La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
L'alinéa 35 du rapport annexé concerne les créations de postes et précise que « […] 54 000 emplois seront créés au ministère de l'éducation nationale, 5 000 au ministère de l'enseignement supérieur et 1 000 au ministère de l'agriculture ». Le présent amendement vise à insérer, après le mot : « nationale », les mots : « , dans le respect de la parité entre l'enseignement public et l'enseignement privé ».
Ce serait l'occasion de confirmer ce principe de parité et c'est aussi l'occasion, monsieur le ministre, de vous interroger sur la place que vous entendez donner à l'enseignement privé, assez peu évoqué dans ce projet de loi dit de refondation de l'école.
La parole est à Mme Annie Genevard, qui arrive à temps pour soutenir l'amendement n° 1134 .
Je vous prie de bien vouloir m'excuser pour mon retard mais je sors tout juste d'une réunion de l'association nationale des élus de montagne, et vous savez comme les montagnards aiment à se réunir pour parler de la montagne.
Je souhaite, par le biais de cet amendement, souligner la nécessité d'observer la parité entre l'enseignement public et l'enseignement privé. Il est donc proposé, à l'alinéa 35, après le mot : « nationale », d'insérer les mots : « , dans le respect de la parité entre l'enseignement public et l'enseignement privé ».
Avant de donner l'avis de la commission, je sollicite une courte suspension de séance, madame la présidente.
Article 1er et rapport annexé
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures trente-cinq, est reprise à neuf heures quarante.)
Mon intervention se fonde sur l'article 58 du règlement.
L'opposition est très étonnée que le rapporteur ait demandé une suspension de séance deux minutes à peine après le début de nos travaux ; une suspension qui a de surcroît duré plus de dix minutes, et cela parce que la majorité n'est pas mobilisée sur ce texte très important. Nous sommes quant à nous présents pour défendre nos amendements. Nous souhaitons travailler et, dans le cadre du bon déroulement de nos travaux, nous avons du mal à comprendre cette attitude. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous savez, monsieur Reiss, que la suspension de séance était de droit ; elle a donc été accordée et je ne doute pas que chacun aura à coeur, tout au long de nos travaux, de respecter le temps accordé pour chaque suspension éventuelle.
Il est évident que la parité entre l'enseignement public et l'enseignement privé est un fait que nul ne songe à contester. Cet amendement est par conséquent satisfait par la volonté du ministre et par le texte lui-même. La commission émet donc un avis défavorable.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements.
Le Gouvernement émet le même avis pour la raison technique et législative évoquée par le rapporteur : cet amendement est déjà satisfait par le code de l'éducation. Pour ce qui est de l'esprit du texte sur le sujet en question, nous aurons l'occasion d'y revenir à plusieurs reprises.
Nous avons recréé des postes dès le collectif budgétaire de juillet dernier. Je me suis attaché à ce que soit respectée de façon absolument exacte la proportion – pour reprendre un terme que vous affectionnez – d'allocation de moyens entre les établissements publics et les établissements privés. Nous continuerons ainsi pour une raison que j'ai pu donner dès ma première visite à l'association des parents de l'enseignement libre : je ne fais aucune différence entre les enfants de France, ce qui nous renvoie à « notre chacun » et à « notre tous » qui vous préoccupent.
Nous prenons acte, monsieur le ministre, de ce que vous venez d'affirmer. Vous montrez que vous respectez la loi Debré et que votre action s'inscrit dans son esprit. C'est important pour nous.
Je profite de l'occasion qui m'est offerte pour constater, comme vient de le faire notre collègue Reiss, que, de toute évidence, votre majorité ne vous soutient pas vraiment. Vous êtes très peu nombreux sur les bancs d'une majorité dès lors provisoire.
Cela illustre bien qu'il ne s'agit pas d'une refondation de l'école puisque, si c'était le cas, je suis certain que les rangs de la majorité seraient très garnis.
Après les enseignants, après les parents d'élèves, j'espère, monsieur le ministre, que les députés à leur tour ne vont pas vous bouder.
Pour le ministère de l'éducation nationale, un premier investissement est nécessaire pour mener à bien la refondation de l'école : la formation initiale des enseignants. Vingt-six mille postes seront donc consacrés au rétablissement d'une véritable formation initiale pour nos enseignants. Cela correspond, dans un premier temps, au remplacement chaque année de tous les départs à la retraite d'enseignants ainsi que, selon le rapporteur, aux postes de stagiaires nécessaires pour créer des emplois d'enseignants. Cependant, la création de 60 000 postes dans l'éducation nationale, prévue par la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques, semble irréaliste.
(L'amendement n° 848 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet autre amendement de notre collègue Paul Salen demande, quant à lui, la suppression de l'alinéa 37, qui est ainsi rédigé : « À ces emplois s'ajoute la création de mille postes d'enseignants chargés d'assurer la formation initiale et continue des enseignants dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, en complément des moyens qui seront dégagés dans les universités. » Cette mesure est irréaliste, étant donné l'état de nos finances publiques, et c'est pourquoi je demande la suppression de l'alinéa 37.
(L'amendement n° 849 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement porte sur l'alinéa 37, relatif aux enseignants qui seront affectés dans les écoles supérieures créées par la loi.
La principale critique que les stagiaires formulaient à l'égard des anciens IUFM, c'était qu'un certain nombre d'enseignants y étaient très en retrait – c'est le moins que l'on puisse dire – par rapport à la pratique professionnelle. Beaucoup de stagiaires auraient préféré que leurs enseignants aient encore un lien direct avec l'enseignement. C'est d'ailleurs dans cet esprit qu'a été mis en place le tutorat : dans la perspective de la masterisation, il y avait bien la volonté de renforcer le lien entre la pratique et la transmission du savoir.
À l'heure actuelle, nous avons un exemple de bonne pratique dans notre système universitaire : il s'agit de l'enseignement de la médecine, où les professeurs ont une véritable pratique de la médecine. L'enseignement, la pratique de la médecine et la recherche se trouvent ainsi étroitement liés.
En conséquence, mon amendement vise à compléter l'alinéa 37 par la phrase suivante : « Les enseignants qui occupent ces postes devront continuer à exercer à temps partiel une activité directe d'enseignement dans le premier ou le second degré. » La mention « à temps partiel » est suffisamment vague pour ne pas imposer de curseur.
Je voudrais poursuivre la démonstration de mon collègue Patrick Hetzel.
Nous avons effectivement un mauvais souvenir de ces formateurs qui n'avaient plus mis les pieds dans une école, un collège ou un lycée depuis parfois dix ou vingt ans, et dont l'enseignement dispensé aux nouveaux arrivants était totalement déconnecté de la réalité du terrain.
Dans la discussion générale, il a été rappelé que les élèves ont énormément changé au cours de ces dix dernières années, ce qui rend encore plus important le contact avec le terrain : c'est pour cela que l'exercice à temps partiel d'une activité d'enseignement, au contact des élèves, nous semble important.
Comme ceux de mes collègues, cet amendement vise à ce que les enseignants qui vont être chargés d'assurer la formation initiale et continue des enseignants dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation puissent continuer à exercer une activité directe d'enseignement à temps partiel.
L'un des griefs que l'on pouvait adresser aux IUFM, c'était leur déconnexion par rapport au terrain et il y avait eu, notamment avec la réforme de Xavier Darcos, une volonté de balayer cette insuffisance.
Il faut permettre à ces enseignants de rester en contact direct avec les élèves, de sorte que l'enseignement théorique qu'ils dispenseront s'appuie sur une pratique susceptible de s'actualiser. Le monde de l'enseignement évolue vite et le contact avec les réalités du terrain doit être prise en compte. C'est le sens de cet amendement.
Nous partageons tout à fait la préoccupation exprimée dans ces amendements. Il est évident que la formation professionnalisante doit reposer sur ce que l'on a appelé le tutorat, ou être dispensée par des professionnels qui sont eux-mêmes en activité et en poste. Nous partageons bien sûr ce point de vue et c'est tout à fait l'esprit des nouvelles écoles qui vont être créées par la loi. J'aurais donc tendance à être favorable à ces amendements.
Cependant, en écrivant que les enseignants qui occupent ces postes « devront » continuer à exercer une activité d'enseignement, vous en faites une obligation, ce qui pose un problème. Si vous acceptez une rectification indiquant que les enseignants « pourront » continuer à exercer leur activité, j'émettrai un avis favorable.
Ces amendements sont très intéressants, parce qu'ils sont parfaitement dans l'esprit de la formation professionnalisante que nous voulons remettre en place.
Celle-ci a plutôt bien fonctionné dans notre pays. Malheureusement, on a partiellement détruit le réseau des maîtres formateurs au fil des ans. C'est d'ailleurs l'un de nos soucis, pour pouvoir commencer à travailler efficacement dès la rentrée, que de reconstituer ce vivier. Il était très faible dans le secondaire et il va nous falloir l'inventer : ce sera certainement très intéressant du point de vue de l'évolution du métier d'enseignant, que vous appelez de vos voeux.
D'ailleurs, votre réflexion pourrait même aller au-delà : le fait que les corps d'inspection et les chefs d'établissement soient dégagés de tout enseignement est une caractéristique française que l'on ne retrouve pas partout. Au moment où vous avez rencontré des difficultés pour réformer l'évaluation, vous avez pu constater combien cette rupture pouvait poser des problèmes.
Je suis favorable à ces amendements, sous réserve que, pour tenir compte d'un certain nombre d'habitudes, on les rende plus souples et qu'on n'introduise pas une obligation généralisée. Il serait bon, en effet, d'afficher notre état d'esprit, d'indiquer la direction que nous prenons et les incitations qui seront les nôtres.
Que pensent les auteurs des amendements de cette rectification qui, à l'alinéa 37, remplacerait « devront » par « pourront » ?
La parole est à M. Frédéric Reiss.
Ce n'est pas tout à fait le même sens.
M. le ministre dit vouloir renouveler le vivier, mais je pense qu'il puisera aussi parmi des enseignants qui sont déjà en service aujourd'hui. Ainsi, la bonne formulation ne consisterait-elle pas à dire que les enseignants qui occupent ces postes « continueront » à exercer à temps partiel une activité directe d'enseignement dans le premier ou le second degré ? Nous accepterions une rectification ainsi conçue.
Cette formulation est similaire à la précédente : en écrivant « continueront », on maintient l'obligation, ce qui pose un problème.
À la place de « pourront », qui avait peut-être un caractère un peu allusif, je vous propose une autre rectification, qui va plus loin : nous pourrions écrire que les professeurs « seront encouragés » à exercer une activité d'enseignement. Cela montrerait que nous avons une réelle volonté de le faire. Si vous acceptez cette rectification, j'émettrai un avis favorable.
La première formulation nous semblait problématique, parce qu'elle ne traduisait pas notre volonté d'inciter fortement les professeurs à continuer d'enseigner. Votre nouvelle rectification est plus conforme à l'esprit de notre amendement.
Si l'on comprend bien que, pour des raisons pratiques, il soit difficile de rendre la chose obligatoire, il importe aussi, comme vous l'avez souvent rappelé, de ne pas écrire des choses qui sont déjà dans le droit commun ; or c'était le cas de votre première rectification Cette nouvelle formulation est conforme à l'esprit de notre amendement et nous l'approuvons.
M. le ministre me fait signe qu'il est lui aussi d'accord avec cette nouvelle rédaction. Pour que notre assemblée soit parfaitement informée, je vous indique que l'amendement rectifié serait désormais ainsi rédigé : « Compléter l'alinéa 37 par la phrase suivante : Les enseignants qui occupent ces postes seront encouragés à continuer à exercer à temps partiel une activité directe d'enseignement dans le premier ou le second degré ».
(Les amendements nos 598 , 633 et 938 , rectifiés, sont adoptés.)
La journée commence bien !
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l'amendement n° 850 .
Je suis très étonnée, alors que nous examinons une loi de refondation de l'école et que cet examen ne va durer qu'une semaine, que les membres de la majorité ne soient qu'une vingtaine dans l'hémicycle en ce jeudi matin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Moi qui croyais que l'éducation nationale c'était très important pour vous ! J'ajoute que la ministre chargé de la réussite éducative est aujourd'hui à Rennes, où elle passe un examen devant les maires.
Elle va essayer de convaincre les derniers récalcitrants que la réforme des rythmes scolaires est une excellente chose. Nous autres, parlementaires, qui sommes obligés d'être là, nous regrettons de ne pas voir la ministre.
C'était une remarque préalable et j'en viens à mon deuxième point. Nous n'opposons pas la qualité et la quantité, contrairement à ce que vous essayez de faire croire. J'aimerais quand même, et c'est l'objet de cet amendement de suppression de l'alinéa 38, que l'on connaisse l'impact financier et budgétaire de toutes ces créations de postes. Par ailleurs, comme il est question dans cet alinéa des postes d'enseignants titulaires, je voudrais savoir si l'on va continuer, sous votre gouvernement, à embaucher également des enseignants contractuels.
Ma deuxième question porte sur les emplois d'avenir professeur. Je vous l'ai déjà posée hier, monsieur le ministre, mais je n'ai toujours pas de réponse. Vous avez fait des déclarations sur ce sujet, mais je voudrais que vous indiquiez clairement l'impact financier de cette mesure.
Enfin, permettez-moi de vous faire remarquer que ce qui importe aux familles, aux enseignants et aux chefs d'établissement, c'est d'abord l'encadrement dans les classes et le problème des classes surchargées.
Ce qui nous importe, c'est de savoir combien il y aura, à l'avenir, de professeurs devant les élèves. Un gros effort a été fait pour qu'un maximum d'enseignants soient désormais devant les élèves, et plus « dans les bureaux ». Ce que je veux savoir, c'est le nombre de professeurs qui seront effectivement devant les élèves, car ce que nous demandent les parents, les familles et les enseignants, c'est surtout de travailler à alléger les classes.
Par politesse, je vais répondre à Mme la députée. Lorsque nous avons voté les emplois d'avenir – je regrette qu'on ne vous ait pas envoyé le dossier de presse –, j'ai eu l'occasion de dire, devant cette assemblée, que l'on prévoyait à terme la création de 18 000 emplois d'avenir professeur : 4 000 en janvier et 6 000 en septembre. Je ne sais pas si c'est par malice, ou simplement par ignorance, que vous essayez de m'opposer à mon collègue Michel Sapin.
Tout cela figurait dans le dossier de presse, a été discuté à l'Assemblée, et je suis très étonné de constater que vous avez raté ce moment important pour la jeunesse et pour les professeurs.
(L'amendement n° 850 n'est pas adopté.)
Toujours dans le même esprit, je souhaite la suppression de l'alinéa 39, qui est ainsi formulé : « Dans le premier degré, ces moyens permettront, tout d'abord, un développement de l'accueil des enfants de moins de trois ans, en particulier dans les zones d'éducation prioritaires ou dans les territoires ruraux isolés les moins bien pourvus, ainsi que dans les départements et régions d'outre-mer. Cela nécessite un total de 3 000 postes sur la totalité du quinquennat. »
Compte tenu de la programmation des finances publiques, je demande la suppression de l'alinéa 39.
Il y a tout de même un paradoxe dans l'attitude des députés de l'opposition : ils nous disent qu'ils sont favorables à l'accueil des enfants de moins de trois ans et qu'ils comprennent la priorité donnée au primaire, mais ils veulent supprimer tous les efforts consentis par la nation en ce sens.
Je veux qu'il soit clairement inscrit dans le compte rendu que toutes les créations de postes supplémentaires qui sont destinées aux zones en difficulté et aux enfants de moins de trois ans, et qui entendent marquer la priorité donnée au primaire, sont méthodiquement contestées par les députés de l'opposition.
Je voudrais faire une remarque à nos collègues de l'opposition.
Vous ne pouvez pas, comme vous le faites depuis deux jours, dire que vous voulez donner la priorité au premier degré,…
…qu'il s'agit là d'une question fondamentale, parce qu'il s'agit du pilier de l'éducation nationale, pour ensuite, amendement de suppression après amendement de suppression, refuser les moyens qui sont nécessaires pour accueillir les enfants de moins de trois ans, pour permettre la formation des maîtres ou pour former des maîtres surnuméraires. C'est complètement illogique !
On ne peut pas donner la priorité au premier degré si l'on ne met pas devant les classes, des maîtres formés en nombre suffisant. Il ne faut pas avoir un discours de façade et ensuite vouloir supprimer, par voie d'amendements, tous les moyens de l'éducation nationale.
Ce n'est pas un discours de façade : il est parfaitement possible d'être d'accord pour considérer que le primaire est une priorité sans approuver l'allocation des moyens.
Aujourd'hui, le budget de l'éducation nationale est le premier budget de la nation. On peut répartir les enveloppes différemment au sein de ce budget.
Je suis d'accord pour dire que le taux d'encadrement dans le primaire devrait être amélioré, mais, aujourd'hui, nous avons le taux d'encadrement le plus élevé de l'OCDE dans les lycées. Il existe donc bien des possibilités de redéploiement.
Par ailleurs, si vous voulez à la fois créer 60 000 postes, et tenir l'engagement du président Hollande de ne pas créer de postes de fonctionnaires durant la législature, cela revient à supprimer 60 000 postes de fonctionnaires dans les autres ministères.
Nous souhaiterions savoir, dans une vue synoptique de la gestion de l'État, quels postes de fonctionnaires seront supprimés, sachant que dans ce cas le « un sur deux » développé par Nicolas Sarkozy ne suffira pas, il faudra appliquer une règle de « deux sur trois » dans les autres ministères.
Il s'agit d'un point éminemment politique qui porte sur l'orientation des politiques publiques. C'est un point sur lequel nous divergeons parce que nous considérons qu'il faut assainir nos finances publiques. Cela avait été engagé, il faut le poursuivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
(L'amendement n° 851 n'est pas adopté.)
Je suis également favorable à une meilleure répartition des effectifs dans l'enseignement. Cet amendement tend à supprimer l'alinéa 40.
Dans l'esprit de ce que vient de répondre le ministre à l'amendement précédent, je relève que cet amendement tend à supprimer les crédits grâce auxquels il y aura plus de maîtres que de classes. Tout le monde s'est pourtant dit d'accord avec cette disposition, parce qu'elle est essentielle pour personnaliser la pédagogie.
Nous avons eu hier, à votre initiative, un long et intéressant débat sur les termes « tous » et « chacun ». Si vous souhaitez personnaliser l'école, il faut qu'il y ait plus de maîtres que de classes, ce qui requiert des moyens. Soyez donc cohérents. Pour vous y aider, la commission a rejeté cet amendement.
Monsieur le ministre, vous vous montrez un peu menaçant avec nous lorsque vous souhaitez que l'on prenne note que les députés de l'opposition veulent supprimer les alinéas et les articles proposant la création de postes.
Puisque vous nous accusez d'être en contradiction avec nous-mêmes, je tiens à vous dire qu'il existe une forme de distorsion entre vos propos donnant la priorité au primaire et aux zones fragiles, et la réalité de la situation telle que nous l'observons dans nos territoires. Cela a été rappelé par des députés de votre majorité lors de la discussion générale. Je connais plusieurs lieux dans lesquels des classes ont été supprimées alors qu'il y a quelques années, avec le même effectif, elles étaient maintenues.
Vous avez donc tort d'essayer de nous piéger sur cette affaire, car, à ce petit jeu-là, vous pourriez bien vous retrouver piégé à votre tour. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame Genevard, nous ne voulons pas vous piéger, mais nous discutons du financement de toutes ces suppressions de postes, de la casse qui a eu lieu au cours des dix dernières années (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…
…de la croissance de 0 % que vous nous laissez, cette dette de plus de 600 milliards d'euros,…
Il est temps d'élever le débat et d'avoir un discours positif. C'est un engagement fort du Gouvernement qui veut faire de l'éducation une grande cause nationale en 2013. Cette refondation de l'école sera la première grande loi du quinquennat de François Hollande. Ses engagements sont tenus, en dépit du bilan de la droite que nous devons malheureusement supporter aujourd'hui.
(L'amendement n° 852 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement tend à renforcer le dispositif créant plus de maîtres que de classes, et les 7 000 postes qui y sont alloués.
Une politique doit se mettre en place pour venir en aide aux élèves. Le dispositif des RASED existant actuellement ne doit pas être remis en cause, même s'il faut évidemment réfléchir à une évolution pour le rendre encore plus efficace dans le cadre du « plus de maîtres que de classes. »
Cet amendement de précision réaffirme également notre volonté de donner la priorité au primaire, ainsi que les dispositifs d'individualisation de l'aide aux élèves les plus en difficulté et les plus fragiles.
Avis favorable. Il s'agit d'une des avancées que j'avais saluées dans la discussion générale.
En cinq années, 5 000 emplois de RASED ont été supprimés. Nous sommes passés de 15 000 RASED en 2007 à 10 000 en 2012. Je profite donc de cet amendement pour déclarer que les RASED seront confortés, et qu'un travail sera fait pour mieux articuler le travail sur la difficulté scolaire réalisé par les réseaux d'aides spécialisées et le travail avec les maîtres surnuméraires. Un rapport sur cette question a été commandé aux inspections générales.
Je soutiens cet amendement, car les réseaux d'aides spécialisées ont montré leur intérêt dans des zones où beaucoup d'enfants connaissent des difficultés. En Seine-Saint-Denis, j'ai pu constater l'extrême sensibilité et l'extrême mobilisation des enseignants, des directeurs et des parents d'élèves pour soutenir leur réseau, souvent menacé faute d'enseignants spécialisés.
Comme l'a souligné le rapporteur, il va falloir travailler le lien entre ces réseaux et les maîtres surnuméraires, qui vont évidemment apporter un bénéfice. Cet amendement est important car il inscrit les RASED dans les orientations.
Je suis tout de même surpris de la réécriture de cet alinéa 40. La rédaction initiale était la suivante : « Il est prévu une évolution des pratiques pédagogiques, – ce que nous souhaitons – via notamment, l'objectif du “plus de maîtres que de classes. » Une mention du nombre de postes figurait à la suite.
Maintenant, l'alinéa commence par la mention de 7 000 postes nouveaux. Cela prouve bien que la majorité propose des réponses quantitatives à tous les problèmes de l'école. Cette nouvelle rédaction n'est pas neutre.
De plus, cet alinéa ne mentionne pas que les 5 000 postes de RASED qui ont été supprimés précédemment seront recréées. On sent bien que la majorité est gênée dès lors que l'on évoque ces dispositifs. Il y aura d'autres dispositifs d'aide aux élèves en difficulté.
C'est un alinéa central, puisque les efforts doivent porter sur les élèves les plus fragiles. Il y est fait mention des « secteurs les plus fragiles ». Pour revenir sur une discussion que nous avons eue hier, il est vraiment dommage de ne pas avoir d'évaluation nationale. Nous avons bien compris que les statistiques permettaient, par échantillonnage, d'avoir des résultats. Mais, pour nous, il est très important de fournir une réponse appropriée au terrain. C'est pour cela que la nouvelle rédaction concernant ces dispositifs ne nous convient pas.
Une fois de plus, nous allons dans le sens de l'égalitarisme : la même chose pour tout le monde partout. Cela ne nous convient pas, nous proposons donc de restaurer l'ancienne rédaction de l'alinéa 40.
Il s'agit d'un amendement de précision, mais quelle précision ?
Vous mentionnez les RASED et les élèves en difficulté, en n'apportant qu'une réponse quantitative. Il n'est jamais fait état de la possibilité de redéfinir le rôle des maîtres qui exercent en RASED. Leur compétence, qui jusqu'à présent s'adressait à quelques élèves en difficulté, pourrait être démultipliée si l'on en faisait de véritables conseillers pédagogiques pour résoudre les difficultés des élèves. Surtout, il serait ainsi possible de démultiplier leurs compétences, en leur confiant les protocoles de remédiation qu'effectueraient les enseignants eux-mêmes dans leurs classes.
Ainsi, nous toucherions beaucoup plus d'enfants qu'avec votre méthode, qui consiste à répondre uniquement par une quantité supplémentaire de maîtres, sans évaluation de ce qui s'est passé. Vous présupposez que les RASED sont extrêmement efficaces, ce qu'aucune étude n'a jamais démontré.
Madame la présidente, vous avez annoncé le scrutin dans l'enceinte de l'Assemblée, je me permets de vous indiquer que le président Bartolone, au cours de débats précédents, a été amené à rappeler à nos collègues que lorsqu'un scrutin public était lancé, il était important que chacun, au moment du vote, n'appuie que sur un seul et unique bouton. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ce point mérite d'être rappelé.
Par mesure de précaution, je considère que nous devons être extrêmement attentifs. Des faits ont été attestés lors d'un débat précédent. Puisque la configuration n'est pas exactement la même, je me permets de le dire.
Monsieur Hetzel, merci de votre commentaire. Néanmoins, chacun dans cet hémicycle connaît l'engagement qu'il a pris de voter exclusivement pour lui-même. Les services de l'Assemblée sont là également pour assurer le bon déroulement de la séance.
Chers collègues de l'opposition, je suis très surprise de vous entendre. Hier, vous avez enterré les IUFM et jeté leurs acteurs. Aujourd'hui, ce sont les RASED.
Ils n'auraient pas démontré leur efficacité à vos yeux. Or, sur le terrain, nous savons tous, et vous le savez tout aussi bien que nous, les RASED (Protestations sur les bancs du groupe UMP)…Arrêtez chers collègues, vous faites preuve de mauvaise foi ! Vous avez tous entendu des parents d'élèves expliquer comment leurs enfants ont vraiment été accompagnés et ont pu sortir la tête de l'eau et vaincre leurs difficultés. Aujourd'hui, vous remettez cela en cause de manière systématique et arrogante, c'est incompréhensible.
Et, la main sur le coeur, vous prétendez vouloir accompagner tous les enfants ?
Comment peut-on accompagner les enfants individuellement, de façon personnalisée, s'il n'y a pas d'enseignants ou un personnel formé ?
Les professeurs dont vous parlez, vous les avez sédentarisés. Autant dire que vous avez asséché leur capacité à vraiment démultiplier leurs compétences. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je souhaite apporter mon soutien à la réhabilitation des RASED. On a voulu remplacer ces réseaux par l'aide personnalisée, mais l'on voit bien que cela n'a pas du tout le même impact sur les élèves, ni la même réussite. L'aide apportée par les RASED va bien au-delà des compétences cognitives, elle porte aussi sur le relationnel, l'intégration dans la classe.
Vous avez supprimé un tiers des postes et énormément de moyens, et l'on a vu des parents et même des enseignants être très déstabilisés par la remise en cause de ce dispositif qui les aidait énormément, ainsi que les élèves.
Nous nous félicitons que l'on reparte dans la bonne direction pour les RASED. Ce n'est pas qu'une question de chiffres, mais cela compte quand même.
Je souhaite défendre l'amendement n° 907 , qui tomberait si l'amendement du rapporteur était adopté. Il ne s'agit pas d'être pour ou contre les RASED : le débat n'est pas manichéen.
Vous proposez un renforcement des RASED. Avec l'amendement n° 907 , nous proposons une redéfinition de leur positionnement et de leur pilotage.
Il ne faut pas perpétuer le fonctionnement actuel des RASED. Vous n'avez jamais trouvé autant de vertus à ces réseaux que depuis que nous voulons prétendument les supprimer. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Sur le terrain, les choses ne sont pas aussi claires. Dans certains secteurs, les RASED ont fait la preuve de leur utilité.
Dans d'autres, ils sont beaucoup plus contestés. On le constate dans nos départements : dans certains secteurs, les RASED fonctionnent bien mais, dans d'autres, on ne voit pas assez leur efficacité.
Il n'y a pas eu d'évaluation de ces RASED. La dernière évaluation, qui n'a d'ailleurs pas été publiée, date de 1996 et 1997. Lors de la précédente législature, avec Gérard Gaudron, nous avons rédigé un avis budgétaire sur cette question, dans lequel nous préconisions une redéfinition du pilotage et du positionnement des RASED.
Il ne s'agit pas d'être pour ou contre les RASED. Nous souhaitons conserver l'alinéa 40 tel qu'il avait été rédigé par le Gouvernement : vous ne pouvez donc pas nous prêter de mauvaises intentions, à moins de nous faire des procès d'intention qui n'ont pas leur place ici. Nous pouvons mettre en place un nouveau dispositif pour les RASED : il faut procéder à leur évaluation, puis à un repositionnement.
Il ne s'agit absolument pas d'être pour ou contre : il faut simplement savoir évoluer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, je tiens d'abord à vous assurer que vous avez toute notre confiance pour mener les débats comme il convient, selon le règlement de notre assemblée. Vous n'avez certainement besoin de personne pour vous le rappeler.
Excusez-moi, monsieur Hetzel, mais comme donneur de leçons… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est un véritable hommage que le vice rend à la vertu ! (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Je demande à nos collègues de l'opposition de lire avec attention l'amendement que je présente. Il s'agit de renforcer l'action des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, dans le cadre du maintien du principe des RASED…
…mais aussi d'une réflexion sur l'aide apportée aux élèves en difficulté,…
…puisqu'il faut intégrer le principe du « plus de maîtres que de classes ».
De plus, monsieur Reiss, il est un peu incohérent – une fois de plus ! – d'avoir proposé précédemment un amendement qui supprimait les 7 000 postes et de demander maintenant l'adoption d'un amendement qui les maintient. Chers collègues de l'opposition, que fait-on ? Supprime-t-on ces postes, ou les maintient-on ? Un peu de cohérence, s'il vous plaît !
Monsieur le ministre, j'ai le sentiment que, sur la question des RASED et sur la reformulation de cet alinéa, vous êtes très embarrassé. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Non, c'est vous qui l'êtes !
Si, c'est vous qui êtes très embarrassé ! Pendant cinq ans, la défense des RASED a été l'alpha et l'oméga de votre discours sur l'école. Il n'y en avait que pour la défense des RASED, à croire que le système allait s'écrouler parce que le dispositif des RASED avait été modifié.
Il y a deux semaines, lors de la séance de questions au ministre de l'éducation nationale, vous avez affirmé, monsieur le ministre, qu'il convenait de réexaminer le dispositif des RASED, qui ne donnait pas tous les résultats espérés.
C'est ce que vous avez dit, et on peut retrouver vos propos. Aujourd'hui, vous proposez une réécriture de l'alinéa 40 parce que vous avez été mis face à une contradiction. Vous êtes obligé de reconnaître que ces RASED, que vous avez tant défendus, méritent d'être évalués, et cela vous est reproché. Vous proposez aujourd'hui une espèce de cote mal taillée, qui ne peut pas dissimuler votre embarras sur cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la députée, il s'agit d'un sujet sérieux. Je veux vous communiquer une information que vous n'avez peut-être pas eue : lorsque nous créons des postes, nous n'affectons pas les enseignants sur un poste déterminé, et nous laissons une certaine autonomie – je sais que ce terme vous plaît – au terrain. Sur les 1 000 postes créés au mois de juillet, 97 enseignants ont été affectés dans les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté. Je reçois en ce moment les chiffres des nouvelles affectations. Vous verrez que les RASED correspondent à des besoins profonds éprouvés par les enseignants à trois niveaux : l'aide à l'enseignant, l'aide à l'élève, l'aide à l'équipe. Ces réseaux sont utiles : nous l'avons toujours dit.
Vous avez procédé à une véritable saignée dans les RASED, avec l'idée que les enseignants concernés n'étaient pas devant les élèves. Vous avez supprimé 10 000 à 15 000 emplois en cinq ans, et cette saignée a beaucoup déstabilisé notre école.
Comme moi, vous aimez l'école et vous y allez. Lorsque j'ai pris mes fonctions, j'ai été frappé d'entendre, déplacement après déplacement, les maîtres dans les écoles, de la maternelle jusqu'au CM2, nous dire qu'ils avaient besoin de ces personnels et qu'ils étaient en difficulté depuis que ceux-ci avaient été supprimés.
Il doit évidemment y avoir des évolutions, mais c'est vous, mesdames et messieurs de l'opposition, qui êtes dans l'embarras. Nous maintenons et confortons ces personnels, car ils sont importants au sein de l'éducation nationale et ils devront travailler dans un cadre qui évolue, avec en particulier les maîtres surnuméraires. Il n'y a aucune contradiction : cela fait déjà un moment que j'ai demandé à l'inspection générale de proposer une nouvelle articulation pour le traitement global de la difficulté scolaire, dans laquelle ces réseaux doivent trouver toute leur place.
Je vois bien votre embarras et je le comprends, en particulier pour certains d'entre vous. Cependant, il existe des mesures importantes qui peuvent nous réunir – nous l'avons encore vu hier et ce matin. Votez pour l'amendement du rapporteur : cela montrera votre attachement à des milliers de fonctionnaires qui traitent la difficulté scolaire et dont le pays a besoin. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
Monsieur le ministre, je ne sais pas où se trouve l'embarras : en tout cas, il n'est pas de notre côté.
Il faudra m'expliquer quelle est la différence fondamentale entre l'ancien alinéa 40 et le nouveau, si ce n'est une question de présentation des choses. Vous semblez dire qu'en votant pour cet amendement, nous serions pour les RASED, alors qu'en votant contre cet amendement, nous serions contre ce dispositif.
C'est totalement faux ! Dans le texte initial de l'alinéa 40, je lis : « ou de renforcer les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté – dispositifs RASED ». Dans le nouveau texte, je lis : « ou de renforcer l'action des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté – RASED ». Dites-moi où est la différence !
Il serait peut-être important de préciser, dans le dispositif « plus de maîtres que de classes », quelle sera la formation de ces maîtres supplémentaires. Auront-ils la qualification de maîtres E ou de maîtres G ? Vous ne l'avez jamais dit. Voilà où se trouve le problème ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je vais maintenant mettre aux voix l'amendement n° 1491 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 110
Nombre de suffrages exprimés 110
Majorité absolue 56
Pour l'adoption 86
contre 24
(L'amendement n°1491 est adopté.)
Dans la continuité de ce que nous avons déjà dit, cet amendement vise à supprimer l'alinéa 41.
(L'amendement n° 853 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Même argumentation : je demande la suppression de l'alinéa 42.
(L'amendement n° 854 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour soutenir l'amendement n° 1075 .
Cet amendement, rédigé par Alain Calmette, défend l'idée qu'une stabilité des effectifs d'enseignants titulaires dans le premier degré à compter de la rentrée 2014 et pendant les trois années suivantes permettrait de procéder à la refondation de l'école dans un meilleur contexte, sans menace de fermetures de classes incessantes, avec une certaine facilité de programmation des installations et des classes, et en meilleure concertation avec les élus.
Cette mesure est demandée par les élus concernés, notamment dans les territoires les plus défavorisés, qui ont été meurtris ces dernières années par des suppressions de postes incessantes, car une logique comptable a toujours été infligée à ces territoires désertés. Cette mesure est attendue sur le terrain : nous aimerions la voir adoptée.
Je partage tout à fait la préoccupation de ma collègue Brigitte Bourguignon, de même que beaucoup de préoccupations de mes collègues siégeant sur tous les bancs.
Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement, ce qui est tout à fait légitime. Mais il y a déjà beaucoup de demandes de rapports : il ne faut pas les multiplier, non parce qu'ils sont inutiles, mais au contraire pour des raisons de cohérence. La commission a adopté un amendement qui inscrit dans la loi la mise en place d'un comité de suivi, lequel aura pour mission de suivre l'application de la loi. Si ce dispositif n'est pas tout à fait nouveau, il est tout de même assez novateur. Le travail du législateur consiste à examiner et voter la loi, mais également à en suivre l'application : cette partie extrêmement importante de notre rôle de législateur sera assurée de manière cohérente par ce comité de suivi. Je propose que nous ne multipliions pas les rapports ce qui affaiblirait d'ailleurs l'efficacité de ce comité.
Madame Bourguignon, dans la mesure où l'instauration de ce comité de suivi satisfait la préoccupation exprimée par votre amendement, je vous propose de le retirer.
(L'amendement n° 1075 est retiré.)
Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 43.
(L'amendement n° 855 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 1137 .
Monsieur le rapporteur, lors de l'examen du texte en commission, j'ai cru comprendre que vous n'étiez pas indifférent à ma proposition de reformulation : à l'alinéa 43, je propose de substituer à l'expression « collèges en difficulté » la formulation « collèges comptant une forte proportion d'élèves en difficulté ». M. le ministre a évoqué le danger du zonage stigmatisant. L'expression « collèges en difficulté » désigne l'ensemble d'un établissement, ce qui me semble préjudiciable.
Madame Genevard, je vous remercie de cette précision qui va dans le bon sens : ce ne sont pas les collèges qui sont en difficulté, mais les élèves. Votre amendement est tout à fait pertinent : j'émets donc un avis favorable.
Deuxième amendement accepté !
(L'amendement n° 1137 , accepté par le Gouvernement, est adopté à l'unanimité.)
Je crains que mon amendement n'aie pas le même sort que celui de Mme Genevard ! Je demande la suppression de l'alinéa 44.
(L'amendement n° 856 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Suppression de l'alinéa 45.
(L'amendement n° 857 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Suppression de l'alinéa 47.
(L'amendement n° 859 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Suppression de l'alinéa 48.
(L'amendement n° 860 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Thierry Braillard, pour soutenir l'amendement n° 1425 .
En commission, le rapporteur a instauré une “jurisprudence rapport” et souhaité qu'il ne soit pas fait mention dans la loi de demandes ou de remises de rapports.
Mais en l'espèce, on peut considérer qu'il y a une différence entre un rapport, le rapport annexé et la loi. C'est pourquoi nous demandons que, dans un délai de six mois ou un an, le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur les évolutions possibles du statut et du recrutement des personnels qui accompagnent les élèves en situation de handicap, afin d'améliorer leur formation et de permettre la pérennisation de cet accompagnement.
En dehors de la jurisprudence qu'il a bien voulu rappeler, je précise à M. Braillard que son amendement est doublement satisfait. Nous n'allons tout de même pas produire des rapports sur un rapport annexé ! Le comité de suivi prendra en compte l'application de la loi et la pertinence des orientations inscrites dans le rapport annexé. C'est pourquoi je lui suggère de retirer son amendement.
Suppression de l'alinéa 49.
(L'amendement n° 861 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Le tableau présenté dans l'annexe démontre que cette loi n'est pas une loi de programmation puisqu'il n'y est pas indiqué, année après année, le nombre de créations de postes et, par conséquent, ce qui sera dépensé. Vous me répondrez sans doute que cela relève de la loi de finances. Dont acte. Mais je rappelle que ce genre de précisions figurait dans des lois de programmation antérieures.
Pourquoi la suppression des IUFM avait-elle coûté ou rapporté – je ne sais pas – 8 000 postes, alors que la création des ESPE coûte 26 000 postes ? Vous m'avez répondu à juste titre, monsieur le ministre, que vous prévoyiez 150 000 recrutements. Il faut donc former 30 000 nouveaux enseignants par an. Mais les 26 000 enseignants stagiaires, qui sont budgétés, sont-ils 26 000 postes de stagiaires ou 26 000 postes ETP, soit des emplois équivalents temps plein ?
Par obligeance à l'égard de Benoist Apparu, je répondrai à son interrogation. Je ne sais pas d'où il sort le chiffre de 8 000 postes. Il s'agit peut-être d'une erreur.
Il s'agit de 14 000 postes qui ont été récupérés – le ministre précédent Luc Chatel m'en avait parlé. Cela s'explique en raison des 28 000 départs à la retraite. Avec le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, vous arrivez à 14 000. Et cela faisait les postes de stagiaires.
Nous renouvelons l'intégralité des départs à la retraite. Les prévisions de départ s'élèvent à environ 27 000 ou 28 000. Il s'agit bien de 27 000 ETP environ – ils sont à plein-temps, même s'ils ne sont qu'à mi-temps devant les classes.
S'agit-il de 27 000 ETP ou de 27 000 postes de stagiaires à neuf heures par semaine ? Ce n'est pas la même chose, 27 000 ETP ne représentant pas le même coût budgétaire. Cette précision est importante au regard de l'annualité budgétaire.
Le traitement d'un ETP n'est pas un demi-traitement. Le professeur stagiaire touche un traitement complet même s'il assure un demi-service en situation, devant une classe.
Il s'agit bien de 27 000 ETP qui donnent, lorsque vous avez à gérer ces masses, 13 500 postes à neuf heures d'enseignement. La remise en place d'une formation – en fait l'année de stage et l'entrée progressive dans la profession – est la priorité absolue de ces créations de postes. Ce quantitatif est en réalité du qualitatif !
Poursuivons la discussion au plan budgétaire, monsieur le ministre.
Pendant la campagne électorale, François Hollande avait annoncé la création de 60 000 postes dans l'éducation : 12 000 en année n, 12 000 en année n + 1, etc.
La mesure avait été évaluée à 500 millions d'euros par an, si mes souvenirs sont bons. Si vous créez 27 000 ETP, vous en avez besoin dès la première année. On n'est donc plus à 12 000 postes en année n, mais à 27 000, que vous reconduisez chaque année. Cela coûtera beaucoup plus cher que les prévisions de François Hollande. L'absence d'annualisation budgétaire est donc une lacune. Si vous créez 27 000 ETP, vous arriverez certes à 60 000 postes à la fin de la législature, mais cela sera beaucoup plus cher que ce qui était prévu par le candidat François Hollande.
Je souhaiterais donc obtenir quelques précisions à ce sujet.
J'ai demandé que l'on envoie tous les documents nécessaires à Benoist Apparu, y compris sur les affectations à la rentrée. Car je suis pour la plus grande transparence. Je me souviens en effet de ce qui pu être dit lors de la campagne électorale et lors d'une visite en Seine-Saint-Denis à des professeurs stagiaires. Depuis des années, nous disons que nous commencerons par remettre en place la formation des enseignants.
Vous avez noté qu'il y avait deux concours cette année : le premier pour la rentrée 2013, avec une situation intermédiaire qui ne sera pas entièrement satisfaisante ; le second pour l'année 2014. Dans les documents que je vous ai transmis, monsieur Apparu, vous verrez qu'il n'y a pas 12 000, puis 12 000 postes, etc, mais une montée progressive en régime. Les 27 000 ETP qui concernent la formation des enseignants n'arrivent pas d'un seul coup. S'agissant des 60 000 créations de postes, 1 000 sont prévus pour l'enseignement agricole et 5 000 – et je m'en réjouis – pour l'enseignement supérieur et la recherche. Nous arrivons à un total de 54 000 postes pour mon ministère. Les affectations concernent prioritairement la formation et monteront en régime pendant deux ans au moins avec la transition que nous avons mise en place, à savoir ce concours qui n'est pas encore le concours définitif.
Avant de donner la parole à M. Patrick Hetzel, je rappelle à nos collègues que s'il est possible d'utiliser un certain nombre d'outils électroniques dans notre hémicycle, il n'est pas encore autorisé de téléphoner.
Notre discussion, fort intéressante, permet de comprendre la logique de la construction budgétaire de ces mesures par rapport à l'annualité de la loi de finances.
Vous l'avez dit, monsieur le ministre, 5 000 postes sont prévus pour l'enseignement supérieur, 1 000 pour l'enseignement agricole, et, pour ce qui concerne directement votre ministère, 54 000. Sommes-nous bien d'accord que les 54 000 dont il est question correspondent bien à 54 000 ETP et qu'il n'y a pas la moindre ambiguïté ?
Confirmez-vous ce point, monsieur le ministre ?
Suppression de l'alinéa 51.
(L'amendement n° 863 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l'amendement n° 122 .
Cet amendement prolonge la discussion que nous avons eue hier sur le métier d'enseignant. Vous avez, monsieur le ministre, confirmé que, d'ici à la fin de l'année, une réflexion serait entreprise à ce sujet. Une fois n'est pas coutume, je partage une position exprimée par mes collègues de l'opposition. (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
C'est très rare et c'est pourquoi il faut le souligner.
Pourquoi ne pas inscrire dans le rapport annexé la nécessité d'une telle réflexion sur le métier d'enseignant, et plus particulièrement sur le rôle du professeur principal, trop peu pris en considération par l'éducation nationale alors qu'il joue un rôle essentiel ? Rôle qui est appelé à se développer si nous allons jusqu'à repenser le collège. Le professeur principal doit être un animateur d'équipe pédagogique. Il doit assurer l'interface avec les familles, que nous voulons élever au rang de co-éducateurs. Il accompagne l'élève dans sa scolarité et l'aide à prendre des décisions d'orientation. C'est un rôle clé qui doit figurer dans la loi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
C'est lui qui suit l'élève dans ses difficultés, son parcours, qui coordonne l'équipe pédagogique. Sans coordonnateur, il ne peut y avoir de travail d'équipe. Tout ce qui est précisé dans cet amendement est parfaitement juste…
Plusieurs députés du groupe UMP. Mais…(Sourires .)
Je ne vois pas pourquoi nos collègues de l'opposition anticipent ma pensée ! (Sourires.)
Mais… (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Est-ce une bonne chose de figer ce rôle pédagogique dans un statut – car c'est bien un statut que vous voulez instituer par cet amendement ? D'une part, le professeur principal peut changer. D'autre part, cela obligerait d'aborder tous les statuts : celui du professeur principal, celui de personnes assurant d'autres fonctions pédagogiques.
Pour ma part, je considère que son rôle n'a pas à être figé et inscrit dans la loi. C'est pourquoi je vous propose de retirer votre amendement. Nous aurons probablement une discussion sur le rôle des uns et des autres dans le cadre de la réflexion annoncée par M. le ministre sur le métier d'enseignant. Le métier d'enseignant, ce n'est pas uniquement le métier de professeur, c'est aussi le métier de professeur principal et tous les métiers de l'éducation.
Il y a matière à une véritable réflexion mais elle n'a pas sa place dans un statut et dans la loi.
J'interviendrai brièvement sur ce sujet très important.
La principale exigence si l'on veut réussir cette réforme – et il semblerait que chacun le veuille –, c'est d'entrer dans le débat par le thème des missions et non par le thème du statut, comme on le fait en permanence. Ce qui manque avant tout – nous l'avons constaté d'ailleurs pour ce qui est des professeurs des écoles –, c'est une réflexion sur ce que doivent être au XXIe siècle le métier de professeur et tous les métiers autour de celui de professeur. L'accord que j'ai avec l'ensemble des représentants des professeurs et des personnels de l'éducation, c'est d'entrer dans cette discussion par le thème des missions, en prenant le temps qu'il faudra, car se pose aussi la question du cadre d'emploi, des évolutions de carrière et des conseillers pédagogiques.
Votre préoccupation est aussi la mienne, madame la députée, mais je vous demande de bien vouloir laisser le temps de la discussion avec les personnels – qui sont tout de même concernés – se dérouler. Il doit y avoir des évolutions. Ne parlons pas de statut, car ce terme est très connoté, vous l'aurez peut-être constaté en écoutant les députés de l'opposition. Il a d'ailleurs bloqué toute évolution. Entrons par le thème de missions dans cette discussion. Elle durera le temps qu'il faudra car elle est fondamentale. Ne doutez pas qu'elle prendra en compte vos préoccupations.
Comme c'est aimable !
J'aurais aimé qu'il fasse l'objet de sous-amendements. Puisque, comme nous le dit M. le ministre, il faut aborder le débat en termes de missions et non de statut des enseignants, il me semble qu'il serait pertinent de revoir les missions des enseignants du secondaire.
Il existait autrefois un corps de professeurs d'enseignement général de collège, les PEGC. Dans mon département,..
…l'Aveyron, qui se situe aux confins de l'académie, nous avons le plus grand mal à obtenir des enseignants remplaçants. Les titulaires sur zone de remplacement, les TZR, ou les ex-TZR, appelés la plupart du temps de Toulouse, ne viennent tout simplement pas.
Il n'est peut-être pas idiot de penser qu'à l'instar des professeurs de langue régionale, qui sont bivalents, les agrégés de philosophie, par exemple (Sourires),…
Ne leur demandez rien, ce sont des incapables ! (Sourires.)
…pourraient également enseigner le français de la sixième à la troisième.
Nous devrions intégrer cette dimension à la réflexion proposée par Mme Pompili par un sous-amendement à son amendement.
Je tiens à rappeler que le statut du professeur principal n'est pas une notion réservée à nos collègues de l'opposition. C'est une demande qui a été soutenue depuis fort longtemps par les élus d'Europe écologie, en particulier par Philippe Meirieu, qui prend vraiment en compte les cadres intermédiaires de l'éducation, dont le manque est criant.
À moins de faire évoluer la loi à la faveur de nos discussions aujourd'hui et demain, je ne vois pas comment les ESPE pourraient dispenser des formations particulières dédiées au professeur principal portant sur son rôle de coordinateur, d'animateur de l'équipe pédagogique, d'intermédiaire avec les parents, ainsi que sur ses capacités à dresser un bilan avec les élèves, si aujourd'hui on ne réfléchit pas sur son statut et si on ne le reconnaît pas.
Il est question d'audace et d'ambition. Il me semble que cette audace et cette ambition doivent aussi concerner les cadres intermédiaires de l'éducation nationale.
Cet amendement du groupe écologiste a deux mérites, à mon sens.
Premièrement, il montre bien qu'il faut mener une réflexion sur le métier d'enseignant, ce que nous vous disons depuis le début, monsieur le ministre. C'est un point crucial qui fait défaut dans ce texte. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous considérons qu'il n'y a pas de refondation. Vous voyez bien que nous ne sommes pas les seuls dans l'opposition à vous le dire.
C'est une raison pour laquelle il faut s'y intéresser.
Deuxièmement, je crois que ce débat sur le professeur principal est l'occasion d'insister sur un sujet important sur lequel nous sommes souvent revenus et sur lequel vous ne vous êtes que peu exprimé, je veux parler de l'autorité des enseignants dans l'exercice de leurs fonctions. Le fait de donner un statut au professeur principal permet de faire toute sa place à l'autorité, au-delà de la coordination des activités dans l'intérêt des élèves.
Au groupe UDI, nous estimons que cet amendement est particulièrement pertinent. Et nous aimerions le rectifier en plusieurs points.
Premièrement, la rédaction implique que la réflexion sur le métier d'enseignant doit inclure une négociation, qui plus est sur un statut, ce qui ne nous semble pas particulièrement adapté. Nous proposons donc de remplacer les mots « doit inclure une négociation sur », par les mots : « doit contribuer à une nouvelle définition du » statut d'enseignant.
Deuxièmement, il est question d'une « éventuelle revalorisation » du statut d'enseignant. Nous proposons de supprimer « éventuelle », qui ne nous paraît pas pertinent. Cette revalorisation doit inclure les obligations de service des enseignants mais également leur rémunération, dont il a été indiqué à plusieurs reprises qu'elle était inférieure en début et en milieu de carrière à celle des enseignants d'autres pays européens, notamment l'Allemagne.
Troisièmement, s'il est question de manière pertinente du « statut du professeur principal » – même si le terme de statut fait débat –, je crois qu'il ne faut pas oublier le statut du directeur d'école qui, lui aussi, exerce dans l'enseignement primaire un rôle particulier, nécessaire, indispensable puisqu'il assure la coordination des équipes, contribue à l'efficacité pédagogique de l'ensemble des enseignants au sein de l'école et porte le projet d'établissement. Il me semble aussi nécessaire de reconnaître son statut que celui du professeur principal.
Eu égard au nombre de modifications que vous proposez, monsieur Gomes, je vous demande de bien vouloir me faire parvenir une version écrite.
La parole est à M. Frédéric Reiss.
Cet amendement est intéressant et la réflexion qu'il a fait naître mérite d'être un peu approfondie.
Il y est question davantage du second degré puisque l'accent est mis sur le rôle essentiel que joue le professeur principal. Il ouvre une porte vers une éventuelle revalorisation du statut d'enseignant, que nous appelons de nos voeux. Vous nous avez indiqué hier soir, monsieur le ministre, que vous souhaitiez ouvrir ce chantier – ce que vous auriez d'ailleurs pu faire avant d'engager la discussion sur la loi –, alors, autant intégrer cette dimension dans le texte en adoptant cet amendement.
Le groupe UMP soutiendra cet amendement du groupe écologiste, même si c'est un peu le mariage de la carpe et du lapin.
Je voudrais, madame Pompili, madame Attard, revenir sur votre argumentation pour éviter tout faux débat entre nous.
Le professeur principal ne se situe pas à part des autres professeurs. Tout professeur dans sa mission de professeur peut être à un moment donné de sa carrière professeur principal. J'ai été moi-même professeur pendant un certain nombre d'années – je tairai ce nombre pour ne pas mettre en avant mon grand âge – et il m'est arrivé d'être professeur principal certaines années et d'autres pas. Si vous en faites un statut, vous allez figer ces fonctions : un enseignant, dès le début de sa carrière, sera susceptible d'être professeur principal ad vitam æternam. Si nous allons au bout de la logique de votre amendement, madame Pompili, qui dit statut dit carrière et concours : envisagez-vous sérieusement un concours de professeur principal ?
La préoccupation pédagogique que vous exprimez est parfaitement légitime et elle doit faire partie intégrante de la réflexion sur le métier d'enseignant. Mais vous voyez bien comment le risque de figer la fonction dans un statut entre en contradiction avec l'objectif que vous poursuivez. Ce serait presque un dévoiement par rapport à ce que doit être le métier d'enseignant.
Par ailleurs, avec les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, nous avons voulu créer, notamment en première année, une culture commune à tous les métiers de l'éducation, à tous les métiers de professeurs. Cela figure dans le projet de loi et dans le rapport que vous avez approuvé. Instaurer un statut particulier pour le professeur principal entrerait en contradiction avec cet objectif auquel nous tenons tous.
Encore une fois, votre préoccupation est juste et nous considérons que la réflexion sur le métier d'enseignant devra aussi porter sur ce que doit être l'animation pédagogique exercée par le professeur principal. Toutefois, je vous demande de retirer cet amendement, d'autant que nous voyons très bien qu'il peut servir de prétexte pour exprimer des préoccupations qui n'ont rien à voir avec ce rôle d'animation pédagogique.
Je suis heureuse que nous ayons dans cette enceinte un débat sur ce sujet qui me paraît essentiel. Je pense que le rôle du professeur principal va bien au-delà d'un rôle strictement pédagogique. Nous voyons bien d'ailleurs qu'en fonction de l'image que les professeurs principaux se font de leur mission, les résultats auxquels ils aboutissent sont complètement différents.
Le débat que nous venons d'avoir va figurer dans le compte rendu officiel : cela montrera que la réflexion est engagée. Une avalanche de modifications présentées au débotté n'est pas forcément la meilleure manière de faire la loi. La navette législative nous permettra d'approfondir nos discussions car nous ne sommes pas encore allés jusqu'au bout de nos réflexions.
Je retire mon amendement, en espérant que nous pourrons poursuivre cet échange très fructueux.
(L'amendement n° 122 est retiré.)
Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 52. Nous préférons une meilleure répartition des effectifs.
Il s'agit d'un titre ! Votre exposé des motifs n'a rien à voir avec la suppression demandée.
(L'amendement n° 864 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Depuis le début de cette discussion, nous avons pu constater que les ingrédients constitutifs d'une refondation n'étaient pas pleinement réunis.
À l'instant même, la discussion a encore montré que la question du métier d'enseignant n'était développée ni dans le projet de loi ni dans le rapport annexé.
Pour toutes ces raisons, le titre proposé par l'alinéa 52, qui fait référence à la refondation, nous paraît en total décalage avec la réalité de ce qui nous est présenté. Pour une meilleure adéquation entre titre et contenu – et je pense qu'un professeur de philosophie est toujours attaché à une telle adéquation – nous proposons le titre : « Les orientations de la loi ».
Au-delà de l'aspect rédactionnel, je voudrais souligner que le mot « refondation » est martelé tout au long du texte : il y apparaît trente fois !
Madame la présidente, sous la pression amicale du Gouvernement et du rapporteur, Mme Pompili a retiré l'amendement n° 122. Or le groupe UDI voulait le reprendre et M. Gomes le défendre. Je suis désolé que nous n'ayons pas pu le faire, les choses étant allées exceptionnellement très vite.
Monsieur Salles, j'en prends acte. Mais autant, M. Gomes ne s'est pas manifesté au moment où a été annoncé le retrait de cet amendement.
C'est parce que les choses se sont précipitées ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l'amendement n° 506 .
Monsieur le ministre, je poursuis le débat sur la revalorisation de tous les métiers de l'éducation.
On sait que les emplois précaires et les contrats de droit privé ne sont plus un phénomène à la marge dans l'éducation nationale, mais qu'ils concernent plusieurs milliers de personnes.
Travailler sur les conditions de travail, de rémunération et de titularisation de ces personnels non titulaires des premier et second degrés est une préoccupation qui correspond aux droits mêmes de ces salariés, mais aussi à la qualité de l'équipe éducative.
Cet amendement vise donc à interroger le Gouvernement sur la validation des acquis, le déroulement des carrières et la façon dont la titularisation de l'ensemble de ces personnels est envisagée.
Madame la députée, vous posez une vraie question qui préoccupe tout particulièrement la majorité, d'autant que la précarité dans le monde enseignant a considérablement augmenté ces dernières années. Je ne dirai pas depuis combien de temps pour ne pas alourdir l'ambiance, mais chacun aura bien compris ce que je sous-entends.
Vous demandez au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport. J'aurai tendance à répéter la même chose que tout à l'heure à propos des demandes de rapports.
Je vous demande de retirer cet amendement. Mais cette demande n'est pas un refus de ma part. Plutôt qu'un rapport qui, certes, pourrait donner des pistes de réponse, c'est une véritable réflexion qui doit être engagée afin d'apporter des réponses au problème que vous posez.
Madame la députée, vous avez déjà abordé cette vraie question dans la discussion générale.
À titre d'information, 10 700 postes sont affectés aux concours réservés pour les quatre prochaines années, les premiers concours réservés ayant lieu en ce moment. Nous avons mis en place un comité de suivi avec les organisations syndicales pour voir comment nous avançons. Nous devons aller au-delà, y compris pour faire l'état des lieux. Vous savez que nous devons inclure dans notre réflexion la question des auxiliaires de vie scolaire. Nous attendons le rapport de mes collègues Marie-Arlette Carlotti et George Pau-Langevin.
Je demanderai pour rester dans les délais qui sont les vôtres, en plus des différents éléments que je vous ai donnés, un rapport à l'Inspection générale de l'administration, pour que nous disposions à l'automne d'un état des lieux extrêmement précis, suite au rapport sur les auxiliaires de vie scolaire et aux premières échéances des concours réservés, ce qui nous permettra d'envisager la suite des opérations.
Chaque fois que la majorité progressiste arrive aux responsabilités (Murmures sur les bancs du groupe UMP) – ce fut le cas après 1997 et aujourd'hui – nous sommes obligés de mettre en place des plans de résorption de la précarité.
Sachez aussi que, lorsque nous augmentons les postes aux concours, y compris cette année, nous luttons contre la précarité, car il s'agit bien de postes de fonctionnaires.
Monsieur le ministre, je retire cet amendement.
Je prends note du rendez-vous que vous nous donnez avec le rapport de l'Inspection générale. J'espère qu'il nous permettra d'ouvrir un débat à l'Assemblée nationale.
(L'amendement n° 506 est retiré.)
Il s'agit d'un amendement de l'opposition archaïque face à une majorité progressiste, si j'ai bien compris, monsieur le ministre. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Cet amendement totalement archaïque vise à engager le débat sur le métier d'enseignant.
Depuis le début de notre discussion, nous ne comprenons pas pourquoi la question centrale du statut et du métier des enseignants n'est pas partie prenante de ce projet de loi. Vous nous aviez dit que vous alliez ouvrir le chantier au second semestre. Pourtant, cette question n'y figure pas. Nous ne comprenons pas une telle contradiction.
Nous savons tous que le statut des enseignants date de 1950, que la définition du métier d'enseignant, notamment au collège et au lycée, est essentiellement disciplinaire et qu'elle correspond au métier tel qu'il était exercé dans les années 50, alors qu'il s'agissait de faire face à des élèves qui, sociologiquement, étaient à peu près tous les mêmes.
L'hétérogénéité grandissante des élèves et des classes nous pousse, les uns et les autres, à entrevoir dans nos discours, depuis une quinzaine d'années, des modifications substantielles de l'acte d'enseigner. Il faut donc en tirer les conséquences sur le plan statutaire, en distinguant les heures d'enseignement de la matière d'autres formes d'accompagnement des élèves – pédagogiques, difficultés, orientation. Bref, le métier n'est plus simplement une transmission de savoirs disciplinaires basés sur la discipline en question.
Monsieur Apparu, peut-on considérer que vous avez défendu aussi l'amendement de repli n° 417 ?
Oui, madame la présidente. Un de ces deux amendements ne devait pas passer les fourches caudines de l'article 40. Mais comme ce ne fut pas le cas, nous nous retrouvons avec deux amendements quasiment identiques.
Le problème que pose M. Apparu est réel. C'est une réflexion fondamentale…
…qui dépasse même le statut de l'enseignant. La manière dont vous posez le problème le montre.
Nous devons avoir une réflexion sur les savoirs, les programmes. Voilà pourquoi il est utile de créer le Conseil national des programmes, qui devra engager cette réflexion.
Quand le projet de loi fait évoluer la pédagogie dans les classes avec « Plus de maîtres que de classes », la liaison et les enseignements communs entre l'école élémentaire et le collège, nous enclenchons de fait cette réflexion sur les savoirs, leur périmètre, la manière de les transmettre, la pédagogie donc le métier d'enseignant.
Mais si nous inscrivions cela dans la loi, comme vous le demandez, c'est-à-dire de manière figée, sans réflexion préalable sur les programmes et les savoirs, sans une grande concertation avec les enseignants eux-mêmes – si on faisait cela à la hussarde, sans concertation, qu'entendrions-nous ! Nous obtiendrions le résultat inverse, c'est-à-dire que nous bloquerions probablement une évolution qui, je le reconnais et vous avez raison, est tout à fait nécessaire.
Comme vous le rappeliez hier, il faut donner du temps au temps, avoir un certain rythme et surtout permettre aux acteurs de l'école de s'approprier leur propre métier.
Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Nous partageons vos préoccupations, comme celle de Mme Pompili tout à l'heure.
Notre problème, qui est d'ailleurs celui de la réforme de l'école en France, c'est de savoir comment passer de déclarations d'intention très généreuses à des actes concrets.
La réflexion qui a été conduite par ceux qui s'intéressent à ces sujets, parfois d'ailleurs au-delà de nos clivages traditionnels, vise à comprendre pourquoi les choses ont été bloquées. Je vous rappelle que M. de Robien avait voulu modifier le statut de 1950, que le président Sarkozy avait pris l'engagement – parce que le SNES avait poussé – de revenir dessus, et qu'a été mise en place sous la précédente majorité la commission Pochard qui a été enterrée très rapidement car il s'agit d'affaires sérieuses.
Ayant suivi à peu près attentivement toutes ces différentes péripéties, ayant participé aux réflexions de ceux qui pensent que les choses doivent changer, nous nous sommes demandé comment faire. Nous avons identifié précisément les points sur lesquels il faut agir et avancer : l'école primaire, les quatre jours et demi, sujet que vous utilisez parfois de façon politique, enfin la formation des enseignants.
Je vous le répète, l'ensemble des organisations représentatives du personnel sont conviées à progresser – j'ai déjà obtenu une avancée en ce qui concerne les professeurs des écoles – pour faire évoluer le métier. Cette discussion prendra le temps nécessaire, mais elle sera conduite jusqu'au bout.
En défendant votre amendement, vous avez oublié de dire que vous aviez déjà conçu l'annualisation du temps de travail des enseignants. Cela serait une bonne façon de ne pas démarrer la moindre discussion. De ce point de vue, on constate l'écart qu'il y a entre les propos tenus dans les hémicycles et l'action quand elle doit donner des résultats.
Cela dit, la question que vous évoquez est un sujet de préoccupation.
Je voudrais dire à Mme Pompili, mais cela vous intéressera également, comme nos amis de la majorité, qu'il nous faut être capable d'organiser des passerelles dans l'éducation nationale.
J'ai voulu, dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, que se côtoient des personnels qui jusqu'à présent étaient très séparés. On l'a vu encore lors de certains mouvements, parfois ils s'ignorent, se méconnaissent et se maltraitent, ce schéma se reproduisant ensuite au niveau des élèves.
L'une des réflexions que j'ai proposées aux organisations syndicales est celle du cadre d'emploi. On n'est pas obligé d'être professeur de collège, principal ou conseiller pédagogique toute sa vie. On doit pouvoir circuler dans ces différents secteurs. Cette réflexion est vaste, mais je souhaite qu'elle soit menée.
En résumé, je partage nombre de vos intentions. Mais vous comprendrez que ma préoccupation est de passer des intentions aux actes, ce qui mérite un peu plus de précision et de rigueur.
Je veux soutenir l'excellent amendement de M. Apparu et remercier le ministre pour la qualité de sa réponse. Cela dit, nous sommes surpris de voir que, dans le cadre d'un rapport annexé à un projet de refondation de l'école, nous ne puissions pas faire figurer que la mission des enseignants doit être revue.
Vous parlez de majorité progressiste, mais en fait, et on l'a bien compris à travers la réponse du rapporteur, vous continuez à fonctionner sur des modèles fort anciens. Aujourd'hui, et on le voit avec l'évolution de ces dernières années, on a besoin pour s'occuper des enfants en grande difficulté, à tous les niveaux d'ailleurs, d'une aide individualisée. D'où la distinction entre les heures matières et les heures d'accompagnement individualisé, qui nous semble essentielle. Comme nous sommes dans le cadre d'un projet de refondation, autant l'écrire dans le projet.
Je m'interroge, monsieur Apparu, sur le bien-fondé de votre proposition, car je ne la crois pas sans arrière-pensées. L'autonomie des établissements que vous proposez, on sait ce que cela veut dire, tout comme votre prétention à faire évoluer le statut des enseignants dans le sens de la modernité ; en tout cas, eux, ils le savent.
Le rapporteur et le ministre ont répondu sur la question du premier degré. Dans ce projet de loi, il y a des réponses au sujet du temps consacré par les maîtres en dehors de l'enseignement proprement dit.
Je voudrais insister sur le second degré, en revenant sur la discussion que nous avons eue hier soir. Monsieur Apparu, je voudrais savoir comment vous mettriez en oeuvre votre proposition sans impact budgétaire. S'agissant d'un professeur certifié qui fait dix-huit heures, quel sera son temps d'enseignement et quel sera son temps hors enseignement ? Même chose pour un professeur agrégé. Et quelle est la cohérence avec votre proposition d'hier soir ? Hier, vous proposiez de redéployer au profit du primaire les moyens que nous consacrons à financer le secondaire. Comment pouvez-vous à la fois appliquer sans impact budgétaire votre proposition sur le temps des enseignants, et procéder à ce redéploiement ? Je serais vraiment curieux que vous puissiez nous donner une réponse précise à ce sujet.
Il y a une certaine démagogie et une certaine irresponsabilité dans ce que vous proposez, qui aurait pour effet la désorganisation du second degré. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
On va essayer de clarifier cette position, sans difficulté aucune.
Oui, très clairement, cette préconisation vise à augmenter le temps de travail des certifiés et des agrégés. L'idée qui est la nôtre est de passer de quinze à dix-huit heures et de dix-huit à vingt et une heures, pour conserver le temps « matière » existant aujourd'hui et augmenter de trois heures le temps de travail des certifiés et des agrégés, pour leur donner de nouvelles missions.
Vous avez raison, trois heures de travail en plus, cela a un coût, évidemment. Et c'est la raison pour laquelle nous faisons, nous, le choix suivant : recruter moins d'enseignants pour mieux les payer. C'est le débat que nous avons depuis le départ, c'est ce que nous avons fait lorsque nous étions aux affaires.
Moins d'enseignants – c'est la raison pour laquelle nous avons proposé la suppression des 60 000 postes – mais des enseignants mieux payés. Je vous rappelle que le temps annuel de travail des élèves français, c'est la Cour des comptes qui le dit, est supérieur de 12 % à la moyenne de l'OCDE : cela nous donne une marge de manoeuvre absolument considérable pour pouvoir moins dépenser et répartir autrement l'investissement entre le primaire et le secondaire, tout en revalorisant la condition des enseignants.
(L'amendement n° 418 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 417 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 1138 .
Je suggère d'ajouter quelques mots à l'alinéa 55, des mots importants. Cet alinéa expose en effet que la refondation que vous appelez de vos voeux, monsieur le ministre, vise à accentuer l'importance du geste éducatif et du renouvellement des pratiques pédagogiques comme fondement de la réussite des élèves. Je suggère donc que nous ajoutions à cet alinéa les mots : « c'est l'effet-maître », de façon à signifier par cette expression à quel point il est fondamental de reconnaître que la pratique pédagogique est un élément essentiel dans la réussite de l'élève. Je ne vois là rien de contradictoire avec l'esprit et la lettre de cet alinéa.
Il est rappelé dans l'alinéa 55 que « la qualité du système éducatif tient d'abord à la qualité de ses enseignants » : je trouve que cette expression a le souffle, la grandeur qui conviennent. « L'effet-maître » est tout de même un peu rugueux à l'oreille et inutile, je vous le dis franchement, madame Genevard. La commission a donné un avis défavorable.
Je ne vois pas ce qu'il y a de rugueux dans cette expression, je pense au contraire qu'elle réaffirme l'importance de la relation, je dirais presque d'autorité – l'autorité ferme et bienveillante du maître à l'égard de l'élève. Dans la discussion générale, j'ai évoqué l'exemple de François Bégaudeau, qui est un enseignant dont l'expérience a nourri Entre les murs, film dont vous avez souligné la qualité : il montre bien à quel point le renouvellement des pratiques pédagogiques est important. Ce qui se noue entre l'élève et le maître est de nature à infléchir profondément la réception du savoir.
Songez tout de même, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que dans notre commission, nous avons auditionné quelqu'un à qui j'ai demandé à quel pourcentage il évaluait le rôle du maître, « l'effet-maître ». Savez-vous ce qu'il m'a répondu ? « L'effet-maître ? Il ne joue pas pour plus de 5 %. »
Soit c'est important et on le dit, on le résume par cette expression, « l'effet-maître » ; soit ce n'est pas important et on le dit. Mais on ne peut pas dire : « C'est important, mais ce n'est pas la peine de le noter. »
La proposition de Mme Genevard m'amène à la réflexion suivante : vous approuvez par avance la création des écoles supérieures du professorat et de l'éducation, qui permettra aux maîtres d'être mieux formés, de recevoir une formation pédagogique et professionnelle pour mieux enseigner.
La question n'est pas de savoir si on cite « l'effet-maître » dans un texte de loi, mais si les maîtres auront les capacités nécessaires, la formation nécessaire pour assurer leur mission dans les meilleures conditions. C'est l'objectif de ce texte et je regrette que, depuis trois ans, cette question de la formation des maîtres n'ait pas été prise en compte : on s'est contenté d'une formation dans la discipline, au lieu d'une formation pédagogique et professionnelle.
J'entends M. Ménard dire que la formation était uniquement disciplinaire : la réalité est tout de même un peu plus complexe, mais peu importe ; nous y reviendrons à propos des ESPE.
La raison pour laquelle je soutiens l'amendement de notre collègue Annie Genevard, c'est que les historiens de l'éducation pointent régulièrement le rôle qu'ont pu jouer les fameux « hussards noirs de la République », d'ailleurs chers à M. le ministre : ce pourrait être un sujet de consensus.
Le monde change, et vous n'êtes pas les derniers à insister par exemple sur la nécessité d'intégrer le numérique. Dans ce monde qui change, plus que jamais il y a des choses à affirmer et peut-être à réaffirmer. Avec le pédagogisme, l'élève était au centre du dispositif. Loin de moi l'idée de contester que l'élève doive être fortement pris en considération, mais il faut s'intéresser à l'interaction entre l'élève et le maître. Et prendre en compte cette interaction, c'est considérer qu'il y a un élément décisif que les spécialistes appellent « l'effet-maître ».
Je pense que cet amendement n'est pas seulement rédactionnel : il a pour but de faire en sorte qu'on dise clairement que les maîtres ont un rôle décisif dans l'évolution de notre école, ce qui est pleinement dans la tradition des « hussards noirs ». Pardonnez-moi si c'est maintenant de ce côté-ci de l'hémicycle qu'il faut reprendre vos icônes ; nous le faisons volontiers quand il s'agit de l'intérêt général de la République et de la nation. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Il y a là trop de paradoxes et un abus de l'esprit de finesse. Nous avons proposé une refondation, sur la base de l'analyse selon laquelle – et vous venons d'en débattre au sujet des 27 000 postes réservés à la formation – il faut accorder à la formation des enseignants toute sa place pour la réussite des élèves.
Comment pouvez-vous passer de longues minutes à défendre cette expression, « l'effet-maître », qui n'ajoute rien à la qualité de l'expression qui est la nôtre selon laquelle « la qualité d'un système éducatif repose sur la qualité de ses enseignants » ? Et cela au début d'une partie du texte qui concerne les écoles supérieures du professorat et de l'éducation : comment pouvez-vous nous faire la leçon sur la formation des enseignants si l'on considère l'état où vous l'avez laissée ?
Je le dis solennellement : notre priorité, c'est précisément la formation, initiale et continue, des enseignants– alors que vous vouliez à l'instant supprimer les 27 000 postes créés pour cette formation. C'est bien la rencontre entre un maître et un élève, et non pas le maître d'un côté, l'élève de l'autre, qui fait tout l'acte pédagogique. C'est bien parce que nous pensons cela que nous concevons cette refondation comme insistant d'abord sur la formation des enseignants.
Maintenant, de grâce, ce n'est pas parce qu'il existe des expressions qui datent peut-être de deux ou trois ans et qui n'ajoutent rien à ce que nous disons dans un meilleur français, qu'il faut nous faire la leçon sur la formation que vous avez vous-mêmes détruite. Je vous demande de prendre en considération que ce sont bien nos propositions qui accordent à la formation des enseignants l'intérêt que nous n'avez pas été capables de lui porter ces dernières années. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
J'interviens pour indiquer que nous soutenons cet amendement. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Dans cette refondation pédagogique, il est indiqué dans le premier alinéa que l'aspect qualitatif est déterminant : nous avons débattu, toute la journée d'hier, du caractère qualitatif ou quantitatif de la refondation qui nous est proposée. Je crois qu'il serait tout à l'honneur du Parlement, tout à l'honneur de la République, que cette belle expression, « l'effet-maître », vienne conclure cet alinéa sur l'aspect qualitatif.
J'ai du mal à comprendre l'importance des oppositions à ce sujet. On a ajouté « inclusif », qui va rapidement disparaître dans les limbes de la sémantique. « L'effet-maître », c'est quelque chose de fondamental dans notre système éducatif. Le reconnaître, c'est aussi reconnaître une profession qui a besoin de l'être et cela me semble indispensable. J'espère que l'Assemblée soutiendra unanimement cet amendement qui parlera au coeur de beaucoup d'enseignants dans notre pays.
Les professeurs ne parlent pas comme cela. « L'effet-maître » ! Ils parlent français !
Le maître, cela devrait tout de même vous rappeler un peu la IIIe République, monsieur le ministre. Quant à « l'effet-maître », je ne peux pas vous proposer de meilleure expression et je vais vous dire pourquoi : au-delà de la formation, monsieur le ministre, c'est l'impact personnel, le coefficient personnel de l'enseignant, c'est ce petit supplément d'âme que je me permets d'évoquer en tant qu'Alsacien. Vous pouvez avoir la meilleure formation, vous le savez bien, monsieur le ministre, il y en a qui arrivent à transmettre, à émouvoir les gamins, quand d'autres qui ont reçu une formation extraordinaire et ont un coefficient intellectuel hors norme n'y arrivent pas tout à fait. Acceptez donc cette expression, prenez-la au sens du maître artisan : je sais que c'est le mot lui-même qui vous heurte, mais c'est bien celui de l'école d'origine, celui de la IIIe République ! Notre maître ! Nous en avons tous eus et nous nous en souvenons encore.
(L'amendement n° 1138 n'est pas adopté.)
Cet amendement apporte une modification essentiellement formelle au texte établi par la commission. L'alinéa 56 souligne précisément l'importance de la préparation des enseignants à leur métier : celle-ci ne se résume pas à une expression du dernier moment telle que « l'effet-maître », qui a cours depuis deux ou trois ans mais en dit beaucoup moins, à mon avis, que ce que nous écrivons dans les paragraphes de ce projet de loi.
L'énumération de ce que l'on doit apprendre dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation comprend les termes suivants : « traitement des besoins éducatifs particuliers notamment le dépistage des troubles du comportement et du langage ». Or, le traitement et le dépistage relèvent de la compétence exclusive des médecins.
Les enseignants doivent être naturellement informés de divers éléments concernant la psychologie des enfants et leurs comportements. Mais il n'entre pas directement dans leur fonction de dépister et a fortiori de traiter les troubles.
C'est pourquoi je vous propose de modifier formellement cette rédaction en adoptant la formulation suivante : « prise en compte des besoins éducatifs particuliers et aide au repérage des difficultés, notamment d'apprentissage, scolarisation des élèves en situation de handicap ».
Il faut veiller à ne pas confondre les rôles des uns et des autres. Il s'agit donc d'un amendement de forme, mais que je considère comme important pour ne pas créer de confusion dans les esprits.
Monsieur le rapporteur, quel est votre avis sur cet amendement du Gouvernement, à défaut de présenter celui de la commission ?
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l'amendement n° 123 .
L'alinéa 56 marque la volonté du législateur de lister toutes les compétences que l'enseignant devra acquérir pour être capable de se présenter dans sa classe et de faire face à tous les comportements des élèves.
Il s'agit là d'une approche disciplinaire de la formation, mais nous avons également souhaité ajouter une partie sur l'enseignement des disciplines transversales. En effet, le rôle du professeur n'est pas seulement d'être confronté à des élèves, mais également de pouvoir travailler avec ses partenaires, avec une équipe pédagogique. Je pense que cette dimension transversale est cruciale.
Cette liste doit donc être complétée, car le rôle de l'enseignant ne se résume pas à un temps de présence devant ses élèves.
La commission a émis un avis favorable à cet amendement, qui s'inscrit tout à fait dans la philosophie générale de ce projet de loi.
Je ferai simplement une remarque à Mme Attard concernant la place de cet amendement dans le rapport annexé : il serait à mon avis plus cohérent de le placer après l'alinéa 63, qui traite du même sujet, si vous êtes d'accord pour le rectifier en ce sens – mais je sais que vous serez d'accord ! (Mme Isabelle Attard manifeste son assentiment).
Avis favorable, puisque tout le monde est d'accord !
Je trouve cet amendement très intéressant, et je le voterai à titre personnel.
J'aurais toutefois souhaité rajouter deux autres termes : les milieux « sociaux » et « de santé ». Nous venons à l'instant d'évoquer les enfants en situation de handicap ; or les parents nous demandent que les enseignants soient davantage sensibilisés à toutes les questions posées par le handicap.
Je suppose qu'elles seront traitées dans le cadre de la formation dispensée par les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, mais les enseignants nous disent aussi qu'ils sont parfois démunis face à la situation sociale de certains enfants, et je trouve qu'on aurait pu ajouter cette précision, peut-être par le biais d'un sous-amendement.
Quoi qu'il en soit, je voterai à titre personnel cet amendement que je trouve très intéressant.
Le sujet que Mme Le Callennec a abordé est important, mais je tenais à préciser, comme je souhaitais déjà le faire à l'occasion de l'examen de l'amendement précédent, que nous avons travaillé en commission sur cette question.
Nous partageons en effet votre préoccupation : nombre d'enseignants se sentent démunis face à des élèves handicapés dans leur classe, et parfois ils ne peuvent, en dépit de leur bonne volonté, les scolariser de manière satisfaisante faute d'outils adéquats.
En commission, nous avons déjà beaucoup avancé puisque nous avons remplacé les termes « accueil » et « accompagnement », qui étaient présents dans tout le projet de loi, par le terme « scolarisation » ; c'est déjà très important.
L'alinéa 56 indique que les professeurs doivent disposer d'outils pour scolariser les élèves en situation de handicap ; c'est pourquoi nous n'avons pas ajouté cette précision dans notre amendement, puisque cette préoccupation était déjà satisfaite.
(L'amendement n° 123 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)
Cet amendement vise à compléter l'alinéa 57, car la question de l'entrée dans le métier est effectivement importante.
Aujourd'hui, l'analyse des dispositifs permettant d'entrer dans le métier montre que l'apprentissage est susceptible de constituer l'un d'eux.
Il convient ainsi de mettre l'accent sur les démarches permettant d'acquérir un certain nombre de compétences pour le métier d'enseignant. Cela ne doit pas seulement se faire de manière déductive, mais doit également reposer sur des démarches plus inductives. Force est de constater que le dispositif le plus indiqué aujourd'hui pour développer de telles démarches inductives en milieu professionnel est l'apprentissage.
Des objectifs ont été fixés, et le secteur public devrait monter l'exemple. L'occasion est en effet unique de développer l'apprentissage dans le secteur public.
Cela éviterait en outre de considérer que l'apprentissage ne serait pas adapté à ce genre de dispositif ; je pense au contraire qu'il l'est plus que jamais. C'est la raison pour laquelle je défends cet amendement proposant que l'entrée progressive puisse se faire en ayant recours à l'apprentissage. Du reste, sur un plan juridique, rien ne s'y oppose.
La préoccupation est juste, mais elle est parfaitement satisfaite par l'article 49 du projet de loi, dont l'alinéa 5 se termine par la phrase suivante : « La formation organisée par les écoles supérieures du professorat et de l'éducation inclut des enseignements théoriques, des enseignements liés à la pratique de ces métiers et un ou plusieurs stages ».
Je pense que cela répond tout à fait à la préoccupation que vous évoquiez, et montre bien que l'enseignement qui sera prodigué dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation repose sur l'alternance entre la théorie et la pratique.
L'avis de la commission est donc défavorable.
Nous soutenons ces amendements pour plusieurs raisons.
Première raison : la formule de l'apprentissage a largement fait ses preuves dans notre pays. Il est donc opportun que cela soit indiqué dans le rapport annexé à l'article premier de ce projet de loi.
Deuxième raison : indiquer explicitement que l'entrée dans le métier peut se faire par la voie de l'apprentissage contribue à donner à l'apprentissage ses lettres de noblesse. Les enseignants aussi peuvent apprendre leur métier dans le cadre d'une formation en alternance, désignée par le beau mot qu'est l'« apprentissage ». Cela serait une bonne chose.
Troisième raison : le rapporteur a affirmé qu'il était inutile de l'indiquer dans l'annexe puisque cela figurait déjà dans le projet de loi. Or, si on supprimait de l'annexe tout ce qui figure déjà dans le projet de loi, je pense qu'elle se réduirait comme une peau de chagrin.
L'annexe a vocation, si j'ai bien compris, à éclairer la loi puis à irriguer le travail réglementaire qui sera nécessaire pour son application ; à ce titre, ces amendements me semblent tout à fait pertinents.
Je viens de relire l'article 49 : vous avez partiellement raison, monsieur le rapporteur. Le dispositif instauré prévoit en effet des allers et retours entre une pratique professionnelle et la formation. Néanmoins, l'amendement que je propose vise à indiquer que l'une des voies possibles serait justement le recours à l'apprentissage.
J'ai été très sensible hier à l'argument développé par notre collègue Marie-George Buffet : elle a notamment dit qu'il fallait éviter les orientations par l'échec, et valoriser au contraire une approche par les métiers. Dans cette optique, il me semble important de faire en sorte qu'un dispositif tel que l'apprentissage soit pleinement pris en charge aussi par l'État. Le service public se grandirait en utilisant lui aussi ce dispositif, car l'on éviterait ainsi de cloisonner et l'on se placerait dans une optique d'ouverture.
Cela permettrait de montrer que l'apprentissage n'existe pas seulement dans certains métiers, et que l'on pourrait également accéder à un métier tel que l'enseignement grâce à un dispositif d'apprentissage.
Cette question est vraiment philosophique, c'est pourquoi je me permets d'insister. Il y a là matière à faire quelque chose d'intéressant. De plus, les enseignants eux-mêmes pourraient encourager certains jeunes à s'orienter dans des filières d'apprentissage. Les enseignants aussi pouvant désormais passer par cette voie, il n'y aurait plus de cloisonnement.
Je me permets donc d'insister, car je pense que cet amendement, loin d'être partisan, sert l'intérêt général.
(Les amendements identiques nos 600 et 635 ne sont pas adoptés.)
Cet amendement concerne les emplois d'avenir professeurs, dont nous avons voté la création. Chacun sait que, pour être titularisé dans l'éducation nationale, il faut réussir un concours.
Se pose alors le problème des reçus-collés. Je sais que cette question existe déjà, mais la situation des emplois d'avenir professeurs présente une grande différence : ils ont un coût. Or, dès lors que ces personnes sont destinées à travailler dans l'éducation nationale, comment être sûr qu'elles y entreront effectivement ?
Cet amendement vise donc à prévoir qu'un décret précisera le devenir de ceux de ces étudiants qui n'auraient pas réussi le concours.
Cette préoccupation est tout à fait louable, mais il existe tout de même des règles pour entrer dans la fonction publique. Le principe est le concours, à égalité pour tous.
Une aide particulièrement forte est apportée aux jeunes de milieu modeste qui veulent embrasser la carrière d'enseignant. On leur permet de faire des études grâce aux emplois d'avenir – je me félicite d'ailleurs de vous voir vous préoccuper particulièrement de ces emplois d'avenir, que nous avons créés dès notre arrivée aux responsabilités. Mais une fois accordée cette aide pédagogique et financière au concours, ils se retrouvent à égalité avec les autres pour passer les concours : c'est la condition sine qua non pour toute personne désirant entrer dans la fonction publique.
L'avis de la commission est donc défavorable.
Je trouve cet amendement intéressant. Nous avons évoqué ce point lorsque nous avons examiné le projet de loi portant création des emplois d'avenir, et notamment des emplois d'avenir professeurs. Cette précision aurait été à mon avis très utile, car nous avons le souci de l'évaluation constante ; or notre rôle est aussi de contrôler le Gouvernement.
Vous m'avez répondu tout à l'heure, monsieur le ministre, sur les emplois d'avenir. J'avais bien noté que leur chiffre s'élevait à 18 000 en 2013, mais votre discours d'hier m'avait laissé croire que vous en demandiez de supplémentaires.
Nous voulons savoir si ces étudiants réussissent ou non aux concours, afin de voir si ces emplois d'avenir professeur auront été utiles, en permettant à ceux qui sont issus de milieux plus modestes d'accéder à la carrière professorale.
Une question demeure : éprouvez-vous, comme M. Sapin pour les emplois d'avenir, des difficultés à recruter ces emplois d'avenir professeur ?
Le dispositif des emplois d'avenir professeur est un dispositif indispensable, car il est important de diversifier le vivier de recrutement : si cette voie le permet, notre école y gagnera.
Le comité de suivi, évoqué à plusieurs reprises par le rapporteur, permettra au Parlement de suivre l'application de cette loi, s'agissant notamment de l'articulation de cette procédure et de la part des personnes recrutées qui réussiront au concours. Nous pourrons disposer par ce biais d'informations utiles à la représentation nationale.
Une modification de forme enfin : à ma connaissance, cette annexe ne renvoie à aucun moment à un acte réglementaire visant à sa mise en oeuvre. J'avais cru comprendre, même si le débat est divers à ce sujet, qu'elle visait à éclairer la loi elle-même, à en fixer les orientations et la programmation, mais sans renvoyer à des actes réglementaires. En ce sens, la manière dont l'amendement est bâti n'est peut-être pas tout à fait adaptée.
J'ai cosigné cet amendement. J'entends bien le rapporteur et il a raison : la règle de la fonction publique est celle des concours. Toutefois, il existe aussi des concours adaptés. Nous avons par exemple dans la fonction publique des concours internes et des concours externes.
Nous pourrions admettre qu'il y ait également, pour les élèves boursiers et dans la mesure où l'ensemble de leur scolarité attesterait leur compétence et leur valeur, des épreuves adaptées sans que personne n'en prenne ombrage. Dès lors que l'on saurait que ces enseignants disposent de certaines capacités, peut-être conviendrait-il de leur organiser des passerelles.
Je suis saisie d'une série d'amendements identiques. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 601 .
Cet amendement vise à compléter l'alinéa 62. Nous avons souvent rencontré ce sujet dans le cadre universitaire, qui doit être aussi ouvert que possible sur son environnement. Aujourd'hui, la situation est sans commune mesure avec celle qui existait il y a plusieurs décennies : au cours des cinquante dernières années, de plus en plus de jeunes sont entrés à l'Université, passant de 300 000 dans les années 1960 à 2,4 millions.
Par conséquent, l'un des objectifs majeurs pour ces jeunes est l'insertion professionnelle. C'est pourquoi cette question du monde du travail et de l'entreprise – la dimension économique – doit avoir ici toute sa place. Les écoles doivent prendre en charge cette dimension, sous peine de mettre à mal l'efficacité du lien entre les entreprises et les écoles intégrées à l'Université.
Ce sujet mérite une attention particulière, d'autant que l'examen des statuts inscrits dans la loi sur l'Université révèle que la question de l'insertion professionnelle est l'une des missions de l'enseignement supérieur.
Permettez-moi de rendre hommage à l'action de M. Hetzel qui dans une autre vie a contribué à faire bouger les lignes dans les relations entre l'école et l'entreprise, et plus particulièrement dans l'Université.
Il nous semble essentiel d'inscrire dans le cadre de la formation dispensée par les ESPE cette dimension économique propre au monde de l'entreprise.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vos réponses sont un peu rapides ! J'aimerais obtenir quelques explications à ce sujet.
Nous avons eu de longs débats en commission, sur le lien entre l'école et l'entreprise et sur l'éveil de l'esprit entrepreneurial chez les élèves. Nous savons qu'à la sortie de l'école, les élèves auront à affronter la jungle de l'emploi. Aussi lier l'école à l'esprit d'entreprise me semble-t-il essentiel. Or tous les amendements qui s'y rapportaient ont été rejetés. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ? S'en tenir à un « défavorable. » me semble un peu court.
« Un peu court » est encore trop généreux !
Nous laissons passer l'occasion d'ouvrir l'enseignement au monde dans lequel il évolue, dans lequel évoluent les enfants, leurs familles et toute la communauté éducative.
Rejeter sans explication et aussi sèchement cet amendement, alors que vous avez sans doute eu en commission des débats sur le sujet, voilà qui est très grave ! Comment pouvez-vous dire que vous êtes favorable au service public de l'orientation, que vous souhaitez son efficacité et dans le même temps ne pas accepter cet amendement de bon sens, qui devrait être au coeur même d'une loi de refondation de l'école ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) C'est incroyable !
C'est la vacuité la plus totale et le plus grand mépris à l'égard de l'opposition ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Je précise simplement que nous avons mené des auditions, pendant de nombreuses heures, depuis maintenant trois mois, auditions auxquelles tous les parlementaires pouvaient participer, et que le débat en commission, où ce problème a été abordé, a duré près de seize heures. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Vous le savez, monsieur le rapporteur, la loi se décide dans l'Hémicycle.
Si j'ai insisté à ce point sur cet amendement, c'est que j'étais soutenu par de bonnes lectures. Dans Apprendre pour entreprendre en effet,…
…Jean-Pierre Chevènement insiste sur ces questions – je suis d'ailleurs outré par votre façon de les traiter. Effectivement, je trouverai sans doute des réponses dans l'ouvrage de Jean-Pierre Chevènement, que j'ai lu avec attention et que je vous invite à lire, car il traite ces questions avec une attention toute particulière, en considérant que l'esprit d'entreprise et l'ouverture sur le monde économique sont essentiels. Votre réaction ne rend pas service à notre jeunesse, ce à quoi nous tentons, quant à nous, de nous employer.
Je soutiens M. Hetzel dans ses propos.
Le déroulement de ce débat rappelle celui mené en commission. Monsieur le rapporteur, il y a peut-être eu, sur ces questions aussi essentielles, des heures d'auditions ainsi que des heures de réunions en commission, auxquelles nous avons participé, mais nous avons posé des questions sans jamais obtenir de réponses. Nous avons également auditionné le ministre en commission, mais il n'a pas davantage répondu. J'estime que dans ce débat nous devons obtenir des réponses quand des questions à ce point essentielles sont posées. C'est pourquoi je demande une suspension de séance au nom du groupe UDI.
Article 1er et rapport annexé
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à douze heures.)
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l'amendement n° 700 .
Lorsque la Cour des comptes a analysé les raisons du surcoût de l'enseignement secondaire, elle a mis en lumière au moins trois motifs principaux : le nombre d'heures de cours, supérieur à celui de nos voisins européens dans les collèges et lycées – notre collègue Benoist Apparu l'a évoqué ; la multiplication des options ces dernières années, qui permet d'ailleurs à certains de contourner la carte scolaire ; et en troisième lieu le fait que les enseignants, dont vous avez rappelé très justement, monsieur le ministre, qu'ils sont tenus à dix-huit heures de cours pour les certifiés et à quinze heures pour les agrégés, n'enseignaient qu'une seule matière. Je rappelle que dans plusieurs pays européens, les professeurs sont en capacité d'enseigner deux matières.
Cet amendement vise donc non pas à obliger, mais à inciter à enseigner une seconde matière. Cela permettrait aux enseignants d'évoluer au sein de leur établissement ou de leur académie, voire de se diversifier s'ils désiraient changer de matière ou si celle-ci était en perte d'appétence chez les élèves – ce fut le cas, il y a quelques années, pour l'allemand –, et aussi de renforcer leur capacité de mobilité s'ils souhaitaient changer d'académie, par exemple pour suivre leur conjoint.
J'aurai peut-être droit à un « défavorable » sec, et je le regretterai puisqu'il n'y a pas malice à inciter à s'intéresser à une seconde matière.
Plusieurs députés du groupe SRC. Sec ! (Sourires.)
Je vais essayer de ne pas être sec en expliquant pour quelle raison l'avis est défavorable, mais je ne comprends pas pourquoi, madame Le Callennec, vous voulez privilégier les enseignants du collège et du lycée. L'idée avec les ESPE, on l'a dit tout à l'heure, c'est de créer, du moins au départ, un tronc commun, une culture commune chez les enseignants. Dès lors je ne crois pas en la faisabilité de votre amendement et je ne vois pas en quoi il apporterait quelque chose à leur formation. L'avis est donc défavorable, mais de la manière la moins sèche possible. (Sourires.)
Tout d'abord, un mot pour répondre à vos interrogations sur les emplois de professeurs d'avenir. S'agissant des 4 000 déjà ouverts pour le mois de janvier, les recrutements se passent bien. Ce n'est pas très étonnant puisqu'on les a ouverts aux étudiants en master, il y a donc un potentiel chez ces élèves boursiers, qui se retrouvaient, avec la mastérisation, dans des conditions très difficiles pour poursuivre leurs études – nous avons des enquêtes très précises là-dessus. Ce dispositif les aide donc vraiment. Je savais que nous disposerions du potentiel, je l'ai toujours soutenu, et nous sommes là au coeur du mérite républicain. Et nous aurons le potentiel pour aller plus loin – il y aura 6 000 postes supplémentaires en septembre. À ce sujet, j'ai entendu des discours marquants de la part des intéressés. J'ai eu l'occasion d'aller à Reims, avec le Premier ministre, pour signer les premières créations d'emplois de professeur d'avenir, et j'ai rencontré des jeunes qui manifestaient vraiment la volonté de servir leur pays et l'éducation nationale. Ce dispositif constitue réellement un élément très important d'espérance et de remise en mouvement de la promesse républicaine.
Pour ce qui concerne l'amendement, je rappelle que ce ne sont pas les ESPE qui ont à décider de la bivalence en France. Soit nous avons le courage de faire un statut différent, soit on rouvre le dossier que vous évoquez, madame la députée ; dans les deux cas les ESPE formeront les professeurs, mais elles ne peuvent pas prendre la décision elles-mêmes de faire une réforme aussi importante.
Pour revenir sur la discussion précédente, chacun sait très bien que s'agissant du parcours d'orientation, le rapprochement avec l'entreprise et l'emploi est un de mes préoccupations majeures, plusieurs parties du texte en témoignent. Mais faisons attention, pour la qualité même du travail que nous menons ici, à ne pas inscrire des dispositions dont nous savons qu'elles susciteraient des débats infinis qui bloqueraient l'évolution. Une des particularités et un des intérêts d'une loi sur l'école, je l'ai dit à plusieurs reprises, c'est de prévoir des dispositions que l'on peut mettre en oeuvre ensuite. La question de la bivalence a une très longue histoire dans ce pays, et on ne peut pas l'introduire en biais par les ESPE, ce n'est pas leur rôle.
S'agissant de la bivalence, je rappelle d'abord qu'il y a des professeurs qui enseignent plusieurs matières, comme l'histoire-géographie et l'éducation civique. Et puis on peut déjà enseigner une matière de plus à partir du moment où on a les diplômes universitaires adéquats : il suffit de demander une habilitation à l'inspecteur pédagogique régional. En ce qui me concerne, je suis professeur certifié d'histoire-géographie et habilité à enseigner les langues régionales.
Monsieur le ministre, vous avez l'air de penser que « l'effet-maître » date de deux ou trois ans, mais je suis désolé, j'ai beaucoup travaillé sur la pédagogie il y a une vingtaine d'années, et je peux vous dire qu'on en parlait déjà.
Pour ce qui est de la bivalence, on ne peut pas balayer d'un revers de main cet amendement. Il me semble extrêmement intéressant, non pas sur le plan du statut mais de l'enseignement. Mon collègue vient de rappeler à juste titre, évoquant les langues régionales, que la bivalence existe déjà.
Au-delà des arguments brillamment défendus par Isabelle Le Callennec, l'amendement apporterait plus de facilité de gestion des moyens en personnel lors des remplacements.
Je tiens à saluer la cohérence, persévérante mais sournoise, de nos collègues de l'opposition. Depuis le début du débat sur le rapport annexé, ils s'acharnent, amendement après amendement, à vouloir remettre en cause le statut des enseignants du second degré. Ici, on nous propose rien de moins que de recréer les PEGC, c'est-à-dire la bivalence. Croyez-vous, mes chers collègues de l'opposition, que les enseignants du second degré sont prêts à vous entendre sur ce point ? Vous allez dire évidemment qu'il faut évoluer, mettant en avant les comparaisons internationales, et que ce serait plus moderne de remettre en cause les acquis en matière de compétences des enseignants du second degré.
Vous dites comme nous qu'il faut refonder l'école primaire, que vous avez malmenée pendant des années,…
…et vous allez maintenant ajouter que pour y parvenir et pour redéployer les financements, il faut casser le second degré, remettre en cause la formation et le statut des enseignants des collèges et des lycées. Tel est votre projet. Il faut qu'il soit bien connu des enseignants du second degré. Il s'agit pour vous d'affaiblir l'enseignement secondaire, on le comprend clairement aujourd'hui. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous, nous voulons refonder l'école de la République, y compris bien évidemment le premier degré, mais sans malmener le second degré.
(M. Marc Le Fur remplace Mme Catherine Vautrin au fauteuil de la présidence.)
Je tiens à souligner l'absence de toute référence au monde économique et aux entreprises dans les pages consacrées à la refondation pédagogique. Cette question a été débattue en commission, elle reviendra dans le débat parce que cela me semble vraiment dommageable. Il est indispensable, alors que l'on parle d'une refondation – qui, on l'a vu, n'en est pas véritablement une –, que la formation ne soit pas repliée sur elle-même mais ouverte sur la vraie vie, d'autant plus que celle-ci est parfois un peu difficile dans le monde des entreprises. Je déplore qu'une telle adjonction n'ait pas été retenue à un moment où, comme l'a dit François Fillon à juste titre, les chefs d'entreprise finissent tous, à force d'être stigmatisés, par être considérés comme des repris de justice. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.) C'est pourquoi je regrette vivement que les amendements n°s 601 et 636 n'aient pas été adoptés.
Au-delà de la rédaction de Mme Le Callennec, la discussion sur le fond mérite d'être approfondie. Il ne s'agit évidemment pas de recréer les PEGC, mais l'on voit bien aujourd'hui l'évolution de la formation dont on a besoin au niveau des langues vivantes, c'est-à-dire des mentions complémentaires dans les concours pour être qualifiés à enseigner des langues vivantes étrangères.
Le problème de fond, c'est la liaison entre le premier et le second degré. Je sais que cette question vous tient à coeur, monsieur le ministre. Si le Gouvernement et la majorité voient que, dans certains secteurs, les écoles du socle commun ont du sens, ils doivent comprendre que nous avons besoin d'une continuité et surtout d'une stabilité dans les personnels, et je trouve cet amendement très intéressant de ce point de vue.
Monsieur le rapporteur, je souscris à votre très bonne idée de privilégier la culture commune dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation. Toutefois mon amendement ne concerne pas les écoles primaires, seulement les collèges et les lycées, c'est pourquoi je n'ai pas compris votre réponse.
J'ai été davantage intéressée par la réponse de M. le ministre parce qu'il a évoqué la bivalence. J'ai le sentiment qu'il considère le dossier clos, un peu « circulez, y a rien à voir », alors que la question existe et qu'il y a des possibilités d'y répondre. Mon amendement vise simplement à inciter en laissant de la liberté, à offrir de la souplesse. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Il faudrait au moins accepter d'en discuter. Il ne s'agit pas du tout d'une remise en cause du statut des enseignants, ce que j'ai entendu à ce sujet est une fois de plus caricatural. Si, dans un débat sur un projet de loi de refondation de l'école, on ne discute pas des questions qui se posent certes depuis des années mais auxquelles on n'a pas apporté de réponses, je ne vois pas à quoi servirait cette loi.
Dans le droit fil de ce que vient de dire ma collègue, je pense que si on est dans le cadre d'une refondation de l'école, il faut se poser toutes les questions et ne s'interdire aucune piste de réflexion. Hier, monsieur le ministre, j'évoquais un article, paru lundi, sur l'école au Canada.
J'y reviens parce que la comparaison avec le système canadien est intéressante. Dans ce collège de la banlieue défavorisée de Toronto, les professeurs sont presque tous bivalents. Ils enseignent, par exemple, les mathématiques et la musique, ou les mathématiques et l'informatique, deux disciplines qui ne sont pas totalement étrangères l'une à l'autre, et ce collège obtient des résultats encourageants en matière de réduction de l'échec scolaire. Monsieur le ministre, il ne faut rien s'interdire…
…dans la réflexion sur la refondation de l'école.
Permettez-moi donc de revenir sur la question des RASED. Je vous rappelle que pendant les questions-cribles, vous avez eu sans doute un moment d'abandon. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Il ne faut rien s'interdire, et maintenant elle nous parle d'abandon ! (Sourires.)
À une question de notre collègue Marie-George Buffet, vous avez répondu : « J'ai demandé, car les résultats n'étaient pas aussi bons qu'on aurait pu le souhaiter, qu'une étude soit réalisée pour conforter les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté ». J'insiste sur le terme « conforter ».
Cela m'inspire deux remarques. D'abord, vous reconnaissez que le système n'est pas totalement abouti et qu'il y a des marges de progression, alors que, pendant des années, vous nous avez dit qu'il n'y avait rien de mieux et de plus efficace pour lutter contre l'échec scolaire que les RASED.
Là, vous convenez que le système n'est pas aussi performant qu'il y paraît.
Deuxièmement, monsieur le ministre, cela interroge tout de même, quand il faut conforter une structure qui est elle-même chargée de conforter les élèves en difficulté.
Plusieurs députés du groupe SRC. Quel rapport avec le débat ?
Le rapport c'est qu'il n'y a pas de sujet tabou et que, non seulement l'on peut mais l'on doit s'interroger par exemple sur la question de la bivalence et sur celle des RASED.
(L'amendement n° 700 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, pour soutenir l'amendement n° 1319 .
Cet amendement a pour objet de s'assurer de l'existence d'un bon équilibre entre formations professionnelle et disciplinaire. J'ai cru comprendre que, sous la précédente majorité, des maquettes du concours de recrutement qu'est le CAPES comportaient seulement un quart d'épreuves disciplinaires.
J'aimerais m'assurer que tel ne sera pas le schéma que vous retiendrez. « L'effet-maître », solécisme intéressant si ardemment défendu par certains de nos collègues, ne gagnerait pas à un mauvais équilibre entre la formation professionnelle et la formation disciplinaire. S'il est vrai que l'on ne transmet bien que si l'on a appris à transmettre, sauf d'ailleurs dispositions ou talents personnels – ceux dont étaient dotés les maîtres dont nous nous souvenons, d'ailleurs –, il est vrai aussi que l'on ne transmet bien que ce que l'on maîtrise le mieux possible.
L'intérêt du concours de recrutement n'est pas seulement de s'assurer que les maîtres auront appris à transmettre, mais aussi, et me semble-t-il prioritairement, qu'ils ont quelque chose à transmettre, c'est-à-dire qu'ils dominent leur discipline.
C'est la raison pour laquelle cet amendement est ici présenté, peut-être plus d'ailleurs en vu d'obtenir quelques assurances sur votre conception des concours futurs.
Bien entendu, on ne peut que partager votre préoccupation : pour un enseignant, il est important d'être formé à savoir transmettre mais aussi d'avoir quelque chose à transmettre et de bien le maîtriser. L'enseignement disciplinaire est fondamental, comme je l'ai écrit dans le rapport adopté par la commission : « La maîtrise de la discipline enseignée devra donc rester le socle de la formation, mais celle-ci doit être mise en perspective. » Le Haut conseil de l'éducation l'a également rappelé.
Cela tombe sous le sens mais c'est extrêmement important de le rappeler et vous avez raison de le faire.
Mais il me semble que cela fait plutôt partie des référentiels de compétences qui vont être soumises aux enseignants. C'est le socle de ce que doit être un enseignant dans sa discipline et dans sa manière de la transmettre.
Cet amendement étant satisfait à la fois par mon rapport, dont je viens de vous lire une phrase très claire, et par les référentiels de compétences, je vous propose de le retirer.
Madame la députée, vous soulevez un sujet essentiel et très ancien dans les débats sur notre école et dans les difficultés rencontrées depuis trois décennies. Cette opposition entre excellence disciplinaire et capacité à transmettre sa connaissance peut paraître étrange à des observateurs un peu extérieurs.
Il ne faut renoncer à rien et se garder des excès. Penser qu'être extrêmement bon dans sa discipline vous assure une compétence professionnelle en est un, qui a causé beaucoup de souffrances chez de jeunes enseignants. L'inverse – faire croire que l'on peut enseigner sans maîtriser son domaine disciplinaire – est tout aussi excessif.
Nous essayons de tenir les deux bouts de la chaîne. Nous sommes en train de revoir, mais avec beaucoup de circonspection, les référentiels du métier où l'affirmation de la connaissance disciplinaire doit être présente, mais aussi les concours, par souci de cohérence, et les écoles supérieures du professorat et de l'éducation.
Je voudrais vous assurer de ma totale détermination personnelle à veiller, concours après concours, à cette double exigence : l'excellence disciplinaire qui fonde l'autorité des professeurs et la reconnaissance de leurs compétences ; une entrée progressive et professionnalisante dans le métier qui donne aussi du sens à la reconnaissance et à l'autorité des professeurs.
Je vous remercie de nous donner ces assurances que je prends comme un engagement à ce que la maîtrise professionnelle ne représente pas les trois quarts de l'évaluation lors des concours et la maîtrise disciplinaire un quart. Dans ces conditions, je retire mon amendement.
(L'amendement n°1319 est retiré.)
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 1139 .
Par cet amendement, je propose d'ajouter le mot « personnelles » après le mot « professionnelles ».
Il n'existe pas de domaine professionnel où, lorsque l'on est confronté à une situation de recrutement, l'on ne s'interroge pas sur l'adéquation entre la personne et le poste proposé. Aussi, je propose que l'appréciation des qualités professionnelles soit accompagnée de l'évaluation de l'aptitude personnelle à remplir une fonction d'enseignement.
Défavorable, parce que ce sont évidemment les qualités professionnelles qui sont essentielles. Ajouter les qualités personnelles, pardonnez-moi de le dire peut-être un peu sèchement, mais c'est la porte ouverte à n'importe quoi.
Défavorable, moins sèchement que le rapporteur.
Monsieur le ministre, à la faveur de cet amendement, je vais vous poser une question. Actuellement, la parité devient une nécessité pour les concours de l'enseignement du premier degré. Lorsque j'encadrais des candidats qui avaient réussi le concours, les effectifs étaient constitués à 96 % de femmes, et je pense que c'est toujours le cas. Que pensez-vous mettre en oeuvre pour arriver, non pas à la parité, mais pour que nos enfants voient aussi quelques enseignants de sexe masculin au cours de leur formation ?
(Mme Catherine Vautrin remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)
Je voulais intervenir sur les qualités personnelles, qu'il me semble inhabituel de pouvoir apprécier lors d'un recrutement en même temps que les qualités professionnelles correspondant à un métier. Lorsqu'on rencontre un étudiant en entretien, quelqu'un qui a réussi un concours, il est bien difficile de définir ses qualités personnelles. Une telle évaluation dépend de l'appréciation de chacun, sans compter que certaines qualités personnelles se révéleront à l'exercice du métier.
S'agissant de la parité, M. Marc pose un faux problème.
Avec cet amendement, j'ai conscience d'ouvrir une brèche, de heurter profondément les habitudes pour ne pas dire le code génétique de la pensée socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Et pourtant, c'est une vraie et juste question. Évidemment, vous n'allez pas dire à un candidat qui a réussi le concours : nous ne pouvons pas vous attribuer de poste parce que vous n'avez pas les qualités personnelles requises. Mais dans l'élaboration même du concours, je pense qu'il faut laisser une part à l'appréciation de ce que peut donner, en situation d'enseignement, un candidat.
Il faut se poser cette question-là. Vous savez comme moi que la profession compte des enseignants qui ont eu de brillants résultats au concours et qui se révèlent être de très piètres pédagogues.
Je pense qu'il faut que l'on puisse se poser cette question. Je crois volontiers que l'on apprend à devenir un bon professeur mais il faut aussi reconnaître que certaines personnes, en dépit d'un apprentissage sérieux, ne deviendront jamais de bons enseignants.
Au moment où l'on recrute, il faut se poser cette question. Elle n'est pas taboue ; elle fait partie des éléments de la refondation de l'école.
Ma chère collègue, bien évidemment, dans un contexte où l'on a supprimé la formation professionnelle, on peut entendre ce que vous dites : nous sommes devant des hommes et des femmes qui possèdent un haut niveau universitaire mais auxquels on n'a pas dispensé de formation professionnelle. On peut donc s'interroger sur leur capacité à être devant une classe. À partir du moment où l'on rétablit une formation professionnelle…
… c'est justement à elle de faire en sorte que ces hommes et ces femmes soient en capacité de faire oeuvre pédagogique et de transmettre les connaissances acquises grâce à leurs diplômes universitaires.
Aller plus loin serait nier le diplôme et ouvrir la porte à toutes les dérives sur des considérations personnelles dont je ne vois pas très bien le contour.
Quant au problème évoqué par M. Marc, il n'est pas secondaire. Pourquoi y a-t-il 96 % de femmes dans les concours, notamment pour exercer dans le premier degré ? Premièrement parce qu'à force de dévalorisation, le métier de professeur des écoles est perçu comme une profession permettant de gagner un salaire d'appoint. Deuxièmement, comme les femmes sont encore cantonnées aux tâches domestiques et qu'elles doivent s'occuper des enfants, elles sont concentrées dans les professions où il y a ouverture de certains congés.
C'est un vrai problème, mais que l'on combattra par la revalorisation de la profession et par l'augmentation des salaires.
Ajouter les qualités personnelles, c'est n'importe quoi, selon le rapporteur.
Ce n'est pas n'importe quoi. D'ailleurs, nous sommes plusieurs à prendre la parole sur cette question des qualités professionnelles et personnelles des candidats, parce que chacun reconnaît que c'est important.
Je suis d'accord avec vous sur le fait que des qualités peuvent tout à fait se révéler au fur et à mesure des années. Mais il existe aussi des cas, et vous en avez certainement rencontré en tant qu'enseignant ou parent d'élève, où l'on entend dire : cet enseignant est excellent dans sa matière mais il n'arrive pas à la faire passer à ses élèves et il manque de pédagogie.
Il y a un énorme travail à faire. Cet amendement est intéressant parce qu'il fait prendre conscience à la représentation nationale qu'il y a là un vrai sujet. Dans toute vie professionnelle – et les enseignants ont un très beau métier – on parle du savoir, qu'ils ont, du savoir-faire, qu'ils exercent, mais aussi du savoir-être, qui est essentiel dans la transmission. C'est dommage que vous ne votiez pas pour cet amendement qui est extrêmement intéressant.
Madame Genevard, votre amendement heurte aussi le code génétique de la pensée radicale.
Oui, ça existe et ça existait bien avant que vous soyez sur ces bancs, monsieur Myard. L'école dont nous parlons, les radicaux y sont pour beaucoup plus que vous ne pensez.
Cet amendement nous paraît introduire une subjectivité totale dans une appréciation qui doit être objective. Il montre qu'il existe une bonne différence entre la droite et la gauche.
Madame Genevard, vous ne manquez jamais une occasion de nous faire la leçon. Cette fois-ci, vous avez parlé du code génétique de la gauche. Comme nous, le monde enseignant a compris depuis longtemps quel était le vôtre…
… et nous avons vu votre politique. Vous continuez, en parlant de valeurs personnelles, à vous méfier des enseignants. C'est la défiance vis-à-vis des enseignants qui est permanente chez vous, notamment s'agissant du second degré.
Nous avons parlé de formation et nous allons continuer à en parler. Les qualités personnelles d'un enseignant – je l'ai été moi-même – dépendent d'abord de sa formation professionnelle.
J'ai été sensible à la proposition de Mme Bechtel tout à l'heure : il est très important, et M. le ministre a donné des assurances en ce sens, qu'il y ait un équilibre entre la formation universitaire et la formation professionnelle. C'est à partir de là que l'on forgera vraiment les qualités personnelles, et donc professionnelles des enseignants – un bon enseignant, c'est l'ensemble des deux. En tout cas, si vous voulez vraiment avec nous refonder l'école, je pense que vous devriez arrêter ces discours de défiance à leur encontre.
Mme Le Callennec a dit à l'instant que les connaissances n'étaient pas suffisantes, et nous avons effectivement tous rencontré des enseignants qui étaient excellents dans leur discipline mais qui avaient du mal à transmettre leur savoir. Mais c'est justement la raison pour laquelle sont créées les écoles supérieures du professorat et de l'éducation ! Elles doivent aussi former les enseignants à leur futur métier, faire en sorte qu'ils deviennent capables de transmettre leur savoir.
Finalement, je prends cet amendement d'abord comme la reconnaissance de la nécessité de rétablir cette formation professionnelle, ou pédagogique. Avec les ESPE, après l'obtention du concours, les futurs enseignants seront stagiaires pendant un an. Ils auront l'occasion d'être évalués, accompagnés et à la fin, ils seront titularisés ou non. Pendant toute cette année, on mesurera leurs capacités professionnelles.
Car c'est bien cela qu'il faut mesurer : sont-ils en capacité d'exercer leur métier ? Il s'agit de capacités professionnelles. Si vous introduisez une dimension personnelle, se pose immédiatement la question de ce que peuvent être les qualités personnelles : le mode de vie ? Les relations ? Cela pourrait mener, me semble-t-il, vers une dérive très grave.
La capacité, la qualité professionnelle d'un enseignant comprennent à la fois le savoir – connaissances disciplinaires –, le savoir-faire – capacité de transmettre –, et éventuellement peut-être, mais cela me paraît très subjectif, quelques qualités personnelles.
Mais vous ne pouvez pas poser d'un côté la capacité et la qualité professionnelle et de l'autre l'aptitude personnelle ! C'est une méconnaissance totale du métier d'enseignant.
(L'amendement n° 1139 n'est pas adopté.)
Cet amendement a pour objectif de modifier l'alinéa 65, selon lequel les ESPE seront dirigées par un directeur nommé conjointement par les ministres de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur.
Vous voulez placer ces écoles à l'intérieur du système universitaire. Or, il est tout de même de tradition de maintenir un minimum de concertation au sein de ce système ! Qu'un président d'université ait dans son périmètre une école dont le directeur a été nommé par deux ministres sans qu'il ait eu le moins du monde à se prononcer, c'est une rupture fondamentale avec les traditions universitaires, et cela montre d'ailleurs une méconnaissance du fonctionnement universitaire.
La majorité précédente avait insisté sur cette question de la nécessaire liberté et de la responsabilité de nos universités. Il est essentiel qu'à tout le moins, le président d'université puisse être consulté. C'est l'objet de cet amendement, qui prévoit que la nomination aura lieu après avis du président d'université. C'est une simple question de bonne gestion universitaire et de philosophie générale appliquée à notre système universitaire.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l'amendement identique n° 637 .
Je rappelle en effet que l'une des grandes lois de la législature précédente a été celle sur l'autonomie des universités. On sait quel rôle majeur joue le président de l'université de ce point de vue. La loi Fillon avait prévu que les IUFM seraient intégrés dans l'université, et il est maintenant confirmé que les ESPE le seront aussi. Dans ce contexte, nous ne demandons pas que le président de l'université participe à la nomination du directeur, mais qu'il puisse donner son avis. Cela semble élémentaire.
Défavorable, pour deux raisons. La première, c'est que le directeur de l'ESPE remplit une mission d'État et qu'il est tout à fait normal qu'il soit nommé par ses deux ministres de tutelle, celui de l'éducation nationale et celui de l'enseignement supérieur. La seconde, c'est que, certes, les ESPE seront partie intégrante de l'université, mais qu'elles pourront être une composante de plusieurs universités à la fois ! Si l'on demande à chaque fois leur avis à tous les présidents d'université concernés, ils risquent de ne pas être d'accord entre eux. Cet amendement pourrait donc institutionnaliser une sorte de désordre qui paralyserait les écoles. Le terme d'école n'est à ce propos pas neutre : ce ne sont ni des instituts, ni des centres de formation. Il faut y développer un esprit d'école, je l'ai dit dans mon intervention liminaire, et cela demande d'abord une certaine cohérence. Votre proposition risquerait de bloquer leur fonctionnement.
De nombreux amendements vont dans le même sens. Cette proposition ne correspond pourtant pas à une demande de la conférence des présidents d'université. Il y a une raison à cela : c'est que traditionnellement, les présidents d'université ne se mêlent pas de la nomination des directeurs de composantes. Ils sont présents au conseil d'école, et cela suffit.
Le grand désordre de ces dernières années résulte précisément de l'incapacité à organiser entre les deux ministères concernés, et dans le cadre de l'autonomie des universités, une formation professionnelle, que le ministère employeur a tout de même quelque droit à superviser et à piloter ! Nous essayons de rattraper cela. C'est pourquoi les deux ministères, travaillant conjointement, ont mis en place un processus d'accréditation qui permet de garantir, tout en respectant évidemment le fait que les ESPE soient une composante universitaire, une identité de la formation professionnelle des enseignants dans ce pays. Nous considérons en effet que c'est un des moyens d'assurer la réussite de tous.
Bref, la demande n'existe pas, cette mesure créerait du trouble et les présidents sont au conseil d'école.
Nous entrons là dans une discussion éminemment importante. Il y avait un choix à faire : créer les écoles en dehors de l'université ou en son sein. Malheureusement, j'ai le sentiment que vous restez dans l'entre-deux. Vous les placez au sein des universités, mais en leur donnant de fait toute l'indépendance des anciennes facultés – par exemple par le fait d'appartenir à plusieurs universités, ou de ne pas dépendre hiérarchiquement du président de l'université. Bref, vous ne menez pas le choix à son terme.
Le débat est vraiment profond. Vous savez comme moi que l'université – j'entends par là le niveau universitaire – a toujours été le parent pauvre de notre enseignement supérieur. Historiquement, le pouvoir a toujours été soit ministériel, soit au niveau des facultés. Le pouvoir universitaire en tant que tel a toujours été très faible. Le principe, l'objet même de la loi LRU, relative aux libertés et responsabilités des universités, était de remonter une partie du pouvoir des facultés vers le niveau universitaire et de redescendre vers lui une partie du pouvoir ministériel, afin de faire de l'université la pierre angulaire du système d'enseignement supérieur français.
Ce choix-là n'est pas remis en cause, je crois, par votre majorité, en tout cas pas dans vos déclarations. Mais en créant des écoles qui semblent se trouver au sein de l'université mais qui sont totalement autonomes, vous allez à l'encontre de ce principe. Vous verrez malheureusement se faire jour des demandes reconventionnelles d'autres entités des universités, les IUT par exemple, qui voudront le même régime.
Car il y a, me semble-t-il, deux questions à trancher : celle que pose l'amendement – avis ou pas du président de l'université – mais surtout celle de la fongibilité budgétaire. Autrement dit, le budget sera-t-il directement fléché vers les écoles, ce qui signifierait que vous retourniez vers le principe des anciennes facultés que la loi LRU a voulu supprimer, ou sera-t-il mis à la disposition des universités qui effectivement, selon le principe de fongibilité, pourront l'attribuer comme elles l'entendent ?
On est effectivement là au coeur du débat. Vous dites que ces écoles seront à l'intérieur du système universitaire, mais en réalité vous les installez à côté.
Cela pose un problème de principe. En effet, comme l'a indiqué fort judicieusement Benoist Apparu, la loi LRU avait la volonté de développer une politique à l'échelle des universités. Or votre texte donne, avec la nomination ministérielle, une supra-légitimité aux directeurs des écoles.
Ce qui m'amène à un argument simplement pratique – et l'on voit que de toute évidence vous ne vous êtes pas penchés sur le fonctionnement concret de notre système universitaire. En effet, le directeur d'école pourra engager un bras de fer avec le, ou éventuellement les présidents d'université. Il se référera, vous pouvez en être certain, à cette légitimité. Il fera valoir qu'il aura été nommé par les deux ministres et dira au président qu'il n'a pas de compte à lui rendre. Dès lors, expliquez-nous comment l'on pourra développer une véritable politique d'ensemble à l'échelle de l'université !
Franchement, je crois que sans vous en rendre compte, vous être en train d'organiser le démantèlement du système universitaire. Tout ce qui a été fait au cours des dernières années va être battu en brèche. Et vous ne vous rendez pas compte non plus que la direction dans laquelle vous vous engagez ne correspond pas du tout aux orientations internationales. Vous voulez redonner du pouvoir au ministre – ce que je comprends venant d'un ministre ! – mais cela ne va pas du tout dans le sens de l'histoire. Je crois qu'il faut combattre une telle orientation. Ce n'est pas de bonne politique.
Je ne comprends pas, monsieur le ministre, que vous restiez sur votre position.
Encore une fois, si l'école est à l'intérieur de l'université, je ne vois pas pourquoi refuser de demander l'avis du président – un avis consultatif. Sinon, comme viennent de le dire nos collègues Hetzel et Apparu, cela risque de créer des antagonismes entre le directeur de l'école et le président de l'université.
Il paraît plus intelligent de le consulter avant la nomination, pour éviter des problèmes entre les deux organismes. Je pense qu'il serait utile de réfléchir à cette proposition. En tout cas, pour ma part, je la soutiens.
Je tiens à le dire : je suis, au contraire, favorable à une certaine autonomie de ces écoles. J'ai déjà pu voir comment les choses pouvaient se passer lors du rattachement des IUFM aux universités. La culture de l'université en France n'est pas forcément une culture professionnelle, ni professionnalisante.
C'est un peu réducteur, mais on a pu voir, par exemple sur le plan des nominations, que ce n'était toujours la dimension pédagogique des anciens IUFM qui était favorisée. J'ai pu le constater directement en Bretagne.
Si l'on veut que les enseignants soient bien formés sur le plan pédagogique, il faut que ce soit un objectif prioritaire pour ces écoles, qui ont donc besoin de cette indépendance.
(Les amendements identiques nos 602 et 637 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisie d'une nouvelle série d'amendements identiques.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 458 .
Ce débat montre que la question de la création des ESPE mérite une attention tout à fait particulière et doit être l'objet d'une discussion spécifique.
Cher collègue Molac, vous avez insisté sur ce qui peut se passer en Bretagne. Cela dit, s'il s'agit créer des écoles autonomes à l'intérieur des universités, eh bien, dites-le, mais alors vous êtes en train de recréer les IUFM.
Le système universitaire a beaucoup oeuvré, ces dernières années, pour que la question de la professionnalisation, puisque vous l'évoquez, soit davantage prise en compte. Je veux d'ailleurs rendre hommage aux universitaires, qui se sont fortement impliqués pour faire en sorte que cette professionnalisation ne se fasse pas simplement à côté du système universitaire, mais que celui-ci la prenne pleinement en compte.
C'est pourquoi je défends le présent amendement, dont l'objet est d'insérer, après l'alinéa 65, l'alinéa suivant : « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er février 2014, un rapport faisant le point sur la mise en place des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE). » Ainsi pourrons-nous en discuter car, finalement, c'est bonne foi contre bonne foi. Nous défendons un point de vue, vous en défendez un autre. Faisons donc le bilan dans un an, voyons si cela fonctionne ou pas, voyons si l'on peut améliorer les choses, car c'est le type même de question qui ne peut être l'objet d'approches dogmatiques. L'intérêt général, c'est de faire en sorte que l'on puisse améliorer les choses.
Je suis toujours frappé, dans la crise que traverse aujourd'hui l'école, que certains enseignants veuillent isoler l'école de la société. Les élus locaux ont par exemple eu beaucoup de mal à y faire entrer des intervenants extérieurs, notamment lorsqu'il était question de problèmes de drogue. « Non, chez nous, cela n'existe pas », nous répondait-on, comme s'il existait une sorte de cloisonnement.
Ce matin, j'entends dire qu'il faut que ces écoles supérieures du professorat et de l'éducation soient totalement autonomes. Ma crainte est que, fonctionnant avec leur propre logiciel, elles en viennent à ignorer l'université. Cela me paraît nous exposer au risque d'une incompréhension entre l'école et la société, entre l'école et, notamment, les parents d'élèves. C'est pourquoi je pense que ces écoles doivent effectivement baigner totalement dans l'ensemble du corps enseignant dans les universités.
Comme vous aimez beaucoup le Parlement – cela se voit –, vous aurez à coeur, monsieur le ministre, de le renseigner sur le déroulement de la mise en place de ces écoles. Alors, nous pourrons en juger ensemble.
Même avis qu'à propos des précédentes demandes de rapport, donc défavorable si les amendements ne sont pas retirés, d'autant que l'article 60 du projet de loi a pour objet de créer un comité de suivi qui remet un rapport intégrant toutes ces questions.
Ce n'est pas la volonté de mettre en concurrence les universités les unes avec les autres qui préside à la création des ESPE. On l'a déjà été trop fait. L'idée est de suivre une logique de coopération et d'intégration, de créer des écoles qui s'inscrivent pleinement dans le cadre des universités – les UFR y joueront notamment un rôle et le budget des écoles sera intégré à celui des universités –, tout en assurant une formation professionnalisante des enseignants. La France n'a, jusqu'à maintenant, pas été capable de le faire, et j'ai toujours pensé que ce serait extrêmement difficile, l'héritage étant ce qu'il est.
Vous avez vous-mêmes exprimé, dans le fil de la discussion parlementaire, le souhait d'une implication forte des enseignants qui exercent déjà, sur le terrain, dans la formation des enseignants. Nous avons bien vu ces dernières années – vous avez fait assez de reproches aux IUFM – qu'il n'est pas toujours simple de croiser les cultures et de parvenir à un équilibre entre l'excellence disciplinaire, qui, avec un recrutement, tout de même, de niveau master 1 ou master 2, sera toujours garantie par l'université, et l'implication dans de telles écoles de ceux que l'on peut appeler les praticiens. Je remercie d'ailleurs la communauté universitaire, qui fut quelque peu traumatisée, et qui s'est rapidement mobilisée, car elle sait que nous devrons quand même accueillir 40 000 jeunes à la rentrée.
Ces écoles supérieures sont en train de se construire, avec l'implication des recteurs mais aussi en associant les présidents d'université dans une logique extrêmement coopérative. Certes, il y a deux ou trois problèmes, liés à des concurrences entre universités qui préexistaient à ce projet. Cela ne simplifie pas la mise en place des écoles supérieures, mais, dans l'ensemble, les choses se passent très bien, dans la coopération.
Vous demandez si cette formation ne méritera pas d'être améliorée au fil du temps. Hier, l'un d'entre vous n'avait de cesse que nous ajoutions l'adverbe « parfaitement » au rapport. Mais la culture humaniste, dont nous avons parlé, n'est pas celle de la perfection, c'est celle de la perfectibilité ! J'en suis tout à fait conscient : les ESPE devront s'améliorer au fil du temps. Je suis cependant déjà heureux à l'idée qu'elles seront en place à la rentrée 2013 ; ce n'était pas évident. Nous aurons à y revenir et, le cas échéant, à procéder à des ajustements, notamment en matière de gouvernance, puisque les problèmes de gouvernance ont littéralement colonisé le champ de la réflexion sur l'université ces dernières années, mais aussi en ce qui concerne les contenus, car tout n'est pas qu'affaire de gouvernance. Il sera effectivement difficile d'ajuster la qualification professionnelle de l'enseignant – avec tutorat, stage et présence sur le terrain – et, en même temps, la qualité disciplinaire, la recherche en éducation et la présence aux ESPE ; j'ai entendu beaucoup de choses à ce propos, et nous aurons l'occasion d'en reparler. Cela dit, notre modèle va dans le bon sens, et il est bien accueilli par les universitaires. Sachons-le reconnaître car c'est de bon augure, alors que le sujet, nous le savons les uns et les autres, n'est pas simple.
Si vous acceptez le principe d'un rapport au Parlement, je ne comprends pas pourquoi vous n'acceptez pas ces amendements identiques. Une telle attitude semble habituelle, mais j'ai toujours du mal à comprendre.
La représentation nationale a effectivement besoin d'un rapport, d'un rapport complet qui évalue jusqu'aux conséquences des décrets qui seront pris. J'imagine qu'il y en aura toute une série, qui suivront l'adoption de ce projet de loi, même si le décret sur les rythmes scolaires est paru avant l'examen de ce texte – je m'interroge aussi à ce propos. Il me semble important que nous allions dans le détail des choses. Il faut que vous nous apportiez la preuve que ces écoles supérieures sont la réponse à tous les problèmes qui n'auraient pas été correctement réglés auparavant. Nous avons besoin de critères objectifs.
Parlons notamment de la titularisation, que notre collègue évoquait tout à l'heure. Après un an de stage, l'enseignant recruté sera titularisé, ou ne le sera pas. Je suppose qu'une liste de critères permettra de prendre cette décision.
Ces questions ne sont pas anodines. Par nos amendements, nous vous demandons une parfaite transparence. Vous restez, certes, modeste, monsieur le ministre, car vous reconnaissez que des améliorations, des ajustements seront sans doute nécessaires au fil du temps. Encore faut-il, pour cela, que des critères assez précis soient définis.
Par ces amendements, nous vous demandons un rapport très précis et qu'il comporte des critères d'évaluation objectifs.
J'étais l'auteur d'un amendement identique n° 897 , sur lequel nous sommes passés un peu vite (Sourires), et je veux souligner la nécessité de ce rapport. En effet, la mise en place de ces écoles supérieures se fera quelque peu à un rythme accéléré. C'est le calendrier que vous avez choisi, dont acte, mais il importe que nous puissions faire le point.
Vous prétendez, monsieur le rapporteur, que vous êtes défavorable à ces amendements identiques parce que vous refusez tout rapport. Le problème est que vous avez fait une exception ! En effet, en commission, vous avez accepté un amendement n° 584 à l'article 30 bis, proposé par notre collègue Buffet. Ainsi, aux termes du texte de la commission, « le Gouvernement, en lien avec les inspecteurs d'académie, effectue un état des lieux annuel de la situation des écoles maternelles. Cet état des lieux est communiqué sous forme de rapport annuel aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Le Gouvernement remet également aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport annuel spécifique sur la scolarisation des enfants de deux ans à trois ans, faisant notamment état des demandes de scolarisation et de la prise en compte de celles-ci dans les effectifs. » Cet amendement a-t-il été accepté au motif qu'il émanait des rangs de la majorité ? Est-ce parce que les amendements identiques que nous examinons présentement émanent de l'opposition que vous les refusez ? Si ce n'est pas le cas, soyez cohérent, monsieur le rapporteur, et proposez la suppression de la disposition que je viens de citer.
Il faut être cohérent, quand on avance un argument. Ce n'est, en l'occurrence, pas votre cas.
Le rapport que vous citez est un rapport annuel, qui sera pérennisé. Je vous le dis sans animosité, monsieur Breton, car nous nous connaissons suffisamment, nous avons même rédigé ensemble des rapports d'information : vous ne pouvez pas prétendre que je refuse les rapports. Je les intègre au travail du comité de suivi, pour leur donner toute la force, la vigueur et la pertinence qui doivent être les leurs.
La discussion a clairement montré qu'il s'agit d'une question sensible, à la fois pour l'éducation nationale et pour l'enseignement supérieur. Créer des écoles autonomes au sein même de l'université posera un certain nombre de problèmes, dont je viens de faire état. C'est pourquoi nous ne pouvons pas simplement nous en tenir au droit commun et nous contenter du comité de suivi. La question est d'une telle acuité, d'une telle sensibilité qu'elle mérite un rapport spécifique au Parlement.
D'ailleurs, il eût également été intéressant que Mme la ministre de l'enseignement supérieur nous donnât son point de vue. Vous faisiez allusion, monsieur le ministre, de manière un peu malicieuse aux rapports entre l'enseignement supérieur et l'éducation nationale. Or, lorsque j'interroge un certain nombre d'universitaires, ils me disent que l'éducation nationale ne tient pas suffisamment compte de la culture universitaire. La conférence des présidents d'université ne vous en a pas fait part, disiez-vous, mais interrogez donc le terrain. Vous constaterez certaines choses. Pour ma part, j'entends dire que le Gouvernement méprise les universitaires. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Il s'agit encore d'un amendement très modéré. (Sourires.) Il s'agit tout simplement de procéder à la suppression des alinéas 66 à 79 du rapport annexé.
Moins de dix ans après sa création par la loi Fillon de 2005, ce projet de loi supprime le Haut conseil à l'éducation, pour créer une instance bicéphale, comprenant d'un côté le Conseil supérieur des programmes, et de l'autre le Conseil national d'évaluation du système éducatif.
Une contradiction très frappante apparaît, concernant la question des programmes. Je vous engage à relire les missions confiées à l'Inspection générale : elle a précisément pour rôle de préparer les programmes. Le texte que vous présentez pose donc, au minimum, un problème très important par rapport aux missions de l'Inspection générale. Je voudrais donc vous poser une question centrale : avec la suppression du Haut conseil de l'éducation – que je condamne bien évidemment – et la création de ces deux nouvelles instances, quelle place accorderez-vous à l'Inspection générale ? Là aussi, un conflit risque d'apparaître entre les missions du Conseil supérieur des programmes et celles de l'Inspection, telles qu'elles sont prévues par des textes de rang législatif aussi bien que réglementaire.
À moins que des dispositifs réglementaires concernant l'Inspection générale soient en préparation ? Dans ce cas, j'aimerais les connaître !
Monsieur le député, vous faites erreur : c'est plutôt le Haut conseil de l'éducation qui était bicéphale ! Nous envisageons la création de deux structures dont le rôle – M. le ministre s'est exprimé sur ce sujet tout à l'heure – est tout à fait différent. L'une s'occupe des programmes : nous ne faisons que la rétablir, puisque le Conseil supérieur des programmes avait été supprimé à tort par la loi d'orientation et de programmation pour l'avenir de l'école de 2005. L'autre se charge de l'évaluation : son rôle est donc totalement différent. Comme vous l'avez rappelé vous-même ce matin, cette dernière structure doit être indépendante. Ces deux structures ne sont donc pas redondantes, bien au contraire.
Une réflexion sur les programmes et les savoirs est nécessaire : nous en avons d'ailleurs parlé ce matin. Chacun de nous l'a bien saisi : nous sommes tous d'accord sur ce point. Le Conseil supérieur des programmes est à cet égard un outil absolument essentiel. D'un autre côté, tout le monde a également insisté sur l'évaluation, vous le premier, monsieur le député ! Il est donc logique d'instituer un Conseil national d'évaluation du système éducatif, dont le rôle est tout à fait différent de celui du Conseil national des programmes. La création de ces deux structures, loin de mettre en place un système bicéphale, répond à la préoccupation de séparer la réflexion sur les programmes de celle sur l'évaluation. Ces deux réflexions doivent être indépendantes et différentes, car leurs rôles sont différents. L'avis de la commission est donc défavorable.
Je dois dire que, depuis le début de nos échanges, cet amendement est le seul que je ne comprends pas. Je comprends beaucoup des éléments que vous avancez, nombre de vos interpellations et de vos demandes de précisions. Mais il me semblait que cette mesure était tellement simple, de bon sens et consensuelle, qu'elle ne soulèverait pas de difficulté. Tout le monde a fait la même analyse ces dernières années, y compris le Haut conseil à l'éducation lui-même. Celui-ci a souffert, dès l'origine, d'un vice de construction : on ne peut confier au même organisme la prescription et l'évaluation. Il faut donc revenir à des organismes distincts, qui ont d'ailleurs déjà existé et assez bien fonctionné. Cela permettra d'éviter des polémiques comme celle qui a eu lieu au sujet des programmes de 2008, par exemple, et que nous devrons trancher.
Tout d'abord, le Conseil supérieur des programmes fera son travail auprès des ministres, mais avec des garanties d'indépendance. Pour nous tous, le problème majeur est celui de l'articulation du socle, des programmes et de l'évaluation. Comme j'ai eu l'occasion de le dire dès la discussion générale, j'ai tendance à considérer que cette tâche constituera l'essentiel de notre activité pour les deux ou trois années à venir, une fois que le processus législatif en cours sera terminé. Comme vous l'avez fort bien dit vous-même, en fin de compte, l'important c'est ce qui se passe entre un maître et ses élèves. C'est à ce moment-là qu'intervient la transmission des connaissances.
Ensuite, l'évaluation doit être maintenue ; nous devons la rendre la plus rigoureuse et la plus indépendante possible. Elle ne doit pas relever de la prescription. Ces deux conseils me semblent donc avoir des fonctions très clairement identifiées. Ils règlent une question qui ne l'était pas. Nous pourrions nous accorder, sereinement, sur ce progrès !
Monsieur le ministre, j'entends bien vos arguments, mais un point reste non résolu. Même si nous étions d'accord sur le diagnostic – ce qui n'est pas tout à fait le cas, mais admettons – pourquoi ne ferions-nous pas simplement évoluer les attributions et les missions du HCE, plutôt que de créer deux instances distinctes ? Voilà un premier point sur lequel je n'ai pas de réponse.
Par ailleurs, à propos de l'évaluation, vous disposez d'une direction spécialement consacrée à cette question. Vous l'avez déjà dit vous-même, tout comme le rapporteur. Il s'agit de la fameuse DEPP, la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance. Le rôle de cette direction est précisément de réaliser des évaluations ! Par surcroît, la Cour des comptes elle-même est en charge d'un certain nombre de questions ayant trait à l'évaluation en matière éducative. Nous y avons souvent fait référence au cours de nos débats.
Je pense donc qu'en réalité, la création de ces deux instances n'est pas bonne pour nos finances publiques, et que ce dispositif n'est pas adéquat aux enjeux qui se posent. Il ne répond pas correctement à votre diagnostic que nous pourrions, sous certaines réserves, partager.
(L'amendement n° 73 n'est pas adopté.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite du projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures dix.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron