La commission poursuit l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2016 (n° 3096) (Mme Valérie Rabault, rapporteure générale).
Ce matin, nous avons examiné soixante et un amendements. Il n'en reste donc plus que 252.
Article 4 : Limitation des effets de seuils dans les TPE et les PME
La commission est saisie de l'amendement I-CF104 de M. Charles de Courson.
Lorsque le Gouvernement a donné son accord pour relever les seuils, le groupe UDI, qui a toujours défendu cette thèse, avait proposé de reporter les seuils de neuf et dix salariés à vingt et un, et de cinquante à soixante. Nous félicitons le Gouvernement d'aller dans la bonne direction et d'amplifier le mouvement.
Monsieur de Courson, c'est un amendement d'inflation puisque vous augmentez le nombre de seuils. Nous allons en rester à la disposition prévue à l'article 4. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF104.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF105 de M. Charles de Courson.
Cet amendement vise à élever le seuil applicable à la désignation d'un délégué syndical, aux calculs des heures de délégation, à l'installation d'un comité d'entreprise, d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et à la mise en place d'une participation aux résultats dans l'entreprise. Augmenter les seuils est une chose. Encore faudrait-il les harmoniser…
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure générale, la commission rejette l'amendement I-CF105.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF106 et I-CF108 de M. Charles de Courson.
Il s'agit d'amendements de repli.
L'amendement I-CF106 vise à porter à vingt et un salariés le seuil d'élection des délégués du personnel.
L'amendement I-CF108 a le même objectif, mais l'application des dispositions est limitée à une durée d'un an à compter de la promulgation de la présente loi. L'un des problèmes de l'article est qu'il fixe la limite à trois ans. Sait-on comment revenir, au bout de trois ans, au seuil antérieur ? Les gens ont besoin de visibilité. Cette limite fixée à trois ans n'est pas cohérente. Ces mesures ne seront pas efficaces, alors que, pour une fois, elles vont dans la bonne direction.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure générale, la commission rejette successivement les amendements I-CF106 et I-CF108.
Puis elle adopte l'article 4 sans modification.
Article 5 : Augmentation du plafond de la provision déductible à l'impôt sur les sociétés des groupements d'employeurs
La commission adopte l'article 5 sans modification.
Après l'article 5
La commission est saisie de l'amendement I-CF295 de Mme Eva Sas.
Une catégorie de jeunes, un peu plus qualifiés que ceux visés par le dispositif, n'est pas concernée par le système des emplois d'avenir. Avec un coût de 6 000 euros par an et par emploi – contre 10 000 pour un emploi d'avenir –, cette mesure serait de nature à faciliter l'embauche de ces jeunes et à leur mettre le pied à l'étrier.
Vous proposez d'octroyer un crédit d'impôt sur les sociétés à des organismes qui en sont exonérés, ce qui revient à une subvention brute. Vous m'opposerez qu'un dispositif de même type existe déjà en faveur des organismes s'occupant de logement social en outre-mer, mais nous souhaitons éviter de répéter ce schéma.
Cet amendement a déjà été rejeté l'an dernier. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF295.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF364 à I-CF366 de M. Alain Fauré.
Ces trois amendements visent à revenir sur le dispositif plus communément connu sous le nom de « niche Copé ». L'amendement I-CF365 vise à substituer au taux de 8 % le taux de 19 %. Les deux autres sont de repli.
Je suis favorable à l'esprit des amendements que vous proposez. Toutefois, ces amendements sont placés dans la première partie du projet de loi de finances, ce qui est inadéquat. Ils devraient être déposés en seconde partie pour éviter l'application du dispositif dès les revenus générés en 2015.
Concernant les différents taux que vous proposez, il faut que nous approfondissions un peu plus ces amendements. Soit vous les retirez maintenant pour les redéposer en séance, soit, à ce stade, je donne un avis de sagesse.
Placés en première partie, ces amendements ne seront pas rétroactifs, mais ils relèveront de ce que l'on appelle la « petite rétroactivité », c'est-à-dire qu'ils s'appliqueront aux exercices clos à compter du 31 décembre 2015, et donc à la totalité des exercices civils sur l'année 2015. C'est très ennuyeux pour des opérations patrimoniales qui ont été faites sous l'empire d'une certaine fiscalité et qui n'auraient pas eu lieu si cette fiscalité avait été – comme en l'occurrence – multipliée par quatre.
Nous avons débattu de la question pendant des années. Que l'on soit pour ou contre l'« amendement Copé », on doit avoir conscience que, si l'on revient sur cette mesure, cela aura pour conséquence un gel total des opérations. Les grands groupes ne feront plus leurs opérations en France et cela accentuera la délocalisation des sièges.
Madame Pires Beaune, je vous invite à relire le rapport que Lionel Jospin avait commandé à Michel Charzat en 2001 et à la suite duquel cette décision avait été prise. Jusque-là, les opérations de cession de titres de participation se faisaient systématiquement à l'étranger, notamment aux Pays-Bas.
Les amendements I-CF364 à I-CF366 sont retirés.
La commission en vient à l'amendement I-CF129 de M. Charles de Courson.
Au lieu de se concentrer sur la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), il eût été préférable que le Gouvernement prenne des mesures en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) en réduisant progressivement le taux de l'impôt sur les sociétés de 15 à 10 %, dans la limite du plafond de la première tranche des bénéfices, et qu'il n'y touche plus ensuite. Tout le monde reconnaît que ce sont, en grande partie, les petites et moyennes entreprises qui créent des emplois et développent ce pays. Au lieu de construire des usines à gaz, encourageons les PME !
Cet amendement, qui cible les PME, est intéressant. J'en avais déposé un dans le même esprit il y a deux ans : il visait à étendre à toutes les PME la taxation à 15 % des premiers 38 000 euros de résultat net. Aujourd'hui, elle ne concerne que les entreprises ayant un chiffre d'affaires de moins de 7,6 millions d'euros.
Toutefois, je vais donner un avis défavorable à votre amendement, monsieur de Courson, car de nombreux dispositifs ont été mobilisés. Ce matin, vous nous avez appelés à la vigilance sur l'ensemble des finances publiques. Des choix ont été faits qui profitent aux PME. Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) étant ciblé jusqu'à 2,5 SMIC, il profite d'abord aux PME et aux très petites entreprises (TPE). L'effort consenti par la Nation en faveur de ces entreprises est déjà considérable et l'état de nos finances publiques ne nous permet pas d'accepter votre proposition.
Le problème de cet amendement, c'est qu'il propose un allégement de la fiscalité sur les entreprises financé par un alourdissement significatif de la fiscalité sur les ménages – avec l'augmentation des droits sur le tabac. Si vous estimez, monsieur de Courson, que votre proposition est plus pertinente que d'autres, il eût été préférable d'indiquer, parmi les mesures que nous nous apprêtons à voter en faveur des entreprises, celle qui devrait être reportée ou différée pour financer celle que vous proposez.
J'en profite pour rappeler que, en 2016, les augmentations de fiscalité qui ont été votées par la précédente majorité et par la nôtre et qui ont pesé sur les entreprises depuis 2011 auront été effacées. À ce stade, nous avons de bonnes raisons de maintenir l'allégement, prévu en 2016, d'environ 1 milliard d'euros de C3S qui va toucher énormément de PME et de TPE, s'agissant d'un impôt sur le chiffre d'affaires dont tout le monde constate que ce n'est pas le plus intelligent. Je rappelle que, dans le pacte de responsabilité et de solidarité, la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés est prévue pour 2017.
Nous proposons cette année un paquet de 9 à 10 milliards d'euros d'allégements pour les entreprises en 2016 en ne reconduisant pas la surtaxe d'impôt sur les sociétés de 2,5 milliards d'euros. Nous aurons, en 2017, à débattre en particulier de la dernière tranche de C3S : si la mesure est votée par notre assemblée, il restera 3,5 milliards de C3S pour 20 000 entreprises. On peut poursuivre dans cette voie, on peut également annoncer que l'on va réfléchir à la manière de redistribuer ces sommes, soit par une baisse du taux général de l'impôt sur les sociétés, soit par une baisse ciblée sur les PME. Pour cela, je vous donne rendez-vous plutôt l'année prochaine.
J'ai eu ce débat en privé avec M. Sapin. Je lui ai dit que je ne comprenais pas ses choix fiscaux. Il est beaucoup plus intelligent et beaucoup plus efficace, avec la même somme, de baisser le taux de l'impôt sur les sociétés pour les PME et de revenir progressivement à des taux plus proches de la moyenne européenne, au-delà du seuil des 30 000 euros et quelques, que de s'échiner à éliminer la C3S. Il est vrai que c'est un impôt imbécile, mais, quand on n'a pas de marge de manoeuvre, il faut se fixer des priorités.
Je prends acte de ce qu'a dit Dominique Lefebvre et j'espère que, l'année prochaine, il m'appuiera pour en finir avec la C3S et passer à l'impôt sur les sociétés, en commençant par les PME, à coût inchangé.
La commission rejette l'amendement I-CF129.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF313 et I-CF311 de Mme Eva Sas.
Nous proposons d'abaisser le plafond de la fraction des dépenses éligibles au taux de 30 % du crédit d'impôt recherche (CIR) de 100 à 50 millions d'euros. Moins de 2 % des entreprises déclarent plus de 20 millions d'euros de recherche et développement (R&D) en France. A contrario, cela veut dire que près de 98 % des entreprises déclarent moins de 20 millions d'euros de R&D. Le plafond de 100 millions d'euros n'a donc de facto aucune raison d'être, alors qu'il occasionne une perte de revenu de 500 millions d'euros pour l'État. L'impact global de cet amendement se chiffrerait à hauteur de 1 milliard d'euros, somme qui pourrait être utilisée notamment pour financer la recherche publique.
Le dispositif du CIR est considéré au niveau européen comme une mesure de dumping fiscal, alors que nous sommes engagés dans la lutte contre l'évasion fiscale générée par les pratiques déloyales de certains pays. Le CIR nous permet de garder un certain nombre d'entreprises sur notre territoire, mais ce n'est pas très loyal non plus.
Vous ne pouvez à la fois déposer un amendement pour que l'on apprécie le plafond de dépenses au niveau du groupe consolidé, afin qu'il n'y ait pas de filiales qui multiplient à l'envi le plafond de 100 millions d'euros, et déposer celui-ci pour redescendre le plafond à 50 millions d'euros. Pour certaines entreprises industrielles, ce n'est pas raisonnable au regard de l'effort de recherche qu'elles font. C'est du point de vue économique que je ne partage pas votre sentiment. Avis défavorable.
Nous devons vivre avec le CIR tel qu'il existe jusqu'à la fin de la législature. Dans un contexte hyperconcurrentiel, nous n'avons pas intérêt à changer une virgule au système actuel, car toute déstabilisation pourrait avoir des conséquences extrêmement graves sur les investissements d'un certain nombre d'entreprises dans le domaine de la recherche et du développement.
On peut toujours en contester le bien-fondé, y compris dans le cas des grands groupes qui calculent le CIR à travers leurs filiales, mais il faut savoir que, s'il n'y avait pas ces dispositions, certains grands groupes ne pourraient pas mener à bien leur activité de recherche et développement dans des filiales dites « mineures ».
Le crédit d'impôt recherche est mal nommé : il s'agit en réalité d'un CICE pour les ingénieurs et les techniciens supérieurs. Il permet de rendre la masse salariale plus supportable, grâce à une réduction du coût des ingénieurs. Ceux qui l'ont conçu souhaitaient redonner de la compétitivité à la R&D dans les entreprises. L'objectif du CIR n'a jamais été de faire de la recherche académique, mais il a permis aux entreprises françaises les plus innovantes de rester en vie et d'être concurrentielles au niveau international.
Ne déstabilisons pas un système que nous envient de nombreux pays et qui rend la France très attractive. Certes, il faut se demander ce que nous ferons ensuite avec les start-up, car il s'agit bien de financer l'innovation. Je serais tenté de donner un coup de rabot sur le CIR, parce qu'il manque de l'argent ailleurs – notamment à la Banque publique d'investissement (BPI) et dans les pôles de compétitivité. Mais, pour l'instant, ne touchons pas au système.
À la constance de ceux de nos collègues qui, à chaque projet de loi de finances, déposent des amendements visant à modifier le CIR, répondra celle du groupe socialiste, républicain et citoyen, qui, depuis le début de la législature, a choisi de le maintenir en l'état et s'opposera à tous ces amendements.
Lors du dernier débat sur le sujet dans l'hémicycle, nous avons appris que, du fait des règles encadrant le marché commun, toute dépense de recherche réalisée dans l'Union européenne était éligible au crédit d'impôt recherche en France. J'espère bien que le CIR n'est pas le CICE des entreprises de technologie, et que vous n'allez pas m'apprendre qu'embaucher des gens en République tchèque donne droit au CICE en France – ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Madame la rapporteure générale, avez-vous pu avoir connaissance des sommes couvertes par un CIR alors qu'elles ne sont pas dépensées sur le territoire français ?
C'est un point crucial. Suite à la dernière loi de finances, j'ai fait plusieurs demandes concernant le CIR. Il s'élevait à 470 millions d'euros en 2002, à 3,4 milliards d'euros en 2012 et à 5,3 en 2015. Force est de constater que les dépenses de recherche n'ont pas progressé dans cette proportion.
J'ai en vain demandé à Bercy un tableau décomposant le montant du CIR entre ce qui est payé à des entreprises en France pour faire de la recherche en France et ce qui est payé pour faire de la recherche l'étranger. On m'a simplement communiqué les montants de CIR des cinquante premières entreprises qui le perçoivent : ce document, couvert par le secret fiscal, est imprimé sur cinquante pages et enfermé dans un coffre de la commission des finances. J'ai expliqué à Bercy que le Gouvernement encourageant la simplification et la productivité, il serait bon qu'on me fasse parvenir ces informations sous forme d'un fichier informatique, qui me permettrait de faire le tri entre ce qui est payé en France et qui l'est à l'étranger.
Je croyais qu'il y avait un accord entre tous les groupes politiques pour ne plus toucher au crédit d'impôt recherche. Ne bougeons plus jusqu'à la fin de la législature et réfléchissons.
Je confirme ce qu'a dit la rapporteure générale : il n'est pas interdit à une entreprise de sous-traiter pour partie sa recherche dans un institut tchèque ou allemand, et d'être éligible au CIR.
L'amendement I-CF311 propose de consolider les dossiers des différentes filiales au niveau du groupe pour éviter les cumuls et le découpage du CIR à travers l'ensemble des filiales. Il s'agit de centraliser les demandes et de réduire le CIR en conséquence.
J'y suis favorable. Mais, si l'on veut éviter la petite rétroactivité, mieux vaudrait déposer cet amendement en seconde partie du projet de loi de finances. Pour cette raison, je vous suggère de retirer l'amendement.
Nous avons eu ce débat pendant des années. Il est vrai que le fait de calculer entreprise par entreprise pose un problème au regard des groupes. Mais soyons pragmatiques ! Un tel amendement pénaliserait les grandes entreprises françaises les plus performantes, comme Airbus ou les groupes automobiles. Tout cela est très compliqué : il faut définir le périmètre du groupe, consolider l'ensemble des dépenses ; il peut y avoir des échanges de recherche à l'intérieur d'un groupe ; des centres de recherche financés par plusieurs entreprises du groupe ; la recherche peut se faire en interne ou en externe. On ne peut que souhaiter la neutralité de l'organisation des groupes au regard des impôts que nous votons. Cela étant, j'appelle votre attention sur les conséquences d'un tel amendement, qui vise à économiser 500 millions d'euros.
Ce que souhaitent nos entreprises, les petites comme les grandes, c'est la stabilité fiscale. Si nous touchons à ce dispositif, nous en revenons à l'instabilité. De grâce, arrêtons ! Redonnons confiance à nos entreprises !
L'année dernière, notre commission a adopté à la majorité des amendements remettant en cause le CIR, lesquels ont finalement été rejetés dans l'hémicycle. Cette manoeuvre a eu pour seul effet de générer des interrogations sur la permanence du dispositif. Je n'ai aucun élément qui me laisse penser que la position du groupe socialiste, républicain et citoyen ait changé par rapport à l'an dernier. Aussi, mieux vaut éviter d'adopter en commission des amendements qui seront rejetés dans l'hémicycle par le Gouvernement et par notre groupe.
L'amendement I-CF311 est retiré.
La commission rejette l'amendement I-CF313.
Puis elle en vient à l'amendement I-CF314 de Mme Eva Sas.
Cet amendement propose de conditionner le CIR d'un montant supérieur ou égal à 1 million d'euros à la création d'un poste à destination d'un docteur. Dans la plupart des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le doctorat est considéré comme un passeport pour les postes à responsabilité dans le secteur privé, du fait de l'autonomie des réseaux académiques et de l'ouverture à l'international de ces diplômes. En France, la séparation entre universités et grandes écoles a contribué à éloigner les chercheurs de la R&D, si bien que 9 % des titulaires d'un diplôme de doctorat sont en recherche d'emploi trois ans après leur soutenance de thèse, contre 2 à 4 % dans les autres pays de l'OCDE. C'est un gâchis énorme pour le développement économique de notre pays.
S'agissant du CIR, le dispositif « jeunes docteurs » existe déjà, avec la prise en compte des rémunérations des jeunes docteurs pour le double de leur montant dans l'assiette du CIR. Il convient de laisser un peu de liberté aux entreprises en ce qui concerne leur manière de mener leur R&D.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF314.
Article additionnel après l'article 5 : Application du doublement des dépenses prises en compte dans le cadre du crédit d'impôt recherche pour les opérations confiées aux instituts technologiques agricoles et aux instituts technologiques agro-industriels
La commission en vient à l'amendement I-CF217 de M. Charles de Courson.
C'est un petit amendement dont le coût est estimé à 3 millions d'euros. Après de longs débats, nous avons intégré dans le code de la recherche les centres techniques industriels (CTI). Mais nous avons oublié leurs équivalents dans le domaine de l'agriculture : les instituts technologiques agricoles (ITA) et les instituts technologiques agro-industriels (ITAI). Au total, ils sont trente. Cet amendement propose de rendre éligible au crédit d'impôt la recherche faite dans ces instituts.
Charles de Courson a raison. Cet avantage a été reconnu aux CTI uniquement via des rescrits fiscaux. Je confirme également le montant de 3 millions d'euros. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement I-CF217.
Article après l'article 5
La commission examine l'amendement I-CF312 de Mme Eva Sas.
Cet amendement vise à supprimer la possibilité de cumuler CIR et CICE.
Nous aurions intérêt à conduire une évaluation englobant le CIR et le CICE, puisque les deux dispositifs montent en puissance. Au total, nous allons arriver à un montant de 25 ou 26 milliards d'euros.
Nous avons déjà eu le débat l'an dernier. Les deux dispositifs ne visent pas tout à fait les mêmes objectifs. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF312.
La commission est saisie de l'amendement I-CF128
Il s'agit d'un amendement « hollandiste », qui vise à appliquer ce qu'a annoncé le Président de la République : le CICE est trop compliqué et il faut le remplacer par une baisse des cotisations sociales. Je partage entièrement cette thèse, que je défends depuis vingt-deux ans. Je cite les propos tenus le 6 novembre 2014 par le Président de la République : « Nous allons faire le CICE pendant trois ans ; ça va monter en régime, et après, en 2017, tout ce qui a été mis sur l'allégement du coût du travail, ça sera transféré en baisse de cotisations sociales pérennes ». Je ne puis qu'approuver de tels propos et je propose simplement d'anticiper d'un an. Je suis un « super hollandiste » !
Vous dites qu'il y a une montée en puissance, mais il y a toujours un recul. Les montants dus cette année aux entreprises seront effectivement délivrés dans deux ans.
Nous sommes aujourd'hui pris dans une mécanique infernale. L'État a une créance envers les entreprises et les derniers montants dus au titre de l'exercice 2012 seront versés en 2016. La transition ne peut se faire que sur une impasse de l'ordre de 25 milliards d'euros. La même année, l'État devra deux montants : celui dû à la sécurité sociale pour compenser la baisse des cotisations et la créance envers les entreprises au titre de l'exercice précédent. Il y a donc un écart très significatif. C'est au Gouvernement et au législateur de décider ensuite s'il doit être payé tout de suite ou en cinq ans. Vous pouvez ne pas payer la créance aux entreprises, mais cela ne rassurera personne. Je n'ose pas imaginer que c'est ce qu'avait en tête le Président de la République.
L'argument d'Olivier Carré est très conservateur. Si l'on poussait sa thèse jusqu'au bout, aucune modification ne serait possible. En réalité, il y a au moins deux moyens de basculer du CICE vers de moindres charges sociales. D'une part, il est possible d'appliquer dès le 1er janvier 2017 de moindres cotisations, en gelant le système du CICE pour 2016 ; d'autre part, comme pour la TVA, il est possible de geler la créance liée au CICE et de la dégeler graduellement.
Il n'y aurait certes rien d'original à étaler ainsi une créance. Mais je considère qu'il s'agit d'une question de loyauté de l'État vis-à-vis des entreprises qui ont déjà inscrit cette créance dans leurs comptes.
Nul ne contestera les propos du Président de la République. Dans son rapport sur la sécurité sociale, la Cour des comptes a consacré un chapitre entier au bouleversement que constituerait, pour la structure de financement de la sécurité sociale, ce basculement présenté comme inéluctable.
Dans un rapport, France Stratégie a constaté que le dispositif du CICE monte en charge et que les entreprises s'en saisissent. En changeant de système, nous bouleverserions leurs décisions en matière d'investissement et d'embauche, en raison des incertitudes qui en découleraient et qui engendreraient à leur tour de la paralysie et affecteraient finalement l'emploi. Misons plutôt sur la stabilité et la lisibilité de la législation.
Je note cependant avec intérêt, monsieur de Courson, que vous soutiendriez le Président de la République s'il devait, dans une campagne pour sa réélection, proposer cette mesure.
Substituer une baisse des cotisations sociales au CICE aurait immédiatement un effet positif sur l'emploi. La baisse de cotisations est en outre plus simple à mettre en pratique que le CICE, qui nécessite une déclaration particulière et représente ainsi une contrainte administrative supplémentaire.
Enfin, il s'agit de transparence. Alors que le CICE apparaît dans les comptes des entreprises qui paient l'impôt sur les sociétés, il n'en va pas de même quand il est imputé sur d'autres types d'impôts, tels que l'impôt sur le revenu. Il serait bon que le montant du crédit d'impôt soit connu de tous, quel que soit l'impôt sur lequel il est imputé.
Je partage l'analyse de Véronique Louwagie. Au comité de suivi des aides publiques aux entreprises, nous avons aussi constaté que les entreprises préféreraient une baisse sèche de charges, même si le CICE est entré dans leurs habitudes.
De multiples ambiguïtés affectent également le dispositif. Elles disparaîtraient si les transferts de la branche famille étaient par exemple retirés de la feuille de paie.
La commission rejette l'amendement I-CF128.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF370 de M. Éric Woerth.
Je pourrais reprendre l'argumentation que j'ai développée à propos de l'amendement précédent. Cet amendement vise quant à lui à instituer une baisse des cotisations salariales et patronales de 15 % sur les 500 premiers euros de salaire. Produisant un effet immédiat, cette mesure aurait aussi l'avantage de la simplicité et de la transparence. Elle serait gagée par la mise en place d'une TVA sociale.
Avis défavorable. Une taxe supplémentaire ne ferait que compliquer le dispositif. S'agissant de votre argumentaire précédent : pour les entreprises qui s'acquittent de l'impôt sur le revenu, le CICE n'apparaît pas dans leur compte de résultat, c'est vrai. C'est pourquoi j'avais, par des amendements aux précédents projets de loi de finances, proposé qu'il puisse être versé sur un compte distinct de celui du contribuable.
La commission rejette l'amendement I-CF370.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF14 de M. Marc Le Fur, I-CF132 de M. Charles de Courson et I-CF46 de M. Marc Le Fur.
L'amendement I-CF14 pourrait être une illustration de l'avantage que présenterait une baisse de charges par rapport au CICE, qui ne touche pas toutes les entreprises. Ainsi, les compagnies maritimes de commerce, qui emploient parfois jusqu'à 2 000 marins, ne bénéficient pas du dispositif, car les armateurs ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés. Tel est le cas de Brittany Ferries.
À défaut de baisse des charges, il faut donc aller vite. Des amendements semblables sont également défendus par nos collègues socialistes ; le sujet dépasse donc les clivages partisans. Je veux cependant souligner l'intérêt d'aller vite pour décider une baisse de charges générale, mesure claire, cohérente et définitive, qui éviterait les scories telles que celles visées par le présent amendement.
Il s'agit d'un tout autre sujet ! Les armateurs s'acquittent d'une taxe au tonnage, non de l'impôt sur les sociétés.
Précisément, ils peuvent exercer une option en faveur d'une taxe sur le tonnage réel, plutôt que de s'acquitter de l'impôt sur les sociétés.
J'ai étudié le sujet avec notre collègue Yves Blein. L'option au tonnage réel est en effet plus favorable aux compagnies maritimes que l'impôt sur les sociétés. Toutefois, depuis le CICE, elles préféreraient payer l'impôt sur les sociétés, sur lequel le crédit d'impôt pourrait être imputé. Lorsque la question s'est posée, la période où l'option pouvait être exercée était fermée. Il s'agissait donc de savoir s'il était possible de la rouvrir. Le ministère des finances était d'accord.
J'en étais également restée à l'idée que ces entreprises pouvaient exercer un choix entre le régime réel au tonnage et l'impôt sur les sociétés. Nous pourrons faire le point en séance publique, mais il me semble que l'article 74 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 a rouvert le délai d'option.
Monsieur Le Fur, vous pourriez donc déposer à nouveau cet amendement en vue de la séance publique.
L'amendement I-CF14 est retiré.
Le CICE exclut les entreprises soumises au régime forfaitaire d'imposition, telles que celles qui sont aujourd'hui touchées par la crise de l'élevage. Ce serait faire un geste à leur égard que de les faire bénéficier du dispositif. Tel est le premier objet de l'amendement I-CF132.
Par ailleurs, je voudrais qu'on en finisse avec l'usine à gaz que constituent les sociétés fiscalement translucides – sociétés mixtes dont tous les porteurs de part ne sont pas des exploitants agricoles. Assis sur la masse salariale de la société mixte, le CICE est recalculé au prorata des parts, mais il n'est versé qu'aux exploitants agricoles pour les parts qu'ils détiennent.
Je plaide donc à la fois pour l'extension du CICE aux entreprises soumises au régime forfaitaire d'imposition, et pour une simplification du régime applicable aux sociétés fiscalement translucides.
Voici encore un cas dans lequel la baisse des charges simplifierait tout par rapport à l'application du CICE !
La commission rejette successivement les amendements I-CF132 et I-CF46.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF16 et I-CF17 de M. Marc Le Fur.
Les amendements I-CF16 et I-CF17 sont retirés.
La commission examine ensuite l'amendement I-CF149 de M. Pascal Cherki.
Cet amendement vous a déjà été présenté l'an dernier et l'année précédente. Il est certes normal que l'État aide à renforcer le tissu économique et productif, y compris au moyen de dépenses fiscales, tels les crédits d'impôt. Mais toutes les dépenses fiscales que nous décidons doivent être compensées, et, comme nous avons décidé de réduire le déficit, nous ne pouvons guère recourir qu'à la réduction des dépenses publiques, en diminuant le financement de ministères utiles, comme le ministère de l'agriculture, ou à des hausses d'impôt. Dès lors que nous avons choisi de dépenser plusieurs milliards d'euros pour renforcer le tissu productif, encore faut-il mobiliser cet instrument à bon escient.
Par cet amendement, je propose donc d'exclure les sociétés cotées sur les marchés du champ des entreprises éligibles au CICE, et de n'en faire bénéficier que les TPE, PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI), qui représentent près de 83 % des entreprises françaises et forment la trame de notre tissu économique : elles ont besoin de trésorerie et ne peuvent faire appel à des financements issus des marchés.
Avis défavorable. Il n'est pas possible d'établir de discrimination qui reposerait sur le mode de financement des entreprises, que ce soit par action, par augmentation de capital ou par souscription de dette. Ce n'est pas sur cette base qu'on peut établir leur niveau de richesse et leur besoin de soutien.
Ce que vise le CICE, c'est un soutien à la compétitivité de l'emploi en France, de sorte que les groupes mondialisés cotés à Paris ne sont soutenus qu'en fonction de leurs emplois en France. Les PME et TPE bénéficient des mêmes avantages, dans les mêmes conditions et pour les mêmes raisons. Votre proposition est donc économiquement absurde, sans même aborder la question sous l'angle de la jurisprudence constitutionnelle.
Nous mènerons de nouveau le débat en séance publique. Il y aurait un parallèle à tracer avec la loi sur les 35 heures. Fallait-il prévoir une compensation pour toutes les entreprises, qu'il s'agisse de Saint-Gobain ou d'une petite PME ? Je reste persuadé que, à l'heure où chacun doit se serrer la ceinture, il est problématique de venir en aide aux entreprises du CAC 40, car elles ont une surface financière qui ne justifie pas ce soutien.
Quand le CICE aura été remplacé par une baisse de charges, nos débats seront beaucoup plus courts… Allons même plus loin et barémisons-la, c'est-à-dire intégrons-la dans un barème. Ainsi, nous n'en parlerions plus. Aujourd'hui, certaines cotisations ne sont pas prélevées, mais le taux apparent est tout de même conservé.
Il conviendrait aussi de les plafonner ! Dans un travail mené avec M. Jean Pisani-Ferry, nous nous sommes aperçus qu'il y a des problèmes sur les salaires plus importants, chez les salariés très qualifiés.
Quand il était encore possible de poser des questions écrites sans limitation, j'avais interrogé le Gouvernement pour savoir quel est le montant de CICE attribué au groupe Carrefour. Je n'ai jamais eu la réponse.
La commission rejette l'amendement I-CF149.
Elle examine ensuite les amendements I-CF130, I-CF131 et I-CF200 de M. Charles de Courson, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
Par l'amendement I-CF130, je propose que les travailleurs indépendants puissent également bénéficier du CICE. Ne représentent-ils pas 10 % de la force de travail de la France ?
L'amendement I-CF131 propose que les travailleurs indépendants agricoles puissent également en bénéficier.
Enfin, l'amendement I-CF200 propose que le travail non salarié agricole soit pris en compte, dans la limite d'un plafond équivalent à deux fois et demie le SMIC. Et ne me dites pas que les travailleurs indépendants ne sont pas soumis à la concurrence internationale !
Je vous répondrai sur un autre terrain. Ces amendements nous avaient déjà été présentés l'an dernier. Mais la situation a changé depuis lors, car, depuis le 1er janvier 2015, les travailleurs indépendants bénéficient d'une réduction de charges de 1 milliard d'euros. Cette mesure me semble plus avantageuse. Votre objectif est donc déjà atteint. Avis défavorable.
Avez-vous du moins chiffré le coût de l'amendement I-CF130 ? L'application générale du CICE coûterait-elle plus ou moins que le milliard d'euros que vous évoquez ?
La commission rejette successivement les amendements I-CF130, I-CF131 et I-CF200.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF315 de Mme Eva Sas.
Voici un amendement qui pourrait, me semble-t-il, emporter l'adhésion de nombre de nos concitoyens. Interrogés par sondage, les Français s'y déclareraient certainement favorables. Il s'agit en effet de moduler le taux du CICE en fonction de la taille de l'entreprise, en favorisant les TPE et les PME.
Avis défavorable. Le soutien aux PME et TPE est un objectif louable. Mais le CICE est déjà concentré sur ces entreprises, en raison de leur structure de salaires.
Nous regrettons cependant l'existence de seuils : ce sont des freins au développement de l'économie française, qui aurait intérêt à ce que les PME deviennent des ETI. N'amplifions pas encore le phénomène avec des éléments supplémentaires, qui renforceraient ces seuils, voire en créeraient de nouveaux.
Il y a un argument supplémentaire contre cet amendement. S'il était adopté, un salarié n'ouvrirait pas droit au même montant de CICE selon que l'entreprise où il est employé est grande ou petite. Il y a de grandes entreprises où les salaires ne sont pas élevés et méritent d'être soutenus – la grande distribution en est un exemple.
Certes, le rapport d'application sur le CICE a mis en évidence qu'il est plus favorable aux PME et aux TPE. Mais pourquoi ne pas amplifier ce phénomène grâce à un taux plus important ?
Madame Louwagie, si le tissu économique français manque d'ETI, il faut précisément les favoriser grâce à un taux préférentiel.
Monsieur de Courson, je voudrais tout de même rappeler que ce ne sont pas les salariés qui touchent le CICE.
J'ajoute que le Conseil constitutionnel estime que nos textes fondamentaux permettent de tolérer une modulation des baisses de cotisations patronales en fonction de la taille des entreprises. Je comprends parfaitement la démarche d'Eva Sas. Il serait mille fois plus utile de soutenir les PME et ETI que les grandes entreprises qui captent 8 milliards d'euros grâce au CICE.
La commission rejette l'amendement I-CF315.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF316 de M. Éric Alauzet.
Cet amendement vise à réduire de moitié le CICE d'une entreprise, lorsqu'elle verse à ses actionnaires des dividendes qui représentent plus de 12 % du bénéfice imposable. Dans son intention, il rejoint donc l'amendement I-CF149 défendu tout à l'heure par Pascal Cherki.
Certes, le versement du CICE n'est pas soumis à des conditions. Mais nous avons tout de même inscrit dans la loi qu'il ne peut servir ni à rémunérer les actionnaires par des dividendes ni à augmenter les salaires des dirigeants des entreprises. Nous aurions pu ajouter qu'il ne peut servir non plus à des transferts fiscaux.
Bien sûr, pour expliquer l'effondrement des marges, il faut prendre en compte la concurrence internationale ou la question du coût des salaires français par rapport aux salaires des autres pays. Mais il ne faut pas oublier de considérer aussi la rémunération parfois éhontée du capital, qui peut atteindre 12, 13 ou 14 %. L'année dernière, j'avais proposé un seuil à 10 %. Cette année, j'essaye 12 %. Je tenterai 14 % l'année prochaine. Nous verrons jusqu'à quel niveau nous sommes prêts à supporter ces rémunérations.
Avis défavorable. Votre amendement pose la question de savoir comment les marges des entreprises doivent être utilisées. Je tiens à vous signaler que son adoption priverait la plupart des entreprises du CAC 40 de son bénéfice. Le taux de distribution de dividendes oscille en effet entre 35 % et 45 %.
Entre fin 2013 et fin 2014, les marges des entreprises sont passées de 29,4 % à 31 %. Rapporté à la valeur ajoutée, leur excédent brut d'exploitation équivaut, en montant, au soutien que leur ont apporté le CICE et le pacte de responsabilité. Je soumets ces éléments à votre réflexion. Il n'en demeure pas moins que, si nous voulons un peu de stabilité de la législation, nous ne saurions adopter cet amendement.
La commission rejette l'amendement I-CF316.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF201 de M. Charles de Courson.
Cet amendement concerne de nouveau les sociétés fiscalement translucides, qui font l'objet d'une discrimination infondée. Je souligne qu'il ne s'agirait que d'une petite dépense.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure générale, la commission rejette l'amendement I-CF201.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF317 de Mme Brigitte Allain et I-CF406 de la commission des affaires économiques.
L'amendement I-CF317 est issu d'un rapport parlementaire, salué par tous, sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires. Il apparaît que nous manquons d'abattoirs de proximité multi-espèces ; ils bénéficieraient ainsi d'un crédit d'impôt sur les sociétés. Un amendement semblable a été adopté par la commission des affaires économiques.
Je confirme que l'amendement I-CF406, identique, a été adopté par la commission des affaires économiques. Trop d'abattoirs ont déjà fermé et les éleveurs doivent désormais parcourir des distances trop longues.
Vous mentionnez les « dépenses d'aménagement et de fonctionnement nécessaires » et les « filières de proximité » sans clairement définir ni les unes ni les autres. On est alors dans le champ de l'incompétence négative, ce qui nous serait reproché par le Conseil constitutionnel. Avis défavorable.
Mes chers collègues, vous affirmez qu'il y a eu, au cours des dernières années, une concentration massive et une spécialisation des abattoirs. C'est au contraire l'insuffisance de la concentration qui nous pose des problèmes : en France, l'abattage coûte environ 1 euro par kilo de plus qu'en Allemagne, ce qui nuit à la compétitivité d'une partie de l'élevage de notre pays. Dans le grand Est, les transformateurs de viande envoient en masse les animaux en Allemagne afin de profiter de cette différence de prix d'abattage. Votre proposition est anti-économique et elle ne pourrait que contribuer à accentuer encore la dégradation de l'élevage français. C'est l'inverse qu'il faut faire.
Pour m'en tenir au raisonnement économique qui sous-tend l'amendement, je m'étonne aussi de ce que vous affirmez. En Bretagne, la région que je connais le mieux, la disparition d'abattoirs est directement liée à la baisse de la production animale. C'est la reconquête de l'élevage qui permettra d'accroître les capacités d'abattage, et non l'inverse.
L'amendement d'Eva Sas, soutenu par la commission des affaires économiques, est certes fiscal et budgétaire, mais il a aussi à voir avec la stratégie de développement économique. Je suis en total désaccord avec Charles de Courson. La compétitivité par les coûts – fondée sur le développement de très grosses structures et une course au moins-disant qui conduit à payer les salariés 2 euros de l'heure en Allemagne – est un échec dans ce domaine. Pour le bétail comme pour la volaille, les modèles qui réussissent sont ceux qui ont promu la petite exploitation de très bonne qualité. On peut mener une stratégie de filière dans certaines régions, en veillant au respect d'un équilibre entre les exploitations de diverses tailles. Il nous faut aussi une stratégie budgétaire et fiscale pour encourager la qualité, le circuit court. Pour ne citer que cet exemple, le Label Rouge n'a aucun problème depuis 1955. Cette réussite contredit les propos que vous venez de tenir. Pour cette raison, je soutiendrai cet amendement.
Je n'aurai pas la cruauté de dire que Montreuil, ce n'est pas vraiment la France agricole…
S'il vous plaît, monsieur de Courson, n'employez pas ce type d'arguments. Sinon, dès que vous parlerez de politique de la ville, je vous demanderai de vous taire !
Contrairement à ce que notre collègue de Courson peut penser, le problème de l'abattage et des abattoirs concerne également Montreuil et Sarcelles ! Certains de nos compatriotes, qui veulent abattre des animaux, en particulier des moutons, vont en Angleterre, parce qu'il n'y a pas d'abattoir local.
Nous en avons, nous en élevons ! Je vous invite à venir visiter les élevages de moutons à Sarcelles. Je ne plaisante pas !
Pour en revenir à l'amendement, j'entends vos arguments concernant l'est de la France ou la Bretagne. La France agricole est diverse. En montagne, où la bonne charcuterie se fait pendant l'hiver, les agriculteurs sont parfois obligés de parcourir des centaines de kilomètres pour trouver un abattoir. Nous souhaitons favoriser le maintien d'abattoirs de proximité pour les agriculteurs qui travaillent en circuit court, sans mettre en péril l'équilibre économique. Ne nous racontons pas d'histoires : les agriculteurs qui ne peuvent pas aller à l'abattoir régional tuent sur place en ne respectant aucune règle d'hygiène. Dans certaines régions, il y a besoin d'abattoirs de proximité.
Pour abonder dans le même sens, en prenant ma casquette de président de la commission permanente du Conseil national de la montagne, je puis vous assurer que les abattoirs de proximité sont indispensables dans certaines régions.
Si vous n'avez pas entendu parler de crise dans certains endroits, notamment dans les territoires de montagne, c'est tout simplement parce que l'utilisation exclusive des circuits courts a tiré les prix vers le haut, ce qui a permis de développer une filière dont la reconnaissance est liée aux signes de qualité. Quand je parle aux agriculteurs de ma circonscription des négociations en cours sur le prix du porc, ils m'expliquent qu'ils vendent leurs animaux trois fois plus cher que le prix minimum dont il est question. Ils travaillent dans une autre logique économique, celle des filières courtes. Ils ne me parlent que d'un risque : la fermeture éventuelle de certains abattoirs de proximité. C'est pourquoi je voterai pour cet amendement qui correspond à une agriculture variée. Pour les filières courtes, il est absolument indispensable que les abattoirs de ces petits territoires puissent subsister.
Pour renchérir sur les propos de mes collègues, je dirai qu'il ne peut pas y avoir un seul type d'abattoir, mais des entreprises adaptées à chaque situation. En Ariège, nous avons deux petits abattoirs qui fonctionnent très bien, sans être déficitaires. Ils offrent une prestation de qualité et permettent le maintien de circuits courts rentables : les producteurs tuent, transforment et vendent eux-mêmes. Ces abattoirs sont certes subventionnés, mais ils permettent de conserver des emplois et contribuent à la valorisation du territoire.
Je ne m'aventurerai pas dans un débat de fond sur la politique des abattoirs, d'autant que je n'étais pas de ceux qui, à la Cour des comptes, ont rendu un rapport sur le secteur – et sont revenus traumatisés de leurs édifiantes visites sur le terrain.
À mes collègues de la commission des affaires économiques, qui posent un intéressant débat de politique publique, je signale que nous sommes ici en commission des finances. À chacun son rôle ! Tout comme moi, notre rapporteure générale s'est bien gardée d'intervenir sur le fond, mais, à l'appui de son avis négatif, elle a évoqué l'incompétence négative. Existe-t-il un décret qui détermine ce qu'est une filière de proximité ou un abattoir multi-espèces ? Quoi qu'il en soit, dans votre amendement, vous ne faites pas référence à la détermination par décret.
Même si cet amendement franchissait le cap de la commission des finances puis du débat dans l'hémicycle, je suis à peu près certain qu'il n'irait guère au-delà : tel que rédigé, il sera sans portée. La commission des affaires économiques l'a adopté : il reviendra donc dans l'hémicycle. Le ministre des finances s'exprimera. Peut-être le ministre de l'agriculture viendra-t-il aussi. Mais, à la commission des finances, on ne peut pas adopter un dispositif de crédit d'impôt qui n'est pas opérationnel.
J'entends ce que dit Dominique Lefebvre. S'agissant de la forme, il a été demandé à la commission des affaires économiques de remettre un rapport sur la fiscalité agricole, ce qui a été fait. Dans un monde normal, la commission des affaires économiques et la commission des finances auraient travaillé ensemble à la mise en oeuvre d'une partie des mesures proposées dans ce rapport. Je peux admettre que cet amendement soit mal rédigé et je suis prêt à le reprendre pour l'améliorer.
Oui, et c'est la commission des affaires économiques qui essaie de faire en sorte que les propositions contenues dans ce rapport ne restent pas lettre morte.
Et ce que nous avons fait nous aussi. Cet échange montre que nous avons sûrement besoin de mieux travailler ensemble sur ces sujets : nous sommes compétents sur le fond et, comme l'a dit notre collègue Lefebvre, vous êtes compétents en matière de finances. Je propose que nous retirions cet amendement et que nous en présentions en séance publique une version améliorée grâce aux lumières des commissaires aux finances.
Un rapport sur la fiscalité agricole a été élaboré à l'initiative de la commission des finances, dont certaines propositions ont été reprises dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Des amendements qui vont être discutés dans quelques minutes – et je l'espère adoptés – vont venir enrichir le projet de loi de finances. Mais la mesure que vous présentez dans votre amendement ne fait pas partie des propositions retenues par les membres de la mission d'information.
Pour poursuivre dans la même veine que mes collègues Hammadi, Pupponi et Giraud, je voudrais insister sur la nécessité de repenser notre modèle agricole. Monsieur de Courson, je vous invite à réfléchir à l'agriculture d'aujourd'hui, qui n'est pas celle d'hier. Nous ne devons pas forcément aller vers une concentration accrue et des abattoirs géants. En tout cas, ce n'est pas le modèle que nous proposons.
Puisqu'une majorité semble approuver le fond de cet amendement, peut-être pourrions-nous en améliorer la forme avant la séance publique, avec l'aide de la rapporteure générale et des services de la commission ? Je peux admettre que sa rédaction pose un problème, mais son objectif doit demeurer le même : encourager fiscalement les abattoirs de proximité, car c'est ce dont nous avons besoin actuellement en France.
Monsieur le président, il y a des gens qui ont travaillé sur le fond de ce sujet. Ici, nous n'avons pas forcément la science infuse en ce qui concerne la pertinence d'un tel modèle. Nous avons peut-être plus de compétences que d'autres sur les finances, mais, pour évaluer le modèle économique, nous ne sommes peut-être pas les meilleurs.
Monsieur Alauzet, la rapporteure générale s'est bornée à expliquer que l'amendement n'était pas correctement rédigé et posait notamment des problèmes d'incompétence négative.
Mais il y a eu d'autres interventions. D'aucuns évoquent l'Est ou l'Ouest, mais ces régions ne sont pas uniformes et la France est diverse. Ma région est à l'est aussi, un peu plus au sud que celle de Charles de Courson. Nous avons pu y sauver de petits abattoirs, diversifiés ou spécialisés, qui s'intègrent dans le cadre d'une économie locale. Je pense à un abattoir de porcs destinés à la fabrication de la saucisse de Morteau, par exemple. Toutes les étapes sont traitées sur le territoire, et tout le monde gagne sa vie le long de la chaîne.
Un modèle paraît incontournable : la concurrence mondiale, les salariés allemands payés à 4 ou 5 euros de l'heure, les produits cotés sur les marchés internationaux. Si c'est notre seul horizon, nous courons à l'échec : à la fin, tout le monde sera mort. Il faut savoir réagir.
Nous avons tous dans nos régions de petits abattoirs en situation difficile. Vous proposez une mesure fiscale pour les aider à se mettre aux normes. Mais nous savons tous que ce qui leur permet de se mettre aux normes, ce sont les subventions accordées par les départements et les régions. Sans cette perfusion, ils n'y parviendraient pas. Voyez ce qu'a perçu l'abattoir de Morteau. Ce que vous proposez n'est pas à la hauteur des enjeux des mises aux normes imposées par l'Union européenne.
Les amendements I-CF317 et I-CF406 sont retirés.
La commission examine l'amendement I-308 de M. Éric Alauzet.
Je reviens sur le CICE qui, il est vrai, encombre nos débats. Je rappelais ce qu'il ne doit pas faire, en défendant mes amendements sur les dividendes et sur les hauts salaires. On peut aussi se demander s'il est bien opportun d'accorder le bénéfice du CICE à des entreprises qui font de l'optimisation fiscale agressive. Les entreprises doivent remettre tous les ans aux services fiscaux une description générale de la politique de prix de transfert du groupe auquel elles appartiennent. Cet amendement propose de réduire le CICE de celles qui ne remplissent pas cette obligation.
Lors des débats sur la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, nous avons adopté un amendement présenté par Pierre-Alain Muet, Sandrine Mazetier et Karine Berger sur les prix de transfert. Vous en étiez d'ailleurs aussi signataire, si mes souvenirs sont exacts. Toutes les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 400 millions d'euros doivent transmettre annuellement à l'administration fiscale la description générale de toute leur politique de prix de transfert. C'est une obligation. Peut-être allez-vous me dire qu'il faut abaisser le seuil de chiffre d'affaires ou supprimer le CICE si ces obligations ne sont pas remplies ? Il y a déjà eu beaucoup d'actions concernant ces prix de transfert.
Incidemment, je signale que d'autres mesures vont être proposées dans le cadre de la mise en oeuvre des quinze recommandations de l'OCDE qui tendent à éviter l'évasion et l'optimisation fiscale agressive.
J'émets donc un avis défavorable à votre amendement. Il faut éviter de tout mélanger et de tout rattacher au CICE, dont les objectifs sont un peu différents.
Mon amendement s'appuie précisément sur le dispositif prévu par la loi du 6 décembre 2013, qu'il cherche à rendre plus opérationnel. Quand une obligation n'est pas assortie d'éventuelles sanctions, elle peut ne pas être très opérante. Le CICE nous offre l'occasion d'intervenir. Le jour où il disparaîtra, remplacé peut-être par un allégement de charges, nous ne nous poserons plus toutes ces questions.
Même s'il encombre nos discussions, ce débat sur le CICE nous conduit à être plus vigilants sur la manière dont les entreprises utilisent l'argent public. Cet argent est souvent bien utilisé, si l'on en juge par les propos de notre rapporteure générale sur la reconstitution des marges qui serait parallèle au montant du CICE, mais j'aimerais savoir ce qu'il en est en fonction de la taille des entreprises.
La commission rejette l'amendement I-CF308.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF296 et I-CF297 de Mme Eva Sas.
L'amendement I-CF296 vise à promouvoir l'apprentissage. Cet après-midi dans l'hémicycle, Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, a redit à quel point l'apprentissage – et l'alternance en général – était la meilleure voie d'entrée des jeunes dans le monde du travail et un élément essentiel et prioritaire des politiques de l'emploi à l'égard des jeunes. Cet amendement d'appel avait déjà été déposé l'année dernière et il ne lui avait manqué que quatre voix pour être adopté en séance publique. Il propose de faire bénéficier les entreprises d'un crédit d'impôt sur les sociétés de 500 euros par mois et par apprenti. Il s'agit d'insister sur la nécessité de passer de la parole aux actes en la matière, car, rappelons-le, l'apprentissage a reculé en 2014.
L'amendement I-CF297 est plus qu'un amendement d'appel et tend à répondre à une difficulté particulière : pour d'innombrables raisons, nombre de jeunes entrent de plus en plus tard dans l'apprentissage, ce qui va bien avec l'idée de la deuxième chance, mais ils coûtent beaucoup plus cher aux chefs d'entreprise qui les embauchent. Il s'agit ici d'ajuster les aides publiques à l'âge de l'apprenti, afin que cette catégorie ne soit pas exclue pour cette raison de surcoût.
Dans le tome I du rapport que nous mettrons en ligne, nous allons refaire un point sur l'apprentissage. Les politiques de soutien à l'apprentissage ont fait le yo-yo, mais un très gros effort a été consenti au cours des deux dernières années. Une entreprise de moins de onze salariés, qui prend un apprenti pendant quatre ans, perçoit 12 000 euros d'aides, celles de la région incluses. Son apprenti payé au SMIC lui coûte en réalité 525 euros par mois. Les apprentis mineurs représentant environ les trois quarts du total, les aides sont concentrées sur eux. Quand l'apprenti est majeur, elles sont moins élevées. Nous ferons un point précis sur les entreprises de moins de onze salariés qui emploient des apprentis mineurs ou majeurs. Mais il me semble que le soutien aux entreprises n'a jamais atteint de tels montants.
J'émets donc un avis défavorable à ces deux amendements.
Il serait intéressant de rapprocher ces mesures de dispositions existant par ailleurs, qui peuvent relever de la commission des affaires sociales ou de voies réglementaires, et du durcissement de l'environnement du code du travail. D'un côté, la position de l'exécutif a fait un aller-retour au cours du quinquennat, et c'est heureux. De l'autre, l'inflation normative s'est poursuivie, complexifiant encore la vie de l'entrepreneur, et de celui qui doit encadrer le jeune. Si ma mémoire est bonne, un risque pénal est même apparu. Résultat, quand on les rencontre sur le terrain, en dehors de la question du coût, les chefs d'entreprise mettent en avant les risques liés à l'environnement réglementaire du travail et se plaignent de ne pas avoir d'apprentis à former.
Un travail est effectué sur l'apprentissage et des efforts ont été accomplis au cours des deux dernières années, dites-vous, madame la rapporteure générale. Dans ce cas, pourquoi le nombre de nouveaux contrats d'apprentissage a-t-il baissé de 3,2 % en 2014 ? Quels sont les chiffres récents ? Quelle dynamique est mise en oeuvre ? Il est urgent de faire le point. À notre avis, les mesures sont insuffisantes. Mais peut-être aurons-nous des réponses dans votre rapport.
La commission rejette successivement les amendements I-CF296 et I-CF297.
Article 6 : Prorogation du dispositif d'amortissement accéléré applicable au matériel de robotique industrielle
La commission examine l'amendement I-CF109 de M. Charles de Courson.
Les entreprises françaises, en particulier les PME, ont un très gros retard par rapport à leurs homologues allemandes en matière de robotique. Le Gouvernement nous propose de prolonger d'un an le dispositif d'amortissement accéléré du matériel robotique, applicable du 1er octobre 2012 au 31 décembre 2015. Plutôt que des dispositions ponctuelles, nous devons prendre des mesures stables et permanentes. Mon amendement vise donc à rendre pérenne ce dispositif spécifique d'amortissement : ce n'est pas en un ou deux ans que la France et ses PME vont rattraper leur retard ; il faudra dix ou quinze ans. Il me semble d'ailleurs, madame la rapporteure générale, que le coût de cette mesure n'est pas considérable.
Une prorogation de deux ans est demandée par les professionnels. Vous qui êtes toujours généreux, monsieur de Courson, préférez une pérennisation. À ce stade, je vais émettre un avis défavorable à votre amendement, car je ne connais pas le coût de la mesure. Je m'en tiens à ma position de ce matin : je trouve dangereux d'adopter des mesures dont on ne connaît pas le coût.
On peut reprendre les déclarations du Gouvernement à l'époque où le dispositif avait été adopté, mais seule l'administration fiscale peut fournir le chiffre. Qu'en est-il des études d'impact ? On me dit qu'elles viennent d'arriver et sont en distribution, mais je ne les ai toujours pas vues. Mettons 2017 au lieu de 2016, si Mme la rapporteure générale y tient, mais je pense que l'on gagnerait à avoir une stratégie fiscale stable pendant plusieurs années.
Vous pouvez retirer votre amendement et le redéposer en séance : entre-temps, je vous aurai communiqué le coût de la mesure.
Voulez-vous que je le redépose en l'état, madame la rapporteure générale, ou en mettant 2017 ?
Ce sera fait.
Cependant, dans l'étude d'impact, que l'on vient de m'apporter, j'ai la réponse à votre question : la mesure coûterait 1 à 2 millions d'euros, ce qui est très peu.
L'amendement I-CF109 est retiré.
La commission est saisie des amendements identiques I-CF222 de M. Charles de Courson et I-CF298 de M. Éric Alauzet.
L'amendement I-CF222 a pour objet d'encourager le développement du gaz naturel (GNV) et du biométhane carburant (bioGNV) dans les PME françaises. Les véhicules fonctionnant avec ces carburants, dont l'usage se développe, représentent de 10 % à 15 % de la flotte des PME.
Il s'agit, avec l'amendement I-CF298, d'étendre le dispositif de suramortissement prévu pour les investissements industriels, les machines-outils en particulier, à l'acquisition de moyens de transport au gaz GNV ou au biométhane.
Comme vous, monsieur le président, je n'ignore pas qu'il y a beaucoup de demandes d'intégration dans ce dispositif de suramortissement, concernant essentiellement les transports. Je ne connais pas le coût – qui pourrait être assez important – de cette mesure. J'émets donc un avis défavorable.
Ces amendements ne portent pas sur n'importe quel type de transports, mais ciblent ceux qui participent à la transition énergétique. C'est évident pour les véhicules qui fonctionnent au biométhane, et même pour ceux qui utilisent le GNV, une énergie transitoire entre le pétrole et les énergies renouvelables. Dans la dépense publique, nous devons être plus sélectifs par rapport à la transition énergétique. Or, nous ne tenons pas suffisamment compte du coût global et des externalités.
La commission rejette les amendements I-CF222 et I-CF298.
Puis elle adopte l'article 6 sans modification.
Article additionnel après l'article 6 : Abaissement du seuil de déductibilité des rémunérations différées
La commission est saisie de l'amendement I-CF71 de M. Laurent Grandguillaume.
Cet amendement revient sur la question des « parachutes dorés ». Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, nous avions adopté à l'unanimité un amendement prévoyant le plafonnement de la déductibilité du bénéfice imposable de ce type d'indemnités de départ. Il faisait suite à un rapport que vous aviez remis, monsieur le président.
Au vu de l'actualité récente, les dispositions que nous avions prises à l'époque paraissent insuffisantes. La déductibilité maximale est aujourd'hui fixée à six fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit 228 240 euros au 1er janvier 2015. Par le présent amendement, nous proposons de diviser cet avantage fiscal par deux.
Comment justifier l'usage des « parachutes dorés » ? Beaucoup de chefs d'entreprise possèdent des parts sociales, acquises tout au long de leur carrière professionnelle par le biais de stock-options qui font partie de leur rémunération. Cela me paraît suffisant. Je pense que cette accumulation – salaire, stock-options, « parachute doré », retraite chapeau – pose un problème moral.
Ce matin, nous avons examiné un amendement I-CF74, similaire à celui-ci, au titre de l'impôt sur le revenu. La commission était largement acquise à la réduction du plafond, mais se posait un problème d'écriture : la cible visée n'était pas celle que nous souhaitions. J'ai proposé qu'il soit retiré et retravaillé avant d'être représenté en séance. Je vous fais la même proposition.
Avec mon collègue Laurent Grandguillaume et comme d'autres ici, nous travaillons sur le sujet depuis des mois. Nous avons étudié les rythmes d'acquisition des droits, nous avons plafonné, conditionné et introduit un droit de regard des syndicats et des représentants des salariés. Mais le dispositif est d'une complexité folle. Chaque fois que nous parvenons à faire adopter une mesure, nous nous rendons compte qu'il reste un trou dans la raquette. Je comprends qu'on nous demande de retirer et de retravailler cet amendement, mais, jusqu'à la fin de la législature, nous aurons des amendements sur les golden hello et les retraites chapeau, car nous tenons à remettre en cause des pratiques qui ne sont pas moralement acceptables.
Je ne suis pas le raisonnement de la rapporteure générale. À part le thème, quel est le rapport entre l'amendement de ce matin et celui de cet après-midi ?
Ce matin, il était question de seuil d'imposition ; cet après-midi, nous parlons de déductibilité.
Je ne vois pas quel est le problème de rédaction. Contrairement à l'amendement dont nous avons discuté ce matin, celui-ci vise parfaitement la cible. Si cet amendement que j'ai cosigné était retiré, je le reprendrais immédiatement.
Nous pourrions reprendre tout cela en seconde partie. Ce dont j'aimerais être absolument certain, c'est qu'il y a adéquation entre la mesure prévue, qui peut se justifier, et ce qui, dans l'exposé des motifs, fait référence à des exemples récents. Pour les Français, les exemples les plus scandaleux sont à des niveaux tels que la modification proposée du plafond de la sécurité sociale ne changera pas grand-chose. Que l'on cible ceux dont les indemnités de départ sont comprises entre trois et six fois le plafond de la sécurité sociale, je peux le comprendre. Ceux qui se situent à des niveaux interstellaires, qui perçoivent des primes de 8 ou 14 millions d'euros, sont hors sujet. Que ce soit déductible ou pas, cela ne change strictement rien. L'amendement concerne des personnes dont les indemnités de départ se situent à 200 000 ou 300 000 euros. Mais on permet à une grande entreprise internationale de faire un chèque de 8 ou 14 millions d'euros à un dirigeant qui s'en va. À mon avis, certains vont se sentir incompris, à juste titre.
Notre collègue Hammadi a jugé certaines pratiques moralement inacceptables tout en constatant qu'il y avait toujours des trous dans nos dispositifs fiscaux. Si vous voulez faire de la morale, il faut passer par d'autres moyens – le code du travail ou un autre – et décider une interdiction stricte de telle ou telle pratique. Quand il veut faire de la morale par le biais de la fiscalité, le législateur déclenche des phénomènes d'optimisation qu'il passe son temps à essayer de corriger, au risque de perturber le fonctionnement global de l'économie et d'affaiblir notre tissu productif national. Si la majorité considère que cette moralisation est un sujet politique fort, ce que je peux comprendre, qu'elle active d'autres textes de loi que ceux qui portent sur la fiscalité !
Je pense au contraire qu'il est possible de faire à la fois de la fiscalité et de la morale, et même de faire de la fiscalité morale. En travaillant sur le sujet, nous nous sommes rendu compte que des centaines de milliers de Français étaient concernés, mais nous ne nous sommes pas attaqués spécifiquement aux « parachutes » les plus scandaleux : nous avons, dans un premier temps, mis en place des dispositifs épargnant ceux qui partent avec un chèque de 10 000, 15 000 ou 20 000 euros de manière légitime dès lors que ces personnes ont passé beaucoup de temps dans l'entreprise, ont cotisé, et peuvent faire état de performances et de résultats. Il faut à présent faire évoluer l'assiette.
Le Premier ministre a pris l'engagement que la loi ne pratiquerait plus de « petite rétroactivité » et il a raison, car il est malsain de prendre des mesures fiscales rétroactives. Comme nous l'avons prévu ce matin au sujet de l'impôt sur le revenu, nous pourrons avoir le présent débat en seconde partie, car les mesures s'appliqueront alors aux revenus distribués ou aux dépenses engagées à partir du 1er janvier 2016. Sur le fond, notre commission est d'accord pour réduire ce plafond, même si l'amendement n'est pas – Dominique Lefebvre a raison de le souligner – de nature à apporter une réponse aux dizaines de millions d'euros qui ont récemment défrayé la chronique.
Si l'amendement est rectifié, avec les bonnes dates, il sera de facto reclassé en seconde partie.
Je propose de rectifier l'amendement en prévoyant une application au 1er novembre 2015 : il n'y a plus de « petite rétroactivité » dans ce cas.
La commission adopte l'amendement I-CF71 ainsi rectifié.
Après l'article 6
La commission examine les amendements I-CF183 et I-CF184 de M. Philippe Vigier, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
Le dispositif de jeune entreprise innovante (JEI) étant actuellement plafonné à 50 millions d'euros, l'amendement I-CF183 prévoit de remonter ce plafond, ce qui s'avérerait d'ailleurs peu coûteux. L'amendement I-CF184 vise quant à lui à allonger la période d'exonération d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés, de deux à trois ans, car la plupart de ces entreprises ne commencent à gagner de l'argent que la troisième année. Cela ne coûtera pas beaucoup non plus.
Le seuil de 50 millions d'euros a le mérite d'être conforme au seuil de définition des PME au sens communautaire. Alors que vous nous avez tout à l'heure invités à fusionner les seuils, vous en proposez là de nouveaux. Ce n'est pas très cohérent. En ce qui concerne la prolongation de la période d'exonération, vous n'apportez aucun chiffrage. Avis défavorable.
L'amendement I-CF183 est retiré.
La commission rejette l'amendement I-CF184.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF212 de M. Charles de Courson.
L'agriculture subissant des variations de revenus de plus en plus fortes, cet amendement vise à permettre une variabilité des dotations aux amortissements en fonction de la variabilité des résultats. En d'autres termes, dans une bonne année, l'agriculteur amortira beaucoup, dans une mauvaise année il amortira peu. Le solde est nul sur la moyenne période, mais cela donnera davantage de souplesse aux exploitations, dans la limite d'une modulation fixée à 50 % du montant déductible.
La série d'amendements sur la fiscalité agricole qui débute avec celui-ci fait suite à une mission d'information conduite au mois de juillet. Cet amendement, monsieur de Courson, reprend une proposition que vous aviez émise dans le cadre de cette mission, mais qui n'a pas été retenue. Avis défavorable.
J'en profite pour signaler que j'ai demandé au ministère des finances, le 17 juillet dernier, l'ensemble des montants d'exonération existant dans l'agriculture, selon une distribution par décile, afin de savoir si ces mesures fiscales sont concentrées sur certains types d'exploitation ou non. J'espère que je recevrai ces données un jour.
En tant que rapporteur de la mission d'information sur la fiscalité agricole, je n'ai pas retenu cette proposition, lui préférant un dispositif de déduction pour aléa. C'est le choix de la mission d'information pour traiter le problème de la volatilité des résultats.
La commission rejette l'amendement I-CF212.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF33 et I-CF36 de M. Marc Le Fur.
La mission d'information sur la fiscalité agricole est parvenue à des propositions consensuelles, que ces amendements reprennent en ce qui concerne la déduction pour aléas (DPA). La DPA est une auto-assurance : au cours d'une bonne année, l'agriculteur est autorisé à mettre de l'argent de côté, de façon qu'il puisse le réintroduire dans ses comptes lors des mauvaises années. La dernière crise agricole a révélé que l'aléa – la variation du climat, mais aussi des prix – était de plus en plus important ; c'est même devenu l'obsession du monde agricole. L'idée est donc de renforcer la DPA. Dans l'immédiat, cela ne coûtera rien, car il s'agit de retirer de l'argent des comptes dans les bonnes années, et nous traversons justement une très mauvaise année, mais cela enverrait au monde agricole le signal très positif qu'il pourra à l'avenir recourir à des mécanismes d'atténuation des aléas.
Ces amendements visent donc à rendre le recours à la DPA plus facile et plus souple, afin que l'atténuation de l'aléa passe principalement par ce dispositif fiscal, qui est moins cher qu'une assurance, car il n'y a pas d'intermédiaire, et plus avantageux que la déduction pour investissement (DPI).
Certains amendements relatifs à la DPA ont été reportés en seconde partie, car ils traitaient de la réintégration, qui se fait au cours des exercices suivants, tandis que ceux qui traitent de la déduction elle-même affectent l'exercice 2016 et ont donc été conservés en première partie.
Nous aurons donc un débat saucissonné et, en termes de lisibilité, c'est bien dommage. Le sujet – la crise l'a révélé – mériterait de faire l'objet d'une mesure dans le prochain projet de loi de finances rectificative (LFR).
La DPA ne fonctionne pas. Elle a même été construite pour ne pas fonctionner, en raison notamment de conditions d'entrée et de sortie extrêmement restrictives. Dans la mission d'information, nous sommes tombés d'accord pour assouplir l'entrée et la sortie, mais nous différons en ce qui concerne l'ampleur de cet assouplissement. J'étais le plus libéral, et le rapporteur le plus restrictif. Je trouve moi aussi très dommage que la discussion soit tronçonnée, car nos collègues n'y pourront rien comprendre. Je pense toutefois qu'il faut voter ces amendements, car cela permettra au Gouvernement de nous indiquer où en sont les arbitrages.
Il serait en effet préférable de discuter tous les amendements ensemble, mais cela peut se faire en seconde partie. Cela ne me dérange donc pas de les retirer à ce stade.
Nous pouvons discuter l'ensemble en seconde partie, début novembre – et il vaut mieux en effet avoir une discussion globale, car le sujet est très compliqué –, si vous rédigez les amendements de façon qu'ils s'appliquent au 1er janvier 2017. Depuis 2002, des amendements tendant à modifier le régime de la DPA sont présentés dans chaque loi de finances, et j'ai du mal à comprendre pourquoi ce régime subit une telle instabilité fiscale.
C'est un régime qui n'a jamais fonctionné et qui ne coûte presque rien, car, comme l'a expliqué Charles de Courson, les conditions ont été définies de façon à décourager les agriculteurs d'y recourir. La crise agricole est due à des aléas d'une ampleur qui était inconnue du temps où il existait une gestion européenne des marchés. Le régime a été modifié à plusieurs reprises, car il n'a jamais fonctionné.
C'est dommage, car il avait fallu une suspension de séance et une réunion de deux heures en salle Colbert, en pleine nuit, pour le créer.
Les amendements I-CF33 et I-CF36 sont retirés.
Les amendements I-CF40 à I-CF42 de M. Marc Le Fur sont également retirés.
Article additionnel après l'article 6 : Relèvement du seuil de prise en compte des recettes accessoires dans la détermination du bénéfice agricole
La commission examine les amendements identiques I-CF147 de M. Hervé Pellois et I-CF390 de la commission des affaires économiques.
Il s'agit de régler un problème de seuil pour les exploitants agricoles qui exercent plusieurs activités. L'agritourisme doit rester une activité complémentaire, mais nous proposons que le seuil de recettes passe de 50 000 à 80 000 euros afin de permettre aux exploitants qui le souhaitent et dont l'activité marche bien de bénéficier de revenus plus importants.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure générale, la commission adopte les amendements I-CF147 et I-CF390.
L'amendement I-CF30 de M. Marc Le Fur n'a plus d'objet.
Article additionnel après l'article 6 : Fixation à quatre de la limite de nombre d'associés dans un GAEC pris en compte en matière de plafond de recettes accessoires
La commission examine les amendements identiques I-CF192 de M. François André et I-CF397 de la commission des affaires économiques.
Nous abordons une série d'amendements sur les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC). L'amendement I-CF192 prévoit que le principe de transparence, en matière de recettes accessoires, sera apprécié à l'échelle du GAEC, jusqu'à quatre associés, et non plus, comme c'est le cas depuis une jurisprudence du Conseil d'État de 2009, au niveau à la fois du GAEC et de chaque exploitant. Cette jurisprudence est peu précise, et nous souhaitons donc inscrire le principe de transparence dans la loi, en précisant qu'il s'applique à l'échelle du groupement.
Nous bricolons ! Le nombre maximal d'associés avait été fixé à deux, puis il est passé à trois, et l'on propose aujourd'hui un petit pas pour le porter à quatre. Ne serait-il pas plus simple de ne pas prévoir de plafond du tout ? Il y a d'ailleurs très peu de GAEC dépassant quatre associés. Raison de plus pour se passer de plafond.
La commission adopte les amendements I-CF192 et I-CF397.
Article additionnel après l'article 6 : Assouplissement du mécanisme d'étalement dans le temps des revenus exceptionnels
La commission examine les amendements identiques I-CF189 de M. François André et I-CF392 de la commission des affaires économiques.
L'amendement I-CF189 vise à assouplir le mécanisme d'étalement des revenus exceptionnels en permettant une intégration par fractions inégales. Aujourd'hui, quand un exploitant agricole dégage un résultat exceptionnel, il existe un mécanisme de lissage de l'intégration de ce revenu sur plusieurs exercices, pour un maximum de sept ans et par fractions égales. Nous souhaitons permettre que cette intégration se fasse, à l'intérieur des sept ans, selon le libre choix de l'exploitant.
Cette proposition a été avancée par la mission d'information et j'y suis à ce titre favorable. Cela ne coûtera d'ailleurs pas grand-chose, le coût total de la DPA n'excédant pas 16 millions d'euros.
J'y suis tout à fait favorable, car c'est conforme au principe de liberté que j'ai défendu au sein de la mission, mais le Gouvernement cherchera comme d'habitude à enserrer le dispositif dans un tunnel.
C'est une méthode utilisée dans le cadre de l'impôt sur le revenu, mais cela peut être contraire à la progressivité de l'impôt. Je suppose qu'il s'agit d'un étalement sur les années à venir et non sur les années passées. Or, on pourrait opposer à un tel système celui de la variabilité de l'impôt en fonction des bénéfices.
Je suis d'accord avec vous. L'INSEE a publié, il y a quelques années, une étude montrant que, pour un revenu de cinq fois le SMIC, un agriculteur payait moins d'impôt sur le revenu qu'un salarié. Quel objectif entendons-nous assigner à la fiscalité agricole ? Un objectif de progressivité et un objectif d'atténuation des aléas peuvent aboutir à des contradictions qui ne sont pas résolues par des amendements de ce type. Il faudrait sans doute remettre les choses sur la table de manière plus globale, mais laisser un peu de liberté aux agriculteurs, à l'intérieur des sept ans, me paraît une bonne chose.
La commission adopte les amendements I-CF189 et I-CF392.
Après l'article 6
La commission examine l'amendement I-CF349 de M. François Pupponi.
Les écrivains, artistes et sportifs peuvent choisir d'étaler l'imposition de leurs bénéfices sur trois ou cinq ans. L'amendement, qui prévoit de déduire des revenus générés avant le choix d'une option, me semble un peu compliqué. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF349.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF215 de M. Charles de Courson.
La déduction fiscale intégrale des salaires des conjoints des adhérents des organismes de gestion agréés a été supprimée l'an dernier. Cet amendement vise à le rétablir, car je n'ai jamais compris la raison de cette discrimination selon que les gens sont mariés ou non.
C'était un amendement que j'avais présenté dans la droite ligne d'un rapport de la Cour des comptes.
La Cour des comptes a commis là, me semble-t-il, une erreur. Que l'on prévoie un plafond pour éviter les faux salariés conjoints dans l'entreprise, d'accord, mais l'élimination du principe même n'est pas compréhensible.
Le principe de la déduction n'est pas éliminé, on rentre dans le droit commun qui plafonne la déduction à 13 800 euros par an. La déduction ne disparaît pas, elle est maintenue à un niveau moindre.
Le raisonnement a été que l'avantage principal conféré aux adhérents des centres de gestion agréés – la non-majoration de 20 % de leurs revenus – était suffisant. Pour le reste, il a été décidé de revenir au droit commun et de supprimer ces microniches fiscales.
Mais pourquoi plafonne-t-on la déductibilité du salaire du conjoint à 13 800 euros, soit à peine plus de 1 000 euros par mois ? Ça ne représente même pas le SMIC : le SMIC brut est à 1 500 euros, 1 700 euros avec les charges.
Au nom de quoi plafonne-t-on ? Imaginons le cas d'un indépendant qui travaille avec sa femme, salariée dans sa petite entreprise, et à qui l'on annonce qu'il n'a pas le droit de la rémunérer plus de 13 800 euros par an. Ça mérite un divorce !
Vous pouvez rémunérer votre conjoint plus de 13 800 euros par an : c'est la déductibilité qui est limitée à ce plafond. Le droit commun s'applique alors que, auparavant, quatre avantages se cumulaient.
La commission rejette l'amendement I-CF215.
Puis elle examine l'amendement I-CF216 de M. Charles de Courson.
Cet amendement vise à instaurer une réduction d'impôt pour frais de comptabilité et d'adhésion à un organisme de gestion agréé, qui a été supprimée dans le système actuel.
Mon amendement prévoit une réduction très modeste, plafonnée à 500 euros par an. Le coût en est estimé à 30 millions d'euros. Il est de l'intérêt de l'État d'améliorer sa connaissance des revenus des TPE.
Avec l'amendement adopté l'an dernier, il est toujours possible de déduire les frais de comptabilité. De mémoire, cela porte sur un peu plus de 900 euros. Vous revenez donc sur une réduction d'impôt alors qu'il est possible, avec ce qui a été adopté l'an dernier, de déduire les frais de comptabilité.
L'an dernier, nous avons réussi à supprimer trois microniches fiscales, en considérant que l'avantage fiscal d'une non-majoration de 20 % du revenu, dès lors que l'on est membre d'un centre de gestion agréé, se suffisait à lui-même.
Pour le plafonnement de la déductibilité du salaire du conjoint, la déductibilité des frais de comptabilité et le reste, nous avons décidé de revenir au droit commun.
La commission rejette l'amendement I-CF216.
Article additionnel après l'article 6 : Application du plafond de crédit d'impôt pour congé à chaque associé d'un GAEC, dans la limite de quatre
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF90 de Mme Christine Pires Beaune, et les amendements identiques I-CF190 de M. François André et I-CF393 de la commission des affaires économiques.
Il existe aujourd'hui un crédit d'impôt pour permettre aux agriculteurs de faire appel à des services de remplacement, qui est limité à quatorze jours. Mais, dans les GAEC où deux ou trois personnes travaillent, ces quatorze jours sont divisés par le nombre d'associés. Cet amendement vous propose donc d'étendre ce crédit d'impôt en tenant compte du nombre d'associés.
L'amendement que je présente est presque identique. Celui de Christine Pires Beaune limite le nombre d'associés à trois, c'est-à-dire qu'elle s'inscrit dans le cadre actuel de l'application du principe de transparence. Le mien, dans la logique des autres amendements GAEC que j'ai proposés, porte la mesure à quatre associés.
En cohérence avec ce que nous avons voté tout à l'heure, je suis favorable aux amendements I-CF190 et I-CF393, et demande le retrait de l'amendement I-CF90.
L'amendement I-CF90 est retiré.
La commission adopte les amendements I-CF190 et I-CF393.
Article additionnel après l'article 6 : Extension à quatre associés de l'application à un GAEC du crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique
La commission examine les amendements identiques I-CF191 de M. François André et I-CF395 de la commission des affaires économiques.
Il s'agit toujours de l'application du principe de transparence aux GAEC. Il est ici proposé de l'étendre concernant le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure générale, la commission adopte les amendements I-CF191 et I-CF395.
Après l'article 6
La commission en vient à l'amendement I-CF202 de M. Charles de Courson.
Le régime de l'assiette annuelle, par le décalage existant entre l'année d'assiette et l'année de couverture, entraîne une imputation fiscale à contresens très pénalisante en cas de variation de résultats.
Il s'agit du problème des cotisations. J'avais proposé, dans le cadre du groupe de travail, de rouvrir l'option de l'année n, qui a existé pendant sept ans et qui existe pour tous les autres régimes d'indépendants non agricoles. Il est plus facile d'expliquer aux gens qu'ils paieront beaucoup de cotisations lorsqu'ils ont beaucoup de revenus, et peu quand leur revenu est plus faible. Ce dispositif a existé jusqu'en 2001.
Vous proposez un mécanisme d'à-valoir. Un exploitant agricole peut payer ses cotisations sociales pour l'année n+1 en année n en cas de bonne année, pourvu que cela soit fait dans les six mois avant la clôture de l'exercice : si la clôture est au 31 décembre, il faut le faire avant le 30 juin de l'année n. C'est un cas très rare en droit fiscal.
Concernant plus précisément cet amendement, la mission d'information de notre commission sur la fiscalité agricole ne l'a pas retenu. L'à-valoir reste une démarche volontaire, et la rédaction que vous proposez le rendrait automatique, ce qui n'est pas conforme à la philosophie du dispositif. L'à-valoir va d'ailleurs être assoupli, suivant une recommandation de la mission d'information, à l'article 13 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisqu'il est prévu que son plafond passe de 50 % à 75 %.
Enfin, vous mentionnez dans cet amendement la date du 31 décembre, qui n'est pas inscrite dans la loi fiscale.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF202.
Article 7 : Exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de contribution foncière des entreprises (CFE) pour les activités pionnières de méthanisation agricole
La commission adopte l'article 7 sans modification.
Après l'article 7
La commission examine l'amendement I-CF218 de M. Charles de Courson.
Nous avons déjà parlé de ce problème. Dans les installations de méthanisation, tout le monde pensait que les installations constituaient de l'équipement, et n'étaient donc pas assujetties à la taxe sur le foncier bâti. Mais l'administration fiscale le considère comme de l'immobilier par destination.
Deux voies étaient alors ouvertes : requalifier ces installations en équipement, mais cela semblait poser des problèmes au regard d'autres dispositions sur l'immobilisation par destination ; ou distinguer les immeubles uniquement affectés au stockage des matières entrantes et du digestat, qui bénéficieront de l'exonération, et tous les autres immeubles directement affectés au process de méthanisation agricole, pour lesquels il est proposé une exonération temporaire automatique de taxe foncière, étendue à sept ans.
Nous avons eu l'année dernière un très long débat en séance sur cet amendement. Les méthaniseurs pionniers, qui font l'objet de l'article 7 du projet de loi, bénéficient actuellement d'une exonération facultative de cinq ans de taxe foncière, mais pas d'exonération sur la cotisation foncière des entreprises (CFE) ni sur la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Quant aux méthaniseurs à partir du 1er janvier 2015, ils bénéficient d'une exonération de taxe foncière de sept ans à compter de l'achèvement de l'installation, et d'une exonération de CFE et de CVAE de sept ans également, dès que l'activité a commencé.
Votre amendement, monsieur de Courson, propose une exonération permanente sur les bâtiments de stockage, et non pas limitée à sept ans.
La mission d'information n'a pas retenu cette piste, qui avait été évoquée. Il me semble par ailleurs que, ce matin, vous nous avez invités à limiter toutes les dépenses, puisque vous vouliez même baisser le plafond des dépenses fiscales.
Enfin, vous introduisez un peu plus de complexité puisque le stockage serait éternellement exonéré, tandis que le reste du méthaniseur ne le serait que sur sept ans, même si son activité continue. Pour ces trois raisons, je suis défavorable à votre amendement.
En effet, la mission n'a pas retenu cette proposition. L'année dernière, nous avons déjà décidé du passage à sept ans de la durée d'exonération de taxe, qui paraissait plus proche de la durée d'amortissement des installations. Je ne vois pas ce qui pourrait justifier économiquement une exonération ad vitam aeternam.
Sept ans, c'est déjà généreux, car, si l'on réintègre toutes les aides sur ces installations, les durées d'amortissement tombent à quatre ans et demi ou cinq ans.
La commission rejette l'amendement I-CF218.
Article 8 : Suppression de taxes à faible rendement
La commission examine les amendements identiques I-CF413 de la rapporteure générale et I-CF310 de Mme Eva Sas.
L'année dernière, nous avions abrogé la disposition qui, sous prétexte de simplification, visait à alléger la fiscalité des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) en les exonérant de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). J'aimerais que la commission des finances maintienne cette TGAP sur les ICPE. Elle représente effectivement une petite recette, mais elle est utile, car nous avons besoin que ces installations soient les plus sécurisées possible.
Effectivement, nous avions déjà repoussé cette suppression de taxe l'an dernier. Cela représente une recette de 25 millions d'euros, alors que les autres taxes supprimées dans cet article représentent des recettes de l'ordre de 5 millions d'euros.
La commission adopte les amendements I-CF413 et I-CF310.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF287 de M. Razzy Hammadi.
Il existe un problème de distorsion de concurrence dans le domaine des farines. Le rendement de la taxe qui leur est appliquée a été critiqué dans le rapport annuel de la Cour des comptes pour 2014, et cette taxe répond en tout point aux critères de l'article 8, qui porte sur les taxes dont le rendement est faible et qui présentent des coûts de gestion élevés.
Par ailleurs, la distorsion de concurrence est de plus en plus forte, les meuniers se sont exprimés de manière répétée à ce sujet.
Deux autres arguments militent en faveur de l'abolition de cette taxe : du point de vue de l'aménagement du territoire, les meuniers sont généralement les garanties bancaires des boulangeries ; et, évidemment, il existe une distorsion de concurrence immense. Les écarts de prix vont de 10 % à 15 %, et la taxe peut avoir un effet de 6 % à 7 % sur le chiffre d'affaires, pour un rendement bas et un coût de gestion élevé.
Cette taxe rapporte 62 millions d'euros par an. Et ces 62 millions d'euros vont à la Mutualité sociale agricole (MSA). Je ne sais pas si vous avez rencontré ses représentants pour leur annoncer que vous souhaitiez qu'ils ne disposent plus de cette somme, mais je crains qu'ils ne demandent bien légitimement qu'elle soit remplacée.
Par ailleurs, il s'agit d'un montant significatif. Même si nous le supprimions, rapporté au nombre de baguettes vendues chaque année, l'impact sur le prix serait insignifiant. J'avoue ne pas avoir examiné le compte de résultat du secteur de la farine en France, mais votre proposition constitue un problème à l'égard de la sécurité sociale.
Le problème n'est pas le prix de la baguette, mais celui de la farine. Il faut savoir si nous allons continuer à faire appel à des fournisseurs de l'autre côté de la frontière.
Notre collègue soulève un problème : trois ou quatre taxes dont l'eurocompatibilité est mise en question sont discriminatoires et perturbent le marché de la farine et de la semoule. Cet amendement est gagé sur la recette tabacs, mais nous savons que celle-ci n'est pas affectée. Il faudrait trouver une recette de substitution et ne pas se contenter d'éliminer la taxe sur la farine, mais toutes les taxes au quantum qui alimentent la MSA.
Je sais que le tabac est souvent utilisé pour gager, mais cette recette de substitution a toute sa pertinence dans notre cas. Lorsque nous avons débattu du tabac et du nouveau calcul l'année dernière, il nous a été dit qu'il n'y aurait pas de gain fiscal pour l'industrie du tabac. Or, il y a, semble-t-il, eu un gain estimé à 60 millions d'euros. Le gage sur le tabac n'est donc pas simplement technique. Je préfère aider l'industrie de la farine en rétablissant la justice fiscale qui nous avait été promise sur le tabac et qui n'a pas été maintenue.
La commission rejette l'amendement I-CF287.
Puis elle adopte l'article 8 modifié.
Après l'article 8
La commission examine, en discussion commune, les amendements I-CF286, I-CF301, I-CF302 et I-CF288 de Mme Eva Sas, I-CF304 de M. Éric Alauzet, I-CF388 de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, I-CF230 de M. Olivier Faure et I-CF303 de Mme Eva Sas.
Nous abordons une série d'amendements sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), la question de l'avantage fiscal du diesel et la contribution climat-énergie.
L'amendement I-CF286 a pour objet de traduire dans la loi de finances l'article de la loi sur la transition énergétique qui fixe la trajectoire de la contribution climat-énergie à 56 euros par tonne de carbone en 2020. Nous nous sommes étonnés que cette avancée de la loi sur la transition énergétique ne soit pas traduite dans la loi de finances pour 2016.
Le Gouvernement souhaite que l'ensemble de ces dispositions soit abordé dans le projet de loi de finances rectificative, pour leur donner une visibilité lors de la COP21.
Quant au fond, vous proposez d'augmenter de 3 centimes par an la taxation du fioul domestique, ce qui représente une augmentation plus forte que celle décidée pour 2015 ; et, pour les carburants, de faire progresser la TICPE de manière plus rapide que ce qui est exigé par l'objectif de 56 euros par tonne de CO2 en 2020.
Pour ces deux raisons, avis défavorable.
Dès lors que le Gouvernement s'engage à ce que cet objectif soit effectivement traduit dans les lois de finances, peu importe que ce soit dans le projet de loi de finances ou dans le projet de loi de finances rectificative. Mais cela ne doit pas rester lettre morte.
Les deux amendements suivants, I-CF301 et I-CF302, combinent cet objectif de 56 euros par tonne de carbone en 2020 avec la convergence progressive des fiscalités du diesel et de l'essence. Je précise, en réponse aux quelques tweets qui ont circulé cet après-midi, que nous proposons de réaliser cette convergence par une baisse de la fiscalité sur l'essence. Nous souhaitons éviter les accusations récurrentes d'« écolo-taxeurs » : notre objectif est de réduire l'écart entre l'essence et le diesel, pas d'augmenter la fiscalité à tout prix.
Sur le même modèle, l'amendement I-CF288 fait plusieurs propositions au Gouvernement pour qu'il puisse choisir de réaliser la convergence de l'essence et du diesel en réduisant le prix de l'essence et en augmentant celui du diesel, ou en augmentant simplement le diesel, ce qui serait plus intéressant pour les recettes fiscales.
L'amendement I-CF304 propose d'augmenter la fiscalité du diesel de 2 centimes par litre en 2016, comme l'an dernier. Si nous ne le faisions pas, le rythme de la convergence ralentirait fortement.
L'amendement I-CF388 est identique, à une petite mention technique près, à celui que présentera Olivier Faure. Il a été adopté par la commission du développement durable, qui s'est saisie pour avis de cette question.
Nous avons séparé la question de la trajectoire de la part carbone de la TICPE de celle de la fiscalité des différents carburants.
Cet amendement propose d'augmenter la fiscalité sur le gazole de 2 centimes, celle des différentes essences – y compris l'essence avec plomb qui ne figure pas dans l'amendement d'Olivier Faure – de 1 centime ; et de baisser de 1 centime de la fiscalité du super 95-E10, qui incorpore 10 % de carburant renouvelable, en l'occurrence du super-éthanol.
Il s'agit de créer une recette qui permette le financement des infrastructures – d'où l'effort demandé sur l'ensemble des carburants, y compris le moins polluant – et de rattraper le différentiel entre le gazole et l'essence, ce qui permettra de financer l'évolution du parc vers des modèles plus vertueux, tant pour les véhicules légers que pour les véhicules lourds, en commençant par inciter les propriétaires des véhicules les plus anciens, souvent les personnes les plus modestes et qui en ont le plus besoin, notamment à la campagne, et qui pourront être orientées facilement vers des véhicules plus propres.
En ce qui concerne les poids lourds, je me permets de faire le lien avec un débat précédent : il serait sain d'orienter le parc de poids lourds vers des moteurs à gaz. Les industriels français accusent un léger retard technologique en la matière, et une perspective sur plusieurs années leur permettrait de se mettre à niveau en ce domaine.
Je voudrais aborder la question sous un angle moins technique que Jean-Yves Caullet, puisque nous présentons deux amendements presque identiques.
La question est assez simple : à quoi servons-nous ? Depuis le début de cette législature, nous avons demandé à Philippe Duron, dans le cadre d'une mission Mobilité 21, d'établir la liste des infrastructures prioritaires à financer pour les quinze années qui viennent. Cette liste a fait l'objet d'un consensus assez large, et a permis d'avancer sur la feuille de route en matière d'édification d'infrastructures de transport pour les prochaines années.
Aujourd'hui, suite à la décision de ne pas réaliser l'écotaxe poids lourds – dans laquelle nous avons tous une responsabilité, car nous avons tous voté cette taxe, et nous avons tous accepté de ne pas la mettre en place l'an dernier – l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) n'a pas les moyens de mener la politique que nous avions pourtant définie en début de législature. Je rappelle qu'elle a besoin de 2,5 milliards d'euros par an pour financer le scénario 2 du rapport Duron ; or, aujourd'hui, elle ne dispose que de 1,8 milliard d'euros.
Je souhaite que la commission adopte mon amendement, et nous verrons ensuite quelle est la position du Gouvernement. Nous comprenons qu'il préférerait que la loi de finances rectificative serve de support à une évolution de la fiscalité sur le gazole. Mais j'aimerais que cette discussion se fasse sur la base d'une double utilisation des recettes.
Comme vient de le dire Jean-Yves Caullet, deux utilisations de cette recette sont possibles : financer l'AFITF et accompagner les utilisateurs qui ne peuvent pas avoir recours aux transports collectifs pour l'achat de véhicules propres, ou encourager la dépollution de leurs véhicules grâce aux filtres à particules. C'est très différent de ce que j'entends de la part du Gouvernement ou de ce que je lis dans d'autres amendements. Le Gouvernement annonce par exemple qu'il souhaite augmenter la fiscalité du gazole pour diminuer celle sur l'essence. Cela revient à faire les poches des diésélistes pour remplir celles de ceux qui circulent à l'essence ! Cela aurait un effet terrible, car ceux qui sont obligés de conserver un véhicule diesel sont les plus modestes d'entre nous. Proposer qu'ils financent ceux qui ont la capacité d'acheter un nouveau véhicule ou qui avaient déjà celle de rouler à l'essence, c'est une mesure très curieuse et qu'il est difficile de soutenir.
Pour la première fois depuis longtemps, tous les astres sont presque alignés : les prix des carburants sont exceptionnellement bas, et il existe, autour de la COP21, une prise de conscience mondiale de la nécessité de lutter contre le réchauffement climatique. Si, dans un tel moment, nous n'arrivons pas à augmenter de 2 centimes d'euros la fiscalité du gazole – soit 20 centimes pour dix litres et 2 euros pour cent litres, ce qui permet de parcourir près de mille kilomètres – si nous ne pouvons pas demander cela aux Français pour financer la lutte contre le réchauffement climatique, la conversion du parc automobile et la réalisation d'infrastructures de transport de qualité, alors je ne sais pas quand nous le ferons.
Lorsque nous proposons d'augmenter la fiscalité, on nous accuse d'assommer les ménages, comme on nous l'a dit à demi-mot dans l'hémicycle cet après-midi ; lorsque nous proposons de l'alléger, on nous reproche de privilégier les ménages aux revenus aisés. On trouve toujours des arguments pour s'opposer aux propositions des écologistes – mais nous y sommes habitués.
Je ne comprends pas que l'on ne veuille réduire que de 1 centime l'écart entre le diesel et l'essence, alors qu'il existe un consensus autour du fait que le diesel constitue un problème de santé publique. L'Organisation mondiale de la santé a reconnu en 2012 que c'était un cancérigène certain. Le récent scandale Volkswagen montre que le diesel propre est une imposture. Il faut accélérer la réduction de l'écart entre le diesel et l'essence. On ne peut pas attendre 2050 pour que la fiscalité soit identique. La moindre des choses est de cesser d'encourager le diesel.
Quoi qu'il en soit, nous soutiendrons tout ce qui va dans le bon sens, et, si la commission décidait d'augmenter la fiscalité du diesel de 2 centimes, les écologistes voteraient cette proposition.
De très nombreux amendements ont été présentés. Je ferai figurer au rapport un petit tableau que nous avons réalisé sur le resserrement de l'écart de TICPE entre l'essence sans plomb 95 et le gazole. En 2014, l'écart était de 17,81 centimes, il devrait être de 15,31 centimes en 2016 en application des précédentes lois de finances. Un effort a donc déjà été fait. L'amendement qui fixe l'objectif de réduction le plus ambitieux propose 12,31 centimes par litre. Cela tendrait à faire converger les deux à l'horizon 2020 si l'on tenait le rythme proposé.
L'amendement d'Olivier Faure n'est pas à somme nulle, puisqu'il dégage sans doute de l'ordre de 650 millions d'euros de recettes supplémentaires. Étant donné l'importance du montant, cette mesure doit s'inscrire dans le débat global que propose le Gouvernement dans le PLFR. Sans doute, nous avons déjà voté des amendements à 650 millions d'euros, mais il n'est pas forcément judicieux de recommencer. Je préférerais donc que ces amendements soient retirés et qu'un débat lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative (PLFR) permette d'avoir une vision globale. Comme le disait Eva Sas, lorsque l'on traite de ce sujet, il faut songer aux questions de pouvoir d'achat et de stratégie industrielle.
Par ailleurs, ces questions sont aussi liées à la réforme de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) qu'impose le droit communautaire et qui sera étudiée dans le PLFR. Avis défavorable.
Je voudrais vérifier un point auprès de d'Olivier Faure. En 2015, la majoration de 2 centimes sur le diesel a été intégralement fléchée sur l'AFITF. Il semblerait qu'elle ne le soit plus que partiellement en 2016, et que 400 ou 500 millions d'euros soient dérivés vers le budget de l'État.
Votre souci est donc aussi lié au financement de l'AFITF, compte tenu de la baisse du financement mis en place à partir de 2015. J'avais compris que les 2 centimes d'euros étaient mis en place pour 2015 et les années suivantes.
Nous avons également déposé, après l'article 14, l'amendement I-CF234 qui vise à augmenter la part du produit de la TICPE affectée à l'AFITF. De sorte que, si la commission adopte l'amendement I-CF230, on abonde non pas les caisses de l'État, mais le budget de l'AFITF.
Je comprends très bien que l'on veuille faire converger les fiscalités sur l'essence et le gazole, sans privilégier ce dernier. Cependant, nos administrés nous reprochent d'avoir nous-mêmes privilégié le gazole pendant des années et de les punir tout d'un coup pour avoir suivi nos conseils. Avant de les punir, mieux vaudrait créer des solutions alternatives.
Tel est l'avantage que présente l'amendement I-CF230 : il n'est pas à somme nulle, ainsi que l'a relevé la rapporteure générale, et offre deux solutions alternatives. D'une part, il permet de financer les transports collectifs, solution de repli pour les automobilistes, qui obtiennent ainsi quelque chose en échange de l'augmentation de la fiscalité sur les carburants. D'autre part, nous disons aux propriétaires de véhicules diesel que nous pouvons les accompagner. À l'intention de ceux qui ont suffisamment d'argent pour changer de véhicule, nous augmentons les bonus pour l'achat d'une voiture électrique ou hybride. Quant à ceux qui n'ont pas ces moyens – ils sont nombreux –, nous les accompagnons, comme cela se fait en Allemagne, pour l'achat non pas d'un nouveau véhicule, mais d'un filtre à particules qui permet de réduire très largement les émissions polluantes. À Berlin, les véhicules équipés d'un tel filtre peuvent circuler dans les zones à faibles émissions.
En résumé, nous donnons un signal clair en direction du marché, mais sans punir – le prélèvement supplémentaire se limite à 2 centimes par litre de gazole – et en accompagnant ceux qui ont fait un choix précédemment encouragé par l'État.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que la commission adopte cet amendement. Cela étant, je comprends très bien que le Gouvernement préfère que le débat soit tranché lors de l'examen du PLFR, et je m'engage à retirer cet amendement en séance publique. Mais il s'agit d'engager le débat en ayant créé un rapport de forces. Je souhaite vérifier que l'intention du Gouvernement n'est pas simplement de diminuer la fiscalité sur un carburant pour augmenter celle sur l'autre. Avec la commission du développement durable, Jean-Yves Caullet, son rapporteur pour avis, et Philippe Duron, nous défendons un autre projet : celui de financer l'AFITF. À défaut, tout ce que nous avons mis sur la table depuis trois ans s'évanouira en fumée ! Nous avons fait un travail suivi, et ce n'est pas la peine de produire des rapports année après année si c'est pour les brûler à la fin de chaque législature ! Si nous ne servons à rien, autant se le dire !
L'Assemblée élabore régulièrement des rapports de sa propre initiative. Ce qui est nouveau, en l'espèce, c'est que le rapport a été demandé à Philippe Duron par le Gouvernement lui-même. Il s'agissait d'en finir avec le schéma national des infrastructures de transport (SNIT), qui était le miroir de nos désirs les plus fous, puisqu'il aurait fallu trois siècles pour les satisfaire ! Conformément au souhait du Gouvernement, le rapport Duron a identifié un certain nombre de projets prioritaires, de telle sorte qu'ils soient finançables sur quinze ans. Si ces projets prioritaires ne sont pas mis en oeuvre, quelle est la crédibilité de la parole publique, tant celle du Parlement que du Gouvernement ?
Je souhaite que nous avancions en posant les bases d'un débat clair avec le Gouvernement. Évitons de nous faire balader dans un débat flou jusqu'à la loi de finances rectificative !
Lorsque, l'année dernière, nous avons voté l'augmentation de 2 centimes de la taxation sur le gazole, le Gouvernement a pris l'engagement de maintenir le budget de l'AFITF à 1,9 milliard d'euros. C'est bien ce que prévoit le présent projet de loi de finances. La question d'une nouvelle augmentation de 2 centimes et celle du financement de l'AFITF sont donc distinctes. D'autre part, le Gouvernement justifie le plafonnement de la part du produit de la TICPE affectée à l'AFITF par le fait que celle-ci a une charge en moins cette année : elle n'a pas à verser, comme l'année dernière, d'indemnités à Écomouv'.
Monsieur Faure, ne caricaturez pas les propos des uns et des autres ! Je propose de faire converger la fiscalité sur l'essence et celle sur le gazole, soit en diminuant la première, soit en augmentant la seconde. Nous partageons le même objectif, mais l'un de mes amendements me paraît plus facile à adopter que le vôtre : celui qui vise à augmenter de 2 centimes la taxation sur le gazole sans augmenter celle sur l'essence. Ainsi, nous resserrerons davantage l'écart entre les deux. D'une manière générale, je vous invite à adresser votre discours en priorité au secrétaire d'État chargé du budget, qui s'oppose à toute augmentation de la fiscalité sur les carburants, considérant qu'elle frapperait trop les ménages dans cette période difficile.
Quant aux recettes, elles doivent en effet être affectées à l'AFITF. À ce titre, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault avait déclaré très clairement en 2013, je le rappelle, que le budget de l'AFITF devait atteindre 2,5 milliards d'euros. Or, aujourd'hui, il est encore de 1,9 milliard. En outre, j'aimerais apporter une nuance : l'AFITF finance majoritairement les transports collectifs et les modes alternatifs à la voiture individuelle, mais elle a également classé comme prioritaires un certain nombre de projets routiers, avec lesquels nous ne sommes pas nécessairement d'accord. Il n'en reste pas moins qu'il faut absolument abonder son budget.
Je suis un peu surpris de cette agressivité à l'égard des automobilistes qui roulent au diesel. Ils n'ont pas à être les victimes de la faute commise par une entreprise allemande bien connue, événement extérieur qui a rouvert le débat.
Je ne vois aucune étude de l'impact de ces dispositions sur les automobilistes qui roulent au diesel. Souvent, ceux-ci n'ont pas de solution alternative en termes de transports en commun, en tout cas, pour certains d'entre eux, pas aux horaires auxquels ils travaillent, soit qu'ils commencent tôt le matin, soit qu'ils terminent tard le soir. On nous explique généralement que les automobilistes doivent payer pour financer un certain nombre de transports publics. Or, je ne saisis pas la raison d'un tel lien : je comprends parfaitement que les transports publics soient financés en partie par l'impôt, mais pourquoi les faire payer précisément par ceux qui n'en sont pas les usagers potentiels ?
Je ne vois rien non plus concernant l'impact sur les entreprises françaises, en particulier sur le groupe PSA, pour lequel les conséquences pourraient être très lourdes, dans la mesure où il est en pointe pour les moteurs diesel, domaine dans lequel il a d'ailleurs fait des efforts remarquables. Du fait des évolutions récentes, l'usine PSA de Rennes s'est réduite comme une peau de chagrin : elle compte à peine 3 000 salariés contre plus de 12 000 naguère, lorsqu'elle était l'une des plus importantes du groupe. C'est dire si ces effets peuvent être redoutables.
S'il y a des efforts à faire, peut-être faut-il qu'ils portent prioritairement sur les véhicules anciens, qui sont souvent les plus polluants, qu'il s'agisse des voitures particulières, des poids lourds ou des véhicules de transport en commun – nous pouvons tous constater dans nos rues qu'un certain nombre de bus sont extrêmement polluants. Nous pourrions imaginer des mesures visant à favoriser la modernisation du parc, tel qu'il en a existé par le passé. Ce serait d'ailleurs aussi un élément de relance. En tout état de cause, je m'opposerai avec la dernière énergie à tout ce qui peut concourir à pénaliser les automobilistes qui ont fait le choix du diesel.
L'impact, monsieur Le Fur, je le mesure tous les jours : j'habite à la campagne et je roule, comme beaucoup de nos compatriotes, avec un véhicule diesel, non pas parce que j'ai choisi un carburant moins cher, mais parce que je fais beaucoup de kilomètres et que j'ai préféré un moteur qui s'use moins vite. Cela restera d'ailleurs, à fiscalité égale, l'un des critères du choix en faveur de telle ou telle motorisation, chacune ayant ses qualités intrinsèques. La fiscalité n'est pas le seul élément qui oriente les décisions d'investissement des particuliers et des entreprises.
Les écarts dont nous parlons sont près de dix fois inférieurs à ceux qui existent entre les prix de différentes pompes à l'intérieur d'un même département. L'impact des mesures que nous envisageons est donc très limité, du fait de la conjoncture pétrolière.
Si nous incitons efficacement nos compatriotes équipés de véhicules anciens à les moderniser, ils supprimeront une pollution et réduiront dans le même temps leur consommation de carburant, ce qui compensera le surcoût, très modeste, que nous proposons.
Eva Sas a raison : l'AFITF finance non seulement des transports publics, mais aussi des projets routiers. C'est précisément ce qui justifie que l'on instaure aussi une petite contribution sur l'essence, ces infrastructures routières étant utilisées par tous les véhicules.
La commission du développement durable avait proposé un calendrier de rattrapage sur dix ans de l'écart entre les fiscalités sur le gazole et l'essence. Il s'agissait non pas de faire la chasse aux moteurs diesel, mais de donner un signal clair quant à la réduction de cet avantage fiscal qui n'a plus lieu d'être aujourd'hui dans son principe. Le rythme modeste que nous avions prévu permettait aux automobilistes et aux industriels de s'adapter.
Au nom du groupe politique majoritaire, j'indique que nous n'avons nullement l'intention d'échapper au débat sur la fiscalité dans le cadre de la transition énergétique, à laquelle sont liés les engagements de la France au titre de la COP21, et que nous assumerons nos responsabilités. Telle est également, selon moi, l'approche du Gouvernement : lorsque l'on décide, de manière cohérente, de renvoyer l'ensemble des dispositions en matière de fiscalité énergétique au projet de loi de finances rectificative, lequel passera en Conseil des ministres au début du mois de novembre et sera débattu dans l'hémicycle au début du mois de décembre, c'est-à-dire en pleine COP21 à Paris, ce n'est pas pour évacuer le débat et ne rien faire, bien au contraire !
Par ailleurs, la présente discussion montre que le débat n'est pas stabilisé entre nous. Je ne vois pas quels arguments pourraient conduire à recommander la construction d'un rapport de forces entre l'Assemblée et le Gouvernement, alors que ni la position du Gouvernement ni celle du groupe politique majoritaire ne sont connues. Ce dernier n'a d'ailleurs pas encore débattu du sujet.
En revanche, à ce stade de la réflexion, eu égard à la sensibilité de la question, à la compréhension ou à l'incompréhension de nos concitoyens, ainsi qu'aux postures adoptées par certains, notamment par Marc Le Fur, il est important, selon moi, que nous ayons un débat dans l'hémicycle avant les décisions et les arbitrages ministériels. Il y a deux manières d'obtenir un tel débat : soit la commission adopte, ainsi que le propose Olivier Faure, l'un des amendements en discussion ; soit les auteurs des amendements les retirent maintenant mais les déposent à nouveau en vue de la séance. Dans les deux cas, nous aurons exactement le même type de débat, et le ou les amendements pourront être retirés en séance publique en fonction de ce que dira le Gouvernement.
Cependant, j'appelle votre attention sur un point, mes chers collègues : pour nos concitoyens comme pour les médias qui m'interpellent depuis le début de l'après-midi pour savoir si les députés socialistes voteront l'augmentation de 2 centimes de la fiscalité sur le gazole, un amendement adopté par la commission des finances n'est pas quelque chose d'anodin : c'est une décision entérinée. J'en appelle donc à la raison et à la responsabilité de chacun.
Je le répète : nous mènerons ce débat et nous aurons un dialogue avec le Gouvernement. Le cas échéant, s'il devait y avoir un désaccord avec celui-ci – nous ne connaissons pas aujourd'hui sa position –, il sera toujours temps pour le groupe politique majoritaire et pour l'ensemble des parlementaires de reprendre la main dans l'hémicycle lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative.
C'est un peu un faux débat : ce n'est pas par le prix du gazole que nous changerons fondamentalement les choses. Le prix du gazole a d'ailleurs fortement progressé, beaucoup plus que celui de la baguette de pain.
Pourquoi les gens continueront-ils à acheter des véhicules diesel ? Parce que le moteur diesel est plus résistant que le moteur à essence et qu'il permet de faire trois à quatre fois plus de kilomètres. Il est aussi plus facile et donc moins coûteux à entretenir, et résiste mieux au froid. Sans parler du fait qu'il consomme moins. Et c'est un mécanicien qui vous le dit !
Nous parlons du diesel, mais pourquoi ne parlons-nous pas du kérosène, qui est beaucoup plus polluant ? Des dizaines de millions de mètres cubes de kérosène sont rejetés chaque année dans l'atmosphère, et les avions ne sont pas équipés de filtres à particules !
La commission du développement durable a auditionné le président-directeur général de PSA Peugeot Citroën. Celui-ci a expliqué que l'air absorbé par un moteur diesel contenait davantage de particules que l'air rejeté par ce même moteur lorsqu'il était équipé d'un filtre à particules. Il s'est dit prêt à financer une étude sur la question, en nous laissant désigner les experts de notre choix. C'est plutôt cela qu'il faudrait faire. Lorsque l'on entend le débat actuel sur le diesel, on a l'impression qu'il est question du moteur Indenor, qui n'existe plus depuis trente ans ! Dans le même temps, on ne fait rien pour régler le problème des camions et des véhicules de transport en commun, qui polluent à fond la caisse ! Car on ne va pas demander aux patrons de changer tous leurs camions en quelques mois !
Nous mélangeons au moins trois dossiers. Le premier porte sur l'opportunité de taxer l'essence et le gazole à parité énergétique, c'est-à-dire de mettre fin à cette disposition remontant à plus de cinquante ans qui a favorisé la diésélisation du parc. Il y a, semble-t-il, une majorité pour aller dans cette direction. Nous avons commencé à le faire l'année dernière en augmentant la fiscalité sur le gazole de 2 centimes par litre. À partir de là, la question est de savoir à quelle vitesse il faut aller. Tous ceux qui se sont penchés sur la question estiment qu'il faut prévoir un temps long : sept à dix ans, c'est-à-dire une augmentation de 1 à 2 centimes par an au maximum. Je précise que taxer à parité énergétique, comme le fait le Royaume-Uni par exemple, cela ne signifie pas instaurer la même taxe pour les deux carburants, car 1 litre d'essence libère 5 % d'énergie en plus que 1 litre de gazole. En outre, il existe plusieurs manières d'atteindre la parité fiscale entre l'essence et le diesel, dont nous pouvons discuter.
Le deuxième débat porte sur le financement de l'AFITF. Son budget s'élevant actuellement à 1,9 milliard d'euros, il lui manque, pour faire simple, 600 à 700 millions d'euros. Certains préconisent d'augmenter à la fois la fiscalité sur le gazole et celle sur l'essence, et d'affecter le produit correspondant à l'AFITF, ce qui pourrait faire en effet à peu près 700 millions, en fonction du rythme de la hausse.
Le troisième débat, marginal par rapport aux deux premiers, porte sur l'opportunité de donner un avantage fiscal aux carburants « oxygénés ». Ainsi, les amendements I-CF388 et I-CF230 visent à diminuer de 1 centime par litre la taxation sur l'essence SP95-E10 et à augmenter de 1 centime par litre celle sur l'esssence SP95. Cette mesure est neutre du point de vue budgétaire.
Plusieurs débats se posent : le pouvoir d'achat, la manière de faire converger les fiscalités sur le gazole et l'essence, le financement de l'AFITF et la contribution climat-énergie. Il me paraîtrait plus logique d'avoir une discussion globale sur l'ensemble des propositions du Gouvernement lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative. Je maintiens ma position : j'invite les auteurs des amendements à les retirer ; à défaut, je donnerai un avis défavorable à chacun d'eux.
Pour répondre à Dominique Lefebvre, je suis plutôt un commissaire discipliné, qui essaie d'être cohérent avec l'action du Gouvernement. Mais il y a des sujets sur lesquels le Gouvernement est plus ou moins cohérent.
Cela n'empêche pas d'être libre, monsieur Le Fur ! Pour votre gouverne, je vous rappelle que vous avez vous-même souhaité la réalisation d'un certain nombre d'infrastructures dans le cadre du rapport Duron. Vous pourrez expliquer au cours de la campagne pour les régionales que vous ne savez pas comment les financer. C'est bien de faire des promesses, c'est mieux de les tenir !
On peut dire que nous ne connaissons pas la position du Gouvernement. Pour ma part, je crois que je la connais depuis au moins un an : l'écotaxe n'a pas été mise en place et, depuis lors, nous ne savons pas comment financer nos infrastructures de transport. La ministre de l'écologie a déclaré aujourd'hui – ce n'est pas neutre – qu'il faudrait parvenir, à terme, à une convergence des fiscalités sur l'essence et le gazole, en finançant la baisse de l'une par l'augmentation de l'autre. Je ne cherche pas à forcer la main de la commission, mais je pense que nous ne devons pas partager cette position, car elle ne résout pas la question que nous posons avec la commission du développement durable.
Je souhaite que nous adoptions mon amendement, afin d'adresser un signal clair et d'être mieux armés pour la discussion dans l'hémicycle. Ainsi que l'a souligné Dominique Lefebvre, lorsque la commission des finances vote un amendement, cela a un sens pour tout le monde. Quelle que soit la position du Gouvernement, je m'engage dès à présent à retirer mon amendement en séance publique pour le déposer à nouveau lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative. Nous accepterons donc de continuer la discussion avec le Gouvernement, de manière calme, mais en ayant une position affirmée.
Je retire mon amendement au profit de l'amendement I-CF388 de la commission du développement durable. Ainsi, les deux commissions auront adopté le même amendement, ce qui lui donnera encore plus de poids.
Les amendements I-CF286, I-CF301, I-CF302, I-CF288, I-CF304, I-CF230 et I-CF303 sont retirés.
La commission rejette l'amendement I-CF388.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 7 octobre 2015 à 16 heures 15
Présents. – M. Éric Alauzet, M. François André, M. Dominique Baert, M. Laurent Baumel, M. Jean-Marie Beffara, Mme Karine Berger, M. Étienne Blanc, M. Jean-Claude Buisine, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. Romain Colas, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Louis Dumont, M. Olivier Faure, M. Alain Fauré, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Joël Giraud, M. Marc Goua, Mme Arlette Grosskost, M. Razzy Hammadi, Mme Bernadette Laclais, M. Jean Launay, M. Dominique Lefebvre, M. Marc Le Fur, Mme Véronique Louwagie, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Monique Rabin, Mme Eva Sas, M. Pascal Terrasse, M. Michel Vergnier
Excusés. - Mme Aurélie Filippetti, M. Jean-Claude Fruteau, M. Victorin Lurel, M. Laurent Wauquiez
Assistaient également à la réunion. - M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. François Pupponi