La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Ce matin, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, tout d’abord, comme je l’avais déjà exprimé en première lecture, je tiens à féliciter les parlementaires de l’Assemblée nationale qui sont à l’origine de ces deux propositions de loi, preuves du dynamisme de notre assemblée, et de sa commission des lois, qui prend en main la réforme de questions importantes. Si ces textes paraissent éloignés des préoccupations des Français, n’oublions pas que c’est de la Constitution et de l’efficacité du système électoral que dépend la légitimité démocratique de tout le droit de notre pays.
Derrière ces deux propositions de loi, organique et ordinaire, se profile une modernisation du régime électoral entourant l’élection du Président de la République et de quelques règles essentielles concernant les élections en général. Certaines dispositions étaient réclamées de longue date par certains élus, le Conseil constitutionnel et de nombreux constitutionnalistes français, mais aussi par la Commission nationale des comptes de campagne et le Conseil supérieur de l’audiovisuel, entre autres.
Il ne s’agit pas, bien sûr, de satisfaire aux demandes de ces autorités, comme l’a rappelé hier M. Lagarde, mais d’entendre ces recommandations et d’apprécier, avec notre liberté de législateur, l’utilité d’aller ou non dans leur sens. Les propositions de ces deux textes s’inscrivent pleinement dans la politique de transparence publique menée par la majorité socialiste depuis l’année 2012. Elles marquent la recherche constante d’un véritable équilibre entre une meilleure représentation politique et le maintien de l’efficacité de l’action publique.
Il en est ainsi de la publication de tous les parrainages qui constitue une réelle innovation sous la Ve République et garantit, pour les électeurs, la transparence de la vie publique. Le choix des élus parrains s’effectue sous le regard attentif des citoyennes et des citoyens qui sont, dans une démocratie digne de ce nom, les véritables juges de l’action politique.
Cette évolution permet de responsabiliser tous les acteurs en soumettant leur choix au regard du public. Elle permet aussi de respecter le principe d’égalité entre les parrains, lesquels seront désormais tous connus. Il est mis fin à l’opacité d’un autre âge entourant les parrainages comme leur nombre rapporté à chacun des candidats.
Il est de bonne politique de prévoir dans le texte une transmission directe des parrainages par les élus au Conseil constitutionnel. L’élu remplira en responsabilité le formulaire ad hoc et les candidats se verront libérés d’une tâche matérielle qui n’est pas la plus valorisante de la procédure.
La substitution du principe d’équité à celui d’égalité, pendant la période dite intermédiaire, qui court de la publication de la liste des candidats à la veille de la campagne officielle, était réclamée de longue date par le CSA. Nous savons tous que cette recommandation ne peut suffire à légitimer cette disposition, laquelle, au demeurant, fait l’objet de critiques auxquelles je n’ai pas été insensible à titre personnel, dans un premier temps.
Mais, en fin de compte, la stricte égalité ne permet pas toujours de coller à une réalité importante dont les médias devraient rendre compte. Il est essentiel que les services de télévision relatent une actualité qui intéresse au premier chef nos concitoyens. Il importe de donner du dynamisme à une campagne électorale et d’attirer les citoyennes et les citoyens. Le temps égalitaire partagé à des heures d’écoute très différentes ne valorise pas, contrairement à ce qu’ils redoutent, les candidats moins connus.
L’équité maintient l’exigence que chaque parti dispose, d’une part, d’un temps d’antenne minimum et, d’autre part, d’un temps d’antenne en fonction de sa capacité à mobiliser et à faire vivre de nouvelles idées. Il nous faudra veiller à ce que cette équité favorise le pluralisme.
Des analyses faites sur cette période intermédiaire, il ressort que l’application du droit actuel est contreproductive pour les candidats et préjudiciable au pluralisme des opinions. La stricte application de l’égalité aboutit à une frilosité des médias et à une réduction du temps de parole, qui serait en baisse continue depuis 2007, en raison de critères trop rigides.
Le CSA devra veiller au respect de ce traitement équitable. Les citoyens et les candidats y veilleront aussi, en tenant compte de critères de représentativité et de la contribution de chaque candidate et de chaque candidat à l’animation du débat électoral. Ces critères ne sortent pas d’une simple analyse, mais ils ont été validés par le Conseil d’État, pour cette période préliminaire. Nous ne proposons pas une modernisation sans garantie. Le débat politique est attendu et cette mesure, très limitée dans le temps, doit permettre de le dynamiser, ce qui favorisera tous les candidats et le pluralisme des opinions auquel nous sommes très attachés.
Enfin, nous revenons pour l’essentiel au texte issu de la première lecture à l’Assemblée nationale. Il en est ainsi de la fermeture des bureaux de vote pour les seules élections présidentielles à dix-neuf heures et à vingt heures, pour mettre un terme aux divulgations anticipées des résultats, comme de la réduction à six mois de la période de prise en considération des comptes de campagne pour toutes les élections hormis les élections présidentielles.
Nous avons adopté en commission des lois, à l’unanimité, un amendement défendu par M. Lagarde, au nom de l’UDI, proche de celui que nous avions nous-même déposé – et c’est très bien ainsi. Nous vous proposerons, au nom du groupe SRC, un nouvel amendement permettant de distraire de l’article L. 52-4 du code électoral la période concernant les élections présidentielles, laquelle doit rester fixée à un an.
À ce sujet, je tiens à préciser, pour avoir entendu des propos contraires, que l’élection d’un président de la République n’est jamais invalidée en cas de rejet des comptes de campagne. Il y a une sanction financière, dont nous avons eu l’exemple il y a peu.
L’article 2 ter de la loi ordinaire a été introduit et adopté à l’unanimité par le Sénat. Cet article vient modifier substantiellement la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages portant sur des sujets liés, de manière directe ou indirecte, au débat électoral. Malgré mes réserves et celles de la rapporteure, tenant à un texte de loi à part entière et non examiné dans le détail depuis 2011, la commission des lois de l’Assemblée nationale a voté conforme hier ce nouvel et long article de plus de quatre pages.
Il s’agit finalement, grâce à ce texte, d’ajouter de la transparence et des contraintes s’attachant à la publication ou à la diffusion des sondages, objets de questions récurrentes en période électorale. Tels sont les commentaires qu’appellent de ma part ces deux textes : il faut en saluer l’adaptation et la modernisation, comme l’exigence de transparence. Nos débats en témoigneront.
Madame la présidente, madame le secrétaire d’État, chers collègues, l’élection présidentielle est devenue l’un des derniers moments où le peuple français se sent encore acteur de son propre destin, l’un de ces derniers refuges où s’exprime le sentiment d’appartenance à une communauté nationale de plus en plus abstraite, malheureusement, pour nos compatriotes.
Pourtant, cette proposition de loi organique n’est rien d’autre qu’un appauvrissement du débat d’idées, un changement des règles du jeu un peu suspect à quelques mois de l’élection présidentielle, au détriment des candidats qui ne bénéficient pas de la connivence du système politico-médiatique et de ses prébendes.
Ce texte aurait pu être l’occasion de revoir intégralement le système inique des parrainages à la présidentielle, un système de filtre dont l’objectif initial était d’éviter les candidatures farfelues, mais qui s’est avéré, et qui s’avère encore, une formidable machine à pénaliser, voire à bloquer, les candidatures des partis hors système, quand bien même elles représenteraient plusieurs millions de Français. Nous en avons d’ailleurs fait la triste expérience en 1981, lorsque notre candidat n’a pu se présenter, faute de parrainages suffisants, suite aux manoeuvres de Valéry Giscard d’Estaing.
La dérive de ce système va encore s’aggraver avec votre loi, car ce sont désormais tous les parrainages qui seront rendus publics, et non pas les 500 actuellement en vigueur par tirage au sort. Cela accentuera toutes les pressions des appareils de partis et des baronnies locales, qui agiteront la carotte de la subvention ou de l’investiture à la prochaine élection, sur les élus locaux, comme c’est déjà tristement le cas.
Il aurait fallu réformer, mais dans le sens de la protection de l’anonymat du parrainage, principe originel des règles relatives à l’élection présidentielle. Comme cette disposition ne suffisait pas, vous précisez que la publication des parrainages par le Conseil constitutionnel se fera au fil de l’eau, c’est-à-dire avant même la validation des candidatures : autant dire que le candidat ayant peu de parrainages sera considéré comme inutile à parrainer et que les risques de pression se multiplieront pour les suivants.
Je partage à ce titre les propos de l’éminent constitutionnaliste Guy Carcassonne, qui déclarait en 2013 sur la publicité des parrainages : « transformer la quête aux signatures […] en une course de performance, où chaque candidat aura à coeur de montrer qu’il a le plus de soutiens à cette occasion, me paraît profondément malsain. Parce que cela ne correspond ni à l’objet, ni à la règle, ni à la logique même de l’élection présidentielle. »
Vous dégradez donc l’esprit de la Ve République, qui voulait que la présidentielle soit la rencontre d’un homme avec les Français, et non pas un affrontement entre appareils partisans. Les parrainages citoyens, annoncés dans les propositions de François Hollande, rejoignent ainsi les mille et une promesses tombées dans les méandres de son quinquennat. Je vous le dis de façon d’autant plus désintéressée qu’aujourd’hui le Front national dispose de suffisamment d’élus pour obtenir ces parrainages sans difficulté. C’est bien le seul souci démocratique qui motive notre position.
En outre, l’article 2 modifie les modalités de transmission des parrainages au Conseil constitutionnel sans aucune justification valable. Désormais, les élus devront directement les adresser aux Sages du Conseil et par voie postale, en espérant que La Poste ne soit pas en grève pour entrer dans les délais, comme ce fut le cas lors des élections régionales. C’en est donc fini de la possibilité pour les équipes de campagne des candidats de centraliser les signatures pour leur dépôt au Conseil constitutionnel.
Les candidats, que vous plongez dans l’incertitude la plus totale, ne connaîtront plus en temps réel le nombre de signatures obtenues. Le décompte des parrainages à l’instant t est pourtant essentiel pour les formations qui n’ont pas un réservoir conséquent d’élus et pour lesquelles la récolte des signatures est un véritable chemin de croix, où tout se joue parfois à quelques signatures près.
L’article 4, quant à lui, porte un nouveau coup au pluralisme politique dans les médias. La campagne allant de la date de publication au Journal officiel de la liste des candidats jusqu’à la veille de la campagne officielle ne permettra plus l’égalité des temps de parole pour l’ensemble des candidats. Cette égalité ne sera assurée que durant les deux dernières semaines de la campagne officielle. Ce sera désormais un vague principe d’équité, sous le contrôle du CSA, qui régira le reste de la campagne.
Rappelons que le président du CSA est nommé par le Président de la République et que les six autres membres sont désignés par les deux assemblées. Nous pouvons légitimement nous inquiéter de l’interprétation qui sera faite de ce concept d’équité. Le CSA devra prendre en compte les enquêtes de sondages. Le Gouvernement avalise donc la démocratie des sondages, en demandant au CSA de se baser sur des intentions de vote, et non sur l’engagement réel des électeurs.
Les autres critères pris en compte par le CSA seront tout aussi contestables et engendreront, inéluctablement, des inégalités de traitement. Je pense notamment aux résultats obtenus lors des dernières élections et à la contribution de chaque candidat à l’animation du débat électoral. Dans ces conditions, une candidature hors parti est quasi disqualifiée d’office.
Nous considérons que l’égalité du temps de parole doit être la règle, dès lors que la liste des candidats est officiellement publiée. Ayant entendu par ailleurs quelques mensonges, je précise à M. Lagarde, qui n’est plus là, qu’en 2014 et 2015, à la télé et à la radio, le temps de parole des Républicains a été de 34,1 % ; celui du PS de 27,4 % ; des Verts de 6,7 % ; et du FN de 5,8 %. Nous voterons contre ces propositions de loi.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle.
La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement no 8 .
Cet amendement a été déposé par Alain Tourret, au nom de notre groupe. Il tient compte de l’apparition des communes nouvelles. Nous souhaitons que les maires adjoints des communes historiquement regroupées puissent continuer à parrainer un candidat à l’élection présidentielle. C’est pourquoi nous proposons d’insérer, après le mot « déléguées », les mots « et des communes regroupées au sein des communes nouvelles ».
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission.
Cet amendement tenait très à coeur à M. Tourret et aux membres du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste – à juste titre, puisqu’il s’agissait d’harmoniser cette loi avec les nouvelles dispositions relatives aux communes regroupées au sein des communes nouvelles. Mais il est déjà satisfait. Depuis la première lecture, à l’initiative de M. Jean-Jacques Urvoas, les mots « des communes déléguées » figurent au troisième alinéa de l’article 1er.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage, pour donner l’avis du Gouvernement.
Même avis.
L’amendement no 8 est retiré.
Dans le cadre de la réforme de la représentation des Français de l’étranger que la ministre Hélène Conway-Mouret avait menée en mai et juin 2013, nous avions réformé l’Assemblée des Français de l’étranger – AFE – et mis en place une démocratie de proximité, avec l’élection de conseillers consulaires au niveau des circonscriptions pouvant regrouper deux, voire plusieurs pays. Cet amendement vise à inclure les vice-présidents de conseils consulaires dans la liste des personnes pouvant présenter un candidat à l’élection présidentielle. Actuellement, ils ne disposent pas de cette possibilité ; à la suite de la proposition de parlementaires de la majorité, le Sénat a jugé que cela devait être réparé. Permettez-moi de citer le rapport des sénateurs Christophe-André Frassa et Jean-Yves Leconte : « cette situation est d’autant plus paradoxale que le législateur organique a interdit, à compter de 2017, l’exercice de la vice-présidence d’un conseil consulaire avec le mandat parlementaire, l’assimilant ainsi à une fonction exécutive locale. Par cohérence, vos rapporteurs estiment que, par souci d’équité, le législateur organique devrait, au même titre que les maires, ouvrir aux vice-présidents du conseil consulaire le droit de présenter un candidat à l’élection présidentielle, actuellement réservé aux conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger. »
En première lecture, nous avions déjà rejeté les amendements visant à ajouter les vice-présidents des conseils consulaires parmi les possibles parrains des candidats à l’élection présidentielle. En effet, à la différence des collectivités territoriales, les conseils consulaires n’ont d’attributions que consultatives. Le fait que le mandat de vice-président de conseil consulaire soit, à partir de 2017, incompatible avec le mandat parlementaire ne suffit pas à justifier l’octroi de la qualité de parrain, sauf à devoir faire de même pour les adjoints aux maires, les vice-présidents d’établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, les présidents et vice-présidents de syndicats mixtes, etc. Les élus des Français de l’étranger – les sénateurs et les députés élus à l’étranger, ainsi que les conseillers à l’AFE – peuvent déjà parrainer des candidats à l’élection présidentielle. Avis défavorable.
Même avis. Le Gouvernement s’est déjà exprimé à ce sujet en première lecture. Comme l’a souligné Mme la rapporteure, on ouvrirait la boîte de Pandore, risquant de recevoir d’autres demandes, par exemple de la part des adjoints aux maires de grandes villes, dont la légitimité démocratique est plus avérée et qui ont des responsabilités importantes.
Madame la ministre, cette demande ne me paraît pas illégitime. Vous oubliez de rappeler que par son vote, le Sénat l’a jugée parfaitement fondée. Je retirerai mon amendement, mais je trouve que le législateur organique introduit là une contradiction. S’il s’agit d’une fonction purement consultative, à quoi répond donc l’incompatibilité entre un mandat parlementaire et une vice-présidence de conseil consulaire ? On peut estimer que le législateur organique s’est trompé au moment du vote sur les incompatibilités de mandats, mais le Sénat porte sur la question une appréciation divergente.
L’amendement no 3 est retiré.
L’article 1er est adopté.
La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement de suppression no 24.
Je suis interpellée par l’exercice de sophisme assez talentueux qui tend à justifier cette mesure, car je ne vois pas quel en serait l’avantage pour le candidat. Laissez parler l’expérience d’un parti politique qui a été extrêmement pénalisé par ce système de parrainage et qui, pendant des décennies, a eu des difficultés considérables, au point, en 1981, de ne pas pouvoir présenter un candidat. Je vous assure que les petites formations ne bénéficiant pas d’un vaste réseau d’élus, comme ce fut longtemps notre cas, ont besoin de savoir précisément combien de signatures elles ont en leur possession pour pouvoir organiser leur campagne dans les meilleures conditions, surtout lorsque cela se joue à quelques signatures près. C’est pourquoi il convient de maintenir la possibilité octroyée au candidat de remettre lui-même au Conseil constitutionnel les signatures des élus habilités.
C’est un des moyens qui nous ont paru intéressants pour s’assurer du caractère personnel et volontaire du parrainage et éviter les pressions qui pouvaient être exercées sur les petits maires. Considérant que le Conseil constitutionnel s’engage à répondre quotidiennement aux candidats qui demandent où ils en sont, mon avis est forcément défavorable. En effet, cette mesure ne pénalisera pas les candidats.
Défavorable. Le Gouvernement est favorable à la réforme des parrainages proposée par le Conseil constitutionnel. Au regard de la longue expérience de l’élection présidentielle dont dispose le Conseil, nous devrions tous réfléchir à deux fois à son avis. Quant à l’argument que vous venez de soulever pour justifier votre amendement, les parrainages seront publiés deux fois par semaine, ce qui est pleinement suffisant pour assurer aux candidats une information précise, et au fur et à mesure, durant la période qui précède le dépôt des parrainages.
L’amendement no 24 n’est pas adopté.
À l’heure actuelle, la loi du 6 novembre 1962 se borne à prévoir que les présentations des candidats à l’élection présidentielle sont « adressées » au Conseil constitutionnel, sans préciser par qui ni sous quelle forme. Ainsi, rien n’impose que le parrainage soit transmis par son auteur : il peut l’être également par le candidat ou par son équipe de campagne. L’article 2 de la proposition de loi organique prévoit que les présentations sont adressées par le « parrain » lui-même, et non par le candidat ou ses soutiens, justifiant cette mesure par les pressions que les élus locaux pourraient subir de la part des candidats. Mais ce n’est pas le mode de transmission qui risque d’exposer les élus à des pressions ; celles-ci peuvent davantage venir des collectivités d’un niveau supérieur, dont les maires, en particulier ruraux, dépendent étroitement pour le financement de leurs projets. Cet amendement vise donc à maintenir la possibilité pour le « parrain » de remettre le formulaire au candidat de son choix, à charge pour celui-ci de le transmettre au Conseil constitutionnel.
J’entends vos arguments, mais je ne vois pas en quoi le changement du mode de transmission donnerait aux collectivités locales davantage de moyens de pression. En revanche, il nous paraît important d’entendre les témoignages de petits maires qui sont harcelés…
…et qui finissent, sous la pression, par donner un document qu’ils n’auraient peut-être pas donné s’ils avaient pu le retenir une heure ou deux. Nous avons choisi la voie de la transparence et du caractère personnel et volontaire des parrainages, et cela nous paraît être une avancée. Avis défavorable.
Défavorable. Nous suivons les propositions du Conseil constitutionnel.
L’amendement no 14 n’est pas adopté.
C’est un amendement de conséquence. Ayant retiré l’amendement auquel il est rattaché, je ne le maintiens pas.
L’amendement no 5 est retiré.
L’article 2 prévoit que dorénavant, hors outre-mer, les présentations devront être adressées au Conseil constitutionnel, et non à une préfecture ; par l’auteur de la présentation lui-même, et non par une équipe de campagne ; par voie électronique ou postale, au moyen de l’enveloppe envoyée à cet effet aux élus, et non sous la forme d’une télécopie, d’un courriel ou d’une remise directe auprès du Conseil.
Nous l’avons vu dans la discussion générale comme lors du débat en commission, la modification des règles de présentation des parrainages devant le Conseil suscite quelques oppositions, certains y lisant une volonté de verrouiller l’accès aux candidatures des petits candidats. Le débat nous a permis de progresser à la fois sur la transparence – le Conseil publiera le nombre des parrainages déposés deux fois par semaine – et sur la nécessité pour chaque élu d’assumer ses choix devant les électeurs. Mais il reste la question de l’utilisation des moyens électroniques pour adresser le parrainage devant le Conseil. Le III de l’article prévoit de repousser la possibilité de présentation électronique à après 2017. Dès lors, la facilité introduite par l’article perd de sa force, alors même que les éléments durcissant ces présentations seront applicables dès la prochaine élection. Aucun élément technique ne s’oppose aujourd’hui à une mise en place de cette possibilité dès 2017. Je suis pour la transparence et l’efficacité ; mais je ne voudrais pas que l’on durcisse les conditions de parrainage.
Monsieur Coronado, je regrette que la transmission électronique des parrainages ne puisse s’appliquer dès l’élection présidentielle de 2017, d’autant plus que j’avais déposé, au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, un amendement similaire. En même temps, dans le cadre de notre travail avec M. Jean-Luc Warsmann, nous constatons que cette réforme ambitieuse nécessite encore du temps. C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité reporter l’entrée en vigueur de la disposition aux élections postérieures à 2017. L’élection présidentielle doit disposer d’un système fiable et sécurisé ; il est donc plus prudent d’attendre que toute la France soit correctement équipée pour assurer ces transmissions électroniques – ce qui est actuellement loin d’être le cas.
Monsieur le député, le Gouvernement est tout aussi favorable que vous au principe de transparence, notamment en matière de parrainages et d’élection présidentielle. C’est justement parce que nous y sommes attachés que nous sommes défavorables à votre amendement, qui supprime l’alinéa permettant au Conseil constitutionnel de préparer l’introduction, en 2020, de ce mode de transmission. Comme l’a souligné Mme la rapporteure, le dispositif ne sera pas prêt pour l’année prochaine.
L’amendement no 1 n’est pas adopté.
L’article 2 est adopté.
La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement de suppression no 25.
Je rappelle que l’objectif initial du système de parrainage était d’éviter les candidatures farfelues. À ce titre, la simple nécessité d’obtenir le parrainage de 500 élus apporte une garantie suffisante. En l’état actuel, ne sont publiés que 500 parrainages tirés au sort ; avec cette proposition de loi organique, l’ensemble des parrainages sera publié. Nous ne comprenons pas ce qui justifie cette évolution, car certains élus, qui peuvent souhaiter simplement permettre l’expression démocratique du vote – c’est souvent le cas –, se retrouveront confrontés à des pressions partisanes, voire à des chantages parfois très virulents. Je parle d’expérience !
À cause de cette publication, certains élus craindront de parrainer certains candidats – alors même que l’acte de parrainage n’est pas un soutien politique. Nous proposons donc, évidemment, de supprimer cette disposition, qui va plus loin que le droit actuel en matière de publication des parrainages. Je défendrai dans quelques instants un amendement visant à supprimer totalement la publication des parrainages.
Votre amendement vise à maintenir le système actuel de publicité des parrainages, qui n’est pourtant pas exempt de reproches. Le tirage au sort de 500 signatures pose problème, car il est facteur d’inégalité : la probabilité de voir leur nom publié est bien plus élevée pour les élus qui ont parrainé un candidat ayant réuni à peine plus de 500 signatures que pour ceux qui ont parrainé un candidat ayant largement dépassé ce nombre minimal.
Qui plus est, nous pensons, au nom du principe de responsabilité politique et de l’exigence de transparence, que les élus ayant décidé de parrainer un candidat doivent assumer ce choix devant les électeurs dans tous les cas. Les électeurs sont tout à fait capables de comprendre que ce choix peut être motivé par la volonté d’encourager la pluralité des candidats. Peut-être devons-nous, en tant que citoyens, y travailler.
En outre, cette considération est confortée par la décision du Conseil constitutionnel du 22 février 2012, selon laquelle « la présentation de candidats par les citoyens élus habilités ne saurait être assimilée à l’expression d’un suffrage. »
Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.
Même avis.
En théorie, tout cela serait formidable, mais dans la pratique, les choses sont radicalement différentes – je l’ai vécu. Les grands partis traditionnels, ceux qui ont mis en place le système, font tout pour exclure des candidatures différentes. Voilà la réalité !
Il faut l’avoir vécu pour le croire : tout est fait pour dissuader les maires d’accorder des parrainages à des personnalités différentes. Ainsi, l’article 3 de cette proposition de loi organique, qui prévoit la publication des parrainages au moins deux fois par semaine, soumettra les maires à une incroyable pression : ils subiront des pressions politiques, on leur fera du chantage aux subventions… Les maires auront désormais peur de parrainer des candidats.
En voici la preuve. Lorsque j’ai été candidat aux élections présidentielles, la plupart des élus qui m’avaient apporté leur parrainage – pas tous, heureusement – étaient en fin de mandat. Ils ont osé me parrainer parce qu’ils avaient décidé de ne pas se représenter. Cela prouve bien l’extraordinaire pression à laquelle ils sont soumis.
Avec cette mesure, vous prenez un risque considérable. L’élection présidentielle a été voulue par le général de Gaulle afin d’échapper au régime des partis ; l’ensemble de cette proposition de loi organique ne vise qu’à kidnapper l’élection présidentielle pour la rendre aux partis. Prenez garde : à force de vous moquer du peuple, le peuple vous le rendra très fort !
Madame la rapporteure, vous vous êtes un peu trahie en donnant l’avis de la commission sur mon amendement. Vous avez vous-même reconnu que dans le système actuel, où 500 parrainages tirés au hasard sont publiés, certains élus risquent plus de voir leur nom apparaître que d’autres.
Il y a une inégalité, c’est vrai ; c’est une simple question de statistiques !
C’est donc qu’il y a un risque de pression ! Que prévoyez-vous pour y répondre ? Absolument rien ! Nous vous expliquons, d’expérience, qu’il y a des jeux de pouvoir et de partis – c’est un fait avéré, évident, personne ne vous dira le contraire. Les maires, notamment les petits maires,…
Ne dites pas « les petits maires », mais « les maires des petites communes » ; ce n’est pas la même chose !
…sont les plus vulnérables à la pression des collectivités ou des députés.
Qu’est-ce qui justifie encore la publication des parrainages ? J’aimerais qu’on me l’explique concrètement ! Si l’objectif est d’éviter les candidatures farfelues, alors le système de parrainage suffit en tant que tel, nul besoin d’exposer les noms des élus signant les présentations. J’aimerais obtenir une réponse qui ne soit pas un simple sophisme.
Derrière la volonté de faire de la recherche des parrainages un véritable chemin de croix, je vois clairement – je suis d’accord avec mon collègue Nicolas Dupont-Aignan sur ce point – l’objectif de favoriser le bipartisme, le règne des deux grands partis. C’est très pénalisant pour les candidats des autres partis, car le temps consacré à la recherche de signatures est perdu pour la campagne elle-même.
L’amendement no 25 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement no 27 .
Cet amendement va au bout de notre logique : comme je l’ai expliqué, il vise à supprimer l’ensemble du système de publication des parrainages. Il va donc à l’encontre de la logique de la majorité, qui entend élargir la publication à tous les parrainages.
Peut-être me suis-je mal exprimée tout à l’heure, quand j’ai évoqué la notion de « risque » : il s’agissait simplement d’un risque statistique. Je soulignais le fait que les parrains des candidats ayant recueilli de nombreuses présentations ont statistiquement moins de risques de voir leur nom publié. Il serait donc plus conforme au principe d’égalité que tous les noms des parrains soient révélés.
Vous témoignez de votre expérience ; nous avons, de notre côté, tenu compte de l’expérience des maires de petites villes : ils rapportent des situations de harcèlement qui leur sont très préjudiciables. Avec ce système de publication au fil de l’eau, quotidienne, les candidats sauront quels élus ont déjà donné leur parrainage ; ils sauront ainsi que ce n’est plus la peine de les solliciter, et pourront organiser autrement leur quête de parrainages. Je conçois que cette quête n’est pas simple, mais nos institutions sont ainsi faites !
Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
Défavorable.
Je voudrais présenter un second argument que je n’ai pas employé tout à l’heure – je l’ai gardé pour maintenant, afin de ne pas vous épuiser, madame la rapporteure !
Si la représentation nationale estime qu’il y a trop de candidats à l’élection présidentielle, et que certaines de ces candidatures sont farfelues, alors libre à elle de fixer le nombre de parrains à 750 ou à 1 000 ! Ce qui est choquant, c’est l’hypocrisie, la tartufferie de cette proposition de loi organique, qui vise, de manière détournée, à limiter le nombre de candidats à l’élection présidentielle. À tel point, d’ailleurs, que nous risquons d’avoir si peu de candidats à l’élection présidentielle que les Français s’en détourneront. Puisque c’est votre logique, assumez-la !
Au cours des élections présidentielles passées, y a-t-il eu tant de candidats farfelus que cela ? Y a-t-il eu un manque de débat ? C’est l’élection qui passionne le plus nos concitoyens, celle où la participation est la plus importante. Si vous voulez la réduire à un bipartisme strict – ou plutôt à un tripartisme, à présent –, alors il n’y aura plus, en réalité, qu’un seul tour de scrutin. Et s’il n’y a plus qu’un tour de scrutin, nous observerons la même chose qu’aux dernières élections régionales : 25 millions d’abstentionnistes, 5 millions de Français qui ne s’inscrivent plus sur les listes électorales, 20 millions qui ne votent plus.
Il y a eu, au deuxième tour des départementales, 8 % de votes blancs ou nuls, et le seul réflexe de votre majorité, c’est de fermer encore plus le système, de mettre le couvercle sur la marmite. C’est complètement ahurissant ! Vous êtes sur un vaisseau en perdition et vous fermez tout, vous vous bandez les yeux, et vous dites : « On continue comme ça. » Eh bien bon courage !
L’amendement no 27 n’est pas adopté.
Notre groupe est évidemment favorable à la publication intégrale de la liste des élus ayant présenté un candidat, car les élus doivent, sur ce point comme sur les autres, assumer leurs choix devant les électeurs.
En première lecture, un amendement a été adopté, aux termes duquel le Conseil constitutionnel doit publier, au fur et à mesure de la réception des présentations et au moins deux fois par semaine, les noms et qualités des citoyens ayant valablement présenté des candidats à l’élection présidentielle. Notre amendement est modeste, rapporté à ceux qui viennent d’être défendus et qui visaient à éviter toute publication : nous proposons simplement de substituer à ce système une publication quotidienne. Ce n’est pas non plus l’Amérique !
Il y a une bonne raison à cela. Votre système de publication deux fois par semaine entretiendra une forme de faux suspense, car la publication des noms sera l’occasion d’un rendez-vous médiatique inconsidéré, d’un véritable feuilleton, sur un sujet pourtant grave. À notre avis, la publication quotidienne des parrainages ferait disparaître le caractère spectaculaire et médiatique de cette divulgation, tout en assurant à nos compatriotes une vraie transparence à l’égard de la collecte de parrainages – objectif auquel la plupart d’entre nous, dans cet hémicycle, tenons le plus.
Ce débat a déjà eu lieu en première lecture. Telle était, en réalité, notre volonté initiale, mais il nous a paru difficile d’imposer au Conseil constitutionnel une publication quotidienne, ne serait-ce que pour lui éviter d’avoir à les publier les dimanches et jours fériés ! Nous avons donc retenu une formule beaucoup plus souple, exigeant une publication deux fois par semaine, sachant que la coutume veut que les candidats soient informés eux-mêmes quotidiennement par le Conseil constitutionnel ; à ce jour, nul n’a soutenu le contraire.
Même en l’absence de publication des parrainages, le battage médiatique a souvent été très soutenu ; l’absence de publication a même été largement instrumentalisée ! Je pense donc qu’il y aura de toutes façons un feuilleton médiatique, monsieur le député.
L’avis du Gouvernement est défavorable. Dans sa rédaction actuelle, la proposition de loi organique permet au Conseil constitutionnel d’apprécier librement la fréquence de publication : elle doit être au moins bihebdomadaire, mais si le Conseil constitutionnel souhaite accélérer la cadence, il pourra tout à fait le faire. Nous n’avons pas besoin d’amender le texte pour cela. C’est au Conseil constitutionnel, en tant que juge de l’élection, qu’il appartiendra de prendre cette décision.
Dans l’intérêt de notre débat, je retire cet amendement. Je comprends qu’il serait dommage d’obliger le Conseil constitutionnel à publier les parrainages y compris les dimanches et les jours fériés et chômés !
L’amendement no 15 est retiré.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 17 .
L’amendement no 17 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 29 .
Cet amendement a pour objet de prévoir la publicité intégrale des noms et qualités des personnes ayant présenté des candidats, y compris ceux qui n’ont pas réuni les 500 signatures requises. Cela améliorera la transparence de la procédure de parrainage.
Nous n’avons pas examiné cet amendement en commission. À titre personnel, j’y suis favorable, au nom de l’égalité des candidats en matière de publication des parrainages.
L’amendement no 29 est adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
L’article 4 A a été supprimé par la commission.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 23 , tendant à le rétablir.
Cet amendement vise à rétablir la première partie de l’article 4 A, introduit par le Sénat puis supprimé par la commission des lois de notre assemblée. Il prévoit que la publication de la liste des candidats n’a pas lieu « quinze jours au moins avant » le premier tour, mais « au plus tard le quatrième vendredi précédant » le premier tour. La période intermédiaire s’ouvrant avec la publication des candidats et se terminant à la veille de la campagne officielle serait ainsi allongée. Cet allongement ne se ferait pas dans des conditions satisfaisantes, mais enfin, la période intermédiaire serait allongée, c’est l’essentiel.
Cet amendement est évidemment lié à l’amendement no 16 visant à supprimer l’article 4. Notre objectif est d’allonger la période intermédiaire en conservant la règle actuelle d’égalité des temps de parole durant cette période – règle que vous essayez de mettre à mal. Je demande même si vous n’auriez pas mieux fait d’introduire dans la loi organique un article ainsi rédigé : « Pour être candidat à l’élection présidentielle, il faut avoir les initiales F. H. ! » Peut-être est-ce un simple oubli !
Sourires.
Cet amendement me paraît quelque peu incohérent, car nous avons évoqué une période intermédiaire de trois semaines – dans laquelle notre commission souhaite introduire la notion d’équité au lieu de celle d’égalité, modification à laquelle M. Lagarde n’est pas favorable. Or, il s’agirait ici d’allonger d’une semaine ladite période. L’amendement est également tout à fait contraire à ce qu’avait adopté le Sénat qui, lui, souhaite réduire cette période. Son adoption ne ferait donc qu’aggraver la situation actuelle. Je rappelle en outre que la période a été calibrée pour instaurer un calendrier qui soit cohérent, y compris en cas d’élection anticipée. Allonger sa durée d’une semaine serait de nature à contrarier ce calendrier. L’avis est défavorable.
L’avis est également défavorable, car en augmentant la durée de la période intermédiaire sans modifier les règles applicables, le présent amendement vise à allonger la période pendant laquelle le principe d’égalité des temps de parole doit être respecté. Or les avis des experts convergent pour que cette période soit régie par un principe d’équité des temps de parole.
Il faut aussi prendre en compte un élément de fait : l’allongement de la période au cours de laquelle on appliquerait le principe d’égalité aurait paradoxalement pour conséquence de réduire l’exposition médiatique de tous les candidats, puisque les médias soumis à la pression de la règle de l’égalité ont tendance à réduire le nombre de débats. Je ne pense pas que ce soit le but si on veut des échanges démocratiques dignes de ce nom.
L’amendement no 23 n’est pas adopté.
Nous avons été plusieurs à rappeler lors de la discussion générale que quand on légifère en urgence comme c’est le cas pour ces deux propositions de loi, il convient de créer les conditions d’un assez large consensus. Or, à part le groupe socialiste, il n’y a absolument pas eu d’accord sur le dispositif proposé, que ce soit en commission ou dans l’hémicycle. Il sera probablement voté du fait du nombre de députés présents, mais j’ai bien entendu ce matin qu’au nom de leurs groupes respectifs, mes collègues Huguette Bello, Jean-Christophe Lagarde et Roger-Gérard Schwartzenberg y étaient opposés, tout comme je le suis au nom du groupe écologiste, Philippe Gosselin étant pour le moins réservé au nom du groupe Les Républicains. Nous avons tous exprimé notre opposition à l’article 4 tel que rétabli par la commission. Comme vous le savez, cet article substitue un principe d’équité à l’actuelle règle d’égalité des temps de parole des candidats pendant la période intermédiaire. Je rappelle qu’il est aujourd’hui prévu durant cette période une stricte égalité des temps de parole et une équité seulement pour les temps d’antenne.
L’adoption de ce dispositif serait un recul regrettable pour notre vie démocratique : cela relève d’une conception assez hégémonique du débat public et appauvrirait la démocratie en empêchant l’émergence de forces minoritaires et alternatives dans le champ politique. En outre, cela contreviendrait au principe d’égalité du citoyen face à l’élection.
Par ailleurs, les électeurs doivent pouvoir écouter ce que tous les candidats ont à dire, dès lors qu’ils ont bénéficié du nombre de parrainages requis pour se présenter, indépendamment de leur appartenance partisane. C’est en tout cas l’esprit de la Ve République. Si l’on y est opposé, il faut changer de République – c’est d’ailleurs ce que nous proposons, mais cela ne semble pas être la volonté du groupe majoritaire.
Enfin, sur quels critères un candidat, par son poids politique passé ou supposé via des sondages, disposerait-il d’un temps de parole différent d’un autre ?
C’est un mauvais choix que vous allez faire, chers collègues socialistes. J’ajoute qu’il aurait été sage, à titre de compromis, de maintenir la proposition du Sénat de réduire la durée du temps intermédiaire. Le vote de cet article va s’apparenter à un petit coup de force peu de temps avant l’élection présidentielle.
La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement no 9 .
Cinq groupes sur six dans cet hémicycle montrent qu’ils ne sont pas favorables à cet article. Or il faut un certain consensus pour légiférer en la matière et changer les règles d’une élection aussi importante que celle-ci.
Je suis pour le maintien du principe d’égalité, même pendant la période intermédiaire.
L’équité est un concept extrêmement flou, qui ne veut pas dire grand-chose. L’exposé des motifs revient à inciter le législateur à se conformer aux impératifs commerciaux des médias et aux codes de l’État spectacle, ce qui n’est manifestement pas souhaitable. Je ne pense pas que cet article vise à renforcer le duopole que forment les deux principaux partis, ni qu’il y ait volonté d’abus de position dominante, mais il serait heureux que nous demeurions dans le cadre du principe d’égalité, base du suffrage universel, à savoir le droit des candidats de se présenter devant lui à armes égales.
J’ajoute que le Sénat a voté pour la suppression de cet article, alors qu’il n’est pas composé de parlementaires totalement inconséquents. Cinq des six groupes de notre Assemblée le rejettent comme la grande majorité des sénateurs : ce sont je crois deux éléments à prendre en considération.
Il y a une jurisprudence constante s’agissant des élections : quand on tripatouille les règles du jeu, l’on perd l’élection. Le groupe UDI s’oppose avec force à l’article 4, qui met fin à l’actuelle règle de l’égalité des temps de parole durant la période intermédiaire. Celle-ci et la campagne officielle sont en effet les seules semaines au cours desquelles une stricte égalité en la matière est garantie. Réduire encore ce nombre de semaines serait une modification totalement inacceptable et de surcroît dangereuse pour notre démocratie, particulièrement à un moment où la vie politique est mouvante.
Selon les auteurs de ce texte, la situation actuelle serait source de complications pour les chaînes de radio et de télévision… On peut ainsi, sous un tel prétexte, priver des candidats d’une règle qui les traite tous de façon égale dans leur accès aux médias. Dès le début de la période intermédiaire, la liste des candidats, établie par le Conseil constitutionnel, est publiée. Ceux-ci ne sont donc plus présumés ou seulement déclarés : ils sont des candidats officiels, ayant franchi l’obstacle des 500 parrainages. Ils doivent à ce titre être en mesure de s’exprimer de façon égale.
Je le dis calmement, mais je crois qu’il s’agit d’une heure très grave pour notre démocratie. Quand on exerce les plus hautes responsabilités tout en se référant à un parti – je pense au Président de la République et au Premier ministre –, essayer de changer les règles soi-disant au nom de l’équité, mais au profit de règles somme toute plus favorables au pouvoir en place… Cela m’inquiète.
La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement no 22 .
Je rejoins tout ce qui vient d’être dit, d’autant plus que l’équité étant un concept extrêmement vague, il va forcément falloir des critères, sur lesquels le CSA va se baser et qui seront nécessairement disqualifiants. Je pense par exemple au critère des résultats aux élections, qui ne sont pas toujours représentatifs, puisque certains partis ne peuvent pas systématiquement présenter des candidats sur tout le territoire, ce qui va mécaniquement réduire leur score de façon quelque peu injuste. Quant au critère des sondages, je le trouve particulièrement injuste – je le dis de façon d’autant plus transparente qu’ils nous sont plutôt favorables en vue des présidentielles. On avance ainsi vers la disqualification médiatique des petits partis, des petites candidatures, ou même de la première campagne d’un candidat hors parti et qui serait, de ce fait même, d’office disqualifié par ces critères.
Nous abordons en effet un point important de cette proposition de loi organique, mais il est difficile d’entendre l’accusation de vouloir museler les petits candidats ou de porter atteinte au pluralisme. Ce n’est pas l’esprit du texte qu’avait souhaité défendre Jean-Jacques Urvoas – dans la continuité duquel je m’inscris – en première lecture. Il faut sortir d’une certaine hypocrisie : tous les candidats n’ont pas droit au même traitement quand on applique les règles de l’égalité. Nous avons constaté au cours des élections précédentes que ce n’était pas le cas : passer à l’antenne dix minutes à deux heures du matin ou à vingt heures, ce n’est pas tout à fait la même chose.
Il aurait mieux valu un consensus, mais celui-ci est difficile à trouver, même parmi les opposants à cette modification : certains d’entre vous voudraient revenir à l’égalité alors que le Sénat, contrairement à ce qui a été dit, n’en a pas demandé le retour sur les cinq semaines – il souhaite seulement abréger d’une semaine la période intermédiaire, sans remettre en cause le principe de l’équité. Et puis, certains ont l’air de découvrir les critères du CSA comme si ceux-ci venaient d’apparaître pour définir cette nouvelle période d’équité, alors qu’ils existent depuis 2006 et ont été validés par le Conseil d’État à l’issue de contestations. Ils sont basés sur des éléments que l’on peut trouver subjectifs, que ce soit la prise en compte des résultats non pas de la dernière élection, mais des dernières élections, ou encore l’animation de la campagne. Je ne suis en effet pas très sûre que si M. Schwartzenberg, Mme Maréchal-Le-Pen et moi-même nous présentions, ce soit moi qui bénéficie, à l’aune du critère de l’exposition médiatique précédente des candidats, de l’exposition médiatique la plus importante, quand bien même je serais soutenue par un grand parti.
Dire que le CSA n’est pas engagé dans une non-discrimination des candidats et qu’il ne faudrait jamais rien changer, c’est oublier qu’une campagne ne se joue pas seulement sur la pluralité des candidats, mais aussi sur son dynamisme, sur l’envie des électeurs d’aller voter. L’équité renforcée que nous proposons, avec des temps d’antenne comparables et la diffusion hebdomadaire en open data des temps de parole des candidats, éventuellement révisables sur les trois semaines, me paraissent des garanties propres à répondre non seulement aux demandes du CSA ou de la télévision, mais aussi aux réclamations émanant d’autres autorités compétentes.
Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable à ces amendements, pour une raison simple : il ne s’agit pas d’une proposition gouvernementale, mais d’une demande exprimée à plusieurs reprises par le CSA, le Conseil constitutionnel et la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l’élection présidentielle. Le Gouvernement ne fait donc que souscrire à une proposition formulée par ces institutions, qui ont une autorité qui mérite d’être prise en compte et une parole qui mérite d’être entendue. Nous l’entendons.
Exclamations sur les bancs du groupe écologiste et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Sur le vote de l’article 4, je suis saisie par le groupe écologiste d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Isabelle Attard.
Madame la rapporteure, vous venez de le dire vous-même : nous sommes déjà face à une certaine hypocrisie lorsque l’on considère l’égalité du temps de parole dans les jours qui précèdent l’élection. Imaginez ce que cela va donner quand on se référera à la notion d’équité ! Ce ne sera plus de l’hypocrisie, avec tout de même un minimum de respect de l’égalité, mais des temps de parole répartis en fonction de je ne sais quels sondages ou de je ne sais quelles pressions.
Respecter l’égalité du temps de parole dérange peut-être le CSA ou les rédactions de presse mais nous n’avons pas à obéir à des rédactions souhaitant se simplifier la vie en n’invitant que trois ou quatre candidats.
Ces derniers mois, nos compatriotes nous ont écrit qu’ils ne voulaient pas l’équité, terme qu’ils n’estiment pas valable, mais l’égalité de traitement entre tous les candidats. Nous n’avons plus rien à faire dans cet hémicycle si nous ne sommes pas capables de faire respecter la volonté des citoyens, des membres des cinq groupes représentés dans notre Assemblée, sur les six qu’elle compte, de tous les non inscrits, qui aimeraient bien aussi être écoutés, et même, pourquoi pas, de ceux qui représentent le vote blanc, qui ont aussi envie de dire leur mot, et si nous ne sommes pas capables de faire respecter la notion d’égalité, qui appartient à la devise de notre République.
Respecter l’égalité du temps de parole entre candidats durant cinq semaines, sur les deux cent soixante que compte un quinquennat, est insupportable pour vous, madame la secrétaire d’État, pour certaines rédactions, pour le parti socialiste, qui devrait avoir honte aujourd’hui. Réalisez-vous ce qui se passe dans notre pays ?
Les députés du groupe socialiste comptent voter une proposition de loi qui veut faire taire des candidats indépendants. Voilà, clairement, une manoeuvre politique visant à imposer le tripartisme et rendre les Français prisonniers d’un face-à-face. Ainsi, mesdames et messieurs les députés du groupe socialiste, vous voulez faire taire les écologistes, le Front de gauche, et nous imposer une élection présidentielle semblable aux élections régionales. Ces faux arguments, cette hypocrisie et cette lâcheté sans nom sont trop faciles !
Mesdames et messieurs les députés du groupe socialiste, comme en matière sociale, où vous avez abandonné l’égalité, vous pouvez aller jusqu’au bout en matière démocratique, en instaurant l’équité ! Vous devez pourtant être bien fatigués pour oser supprimer l’égalité du temps de parole. Comme de nombreux Français, je suis vraiment scandalisé de ce qui se passe aujourd’hui. Les centaines de milliers de mails envoyés témoignent de l’impact de cette mesure, que vous n’imaginez pas ! Quelle hypocrisie !
Revenons sur l’équité, ce terme flou que personne ne peut interpréter et dont nous avons fait l’expérience lors des autres élections. Elle sert un duo terrible, celui des instituts de sondage et des rédactions, qui, ensemble, font l’opinion. Lors des élections régionales, nous avons vu comment, à partir de sondages, qui se sont révélés entièrement faux, les rédactions n’ont invité que certaines personnalités : le deuxième tour a été fait avant le premier !
Avec ce dispositif très pernicieux que vous voulez mettre en place, c’est la suppression du premier tour qui est en jeu. Dans ces trois semaines avant les deux semaines de campagne définitives, au moment où l’opinion se cristallise, vous voulez étouffer tout courant intermédiaire et enfermer les Français dans le tripartisme. Vous croyez ainsi vous sauver. Vous allez au contraire vous tuer.
Par ailleurs, en confiant au CSA l’arbitrage de la présence médiatique des candidats à la présidentielle, vous faites de cette instance l’arbitre de la présidentielle alors qu’elle n’est pas faite pour cela et qu’elle n’est pas susceptible d’appel. Une telle disposition, j’en suis convaincu, est anticonstitutionnelle. En tant que loi organique, elle sera nécessairement examinée par le Conseil constitutionnel.
Permettez-moi, madame la présidente, d’achever mon propos sur un sujet aussi grave.
Je ne garantirai alors plus l’égalité du temps de parole entre les députés !
Mesdames et messieurs les députés de la majorité, votre responsabilité est immense : en adoptant cet article, vous allez dévaloriser l’élection présidentielle, détourner les Français de cette élection, et les lasser. Je ne comprends pas que vous puissiez le voter.
Ce concept d’équité, particulièrement vague et flou, risque d’instaurer une seconde sélection, qui me paraît très dangereuse. Après celle des parrainages, par des femmes et des hommes qui ont un mandat démocratique, procédant du suffrage universel, il s’agira d’une sélection par les médias audiovisuels, par les dirigeants de l’audiovisuel, dont l’indépendance, on le sait, n’est pas totale, qu’il s’agisse de chaînes du service public ou d’intérêts privés.
Par ailleurs, se référer aux résultats des précédentes élections pose problème. Cela signifierait en l’espèce qu’il faudrait se référer uniquement aux résultats des élections régionales où des listes d’union entre les différents partis avaient été conclues. Ceux-ci pourraient cependant vouloir présenter des candidats distincts à l’élection présidentielle.
Enfin, je comprends mal la référence récurrente au Conseil constitutionnel, au CSA et à d’autres organismes, souvent des autorités administratives indépendantes. Celles-ci peuvent souhaiter nous éclairer mais nous pouvons aussi souhaiter les éclairer. En effet, c’est le Parlement qui fait la loi : il peut entendre les avis du CSA, s’ils sont sensés, ou ceux du Conseil constitutionnel, dès lors qu’ils sont « raisonnables et opportuns », mais il n’a pas à en tenir compte de manière systématique. Le souverain en matière législative est ici, pas ailleurs.
Les propos tenus me forcent à intervenir, alors que je ne l’avais pas prévu initialement. En particulier, ce que vous dites, madame la secrétaire d’État, me surprend : en vous référant à la demande du CSA et de la presse, vous êtes en train non pas d’affaiblir, mais pratiquement, de tuer le Parlement. À quoi servons-nous, si de telles dispositions sont adoptées ? Les parlementaires n’existent-ils que pour faire bonne figure et obéir aux décisions du CSA ? Supprimons donc le Parlement ! J’irai même plus loin : supprimons le Gouvernement !
Si vous pensez que le Gouvernement est obligé de répondre de telle manière au CSA, madame la secrétaire d’État, vous montrez une fois de plus sa faiblesse, et qu’il se soucie non de l’avenir de la France mais de son propre avenir politique.
C’est donc avec une profonde déception que j’interpelle mes collègues socialistes : ne vous laissez pas entraîner dans cette descente aux enfers où vous conduit le Gouvernement aujourd’hui ! Cette référence au CSA, madame la secrétaire d’État, n’entre pas dans votre rôle.
Madame la secrétaire d’État, dans un pays démocratique imaginaire, où le président disparaîtrait des sondages, ou son parti politique obtiendrait de très mauvais scores – 9 à 11 % aux dernières élections –,…
…votre système malmènerait beaucoup ce président, s’il était candidat. En France, ce candidat existe peut-être…
Votre intervention, madame Greff, me semble très étrange car c’est précisément le Parlement qui a pris l’initiative de ce texte.
En réponse à un amendement, j’ai fondé mon avis, qui était défavorable, sur une référence à des institutions de la République. Il est de notre mission de passer du temps devant le Parlement, pour discuter avec les parlementaires, notamment de textes présentés par les députés. Il ne s’agit donc nullement de mépriser le Parlement. C’est pourquoi je m’inscris en faux contre vos propos, madame la députée.
Il est procédé au scrutin.
Après cette grande déception démocratique, je réaffirme que le groupe UDI s’oppose avec force à l’article 4, un texte habile mais extrêmement pernicieux pour la démocratie. Cette période intermédiaire et la campagne officielle sont les seules semaines au cours desquelles l’égalité de traitement des candidats sera strictement respectée. Il est dommage que le parti socialiste n’ait même pas le courage de faire présenter cette disposition par le Gouvernement. Les députés du groupe socialiste sont en revanche bien courageux de défendre cette disposition à la place du Gouvernement.
Avis défavorable. Le sujet est identique à celui des amendements précédents. Nous pourrions reprendre la discussion indéfiniment. Parce que je crois à l’équité renforcée, je souhaite que l’on établisse un bilan de cette disposition après l’élection présidentielle. Peut-être qu’alors nous vous ferons changer d’avis, mesdames et messieurs les députés.
Même avis.
L’amendement no 18 n’est pas adopté.
Selon cet article, le CSA devrait, dans l’exercice de sa mission de contrôle, tenir compte « de la représentativité des candidats, appréciée, en particulier, en fonction des résultats obtenus aux plus récentes élections par les candidats ou les partis et groupements politiques qui les soutiennent et en fonction des indications de sondages d’opinion ».
Il s’agit là d’un grand risque pour tous les partis, notamment celui qui a présenté cette proposition de loi organique. La référence aux « plus récentes élections » s’apparente à un système de corsetage propre à vicier le mécanisme démocratique dont vous pourriez d’ailleurs faire les frais, mesdames et messieurs les députés de la majorité. Prendre ainsi en compte les élections les plus récentes, en l’espèce, les élections régionales voire les dernières élections législatives partielles, pourrait inciter les formations à présenter des candidats afin d’obtenir un temps de parole à l’élection suivante. Constituer une coalition se révélerait en effet pénalisant s’agissant de l’accès aux médias. Le groupe UDI est bien placé pour évoquer cette problématique, qui est réelle. Ce mode de calcul encouragerait donc la scissiparité des listes électorales.
Pour toutes les raisons, nous proposons de supprimer le premier critère.
Monsieur Richard, votre amendement tend à supprimer le critère des résultats aux élections pour apprécier la représentativité des candidats, car vous estimez que cela pourrait avoir pour conséquence de favoriser les formations majoritaires au détriment du nécessaire renouvellement du paysage politique. Or ce critère est d’ores et déjà utilisé par le CSA pour définir le traitement équitable des candidats ou des formations politiques dans les médias, notamment au cours de la période préliminaire. En outre, la proposition de loi fait référence aux « plus récentes élections », au pluriel. Dès lors, si le candidat ou le parti ne s’est pas présenté aux élections immédiatement précédentes, je pense que le CSA saura se reporter aux élections antérieures.
D’autre part, j’observe que M. Lagarde a déposé un amendement no 20 , qui vise à supprimer un autre critère permettant de définir le traitement équitable. Si nous adoptions ces deux amendements, la seule chose qui resterait au CSA pour arbitrer entre les candidats serait le critère des sondages. D’une manière générale, il me semble nécessaire pour le législateur organique de définir lui-même les différents critères d’application du principe d’équité, sans quoi nous risquerions la compétence négative, en d’autres termes l’arbitraire du CSA.
Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable à l’amendement.
L’avis est défavorable, dans la mesure où nous pensons que la pluralité des critères est indispensable pour assurer l’approche la plus objective possible.
L’amendement no 19 n’est pas adopté.
Il s’agit, comme l’a dit la rapporteure, de supprimer le deuxième critère d’appréciation du principe d’équité. Selon l’alinéa 5, le CSA devra tenir compte, dans l’exercice de sa mission de contrôle, « de la contribution de chaque candidat à l’animation du débat électoral ». Je lui souhaite bien du plaisir, car cette notion est extrêmement floue – et, comme vous le savez, quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup !
Comment peut-on confier au CSA la responsabilité de juger si tel candidat contribue suffisamment à l’animation du débat électoral pour lui attribuer du temps de parole en conséquence ?
Vous faites du CSA le censeur des idées des candidats : c’est un choix politique de votre part. Par conséquent, nous souhaitons la suppression de ce deuxième critère.
Je ne reprendrai pas l’argumentation que j’ai déjà présentée. Je dirai juste que vous devriez plutôt accueillir favorablement le fait que le dynamisme de la campagne, découlant du talent de certains candidats, soit pour le CSA un critère d’appréciation du principe d’équité, en dehors du recours à des chiffres ou à des sondages. Nous savons tous que certains candidats qui obtiennent peu de voix sont hautement médiatiques.
Avis défavorable, donc.
Avis défavorable.
L’amendement no 20 n’est pas adopté.
Comment va-t-on vérifier que l’équité est respectée ? Les deux critères inscrits à l’article 4 pour guider le CSA dans l’exercice de sa mission de contrôle ne nous semblent pas pertinents : ils sont insuffisamment définis et difficilement quantifiables.
Nous proposons donc de retenir un autre critère, qui lui non plus n’est peut-être pas parfait ; je comprendrai fort bien que certains collègues ne l’acceptent pas, mais il vaut ce qu’il vaut. Il s’agit du nombre de parlementaires qui auraient déclaré au Conseil constitutionnel leur soutien à un candidat. Cela permettrait, d’une part de tenir compte d’une représentativité objective dans la vie politique française, puisque ce critère résulterait d’un scrutin, d’autre part de ne pas s’en tenir aux résultats des élections législatives précédentes.
Nous avions déjà examiné cette proposition en première lecture ; l’avis avait été défavorable. Il le reste.
Même avis.
L’amendement no 21 n’est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 20 Nombre de suffrages exprimés: 18 Majorité absolue: 10 Pour l’adoption: 11 contre: 7 (L’article 4 est adopté.)
La commission a supprimé l’article 6.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 10 , 11 rectifié , 12 et 13 , tendant à le rétablir.
La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 10 .
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l’amendement no 11 rectifié . Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement no 30 du Gouvernement.
Nous avions adopté à la quasi-unanimité de la commission des lois un amendement fixant à six mois, pour toutes les élections, la durée de prise en considération des comptes de campagne ; toutefois, nous ne souhaitions pas le faire pour les élections présidentielles. Cela nous contraint donc à inscrire dans la loi organique la considération selon laquelle, au regard de l’article L. 52-4 du code électoral, un régime particulier est appliqué pour l’élection présidentielle. L’objectif est de retenir pour celle-ci une période d’un an.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir le sous-amendement no 30 .
Il s’agit de compléter l’alinéa 4 par les mots : « et règle les dépenses engagées en vue de l’élection ».
Si le Gouvernement est favorable à une durée de prise en compte de douze mois des recettes et des dépenses de campagne, de manière à assurer une plus grande transparence du financement des campagnes électorales, il convient en effet d’intégrer tant les recettes que les dépenses.
Sous réserve de cette modification, nous demandons le retrait des autres amendements en discussion commune au profit de celui présenté par Mme Untermaier.
Cet amendement prévoit d’appliquer la réduction à six mois de la période couverte par les comptes de campagne s’agissant des élections présidentielles, mais seulement à compter des élections qui suivront celles de 2017 – c’est-à-dire, a priori, à partir de 2022 –, respectant ainsi l’avis du Sénat.
Nous allons nous rallier à l’amendement de Mme Cécile Untermaier, tel que sous-amendé par le Gouvernement, car nous trouvons que la proposition retenue est plutôt sage – comme quoi vous pouvez revenir à des positions sages après avoir donné un coup de canif à la démocratie !
Je retire l’amendement.
L’amendement no 13 est retiré.
À l’instar de nos collègues du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, nous nous rallions à la proposition du groupe socialiste, républicain et citoyen. Nous avions eu un débat quelque peu difficile en commission…
Précisément, ainsi que sur l’ordonnancement. Le compromis qui a été trouvé me semble répondre à ce qui avait été dit, notamment par notre collègue Lagarde.
Nous retirons donc l’amendement no 10 .
L’amendement no 10 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion commune ?
Je suis bien entendu favorable à l’amendement de Mme Untermaier, tel que sous-amendé par le Gouvernement afin de réparer un oubli.
Oui, car il ne prévoit la présentation des comptes de campagne que pour les candidats ayant obtenu au moins 1 % des voix, ce qui m’apparaît comme un recul par rapport aux textes existants.
Madame la ministre, vous avez déjà indiqué l’avis du Gouvernement en appelant à un ralliement à l’amendement no 11 tel que sous-amendé par vos soins.
La parole est à M. Romain Colas.
Si nous adoptions l’amendement no 11 tel que sous-amendé par le Gouvernement, nous en reviendrions à la solution de compromis que nous avions trouvée en première lecture.
Je rappelle que le raccourcissement de douze à six mois du délai d’imputation des dépenses et recettes de campagne répond à une demande de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, qui avait proposé que ce délai soit réduit pour toutes les élections. Je me range pour ma part à l’avis exprimé par mon collègue Richard ; c’est d’ailleurs le sens de l’amendement déposé par le groupe socialiste, républicain et citoyen. Il importe, vu les sommes engagées dans le cadre d’une élection présidentielle, vu qu’elles le sont bien souvent antérieurement aux six derniers mois, et vu l’émergence du phénomène des primaires, qui tendent à s’imposer dans le débat démocratique, que nous conservions une période de contrôle de douze mois pour l’élection présidentielle, ce qui permettra de placer sous le contrôle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les dépenses engagées dans le cadre des primaires.
Le sous-amendement no 30 est adopté.
L’amendement no 11 rectifié , sous-amendé, est adopté et l’amendement no 12 tombe.
L’article 6 est ainsi rédigé.
Article 6
L’article 6 ter est adopté.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je trouve mon collègue du groupe de l’Union des démocrates et indépendants bien optimiste. Un coup de canif à la démocratie ? Moi, j’évoquerais plutôt un grand coup de matraque ! Mais j’ai déjà eu l’occasion d’en parler.
Que voulez-vous ? Le texte va passer. Je ne peux que saluer ce gouvernement et l’apport considérable qui aura été le sien à la démocratie, au moment où la moitié de nos concitoyens ont décidé de ne plus voter – quant à l’autre moitié, on sait ce qu’il en advient.
Le fait de laisser au CSA le soin de juger qui animera le mieux la campagne, quand on sait que ses membres sont nommés par le Président de la République et par le Gouvernement, voilà qui laisse entrevoir des avis ouverts à la démocratie ! Quant au recueil des signatures des parrains en présence des médias, de l’ensemble du conseil municipal et de toute la ville, voilà qui promet une tâche facile pour le maire !
Ayant eu l’occasion de parrainer plusieurs candidats, je sais qu’il s’agit toujours d’un moment difficile pour le maire, même si nous ne parlons que d’un parrainage. Cela deviendra impossible, d’autant que les maires des communes de 10 000 habitants savent qu’ils exerceront leur mandat pour la dernière fois : ils n’en ont donc plus grand-chose à faire, non plus que leur conseil municipal, qui se sera fait condamner… Tout cela est fait pour faciliter l’explication finale entre Les Républicains et le parti socialiste, qui seront en demi-finale face au Front national.
Si c’est la vision qu’a le parti socialiste de la France, je n’ai rien à ajouter : j’espère seulement un sursaut salutaire de la part du peuple.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 28 , tendant à la suppression de l’article.
L’article 7 modifie les horaires de fermeture des bureaux de vote, si bien que, comme je l’ai expliqué lors de la discussion générale, ces horaires ne seraient pas les mêmes pour l’élection présidentielle et pour les autres scrutins : ce serait difficile à expliquer aux électeurs, d’autant plus qu’ils seront appelés deux fois aux urnes, à un mois d’intervalle, comme c’est désormais l’usage. En clair, les bureaux ne fermeront pas à la même heure pour l’élection présidentielle en avril-mai et pour les élections législatives.
Les électeurs, me semble-t-il, n’entrent pas dans de telles subtilités : ils risquent de ne pas comprendre pourquoi les règles sont différentes, et de commettre des erreurs. Comment expliquer à un électeur venu voter à dix-neuf heures pour l’élection présidentielle qu’il ne peut le faire à dix-huit heures trente ou dix-huit heures quarante-cinq pour l’élection législative ? Aussi proposons-nous la suppression de l’article.
Cet amendement, qui maintiendrait le statu quo, gêne considérablement le fruit de notre travail. Même si nous n’avons pas trouvé de consensus avec le Sénat, celui-ci n’est pas favorable à ce statu quo : il souhaite que tous les bureaux ferment à dix-neuf heures. Or il nous apparaît difficile de revoir à la baisse l’horaire de fermeture dans les grandes villes tout en le remontant dans les petites et moyennes communes.
La modification des horaires n’a rien d’une lubie : elle correspond à une demande spécifique, car le delta de deux heures dans la fermeture des bureaux de vote favorise les fuites, par exemple, sur les réseaux sociaux. Le phénomène n’est peut-être que marginal, mais il empoisonne un peu les dernières heures du scrutin dans les villes où celui-ci est encore ouvert.
La difficulté dont vous parlez, madame la secrétaire d’État, ne nous paraît pas évidente dans la mesure où la loi prévoirait une fermeture à dix-neuf ou à vingt heures pour les présidentielles. Pour les élections législatives qui suivent, la fixation des heures d’ouverture des bureaux de vote relève du pouvoir réglementaire. Il suffirait donc d’harmoniser les horaires par cette voie. Les élections législatives ont lieu au printemps, lorsqu’il fait encore jour assez tard : cela ne devrait donc pas être très compliqué. Avis défavorable.
Je comprends le raisonnement de la rapporteure mais, si on le pousse jusqu’à son terme, il confirmera ce que je viens de dire. Il revient en effet au pouvoir réglementaire, non à la loi, de fixer l’heure de fermeture des bureaux de vote. Dès lors que les parlementaires entendent modifier ici l’heure de fermeture des bureaux de vote, il ne tient qu’à eux de le faire pour l’ensemble des scrutins : je vous invite à aller au bout de la logique et à prendre vos responsabilités, puisque vous vous emparez d’une matière qui, en principe, est du ressort gouvernemental. En somme, soyez cohérents ; faute de quoi vous créerez une situation absurde, que nos concitoyens ne comprendront pas et que rien ne justifiera à leurs yeux.
Les citoyens sont plus sages que ne le croit Mme la secrétaire d’État, et ils ne sont dupes d’aucune manoeuvre – en particulier de cette proposition de loi organique. Ils sont tout à fait capables de savoir, lorsqu’ils souhaitent aller voter, si les bureaux ferment à dix-huit heures trente, dix-neuf heures ou vingt heures. Au-delà de ce que l’on peut penser du texte, je désapprouve cette façon de faire ; aussi voterai-je contre l’amendement du Gouvernement.
L’amendement no 28 n’est pas adopté.
L’article 7 est adopté.
L’amendement tend à rétablir la version du Sénat sur la radiation des Français établis hors de France.
Si une personne inscrite au registre consulaire demande sa radiation, il est effectivement logique qu’elle soit également radiée de la liste électorale, puisque l’on peut alors supposer qu’elle quitte la circonscription consulaire.
Inscrire dans la loi l’automaticité de la radiation revient à radier l’ensemble des personnes dont la caducité de l’enregistrement consulaire a été constatée, alors qu’elles n’ont pas fait de demande d’inscription dans un autre centre de vote.
Toute modification plus importante, s’agissant de l’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France, devrait faire l’objet d’une proposition de loi dédiée. Je crois d’ailleurs que Mme Pochon a commencé à y travailler.
Je ne puis que vous répéter, monsieur Coronado, ce que je vous avais déjà dit en commission. Votre amendement tend à rétablir la rédaction du Sénat, alors que nous souhaitions en revenir à celle adoptée par l’Assemblée en première lecture.
De fait, votre amendement restreint exagérément le dispositif en ce qu’il limite la radiation automatique dont nous parlons au seul cas où la radiation a été demandée par l’intéressé. Or les problèmes d’accès rencontrés lors des élections présidentielles de 2007 et de 2012 concernaient précisément les personnes radiées du registre des Français de l’étranger par l’administration consulaire car celles-ci, bien que parfois rentrées en France depuis longtemps, demeuraient inscrites sur les listes électorales consulaires. Cela leur interdisait normalement de voter en France alors même qu’elles étaient inscrites sur les listes d’une commune française. Afin de limiter ces difficultés en 2017, il est nécessaire de nous en tenir au texte adopté hier par la commission. Avis défavorable.
Même avis.
J’entends bien ce que vous dites, madame la rapporteure, mais M. Fekl a annoncé, devant l’Assemblée des Français de l’étranger, que ces derniers pourraient procéder eux-mêmes à leur radiation via le site service-public.fr. La difficulté que vous soulevez est donc levée : de fait, certaines personnes quittaient le pays où elles étaient établies sans pouvoir effectuer les démarches requises au consulat, soit à cause de l’heure des rendez-vous, soit à cause de leur éloignement, lequel rendait nécessaire la prise en charge des transports. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Loin de restreindre le dispositif, mon amendement s’adapte à la situation et tient compte des annonces du Gouvernement : ma démarche, constructive, vise à la simplification.
L’amendement no 7 n’est pas adopté.
L’article 8 est adopté.
La proposition de loi organique est adoptée.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi ordinaire.
L’article 1er AA est adopté.
Cet amendement vise à maintenir à un an la durée prévue pour la tenue des comptes de campagne pour l’élection présidentielle.
Le maintien de la période d’un an est essentiel en l’espèce : l’inflation des dépenses électorales et la question des primaires ouvertes le justifient pleinement.
L’amendement est satisfait par le texte que nous venons d’adopter. Je vous invite donc à le retirer.
L’amendement no 8 est retiré.
L’article 1er A est adopté.
En première lecture a été introduit un article appliquant les dispositions pénales du code électoral au vote électronique par machine à voter ou par internet.
Avec cet amendement nous vous proposons d’aller plus loin en interdisant le vote par machine à voter. Le rapport des sénateurs Alain Anziani et Antoine Lefèvre, publié l’an dernier, était déjà très critique sur ces machines. De nombreuses communes ont cessé de les utiliser, ou en ont restreint l’usage : 83 communes y avaient recours en 2007, contre 64 en 2012. Cela ne tient pas seulement aux dysfonctionnements probables – ou possibles – de ces machines, mais aussi à des malveillances qui peuvent en altérer le fonctionnement.
De plus – et c’est là le plus important à nos yeux –, les machines à voter rendent impossible la vérification par l’électeur de son vote. Cette absence de fiabilité a conduit l’Irlande à renoncer à les utiliser en 2009 ; et ce ne sont pas les exemples offerts par certaines primaires dans notre pays qui nous inciteront à y revenir.
Cet amendement vise à la suppression des machines à voter. Ce n’est pas l’objet de la proposition de loi, centrée sur la seule élection présidentielle.
En tout état de cause, les machines à voter font actuellement l’objet d’un moratoire. Les 64 communes autorisées à les utiliser peuvent continuer à le faire, mais cette possibilité n’est ouverte à aucune nouvelle commune. La portée de l’amendement est donc un peu limitée ; mais cela ne nous empêchera peut-être pas, à l’avenir, d’envisager des améliorations. En l’état actuel des choses, l’avis est défavorable.
Même avis.
J’apporte tout mon soutien à cet amendement essentiel, même si peu de communes ont aujourd’hui recours aux machines à voter. L’amendement devrait, à terme, inspirer le Gouvernement.
L’amendement no 1 n’est pas adopté.
L’article 2 bis est adopté.
Article 2
Nous en venons aux amendements à l’article 2 ter. La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 10 de suppression de l’article.
Il s’agit d’un amendement de suppression de dispositions figurant dans une proposition de loi adoptée au Sénat le 14 février 2011 et qui n’a pas, depuis cette date, fait l’objet d’une inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
L’article traite de l’encadrement des sondages. S’agissant d’un domaine extrêmement sensible, la liberté de la presse et de la communication, il nous semble que prendre comme support législatif au débat parlementaire un texte sur lequel le Gouvernement a engagé la procédure accélérée n’est pas digne d’un débat d’une telle importance. Je rappelle qu’il s’agit, en outre, de libertés fondamentales.
Par ailleurs, il eût fallu, sur un tel sujet, consulter à la fois la commission des sondages et les acteurs économiques concernés. Pour toutes ces raisons, il nous apparaît que ces dispositions doivent être disjointes de la proposition de loi et pourraient faire l’objet d’un débat ultérieur.
Le Gouvernement est en effet prêt à en discuter, mais les conditions offertes par cette proposition de loi ne sont pas à la hauteur de l’encadrement approprié de dispositions qui, je le rappelle, s’agissant de la liberté de la presse, font partie des droits constitutionnels.
Un élément doit être ajouté au débat : la rédaction de l’article 2 ter ne prend pas en compte les enquêtes d’opinion qui ne relèvent pas de la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d’opinion. Ainsi, les sondages relevant de cette loi seraient interdits, alors que les enquêtes d’opinion pourraient être diffusées sans encadrement : une telle situation serait, pour le moins, paradoxale, eu égard à la sensibilité du sujet et du poids que l’un comme l’autre peuvent avoir au cours de la période concernée.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que le Gouvernement propose, tout simplement, de supprimer l’article 2 ter dans lequel figurent ces dispositions.
Comme l’a dit Mme la secrétaire d’État, l’amendement no 10 vise à supprimer l’article 2 ter qui insère dans cette proposition de loi la quasi-intégralité des dispositions d’une proposition de loi relative aux sondages, adoptée le 14 février 2011 par le Sénat puis, le 1er juin 2011, par la commission des lois de notre assemblée.
Hier, en commission, j’ai moi-même déposé un amendement allant dans le même sens que celui du Gouvernement que nous examinons à cet instant. Il est apparu à la commission qu’elle n’avait pas été saisie dans des délais lui permettant de vérifier si tous les éléments figurant à la proposition de loi que je viens de mentionner nécessitaient ou non une actualisation.
Par conséquent, j’émets – ce qui est cohérent avec la position que j’ai exprimée hier – un avis favorable concernant cet amendement de suppression, même si j’aurais préféré une solution permettant de conserver les dispositions introduites à l’Assemblée nationale en première lecture – à l’initiative de M. Patrick Bloche – au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Quoi qu’il en soit, cette question des sondages mérite un texte législatif spécifique. La détermination des députés à voter cette proposition de loi va peut-être permettre, si le Gouvernement était suivi, qu’un tel texte trouve une place dans l’ordre de jour de notre assemblée. Je suis donc favorable à l’amendement gouvernemental n°10.
Cette question a fait débat au sein de la commission des lois. Il est vrai qu’elle n’a pas modifié cet article, mais nous entendons – je m’exprime au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen – les arguments du Gouvernement.
Nous admettons que les dispositions figurant à cet article doivent être retravaillées. Il est question de liberté de la presse et nous ne pouvons courir le risque d’un inconstitutionnalité.
La position de la commission des affaires culturelles et de l’éducation doit être prise en compte, et ce texte doit être retravaillé en collaboration avec elle.
Nous sommes également sensibles au fait que la notion d’enquêtes d’opinion n’apparaît pas dans le texte. Pour toutes ces raisons, nous proposons à l’ensemble des membres du groupe d’adopter l’amendement du Gouvernement.
Légiférer dans l’urgence provoque ce type de situation : comme nous l’avions vu au moment du débat en commission, il semblait peu probable que nous parvenions à une rédaction adéquate sur cette question, très importante, des sondages.
En déposant des amendements à cet article, nous avons tenté de soulever un certain nombre de questions qui nous semblaient importantes. Nous sommes donc plutôt heureux et satisfaits que le Gouvernement ait décidé de déposer un amendement de suppression de l’article.
Renvoyer à un travail parlementaire plus approfondi est, en effet, nécessaire, d’autant plus qu’au moment des élections – notamment de l’élection présidentielle – cette question est cruciale.
L’amendement no 10 est adopté et l’article 2 ter est supprimé.
Les articles 2 quater et 2 quinquies ont été supprimés par la commission.
L’article 5 est adopté.
La proposition de loi est adoptée.
Prochaine séance, mardi 29 mars 2016, à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
La séance est levée à seize heures cinquante.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly