La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, de nombreuses voix s’élèvent à gauche, sur tous les rangs de la gauche, pour contester le plan d’économies de 50 milliards d’euros que vous allez soumettre à la Commission européenne et au vote purement consultatif des députés.
Ces voix estiment ce plan d’économies dangereux. La baisse de 41 milliards d’euros des prélèvements sur les entreprises n’est assortie d’aucune contrepartie en termes d’investissement et d’emploi.
Pour financer cette baisse, vous allez geler le pouvoir d’achat de millions de ménages modestes et moyens. Gel des pensions de retraite, gel du traitement des fonctionnaires, gel des prestations liées à la famille, au logement, à l’invalidité : après la hausse de la TVA et des impôts, toutes celles et ceux qui ont cru au changement en 2012 ont le sentiment d’avoir été trahis.
Quant au statu quo pour les fonctionnaires les plus modestes et les retraités percevant moins de 1 200 euros, il ne fait pas le poids. Nos concitoyens vont voir, une nouvelle fois, leur quotidien se dégrader, sans constater d’amélioration de la situation du pays.
La forte austérité que vous programmez, pour ne pas toucher au capital et à l’enrichissement d’une minorité, va pénaliser des millions de Français et faire reculer la demande. Sans demande, les entreprises n’ont guère de raisons d’investir ni d’embaucher. Le risque est grand que cette politique socialement injuste nous plonge en fait dans une spirale de régression.
Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt à réunir ceux qui, à gauche, contestent vos choix ? Êtes-vous prêt à entendre leurs propositions alternatives pour une transition sociale et écologique ? Êtes-vous prêt à tenir tête à Bruxelles et engager notre pays dans la voie d’un redressement attentif aux aspirations populaires ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Chassaigne, le mal dont souffre aujourd’hui la France,…
…c’est une croissance trop faible.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je dirais même qu’il tient au fait que durant cinq ans de suite – je dis bien : cinq ans de suite –, entre 2008 et 2013, notre pays a connu une croissance zéro et une crise destructrice : destructrice de notre économie,
Exclamations les bancs du groupe UMP
destructrice de nos emplois, destructrice aussi de l’équilibre de nos finances publiques. En effet, une croissance faible, ce sont des entreprises en moins, des emplois en moins, mais aussi des déficits en plus.
C’est contre cela que le Gouvernement vous propose aujourd’hui, aux uns et aux autres, d’agir pour qu’il y ait plus de croissance, pour atteindre 1 % de croissance dès cette année et 1,7 % l’année prochaine, ce qui va nous permettre, dans les entreprises – car c’est là que doivent être créés aujourd’hui des emplois et des investissements –, de lutter en profondeur contre le mal qui nous frappe, je veux évidemment parler du chômage.
Nous voulons tous, vous comme nous, faire reculer ce chômage qui fait tant de mal à la France et à notre société : tel est le coeur des choses.
Monsieur Chassaigne, agissons-nous ainsi parce qu’on nous le demanderait ailleurs, dans telle ou telle capitale ? Non. Nous le faisons – même si tout peut bien sûr être discuté – parce que nous pensons que c’est l’intérêt profond de la France. Rééquilibrer nos finances, c’est notre intérêt ! Donner des marges aux entreprises pour investir et pour embaucher, c’est notre intérêt ! Faire en sorte que l’endettement de la France, qui n’a pas cessé de croître au cours de ces dernières années,
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
se stabilise, c’est aussi notre intérêt ! Si nous ne le faisions pas, nous nourririons la finance folle, que nous voulons, par ailleurs, combattre.
Tel est l’objectif du Gouvernement, voilà ce à quoi nous vous appelons à participer.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Olivier Falorni, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Mes chers collègues, nous avons une longue séance devant nous, je vous demanderai donc de vous efforcer dès à présent de garder votre calme. Vous avez la parole, cher collègue.
Monsieur le ministre de l’intérieur, c’est avec une immense joie que nous avons vu revenir sur le territoire national les quatre journalistes français qui étaient retenus en Syrie.
Applaudissements sur tous les bancs.
Cette joie a malheureusement été assombrie par la nouvelle du décès de notre compatriote Gilberto Rodrigues-Leal, qui était jusqu’alors retenu en otage au Mali, et à qui nous pouvons également tous rendre hommage ici.
Applaudissements.
Cependant, cette libération heureuse a mis en lumière un phénomène inquiétant : des Français, toujours plus jeunes et plus nombreux, partent à l’étranger faire le djihad. Face à cela, il faut une République forte, c’est-à-dire une République qui dissuade, qui empêche et qui punit. Cela suppose une cybersurveillance, parce qu’on sait que l’embrigadement se fait souvent sur Internet. Cela suppose des procédures d’aide et d’alerte à destination des familles. Cela suppose une répression ferme des filières djihadistes. Cela suppose enfin un dialogue constant avec les représentants légitimes du culte musulman, dont je veux saluer le sens des responsabilités.
Monsieur le ministre, je sais que vous prêtez une attention particulière à ce phénomène, préoccupant parce qu’il porte en lui la menace du terrorisme. Ma question est aussi simple que la réponse est compliquée : comment faire pour que d’autres jeunes Français n’empruntent pas à leur tour ce funèbre et funeste chemin de Damas ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur quelques bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, vous posez une question très importante, relative à ces jeunes qui basculent dans la violence en rejoignant des groupes djihadistes en Syrie.
Permettez-moi tout d’abord de vous rappeler l’importance du phénomène. Trois cents ressortissants français se trouvent sur le théâtre des opérations syriennes. Vingt-cinq au moins y ont perdu la vie et cent vingt sont actuellement en transit vers la Syrie.
Le Premier ministre, lorsqu’il était ministre de l’intérieur, avait arrêté dans le cadre d’un conseil de défense les principes d’un plan en vingt-trois mesures, qui a été présenté en conseil des ministres la semaine dernière et qui témoigne de la très grande fermeté et de la très grande détermination du gouvernement français face à ce phénomène de nature à porter atteinte à la sécurité de notre pays. Je veux vous en rappeler le contenu.
Premièrement, nous voulons empêcher ces ressortissants de partir sur le théâtre des opérations. C’est la raison pour laquelle, dès que des informations nous seront transmises par nos services de renseignement ou par les familles, nous inscrirons ces ressortissants sur le fichier des personnes recherchées et dans le système d’information Schengen, de manière à pouvoir, avec l’ensemble des pays de l’Union européenne, empêcher leur départ.
Deuxièmement, nous devons démanteler les filières. À cette fin, tous les étrangers stationnant sur le territoire français et susceptibles d’être engagés dans des opérations terroristes seront, dans le respect du droit, expulsés. Les entretiens administratifs avec ceux qui auront la tentation de partir se multiplieront.
Par ailleurs, nous allons engager de façon déterminée une action de démantèlement de ces filières sur Internet, en faisant d’ailleurs légiférer l’Assemblée nationale et le Sénat sur le sujet, car la propagande au moyen de ce média est en grande partie à l’origine de l’engagement de ces jeunes. Il s’agira de donner à nos services la possibilité d’intervenir sur Internet sous pseudonyme et de conserver au-delà de dix jours les données de connexion.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Christian Estrosi, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, les Français viennent de sanctionner lourdement votre politique lors des élections municipales. On pouvait s’attendre à une remise en question de celle-ci ; or il n’est est rien.
Concernant les collectivités territoriales, votre prédécesseur a supprimé 1,5 milliard d’euros de dotations. Vous souhaitez aller plus loin en imposant 11 milliards d’euros de baisse.
La dotation de l’État aux collectivités, je le rappelle, n’est pas un cadeau : c’est une compensation. Or la baisse de cette dotation s’accompagne d’une perte sur les compensations de dégrèvements législatifs, non compensée, de l’abaissement du barème de la contribution foncière des entreprises, non compensé, d’une hausse de la TVA sur la collecte et les transports, non compensée, de la revalorisation de la grille des fonctionnaires territoriaux de catégorie C, non compensée, de la hausse des taux de cotisation de retraite, non compensée, de la suppression du jour de carence, non compensée, et de la réforme non concertée des rythmes scolaires, non compensée. Cette attaque contre les collectivités est en réalité une attaque contre les entreprises et l’emploi, puisque ce sont ces mêmes collectivités qui réalisent 70 % de l’investissement public dans notre pays.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.
Il faut ajouter à cela le choc de fiscalité qui attend les Français en septembre – abaissement du quotient familial, gel et fiscalisation des pensions de retraite, et j’en passe – et qui représente 4 milliards d’euros supplémentaires d’impôts sur le revenu.
Monsieur le Premier ministre, peut-on s’attendre dans quelques instants à une déclaration qui garantira l’inversion de ces tendances ? S’il n’en est rien, ne comptez pas sur nous pour vous donner un blanc-seing : les Français attendent de vous non pas que vous redessiniez la France de manière utopique en 2021, mais que vous mettiez un terme dès maintenant, dès 2014, à leurs souffrances et aux difficultés de leurs entreprises.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l’État et de la fonction publique.
Monsieur le député, vous savez très bien en quoi consiste cette demande de participation des collectivités territoriales à l’effort de réduction de la dépense publique. Nous en avons souvent parlé avec les uns et les autres, y compris au sujet de la réforme relative aux métropoles, projet de loi sur lequel vous vous êtes montré actif.
Les dépenses des collectivités locales représentent 20 % de la dépense publique. L’effort demandé aux collectivités locales correspond à 11 milliards d’euros, soit environ 21 % des 50 milliards d’euros d’économies prévus. Cela correspond exactement à la hausse constatée, et si souvent regrettée sur les bancs sur lesquels vous siégez, monsieur Estrosi, des dépenses des administrations publiques locales entre 2010 et 2012, qui ont augmenté d’un peu plus de 12 milliards d’euros.
Il s’agit donc bien de stabiliser et de maîtriser la dépense publique.
Pour accompagner cet effort demandé aux collectivités locales, le Premier ministre a tenu à faire deux propositions. Premièrement, un groupe de travail extrêmement spécialisé, que vous avez réclamé en novembre 2013, se penchera sur la technique de révision des différentes dotations, que vous trouvez comme beaucoup injuste ; nous pourrons convenir d’un accord sur ce point. Deuxièmement, les doublons seront supprimés grâce à la réorganisation des collectivités territoriales sur notre territoire.
Je pense que nous trouverons sans doute un accord, monsieur Estrosi, car si je reprends toutes les déclarations que vous avez faites sur la nécessaire baisse des dépenses dans la région Île-de-France ou dans telle ou telle collectivité,…
…sur la suppression des départements ou sur les intercommunalités, c’est vraiment votre dossier que nous reprenons, mais avec un profond sens politique visant à garantir le service public et l’aide à l’ensemble de nos concitoyens.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Thomas Thévenoud, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
La France est un grand pays, une grande nation et une grande puissance économique. C’est précisément parce que la France est un grand pays que nous pouvons et que nous devons tous, ici, nous rassembler autour de son redressement économique.
Mais, pour y parvenir, il faut faire des efforts et réaliser des économies,…
…non pas pour plaire à Bruxelles ou à nos partenaires européens, mais pour moderniser la France.
Oui, il faut que l’euro baisse, car – vous l’avez dit, monsieur le ministre –, c’est aujourd’hui un handicap pour nos PME qui exportent, qui innovent et qui investissent.
Oui, il faut nous battre pour créer de grands champions industriels européens. C’est ce que vous faites actuellement, avec le Président de la République, dans le dossier Alstom.
Alstom est l’un des fleurons de notre industrie. Dans mon département, au Creusot, ses ingénieurs et ses salariés inventent les TGV du futur et les transports de demain.
Le redressement économique passe par ces grandes entreprises qui vont chercher partout dans le monde la croissance dont nous avons besoin. Mais si nous voulons que le pays se redresse, il faut aussi entendre la voix de celles et ceux pour qui chaque euro compte à la fin du mois.
C’est la raison pour laquelle les petites retraites doivent être revalorisées. Les fonctionnaires aux rémunérations les plus modestes, qui portent fièrement l’idéal de service public à la française, doivent eux aussi être soutenus. Nos concitoyens les plus en difficulté ne doivent pas être oubliés ; c’est là le combat historique de la gauche contre les inégalités. Enfin, tout le monde n’étant pas retraité ou fonctionnaire dans notre pays, les salariés du privé ne doivent pas connaître à nouveau, en septembre, le triste sort des augmentations d’impôt.
Monsieur le ministre, le Gouvernement se bat chaque jour pour redonner attractivité et compétitivité à l’économie française. Or compétitivité et justice sociale ne sont pas contradictoires. Le message de justice sociale est celui que nous portons, mes collègues députés socialistes et moi-même. Je ne doute pas que le Gouvernement saura l’entendre pour réconcilier justice sociale et compétitivité de l’économie.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
Monsieur le député, les propositions qui sont faites par le Gouvernement visent à atteindre un équilibre pour l’amélioration des moyens de résistance et de performance de notre appareil productif.
Nous avons commencé avec le crédit d’impôt compétitivité-emploi ; nous continuons avec le pacte de responsabilité.
La nation est entièrement mobilisée, dans toutes ses forces – les syndicats, le patronat, les élus, les territoires, mais aussi les banquiers,
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
auxquels nous demandons également une contribution –, pour que notre appareil productif se redresse.
Nous observons d’ailleurs, au premier trimestre 2014, une poussée intéressante et encourageante de nos exportations vers l’Allemagne : leur montant, en progression, s’élève à 70 milliards d’euros.
Nous observons aussi une amélioration du commerce extérieur et une chute spectaculaire – moins 28 % – des faillites dans les PME de plus de cinquante salariés.
Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe UMP.
On peut s’en réjouir, mes chers collègues. Il n’y a pas de raison d’offrir un tel spectacle !
Notre appareil productif se reconstitue donc ; il retrouve des forces. Pour poursuivre dans cette voie, il faut une politique de l’offre, mais aussi de la demande.
Vous avez observé que, dans le discours de politique générale du Premier ministre, la question de l’euro était centrale. De fait, Michel Sapin et moi-même déployons des efforts pour demander aux institutions européennes – qu’elles soient indépendantes, comme la Banque centrale, ou politiques, comme le Conseil économique et financier – de prendre en compte les besoins des économies qui se reconstruisent, comme c’est le cas de la France. Tel est l’objectif de notre politique ; nous espérons réussir, avec votre concours.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Programme de stabilité
La parole est à M. Alain Chrétien, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Dans quelques minutes, vous allez nous exposer votre plan d’économies pour les années 2015 à 2017. Ce plan est un terrible aveu d’échec de la politique que vous conduisez depuis 2012, un reniement complet de ce que vous aviez défendu.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Le reniement, c’est maintenant !
Vous nous annoncez 50 milliards d’économies tout en multipliant les dépenses.
Comment voulez-vous rétablir la confiance avec tant de contradictions ?
Vous prétendez défendre le pouvoir d’achat des bas salaires, alors que vous avez supprimé la défiscalisation des heures supplémentaires. Vous voulez supprimer les conseils généraux, alors que le chef de l’État veut les conserver. Vous demandez 11 milliards d’économies aux collectivités locales tout en leur imposant des dépenses nouvelles, par exemple à travers la réforme des rythmes scolaires. Vous affirmez baisser les impôts sur les entreprises après les avoir matraquées pendant deux ans.
Qui peut comprendre cette politique de zigzag ? Sûrement pas nos partenaires européens, lesquels attendent de la France de la clarté et des réformes structurelles que nous sommes les seuls à ne pas engager.
La France s’isole de manière dramatique. L’Italie, la Grande-Bretagne et l’Espagne renouent avec la croissance, alors que nous battons des records calamiteux. Nous ne voulons pas d’une France faible dans une Europe forte ; c’est pourtant le chemin qui se profile avec vous et avec le chef de l’État.
Alors, à part un incroyable coup de rabot supplémentaire, que nous proposez-vous pour renouveler notre modèle social et redonner confiance à nos partenaires européens ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, nous ne sommes pas là, à cet instant, pour polémiquer sur ce que les uns et les autres ont pu faire ou ne pas faire.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous sommes là pour regarder la vérité en face. Depuis plus de dix ans, la situation de nos entreprises s’est profondément dégradée, au point qu’aujourd’hui notre balance commerciale, qui était excédentaire, est déficitaire. C’est là un fait. Cette situation ne date pas d’un an ou deux ans ; elle est le résultat d’un processus de dégradation continue depuis dix années.
C’est contre cela que nous proposons à l’ensemble de l’Assemblée nationale et du Parlement d’agir.
Comment ? D’abord, dans la continuité du CICE, le crédit d’impôt compétitivité-emploi, en allégeant un certain nombre de cotisations et d’impôts qui pèsent sur les entreprises et les empêchent d’investir et d’embaucher comme elles le devraient, ce que, les uns et les autres, nous ne pouvons que souhaiter.
Ensuite, en finançant l’ensemble de ces dispositions, y compris celles qui relèvent de la justice sociale – car il faut aussi répondre aux besoins des plus modestes –, non pas, comme vous l’avez fait et comme nous l’avons fait nous aussi, en augmentant les impôts, mais en maîtrisant la dépense et en faisant des économies.
Ce programme équilibré est parfaitement compris par tous nos partenaires. En effet, monsieur le député, je peux vous l’affirmer : non, nous ne sommes pas isolés en Europe. Nous travaillons avec les autres pays européens, non pas pour obéir à je ne sais quel diktat, mais parce que c’est là l’intérêt de la France. Oui, la France a besoin d’être forte en Europe, mais l’Europe, pour être forte, a besoin d’une France qui le soit aussi. Tel est bien l’objectif du pacte de responsabilité autour duquel nous vous proposons, aux uns et aux autres, de vous rassembler.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Élisabeth Guigou, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, chers collègues, ma question s’adresse au ministre des affaires étrangères. Depuis le début de la très grave crise en Ukraine, la France, avec ses partenaires européens, notamment allemand et polonais, appelle à la retenue et au dialogue. Nous soutenons le gouvernement ukrainien, mais nous l’invitons aussi à mener les réformes indispensables qu’exige le peuple ukrainien, à l’ouest comme à l’est du pays, notamment la lutte contre la corruption. Notre priorité immédiate est que l’élection présidentielle du 25 mai se déroule dans de bonnes conditions.
Or, contrairement aux engagements pris à Genève le 17 avril, la Russie poursuit ses actions de déstabilisation dans l’est de l’Ukraine. Les mouvements de ses troupes, les déclarations de ses dirigeants font planer la menace d’une intervention militaire directe. La propagande russe travestit la situation à Kiev, où le calme est revenu. Je l’ai constaté lors des deux déplacements que j’ai effectués récemment, le dernier avec mes homologues allemand et polonais.
Les sanctions qui ont été décidées ont pour but non pas d’isoler la Russie, mais de convaincre ses dirigeants qu’ils commettent une erreur stratégique majeure. Ces sanctions s’ajoutent à celle des marchés – chute du rouble, fuite massive des capitaux. Elles adressent un signal au président de la Russie : il n’y a pas d’avenir pour le peuple russe dans une confrontation avec l’Union européenne.
Nous souhaitons avec la Russie un dialogue sur la construction d’un espace économique et politique commun, de Lisbonne à Vladivostok. C’est le même langage que nous tenons au gouvernement ukrainien lorsque nous lui recommandons de répondre concrètement aux légitimes aspirations de sa population à l’est du pays.
Monsieur le ministre, pouvez-vous informer notre assemblée sur le sens et le contenu des décisions de l’Union européenne, nous dire quelles dispositions seront prises pour garantir la bonne tenue des élections du 25 mai et nous préciser quels gestes concrets vous attendez de la Russie aujourd’hui ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Madame la présidente Elisabeth Guigou, « désescalade » : voilà le seul objectif raisonnable, et celui que poursuivent la diplomatie européenne et la diplomatie française.
Quels gestes attendons-nous de la part des autorités russes ? Tout simplement qu’elles respectent la souveraineté – à laquelle les Russes sont attachés lorsqu’il s’agit de leur pays, à bon droit – des pays limitrophes, et notamment de l’Ukraine.
C’est précisément parce qu’ils n’acceptent pas, pour le moment, de respecter cette souveraineté, que l’Europe et la France ont pris des sanctions. Nous en sommes au « niveau 2 ». Les ministres des affaires étrangères se réuniront probablement jeudi ou la semaine prochaine afin d’examiner la situation et de décider s’il y a lieu d’aller plus loin.
Vous avez raison d’insister sur l’élection du 25 mai. Peu de monde en parle, et pourtant c’est la solution. Lorsque l’on se trouve dans une telle situation de crise, il n’y a d’autre solution que de faire appel à la population. Des vingt-trois personnes qui se sont portées candidates à l’élection présidentielle, plus de la moitié viennent de l’est de l’Ukraine et du sud, et parmi ces candidats figurent les deux représentants de l’opposition parlementaire, le Parti communiste et le Parti des régions. Il faut laisser au peuple ukrainien la possibilité de voter.
Désescalade, donc – et sinon, sanctions –, préparation de l’élection présidentielle, nouvelle constitution : c’est la seule voie possible pour éviter les incidents tragiques qui pourraient découler de la situation actuelle.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Claude Sturni, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question, à laquelle j’associe mon collègue et voisin Frédéric Reiss, s’adresse au Premier ministre. L’heure est grave pour ce fleuron industriel français qu’est Alstom, avec ses 18 000 salariés. Ce qui est particulièrement étonnant dans cette affaire, c’est le sentiment de précipitation et d’urgence qui anime le Gouvernement. Sans doute cherche-t-il ainsi à masquer le manque d’anticipation et de vision que l’on est en droit d’attendre d’un État stratège, d’un État qui, sur le papier, a identifié des filières stratégiques et prétend assurer le redressement productif de la France.
Depuis combien de temps, monsieur le Premier ministre, votre ministre de l’économie est-il au courant des difficultés d’Alstom et des options stratégiques que ses dirigeants étudient pour faire face aux défis que rencontre le groupe ?
Depuis deux ans, la majorité a adressé beaucoup trop de signes de défiance aux acteurs économiques et contribué à leurs difficultés. En exerçant une pression fiscale déraisonnable et en multipliant les règles et les contraintes, elle a pénalisé sans cesse leur compétitivité.
Il n’est donc pas étonnant de constater l’absence de confiance de nombre de dirigeants des grands groupes envers les pouvoirs publics. Comment le Gouvernement imagine-t-il déployer une vision stratégique quant à l’avenir industriel de la France sans pouvoir s’appuyer sur cette relation de confiance ? Les Français sont en droit d’attendre de leur gouvernement une anticipation sur les dossiers et une intelligence partagée. Celles-ci font actuellement défaut.
Quelle différence avec la détermination et la ligne de conduite stratégique de Nicolas Sarkozy et de Jean-Pierre Raffarin…
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Certains dans votre majorité, comme Jean-Pierre Chevènement, le reconnaissent d’ailleurs.
Après les grandes déclarations sur la compétitivité de nos entreprises, voici venue l’heure des travaux pratiques : comment allez-vous rattraper le retard pris par le Gouvernement dans cette affaire ? Comment comptez-vous pérenniser les emplois et les filières d’excellence portés par le groupe Alstom ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
Monsieur le député, le Gouvernement n’accepte pas d’avoir été informé un vendredi que l’un de ses fleurons nationaux, qui vit de la commande publique, totalise 20 milliards de chiffre d’affaires et compte 95 000 salariés, serait vendu le dimanche soir. Aucun gouvernement dans aucun autre État n’accepterait d’être placé devant le fait accompli !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, nous sommes prêts depuis le mois de février. Depuis le mois de février, j’interroge le président de ce fleuron national, M. Patrick Kron. M. Kron, que j’ai interrogé dûment, solennellement et sérieusement, m’a toujours assuré qu’il n’y avait aucun projet d’alliance. Le ministre de l’économie doit-il faire installer un détecteur de mensonges dans le bureau des présidents du CAC 40 qui n’ont pas le civisme élémentaire d’avertir le Gouvernement ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP. – Exclamations sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.
Je veux vous rappeler, monsieur le député, qu’Alstom fabrique les turbines des chaudières nucléaires d’EDF, notamment de l’EPR. C’est la raison pour laquelle j’ai invoqué auprès des investisseurs étrangers, comme General Electric, la clause du contrôle des investissements étrangers – ce que tout citoyen américain peut comprendre, puisqu’elle existe aux États-Unis.
Une offre du groupe allemand Siemens s’est présentée – c’est une information : elle est déposée en ce moment entre les mains du conseil d’administration d’Alstom. Nous avons donc demandé, en liaison avec l’autorité des marchés financiers, que soit assurée l’égalité de traitement des offres. Nous avons déjà gagné quarante-huit heures depuis dimanche soir.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous gagnerons le temps nécessaire pour que les intérêts industriels de la nation soient préservés.
J’invite d’ailleurs tous les dirigeants de l’opposition et de la majorité parlementaire à se rendre à Bercy le plus tôt possible, afin que je les informe de la situation d’Alstom.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Alstom
La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Ma question s’adresse au Premier ministre. Elle présente d’autant plus d’intérêt que la réponse qui vient d’être donnée à mon collègue, et dont je m’étonne, témoigne très clairement d’une perte de confiance entre l’exécutif et l’industrie française.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Les propos du ministre de l’économie attestent que la connexion naturelle – je dis bien « naturelle », et non pas contractuelle –, qui devrait lier nos industriels au Gouvernement n’existe pas – ou plutôt, n’existe plus.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Dans la période de crise que nous traversons aujourd’hui, permettez-moi, monsieur le Premier ministre, d’attendre de vous des propos plus rassurants quant à la qualité des relations entre l’exécutif et l’industrie française.
S’agissant d’Alstom, nous pouvons orienter notre politique industrielle dans trois directions. S’agit-il de mener une politique industrielle nationale, souverainiste, fermée, démondialisée ? Ou bien voulons-nous, comme le préconise Pascal Lamy, une politique industrielle globalisée où l’on reconstituerait des chaînes de valeur ouvertes sur le monde afin que chaque pays soit positionné au mieux de son attractivité industrielle ? Quelle serait alors la politique d’attractivité industrielle ? Quelle est celle que vous menez ? Quel est le cap du Gouvernement en la matière ?
Enfin, troisième solution, évoquée par l’un de nos collègues tout à l’heure : avez-vous la volonté, surtout à la veille d’un scrutin européen, de mener une grande politique industrielle européenne ?
Nous pouvons, en l’espèce, nous interroger sur votre doctrine et vos arbitrages, entre une politique plutôt mondialisée, favorisant les chaînes de valeur, comme le préconise Pascal Lamy et qui conduirait à préférer General Electric, et une stratégie plus européenne, qui favoriserait la proposition de Siemens.
Nous avons besoin que vous apportiez une réponse de fond à une telle problématique.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
La parole est à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
Monsieur le député, je voudrais vous rassurer : notre politique industrielle vise, comme celle de tous les États du monde, à accroître notre base industrielle, à augmenter notre puissance économique dans le monde et à nous armer dans la mondialisation. C’est la raison pour laquelle nous accueillons de nombreux investissements étrangers en France.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous sommes la première destination d’investissements américains en Europe.
Je voudrais d’ailleurs saluer General Electric qui, dans cette affaire, a été très correct, et les remercier de l’intérêt qu’ils portent à la France. Si l’allemand Siemens emploie 8 000 personnes sur notre territoire, General Electric en fait travailler 11 000.
Nous l’avons dit, avec le Président de la République, aux deux dirigeants intéressés par Alstom, lorsqu’ils ont été reçus à l’Élysée : nous préférons nouer des alliances plutôt que vendre par pièces détachées un fleuron industriel du secteur de l’énergie, secteur fondamental et stratégique. Je ne pense pas seulement au nucléaire, mais aussi aux énergies renouvelables, à la fabrication de turbines, aux transports car le transport représente l’avenir. Pour toutes ces raisons, nous leur souhaitons la bienvenue en France.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
En revanche, nous souhaitons que soient nouées des alliances car notre économie, nos entreprises, ne sont pas des proies, mais des entités puissantes capables d’affronter avec des alliés dans le monde, le monde tel qu’il est.
Voilà, monsieur le député, la politique industrielle du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC, « Baratin ! », sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse au nouveau ministre du travail et concerne l’emploi, ou plutôt le chômage. En mars, 1 600 chômeurs de plus étaient inscrits en catégorie A, après un mois de février à plus 31 000. Déni des réalités et méthode Coué du Président de la République n’auront pas eu raison de la courbe du chômage. Notre pays compte plus de 3,3 millions de chômeurs. La situation des chômeurs seniors ou des chômeurs de longue durée ne cesse de se dégrader.
Qu’est-ce qui a changé depuis un mois ? Le ministre. Ce qui demeure ? Trois dispositifs emblématiques qui ont été l’alpha et l’oméga de la politique du gouvernement précédent sans apporter la preuve de leur efficacité durable.
Les emplois d’avenir ? Ils ont concentré toutes les énergies et les moyens des acteurs locaux de l’emploi, et ce, au détriment manifeste de l’apprentissage et de l’alternance – les entrées en apprentissage ont baissé de 8 % en 2013.
Les contrats de génération ? Ils ne décollent absolument pas : 20 000 pour un objectif de 75 000.
Les emplois francs ? Rappelons à Mme la ministre de la ville que, sur les 5 000 escomptés, 130 ont été signés.
Emplois d’avenir, contrats de génération, emplois francs, sont bien loin de compenser les centaines de milliers d’emplois détruits en raison d’un environnement hostile aux entreprises que votre majorité a créé ces deux dernières années.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Alors, pour faire croire au changement, vous multipliez les annonces sorties du chapeau : 500 000 alternants d’ici 2017, un statut d’apprenti pour les chômeurs de longue durée, toujours plus d’emplois d’avenir et de contrats aidés.
C’est ce que vous appelez la « mobilisation pour l’emploi ». Jusqu’à ce qu’elles soient financées, les annonces d’objectifs ne coûtent rien, mais les Français ne sont pas dupes.
Ma question est simple, monsieur le ministre : après un mois aux responsabilités, avez-vous vraiment l’intention de continuer d’inscrire vos pas dans ceux de votre prédécesseur, avec les résultats que l’on sait ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social.
Madame la députée, votre question appelle quelques remarques. Tout d’abord, c’est vrai, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A s’élève à 3,349 millions. Ce chiffre atteste d’une stabilisation.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Pour autant, je ne m’en satisfais pas, tout comme vous. Je pense d’ailleurs que personne, ici, à l’Assemblée nationale, sur ces bancs, ne pourrait se satisfaire ne serait-ce que d’un chômeur supplémentaire chaque mois.
Cette stabilisation traduit une évolution. Rappelons une nouvelle fois que, sur le nombre d’1,3 million de chômeurs en plus que notre pays connaît depuis 2008, nous pouvons, pardonnez-moi l’expression, en mettre 750 000 à la charge de M. Fillon et 450 000 à celle de M. Ayrault.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
C’est un combat national que nous menons et, sur tous les bancs, nous devons tout mettre en oeuvre pour faire baisser le chômage. Les politiques menées par mon prédécesseur et par le Gouvernement contre le chômage des plus jeunes ont été efficaces. Il a ainsi diminué de près de 16 000 demandeurs d’emploi depuis le mois de mars de l’année dernière.
En revanche, la progression continue du chômage des seniors nous préoccupe tous. Nous devons, sur tous les bancs, nous en occuper, tous ensemble.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale. Malgré les difficultés considérables provoquées par la dégradation de nos finances publiques, qui nous impose de réaliser 50 milliards d’euros d’économies, le Président de la République a tenu à maintenir l’éducation comme première priorité, et nous nous en félicitons !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Ainsi la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, votée par notre Assemblée en juillet dernier, doit-elle s’appliquer dans toute sa cohérence et toute son ambition. Et d’abord en redonnant des moyens à l’école, bien sûr : après dix ans de politique de destruction de postes par la droite, nous nous félicitons du maintien des 60 000 postes pour l’éducation, que vous avez confirmé, Monsieur le Premier ministre, dans votre discours de politique générale.
Mais les moyens ne sont pas tout. Au-delà, il s’agit désormais de mettre en place les grands volets de cette refondation : la formation des enseignants qui doit redonner aux jeunes maîtres le goût de leur métier grâce aux écoles supérieures du professorat et de l’éducation, l’éducation prioritaire qui doit redevenir enfin le fondement d’une véritable égalité des chances,…
…et une meilleure organisation du temps scolaire pour nos enfants. Vous avez écouté les enseignants, les parents et les élus, monsieur le ministre. Vous les avez entendus en apportant des aménagements à la réforme des rythmes scolaires. Cette réforme absolument nécessaire fait l’unanimité de tous les responsables de bonne foi
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
et a d’ailleurs été proposée par l’unanimité des députés de notre Assemblée. Elle doit maintenant s’appliquer dans la sérénité. Monsieur le ministre, pouvez- vous nous présenter les modalités d’application de la réforme des rythmes scolaires pour la rentrée de septembre prochain ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Je vous remercie, monsieur le député, d’avoir souligné le fait qu’il n’existe sans doute pas un seul pays européen qui ait manifesté en termes budgétaires une telle ambition éducative…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Tel est le choix politique qu’a fait ce Gouvernement !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Le Président de la République et le Premier ministre ont confirmé notre ambition de créer 60 000 postes
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
après que 80 000 postes ont été détruits dans l’Éducation nationale : c’est un engagement fort et je tiens à le rappeler aujourd’hui.
Permettez-moi également de rappeler les résultats d’une étude réalisée lors de la Journée de citoyenneté et de défense en 2013. Ils confirment le constat alarmant que nous pouvons faire à propos de notre système éducatif : près de 10 % des jeunes de dix-sept ans manifestent de grandes difficultés dans les tests de lecture et de mathématiques. Avant cela, les études PISA et CEDRE ont montré que les élèves de sixième et de troisième éprouvent de grandes difficultés en mathématiques, en anglais, en français ou encore en histoire et en géographie.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a entrepris la refondation de l’école : formation des maîtres, scolarité avant trois ans, priorité accordée à l’école primaire, refonte de l’éducation prioritaire, grand chantier du numérique et refonte des programmes. C’est aussi la raison pour laquelle nous avons lancé une importante réforme des rythmes scolaires, dont je voudrais dire un mot.
J’ai compris que certaines communes éprouvaient des difficultés à mettre en oeuvre ces nouveaux rythmes scolaires.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
C’est pourquoi, à la demande de M. le Premier ministre, j’ai proposé qu’un nouveau décret accompagne le décret initial et comprenne deux mesures d’assouplissement.
La première consiste à offrir la possibilité de réunir la totalité des heures périscolaires dégagées sur une après-midi, tout en maintenant le principe de cinq matinées travaillées, car il y va de l’intérêt de l’enfant.
La deuxième mesure offre la possibilité d’alléger la semaine afin d’allonger l’année scolaire, parce que cela correspond à des expérimentations souhaitables. Nous voulions en effet tenir compte des suggestions qui venaient du terrain. Telle est donc la proposition que nous vous faisons d’assouplir en ce sens les rythmes scolaires.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Elle porte sur l’enquête conduite par l’association « Générations futures » sur l’exposition aux pesticides des jeunes enfants qui vivent dans des zones agricoles où ces substances sont pulvérisées.
Les résultats de cette nouvelle enquête sont très inquiétants. En moyenne, vingt et un résidus de perturbateurs endocriniens ont été retrouvés par enfant. Sur cinquante-trois substances recherchées, trente-cinq ont été retrouvées au moins une fois, dont treize chez chaque enfant examiné. Plus grave encore : plusieurs substances pourtant interdites en agriculture ont également été retrouvées. Les résultats de cette enquête sont alarmants et doivent nous faire réagir.
Rappelons que les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques capables de modifier le fonctionnement hormonal à des doses très faibles, entraînant notamment des cancers, et que ces substances sont encore plus nocives lorsqu’elles touchent une population vulnérable comme les enfants.
Surtout, les effets sur le long terme d’une exposition à un cocktail de substances chimiques sont encore très peu connus. Et pourtant, nous faisons prendre à nos enfants le risque d’une exposition excessive et incontrôlée. Nous savons que les agriculteurs sont les premières victimes des pesticides ; nous savons désormais que nos enfants le sont tout autant.
Vous avez, madame la ministre, présenté ce matin une nouvelle stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, que nous saluons. Toutefois, comme l’a rappelé tout récemment notre collègue Jean-Louis Roumegas dans son rapport sur le sujet, la stratégie européenne en matière de perturbateurs endocriniens est au point mort. De surcroît, elle est gravement menacée par la négociation en cours du traité transatlantique, dont l’adoption entraînerait la suppression de toutes les normes sanitaires et environnementales.
Je vous pose donc deux questions, madame la ministre : comment comptez-vous interdire les épandages de pesticides aux abords des habitations et des lieux de vie ? Comment comptez-vous agir au niveau européen et dans les négociations internationales pour protéger la population des effets de l’ensemble des perturbateurs endocriniens ?
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
En effet, madame la députée, le Conseil national de la transition écologique, que je présidais ce matin, a adopté à l’unanimité moins quatre abstentions la stratégie nationale de lutte contre les pertubateurs endocriniens. Je me réjouis de constater que, pour une fois, les associations mais aussi les entreprises, les élus locaux et les parlementaires présents ont exprimé une volonté commune de réduire l’usage des perturbateurs endocriniens.
Dès lors, la France se trouve en position de force pour se présenter devant la Commission européenne et accélérer la prise de décision en ce domaine, puisque la Commission doit à son tour arrêter la stratégie européenne de lutte contre les perturbateurs endocriniens.
Des solutions très concrètes seront adoptées, car ces perturbateurs concernent des produits utilisés dans la vie quotidienne : je pense aux parabènes, aux phtalates ou encore au bisphénol A. Dans ce domaine, il est essentiel de réagir par des mots précis aux mises en cause émanant de l’industrie chimique. C’est pourquoi j’ai donné ce matin la liste des nouvelles substances qui seront placées sous contrôle. J’ai notamment demandé aux enseignes de grande distribution et aux banques de consentir un effort – certaines l’ont déjà fait – afin de supprimer toute trace de bisphénol A dans les reçus de paiement en caisse et par carte bancaire, et de veiller à contrôler les jouets et les produits alimentaires et sanitaires. Parallèlement, nous lançons l’opération « Terre saine », ou « zéro pesticide ». J’appelle à cette occasion les maires à faire en sorte que ces substances disparaissent complètement des espaces verts et des écoles !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et du groupe écologiste.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, vous venez de fixer le cap de votre gouvernement : emploi, pouvoir d’achat, compétitivité des entreprises et soutien à l’innovation française. Or de très nombreuses grandes entreprises françaises s’en vont.
Aujourd’hui, vous avez à faire un arbitrage qui concerne 45 millions de Français et leur accès mutualisé à des prestations de qualité, qui menace les 10 500 salariés des entreprises spécialisées et 40 000 sous-traitants et prestataires, qui ne peut être appréhendé sous le seul prisme du prix, comme le fait Mme la ministre de la santé, et qui interdit d’accès au marché national une filière de pointe reconnue mondialement.
Cette filière d’excellence, exportatrice et innovante, dont les fabricants sont soutenus par le « Produire en France », est celle de la fabrication de l’optique ophtalmique, présente dans soixante-dix-sept sites en France. Le savoir-faire spécialisé de la fabrication des montures fait vivre des bassins d’emploi à Morez dans le Haut-Jura, à Oyonnax ; la recherche, l’innovation et la fabrication des verres ophtalmiques font vivre des bassins d’emploi à Dijon, Émerainville, Fougères, Provins, Sézanne, mais aussi Ligny-en-Barrois.
Ces entreprises familiales, ces grands groupes, soumis à la concurrence internationale, sont aujourd’hui menacés sur le marché national. Récemment, votre majorité a adopté différentes lois qui visent, soit à libéraliser, soit à réguler, soit à administrer ce secteur. Les conséquences de ces mesures vont indéniablement se traduire par une casse industrielle sans précédent.
Ces mesures sont injustes socialement, injustes pour ce qui est du pouvoir d’achat, injustes pour ce qui est de l’emploi. Vous condamnez irrémédiablement la fabrication française et ses salariés, dans une filière encore très implantée en France.
Monsieur le Premier ministre, comment entendez-vous remédier au désastre économique, conséquence des mesures dogmatiques adoptées contre la filière de l’optique ophtalmique ?
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.
Pour nous, madame la députée, l’enjeu est de permettre à l’ensemble de nos concitoyens d’accéder à des soins de qualité. Dans chacune de vos permanences, mesdames et messieurs les députés, vous rencontrez des hommes et des femmes qui vous disent que les lunettes et les frais d’optique sont trop chers et qu’il leur est parfois difficile de se soigner dans des conditions accessibles.
La seule volonté du Gouvernement est de faire en sorte que cette filière économique et industrielle d’excellence garantisse des soins de qualité à l’ensemble de nos concitoyens.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Il n’y a aucune raison pour que les lunettes ou les frais d’optique coûtent plus cher en France que chez nos voisins. Il n’y a aucune raison pour que nos concitoyens, tous nos concitoyens, ne puissent accéder à des soins de qualité dans l’ensemble des secteurs qui les concernent. La politique du Gouvernement a une seule exigence : l’accès à des soins de qualité, pour tous et en permanence.
Nous voulons que la qualité de notre filière optique soit renforcée et maintenue. Nous avons engagé, avec l’ensemble des acteurs industriels, des relations permettant de conforter les secteurs d’excellence, d’innovation et d’amélioration des produits qui sont proposés. Dans le même temps, la volonté du Gouvernement – c’est ma responsabilité – est que l’ensemble de nos concitoyens soient soignés et pris en charge dans de bonnes conditions. C’est la raison pour laquelle, avec l’assurance maladie et les complémentaires santé, nous faisons en sorte de permettre l’accès aux soins d’optique pour tous, dans de bonnes conditions financières et de qualité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
La semaine dernière, un grand quotidien national a fait état, une nouvelle fois, de certaines situations concernant des personnes handicapées accueillies dans des établissements wallons.
Il a été mis en avant que, dans plusieurs établissements, l’accompagnement des personnes accueillies était loin de répondre aux exigences légales et réglementaires instituées dans notre pays. Pis encore, il est fait état de pratiques dégradantes portant atteinte à l’intégrité physique et morale des ressortissants handicapés, ce qui constitue une dérive intolérable.
Pour autant, le Gouvernement n’a pas attendu que les médias s’y intéressent pour engager des actions fortes de coopération et de contrôle. Au mois de mars dernier, un accord conclu entre la France et la Wallonie est entré en vigueur. Il permet désormais aux inspecteurs français de se rendre en Belgique afin de contrôler, en collaboration avec les inspecteurs wallons, les conditions d’accueil et la qualité des prestations.
Suite à l’annonce de ces mesures, pourriez-vous, madame la secrétaire d’État, nous indiquer où en sont les démarches avec nos voisins belges ? Pouvez-vous nous dire également ce que vous comptez mettre en oeuvre pour répondre à ces situations inacceptables qui jettent le discrédit sur tous les autres établissements – qu’ils soient en Belgique ou en France – et qui remplissent leur mission avec beaucoup d’humanité et de professionnalisme ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Madame la députée, je vous remercie de votre question qui va me permettre, suite à l’article paru vendredi dernier, d’apporter quelques éclaircissements.
Vendredi dernier, je me suis entretenue sur ce sujet avec la ministre wallonne des affaires sociales, Éliane Tillieux. Sachez que, dès vendredi, les services d’inspection wallons ont mené une inspection dans les établissements mis en cause dans cet article.
Bien entendu, cette situation, telle qu’elle nous est présentée à la une de ce journal, est intolérable. Mais comme vous l’avez souligné, madame la députée, le Gouvernement n’a pas attendu cette alerte, même si celle-ci est salutaire, pour agir. Un accord franco-wallon est en oeuvre depuis le mois de mars 2014. Je tiens à saluer à ce sujet le travail du député Philip Cordery, qui s’est penché longuement sur ce sujet.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Dès demain, un inspecteur français se rendra en Wallonie pour inspecter, conjointement avec les services wallons, les établissements en question. Pour ma part, je me rendrai dès la semaine prochaine en Belgique pour rencontrer la ministre wallonne des affaires sociales.
L’accueil des personnes handicapées en Wallonie est une réponse limitée à des situations bien précises, mais elle ne se réduit pas à ce qui a été montré dans l’article puisque bon nombre d’établissements sont de qualité en Wallonie. Cela ne doit pas remettre en cause la coopération entre la France et la Belgique.
Je veux aussi rappeler que l’accompagnement des personnes handicapées en France ne se résume pas à ces situations précises et que les Français accueillis en Belgique ne représentent que 1 % des personnes concernées. Je salue ici le travail des associations – et notamment des associations de parents – qui accueillent 460 000 personnes handicapées en France. Ce sont 10 000 établissements et 280 000 salariés. Ils font du bon travail !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs des groupes écologiste et RRDP.
La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à Mme la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports. Votre ministère, madame la ministre, doit choisir au mois de juin prochain les 230 communes du territoire qui bénéficieront du programme national de rénovation urbaine. Engagé par Jean-Louis Borloo et créé par la loi du 1er août 2003, ce programme connaît un succès dont chacun convient. Il a vocation à transformer les quartiers les plus fragiles classés en zone urbaine sensible ainsi que ceux qui ne le sont pas mais présentent les mêmes difficultés socio-économiques. Grâce au PNRU, près de 600 quartiers sensibles ont été restructurés et environ 27 000 opérations ont été financées.
Ainsi, dans ma bonne ville de Sens,
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC
le programme de l’ANRU a permis de réhabiliter et construire des centaines de logements dans les quartiers des Chaillots, des Champs d’Aloup et des Champs Plaisants. L’enjeu s’avère donc majeur pour nos communes et de nombreux maires espèrent que la couleur politique ne sera pas un critère de choix du Gouvernement. Dès lors, pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer quels critères détermineront le choix des communes bénéficiant du PNRU 2 pour la période 2014-2024 ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports.
J’ai écrit hier aux quelque 900 maires concernés par la politique de la ville afin de leur indiquer le calendrier exact de la réforme de la politique de la ville que nous nous apprêtons à mener dès lors que vous avez accepté au mois de février dernier, mesdames et messieurs les députés, de la voter. Elle a précisément pour objet de mettre un terme à quelques-uns des dysfonctionnements que vous évoquez, madame la députée, tels que l’illisibilité des dispositifs, leur multiplication et le morcellement des aides, dont résulte une assez mauvaise compréhension de ce que la politique de la ville parvient concrètement à réaliser pour les habitants concernés. Afin d’y mettre fin, nous concentrons les efforts sur les territoires aux besoins les plus forts.
Vous connaîtrez dès la fin du mois de mai, mesdames et messieurs les députés, les 1 300 quartiers « coeur de cible » qui bénéficieront désormais des efforts conjoints de l’État, des collectivités locales et des grandes entreprises liés par des contrats de ville que nous signerons prochainement. Ils sont désormais définis sur la base d’un critère unique, objectif et transparent, qui est le niveau de revenu des habitants. Il permet d’ailleurs d’identifier, outre les quartiers situés en périphérie, des territoires situés en centre-ville ou dans des villes moyennes, ce qui est intéressant.
Nous fournirons un effort maximal au bénéfice de ces quartiers afin d’y relancer la vie et la rénovation urbaine, en particulier les 200 d’entre eux qui seront désignés cet été sur la base des propositions du conseil d’administration de l’ANRU, donc de façon objective et transparente, car collectivités locales et bailleurs sociaux y participent. Ils bénéficieront des 5 milliards d’euros de l’ANRU au cours des six prochaines années et connaîtront ainsi des opérations de renouvellement urbain, de désenclavement grâce à des transports adaptés mais aussi de développement de commerces de proximité dont nous avons besoin, au moins pour rétablir la vie économique et redonner de l’emploi aux habitants.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Yannick Favennec, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et du redressement productif.
Vous êtes mobilisé à juste titre, monsieur le ministre, pour l’avenir d’un grand groupe industriel français certes stratégique pour notre pays. Mais n’oubliez pas pour autant qu’il existe également des petites et moyennes entreprises, qui sont aussi créatrices de richesse et par conséquent d’emplois, en particulier dans nos territoires ruraux. Pourtant, votre pacte de responsabilité ne les concerne aucunement.
Je citerai en exemple une entreprise de ma circonscription, les établissements Gontier situés à Landivy, dans le nord du département de la Mayenne, qui fabriquent des meubles et emploient aujourd’hui 78 personnes. L’entreprise a été placée en redressement judiciaire au début du mois et 39 salariés vont être licenciés. Mais à terme, c’est le devenir de la PME dans son ensemble qui est en jeu. L’entreprise Gontier et ses salariés sont semblables à des milliers de PME qui irriguent des territoires et attendent de votre part, monsieur le ministre, des décisions fortes et claires en matière de compétitivité.
Je vous ai sollicité à plusieurs reprises à ce sujet, ainsi que le président de la Banque publique d’investissement, et n’ai jamais reçu de réponse de fond.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Qu’avez-vous fait, monsieur le ministre, pour cette entreprise et ses salariés ? Vous vous battez en faveur du made in France, mais que faites-vous, sinon des discours, pour sauver l’un des derniers savoir-faire français de qualité implanté dans un canton rural ? A quoi sert votre commissaire régional au redressement productif, que les dirigeants d’entreprise n’ont jamais eu la possibilité de rencontrer ? Les salariés de Gontier, les élus locaux et les habitants de Landévy attendent aujourd’hui une réponse précise de votre part, monsieur le ministre !
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
La parole est à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
Je vous remercie de votre question, monsieur le député, et vous informe qu’il n’entre pas dans les habitudes des commissaires régionaux au redressement productif de ne pas répondre au courrier et de ne pas être disponible pour les dirigeants des entreprises et des syndicats concernés. Je vais donc tirer au clair les éléments dont vous faites état et, si des fautes ont été commises, je vous le dirai et prendrai des décisions. Nous disposons d’informations au sujet de l’entreprise que vous évoquez et mes équipes, en liaison avec les collectivités locales, s’en sont occupé. Cependant, nous avons beau nous occuper des petites et moyennes entreprises, il arrive parfois que nous échouions.
En l’espèce, un redressement judiciaire douloureux est en cours après des difficultés qui sont apparues dès 2011.
Mais notre travail consiste invariablement à préserver l’outil industriel, même si des sacrifices doivent être consentis. En effet, mieux vaut une entreprise réduite et en cours de restructuration qu’une entreprise liquidée. Nous luttons donc contre la maladie de la liquidation. Je vous transmettrai des informations plus précises et ferai toute la lumière sur l’activité de mes services à ce sujet, monsieur le député. Depuis deux ans, nous avons tout de même traité 1 572 dossiers, selon un chiffre publié hier, ce qui représente 197 304 emplois préservés sur 226 843 emplois menacés.
Ainsi, nous déplorons certes des dégâts de 25 000 emplois environ, mais la stratégie de l’endiguement justifie une mobilisation des territoires et des élus. Je suis pour ma part toujours très heureux que des parlementaires fassent appel à moi et mes services. Nous allons donc faire toute la lumière sur cette affaire, monsieur le député, et nous mettre à votre disposition.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Avenir de l’entreprise Gontier à Landévy
La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.
Heureusement que nous sommes là ! On se demande bien où est la majorité !
Heureusement que nous sommes là ! On se demande bien où est la majorité !
L’ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement en application de l’article 50-1 de la Constitution, suivie d’un débat et d’un vote sur le projet de programme de stabilité pour 2014-2017.
La parole est à M. le Premier ministre.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et sur de nombreux bancs des groupes écologiste et RRDP.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, il y a trois semaines je me présentais devant vous, investi par le Président de la République d’une mission : ouvrir une nouvelle étape du quinquennat, c’est-à-dire accélérer le rythme des réformes pour répondre plus efficacement, plus rapidement, aux attentes de nos concitoyens, exprimées notamment à l’occasion des élections municipales, pour poursuivre le redressement de notre pays, de son économie.
Le 8 avril, vous m’avez accordé la confiance. Elle est essentielle : la confiance, c’est la condition de la réussite. De la réussite de la France et des Français. Le vote d’aujourd’hui est un moment de vérité. Ce n’est pas un vote indicatif. C’est un vote décisif ! Il marquera profondément, j’en suis convaincu, l’évolution de notre pays. Ce moment nous invite tous au dépassement de nous-mêmes. J’ai écrit hier en ce sens à l’ensemble de la représentation nationale.
Depuis ma nomination, j’ai voulu ouvrir – je continuerai et je sais, monsieur le président de l’Assemblée nationale, que vous y êtes particulièrement attaché – une nouvelle méthode de dialogue et de travail avec le Parlement. Un dialogue permanent, en responsabilité, constructif. Il est le socle des réformes nécessaires pour le pays. Je viens soumettre à la discussion et à votre vote les grandes orientations du programme de stabilité budgétaire de la France, que le ministre des finances et des comptes publics et le secrétaire d’État au budget vous ont déjà présentées en commission des finances.
Mesdames, messieurs les députés, comme vous, j’aime la France. Je veux pour elle le meilleur. Je veux qu’elle regarde devant elle avec optimisme, en ayant conscience de ses atouts et en ayant confiance en elle-même. Je veux qu’elle retrouve cette envie d’aller de l’avant.
Nous partageons tous les mêmes objectifs : la croissance, l’emploi et le pouvoir d’achat. Et ce vote, c’est une impulsion pour mettre en oeuvre concrètement le pacte de responsabilité et de solidarité.
Ce pacte, que nous avons déjà présenté, c’est d’abord la compétitivité de nos entreprises. L’enjeu, c’est de renforcer durablement l’offre productive de la France. Si nous avons de nombreux fleurons à dimension mondiale, la base industrielle de la France s’est rétrécie depuis dix ans. Nous avons perdu des dizaines de milliers d’emplois industriels. Il faut donc la réarmer dans le cadre de la compétition mondiale.
C’est la raison pour laquelle, comme cela a été dit tout à l’heure, le cas d’Alstom est l’objet de toute l’attention du Président de la République et du Gouvernement. L’État doit être présent à la manoeuvre, car c’est un enjeu stratégique national. Comme l’a dit Arnaud Montebourg, nous serons attentifs aux offres et à leurs garanties en termes de création d’activité en France, de localisation des centres de décision et d’emplois. Et bien sûr, nous serons aussi extrêmement vigilants sur la question de l’indépendance énergétique.
Aujourd’hui, mesdames et messieurs les députés, la croissance repart en France et en Europe. Mais elle est encore trop faible. Il faut donc la soutenir sans relâche, en redonnant des marges à toutes les entreprises françaises, qui sont les plus faibles d’Europe – notamment les PME, les PMI et les entreprises de taille intermédiaire –, en réduisant leurs charges. Le CICE est une première étape. La plupart des entreprises vont commencer à le percevoir ces prochains jours.
Avec le pacte de responsabilité et de solidarité, la baisse du coût du travail va s’amplifier. Zéro charge pour un salarié payé au SMIC au 1er janvier 2015, c’est une incitation forte pour les employeurs. La fiscalité des entreprises va également diminuer progressivement d’ici à 2017, avec la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés – la C3S – et la baisse de l’impôt sur les sociétés. En 2015, les premiers bénéficiaires de ces mesures seront les PME et le PMI.
Le pacte de responsabilité et de solidarité, c’est de l’emploi. Ce sont les entreprises qui créent de la richesse, donc de l’emploi. Je fais confiance aux entrepreneurs, aux salariés, aux commerçants, aux artisans, aux créateurs. Comme vous, je connais leur engagement et leur goût pour le travail et l’effort. Jamais un tel niveau d’engagement n’a été consenti en si peu de temps pour les entreprises et l’emploi : 30 milliards d’euros !
Mesdames et messieurs les députés, il vous appartiendra, et c’est légitime, de vous assurer que les incitations fiscales attribuées aux entreprises servent bien les objectifs du pacte, c’est-à-dire l’investissement et l’emploi. Vous devez être, et vous serez étroitement associés – c’est le rôle du Parlement – au suivi et aux évaluations que feront les partenaires sociaux des engagements pris par les représentants des entreprises. Les marges dégagées par celles-ci ne doivent pas constituer l’occasion d’augmenter les dividendes pour les actionnaires ou les rémunérations des dirigeants.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.– Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.
Ces marges doivent servir l’investissement et l’emploi.
Il ne s’agit pas jeter la suspicion sur les entreprises,…
…ais de mesurer pleinement l’efficacité de nos politiques, notamment de nos politiques publiques, et de faire vivre un engagement partagé, majeur pour la nation tout entière. Quand la nation tout entière consent un tel effort pour les entreprises et pour l’emploi, il est légitime que les représentants du peuple et ceux des salariés puissent examiner et évaluer l’emploi des fonds mis en oeuvre. C’est l’engagement pris par le Gouvernement devant vous.
L’emploi, c’est celui des seniors qui, malgré leurs compétences et leur expérience, ne trouvent pas d’employeurs. C’est aussi celui des jeunes, que nous devons aider davantage à débuter dans la vie. Comme le Président de la République et moi-même le disions hier, des dispositifs existent : les contrats d’accompagnement dans l’emploi, les contrats d’avenir, les contrats de générations. Et puis, il y a surtout l’apprentissage, dont nous parlons depuis si longtemps et qu’il faut développer, car il est en baisse…
…alors qu’il constitue une très bonne voie pour s’insérer dans l’entreprise, pour former, pour trouver un emploi qualifié. Le pacte doit venir prolonger ces dispositifs. Ces sujets – je pense en particulier à ceux de la formation et de l’apprentissage – sont au coeur des discussions avec les partenaires sociaux.
Le pacte de responsabilité et de solidarité, c’est du pouvoir d’achat. Et l’enjeu est là : la vie chère, la difficulté à réaliser les projets du quotidien, à se loger, tout cela doit être au centre de nos préoccupations. La dernière enquête de conjoncture mensuelle effectuée par l’INSEE auprès des ménages montre que leur confiance continue de s’effriter. Les perspectives d’évolution de la situation financière personnelle chutent de 11 points. Chacun doit y être attentif.
Notre pays doit savoir mieux rémunérer le travail, en particulier tous ces employés, ces salariés, ces ouvriers qui travaillent dur et qui ont les plus grandes difficultés à boucler leurs fins de mois, à payer leurs factures, à rembourser leurs crédits
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
La baisse de cotisations salariales pour les bas salaires va représenter, je le répète ici, pour un salarié au SMIC, la moitié d’un treizième mois, c’est-à-dire 500 euros par an. Voilà qui apporte du concret dans le budget des familles.
Pour les ménages aux revenus modestes, pour les bas salaires encore, une mesure fiscale de soutien au pouvoir d’achat interviendra dès cet automne. Nous en élaborerons ensemble les modalités, dans les prochains jours, dans le cadre de la loi de finances rectificatives. En règle générale, mesdames et messieurs les députés, nous devons mettre un terme à ce réflexe de la hausse des impôts qui s’est vérifié depuis 2010 (« Ah ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)…
..à savoir 30 milliards par la précédente majorité
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC
et 30 milliards par l’actuelle. Quand on les écoute, les Français nous disent qu’ils n’en peuvent plus. Il faut donc nous engager dans une baisse des prélèvements obligatoires.
Au final, mesdames et messieurs les députés, le pacte de responsabilité et de solidarité doit être un immense levier de confiance pour aller chercher la croissance et la compétitivité.
Pourtant, depuis des années, les déficits et la dette nous étranglent et nous empêchent de réinstaller la confiance. Depuis près de quarante ans, la France dépense, chaque année, plus qu’elle ne produit. Et nous savons tous que quand on vit au-dessus de ses moyens, on ne peut pas envisager sereinement l’avenir. Chacun le comprend. Les Français l’ont compris depuis longtemps. La perte de confiance de notre pays, elle est là aussi.
À force de déficits répétés, nos comptes publics sont devenus une entrave pour notre économie. La France est un grand pays, une grande puissance économique, industrielle et agricole. Elle se doit de garantir son indépendance financière, sa souveraineté, c’est-à-dire ne pas dépendre du bon vouloir des marchés financiers, et ne jamais faire peser le poids de sa dette sur les générations futures.
Le remboursement de notre dette, c’est le deuxième poste de dépense de l’État. Nous y consacrons, chaque année, 45 milliards d’euros. Vous tous, ici, le savez : c’est plus des deux tiers du budget de l’éducation nationale, et ce n’est plus acceptable ! La dette était de 1 300 milliards d’euros en 2008, avant que nous ne la stabilisions à partir de 2012 autour de 1 800 milliards.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Pendant longtemps, par manque de courage, nous avons rechigné, les uns et les autres, à prendre les mesures qui s’imposaient : ce n’était jamais le moment. Malgré un niveau de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés au monde, la France n’a pas su maîtriser l’évolution de sa dette publique.
Bien sûr, il y avait la crise, mais elle n’explique pas tout. Cette dérive s’est fortement accentuée depuis 2007. Le déficit s’établissait alors à 50 milliards d’euros. En 2009 et 2010, il a quasiment triplé, pour atteindre 140 milliards d’euros. En 2011 et 2012, il avoisinait encore les 100 milliards. En 2013, même si nous l’avons ramené à 88 milliards d’euros, il continue de peser lourdement.
Le déficit a-t-il permis une amélioration de la situation des Français ? Non.
Notre produit intérieur brut en 2013 était de 2 000 milliards d’euros : le même qu’en 2008. Depuis, la population française a continué de croître. En réalité, les richesses produites rapportées au nombre d’habitants ont diminué de 3 %. Nous nous sommes donc appauvris collectivement.
Laisser filer les déficits n’est donc pas la solution pour retrouver la croissance et redonner du pouvoir d’achat à nos concitoyens, et cela n’a rien à voir avec je ne sais quelle injonction bruxelloise. Nos dépenses publiques doivent être financées, et je revendique devant vous le sérieux budgétaire.
Réduire nos déficits, c’est aussi le sens du plan d’économies de 50 milliards d’euros que j’ai présenté au conseil des ministres le 16 avril.
Je suis convaincu que beaucoup d’entre vous, sur tous les bancs, partagent l’idée que ces efforts doivent s’accompagner d’initiatives fortes au niveau de l’Union européenne pour soutenir la croissance. Cela passe par des politiques d’investissement ; des politiques de grands travaux sur les grands sujets d’avenir tels que l’énergie ou le numérique ; des politiques d’emplois, et notamment pour les jeunes. Mais aussi une politique monétaire plus adaptée car, aujourd’hui, le niveau de l’euro est trop élevé, et le ministre des finances et le ministre de l’économie l’ont rappelé. Ce sera la démarche du chef de l’État dans les négociations qui suivront le renouvellement du Parlement européen. Les efforts qui sont faits par les peuples européens, les efforts que nous faisons, doivent désormais trouver une traduction au niveau européen. Il en va du projet européen et de sa crédibilité, c’est l’engagement du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Mesdames et messieurs les députés, le plan d’économies qui vous a été présenté assurera notre redressement collectif, c’est ma conviction et c’est pour cela que je suis devant vous. Certains nous disent qu’il est trop timide ou insuffisant, d’autres, au contraire, qu’il est trop dur.
J’ai deux convictions. La première, c’est qu’il est calibré pour assurer le redressement de notre économie.
Le respect des 50 milliards, c’est le respect des engagements de la France, pour elle-même. C’est un impératif aussi pour sa crédibilité, et la crédibilité et la parole de la France comptent en Europe et dans le monde, et nous n’avons pas le droit de la mettre en cause.
Ma seconde conviction, c’est que ce plan d’économies est bien réparti. Il est juste, c’est la volonté du Gouvernement, et il est juste parce qu’il tient compte du dialogue nourri, exigeant et fructueux que j’ai eu avec les groupes de la majorité. Mais j’ai aussi entendu sur un certain nombre de sujets les voix ou les propositions qui pouvaient venir de l’opposition.
Les minima sociaux seront indexés régulièrement par rapport aux prix. Les plus démunis verront donc leur pouvoir d’achat garanti. Par ailleurs, deux prestations ont été augmentées de façon exceptionnelle au début du mois d’avril : l’allocation de soutien familial, qui bénéficie aux parents isolés, a augmenté de 5 % ; et le complément familial de 10 % pour les familles nombreuses les plus pauvres. Mesdames et messieurs, c’est cela la justice sociale !
Près de 6,5 millions de retraités modestes verront leur pouvoir d’achat intégralement préservé, c’est-à-dire, tous ceux qui perçoivent jusqu’à 1 200 euros de pension. Pour eux, il n’y aura pas de report de la revalorisation. C’est cela aussi la justice sociale !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Nous devons soutenir les travailleurs aux revenus modestes, ceux pour qui la vie est dure, ceux qui désespèrent de retrouver un emploi. Mais plus que jamais, la lutte contre la pauvreté demeure notre priorité. Par conséquent, la revalorisation exceptionnelle du RSA, de 10 % en cinq ans, qui a été voulue sur tous les bancs, interviendra bien, comme prévu, le 1er septembre 2014. C’est cela aussi la justice sociale !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Les fonctionnaires des trois fonctions publiques aux rémunérations les plus modestes bénéficieront des mesures de revalorisations prévues pour la catégorie C et les agents de catégorie B en début de carrière. Ils sont le coeur, la fierté même, de nos services publics, donc de notre cohésion sociale. Pour 1,6 million d’entre eux, cela représente en moyenne environ 440 euros de salaire net en plus dès l’an prochain. Mesdames et messieurs les députés, c’est cela aussi la justice sociale !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Sur ce sujet de la fonction publique, je rappelle enfin que le gel du point d’indice des fonctionnaires fera l’objet d’un réexamen chaque année au regard de la croissance et des résultats du redressement économique de notre pays.
Mais j’ai la conviction qu’il nous faut aller plus loin car, au fond, l’aspiration essentielle de chacun, c’est d’offrir un meilleur avenir à ses proches et à ses enfants. Il faut donc accélérer le rythme des réformes car l’avenir se prépare maintenant.
C’est la cohérence de notre stratégie, depuis ma déclaration de politique générale jusqu’à l’intervention que je fais devant vous : le pacte, les économies budgétaires, la réforme.
Préparer l’avenir, c’est d’abord, la grande réforme territoriale que je vous ai proposée. Le constat est, je le crois, partagé sur de nombreux bancs : malgré l’action des élus que je veux saluer encore une fois, l’action publique locale est parfois peu lisible pour nos concitoyens et pour les acteurs économiques et sociaux.
L’empilement des échelons, la superposition des compétences, les financements croisés nuisent à l’efficacité de l’action menée par nos collectivités.
Sur ce sujet comme sur les autres, les Français attendent un discours de vérité, de responsabilité, loin des postures. Moderniser nos collectivités, c’est clarifier leurs domaines d’intervention, ajuster leur périmètre. C’est aussi leur permettre de s’adapter à la diversité des territoires. Je pense notamment à nos territoires périurbains, aux espaces ruraux, mais aussi aux quartiers de nos villes, à nos outre-mer qui connaissent des réalités difficiles dont il faudra bien évidemment tenir compte.
Cette réforme de nos collectivités, on en a beaucoup parlé. Mais à part le conseiller territorial qui n’a jamais vu le jour dans le cadre du dernier quinquennat,
Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP
Le conseiller territorial était une bonne réforme, mais vous l’avez abrogée !
Il faut donc avancer, sur ce sujet comme sur d’autres. C’est le sens des quatre axes de réformes que j’ai détaillés devant vous le 8 avril. Il s’agit de doter les régions de compétences approfondies et d’élargir leurs périmètres ; de redessiner des intercommunalités plus grandes et plus fortes ; de clarifier les compétences en supprimant la clause de compétence générale ; et d’ouvrir le débat sur la suppression des conseils départementaux.
J’ajoute que nous devons être attentifs à préserver la capacité d’investissement des collectivités territoriales car nous connaissons tous le rôle de l’investissement de nos régions, de nos départements, de nos villes, dans l’investissement public.
Nous devons également être attentifs à la situation financière des villes dont les ressources sont parmi les plus faibles, dans les territoires urbains, dans nos banlieues, comme dans les territoires ruraux. En somme, nous devons être attentifs, sans oublier les autres, à la situation de villes comme Sarcelles, Drancy, Guéret, Trélazé ou Saint-Denis de la Réunion.
Mesdames et messieurs les députés, les mesures prévues sont ambitieuses. Et j’entends les doutes, les critiques. Mais avec ces réformes profondes et indispensables, nous mettrons en oeuvre une organisation territoriale plus efficace, avec des collectivités renforcées dans leurs missions. Et s’il faut aller plus vite, le Gouvernement y est prêt.
Repenser nos structures territoriales pour les rendre plus efficaces, c’est aussi, nécessairement, repenser le rôle et la place que l’État doit tenir dans nos territoires.
L’État territorial, c’est l’État proche des gens. C’est l’État qui a un rôle dans leur quotidien. Nous allons donc revoir et renforcer son organisation, tout particulièrement au niveau départemental. Les Français tiennent également à l’État central. Ils tiennent surtout à son efficacité. Et pour qu’il soit efficace, l’État devra aussi se recentrer sur ses missions : la définition des stratégies nationales. Et ces missions devront être davantage ciblées pour être plus efficaces. Nous parlons depuis trop longtemps de la réforme de l’État, elle ne peut pas se faire à coup d’économies et de rabot. En plus d’une réforme profonde de nos collectivités territoriales, nous mettrons en oeuvre une réforme nécessaire, indispensable, de notre État.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Préparer l’avenir, c’est ensuite restaurer pleinement la puissance de nos politiques publiques. Qui veut gouverner doit choisir. C’est ce que nous avons fait en dégageant deux priorités : l’école d’un côté ; la sécurité et la justice de l’autre.
S’agissant tout d’abord de l’école, nous savons que le rythme de croissance d’un pays est très souvent lié aux performances de son système scolaire. Investir dans l’école, c’est investir pour le développement, pas seulement le développement personnel de nos enfants, mais également le développement économique de notre pays. Ainsi, 30 000 postes seront encore créés dans l’éducation nationale d’ici 2017 pour atteindre 60 000 postes supplémentaires en cinq ans !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.– Applaudissements sur les bancs du groupe SRC
C’est l’engagement que le Président de la République et cette majorité ont pris devant les Français, Benoît Hamon le rappelait tout à l’heure. Et nous tenons nos engagements pour l’école, pour notre jeunesse, pour les enfants, pour soutenir nos universités, la recherche et l’innovation, parce que c’est là-dessus que se joue l’avenir du pays dans le monde qui est le nôtre.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
La seconde priorité, ce sont la sécurité et la justice, car nous sommes convaincus qu’il n’y a pas d’avenir, donc pas de progrès social sans ordre. L’insécurité, le désordre, la violence, sont des injustices sociales supplémentaires qui minent le pacte républicain et qui touchent d’abord les plus modestes et les plus fragiles de notre société. C’est pourquoi nous maintiendrons la création de cinq cents postes supplémentaires par an dans la police et la gendarmerie ainsi que les cinq cents prévus tous les ans dans la justice, et plus particulièrement dans la pénitentiaire. La sécurité et la justice sont des priorités, nous maintenons les postes, c’est aussi cela tenir ses engagements devant le peuple.
Préparer l’avenir, c’est créer des logements. Le logement est au coeur des préoccupations de nos compatriotes, c’est le premier budget des familles. Et nous manquons cruellement de logements.
Il faut diminuer les coûts de la construction, diminuer les délais, tout en conservant la même exigence de qualité. Malgré les textes déjà votés, ce chantier reste devant nous. Pour cela, nous sommes en train de mettre en oeuvre cinquante mesures de simplification des règles et des normes de construction. Nous devons débloquer ce qui est aujourd’hui bloqué, parce que le logement est une priorité pour les classes moyennes, pour les couches populaires, et le Gouvernement veut, c’est ma mission, aller plus loin et plus vite sur ce sujet comme sur les autres.
Préparer l’avenir, c’est aussi accompagner les évolutions de la société. Le vieillissement de la société est un défi majeur. Nous devons répondre aux inquiétudes des Français, qui craignent de devoir affronter seuls une future perte d’autonomie pour eux-mêmes ou pour leurs parents. Là encore, c’est un sujet de grande préoccupation dans les familles. Je confirme donc que le projet de loi pour l’adaptation de la société au vieillissement sera présenté au conseil des ministres avant cet été et je ne doute pas qu’il fera l’objet d’un travail de très grande qualité avec l’Assemblée.
Préparer l’avenir, c’est lutter aussi contre l’accroissement des inégalités dans le domaine de la santé. Au-delà de ce qui a déjà été engagé, un projet de loi permettra de réformer ce secteur et de faire face aux besoins d’économies sans réduire la prise en charge des soins, ni leur qualité. Les solutions existent, Marisol Touraine les rappelle régulièrement : la chirurgie ambulatoire, qui permet aux patients d’être soignés dans la journée, ou la mutualisation des achats pour les hôpitaux. Nous devons également éviter les actes médicaux inutiles, et poursuivre le mouvement de baisse des prix, pour les médicaments de marque comme pour les génériques.
Enfin, préparer l’avenir, c’est s’engager avec conviction dans l’économie verte. La transition énergétique est une nécessité. C’est un impératif environnemental, bien sûr. C’est aussi, surtout, une source de croissance économique, un gisement d’emplois non délocalisables. La loi de transition énergétique sera transmise avant l’été au Conseil économique, social et environnemental, en vue d’une inscription à l’agenda du Parlement.
Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, préparer l’avenir, ce n’est pas l’austérité, mais faire des choix et définir des priorités. C’est répondre surtout à la crise de confiance, mais aussi à la crise d’identité que traverse notre pays. Je n’y reviens pas : je l’ai évoquée dans ma déclaration de politique générale.
La politique que nous menons est également cohérente, car elle veut l’apaisement. Elle veut rendre ce pays plus conscient de ses atouts, plus fier de lui-même.
Mesdames et messieurs les députés, ce que le Gouvernement soumet aujourd’hui à votre vote, c’est le programme de stabilité pour les trois années à venir.
Notre stratégie collective vise la réussite de la France, et rien d’autre. Sa force, c’est sa cohérence : tonifier la croissance, soutenir pour l’emploi la compétitivité de nos entreprises par une réduction de leurs coûts, réduire les déficits qui nous asphyxient en faisant des économies,…
…soutenir le pouvoir d’achat des plus modestes par des mesures ciblées, mais aussi par une baisse des prélèvements obligatoires.
Je vous ai dit mon souhait, et celui de mon gouvernement, de travailler étroitement avec vous. Et c’est ce que nous ferons à l’été, puis à l’automne, lors de l’examen des textes financiers.
Lors de mon discours de politique générale, j’ai fait référence à Pierre Mesdès France. Je veux l’évoquer ici à nouveau,…
…et rappeler ses mots : « C’est parce que nous pouvons nous redresser en prenant appui sur les réalités que j’ai dénoncé les illusions. »
Je sais que beaucoup de Français doutent. Ma mission est celle de tous, quel que soit notre engagement politique : elle consiste à redonner confiance et envie dans la parole publique…
...ô combien écornée – les responsabilités sont partagées. Cela implique de dénoncer les illusions, de dire encore et toujours la vérité.
Devant vous, je veux parler clair. Je n’ai qu’un seul discours, ici comme ailleurs. Le Gouvernement ne vous demande pas de vote à blanc, juste pour voir,…
…ni une indication, et encore moins un message. Le résultat du vote de cet après-midi conditionne à la fois la légitimité du Gouvernement de la France,…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
…sa capacité à gouverner et, surtout, la crédibilité de la France.
La vérité est ma responsabilité. La confiance est le chemin. La réussite collective des Français est notre but.
J’assume, oui, j’assume les choix qui sont faits ! J’assume, oui, j’assume, car c’est le choix de la cohérence, car c’est le choix du courage !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Oui, j’assume, car c’est le choix de la croissance et de l’emploi, et les Français nous attendent là-dessus !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
J’assume, car c’est le choix des réformes pour l’avenir, qui ont trop tardé !
J’assume, car c’est le choix d’une fierté et d’un optimisme retrouvés, dont notre pays a besoin !
Mêmes mouvements.
J’assume, oui, j’assume, car c’est le choix de la confiance !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Et ces choix, assumons de les faire ensemble pour la France, pour les Français !
Mesdames et messieurs les députés, la France a besoin de votre force pour se mettre en mouvement. Voilà pourquoi je sollicite votre vote !
De nombreux députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent vivement. – « Debout ! » sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants veut croire qu’aujourd’hui, une page se tourne définitivement. Mais cette page ne peut se tourner que si vous portez un regard lucide et exigeant sur les deux années qui viennent de s’écouler. Revenons en arrière quelques instants – précisément au 6 mai 2012, date de l’élection de François Hollande. Un enchaînement continu de fautes, d’errements et d’incohérences n’a fait qu’enfoncer le pays un peu plus dans la crise. Cette majorité, votre majorité, est restée trop longtemps prisonnière des promesses de campagne d’un candidat aveugle face à une crise dont il a refusé de voir l’ampleur. Ce déni de réalité a enlisé la France durablement.
Les premières décisions de l’exécutif et de sa majorité – la vôtre, monsieur le Premier ministre – en sont des manifestations édifiantes. Chacun a en tête la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires…
…deux attaques massives contre le pouvoir d’achat et la compétitivité, deux péchés originels qui ont conduit le pays dans l’impasse.
Vous avez, depuis, asphyxié la France d’impôts et mis à l’arrêt l’ensemble des moteurs de l’économie en vous attaquant à des secteurs pourtant vitaux pour l’emploi. Vous avez à plusieurs reprises enterré la promesse de pause fiscale et fragilisé durablement la confiance des ménages et des entreprises. Vous avez échoué à inverser la courbe du chômage, parce que vous vous êtes accrochés à votre « boîte à outils », censée tout résoudre et qui s’est avérée inefficace.
Le groupe UDI n’a d’ailleurs eu de cesse de répéter que vous faisiez fausse route. En mars 2013, Jean-Louis Borloo avait écrit à Jean-Marc Ayrault pour l’alerter sur les conséquences dramatiques des décisions que vous avez prises en arrivant au pouvoir. Ces décisions ont mis la France en panne – en panne de confiance, en panne de croissance et de compétitivité, en panne de créations d’emplois. Vous ne nous avez pas entendus.
Monsieur le Premier ministre, l’effort de 50 milliards d’euros d’économies que vous présentez aujourd’hui semble enfin poser un premier acte de responsabilité.
Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.
Il nous oblige également à dire que l’actuelle majorité n’est pas l’unique responsable de la situation du pays. Vous y faisiez référence, monsieur le Premier ministre : le dernier budget en équilibre fut voté il y a presque quarante ans.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Depuis, la France a vécu à crédit et nous avons tous contribué à alourdir le fardeau qui pèsera lourdement sur les générations futures. Pour ceux qui doutent que le déficit est un problème, un seul chiffre : 30 000 euros par habitant, tel est aujourd’hui le poids de la dette, mère de toutes les injustices. La première injustice consiste à faire supporter à nos enfants le coût d’un modèle social dont ils risquent d’être privés par notre seule responsabilité. Je veux parler aussi de l’injustice qui touche les plus modestes, les premiers à être fragilisés par la crise.
Ce programme de stabilité doit constituer un tournant indispensable pour préserver l’avenir. Il doit interroger chacune et chacun d’entre nous sur le sens de son vote.
Aujourd’hui, la France est confrontée à des choix qui engagent son modèle économique et social pour les prochaines années. Face à une économie mondialisée, face à un monde en pleine mutation offrant de nouvelles opportunités, il est une exigence : celle d’adapter notre pays.
Nous sommes également regardés par l’Europe, qui attend que nous démontrions notre capacité à tenir nos engagements et à garder la maîtrise de notre destin. Mais nous ne pourrons y parvenir qu’en nous attaquant frontalement à la dette et au déficit.
Il y a encore quelques semaines, monsieur le Premier ministre, votre majorité refusait de regarder cette réalité en face. Elle a conduit le pays dans l’impasse, brisant par là même la confiance que les Françaises et les Français avaient placée en elle. C’est pourquoi ils vous ont durement sanctionnés lors des élections municipales. Et nous avons d’ailleurs tous en mémoire les déclarations du Président de la République au lendemain de cette défaite : « J’ai entendu votre message, il est clair. [… ] Il m’est adressé personnellement. Je dois y répondre. »
L’heure n’est donc plus à la fuite en avant. L’heure est au courage, monsieur le Premier ministre. Le courage, c’est d’être habité par la conviction intime que ce n’est pas la survie de votre majorité qui est en jeu, mais celle de la France. Le courage, c’est d’arrêter de parler seulement à son électorat pour se tourner, enfin, vers tous les Français. Le courage, c’est de cesser d’ignorer l’ampleur historique des défis auxquels la France est confrontée et d’inviter, par la force de la vérité, notre pays à les regarder et à les surmonter.
Jean-Louis Borloo l’avait dit à Jean-Marc Ayrault, votre prédécesseur, dès le 3 juillet 2012 : « Le groupe UDI sera la vigie lucide, indépendante et exigeante de cette législature parce que nous souhaitons d’abord la réussite de la France. » C’est à cette exigence, monsieur le Premier ministre, que le groupe UDI a toujours répondu.
Monsieur le Premier ministre, si vous empruntez le chemin du courage, nous répondrons encore et toujours présents. Nous sommes et demeurerons une opposition constructive et responsable.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Alors, oui, nous saluons cette volonté de diminuer les dépenses publiques. Pour autant – et nous prenons date –, vous ne ramènerez pas le déficit à 3 % du PIB en 2015. Cet objectif est pourtant essentiel car, derrière ce chiffre, c’est le coût de la dette qui explose. C’est aussi et surtout la confiance, gage de la croissance, qui est en jeu. Nous ne vous faisons pas de procès d’intention, mais vous ne tiendrez pas cet engagement, pour trois raisons.
Première raison : les économies annoncées ne seront pas au rendez-vous. Un seul exemple : dire que les dépenses d’assurance maladie vont diminuer de 10 milliards d’euros en trois ans est tout simplement irréaliste, car cela représenterait des efforts cinq fois supérieurs à ceux qui ont été réalisés ces deux dernières années. En réalité, monsieur le Premier ministre, sur les 50 milliards d’euros d’économies que vous prévoyez, seuls 30 milliards devraient être effectivement réalisés, dont plus d’un tiers sur le dos des collectivités locales.
Deuxième raison : vous allez engager 30 milliards d’euros de dépenses nouvelles pour donner de l’oxygène aux entreprises et aux ménages. 30 milliards d’euros d’économies d’un côté, 30 milliards d’euros de dépenses de l’autre : c’est une opération blanche pour le déficit.
Troisième et dernière raison : votre programme de stabilité ne prévoit à aucun moment des reformes structurelles, des réformes d’avenir, des réformes en profondeur. Vous ne proposez que des demi-mesures, des mesures de court terme qui n’éclairent pas le long terme ni l’avenir de la France.
Vos demi-mesures sont malheureusement l’assurance que les Français se verront infliger une nouvelle cure d’austérité dans les prochaines semaines. D’où l’exigence d’engager des réformes d’avenir sans délai : c’est votre devoir, c’est notre devoir, et c’est cela le courage !
Pour le groupe UDI, il convient de mener cinq chantiers majeurs pour que la France retrouve confiance en elle.
Premier chantier : il faut libérer les énergies en réformant l’État et notre organisation territoriale. Les questions sont aussi simples qu’essentielles : que doit-on attendre de l’État et des territoires ? Comment faire de nos territoires les moteurs de la croissance de demain ?
Deuxième chantier : pour garantir l’équité et la justice sociale, il est essentiel de rénover en profondeur notre démocratie sociale. Passons enfin d’un paritarisme de gestion à un paritarisme de négociation !
C’est ce que nous faisons depuis deux ans !
Troisième chantier : remettre la solidarité et la confiance au coeur du lien entre les générations. Vous devez donc dès maintenant reculer l’âge légal de départ à la retraite, augmenter la durée de cotisation, et enclencher un mouvement de convergence entre l’ensemble des régimes existants afin de parvenir à un système unique de retraites.
Quatrième chantier : il n’y aura pas de croissance durable sans efficacité énergétique, sans respect des ressources et sans respect de la biodiversité. La croissance verte est un vrai chemin pour notre avenir, un vrai chemin pour nos emplois. La formidable mutation engagée par le Grenelle de l’environnement doit être poursuivie.
Le cinquième et dernier chantier est sans doute le plus beau : il s’agit de faire vivre l’énergie formidable de la France, sa capacité éprouvée à sortir plus forte des épreuves, de valoriser ses talents, ses intelligences et sa force de travail pour préparer le pays aux mutations économiques.
Oui, mes chers collègues, « La force d’une nation est dans sa ressource humaine » comme aime à le dire Jean-Louis Borloo.
Je vous ai écouté tout à l’heure, monsieur le Premier ministre. Pourquoi ne pas revenir sur cette décision incompréhensible de diminuer les crédits de l’apprentissage de 800 millions d’euros ? Il faut un plan d’urgence, un plan massif de développement de l’apprentissage pour apporter une réponse d’ampleur au chômage des jeunes. Et nous ne pouvons pas nous contenter de votre réforme à la marge de la formation professionnelle. Il faut trouver une solution durable pour qu’il n’y ait plus plusieurs centaines de milliers d’emplois non pourvus chaque année.
Monsieur le Premier ministre, le pacte de responsabilité et de solidarité est une opportunité pour le redressement du pays. L’urgence est absolue. Les mesures en faveur de la compétitivité et du pouvoir d’achat ne peuvent plus attendre. Nous demandons leur application dès le 1er juillet 2014, et non en 2015, et encore moins en 2016 comme vous venez de nous le dire à l’instant. Car derrière les chiffres du chômage, il y a des usines qui ferment, des drames humains qui se jouent, des familles qui explosent, des vies brisées, des projets qui s’arrêtent du jour au lendemain. La vraie bataille pour l’emploi doit être engagée dès maintenant, sans délai !
Monsieur le Premier ministre, vous avez tenu à l’instant un discours constructif. Vous avez en face de vous une opposition constructive qui fait preuve, à votre égard, d’une exigence bienveillante. Nous attendons maintenant que vous donniez du sens à ce programme de stabilité en prenant dès aujourd’hui des engagements clairs accompagnés d’un calendrier précis quant aux réformes d’avenir qui seules permettront de véritables et durables économies. Nous attendons aussi et surtout que face à l’urgence des drames du chômage, vous répondiez par l’urgence de l’action. C’est à ces seules conditions que le programme de stabilité aurait pu servir pleinement l’intérêt supérieur du pays et c’est en fonction de ces seules considérations que le groupe UDI se prononce. Nous nous abstiendrons donc majoritairement.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Monsieur le Premier ministre, il m’a été confié la tâche bien ardue d’expliquer la position, les positions nuancées, devrais-je dire, du groupe RRDP sur le pacte, à moins que cela ne soit le programme ou le plan de stabilité. Avant de tenter cette synthèse pas tout à fait impossible mais néanmoins positive, je dois vous dire que ces positions ne procèdent ni du calcul ni de la posture, mais de la solution d’une équation dans laquelle entrent la loyauté que nous devons au Gouvernement, ce qui nous remonte du peuple qui nous a élus et tout ce que nous essayons de retenir des contradictions infinies des théories et des expériences économiques dans un contexte mondial de crise toujours recommencée.
Cependant, avant même de poser cette équation, nous devons à l’honnêteté de dire que l’axiome ou le postulat européen s’impose à nous : la France ne peut faire autrement pour respecter ses engagements européens que de présenter un plan d’économies.
Retrouver les 3 % puis l’équilibre de nos comptes publics est une obligation même si le Gouvernement a pu une dernière fois en différer un peu le délai. Atteindre cet équilibre par l’impôt supplémentaire est totalement exclu lorsque l’on est titulaire du championnat du monde des taxes et la France est donc contrainte à l’économie budgétaire et comptable.
M. de La Palisse dirait que nous ne serions pas obligés de faire aujourd’hui de telles économies si elles avaient été faites auparavant : ce n’est pas un point de vue partisan puisqu’au jeu de la dépense publique, chacun, de gauche à droite et de droite à gauche, porte sa part de responsabilité. Il est par ailleurs vain de rechercher une justification théorique ou expérimentale à ce qui nous est demandé au titre du dogme eurocratique. La théorie économique, vous le savez, est partagée.
Murmures
Mes chers collègues, je vous prie d’écouter les orateurs. C’est la règle commune, et je ne souhaite pas la rappeler lors de chaque intervention.
Les fils prodigues de la pensée keynésienne pensent avoir hérité de leur maître la formule magique selon laquelle toute dépense publique contribue à la croissance et toute dépense sociale, tendant à corriger les inégalités, renforce l’économie.
Les néo-rigoristes analysent depuis un demi-siècle les statistiques pour tenter de démontrer à l’inverse que seule la rigueur finit par porter les fruits de la croissance, mais leurs recherches sont entachées d’erreurs de calcul et de méthodologie, comme celles qui ont été reprochées par la critique académique aux professeurs Rogoff et Reinhart, tandis que l’expérience récente des cures de rigueur budgétaires tend à démontrer qu’elles permettent de guérir efficacement des économies malades avec malheureusement l’effet secondaire de les tuer.
Il est en revanche utile, face aux chiffres et aux faits, de souligner l’incroyable paradoxe par lequel la technocratie budgétaire de l’Europe nous impose l’austérité au moment même où la technocratie monétaire de l’Europe s’apprête à ouvrir à nos banques un crédit gratuit, renouvelable et sans contreparties financières de mille milliards d’euros, venant s’ajouter à plus de deux mille milliards d’euros déjà accordés depuis 2007 à notre appareil bancaire européen. Les banques ont commis des folies, ont surfé sur les vagues spéculatives et joué au casino de la finance mondialisée en adossant leurs mises sur les dépôts de leurs clients.
Pour les sauver, les autorités monétaires ont ouvert un crédit gratuit et pratiquement illimité tandis que tout l’effort de réglementation destiné à prévenir de nouvelles crises spéculatives a produit des montagnes de papier qui se traduisent par presque rien en termes de contraintes réelles.
Il est heureux que les peuples à qui l’on impose tant de sacrifices soient à ce point ignorants des politiques monétaires qu’ils ne perçoivent même pas la monstrueuse injustice qui leur est faite et qui aboutit à ce que les banques aient droit à tout, y compris la rémission de leurs fautes sans se voir imposer aucun purgatoire financier, tandis que les peuples doivent payer comptant et avec intérêts et pénalités les erreurs commises par leurs dirigeants.
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.
Au-delà de ces considérations générales qui constituent tout de même un contexte qui devrait légitimement nous interpeller, il reste que ce programme, ce plan, ce pacte de stabilité, même s’il nous est indispensable, ne nous apportera ni la stabilité ni la croissance pour deux raisons : l’une tenant à la conjoncture internationale et l’autre tenant à notre refus persistant de réforme structurelle dans le domaine de l’économie.
Je voudrais redire ici ce que je dis de manière récurrente depuis plus de six ans et qui reste malheureusement vrai, à savoir que pour sauver le système financier de la crise, on a injecté de manière illimitée de l’argent aux banques, sans doute quinze mille milliards de dollars sur le plan mondial. Cette manne a sauvé les banques dont le montant cumulé des pertes qu’elles ont dû enregistrer pour sauver leurs folies spéculatives n’atteint probablement pas le cinquantième de ce qu’elles ont reçu des autorités monétaires.
Cette création massive, exceptionnelle dans l’histoire du monde, n’a pas suscité l’inflation mais la spéculation. Celle-ci se manifeste aujourd’hui non pas dans les prix à la consommation puisque l’on s’est refusé à donner au peuple de quoi acheter, mais dans la formation de nouvelles bulles spéculatives puisque l’on a donné aux banques de quoi les gonfler. Les cours de bourse sont aujourd’hui très au-dessus du niveau atteint avant la crise, sans aucune justification. Les matières premières avec un pétrole à plus de cent dollars le baril et l’or à mille deux cents dollars l’once sont surévalués par la spéculation. L’immobilier, en particulier aux États-Unis, a repris le chemin de la spirale infernale et les obligations privées se négocient aujourd’hui à des niveaux étonnement bas par rapport aux risques. Imaginer dans un tel contexte qu’il n’y aura pas d’ajustement, c’est de l’inconscience.
Tous les observateurs lucides disent et redisent que nous nous trouvons à des niveaux de spéculation supérieurs à ce que l’on a connu au plus haut de l’avant-crise. William R. White, ancien chef économiste de la BIS, résumait la situation en disant que cela ressemblait à 2007 avec des marchés financiers surévalués et des prises en compte des risques au plus bas pour les marchés obligataires tout en remarquant globalement : « We are in a world where the profit belongs to the banks while the governements socialize all the losses » – « Nous sommes dans un monde où les profits appartiennent aux banques tandis que les gouvernements assument la socialisation des pertes. »
De ce fait, l’idée que le cycle va se retourner en notre faveur est une erreur de perspective et d’ailleurs une interprétation à tout le moins imprudente du cycle de Kondratieff. En tout état de cause, quand bien même la conjoncture mondiale reviendrait favorablement alimenter la croissance, la France ne pourrait qu’être décalée par rapport à ce phénomène parce qu’elle se refuse véritablement à réformer ses structures économiques et même à faire évoluer les esprits.
Je sais bien et je reconnais que ce Gouvernement a fait des efforts relativement limités mais, en définitive, sans précédent pour faire baisser les charges des entreprises et que dans le contexte actuel, celui qui nous conduit à des économies aussi fortes que le plan de stabilité, il ne pourra pas aller plus loin dans cette voie de la baisse des charges. Mais la réforme structurelle, ce n’est pas nécessairement baisser les charges qui d’ailleurs comptent bien moins que l’on ne croit puisque par exemple la surévaluation de l’euro d’au moins 15 % est tout aussi défavorable en termes de compétitivité internationale. La réforme structurelle, c’est d’abord recréer la confiance de l’investisseur qui est aussi l’employeur. Cette confiance se constitue progressivement par des actes en cohérence avec des discours, par la stabilité des lois, la loyauté fiscale et, par-dessus tout, l’assurance qu’une démarche d’investissement et d’emploi est réversible.
Il y a quatre ans, j’ai passé des mois à interroger bien des investisseurs étrangers à propos de l’attractivité de la France. Peu se sont plaint des charges, tous s’inquiétaient de l’instabilité de nos lois et manifestaient la peur de ne pouvoir se retirer de leur engagement dans notre pays si les choses tournaient mal pour leur investissement.
Nous souffrons aussi beaucoup d’un discours public qui, même s’il a considérablement évolué – et c’est heureux – vis-à-vis de l’entreprise, témoigne encore d’une sorte de perversion par laquelle plutôt que de veiller à renforcer sur le long terme nos entreprises, nous intervenons bien trop tard au moment où elles menacent de disparaître ou d’être reprises par des mains étrangères. La quasi-totalité de ces interventions in extremis se traduit d’ailleurs par des échecs.
Ces réformes de structure là ne coûteraient rien, mais feraient plus pour la croissance que tous les plans, les programmes et les pactes du monde dont nous avons depuis si longtemps éprouvé la vanité.
Quoi qu’il en soit, les erreurs de perspective au sens propre du mot ou l’insuffisance notoire de tout ce qui devrait accompagner en termes de réformes structurelles ce plan de stabilité n’enlèvent rien à son caractère contraint et indispensable et c’est la raison pour laquelle le groupe RRDP le soutiendra, pratiquement dans sa totalité.
J’y viens, chers collègues, mais permettez-moi de conclure.
Le Gouvernement a tenu compte de nos remarques. La première consiste à épargner les petits retraités du gel de leur retraite en deçà d’un seuil de 1 200 euros par mois. La deuxième tient à l’équilibre entre ce qui est accordé aux entreprises et ce qui est exigé des ménages. La troisième condition est liée à l’application sans décalage du plan de lutte contre la pauvreté qui comportait notamment une revalorisation significative du revenu de solidarité active.
C’est en prenant en compte ces avancées que le groupe RRDP votera en faveur de ce plan, ce qui n’empêchera pas un certain nombre d’entre nous d’exprimer leurs nuances et de poursuivre leurs réflexions : le député radical est finalement toujours loyal et obéissant, mais il n’en est pas de notre parti comme de la compagnie de Jésus puisque cette obéissance ne s’accomplit pas « perinde ac cadaver ».
Sourires.
Deux membres du groupe RRDP s’abstiendront parce qu’ils estiment que l’effort d’équilibre n’est pas suffisant, que la prise en compte des plus démunis n’est pas suffisante et parce qu’enfin ils s’inquiètent des contradictions dont je me suis fait l’écho entre la rigueur budgétaire imposée aux États et l’abondance financière prodiguée aux banques.
Néanmoins, monsieur le Premier ministre, notre groupe est largement présent à vos côtés comme il l’a toujours été. Notre loyauté nous impose de vous soutenir même si elle nous fait un devoir de vous avertir.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et plusieurs bancs du groupe SRC.
Monsieur le Premier ministre, chers collègues, le 30 mars dernier, les Français nous ont adressé un message. La question qui nous est posée aujourd’hui est la suivante : ce message a-t-il été entendu ? Les écologistes n’en ont pas l’impression.
Vous nous proposez, monsieur le Premier ministre, une trajectoire de réduction des déficits qui maintient l’objectif de 3 % en 2015, qui maintient le plan d’économies de 50 milliards sur trois ans et qui maintient les mesures d’allégement de la contribution des entreprises à la protection sociale.
Ces propositions prolongent, voire accélèrent la politique que les Français ont pourtant massivement rejeté le 30 mars dernier. Les écologistes, parce qu’ils attendaient, comme les Français, une inflexion de la politique gouvernementale ne pourront vous suivre sur ce chemin.
De ce programme de stabilité, nous questionnons d’abord le rythme de réduction des déficits. D’abord parce qu’un effort sans précédent a déjà été fait, et que ses conséquences sur l’emploi ont déjà été et seront plus encore demain négatives.
Les écologistes ne sous-estiment pas les risques liés à la dette et la nécessité de garantir des taux d’intérêt faibles alors que nous empruntons 174 milliards par an et que la charge de la dette est le deuxième poste de dépenses de l’État avec 45 milliards d’euros. Des réponses ont toutefois déjà été apportées : d’abord, grâce à l’évolution de la position de la BCE et la mise en place du Mécanisme européen de stabilité qui garantissent de fait aujourd’hui la dette des États ; ensuite, par la réduction de notre déficit structurel de 4,2 points sur la période 2010-2013, effort sans précédent dont l’impact estimé sur le chômage aura été de 3 points.
Aujourd’hui, 3,6 millions de personnes sont sans emploi avec les conséquences que l’on sait pour leurs familles. Notre priorité commune aujourd’hui, ce doit être l’emploi. Or le Haut conseil des finances publiques lui-même souligne que l’effet attendu du pacte de responsabilité sur l’emploi pourrait ne pas suffire à compenser l’impact négatif de la consolidation budgétaire. Un assouplissement du rythme de réduction des déficits nous apparaît, de ce fait, absolument nécessaire. Il l’est d’autant plus que la réduction à marche forcée des déficits, cumulée avec les allégements des cotisations des entreprises, pèse à la fois sur le pouvoir d’achat des ménages et sur l’investissement public.
Les ménages ont vécu dans ce premier temps de la législature une hausse de la fiscalité. Certaines mesures étaient de l’ordre de la justice sociale, je pense notamment à la barémisation des revenus du capital ou à la création d’une tranche supplémentaire d’impôt sur le revenu. Ces mesures, nous les avons soutenues et nous avons même regretté que certaines n’aillent pas assez loin. Cependant, d’autres ont touché les ménages plus modestes : le gel du barème, la suppression de la demi-part pour les personnes isolées, la hausse des cotisations retraite ou la hausse de la TVA.
Les ménages, qui ont déjà subi les hausses d’impôt, vont à présent subir le gel des prestations sociales. Les mesures que vous avez annoncées hier, notamment le non-report de la revalorisation des retraites jusqu’à 1 200 euros et le respect de la mise en oeuvre du plan pauvreté, vont dans le bon sens, mais faut-il se réjouir outre mesure qu’on ne dégrade pas plus encore la situation des plus précaires dans notre pays ? Les ménages continueront dans leur ensemble à être affectés, notamment au travers du gel de la revalorisation des allocations et des retraites.
Et encore cet effort pourrait-il être compris s’il était équivalent pour les entreprises et pour les ménages. Mais quand les entreprises bénéficient de 30 milliards d’allégements, les ménages modestes eux ne pourront espérer bénéficier que de 5 milliards. Cet effort pourrait également être compris s’il était mis au service d’un projet. Mais quel est aujourd’hui le projet pour la France ?
Nous écologistes, nous vous proposons depuis le début de la législature de travailler à un projet, celui de la transition écologique. Cela consiste à laisser à nos enfants une planète vivable où l’alimentation est saine, où l’on ne sacrifie pas la santé sur l’autel de la surconsommation, où l’air est respirable, où l’on ne subit plus, sans rien faire, des événements climatiques violents répétés, où l’on prépare l’économie de demain, une économie qui n’est pas dépendante de ressources de plus en plus rares, comme le pétrole ou l’uranium.
Pour cela, il faut une politique d’investissement. Or, nous l’avons dit, cette politique d’austérité ne nous laisse pas les marges de manoeuvre nécessaires pour investir. Et il ne peut y avoir de transition écologique sans investissement public. Ce n’est pas le seul outil à notre disposition, nous devons aussi développer les normes et les incitations fiscales, mobiliser l’épargne privée, mais il est de la responsabilité des pouvoirs publics de faire des investissements aujourd’hui pour préparer l’économie de demain, des investissements qui sont et seront en grande partie rentables.
Que constate-t-on depuis deux ans ? Que la priorité absolue donnée à la réduction des déficits, cumulée aux allégements de charges des entreprises, a signé l’arrêt de toute politique d’investissement écologique. Alors qu’en 2009 et 2011, au coeur de la crise, l’État consacrait encore 1,4 milliard d’euros aux projets de transports collectifs, en 2014, le troisième appel à projets a été annulé, signant ainsi l’arrêt du soutien de l’État au développement de la mobilité durable. Il ne s’agissait pourtant que de 450 millions d’euros.
Si nous voulons atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé d’isoler 500 000 logements par an, si nous voulons développer les énergies renouvelables, notamment l’éolien off-shore et le solaire photovoltaïque, nous avons besoin d’investissements. Et nous vous le répétons inlassablement, ces investissements seront fortement créateurs d’emplois : 330 000 d’ici à 2030 selon les estimations du débat national sur la transition énergétique. C’est l’un des chemins de la sortie de crise, et ce programme de stabilité ne nous permet pas de le suivre.
La troisième réserve que nous exprimerons à l’égard de ce programme de stabilité porte sur la nature des économies que vous proposez. Autant nous sommes d’accord pour dire que des économies sont possibles et nécessaires, autant les mesures que vous proposez, je pense notamment au gel des prestations sociales, nous paraissent n’être que des économies de court terme alors que des réformes de long terme, des réformes réellement structurelles en définitive, sont nécessaires.
Je citerai deux pistes parmi de nombreuses possibles :
La première serait le désengagement de la dissuasion nucléaire dont le coût total est de 3,5 milliards et dont la simple suppression à court terme de la composante aéroportée permettrait d’économiser 300 millions d’euros ;
La deuxième, plus importante encore, serait une réforme de l’assurance maladie, marquée par le passage d’une politique de soins à une politique de santé, en particulier une politique de prévention. Le surcroît de dépenses médicales engendré en six ans par la hausse des cancers, du diabète et des maladies cardio-vasculaires, l’évolution de la population une fois prise en compte, a été en France de 9,9 milliards d’euros, soit un montant nettement supérieur au déficit actuel de l’assurance maladie. La crise de la Sécurité sociale est donc en grande partie une crise sanitaire. L’enjeu principal de l’assurance maladie ne doit-il pas être d’endiguer cette explosion des maladies chroniques qui touchent toutes nos familles et grève le déficit des comptes sociaux ? Au lieu de cela, vous nous proposez des économies de court terme qui vont toucher les prestations sociales et les collectivités territoriales.
S’agissant de ces dernières, nul ne nie que des économies peuvent et doivent être réalisées dans certaines d’entre elles. Les écologistes sont d’ailleurs les premiers défenseurs de la simplification des échelons territoriaux et l’objectif qui nous réunit tous est la meilleure efficacité de la dépense publique. Néanmoins, il ne faut pas oublier que les collectivités sont aujourd’hui le premier moteur de l’investissement public en France, un investissement dont les Français ont besoin car c’est leur qualité de vie quotidienne qui est en jeu : transports collectifs, équipements sportifs et culturels, centres sociaux, maisons de quartier, accueil de la petite enfance. Or le gel des dotations aux collectivités territoriales entre 2011 et 2013 se traduit dès aujourd’hui par un recul de leurs investissements, qui devrait s’élever à 5,6 % en 2014. Comme les collectivités portent 70 % de l’investissement public, cela signifie qu’il y aura un recul de 3,9 % de l’investissement public en France en une seule année. Pourtant, dans ce programme de stabilité, vous nous proposez,non plus un gel mais une baisse de ces concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, de 1,5 milliard en 2014, puis de 11 milliards entre 2015 et 2017. Selon une étude récente de la Banque Postale, le recul des investissements des collectivités locales pourrait atteindre 35 % en 2017.
Enfin – et c’est peut-être le point le plus important pour nous, écologistes – ce programme de stabilité, tel que vous nous le proposez, n’est pas compatible avec notre projet européen.
La politique d’allégements de charges pour les entreprises que vous souhaitez mettre en oeuvre n’est pas faite pour concurrencer nos amis indiens ou chinois. Vous le savez, un salarié indien gagne en moyenne 28 fois moins qu’un salarié français, et le pacte de responsabilité ne représentera qu’une baisse de 4 % du coût du travail. Non, ce que vous engagez là, c’est une compétition contre nos partenaires européens, une course à celui qui aura le coût du travail le plus faible pour grappiller quelques parts de marché.
Avec ce pacte, nous rentrons dans une compétition déflationniste contre nos partenaires européens. Est-ce là le projet que nous avons pour l’Europe ? La compétition de tous contre tous ? La voix de la France ne devrait-elle pas s’élever au contraire en Europe pour demander l’assouplissement de cette politique d’austérité généralisée et l’harmonisation sociale à la hausse pour éviter le dumping social intra-européen ?
En conclusion, vous l’avez compris, monsieur le Premier ministre, nous ne pourrons soutenir votre programme de stabilité : parce que le rythme de réduction des déficits que vous nous proposez pèse de façon trop lourde sur l’emploi ; parce qu’il ne nous laisse pas de marges de manoeuvre pour financer des mesures en faveur des plus modestes et les investissements nécessaires à la transition écologique ; parce que notre projet européen, ce n’est pas et ce ne peut pas être, la compétition déflationniste.
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, chers collègues, la trajectoire des finances publiques, qui reprend le pacte improprement dénommé de responsabilité, soumise à la représentation nationale marque une accélération dans ce qu’il faut bien appeler le virage social-libéral du Gouvernement.
Les députés du Front de gauche ne l’accueillent pas de gaîté de coeur. La question n’est pas d’ergoter sur plus ou moins 0,1 % de croissance en 2015 ou 2016, comme le fait la droite pour justifier le rejet d’orientations qu’elle approuve sur le fond, mais porte sur la stratégie adoptée. Soutenir exclusivement l’offre et opérer des coupes drastiques dans les finances publiques, comme vous le proposez, ou bien soutenir la demande et actionner le levier de l’investissement public pour soutenir la croissance, tels sont les termes du débat alors que nous vivons une crise économique et financière destructrice.
Vous avez choisi. Votre programme, c’est l’austérité, cette austérité qui a fait tant de mal en Europe avec son cortège d’inégalités.
L’échec des politiques conduites depuis des années, la lourde sanction électorale infligée à l’ensemble des forces de gauche, à commencer par la formation politique à laquelle vous appartenez, monsieur le Premier ministre, auraient dû entraîner un changement de cap.
Des voix s’élèvent chez nos concitoyens, chez les représentants syndicaux, chez les élus de la gauche, parmi les économistes, pour vous enjoindre de ne pas vous enferrer dans une rigueur irréaliste et désastreuse pour la vie de millions de Françaises et de Français.
Il faut être concret, monsieur le Premier ministre : je veux vous parler de Marie-Claude, employée de coiffure à la retraite, qui survit avec ses 750 euros par mois et qui, à soixante-trois ans, est obligée de reprendre une activité auprès de personnes âgées car elle ne s’en sort pas ; je veux vous parler de Christian, chef d’une entreprise de travaux publics de 80 salariés qui voit les commandes des collectivités territoriales fondre comme neige au soleil, qui plus est dans des territoires fragiles et qui s’alarme de la baisse de 11 milliards de dotations aux collectivités car c’est autant d’investissement public en moins, autant d’emplois menacés, autant d’équipements utiles à la population qui seront abandonnés ; je veux vous parler de Marwane, jeune homme de vingt-huit ans qui, de stage en contrats d’intérim, n’a connu que la précarité dans sa vie active, Marwane condamné à vivre chez ses parents, sans pouvoir gagner l’autonomie à laquelle tout jeune aspire. Voilà la réalité des couches modestes.
Certes, tous nos concitoyens ne vivent pas de telles difficultés, de telles angoisses, mais force est de constater que les politiques conduites depuis trop d’années, dans un cadre européen coercitif, ont eu pour conséquence désindustrialisation, accroissement de la pauvreté, explosion des rendements du capital au détriment du travail.
Nous, députés du Front de gauche, estimons que vous faites fausse route. L’accueil favorable d’une partie de la droite – nous venons de le voir avec le discours de M. Vigier – devrait d’ailleurs vous alerter. Comme disait un célèbre combattant de la liberté : « Quand ton adversaire te félicite, demande-toi quelle erreur tu as faite. »
Il y a à notre sens urgence à construire une politique véritablement alternative, une politique novatrice, qui sorte du carcan européen actuel.
Le Traité européen dit de stabilité, de coordination et de gouvernance est le péché originel de ce quinquennat. Il a été ratifié en 2012 sans qu’une ligne en soit modifiée. Les mesures du pacte de croissance, pourtant promises, n’ont pas vu le jour et notre pays se trouve désormais entraîné, comme ses voisins, dans une spirale de la déflation, de stagnation et de chômage.
L’Europe est devenue, pour la plupart des peuples qui y vivent, synonyme de dégradation des conditions de vie et de travail, d’aggravation des inégalités, de démantèlement des services publics, de casse des acquis sociaux, de déchaînement de la concurrence. L’Europe sociale, l’Europe de la coopération et de la solidarité si chère à la gauche ne verra pas le jour sans une autre politique monétaire, sans recours à l’investissement public, sans harmonisation par le haut des normes fiscales, sociales et environnementales.
En prenant fait et cause pour la poursuite de la rigueur, vous prenez le chemin opposé. Ce n’est pas un chemin de courage et de sérieux mais un chemin de capitulation devant les exigences d’un capitalisme financier qui continue d’engranger des profits colossaux. Le discours du Bourget est bel et bien enterré. La spéculation bat son plein, les encours des produits dérivés au niveau mondial sont à présent aussi élevés qu’avant la crise financière de 2008.
Pendant que l’instauration d’une taxe sur les transactions financières s’enlise, l’accord de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis se prépare dans le plus grand secret avec des conséquences sur les conditions faites aux salariés et sur l’environnement. Ce projet ardemment soutenu par les multinationales leur permettra d’attaquer en justice tout État qui ne se plierait pas aux normes du libéralisme. Ces normes libérales, ce sont celles qui causent des drames tels que celui de Rana Plaza, au Bangladesh, il y a un peu plus d’un an, avec des multinationales qui piétinent les règles sociales et environnementales et méprisent la vie humaine.
Mettre en concurrence les êtres humains, mettre en concurrence les territoires, en France, en Europe ou dans le monde, c’est le credo des puissants pour dégager toujours plus de profits financiers. Rappelez-vous ce formidable mot de Warren Buffet, une des premières fortunes mondiales, qui disait il y a peu : « La guerre des classes existe, c’est un fait, mais c’est la mienne, la classe des riches, qui mène cette guerre et nous sommes en train de l’emporter. »
Face à cette situation, notre pays a une grande responsabilité. La France est un grand pays qui peut jouer un rôle majeur dans la réorientation de l’Europe, pour peu qu’elle en ait le courage et la volonté. C’est ce courage et cette volonté qui manquent aujourd’hui. Le renoncement à engager un bras de fer avec nos partenaires européens conduit à prévoir l’an prochain, par le biais de ce pacte de stabilité, des mesures douloureuses, politiquement et socialement indéfendables, dont les classes moyennes et populaires vont une nouvelle fois faire les frais.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes, comme trop de gouvernants avant vous, victime ou complice du « syndrome TINA » – There Is No Alternative –, selon la célèbre formule de Mme Thatcher. Or il y a une alternative ! Redresser les comptes publics, chacun s’accorde à en reconnaître la nécessité ; mais alors, pourquoi n’avoir dans le viseur que la dépense publique et sociale ? Pourquoi ne pas s’attaquer réellement à la fraude, à l’évasion fiscale, à la fraude à la TVA, à l’optimisation fiscale ?
…ussi injustes qu’inefficaces, qui ne font que gonfler le patrimoine des plus fortunés ? Elles atteignent des niveaux inégalés !
Deuxième grande erreur, à notre sens, dans ce plan d’austérité de 50 milliards, c’est la correspondance que vous établissez entre compétitivité et baisse du coût du travail : 41 milliards d’euros seraient octroyés aux entreprises, sans contrepartie ni discernement ! Si l’on peut comprendre que des TPE, des PME, des ETI de l’industrie ou des services, puissent avoir besoin de soutien, le débat que nous avons eu lors de l’adoption du CICE, le crédit d’impôt compétitivité emploi, reste pleinement d’actualité. Comment accepter que les grands groupes bancaires et assurantiels ou les groupes de la grande distribution bénéficient de ces milliards de suppression de cotisations sociales et de la quasi-extinction de l’impôt sur les sociétés, lequel passera de 52 milliards d’euros en 2013 à moins de 30 milliards d’euros en 2015 ? Ce sont bien les ménages, et d’abord les couches moyennes et modestes, qui seront appelés à payer la note par la hausse de la TVA, par l’augmentation des cotisations des mutuelles, par le gel des prestations sociales !
Si nous vous alertons sur ce non-sens de votre obsession du coût du travail, c’est que vous n’évoquez jamais – jamais ! – le coût du capital. La rémunération excessive du capital fait pourtant mal à nos entreprises, mal aux salariés, mal au pays ! Car si c’est « ceinture » pour les retraités, les fonctionnaires, les salariés du privé, c’est happy hour pour les actionnaires :…
…5 milliards d’euros de dividendes distribués chez Vivendi, des dividendes jamais aussi élevés depuis trente ans, selon un article des Échos du 14 avril dernier !
Dans ce cadre, les 500 millions d’euros prévus pour les petites retraites ou pour le plan pauvreté ne sont pas des avancées, monsieur le Premier ministre : ce ne sont que des non-reculs ! Et ces 500 millions d’euros représentent 1 % du total des 50 milliards de coupes dans les dépenses publiques et sociales !
Pour stimuler l’investissement et l’emploi, il est possible d’emprunter d’autres chemins : doter notre pays d’une véritable banque publique d’investissement, quand celle mise en place fin 2012 reste sous-dotée ; moduler l’imposition des entreprises pour favoriser celles qui investissent et créent de l’emploi et sanctionner celles qui ne se préoccupent que de rendements financiers et de taux de rentabilité à deux chiffres ; relancer le pouvoir d’achat par la hausse des salaires et des pensions pour soutenir la demande intérieure ; favoriser de nouveaux modes de consommation et la transition énergétique.
J’ajoute la nécessité de soutenir l’investissement public des collectivités territoriales et les services publics locaux, véritables amortisseurs des difficultés quotidiennes de nos concitoyens.
La crise économique et sociale que nous traversons depuis cinq ans a signé la faillite du prétendu modèle économique libéral. Souvenez-vous que ce modèle néolibéral n’a pu être sauvé qu’en prenant en otage les peuples, en leur imposant de payer la facture de dettes privées prises en charge par l’endettement public !
Quand la misère grandit, que les inégalités explosent, que soixante-sept personnes possèdent autant que 3,5 milliards d’êtres humains, un tel système est à bout de souffle. Sans la volonté farouche de combattre le capitalisme financier et son cortège de désastres économiques, sociaux et environnementaux, le risque est de voir triompher les pires forces réactionnaires, comme nous risquons de le constater dans moins de quatre semaines lors du scrutin européen.
La responsabilité historique de la gauche est d’ouvrir une nouvelle voie, une voie qui combatte l’impuissance publique. C’est la raison pour laquelle les députés du Front de gauche ne peuvent que s’opposer à la feuille de route que vous avez tracée. Notre vote contre est aussi une main tendue à toutes celles et tous ceux qui se reconnaissent dans une gauche qui tout à la fois rassemble et ne renonce pas. Où est le souffle de 1936, de 1945, de 1981, voire de 1997 ? Notre pays n’est jamais si grand ou si fort que quand il ouvre de nouvelles perspectives progressistes, des perspectives de rassemblement, des perspectives qui lient progrès social, efficacité économique et transition écologique.
Monsieur le Premier ministre, face à une extrême droite qui se tient en embuscade et voudrait passer pour la seule alternative à ce modèle social-libéral ou néolibéral à l’oeuvre en France, en Allemagne, en Italie, écoutez la voix de celles et ceux qui refusent la division et portent les valeurs d’égalité, de fraternité, de liberté, les valeurs d’efficacité économique par la justice sociale !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, nous sommes saisis aujourd’hui d’une déclaration du Gouvernement sur le programme de stabilité qui sera présenté par la France à la Commission européenne.
Nous allons en débattre ; mieux, nous allons voter. Nous allons voter, non seulement parce que le Gouvernement a souhaité marquer son respect pour le Parlement en mettant en oeuvre cette procédure, mais surtout parce que l’enjeu qu’il retranscrit – celui du pacte de responsabilité et de solidarité – exige la mobilisation de la représentation nationale. Au-delà de la procédure européenne, c’est bien de cela qu’il s’agit : la mise en oeuvre de ce pacte pour soutenir l’investissement et l’emploi, donc la croissance et le pouvoir d’achat – en particulier celui des plus modestes. Cette procédure ne traduit pas simplement une volonté de faire plaisir ; elle ne répond pas davantage à une injonction européenne à laquelle nous céderions : dans ce moment le plus décisif pour notre pays, elle traite de l’avenir des Françaises et des Français, notamment des plus modestes.
Oui, nous allons voter, et ce vote ne comptera pas pour rien. Ce vote qui marquera fait l’objet – c’est normal, et même indispensable – de nombreux débats, de réelles interrogations, de vraies questions et même de quelques objections. Je comprends ces interrogations ; je respecte ces débats. Je sais tout ce qui traverse notre assemblée, y compris au sein de mon groupe. Je sais l’attente de nos concitoyens, qui est forte et porte en elle une exigence : réussir. Réussir à réformer notre pays pour trouver des solutions concrètes aux préoccupations de tous les Français : le chômage, les fins de mois difficiles, le sentiment de payer beaucoup d’impôts sans être toujours certain de l’utilité de la dépense publique.
Je respecte ces interrogations, je sais qu’elles sont légitimes ; mais je sais aussi que, sur un enjeu aussi central, il ne saurait y avoir de calcul politique. L’enjeu, c’est la France, et non le positionnement des uns ou des autres, dans l’opposition ou dans la majorité.
Ce vote n’indique donc rien : il décide. Aujourd’hui, nous sommes tous, dans la majorité comme dans l’opposition, face à nos responsabilités. Les Français nous ont élus, ils ont fait confiance à la gauche. Ils nous ont élus dans le moment le plus difficile parce qu’ils nous ont fait confiance pour conduire le redressement de notre pays, pour porter de nouveaux progrès, pour la justice sociale.
Oui, ce programme marque une trajectoire, une trajectoire qui répond aux défis auxquels nous avons à faire face. Cette trajectoire, c’est vrai, passe par le redressement des finances publiques. Ce redressement est à l’oeuvre depuis que nous sommes aux responsabilités. Depuis 2012, nos efforts – les efforts des Français ! – ont commencé à payer : le déficit était de 4,9 % en 2012, il est de 4,3 % en 2013 et sera de 3,8 % en 2014, puis de 3 % en 2015. Il est loin le temps où l’on laissait filer dette et déficit, rendant impossible pour la France et les Français d’envisager l’avenir sereinement !
Oui, nous sommes en train de sortir notre pays de la situation dans laquelle nous l’avions trouvé, avec une dette qui s’est massifiée et dont les intérêts pèsent à eux seuls 45 milliards d’euros chaque année. Et si nous le faisons, ce n’est pas par obligation européenne, mais parce que nous devons retrouver les marges de manoeuvre que le laxisme de la droite nous a fait perdre. Nous le faisons non seulement parce que nous devons préserver notre souveraineté mais aussi parce que nous voulons éviter à la France l’austérité qui a tant fait souffrir certains peuples européens, et continue à les faire souffrir encore aujourd’hui. C’est à cette austérité, celle qui a conduit la Grèce à augmenter de dix points son taux de TVA, celle qui a conduit le Portugal à baisser de 27 % les salaires des fonctionnaires, celle qui a conduit l’Irlande à réduire de 11,6 % le salaire minimum, que nous conduisait la politique menée par la droite ; c’est à cette même austérité que nous conduiraient les recettes de sortie de crise qui sont aujourd’hui proposées par l’opposition. Si nous ne maintenions pas le cap fixé par le Président de la République, c’est à cette austérité que notre pays serait demain immanquablement conduit.
Réduire notre déficit public est donc indispensable. Réduire le déficit public, c’est la condition de la réduction de la dette. Réduire le déficit public, c’est l’assurance du maintien de notre capacité à emprunter dans de bonnes conditions, pour l’État bien entendu, mais aussi pour les entreprises et pour les ménages. Réduire le déficit public, c’est surtout garantir que la voix de la France restera entendue en Europe, que la France pourra continuer à oeuvrer pour réorienter la politique européenne. Celle-ci a commencé à évoluer et nous devons aujourd’hui poursuivre nos efforts dans la perspective de l’élection européenne qui se tiendra en mai :…
...c’est important pour les peuples européens, pour les États qui veulent sortir de l’austérité et bien entendu pour le Gouvernement que vous conduisez, monsieur le Premier ministre, tout comme pour la majorité qui vous soutient. Mais réduire les déficits ne peut plus passer par l’augmentation des impôts.
Cela doit passer par la réduction de la dépense. C’est ce que vous nous proposez, monsieur le Premier ministre, avec l’effort d’économies inédit présenté dans le cadre de ce projet de programme de stabilité. Cet effort est indispensable pour permettre la réduction des déficits sans augmentation des impôts. Il portera de façon équitable sur l’État et ses opérateurs, sur les collectivités territoriales, sur l’assurance maladie et sur la protection sociale. Cet effort de 50 milliards d’euros d’économies en trois ans est calibré au plus juste, bien loin – j’insiste car il ne faut pas se tromper – des plans d’austérité mis en oeuvre dans d’autres pays européens ou des 130 milliards d’euros prônés par d’autres sur les bancs de cette assemblée. C’est en effet à l’aune des propositions, voire des contre-propositions, qu’il faut analyser le plan que nous allons mettre en oeuvre avec le Gouvernement : d’un côté 50 milliards d’économies calibrées au plus juste pour rendre la dépense publique plus efficace, de l’autre 130 milliards proposés aux Français, qui rogneraient immanquablement le modèle social de notre pays et ne permettraient plus aux Français de bénéficier de la protection d’un État qui prépare l’avenir.
Encore une fois – je m’adresse à ceux qui nous écoutent et non aux députés de la majorité, car ceux-ci en sont convaincus –,…
…qui pourrait penser que notre pays connaît aujourd’hui l’austérité, alors que nous assumons la promesse prise devant les Français de recruter 60 000 postes supplémentaires dans l’éducation nationale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Ce faisant, la déqualification de l’école à laquelle notre pays était soumis par la droite, dont c’était la seule perspective, est aujourd’hui totalement combattue par les politiques publiques que nous mettons en oeuvre. Ce sont là des réalisations très concrètes, qui portent un nom pour les Français, et pour lesquelles nous souhaitons, monsieur le Premier ministre, que vous puissiez continuer votre action.
« Si ! » sur divers bancs du groupe UMP.
quand on parle de l’éducation de nos enfants, que vous avez très sérieusement malmenée ces dernières années !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Puisque vous souhaitez m’interrompre, ayez au moins une pensée pour M. Copé, qui prendra la parole juste après moi ! (Exclamations sur divers bancs du groupe UMP.)
Je veux simplement dire que ce dialogue que l’opposition semble souhaiter, nous pourrons l’avoir de façon aussi vive dans quelques minutes avec son orateur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous appelle donc au calme et à la retenue, mes chers collègues de l’opposition !
Exclamations sur divers bancs du groupe UMP.
Je vois que les arguments portent et que vous les comprenez rapidement !
Mêmes mouvements.
Mais ce redressement, monsieur le Premier ministre, n’a de sens que s’il permet d’accélérer la croissance et de faire durablement progresser l’emploi. Ce redressement ne serait pas acceptable s’il ne prenait pas également en compte l’exigence de justice sociale que nous assumons et pour laquelle les Français nous ont élus.
Voilà pourquoi le pacte de responsabilité et de solidarité est indissociable du programme de stabilité. Ce pacte, c’est un levier pour la croissance, pour la confiance, donc pour l’emploi.
C’est aussi un pacte qui doit améliorer le pouvoir d’achat des salariés les plus modestes. Cet équilibre, nous avons réussi à l’établir lors de nos discussions. C’est donc bien sur ces deux aspects que nous votons : la maîtrise des comptes publics et le pacte pour la croissance, pour l’emploi et pour le pouvoir d’achat des plus modestes.
La reprise est en cours ; nous devons la conforter, l’amplifier, accélérer ses effets sur l’emploi. Voilà pourquoi nous soutenons votre action pour provoquer un choc de confiance dans l’économie. C’est l’enjeu du pacte : soutenir l’investissement et l’emploi, donc la croissance et le pouvoir d’achat.
Ce pacte de responsabilité et de solidarité doit permettre d’abord de restaurer la compétitivité de nos entreprises et de renforcer la croissance. Là encore, je ne veux pas revenir sur l’ensemble des mesures que vous avez annoncées, mais l’essentiel est là : après les réformes courageuses que nous avons faites, comme celle du marché du travail qui permet d’enrichir la croissance en emplois, nous complétons cette politique avec l’objectif clair d’inverser durablement la courbe du chômage, de rendre du pouvoir d’achat aux Français et de faire en sorte que des emplois pérennes pour notre pays et pour les Français soient à nouveau créés par le secteur industriel grâce à une nouvelle compétitivité.
L’État prend donc ses responsabilités. Il appartient aux chefs d’entreprise – je le dis ici peut-être avec plus de solennité qu’il n’en faut car je sais que le civisme fait partie pour bon nombre d’entre eux du logiciel républicain et qu’ils sont aussi des citoyens – de tenir leurs engagements en matière d’emploi, d’insertion des plus jeunes. Ils doivent offrir de nouvelles qualifications, de nouveaux champs à l’apprentissage et participer à la lutte contre la précarité. Bien entendu, nous voulons évaluer et contrôler toutes les mesures prises, même si nous jugeons a priori que les chefs d’entreprise veulent les mettre en oeuvre de la meilleure façon, c’est-à-dire d’une manière qui bénéficie à l’emploi et qui correspond avec la crise que nous vivons. Entre l’emploi et les dividendes, ils doivent faire le choix du long terme, ils doivent choisir aujourd’hui ce qui peut sortir notre pays de la crise : c’est par l’emploi et par aucune autre politique que l’avenir de nos entreprises pourra à nouveau se dessiner dans notre pays.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le Premier ministre, les discussions qui se sont tenues ces derniers jours ont permis d’aboutir à des progrès supplémentaires. C’est d’ailleurs tout l’enjeu du dialogue entre une majorité et son gouvernement. J’aime d’ailleurs que l’on qualifie de marchandage le fait de dire à 6,5 millions de retraités que leurs retraites seront préservées de tout gel (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), alors que c’est le résultat d’une exigence de solidarité qui est la marque de notre majorité. Je veux bien que l’on appelle cela du marchandage, mais les Français jugeront.
Ils ont jugé votre politique le 30 mars dernier !
Je veux également saluer ici l’indexation par rapport aux prix des minima sociaux. Je n’oublie pas que l’allocation de soutien familial qui bénéficie aux parents isolés a été revalorisée de 5 % le 1er avril dernier et que le complément familial pour les familles nombreuses les plus pauvres a augmenté de 10 %. Je salue également, monsieur le Premier ministre, votre décision de faire intervenir au 1er septembre la revalorisation exceptionnelle du RSA comme prévue dans le plan pauvreté. Si un plan pauvreté existe, c’est pour qu’il soit appliqué lorsque les Français souffrent le plus et non quand nous sortirons de la crise. Nous nous félicitons de pouvoir dire ici aux plus modestes que nous allons les préserver encore plus de la crise qu’ils vivent au quotidien.
Monsieur le Premier ministre, voilà pourquoi bien entendu la majorité vous soutient et qu’elle se félicite des mesures que vous avez prévues en faveur des petites retraites, des fonctionnaires, du pouvoir d’achat des ménages, de la mise en oeuvre de ce plan pauvreté.
La marque de notre fonctionnement collectif, c’est le dialogue mais c’est aussi la loyauté et le rassemblement. Nous assumons les objectifs et les moyens mis en oeuvre pour la croissance, pour l’emploi et pour la compétitivité. Nous connaissons les efforts qui doivent être consentis par les Français aujourd’hui. Ils sont importants, nous ne voulons pas les nier. Ils sont justement répartis : c’est une nouvelle fois la marque de la majorité à laquelle nous appartenons. Nous continuerons sans relâche, lors de l’examen de chacune des mesures, à défendre la justice sociale car même dans ces périodes de crise où les efforts sont nécessaires, elle doit être le marqueur de chacune de nos décisions.
Monsieur le Premier ministre, dans ces moments il faut du courage ; vous n’en manquez pas. Je suis sûr que la majorité qui vous accompagne et qui vous accompagnera dans toutes ces réformes ne manquera pas non plus dans quelques minutes du courage de soutenir la politique que vous menez.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le Premier ministre, lors des élections municipales des 23 et 30 mars derniers, les Français ont infligé un désaveu massif à la politique désastreuse conduite par François Hollande depuis deux ans.
En rejetant les candidats de la majorité de gauche, en faisant de l’UMP le premier parti de France,…
…ils ont clairement demandé un changement radical de politique. Je ne suis d’ailleurs pas sûr que les observateurs aient mesuré l’ampleur du séisme politique du 30 mars dernier.
Protestations sur les bancs du groupe SRC.
Il est vrai que la situation de notre pays est très grave. Avec 5 millions de personnes inscrites à Pôle emploi en catégories A, B et C, le chômage a atteint un record historique.
Le taux des prélèvements obligatoires était de 43,7 % à la fin de 2011, contre 46 % à la fin de 2014 : 50 milliards de hausses d’impôts ont été décidées par votre gouvernement. La hausse de la dette va atteindre les 100 % du PIB. Le déficit devait être de 3 % ; vous arrivez péniblement à 4,3 %.
Nous détenons le record absolu de dépenses publiques rapportées au PIB, avec 57 %. Nous sommes, hélas ! les champions en Europe. Vous nous avez encore répété aujourd’hui que c’est la faute à la crise, que c’est la faute à l’Europe et pas à vous.
« C’est de votre faute à vous ! » sur les bancs du groupe SRC.
J’oubliais : c’est de la faute de Nicolas Sarkozy, ça ne peut en aucun cas être celle de François Hollande, bien entendu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Rien de tel que de regarder ce qui se passe ailleurs. En France, le taux de chômage est de 10 %, alors qu’il est de 7 % en Grande-Bretagne. Quant à l’Italie, elle vient d’engager une réforme courageuse du marché du travail. L’année dernière, la France a enregistré un déficit commercial de 61 milliards alors que l’Allemagne et même l’Italie ont dégagé respectivement un excédent commercial de 200 milliards et de 30 milliards. Et je n’oublie pas les progrès remarquables accomplis par l’Espagne en matière de réduction du déficit budgétaire.
Face à ce fiasco, François Hollande a parlé aux Français le 31 mars dernier. Dans un élan digne d’un « Je vous ai compris », aux accents gaulliens, il a dit aux Français : Vous n’avez pas aimé Jean-Marc Ayrault. Soit. Vous adorerez Manuel Valls. Ainsi est né, et je le dis avec le sourire, une forme de « Valls mania », l’homme providentiel.
Grâce à votre style réputé moderne, monsieur le Premier ministre, votre langage désormais direct, vos sondages trois à quatre fois supérieurs à ceux de François Hollande,…
Nous sommes nombreux, dans ma famille politique, à nous dire qu’on aurait bien aimé le croire, pour la France et pour les Français. Un mois après, je le dis avec beaucoup de regrets mais c’est ainsi, ce pacte apparaît tel qu’il est : une terrible illusion d’optique.
Comprenez-moi : la situation est tellement grave que l’annonce d’un plan miracle, d’une potion magique avait créé un espoir. Or en découvrant son véritable contenu, on voit qu’elle n’a rien de magique. Ce plan, je le prédis avec regret, n’aura pas d’effet positif. D’ailleurs, monsieur le Premier ministre, vous partagez nos doutes, votre visage est souriant, mais tel un colosse aux pieds d’argile vous vous êtes bien gardé d’engager votre responsabilité, comme l’évoquait tout à l’heure Bernard Accoyer. Pourquoi ? Tout simplement parce que vous proposez de garder le même système, les mêmes règles, le même modèle, les mêmes faiblesses tout en serrant fortement la ceinture des Français. Là où l’on attend un État stratège qui propose une vision, une perspective, vous nous proposez un État pompier, je dirai même un État pompier- pyromane tant il a allumé lui-même l’incendie depuis deux ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, vous faites le pire des choix : le rationnement sans réforme. Vous gérez la pénurie au lieu de changer de modèle. Vous imposez des tickets de rationnement aux Français en restant dans le même cadre. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Le gel des pensions ? Quelle bonne idée quand, dans le même temps, on n’a pas le courage de réformer les retraites, de réformer les régimes spéciaux ou de faire des mesures d’âges que les autres pays d’Europe ont faites !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Le gel du traitement des fonctionnaires ? Quelle bonne idée quand, dans le même temps, votre ministre de l’éducation nous a confirmé tout à l’heure qu’on allait continuer d’embaucher jusqu’à 60 000 fonctionnaires dans l’éducation nationale…
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Le gel des prestations familiales ? Quelle bonne idée quand, dans le même temps, vous n’avez pas le courage de toucher aux dépenses sociales les plus inefficaces ou les plus choquantes comme l’aide médicale d’État qui couvre à 100 % les frais maladie des étrangers en situation illégale !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.– « Propos honteux ! » sur les bancs du groupe SRC.
Vous nous annoncez un choc de simplification – et Dieu sait si vous aimez les chocs ! –, mais dans le même temps entre en application la désastreuse loi Duflot qui a paralysé le marché de la construction et de l’immobilier en France.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Enfin, vous nous annoncez – quelle belle ambition ! – la suppression des départements en 2021. Mais qui sait où vous serez à cette date !
« Et vous ? » sur les bancs du groupe SRC.
Vous avez supprimé le conseiller territorial il y a un an et créé la clause de compétence générale que vous venez de décider de supprimer.
Monsieur le Premier ministre, votre plan dans les faits comporte, hélas ! trois péchés originels qui le condamnent à l’échec…
…alors qu’à votre arrivée tout était possible.
D’abord le compte n’y est pas. Vous osez nous parler – d’ailleurs je note que vous ne l’avez pas fait cet après-midi – de 50 milliards de baisses de dépenses. Mais relisez les analyses fort précises du président de la commission des finances. 50 milliards, on est bien loin du compte si l’on intègre la courbe de progression naturelle des dépenses. 50 milliards, alors que dans le même temps vous allez proposer – et c’est ce que nous avions fait lorsque nous étions au gouvernement et que vous avez supprimé – 25 milliards de baisses de charges et d’impôts. Qui va les payer ? Pire, vous parlez toute la journée de justice sociale pour rassurer votre majorité dans un contexte de IVe République qui a fait sourire bien des Français…
...en vous voyant négocier avec tous les sous-courants de votre parti quelques concessions pour obtenir le maximum de voix (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)…
…alors que dans le même temps les impôts des Français vont – il n’y a pas d’autre mot – augmenter.
Le quotidien Le Parisien évoquait l’exemple de ce couple de retraités qui gagne 30 000 euros par an et qui va voir en un an son impôt sur le revenu augmenter de 30 %. Beau bilan que celui de cette gauche censée s’occuper des Français qui sont dans la difficulté !
Deuxième péché originel : votre plan n’est pas documenté et donc pas démontré. Pour illustrer mon propos, je prendrai un seul exemple : vous annoncez 11 milliards de réductions des dotations des collectivités locales. S’il faut participer à l’effort, pourquoi pas ? Mais, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous alors m’expliquer au nom de quoi vous continuez de demander aux collectivités locales, et donc aux mairies, de financer seules 1 milliard d’euros supplémentaires pour des rythmes scolaires qui n’apporteront aucun bénéfice éducatif à nos enfants ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Troisième péché originel : votre plan, monsieur le Premier ministre, n’est pas crédible car il ne contient aucune réforme de structure et vous le savez bien.
Hélas, tout cela vient de ce que vous n’avez pas fait le bon diagnostic.
La réalité, c’est hélas qu’il y a en France, depuis deux ans, beaucoup de départs et pas beaucoup d’arrivées, comme le symbolise de façon tragique le dépeçage de l’entreprise Alstom, faute d’un Gouvernement capable d’anticiper et d’avoir une politique stratégique courageuse pour un des fleurons de notre industrie.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Vous n’avez pas fait le bon diagnostic et pourtant les Français, eux, l’ont fait depuis bien longtemps, comme nous-mêmes d’ailleurs, parce que le temps est venu de tourner la page et de regarder l’avenir.
Le diagnostic, il est très simple, et tous, dans cet hémicycle, nous pouvons le partager. Il se résume en une phrase : nous portons des chaînes, que la gauche bien-pensante ne veut pas voir.
Ces chaînes s’appellent les trente-cinq heures, les codes qui bloquent le pays – code du travail, code des impôts, code de l’urbanisme, code de l’environnement, qui empêchent ceux qui veulent entreprendre, travailler, prendre des risques, de réussir !
Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR. Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Et vous serrez tous les jours leurs chaînes, en les stigmatisant et en les culpabilisant !
Ces chaînes s’appellent instabilité fiscale permanente, charges, hausses d’impôts et de prélèvements, qui ne cessent de dissuader ceux qui veulent entreprendre de continuer à le faire dans notre pays, la France.
Ces chaînes enfin s’appellent contrôles fiscaux, contrôles de l’URSSAF, qui se multiplient et bloquent eux aussi les entrepreneurs de notre pays.
Interruptions sur les bancs du groupe SRC.
On a compris que vous n’étiez pas d’accord avec M. Copé. Il le sait. Maintenant, veuillez l’écouter.
Je comprends bien que tout cela puisse indigner une majorité venue au pouvoir avec des a priori idéologiques et qui chaque jour continue, au mépris de la réalité de notre pays et de notre monde, de les imposer à des acteurs économiques qui n’en peuvent plus et qui préfèrent quitter la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Oui, le péché majeur de votre plan, monsieur le Premier ministre, c’est d’avoir oublié que pour marcher, il faut être en équilibre sur deux jambes. Vouloir réduire les déficits sans prendre dans le même temps des mesures en faveur de la compétitivité, avec des réformes structurelles, c’est un plan voué à l’échec.
Si on veut libérer les Français de ces chaînes, il y a un mot, un mot que vous n’employez jamais, hélas : c’est le mot de « liberté ».
« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.
Ce mot, il est au coeur du projet auquel nous travaillons pour la France : sortir des trente-cinq heures pour permettre la négociation par entreprise ou par branche, assumer une simplification du droit du travail…
Ainsi, vous parliez des seuils : moi, je suis bien d’accord pour voter le report de ces seuils qui bloquent. Par exemple, pour passer de quarante-neuf à cinquante salariés, il faut trente-cinq documents et procédures en matière fiscale et sociale. Je ne sais ce que ferait votre majorité, mais cette question est traitée dans le programme de l’UMP justement !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Oui, il faut proposer une vraie vision industrielle, pour nos entreprises face à la mondialisation, au lieu de la considérer, comme M. Montebourg, comme l’ennemie à abattre.
Votre discours, monsieur le Premier ministre, ne s’adresse ni aux jeunes de France, ni à leurs parents, pour leur donner une espérance. Votre discours n’attirera pas les arrivées et continuera d’encourager les départs. Votre discours ne sera pas suivi des résultats attendus et vous allez encore écraser le pouvoir d’achat des classes moyennes dans notre pays, hélas pour la France.
Voilà pourquoi le groupe UMP votera contre ce plan et va poursuivre son travail de reconquête de la confiance des Français, pour porter, le jour venu, une nouvelle espérance pour la France.
Applaudissements nourris sur les bancs du groupe UMP dont de nombreux députés du groupe UMP se lèvent. - Huées sur quelques bancs du groupe SRC.
Nous venons de vivre, monsieur le Premier ministre, deux années extrêmement difficiles pour notre pays : deux années difficiles pour les Français, avec un nombre croissant de chômeurs, deux années difficiles marquées par l’augmentation des impôts, deux années difficiles pour nos entreprises, marquées par le déclin que votre politique a provoqué.
Dans une telle situation, il faut réagir. Vous nous dites vouloir le faire à votre manière et selon vous, monsieur le Premier ministre, nous vivrions aujourd’hui un moment de vérité. Chiche !
Chiche, car ce moment de vérité est nécessaire. Il est nécessaire parce que votre bilan, au fil de ces deux années, est catastrophique. Il est nécessaire car, au-delà de ces résultats tragiques, nul ne sait en réalité où vous voulez mener l’économie de notre pays.
Ces deux dernières années, tantôt vous avez aggravé la charge des entreprises, tantôt vous l’avez allégée. Tantôt vous leur avez imposé des contraintes nouvelles, tantôt vous avez tenu un discours plus aimable à l’égard de l’économie et des entreprises.
Alors, où en sommes-nous aujourd’hui ? Les plus aimables à votre égard, il y a quelques semaines à peine, déclaraient que le problème n’était pas que vous ayez une mauvaise politique économique. Mauvaise, elle l’est certes, par ses résultats. Et certains disaient : « Mais au fond, y a-t-il une politique économique du Gouvernement ? »
Les plus aimables concluaient qu’en réalité, il y a deux politiques économiques, de sens contraires !
Les plus optimistes, ce soir, pourraient dire qu’enfin, vous avez choisi. Enfin, vous auriez choisi d’honorer les entreprises, d’interrompre le matraquage fiscal, de simplifier. Enfin, vous auriez choisi de ne plus enfermer nos concitoyens dans cette politique malheureuse qui les assomme depuis deux ans.
C’est une partie du discours que vous tenez. C’est un discours aimable, qu’il peut être agréable d’entendre.
Hélas, monsieur le Premier ministre, si vous semblez dans le discours, après deux années d’errance, avoir choisi une voie qui serait moins mauvaise, en réalité, dès qu’on regarde le contenu de votre plan, dès qu’on regarde les chiffres, on s’aperçoit que vous mentez aux Français.
Vous mentez aux Français, monsieur le Premier ministre, dans le programme de stabilité dont nous parlons beaucoup, mais vous mentez aussi dans ce programme national de réformes que vous présentez en même temps, qui n’est que reculades et contre-vérités.
Monsieur le Premier ministre, sans doute votre orientation générale et votre discours peuvent-ils paraître plus aimables, mais vous masquez aux Français l’effort à réaliser.
Vous le masquez de plusieurs manières. L’une est sans doute usuelle, mais vous l’aggravez beaucoup. Pour un foyer normalement constitué, faire des économies, c’est dépenser moins. Pour le budget de l’État, avec votre Gouvernement et d’autres avant, faire des économies, c’est ralentir l’augmentation de la dépense.
Jusque là, rien que de très classique, même si ce n’est guère brillant. Mais vous faites mieux, messieurs les ministres. Prenons un exemple précis ; dans ce genre de débat ce peut être utile.
Vous décidez de poursuivre la non-indexation de l’indice de la fonction publique et vous dites que c’est une économie. Mais poursuivre ce blocage, ce n’est pas dépenser moins ; ce n’est pas non plus arrêter une progression, puisqu’elle était déjà arrêtée. Au risque d’être un peu parodique, je vous invite à envisager le chemin de bon sens sur lequel vous pourriez progresser, monsieur le Premier ministre. Pour certains, faire des économies, c’est diminuer les dépenses. Pour d’autres, sans doute plus savants, cela porte sur des dépenses qui viendraient en plus. Pour vous, c’est économiser sur des dépenses supplémentaires qui ne sont pas réellement supplémentaires, mais qui auraient pu être !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Voilà ce que veut dire prétendre que le blocage de l’indice de la fonction publique serait une économie.
De façon plus massive, monsieur le Premier ministre, depuis que les ministres ont laborieusement présenté le pacte de stabilité en commission des finances la semaine dernière, sans répondre à nos questions précises, vous mentez sur l’ampleur de l’effort à réaliser, parce que chacun le sait : 50 milliards, cela ne fait pas le compte.
Déjà l’an dernier, au début de l’année, – et après moult hésitations vous avez choisi de ne pas reporter l’objectif des 3 % de déficit public pour 2015 – la Cour des comptes avait dit qu’il fallait un effort de trois fois 17 milliards, soit un peu plus de 50 milliards.
À cette contrainte, qu’on peut justifier, vous avez ajouté, monsieur le Premier ministre, un certain nombre d’annonces successives de baisses d’impôt. Baisser les impôts, c’était bien le moins, après le matraquage de ces deux dernières années. Mais où est le financement de ces baisses d’impôt ?
Dans l’abondant rapport des ministres, je n’ai rien trouvé. J’ai lu, il y a quelques minutes, la note tout à fait intéressante que notre collègue rapporteure générale du budget Valérie Rabault a transmise aux membres de la commission des finances : pas le début d’une justification non plus du financement des baisses d’impôt !
Monsieur le Premier ministre, vous devez être un chef de Gouvernement extraordinaire pour être capable de nous expliquer ce que ni les ministres, talentueux, ni la rapporteure générale du budget n’ont réussi à nous expliquer et à nous démontrer.
Sourires.
Il y a manifestement, dans votre affaire, un mistigri de plus d’une vingtaine de milliards d’euros – ce qui n’est pas tout à fait rien – sur lesquels, aujourd’hui, la représentation nationale n’est nullement renseignée.
Il y a dans votre programme 50 milliards d’économies peut-être, si l’on s’en remet à votre bonne foi ; il n’y a pas en tout cas – et je vois que votre ministre des finances opine – de quoi financer à la fois le pacte de stabilité et les mesures de baisse fiscale.
Là, je n’opine pas !
Monsieur le Premier ministre, ce ne serait pas du luxe, dans une démocratie ordinaire, qu’il y ait une réponse à cette question.
En réalité, vous mentez aux Français…
« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.
Vous mentez aussi à Bruxelles, vous mentez à votre majorité et sans doute vous vous mentez à vous-même.
Une simple proposition, monsieur le Premier ministre : puisque vous prenez l’engagement – et avec vous j’imagine l’ensemble de l’exécutif, y compris le Président de la République – qu’en 2015, nous serons à 3 % de déficit, est-ce que vous et le Président de la République prenez l’engagement, si cet objectif n’est pas atteint, de renoncer à vos fonctions l’un et l’autre ?
Le Président de la République a fait une observation de bon sens sur le chômage. Est-ce qu’il nous dirait aujourd’hui, ou vous ici au nom de l’exécutif, que si cet objectif de 3 % n’était pas respecté, alors vous prendriez votre responsabilité devant les Français, ce qui amènerait le Président de la République à ne pas se présenter de nouveau ?
La réalité, ce sont les impôts annoncés dans votre plan, les impôts nouveaux, avec en particulier la taxe carbone et la fiscalité écologique. Voulant accumuler les bonnes nouvelles, vous avez annoncé une baisse d’un point des prélèvements obligatoires. Dans un moment d’honnêteté arithmétique, le ministre, lui, n’annonce que 0,6 point. C’est bien qu’il y a aujourd’hui dans les tuyaux 0,5 point de PIB d’impôts supplémentaire.
Les réformes structurelles sur lesquelles vous voudriez nous impressionner ou impressionner Bruxelles…
Je vais conclure.
Monsieur le Premier ministre, dans le domaine de l’énergie, pensez-vous réellement que la loi de transition énergétique qui sera en réalité une charge supplémentaire pour le contribuable, qui sera en réalité une charge supplémentaire pour l’économie, qui sera un handicap supplémentaire pour la compétitivité de nos entreprises, puisse s’inscrire dans votre programme de réformes ?
Lorsque vous parlez – c’est un sujet que nous sommes quelques-uns à suivre – de libéralisation dans le domaine des transports, regardez le rapport qui a été remis la semaine dernière concernant les taxis et les VTC ! Il ne comporte aucune précision quant à l’ouverture du marché !
Et que dire de la réforme ferroviaire dont vous parlez dans le programme national de réformes et qui, en réalité, bloquera toute possibilité de concurrence ? Là encore, il n’y a rien de précis en ce qui concerne le marché du travail !
S’agissant du logement, comme le disait Jean-François Copé…
…la situation s’est considérablement aggravée.
Bref, monsieur le Premier ministre, votre projet ne propose ni effort suffisant de maîtrise des finances publiques, ni effort de modernisation…
…à la hauteur de ce que notre pays exige. Heureusement, nous pouvons proposer une meilleure voie…
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, j’ai du mal à définir avec précision votre pacte. Est-il de responsabilité, est-il de stabilité, est-il de vassalité, est-il de versatilité ? Je vous ai écouté avec beaucoup d’intérêt et sans préjugés, et je vous ai entendu dire le contraire de ce que vous faites.
Qui dit pacte dit, forcément, paix, or, votre pacte fait la guerre, hors au capital auquel il accorde 50 milliards. Il fait la guerre aux petits, et vous le savez. Ce sera le pacte des claque-dents, le pacte des crève-misère, le pacte de petits qui souffriront parce qu’il faut que, dans quelques jours, vous présentiez votre copie à la Commission de Bruxelles !
Et alors, que l’on soit de gauche ou de droite, on oublie la toute-puissance des banques, le dogme eurocratique, comme cela a été dit – et il est vrai que ce dogme existe et qu’il nous écrase –, on oublie la technocratie budgétaire de Bruxelles tatillonne et torturante – c’est à cause d’elle que ce pacte est un piège –, ou oublie la toute-puissance des banques, je le répète.
Déflation, stagnation, chômage, désindustrialisation, pauvreté, tant pis ! Bruxelles commande et l’on doit se rendre à Canossa pour respecter son diktat, celui de Berlin et de Washington.
Oh, vous le paierez un jour ! Je me rappelle ce que je vous ai dit il y a de cela quelques mois : un moment viendra où vous serez cinquante sur vos bancs. Mais j’étais excessif : un jour, vous serez trente à vous compter comme des petits pois – sans vouloir évidemment citer Nicolas Sarkozy.
Bientôt, nous aurons l’accord de libre-échange avec les États-Unis et tout sera dit.
Ce pacte ne comporte aucune réforme structurelle. L’aide médicale d’État ? Vous n’y touchez pas, et vous allez injecter 600 millions supplémentaires dans la politique de la ville, pudique dénomination d’un clientélisme d’État. Voilà !
Vous avez décidé de ne faire aucune réforme de structure. Vous avez décidé que l’on ne toucherait pas à ce qui pourrait peut-être nous permettre de nous libérer de ce piège.
Et l’on fera des sacrifices, et l’on demandera au peuple des fonctionnaires, au peuple des retraités, au peuple des épargnants, au peuple des petits, des tout-petits, de se sacrifier encore plus !
Alors, pour que votre majorité ne grogne pas et pour qu’elle vote, vous concédez quelques petits sacrifices dans les économies prévues sur les retraites. Mais la réalité, ouvrez les yeux, c’est que les Françaises et les Français, même si vous concédez que l’impôt est désormais trop lourd, souffriront et devront payer très chèrement notre obligation d’obéissance aux diktats européen, allemand et américain !
Alors, monsieur le Premier ministre, vous citez souvent Clemenceau, vous citez souvent Pierre Mendès-France, de grands hommes…
Oui, c’est vrai, des radicaux et, principalement, vous citez Mendès-France. Mais, voyez-vous, vous devriez citer Molière de temps en temps parce que je crains fort que vous n’entriez dans l’Histoire comme le Monsieur Purgon des ordonnances purgatives.
Or ce qui est dramatique, c’est que le malade, aujourd’hui, n’est pas imaginaire. Franchement, ce n’est pas d’une thérapie purgative dont nous avions besoin mais d’une thérapeutique du courage qui sache dire non à Bruxelles et oui à la France, monsieur le Premier ministre, cette France que vous aimez, je ne le discute pas et je ne le discuterai jamais, cette France qui est dans votre sang, dans votre culture, dans votre histoire.
Oui à la France, non à Bruxelles !
Monsieur le Premier ministre, par la lettre que vous nous avez communiquée hier, vous avez souhaité expliquer votre plan d’économies à l’ensemble des membres de cette Assemblée.
Je le reconnais, c’est une démarche louable, peut-être d’ailleurs assez inédite, mais c’est également une initiative sans lendemain.
Il est en effet regrettable, monsieur le Premier ministre, que pour la qualité de nos débats, au moment où nous nous apprêtons à nous prononcer sur un texte – certes programmatique – nous ne disposions pas de la moindre étude d’impact sur les mesures envisagées, en économies comme en dépenses.
Vous nous dites, monsieur le Premier ministre, que ces précisions viendront en leur temps. Mais vos mesures subiront inévitablement les aléas des prévisions de croissance auxquelles vos ministres, MM. Sapin et Eckhert, avaient eux-mêmes du mal à croire lorsqu’ils sont venus nous les présenter en commission des finances la semaine dernière.
Mes chers collègues, nos engagements à l’égard de l’Union européenne sont rien moins que la garantie de la soutenabilité de notre dette et donc de notre souveraineté budgétaire.
La France sera l’an prochain le premier emprunteur en euros au monde en raison des dettes contractées pendant la crise. Je vous incite vraiment à écouter avec beaucoup d’attention l’analyse de notre président de la commission des finances Gilles Carrez à ce propos. Il a beaucoup insisté sur cette situation difficile, voire dramatique, de notre pays.
Avec un besoin de financement qui frisera bientôt les 230 milliards et une dette égale à 93,5 % de la richesse nationale, c’est la crédibilité de notre pays à l’égard des marchés financiers et, du même coup, sa capacité à assumer son propre destin qui sont directement mises à mal.
Le redressement de nos finances publiques n’est pas un luxe : c’est une nécessité financière et une exigence morale. Si quelques voix s’élèvent encore à gauche pour réclamer une énième relance de l’économie par une politique de la dépense, il semble que le Parti socialiste se soit enfin rallié à cette cause que notre groupe défend depuis longtemps et avec obstination : celle de la réduction des déficits et de la dépense publique.
Après deux ans d’hésitations et d’atermoiements du Président de la République, vous affichez votre intention, monsieur le Premier ministre, de reprendre la trajectoire dont le précédent gouvernement s’était écarté de façon dramatique et vous prévoyez un retour à un déficit à 3 % du PIB pour 2015 puis à 1,3 % à l’horizon 2017. Nous sommes une majorité dans cet hémicycle à souhaiter que vous y parveniez, dans l’intérêt de la France.
Mais cet objectif est-il vraiment atteignable, monsieur le Premier ministre, si l’on en juge par les grandes lignes du plan d’économies que nous serons appelés à voter ? J’en doute fortement, pour trois raisons.
Tout d’abord, parce que les prévisions du Gouvernement sont fondées sur des taux de croissance certes peut-être crédibles pour 2014 mais déraisonnablement optimistes ensuite – 2,25 % par an à partir de 2015.
Ensuite, parce que la diminution de 25 milliards d’euros des prélèvements obligatoires prévue dans le pacte de responsabilité ne pourra dans ce contexte être financée que par l’emprunt et donc par la dette, compte tenu des autres impératifs poursuivis que sont le CICE et le redressement des comptes.
Ce ballon d’oxygène donné in extremis à nos entreprises ne doit d’ailleurs pas éclipser la hausse d’impôts qui attend les contribuables dès cet automne. Après un choc de compétitivité annoncé mais jamais mis en oeuvre, après un pacte de responsabilité aux contours très flous, les Français doivent savoir qu’ils seront bientôt soumis à un nouveau choc fiscal à travers toute une série de mesures qui toucheront les retraites, la fiscalité écologique ou, encore, les impôts locaux.
Et je ne parle pas des annonces toutes récentes que vous avez formulées, monsieur le Premier ministre, concernant les petites retraites, non plus que de l’augmentation de salaires des fonctionnaires. Nous ne savons absolument pas comment cela sera financé.
Enfin, l’objectif de déficit n’est pas atteignable parce que le plan de 50 milliards d’économies comporte une malfaçon essentielle : il n’agit que sur des curseurs, sur des paramètres, mais ne prévoit pas la moindre réforme de structure, hormis peut-être la possibilité de faire fusionner les régions.
Mais vous conviendrez, mes chers collègues, que les perspectives lointaines et pour l’instant chimériques de cette évolution pourtant souhaitable ne suffisent pas à répondre aux besoins immédiats de notre pays !
En fait, ce plan se contente de tabler sur des mesures aussi brutales sur le plan humain qu’anecdotiques, à moyen terme, sur le plan financier. Si je puis dire, il fait « l’économie » de toute remise en question en profondeur de nos modes de fonctionnement et de notre gouvernance, alors que notre pays bat tous les records en termes de dépense publique.
Pour résumer la situation dans laquelle vous vous trouvez, monsieur le Premier ministre, je dirais que vous êtes en quelque sorte le Grouchy de la bataille pour la compétitivité qu’un Président de la République isolé dans son propre camp mais aussi assiégé par ses partenaires européens vient enfin de se décider à engager.
Et je vous le dis, monsieur le Premier ministre, avec beaucoup de force : vous faites fausse route !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, « Aujourd’hui est un jour qui compte pour l’avenir de la France et des Français ».
Ces mots, tirés de votre lettre aux parlementaires de la majorité, monsieur le Premier ministre, traduisent la pression exercée par votre Gouvernement pour faire adopter les mesures présentées.
Le changement de cap de la politique gouvernementale allait pourtant dans le bon sens. Il faut dire la vérité aux Françaises et aux Français : nous la leur devons et ils sont prêts à l’entendre. Nous devons réduire nos dépenses publiques. L’effort de 50 milliards d’euros d’économies soutenu par le Gouvernement est donc un premier pas.
Il reprend enfin le redressement des comptes publics engagé par la précédente majorité, qui est essentiel pour l’indépendance de notre pays et le succès de nos entreprises.
Enfin, un effort est réalisé à destination des entreprises afin de limiter le coût du travail. Elles seules développeront l’emploi mais à condition que leur environnement fiscal s’améliore, soit lisible et stable.
Pour avoir été dans une situation comparable lors de la précédente législature, je sais à quel point il est difficile pour les députés de la majorité de voter un plan d’économies et, pour le Gouvernement, de le faire adopter. C’est une question de courage et de détermination.
Malheureusement, le Gouvernement se rend compte des réalités avec deux ans de retard et l’adage « mieux vaut tard que jamais » ne peut pas s’appliquer à l’avenir d’un pays, de notre pays.
Je ne reviendrai pas sur les caractéristiques techniques et fiscales du projet présenté par le Gouvernement : Jean-François Copé l’a fait avec talent. Je souhaite m’attacher exclusivement à la situation de nos entreprises et à la création d’emplois.
Tant que le taux de chômage sera aussi élevé, les problèmes de nos concitoyens et de notre pays persisteront. Ce n’est que par le travail de tous que nous engagerons le redressement du pays. Si le Gouvernement avait pris les bonnes décisions durant ces deux dernières années, nous ne serions pas appelés aujourd’hui à voter ce plan de rigueur.
Au lieu de cela, le Gouvernement prend des décisions motivées par une idéologie dépassée. À force de vouloir effacer toute trace du précédent Président de la République et de sa majorité, votre Gouvernement s’est tiré une balle dans le pied. La France et les Français en subissent les conséquences, comme le montrent les trois exemples suivants.
La suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires tout d’abord. Par pure idéologie, votre majorité a supprimé cette mesure populaire et essentielle pour le pouvoir d’achat d’un grand nombre de salariés.
De nombreuses voix s’élèvent pour la rétablir. Les Françaises et les Français, eux, n’ont pas oublié.
La suppression de la TVA compétitivité, ensuite. Nous avions pris une mesure forte et courageuse : augmenter la TVA pour baisser la fiscalité pesant sur les entreprises. Votre majorité est revenue sur cette décision, mais a finalement augmenté la TVA dès le 1er janvier 2014, sans pour autant baisser les charges sociales. Ainsi, tout le monde est perdant : nos concitoyens, car ils ont perdu du pouvoir d’achat, et les entreprises, car leur compétitivité ne s’est pas améliorée.
La réforme territoriale, enfin : là encore, la majorité actuelle est revenue dessus, par pure idéologie. Oui, monsieur le Premier ministre, la réforme du conseiller territorial était votée et vous l’avez abrogée. (« C’est vrai ! » sur quelques bancs du groupe UMP.)
Que de temps perdu ! Alors, soyons honnêtes : nous pourrions féliciter le Gouvernement pour certaines des décisions qu’il prend dans le cadre de ce programme de stabilité, s’il n’avait pas deux ans de retard. Et il faut ajouter à cela les revirements de la journée d’hier : par peur d’être mis en minorité à l’Assemblée nationale par votre majorité, vous avez, monsieur le Premier ministre, annoncé des reculs. Il est regrettable que le courage du Gouvernement n’ait tenu que quelques jours.
Il faut réformer structurellement notre pays et son rapport avec les entreprises. Ce sont nos entreprises, petites, moyennes et grandes, qui recréeront de l’emploi. Il faut faire confiance aux entrepreneurs et aux salariés, qui sont la richesse de l’entreprise. Certes, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi va dans ce sens. Toutefois, comme l’a rappelé le Haut conseil des finances publiques, il ne peut être assimilé à une baisse des cotisations patronales, et son effet sur l’emploi est surestimé.
De quelles réformes notre pays a-t-il besoin en matière de travail et d’emploi ? Il faut réformer le code du travail, bien trop complexe, les différents contrats de travail, bien trop nombreux, le temps de travail, bien trop rigide, le coût du travail, bien trop important par rapport à nos concurrents, ou encore les niveaux des seuils sociaux dans les entreprises, bien trop contraignants.
Dans l’attente de ces réformes qui apporteront la croissance, les pansements se succéderont, sans jamais régler les problèmes de fond. Le Gouvernement a probablement sauvé le vote de l’Assemblée nationale sur ce texte en renonçant. Mais qu’en sera-t-il des prochains textes ? De la prochaine loi de finances et de la prochaine loi de finances rectificative ? Les annonces d’hier ont déjà amputé les 50 milliards d’économies, qui sont annoncés, mais peu probables. Comment allez-vous tenir vos engagements ?
Vous l’aurez compris : en l’absence des réformes structurelles indispensables pour notre pays, en l’absence de courage, nous voterons contre le programme de stabilité présenté.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la Présidente de la commission des affaires étrangères.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, je voterai le programme de stabilité que vous présentez aujourd’hui.
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.
D’abord par loyauté à l’égard du Président de la République et du Gouvernement, ce qui est bien la moindre des choses pour une députée élue dans cette majorité en juin 2012.
Ensuite par respect pour les électeurs qui nous ont confié en 2012 la lourde tâche de redresser notre pays.
Mêmes mouvements.
Enfin et surtout, parce que j’ai la conviction que la France d’aujourd’hui ne peut léguer à sa jeunesse le fardeau d’une dette qui a doublé entre 2002 et 2012. Notre responsabilité collective est de la réduire, et pour cela de ramener les déficits publics en dessous de 3 %.
Il n’est pas acceptable que le service de la dette qui, comme cela a été rappelé, s’élève à 45 milliards en 2013, soit le premier poste de dépenses dans le budget de l’État, devant celui de l’éducation nationale, et que soient ainsi délaissés des financements qui pourraient aller à des investissements d’avenir dans la recherche, l’éducation ou la formation, et y créer des emplois durables.
Lorsque le Gouvernement fait le choix d’aider les entreprises, notamment les PME, à rétablir leur compétitivité, ce sont les investissements et la création d’emploi qu’il veut favoriser, et je soutiens totalement cette démarche. Lorsque le Président de la République obtient au Conseil européen la mobilisation d’un fonds de 8 milliards d’euros pour lutter contre le chômage des jeunes, c’est pour permettre la mise en oeuvre d’une véritable « garantie jeunesse », afin que chaque jeune en recherche d’emploi bénéficie d’une formation ou d’un stage. Lorsque le Gouvernement fait le choix de ne plus augmenter les impôts – qui ont augmenté de 60 milliards depuis 2010 –, c’est pour ne pas peser davantage sur le pouvoir d’achat des ménages.
C’est pourquoi il faut diminuer les dépenses publiques, qui absorbent une part exagérée du produit national, en traquant les fraudes et les gaspillages et en améliorant l’organisation et la gestion des services publics. Le programme de stabilité s’inscrit dans la droite ligne de l’action menée par la majorité depuis 2012. Je rappelle que la norme de dépenses des projets de loi de finances a été tenue, et même un peu mieux que prévu. Le déficit structurel a été abaissé à 2,9 % du PIB en 2013, soit le niveau le plus bas constaté depuis 2001.
Les objectifs fixés par le Gouvernement à l’horizon 2017 sont clairs : le poids de la dépense publique devra baisser de 57 à 53,5 % du PIB et, pour ne pas casser la croissance, cette réduction se fera par des réformes structurelles, notamment en matière de réorganisation territoriale et de transition énergétique.
Il est parfaitement légitime que notre majorité débatte de la juste répartition des efforts entre les catégories sociales, entre les générations et entre les territoires. Et vous avez su, monsieur le Premier ministre, entendre les députés qui se sont fait l’écho des difficultés des jeunes en recherche d’emploi, des retraités aux maigres ressources, des salariés au SMIC, des fonctionnaires de catégorie modeste et des petits entrepreneurs. Ainsi, les retraités qui perçoivent une pension inférieure ou égale à 1 200 euros, ainsi que les fonctionnaires des catégories C et B, verront leur pouvoir d’achat préservé. Dès 2015 les cotisations salariales et les cotisations familiales sur les bas salaires seront par ailleurs allégées, ainsi que celles des indépendants jusqu’à 3,5 SMIC. Et dès le 1er janvier 2015, c’est le pouvoir d’achat des plus modestes qui sera augmenté par une revalorisation de 500 euros des salaires autour du SMIC. Voilà des mesures que je crois importantes.
Il faudra certainement, monsieur le Premier ministre, améliorer encore ce travail commun entre le Gouvernement et notre assemblée. Celle-ci devra y être toujours davantage associée, et le processus d’élaboration des politiques publiques être toujours plus transparent. Pour ma part, je serai particulièrement vigilante sur l’école, sur le logement, dont vous avez souligné qu’il était une priorité, mais aussi, monsieur le ministre des finances et des comptes publics, sur la lutte contre la fraude fiscale, car lorsque l’on demande des efforts aux Français, il est inacceptable que certains s’évadent à l’étranger.
C’est là un élément crucial pour la justice sociale et j’espère donc, monsieur le ministre des finances, que vous pourrez nous donner régulièrement des précisions sur les résultats de la lutte contre la fraude fiscale.
Toutes ces réformes, tous ces efforts, nous devons les faire pour nous-mêmes, pour nos enfants et nos petits-enfants, et pour le redressement de notre pays. Même s’il n’y avait pas l’Europe, la France devrait quand même le faire. C’est une question de souveraineté et d’indépendance à l’égard des marchés financiers. Ne nous y trompons pas : nous ne pourrons pas peser en Europe,a fortiori conserver notre influence dans le monde, si notre économie décroche. Or ce risque existe : nous le voyons avec Alstom.
Il faut que nous nous battions pour soutenir notre industrie, pour renforcer notre économie et équilibrer nos comptes publics et notre commerce extérieur.
Le programme de stabilité et de réduction des dépenses et de la dette est un engagement que nous avons pris au sein de l’Union européenne pour contribuer au renforcement de l’Union économique et monétaire. Tenir cet engagement est une condition pour obtenir que l’Union européenne fasse davantage pour la croissance et l’emploi. Notre pays, la France, est un grand pays, qui a des atouts considérables et dont l’influence reste grande, mais elle doit respecter ses engagements. Il y va de notre crédibilité et de notre capacité à peser en Europe et dans le monde.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, une dette publique qui a atteint près de 2000 milliards d’euros à la fin de l’année 2013, soit 93,5 % du PIB ; un besoin de financement qui s’élèvera à 230 milliards d’euros dès 2015, dont un tiers à peine sera couvert par de l’épargne française – le premier besoin de financement de la zone euro ! un déficit public qui devait être ramené à 3 % du PIB en 2013, et qui aura dérapé pour atteindre 4,3 %…
…ces quelques chiffres suffisent à démontrer que notre souveraineté budgétaire est aujourd’hui menacée.
Et le gendarme n’est ni à Bruxelles, ni à Francfort, ni à Washington ! Comme cela vient d’être dit, c’est avant tout à nous Français, d’être enfin capables de réduire l’écart entre les recettes et les dépenses publiques.
Rendez-vous compte ! La France est devenue le seul pays de la zone euro, avec la Grèce, à être encore en déficit budgétaire primaire. De même, nous sommes les seuls, avec la Grèce, à être encore en déficit commercial. Vous avez donc raison, monsieur le Premier ministre, d’exhorter votre majorité à tenir nos engagements à travers ce programme de stabilité pour 2014-2017, parce qu’une crise de financement serait bien pire que quelques milliards d’économie sur les dépenses.
Rendez-vous compte : une augmentation de 1 % du taux d’intérêt, ce sont 3 milliards d’euros de frais financiers supplémentaires la première année, et 6 milliards l’année suivante ! Tous nos efforts seraient réduits à néant. Or ce risque pèse de plus en plus lourdement sur notre pays, au moment où nos voisins européens, eux, notamment l’Espagne et l’Italie, savent se redresser.
Vous avez également raison, monsieur le Premier ministre, d’abandonner la politique irresponsable de hausse des impôts tous azimuts, que vous avez menée depuis deux ans. La baisse de 25 milliards d’euros – 20 milliards sur les entreprises et 5 milliards sur les ménages – est bienvenue, et les échéances fixées, en 2015, 2016 et 2017, sont bonnes. S’agissant des entreprises, vous commencez en 2015 par un allégement des cotisations sur les très bas salaires – c’est, d’après les économistes, à ce niveau-là que les effets sur l’emploi sont les plus nets – puis vous montez à partir de 2016 pour essayer d’avoir un effet sur la compétitivité. Mais reconnaissez, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, qu’il aurait été infiniment plus efficace et plus simple de mettre en oeuvre la réforme relative aux cotisations familiales et à la TVA antidélocalisation que nous avions votée en mars 2012.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
On peut nous reprocher de l’avoir proposée trop tard, mais vous, vous vous êtes lourdement trompés en la supprimant.
« Absolument ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Je dois dire que la disparition progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, un impôt sur la production qui est malvenu et qui pénalise la compétitivité de nos entreprises, est une bonne mesure. S’agissant des ménages, le fait de baisser les cotisations salariales sur les bas salaires en dessous de 1,3 SMIC et de creuser ainsi l’écart entre le travail et l’assistance est une bonne chose. Mais là encore, c’était exactement l’objet de la défiscalisation des heures supplémentaires, que vous avez mise à bas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, je vous mets en garde : les baisses que vous annoncez sont prévues pour 2015, pour 2016, mais à l’automne 2014, c’est un choc fiscal colossal – plus de 4 milliards d’euros ! – que tous les Français vont subir !
Mêmes mouvements.
Au moment de ce choc fiscal, vous subirez quant à vous, monsieur le Premier ministre, un choc de crédibilité, un choc de confiance, parce que votre parole de cet après-midi sera complètement reniée, complètement démentie !
Le problème de ces 25 milliards d’euros de baisse d’impôt, c’est qu’ils ne sont absolument pas financés. Souvenons-nous en effet que les 50 milliards d’économies ont été annoncés il y a déjà plusieurs mois et qu’ils devaient servir à assurer la trajectoire de réduction progressive des déficits à 3 % en 2015. Ils n’étaient en aucun cas destinés à financer ces baisses supplémentaires d’impôt.
Il faut que tout le monde soit bien conscient du raisonnement qui est tenu : on va réaliser 50 milliards d’économies, mais par rapport à quoi ? Quand on regarde de près le programme de stabilité et les chiffres que vous donnez, on voit que vous faites l’hypothèse que notre dépense publique, qui s’élève à 1 200 milliards d’euros, soit 57 % de notre PIB – le record du monde ! – va inéluctablement augmenter chaque année de 35 milliards d’euros – c’est ce que l’on appelle la croissance spontanée. Vous estimez donc qu’avec une augmentation de 105 milliards sur trois ans et 50 milliards d’économies, elle n’augmentera que de 55 milliards. Mais ce n’est pas du tout cela, l’effort qui est demandé !
Surtout, vous ne proposez aucune réforme de structure, comme cela a été dit.
Il vaut pourtant mieux avoir moins de fonctionnaires, correctement payés, que le même nombre de fonctionnaires, paupérisés.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Par ailleurs, le gel des retraites est une mauvaise solution et vous auriez mieux fait de poursuivre la réforme courageuse que nous avions engagée sur les régimes spéciaux et sur les dates de départ en retraite. Mais tout cela a été mis à bas.
En fait, monsieur le Premier ministre, vous êtes le champion du rabot
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
ou plutôt du rasoir – veuillez m’excuser, madame la rapporteure générale !
Sourires.
Le manque d’ambition sur la maîtrise des dépenses et toutes ces zones d’ombre nous font courir de grands risques de dérapage par rapport à nos engagements européens, et, surtout, sont susceptibles de compromettre la confiance que nous accordent nos créanciers.
Pour conclure, j’espère sincèrement que, malgré vos efforts, vous n’allez pas devenir le premier Premier ministre à la tête d’un État en faillite !
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, réduire nos déficits publics n’est pas une fin en soi : c’est une condition de notre souveraineté économique, un moyen de nous conférer des marges de manoeuvre, une responsabilité vis-à-vis de tous nos concitoyens et un engagement à l’égard des générations qui viendront après nous. Nous ne le faisons pas pour répondre à je ne sais quel diktat de technocrates, nous le faisons pour nous.
S’il est de notre responsabilité de réduire le déficit public, il l’est tout autant d’assurer le soutien de la croissance économique. La croissance, c’est l’emploi ; l’emploi, c’est le pouvoir d’achat ; le pouvoir d’achat, c’est permettre à chacune et à chacun de nos concitoyens d’avoir une vie décente.
Parce que notre responsabilité est double, elle s’appuie, monsieur le Premier ministre, sur le pacte de responsabilité que vous nous avez proposé. Ce pacte repose sur deux piliers : une réduction des dépenses publiques de 50 milliards d’euros d’ici à 2017 et un soutien à la croissance, grâce au pacte de responsabilité, d’un montant de 46 milliards d’euros, également décliné sur plusieurs années.
L’un ne va pas sans l’autre. C’est l’articulation des deux qui permettra notre réussite économique. Il s’agit de revoir notre structure de dépenses publiques pour libérer de la marge de manoeuvre, afin d’investir en faveur de notre croissance et de notre pouvoir d’achat. C’est un équilibre à trouver, et je veux remercier le Gouvernement et, en premier lieu, M. le Premier ministre, pour le dialogue qu’il a noué à ce sujet.
L’année 2013 a été la première année qui nous a permis de retrouver un peu de croissance – 0,3 %. On attend 1 % cette année et 1,7 % pour 2015. Il est donc indispensable que les entreprises, l’ensemble des entrepreneurs de ce pays puissent s’appuyer sur ce début de reprise et sur les mesures que nous instituons en leur faveur.
C’est tout l’objet du CICE et du pacte de responsabilité, qui mettent en action trois leviers. Le premier levier réside dans la baisse des coûts pour les entreprises, la diminution de trois points des cotisations famille, la suppression progressive de la C3S, l’arrivée à échéance de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés au 30 décembre 2015 et, bien entendu, le maintien du CICE que beaucoup d’entrepreneurs, en France, ont commencé à percevoir à partir de ce mois d’avril.
Le deuxième levier concerne l’amélioration de la rémunération du travail, avec la baisse des cotisations salariales pour les rémunérations inférieures à 1,3 SMIC.
Le troisième levier a trait à la simplification des relations entre l’administration et les entreprises.
Afin de financer ces mesures, d’assumer nos responsabilités en matière d’assainissement des comptes publics et de respecter nos engagements vis-à-vis de l’ensemble de nos partenaires européens, nous nous engageons sur un plan d’économies de 50 milliards d’euros : 18 milliards pour l’État, 21 milliards pour l’assurance maladie et la protection sociale et 10 milliards pour les collectivités territoriales.
N’en déplaise à M. Copé, il s’agit d’un effort sans précédent. En effet, la dépense publique a connu une progression annuelle en volume de 2 % par an au cours des dix dernières années, alors qu’elle s’est limitée à 1,3 % en 2013 et qu’elle devrait fortement ralentir en 2014, à 0,3 %.
L’ensemble de la sphère publique participera à l’effort demandé – l’État, ses opérateurs, les collectivités territoriales et, bien sûr, la sphère sociale – mais cet effort est justement réparti : je salue à cet égard les mesures que M. le Premier ministre a bien voulu engager, en faisant notamment en sorte que les retraites inférieures à 1 200 euros soient revalorisées normalement et qu’elles ne subissent aucun gel, en tout cas jusqu’au 31 octobre 2015.
Vous l’avez dit, monsieur le Premier ministre, c’est le pouvoir d’achat de 6,5 millions de retraités, c’est-à-dire la moitié des retraités français, qui sera intégralement préservé, ce qui représente un effort non négligeable, d’un montant de 1,5 milliard d’euros.
Des mesures structurelles ont également été engagées : l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et celui du 22 mars 2014, qui ont pour objet de permettre un retour plus rapide à l’emploi, en simplifiant les conditions de cumul entre l’allocation de chômage et les revenus d’activité.
Vous le voyez, mes chers collègues, il nous est demandé aujourd’hui d’approuver un équilibre entre l’assainissement de nos finances publiques et le soutien à la croissance économique. Atteindre cet équilibre entre croissance et réduction du déficit budgétaire nous permettra de tenir nos engagements vis-à-vis de nous-mêmes et de nos partenaires européens. C’est pourquoi je vous invite à soutenir la proposition du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes.
Monsieur le Premier ministre, le débat que nous tenons aujourd’hui a une forte dimension européenne, puisque le plan que vous nous présentez se veut une réponse à la Commission européenne. Mais cette dimension ne peut servir de prétexte à des choix budgétaires contraires à nos choix de société.
Certes, le Gouvernement a proposé des inflexions au projet initial qui nous a été présenté mercredi dernier : je pense aux faibles retraites, sur lesquelles, avec d’autres, j’avais appelé votre attention, messieurs les ministres ; je pense aussi aux engagements sur le RSA et à la mise en oeuvre du plan de lutte contre la pauvreté.
Si ces inflexions vont dans le bon sens et doivent être saluées, modifient-elles l’orientation de fond ?
Certaines des mesures proposées méritent d’être précisées.
S’agissant tout d’abord de la transition énergétique, vous nous avez indiqué par courrier, monsieur le Premier ministre, que vous vouliez en faire une priorité. Mais quels moyens la France est-elle prête à mettre en oeuvre pour entraîner ses partenaires dans la voie d’une politique européenne de l’énergie et du climat, pour investir dans l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, les transports ou les autres secteurs concernés ? Les projets de loi de finances à venir permettront-ils de préserver notre capacité d’investissement en la matière ?
En ce qui concerne le soutien aux ménages en difficulté, pouvez-vous nous détailler précisément les nouvelles dispositions fiscales ?
Il semble que, si les mesures que vous proposez, monsieur le Premier ministre, constituent une première avancée, elles demeurent insuffisantes au regard de la situation difficile que vivent nombre de nos concitoyens et qui les pousse à douter de la France comme de l’Europe.
Certes, nous avons pris des engagements auprès de nos partenaires européens, et il est sain de prendre le problème de la dette à bras-le-corps, s’il s’agit de créer de l’emploi. Mais il ne faudrait pas que le remède tue le malade. Ayons à l’esprit la protection des plus faibles d’entre nous et donnons des perspectives aux jeunes fortement touchés par le chômage, partout en Europe.
Comment nous assurer que les services publics, gages d’égalité, seront préservés ? Le programme de stabilité que vous nous avez soumis aujourd’hui ne va-t-il pas conduire à une remise en cause des missions de service public assurées par l’État, les collectivités territoriales ou l’hôpital ? Veillons à ce que les mesures contenues dans le pacte de responsabilité – poids non négligeable pour nos finances publiques – soient efficaces, ciblées sur la création d’emplois de qualité et évitent les effets d’aubaine. À cet égard, monsieur le Premier ministre, pouvez-nous préciser les contreparties qui seront spécifiquement demandées aux multinationales ?
Où en est la grande réforme fiscale annoncée ? Comment la mobilisation de l’épargne sera-t-elle mise au service de l’économie réelle, y compris l’économie sociale et solidaire ? Même l’OFCE et le FMI sont sceptiques quant à l’efficacité d’une relance fondée sur une rigueur exacerbée : voilà plus de deux ans que le FMI l’affirme et le réaffirme. L’exemple actuel de la reprise américaine, synonyme d’inégalités, d’injustice et de péril écologique, nourrit à juste titre les critiques que nous formulons à l’égard d’une vision du développement réduite au seul PIB.
Ce débat ne se réduit donc pas au cadre national : il est avant tout européen. À quelques semaines des élections qui décideront de l’avenir de l’Union, pour restaurer la confiance dans le projet européen, nous devons veiller à ce que le programme de stabilité soit efficace, juste et relance une Europe qui ne se limite pas à la seule loi des marchés financiers. Cela suppose une politique monétaire plus active et une politique de change plus réaliste. Mettre en cause l’euro fort, oui, vous avez raison, mais au service d’un projet social européen.
La France pourrait redevenir le porte-parole de l’Europe qui souffre et qui attend une Union plus solidaire, prête à répondre aux enjeux de fond, à commencer par le réchauffement climatique ou l’épuisement des ressources naturelles. Ne réduisons pas l’Europe à la mise en oeuvre de politiques de rigueur mais permettons-lui de s’incarner dans le domaine social, dans l’innovation créatrice de prospérité partagée. C’est l’essentiel pour nos concitoyens, qui souffrent actuellement. C’est tout l’enjeu de l’affirmation de la dimension sociale de l’Union économique et monétaire. Notre commission des affaires européennes, très active en la matière, plaide par exemple en faveur de la mise en place d’une procédure pour déséquilibres sociaux, sur le modèle de la procédure pour déséquilibres macroéconomiques existant aujourd’hui.
Dans le même esprit, notre commission s’est beaucoup investie – avec succès, vous le savez – dans le dossier de la directive relative aux travailleurs détachés. Aussi, plutôt qu’une compétition déflationniste aux dépens des salaires les plus bas, les propositions françaises doivent s’organiser autour de la solidarité. C’est ainsi qu’ensemble, nous traiterons du nivellement – qui ne doit pas se faire par le bas – et que nous pourrons proposer une Europe solidaire, tournée vers l’avenir, qui, me semble-t-il, aura du sens pour nous tous, les Français comme les autres Européens.
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
Monsieur le président, avant les explications de vote, je veux répondre ou réagir brièvement aux propos qui ont été tenus.
Comme je le disais tout à l’heure, le débat relatif à ma déclaration de politique générale, et celui que nous venons d’avoir sur ce programme de stabilité, ont permis, me semble-t-il, de mettre sur la table tous les arguments.
Nous pouvons nous accorder – d’une certaine manière, Gilles Carrez l’a fait, avec beaucoup d’honnêteté intellectuelle – sur l’état de la France. J’ai rappelé le sentiment de souffrance sociale qu’éprouvent beaucoup de nos compatriotes ; nombre d’entre vous, qui vivez cette réalité, l’ont également affirmé.
Par ailleurs, beaucoup – vous-même, monsieur Carrez, l’avez fait, ainsi que, il y a un instant, la rapporteure générale du budget et le président Vigier – ont rappelé l’état de nos comptes publics.
C’est sur cela que les uns et les autres devraient être en mesure de rapprocher leurs points de vue, tant ceux qui gouvernent depuis deux ans que ceux qui ont gouverné pendant dix ans.
Mais le problème réside dans le ton employé par certains, et je voudrais qu’à tout le moins on puisse changer cela. Peut-être suis-je seul à le penser ? Employant un ton déplace, M. Copé affirmait tout à l’heure qu’il avait gagné les élections municipales et que cela lui donnait tous les droits, que cela l’autorisait à oublier ce qu’il avait fait pendant dix ans avec ses amis.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Voilà ce que, je le répète, les Français ne comprennent pas. Nous avons, nous aussi, gagné les élections municipales en 2008, nous avons gagné les élections régionales en 2010, mais nous savons parfaitement, au-delà de la qualité des uns et des autres et des candidats locaux, quelles en étaient les raisons profondes.
Ne considérez pas votre victoire aux élections municipales comme un blanc-seing à l’égard de la politique que vous avez menée pendant dix ans
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC
et de vos propositions.
Monsieur Carrez, j’aurais aimé vous entendre – même si, je le reconnais, ce n’était pas tout à fait votre rôle – non seulement détailler les 50 milliards d’économies contenus dans notre programme de stabilité, mais aussi présenter les 130 milliards d’économies que votre formation politique souhaite mettre en oeuvre, ce qui vous aurait permis d’indiquer aux Français quelles mesures, quelle austérité vous leur proposez,
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC
ce qu’il y aura en moins en matière de retraites, de fonctionnaires, de pouvoir d’achat, d’éducation et dans bien d’autres domaines.
Tel n’était pas votre rôle, monsieur Carrez, mais votre langue a fourché : un Premier ministre – François Fillon, pour ne pas le nommer – a admis, par le passé, dans un éclair de lucidité, qu’il gouvernait un État en situation de faillite.
Vous ne l’avez pas dit : lorsqu’on veut être honnête intellectuellement – et vous l’êtes parfaitement –, il faut aller jusqu’au bout de son raisonnement.
Oui, nous vivons au-dessus de nos moyens depuis des années.
Oui, la dette est insupportable.
Oui, les déficits publics sont insupportables.
Au lieu de tenir des discours caricaturaux – ce qui n’est pas votre cas, monsieur Carrez –, je crois que la représentation nationale devrait au moins s’accorder sur le diagnostic, sur les responsabilités partagées des uns et des autres. Dans un contexte de crise politique, de crise de confiance, alors que les Français en ont assez d’un certain nombre de discours, c’est sa responsabilité. J’ai parlé de responsabilités partagées, c’est-à-dire partagées par ceux qui assument la charge du gouvernement. Certains tiennent des discours en dehors de la réalité, ou oublient qu’ils ont gouverné pendant dix ans, voté des budgets, formé des gouvernements et pris des décisions – y compris des décisions sur l’Europe. Or la responsabilité de ceux qui ont gouverné, c’est au moins de se mettre d’accord sur l’état du pays, sur le diagnostic. Il peut y avoir ensuite des divergences quant aux solutions – c’est normal, c’est la vie politique –, mais je pense très honnêtement que les Français en ont assez des discours caricaturaux et de la violence qui sourd parfois d’un certain nombre de propos politiques.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Les Français ont besoin d’apaisement, de rassemblement ; il faut prendre au sérieux les messages qu’ils nous ont fait passer, hier comme aujourd’hui.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Notre politique a sa cohérence – que l’on peut, bien sûr, critiquer – : c’est le soutien à la compétitivité pour l’emploi, et le soutien aux entreprises. C’est un élément fondamental, que je ne détaillerai pas : avec le CICE et le pacte de responsabilité, 30 milliards d’euros sont consacrés aux entreprises et à l’emploi. Tel est le choix que le Président de la République a fait : c’est un choix difficile, courageux, qu’il faut prolonger dans les années qui viennent.
Notre appareil productif a été mis à mal depuis plus de dix ans. L’écart de compétitivité entre la France et l’Allemagne s’est inversé tout au long des années 2000. Pour que notre pays retrouve de la force, de la compétitivité, de la productivité, de l’attractivité, oui, il faut du temps ! Ce n’est pas en quelques mois que nous pourrons inverser cette tendance !
Comme vous le savez parfaitement, nous avons perdu des dizaines de milliers d’emplois. La politique menée par M. le ministre de l’économie pour réarmer notre outil productif dans toute une série de domaines délaissés depuis des années vise précisément, sur le long terme, à récupérer ces marchés. Oui, nous devons soutenir les PME et les PMI ! D’ailleurs, les représentants de ces entreprises nous reprochent depuis des années – que la gauche gouverne ou que ce soit la droite – de privilégier trop souvent les grands groupes au détriment des PME et des PMI, dans lesquelles travaille l’immense majorité de nos concitoyens. Il faut les rendre plus fortes, notamment sur le marché européen et le marché international.
Oui, ce gouvernement, cette majorité, font le choix de soutenir les entreprises, pour l’emploi. Il est tout à fait normal que la représentation nationale demande de suivre avec précision l’emploi de ces fonds, afin qu’ils n’alimentent pas les dividendes mais l’investissement et l’emploi. Il est tout aussi normal que le Gouvernement s’appuie sur un dialogue constructif non seulement avec la majorité, mais aussi avec tous les autres groupes parlementaires ; ainsi, conformément aux principes de la Constitution, vous, parlementaires, jouez pleinement votre rôle d’évaluation des politiques publiques que vous votez.
Monsieur Copé, vous n’étiez pas là quand j’ai commencé mon intervention. J’ai simplement dit : respectons-nous, écoutons-nous, et sortons – vous le premier – des caricatures !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Nous avons fait le choix des économies. Certains disent qu’il faudrait en faire moins, d’autres qu’il faudrait en faire plus, mais ce qui importe avant tout, c’est de lancer un mouvement. Il est vrai que c’est difficile : pour un chef du Gouvernement, il est plus aisé, évidemment, de dépenser davantage et de considérer que tout est prioritaire, que tout se vaut. Ce n’est pas notre choix !
C’est pour cela – je le dis à l’intention de nos amis du groupe GDR – que la politique que nous menons n’est en rien une politique d’austérité. Je sais que cet argument n’est pas toujours facile à entendre, mais pour s’en convaincre, il faut comparer avec ce qui se passe dans d’autres pays. Comme je le disais tout à l’heure, on ne peut pas parler d’austérité quand le Gouvernement fait de l’école sa priorité, et crée 60 000 emplois, qui sont nécessaires pour former les enseignants, nécessaires à cause du pic démographique, nécessaires enfin car les inégalités se sont accrues dans l’éducation nationale depuis des années. Tout cela ne suffit pas, évidemment : il faut encore soutenir le projet pédagogique. Mais il n’y a pas d’austérité, quand on fait de l’école, de l’université, de la jeunesse, la priorité. Je le dis à tous les groupes de la gauche : le grand engagement pris par François Hollande en 2012, c’est la jeunesse, la jeunesse, encore la jeunesse !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Cet engagement est au coeur de la politique du Gouvernement : on ne peut donc pas parler d’une politique d’austérité. Nous ne pouvons pas nous dérober à notre devoir, qui est de soutenir le pacte de responsabilité et la priorité donnée à l’école, à l’éducation, à la jeunesse de notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Quel décalage entre les paroles et la réalité ! Tout cela, c’est des mots !
J’aborde à présent la sécurité, le rôle de la justice, la situation de nos tribunaux. Nos concitoyens ressentent, dans ce domaine-là, une inquiétude, liée au fait que l’on a supprimé, au cours du quinquennat précédent, des milliers d’emplois dans la police et dans la justice.
Qui souffre de l’insécurité ? Qui souffre de l’état de la justice ? Ce sont nos concitoyens les plus modestes, ceux qui subissent déjà la crise économique, l’exclusion sociale, la violence. Eh bien le Gouvernement garde cette priorité pour la sécurité, pour la police, pour la gendarmerie,…
…pour la justice, pour la réforme nécessaire de notre code pénal et de l’administration pénitentiaire.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
S’il vous plaît, un peu de calme ! Le débat jusqu’ici a été de bonne tenue : continuons ainsi.
Nous avons besoin, là aussi, de moyens supplémentaires. C’est de l’austérité, cela ? Non, ce sont des choix. Pour qui faisons-nous ces choix, mesdames et messieurs les députés de la majorité comme de l’opposition ? Pour le peuple français ! Pour les Français, qui attendent de nous une réponse claire à leurs préoccupations en matière de sécurité et de justice.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Même dans la situation difficile qui a été décrite tout à l’heure, il est possible de faire des choix. C’est ce que nous faisons, pour mieux répondre aux attentes de nos concitoyens.
Enfin, bien sûr, il faut mener des réformes : c’est le sens de ce que nous engageons. Il est vrai que nous avons beaucoup attendu, dans ce pays, avant de nous y attaquer. Vous avez d’ailleurs reconnu, monsieur le président Copé, qu’en ce qui concerne les collectivités territoriales, ces réformes n’ont pas été menées. Je salue votre lucidité ! J’ai évoqué le conseiller territorial…
Permettez que je poursuive ! Un mode de scrutin fait-il une réforme des collectivités territoriales ?
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Vous avez adopté la réforme du conseiller territorial, mais vous ne l’avez pas mise en oeuvre ; vous n’avez même pas réalisé le découpage électoral correspondant !
J’ai dit ici même que nous nous étions trompés.
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.
Je pense qu’il faut être lucide, et que nous devons la vérité aux Français. Dire qu’il faut changer n’est pas un problème, mais avoir entamé la réforme territoriale par un changement du mode de scrutin dans les départements était une erreur.
Alors je veux corriger cette erreur ! C’est pour cela que nous voulons avancer vite en ce qui concerne les régions et les départements.
Vous ne l’avez pas fait, nous voulons le faire ; réformer en profondeur notre pays, c’est l’honneur de ce gouvernement, de cette majorité. Il est indispensable de réformer les collectivités territoriales, mais aussi l’État. Cette réforme est attendue non seulement pour diminuer la dépense publique, mais aussi pour la rendre plus efficace. Nos compatriotes veulent, dans ce domaine aussi, plus d’efficacité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur Sauvadet, il ne s’agit pas d’une conversion ! Vous ne pouvez pas nous demander d’entendre le message envoyé par les électeurs à l’occasion des élections municipales, qui sont des élections intermédiaires ne remettant pas en cause la majorité ni les choix du Président de la République,…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
…vous ne pouvez pas nous demander d’en tirer les leçons, car vous ne l’avez pas fait en 2008 ni en 2010 !
Exclamations sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Le Président de la République, lui, a eu le courage de reconnaître cette attente et d’essayer d’y répondre : là est la différence !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Nous reconnaissons que sur certains points il y a eu des erreurs ; il faut changer, il faut entendre le message des Français.
Je suis évidemment conscient, par exemple, de la hausse de la fiscalité qui touchera beaucoup de nos concitoyens à la rentrée prochaine. C’est pour cela que nous voulons corriger ce mouvement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative.
Nous devrons y travailler, car nous sentons bien qu’il y a un trop-plein d’impôts – aussi bien les 30 milliards que votre majorité avait votés, monsieur Copé, que les 30 milliards votés par la présente majorité. Les Français n’en veulent plus !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
C’est cette politique qu’il faut changer ; c’est pour cela qu’il faut s’engager intelligemment dans la baisse des prélèvements obligatoires.
Enfin, je pense que le courage, aujourd’hui, c’est d’adopter un autre ton, c’est d’essayer de converger. À cet égard, je veux remercier le président Vigier, ainsi que Bruno Le Roux et Paul Giacobbi, qui ont pris la parole pour soutenir le programme de stabilité que nous avons présenté. Il ne s’agit pas de gommer nos différences, mais d’avancer ensemble pour le pays et pour les Français. Je le dis à la majorité : il relève de notre responsabilité, dans les trois ans qui viennent, de tenir le cap avec le courage et de réaliser les réformes nécessaires, et d’accomplir cela en privilégiant toujours la justice sociale. Ce pays est prêt aux réformes ; il est prêt à les comprendre, à condition qu’elles soient expliquées, et qu’elles soient justes. C’est le cap du Gouvernement, et je n’en changerai pas !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
le débat est clos.
Le Premier ministre ayant décidé, en application de l’article 50-1 de la Constitution, que cette déclaration ferait l’objet d’un vote, je vais mettre aux voix cette déclaration sur le programme de stabilité de la France 2013-2017.
Dans les explications de vote, La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe de l’Union des démocrates.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, le groupe UDI s’est toujours situé, comme notre président de groupe l’a rappelé tout à l’heure, dans une opposition constructive. Monsieur le Premier ministre, nous avons fermement combattu la politique économique et financière menée par votre prédécesseur, Jean-Marc Ayrault, parce qu’elle était fondée sur une analyse erronée de la situation économique et sociale de notre pays. Toujours plus d’impôts et de cotisations sociales : on aboutit à un ras-le-bol fiscalo-social qui décourage le travail et pénalise la compétitivité des entreprises et l’investissement créateur de richesses et d’emplois. Mais aussi toujours plus de dépenses publiques, conformément à l’idée naïve de beaucoup de nos collègues de gauche selon laquelle plus la part des dépenses publiques dans la richesse nationale est élevée, plus la justice sociale est grande.
Aujourd’hui, monsieur le Premier ministre, vous nous proposez un pacte de responsabilité et un programme de stabilité qui visent à réaliser l’inverse de ce qu’a fait votre prédécesseur. Eh bien, monsieur le Premier ministre, le groupe UDI vous en félicite ! Nous vous félicitons de votre conversion, mais nous n’aurons pas la cruauté de citer l’évêque Rémi de Reims : « Brûle ce que tu as adoré… »
Plus prosaïquement, nous nous réjouissons de votre début de révolution culturelle, même si elle indispose l’aile gauche de votre majorité. Notre groupe a un certain nombre d’inquiétudes quant à la cohérence des 50 milliards d’euros d’économies sur les dépenses, des 33 milliards d’euros de baisses d’impôts et de cotisations sociales – dont 8 milliards d’euros sur le CICE –, et de la réduction rapide des déficits publics pour ramener le déficit structurel à un niveau proche de l’équilibre en 2017. En effet, monsieur le Premier ministre, votre programme ne comprend pas 50 milliards d’euros d’économies réelles : nous l’avons dit lorsque vos ministres sont venu nous le présenter la semaine dernière en commission. Il y a en réalité entre 30 et 35 milliards d’euros d’économies, et encore, en comptant large. Laissez-moi vous donner deux exemples pour illustrer cela.
Où est l’économie sur la masse de la fonction publique, lorsque vous maintenez encore pendant trois ans le gel du point d’indice, alors qu’il est déjà bloqué depuis quatre ans ? Vous maintenez une politique, vous ne réalisez pas une économie supplémentaire ! Si vous aviez décidé de baisser le point d’indice, cela aurait été une économie, mais vous ne le faites pas !
Deuxième exemple : vous nous dites qu’en moyenne, sur les trois prochaines années, les dépenses d’assurance-maladie augmenteront de 2 % par an. À combien s’élevait l’augmentation de ces dépenses au cours des trois dernières années ? À 2,6 % : votre économie représente 0,6 points ! Or 0,6 % de 180 milliards, cela fait environ 1,1 milliard par an, soit au total 3,3 milliards, pas plus !
Voici donc le message du groupe UDI : monsieur le Premier ministre, vos êtes un néo-converti, mais vous n’allez pas au bout de votre démarche. Vos économies réelles sont insuffisantes pour redresser la maison France.
En ce qui concerne les allégements de charges, expliquez-nous, monsieur le Premier ministre, comment vous pouvez à la fois dépenser 35 milliards supplémentaires et diminuer les recettes tirées des charges sociales de 35 milliards en ne réalisant que 30 à 35 milliards d’économies. Que reste-t-il donc pour la réduction du déficit ?
Vous essayez de vous en tirer en retenant des hypothèses de croissance économique totalement irréalistes : 1,7 % pour l’année prochaine et 2,25 % en 2016 et en 2017. Sur ce point, vous devriez écouter l’avis du Haut conseil des finances publiques.
Nous l’avons fait !
Or, que vous dit-il ? Qu’il est déjà optimiste de prévoir 1,7 % et que la probabilité de réaliser 2,25 % est proche de zéro.
La croissance structurelle de la France se situe, hélas ! entre 1 % et 1,2 %. Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, vous n’arriverez pas à redresser les comptes publics. Il vous faudra donc, au dernier moment, faire des économies supplémentaires.
Sourires.
Dans votre réponse, monsieur le Premier ministre, vous n’avez pas parlé des cinq réformes que demande le groupe UDI.
Parlons, par exemple, de la réforme territoriale. Dans ce que vous proposez, il n’y a pas de réforme territoriale. En effet, préconiser la suppression des départements en 2021, sans même préciser d’ailleurs à qui vous transférez leurs compétences, cela n’est pas très sérieux. Ce qui réduira sensiblement les coûts, c’est, non pas la division par deux du nombre de régions, mais des réformes de fond.
Que demande le groupe UDI depuis vingt ans ? Le régime unique pour tous les salariés – ceux du public et ceux du privé – et la mise en extinction de tous les régimes spéciaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
En conclusion, monsieur le Premier ministre, le groupe UDI, dans sa majorité, s’abstiendra sur ce vote indicatif.
Dans les deux mois qui viennent – je pense à la loi de finances rectificative du mois de juin et à la loi de financement de la Sécurité sociale rectificative –, nous voterons en fonction de l’intérêt supérieur du pays. Surtout, à partir de septembre, nous vous attendrons sur la loi de programmation des finances publiques pour les années 2015 à 2017, ainsi que les deux textes qui lui sont liés, à savoir la loi de finances et la loi de financement de la Sécurité sociale.
Voilà le message du groupe UDI.
Nous vous encourageons donc, monsieur le Premier ministre, mais ce que vous nous proposez aujourd’hui n’est pas à la hauteur de l’enjeu auquel notre pays est confronté.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
La parole est à M. Paul Giacobbi, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
J’ai déjà suffisamment indiqué, dans le débat, quelle est la position du groupe RRDP, avec sa loyauté, mais aussi ses réserves ou ses avertissements et quelques conditions.
Je dois dire que la suite du débat a conforté notre position. En effet, j’ai écouté avec beaucoup d’attention la position du groupe UDI, lequel manifeste un certain courage politique, mais tout de même, j’ai été surpris d’entendre dire que nous sommes à l’époque du Veau d’or. Nous n’y sommes plus, malheureusement – cela explique d’ailleurs la rigueur. Nous ne brûlons rien que nous ayons adoré : nous nous contentons, et cela n’est déjà pas mal, de prendre en compte le déroulement des événements.
J’ai aussi éprouvé une immense surprise – je le dis sans esprit partisan – en entendant l’opposition nous reprocher la dette. Mais à qui cette dette appartient-elle ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
En moyenne – la France n’échappe pas à la règle –, la maturité des dettes publiques des pays occidentaux est de sept ans, chiffre mythique s’il en est. Je vous le demande donc : à qui la dette des sept dernières années incombe-t-elle ? Nous acceptons la responsabilité de deux d’entre elles – encore que, vous savez bien qu’il en va des finances publiques comme d’un navire très lourd que l’on n’arrête pas aussi facilement. Mais, à tout le moins, acceptez la responsabilité des cinq autres années et de celles qui les ont précédées.
Or, non contents de nous transmettre le fardeau, vous dites que c’est nous qui en sommes à l’origine ! C’est tout de même un petit peu exagéré.
Dans vos réponses aux différentes interventions, vous avez eu, monsieur le Premier ministre, beaucoup de courage et vous avez fait preuve d’une grande netteté. Vous avez appelé cette assemblée à l’unité face à l’Europe, face au monde, face aux prêteurs, aux marchés et à la mondialisation de l’économie.
Or, dans d’autres pays, à commencer par l’Allemagne, on voit se réaliser, quoique d’une façon un peu différente – chacun agit selon son génie national – une unité autour d’un programme qui se rapproche beaucoup de ce que nous proposons aujourd’hui. La principale différence est qu’en Allemagne les deux grands partis se sont accordés et unis pour préparer et mettre en oeuvre un tel programme, malgré les difficultés qu’il pouvait y avoir à le faire à un moment où ils s’opposaient électoralement.
Or, ici, l’opposition se contente de nous transmettre le fardeau d’une dette que nous n’avons pas créée. Je dois dire qu’à cet égard l’état du débat – pour ne pas dire l’état de la France – est extraordinairement inquiétant. Alors que les députés de la majorité et le Gouvernement ont le courage de faire ce qui ne l’a pas été précédemment, il va tout de même falloir que finisse par se manifester un esprit de cohésion nationale, sans lequel personne – pas même les radicaux, monsieur le Premier ministre – n’arrivera à réformer ce pays comme il convient. Voilà la situation.
Tout à l’heure, je vous ai dit que le groupe RRDP soutenait positivement et loyalement le Gouvernement, malgré les réserves que j’ai formulées et ce que j’ai dit – que chacun sait d’ailleurs – sur le risque pesant sur la croissance et sur la crise spéculative qui nous pend au nez comme un sifflet de quatre sous, ou plutôt de 15 000 milliards. Eh bien, à l’issue du débat, nous sommes renforcés dans notre position. Je suis donc très heureux de vous dire à nouveau, monsieur le Premier ministre, que nous vous soutenons loyalement.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues,
non, nous n’oublions rien.
Ce n’est pas la première fois que notre assemblée est appelée à soutenir un plan du Gouvernement transmis à la Commission européenne dans le cadre de la mise en cohérence des politiques budgétaires des pays de la zone euro.
Ce n’est pas la première fois que l’on tente de nous faire croire à un choix déterminant qui définirait les contours de la majorité parlementaire. Rappelons-nous le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, le TSCG.
Ce n’est pas la première fois non plus que, mes collègues écologistes et moi-même, nous nous interrogeons sur la pertinence d’une démarche qui consiste à prendre des engagements dont la réalisation effective est plus qu’hypothétique.
Comment pourrions-nous ne pas nous interroger ? Il y a deux ans, ici même, lors du débat sur l’adoption du TSCG, François de Rugy, au nom de notre groupe, décrivait « une Europe en équilibre instable sur la ligne de crête qui sépare le désendettement raisonné de l’austérité contre-productive. » Qui pourrait prétendre sincèrement que nous sommes sortis de cette dialectique ?
C’est bien l’Europe qui fait défaut. Elle fait défaut en n’avançant pas assez sur la question pourtant essentielle de la mutualisation et de la garantie des dettes souveraines.
L’Europe fait défaut en continuant d’avancer à pas comptés, pour ne pas dire en piétinant, sur la mise en oeuvre d’une taxe sur les transactions financières, ou encore pour le contrôle des activités financières des banques.
L’Europe fait défaut en tardant à impulser, grâce à des investissements à l’échelle du continent, de vraies logiques industrielles.
Comment cela serait-il possible de ne pas s’interroger quand nous acceptons la réduction du budget européen à 1 % du PIB, tandis que nous procédons à des restrictions dans nos budgets nationaux ?
Mais cette Europe que nous espérons, cette Europe dont les peuples désespèrent, qui est-ce ?
S’agit-il de la commission de Bruxelles ? Certes. Toutefois, elle est en bout de course et le renouvellement prochain du Parlement européen lui donnera d’autres visages et, espérons-le, d’autres priorités.
S’agit-il du Conseil européen ? Certes. De ce point de vue, la majorité qu’y possèdent les gouvernements libéraux laisse peu d’espoir d’un réel changement à court terme.
S’agit-il du Parlement européen ? Aussi, même si ses pouvoirs et son mode de fonctionnement demeurent par trop faibles.
Mais cette Europe dont nous parlons, ce n’est pas seulement les autres : c’est nous, avant tout. Si l’Europe fait défaut, c’est parce que nous faisons défaut ; c’est nous qui la confortons en faisant semblant de croire à ses mécanismes de convergence qui donnent toujours lieu, in fine, à de petits arrangements avec la vérité.
Cette Europe-là, qui devient de plus en plus le bouc émissaire de nos propres insuffisances, cessons de l’entretenir par des décisions de circonstance.
Monsieur le Premier ministre, tout à l’heure, on a beaucoup parlé du contenu du plan de redressement des comptes publics qui accompagne cet engagement de trajectoire budgétaire. Nous avons noté les aménagements que vous lui avez apportés. Ils sont toujours bons à prendre, même si nous ne pouvons concevoir que certains nomment « concessions » les mesures que vous avez annoncées pour les petites retraites ou les salariés les plus précaires. Car la solidarité est peut-être une concession pour la technocratie, mais, pour les députés de cette majorité, et bien au-delà des bancs écologistes, elle est – je le sais – une conviction.
Nous ne nions pas la situation très difficile de nos finances publiques et la nécessité de résorber le déficit sans augmenter la pression fiscale. Nous sommes prêts, lors de l’examen des textes qui nous seront soumis d’ici à l’automne, à faire preuve de responsabilité et d’audace pour proposer des mesures concrètes qui répondent à ces défis. En luttant mieux contre la fraude et l’évasion fiscales ; en ciblant les allègements de cotisations pour les rendre plus efficaces et en les conditionnant à des pratiques de rémunération du capital et de politique salariale décentes ; en engageant la réforme de la fiscalité des ménages, annoncée par votre prédécesseur ; en rendant la fiscalité écologiquement intelligente, nous y parviendrons. Sur tous ces points, monsieur le Premier ministre, nous sommes prêts à travailler dans la majorité.
Mais ce n’est pas là-dessus que nous sommes appelés à voter aujourd’hui. Ce qui est en cause aujourd’hui, c’est la trajectoire, son rythme et ses effets sur notre économie, sa crédibilité et le message que nous envoyons à nos partenaires comme aux instances européennes. Ce message ne peut plus être celui des engagements pris en échange de perspectives hypothétiques. S’il s’agit de dire que c’est en respectant des engagements comptables de réduction du déficit que nous aurons plus de poids pour imposer nos points de vue sur la politique monétaire ou sur l’indispensable régulation de la finance, nous avons déjà donné ! Voilà pourquoi, monsieur le Premier ministre, une majorité des députés de notre groupe votera contre cette trajectoire budgétaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
La parole est à M. Gaby Charroux, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le débat de cet après-midi confirme nos craintes : la trajectoire des finances publiques que vous soumettez à notre examen, de manière consultative, à travers le pacte de responsabilité 2014-2017, est présentée comme la seule option pour affronter l’avenir.
À vous entendre, si nous ne nous plions pas face aux exigences de l’Union européenne, des grands groupes et de la finance internationale, point de salut pour notre pays et nos concitoyens. Si nous ne mettons pas en oeuvre, tant dans la réorganisation territoriale de la France que dans notre modèle social, les remèdes de la doxa libérale, nous enfoncerions notre pays dans une crise sans fin. C’est le « no alternative » dont parlait mon collègue Nicolas Sansu un peu plus tôt dans le débat.
Comment le comprendre ? Comment l’accepter ? Comment nos concitoyens qui souffrent du chômage, de la pauvreté, de la précarité et du renoncement aux soins vont-ils accepter de partager – selon votre expression – les efforts avec ceux qui s’enrichissent beaucoup plus chaque jour ?
En France, comme partout en Europe, c’est bien sûr l’austérité qui est à l’origine de toutes les récessions, de tous les mal-être, de tous les mal-vivre, mais aussi de toutes les contestations. Je pense, par exemple, aux 9 millions de Français qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté.
L’État a beau déverser, depuis des années et sous toutes les formes possibles, des milliards d’euros dans les caisses des grands groupes, cela n’a pas créé d’emploi – toutes les études le confirment –, pas plus que cela n’a empêché la moindre fermeture d’entreprise. Malgré cela, l’État poursuit dans cette voie ; vous versez au tonneau des Danaïdes 40 milliards d’euros supplémentaires, sans contrepartie ni discernement en fonction des secteurs et de la taille des entreprises.
Les collectivités territoriales sont les meilleurs remparts contre la crise, elles accompagnent chaque jour ses effets auprès de concitoyens de plus en plus fragilisés, dans une société qui se fragmente. Elles sont porteuses directement et indirectement de milliers d’emplois dans nos territoires. Elles investissent pour équiper le pays et dynamisent ainsi l’économie.
À vous entendre, il ne faut pas les encourager à poursuivre. Ainsi, on va créer des métropoles, regrouper des régions, supprimer les départements, fers de lance de la solidarité… Et comme si cela ne suffisait pas, les baisses en tous genres qu’elles ont connues ces dernières années vont encore se poursuivre, avec la suppression de 11 milliards d’euros de dotations.
Qui peut croire que nous allons améliorer notre système de santé en prélevant 10 milliards d’euros ? Il en est ainsi pour l’ensemble des propositions du pacte de responsabilité : 18 milliards d’économies pour l’État, après cinq ans de révision générale des politiques publiques et un discours libéral maintes fois entendu.
Ce qu’il faut – nous l’avons déclaré à l’occasion du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, nous l’avons dit lors de l’examen du CICE, nous l’avons répété lors de la discussion des projets de loi sur les retraites ou la sécurisation de l’emploi –, c’est réorienter l’économie, réorienter l’Europe, réorienter la Banque centrale européenne. Ce qu’il faut, c’est tout simplement mettre en oeuvre une politique de gauche, se donner les moyens du changement annoncé que nos concitoyens attendent, ou malheureusement, n’attendent plus.
La trajectoire que vous donnez aux finances publiques pour les années à venir, le contenu du pacte de responsabilité et de solidarité, enterrent définitivement le discours du Bourget, lequel n’a franchi ni le mur du son, ni ceux de notre assemblée.
Monsieur le Premier ministre, chers collègues, vous comprendrez bien que ce ne sont pas les quelques non-reculs de ce programme qui nous feront changer d’avis. Les députés du Front de Gauche voteront donc résolument contre ce programme de stabilité.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, chers collègues, ce vote est décisif et nous engage. Il engage l’avenir de la France, il conditionne la réussite de l’action de redressement du pays, entamée en juin 2012 sous l’impulsion du Président de la République. Notre économie et nos finances publiques ont été gravement dégradées sous les deux précédents quinquennats et la France, cette grande puissance mondiale, fait face à un risque de décrochement qui pourrait être fatal à notre modèle social.
Le Gouvernement, vous-même, monsieur le Premier ministre, et notre assemblée doivent être à la hauteur de cette situation. Telle est notre responsabilité à l’égard de l’avenir. Parce que ce vote engage la France, votre gouvernement et notre assemblée, le groupe SRC, au nom duquel je m’exprime, votera la déclaration que vous nous avez présentée.
L’attente et les inquiétudes de nos concitoyens sont fortes et nous devons y répondre : le chômage, les fins de mois difficiles, l’exclusion sociale, le logement, le sentiment de payer beaucoup d’impôts… Et puis, au-delà de la crise économique et sociale, l’inquiétude, la peur d’un monde qui change et la tentation du repli, qui mine les fondements de notre société et le vivre ensemble, lequel a été et devra encore être demain la force de notre République.
Le programme que vous nous présentez réaffirme cette priorité essentielle qu’est, pour nous socialistes, l’emploi. L’emploi, pour redresser notre pays dans la justice. Recréer de l’emploi et faire reculer le chômage est d’ailleurs la première chose à faire pour redonner du pouvoir d’achat à nos concitoyens, et d’abord à ceux qui n’en ont pas.
Le pacte de responsabilité et de solidarité, dont la mise en oeuvre, pour être efficace, doit être la plus rapide possible, y répond. Il y répond par les mesures d’allègements fiscaux et sociaux de 5 milliards d’euros en faveur des ménages. Ces mesures de justice sont aussi des mesures d’efficacité économique pour soutenir la consommation, donc l’activité et l’emploi. Il y répond par des mesures en faveur de nos entreprises et d’abord de nos PME et ETI, pour leur permettre de retrouver de la compétitivité, d’innover, d’investir et d’embaucher. Ces mesures sont d’ampleur – à la mesure de la crise que nous traversons – elles sont nécessaires, elles devront être efficaces.
Cet effort considérable de la nation en direction de nos entreprises doit servir le pays et lui permettre de gagner la bataille de la compétitivité. Il ne doit pas être détourné de cet objectif et nous serons plus que vigilants sur ce point, vous le savez. J’ai noté vos engagements sur le suivi et l’évaluation de ces mesures, auxquels le Parlement sera étroitement associé.
Le pacte de responsabilité et de solidarité est un puissant levier pour la croissance ; c’est aussi une puissante incitation à la mobilisation de tous – entreprises, salariés, syndicats et patronat, puissance publique –, une mobilisation qui doit pouvoir s’appuyer sur la confiance.
Nous le savons, cette confiance est indispensable, notamment avec nos partenaires européens pour permettre une réorientation des politiques européennes, sans laquelle nous ne pourrons réussir, ni en France ni en Europe. C’est tout l’enjeu de l’élection du 25 mai, mais cela commence aujourd’hui car ce vote est aussi un vote sur la crédibilité de la France en Europe et sur le respect de ses engagements.
Réorienter l’Europe ne se fera qu’avec une France forte et respectée. Après des années d’errements dans la gestion de nos finances publiques, qui ont vu s’envoler les déficits et la dette entre 2002 et 2012, nous devons retrouver cette crédibilité et cette confiance en Europe pour être, non seulement écoutés, mais surtout entendus et suivis par nos partenaires.
Nous avons aussi une exigence et un devoir de vérité vis-à-vis de nos concitoyens et vis-à-vis de nous-mêmes. Il n’y aura pas de retour de la croissance sans redressement des comptes publics, pas davantage de redressement de nos comptes publics sans croissance.
C’est donc tout l’objet de la trajectoire d’évolution de notre déficit public et de notre dette d’ici 2017 que traduit ce programme de stabilité. Je ne saurais trop insister sur cette véritable bombe à retardement que constituent les 900 milliards d’euros de dettes accumulées entre 2002 et 2012, et la déflagration qu’entraînerait une forte augmentation des intérêts de la dette, qui s’élèvent déjà à 45 milliards d’euros. Cela se compte tout de suite en milliards, très rapidement en dizaine de milliards.
C’est pourquoi il nous faut rompre avec l’augmentation continue de la dépense publique, qu’il nous faut dépenser moins et mieux. C’est ce que nous demandent en priorité nos concitoyens. 50 milliards d’euros, c’est un effort jamais encore réalisé, mais c’est un effort soutenable, qui relève du sérieux budgétaire et non, comme on l’entend ici ou là, d’une politique de rigueur, ou pire encore, d’une politique d’austérité.
Ces mesures d’économies, dès lors qu’elles respectent nos objectifs de justice sociale et qu’elles reposent sur des réformes structurelles trop longtemps différées, sont indispensables. Elles sont possibles.
Je veux donc, au nom du groupe SRC, saluer le dialogue naturel et constructif entre vous-même, monsieur le Premier ministre, votre gouvernement et notre majorité parlementaire, pour que ces économies et les efforts demandés à nos concitoyens soient justement répartis.
Je salue la méthode de dialogue, comme son résultat et les engagements que vous avez pris sur les petites retraites, les ménages modestes et le plan pauvreté ou vis-à-vis des fonctionnaires, à qui un effort important est demandé depuis plusieurs années.
Monsieur le Premier ministre, après un vote de confiance sur votre déclaration de politique générale le 8 avril, le groupe SRC vous renouvellera par son vote sa confiance pour conduire, avec un courage et une détermination dont vous venez de faire preuve et que je veux saluer, les politiques qui donneront un avenir à la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le moins que l’on puisse dire est que M.Valls vient de se livrer à une critique d’une sévérité inouïe du gouvernement dont il a fait partie. Car critiquer l’importance de la dette, le montant des impôts ou le dérapage des dépenses publiques, c’est se retourner sur les deux années qui viennent de s’écouler.
Les lois de finances successives – qu’il s’agisse de la loi de finances rectificative de 2012, de la loi de finances initiale pour 2013, de la loi de finances rectificative de 2013 ou de la loi de finances pour 2014 – n’ont cessé d’augmenter la dépense publique.
Oui, monsieur le Premier ministre, vous avez jugé quelque peu calamiteuse cette politique et l’UMP vous rejoindra sur ce point.
En moins de deux ans, le parti socialiste aura réussi à augmenter les impôts des Français de l’ordre de 50 milliards d’euros.
Et alors qu’il explique qu’il faut réduire la dépense publique, il aura supprimé la réforme de l’aide médicale d’État et créé des postes de fonctionnaires.
Il aura réformé les retraites de telle façon que la France est le seul pays d’Europe à connaître une augmentation des cotisations et une augmentation des prélèvements.
Oui, c’est à une critique sévère de votre prédécesseur que vous venez de vous livrer. Le résultat de cette politique est aujourd’hui tangible, vous l’avez rappelé : la France détient le record des prélèvements obligatoires, qui s’approchent de 50 %, et de la dépense publique, qui frise les 57 %. Le déficit, qui atteint les 4,3 % du PIB et le taux de chômage constituent aussi des records.
Ces résultats vous mettent évidemment en difficulté avec Bruxelles, où un certain nombre de ministres se sont rendus. Ils y sont partis en annonçant qu’ils obtiendraient des délais et en sont revenus en expliquant qu’ils ne les avaient pas demandés. Bruxelles vous met aujourd’hui au ban, tout comme les marchés, qui annoncent d’ores et déjà une tension sur les taux d’intérêt. En 2015, la France sera le premier pays emprunteur de la zone euro. Le moindre dérapage des taux, de 1 %, coûtera 3 milliards au budget de la nation.
Monsieur le Premier ministre, une belle occasion vous était donnée aujourd’hui de dire la vérité aux Français. Ainsi, vous auriez pu cesser de leur mentir sur l’impôt, en disant aux ménages que les choses s’amélioreront sous votre autorité : en 2014, ils paieront 4 milliards d’impôts supplémentaires, avec le déplafonnement des allocations familiales, la fiscalisation, cette fois complète, des heures supplémentaires. Les impôts locaux devraient eux aussi augmenter, du fait de l’aménagement du temps scolaire que vous imposez aux collectivités et de la diminution des dotations dont vous les gratifiez.
Ainsi, vous auriez pu expliquer aux Français que l’augmentation tendancielle de la dépense publique est désormais de 35 milliards d’euros, aune à laquelle il convient de mesurer les 50 milliards d’euros d’économies que vous estimez devoir faire.
Voilà pourquoi l’UMP considère que votre programme de stabilité est un leurre. Voilà pourquoi l’UMP vous répète que le seul moyen de rétablir la situation des finances publiques est de mettre en oeuvre – enfin ! – des réformes structurelles.
Les palinodies de votre famille politique de ces dernières quarante-huit heures vous ont fait reculer. Elles vous inquiètent quant à la tenue de votre majorité, mais elles inquiètent aussi l’Europe et les marchés financiers, qui vous observent.
Oui, monsieur le Premier ministre, ce programme de stabilité ne traduit pas la vérité ; il n’est pas davantage la marque d’un courage ; il ne peut inviter à la confiance. C’est la raison pour laquelle l’UMP ne le votera pas.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Explications de vote
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt heures quinze.
La séance est reprise.
Voici le résultat du scrutin sur la déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité pour 2014-2017 :
Nombre de votants 564
Nombre de suffrages exprimés 497
Majorité absolue 249
Pour l’adoption 265
Contre 232
L’Assemblée nationale a approuvé la déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité pour 2014-2017.
Applaudissements prolongés sur les bancs des groupes SRC et RRDP, dont les députés se lèvent.
Merci monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, merci à la majorité pour ce soutien qui est important. Certains se demandaient pourquoi procéder à ce vote. C’est un respect que nous devons au Parlement, quand il s’agit de faire des choix qui engagent la France devant les Français, qui engagent aussi sa crédibilité devant l’Europe. Dans cette période que notre pays traverse, il était essentiel que, sur la base du programme que nous avons présenté, un vote ait lieu ; je remercie à cet égard les ministres des finances et du budget, qui ont particulièrement suivi ce travail, ainsi que le ministre en charge des relations avec le Parlement.
Ce vote témoigne que la majorité, au-delà des débats qui la traversent, approuve ce projet et ce programme. Je reste convaincu qu’il s’agit là d’un acte fondateur important pour la suite du quinquennat du Président de la République. Vous avez toute ma reconnaissance.
Nous vivons un moment essentiel pour notre pays et je ne doute pas un seul instant que les Français sauront en tirer, eux aussi, toutes les conclusions.
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Projet de loi relatif aux activités privées de protection des navires.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures vingt.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron