La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, certains débats demandent de la hauteur de vue, de la clarté et de la précision.
Monsieur le Premier ministre, nous vous pensions prêt à gouverner. C'était une erreur mais, tant qu'à faire, le choix de Louis Gallois était un bon choix. N'est-ce pas lui qui préconisait dès le 7 juillet 2012 à Aix-en-Provence un choc de compétitivité massif, un transfert par allègement des charges sociales de 30 à 50 milliards d'euros, en indiquant qu'il était temps d'arrêter les demi-mesures ?
Monsieur le Premier ministre, vous avez réalisé le choc de compétitivité à l'époque, puisque contrairement aux suggestions de Louis Gallois, vous avez aggravé les charges sur les entreprises d'environ 30 milliards d'euros depuis que vous êtes entré en fonction ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)
Cependant, ce fameux rapport est passionnant et instructif. Que dit-il ? D'abord, il vous adresse une première supplique : « De grâce, arrêtez de clouer au pilori les dirigeants des entreprises françaises, et surtout, arrêtez l'instabilité, préservez les mesures essentielles qui ont été prises par le gouvernement précédent ! » (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais ce rapport préconise surtout un allègement immédiat des charges de 30 milliards d'euros sur un an, un dispositif simple compensé par une assiette large.
Monsieur le Premier ministre, qu'avons-nous entendu ce matin ? Rien pour 2012 ! Rien pour 2013 ! Peut-être 10 milliards d'euros pour 2014, mais avec deux comités de suivi : l'un interne à l'entreprise,…
…l'autre par branche. Monsieur le Premier ministre, arrêtez cette usine à gaz ! Les entreprises ont besoin de clarté. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)
Monsieur le président Borloo, j'ai présenté ce matin le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi…
Un député du groupe UMP. Cela ne veut rien dire !
…qui s'attaque au coeur du problème, c'est-à-dire la relance du moteur économique de la France. J'avais annoncé ce pacte dans les mêmes termes le 3 juillet lors de ma déclaration de politique générale. Maintenant, nous y sommes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)
J'ai demandé dès le 11 juillet un rapport indépendant à Louis Gallois. Chacun connaît son intégrité, son sens de l'État et son expérience de grand patron d'industrie.
Mesdames et messieurs les députés, ce rapport est le plus sévère et le plus implacable sur le décrochage de notre économie et de notre industrie depuis dix ans. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste. – Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
En effet, notre économie a décroché…
…et les entreprises françaises sont entrées dans un cercle vicieux qui les conduit à comprimer les coûts sans pouvoir innover ni investir. C'est pourquoi il était urgent, conformément aux engagements pris et annoncés, que le Gouvernement prenne ses responsabilités. Il le fait. Le rapport Gallois sera appliqué : tout le rapport Gallois, et plus que le rapport Gallois !
Un député du groupe UDI. C'est faux !
En effet, il s'agit de retrouver le chemin de l'investissement, de l'innovation et de la création d'emplois en France. Pour cela, il est nécessaire de redonner de la marge de manoeuvre à nos entreprises. C'est ce que le Gouvernement a décidé.
La première mesure est sans précédent : il s'agit de l'allègement de 20 milliards d'euros du coût du travail – soit l'équivalent de 6 % du coût du travail –, mis en oeuvre sur trois ans par le biais d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi,…
…utilisable par les entreprises dès 2013 pour 10 milliards d'euros.
Il n'y a pas plus simple que le crédit d'impôt.
Il n'y a pas plus rapide que de l'utiliser. Les entreprises l'ont compris, et celles qui ne l'ont pas encore compris s'en rendront compte. Toutes les entreprises seront concernées : celles qui paient des impôts et celles qui n'en paient pas, y compris les travailleurs indépendants.
Je viens de le redire : il s'agit d'une mesure simple. C'est une mesure que Louis Gallois a considérée comme plus efficace que ce qu'il proposait lui-même dans son rapport pour relancer l'investissement et la création d'emplois dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)
Il faut bien sûr financer cette mesure. Puisqu'elle coûte 20 milliards d'euros en vitesse de croisière, elle sera d'abord financée par moitié par des économies. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Les économies que nous proposons visent à moderniser notre service public, nos administrations publiques, par le dialogue.
Dès 2013, nous nous attaquerons à ce chantier par la concertation, et non par un diktat décidé d'en haut. Nous voulons préserver nos services publics, et non les laisser se détruire à petit feu. 10 milliards d'euros d'économies représentent moins de 1 % de la dépense publique française.
Cet objectif est à notre portée si nous le voulons. Voilà le chantier que nous allons engager.
Plusieurs députés du groupe UMP. Bla bla bla !
Pour l'autre moitié du financement, pour les 10 autres milliards d'euros, il y a effectivement un appel à la TVA (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP). Mais celui-ci concerne seulement un tiers du financement, et il sera réalisé par une modulation à partir du 1er janvier 2014 et non à partir du 1er octobre 2012 comme vous l'aviez décidé pour 12 milliards d'euros prélevés sur le pouvoir d'achat des ménages. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
À partir du 1er janvier 2014, la TVA sera modulée. Le taux maximum augmentera de 0,4 point, le taux intermédiaire passera de 7 à 10 %, et le taux minimal baissera de 0,5 point pour l'alimentation et les dépenses d'énergie, qui constituent l'un des postes les plus importants dans le budget des ménages. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)
En outre, après la conférence sur la transition énergétique,…
…une fiscalité écologique sera mise en oeuvre en 2016. C'est un plan cohérent, complet, qui n'est bien sûr pas limité à la question du coût du travail, mais qui lance un signe fort, que vous n'avez jamais eu le courage de réaliser et que nous entreprenons. (Protestations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Redonner des marges de manoeuvre à nos entreprises est une nécessité, une ardente obligation. Redresser la France, préparer l'avenir, en particulier celui de la jeunesse, c'est ce que le Gouvernement a décidé ce matin avec courage, détermination et sans ambiguïté. Je ne doute pas de la confiance de la majorité pour réussir ce changement. (Mmes et MM. les députés des groupes SRC, RRDP et écologiste, ainsi que quelques députés du groupe GDR, se lèvent et applaudissent.)
Compétitivité
Ma question s'adresse au Premier ministre et porte sur les suites du rapport Gallois. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Sur le constat, je vous invite, chers collègues de l'opposition, à un peu de retenue et d'humilité dans vos commentaires. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.) Le rapport Gallois est d'une précision implacable…
Erreur ! Signet non défini.. …à l'égard de la politique que vous avez menée depuis dix ans. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.) « Le décrochage de l'industrie française s'est accéléré au cours de la dernière décennie. » Voilà ce que dit le rapport Gallois…
…sur votre politique, celle que vous avez menée pendant dix ans. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mais au-delà d'un constat partagé, d'un diagnostic que nous jugeons partiel, et de pistes de travail dont nous nous félicitons que certaines aient d'ores et déjà été abandonnées,…
Plusieurs députés du groupe UMP. Lesquelles ?
…il y a les décisions que vous avez commencé à annoncer ce matin. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Vous avez notamment annoncé des crédits d'impôt qu'il va falloir financer. Quitte à s'inspirer des expériences réussies dans d'autres pays, notre groupe tient à rappeler que l'une des priorités devait être la fiscalité écologique. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.) La fiscalité environnementale,celle qui taxe les usages néfastes pour la planète et incite à des transitions, est dans notre pays très inférieure à celle constatée chez nos homologues européens dont vous vantez si souvent la compétitivité.
Les propositions avancées par M. Gallois dans son rapport en la matière sont très peu explicites, c'est le moins que l'on puisse dire.
Pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, nous indiquer selon quelles modalités et quel calendrier le Gouvernement entend mettre en oeuvre les mesures annoncées ?
Comment comptez-vous intégrer la fiscalité écologique dans le débat sur la compétitivité économique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)
Monsieur le président François de Rugy, vous avez déjà entendu une partie de la réponse. J'ai évoqué les mesures qui permettent d'alléger le coût du travail, non pas comme un problème en soi…
Erreur ! Signet non défini. et M. Claude Goasguen. . C'est laborieux !
Le rapport Gallois est sur ce point explicite : la question du coût du travail est posée essentiellement pour redonner de la marge de manoeuvre aux entreprises pour investir, innover et créer des emplois. Celles-ci sont, pour la plupart d'entre elles, dans l'impasse totale, et en danger. Il avait préconisé de réagir vite, et c'est ce que fait le Gouvernement.
Plusieurs députés du groupe UMP. En 2014 !
Pour ce qui est du financement, les entreprises, qui savent très bien ce qu'est la prévision des comptes, pourront intégrer le crédit d'impôt dès 2013.
Le financement se fera par étapes avec une partie de fiscalité écologique, que vous venez d'évoquer à l'instant. Mais je ne souhaite pas que cette fiscalité écologique soit mise en oeuvre de façon unilatérale sans laisser le temps à la discussion : ce sera précisément l'objet du débat sur la transition énergétique qui va commencer dans quelques jours, et je sais que vous y participerez.
Pour ce qui est de l'effort fiscal, je tiens à préciser qu'en 2013, quelle que soit la fiscalité, aucun impôt supplémentaire ne sera demandé aux contribuables français. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce n'est qu'à partir de 2014 que l'effet TVA commencera à jouer.
Quant à la compétitivité, vous le savez bien, monsieur de Rugy, elle ne se limite pas à cette question fiscale et à celle du coût du travail. Elle doit être associée à une volonté très forte de promouvoir des politiques de filières où les grands groupes, les PME, les laboratoires de recherche publics et privés, la formation professionnelle, le dialogue et la négociation sociale, s'associent dans un même élan pour développer des produits de meilleure qualité, de plus haut de gamme, et qui s'intéressent à toutes les filières – dont la filière de la transition énergétique, que le Gouvernement et moi-même jugeons porteuse et créatrice d'emplois pour l'avenir.
C'est tout cela : dialogue social, compétitivité, nouvelles filières, participation au financement de notre système de protection sociale…
…que nous serons capables de mettre en oeuvre dans ce nouveau modèle français que la France attend. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Compétitivité
La parole est à M. Franck Riester, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Alors en pleine campagne électorale, François Hollande déclarait que toute hausse de la TVA était « inopportune, injuste, et inconséquente. »
Plusieurs députés du groupe UMP. Voilà !
En juillet, vous supprimiez la TVA compétitivité que nous avions votée, soit 13 milliards d'euros de baisse annuelle de charges que vous avez annulés : un véritable coup de poignard dans le dos des entreprises et des salariés de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le 27 septembre dernier, vous affirmiez solennellement, monsieur le Premier ministre, qu'il n'y aurait « pas d'augmentation de la TVA ».
Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !
Aujourd'hui, six mois après l'élection de François Hollande, c'est une nouvelle promesse de campagne que vous piétinez !
Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !
L'augmentation de la TVA, que vous avez tant brocardée, aura donc bien lieu : vous allez bel et bien l'augmenter. Où est votre cohérence, monsieur le Premier ministre ?
Plusieurs députés du groupe UMP. Il n'y en a pas !
Où sont vos convictions ?
En vérité, cet énième reniement illustre une nouvelle fois que François Hollande a été élu sur une imposture. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Sans aucun projet, il n'a cessé de mentir aux Français ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Alors, certes, vous avez commandé un rapport sur la compétitivité à M. Gallois, dont d'ailleurs nous partageons un grand nombre de préconisations. Mais pour quelles décisions ? Vous ne suivez pas ce rapport, contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le Premier ministre ! Vos décisions ne sont absolument pas à la hauteur des enjeux !
Au lieu de baisser massivement et immédiatement les charges des entreprises, vous nous sortez du chapeau une nouvelle usine à gaz bureaucratique estampillée socialiste : le crédit d'impôt… Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Et surtout, quelle folie d'attendre une montée en charge sur trois ans, alors que c'est maintenant qu'il faut agir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Face à la crise, et face au choc fiscal que vous infligez à nos compatriotes, notre pays a besoin d'une stratégie économique et sociale claire, notre pays a besoin d'un choc de compétitivité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, on ne peut s'empêcher de sourire en vous entendant parler de compétitivité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Comme l'a dit le Premier ministre, lisez ce rapport Gallois que vous vantez tant : ce n'est pas seulement un diagnostic, c'est un réquisitoire contre ce que vous n'avez pas fait… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
…un réquisitoire contre l'état du pays tel que vous le laissez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Un seul chiffre suffit à mesurer notre déficit de compétitivité : ces 70 milliards d'euros de déficit de notre commerce extérieur, là où l'Allemagne avec la même monnaie, la même crise, dégage 160 milliards d'euros d'excédents !
Vous n'avez pas de leçons à nous donner. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Car ce que nous faisons, ce que fait le Premier ministre, ce que fait le Gouvernement, c'est l'oeuvre de redressement que vous n'avez pas fait.
Je souris aussi en vous entendant parler de la TVA…
…car je me souviens que vous aviez fait voter à la fin du quinquennat précédent la TVA à jouissance différée, à hauteur de 12 milliards d'euros et sur le taux supérieur.
Eh bien, voyez-vous, nous, ce que nous sommes en train de faire, c'est un effort sans précédent, courageux, ambitieux, global sur la compétitivité,… (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
…à la fois sur la compétitivité hors coût et sur la compétitivité coût. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous faisons ce que vous n'avez pas fait ! Et les 20 milliards, ce sont bien ceux qu'évoque Louis Gallois : il parle bien de 20 milliards sur la compétitivité et de 10 milliards sur le financement de la protection sociale – ce sera examiné par ailleurs.
Ce crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, central, c'est une mesure simple : elle ressemble au crédit d'impôt recherche. C'est une mesure d'effet immédiat : dès 2013.
Par son financement, elle nous permet de ne pas ponctionner le pouvoir d'achat en 2013. Nous faisons cet effort, parce que nous voulons redresser le pays. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Plutôt que de vociférer, plutôt que de vous renier, plutôt que de donner des leçons (Mêmes mouvements), vous devriez regarder en face ce que vous avez fait et approuver ce que fait ce Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Compétitivité
La parole est à Mme Annick Lepetit, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, hier, Louis Gallois remettait le rapport que vous lui aviez commandé ; aujourd'hui, vous nous présentez le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi qui s'en inspire largement. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Le constat est partagé par tous : la France a reculé dans bien des domaines après dix ans de gouvernements de droite. C'est pour cela qu'il y a urgence à agir afin de sortir de la spirale du déclin.
Les lois votées ces derniers mois, que ce soit en matière de finances de l'État ou de budget de la sécurité sociale, ont déjà permis de replacer l'économie de la France sur de bons rails. (Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.)
Alors, vous avez raison d'aller plus loin, monsieur le Premier Ministre, et de nous présenter une stratégie globale pour reconstruire notre compétitivité, relancer la croissance et créer des emplois.
Vous n'êtes pas dans les effets d'annonce, mais dans le concret. Vous traitez toutes les dimensions du problème, que ce soit le soutien aux projets innovants, aux PME, à l'exportation, ou encore la montée en gamme des produits et le renforcement de la formation professionnelle. On est bien loin de l'enterrement du rapport Gallois prophétisé par quelques esprits chagrins.
Oui, chers collègues de l'opposition, la compétitivité était pour vous un sujet de dissertation ; elle est pour nous un levier d'action que nous plaçons au service de nos concitoyens. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous expliquer comment le nouveau modèle français que vous proposez va redresser l'économie de notre pays dans la justice et la solidarité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame Lepetit, vous avez raison de replacer les décisions qui sont prises aujourd'hui dans une cohérence d'ensemble. Nous sommes en effet en train de répondre à un déficit qui est à la fois un déficit de croissance – la croissance française est trop faible –, un déficit de crédibilité, …
…notamment de crédibilité budgétaire car on nous a laissé des déficits supérieurs à 5 %, et un déficit de compétitivité comme l'a montré le rapport Gallois dont la partie diagnostic devrait constituer pour tous une base pour comprendre ce que la France doit maintenant faire.
Depuis son arrivée aux responsabilités, le Gouvernement s'attaque à tous ces déficits à la fois. Aujourd'hui, nous en sommes à la troisième étape d'une stratégie qui est une stratégie d'ensemble.
D'abord, nous avons voulu faire en sorte que le sérieux budgétaire soit respecté dans ce pays : c'était une nécessité. C'est une question de crédibilité et de qualité de la signature. Je suis fier que nous puissions emprunter à des taux bas, ce qui est bon à la fois pour l'État et pour nos entreprises.
Ensuite, nous avons voulu réorienter la construction européenne, faire en sorte que l'Europe parle désormais de croissance, qu'elle soit capable de parler d'union bancaire.
Enfin, nous nous attaquons maintenant à ce grand défi qui est celui de la compétitivité avec un effort sans précédent qui concerne aussi bien la compétitivité hors coût que la compétitivité-coût.
Sur cette base, ce que nous ferons, c'est créer des emplois. La mesure annoncée par le Premier ministre créera plusieurs centaines de milliers d'emplois, elle permettra d'élever le PIB pendant ce quinquennat.
Nous voulons reconquérir la croissance, nous voulons reconquérir l'emploi et nous le faisons dans la justice. C'est cette démarche-là que les Français comprennent, quelles que soient sur ma droite les vociférations ou les plaintes. Nous avons un cap, nous avons une cohérence, et c'est ainsi que nous allons réussir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Compétitivité
La parole est à Mme Sandrine Hurel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre du redressement productif, depuis six mois, vous êtes mobilisé chaque instant, autour du Premier Ministre, pour sauver, redresser et développer l'industrie française. Votre détermination est d'autant plus nécessaire que le bilan du précédent gouvernement en la matière est accablant : le déficit commercial a atteint un niveau record de 70 milliards d'euros ; 750 000 emplois industriels ont été détruits en dix ans ; la part de notre industrie dans la valeur ajoutée a chuté de 18 % à 12 % et la France a compté en cinq ans un million de chômeurs de plus.
Les plans sociaux, dissimulés sous le tapis de l'aveu même de l'ancien Premier ministre, laissent plusieurs centaines de salariés et leurs familles, dans l'incertitude quant à leur avenir.
Il suffit de lire le rapport Gallois, véritable réquisitoire contre la politique industrielle menée par les gouvernements de droite, mesdames, messieurs de l'opposition, pour se rendre compte de l'état extrêmement préoccupant de la situation de l'industrie française. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Comble de l'ironie, la droite, qui prétend nous donner des leçons, se félicite d'un rapport qui fustige son bilan et brocarde son inaction ! C'est la droite qui avait intérêt à ce que le rapport Gallois soit enterré.
Depuis dix ans, notre compétitivité industrielle régresse, signe d'une perte de compétitivité globale de notre économie, ce qui déséquilibre nos finances publiques et fragilise notre protection sociale.
Vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, en faveur de l'emploi et du redressement productif de la France avec notamment la mise en oeuvre de 150 000 emplois d'avenir, 500 000 contrats de génération et la création de la banque publique d'investissement pour soutenir nos entreprises. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Monsieur le ministre, j'ai eu le plaisir, en septembre dernier, de vous recevoir («Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), avec mon collègue Guillaume Bachelay, à l'usine Renault de Cléon pour conforter les orientations industrielles de cette grande entreprise en Seine-Maritime. Hier, le président de Renault et le président de la région Haute-Normandie et vous-même avez signé un accord pour relancer la marque Alpine sur le site industriel de Dieppe.
Voilà autant d'exemples concrets de votre politique.
Vous avez raison, madame la députée, les enjeux de la reconstruction de notre industrie en France nécessitent la mobilisation partout de tous en même temps : des organisations syndicales, du patronat, des collectivités locales, du Gouvernement, de la droite et de la gauche. Tout le monde doit travailler à cette reconstruction.
Nous le faisons là où nous perdons des savoir-faire industriels : Petroplus comme Florange, nous nous battons pour aller chercher des repreneurs. C'est une lutte d'ampleur et de nécessité nationale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Il faut faire encore plus, car le rapport de Louis Gallois, qui devrait être lu dans toutes les chaumières de France, emploie les mots qu'il faut : « côte d'alerte », « atteinte », « décrochage industriel », « situation d'urgence », « drame industriel », « climat de méfiance ». C'est finalement la peinture des dix années qui viennent de s'écouler de laisser-faire et de ne rien faire en matière industrielle – il y a des responsables à cela. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Maintenant, il faut prendre le taureau par les cornes. Dans la mondialisation déloyale que le Président de la République vient de condamner à Vientiane au Laos, nous n'avons pas l'intention de nous laisser faire et de ne pas nous organiser. Nous n'avons pas vocation à toujours encaisser les buts pour n'en jamais mettre dans le camp de l'économie, de la croissance et de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Alors, oui, les propositions issues du rapport Gallois présentées par M. le Premier ministre, sous son arbitrage et autorité, sont courageuses et difficiles. Elles apportent de l'oxygène aux entreprises, surtout, elles impliquent des contreparties. Nous défendons, c'est vrai, le donnant-donnant. L'argent que la nation met dans les entreprises, nous voulons le connaître et vérifier son usage. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Compétitivité
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, M. Gallois vous a remis hier le rapport sur la compétitivité que vous lui aviez commandé.
Ce document montre avant tout que vous faites fausse route depuis six mois (« Et vous depuis dix ans ! » sur les bancs du groupe SRC.) et que les mesures en matière de politique économique et de fiscalité du précédent gouvernement méritent d'être poursuivies et amplifiées,… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Dix ans, dix ans ! » sur les bancs du groupe SRC.)
…alors que vous n'avez eu de cesse que de les détricoter. Et cette fois-ci, ce n'est pas quelqu'un de l'UMP qui l'écrit !
Alors que ce rapport recommande dans ses propositions une thérapie de choc pour l'industrie française, en tablant sur une réduction de 20 milliards des cotisations patronales et une diminution de 10 milliards des cotisations salariales, vous avez indiqué que vous ne l'appliqueriez qu'à dose homéopathique, sans créer de véritable choc économique et de compétitivité.
Les faits sont têtus. Avec notre réforme, à laquelle vous avez fait référence tout à l'heure, la TVA pour la compétitivité serait déjà en vigueur depuis le 1er octobre dernier. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Avec vous, le reniement, c'est maintenant ! Et de plus, la compétitivité, ce n'est pas pour aujourd'hui ! Vous avez perdu du temps ; la France a perdu beaucoup de temps ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Dix ans ! Dix ans ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
Vous allez faire trop peu et trop tard. La France a besoin d'un véritable choc de confiance, et non pas de votre défiance. Aussi la représentation nationale voudrait-elle savoir quelles mesures vous comptez prendre pour créer un véritable choc de compétitivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, il y a quelques instants, je souriais ; mais maintenant, je souris deux fois !
Je voudrais d'abord vous inciter à lire le rapport Gallois.
Il faut quand même un optimisme chevillé au corps, ou une mauvaise foi caractérisée, pour y voir la confirmation de ce que vous n'avez pas fait, et encore plus de ce que vous avez fait ! Car, je le redis, c'est un réquisitoire accablant, qui dénonce la façon dont la compétitivité en France a reculé pendant dix ans – D'où ma deuxième raison de sourire : vous nous sommez en effet de réaliser en six mois ce que vous n'avez pas fait en dix ans, ou de réparer en quelques jours ce que vous avez détruit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Voilà où est la vérité, et vous feriez mieux, encore une fois, d'observer une petite période de pudeur ou de latence.
Sur le fond, vous feriez mieux également de saluer et de reconnaître ce que ce gouvernement accomplit. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) M. Gallois lui-même a reconnu ce matin que le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi était la meilleure traduction de son rapport, et que l'effort de 20 milliards d'euros était très précisément à la hauteur de ce qu'il avait proposé. Il a lui-même salué l'effort global du Gouvernement pour reprendre l'ensemble de ses propositions et en ajouter d'autres, ainsi que sa capacité à cibler les priorités pour les accomplir dans la durée.
Notre augmentation de la TVA n'est pas la vôtre : nous, nous modulons les taux. Nous ramenons ainsi à 5 % le taux réduit sur les produits de première nécessité. Il y a toujours chez nous une notion de justice. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
J'espère donc, monsieur le député, que dans la suite de cette séance, nous entendrons autre chose, et que vous vous rendrez compte que vous vous enferrez au fur et à mesure qu'elle dure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Ma question s'adresse à M. Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Je vous invite, l'espace d'un instant, à prendre de la hauteur…
Le 15 novembre 2011, la ministre de l'écologie de l'époque, Mme Kosciusko-Morizet, prenait un arrêté relatif au relèvement de 300 mètres des altitudes d'approche des aéroports parisiens. Le but affiché était de réduire par deux le bruit. Résultat : trois décibels en moins, soit un gain imperceptible à l'oreille.
Mais parallèlement, cette mesure a eu pour conséquences d'étendre les nuisances sonores et les pollutions vers d'autres départements, notamment l'Aisne et la Seine et Marne. L'allongement de deux minutes en moyenne des vols a aggravé les pollutions atmosphériques : émissions de particules fines et surconsommation de carburants – près de 17 000 tonnes de kérosène par an.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, la procédure préalable a été entachée d'irrégularités. Le Conseil constitutionnel rappelait, le 27 juillet dernier, que toute personne a le droit de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. Or, dans l'Aisne, une seule commune sur plus de cinquante a fait l'objet d'une enquête publique. Comment, dans ces conditions est-il possible de parler de concertation ? Nos concitoyens ont eu le sentiment d'avoir été bafoués, piétinés.
Monsieur le ministre, il est urgent de revenir rapidement sur ce déni de démocratie. Certes, le 5 décembre dernier, la Direction générale de l'aviation civile a fait abroger par le Gouvernement cet arrêté. Mais sur le fond, rien n'a changé.
Ma question est donc la suivante : que comptez-vous faire pour revenir sur cette injustice, faire respecter le droit et mettre en place une réelle concertation ? Les élus et les associations – ainsi l'ONASA dans l'Aisne – souhaitent en débattre le plus rapidement possible avec vous.
Permettez-moi, pour conclure, de citer Jean de la Fontaine : « Les sages quelquefois… marchent à reculons… et pour couvrir quelque puissant effort, envisagent un point directement contraire. ». Voilà ce que nous attendons de vous, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, vous faites référence à des dispositions engagées depuis 2007, relatives au relèvement des trajectoires aériennes d'approche de l'Île-de-France. Cela a abouti, vous l'indiquiez, à la publication de deux arrêtés le 15 novembre 2011, l'un modifiant le dispositif de circulation aérienne, l'autre créant des zones de contrôle nouvelles.
Ces deux arrêtés, pourtant pris par l'ancienne ministre de l'écologie et de l'environnement, ont eu des effets que vous dénoncez à juste titre : leur conséquence directe a été l'extension à l'est de l'Île-de-France des nuisances sonores et l'augmentation du nombre de survols sur plusieurs de départements.
Le Conseil d'État a rejeté le 16 avril la demande de suspension d'exécution, et ce pour des raisons d'intérêt général et de sécurité. Mais cela n'empêche pas de constater, comme l'avez fait à juste titre, à quel point la procédure a été viciée, non seulement du fait de l'irrégularité de la consultation de la commission consultative de l'environnement, notamment pour l'aéroport Charles de Gaulle, mais aussi par le non-respect des objectifs constitutionnels d'accessibilité à la norme juridique.
Aujourd'hui, nous sommes en plein contentieux. Le Conseil d'État n'a pas encore jugé sur le fond de façon définitive ; il ne nous est donc pas possible d'engager de modification.
En revanche, vous me demandez quelle sera la démarche suivie par le Gouvernement. Une chose est certaine : nous sommes loin de l'autosatisfaction affichée par Mme Kosciusko-Morizet, qui soutenait que ces modifications allaient améliorer la qualité de vie de centaines de milliers de personnes. Ce sont des centaines de milliers de personnes qui, au contraire, en subissent les inconvénients.
Nous allons donc à la fois demander des évaluations des résultats, une concertation renouvelée en confiance, notamment avec les élus, et une sensibilisation des acteurs concernés par cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Qu'il me soit d'abord permis, monsieur le président, de rappeler à M. Moscovici que le précédent gouvernement avait allégé la taxe professionnelle pour l'industrie, consolidé le crédit d'impôt recherche et voté la TVA compétitivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, 6 mai 2012-6 novembre 2012 : voilà six mois que vous dirigez le gouvernement de François Hollande. Pour quel résultat ? Six mois de votre gouvernement, et c'est toujours plus d'impôts et donc moins de pouvoir d'achat pour les Françaises et les Français. Votre courage politique c'est d'augmenter les impôts. En revanche, en ce qui concerne la réduction des dépenses publiques et la réduction du nombre de fonctionnaires, vous appliquez la politique de la fuite en avant.
Vous trompez les Français, lorsque vous déclarez que neuf Français sur dix ne seront pas affectés par la hausse des impôts. C'est faux !
La taxation des heures supplémentaires pour 9 millions de salariés, c'est vous ; l'augmentation de 23 % de l'impôt sur le revenu pour 16 millions de foyers, c'est vous ; l'augmentation de la redevance télé, c'est vous ; l'augmentation de 30 % de l'impôt sur les sociétés, c'est vous ; la hausse des cotisations sociales pour 2,5 millions d'artisans, commerçants et professions libérales, c'est vous ; la hausse des droits de succession, c'est vous ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Six mois de votre gouvernement, c'est une croissance affaiblie et une augmentation du chômage. Voilà le résultat de votre politique fiscale. Toujours plus d'impôts, cela conduit au ralentissement des investissements dans nos entreprises et à la réduction de la consommation des ménages.
Six mois de votre politique, c'est plus de laxisme et moins de sécurité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Chaque jour voit une nouvelle proposition de vos ministres : la dépénalisation du cannabis ou encore l'expérimentation des salles de shoot. Vous êtes à contre-emploi, monsieur le Premier ministre.
Tel est votre bilan. Vous avez fait le choc fiscal au lieu de faire le choc de compétitivité. Voilà le triste anniversaire que nous célébrons aujourd'hui.
Il est temps de corriger le tir. Dites-nous ce que vous voulez faire maintenant, notamment en matière d'économies. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, votre question est intéressante mais elle me semble incomplète. Vous vous vantez de la réforme de la taxe professionnelle, peut-être à juste titre, mais il eût été intellectuellement honnête de préciser que vous ne l'avez pas financée autrement que par l'emprunt.
Vous aurez constaté que le pacte de compétitivité que le Premier ministre a présenté à la représentation nationale est, lui, financé et autrement que par l'emprunt.
Il l'est certes par un prélèvement supplémentaire, mais surtout par des économies dans la dépense,…
Plusieurs députés du groupe UMP. Lesquelles ?
…des économies dont vous avez beaucoup parlé, mais que vous n'avez jamais faites (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), des économies que vous nous reprochez de ne pas faire contre toute raison.
Contrairement à vos affirmations, nous nous permettons de demander aux Français de faire un effort précisément parce que nous demandons à l'État, à la protection sociale et aux collectivités locales cet effort dont vous vous prévalez à tort et dont nous nous prévalons à raison puisque nous allons faire ce que vous avez prétendu faire sans jamais le réaliser.
Puis-je vous vous rappeler que pendant les dix ans vous avez été majoritaires et siégé sur ces bancs vous avez systématiquement voté toutes les hausses d'impôts…
…que les gouvernements de M. Raffarin, de M. de Villepin et de M. Fillon vous ont demandé d'approuver ?
Puisque vous citez les taxes récentes, permettez-moi de vous rappeler celles que vous avez instaurées sur les opérateurs de télécommunications – c'était vous – sur les opérateurs de télévision – c'était vous – sur les disques durs – c'était vous – sur les poissons, les crustacés et les mollusques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Je vois que cela vous fait rire, monsieur Martin, mais cette taxe, vous l'avez inventée et votée. J'aurais préféré vous voir faire preuve d'un peu plus de lucidité, à défaut de cet humour que j'apprécie néanmoins. Cette taxe, vous en avez un peu honte et vous avez raison. Vous avez même dû la supprimer tant elle était absurde.
Vous avez voté près de vingt-cinq taxes supplémentaires, vous avez augmenté les impôts entre 2002 et 2012 comme jamais aucun gouvernement ne l'avait fait.
Le résultat de cette politique d'augmentation de la dépense publique, c'était vous, des impôts, c'était vous, du déficit du commerce extérieur, c'était vous. Ces résultats, nous sommes obligés de les assumer. Nous les corrigeons en menant une politique qui n'est pas celle que vous avez conduite, une politique que les Français jugeront et apprécieront. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
La parole est à M. Arnaud Leroy, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre de l'économie et des finances, avec le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi dont le Premier ministre a décliné les principaux axes ce matin, le Gouvernement montre la pertinence de la méthode retenue par la nouvelle majorité.
Eh oui, chers collègues de l'opposition, voilà bien la preuve que le rapport Gallois – ce véritable Livre noir de votre inaction pendant dix ans – ne sera pas enterré. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Après les mesures d'urgence des premiers mois, la large concertation voulue par le Gouvernement permet d'engager la mobilisation générale pour l'emploi et l'industrie.
Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi est au coeur du pacte national qui permettra à notre pays de retrouver le chemin de la croissance et du dynamisme économique.
Un étalement sur trois ans de l'effort financier de l'État conduira à une baisse massive des charges patronales, une baisse d'un montant de 20 milliards d'euros. Cet effort sans précédent pour réduire le coût du travail tout en préservant le pouvoir d'achat des Français est un choc exceptionnel.
C'est un signal très positif que le Gouvernement, que la gauche adressent aux forces vives de la nation et à la jeunesse en quête d'avenir dans notre pays.
J'y arrive.
La gauche, elle, fait le choix de soutenir ceux qui prennent des risques, ceux qui investissent, ceux qui créent des emplois. (Rires sur les bancs du groupe UMP.) Elle croit en la capacité de notre pays à vivifier son tissu industriel pour assurer la transition écologique de notre économie.
Monsieur le ministre, nous le savons, cette stratégie du donnant-donnant portera ses fruits. Le crédit d'impôt apporte la preuve que notre majorité a raison de ne pas céder au déclinisme trop en vogue depuis dix ans.
Pouvez-vous nous dire quels résultats sont attendus de la baisse progressive des charges patronales en matière d'emploi et de croissance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, le crédit d'impôt compétitivité-emploi est la mesure centrale en termes de compétitivité-coût qui a été annoncée ce matin par le Premier ministre.
Ce crédit d'impôt est un dispositif très simple parce qu'il ressemble au crédit d'impôt recherche auquel les entreprises ont déjà recours et qu'elles connaissent bien.
Il permettra une baisse de 6 % du coût du travail sur les salaires équivalents à 1 SMIC jusqu'à 2,5 SMIC.
Ce dispositif est également extrêmement efficace. On a pu avoir un débat sur les secteurs exposés et les secteurs abrités – industries et services. En vérité, il permet de prendre en compte 85 % des salaires et 83 % dans l'industrie. Du coup, celle-ci bénéficiera pour un quart de ce dispositif, le rapport Gallois ayant pointé du doigt le fait qu'il était indispensable de la redresser. Nous y travaillons avec Arnaud Montebourg.
Ce que nous escomptons de ce dispositif simple, efficace, justement financé et global, c'est qu'il crée des emplois. Nous avons fait tourner les modèles, comme on dit, qui sont tout sauf complaisants. Il en ressort que nous pouvons espérer la création de plusieurs centaines de milliers d'emplois d'ici à 2017 ainsi qu'une hausse nette du PIB.
J'ai la conviction tranquille que ce dispositif fera date parce qu'il est d'une ampleur inédite et d'une efficacité extrêmement forte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre des sports et porte sur la situation des jeunes sportifs martiniquais, proprement dramatique. Le manque de moyens financiers, matériels et humains est patent. Nos infrastructures et nos équipements sont vétustes. Nos clubs sont peu aidés. Nos jeunes sportifs sont livrés à eux-mêmes, avec pour unique encadrement quelques bénévoles militants qui assurent seuls leur formation.
De ce fait, nombre de nos jeunes prometteurs sont victimes de blessures récurrentes qui compromettent leur avenir. Certains cèdent au découragement, à l'image de tous ces adolescents issus des pôles espoir, sous-équipés, sous-encadrés, qui, démotivés, viennent grossir chaque jour le rang des quelque 12 000 jeunes Martiniquais en situation d'errance.
Pire, faute de pouvoir disposer d'infrastructures dédiées, nos cyclistes se font régulièrement faucher sur les routes. Au final, le mouvement sportif en outre-mer est en train de perdre le match capital qu'il livre contre toutes les formes de déviance sociétale.
Aujourd'hui, du fait de ses errements, la nouvelle gouvernance locale ne compense plus, comme par le passé, les insuffisances de l'État en matière de politique sportive.
Malgré tout, la Martinique reste une terre de champions. C'est vrai que lorsque nous gagnons, nous sommes érigés en héros de la nation française. Mais en cas de défaite, nous redevenons Martiniquais, Guadeloupéens, Guyanais, Réunionnais ou Kanak. En cas de déroute, nous sommes traités de « caïds », voire de « chipeurs de pains au chocolat ». (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Nous attendons une politique globale, qui reconnaisse l'identité des territoires, qui accorde au bénévolat sportif un statut d'utilité publique, qui alloue des aides réelles aux sportifs de haut niveau, qui favorise la mise à disposition de nos joueurs en sélection lorsque nous sommes engagés dans des compétitions internationales.
Madame la ministre, entendez-vous impulser cette véritable rupture ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative.
Monsieur le député, la France du sport sait ce qu'elle doit aux outre-mers : des championnes et des champions qui sont de magnifiques exemples pour notre jeunesse et encore cet été, aux Jeux olympiques et paralympiques, Marc-André Cratère, Coralie Balmy ou Mandy François-Élie sont là pour en témoigner.
Néanmoins, vous avez raison, la situation reste grave, parce qu'il existe un sous-équipement en matière sportive, parce que ces équipements sont souvent vétustes, parce qu'il y a 10 % de licenciés de moins que sur le territoire national et moins de pratique féminine également, et parce que les indicateurs de santé publique se sont aggravés en matière de sédentarité.
J'ai souhaité depuis six mois réorienter cette politique sportive, prioritairement sur le sport pour tous et sur tous les territoires. C'est dans ce cadre, malgré la situation exsangue du Centre national de Développement du Sport, que sera soutenu l'Institut régional de formation. J'ai souhaité soutenir également l'emploi : une convention cadre a été signée avec le Centre national olympique et sportif français : nous avons veillé, avec Victorin Lurel, à prévoir ait une bonification pour les jeunes d'outre-mer. Je suis également attentive à l'accompagnement des sportifs de haut niveau, avec une retraite de haut niveau qui est pour la première fois financée. Enfin, une politique « sport-santé publique » : le sport outil de santé primaire, secondaire et tertiaire. Dans ce cadre, le réseau sport-santé-bien-être de la Martinique, dit Réseau Saphir, sera soutenu à la fois par l'agence régionale de santé et par la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale.
Vous le voyez, nous sommes parfaitement conscients de l'exemplarité de nos sportifs de haut niveau outre-mer, mais aussi parfaitement conscients que cela appelle une politique plus adaptée à ces priorités. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire
Monsieur le président, permettez-moi, avant de poser ma question à M. le Premier ministre, de dire à M. Cahuzac que son agressivité est tout de même la marque d'une certaine fragilité : nous verrons les résultats dans cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, demain, en Conseil des ministres, sera présenté le projet de loi sur le mariage pour tous et l'adoption par les couples homosexuels.
À travers ce texte, vous vous apprêtez à mettre en oeuvre une promesse de campagne qui va bouleverser profondément notre société et désagréger le modèle naturel de la famille. Une promesse de campagne dont la moitié des Français ne veut pas et dont la frange ne cesse de grandir à l'approche de cette réalité que vous voulez leur imposer.
Chaque jour voit se multiplier les polémiques, les mises en garde, les manifestations, dans toutes les strates de la société. Chaque jour, des centaines d'élus, d'associations, d'éminentes personnalités vous exhortent à lancer un véritable débat national sur un sujet d'une telle ampleur, mais chaque jour vous vous enfermez un peu plus dans vos certitudes en refusant obstinément d'organiser la consultation. (Vives réactions sur les bancs du groupe SRC.)
À travers cette loi, il ne s'agit pas seulement de toucher à la structure juridique et administrative de notre pays. Cette loi s'attache à l'humain, monsieur le Premier ministre, à l'enfant et à son identité, à la notion même de filiation. C'est une véritable révolution de société qui remplacera demain les mots de « père » et « mère » par ceux de « parent 1 » et « parent 2 ».
« Il ne faut toucher à la loi que d'une main tremblante », disait Montesquieu. Alors que vous êtes sur le point de remettre en cause d'un trait de plume ce qui constitue les fondements de notre société depuis des siècles, comment pouvez-vous envisager de vous exonérer d'un débat associant l'ensemble des Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la députée, comment pouvez-vous dire que nous escamotons un débat ?
Ne serait-ce que parce de nombreuses propositions de loi ont déjà été déposées sous les mandatures précédentes, parce que nous avons conduit avec Mme Taubira un grand nombre d'auditions, entendant des avis tout à fait différents ; de leur côté, les parlementaires, à partir de jeudi, vont eux aussi mener des auditions variées et diverses. Bref, le débat est déjà là, il a lieu, il se déroule et, je tiens à le souligner, ce n'est pas une nouveauté.
Attendez de voir le projet de loi qui sera présenté demain en Conseil des ministres avant d'avancer des choses totalement fausses, comme cette idée du « parent 1 » ou du « parent 2 » ! Vous ne cherchez pas à éclairer le débat, mais à faire en sorte de créer des fantasmes (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP, écologiste et GDR), alors que c'est simplement une mesure d'égalité, de respect d'engagements qui ont été pris par François Hollande.
Demain sera présenté un projet de loi sur lequel enfin vous pourrez vous fonder véritablement et cesser de raconter n'importe quoi (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) : vous verrez combien c'est à la fois une mesure qui respecte la liberté, l'égalité et la laïcité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP, écologiste et sur plusieurs bancs du groupe GDR. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean Grellier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s'adresse à M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
La réindustrialisation de la France nécessite la mobilisation de tous. À cet effet, il faut engager une refondation de notre pacte social autour de l'industrie, qui encourage à un nouvel état d'esprit et à une amélioration du dialogue social.
Nous devons développer partout l'exigence de confiance mutuelle. Parler de compétitivité industrielle, c'est dessiner un projet collectif dès maintenant, en l'inscrivant dans le temps.
Dans son rapport, Louis Gallois insiste sur la nécessité de mobiliser fortement tous les acteurs afin que notre pays redevienne une terre d'industrie. Il préconise d'améliorer la qualité du dialogue social et il formule des propositions concrètes : assurer la présence de salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance des grands groupes avec voix délibérative ; renforcer la gouvernance et les moyens affectés au comité stratégique de filière de la Conférence nationale de l'industrie ; permettre aux régions et aux territoires d'animer le dialogue social ; doubler le nombre de formations en alternance sur la durée du quinquennat ; et demander aux partenaires sociaux de négocier les modalités de mise en oeuvre d'un compte individuel de formation attaché à la personne.
Ce matin, M. le Premier ministre a annoncé des mesures très fortes, qu'il a synthétisées par l'expression « Produire ensemble ». Il en appelle à une refondation et à une rénovation du dialogue social, inscrite d'ailleurs dans la conférence mise en place en juillet dernier.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, indiquer à la représentation nationale quelles mesures touchant à la qualité du dialogue social ont été décidées afin d'engager la mobilisation pour l'industrie ? Pouvez-vous également vous prononcer sur un échéancier ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Comme vous l'avez souligné, monsieur Grellier, le rapport Gallois s'intéresse aussi, au nom de la compétitivité et de son redressement, à la qualité du dialogue social. Dans ce domaine également, il dresse un réquisitoire sur la manière de faire auparavant (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…
…en disant à quel point, aujourd'hui, le dialogue social est en panne et ne produit pas. Il souligne qu'une des grandes qualités des pays qui s'en sortent aujourd'hui, c'est le dialogue social, grâce auquel on redonne du dynamisme aux entreprises en protégeant les salariés. C'est la position du Gouvernement depuis le départ.
Dès la grande conférence sociale, le Premier ministre a voulu que soient lancées de grandes négociations dans le domaine social. L'une vient de réussir sur le contrat de génération, et vous allez en être saisis – je pense pouvoir dire que tous les partenaires sociaux seront partisans d'une mise en oeuvre positive de ce contrat ; l'autre, sur la sécurisation de l'emploi, c'est-à-dire les capacités d'adaptation des entreprises tout en sécurisant individuellement les salariés, la négociation est ouverte. Elle aura des moments de haut et des moments de bas,…
…mais c'est une responsabilité qui est aujourd'hui entre les mains des partenaires sociaux. Car nous, nous faisons confiance aux partenaires sociaux. Nous ne leur donnons pas des ordres ni des directives, nous ne leur fixons pas d'ultimatums, nous les mettons en situation de responsabilité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, j'aimerais insister sur un dernier point.
Aujourd'hui, le Premier ministre a annoncé que 20 milliards d'euros allaient être mis à disposition des entreprises. Ce n'est pas un chèque en blanc.
Ce sont 20 milliards d'euros que, par économie ou par le biais de la TVA, les Français vont consentir aux entreprises. Ils vont pouvoir en suivre l'utilisation : dans chaque entreprise, les comités d'entreprise auront à se saisir du suivi de l'utilisation de cette aide.
Au niveau national – c'est normal –, un comité, qui pourra en suivre l'utilisation globale, permettra aux partenaires sociaux d'être aussi les partenaires de la mise en oeuvre de cette aide indispensable au redressement de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Christophe Guilloteau, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Je rappellerai d'abord à Mme Bertinotti qu'elle n'a pas répondu à la question qui lui a été posée et que nous souhaitons un débat national sur un sujet aussi important. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Hier après-midi, nous avons débattu, dans cet hémicycle, du budget des anciens combattants.
Je crois que, sur tous les bancs, nous avons à coeur de renforcer le lien armée-nation au travers de la reconnaissance de notre pays au monde combattant que nous considérons comme un « passeur de mémoire » entre les générations.
L'engagement de ces hommes et de ces femmes pour la patrie doit être salué chaque fois que c'est possible, car ils ont répondu loyalement à l'appel de la République. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Dans cet esprit, sous la précédente législature, notre majorité avait systématiquement augmenté la retraite du combattant, qui a été portée ainsi à quarante-huit points au 1er juillet 2012, soit une augmentation de 30 % en cinq ans.
Hier, nous souhaitions poursuivre ce légitime effort et nous avons proposé un amendement visant à augmenter de deux points la retraite du combattant. Votre gouvernement l'a refusé. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.) Cela ne vous honore pas.
Monsieur le Premier ministre, il n'est jamais trop tard pour bien faire ! Accepterez-vous de faire machine arrière et d'envoyer aux anciens combattants le message de reconnaissance qu'ils méritent ? Ce serait un signal fort.
En attendant, je souhaite aux membres du Gouvernement un bon 11 novembre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Guilloteau, nous étions, vous et moi, dans cet hémicycle hier soir pour examiner le budget des anciens combattants.
Vous rappelez que l'augmentation de quarante-quatre à quarante-huit points de la retraite du combattant n'avait pas été financée par le gouvernement précédent (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe UMP) et qu'il a fallu trouver, pour 2013, 54 millions d'euros en année pleine. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
De la même manière, les annonces que vous avez faites pour l'augmentation de l'aide différentielle au conjoint survivant à hauteur de 900 euros n'étaient pas financées, et vous avez mis en situation difficile l'Office national des anciens combattants.
Un député du groupe UMP. Menteur !
Le budget que j'ai proposé hier prend en compte la notion de reconnaissance du monde des anciens combattants – même si mon ministère a dû faire des efforts, compte tenu des contraintes que vous connaissez. C'est aussi un budget qui n'a baissé que de 2,4 %. Cette baisse permet d'augmenter l'aide sociale de 3 millions d'euros sur un budget triennal. Nous avons permis de maintenir la Journée défense et citoyenneté, avec un budget de 20 millions d'euros, tandis que vous aviez, vous, prévu sa disparition.
Nous n'avons donc pas de leçons à recevoir de votre part sur ces questions. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Il est toujours très facile de commander la tournée et de ne jamais la payer. Nous, nous la payons à votre place. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Michel Lesage, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre de l'économie et des finances, comme les autres collègues du groupe, je souhaite vous interroger sur les enjeux de la compétitivité. Oui, la compétitivité et le redressement économique et social de notre pays sont pour nous de véritables obsessions : ils nécessitent une mobilisation générale.
Monsieur le ministre, ancrées dans l'économie réelle, et pourtant oubliées des années bling-bling, les très petites entreprises, les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire sont confrontées à des difficultés de financement qui entravent leurs capacités à se développer, à innover et à exporter, et qui menacent même la survie de certaines d'entre elles. Or, ces entreprises ont le plus fort potentiel en termes de créations d'emploi, et elles jouent un rôle déterminant sur nos territoires, dans nos régions et dans nos départements.
Le Gouvernement vient judicieusement de décider ce matin de mobiliser un arsenal complet de mesures, combinant des actions d'urgence et d'autres à plus long terme, afin de répondre immédiatement à leurs besoins de trésorerie, et d'apporter, de manière durable, les financements nécessaires. La Banque publique d'investissement, que le Gouvernement a décidé de créer dès le début de l'année 2013, sera un outil majeur pour nos PME-PMI.
Avec 42 milliards d'euros, la force de frappe de la BPI sera un véritable multiplicateur de croissance et contribuera à redonner confiance à tous les entrepreneurs qui innovent, se développent et prennent des risques dans tous les secteurs d'activités de l'économie française.
Monsieur le ministre, alors que le Parlement sera prochainement amené à examiner le projet de loi sur la BPI, pouvez-vous nous dire comment la question fondamentale du financement de notre économie s'intègre dans la stratégie gouvernementale en faveur de la compétitivité, de la croissance et du redressement de notre pays ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député Lesage, je partage tout d'abord votre diagnostic…
…sur le rôle des très petites entreprises, des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire dans notre appareil productif. Si nous avons aujourd'hui un déficit de compétitivité par rapport à l'Allemagne, c'est notamment à cause de ce chaînon manquant, à tout le moins insuffisamment développé. C'est là, dans les territoires, que se créent les emplois, c'est là que se crée l'innovation, c'est là enfin que des opportunités d'exportation se développent. Or, il est vrai que ces entreprises connaissent dans notre pays des problèmes d'accès au financement. Le manque de trésorerie peut d'ailleurs les mener au dépôt de bilan ; elles souffrent de restrictions dans l'accès au crédit, parce que les banques sont trop frileuses, notamment du fait de nouvelles réglementations très exigeantes ; elles se caractérisent enfin par l'insuffisance de leurs fonds propres.
C'est la raison pour laquelle nous avons créé la Banque publique d'investissement, qui sera effectivement opérationnelle le 1er janvier 2013. Ce sera la banque des territoires ; ce sera la banque des petites et moyennes entreprises, et ce sera un outil pour la compétitivité. Pour le montrer, je voudrais vous citer quatre leviers d'intervention de la BPI pour les mois à venir.
Premier levier : au 1er janvier 2013, la BPI mettra en place une nouvelle garantie publique pour apporter 500 millions d'euros de crédits de trésorerie aux PME.
Deuxième levier : pour faciliter la trésorerie des PME, la BPI assurera également le préfinancement du crédit d'impôt recherche l'année prochaine.
Troisième levier : pour répondre aux besoins de financement et d'innovation des entreprises en matière de fonds propres, la BPI assurera la gestion de 2 milliards d'euros de fonds nouveaux, dans le cadre du programme des investissements d'avenir.
Quatrième levier enfin : la BPI jouera un rôle majeur dans le cadre du financement à l'exportation, car il a été montré qu'il s'agissait là d'un handicap de notre pays, et nous devons rattraper les meilleurs sur ce terrain-là.
La BPI est, je crois, une création patriotique. Elle viendra ici en débat dans quelques jours ou dans quelques semaines : j'appelle toute la représentation nationale à appuyer ce grand projet utile au pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire
Monsieur le président, chers collègues, ma question s'adresse au Premier ministre et porte sur la réduction des exonérations des cotisations des travailleurs occasionnels.
Avant de poser ma question, je voudrais vous dire, monsieur le Président, que ce qui s'est passé ce matin est particulièrement honteux.
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est un scandale !
Ce matin, lors de l'examen du budget de l'agriculture, qui ne semble pas intéresser le parti socialiste, puisque nous étions majoritaires (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI – Exclamations sur les bancs du groupe SRC), le scrutin public était annoncé sur notre amendement de maintien de l'exonération, quand le président de séance a suspendu la séance. Oui, clairement, à l'UMP nous sommes favorables au maintien de l'exonération, et on nous a empêchés de voter ce maintien !
Être manipulateurs, c'est encore plus grave qu'être amateurs. Voler un scrutin à l'opposition, c'est manipuler l'opinion (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.), mais les citoyens ne s'y tromperont pas. Ils savent déjà que l'ensemble de votre budget n'est qu'un alignement de chiffres pour paraître !
Alors, parlons-en, des travailleurs occasionnels ! Le travail occasionnel permet à des gens parfois non qualifiés de trouver un travail, et donc une petite source de revenus. Pour certains, être travailleur saisonnier est devenu un métier. Ce sont des personnes courageuses et méritantes qui n'ont pas, elles, perdu la valeur travail. Elles vont se trouver face à des employeurs et des agriculteurs qui vont y réfléchir à deux fois avant de les embaucher.
En général, c'est en saison, donc occasionnellement, que l'on fait des heures supplémentaires. Or, rappelons-le, la refiscalisation des heures sup', c'est 100, 200, voire 300 euros en moins sur leur fiche de paie du mois.
Pratiquer un sport, même en amateur, ce n'est pas dangereux, à condition que l'on respecte les règles, mais diriger l'exécutif en amateur, avec une majorité qui ne respecte pas les règles du jeu (Exclamations sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur certains bancs du groupe UMP), ces règles du jeu dont vous parliez ce midi, monsieur le président, diriger l'exécutif de la sorte, c'est éminemment dangereux pour les Français, et destructeur pour le fabriqué en France !
Ma question est simple et, je l'espère, occasionnelle – à vous de faire en sorte, monsieur le Premier ministre, qu'elle ne devienne pas récurrente, car, je vous le rappelle, c'est le travail qui crée l'emploi : quand allez-vous cesser de détruire l'envie de travailler en France ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
Monsieur le député, vous avez parlé de l'emploi. Pour nous donner des leçons, encore faudrait-il que vos résultats, en termes de chômage, soient à la hauteur de l'ambition que vous essayez d'afficher aujourd'hui.
Vous avez eu ce matin un débat, et je passerai sur les artifices des procédures parlementaires,…
…au cours duquel vous avez présenté, dix, quinze, peut-être vingt fois le même amendement, toujours sur le même sujet. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !
Je vous ai rappelé de manière très claire – et c'est peut-être cela qui vous a gênés, d'ailleurs – que vous aviez vous-mêmes voté, en 2012, un article et une ligne au titre du dispositif TODE, à hauteur de 506 millions d'euros. C'est la même ligne que nous avons adoptée aujourd'hui, dans le cadre du budget de l'agriculture, et c'est cela qui, semble-t-il, vous pose un problème.
C'est cela que vous n'arrivez pas à accepter. Cette question de la compétitivité, nous l'avions anticipée, en particulier s'agissant du travail saisonnier.
Je vous ai entendu beaucoup parler, de « choc » en particulier. Je l'ai dit ce matin : je me rappelle très bien l'interview de M. François Fillon, Premier ministre, au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Il avait parlé de « choc fiscal » : en fait de choc, c'était celui du bouclier fiscal… Il a fait mal à la tête à tous les Français : il est temps de changer !
Travailleurs saisonniers
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)
La Conférence des présidents réunie ce matin a arrêté, pour la semaine du 27 au 30 novembre 2012, les propositions d'ordre du jour suivantes :
Proposition de résolution européenne sur l'ancrage démocratique du gouvernement économique européen ;
Projet de loi relatif à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme ;
Proposition de loi visant à la suspension de la fabrication, de l'importation, de l'exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A ;
Proposition de loi visant à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins ;
Projet de loi relatif à la création de la banque publique d'investissement.
Il n'y a pas d'opposition ?
Il en est ainsi décidé.
La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour soutenir l'amendement n° 72 .
Nous avons évoqué ce sujet ce matin. Je regrette d'ailleurs la façon dont le débat s'est déroulé : le scrutin public avait été annoncé, nous étions présents, et nous aurions dû voter.
Je déplore que les députés de la majorité n'aient pas été présents lors d'un débat aussi important, et qu'il ait fallu une suspension de séance et tout ce qui s'en est suivi pour que l'on procède enfin au vote vers 13 heures 20.
De tels incidents sont tout à fait regrettables et, malheureusement, ils sont de plus en plus fréquents à l'Assemblée comme au Sénat. J'espère que cela ne se reproduira plus.
Pour en venir à l'amendement, le projet du Gouvernement me semble en contradiction avec le rapport Gallois et toutes les considérations actuelles sur la compétitivité des entreprises et les cotisations sociales.
Il s'agit de soutenir les entreprises agricoles, et de ne pas aller dans le sens souhaité par le Gouvernement mais plutôt de maintenir le dispositif en vigueur. Ce dispositif efficace donne satisfaction aujourd'hui. Si les dispositions voulues par le Gouvernement étaient adoptées, un grand nombre d'entreprises agricoles seront plongées dans de très grandes difficultés.
Monsieur le président, si vous m'y autorisez, je pourrais également exposer l'amendement n° 213 , qui est identique.
L'article 60 comporte deux mesures : la suppression de l'exonération dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles sur les cotisations d'accidents du travail ; et l'alinéa 3, qui concerne les exonérations de charges hors accidents du travail. Le Gouvernement propose d'en limiter l'application aux salaires inférieurs à 1,5 fois le SMIC, la mesure s'appliquant de manière dégressive à partir de 1,25 fois le SMIC, ce qui constitue une forte baisse.
J'avais appelé l'attention du Gouvernement sur un point tout à l'heure, mais le brouhaha était tel que mes propos se sont perdus. Le Gouvernement nous explique que cette mesure ne concerne que 9 % des contrats. Ce n'est pas exact : à la lecture de l'étude d'impact, il apparaît que cela entraîne, certes, une suppression intégrale de l'exonération pour 9 % seulement des contrats, mais une réduction partielle de cette même exonération pour 13 %. La part des contrats concernés est donc de 22 %, selon les données de l'étude d'impact fournie par le Gouvernement.
Je nourris de plus quelques doutes sur les statistiques de la Mutualité sociale agricole, non que les données soient fausses, mais parce qu'elles n'incluent pas les heures supplémentaires. Quoi qu'il en soit, ce sont au minimum 22 % des 900 000 contrats aujourd'hui bénéficiaires de l'exonération qui seront affectés.
De plus, le travail saisonnier est extrêmement concentré, puisque, comme le montre l'étude d'impact, 42 % des heures travaillées dans les fruits et légumes sont concernées par l'exonération.
Le ministre a développé tout à l'heure un exemple situé dans la circonscription de son collègue chargé du budget, établissant que la mesure entraînera une perte de 2 000 euros dans une exploitation-type de fruits et légumes. Sachant ce que gagnent actuellement les producteurs de fruits et légumes, 2 000 euros de moins représentent une somme considérable, qui peut se traduire par des baisses de 5 % à 10 % du revenu agricole.
L'objet de l'amendement n° 213 est tout simplement de demander au Gouvernement de ne pas toucher à ce régime. Il est admissible de supprimer les exonérations de cotisations au régime accidents du travail, mais pas les autres. Cela réduirait d'un bon tiers l'impact de la mesure. Je rappelle à mes collègues qu'en année pleine cet impact est de 130 millions d'euros, dont 50 millions pour les accidents du travail et 80 millions hors accidents du travail.
Je défendrai par la suite un autre amendement déposé à la demande de nombre de mes collègues, y compris de la majorité, afin de trouver une voie médiane. Cela coûterait à peu près une quarantaine de millions en année pleine, et 20 à 25 millions en 2013. Mais nous en discuterons tout à l'heure.
Sur ces deux amendements, le débat a commencé depuis un certain temps déjà.
Je n'ai jamais nié que le recentrage de la mesure aurait pour effet de réduire sa portée. J'ai même donné un exemple, pris en Lot-et-Garonne, où, pour une exploitation qui compte quatorze contrats salariés, l'exonération totale passerait de 16 000 euros à 14 600 euros. Je l'ai donc bien dit.
Ce que je conteste, c'est que ces exonérations portent sur des contrats rémunérés jusqu'à 2,5 ou 3 fois le SMIC pour un travail saisonnier concentré dans le temps et exigeant une qualification qui ne justifie pas un tel salaire.
Cela signifie que soit des heures supplémentaires, soit des primes, ont été intégrées dans le salaire, ce qui expliquerait la dérive constatée de ce dispositif, adopté dans la loi de finances pour 2012. Son coût est passé de 506 millions d'euros à 610 millions d'euros. Cela n'avait pas été prévu, puisque la MSA elle-même n'avait pas été remboursée des pertes de cotisations dues aux exonérations, ce qu'il a fallu corriger grâce à la recette votée sur les exonérations portant sur le travail permanent.
Nous débattons donc bien d'une réduction du périmètre de la mesure, mais sans remettre celle-ci en cause, et je répète que, pour une exploitation moyenne de fruits et légumes comptant quatorze salariés, l'exonération, donc l'aide de l'État, qui s'élevait à 16 000 euros, va maintenant s'élever à 14 600 euros.
Je conteste profondément le fait que cette mesure remettrait tout en cause. On a parlé, ce matin, d'arrêt de mort. On a ciblé cette mesure sur des salaires qui vont de 1 à 1,5 SMIC, sachant que 78 % des contrats signés se situaient entre 1 et 1,25 SMIC, 13 % entre 1,25 et 1,5 SMIC et que seulement 9 % des contrats dépassaient 1,5 SMIC.
(Les amendements identiques, nos 72 et 213 , ne sont pas adoptés.)
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Notre collègue Fasquelle est revenu sur le déroulement de nos travaux. Je voudrais simplement lui rappeler que, ce matin, se tenaient concomitamment une séance dans l'hémicycle et une en commission. Ainsi la commission à laquelle lui-même appartient était-elle concernée par ces deux réunions, l'une portant sur le budget de l'agriculture, l'autre sur la mission relative à l'économie sociale et solidaire.
Je tenais aussi à lui faire observer qu'une trentaine d'amendements ont été votés ce matin et qu'il y a toujours eu une majorité pour les rejeter. Quand il évoque l'absence de la majorité ce matin, je ne peux que constater qu'aucune difficulté ne s'est fait jour sur ces trente amendements.
Enfin, et je m'exprime sous le contrôle de la présidence, il en va différemment selon que le scrutin est simplement annoncé ou qu'il est ouvert. Dès l'instant où il est ouvert, on ne peut plus suspendre la séance. En revanche, c'est tout à fait possible lorsqu'il n'est qu'annoncé. Il n'y a donc eu aucune défaillance de la présidence. Cela a été de nouveau établi lors de la Conférence des présidents qui s'est réunie après l'événement que vous avez provoqué ce matin. Je tenais, monsieur le président, à apporter ces quelques précisions à mon collègue.
Monsieur Brottes, c'est tout de même la présidence, avec les présidents des commissions, qui organise nos travaux. Si, ce matin, se sont parallèlement déroulés un débat important dans l'hémicycle et un débat en commission élargie, les députés de l'opposition n'y sont absolument pour rien. Vous avez d'ailleurs raison, et c'est un motif de plus pour vous blâmer, puisque nous avons eu à choisir entre deux réunions auxquelles nous aurions voulu participer. J'espère que cela ne se reproduira pas et que vous saurez, à l'avenir, organiser l'emploi du temps pour que nous puissions nous trouver en commission et dans l'hémicycle quand c'est nécessaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
L'incident est clos, mes chers collègues. Une conférence des présidents a été réunie à la suite de l'épisode de ce matin, et le président Bartolone est venu en séance expliquer très clairement les choses s'agissant de l'annonce du vote.
Je suis saisi de trois amendements, nos 190 , 212 et 235 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n°s 212 et 235 sont identiques.
La parole est à M. Julien Aubert pour présenter l'amendement n° 190 .
Cet amendement de repli par rapport aux amendements de suppression de l'article est cosigné par vingt-sept de mes collègues de l'UMP. Il y est proposé ainsi une solution intermédiaire légèrement différente de celle de M. de Courson en ce qu'elle prévoit une exonération dégressive entre 1,6 et 2,1 fois le SMIC. Lors de l'examen du texte relatif au logement social, il est apparu que l'on ne faisait pas confiance aux maires dans cette enceinte. Je crois que nous devons, ici, faire confiance aux agriculteurs, et non pas nous enfermer dans le dogme de l'infaillibilité ministérielle consistant à penser que seul,le ministre de l'agriculture sait ce qui est bon pour les agriculteurs !
Je propose donc une solution alternative. En effet, les agriculteurs, qui vivent tous les jours leur métier, se mobilisent, signent une pétition et montent à Paris. S'ils vous expliquent que votre décision leur pose un problème, vous devriez peut-être les écouter quelque peu !
Vous avez raison, monsieur le ministre, quand vous expliquez que trois fois le SMIC, c'est trop. Tout le problème réside dans le point de bascule. Dans les exploitations de Vaucluse, le temps de travail est, en moyenne, de 43 heures, heures supplémentaires comprises. Par conséquent, quand vous vous basez sur 35 heures, que les agriculteurs en accomplissent en réalité 39, ce qui est inférieur à la moyenne que je viens de vous donner, et que vous considérez les cinq semaines de congés payés, le salaire moyen est compris entre 1,5 et 1,6 fois le SMIC. Pour que l'exonération puisse jouer, elle ne doit pas s'arrêter avant ce seuil. Or vous proposez une exonération dégressive dès 1,25 fois le SMIC.
Nous suggérons, pour notre part, une mesure juste. Ainsi, si les saisonniers sont rémunérés à environ 1,5, ou 1,6 SMIC, la réduction doit s'appliquer. En effet, en Vaucluse, la récolte des fruits s'effectue en mai, monsieur le ministre. Or, pendant ce mois, il y a traditionnellement des jours chômés et payés, qui doivent, en conséquence, être intégrés dans le calcul. Votre analyse se fonde sur une moyenne, mais, suivant les régions, les climats, les récoltes, les spécificités locales, elle peut se heurter à de gros obstacles. Ainsi, après avoir inventé la taxe à 75 % qui ne s'applique pas aux riches, vous venez d'inventer une exonération qui ne s'applique plus aux agriculteurs !
Nous vous proposons donc, pour notre part, une solution médiane, laquelle permettra d'éviter aux agriculteurs de faire un choix cornélien : celui de baisser les salaires ou de recourir au travail au noir, ou à des sociétés espagnoles qui fournissent les services de saisonniers et ne paient aucune cotisation sociale dans notre pays. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Comme je l'ai rappelé lors de l'examen des précédents, cet amendement n'a pas été examiné en commission, laquelle n'a donc pas été en mesure de se prononcer. Elle a certes repoussé l'amendement de suppression de l'article, mais les commissaires de la majorité se sont déclarés ouverts à une solution intermédiaire, ainsi que je l'ai rappelé tout à l'heure.
Je voudrais tout de même appeler l'attention du Gouvernement sur l'articulation entre cette mesure et les taux plafonds après ce qu'il vient d'annoncer. Il me semble, en effet, que les amendements ultérieurs sont cohérents, puisque l'on y parle de 1,5 à 2 fois le SMIC. Ainsi, les 6 % du crédit d'impôt s'appliqueraient jusqu'à 1,5 fois le SMIC, avec raccordement à deux fois le SMIC.
Il est toutefois nécessaire, monsieur le ministre, de coordonner les différents dispositifs d'exonération, afin d'éviter que les plafonds ne soient incohérents entre eux. Ainsi, comment allez-vous coordonner la présente mesure avec celle annoncée ce matin par le Premier ministre ? Le problème est sérieux, et c'est pourquoi nous avons déposé ces amendements. L'opposition montre, ce faisant, son caractère extrêmement ouvert...
…et coopératif, comme vient de le dire ma chère collègue, afin de sortir le Gouvernement d'un mauvais pas.
À titre personnel, donc, je pense qu'il convient de se rallier aux amendements n°s 212 et 235 . Je rappelle que les représentants de la majorité au sein de la commission des finances m'ont demandé de rédiger un amendement intermédiaire entre la position arrêtée ce matin par le Gouvernement et la suppression des exonérations.
Mes arguments sont identiques à ceux de M. de Courson.
J'ai déposé un amendement de compromis, d'équilibre et de cohérence avec les annonces faites ce matin. Il serait donc tout à l'honneur de l'Assemblée nationale d'adopter cet amendement, qui ne représente pas un coût majeur pour les finances publiques et qui permet, surtout, d'éviter la « trappe à bas salaires ». Je peux comprendre que prolonger la dégressivité jusqu'à 2,5 et 3 SMIC serait sans doute excessif, mais s'en tenir à 1,5 et 2 SMIC, comme nous le proposons, me paraît équilibré. Droite et gauche devraient pouvoir se retrouver sur cet amendement en l'adoptant.
Le Gouvernement rencontre un problème de coordination sur les plafonds qu'il s'agisse de cette mesure ou d'autres, d'ailleurs. L'avantage de ces deux amendements identiques est d'assurer une bonne coordination. Cela coûtera à peine 30 millions d'euros en 2013, monsieur le ministre. Donc, vous économiserez 60 millions et non 90 millions comme vous le vouliez, soit seulement, si je compte bien, une trentaine de millions de manque à gagner. En année pleine, sachant que le dispositif accidents du travail n'est pas concerné, on réaliserait 90 millions d'euros d'économies au lieu des 130 millions attendus. L'impact serait donc de 40 millions, ce qui ne me paraît pas excessif.
J'observe que MM. de Courson et Aubert me proposent des solutions différentes. Il faudrait qu'ils se mettent d'accord entre eux…
Je reviens à ce que j'ai dit, s'agissant des exonérations jusqu'à 1,5 fois le SMIC. Cette proposition s'appuie sur la durée légale du travail, à savoir 35 heures. Je suis en effet désolé de vous rappeler que les heures supplémentaires sont exonérées, puisque l'exonération transversale « Fillon » s'applique. Ce dispositif ayant eu des répercussions beaucoup plus importantes que ce que vous avez prévu dans la loi de finances de 2012, nous avons décidé de continuer à exonérer les heures supplémentaires pour les salaires compris entre une fois et une fois et demie le SMIC. Je ne vois donc pas de quoi vous parlez !
Des correctifs ont été apportés à la défiscalisation des heures supplémentaires, mais elles restent défiscalisées dans plus de 90 % des entreprises de moins de vingt salariés. J'ai entendu dire tout à l'heure qu'il y aurait une baisse de 200 euros sur la feuille de paie ; ce n'est pas vrai. Le choix a été fait voici longtemps par le ministre, qui considérait qu'il fallait être attentif à cette question.
M. de Courson a jugé bon d'anticiper une cohérence générale avec les annonces faites ce matin par le Premier ministre. Nous devrons effectivement examiner tout cela pour parvenir à une cohérence. Nous avons parlé de crédit d'impôt. Nous débattons, ici, essentiellement des travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi, mais cette mesure plus large, plus générale, aura un impact beaucoup plus positif. Nous devrons donc y revenir, mais nous disposons encore d'un peu de temps. Nous donnons, aujourd'hui, au secteur agricole – fruits, légumes, viticulture – les moyens d'embaucher des salariés occasionnels.
J'entends bien les arguments de M. le ministre. Je possède ici une simulation établie par la FNSEA (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC), qui a comparé le régime actuel et celui prévu par le PLF pour 2013. Cette analyse, que je vous ferai parvenir, laisse apparaître qu'avec le dispositif Fillon, dans le cas des salaires entre 1,5 et 1,6 SMIC, avec cinq heures supplémentaires par semaine, le coût horaire augmente de 1,80 euro, toutes exonérations comprises.
L'impact est bien négatif, alors que l'enjeu est d'encourager le travail et d'améliorer les salaires dans cette branche. On sait très bien que le travail saisonnier implique des heures supplémentaires. Ce n'est pas en faisant travailler les gens 35 heures que l'on résoudra le problème, car il y a des bras à trouver. Je veux bien comprendre que l'articulation se fera peut-être plus tard, mais, dans l'intervalle, on va accroître le coût du travail alors que le but est d'augmenter les salaires et d'être plus compétitifs.
Je vais vous donner cette pièce essentielle de mon dossier, monsieur le ministre, en espérant qu'elle vous fera fléchir.
Faut-il placer le seuil à 1,5 ou à 1,6 fois le SMIC ? Je suis loin d'être aussi compétent que mon collègue de l'UDI. (Sourires.) Nous ne sommes pas dans le même groupe, nous gardons donc notre liberté d'amender. Selon mes hypothèses de calcul, j'arrivais à environ 1,55. Dans le doute, j'ai proposé 1,6 parce que l'essentiel, pour moi, c'est d'éviter l'effet de trappe. Je préfère me tromper de 0,5 et avoir un dispositif efficace que l'inverse. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
(L'amendement n° 190 n'est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 212 et 235 ne sont pas adoptés.)
(L'article 60 est adopté.)
La parole est à M. le ministre pour soutenir l'amendement n° 245 portant article additionnel après l'article 61.
C'est un amendement sur les pépinières, comme celui que j'ai présenté ce matin. Il s'agit d'un transfert de compétence en Corse, avec un transfert des ressources nécessaires à l'application de cette compétence.
Favorable, à titre personnel car la commission n'a pas été saisie de cet amendement. C'est cohérent par rapport à ce que nous avons voté ce matin. C'est triste de devoir légiférer pour 23 000 euros, mais c'est ainsi… (Sourires.)
(L'amendement n° 245 est adopté.)
Cet amendement vise à fixer à 2 % l'augmentation maximale du taux moyen du plafond de la taxe pour frais de chambres d'agriculture.
Une telle évolution est strictement nécessaire, parce que cette taxe est fixe en valeur et ne dispose pas de la revalorisation des bases existant pour les communes, intercommunalités, conseils généraux et conseils régionaux, parce que la subvention de 2 millions d'euros reçue en 2012 à la suite de l'intégration des ADASEA a disparu, parce qu'il y aura des surcoûts dus aux conséquences de la privatisation de La Poste sur le coût des élections internes de janvier prochain, et pour diverses autres raisons développées dans l'exposé sommaire qui expliquent pourquoi l'on en arrive au chiffre de 6 millions d'euros.
De manière générale, les chambres d'agriculture sont un relais efficace et un partenaire utile pour tout ce qui concerne le développement de notre agriculture. Cette demande est la conséquence de leurs calculs internes. Elle est justifiée. Elles ont besoin d'une telle mesure pour développer ou maintenir leur activité. Je vous appelle donc à voter cette augmentation qui leur permettra de rester à flot.
Nous n'en avons pas discuté, puisque ces amendements n'ont pas été déposés en commission.
À titre personnel, je rappelle qu'il y a eu un accord avec les chambres d'agriculture pour fixer un taux pivot permettant ensuite de gérer entre les différentes chambres d'agriculture, c'est-à-dire qu'il y a un plafond global et qu'après, on redistribue.
Implicitement, le Gouvernement fixe le taux pivot à zéro puisqu'il n'y a rien sur le sujet dans la loi de finances, à moins qu'il n'envisage de déposer un amendement au Sénat.
Comme M. Aubert l'a rappelé, monsieur le ministre, les chambres d'agriculture ont plusieurs problèmes. D'abord, elles ont fait un vrai effort de réorganisation. Ensuite, l'intégration des associations départementales pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, les ADASEA, mesure sur laquelle le Gouvernement, avec raison, ne revient pas, a entraîné pour elles un surcoût de 2 millions d'euros puisqu'elles n'ont pas reçu les recettes correspondantes.
C'est une taxe additionnelle au foncier non bâti qui alimente les chambres d'agriculture. Le Gouvernement ne nous a pas encore dit de combien il envisageait de rééavaluer les bases du foncier non bâti mais, pour elles, ce n'est pas la même chose que pour les collectivités locales, pour lesquelles on fixe un taux. Là, le montant est fixé globalement puis réparti après un accord entre le Gouvernement et l'APCA, qui fait ensuite un effort de redéploiement, n'accordant aucune augmentation à certaines chambres et 1,5 ou 1,8 % à d'autres.
Mon amendement n'est pas très différent de celui de M. Aubert. Je propose que l'augmentation maximale du produit global de la taxe additionnelle perçue par l'ensemble des chambres départementales soit fixée à 1,8 %, soit le taux prévisionnel de l'inflation, selon les documents officiels du Gouvernement.
Vous aurez de très gros problèmes de gestion si vous maintenez le taux pivot à zéro. Si vous pensez qu'il faut encore descendre un peu en dessous de 1,8 %, on peut en discuter : il s'agit pour nous de lancer un appel au Gouvernement pour qu'il fixe un taux raisonnable.
Nous ne sommes pas là pour remettre en cause le travail des chambres consulaires, en particulier des chambres d'agriculture, dont la charge de travail a effectivement augmenté à la suite de l'intégration des ADASEA et qui travaillent quotidiennement pour le développement agricole.
De manière cohérente, nous avons demandé à l'ensemble des chambres consulaires, comme à l'État et aux collectivités locales, de faire des efforts, sauf aux chambres d'agriculture, pour lesquelles le taux est maintenu. Je ne vois donc pas pourquoi on augmenterait ce taux et je ne peux être favorable à ces amendements proposés par M. Aubert et M. de Courson.
Monsieur le ministre, j'ai été l'auteur du volet financier de la réforme des chambres de commerce et des chambres de métiers, et les propos que vous venez de tenir sont inexacts.
Nous avons régionalisé le financement des chambres de commerce, et elles bénéficient de l'augmentation de l'équivalent de la CSVAE, c'est-à-dire de l'augmentation de la valeur ajoutée produite dans les entreprises. Les chambres consulaires ne sont donc pas dans la même situation que les chambres d'agriculture. Pour les chambres de métiers, c'est plus compliqué puisqu'il y a la taxe et la taxe additionnelle alimentant la formation, sur laquelle elles ont une marge de manoeuvre. La majoration représente des sommes non négligeables par rapport à la taxe de base, éventuellement 20, 30, 40, 50 ou 60 % de plus.
Si vous voulez un certain parallélisme entre les trois régimes financiers des chambres consulaires, vous ne pouvez maintenir le taux à zéro pour les chambres d'agriculture alors qu'elles ont des charges supplémentaires.
Prenez par exemple le coût des élections qui ont lieu en janvier. Vos services vous ont-ils informé que La Poste avait décidé de faire payer ses services ? Autrefois, c'était le ministère qui payait. Maintenant, ce sont elles. Il faut 2 millions d'euros. M. Aubert l'a signalé et je le confirme, j'ai vérifié en tant que rapporteur spécial. Il manquera également 2 millions à cause de l'intégration des ADASEA.
Le produit de la taxe additionnelle au foncier non bâti, c'est 297 millions. Rien que ces deux exemples représentent 4 millions, c'est-à-dire 1,5 %. Si vous ajoutez d'autres charges dont a également parlé M. Aubert, vous en êtes au moins à 1,5 ou 1,8 %.
Le maintien d'un taux de 0 % entraînera de graves problèmes. Si vous voulez réserver un petit amendement pour le Sénat, comme il était classique, pourquoi pas, mais annoncez-nous que ce ne sera pas 0 %.
(Mme Laurence Dumont remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)
(L'amendement n° 189 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 211 n'est pas adopté.)
Sur ces crédits, je suis saisie d'un amendement n° 184 .
La parole est à Mme Brigitte Allain. pour le soutenir.
Cet amendement vise à renforcer les moyens de politique publique destinés à enrichir les connaissances dans le but de favoriser la mise au point de pratiques agricoles rentables sur le plan économique, respectueuses de l'environnement et riches en emplois.
La nécessaire réorganisation des filières associée à un changement d'échelle en matière d'agriculture durable nécessite des travaux spécifiques de recherche appliquée et de valorisation des savoir-faire paysans.
Dans cette optique, il s'agit simplement de faire un transfert du programme 775 vers le programme 776, plus structurant et innovant. Il comprend des appels à projet, des plans pluriannuels d'accompagnement de changement de pratiques pour les agriculteurs, et de la recherche appliquée.
En renforçant les moyens, il sera possible d'améliorer les connaissances et, grâce à la recherche appliquée, de disposer de préconisations aux bases scientifiques solides pour l'amélioration de l'efficience des intrants, l'optimisation des ressources des exploitations, le développement de l'agriculture biologique et l'organisation de ses filières.
Ce redéploiement donnera des moyens supplémentaires au Gouvernement et à l'administration pour entreprendre dès l'année 2013 une réorientation de l'agriculture.
Cet amendement n'a pas été examiné en commission.
Il y a deux programmes dans le compte d'affectation spéciale et accorder 5 millions d'euros supplémentaires à la recherche appliquée en diminuant les crédits de l'autre programme me paraît un peu dangereux.
J'y suis donc défavorable à titre personnel.
Madame la députée, vous évoquez les enjeux liés aux pratiques innovantes en agriculture. Vous savez que je suis attachée à faire évoluer l'ensemble des modèles de production, mais une telle réflexion doit être menée de manière globale dans le cadre d'une loi qui devra imaginer une organisation, un cadre juridique, un financement global du développement des nouveaux modèles de production. Je ne souhaite donc pas que l'on modifie les crédits des programmes 775 et 776.
Le changement…
…doit avoir lieu en pensant les nouveaux modèles de production en agriculture de manière globale.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement.
En commission, monsieur le ministre, je vous ai interrogé sur le CASDAR. La collecte prévisionnelle est de 115 millions d'euros et les dépenses telles qu'elles sont calibrées de 110 millions d'euros. Vous ne nous avez toujours pas expliqué comment vous comptez gérer ces 5 millions qui se baladent quelque part.
Madame Allain, 5 millions, c'est presque 10 % de la dotation du programme « Développement et transfert en agriculture ». Ce programme permet aussi aux chambres d'agriculture d'assurer le développement de l'agriculture biologique. Cela ne me paraît donc pas très cohérent par rapport aux positions traditionnelles de votre groupe, mais chacun fait comme il l'entend.
J'ai dit qu'il s'agissait du transfert d'un programme vers l'autre, le programme 776 étant davantage consacré à l'accompagnement des changements de pratiques agricoles et de la recherche appliquée. Toutefois, j'ai bien entendu la proposition de M. le ministre, qui souhaite que nous travaillions globalement sur cette question dans le cadre de la loi d'avenir sur l'agriculture, notamment afin de voir comment les transferts vers la recherche et le développement peuvent évoluer. Compte tenu de cette proposition, je retire l'amendement.
Plusieurs députés des groupes UMP et UDI. Et voilà !
(L'amendement n° 184 est retiré.)
Je souhaite répondre à la question de M. Herth. Les recettes du CASDAR passent de 100 à 105 millions. Vous connaissez la position de l'administration des finances aujourd'hui : elle essaiera de récupérer tout ce qui peut l'être. Au ministre de l'agriculture de défendre le budget du CASDAR, qui est important.
Je mets aux voix les crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».
(Les crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » sont adoptés.)
Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à l'agriculture, à l'alimentation, à la forêt et aux affaires rurales. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à la sécurité et à la sécurité civile (n° 251, annexes 43 et 44, nos 256 et 258).
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire pour la sécurité.
Madame la présidente, monsieur le ministre de l'intérieur, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, avant de vous présenter les 17,55 milliards d'euros de crédits de la mission « Sécurité », augmentée pour 2013 du programme « Sécurité et éducation routières », et le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routier », quelques mots pour rappeler les nouvelles orientations de la politique de sécurité.
Monsieur le ministre, vous avez exposé ces nouvelles orientations le 12 juillet dernier devant la commission des lois de cette assemblée ; je vous cite : « En matière de sécurité publique, un seul mot d'ordre guidera mon action : la République doit être partout, dans les villes, dans les quartiers, dans les villages. Il ne doit pas y avoir un seul espace où la loi du plus fort ne le cède aux lois de la République. » Vous avez affirmé les mêmes convictions le 19 septembre, à l'École militaire, devant les forces de sécurité.
Mes chers collègues, la mission « Sécurité » du projet de loi de finances pour 2013 en est la traduction concrète. Priorité du Gouvernement avec la justice, l'éducation et l'emploi, la mission « Sécurité » est l'une des rares à voir ses crédits progresser dans ce projet de loi de finances marqué par la nécessité du redressement des finances publiques. Ainsi prend fin le désarmement matériel et moral de la police et de la gendarmerie ; ainsi s'achève une période caractérisée par les suppressions de postes, la frénésie législative et l'improvisation au quotidien. C'en est fini des injonctions paradoxales faites aux forces de sécurité, sommées de tenir des objectifs chiffrés toujours plus élevés avec des moyens humains et matériels toujours plus réduits.
À la politique du chiffre va ainsi succéder une culture du résultat, un résultat évalué non seulement quantitativement mais aussi qualitativement, avec la volonté de réconcilier la société française avec celles et ceux qui la protègent et de leur donner les moyens humains et matériels d'accomplir leur mission.
En premier lieu, après une décennie qui a vu se multiplier les tensions entre les citoyens et les différents acteurs de la sécurité, et dans une société de plus en plus dure, violente, où la remise en cause de l'autorité sous toutes ses formes est fréquente, il s'agit de rétablir la confiance et de construire un consensus autour des valeurs de la République. La nouvelle politique vise donc à renforcer les liens entre forces de l'ordre et citoyens. Vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre : « Une police qui ne travaille pas dans un climat de confiance travaille moins efficacement. » Cette confiance se noue d'abord sur le terrain, par une présence visible et un contact aussi fréquent et diversifié que possible avec les habitants, ce que les suppressions de postes des cinq dernières années avaient rendu bien difficile.
Vous souhaitez en second lieu faire du renforcement de l'éthique et de la déontologie une préoccupation permanente. À cette fin, vous avez annoncé l'ouverture d'un premier chantier : la rénovation du dispositif de formation.
La réponse aux priorités se trouve à la fois dans une mesure emblématique – la création des zones de sécurité prioritaires – et dans un effort, certes moins nouveau mais qui se poursuit, d'optimisation et de coordination des ressources, avec une mutualisation accrue des fonctions supports en même temps qu'une réduction des missions périphériques, comme les transfèrements, afin de libérer des ressources pour la mission centrale de lutte contre la délinquance.
Vous concevez les zones de sécurité prioritaires comme des zones de concentration des moyens et, au moins autant, voire surtout, comme des terrains d'expérimentation pour la mise en oeuvre des principes fondateurs de la nouvelle politique de sécurité publique : responsabilisation de tous les acteurs de la sécurité, ancrage local d'une action qui doit s'adapter aux spécificités du terrain, optimisation et coordination des ressources, formation de partenariats solides et efficaces, en particulier avec les maires et les élus locaux. Ces ZSP ne sont pas appelées à constituer un dispositif spécifique, mais correspondent davantage à la mise en oeuvre, sur des territoires ciblés en raison de leurs difficultés et de la présence d'une délinquance enracinée, d'une méthode au service de l'action et de personnels formés et expérimentés. Mon collègue rapporteur pour avis de la commission des lois, Jean-Pierre Blazy, y a consacré l'essentiel de son rapport ; je n'en dirai donc pas plus.
Enfin, vous considérez, monsieur le ministre, qu'au-delà de la réforme de la formation des policiers, il convient de rationaliser davantage encore l'organisation de la sécurité publique. De nouvelles évolutions de compétence territoriale devraient intervenir, après une concertation approfondie – ce qui est nouveau – avec les élus comme avec les personnels, et à condition qu'elles accroissent véritablement l'efficacité de chacune des deux forces. Le renforcement du soutien logistique devrait procéder d'un élargissement des mutualisations.
Dans mon rapport, je donne deux coups de projecteur, l'un sur la police technique et scientifique, l'autre sur un sujet dont la précédente majorité s'est beaucoup moins préoccupée : la lutte contre la délinquance économique et financière.
Dans un contexte budgétaire contraint, le renforcement de la police technique et scientifique constitue toujours une priorité, ce qui passe, selon moi, par un recentrage qualitatif. Le « tout-ADN » est coûteux. Il comporte en outre le risque de négliger les autres techniques de la police scientifique. Dans ce domaine où les prix peuvent devenir exorbitants faute de véritable concurrence, le dispositif français de recours aux laboratoires publics apporte la meilleure garantie contre toute forme de dérive financière. Il convient en outre de limiter les prélèvements génétiques de masse à ce qui apparaît nécessaire et utile, en particulier dès la phase initiale de constatations techniques et de recherche de traces. Là encore, il est souhaitable de passer d'une politique du chiffre à une culture du résultat orientée vers la recherche d'une efficience réelle.
Les crédits ainsi économisés pourraient alors être mis au service des autres secteurs de la police technique et scientifique : balistique, entomologie, analyse morphologique des traces de sang, numérisation des scènes d'infraction, exploitation des traces numériques...
Autre focus de mon rapport : la lutte contre la délinquance financière. Elle donne moins lieu à affichage que le déploiement de forces de sécurité sur la voie publique. Elle est pourtant tout aussi essentielle car les produits de la délinquance nécessitent toujours un traitement par ceux qui les accaparent : un recyclage, du blanchiment.
Au-delà des faits constatés, il faut donc s'attacher à suivre le parcours des produits et des profits de la criminalité. L'actualité récente a encore mis en évidence, avec l'opération Virus, l'efficacité de la police judiciaire dans le démantèlement d'un réseau international de blanchiment, et il convient de saluer ce succès.
Les services de police judiciaire dépendant de la sous-direction de la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance financière, traitent l'essentiel des grandes affaires de délinquance financière. La gendarmerie, a contrario, prend en charge une bonne part des petites infractions commises en zone rurale, infractions simples pour lesquelles la réponse pénale est malheureusement le plus souvent inexistante.
Je me permets, monsieur le ministre, de suggérer que ce sujet entre dans la réflexion que vous avez engagée avec la garde des sceaux et les services de justice. Il est en effet indispensable d'améliorer les sanctions de ces infractions, peu spectaculaires mais dont les conséquences sont souvent très graves pour les victimes. J'insiste, au nom de ces victimes invisibles et sans voix, pour lesquelles l'État est encore « le plus froid des monstres froids ».
Les services généralistes de la police nationale renvoient, eux, le traitement de ces petites infractions aux services interrégionaux ou régionaux de police judiciaire, voire aux structures nationales installées à Nanterre. Il en résulte un encombrement de ces structures mises en place pour mener des investigations sur des montages complexes. La petite escroquerie n'exige pourtant pas l'intervention de personnels formés à identifier des réseaux de trafics internationaux. Il y a là un gâchis, allant à rebours de l'exigence d'utilisation optimale des moyens. Il faut donc améliorer le traitement direct des petites infractions financières à la bonne échelle, par les services généralistes. Ils ont toutes les compétences pour cela.
Parallèlement, il convient de redéployer les moyens des services spécialisés sur le traitement des infractions les plus importantes. Dans ce domaine, l'efficacité passe par la possibilité de saisir les avoirs des grands délinquants, menace beaucoup plus dissuasive pour eux que celle de l'enfermement. Les services de police concernés souhaitent donc une amélioration et une extension des procédures de saisie.
J'en viens à l'analyse des 17,55 milliards d'euros de crédits de la mission sécurité. La part des dépenses de personnel constitue plus de 90 % des dotations du programme « Police » et plus de 85 % du programme « Gendarmerie nationale ». Les contributions aux pensions de retraite progressent en particulier de 6,08 %.
Après des années noires, la mission « Sécurité » voit en 2013 les moyens des forces de sécurité intérieure augmenter. Ainsi, après cinq ans de diminution continue, et alors que 3 200 suppressions de postes étaient encore prévues pour 2013 par l'ancienne majorité, 480 créations nettes d'emplois interviendront l'an prochain : 288 de policiers et 192 de gendarmes. C'est la première étape d'un plan visant à créer 5 000 emplois en cinq ans pour la sécurité et la justice, conformément aux priorités du Gouvernement.
Cependant, la mission contribuera, elle aussi, à la maîtrise des dépenses publiques, en particulier par une réduction des crédits de fonctionnement, épargnant les missions opérationnelles, la volonté de tous étant de préserver les capacités opérationnelles des deux forces. Pour le reste, des préoccupations demeurent : sur la maîtrise de la masse salariale dans la police, et en particulier l'impact des mesures catégorielles et indicielles, sur les moyens de fonctionnement et sur la question de l'immobilier. Nous en reparlerons.
Cette année, la mission est augmentée du programme 207 « Sécurité et éducation routières », rattachement sur lequel je formulerai deux observations.
En premier lieu, les crédits de ce programme font plus que doubler en 2013 du fait de transferts d'effectifs précédemment inscrits sur le programme support de la mission « Écologie ». Mais ces transferts sont partiels : 1 526 ETPT ont été rattachés mais 959 emplois restent inscrits sur le programme 217, tout en concourant à la sécurité routière. C'est ce que l'on appelle une cote mal taillée.
Par ailleurs, ce programme « Sécurité et éducation routières », aux crédits limités de 129 millions d'euros – à comparer aux quelque 9 milliards du programme « Police nationale » et aux près de 8 milliards du programme « Gendarmerie nationale » – procède davantage du pilotage de la politique de sécurité routière que de l'opérationnel. Il serait donc à mon sens plus judicieux de l'intégrer à la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
Passons enfin au délicieux compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », dont on m'a demandé de rapporter les crédits. Je ferai plusieurs remarques sur sa situation actuelle. En premier lieu, les masses budgétaires en jeu sont considérables : 1,4 milliard d'euros, essentiellement assuré par une fraction des amendes de la circulation. Ensuite, malgré le schéma d'emploi du produit des amendes qui figure en page 486 du tome II du rapport général, les flux et les situations de trésorerie ne sont pas clairs.
Selon les informations qui m'ont été transmises, les prévisions de recettes actualisées des amendes forfaitaires radars pour l'année 2012 sont de 603 millions d'euros, mais ce montant ne comprend pas les amendes radar majorées, et ce n'est qu'un exemple. De plus, le délégué interministériel à la sécurité routière, M. Péchenard, communique dans la presse sur d'autres chiffres, plus élevés – ce qui est à la fois une bonne nouvelle pour les finances publiques et tout à fait fâcheux pour votre rapporteure. Je pense que ce manque de clarté est une petite erreur de début de législature et que ce sera corrigé.
Enfin, les dépenses du compte d'affectation spéciale concernent des domaines importants de la sécurité routière : les radars automatisés, le Fichier national du permis de conduire, le déploiement du procès-verbal électronique. Mais ce sont des domaines subsidiaires au plan budgétaire. En effet, plus de 80 % des dotations du compte alimentent les collectivités locales et le désendettement de l'État. En première partie de l'examen du projet de loi de finances, notre assemblée a voté deux mouvements sur les recettes du compte en réaffectant de l'agence de financement des infrastructures de France – l'AFITF – vers les collectivités locales 10 millions d'euros provenant des amendes radars, et 10 millions d'euros provenant des amendes de police vers le fonds interministériel de prévention de la délinquance – le FIPD –, restant ainsi dans une logique de prévention.
La commission des finances a adopté le budget de la mission « Sécurité » et du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routier » sur ma proposition, et je vous invite bien entendu, mes chers collègues, à adopter ces crédits qui me semblent correspondre en tout point à cette citation d'une figure qui vous est chère, monsieur le ministre, Clemenceau : « Il faut d'abord savoir ce que l'on veut, il faut ensuite avoir le courage de le dire, il faut ensuite l'énergie de le faire. » Monsieur le ministre, vous ne manquez ni de clarté, ni de courage, ni d'énergie, et nous non plus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Patrick Lebreton, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire pour la sécurité civile.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, je suis chargé de présenter la position de la commission des finances sur le projet de budget de la mission « Sécurité civile » pour 2013.
Je voudrais rappeler, en premier lieu, qu'en France la politique de la sécurité civile est définie au niveau national, mais qu'elle est largement gérée et financée à l'échelon de nos collectivités territoriales. Ainsi, les dépenses d'ensemble que l'État effectue pour la sécurité civile sont évaluées à environ un milliard d'euros, mais les collectivités territoriales y consacrent annuellement près de 5 milliards. Les crédits de la mission « Sécurité civile » dont je présente, dans mon rapport spécial, l'évolution prévue pour 2013, ne représentent d'ailleurs que 40 % environ des dotations que l'État affecte à la sécurité civile de nos concitoyens. Les intervenants dans ce domaine sont nombreux.
Avant de procéder avec vous à l'examen des moyens budgétaires consacrés à la mission pour l'exercice 2013, je voudrais, mes chers collègues, insister sur trois points.
Tout d'abord, s'il y a obligation de parvenir à une gestion rationnelle et optimale des crédits qu'impose la situation de nos comptes publics, cela ne doit pas faire oublier la nécessité d'actions résolues au profit des victimes de situations de crise. Les effets dévastateurs de la tempête Xynthia qui a frappé plusieurs de nos départements de l'Ouest en février 2010 et des feux de forêts du Maïdo sur l'île de La Réunion à la fin de 2011, comme ceux du tsunami de mars 2011 au Japon, où notre pays a envoyé des sauveteurs, sont bien présents dans notre mémoire.
L'analyse, peut-être parfois aride, des chiffres, des données financières, ne doit par ailleurs pas masquer les réalités humaines. Ainsi, toutes les trente-neuf minutes, une personne est secourue en France par hélicoptère, et en 2011, onze sapeurs-pompiers sont décédés en service et 1 210 ont été victimes d'agressions sur l'ensemble du territoire national et, chaque jour, les femmes et les hommes intervenant en sécurité civile donnent l'exemple du courage et de l'engagement. Et je n'oublie les deux victimes de ce samedi, un sapeur-pompier professionnel et un sapeur-pompier volontaire, qui ont tragiquement péri au cours d'une intervention.
Enfin, je veux vous rendre hommage, monsieur le ministre, pour votre action et souligner tout particulièrement la détermination dont vous avez fait preuve à de nombreuses reprises depuis votre entrée en fonction.
Je vais donc présenter l'évolution des crédits de la mission « Sécurité civile » avant d'analyser l'action des autres acteurs de ce secteur, tout particulièrement celle des SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours.
La mission « Sécurité civile » est composée de deux programmes budgétaires dédiés à la protection des populations et à la gestion des crises : Le programme 161, « Intervention des services opérationnels », regroupe les moyens nationaux de sécurité civile que l'État met à la disposition de la population au quotidien ou lors de catastrophes majeures, naturelles ou technologiques ; le programme 128, « Coordination des moyens de secours », quant à lui, permet la mise en oeuvre de projets visant à la coordination des acteurs locaux et nationaux susceptibles de contribuer à la préparation et à la gestion des crises. Le projet de loi de finances propose de porter les crédits de la mission à 409,09 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une hausse de 0,08 % par rapport à 2012, et à 440,26 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 0,78 % par rapport à 2012, ce qui représente un signal fort lorsque l'on considère la situation des comptes publics de notre pays. Les demandes de crédits correspondent, pour le programme « Intervention des services opérationnels », à une augmentation de 6,3 % en autorisations d'engagement et de 6,7 % en crédits de paiement pour 2013. En revanche, le programme « Coordination des moyens de secours » voit ses dotations diminuer de 10,2 % pour les autorisations d'engagement et de 8,05 % pour les crédits de paiement.
Je développe l'analyse des moyens prévus dans mon rapport écrit mais souhaite évoquer, quelques instants, cette priorité que constitue la lutte contre les feux de forêt. Les crédits de l'action 1 du programme 161, « Participation de l'État à la lutte aérienne contre les feux de forêts », qui représentent 23,6 % des moyens de ce programme, correspondent à l'activité des vingt-six avions de la sécurité civile dont l'emploi, complémentaire de celui des moyens des SDIS, vise à assurer la détection rapide des feux de forêts et leur traitement avec des moyens de lutte aérienne adaptés. La flotte comprend douze avions bombardiers d'eau amphibies Canadair, neuf bombardiers d'eau ravitaillés au sol Tracker, trois avions d'investigation et de liaison Beechcraft 200 et deux avions polyvalents bombardiers d'eau Dash 8, tous mis à la disposition des préfets de zone. Sont prévus pour cette action 64,21 millions d'euros en autorisations d'engagement et 64,45 millions d'euros en crédits de paiement. Ces moyens concernent aussi le fonctionnement courant de la base avions de la sécurité civile, le financement du carburant aérien, du produit retardant, la location de trois bombardiers d'eau pour la saison « feux », mais surtout la maintenance des vingt-six avions de la sécurité civile pour 43,3 millions d'euros. Cette action fait figure de véritable priorité budgétaire, le Gouvernement ayant insisté sur la nécessité d'un maintien en condition opérationnelle des avions de lutte contre les feux de forêts. De fait, l'action « Participation de l'État à la lutte aérienne contre les feux de forêts » est celle qui connaît la plus forte hausse des moyens prévus pour la sécurité civile – plus 19,8 % en autorisations d'engagement et plus 19,5 % en crédits de paiement.
Un problème sensible rencontré au cours des dernières années réside dans l'obsolescence des avions amphibies de type Tracker, particulièrement utilisés dans l'attaque des feux naissants, et qui doivent être retirés du service entre 2016 et 2020. Des expérimentations sont menées pour trouver un type d'aéronef apte à remplacer en totalité la flotte de Tracker à l'horizon 2020. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises a envisagé ainsi la location d'aéronefs de type Air Tractor afin d'évaluer leur aptitude à remplacer, à terme, les avions Tracker.
Je vais évoquer maintenant les grands programmes d'investissement retenus en matière de sécurité civile.
Je pense d'abord à la création d'un centre commun de formation et d'entraînement civil et militaire pour les risques nucléaires, radiologiques, bactériologiques, chimiques et explosifs recommandée par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, qui doit intervenir avant la fin de 2012. La création d'un tel centre doit mettre un terme à l'hétérogénéité des formations jusqu'à maintenant prodiguées aux décideurs et à l'insuffisance des entraînements communs.
Je dois vous parler aussi de la mise en place du SAIP, le système d'alerte et d'information des populations, voué à remplacer l'actuel Réseau national d'alerte. Ce nouveau système d'alerte est un dispositif de proximité concernant des bassins de risques et fonctionnant à partir de sirènes mises en réseau renforcé par d'autres moyens d'alerte. Le mécanisme est complété, élément de nouveauté, par l'envoi de messages-textes sur tous les téléphones portables présents dans la zone concernée. Le dispositif partenarial actuel, élaboré avec les radios et télévisions du service public, est par ailleurs maintenu. Le SAIP a deux fonctions essentielles : une fonction d'alerte et une fonction d'information Le premier marché a été lancé au premier semestre 2011. Le budget initial avait été initialement estimé à 78 millions d'euros, et le noyau central du SAIP correspondant aux équipements indispensables à sa réalisation doit nécessairement s'inscrire dans la limite de 44,7 millions d'euros en autorisations d'engagement programmés par la loi du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure – la LOPPSI. Les négociations se poursuivent avec les opérateurs de téléphonie mobile dans le cadre de marchés pour l'envoi de messages d'alerte et d'informations sur les téléphones portables. Le dispositif SAIP, qui mobilisera 32 millions d'euros dans le prochain triennal, permettra l'usage de SMS. Il a sûrement connu un coup d'accélérateur avec la tempête Xynthia.
J'évoquerai aussi la création d'un centre national d'alerte spécifique au risque tsunami dans le bassin méditerranéen. À la suite du tsunami de Sumatra du 26 décembre 2004 et de la conférence de Kobé, la commission océanographique intergouvernementale de l'Unesco a été chargée par la communauté internationale de mettre en place un système d'alerte aux tsunamis dans chacun des bassins océaniques concernés. La France, présente sur plusieurs mers et océans, s'est engagée à développer un centre national d'alerte aux tsunamis pour l'Atlantique Nord-Est et la Méditerranée, à vocation régionale pour la Méditerranée occidentale. En mars 2009, à l'initiative du ministère de l'écologie et du ministère de l'intérieur, le Commissariat à l'énergie atomique s'est vu confier la mission de constitution puis d'exploitation du centre. Le Centre national d'alerte aux tsunamis – le CENALT –, implanté sur le site du CEA de Bruyères-le-Châtel, dans l'Essonne, est ainsi opérationnel depuis le 1er juillet dernier, et ce vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Chacun peut se réjouir de la mise en place, intervenue au cours de cette année, d'un centre d'alerte aux tsunamis pour la Méditerranée.
Je mentionnerai enfin le programme ANTARES – Adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours –, qui vise à une interopérabilité des moyens de communication des différents services publics concourant aux missions de sécurité civile. C'est un réseau unique, permettant la communication entre tous les intervenants de la sécurité civile et nationale, et utilisable en tout point du territoire. En 2012, 65,6 % des sapeurs-pompiers sont équipés de ses terminaux, les perspectives pour 2013 conduisant à un taux de migration de 75 % ; soixante-dix départements sont actuellement concernés et la couverture devrait être totale dans quatre ans.
Depuis 2007, l'État a assumé la charge financière du déploiement du réseau ANTARES sur l'ensemble du territoire et participé, par le biais du fonds d'aide à l'investissement – le FAI – des services départementaux d'incendie et de secours, aux dépenses d'investissement engagées par ces derniers afin d'acquérir les équipements, notamment les terminaux, pour un montant global de 32 millions d'euros. 4 millions d'euros de travaux nouveaux ont été engagés par l'État en 2012. À partir de 2013, l'État, qui a pour objectif prioritaire d'achever le développement d'ANTARES, prévoit d'engager 17,75 millions d'euros de travaux jusqu'en 2015 et 7,1 millions d'euros en 2016, ce qui correspond à un montant global d'investissement de 120 millions d'euros. Pour 2013, les crédits de paiement prévus au titre du fonds d'aide à l'investissement ne s'établissent qu'à 3,9 millions d'euros ; ces crédits assureront le financement des opérations ayant bénéficié, au cours des exercices précédents, d'une subvention au titre du FAI mais qui n'ont pas encore été achevées par les SDIS bénéficiaires.
J'en viens à une brève analyse de l'action des autres intervenants, très nombreux, de la sécurité civile. Les actions menées en matière de sécurité civile ne peuvent se résumer, mes chers collègues, à celles qui sont retracées dans les programmes budgétaires 161 et 128. Le monde de la sécurité civile comporte un ensemble très vaste d'acteurs relevant de la sphère publique, en particulier les services départementaux d'incendie et de secours, ou de la sphère privée. Un montant global de plus d'un milliard d'euros est prévu pour 2013 par les différents ministères en faveur de la sécurité civile. Près de 650 millions d'euros en autorisations d'engagement sont ainsi consacrés par les autres ministères à ces actions, s'ajoutant aux crédits gérés par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises et rassemblés dans la mission « Sécurité civile ».
Les SDIS sont un acteur public essentiel. Le nombre de sapeurs- pompiers regroupés dans les SDIS est voisin de 250 000, dont 195 000, c'est-à-dire pratiquement 80 %, sont sapeurs-pompiers volontaires, 40 500 – 16 % – sapeurs-pompiers professionnels et 12 200 militaires, relevant de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris ou du bataillon des marins-pompiers de Marseille.
En 2011, les effectifs de sapeurs-pompiers volontaires sont en légère baisse, de 0,3 %, ceux de sapeurs-pompiers professionnels augmentant très légèrement, de 0,5 %. La féminisation des sapeurs-pompiers reste stable : 13 % en 2011 comme en 2010.
Le nombre de centres d'incendie et de secours est en léger accroissement : 7 296 contre 7 277 en 2010. Si les dépenses des SDIS ont progressé de 10,71 % entre 2007 et 2009, elles ne se sont accrues que de 1,5 % en 2010 et sont stabilisées depuis 2011. Le coût moyen par habitant est de 80 euros par mois. La répartition du financement des SDIS par les collectivités territoriales n'a pas évolué et se maintient à 56 % pour les départements et 44 % pour les communes et établissements publics de coopération intercommunale.
Dans mon rapport écrit, j'aborde les questions posées au statut des sapeurs pompiers professionnels et volontaires, rappelant que ces derniers constituent 80 % des effectifs et assurent 70 % des interventions.
Avec le directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, M. Kill, que j'ai rencontré dans le cadre de la préparation de ce débat budgétaire, je voudrais vous rappeler que le système français, fondé sur la complémentarité des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, favorise la maîtrise des coûts au profit des contribuables, tout en assurant aux citoyens des secours de qualité dans des délais raisonnables en tout point du territoire. Les 7 400 centres existants en font le plus dense de nos réseaux de service public.
Ce modèle a fait ses preuves. Sa remise en cause pourrait, à service rendu constant, conduire au recrutement de plus de 60 000 sapeurs-pompiers professionnels supplémentaires, pour un montant estimé à 2,5 milliards d'euros, que les collectivités territoriales ne seraient pas en mesure de supporter. Parce qu'il fait référence aux notions d'engagement et de volontariat, ce modèle offre aussi un exemple de civisme authentique.
Je termine en évoquant ces autres acteurs essentiels que sont les formations militaires de sapeurs-pompiers, brigade des sapeurs-pompiers de Paris et bataillon des marins-pompiers de Marseille, dont les interventions connaissent une croissance constante et qui sont de plus présentes dans le domaine des secours à personne.
La sécurité civile étant l'affaire de tous et une école permanente de civisme, il me faut mentionner aussi les acteurs privés que constituent tout particulièrement les réserves communales constituées de citoyens bénévoles et des associations.
À titre plus personnel, j'aurais voulu souligner l'effort en direction des outre-mer, territoires qui sont exposés à la quasi-totalité des risques naturels, avec la création de la base héliportée de Martinique et le réaménagement de la zone aéroportuaire du Raizet en Guadeloupe. Je n'oublie pas non plus, monsieur le ministre, l'attention toute particulière qui a été portée au risque incendie à La Réunion, où le prépositionnement d'un avion Dash 8 a permis de circonscrire près de onze départs de feux en moins d'un mois, évitant ainsi le désastre de l'an passé.
J'en termine, madame la présidente.
La diversité des crises et des menaces nous impose à tous un effort permanent de lucidité, de courage et de civisme.
La commission des finances a estimé que les crédits prévus en matière de sécurité civile pour le nouvel exercice budgétaire permettaient de faire face à des situations difficiles. Elle a donc adopté les crédits de la mission pour 2013, ce que je vous demande à mon tour de faire, mes chers collègues. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Daniel Boisserie, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées pour la gendarmerie.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Président de la République a fait de la mission sécurité une priorité politique publique et le PLF pour 2013 traduit cet engagement dans les faits.
L'ensemble des crédits de la mission est globalement stable entre 2012 et 2013, autour de 7,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, ce qui représente un premier effort dans le contexte de rétraction des dépenses de l'État.
Tout d'abord, nous nous réjouirons tous de l'augmentation des effectifs de la gendarmerie. Hors évolution de périmètre, le gain sera faible mais existant : 193 gendarmes en équivalent temps plein. Il s'agit d'un ballon d'oxygène particulièrement bienvenu qui permettra aux gendarmes de faire face aux sollicitations toujours plus nombreuses dont ils sont l'objet. C'est surtout une inversion positive de la courbe après une baisse régulière du nombre de gendarmes.
Les crédits de fonctionnement avaient atteint un niveau relativement faible à la suite de plusieurs années de réduction. Pour 2013, cette tendance est stoppée et les crédits sont stables. On pourrait souhaiter plus et on souhaitera plus pour les prochaines années, mais il s'agit d'un premier progrès. Ces crédits permettront de faire face aux besoins essentiels, sans plus.
Le poste carburant pose une réelle difficulté. Les missions de service public imposent aux gendarmes de parcourir l'ensemble du territoire national. Ils bénéficient pour ce faire d'une dotation globale exprimée en litres. Il faut espérer que les prévisions seront justes, faute de quoi leur croissance excessive contraindrait à de pénibles arbitrages. Quand on visite des brigades, on se rend compte qu'à la fin de l'année certains gendarmes font de la marche à pied, ce qui est sans doute excellent pour la santé mais ne va pas sans poser quelques problèmes. (Sourires.)
L'arbitrage pour cette année a été de limiter les crédits d'investissement lourd dans le domaine immobilier pour des raisons sur lesquelles je reviendrai. La baisse est importante puisque l'enveloppe passe de 289 millions d'euros à environ 165 millions. Ce montant permet de parer au plus pressé en véhicules, en systèmes d'informations et en travaux urgents. Il est évident qu'il faudra dégager plus tard des crédits importants pour faire face aux besoins immobiliers.
En revanche, les crédits d'investissements du programme 152 permettront de répondre aux besoins pressants de la gendarmerie : les travaux urgents, l'achat pour 40 millions d'euros de véhicules, la modernisation des systèmes d'information et communication. Ces chantiers essentiels devaient être conduits.
Ces moyens permettront aux gendarmes d'assurer des missions nombreuses et toujours plus exigeantes. Je retiens tout d'abord l'évolution lente mais profonde de la place du gendarme dans la société : il est de plus en plus impliqué dans les drames du quotidien tels que les conflits familiaux.
Au titre de ses missions traditionnelles, je relève sa forte mobilisation face à la croissance des cambriolages, notamment face à la délinquance itinérante. C'est un vrai problème que j'ai vécu encore cette semaine dans ma circonscription. Les délinquants très organisés et équipés de moyens modernes mènent des raids de plus en plus rapides et efficaces.
Outre-mer, la gendarmerie déploie des moyens essentiels au maintien de l'ordre et de notre souveraineté, que ce soit à Mayotte où en Guyane où il faut signaler l'investissement exemplaire dans l'opération Harpie de lutte contre l'orpaillage clandestin.
Elle est également engagée en opérations extérieures, ce qui nous a valu de nous rendre au Kosovo où soixante-dix gendarmes sont déployés, dont cinquante-deux dans le cadre programme de formation de l'Union européenne, Eulex. Les gendarmes font ce qu'ils peuvent mais ils ne sont pas assez nombreux, eu égard au matériel blindé notamment. Faut-il maintenir ces gendarmes au Kosovo ? On peut se poser la question et nous en avons parlé, monsieur le ministre. Je pense vraiment que nous devons nous retirer du Kosovo.
Dans une démarche plus prospective, le constat des difficultés liées au casernement de la gendarmerie m'a conduit à consacrer un développement spécifique aux questions immobilières et je me suis efforcé de recenser les principales difficultés qui concernent notamment les casernes domaniales.
Le reste du casernement est plutôt en bon état, surtout lorsque les collectivités locales se sont efforcées de réaliser des améliorations importantes. Mais le coût des loyers…
Le ministère et la direction générale de la gendarmerie nationale mettent néanmoins en oeuvre des mesures d'amélioration du parc, comme l'isolation thermique.
Parmi les quelques pistes évoquées pour améliorer la situation, citons une réorganisation qui justifierait la baisse des engagements en matière immobilière. Un peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie ne doit plus être à une heure de son lieu d'intervention. Là où les casernements sont en mauvais état, il faut peut-être supprimer les brigades de quatre gendarmes qui sont totalement inefficaces. Il faut développer la vidéoprotection ou vidéosurveillance, ce que j'ai fait dans ma commune. Il faut essayer de supprimer les enclaves qu'elles soient de police en zone de gendarmerie ou l'inverse. Voila tout un ensemble de mesures à apprécier.
Je vais conclure sur l'annulation de loi dite Duflot, qui nous pose aussi quelques problèmes car le produit des cessions immobilières de la gendarmerie servirait à financer le logement social. Il serait tout de même paradoxal de financer du logement social en aggravant encore la situation du casernement des gendarmes. Je souhaite que les préfets, appelés à arbitrer en la matière, le fassent d'une manière bienveillante. Monsieur le ministre, je souhaite aussi que vous suiviez le problème de très près lorsque la loi Duflot réapparaîtra.
Merci, madame la présidente, de m'avoir accordé quelques secondes supplémentaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Plutôt quelques minutes (Sourires), et je vous rappelle que je suis contrainte de vous rappeler à votre temps de parole puisque la répartition a été faite par les commissions elles-mêmes.
La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour la sécurité.
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, François Hollande en a pris l'engagement lors de la campagne présidentielle : la sécurité est une priorité.
C'est une priorité pour tous nos concitoyens qui aspirent à vivre paisiblement dans une société perturbée par l'incivilité et trop souvent par la violence. C'est une priorité pour les policiers et les gendarmes qui assurent leurs missions dans des conditions souvent difficiles.
Comment ne pas s'indigner quand le nombre de blessés et de morts augmente depuis de nombreuses années parmi nos forces de l'ordre ? Un chiffre vient de tomber et nous ne pouvons que nous en alarmer : 4 665 policiers et gendarmes ont été blessés dans des agressions depuis le début de l'année 2012. Autrement dit, dix-sept membres des forces de l'ordre sont victimes de violences chaque jour. C'est pourquoi je tiens ici à rendre hommage à tous ces hommes et femmes qui agissent au quotidien pour assurer la sécurité de nos concitoyens.
La droite a longtemps prétendu et prétend encore détenir le monopole de la sécurité, critiquant une gauche considérée comme laxiste. Or la période écoulée depuis 2002 a prouvé, s'il en était besoin, que la droite n'a pas apporté de véritables solutions à l'insécurité vécue et ressentie.
Entre coups de Kärcher et politique du chiffre, les citoyens ne se sentent pas plus en sécurité en 2012, comme l'ont montré plusieurs enquêtes d'opinion.
Faut-il rappeler les effets néfastes de la révision générale des politiques publiques ? Depuis cinq ans, 10 700 emplois de policiers et de gendarmes ont été supprimés du fait du non-remplacement des départs en retraite. Si elle avait été maintenue, la RGPP aurait entraîné la suppression de 3 200 postes supplémentaires pour l'année 2013. Voilà le bilan de la droite en matière de sécurité !
Comment alors s'étonner que, selon l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, les violences physiques crapuleuses et non crapuleuses aient augmenté depuis 2007 de près de 10 % ? Comment s'étonner de l'augmentation des difficultés rencontrées sur le terrain par nos forces de l'ordre soumises à une culture du chiffre quand leurs moyens n'ont cessé de diminuer ?
Le Gouvernement s'est donné un objectif prioritaire : mettre fin à la forte réduction des effectifs de la police et de la gendarmerie. Ainsi, tous les départs en retraite seront désormais remplacés. De plus, la création de 480 postes dans la police et la gendarmerie en 2013, dont 288 dans la police et 192 dans la gendarmerie, participe de l'effort du Gouvernement de rétablir une véritable politique de sécurité en France. Cette politique se veut pérenne puisque 1 440 postes devraient être créés entre 2013 et 2015, dans le cadre du plan triennal.
Cela étant, nous sommes conscients que l'augmentation des ressources humaines sans l'apport adéquat de moyens de fonctionnement serait un cautère sur une jambe de bois. Or, depuis cinq ans, les moyens de fonctionnement de la police et de la gendarmerie ont diminué de 18 %. Savez-vous que la gendarmerie a réduit en 2012 ses achats d'armes et de munitions au strict minimum ? Savez-vous qu'il n'y a eu cette année aucun renouvellement des équipements informatiques et de transmission ?
Avec le budget pour 2013, toutes les dépenses courantes seront financées : 8 millions d'euros seront notamment consacrés à l'acquisition de munitions de service et d'instruction ; le renouvellement complet des équipements numériques sera enfin assuré ; 90 millions d'euros seront alloués au renouvellement du parc automobile actuellement en grande souffrance, dont 50 millions pour la police et 40 millions pour la gendarmerie. Monsieur le ministre, il serait indispensable de rendre effectif le dispositif législatif prévu par la loi du 9 juillet 2010 qui vise à faciliter la saisie et la confiscation des véhicules en matière pénale, et dont l'application rencontre encore de grandes difficultés.
Le budget pour 2013 permettra également des avancées catégorielles, sujet essentiel pour les policiers et gendarmes et pour leurs syndicats. Ceux que j'ai rencontrés s'inquiètent de ne pouvoir connaître de progression indiciaire. Dans ce budget, 29 millions d'euros supplémentaires y seront consacrés pour la police et 31 millions pour la gendarmerie.
Nous ne pouvons nier, néanmoins, que les contraintes budgétaires actuelles ne nous permettront pas de redresser rapidement une situation dégradée. Ainsi, seul l'indispensable pourra être fait en matière d'immobilier. À ce sujet, les constructions réalisées en partenariat public privé ne se révèlent pas satisfaisantes, le coût pour l'État en termes de loyers augmentant de façon exponentielle, et c'est à juste titre que vous avez décidé, monsieur le ministre, d'arrêter les opérations de ce type. Mais la situation immobilière dans la police et la gendarmerie n'est pas satisfaisante. L'acte III de la décentralisation annoncé pour 2013 devrait nous conduire à réfléchir d'une manière nouvelle à la question, tout en gardant à l'esprit que tout transfert de compétences de l'État doit s'accompagner de transferts de ressources. Il y a là véritablement une réflexion à engager.
En dépit des contraintes budgétaires, le budget pour 2013 constitue la preuve qu'une rupture avec la période précédente est engagée. Par exemple avec votre volonté, monsieur le ministre, de traiter l'insécurité dans les secteurs où la délinquance est particulièrement forte, en mettant en place les zones de sécurité prioritaires et en redynamisant la coproduction de la sécurité selon une approche globale et partenariale : celle-ci ne devra pas se décider dans les bureaux des directions centrales, mais après association des citoyens, des acteurs du terrain et naturellement des élus.
La droite, en son temps, avait fustigé la police de proximité et ses agents condamnés à n'organiser – je cite – que des matchs de rugby avec les jeunes. Mais, pour filer la comparaison sportive, c'est bien elle qui a perdu la partie et, reconnaissant implicitement sa défaite, a assuré le retour d'une prétendue proximité avec l'instauration des UTeQ et des BST – que de sigles pour, in fine, peu d'actes ! Et que dire des patrouilleurs créés par Claude Guéant, qui prétendait donner plus de « visibilité » à la police nationale et lui permettre « d'observer et écouter, se renseigner, interpeller »… Difficile de comprendre la logique de nos prédécesseurs à la vue de la baisse constante des effectifs et moyens dans la police et la gendarmerie depuis maintenant cinq ans.
La situation prêterait à rire si l'intégrité physique de nos forces de l'ordre et la tranquillité de nos concitoyens n'en dépendaient. Au-delà des chiffres, c'est un véritable malaise qu'il faut aujourd'hui traiter. Il ne pourra se résorber sans une action positive sur l'image de nos forces républicaines, qui pâtissent de plus en plus de leur éloignement des citoyens – et c'est le résultat aussi de la politique des années passées. Il faut plus de moyens d'assurer la sécurité, oui ! Mais pas sans un rapprochement avec tous les acteurs chargés de veiller à la tranquillité des habitants dans nos quartiers, nos villes et nos villages.
Une politique de sécurité nécessite à la fois la sanction des auteurs et la prévention de la délinquance. Le Fonds interministériel de prévention de la délinquance augmentera en 2013 de 6,5 millions. C'est une bonne nouvelle, mais il faudra aussi procéder à un rééquilibrage entre vidéoprotection et financement des actions de fonctionnement de la prévention de la délinquance. Ainsi, le FIPD permettra de soutenir l'action des maires et autres acteurs en matière d'aide au fonctionnement, en finançant par exemple les postes de coordonnateur de prévention de la délinquance, de médiateur ou de correspondant de nuit.
Une réforme structurelle du Fonds pour 2014 est indispensable, monsieur le ministre, bien sûr pour redynamiser la politique de prévention de la délinquance dans les zones de sécurité prioritaire, dont le nombre va croître dans les prochains mois, mais aussi d'un point de vue plus général, au niveau national. Vous avez d'ailleurs montré votre ouverture sur le sujet en commission des lois.
À une droite qui se voulait dure en matière de sécurité, nous opposons une gauche forte, qui traite les réalités de l'insécurité au lieu d'exploiter le sentiment d'insécurité. C'est pourquoi ce budget est celui d'une double rupture : rupture avec la politique de la période précédente, qui n'a pas garanti la sécurité des Français, et rupture avec un discours gouvernemental qui dissimulait en fait la régression des moyens de la police et de la gendarmerie. Monsieur le ministre, la commission des lois apporte son soutien à votre projet de budget pour 2013. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour la sécurité civile.
Madame la présidente, monsieur le ministre de l'intérieur, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, je souhaite avant toute chose rendre ici hommage aux deux pompiers, l'un volontaire, âgé de 16 ans, l'autre professionnel, âgé de 35 ans, décédés ce samedi à Digne-les-Bains lors d'une intervention. Ce drame, loin d'être unique, nous rappelle le dévouement de ceux qui portent secours à autrui par vocation et qui acceptent depuis toujours les risques que cela implique. Nous ne devons pas l'oublier.
Dans le temps qui m'est imparti, il m'est impossible d'examiner en détail le budget de la sécurité civile pour 2013. Ce n'est d'ailleurs pas mon rôle. En tant que rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, mon but n'est en effet pas d'émettre un jugement d'ensemble d'ordre financier et technique, mais plutôt de porter un regard général sur les grandes options stratégiques retenues par le Gouvernement en matière de sécurité civile.
La sécurité civile est un des sujets sur lesquels majorité et opposition entretiennent finalement assez peu de désaccords. Les grands choix que la France a faits dans ce domaine font généralement l'objet d'un large consensus. C'est donc sans grande difficulté que la commission des lois a approuvé, conformément à l'avis que j'ai exprimé, les crédits de la mission « Sécurité civile », crédits dont la légère diminution reflète la contrainte budgétaire qui pèse aujourd'hui sur notre pays.
La sécurité civile, en outre, n'est pas un domaine d'activité isolé qui serait consolidé sous la forme d'une ligne budgétaire unique. C'est une politique globale qui se trouve de fait confiée à de multiples acteurs et dont les programmes « Intervention des services opérationnels » et « Coordination des moyens de secours » ne représentent finalement, du point de vue financier, qu'une petite partie.
Cette dispersion du budget tient pour une part à la décentralisation dont la sécurité civile a fait l'objet, notamment depuis la loi de départementalisation des services d'incendie et de secours du 3 mai 1996. Mais c'est surtout la variété des missions de sécurité civile qui rend impossible un regroupement sous une ligne budgétaire unique.
Il existe toutefois des domaines dans lesquels les décisions prises par le Gouvernement peuvent être lourdes de conséquences. Je souhaite évoquer ici deux sujets qui me paraissent mériter à ce titre une attention particulière.
Le premier concerne le service des pompiers en France. Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur l'augmentation des budgets des SDIS depuis la départementalisation. Cette augmentation, justifiée pour l'essentiel par l'augmentation du nombre d'interventions et par la nécessaire remise à niveau des matériels et de l'immobilier, a finalement été maîtrisée.
Certes, des progrès sont toujours possibles en matière de gouvernance des SDIS. Leur coordination peut être renforcée, sans toutefois revenir sur le principe de la départementalisation, et leurs moyens peuvent être plus efficacement mutualisés. Mais il reste que notre service des pompiers est l'un des meilleurs du monde pour un coût évalué à 80 euros par habitant et par an, ce qui est très modéré par rapport au service rendu et à la confiance que lui témoignent chaque jour nos concitoyens. J'insiste, parce que beaucoup de commentateurs disent le contraire : cela ne coûte pas cher.
Mais la préservation de ce service suppose une attention permanente du Gouvernement. Je me félicite ainsi que la mise en application de la loi du 20 juillet 2011 soit en bonne voie.
Je n'ose pas l'appeler la loi Morel… (Sourires). Quoi qu'il en soit, cette loi concerne les sapeurs-pompiers volontaires, qui comptent pour 80 % dans les effectifs des pompiers et sont responsables de la moitié des interventions réalisées.
Je souhaite cependant insister auprès du Gouvernement, comme je l'ai fait lors de la réunion de commission du 24 octobre dernier, pour qu'il demeure vigilant dans la négociation sur la révision de la directive européenne de 2003 sur le temps de travail, afin que les sapeurs-pompiers volontaires soient explicitement exclus de son champ d'application. Monsieur le ministre, vous nous aviez fait part en commission de l'attention que vous portez à cette question.
Ce point, qui faisait l'objet de l'article 1er de la loi du 20 juillet 2011 sur l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires, texte que j'ai eu l'honneur d'initier et de rapporter et qui a été adopté à l'unanimité par les membres de cette assemblée, est en effet crucial. Une application stricte des règles européennes relatives au temps de travail risquerait de remettre en cause tout notre système de volontariat, sur lequel repose en grande partie le service des pompiers français – 200 000 personnes en France.
Le deuxième sujet que je souhaite aborder brièvement est celui des moyens aériens de la sécurité civile. Les projets, actuellement à l'étude, de mutualisation des moyens héliportés de secours à personne entre la sécurité civile, la direction générale de la gendarmerie nationale et le ministère de la santé devraient engendrer des économies.
Mais c'est surtout dans le domaine de la lutte contre les feux de forêts que notre pays peut être fier de ce qui a été accompli. Depuis les années soixante, à l'initiative d'un sous-préfet et d'un petit groupe de pilotes et de navigants venus de l'aéronautique navale et de l'armée, la France a su développer une doctrine unique de lutte contre les feux de forêt basée sur une surveillance permanente des zones à risques et sur l'attaque immédiate des feux naissants.
Le maintien de cette doctrine suppose des moyens, et c'est dans ce domaine qu'il faut maintenant faire deux séries de choix. Les premiers concernent le remplacement des avions. La flotte d'avions de la sécurité civile présente en effet tous les symptômes du vieillissement : coûts de maintenance en hausse, disponibilité déjà réduite des appareils, ce qui a rendu difficile le détachement de bombardiers d'eau en Corse l'été dernier, et risques croissants d'aggravation de la situation pour certains appareils dont les pièces de rechange deviennent de plus en plus difficiles à trouver.
La limite de vie des bombardiers d'eau nous met de toute façon au pied du mur. Les avions de type Tracker commenceront en effet à quitter le service en 2016 – demain ! – et les Canadair, véritables symboles de la lutte contre le feu, à partir de 2025. Compte tenu des coûts qu'implique le renouvellement de la flotte et de la difficulté à choisir les modèles d'appareils qui conviendront le mieux pour remplir ces missions, les choix à faire sont complexes et auront de lourdes conséquences.
On peut ainsi craindre que le remplacement des Tracker par des appareils moins puissants comme les Air Tractor ne rende plus difficile à mettre en oeuvre la doctrine d'attaque des feux naissants. De la même façon, le modèle économique qui sera choisi pour l'acquisition des appareils et pour leur entretien doit faire l'objet d'un examen approfondi. La possibilité de partenariats public-privé a été évoquée afin de réduire les coûts immédiats d'acquisition de nouveaux appareils, en particulier s'il s'agissait d'appareils onéreux tels que le Beriev 200, envisagé comme remplaçant des Canadair. Il n'y a pas lieu d'exclure une telle hypothèse, mais elle devra être examinée avec beaucoup de prudence.
Le second choix, sans doute celui dont la valeur symbolique est la plus grande, concerne la relocalisation de la base d'avions de la sécurité civile qui se trouve aujourd'hui à Marignane. Ce site historique de la sécurité civile aérienne a permis le développement de la pratique française en matière de lutte contre les feux de forêt.
En juillet 2012, l'excellent président de la commission des lois Jean-Jacques Urvoas et moi-même nous sommes rendus à Marignane à la suite du mouvement social des pilotes de bombardiers d'eau, qui avaient voulu attirer l'attention sur la dégradation des conditions dans lesquelles ils remplissent leur mission cruciale. Nous avons ainsi pu constater l'état de vétusté des installations de la base de Marignane et plus généralement le caractère inadéquat de cette implantation, qui n'est plus en mesure d'accueillir les moyens aériens aujourd'hui nécessaires.
Le site est trop petit pour héberger convenablement les avions dont dispose aujourd'hui la BASC, qui le partage par ailleurs avec l'aéroport international de Marseille-Provence et la société Eurocopter, dont les besoins se sont également accrus depuis les années soixante. Les installations de Marignane, enfin, ne permettent pas aujourd'hui à la sécurité civile de disposer d'une salle opérationnelle moderne ni d'un simulateur de vol.
Le rapport rendu en mars 2012 par le préfet Sappin, inspecteur général de l'administration, sur la relocalisation de la BASC mettait clairement en avant, parmi les options disponibles, une implantation sur le site de Nîmes-Garons. Cette solution a également ma préférence, ainsi que celle de MM. Yvan Lachaud, ancien député du Gard, et Jean-Paul Fournier, sénateur du Gard. Non seulement le site est capable d'accueillir la BASC dans de bonnes conditions, mais un tel transfert ouvrirait également la voie à des projets plus ambitieux tels que la mise sur pieds d'une grande base de sécurité civile qui pourrait jouer un rôle majeur dans la création, parfois évoquée, d'une flotte européenne de sécurité civile.
Monsieur le ministre, vous avez dit lors de la réunion de commission du 24 octobre qu'une contre-expertise interministérielle allait être demandée concernant le futur site de la BASC. Ce sujet demande certainement une réflexion très approfondie, et il ne faut pas prendre de décision à la hâte. Mais il y a un moment où une décision doit être prise, et ce moment est très proche. Vous m'avez dit que ce serait chose faite à la fin de 2012, au plus tard au début de 2013. Je formule ici le voeu que ce calendrier soit respecté, avec une petite préférence pour Nîmes-Garons.
Je conclurai en formulant le voeu que la sécurité civile reçoive du Gouvernement toute l'attention qu'elle mérite et que l'on ne recule pas devant des choix stratégiques qui relèvent maintenant de l'urgence. Je vous sais très attentif à ces problématiques, monsieur le ministre, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(Mme Sandrine Mazetier remplace Mme Laurence Dumont au fauteuil de la présidence.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je souhaite, à l'occasion de ce débat budgétaire, saluer toutes les forces de l'ordre, police et gendarmerie, qui, jour après jour, oeuvrent sur l'ensemble de notre territoire pour la sécurité de nos concitoyens.
Durant ces dix dernières années, nos policiers et nos gendarmes ont dû assumer des missions de plus en plus nombreuses, de plus en plus difficiles avec de moins en moins de moyens. On leur a demandé toujours plus alors qu'ils étaient de moins en moins nombreux. De l'instrumentalisation de faits divers à la politique du chiffre, la droite a beaucoup parlé durant la décennie écoulée, tout en supprimant 10 700 fonctionnaires de police et de gendarmerie et en provoquant ainsi de véritables saignées dans nos commissariats et nos casernes de gendarmerie. Elle a beaucoup gesticulé tout en démotivant ces fonctionnaires au service de l'État. Eh oui, mes chers collègues, la sécurité était un mot galvaudé sans traduction budgétaire, sans objectifs et sans moyens !
Le budget que vous nous présentez, monsieur le ministre, est un budget de rupture : rupture avec la politique du chiffre, rupture avec la baisse constante des effectifs, rupture avec les effets d'annonce.
Le nouveau gouvernement a su enfin entendre les forces de l'ordre et, surtout, tous ces habitants de nos villes et de nos campagnes qui souffrent des actes de délinquance et de la criminalité. Les députés socialistes se réjouissent de ce budget car il était urgent de faire de la sécurité une priorité, ce qu'elle n'était plus.
Ce budget de rupture que vous nous présentez, monsieur le ministre, a été bien accueilli par l'ensemble des syndicats de police et de gendarmerie. Comme nous, ils espéraient la fin de la funeste révision générale des politiques publiques, qui les plaçait dans l'impossibilité de remplir leur mission. La RGPP a rendu impossible pour les forces de l'ordre d'assumer leurs fonctions régaliennes partout sur notre territoire.
Je le disais : 10 700 fonctionnaires de police et de gendarmerie ont été sacrifiés depuis 2008, et 3 000 devaient encore l'être en 2013. Il était donc impératif de stopper cette véritable hémorragie si nous voulions que le service public de la sécurité intérieure soit assuré sur l'ensemble du territoire,
Vous rappeliez récemment, monsieur le ministre, que rien ne remplace la présence humaine. Ce budget en est la preuve. Le renforcement des effectifs sur le terrain est le point fort de ce budget. Il rompt avec la logique comptable de la droite en remplaçant chaque départ en retraite – 2 144 dans la police et 3 269 dans la gendarmerie –, ce à quoi vous ajoutez la création nette de 480 emplois dont 255 dans la police et 192 dans la gendarmerie. Ce sont donc près de 6 000 recrutements qui sont annoncés pour 2013.
Ils vont permettre un nouveau redéploiement des forces de l'ordre. La proximité est nécessaire pour renouer sur le terrain un lien de confiance avec les habitants. Parallèlement, des femmes et des hommes, parmi les plus aguerris, volontaires parmi celles et ceux qui connaissent le mieux le terrain, seront prioritairement affectés dans les zones de sécurité prioritaire que vous avez créées.
C'est le moyen le plus pertinent de relever les défis lancés à notre pays par les trafiquants en tous genres, notamment de stupéfiants et d'armes, qui imposent une loi qui n'est pas celle de la République et qui sont source de violence extrême.
La République ne pourra jamais accepter qu'une partie de son territoire soit abandonnée aux délinquants ou aux mafieux.
La concentration des effectifs et des savoir-faire dans ces zones à forte délinquance est une des réponses opérationnelles financées par ce budget, mais, pour être encore plus efficace, il faudra renforcer le lien entre les forces de l'ordre et la justice dont le budget est, lui aussi, une priorité de notre gouvernement. Avec la mise en oeuvre de ces ZSP, je ne doute pas que ce partenariat sera renforcé. Le rôle des élus locaux devra également, sans nul doute, être accentué.
Pour que ces missions soient remplies, vous avez su, monsieur le ministre, renforcer les moyens. Le parc automobile se voit doté d'une enveloppe de 90 millions d'euros : 50 millions d'euros au bénéfice de la police, 40 millions d'euros à celui de la gendarmerie. Cela permettra l'acquisition de 4 500 véhicules neufs dont 7 % de véhicules sérigraphiés supplémentaires, qui donneront à nos forces de l'ordre une meilleure visibilité dans nos rues. Ces acquisitions ne devraient cependant pas empêcher qu'un soin particulier soit apporté à la maintenance du parc.
Votre budget, monsieur le ministre, est un budget de modernisation. J'en veux pour preuve supplémentaire le développement d'une nouvelle vidéo-protection à Paris grâce à une plateforme d'exploitation qui permettra l'utilisation des images pour prévenir la délinquance comme pour la poursuivre. Il serait utile d'envisager une extension pleine et entière de cette nouvelle fonction à la petite couronne.
Vous avez également hérité d'une police technique et scientifique fragilisée par une succession de crédits de fonctionnement notoirement insuffisants. La diminution des effectifs des personnels techniques compétents explique en outre les difficultés de l'Institut national de police scientifique, qui n'est plus en mesure de fournir dans les délais convenables les résultats nécessaires aux enquêtes en cours.
Vous envisagez une réorganisation globale de la police scientifique et technique. Elle est nécessaire, mais ne nous leurrons pas : ses missions ont un coût élevé, d'autant plus élevé que ces services sont sollicités de plus en plus souvent. Je souhaite, pour développer cette police tout en réduisant les coûts, une mutualisation des services des deux forces qui tienne compte de leurs savoir-faire respectifs mais qui ne se heurte pas à l'écueil de leurs cultures propres. Il serait alors utile de prévoir une formation commune, initiale et continue.
Grâce au recrutement de 1 071 agents administratifs, techniques et scientifiques, vous allez pouvoir déployer à nouveau sur le terrain des agents actifs qui étaient occupés à des tâches administratives. Réaffecter des actifs sur des missions opérationnelles, c'est encore et toujours remettre du bleu dans nos quartiers, dans nos communes, dans nos villages.
Bien que prioritaire, la sécurité a dû aussi faire des sacrifices. Vous avez sauvegardé – c'est très important – tous les crédits de fonctionnement sans lesquels les forces engagées ne seraient pas opérationnelles, au premier rang desquels le carburant, mais aussi la tenue et surtout les armes, dont les crédits ont diminué les cinq années précédentes. C'était tout de même un comble, vous l'avez rappelé : certaines patrouilles de police ou de gendarmerie finissaient une heure plus tôt faute de carburant !
Je tiens cependant, monsieur le ministre, à signaler à quel point la situation des casernes comme des commissariats est préoccupante. Certains sont neufs mais les loyers sont exorbitants et viennent ponctionner les crédits de fonctionnement. D'autres sont dans un état déplorable et ne permettent pas un accueil digne de la République – un accueil des victimes comme des personnels.
Je sais que la question est très difficile, mais j'espère que vous saurez trouver les solutions à moyen et long terme. À mon sens, elles ne passent pas par la multiplication des partenariats public-privé, si coûteux pour les générations futures.
Enfin, j'en viens à la sécurité routière. La politique engagée par le Président Chirac est une réussite, et je me félicite que les efforts soient poursuivis. Nous ne devons évidemment pas baisser la garde.
Monsieur le ministre, votre tâche est rude tant est lourd l'héritage laissé par la droite. Le groupe SRC est conscient que l'on ne peut pas faire tout, tout de suite, mais, plus qu'un alignement de chiffres, votre budget est la traduction de votre volonté, et, à travers vous, de celle du Président de la République et de l'ensemble du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, de faire respecter la République partout et en permanence.
Ce budget est un soutien à nos forces de l'ordre. Il est ambitieux, courageux et réaliste. Vous donnez un nouveau souffle à la politique de la sécurité en France qu'il faudra poursuivre et conforter dans les années à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je ne veux, en commençant mon propos, faire oeuvre ni de provocation ni d'indifférence.
Certainement pas, monsieur Blazy. Vous m'entendrez dans quelques instants le démontrer.
Après vous avoir entendu, les uns et les autres, et après avoir longuement réfléchi à ce que pourrait et devrait être la ligne du groupe UMP sur le budget que vous nous proposez, monsieur le ministre, je ne pense vraiment pas que vous puissiez, sauf à vouloir continuer de manière un peu inutile une campagne électorale terminée depuis maintenant plus de six mois, affirmer qu'il s'agit d'un budget de rupture. Il s'agit plutôt, permettez-moi de vous le dire, même si je ne veux pas faire de la provocation, d'un budget de continuité.
Un budget de continuité ? Regardez donc les graphiques de mon rapport !
Je renverrai à cet égard non seulement au détail de ce budget, mais aussi à deux séries d'éléments.
La première série tient à votre premier déplacement en tant que ministre. Je m'en souviens très bien : le hasard a voulu que vous fassiez ce déplacement, à la fois sur des sujets de sécurité intérieure et sur des sujets de sécurité civile, dans ma circonscription.
J'ai le souvenir, c'était le lendemain de votre nomination, d'un ministre de l'intérieur attentif qui montrait, sur le site de la gendarmerie de Mormant, tout son intérêt pour le projet, qui venait d'être décidé, d'une nouvelle gendarmerie, désormais en construction, et pour l'ensemble des équipements qu'on lui présentait, qui illustraient les évolutions intervenues au cours des années précédentes. C'était un ministre attentif et satisfait qui prenait connaissance de tout cela avant de commencer à imprimer, à son tour, sa marque sur ce ministère.
Quelques instants plus tard, au centre de secours de Pontault-Combault, le même ministre montrait le même intérêt et la même satisfaction devant tout ce qui lui était présenté, et qui témoignait que des progrès avaient été accomplis, que des efforts avaient été fournis et que tout cela allait dans le bon sens.
La seconde série d'éléments tient, elle, à la relecture à laquelle je me suis livré – c'est toujours utile – des interventions de M. Blazy et de M. Valls à l'occasion de la discussion générale de la LOPPSI, au mois de juillet 2002. En relisant ces deux interventions, on comprend bien que ces deux élus de la République, qui venaient d'entrer dans l'opposition, et qui étaient sincères – j'espère qu'ils le sont restés –, étaient vraiment en difficulté pour justifier le vote, qui s'annonçait négatif, de leur groupe. Leurs propos comportaient en effet certains encouragements à l'égard du ministre de l'intérieur de l'époque, un certain Nicolas Sarkozy. Ils prenaient date et attendaient la concrétisation de l'ensemble du contenu de cette loi. Je me souviens que l'un – mais pas l'autre – était de ceux qui disaient encore que ce qu'attendaient les Français, ce n'était pas une politique sécuritaire passant par des augmentations massives des effectifs de police et de gendarmerie, mais, au contraire, une politique de prévention. La répression, ajoutait-il, ça suffisait car la prévention faisant tout, la répression n'aurait à intervenir qu'à la marge, lorsque la prévention n'aurait pas suffi.
Les temps ont changé, et vous aussi avez changé.
Au lieu de rompre avec ce qui a été fait de 2002 à 2012, qui est considérable,…
…vous vous inscrivez à votre manière, avec votre originalité, avec votre sensibilité, dans une véritable continuité, que je veux saluer.
J'en donne plusieurs exemples.
Que n'avons-nous pas entendu, en 2002, à propos du FNAEG, le fichier national automatisé des empreintes génétiques ! Aujourd'hui, il est en très bonne position, et on salue son intérêt dans tous les rapports que j'ai pu lire.
Que n'avons-nous pas entendu sur les groupes d'intervention régionaux les GIR,…
…ces montages un peu impossibles et improbables que nous avions proposés dans le cadre de la LOPPSI ! Les GIR fonctionnent,...
…et vous ne revenez absolument pas sur leur existence et sur leur fonctionnement.
Il y eut aussi, puisque vous parliez de prévention de la délinquance, la loi de prévention de la délinquance et la création du fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD. Vous ne vouliez pas de ce dernier, et vous en parlez aujourd'hui comme d'une chose normale, comme de quelque chose de positif, dans un dispositif global qui associe de manière harmonieuse la prévention et la répression.
Je pourrais également prendre l'exemple de tout ce qui a été fait en termes de revalorisation des carrières, avec le protocole du ministère de l'intérieur pour la police nationale et le PAGRE, le plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées, pour la gendarmerie.
Tout cela, vous l'intégrez comme du bon pain, comme quelque chose de positif. Effectivement, cela l'était, et il faut le poursuivre.
Par rapport à tout cela, que vous ne contestez pas, parce que ce n'est pas contestable, que représente votre projet de budget pour l'année 2013 ? Je suis tenté de le présenter comme étant à la fois en demi-teinte et en trompe-l'oeil.
C'est un budget en demi-teinte parce qu'il y a des choses positives et d'autres qui interrogent.
C'est un budget en trompe-l'oeil parce que certains éléments peuvent apparaître franchement nouveaux, modernes et novateurs, alors que dans la réalité ce sont plus des sources d'interrogation que de véritables améliorations.
Je prendrai quelques exemples afin de montrer en quoi ce budget est en demi-teinte. J'aborderai tout d'abord l'évolution des effectifs des forces de sécurité.
Les créations d'emplois sont incontestables quoique limitées. Mais on ne sait pas exactement – me référant en cela au rapport de Mme Sandrine Mazetier, qui à cette heure préside notre assemblée – dans quelle mesure ces créations d'emplois produiront les effets que l'on en attend. Je veux parler des zones prioritaires de sécurité dont une dizaine ont déjà été créées – une cinquantaine d'autres devraient l'être au cours de l'année 2013, si l'on en croit, monsieur le ministre, vos déclarations. Lorsqu'on relit fidèlement le rapport de Mme Mazetier, on lit bien une interrogation : dans ces zones, on doit trouver des fonctionnaires ayant déjà reçu une formation. Or, si les postes sont créés, leurs titulaires n'ont bien évidemment pas encore reçu de formation. De plus, ces zones prioritaires devront être mises en place à moyens constants. Dans ces conditions, comment pourront-elles être mises en place ? Cette interrogation, je le répète, a été formulée par Mme la rapporteure spéciale de la commission des finances, et je la fais mienne.
Elle ne peut pas vous répondre, puisqu'elle préside la séance, mais elle n'est pas d'accord avec vous !
Cette mesure est en apparence positive, mais lorsqu'on l'examine d'un peu plus près, on se rend compte qu'il n'en est pas tout à fait ainsi.
Ce budget est par ailleurs en trompe-l'oeil, parce qu'on voit bien apparaître, derrière les chiffres, une réalité qui pose problème. Cette réalité est la suivante : l'augmentation du budget de la sécurité recouvre une augmentation des dépenses de personnel, mais aussi une diminution des dépenses de fonctionnement ! Cette diminution, qui représente 29 millions d'euros, ressort des différents rapports et du projet de loi de finances, et personne ne peut le contester !
Dans ce contexte, reconnaîtrez-vous clairement que l'essentiel de l'augmentation des dépenses nouvelles de personnel est en fait lié à la revalorisation des carrières et au paiement des pensions de retraite dont le montant s'explique par une augmentation du nombre de fonctionnaires en bénéficiant ?
Vous le voyez, monsieur le ministre, je voulais, grâce à ces quelques exemples, vous dire que votre budget, en fin de compte, s'inscrit dans la ligne que nous avons suivie pendant dix ans et dont les Français ont compris l'importance, à savoir la nécessité de mener une politique cohérente de sécurité publique. Le pourrez-vous ? Je l'espère pour la France ! Le ferez-vous ? Je n'en suis pas certain. Les éléments de votre budget ne nous permettent pas d'être aussi optimistes ni aussi catégoriques.
Je me permettrai de vous poser une dernière question, sur un simple détail. En tant qu'ancien rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité, je me permets ainsi d'exercer une sorte de droit de suite. J'avais évoqué, l'an passé, dans l'avis que j'avais présenté au nom de la commission des lois sur la mission « Sécurité », la situation de ces gendarmes adjoints volontaires qui, de par leur statut, pouvaient bénéficier d'une sorte d'avantage pour être directement intégrés dans les polices municipales, alors que ce n'est pas le cas pour les adjoints de sécurité de la police nationale.
J'avais demandé, à l'époque, à Claude Guéant, ce qu'il pensait de l'idée de les mettre sur un pied d'égalité. Il avait répondu que cela mériterait d'être fait. Je vous pose à nouveau cette question, parce que je pense que ces nombreux adjoints de sécurité, que j'ai rencontrés, et qui ont marqué de l'intérêt pour la formule applicable aux gendarmes adjoints volontaires, seraient très heureux de pouvoir en bénéficier.
Madame la présidente, je vous remercie de m'avoir donné ces quelques instants supplémentaires pour me permettre d'achever mon intervention. Je pense que les jeunes concernés méritent bien cette petite minute de plus.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre : d'une manière lucide et aussi constructive que possible, le groupe UMP ne vous apportera pas son soutien sur le vote de ces crédits. Je vous le répète, nous espérons qu'ultérieurement, vous aurez véritablement les moyens de mener votre politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je veux, avant de commencer mon intervention rendre un hommage particulier aux gendarmes, policiers et sapeurs-pompiers qui remplissent des missions particulièrement importantes et souvent difficiles dans des conditions parfois périlleuses. Nous aurons une pensée plus particulière pour celles et ceux qui sont morts en service durant l'année 2012.
La garantie de la sécurité et la protection de nos concitoyens doivent demeurer l'une des prérogatives essentielles de l'État, y compris dans un contexte budgétaire contraint. À ce titre, monsieur le ministre, je voudrais vous dire combien, parfois, vos propos ont été appréciés. Souhaitant mener une politique d'opposition constructive, nous serons à vos côtés. Dans ce cadre, chaque fois que vous adopterez une posture de fermeté, de rigueur et de justice.
La préoccupation de la sécurité est en effet essentielle pour nos concitoyens.
La principale difficulté réside dans la nécessité de concilier deux impératifs distincts : améliorer l'efficacité de la lutte contre la délinquance et assurer la protection de nos concitoyens, tout en participant à l'effort de maîtrise accrue des dépenses publiques.
Le budget de la mission « Sécurité » se caractérise essentiellement par une très légère hausse des effectifs de la police et de la gendarmerie : en 2013, la masse salariale de la police nationale s'élèvera à 8 586 millions d'euros, soit une augmentation de 4,14 % par rapport à 2012, et celle de la gendarmerie nationale sera de 6 761,9 millions d'euros, soit une augmentation de 1,7 % par rapport à 2012.
Concernant la police, la hausse modérée des effectifs est plutôt satisfaisante. La disponibilité opérationnelle des services et la présence des agents sur la voie publique répondent en effet à une attente forte de la population. Ce n'est pas Mme la maire adjointe d'Albi, ici présente dans les tribunes, qui nous dira le contraire – tout comme bon nombre d'entre nous !
Il est important de souligner cet effort parce que la tâche des policiers est très difficile, face à une délinquance toujours plus forte et toujours plus virulente.
Pour avoir été rapporteur pour la gendarmerie pendant la période de 2002 à 2007…
…je rappellerai que cette période a été marquée par une augmentation très significative des effectifs. Même les évolutions liées à la RGPP depuis 2007 ne peuvent être interprétées comme une baisse par rapport à la situation de 2002.
Ce budget présente donc des éléments tout à fait positifs concernant les dépenses de personnel, avec 480 créations de postes, 288 pour la police et 192 pour la gendarmerie…
…soit en moyenne deux par département.
Il me paraît toutefois important de souligner un certain nombre d'autres éléments.
Je dirai tout d'abord quelques mots concernant la gestion immobilière de la gendarmerie. C'est quelque chose d'essentiel ; or force est de constater que ce budget ne correspond pas aux attentes, ni même aux besoins minimums pour assurer une simple politique au fil de l'eau en la matière.
Ensuite, il me paraît essentiel, pour la motivation de nos gendarmes, qu'ils soient traités de manière équitable par rapport à la police. À l'époque, en 2009, j'avais exprimé un certain nombre de réserves quant à la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale. Je crois qu'il faut être toujours vigilant et prudent en la matière.
En ce qui concerne la sécurité civile, je voudrais d'abord rendre hommage au travail réalisé par nos pompiers. Quelle que soit l'actualité, notamment au regard de ce drame qui a coûté la vie au jeune Yann à Digne-les-Bains, nous devons rester prudents et ne pas légiférer sous l'empire de l'émotion. Nous ne devons pas imposer de contraintes telles que le recrutement deviendrait très difficile dans nombre de territoires ruraux. Chacun d'entre nous sait ce qu'il en est dans sa circonscription, et combien il est important de sauvegarder les petits centres de secours en milieu rural. Cela coûte moins cher à la collectivité que de professionnaliser l'ensemble de la sécurité civile.
Je conclus, madame la présidente.
Ce budget présenté comme un budget de rupture est somme toute, à bien des égards, un budget de continuité. Même si vous avez considéré qu'il faut revenir sur la politique du chiffre et qu'un certain nombre d'éléments doivent être adaptés, monsieur le ministre, mes chers collègues, en l'état, le groupe UDI ne votera pas les crédits des missions « Sécurité » et « Sécurité civile ». (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
On n'y comprend plus rien ! Votre conclusion n'est pas en accord avec vos arguments !
Madame la présidente, monsieur le ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, longtemps, les choses ont pu sembler simples aux yeux du plus grand nombre, s'agissant de la sécurité. Matraqués par des discours à l'aplomb sans mesure, impressionnés par une surdose de méthode Coué, dont l'usage n'eut parfois d'égale que la mauvaise foi de ceux qui l'employaient, touchés par l'exploitation sans limite de l'émotion que peuvent susciter certains faits divers, nos concitoyens ont été un temps convaincus que c'est à droite que se trouvent les experts, ceux qui savent faire et qui ont la volonté et l'autorité nécessaires, presque de manière génétique, et qu'à gauche n'étaient que d'irresponsables laxistes.
Plusieurs députés du groupe UMP. Mais c'est tout à fait vrai !
Cette caricature a vécu, même si d'aucuns sur ces bancs s'essaient encore à l'entretenir, à la manière de vieux artistes nostalgiques de leurs succès d'antan, qui éprouvent les plus grandes difficultés à renouveler leur répertoire.
Cette caricature a vécu, d'abord parce qu'elle est confrontée au bilan de dix années d'exercice du pouvoir. On allait voir ce que l'on allait voir, nous promettait-on. Eh bien les Français ont vu !
Alors qu'ils prétendaient agir, nos prédécesseurs se sont surtout agités. En dix ans, pas moins de dix-huit lois ont été proposées à la représentation nationale, qui les a consciencieusement votées. Un fait divers, une loi – la plupart du temps redondante ou inapplicable sur le terrain.
Cette inflation législative n'a en rien amélioré la sécurité de nos compatriotes. Elle n'a fait que surcharger de travail la commission des lois, qui n'a quasiment travaillé que sur cela au cours de la précédente législature. Le Gouvernement n'avait même pas le temps d'adopter les décrets d'application nécessaire ! Cette frénésie a donné le tournis aux forces de l'ordre et aux magistrats chargés d'appliquer ces lois.
Il ne suffit pas, mes chers collègues, de voter un texte sur les rassemblements menaçants ou hostiles dans les parties communes d'immeubles, comme vous l'avez fait en 2003, pour que neuf ans plus tard, les riverains des quartiers de ma circonscription aient retrouvé la tranquillité à laquelle ils ont droit !
Il n'est en effet pas de police sans policier, ni de gendarmerie sans gendarme. Nos prédécesseurs prétendaient renforcer, ils n'ont fait qu'affaiblir. Entre 2007 et 2012, comme cela a déjà été dit, 10 700 postes affectés aux missions de sécurité ont été supprimés. 3 700 devaient l'être encore en 2013, avant que vous ne décidiez, monsieur le ministre, de mettre un terme à cette hémorragie, conformément aux engagements pris par le Président de la République.
Il n'est pas non plus de bonne police sans proximité. On savait déjà cela du temps de Vidocq !
Pourtant, la précédente majorité a mis un terme dès 2003 à cette police de proximité moderne, que la gauche avait commencé à mettre en place au début des années 2000. À la place, nous avons vu débarquer de manière ponctuelle des cars de CRS dans nos quartiers, quand la situation devenait trop tendue, ce qui ne contribuait en rien à la détendre, tant ces forces de l'ordre se trouvaient là éloignées des missions pour lesquelles elles ont vocation à intervenir.
On nous avait aussi vanté la culture du résultat. Il n'y eut, dans la réalité, que la mise en place d'une stressante culture du chiffre, avec distribution de bons et de mauvais points pour ceux, plus ou moins zélés, qui parvenaient à présenter ou pas les statistiques flatteuses attendues par leur ministre.
Et peu importe si, à compter du 25 du mois, porter plainte pouvait relever du parcours du combattant, pour certaines victimes, en certains endroits. À défaut de faire tomber la fièvre, il fallait casser le thermomètre, avec des chiffres – torturés de telle sorte qu'Amnesty International aurait pu s'en émouvoir – destinés à masquer la piètre réalité.
Tel est le contexte dans lequel intervient ce premier budget de l'alternance. Je tenais à le rappeler parce qu'aucune politique nouvelle ne peut s'abstraire du bilan de la politique précédente. En effet, monsieur le ministre, j'entends déjà quelques critiques sur vos propositions de la part de ceux qui, de mon point de vue, gagneraient à faire preuve, dans ce domaine comme dans quelques autres, de l'humilité de bon aloi qui sied à ceux qui ont échoué.
Je tenais à rappeler ce bilan, parce qu'il éclaire l'importance des changements inscrits dans les crédits de la mission « Sécurité » pour 2013 tels que vous nous les proposez. En dépit d'un contexte budgétaire tout particulièrement contraint, le Gouvernement remet la sécurité au coeur du pacte républicain, et je m'en réjouis. Je pense bien sûr aux effectifs supplémentaires, mais aussi à la mise en place des zones de sécurité prioritaires, aux politiques de prévention, aux efforts pour rétablir un lien de confiance avec la population et entre la police et la justice, et à l'adaptation des modes d'action à tous les aspects de la délinquance. Voilà ce qui justifie aujourd'hui pleinement notre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, « le Gouvernement a pour mission de faire que les bons citoyens soient tranquilles et que les mauvais ne le soient pas ».
Monsieur le ministre, c'est ainsi que Georges Clemenceau qualifiait l'action du pouvoir exécutif afin de garantir l'ordre public. Protéger nos compatriotes, lutter contre la violence : c'est la mission qui vous incombe aujourd'hui. Vous êtes à la tête des préfets, des policiers, des gendarmes et des pompiers qui travaillent, chaque jour, chaque nuit, au service de la sécurité des Français. Ces hommes et ces femmes incarnent au quotidien la continuité de l'État. Ils paient dans leur chair un lourd tribut à la protection des Français. Avec mes collègues de l'UMP, je tiens à leur rendre hommage.
J'ai la conviction que les républicains peuvent se retrouver sur l'essentiel, lorsqu'il s'agit de renforcer la capacité opérationnelle des forces de l'ordre.
Je ne doute pas, monsieur le ministre, de la bonne volonté qui est la vôtre. Je me réjouis que vous sembliez rompre avec certaines vieilles lunes du Parti socialiste.
Pendant des années, nous avons entendu les députés socialistes, écologistes et communistes protester contre les fichiers de police, critiquer la police d'agglomération, refuser la vidéoprotection, s'opposer au rapprochement entre la police et la gendarmerie, et même parfois demander la suppression de la préfecture de police.
Je me souviens des mots très durs, parfois à la limite des insultes, qui ont été proférés sur les bancs de la gauche contre Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux ou Claude Guéant.
Devenu ministre de l'intérieur, vous avez, quant à vous, confirmé tous les choix fondamentaux de vos prédécesseurs place Beauvau. Vous ne proposez pour l'heure aucune abrogation, aucune modification des lois sur la sécurité intérieure auxquelles vos amis politiques se sont pourtant constamment et violemment opposés.
De même, nous avions entendu M. François Hollande, alors candidat à la présidence de la République, souhaiter que les contrôles d'identité fassent l'objet d'une nouvelle procédure. Très sensible aux pressions de certaines associations, le Premier ministre, M. Ayrault, vous a demandé de faire délivrer par les forces de l'ordre un récépissé après chaque contrôle d'identité. Vous avez, non sans bon sens, refusé d'appliquer cette instruction hasardeuse qui témoignait d'une véritable défiance à l'endroit des policiers et des gendarmes.
Vous avez ainsi choisi, monsieur le ministre, une allure pragmatique qui peut être portée de prime abord à votre crédit. Mais vous vous heurtez à une réalité qui, hélas, entrave votre action place Beauvau. Cette réalité, c'est l'incapacité du gouvernement de M. Hollande à faire face à la profonde crise d'autorité dont souffre notre pays. Partout en France, à Marseille comme à Grenoble, à Amiens comme à Saint-Denis, à Dole comme à Auxerre et jusque dans les campagnes, l'ordre public est menacé lorsque des individus refusent la légalité républicaine et ne respectent aucune institution.
L'action déterminée des policiers et des gendarmes est absolument nécessaire, mais elle ne saurait à elle seule conforter une autorité qui se trouve précisément affaiblie au sommet de l'État.
Ce n'est pas très sérieux ! Vous faites là le bilan de votre politique pendant dix ans !
Le Premier ministre démantèle la politique de lutte contre la délinquance lorsqu'il assèche les crédits affectés à la vidéoprotection, donnant un coup d'arrêt à l'équipement des communes.
Le ministre de l'éducation nationale – le vôtre, monsieur Blazy ! – mine l'autorité des parents et des professeurs lorsqu'il déclare être favorable à la légalisation de l'usage du cannabis par les adolescents.
La garde des sceaux, ministre de la justice, sape l'autorité judiciaire lorsqu'elle donne instruction aux parquets de ne plus requérir de peines planchers et lorsqu'elle supprime les tribunaux correctionnels pour les mineurs récidivistes.
Le Président de la République lui-même affaiblit l'autorité de l'État…
…lorsqu'il maintient sa confiance à des ministres dont l'action est à ce point contraire aux nécessités de l'ordre public.
Vous le pressentez sans doute, monsieur le ministre : il ne peut y avoir de politique de sécurité efficace lorsque le Gouvernement tire à hue et à dia, incapable de définir et d'assumer une réponse cohérente face à la violence.
Il ne peut pas y avoir de politique de sécurité efficace si l'on diminue les effectifs des policiers et des gendarmes !
Il y a pourtant urgence ! Partout dans notre pays, la criminalité la plus violente est repartie à la hausse.
Madame Untermaier, lisez les rapports : cela vous instruira et cela vous permettra d'éviter de vociférer ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Une lecture attentive et sereine des bulletins de l'Observatoire national de la délinquance…
…révèle que, sur les neuf premiers mois de l'année, les atteintes volontaires à l'intégrité physique ont augmenté de 2,4 %, ce qui signifie que 358 000 personnes ont été victimes de violences, soit 8 000 de plus que l'année passée. Voilà la vérité ! Sur les neuf premiers mois de l'année – je parle bien des neuf premiers mois, je ne réduis naturellement pas ces statistiques aux trois ou quatre mois les plus récents…
Il faut conclure, monsieur Larrivé, vous que je sens sensible à la règle et au respect de l'autorité !
Je conclus. Vous avez décidé, monsieur le ministre, de ne plus commenter ces statistiques car vous prétendez refuser la politique du chiffre.
Au-delà des mots, au-delà des postures, il faudra accepter d'évaluer votre efficacité et d'assumer vos résultats. Le moment venu, les Français en jugeront. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, mes chers collègues, un budget est toujours la traduction d'une volonté politique. Il est aussi l'heure de vérité pour un Gouvernement. Il permet de mesurer, pour une grande part, si les mots vont être suivis d'actes.
Conformément aux engagements du Président de la République, vous nous présentez, monsieur le ministre, un budget qui traduit la volonté de donner aux forces de la police nationale et de la gendarmerie les moyens nécessaires pour mener à bien leurs missions, lesquelles sont au coeur de la cohésion nationale et de notre pacte républicain. En mettant fin à la RGPP dans vos services, vous mettez fin à de trop longues années d'une véritable mystification…
…pendant lesquelles les suppressions de postes répondaient aux discours martiaux.
Mais ce budget ne signe pas seulement la fin de cette mystification. Lors de votre discours cadre prononcé à l'École militaire le 19 septembre dernier, vous avez proposé un cap, une nouvelle mobilisation des forces de l'ordre qui rompt avec le désordre caractéristique de la précédente législature. Ce cap est celui de l'exigence du respect pour celles et ceux que nous mandatons pour protéger la population. Le respect de nos forces de l'ordre doit être une priorité absolue. La défiance, la violence, l'insulte, la menace ou pire encore, comme vient de le rappeler l'agression inadmissible d'un agent de la BAC de Montpellier hier, doivent être condamnées avec la plus grande fermeté.
Des forces de l'ordre respectées et protégées, ce sont aussi des forces de l'ordre respectueuses de toutes et tous. Elles se doivent donc d'avoir un comportement irréprochable. Ce dernier passe, par exemple, par la fin du tutoiement et par le choix, à cette étape, de rétablir le numéro de matricule sur l'uniforme ou les brassards plutôt que de délivrer des récépissés. Très bureaucratiques et peu appliqués à l'étranger, les récépissés sont trop souvent associés à une classification de la population qui engendrerait de nouvelles formes de stigmatisation et serait incompatible avec notre conception républicaine du maintien de l'ordre.
La déontologie constitue l'un des socles de la confiance entre la population et les forces de l'ordre chargées d'assurer sa protection. Nous soutenons donc votre volonté de conforter tous les organes de contrôle, tant internes qu'externes. Le défenseur des droits, le contrôleur général des lieux de privation de liberté ainsi que les magistrats du parquet et du siège conservent ainsi leur rôle de relais des doléances citoyennes.
Par ailleurs, l'amélioration de l'accueil du public, la mise en oeuvre de la charte Marianne, l'application du discernement et de l'usage proportionné de la force sont confortées.
Le cap que vous fixez dans ce budget, monsieur le ministre, repose également sur la place plus importante donnée à la formation des agents. Les assises appelées de vos voeux pour définir les axes prioritaires d'une nouvelle formation policière constituent l'un des symboles de notre volonté de porter le changement partout où il est nécessaire. D'ores et déjà, plus de 10 millions d'euros seront consacrés à la mise en oeuvre de la formation initiale et continue, laquelle est renforcée puisque ce montant correspond à une augmentation de 15 % par rapport au budget exécuté en 2011. Dans le cadre de la création des ZSP, un accompagnement en termes de formation sera mis en place pour de nombreux fonctionnaires de police et de gendarmerie.
La question des missions de l'ENSP et de l'ENSOP représentera l'un des enjeux majeurs de la formation policière dans les années à venir. La révision du statut de l'ENSP, conforme aux recommandations de la Cour des comptes en termes de maîtrise budgétaire, s'inscrira dans la volonté de regrouper la formation des commissaires et des officiers de la police nationale au sein d'un établissement public unique doté d'une autonomie juridique et financière. Par ailleurs, l'ambition est aussi d'ouvrir l'accès, pour les élèves lieutenants, à la formation universitaire par le biais d'une licence ou du master 2 « Sécurité intérieure ». Enfin, des passerelles entre les classes préparatoires intégrées des deux écoles, créées dans le cadre de la politique de promotion de l'égalité des chances ou avec les auditeurs étrangers, sont envisagées. Elles permettront de donner une dimension européenne aux missions des officiers et des commissaires de police français et de renforcer notre coopération.
D'ailleurs, monsieur le ministre, s'agissant de coopération internationale ou plus précisément européenne, et en marge de nos débats budgétaires, je souhaiterais que vous saisissiez l'occasion de votre intervention devant la représentation nationale pour faire le point sur l'exécution du mandat d'arrêt européen à l'encontre d'Aurore Martin. Trop de contrevérités ont été énoncées, et je crois qu'il est temps de faire la lumière, devant la représentation nationale, sur ce qu'il s'est réellement passé.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, voilà exposé en quelques minutes ce qui, tant en matière de déontologie que de formation, dit une nouvelle ambition, sérieuse, forte, pour donner les moyens à nos fonctionnaires de se former, d'agir et d'être pleinement respectés par la population.
En dix ans, nous avons tout entendu de la précédente majorité en matière de sécurité. Pour autant, jamais l'écart entre les paroles et les actes n'a été aussi grand que durant ces dix dernières années.
Ce budget met fin à cet écart et réaffirme la confiance du Gouvernement et de la représentation nationale dans les fonctionnaires de police et les gendarmes pour répondre aux attentes légitimes de résultat de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Philippe Goujon. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Amiens et ses émeutes urbaines, Marseille et ses règlements de compte en série, Échirolles et ses massacres à l'arme blanche, Ajaccio où les tueurs vont jusqu'à abattre un avocat, Notre-Dame-des-Landes et ses 1 200 gendarmes mobilisés pour le maintien de l'ordre : vous êtes, monsieur le ministre, appelé sur tous les fronts ! Il est vrai que vous suivez un chemin de croix.
Malgré votre énergie et votre volonté d'agir, qui présentent – chacun le dit – quelques ressemblances de nature à rassurer nos compatriotes, la comparaison s'arrête, hélas, bien vite. Alors qu'au cours de la décennie écoulée, un demi-million de victimes furent épargnées par rapport aux années Jospin…
…caractérisées, elles, par une hausse de 10 % par an – et non sur l'ensemble de la législature – des violences aux personnes,…
…votre retour aux affaires semble coïncider avec leur explosion, avec déjà 30 000 victimes de plus. C'est là la première rupture avec Nicolas Sarkozy.
On comprend mieux votre envie de chambouler l'architecture de la statistique et votre rejet de la culture du résultat, au moment même, pourtant, où l'action policière peut aujourd'hui être éclairée par un enrichissement sans précédent des dispositifs de pilotage, de l'informatisation des mains courantes aux enquêtes de victimisation, en passant par les partenariats locaux de sécurité et les recoupements avec les statistiques judiciaires.
Quant à la rupture que vous proclamez, avec les créations d'emplois de ce budget par exemple, admettez qu'il s'agit essentiellement – ce qui n'est déjà pas mal – d'adjoints de sécurité et de gendarmes adjoints volontaires, ce qui vous ramène modestement au niveau des effectifs de 2011. En tout cas, pas de quoi nourrir vos quinze premières zones de sécurité prioritaires !
Permettez-moi de rappeler à tous ceux qui s'offusquent de l'effort de réduction de la dépense publique et qui, dans un passé pas si lointain, sont justement ceux qui ont le plus diminué ces mêmes effectifs, qu'il a fallu plusieurs années de créations d'emplois, garanties par la LOPPSI, pour compenser la baisse du potentiel horaire consécutive aux 35 heures, équivalent à la suppression de 11 000 postes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Les 35 heures responsables de tout, toujours et tout le temps ! Heureusement, que vous n'êtes pas remonté jusqu'au Front populaire !
Il vous aurait plutôt fallu substituer à une vision quantitative, un peu passéiste – comme dans l'Éducation nationale d'ailleurs, mais c'est un autre sujet –, des objectifs plus qualitatifs, grâce à la synergie du rapprochement police-gendarmerie ; à la réorganisation de la carte territoriale des zones de compétence ; à la poursuite de l'ajustement du niveau des forces mobiles et d'un meilleur équilibre entre unités mutualisées départementales et services de proximité ; à une présence plus sélective sur la voie publique aux horaires et lieux les moins sûrs, en choisissant des quartiers prioritaires d'intervention avec des stratégies coordonnées dynamisant l'occupation du terrain par l'usage de la géolocalisation et de la vidéoprotection à laquelle la gauche s'est enfin convertie…
… et s'appuyant sur une cartographie opérationnelle intégrée des flux criminels.
En somme, vous n'avez donc rien inventé avec les ZSP, même si le rapporteur a raison de s'interroger sur leurs capacités opérationnelles avec des crédits de fonctionnement en baisse de 3,1 % pour la police et de 1,4 % pour la gendarmerie.
Alors, dans une continuité budgétaire assumée, accepterez-vous de moderniser les grands fichiers de police, auxquels le PS s'est toujours opposé ?
Poursuivrez-vous le redéploiement des zones de compétence territoriale de la police et de la gendarmerie autour de la logique d'agglomération et de bassin de délinquance, déterminant un juste équilibre entre hyperspécialisation et trop grande polyvalence ?
Poursuivrez-vous le partenariat amorcé entre toutes les forces de sécurité, nationale, municipale et privée ? Saurez-vous mieux articuler les activités de police judiciaire avec les réponses pénales et l'exécution des décisions de justice, tant le bât blesse sur la segmentation excessive de ces activités et, surtout, mes collègues l'ont rappelé, sur la politique affichée par la garde des sceaux qui, vous le savez bien, inquiète les milieux policiers et l'opinion ?
« À quoi joue la gauche en matière de sécurité ? », titre un grand hebdomadaire cette semaine.
Nagez-vous carrément à contre-courant de la majorité, monsieur le ministre, en enterrant le récépissé consécutif à un contrôle d'identité, contredisant ainsi le Premier ministre et le Président de la République, en vous opposant à vos collègues Peillon et Duflot et à tant de parlementaires sur ces bancs sur la dépénalisation du cannabis ou comme je viens de l'entendre sur l'interpellation d'une militante basque pour laquelle François Hollande avait demandé à Claude Guéant sa clémence ? Ou alors êtes-vous dans le double discours d'un jeu de rôles concerté, vous comme ministre de l'intérieur musclé pour séduire la droite et les policiers, à tel point que Libération vous a qualifié « d'ennemi de l'Intérieur », tandis que la garde des sceaux donnerait des gages à la gauche et aux syndicats de magistrats ?
Cette approche trompeuse n'aboutit-t-elle pas fatalement à la confusion et à l'immobilisme ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Seul M. Goujon a la parole. Ne vous laissez pas interrompre, monsieur Goujon, poursuivez.
Vous démantelez les camps de Roms quand le Gouvernement leur ouvre l'accès à l'emploi et au logement… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
…alors qu'un déferrement sur dix à Paris concerne un Rom. Mais vous consentez à la suppression des peines planchers qui permettent un traitement approprié des 5 % de multirécidivistes, auteurs de la moitié de la production criminelle, soit 19 000 délinquants mis en cause cinquante fois et plus – ce sont les chiffres d'Alain Bauer. Alors que pour éviter de décourager les forces de police, il faudrait au contraire aller plus loin en les étendant à la réitération, comme le prévoit une proposition de loi qu'Éric Ciotti, Jean-Paul Garraud et moi-même avons déjà fait adopter en première lecture. Il ne vous reste plus qu'à achever le travail.
Vous regrettiez, alors que vous étiez dans l'opposition, monsieur le ministre, que les efforts quotidiens des policiers soient trop souvent mis à mal par les décisions des juges, notamment pour la justice des mineurs, mais vous souscrivez à l'abolition des tribunaux correctionnels pour mineurs de plus de seize ans, récidivistes et passibles de plus de trois ans de prison. Ce n'est pas rien.
Vous gardez un silence prudent quand la garde des sceaux dénonce le « fantasme des centres éducatifs fermés », alors qu'il faudrait les multiplier en même temps qu'élaborer un code des mineurs.
Exactement.
Au moment où les violences scolaires repartent à la hausse, n'avons-nous pas à redouter – je vous pose la question – l'abrogation des lois contre les bandes et les attroupements dans les halls d'immeubles,…
… des convocations des mineurs par OPJ, des conseils des droits et devoirs des familles, comme vous l'avez fait pour la suspension des allocations familiales, du couvre-feu préventif ou encore des peines aggravées en cas d'agression contre la communauté scolaire ?
Les syndicats de police ne croient pas que vous pourrez concilier votre apparent discours de fermeté avec la volonté de la garde des sceaux de recourir le moins possible à la comparution immédiate et de faire de l'emprisonnement une exception, révisant à la baisse notre programme de 20 000 nouvelles places de prison. Ils ne comprennent pas davantage pourquoi vous rechignez, même si vous leur portez de l'attention, à leur assurer comme le préconise une proposition de loi de notre collègue Larrivé, une meilleure protection fonctionnelle face à la hausse de 5,3 % des agressions dont policiers et gendarmes sont victimes depuis le début de l'année : dix-sept par jour, avez-vous dit, monsieur Blazy, et encore hier, à Montpellier.
Quel discours tiendrez-vous, monsieur le ministre, dans le débat sur le sens de la peine dans la conférence de consensus voulue par Mme Taubira ? N'avez-vous rien à dire non plus sur l'abrogation annoncée de la loi de rétention de sûreté contre les criminels et violeurs en série ?
Approuvez-vous les termes de la circulaire de politique pénale du 19 septembre, véritable entreprise de démolition à grande échelle de la politique de sécurité de Nicolas Sarkozy…
…et surtout formidable exhortation à l'impunité adressée à tous les délinquants présents et à venir ?
Erreur ! Signet non défini.. Je vous le dis tout net : vous ne pouvez plus vous contenter, monsieur le ministre, d'une communication efficace et devez répondre clairement à ces questions et à bien d'autres quant à la politique de sécurité que vous professez, avec un talent que nous reconnaissons,…
…qui ne doit pas être celui du communiquant rusé, mais de l'homme d'État inflexible dans ses convictions, ferme dans ses décisions, dur avec les délinquants et protecteur des honnêtes gens – j'espère que c'est ce qui vous caractérise, je le crois d'ailleurs. C'est ce qu'attendent, soyez en sûr, nos compatriotes.
Vous n'avez pas encore choisi entre les deux rôles, mais l'heure de vérité approche à l'aune de vos premiers résultats. Le grand écart et le double discours ne pourront bien longtemps encore tenir lieu de politique de sécurité. Car au bout du chemin, c'est la souffrance de milliers, de dizaines et même de centaines de milliers de victimes supplémentaires…
… qu'il vous faudra affronter, comme la pire des sanctions d'une politique qui aura, hélas, échoué à se vouloir trop habile, à défaut d'être exigeante et courageuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, mes chers collègues, monsieur le ministre, en 2017, les Français nous jugeront sur deux points essentiels : la question sociale et économique, et la question de la sécurité.
Ce sont d'ailleurs les deux faces d'une même aspiration de nos citoyens à une société plus juste, plus protectrice et plus sûre. C'est là l'enjeu de votre budget : engager le chantier de la restauration d'une police républicaine confortée dans ses missions.
En tant que citoyen, je mesurais depuis des années la dégradation de la situation sécuritaire de nos territoires. Depuis mon élection comme député en juin dernier, j'ai rencontré sur le terrain les équipes de gendarmes et de policiers qui assurent notre sécurité, notamment dans ma circonscription à Sète, à Agde, à Pézenas. J'ai mesuré les besoins.
Globalement, les dégâts de dix ans de purges d'effectifs et de moyens sont considérables.
Les gendarmeries ont progressivement déserté nos campagnes, les escadrons de gendarmes mobiles ont été saignés à blanc, et le budget de l'institution a perdu près de 20 % entre 2006 et 2010.
La police a accumulé un retard considérable en matière d'équipements scientifiques, de moyens de recherche, de capacité informatique.
Sur le plan des effectifs, près de 7 000 postes ont été supprimés en dix ans.
Voilà le triste bilan d'une politique de droite…
…qui se prétendait sécuritaire, et qui a gravement démantelé notre appareil républicain de sécurité, parce qu'en matière de sécurité, le laxisme, il est à droite ! Les laxistes siègent sur les bancs de l'UMP ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Les conséquences sont là : des personnels motivés mais harassés et une opinion publique qui s'inquiète.
Monsieur le ministre, le chantier est immense, heureusement, je sais que vous n'aspirez pas au repos, mais au travail. Pour ma part, en tant que co-animateur avec Jean-Pierre Blazy du groupe de travail parlementaire du groupe SRC sur les zones de sécurité prioritaire, j'ai pu suivre de près la première pierre de l'édifice que vous construisez.
À mon sens, vous aviez une priorité absolue et deux impératifs. Nous les retrouvons aujourd'hui déclinés dans le budget présenté.
Une priorité absolue : celle de rétablir durablement l'ordre républicain, un ordre juste, dans les territoires qui ont été abandonnés par l'ancienne majorité. C'était l'esprit de votre visite avec le président de la République à Grenoble. C'est le sens des ZSP que vous déployez progressivement. Il fallait agir vite, avec méthode. Cette méthode est la bonne car il ne sert à rien de déployer épisodiquement des forces mobiles dans un secteur délaissé ou de laisser les Bac seules en première ligne. C'est dans la durée, avec une présence de terrain renforcée, qu'une forme insupportable de délinquance organisée sera enfin extirpée de nos territoires.
Votre premier impératif, c'est de donner les moyens pour que la population et les jeunes en particulier portent un nouveau regard sur nos forces de police et de gendarmerie. Cela passe par une police plus proche des citoyens, mieux équipée, mieux formée, avec des effectifs adaptés aux missions.
Votre second impératif, c'est d'intégrer nos forces de sécurité confortées dans une chaîne complète de prise en charge de la sécurité. C'est là tout l'intérêt des ZSP mises en place. Je suis convaincu que le réel caractère interministériel de cette démarche, appuyée sur la responsabilisation des acteurs de terrain et la motivation des policiers et gendarmes, va porter ses fruits.
Votre budget intègre également une dimension essentielle : celle de la modernisation de la police et de la gendarmerie. Chaque jour nous démontre que la vidéoprotection des espaces publics évite des délits ou permet la poursuite des auteurs de faits commis.
À cet égard, faut-il continuer à immobiliser de nombreux effectifs à des gardes statiques d'innombrables immeubles ou, au contraire, réfléchir à des missions plus motivantes et plus efficaces pour les policiers et gendarmes concernés ?
Chaque semaine nous apprend que la police scientifique apporte des preuves essentielles. Nous pouvons construire la police la plus efficace d'Europe par un investissement approprié.
Monsieur le ministre, nous sommes trente ans après les événements des Minguettes. Trente années d'efforts pour contenir, souvent en vain, et faire régresser les violences urbaines. La délinquance n'a cessé d'être toujours plus visible, de s'étaler jusque dans nos campagnes, et d'introduire de l'insécurité dans notre société.
Au-delà de ce budget qui donne enfin une perspective claire à notre police et notre gendarmerie, il est temps, avec vous, de concevoir ensemble, dans une démarche de co-production associant gouvernement, parlement, professionnels, acteurs locaux, une nouvelle politique de sécurité adaptée à la réalité du XXIe siècle.
Pour relever ce défi, vous le savez, monsieur le ministre, vous avez toute notre confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(M. Denis Baupin remplace Mme Sandrine Mazetier au fauteuil de la présidence.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au sein d'un Gouvernement qui est souvent – et aujourd'hui plus que jamais – prisonnier de ses dogmes, voire parfois de simples slogans, …
…vous semblez, monsieur le ministre, vous distinguer par un certain pragmatisme, ce qui est sans doute ce qu'il y a de mieux à espérer d'un socialiste en matière de sécurité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ainsi, vous avez sagement remisé au placard, quoique certains en aient dit cet après-midi, le retour de la police de proximité qui a pourtant tenu lieu de contre-programme au PS pendant cinq ans. Vous donnez ainsi raison à Nicolas Sarkozy qui y avait renoncé en 2002, pas par idéologie, (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), mais simplement dans un souci d'efficacité parce que la police de proximité pour produire des résultats aurait supposé des moyens considérables.
C'est quoi les patrouilleurs ? Ce n'est pas de la police de proximité ?
C'est l'Inspection générale de la police nationale qui l'a souligné en 2001.
En revanche, au nom du même pragmatisme, vous avez fait le choix de maintenir les patrouilles de la police nationale, dispositif mis en place par votre prédécesseur Claude Guéant, et dont vous actez ainsi cette fois l'efficacité.
En effet, monsieur Blazy.
On a donc plutôt envie, monsieur le ministre, de croire dans votre projet que sont les zones de sécurité prioritaire. J'ai eu l'occasion de vous dire l'intérêt que nous manifestons à Dreux pour entrer dans ce dispositif. Mais ce faisant, je dois avouer que je fais une sorte de pari pascalien : que les effectifs supplémentaires existent ou qu'ils n'existent pas, j'ai plus à gagner à y croire, qu'à ne pas y croire. (Sourires.) Et s'il n'y en a pas, au moins je n'en perdrai pas.
Parce que pour l'instant, force est de constater qu'il en est des effectifs supplémentaires comme de l'existence de Dieu : on attend toujours les preuves. (Sourires.)
En l'occurrence, vous annoncez 480 emplois créés dans la police et la gendarmerie. Pourtant à y regarder de près, le plafond d'emplois du programme « Police nationale » diminue de 1 218 emplois – net de transferts –…
… et celui de la gendarmerie nationale affiche une augmentation de 1 235 emplois uniquement grâce à une mesure technique consistant à réintégrer des effectifs mis à dispositions des grands opérateurs tels EDF, SNCF, qui porte sur 1 045 ETP.
La hausse du côté des effectifs de la gendarmerie n'est donc plus que de 193 emplois.
Moins 1 218 d'un côté, plus 193 de l'autre : c'est bien d'une diminution des plafonds d'emplois de la police et de la gendarmerie de 1 025 emplois qu'il s'agit. La seule réalité budgétaire, c'est celle-ci !
Nous voulons donc bien croire à vos augmentations d'effectifs, mais nous avons encore besoin que vous nous y aidiez : pour l'instant, la seule chose certaine, c'est qu'en dehors de ces ZSP, il y aura des réductions d'effectifs importantes partout ailleurs.
Enfin, ces ZSP ne pourraient-elles pas être l'occasion de revoir une géographie indemnitaire trop souvent injuste ? Je pense en particulier aux difficultés de recrutement dans les départements périphériques de la petite couronne, là où les primes de SGAP n'existent pas. Entre Rambouillet et Dreux, par exemple, la différence de rémunération est de plus de 1 000 euros par an pour un gardien de la paix – et ce ne sont pas les chiffres de la délinquance qui justifie cette différence. Je suis bien conscient que les chantiers indemnitaires sont difficiles, mais en début de quinquennat, c'est sans doute le moment ou jamais de s'y atteler.
Enfin, monsieur le ministre, on serait bien tentés de croire au discours de fermeté que vous vous efforcez de construire pour la gauche en matière de sécurité. L'enjeu est de taille. Mais ce discours a besoin d'un corollaire rigoureux : une justice ferme.
Or la circulaire de politique pénale publiée par Mme la garde des sceaux au mois de septembre semble vouer vos efforts à l'échec en revendiquant le renoncement à la fermeté face aux récidivistes puisqu'elle propose une application homéopathique des peines plancher. Alors que la loi a entendu instaurer le principe de peines minimum pour les récidivistes, en l'assortissant d'une possibilité pour le juge de s'en écarter au nom du principe de l'individualisation des peines, Mme Taubira entend faire de l'exception la règle en allant à rebours de l'intention du législateur. Si le Gouvernement veut revenir sur les peines plancher, qu'il passe par la loi, qu'il ait le courage de rouvrir ce débat devant le Parlement. Il serait parfaitement scandaleux qu'il incite les juges à faire une application de la loi contraire à son esprit.
L'action entreprise depuis 2002 en matière de sécurité a porté ses fruits, avec une baisse de 17 % de la délinquance générale. En 2012, année d'alternance électorale au bilan partagé, nous enregistrerons probablement une baisse pour la dixième année consécutive. Preuve qu'en matière de lutte contre la délinquance et la criminalité, il n'y a pas de politique alternative, il n'y a qu'une seule politique : la fermeté.
Nous veillerons, monsieur le ministre, à ce que votre discours de fermeté ne soit pas, faute notamment d'une politique pénale ferme et d'une volonté gouvernementale partagée, un discours d'illusion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, depuis notre arrivée aux responsabilités, nous avons tenu l'un des principaux engagements de campagne de François Hollande : faire de la sécurité une priorité de notre quinquennat.
Au cours des six derniers mois, le Gouvernement comme la majorité ont eu l'occasion de prouver que cet engagement était tenu en mettant la sécurité au coeur de leur action. Les crédits de la mission « Sécurité » que nous examinons sont l'illustration de notre engagement en faveur d'une politique de sécurité qui renoue avec une volonté d'efficacité.
Alors que la majorité précédente s'était perdue dans une mythologie sécuritaire où l'affichage et la rhétorique occupaient davantage de place que l'action, les moyens ou les résultats,…
…nous nous sommes donné pour mission de redresser la France, y compris en matière de sécurité.
La charge qui nous incombe est bien lourde, vous le savez, mes chers collègues, mais notre chemin est clair : il s'agit de redonner des moyens à la police et à la gendarmerie, de revoir la méthode, de restaurer la confiance.
Avec le PLF pour 2013, nous nous donnons les moyens concrets pour faire revenir la police sur le terrain. Entre 2002 et 2012, la police a perdu pas moins de 7 000 postes. Rien qu'en 2013, si la droite était encore au pouvoir, les effectifs auraient diminué de 1 790. C'est vous dire l'état dans lequel nous aurions trouvé nos forces de police et de sécurité…
Ce constat est partagé par beaucoup, je le crois, et a été rappelé par de nombreux orateurs. Je ne m'y attarderai pas car il me semble sans appel. Le moment est maintenant venu de l'action, la nôtre, celle de notre majorité.
Si nous voulons redonner des moyens à la police, c'est parce que nous voulons qu'elle soit présente sur le terrain, au quotidien. Les effectifs supplémentaires dans la police et la gendarmerie visent tout simplement à permettre leur présence sur l'ensemble du territoire national, un bon maillage étant essentiel, chacun le sait, à l'efficacité des actions des forces de l'ordre.
Les zones de sécurité prioritaires, engagement de campagne de François Hollande, sont aussi la marque de notre volonté de ne laisser aucun territoire de la République devenir une zone de non-droit, qu'il s'agisse de quartiers urbains ou de zones rurales. Ce nouveau dispositif que vous avez mis en place depuis quelques mois maintenant, monsieur le ministre, et qui se renforce de jour en jour est aussi l'emblème de notre action : à la fois ferme dans les objectifs et souple dans la façon de concevoir la mise en place des forces de la police à travers un travail partagé, concerté avec l'ensemble des acteurs, notamment la justice, la politique de la ville et naturellement les élus locaux. Nous donnons tous les moyens nécessaires, au-delà des forces de sécurité, pour obtenir des résultats dans la durée et endiguer la délinquance et le crime dans des endroits où ils touchent plus durement nos concitoyens.
À Marseille, les actions ciblées des forces de l'ordre avec les renforts significatifs que vous avez décidé d'envoyer, monsieur le ministre, montrent la capacité de réaction du Gouvernement comme de la majorité face à des situations exceptionnelles.
Ces quelques éléments marquent la rupture que nous avons établie avec la politique-spectacle de la précédente législature. En somme, nous refusons de tomber dans les effets d'annonce : pour chaque fait divers, une loi sécuritaire était annoncée, c'était la marque de fabrique de Nicolas Sarkozy et de l'UMP. C'est sans doute ce qui a scellé l'échec de sa politique de sécurité, à mon humble avis. C'est aussi ce qui a précipité la défiance, y compris des policiers eux-mêmes, à l'égard du précédent gouvernement.
Ce budget illustre le retour des fondamentaux pour une politique de sécurité efficace, c'est-à-dire une politique qui obtienne des résultats. C'est le premier élan d'une stratégie longue en matière de sécurité publique. Au cours des dix dernières années, grâce à l'action de nos élus locaux confrontés en première ligne à l'ensemble des enjeux de sécurité, nous avons acquis une expérience significative, une expérience précieuse qui nous permet d'appréhender avec rigueur et sérieux la réalité que de nombreux de nos concitoyens vivent, parfois quotidiennement.
Pour nous, l'insécurité n'est pas un chiffon rouge que l'on agite à l'occasion des élections. C'est d'abord une réalité dont souffrent beaucoup de nos compatriotes. C'est pourquoi notre seule volonté est de lutter de manière implacable contre la criminalité et la délinquance. Pour cela, il fallait une rupture avec les années précédentes, à la fois pour retrouver des moyens humains et matériels, pour définir une méthode et reconstruire un lien de confiance entre la police et les Français.
C'est tout cela que nous retrouvons aujourd'hui dans ce budget. Avec vous, monsieur le ministre, avec l'action du Gouvernement et de la majorité, nous n'en sommes plus au stade de la parole vide. C'est le moment des actes mis en cohérence avec les engagements pris devant les Français. Nous assumons pleinement d'avoir fait de la sécurité une priorité en lieu et place de l'affichage stérile de la majorité précédente. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la sécurité est, on le sait, l'une des principales préoccupations de nos concitoyens, qu'ils vivent en milieu urbain ou en milieu rural. On sait également que l'insécurité et la violence revêtent des formes multiples, diversifiées et changeantes. La puissance publique doit donc apporter des réponses multiples, diversifiées et particulièrement adaptées aux nouvelles formes de délinquance.
Je n'ai pas le sentiment, monsieur le ministre, que le projet de budget que vous nous présentez soit vraiment à la hauteur de ces enjeux.
Ainsi pouvons-nous légitimement craindre que l'augmentation des effectifs de police et de gendarmerie que vous annoncez ne soit qu'une apparence lorsqu'on la met en regard des postes supprimés, comme l'a fait tout à l'heure notre collègue Olivier Marleix.
Il importe également de constater une forte réduction des crédits de fonctionnement qui baissent de 29 millions d'euros – 7 % – par rapport à l'année 2012.
Le même constat, monsieur le ministre, peut malheureusement être fait à propos des dépenses informatiques et des dépenses de communication.
Au-delà de ces chiffres bruts qui comptent lorsque l'on examine un projet de budget, plusieurs remarques de fond peuvent être faites.
Les zones de sécurité prioritaires, dont la création n'est pas intrinsèquement contestable, ne font pas l'objet d'un financement spécifique. Il y a donc un véritable risque de les voir absorber une grande partie des crédits et des emplois de votre ministère, ce qui, par effet de ricochet, diminuera les moyens affectés aux zones de police et de gendarmerie classiques. Le risque est d'autant plus grand, monsieur le ministre, qu'à ce jour seulement quinze zones de sécurité prioritaires ont été créées alors que le candidat François Hollande en promettait soixante pendant sa campagne électorale.
Par ailleurs, votre budget est marqué par une forte augmentation des dépenses de personnel. Elle recouvre certes des créations d'emplois, avec la réserve que j'émettais tout à l'heure, mais également une revalorisation indiciaire de très nombreux agents. Il en résulte que l'accroissement facial de la mission « Sécurité » ne va pas nécessairement se traduire par un renforcement de la présence des forces de l'ordre sur le terrain.
Ainsi, et je ne citerai que ce seul exemple, la situation de l'immobilier des commissariats de police, des gendarmeries surtout, demeure très préoccupante. Nombre de collectivités locales sont dans l'incertitude quant au maintien de leurs brigades de gendarmerie. Faute de travaux devenus particulièrement nécessaires dans leurs locaux, elles pourraient purement et simplement être fermées et regroupées au chef-lieu de canton voisin.
Je crains donc, monsieur le ministre, que malgré votre engagement personnel et votre pragmatisme, que je veux saluer et qui tranche avec l'idéologie et l'angélisme dont font preuve vos amis politiques,…
…que votre budget soit à beaucoup d'égards en trompe-l'oeil, qu'il ne soit pas de nature à assurer réellement la sécurité des biens et des personnes alors qu'il y a dans ce domaine une forte et très légitime demande de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la mission « Sécurité » du projet de loi de finances pour 2013 dont nous débattons aujourd'hui traduit la volonté du Président de la République et du Gouvernement de faire de la sécurité et de la justice des priorités pour tous les citoyens sur l'ensemble du territoire au même titre que l'éducation et l'emploi.
Cette exigence est portée avec détermination par l'ensemble de la majorité. Je n'ai pas peur d'affirmer que cette politique est en rupture avec les choix du précédent gouvernement.
Rupture, car il n'est pas question de jouer sur les peurs, mais de porter la conviction qu'en République, la sécurité est une exigence légitime pour tous les citoyens.
Rupture, car contrairement aux effets d'annonce sans lendemain trop souvent subis ces dernières années, nous voulons agir avec constance et détermination pour le droit à la tranquillité publique.
Rupture enfin, car la politique des emplois sera désormais en cohérence avec les objectifs affichés.
De 2007 à 2012, pas moins de 7 700 postes de policiers ont été supprimés. Cette baisse des effectifs est le résultat de l'application brutale de la RGPP, avec son principe absurde de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Les conséquences de cette politique, vous les connaissez aussi bien que moi, mes chers collègues : détérioration des conditions de travail des policiers, affaiblissement des rapports entre la police et les citoyens, hausse de la délinquance, illustrée par la forte augmentation des violences envers les personnes ces dernières années.
La suppression des postes couplée à la politique du chiffre et à l'extension des missions a placé les fonctionnaires de police dans une situation intenable.
Il était urgent de mettre un terme à cette politique. C'est le choix qui est fait dans ce projet de loi de finances.
Désormais, tous les départs d'actifs à la retraite seront remplacés. Dès 2013, 1 700 postes qui auraient dû être supprimés seront sauvés, 288 postes de policiers supplémentaires seront créés et 2 432 gardiens de la paix seront recrutés quand le précédent gouvernement n'en recrutait que 500 en 2010. Ces trois chiffres, vous le voyez bien, mes chers collègues, illustrent à eux seuls la rupture que j'évoquais précédemment.
Cet engagement est d'autant plus important qu'il intervient dans un contexte budgétaire difficile. Il marque la volonté du Gouvernement de mener une nouvelle politique de sécurité et de ne plus sacrifier la sécurité de nos concitoyens sur l'autel de règles purement comptables.
Vous avez, monsieur le ministre, défini les orientations de cette nouvelle politique dans votre discours du 19 septembre 2012 à l'École militaire. Vous souligniez alors la nécessaire mobilisation de l'État face à l'urgence de redonner l'espoir, à l'urgence de faire reculer les violences et les incivilités, à l'urgence de casser les trafics, à l'urgence de trouver des solutions pour que la vie des Français change durablement.
Cette nouvelle politique s'appuiera donc, sur le terrain, sur des effectifs renforcés qui seront affectés en priorité dans les zones les plus difficiles.
Député de Saint-Denis, Pierrefitte et Villetaneuse, je sais que les habitants confrontés aux difficultés économiques et sociales les plus importantes sont également les premières victimes de la hausse de la délinquance, du développement des trafics et des nuisances du quotidien.
Saint-Denis, sous-dotée en policiers depuis de trop nombreuses années, détient le triste record du taux de crimes et délits le plus élevé des grandes villes de France. Dans le même temps, Saint-Denis connait un très fort développement démographique, économique et territorial. Aussi, afin d'appuyer le développement de la ville et d'assurer la protection des citoyens, je réaffirme ici la nécessité d'une présence renforcée et permanente des forces de police.
La ville bénéficie à ce titre de la création d'une des quinze premières zones de sécurité prioritaires. Cette ZSP, par le renforcement des forces de police et une meilleure coordination des différents services, permettra de lutter efficacement contre les phénomènes de délinquance.
Sans hiérarchiser ni opposer en aucune manière les différents modes d'intervention, je veux dire ici que les habitants ont besoin d'une police de proximité visible sur la voie publique.
La présence renforcée de policiers est un élément essentiel pour permettre la reconquête de l'espace public et garantir ainsi que le droit s'applique partout et à tous de la même manière.
Cette mobilisation sur le terrain répond également à l'enjeu de rapprocher policiers et citoyens. Les rapports entre ces derniers ont été beaucoup trop distendus ces dernières années.
Au-delà des missions de coercition, il faut permettre aux forces de l'ordre de nouer des contacts de proximité et de confiance avec les citoyens et ainsi d'améliorer l'efficacité de leurs missions.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, avec ce budget pour 2013, nous faisons le choix d'une police aux effectifs renforcés, d'une police aux objectifs clarifiés, et d'une politique qui agit pour la sécurité de tous les citoyens sur l'ensemble du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous voici présents dans cet hémicycle afin d'examiner l'un des budgets les plus sensibles pour le quotidien des Français : celui de la police et de la gendarmerie. Vous découvrez donc, monsieur le ministre, la difficulté d'un tel exercice, ô combien important pour votre administration. Permettez-moi, malgré les oppositions de nos familles politiques, de vous présenter mes voeux républicains de plus vif succès dans la mission qui vous incombe. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Après avoir lu avec attention l'ensemble des documents budgétaires, je ne vous interrogerai pas sur votre volonté, monsieur le ministre, d'assurer la sécurité des citoyens de notre pays. Je m'inquiète néanmoins de la méthode employée par le Gouvernement pour tenir les engagements du candidat devenu Président de la République.
Ce budget, qui devait annoncer un changement radical dans la politique de sécurité menée, prend à ma grande surprise le virage de la rigueur. Plus ironiquement, je soulignerai que certaines habitudes de gestion, tant décriées par l'opposition d'hier, ont perduré après l'alternance, preuve que la droite ne gérait pas si mal ce ministère. Sauf à ce que le vice soit devenu vertu, je constate que vous n'avez pas supprimé les lois votées sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Il y a quelques semaines, lors d'une question orale à la ministre de la justice, vous aviez opportunément répondu à sa place, monsieur le ministre, en me demandant de vous rejoindre pour voter l'augmentation des moyens consacrés aux forces de l'ordre. Cela n'enlève rien au fait que la justice est impotente dans notre État de droit, mais passons.
Aujourd'hui, je suis venu répondre à votre appel pour voter plus de moyens pour votre ministère, et je suis déçu. Au départ, tout avait bien commencé : les crédits du programme « Police nationale » étaient en augmentation de plus de 3 %, et je me disais que nous tenions là un ministre de l'intérieur exemplaire.
Hélas ! Quelle ne fut pas ma surprise en constatant que le plafond d'équivalents temps plein travaillé de la police nationale diminuait de 1 218 unités par rapport au précédent budget, en dépit de la création de 288 postes. En d'autres termes, il y aura moins de policiers dans les rues qu'il y a un an.
Vous choisissez de mieux les rémunérer, ce qui est nécessaire, mais la population entend être mieux protégée.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, je suis venu répondre à votre appel pour voter plus de moyens pour votre ministère, et je suis déçu.
Dans la gendarmerie, vous faites l'inverse : le nombre d'ETPT est en hausse plus que sensible de 193 unités, mais le budget, lui, diminue de 40 millions d'euros. Nos gendarmes seront ainsi plus nombreux, mais devront s'entasser dans des voitures fatiguées, utiliser des ordinateurs vieillissants et amener au travail leurs propres ramettes de papier.
Aujourd'hui, je suis venu répondre à votre appel pour voter plus de moyens pour votre ministère, et je suis déçu.
J'ai un temps applaudi en voyant que vous augmentiez le montant de l'action « Sécurité Routière » de la gendarmerie de 32 millions d'euros. Puis, je me suis aperçu que vous aviez déshabillé Paul pour habiller Pierre, car l'action « Sécurité routière » du programme « Police nationale » diminue en fait de 70 millions d'euros.
Ces deux actions cumulées connaissent une baisse de leurs budgets de près de 40 millions d'euros ; c'est une politique nudiste…
Aujourd'hui, je suis venu répondre à votre appel pour voter plus de moyens pour votre ministère, et je suis déçu.
Nous retrouvons le même effet de vases communicants entre la police nationale et la gendarmerie pour les actions « Commandement, ressources humaines et logistiques », puisque l'une augmente tandis que l'autre diminue.
Évidemment, le plus inquiétant dans tout cela est que nous allons à grande vitesse vers un service public digne d'un pays du tiers-monde,… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
…etavec une réduction des crédits de fonctionnement de 29 millions d'euros par rapport au précédent budget. Comment les policiers et les gendarmes feront-ils leur travail ? Comment feront-ils pour imprimer les procès-verbaux qu'ils rédigent ? Comment feront-ils pour accueillir les victimes dans des locaux en bon état ?
S'agissant des zones prioritaires de sécurité, force est de constater qu'elles n'ont pas été budgétées. Le retour d'une police de proximité serait-il donc un miroir aux alouettes, pour ne pas dire aux manchots, ou encore aux canards sans tête ? Je vous laisse le choix du volatile – le pigeon est déjà pris…
Monsieur le ministre, ce budget tant attendu par nos concitoyens est décevant. Aucune décision, aucun marqueur sensible ; est-ce ainsi que l'on fait de la politique chez les socialistes ? Annoncer et ne rien faire – même si vous êtes très certainement le plus actif et efficace ministre de ce gouvernement, mais ce n'est pas difficile.
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est vrai !
Monsieur le ministre, vous en conviendrez avec moi, la sécurité des Français n'a pas de prix. Où est la cohérence ? Je vous promets pour ma part de me montrer cohérent, et de voter l'an prochain ces fameux moyens dont vous aviez parlé, mais que vous n'avez visiblement pas l'intention d'obtenir. Oui, monsieur le ministre : je suis déçu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Manifestement, nous n'avons pas lu le même budget que certains de nos collègues, et singulièrement celui qui m'a précédé à cette tribune.
Je veux revenir à l'essentiel, car certains tentent de noyer le poisson en parlant de tout autre chose que le budget. Je parlerai donc du budget qui nous a été présenté aujourd'hui.
Comme l'ensemble des députés socialistes, je ne peux que me réjouir en constatant, à la lecture de celui-ci, que la sécurité y figure bien comme une priorité du Gouvernement, au même titre que la justice, l'éducation et l'emploi. C'était une promesse de campagne de François Hollande, et elle se traduit aujourd'hui concrètement dans les actes.
Ce budget pour 2013 présente une double rupture, tout d'abord avec le précédent gouvernement, qui invoquait la sécurité sur tous les tons mais qui concrètement a sabré dans les effectifs – je vous rappelle que 12 000 postes ont disparu entre 2007 et 2012 –…
…et réduit le budget de fonctionnement de la gendarmerie comme celui de la police.
La rupture est également consommée avec la logique politique conservatrice qui, sous couvert de bonnes paroles, a échoué ces dix dernières années à répondre aux attentes des Français en matière de violence et de délinquance. Dois-je vous rappeler, chers collègues, que nous avons subi une hausse constante des violences aux personnes et l'explosion des cambriolages ?
Fort de 17,5 milliards d'euros, le budget global pour 2013 est en augmentation de 440 millions d'euros au titre des crédits de paiement. Il traduit, dans un cadre particulièrement contraint, la volonté de conduire une politique responsable pour assurer partout la sécurité de nos concitoyens. Je ne peux que m'en féliciter.
Nombre de mes collègues, comme M. Hanotin il y a quelques instants, ont insisté sur le rôle de la police dans notre société. J'y suis pour ma part très sensible, ma circonscription comptant elle aussi des policiers.
Je souhaite toutefois attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la gendarmerie en milieu rural. Après dix années de gouvernement de droite, dont cinq années de sarkozysme, nous avons atteint avec la RGPP un véritable point de non-retour. Ce sont là quelques vérités que nos collègues de l'opposition nieront peut-être, mais que j'ai subies dans la circonscription que j'ai l'honneur de représenter aujourd'hui.
Cette circonscription rurale compte 165 communes et 15 cantons, dont 13 ruraux. Sa densité est extrêmement faible, avec 42 habitants au kilomètre carré pour un total de 116 000 habitants, une population vieillissante et durement touchée par le chômage.
Or, ma circonscription, située dans le département du Cher, a payé un lourd tribut à la RGPP : 48 gendarmes supprimés ces cinq dernières années, voilà votre bilan, chers collègues de l'opposition !
En 1999, grâce à notre mobilisation, nous avons réussi à sauver un commissariat de police au centre de cette circonscription. En 2002, dès l'élection de la nouvelle majorité, ce commissariat a été supprimé.
Nous constatons aujourd'hui le bilan de cette politique. De 2007 à 2012, les effectifs de la gendarmerie du Cher ont donc été massivement réduits.
Concrètement, cela signifie que les gendarmes appelés en intervention mettent aujourd'hui trois quarts d'heure pour intervenir lorsqu'ils sont appelés dans certains endroits de la circonscription.
C'est le corollaire de la réduction des effectifs. Le budget que vous nous présentez, monsieur le ministre, permet d'inverser cette logique.
À l'évidence, le montant des crédits budgétaires pour la gendarmerie en 2013 met un terme à la RGPP que nous avons subie dans nos territoires ruraux. Il traduit l'engagement du Président de la République de rétablir une sécurité de qualité et de proximité, avec des crédits de paiement pour l'année 2013 en hausse de 94 millions d'euros,…
…et le recrutement de nouveaux effectifs : plus 3 641 sous-officiers en 2013 contre 3 148 en 2012, dont 192 postes créés dans la gendarmerie. Cette réalité est incontestable.
Ce budget comprend également des mesures indemnitaires, déjà évoquées, et affiche le souci de préserver les moyens de fonctionnement sur le terrain ; il faudra bien entendu poursuivre le travail sur ce point.
Je confirme que le carburant pose souvent problème en fin d'exercice budgétaire ; c'est d'ailleurs le cas avec le budget que l'ancienne majorité a voté l'année dernière.
Monsieur le ministre, à l'heure où il est mis fin à la politique brutale de diminution des effectifs dans la police et la gendarmerie, et alors que vous nous annoncez des moyens consolidés pour les forces de police et de sécurité dans notre pays, je me permets d'attirer votre attention, au-delà des zones de sécurité prioritaires instituées par le Gouvernement et soutenues par votre majorité, sur les besoins de ces brigades de gendarmerie rurales qui assurent la sécurité de pans entiers de notre territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, tout a déjà été dit, (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) et je n'ai pas envie de rejouer la bataille d'Hernani sur les chiffres des effectifs défendus à juste titre par les membres de la majorité, et combattus par l'opposition comme c'est naturellement son devoir.
Je les renvoie simplement à l'excellent tableau dressé par notre rapporteur, qui en matière d'effectifs illumine de sa clarté la très grande vérité qui différencie le budget que vous présentez de celui qui nous a été présenté pendant cinq ans.
Monsieur le ministre, vous savez combien la majorité soutient la politique que vous conduisez. L'énergie que vous mettez à l'incarner n'a d'égale que la détermination dont vous faites preuve depuis six mois pour que ce pays ait à nouveau le sentiment que l'on se préoccupe de lui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous savons tous, cependant, combien votre tâche est difficile. Les attentes sont fortes, et sont proportionnelles à la déception ressentie par nos concitoyens après avoir fait confiance, pendant dix ans, à une majorité qui leur avait beaucoup promis, et qui les a beaucoup déçus.
Pour y répondre, monsieur le ministre, vous n'avez guère de solution. Vous avez besoin de moyens ; malheureusement l'État ne peut pas vous les accorder. Votre budget représente donc le minimum de ce qu'une priorité peut recueillir dans le cadre d'une politique de finances publiques rigoureuse.
Nous aurions aimé voir plus de créations de postes et de personnels mobilisés. Toutefois, il me semble que le Président de la République a fait le maximum et nous ne doutons pas que cet effort sera poursuivi.
Il faut s'intéresser aux marges de progression qui peuvent exister dans l'administration que vous avez aujourd'hui l'honneur de diriger. Il faut s'interroger sur les capacités d'évolution, sur une gestion plus rigoureuse du ministère de l'intérieur, parce qu'il me semble qu'il y a des marges de progression.
Dans cet hémicycle, au mois de juillet dernier, le rapporteur général du budget, Christian Eckert, est revenu sur une tendance lourde et préoccupante. Elle est d'autant plus préoccupante que la Cour des comptes elle aussi a eu l'occasion de la souligner dans ses travaux : cette tendance qui fait que, depuis 2007, au sein de la police nationale, l'augmentation très soutenue des dépenses de rémunération exerce une pression excessivement forte sur les moyens de fonctionnement et d'investissement.
En effet, depuis cette date, la Direction générale de la police nationale a dépassé systématiquement les crédits figurant dans les lois de finances. Après avoir souligné la difficulté à obtenir les raisons du dépassement de ces crédits, le rapporteur général a souligné qu'il fallait y trouver une source dans les coûts des mesures catégorielles qui ont été accordées par vos prédécesseurs. Ainsi, la part des rémunérations dans la mission « Sécurité » ne cesse de croître : 84,4 % en 2009, 86,2 % en 2010, 86,4 % en 2011, alors même, comme l'a dit Jean-Pierre Blazy, que la police compte aujourd'hui moins d'effectifs de fonctionnaires qu'en 2007.
Une police de moins en moins nombreuse, une police qui coûte de plus en plus cher, voilà qui en fait un isolat très particulier dans la fonction publique d'État aujourd'hui. C'est pourquoi il me semble qu'une bonne direction doit prendre le pas sur une mauvaise gestion. Il faut que l'institution policière accepte de reviser un certain nombre de mauvaises habitudes de gestion et de conception acquises depuis dix ans, qui aboutissent à créer une tension difficilement supportable pour les finances publiques.
Par ailleurs, je tiens à vous assurer de notre soutien pour que votre ministère puisse obtenir rapidement la levée complète de ce que l'on appelle la mise en réserve. Il y a, en effet, un paradoxe puisque les parlementaires passent des semaines à discuter des crédits mais qu'à peine votés, la mauvaise habitude est prise d'en geler l'affectation, voire de les réserver, interdisant ainsi aux ministres de dépenser les sommes votées par les parlementaires, et par le fait de concrétiser les objectifs fixés.
En 2010, 2011 et 2012, votre ministère a obtenu le dégel immédiat des crédits de fonctionnement et d'investissement. Je veux croire que cette habitude sera reconduite cette année et que vous pourrez disposer rapidement de la levée de la mise en réserve, sinon il faudra revenir sur des investissements. Vous avez le soutien de la majorité pour obtenir rapidement le déblocage des crédits dont la mise en réserve a été annoncée. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le ministre, le projet de budget alloué à la mission « Sécurité » pourrait paraître positif : le programme « Police nationale » voit ses crédits de paiement augmenter de 275 millions d'euros, et la gendarmerie nationale bénéficiera de 95 millions d'euros supplémentaires. S'il est vrai que cet effort est indéniable au regard du contexte actuel de réduction des dépenses de l'État, il s'agit néanmoins d'une hausse en trompe-l'oeil.
Ces 400 millions d'euros de crédits supplémentaires ne bénéficieront pas à l'amélioration de la sécurité des Français ni à l'amélioration du parc immobilier. Ils seront essentiellement consacrés à la revalorisation des traitements. Ce choix n'est pas contestable en soi, à condition que la majorité socialiste ne prétende pas ensuite réaffirmer la présence des forces de l'ordre sur le terrain.
Et pourtant, François Hollande avait évoqué la création de plus de soixante zones de sécurité prioritaires durant sa campagne ! Or, à ce jour, monsieur le ministre, vous n'avez annoncé la création que de quinze zones, sans qu'elles soient budgétées puisqu'elles doivent se faire à coûts constants. Il y a d'ailleurs là une contradiction, puisque le document de présentation du projet de loi de finances pour 2013 ainsi que le site du ministère annoncent que les créations de postes – 288 policiers et 193 gendarmes – seront notamment affectées aux zones de sécurité prioritaires. Ce n'est donc pas à coût constant.
J'attends également impatiemment de voir, au-delà des annonces du Gouvernement, si l'intérieur et la justice vont effectivement collaborer très étroitement sur ce dossier des zones de sécurité. Nous sommes en droit de nous interroger car, d'un côté, les effectifs sont renforcés tandis que, de l'autre, on s'attache à détricoter toutes les réformes précédentes en matière judiciaire, en particulier les peines planchers ou l'application des peines. Je suis curieux de connaître la façon dont la ministre de la justice entend lutter contre la récidive avec le simple port d'un bracelet électronique.
Il fallait venir en commission lors de l'examen des crédits relatifs à la sécurité !
Je m'inquiète également du caractère de délimitation géographique prioritaire donné aux zones de sécurité. Ne s'agit-il pas d'un désengagement de l'État dans le reste des territoires ? Dans votre circulaire du 30 juillet 2012, vous précisez que, pour ces territoires, serait maintenue une politique de sécurité « dynamique ». Que cela signifie-t-il, monsieur le ministre ?
En somme, s'il convient de reconnaître la fin des suppressions de postes de policiers et de gendarmes, il est inutile pour autant de pavoiser en faisant miroiter aux Français le retour d'une police de proximité.
Le ministère n'en aura pas les moyens, à moins de fermer des brigades de gendarmerie en zone rurale pour pouvoir allouer plus de moyens aux zones de sécurité en milieu urbain, ce qui reviendrait, monsieur le ministre, à accepter l'idée d'une sécurité à la carte.
En dehors de la question des zones de sécurité qui ne sont pas budgétées, il convient de reconnaître le maintien global, voire la hausse, des crédits de la mission « Sécurité » en dépit des contraintes budgétaires.
Je note également l'effort en ce qui concerne les crédits d'investissement dédiés aux systèmes d'information et à l'achat de nouveaux véhicules dont le parc opérationnel est vieillissant. La décision d'acquérir pour 40 millions d'euros de véhicules neufs en 2013 est donc positive.
Les forces de l'ordre sont confrontées à des missions de plus en plus dures au point d'y être blessées, voire d'y laisser la vie. Nous touchons ici au rôle des forces de l'ordre dans notre société. Je souhaite également souligner leur forte mobilisation face à de nouveaux types de délit : délinquance itinérante, cybercriminalité, incivilités croissantes.
Cela dit, plusieurs questions restent en suspens.
La première concerne l'usage de la vidéosurveillance qui a fait ses preuves. Pourtant, j'entends encore des députés réticents sur ce dispositif de protection. Il faudra clarifier la volonté de l'État pour aider les collectivités qui souhaitent s'équiper.
La deuxième concerne le budget de la gendarmerie qui affiche une diminution de 29 millions d'euros relative aux dépenses de fonctionnement, hors interventions opérationnelles. Mais à quoi correspondent exactement ces économies ?
Il en va de même pour la problématique des carburants qui pose une difficulté réelle. Le rapporteur pour avis a indiqué par exemple qu'une hausse du coût du brut de 10 centimes représentait un surcoût de près de 5 millions d'euros pour la gendarmerie.
De même, nous nous interrogeons sur l'affaiblissement des crédits d'investissement immobiliers. C'est là un vrai défi. Or le budget présente une baisse importante de 124 millions d'euros alors qu'il faudrait investir entre 200 et 300 millions d'euros pour remettre à niveau le parc des casernes domaniales. La fameuse loi Duflot sur le logement social, qui a été annulée mais qui sera probablement à nouveau examinée ici même, pourrait signifier la diminution d'une ressource d'à peu près 120 millions d'euros, pourtant vitale pour le maintien de la qualité des casernements.
Nous partageons le même constat sur la nécessité de rénover le parc immobilier et sur le manque d'effectifs. Mais j'entends certains de nos collègues indiquer qu'il est prématuré d'envisager toute rénovation du parc immobilier sans revoir avant la carte des implantations de gendarmeries. Ce débat est dangereux car c'est la porte ouverte d'une sécurité à la carte entre les zones urbaines et les zones rurales. Dans les territoires éloignés, le gendarme est bien souvent le seul interlocuteur immédiatement disponible. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de parler du budget et de la mission « Sécurité civile », je souhaite, au nom du groupe socialiste, saluer le courage de tous les pompiers professionnels et volontaires qui assurent, au quotidien, la sécurité des Français et sauvent des vies, souvent au péril de la leur, comme nous le rappelle le drame de Digne-les-Bains. Au nom de mes collègues, je veux rendre hommage au sergent Michaël Baghioni, sapeur-pompier professionnel, et à Yann Siméoni, sapeur-pompier volontaire, tous deux décédés le 3 novembre dernier alors qu'ils tentaient de maîtriser un incendie. En ce moment de deuil, nous pensons aussi à l'ensemble des sapeurs-pompiers décédés en service commandé, à leurs familles, ainsi qu'à celles et ceux, qui, au cours des multiples interventions, ont été atteints dans leur chair ou psychologiquement.
La sécurité civile est un pan entier de la sécurité des Français. À ce titre, elle doit faire partie de vos priorités politiques.
Jamais la demande sociale de secours n'a été aussi importante. Jamais, les situations de graves crises mettant en danger nos concitoyens n'ont été aussi nombreuses. Dans ce contexte, les Français attendent de nous de l'efficacité pour le maintien de l'ordre et de la tranquillité, mais aussi pour des secours rapides et efficients, afin d'être protégés au mieux en cas d'accident ou de catastrophe.
Notre pays possède une organisation performante en matière de sécurité civile et de gestion des crises. Cette organisation permet d'assurer plus de 4 millions d'interventions par an avec un très bon rapport coût-efficacité, grâce à notre modèle original, fondé sur la complémentarité entre 200 000 sapeurs-pompiers volontaires et 50 000 professionnels et militaires, répartis dans 7 300 casernes. La force de notre organisation réside aussi dans la compétence partagée en l'État et les collectivités territoriales. Cette complémentarité permet à nos sapeurs-pompiers de passer très rapidement du secours de proximité qui fait leur quotidien à la gestion des crises les plus exceptionnelles.
Monsieur le ministre, à travers votre action et vos choix budgétaires, vous êtes chargé de maintenir les capacités opérationnelles de l'État et de préserver les conditions dans lesquelles les sapeurs-pompiers assurent leurs missions. Vous avez dû faire des choix difficiles dans un contexte budgétaire contraint connu de tous.
D'une manière générale, ce budget pour 2013 prévoit une forte évolution des crédits de paiement pour la période 2013-2015, ce qui traduit une véritable montée en puissance du soutien de l'État.
Pour 2013, vous avez clairement fait le choix de maintenir en condition opérationnelle les moyens aériens de lutte contre les feux de forêt et de secours. Vous avez obtenu que la maintenance des avions et des hélicoptères soit intégralement financée l'an prochain et disposerez à cet effet de 13 millions de plus qu'en 2012.
L'amélioration de la qualité du réseau de transmission des SDIS constitue aussi une priorité pour vous. Nous vous rejoignons en ce sens. Pour accélérer le déploiement opérationnel du réseau ANTARES, vous avez décidé de réaliser une nouvelle tranche de travaux de près de 18 millions d'euros entre 2013 et 2015. Ces crédits ont été priorisés dans le projet de loi de finances pour 2013, s'ajoutant ainsi aux 4 millions d'euros déjà engagés depuis votre arrivée.
Les moyens aériens, le déminage, les formations militaires de la sécurité civile continueront à être associés, lorsque ce sera nécessaire, aux efforts menés localement puisque vous préférez avec justesse un État présent lors des coups durs, un État solidaire plutôt qu'un saupoudrage d'aides ou de subventions peu signifiantes.
Monsieur le ministre, dans cette période budgétaire difficile, chacun sait que, dorénavant, vous demanderez que la réflexion ne porte plus sur le dépenser plus, mais sur le dépenser mieux. Il faudra éviter les redondances, mutualiser certains moyens et planifier les investissements entre départements. Il deviendra ainsi nécessaire de mettre en place des outils d'analyse des risques et d'intervention dans une logique de bassins de vie et non dans les limites administratives d'un département.
Enfin, il sera indispensable de faciliter la constitution de colonnes de renfort dans le cadre national, européen voire au-delà, et de travailler demain à la création d'une future force européenne de protection civile. Nous savons que le défi est immense mais c'est aussi ce qui le rend intéressant, voire passionnant.
Monsieur le ministre, lorsque nous parlons de sécurité civile, nous parlons d'intérêt général, nous parlons de milliers d'hommes et de femmes qui ont la lourde responsabilité de veiller sur notre sécurité. Partout sur le territoire, chaque jour, ils donnent une expression concrète à notre devise républicaine. Votre devoir est de les accompagner dans leurs missions ; sachez que nous serons à vos côtés pour cela. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le ministre, vous souhaitez mettre en oeuvre, je vous cite, « une nouvelle politique de sécurité ». Bien. Mais de quoi s'agit-il exactement ? Soyez transparent : s'agit-il de renouveler l'expérience de la police de proximité, dont on a pu mesurer les effets en termes d'augmentation de la délinquance lors de la période 1997-2002 ?
S'agit-il de concentrer les effectifs de sécurité publique dans les zones que vous considérez comme prioritaires, au détriment des zones périurbaines et rurales, lesquelles sont elles aussi confrontées à la délinquance ? J'attends vos réponses.
Croyez-vous que le renforcement des liens entre les forces de l'ordre et les populations répondra aux attentes ? Je ne le crois pas. Dans ma circonscription, nous connaissons des actes qualifiés de délinquance itinérante. Pensez-vous que les victimes de ces actes attendent un lien renforcé entre elles et les forces de l'ordre ? Non, ce que les victimes souhaitent, c'est une réponse ferme à ces méfaits, pas de la commisération et certainement pas de l'indulgence au niveau des sanctions.
En définissant des zones prioritaires, vous allez accentuer ce phénomène de délinquance itinérante.
L'autorité publique doit s'exercer en tout lieu de notre territoire national. Les Françaises et les Français doivent être égaux en matière de sécurité publique.
Votre politique ne doit pas d'une part conduire à vouloir apaiser certains quartiers et d'autre part à transférer une partie de la délinquance vers d'autres territoires, dont les zones rurales.
Avec ce projet de budget, vous appelez de vos voeux, monsieur le ministre, un partenariat renforcé de l'ensemble des acteurs concernés au niveau national – justice, police, gendarmerie – comme sur le terrain. Je me félicite qu'en la matière, vous mettiez vos pas dans ceux de la précédente majorité. Peut-être l'ensemble du Gouvernement serait-il inspiré de le faire en d'autres matières. (Interruptions sur les bancs du groupe SRC.)
En effet, il me semble utile de rappeler à l'occasion de ce débat que de nombreux comités intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance ont vu le jour sur l'ensemble du territoire. En la matière, personne ne vous a attendu…
Alors, entre des mesures passéistes et inefficaces et des mesures déjà mises en oeuvre, où est le changement ? Monsieur le ministre, si vous souhaitez engager le changement, je me permets de vous proposer d'engager des mesures en faveur du recentrage de l'action des effectifs de gendarmerie et de police sur leur coeur de métier.
En effet, pour m'entretenir régulièrement avec les forces de police et de gendarmerie de ma circonscription, j'ai pu constater que les personnels ont le sentiment que leur charge de travail n'est pas reconnue à sa juste valeur…
… et qu'ils doivent assumer toujours plus de tâches induites et périphériques, lesquelles accroissent leur temps de travail et les éloignent de leur mission première. Trouvez-vous normal, monsieur le ministre, que deux gendarmes affectés à la compagnie d'Épernay soient contraints de se rendre à proximité de Strasbourg pour conduire une personne dans un centre de rétention, car les plus proches ne disposent d'aucune place ? Est-ce la mission première de leur fonction ?
Est-il opportun que les tâches administratives deviennent toujours plus importantes, au détriment du temps passé sur le terrain ? Bien sûr, l'accomplissement des missions induites, périphériques, ne poserait pas de problème si, dans le même temps, les policiers et les gendarmes étaient déchargés de leurs fonctions de sécurité publique ; mais tel n'est pas le cas.
Aussi est-il utile de préciser, monsieur le ministre, que le temps de travail moyen des gendarmes de ma circonscription est de quarante-cinq heures par semaine, dont quatre heures de nuit. Il va sans dire que pour les effectifs de police, le temps de travail hebdomadaire est peu ou prou le même.
Bien sûr, les personnels s'acquittent de leur travail avec dévouement et courage, mais reconnaissons que l'allongement de la durée de travail hebdomadaire, la réduction des temps de repos, l'augmentation de la fréquence du travail de nuit ne participent pas de la sérénité qui doit accompagner l'exercice de leur délicate mission.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, la revalorisation des carrières des personnels de sécurité intérieure, mais aussi la présence au sein des compagnies de gendarmerie et des circonscriptions de police d'effectifs suffisants, sont à mon sens les premiers garants du service public de sécurité intérieure.
Soyez donc assuré que je serai vigilant quant au respect des engagements de valorisation des personnels des forces de sécurité. De même, j'attacherai une importance toute particulière au maintien des effectifs dans les zones périurbaines et rurales, car le principe d'égalité doit aussi s'appliquer en matière de sécurité publique.
En l'absence de ces garanties, vous comprendrez que je ne puisse voter le budget proposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame et messieurs les rapporteurs, nombre d'interventions précédentes ont souligné le progrès que représente ce budget au regard des années passées, notamment en matière d'effectifs. J'y souscris pleinement et je ne m'appesantirai donc pas sur cet aspect très positif.
En tant que députée des Yvelines, de la huitième circonscription dans laquelle la question de la sécurité publique est essentielle, j'apprécie pleinement depuis le mois de juin dernier le changement induit par l'action du ministre et tout particulièrement la création des zones de sécurité prioritaires. Elles augurent une nouvelle approche organisationnelle et humaine pour ces territoires : d'abord une démarche commune intérieur-justice et j'ai salué la semaine dernière, dans le cadre de l'examen du budget de la justice pour 2013, le retour de nouveaux moyens apportés à la protection judiciaire de la jeunesse, sinistrée après les réductions d'effectifs opérées ces dernières années. Mais, monsieur le ministre, c'est tout une approche transversale, interministérielle, et en partenariat avec les collectivités locales, qui est nécessaire. Celle qui doit permettre à nos concitoyens qui habitent ces secteurs souvent déficitaires de retrouver capacité à avoir les mêmes chances de vie, de parcours individuel et collectif, qu'ailleurs. C'est répondre concrètement à l'objectif de l'égalité des territoires que notre majorité poursuit.
Je sais aussi, monsieur le ministre, que c'est dans ce sens que vous orientez votre action gouvernementale.
Revenons plus concrètement aux crédits de fonctionnement et d'investissement de la police et de la gendarmerie : je veux souligner que si l'humain est une priorité absolue, il n'en demeure pas moins qu'il convient que les hommes et les femmes de la police nationale et de la gendarmerie soient équipés et appuyés matériellement de manière efficace. C'est l'enjeu des dépenses d'équipement et de fonctionnement qui visent à l'équipement des forces – entendu au sens large.
Or, si la mission budgétaire « Sécurité » est en augmentation globale de 3 % pour le programme « Police nationale et de 2,3 % pour le programme « Gendarmerie », des variations apparaissent au niveau infra-programmatique.
Si l'on se concentre sur les titres III et V, les dépenses de fonctionnement et d'investissement pour la police nationale sont en baisse, ainsi que les dépenses de fonctionnement de la gendarmerie. Elles sont en revanche en hausse concernant les dépenses d'investissement, de plus de 11 %, ce qui vient compenser, si je puis me permettre, la baisse des autres sous-programmes budgétaires.
Concrètement, que signifient ces chiffres ? Si ces baisses peuvent s'expliquer en bonne partie, pour les dépenses de fonctionnement, par les objectifs fixés par la lettre de cadrage du Premier ministre et par la création du compte d'affectation spéciale « fréquences », elles n'en traduisent pas moins le besoin de faire des choix, de déterminer des priorités et de s'intéresser aux marges de progression possibles.
Je me réjouis de l'effort important sur le renouvellement de la flotte de véhicules, puisque 90 millions d'euros vont y être affectés, toutes forces confondues. L'âge moyen du parc de la police nationale atteignait 5,47 années : ce chiffre en augmentation régulière ne pouvait que susciter l'inquiétude. Cet effort est fait dans un esprit pragmatique d'économies que je tiens à souligner, puisque la mutualisation des moyens d'entretien et de maintenance des véhicules est poursuivi entre police nationale et gendarmerie. Avec cinquante-huit ateliers de réparation automobile déjà mutualisés, 8,5 % du parc de la police soutenu par la gendarmerie et 4,5 % du parc de la gendarmerie par la police, le travail est bien entamé : il faut le poursuivre.
Dans ces temps difficiles, nos concitoyens attendent de telles mesures qui relèvent simplement du bon sens.
Monsieur le ministre, je voudrais vous rappeler à l'occasion de cet effort important pour le renouvellement du parc, la nécessité impérieuse de faire en sorte que l'automobile française et l'emploi localisé en France puissent bénéficier en premier lieu de la commande publique.
En ce qui concerne les dépenses d'investissement, la baisse de plus de 10 % des crédits de paiement et surtout la baisse de 46 % des autorisations d'engagement impressionnent à première lecture. Le rapporteur souligne qu'elles s'expliquent par l'inscription l'an dernier d'autorisations d'engagement exceptionnelles, d'un montant de 140 millions d'euros, en faveur du projet de transfert des locaux de la police judiciaire parisienne. La même raison vaut pour la gendarmerie.
Dans cet exercice difficile, en prise avec les nombreuses urgences territoriales qui se font jour, suite à la politique du verbe haut et de l'action faible de ces dernières années…
… je tiens pour finir à saluer la capacité du ministère de l'Intérieur à faire des choix, à déterminer des priorités, puisque via le programme « Grands projets immobiliers », ce sont six hôtels de police modernes et fonctionnels qui seront livrés entre 2012 et 2013, notamment aux Muraux, Sevran et Saint-Chamond. Signalons le programme de cantonnement des CRS en région parisienne à Pondorly et la rénovation des cellules de garde à vue et d'autres travaux d'entretien du parc immobilier domanial, notamment à Paris.
Monsieur le ministre, il n'en demeure pas moins que ces moyens seront insuffisants au regard des besoins en nouveaux bâtiments ou rénovation des anciens, puisque pour la seule gendarmerie nationale, les besoins en termes de construction sont évalués à 200 millions d'euros et ceux de rénovation à 100 millions d'euros.
Il faut aussi prendre en compte les charges importantes que vont faire peser, pour les années à venir, les partenariats public-privé contractés ces dernières années. N'allons-nous pas nous retrouver confrontés à un effet de ciseaux entre l'important stock immobilier à rénover, détruire, construire, et le fait que des moyens considérables seront mobilisés pour payer ces PPP ?
Comment envisagez-vous cette possible évolution et les éventuels moyens d'y parer ?
Votre tâche est difficile, le président de la commission des lois l'a souligné tout à l'heure, mais votre détermination est totale et nous vous apportons donc notre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2013 :
Suite de l'examen des crédits de la sécurité et de la sécurité civile ;
Examen des crédits de l'outre-mer.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron