COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 15 octobre 2014
(Présidence Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)
La séance est ouverte à seize heures vingt-cinq.
La Commission poursuit l'examen, ouvert à la presse, des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (n° 2252) sur le rapport de MM. Gérard Bapt, Olivier Véran, Mme Martine Pinville, MM. Michel Issindou, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau.
Article 51 : Adaptation du régime des plasmas thérapeutiques à la qualification des plasmas industriels comme médicaments dérivés du sang
La Commission examine l'amendement AS276 du rapporteur.
La Commission adopte l'amendement.
Monsieur le rapporteur, l'établissement français du sang de ma région souhaiterait savoir où en est l'application de la mesure, que nous avions adoptée à votre initiative l'an dernier, visant à valoriser la filière éthique de production de médicaments dérivés du plasma grâce à un mécanisme fiscal avantageux.
À la demande du ministère, la Fédération des donneurs de sang bénévoles s'est chargée de l'élaboration du logo destiné à identifier ces médicaments, conformément à ce que nous avions voté dans le cadre du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (DADU) en matière de politique de santé. Pour le reste, j'ignore où en est la publication des décrets d'application, mais je pourrais interroger la ministre sur ce point.
Je vous remercie. Il serait en effet souhaitable que nous apportions une réponse commune à cet établissement.
La Commission adopte l'article 51 modifié.
Après l'article 51
La Commission est saisie de l'amendement AS121 de M. Dominique Tian.
S'agissant des arrêts de travail, le diagnostic de certaines maladies, parfois complexe, nécessite une expertise particulière. C'est pourquoi il est proposé de permettre à l'employeur, non de contester pour contester, mais de demander si besoin est un avis complémentaire.
Avis défavorable. Nous estimons également nécessaire de lutter contre les arrêts de travail abusifs, mais le dispositif proposé s'apparenterait en quelque sorte à une « contre-contre-expertise », ce qui nuirait à la simplicité et à la fluidité de la procédure ; au final, je le crains, ni les employeurs ni les assurés ni les caisses n'y gagneraient. En outre, il pourrait permettre in fine à la caisse de suspendre le versement de la prestation sur le fondement d'analyses produites en l'absence du médecin-conseil, ce qui n'est pas souhaitable.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission examine l'amendement AS125 de M. Dominique Tian.
Par cet amendement, qui reprend l'une des recommandations formulées par la MECSS en matière de contrôle des arrêts de travail, nous proposons que soit conclu un protocole d'accord entre, d'une part, la CNAMTS, la MSA et le RSI et, d'autre part, les principales sociétés de contre-visites médicales afin de rappeler à chacune des parties son rôle et ses missions.
Avis défavorable, pour des raisons identiques à celles pour lesquelles un amendement similaire avait été rejeté lors de l'examen du PLFSS pour 2014. Il faut rappeler que, depuis avril 2012, la CNAMTS fixe l'orientation de sa politique de contrôle dans une lettre de réseau. Au demeurant, l'enjeu porte certainement davantage sur les moyens et l'efficacité de la mise en oeuvre des contrôles que sur les supports destinés à organiser leur coordination.
Je rappelle que, par cette recommandation figurant dans le rapport d'information de Mme Poletti sur les arrêts de travail et les indemnités journalières, la MECSS souhaitait seulement que soit mise en oeuvre une stratégie de coordination des différents acteurs par voie conventionnelle. L'esprit de cet amendement est donc très différent de celui de l'amendement AS121. Il ne s'agit pas ici de mener une chasse aux fraudeurs, mais de favoriser le partage d'informations médicales entre les experts et les professionnels statuant sur la pertinence des arrêts de travail.
Le contrôle des arrêts de travail est en effet un véritable enjeu ; il y a beaucoup à faire pour qu'il soit amélioré dans le privé et exercé dans le public. Tel était du reste l'objet de plusieurs des dispositions de la proposition de loi visant à rétablir la journée de carence pour les congés maladie des agents publics. Nous débattrons de ce sujet en séance publique, et j'espère que le rapporteur saura développer des arguments pertinents car il y a, dans ce domaine, d'importantes sources d'économie pour la sécurité sociale.
Compte tenu de vos interventions, je reconsidère mon jugement sur cet amendement. Cela étant, la coordination que vous proposez nécessite en tout état de cause une expertise et j'avoue modestement ne pas être spécialiste de la question. Je vous propose donc que nous en rediscutions en séance publique, après analyse et en présence de la ministre. Nous devons en effet être en mesure de vous donner les raisons pour lesquelles nous rejetons ou, au contraire, nous acceptons votre amendement.
Je tiens à souligner que le rapporteur est excellent et qu'il est soucieux de transparence. Il est en phase avec l'opposition constructive que nous représentons. Avec lui, nous avançons !
L'amendement AS125 est retiré.
Article 52 : Forfaitisation du capital décès
La Commission examine l'amendement de suppression AS14 de M. Jean-Pierre Door.
Le rapporteur a reçu tant de compliments de la part de l'opposition qu'il ne pourra qu'approuver l'amendement de suppression de l'article 52, qui ne manque pas de nous étonner. En effet, dans le but de faire des économies, le Gouvernement a décidé de forfaitiser le montant du capital décès accordé au conjoint survivant, qui sera dorénavant fixé par rapport au SMIC, quels que soient les revenus du défunt. Cette réforme, qui a une portée affective, se fait donc sur le dos de certains conjoints survivants. Qu'il faille réaliser 160 millions d'euros d'économies, soit, mais pas sur le capital décès : c'est profondément choquant. Cherchons des recettes ailleurs ; nous avons quelques idées là-dessus.
Avis défavorable. Laissez-moi préciser qu'il s'agit d'une économie de recentrage. Initialement, le capital décès permettait aux conjoints survivants de faire face à des pertes de revenus immédiatement après le décès. Aujourd'hui, il s'agit d'une assurance décès qui permet de couvrir les frais liés aux obsèques. Dès lors, il ne paraît pas scandaleux d'introduire davantage d'égalité – en pratique, selon que vous êtes issu d'une catégorie socioprofessionnelle supérieure ou en situation de précarité, l'assurance maladie peut actuellement vous verser 9 400 euros ou 375 euros – en proposant qu'une indemnité forfaitaire unique soit versée à l'ensemble des salariés. Certaines familles seront gagnantes, puisque l'indemnité des salariés dont les revenus étaient inférieurs au SMIC ou qui étaient à temps partiel sera calculée sur la base du SMIC. Il s'agit donc d'une mesure d'économie, certes, mais aussi d'une mesure de justice. Par ailleurs, il demeure possible à ceux qui le souhaitent ou le peuvent de capitaliser auprès des régimes de prévoyance et des assurances complémentaires en vue d'améliorer leur couverture décès.
Cette assurance décès étant adossée à des cotisations, il est choquant que le capital versé ne soit plus proportionnel à ces dernières. La mesure serait judicieuse et cohérente si elle fixait également pour tout le monde un plafond de cotisations à hauteur du SMIC.
J'ajoute que cette disposition ne peut pas être rétroactive, ou alors elle poserait un problème constitutionnel, dès lors que la cotisation et le montant du capital figurent dans les contrats qui ont été signés. Je me vois mal expliquer aux familles qu'elles ont cotisé pour rien… Par ailleurs, le capital décès n'a pas été conçu uniquement comme un premier secours : lorsqu'une personne souscrit une telle assurance, c'est qu'elle a choisi de laisser une somme d'argent à son conjoint ou à ses enfants. En tout état de cause, je défendrai certainement un amendement de suppression de l'article 52 en séance publique, car il me paraît injuste.
Sauf erreur de ma part, ce capital décès s'inscrit bien dans le régime de sécurité sociale de base. Ici, les cotisations financent une assurance globale qui couvre aussi bien la maladie que l'invalidité et le décès. C'est un dispositif distinct du contrat d'assurance décès que l'on souscrit auprès d'un régime de prévoyance ou d'un régime complémentaire.
Un deuil est toujours un drame humain, moral et financier. Il est donc normal que des aides existent. Ainsi le dispositif doit permettre, selon l'exposé des motifs de l'article 52, aux assurés les plus précaires de faire face aux frais immédiats occasionnés par le décès. Du reste, à Metz, dans ma commune, une « aide aux indigents » était versée aux familles en cas de décès afin de leur permettre d'organiser des obsèques en toute dignité. De manière plus générale, je me demande si nous ne devrions pas mener une réflexion globale sur les problèmes liés au veuvage.
Je remercie Joëlle Huillier pour la clarté de son intervention. Elle m'a devancé en rappelant que l'assurance du régime général est globale ; les cotisations sont plafonnées, de même que les prestations. Actuellement, le plafond du capital décès est fixé à 9 400 euros. Nous le modifions, ainsi que le seuil, afin que chacun puisse faire face aux frais d'obsèques. Certes, c'est une mesure d'économie, mais elle permet d'égaliser les prestations versées en cas de décès.
La philosophie de la mesure me gêne. On comprend que l'on souhaite augmenter le capital décès d'une personne dont les revenus sont très faibles, mais le Gouvernement opte systématiquement pour un nivellement par le bas. Bien entendu, cette disposition profitera à certaines familles, mais elle sera défavorable à d'autres, et c'est dommage ! Pourquoi ne se contente-t-on pas de relever le seuil et de fixer le montant minimum du capital décès sur la base du SMIC ? Certes, il faut faire des économies. Mais, à force d'en appeler à la solidarité, on finit par organiser un appauvrissement général.
Une mesure de solidarité est une bonne mesure ; je suis plutôt favorable au fait que les cotisations soient proportionnelles aux revenus. Ce qui est contestable, en revanche, c'est que les personnes concernées n'aient pas été informées. Elles pensaient que leurs cotisations correspondaient à un capital d'un certain montant, et on change les règles du jeu en cours de route. Les Français ont assez de telles pratiques, qui créent un climat de défiance envers les politiques menées. Il serait souhaitable que la mesure ne s'applique qu'aux nouveaux adhérents.
J'appelle votre attention sur le fait que cette mesure d'économie permettra tout de même à chacun de percevoir un capital décès d'un montant équivalent à trois SMIC, alors qu'il peut n'être aujourd'hui que de 375 euros. Certes, la diminution du plafond excède la compensation du relèvement du seuil, mais il s'agit également d'une mesure d'économie, qui contribuera à réduire la dette de notre pays. Cet impératif s'impose à chacun d'entre nous.
Sur le plan juridique, cette disposition ne risque-t-elle pas de faire l'objet d'un recours qui en contesterait la rétroactivité ?
Cette mesure ne sera évidemment applicable qu'à compter de la date de promulgation de la loi. Elle ne sera pas rétroactive : on ne reprendra pas une partie de leur capital décès aux personnes qui l'ont perçu.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 52 sans modification.
Article 53 : Fixation des dotations au FMESPP, à l'ONIAM, l'EPRUS, et de la contribution de la CNSA aux ARS pour l'année 2015, modification des règles applicables aux dotations de la CNSA aux opérateurs
La Commission adopte l'article 53 sans modification.
L'amendement AS97 de Mme Martine Carrillon-Couvreur portant article additionnel après l'article 53 est réservé.
Article 54 : Fixation des objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès pour 2015
La Commission adopte l'article 54 sans modification.
Article 55 : ONDAM et sous-ONDAM pour 2015
La Commission adopte l'amendement l'article 55 sans modification.
Titre II : Dispositions relatives aux dépenses d'assurance vieillesse
Article 56 : Aide au rachat de trimestres de retraite pour les enfants de harkis
La Commission est saisie de l'amendement AS237 du rapporteur.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 56 modifié.
Après l'article 56
La Commission examine l'amendement AS34 de M. Francis Vercamer.
La réforme des retraites qui a été votée par la majorité actuelle ne remet nullement en cause l'allongement de la durée de cotisation et le report de l'âge légal de départ à la retraite décidés par la précédente majorité. Au contraire, le Gouvernement a repris à son compte ces mesures et il a les même prolongées en portant à quarante-trois ans en 2035 la durée d'assurance nécessaire pour percevoir une retraite à taux plein. Il a ainsi fait le choix hypocrite de ne pas repousser l'âge légal de départ à la retraite tout en allongeant la durée de cotisation nécessaire pour une retraite à taux plein. Ce rideau de fumée ne trompe personne : les salariés devront travailler encore plus longtemps pour percevoir une retraite à taux plein. L'UDI souhaite, quant à elle, poser les jalons d'une réforme structurelle de notre système de retraites par répartition qui permettrait d'éviter une succession de réformes, qui mine la confiance des Français. Ainsi nous proposons par cet amendement de porter la durée de cotisation à quarante-quatre ans et l'âge légal de départ à la retraite à soixante-quatre ans, avec au préalable la mise en oeuvre de la réforme de 2010 dès l'année 2015.
Je rappelle à M. Richard qu'une réforme des retraites a été votée il y a moins d'un an. Il n'est donc pas raisonnable de relancer le débat par un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Je veux néanmoins lui répondre que nous avons choisi, quant à nous, de procéder en deux temps : un rééquilibrage financier jusqu'en 2020, puis un allongement de la durée de cotisation qui sera progressivement portée de 41,5 annuités à 43 annuités entre 2020 et 2035 – cela revient à peu près au même que de repousser l'âge légal de départ à la retraite, qui n'a plus guère de sens aujourd'hui. La réforme que vous proposez serait certes beaucoup plus rapide, mais également beaucoup plus choquante. Or nous ne souhaitons pas brusquer les choses. Le comité de suivi des retraites a rendu, le 15 juillet dernier, un premier rapport d'observation de la réforme de 2013, sans émettre d'observations majeures. Le 15 juillet prochain, il aura davantage de recul pour évaluer son application et juger s'il est nécessaire ou non d'y revenir.
En outre, il faut éviter de sonner l'alerte quand le danger n'est pas avéré : M. Richard estime qu'une nouvelle réforme est nécessaire, alors que, grâce au surplus de cotisations, le déficit de la CNAV, qui s'élève à 1,5 milliard pour 2015, n'a jamais été aussi faible.
Cette réforme n'est certes pas la vôtre, mais je constate que vos propositions sont beaucoup plus audacieuses aujourd'hui qu'en 2010. En tout état de cause, laissez cette réforme vivre tranquillement sa vie !
Force est de constater, monsieur Vercamer, qu'en 2010, vous gouverniez sans prévoir puisqu'une nouvelle réforme a été nécessaire en 2013.
Une discussion sur les retraites n'a pas sa place dans un débat sur le PLFSS. Cependant, M. Issindou a, involontairement sans doute, omis de préciser que si les dépenses de la CNAV sont moindres aujourd'hui, c'est notamment grâce au déplacement de la borne d'âge décidé lors de la réforme de 2010, qui devait nous permettre de rétablir l'équilibre des comptes en 2020 et qui incluait une clause de revoyure en 2017. Hélas, la crise économique est survenue au même moment. En réalité, la mini-réforme de 2013 s'est appuyée sur la réforme de 2010. Vous avez fait de la mauvaise cosmétique.
La Commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement AS35 de M. Francis Vercamer.
La Commission examine l'amendement AS36 de M. Francis Vercamer.
Il s'agit d'un amendement de repli, qui tend à instaurer une règle de confiance. Celle-ci doit reposer sur la certitude pour ceux qui consentent aujourd'hui les sacrifices indispensables à la préservation de notre système de retraites qu'ils ne seront pas, demain, les oubliés de la solidarité nationale. Elle est nécessaire car un déficit de confiance fragilise l'adhésion des Français au système de retraite par répartition, quand nos partenaires européens parviennent à réformer le leur dans le consensus. Seule une règle de confiance peut rendre acceptables les nouveaux efforts envisagés. Elle permettra de définir un taux de cotisation maximal, qui protégera le pouvoir d'achat des salariés et la compétitivité de nos entreprises, un taux de remplacement minimal, afin que le travail de toute une vie soit reconnu, et, enfin, un montant de pension de retraite minimal garantissant une retraite digne à chaque Français. Les taux et les montants ainsi que le calendrier d'entrée en vigueur de cette règle de confiance seraient définis au terme d'une négociation avec les partenaires sociaux.
Ce qu'une loi fait, une autre peut le défaire ; si nous avons dû légiférer en 2013, c'est parce que la précédente loi sur les retraites était insuffisante, même si elle a fait descendre des millions de personnes dans la rue. M. Vercamer défend un amendement de repli, mais l'opposition ne peut qu'adopter une position de repli, puisqu'elle n'est pas unanime sur le sujet : à entendre les uns, dont l'ancien Président de la République, qui ne veut pas trop remettre en cause la politique qu'il a lui-même menée, l'âge légal de départ à la retraite devrait être porté à soixante-trois ans selon ; à croire François Fillon, il faudrait aller à soixante-cinq ans…
J'admire le stoïcisme de notre rapporteur, pour qui un déficit de 1,5 milliard d'euros n'impose pas de prendre des mesures particulières. Pourtant, le Gouvernement n'a pas hésité à réaliser 700 millions d'économies sur la branche famille, dont le déficit s'élève à 2,9 milliards. J'aimerais savoir quels sont les principes qui guident ces décisions et quelles sont vos méthodes de prévision…
Notre amendement fixe un certain nombre de règles du jeu. Certes, une loi peut défaire ce qu'une loi précédente a voté. C'est d'ailleurs ce que vous avez fait pour les retraites puisque vous avez ramené à nouveau à soixante ans le départ à la retraite d'un certain nombre de Français, détricotant ainsi ce que nous avions fait. Après, il ne faut pas s'étonner qu'il y ait des déficits ! Mais si l'on ne prend pas de mesures aujourd'hui, celles que l'on prendra demain seront beaucoup plus violentes. Il est très important de commencer à fixer les règles du jeu, et c'est ce que nous proposons.
Le courage n'étant pas toujours au rendez-vous, pour vous comme pour nous, nous n'arriverons pas à prendre des mesures drastiques ; nous serons obligés de procéder au fur et à mesure. Notre amendement a le mérite de fixer une règle du jeu afin que les Français ne perdent pas de pouvoir d'achat et soient assurés de percevoir une pension de retraite minimale. Cela permettra au moins de redonner de la confiance et de pouvoir travailler dans le temps sur la réforme des retraites.
Cette proposition ne remet pas en cause l'ensemble du système de retraites, mais au moins, elle pose des bases pour que la discussion puisse avoir lieu.
M. Barbier a parlé de 1,5 milliard. Je ne sous-estime pas le chiffre, mais il faut le comparer à d'autres, par exemple à ceux de 2012, lorsque vous étiez encore aux affaires : moins 4,7 milliards sur la branche retraites ! Nous l'avons ramené à moins 3,6 milliards en 2013, puis moins 1,6 milliard en 2014, et nous sommes encore à moins 1,5 dans un contexte économique difficile. Nous continuons à faire des économies et à nous préoccuper de l'équilibre du régime général, qui conditionne tout le reste.
Votre amendement est plein de bonnes intentions. Nous aimerions pouvoir d'ores et déjà fixer un taux de cotisation plafond et un taux de remplacement plancher. Nous avons créé, dans l'article 3 de la loi portant réforme des retraites, un comité de suivi qui travaille, tous les ans, dans un cadre bien défini. Nous lui avons interdit de toucher aux cotisations et nous lui avons demandé de jouer sur la durée et sur le taux de remplacement. Laissons-le jouer son rôle. Ce n'est pas à nous, avant qu'il n'ait observé l'évolution de la loi, de faire de nouvelles propositions.
Comment anticiper aujourd'hui sur la croissance économique ? Avant l'été, la croissance tournait autour de 1 %. À la fin de l'été, elle était plus faible. Comment pouvez-vous assurer aux retraités, dans un contexte économique fluctuant, que vous allez stabiliser à la fois leurs cotisations et leur taux de remplacement ? Si vous le faites, ce sera au détriment d'autres catégories et d'autres politiques publiques, c'est-à-dire au détriment des jeunes, par exemple, ou du logement.
Aujourd'hui, on consacre aux retraites environ 13 % du PIB. Faut-il rester dans cette fourchette ou laisser monter ce pourcentage en fonction des besoins des retraités, mais en mésestimant ou en sous-estimant les besoins des autres catégories de la population ?
Nous ne sommes pas aujourd'hui dans une période où l'on favorise les retraités. Nous leur avons plutôt demandé des efforts, l'objectif étant de rétablir les comptes et d'assurer la pérennité de notre système.
Les bonnes intentions contenues dans votre amendement rigidifieraient le système et vendraient des promesses que nous ne pourrions pas tenir. Les Suédois ont mis en place un système notionnel dont tout le monde rêve : c'est un pilotage automatique, et c'est un peu ce que vous proposez : on est dans un tuyau, on fixe les taux à l'entrée ; le problème, c'est qu'à l'arrivée, tous les ans, les Suédois sont obligés de procéder à des modifications parce que leur pilotage automatique ne fonctionne pas. Dans notre pays, nous avons choisi un pilotage plus politique, et je souhaiterais qu'il soit annuel. Le comité de suivi rend un avis motivé au Gouvernement lorsqu'il estime que la situation est grave, et le Gouvernement se doit de réagir. S'il ne réagit pas, il faudra qu'il assume et qu'il dise pourquoi. C'est selon moi la meilleure des solutions. Encore une fois, tout est dans la réforme des retraites. N'en rajoutons pas !
Nous parlons du PLFSS, et non des retraites. Mais ces amendements sont là pour que le Gouvernement n'oublie pas que la question des retraites est extrêmement importante dans une période où le pouvoir d'achat des retraités a été attaqué.
Le rapporteur vient d'expliquer que nous n'avons pas beaucoup de leviers pour tenir nos promesses concernant les retraites. Il est pourtant possible de les tenir. Au moment de la réforme de 2010, nous savions que nous pouvions jouer sur trois paramètres : les cotisations, les prestations et la durée. Nous avons décidé de ne toucher ni aux cotisations ni aux prestations : les personnes retraitées ont reçu le jour dit le montant qu'elles devaient percevoir. Nous avons joué sur la durée, parce que c'était le facteur le plus rapide pour qu'il n'y ait aucun problème financier pour les retraités, et surtout pour assurer la pérennité et la lisibilité du système. Et même en portant la bande d'âge à soixante-deux ans, nous restons le pays d'Europe et l'un des pays du monde où elle est la plus basse. On ne peut donc pas dire que nous n'avons pas été bons : nous avons eu le souci de tenir nos promesses. Les retraités ont travaillé et cotisé ; ils doivent percevoir un certain montant de prestations et ils ne doivent pas être traités de nouveaux riches. Il faut continuer dans ce sens.
Monsieur le rapporteur, je vous remercie d'avoir validé toutes les réformes faites par la droite. Vous avez cité la décrue du déficit du régime des retraites en 2011, 2012 et 2013. Ce n'est sûrement pas grâce à votre action, mais bien grâce à celle de la majorité précédente. Je vous ferais remarquer qu'il a décru de plus de la moitié en trois ans. La réforme mise en place n'était donc pas si mauvaise.
La Commission rejette l'amendement.
Après l'article 53 (amendement précédemment réservé)
La Commission examine l'amendement AS97 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Nous revenons à l'amendement portant article additionnel après l'article 53, dont Mme Carrillon-Couvreur a bien voulu accepter de retarder l'examen.
Cet amendement propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport d'évaluation sur le déploiement des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) mis en place depuis 2008.
Les CPOM ont été une première étape dans l'évolution des systèmes de tarification et ont permis de substituer la dotation globale de financement aux prix de journée en offrant une souplesse de gestion nouvelle, dans un cadre pluriannuel à cinq ans. Les gestionnaires de structures sociales et médico-sociales ont pu ainsi appréhender un exercice budgétaire sans la contrainte du maintien de la réalisation d'une activité qui, de plus en plus souvent, est fixée à un niveau très élevé par les autorités de tarification, sans tenir compte des parcours et des absences des personnes accueillies.
Jusqu'à présent, aucune évaluation qualitative et quantitative n'a été menée sur le déploiement de cet outil de gestion, qui a été fort bien utilisé au cours de ces trois dernières années. Les premiers contrats arrivent à échéance et de nombreux gestionnaires rencontrent des difficultés dans leur renouvellement. Il faut demander un état des lieux, puis considérer que le CPOM constitue un objectif de dépense opposable au gestionnaire et un outil de prévision budgétaire pour l'autorité en charge de la tarification.
Dans le cadre des travaux récents conduits dans le secteur médico-social, je voudrais citer le rapport de Denis Piveteau et le rapport Jeannet-Vachey, qui mettent en évidence la nécessité d'avancer vers de nouvelles méthodes de dialogue de gestion, ce qui est en cours, et surtout organiser et transformer progressivement le secteur, en améliorant les outils de travail. Je souhaiterais que cet amendement soit l'occasion d'un échange avec la ministre pour savoir quelle suite sera donnée, notamment, au rapport de Denis Piveteau.
J'aimerais savoir si cet amendement a un rapport avec la réforme de la tarification et la mise en place des nouvelles conventions tripartites. N'y a-t-il pas une attente en la matière ? La demande d'un rapport retarderait-elle d'un an la mise en place de cette nouvelle tarification ?
L'exposé des motifs indique que l'arrêté n'est à ce jour pas publié et accuse quatre ans de retard. Est-ce le fait de demander un rapport qui a causé un tel retard ?
Pour répondre à Mme Poletti, la question des CPOM rejoint la réforme de la tarification. Aujourd'hui, cette réforme est en cours, et une personne a été nommée pour avancer sur le sujet. Des travaux sont menés pour trouver les moyens d'améliorer l'organisation, le dialogue de gestion et l'offre.
Si je demande un rapport, c'est aussi pour obtenir des réponses de la ministre afin de savoir où nous en sommes de ces travaux, très attendus dans le secteur médico-social. Il faut accompagner sérieusement les gestionnaires à travers ces outils de gestion et s'assurer de la concordance du dispositif, comme le préconisait Denis Piveteau.
Martine Carrillon-Couvreur est rapporteure de la MECSS pour les questions relatives à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Lors des nombreuses auditions qu'elle a menées, est revenu à de nombreuses reprises le déficit d'informations, notamment en ce qui concerne les coûts de gestion. Il était absolument essentiel d'avoir cette évaluation, d'où la pertinence de l'amendement, que j'appuie en tant que président de la MECSS.
Je remercie Mme Carrillon-Couvreur, d'avoir accepté de reporter la discussion de cet amendement, sachant que je devais m'absenter un moment.
J'ai d'ordinaire plutôt tendance à freiner les demandes de rapports, pour éviter l'inflation. Mais en la circonstance, nous devons travailler au fond pour examiner le déploiement des CPOM et leur pertinence. Cela permettrait d'engager des discussions avec la ministre et les services qui travaillent sur ces sujets, et de reparler de la réforme tarifaire.
Peu d'amendements ayant été déposés sur la branche médico-sociale, je profite de l'occasion pour aborder la question de la contribution de solidarité pour l'autonomie. La totalité du financement apporté par la CASA sera dédiée à une politique concernant les personnes âgées. L'année prochaine, les crédits qui ne seront pas utilisés dans le cadre de la CASA serviront à financer un plan d'aide à l'investissement, toujours pour le secteur des personnes âgées.
Je rappelle enfin que l'ONDAM médico-social pour l'an prochain est à hauteur de 2,2 %. Dans cette période particulière de maîtrise budgétaire, il convenait de le souligner.
Je remercie Mme Pinville, car je n'avais pas pu approfondir les choses avec Mme la ministre quand nous avons auditionné le Gouvernement, la semaine dernière. Mme Pinville avait précisé que, contrairement aux deux dernières années, il n'y aurait pas de reprise sur la part de la CSG versée à la CNSA et que cette dernière bénéficiera bien de la totalité du produit de la CASA. Si j'ai bien compris, le texte vieillissement sera mis en place à partir de la mi-2015 et il y aura une non-consommation de la CASA à partir du 1er janvier 2015 jusqu'en juillet ou août. Des crédits vont donc être dédiés aux nouveaux plans d'aide à l'investissement (PAI), ce qui est une bonne chose, car il y a encore des besoins.
S'agissant de l'ONDAM médico-social, nos collègues avaient sévèrement critiqué le gouvernement précédent, lui reprochant d'avoir fait peu de choses pour les personnes âgées et dépendantes. Et pourtant, malgré une crise internationale particulièrement violente l'ONDAM médico-social avait été fixé à un niveau bien plus élevé que les 2,2 % que vous évoquez. Je peux comprendre que le contexte est difficile, mais je demande à mes collègues de la majorité de reconnaître aussi les efforts faits par l'ancienne majorité pendant des années.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Nous en revenons à l'article 57.
Article 57 : Objectifs de dépenses de la branche vieillesse pour 2015
La Commission adopte l'article 57 sans modification.
Titre III : Dispositions relatives aux dépenses de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles
Article 58 : Fixation des montants des dépenses de transfert instituées par des dispositions légales à la charge de la branche AT-MP
La Commission est saisie de l'amendement AS240 de M. Denis Jacquat.
La rédaction actuelle de l'article 58 propose d'élever le montant du transfert de la branche AT-MP à la branche maladie à 1 000 millions d'euros. En littérature, cela s'appelle une litote, c'est-à-dire que l'on s'efforce d'atténuer une idée qui aurait quelque chose de brutal ou de déplaisant. Je pense, au contraire, qu'il ne faut pas cacher le montant de cette augmentation. Il faut réagir pour comprendre les raisons de la sous-déclaration et pour l'endiguer auprès de tous les acteurs de la branche AT-MP : les salariés, les employeurs, les professionnels de santé et les établissements de santé.
C'est pourquoi je propose de remplacer les mots « 1 000 millions » par les mots « un milliard », bien plus révélateurs de l'urgence de la situation. J'en avais parlé à la ministre en disant que c'était peut-être pour le fun. Toutefois, il faut reconnaître que l'on ne parle jamais de 1 000 millions, mais d'un milliard.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Les deux premiers points de l'article 58 ne font l'objet d'aucun amendement, mais il ne faudrait pas pour autant les banaliser. Ils concernent les victimes de l'amiante. L'absence d'amendement prouve que l'enveloppe budgétaire accordée au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) est assez satisfaisante, et cette commission en est la garante par rapport aux victimes. Chacun peut imaginer le drame que cela peut représenter, par rapport aux dizaines de milliers de morts et aux dizaines de milliers de personnes qui voient leur espérance de vie diminuer rapidement.
Je déposerai peut-être, à la demande de l'association nationale des victimes, un ou deux amendements en séance publique. Après la réception par le Président de la République des veuves de victimes de l'amiante, tout porte à croire qu'une petite évolution se dessine pour certaines catégories.
On assiste à une reprise de l'engagement de l'État à hauteur de 10 millions d'euros ; cela reste certes modeste par rapport au montant du fonds d'indemnisation, mais nous étions tombés d'accord lors des précédents PLFSS, dans un souci de bonne gestion, pour ne pas laisser au FIVA un fonds courant excessif. Reste qu'il y a à nouveau un – petit – engagement de l'État, et cela me semble tout à fait légitime.
On note également une augmentation du nombre des dossiers traités par le FIVA. Si l'on ne peut guère s'en réjouir, il faut reconnaître les efforts considérables qui ont été faits pour améliorer son efficience. Nous pouvons remercier sa présidence, son conseil d'administration et sa direction, ainsi que les associations qui, par leurs démarches auprès des personnes exposées, ont réussi à faire passer un certain nombre de dossiers pouvant prétendre à indemnisation : je pense notamment à ces femmes de victimes, qui avaient nettoyé les bleus de travail de leurs conjoints et ont développé la maladie un peu plus tard, sans jamais avoir pensé faire une déclaration. Elles commencent à entrer dans le système d'indemnisation.
M. Hutin a parfaitement raison d'évoquer ce problème que j'évoquerai dans mon rapport. Notre collègue préside le groupe d'études sur l'amiante. Des décisions extrêmement importantes ont été prises à l'Assemblée nationale il y a quelques années. Après deux ans d'absence, l'État participe de nouveau au fonds FIVA à hauteur de 10 millions d'euros.
Quant aux veuves, elles ne doivent pas être les oubliées de la société. Elles ont, pendant trente ou quarante ans, nettoyé les bleus de leurs maris et elles ont été des victimes indirectes de l'amiante, puisque c'est la poussière d'amiante qui est responsable des mésothéliomes ou d'autres pathologies.
Je félicite mon collègue Hutin pour l'action qu'il mène dans le cadre de ce groupe d'étude, dont je suis moi-même membre ; en tant que médecin et venant d'une région sidérurgique, il connaît particulièrement bien ces problèmes. Nous devons rester très vigilants et les associations sont là pour nous stimuler.
Certains groupes d'étude ont plus de pertinence que d'autres, et celui-là a prouvé la sienne.
La Commission adopte l'article 58 modifié.
Article 59 : Extension du bénéfice des indemnités journalières ATEXA aux collaborateurs d'exploitation ou d'entreprise agricole et aux aides familiaux
La Commission en vient à l'amendement AS239 de M. Denis Jacquat.
C'est un amendement de conséquence.
L'article 59 propose d'élargir aux collaborateurs, aux aides familiaux et aux associés d'exploitations agricoles le bénéfice des indemnités journalières en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle. Il convient de modifier en conséquence le deuxième alinéa de l'article L. 752-3 du code rural et de la pêche maritime. C'était une demande d'organismes tels que la MSA. En effet, les collaborateurs ou aidants familiaux étaient exclus de ce type d'indemnité. Or parmi ces collaborateurs, il y avait beaucoup de conjoints d'exploitants agricoles qui ne pouvaient pas bénéficier de ce type d'indemnité.
Cet amendement, extrêmement important, devrait recueillir l'unanimité des membres de notre commission.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Puis elle examine l'amendement AS238 de M. Denis Jacquat.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Puis elle adopte l'article 59 modifié.
Article 60 : Objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2015
La Commission adopte l'article 60 sans modification.
Titre IV : Dispositions relatives aux dépenses de la branche famille
Article 61 : Différenciation du montant de la prime à la naissance ou à l'adoption selon le rang de l'enfant
La Commission examine les amendements identiques AS16 de M. Gilles Lurton, AS26 de M. Francis Vercamer, AS106 de Mme Jacqueline Fraysse, AS111 de Mme Véronique Massonneau et AS 234 de Mme Dominique Orliac.
Nous avons été très surpris de voir un de nos amendements, déposé avant l'article 61, déclaré irrecevable alors qu'il visait à revenir sur la réforme du congé parental que vous nous proposez et qui, à nos yeux, remet en cause la possibilité pour une femme de concilier vie professionnelle et vie familiale. Nous souhaitions proposer une réforme positive du congé parental en laissant aux familles le libre choix d'organiser leur vie comme elles l'entendent. Notre amendement donnait la possibilité aux parents de se rendre disponibles en fonction des moments clés de la vie de leurs enfants. Comment allons-nous pouvoir en discuter en séance publique ?
L'article 61, que notre amendement AS16 vise à supprimer, propose d'inscrire le principe d'un montant différencié de la prime à la naissance et à l'adoption en fonction du rang de l'enfant dans le foyer. Ainsi, pour la première naissance ou adoption, le montant actuel de la prime de naissance et de la prime d'adoption seront conservés tels quels, mais réduits à compter du deuxième enfant, au motif que si l'arrivée du premier enfant est particulièrement coûteuse pour un ménage, les dépenses réalisées pour ce premier enfant bénéficient aux enfants suivants.
Nous sommes catégoriquement opposés à une telle mesure qui choque profondément de nombreuses familles. Tout le monde sait fort bien que l'arrivée d'un deuxième enfant, puis d'un troisième, a un coût pour les jeunes ménages, qui doivent souvent trouver un logement plus grand et faire face à de nombreux autres frais, quel que soit le rang de l'enfant. Ajoutons que la division par trois de la prime de naissance ou d'adoption, mesure qui s'accompagne d'un report du mois de versement de l'allocation de base, ne va pas toucher les familles les plus riches, puisque ces prestations sont soumises à conditions de ressources, mais bien les plus modestes pour lesquelles cet apport est indispensable pour faire face aux dépenses consécutives à l'arrivée du deuxième enfant.
À travers l'article 61, c'est toute notre politique familiale que vous remettez en cause, une politique qui pourtant a fait ses preuves au niveau du maintien du taux de fécondité et que de nombreux pays nous envient.
Une fois de plus, ce sont les familles qui vont trinquer. Nous avons calculé qu'avec l'ensemble des mesures prises depuis deux ans et demi, plus de 4 milliards d'euros au total ont été pris sur le budget des familles, alors que le bon sens commanderait plutôt de sanctuariser une politique dont l'efficacité est unanimement reconnue. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer l'article 61.
Mes arguments en faveur de la suppression du présent article sont différents. Les responsables politiques affectionnent parfois les formules percutantes. Ainsi, parmi les engagements pris par le président de la République, le seizième prévoyait qu'il maintiendrait toutes les ressources affectées à la politique familiale…
La mesure proposée est en fait incohérente, injuste, inefficace et infondée. Elle est incohérente, car il est difficile de comprendre comment l'allocation de rentrée scolaire peut augmenter tandis que le quotient familial devrait baisser. Elle est injuste, parce qu'elle porte préjudice à la compétitivité de notre pays, qui compte parmi ses atouts d'avoir une politique familiale qui permet un taux de professionnalisation de 81,2 %, très élevé, chez les femmes. Enfin, elle est incohérente, car la branche famille ne serait pas en déficit si elle n'était pas régulièrement ponctionnée. Or elle vient encore de transférer 9,5 milliards d'euros à la branche retraites pour financer la majoration de 10 % des pensions des retraités ayant eu trois enfants et pour financer les cotisations de retraite des mères modestes qui ont arrêté de travailler pour élever leurs enfants.
L'argument budgétaire est mensonger. Notre politique familiale fonctionne. Le gouvernement choisit une fois de plus la facilité et repousse les réformes courageuses. Car ce n'est pas la politique familiale qu'il faut réformer, mais le régime des retraites.
Eu égard à la dégradation des comptes publics et sociaux, le groupe UDI ne s'interdit pas a priori toute réflexion sur la politique familiale, mais ce ne peut qu'être une réforme globale, non une variable d'ajustement budgétaire. En attendant, à défaut de décision courageuse, le Gouvernement fait les poches des familles. Je propose donc la suppression de cet article.
Ce dossier est essentiel pour notre pays. Nous aurons l'occasion – je l'espère ! – d'en parler en séance publique, en présence du Gouvernement. Je me limiterai donc à dire que cette modulation constitue une mesure d'économie inacceptable. Alors que 700 millions d'euros doivent être confisqués aux familles et à leurs enfants, cet article a pour seul but d'en apporter 250 millions.
J'y insiste, les familles modestes seront touchées, car la prime à la naissance est de toute façon déjà soumise à des conditions de ressources. Pour la percevoir, une famille ne doit pas toucher plus de 3 900 euros par mois. Mais une famille où les deux parents travaillent pour un salaire inférieur à 2 000 euros par mois chacun ne peut être considérée comme une famille aisée ! Il s'agit donc bel et bien d'une pénalité pour les familles modestes. Voilà pourquoi nous proposons sa suppression.
C'est d'ailleurs la seule mesure concernant la politique familiale que nous examinons, parce qu'elle est de rang législatif. Mais d'autres mesures, prises au niveau réglementaire, vont également pénaliser les familles. Cinq groupes politiques y sont opposés, trois de la majorité et deux de l'opposition. Cela devrait conduire à se poser des questions. Le contexte était déjà le même lors du débat sur les petites retraites.
La mesure proposée est parfaitement contraire aux engagements pris par la majorité en 2012, qui prévoyaient même une revalorisation. Je souligne que la prime de naissance est déjà soumise à des conditions de ressources ; autrement dit, on rabote les ressources des plus modestes. Au même moment, tous les Français savent que, par le biais du pacte de responsabilité , on multiplie les cadeaux aux supermarchés, qui n'ont pas de problèmes de compétitivité et qui se caractérisent par des salaires précaires et des conditions de travail inacceptables, ou encore au secteur bancaire, qui ne relève pas du secteur concurrentiel et n'a certes pas besoin d'allégement de charges. Le Gouvernement prétend que ces allégements sont compensés. Mais par des ressources qui auraient fort bien pu servir à maintenir les prestations familiales ! Je vous souhaite bien du courage pour aller vendre cette soupe à l'opinion publique : ces mesures inacceptables, qui ne vous rapporteront que de petites économies, causeront d'énormes dégâts politiques. Assumez-les si vous voulez, mais ne comptez pas sur nous !
Je souhaite la bienvenue à notre collègue Stéphane Claireaux, élu de Saint-Pierre-et-Miquelon, venu remplacer Annick Girardin, nommée secrétaire d'État.
Le groupe RRDP trouve également que toucher à des allocations familiales en période de crise économique n'est pas pertinent. Nous demandons la suppression de cet article.
Nombre de prestations familiales sont déjà modulées en fonction du rang de l'enfant : les allocations familiales ne sont pas versées pour le premier enfant, tandis que leur montant augmente ensuite plus vite selon le rang de l'enfant ; le complément familial n'est pas versé pour les deux premiers enfants. Les effets d'une baisse de la prime à la naissance après le premier enfant sont donc atténués par le versement des allocations familiales. La question du coût de l'enfant selon son rang est donc complexe.
Permettez-moi seulement de rectifier les affirmations de notre collègue Francis Vercamer : les recettes de la caisse nationale d'allocations familiales sont bel et bien maintenues. Les dépenses de la branche famille ne baissent pas non plus.
Mme Fraysse, le plafond de ressources pour le versement de la prime de naissance est fixé à 51 745 euros pour un couple où les deux parents travaillent et ont deux enfants. Cette règle n'exclut du bénéfice de la prime de naissance que 15 % des ménages.
Chers collègues, je partage certaines de vos réactions. Un débat s'est engagé sur la branche famille. Je suis toujours en discussion avec le Gouvernement pour affiner les propositions, dans le souci que la situation de chacun puisse être prise en compte. Outre la piste diffusée hier dans la presse, une modulation des allocations familiales pourrait être également envisagée quand les revenus d'un ménage dépassent 6 000 euros par mois pour deux enfants.
Je souhaiterais le retrait de ces amendements de suppression. Il favoriserait une nouvelle discussion dans l'hémicycle, au cours de laquelle je pourrais présenter un amendement sur cet article.
Je souligne que notre rapporteure Marie-Françoise Clergeau travaille jour et nuit sur le sujet depuis quinze jours. Je ne voudrais pas qu'on l'accuse de ne pas se soucier de la politique familiale.
Ne voyez rien de personnel, madame la rapporteure, dans mon propos. Je mesure au contraire combien votre tâche est difficile. Je rejoins les observations de nos collègues Vercamer, Lurton et Roumegas sur ce mauvais coup porté à la famille.
Dans Les Échos d'hier, des amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale ont été annoncés. Je m'étonne de ne pas en voir passer aujourd'hui… J'y ai également appris que les députés socialistes négocieraient pour que le congé parental, que le Gouvernement veut réduire, soit ramené à vingt-quatre mois pour la mère et douze mois pour le père à compter du deuxième enfant. De même, les députés s'emploieraient à ce que la prime de naissance ne soit plus divisée que par deux, et non par trois comme le veut le Gouvernement, tout en acceptant un abaissement du plafond de ressources pour la prime d'accueil jeunes enfants. Une fiscalisation des allocations familiales est également évoquée.
Il est difficile de travailler dans ces conditions. Le travail en commission doit être respecté et ne peut porter sur des mesures qui seront bientôt bouleversées.
Le règlement de cette assemblée permet d'examiner en réunion au titre de l'article 88, avant la séance publique, les amendements n'ayant pu être déposés qu'après la réunion de commission consacrée au projet de loi en discussion. Ne faites donc pas comme si cette porte ouverte n'existait pas. Et je vous rappelle que lorsque nous avons examiné le projet de loi sur la recherche embryonnaire, votre groupe n'avait défendu que deux amendements de suppression au moment de la réunion de commission, et que, dans l'hémicycle, il en a déposé trois cents ! Nous vous avons expliqué que Mme Clergeau, avec d'autres, est en train de négocier avec le Gouvernement, et que de ce travail pourront sortir des amendements. Et mes sources ne viennent pas des Échos, mais de pourparlers en cours entre le Parlement et le Gouvernement !
Je sais que l'on peut déposer des amendements d'ici à la séance, mais reconnaissez que nous travaillons dans des conditions qui laissent à désirer. Sur la politique familiale, comme sur le reste, on ne sait pas où l'on va.
Pour commencer, nous n'abordons que la question de la prime de naissance, car il s'agit d'une disposition de rang législatif. Il y a d'autres mesures, mais qui relèvent du domaine réglementaire.
Ensuite, ce serait la première fois, comme le dit la présidente, qu'il n'y aurait pas possibilité d'examiner de nouveaux amendements en réunion au titre de l'article 88. Enfin, je vous ai présenté de manière très claire la situation. Des discussions sont en cours avec le gouvernement, afin de parvenir à des mesures qui soient équilibrées pour l'ensemble des familles et garantissent aussi une plus grande justice sociale.
J'ai fait part à la presse, en effet, de possibilités d'évolution, en les qualifiant d'hypothèses de travail. Les pourparlers en cours fournissent l'occasion d'améliorer les mesures envisagées. Il est dommage, je le concède, que je ne possède pas tous les éléments lors de notre réunion de commission, mais nous aurons l'occasion d'en débattre au titre de l'article 88 ou dans l'hémicycle, puisque j'aurai des propositions à vous faire dans les jours, voire les heures qui viennent.
Le renvoi en commission ne sera donc pas nécessaire : l'examen d'un PLFSS en séance publique n'est pas soumis aux contraintes du temps programmé et s'achève souvent le samedi matin…
Seule la disposition proposée dans cet article est de nature législative, mais la ministre Marisol Touraine nous a elle-même invités à nourrir le débat sur les mesures d'économie demandées. Je me réjouis que ce débat soit ouvert et soit même devenu un débat citoyen. Certains propos me semblent un peu durs à entendre. Quel est l'objectif ? C'est de trouver des solutions qui permettent de protéger et de soutenir les familles modestes, en particulier les familles monoparentales, qui connaissent le plus de difficultés. Voilà pourquoi, parmi les hypothèses de travail en discussion, il y a, entre autres, une hypothèse de modulation.
Nous devrons prendre position dans l'hémicycle et j'y serai particulièrement vigilante sur l'attitude de chacun.
Je ne mets aucunement en doute l'engagement de la rapporteure en faveur de la famille. Mais, si la précédente majorité avait, par erreur, proposé un article de ce type, quelle n'aurait été sa réaction ? Sans aucun doute une franche opposition. Et si notre collègue passe aujourd'hui des jours et des nuits à travailler sur le projet de loi, c'est bien parce que le texte ne passe pas, à l'intérieur même de la majorité.
La ministre nous demande de débattre, mais en réalité, nous ne débattons sur rien, car la plupart des mesures envisagées sont d'ordre réglementaire. Cela signifie surtout qu'on ne se sent pas à l'aise, que quelque chose ne va pas. Jusqu'à présent, le principe était toujours resté celui de l'universalité de la politique familiale : aujourd'hui, on assiste à une remise en cause totale. Cet après-midi même, lors des questions d'actualité, notre collègue Patrice Verchère a demandé au Gouvernement si cette remise en cause ne pourrait même aller jusqu'à toucher au domaine de la santé, où le remboursement des soins ne serait plus garanti qu'en fonction des ressources.
Les associations familiales ont cru le président de la République lorsqu'il a pris cet engagement n° 16 rappelé par notre collègue Arnaud Richard. Aussi les annonces présentes ne peuvent-elles que surprendre, car elles ne correspondent pas à l'esprit de la politique familiale telle qu'on la conçoit dans notre pays. Le groupe UMP reste donc particulièrement circonspect. Ces mesures sont habilement présentées sur le plan financier, comme des économies. Mais ce sont en réalité des mesures anti-famille.
Je récuse ce parallélisme entre la politique familiale et la politique de santé. Un enfant ne saurait être considéré comme un aléa de la vie, alors qu'on peut n'avoir toute sa vie que des rhumes faciles à soigner, ou déclarer au contraire un cancer à trente ans. Le principe de conditions de ressources ne pourra donc jamais s'appliquer dans le domaine de la santé. Ce serait au demeurant contraire aux principes de solidarité formulés par le Conseil national de la résistance. Votre interrogation n'est donc pas recevable.
Je crains sincèrement que le taux de remboursement ne puisse un jour varier en fonction des revenus.
Ce n'est pas du tout la même chose. Un cadre supérieur touche exactement la même allocation que tout un chacun, quand bien même il cotise beaucoup plus. Je suis étonnée qu'un si fin connaisseur de ce domaine puisse poser de telles questions.
Nous avons reçu cette semaine une délégation de députés portugais, qui soulignait comme une force de la France son grand nombre d'enfants. Au Portugal en revanche, la natalité s'est effondrée à un niveau alarmant : c'est devenu une des plus faibles du monde. À l'inverse, notre politique familiale fonctionne. Je vous invite, madame la rapporteure, à vous montrer forte en face du gouvernement. L'adoption de ces amendements vous mettrait dans une meilleure position de négociation.
Pas moins de cinq groupes politiques sur sept qui vous demandent la suppression de cet article. Il en va en outre du reniement d'un engagement pris. Vous-même n'êtes pas à l'aise avec la mesure proposée.
Je ne mets certainement pas en cause la rapporteure. Je vous vois plutôt contrainte, madame Clergeau, de faire le sale boulot…
D'autres mesures seraient en discussion, sur la table, dit-on. Mais sur quelle table ? En réalité, tout cela reste dans les limbes socialistes ; mais pour l'instant, sur la table des parlementaires, il n'y a rien, sinon des promesses. J'en ai parlé ce matin avec la ministre des affaires sociale : même si vos pistes étaient retenues, elles sont d'ores et déjà jugées insuffisantes par le Gouvernement. Les mesures qu'il a décidées resteraient, au moins pour partie afin d'atteindre l'objectif fixé en termes d'économies. Sur la méthode enfin, notre collègue Jean-Pierre Barbier a raison de dire que le Parlement n'est pas associé à la décision. Sous couvert de réforme de la politique familiale, il s'agit seulement d'habiller des économies.
Si l'on veut réformer la politique familiale ou sociale, nous sommes prêts à un débat global. Mais la présente discussion est biaisée, puisqu'elle prend pour point de départ une économie nécessaire de 700 millions d'euros. Telle est la feuille de route.
Pour l'heure, telle qu'elle est présentée, nous ne saurons cautionner une mesure aussi injuste, ni même participer à une réflexion globale dans un tel contexte. Peut-être un travail est-il en train de se faire entre le groupe majoritaire et le Gouvernement ; mais pour l'instant, cela ne concerne que vous, et votre conscience.
J'observe tout de même que les membres du Gouvernement ne manquent pas de vous recevoir : on vous voit en boucle sur toutes les chaînes de télévision ressortir tantôt de l'Élysée, tantôt de Matignon… Et le président du groupe UDI lui-même a été reçu par M. Macron !
Madame la rapporteure, vous avez acquis de précieuses compétences en matière de politique familiale, depuis des années. Mais je rejoins notre collègue Denis Jacquat lorsqu'il suggère que vous auriez vivement protesté, et avec raison, si une mesure de ce genre avait été présentée lorsque vous étiez dans l'opposition.
Sur le fond, les allocations familiales n'ont pas de vocation redistributive, contrairement à l'impôt sur le revenu. Au demeurant, le Gouvernement avait pris l'engagement de n'y pas toucher. Une vraie politique de gauche en faveur de la justice sociale consisterait à remettre à plat, à revoir le barème de l'impôt sur le revenu. Mais le Gouvernement refuse jusqu'à présent de traduire ces promesses en actes.
Quant à la présente mesure, elle a pour seul objectif de faire des économies. Vous vous efforcez d'arrondir les angles, pour qu'elle fasse moins mal à ceux qui souffrent le plus. Mais, en réalité, vous remettez en cause l'universalité des allocations, qui n'ont, je le répète, pas de vocation redistributive, même si elles peuvent effectivement atténuer les inégalités sociales.
Aussi n'est-il pas illogique – cela n'a rien d'une illusion ni d'une illumination – d'imaginer que l'universalité des prestations puisse être remise en cause dans d'autres domaines également, tel que le domaine de la santé. Les remboursements aux patients auraient alors lieu en fonction des ressources. Du reste, le mouvement n'est-il pas d'ores et déjà plus ou moins enclenché avec les mutuelles complémentaires ? Les plus riches peuvent s'offrir les complémentaires les plus chères, celles qui couvrent tout. Et ceux qui ne le peuvent pas ? C'est bien pour cette raison que la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) a été mise en place. Cela n'a donc rien d'une illusion. Même si la famille et la santé ne sont pas la même chose, cet article n'en ouvre pas moins la voie à une autre philosophie et à un autre modèle social que celui que nous connaissons. On peut évidemment en débattre mais, pour ma part je m'y opposerai résolument. Par conséquent, il n'est pas question de retirer mon amendement de suppression.
Commençons par quelques petits rappels. En 2012, le gouvernement Ayrault décide de plafonner le quotient familial à 2 000 euros par demi-part, une mesure qui touche un peu plus d'un million de foyers fiscaux. En octobre 2013, le plafond du quotient familial baisse encore et passe de 2 000 à 1 500 euros. En juillet 2014, avec la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, le congé parental est écourté et il passe de trois ans à deux ans et demi pour les femmes.
En octobre 2014, tombent plusieurs annonces : division par trois de la prime à la naissance à partir du deuxième enfant ; nouveau partage du congé parental qui vise à faire des économies sous couvert d'égalité entre les hommes et les femmes ; report à seize ans de la majoration des prestations familiales ; diminution des aides à la garde d'enfants pour les ménages.
Les associations familiales estiment que ces mesures additionnées représentent un montant de plus de 4 milliards d'euros depuis 2012, ce qui commence à faire lourd. La ministre relativise, disant qu'il faut comparer 700 millions d'euros d'économies à des sommes dont je ne me souviens même plus tant leur montant varie au fil des interventions.
Quoi qu'il en soit, ces 4 milliards d'euros commencent à handicaper sérieusement une politique dont nous avons des raisons d'être fiers. Dieu sait si certaines politiques ne fonctionnent pas et nécessitent une réforme dans ce pays, mais ce n'est pas le cas de notre politique familiale dont cherchent à s'inspirer des pays étrangers comme le Portugal.
Mme la rapporteure, que je connais et que je vois agir depuis longtemps, a certes toujours défendu les politiques familiales. Dans la mesure où elle est le trait d'union entre le Gouvernement et les députés, je sais que sa position est difficile. Mais de là à retirer notre amendement, ce n'est pas possible.
Entre votre groupe politique et le Gouvernement, les discussions sont très difficiles et les divergences de vue ne concernent pas que les députés frondeurs dont certains ont été exclus de la Commission des affaires sociales car ils protestaient contre les atteintes à la politique familiale. Les mésententes à l'intérieur de votre groupe sont telles qu'on nous a imposé une suspension de séance d'une demi-heure ce matin. Nous avons tout de même le droit de réagir, comme vous lorsque vous étiez dans l'opposition, face aux débats – pour ne pas dire aux disputes – qui traversent la majorité !
Nous voyons bien que vous avez des difficultés dans votre groupe, madame la rapporteure, mais il est d'autant moins question de retirer cet amendement que nous espérons le voir adopter. Du reste, dans une loi de finances, ce n'est pas le texte de la commission qui est discuté en séance, mais celui du Gouvernement. C'est pourquoi je demande aux députés socialistes qui partagent notre point de vue de voter notre amendement de suppression, afin d'avoir un avis favorable de la Commission, ce qui aidera à infléchir la position du Gouvernement au moment où nous discuterons en séance des politiques familiales.
Il arrive qu'il y ait des problèmes dans une majorité, madame Poletti… Souvenez-vous de vos divisions à propos du travail le dimanche, en décembre 2009. Ce n'est pas une première.
Vous dites que cela gêne le travail de la Commission. Nous l'avons vécu de la même manière à l'époque. Nous faisons ce que vous avez fait, ni plus ni moins. Ce qui s'est passé ce matin n'a rien d'extraordinaire, pas plus que les débats internes à une majorité dont les membres ne sont pas tous d'accord. Ne perdez pas la mémoire.
Sur la forme, nous pouvons trouver qu'il est bon de débattre au Parlement. Qu'il y ait du dialogue entre le Gouvernement et sa majorité, entre le Gouvernement et le Parlement, c'est même très sain. Alors qu'on remet en permanence les institutions de la Ve République en question, soyons fiers de débattre. Que le débat évolue plus ou moins sur la place publique parce que l'imbrication avec la presse et la société est très forte, cela ne me pose pas de problème.
Je me joins aux encouragements adressés à notre rapporteure Marie-Françoise Clergeau, à Martine Pinville et à la présidente de Commission, qui travaillent d'arrache-pied dans l'intérêt général. Tout le monde s'accorde sur la nécessité de réduire la dette – qui est énorme –, mais personne ne veut entendre parler d'augmentation des cotisations ou de modulation des prestations. Gouverner c'est prévoir, mais c'est aussi choisir !
S'agissant de la politique familiale de ce Gouvernement, il est important de rappeler quelques chiffres : 3 millions de familles ont bénéficié de la revalorisation de 25 % de l'allocation de rentrée scolaire en 2012 ; 300 000 familles bénéficient d'une couverture par CMUC ou par ACS, suite à un relèvement du plafond en 2013 ; 400 000 familles bénéficient sur cinq ans d'une hausse de 50 % du complément familial accordé aux familles modestes de trois enfants ou plus ; 700 000 familles bénéficient d'une hausse de 25 % sur cinq ans de l'allocation de soutien familial versée aux parents isolés, etc. Sans parler de la création de 275 000 places supplémentaires pour l'accueil de la petite enfance, de l'octroi de bourses aux étudiants, etc.
Que nous ayons un débat sur des équilibres et des arbitrages budgétaires, c'est très sain et nous sommes là pour ça, mais évitez-nous les banalités sur le thème « la gauche est l'ennemie des familles » : les chiffres parlent d'eux-mêmes, et ils sont têtus.
Évidemment, je m'associe aux compliments adressés à Mme Clergeau. Par expérience, je confirme que l'on peut discuter avec elle, même si cela n'aboutit pas toujours. (Rires.)
Une Commission est un lieu de discussion des problèmes de fond comme celui que vous qualifiez de réglementaire : la réforme du congé parental. Je ne comprends pas que notre amendement portant article additionnel avant l'article 61 ait été déclaré irrecevable alors qu'il avait été jugé recevable à plusieurs reprises par le passé.
Nous assistons depuis quinze jours à un débat à l'intérieur de la majorité – M. Le Roux s'est lancé le premier avec l'idée de moduler les allocations familiales – à la suite de nos questions au Gouvernement sur ses propositions concernant le budget de la famille. D'après les échos qui nous parviennent de toutes parts, la tendance serait à une certaine modulation des allocations familiales pour les familles dites à hauts revenus. D'emblée, je rappelle que les allocations familiales ont été créées pour compenser l'arrivée d'un enfant dans un foyer et qu'elles n'ont jamais été soumises à des conditions de ressources. Je reste extrêmement attaché à cette caractéristique.
Je maintiens mon amendement : il tend à supprimer un article que vous-mêmes souhaitez faire évoluer. Vous auriez tout intérêt à l'adopter afin d'être en mesure de dire à madame la ministre : n'y revenez pas !
Puisque vous parlez de l'universalité des allocations familiales, je vous rappelle que les familles qui n'ont qu'un enfant n'en touchent pas, même si elles sont dans la galère. Aucune porte n'est fermée dans la réflexion qui pourrait être menée dans l'année à venir.
Tout à l'heure, vous dénonciez les déficits accumulés de la Sécurité sociale et l'inaction du Gouvernement en la matière. La branche vieillesse a été réformée l'an dernier ; la branche famille est en déficit depuis une dizaine d'années alors qu'elle était excédentaire en 2002. Votre générosité envers les familles a été financée par de la dette publique !
Doit-on laisser ce déficit perdurer éternellement ? L'effort demandé à cette branche est très léger par rapport aux sommes versées : nous avons la meilleure politique familiale d'Europe, nous versons entre 50 et 80 milliards d'euros, selon le périmètre retenu, et nous sommes en train de nous écharper sur 700 millions d'euros, soit moins de 1 % des sommes distribuées. Nous ne sommes pas en train de tuer la politique familiale, nous cherchons à rééquilibrer une branche de la Sécurité sociale.
Dans ce débat sur les allocations familiales qui nous anime, j'avoue être depuis très longtemps un partisan de la modulation. Depuis dix ans, j'en parle avec mon entourage et je considère qu'il vaut mieux attribuer ces allocations aux familles très modestes et en donner moins à celles qui disposent de revenus importants. Sans remettre forcément en question l'universalité, la modulation l'allocation en fonction des revenus me semble être une mesure de justice évidente et je la défendrai avec conviction.
Je remercie, moi aussi, Marie-Françoise Clergeau, qui n'a jamais été autant félicitée qu'aujourd'hui et qui le mérite. Laissez-nous le temps de poursuivre tranquillement ce débat tout à fait légitime et nous aurons arbitré dans une semaine. Pour l'instant, sachez que je ne suis pas prêt à voter pour un amendement collectif de suppression.
Madame la présidente, vous avez dit qu'aucune porte n'était fermée et rappelé que des personnes qui n'ont qu'un seul enfant peuvent rencontrer énormément de difficultés. La société a beaucoup changé. N'est-ce pas le rôle du législateur que de se reposer des questions ?
Nous devons effectivement faire des économies et celles qui sont demandées représentent environ 1 % de la masse globale de la politique familiale en France, comme vient de le rappeler Michel Issindou. On peut se dire que c'est toujours trop quand on touche aux familles. On peut aussi penser que la somme versée ne représente pas grand-chose pour certaines familles alors qu'elle est très importante, voire insuffisante, pour d'autres. Est-il scandaleux de se reposer cette question ? Je ne le crois pas. Est-ce qu'envisager une modulation revient à remettre en cause l'universalité ? Je ne le crois pas non plus. Si tout le monde peut bénéficier d'allocations, tout le monde doit-il bénéficier de la même chose ? Ce n'est pas certain.
Le débat sur cette question difficile est ouvert. Pourquoi les débats n'auraient-ils pas lieu dans les groupes majoritaires ? Nous avons besoin de sérénité car nos positions ne sont pas tellement éloignées : nous voulons tous faire avancer la politique familiale, persuadés qu'il s'agit d'un atout de notre pays. Cela étant, je pense que le versement d'allocations familiales n'est pas décisif dans le choix de certaines familles d'avoir un enfant, pas plus qu'il ne conditionne leur manière de dépenser pour cet enfant. Il est normal de vouloir adapter des principes élaborés après-guerre à notre société qui a beaucoup évolué, et la question du premier enfant dans des familles très modestes mériterait d'être posée.
Nous pouvons avoir la satisfaction commune d'être fiers de notre politique familiale. Si notre pays affiche un taux de fécondité stable, c'est parce que, les uns et les autres, nous avons cherché à faire en sorte que les vies familiales et professionnelles soient conciliables, notamment en développant les modes de gardes d'enfant. Nous voulons poursuivre dans cette voie, en accentuant l'effort envers les familles qui en ont le plus besoin. Une famille de deux enfants disposant de 10 000 euros de revenus mensuels ne va pas changer de mode de vie si on lui retire 60 euros. Une famille qui vit avec 1 200 euros par mois fera d'autres choix si elle est privée de la même somme. Il faut se poser des questions et les résoudre au fur et à mesure que la société évolue.
Monsieur Jacquat, il y a quelques années, vous avez relevé de onze ans à quatorze ans le seuil de majoration des prestations familiales. Reconnaissez que chaque majorité est amenée à faire des choix qui ne plaisent pas forcément à l'opposition. Cela n'a rien d'illogique.
Pour ce qui est du congé parental, la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes proposait de le faire évoluer progressivement afin qu'il soit pris conjointement par les deux parents, à raison de dix-huit mois chacun. Ce scénario annoncé peut devenir réalité.
Aujourd'hui, vous ne connaissez pas toutes les mesures que je vais vous proposer – je regrette cette situation qui n'est pas de mon fait – et, si elles sont validées, je pense qu'elles vont vous surprendre agréablement. C'est pourquoi je souhaite que vous n'adoptiez pas ces amendements, et que vous attendiez mes propositions.
La Commission rejette les amendements identiques AS16, AS26, AS106, AS111 et AS234.
Puis elle adopte l'article 61.
Ce rejet par quatorze voix contre douze est très bien pour Mme la rapporteure : elle pourra aller négocier en indiquant qu'il s'en est fallu de peu que l'article soit supprimé en commission…
Je voudrais rappeler deux chiffres incontournables : lors de notre arrivée au pouvoir en 2012, la branche famille affichait un déficit de 3 milliards d'euros ; depuis deux ans et demi, nous avons néanmoins augmenté de 2 milliards d'euros les prestations accordées aux familles les plus modestes.
Après l'article 61.
La Commission est saisie de l'amendement AS197 de Mme Dominique Orliac.
Nous proposons d'inscrire dans la loi que l'âge de l'enfant, qui emporte le bénéfice de la majoration des allocations familiales, est maintenu à quatorze ans.
Cette condition d'âge de l'enfant doit tenir compte des réalités vécues par les familles. Le report de quatorze ans à seize ans est une mesure de stricte économie, sans relation avec le coût de l'enfant assumé par les familles. Pour ne plus faire de la majoration des allocations familiales une variable d'ajustement, il est nécessaire de fixer dans la loi l'âge de l'enfant qui permet de bénéficier de cette majoration.
Il me semble difficile de figer ce principe dans la loi. L'âge maximum de l'enfant au-delà duquel les allocations familiales ne sont plus versées – vingt ans – est fixé par décret et non par la loi. Pourquoi y inscrire l'âge de la majoration ? Les conditions de vie évoluent et l'âge de quinze ans, qui correspond à l'entrée au lycée, pourrait constituer le point de rupture actuel. Avis défavorable.
L'argument qui consiste à renvoyer au domaine réglementaire est un peu faible. Pourquoi cet âge ne serait-il pas fixé dans la loi ? Pour le congé parental, nous avons fait confiance au Gouvernement et nous ne nous attendions pas à ce qu'il propose de modifier les règlements concernant des mesures aussi importantes. Pour les familles concernées, qui peuvent être très précaires, ce report de la majoration de quatorze à seize ans représente une perte de 700 euros. Puisque nous ne pouvons pas faire confiance au Gouvernement, nous soutenons l'amendement du groupe RRDP.
Nous allons soutenir ce très bon amendement, mais revenons un instant sur vos chiffres, madame la présidente. Le déficit de 2,9 milliards d'euros que vous nous reprochez d'avoir laissé serait quasiment comblé si vous n'aviez pas versé 2 milliards d'euros de prestations supplémentaires aux familles les plus modestes à votre arrivée.
Il n'est pas d'usage d'inscrire les âges dans la loi, comme l'a très bien dit Mme Clergeau, mais compte tenu des événements, de la remise en cause permanente des engagements et de décisions même consensuelles, je pense qu'il est bon de le faire. De toute façon, nous ne prenons pas beaucoup de risques car la loi est révisable tous les ans et elle peut être ajustée si la société évolue. Je voterai donc en faveur de cet amendement.
Pour toutes les prestations familiales, les âges sont définis par décret et il n'y a aucune raison d'en fixer un seul dans la loi. Je maintiens mon avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement AS197.
Article 62 : Objectif de dépenses de la branche famille pour l'année 2015
La Commission examine l'amendement AS112 de Mme Véronique Massonneau.
L'article 62 traduit l'objectif d'économies pour la branche famille. Il comprend les mesures réglementaires qui ont été annoncées par le Gouvernement, qui seront peut-être annulées par les futures propositions de madame la rapporteure. Par cet amendement de suppression, nous manifesterons notre refus en bloc de ces mesures législatives et réglementaires qui visent à raboter les prestations familiales.
Comment ne pas adopter un objectif de dépenses pour la Caisse nationale des allocations familiales en 2015 ? Le montant proposé représente une stabilité des dépenses par rapport à 2014, et il tient compte du montant total du plan d'économies. La CNAF doit participer à l'effort de redressement des comptes sociaux comme toutes les branches de la Sécurité sociale. Les mesures d'économie pourront être modifiées dans le cadre de l'examen de projet de loi, mais il convient de maintenir leur niveau global. Avis défavorable.
Nous allons voter pour cet amendement, mais je m'étonne que la Commission des finances l'ait laissé passer alors que d'autres, de même nature, ont été déclarés irrecevables en vertu de l'article 40.
On a le droit de souhaiter que la CNAF n'envisage pas de nouvelles dépenses. Rien ne s'oppose à un amendement de ce genre et c'est pourquoi il n'a pas été déclaré irrecevable par la Commission des finances.
Vous souhaitez que la CNAF n'engage pas de nouvelles dépenses. Dans ce cas, comment va-t-elle faire pour honorer la participation financière qui lui est demandée dans le cadre des nouveaux rythmes scolaires ?
La CNAF participe au financement de la réforme des rythmes scolaires à travers deux mécanismes, l'un transitoire et l'autre permanent : à titre exceptionnel, la branche a versé une participation financière au fonds d'amorçage piloté par l'État ; à titre pérenne, elle verse une prestation de service aux accueils organisés dans le cadre d'un projet éducatif territorial, en fonction du nombre d'élèves qui les fréquentent, dans la limite de trois heures par semaine et de trente-six semaines par an.
En 2015, elle a ainsi versé 250 millions d'euros d'aide forfaitaire pour les trois heures induites par la réforme. Cette participation de la CNAF est inscrite dans son budget, sans aucune ambiguïté. D'ailleurs, M. Hutin et M. Vercamer pourraient nous apporter des précisions puisqu'ils viennent de rendre un excellent rapport sur ce thème.
Pour récapituler, elle a donc versé 62 millions d'euros au fonds d'amorçage, plus 250 millions d'euros d'aide forfaitaire.
Elle a versé 62 millions d'euros au fonds d'amorçage en 2014. En 2015, 2016 et 2017, elle versera 250 millions d'euros par an pour les prestations de service liées à la réforme des rythmes scolaires.
Madame la rapporteure, est-il normal que les communes qui ne font pas l'effort de mettre en place des dispositifs d'accueil complets touchent autant que celles qui, à l'instar de la mienne, consentent cet effort ? Ne pourrait-on pas effectuer des contrôles pour empêcher que certaines communes encaissent des recettes indues ?
La prestation de service spécifique est une subvention versée à la commune au vu d'un projet éducatif territorial. Cela a pu se produire avec le fonds d'amorçage, qui répondait à une volonté d'inciter des communes, qui ne le souhaitaient pas forcément, à s'engager dans le processus ; mais désormais, il s'agit d'un contrat entre la CNAF et la collectivité et il ne peut donc y avoir de versement sans projet.
La Commission rejette l'amendement AS112.
Puis elle adopte l'article 62.
Titre V : Dispositions relatives aux organismes concourant au financement des régimes obligatoires
Article 63 : Fixation du transfert du Fonds de solidarité vieillesse au titre du financement du minimum contributif pour 2015
La Commission adopte l'article 63.
Article 64 : Prévisions des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires en 2015
La Commission adopte l'article 64.
Avant l'article 65
La Commission examine l'amendement AS75 de M. Francis Vercamer.
Je présenterai en même temps mon amendement AS43, qui est de la même teneur.
Les fraudes aux cotisations sociales ont atteint, selon les estimations, de 20 à 25 milliards d'euros en 2012, doublant ainsi en douze ans. En matière d'économies, la Cour des comptes préconise un effort sur les dépenses plutôt que la création de nouveaux prélèvements. Dans cet esprit, mes amendements tendent à élargir la base de données des informations disponibles, en complément du répertoire national commun de protection sociale (RNCPS), afin d'améliorer la lutte contre la fraude.
Le droit de communication oblige déjà les fournisseurs d'énergie et les opérateurs de téléphonie à transmettre aux organismes de sécurité sociale les informations demandées, mais au cas par cas et non via un fichier ouvert en permanence. Cette solution, qui satisfait amplement vos amendements, me semble plus prudente.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement AS75.
L'amendement AS43 est retiré.
La Commission passe à l'amendement AS261 du rapporteur.
Selon le rapport annuel de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, paru en septembre 2012, la gouvernance du système d'information de la branche famille manque de clarté et de pilotage, cependant que la dispersion de ses structures en quatorze entités et l'éclatement des missions nuisent à l'efficience de la branche famille. L'amendement AS261 tend à rationaliser l'organisation de ce système d'information, avec une direction informatique unique au sein de la Caisse nationale des allocations familiales, qui deviendrait ainsi opérateur de service informatique pour la branche.
Cette nouvelle organisation concrétise ce que nous avons obtenu de la part de la direction nationale de la CNAF : j'étais à l'origine de cette demande, mais il faut rendre hommage à M. Morange et M. Germain, alors coprésidents de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, qui, passez-moi l'expression, avaient mis le couteau sous la gorge du président de la CNAF. Suite à un appel d'offres, le système propriétaire « main frame » a été remplacé par un système ouvert beaucoup plus réactif et moderne, qui permet un pilotage unique – voeu déjà formulé par la Cour des comptes –, mais également une économie de gestion pérenne de 20 millions d'euros par an.
M. Bapt, M. Germain et moi avions en effet ferraillé sur ce sujet. Les établissements publics sont souvent captifs de ces systèmes d'exploitation « main frame » très lourds, installés dans les années soixante-dix et quatre-vingt. En optant pour un système ouvert, le coût pour la branche famille a été ramené d'environ 30 ou 35 millions d'euros à quelque 10 ou 15 millions ; l'extension de ce choix à de nombreux autres établissements publics générerait une économie plus substantielle encore.
La Commission adopte l'amendement.
Titre VI : Dispositions relatives à la gestion des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement ainsi qu'au contrôle et à la lutte contre la fraude
Article 65 : Proportionnalité des sanctions prononcées en cas de fraude aux prestations famille et vieillesse
La Commission se saisit de l'amendement AS107 de Mme Jacqueline Fraysse.
Cet amendement, dont je ne suis pas sûre qu'il soit à sa juste place, tend à responsabiliser les holdings en les rendant passibles de pénalités en cas de fraude des sociétés qu'elles dominent. La mesure permettrait d'instaurer, au sein du groupe, des contrôles internes qui nous semblent de bonne pratique.
Outre qu'il n'est effectivement pas à sa place, l'amendement est satisfait par des dispositions législatives sur la responsabilité des donneurs d'ordre en matière de travail dissimulé, votées, me semble-t-il, avec le projet de loi de transposition de l'accord national interprofessionnel.
Votre amendement vise toutes les prestations, celles de la branche famille comme les retraites ; nous allons vérifier s'il est effectivement satisfait. D'ici là, je vous invite à le retirer, pour le réécrire afin de l'insérer au mieux dans le texte.
L'amendement est retiré.
La Commission en vient à l'amendement AS199 de M. Stéphane Claireaux.
Cet amendement vise à donner de nouveaux instruments de lutte contre les mouvements contestataires qui remettent en cause la légalité de la sécurité sociale. Depuis plusieurs années, ces mouvements, profitant des lourdeurs de la procédure pénale, incitent en effet de plus en plus d'assurés à se désaffilier, et nombreux sont ceux qui passent à l'acte.
Afin de raccourcir les délais de sanction, il pourrait être accordé au directeur de la caisse concernée le pouvoir de sanctionner immédiatement tout comportement tendant à refuser ou à remettre en cause l'affiliation obligatoire auprès d'un organisme de sécurité sociale.
Le champ de la lutte contre la fraude couvrirait ainsi l'affiliation au même titre que les cotisations ou les prestations. En introduisant dans le code de la sécurité sociale une sanction spécifique pour défaut ou refus délibéré d'affiliation, le législateur marquerait sa volonté de lutter sur tous les registres de la fraude à la sécurité sociale.
M. Claireaux soulève un problème bien réel. Souvent évoqués sur telle ou telle radio « périphérique », ces mouvements, qui allèguent des directives européennes pour préférer des assurances privées au régime de la sécurité sociale, représentent en effet un vrai problème et concernent environ 300 personnes. Toutefois, son amendement donnerait un pouvoir de sanction pénale au directeur de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF). Je vous suggère donc de le retirer pour le revoir juridiquement d'ici à l'examen en séance.
Des chefs d'entreprise, des irréductibles Gaulois, qui refusent le régime de la Sécurité sociale et prétendent s'affilier à une assurance privée en arguant du droit européen, ce qui donne lieu à des procédures interminables.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 65 sans modification.
Article 66 : Régulation des déclarations à la suite d'un contrôle
La Commission adopte l'article 66 sans modification.
Après l'article 66
La Commission examine l'amendement AS3 de M. Pierre Morange.
Cet amendement, que l'on peut considérer comme de précision, fait suite à des travaux menés depuis le PLFSS pour 2007 sur le croisement des fichiers sanitaires et médico-sociaux avec ceux du fisc, afin de lutter contre la fraude sociale.
De tels échanges devaient logiquement embrasser l'ensemble des informations mais, dans les faits, le contrôle s'est cantonné à l'éligibilité des droits. Lors de la précédente législature, dans le cadre d'un rapport de la MECSS sur la fraude sociale, M. Mallot, M. Tian et moi-même avions souligné l'impérieuse nécessité d'inscrire les montants. Pour mémoire, cette fraude représente de 20 à 25 milliards d'euros, selon l'estimation même du Premier président de la Cour des comptes, qui insistait sur la nécessité de renforcer la lutte dans ce domaine. Il s'agit aussi, d'ailleurs, de lutter contre la fraude fiscale – qui pour sa part atteint de 60 à 70 milliards d'euros –, notamment par le dépistage des économies souterraines dans nos banlieues.
Mon amendement relaie les préconisations techniquement mises en oeuvre par l'ancien Gouvernement, ainsi qu'une question écrite que j'avais adressée en 2013 au Gouvernement actuel pour l'informer du caractère opérationnel du dispositif ; il prévoit donc l'inscription du montant des prestations dans le RNCPS.
Cet amendement découle en effet des travaux de la MECSS, au sein de laquelle M. Morange siégeait alors au côté de M. Jean Mallot.
Un amendement sur le sujet avait été voté dans le PLFSS pour 2013, mais l'amendement de M. Morange tend à rendre plus contraignant le code de la sécurité sociale car les informations visées, qui doivent faire l'objet d'une demande, ne sont pas toujours accessibles dans le RNCPS. Je suis favorable à cette mesure de simplification.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
La Commission en vient à l'amendement AS260 du rapporteur.
Cet amendement vise à permettre l'annulation des exonérations en cas de verbalisation pour travail dissimulé dans l'hypothèse, aujourd'hui non couverte, d'exonérations accordées après demande préalable.
Actuellement, toutes les exonérations sont annulées en cas de travail dissimulé, à l'exclusion de celles qui font l'objet d'une demande préalable. Ces exonérations, qui ne donnent lieu qu'à des vérifications de conformité sur pièces par les organismes de recouvrement, sont celles octroyées dans le cadre de l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises (ACCRE), ou aux travailleurs indépendants qui, âgés de soixante-cinq ans pour les hommes et soixante ans pour les femmes, ont élevé au moins quatre enfants jusqu'à l'âge de quatorze ans. Pour les indépendants, les exonérations continuent donc de s'appliquer même en cas de fraude. Il est proposé de mettre fin à cette anomalie.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite le titre VI modifié.
La Commission adopte l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 modifié.
La séance est levée à dix-neuf heures cinq.