La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Hier soir, l'Assemblée a commencé l'examen des crédits concernant l'agriculture, l'alimentation, la forêt et les affaires rurales (n° 251, annexes 3 et 4 ; n° 253, tomes I et II).
Nous en arrivons aux questions, en commençant par celles du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
La parole est à Mme Marianne Dubois.
Monsieur le ministre de l'agriculture, lors du conseil des ministres du 12 septembre dernier, vous avez présenté une communication selon laquelle, au niveau européen, « la France promouvra une position collective sur la pause du développement des biocarburants concurrents des usages alimentaires ». Par conséquent, sous votre impulsion, notre pays entend suspendre la progression de ces biocarburants dont la production entre en concurrence avec les cultures à vocation alimentaire.
Ainsi, le taux d'incorporation dans les carburants des biocarburants dits de première génération, issus notamment du maïs, de la betterave, des céréales, du soja ou encore du colza, a été limité. La Commission européenne a décidé, le 17 octobre, d'abaisser le taux d'incorporation des agrocarburants dans les carburants de 10 % à 5 % d'ici à 2020, ce qui n'est pas sans susciter des critiques et inquiétudes des professionnels concernés. Je rappelle que cette filière concerne 5 000 emplois directs et indirects et représente 1 milliard d'euros d'investissements.
À cela s'ajoute la hausse du droit d'accise sur la bière, qui fragilise les acteurs de la filière de l'orge. Ceux-ci sont nombreux dans ma circonscription et reconnus pour la qualité de leurs céréales.
Monsieur le ministre, soutiendrez-vous un plafonnement à 5 % quelque peu arbitraire et inacceptable, au risque de mettre en péril investissements et emplois ?
La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
Monsieur le président, madame la députée, j'ai expliqué hier la position de la France à ce sujet. Nous avons choisi de faire une pause pour ce qui concerne l'incorporation obligatoire des agrocarburants dans les carburants. Cette pause correspond à la situation actuelle en France, où le taux d'incorporation obligatoire tourne autour de 7 %, à la fois pour ce qui est de l'éthanol et des huiles, en particulier de l'huile de colza.
La proposition de la Commission européenne a été formulée quelques jours après que la France a pris cette position. Cette proposition remet en cause le dispositif existant, mis en place par une directive, qui prévoyait d'élever le taux d'incorporation obligatoire à 10 %.
Vous savez que le débat européen, une fois lancé par la Commission, met, selon la formule consacrée, « un certain temps » à aboutir. Je ne doute pas que cette proposition, qui a été mise sur la table très rapidement, suscitera des débats. La France, quant à elle, garde la position que j'ai indiquée. Notre ligne est la suivante : il faut stopper l'augmentation du taux d'incorporation obligatoire et revenir à une position raisonnable sur la question des agrocarburants. Telle est la position que défendra la France au cours des débats, lorsqu'ils auront commencé.
Je sais, pour en avoir discuté avec plusieurs collègues européens, que nous pourrons avancer sur ce point, à la fois pour protéger les investissements et les emplois existants, comme vous l'avez dit, et pour ne pas mettre en concurrence les productions alimentaires et non alimentaires.
Monsieur le ministre, ma question porte à nouveau sur le coût de la main-d'oeuvre agricole, et plus particulièrement de la main-d'oeuvre occasionnelle. Depuis 2010, les employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles bénéficient d'un dispositif d'exonération totale de charges sociales patronales pour l'emploi de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi. Ce dispositif, dit TO-DE, est satisfaisant : il contribue à faire baisser les cotisations pour les travailleurs saisonniers à environ 4,70 %. Il s'agit là d'une vraie mesure de compétitivité : modeste, certes, mais réelle !
Or que proposez-vous, dans cette mission agriculture, en faveur de l'emploi des saisonniers et des travailleurs occasionnels ? Renforcer la compétitivité des entreprises agricoles ? Non ! Alléger les charges sociales pour réduire les distorsions de concurrence ? Non ! Au contraire, vous modifiez le dispositif TO-DE de telle sorte que les entreprises agricoles perdent encore plus en compétitivité. Il faut rappeler que le coût de cette mesure pour les entreprises agricoles s'élève à plus de 100 millions d'euros ! Cette décision me semble donc totalement inadaptée.
Je rappelle également que la filière agricole, et plus encore celle des fruits et légumes, est confrontée à une importante distorsion de concurrence en matière de coût du travail par rapport à nos partenaires européens. Pour ceux qui n'auraient pas les chiffres en tête, les voici : le coût de l'emploi saisonnier agricole en France est 80 % plus élevé qu'en Allemagne, 39 % qu'en Espagne et 49 % qu'en Belgique. Voilà la réalité !
Par conséquent, monsieur le ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement quant au maintien des allègements de charges, et notamment des allègements prévus par le dispositif TO-DE. Je souhaiterais également connaître ses intentions quant aux exonérations de cotisations sociales visant à réduire d'un euro le coût de l'heure de travail des travailleurs agricoles permanents, quant à l'allègement de charges pour les bas salaires et quant aux allègements de charges sur les heures supplémentaires. En somme, pouvez-vous nous exposer les mesures que le Gouvernement entend développer en faveur de la compétitivité des entreprises agricoles ?
Les réponses que vous nous avez données cette nuit n'ont pas satisfait le monde agricole. J'en fais partie moi-même : comme vous, monsieur le ministre, j'ai ramassé des pommes. Je ne suis pas non plus satisfait !
Vous avez dit que vous vous contenteriez de resserrer le dispositif. Vous ne reconduirez pas les mesures adoptées par la précédente majorité. Vous dites qu'il faut harmoniser les mesures fiscales et sociales au niveau européen : nous le savons. Mais c'est maintenant qu'il faut prendre des décisions !
Plusieurs députés du groupe UMP. Le changement, c'est maintenant ! (Sourires)
Monsieur le député, nous avons chacun ramassé des pommes, mais pas ensemble. L'essentiel est de ne pas de se lancer de pommes à la figure ! (Sourires.)
Les exonérations de charges sur le travail saisonnier prévues par le dispositif TO-DE sont maintenues dans des proportions identiques à celles que la majorité précédente avait adoptées. Le coût sera donc de 506,8 millions d'euros.
Des décisions seront bientôt prises sur la question de la compétitivité. Chacun a bien compris qu'il y a des efforts à faire, en particulier dans l'agriculture et l'agroalimentaire. Le Gouvernement fera des propositions pour améliorer, entre autres, la compétitivité de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Je n'anticiperai pas sur ce que dira le Premier ministre.
Comme je l'ai dit, nous avons resserré le dispositif TO-DE. Les 506 millions d'euros attribués à cette mesure par la loi de finances pour 2012 n'avaient pas suffi. Le financement de ce dispositif avait dérapé, jusqu'à atteindre 610 millions d'euros. Il a fallu corriger ce dérapage et régulariser notre situation vis-à-vis de la MSA. Nous avons dû ponctionner 140 millions sur les mesures prévues pour le travail permanent, afin d'équilibrer nos comptes avec la MSA sur le travail occasionnel.
Je vous donnerai un exemple, pour que le débat soit plus concret. Les services du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ainsi que ceux de la MSA m'ont fourni ces données. Cela permettra de répondre aux propos que j'ai entendus, selon lesquels nous remettrions en cause l'ensemble des exonérations et créerions des difficultés aux entreprises. Cet exemple est celui d'une entreprise maraîchère du Lot-et-Garonne. Plusieurs députés du Sud-Ouest sont présents ce matin. Nous pourrons ainsi mesurer ensemble la portée de ce que le Gouvernement propose.
Cette entreprise emploie 14 personnes sous contrat saisonnier. La durée moyenne de ces contrats est de 42 jours, soit 4 268 heures de travail, pour une masse salariale de 44 000 euros. Telle est la situation d'une entreprise maraîchère moyenne dans le Lot-et-Garonne, et globalement dans tout le Sud-Ouest. Le niveau de rémunération moyen des travailleurs saisonniers est de 1,1 SMIC. Un saisonnier accomplit en moyenne 14 heures supplémentaires pendant la durée de son contrat. Voilà ce qui a été réellement constaté dans cette entreprise, prise comme exemple représentatif d'une entreprise agricole moyenne. En l'état actuel du droit, le montant des exonérations s'élève à 16 409 euros. Lorsque les mesures que nous proposons auront été adoptées, ce montant s'élèvera à 14 329 euros. Il y a effectivement une perte pour les entreprises agricoles : je l'assume. Le montant par contrat des exonérations est actuellement de 1 171 euros, il sera de 1 022 euros. La part des charges sociales patronales exonérées était de 89 % dans le dispositif actuel, elle sera de 82 %. L'exonération sur les heures supplémentaires, je vous l'ai dit, ne change pas : elle sera toujours de 294 euros.
Les charges sociales patronales seront donc exonérées à 82 %, chiffre à comparer avec celui qui découlerait de l'application de la « réduction Fillon », à savoir 51 %. Soyez donc rassurés, nous avons pris en compte la question de la compétitivité.
L'importance de l'agriculture française n'est plus à démontrer. Dans une conjoncture mondiale morose, notre agriculture a su tirer son épingle du jeu. L'excédent généré par l'agriculture et l'agro-industrie était en 2011 de 11,9 milliards d'euros. Aussi la diminution du budget qui lui est consacré, diminution de 7,3 % à 3 % selon ce que l'on prend en compte, est-elle lourde de conséquences.
Je vous ai bien écouté lors de votre audition en commission, monsieur le ministre, notamment pour ce qui concerne l'installation des jeunes agriculteurs. Vous avez confirmé que, malgré la baisse de 4 millions d'euros du budget alloué aux aides à l'installation, 6 000 jeunes s'installeront l'an prochain avec le même niveau d'aides. C'est ce que nous souhaitons, et nous serons tous vigilants sur ce point.
La baisse de 84 à 52 millions d'euros du budget consacré aux prêts bonifiés nous inquiète. Est-ce un signe positif en direction de l'agriculture ?
J'appelle également votre attention sur un problème que peu d'entre nous connaissent, celui des congés des agriculteurs, et notamment des agriculteurs éleveurs, qui sont nettement majoritaires dans mon département. Une mesure de défiscalisation leur permettait de partir environ deux semaines par an en congé. Ils l'avaient appréciée, eux qui travaillent 365 jours sur 365, d'autant plus qu'elle est favorable à l'emploi. Cette mesure arrive à échéance : nous aimerions savoir si vous souhaitez la reconduire.
La différence entre les conditions de vie des agriculteurs et des éleveurs, différence qui est encore plus importante par rapport à l'ensemble de la société, nous inquiète particulièrement. Si vous me permettez un peu d'humour, je dirai qu'on pourra toujours, en France, continuer à bénéficier de mesures de défiscalisation en achetant des oeuvres d'art. Autant dire que cela conviendra très bien à ceux qui n'ont pas de souci pour boucler leurs fins de mois. Nos agriculteurs éleveurs continueront à oeuvrer, eux, 365 jours sur 365, et ne pourront même pas découvrir ces oeuvres que votre générosité aura permis de conserver en France…
Que comptez-vous donc faire, monsieur le ministre, à propos de la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs et des prêts bonifiés qui leur sont destinés ? Nous en avons déjà parlé un peu lors des travaux en commission.
Surtout, que comptez-vous faire concernant le crédit d'impôt qui doit permettre aux agriculteurs, et plus particulièrement aux éleveurs, de prendre des congés comme tous les autres Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Excellent !
Monsieur le député, concernant le crédit d'impôt pour remplacement temporaire de l'exploitant agricole, je vous ai dit hier qu'un amendement sera déposé pour le maintenir. Le Gouvernement soutiendra cet amendement : c'est clair et net. Je n'avais pas l'intention de le répéter toute la matinée, mais s'il le faut je le ferai ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
À propos de l'installation des jeunes agriculteurs, vous avez évoqué un certain nombre de points.
D'abord, concernant les prêts bonifiés : moins les taux d'intérêt sont élevés, plus on ajuste le niveau des prêts octroyés. C'est aussi simple que cela. Nous sommes, ici aussi, tenus par l'exigence de sérieux budgétaire. Les taux d'intérêt sont bas à l'heure actuelle : il faut en profiter et en tirer les conséquences. C'est pourquoi l'enveloppe consacrée aux prêts bonifiés a été diminuée.
Ensuite, nous avons inscrit dans le projet de loi de finances un montant de 7 millions d'euros pour le fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture, le FICIA. Ce montant est en retrait de 4 millions d'euros par rapport aux 11 millions d'euros qui étaient alloués au FICIA par la loi de finances pour 2012. Ces 4 millions manquants seront apportés par des redéploiements au niveau du ministère, de manière à ce que le FICIA dispose bien de 11 millions.
Je le répète : 300 millions d'euros au total seront consacrés à l'installation. L'objectif est de permettre à 6 000 jeunes agriculteurs de s'installer. On estime que cette année, en 2012, ils ont été 5 000 à le faire : il faut donc progresser et permettre l'installation de 1 000 jeunes supplémentaires. Nous répondons par là à l'ambition partagée d'assurer le renouvellement des générations d'agriculteurs.
Monsieur le ministre, la répartition des recettes qui seront générées, à partir de 2013, par le nouveau système de ventes aux enchères des quotas d'émission de gaz à effet de serre aux entreprises, devait faire l'objet durant l'année 2012 d'une réflexion conjointe entre les ministères chargés de la forêt, du climat et du budget. Votre prédécesseur, Bruno Le Maire, était très attaché à ce que le secteur forestier bénéficie d'un juste retour d'une partie de ces recettes, à hauteur de sa contribution à l'atténuation du changement climatique. En effet, la filière forêt-bois française séquestre annuellement 80 millions de tonnes de C02, principal puits de carbone en France, et représente à elle seule de l'ordre de 50 % de l'ensemble des énergies renouvelables en France. Elle peut donc très légitimement revendiquer une partie des sommes en jeu, de l'ordre d'un milliard d'euros dès 2013. Cette juste rémunération permettrait à la filière forêt-bois de réaliser les investissements d'avenir nécessaires et d'atteindre des objectifs ayant les impacts économiques, sociaux et environnementaux suivants : le renouvellement et l'adaptation aux changements climatiques en quatre-vingts ans, soit presque 125 000 hectares par an ; l'optimisation de la croissance par l'amélioration des peuplements, 60 000 hectares par an ; la préservation des services éco-systémiques et de la biodiversité ; l'accroissement de la mobilisation de bois, 13 millions de mètres cubes supplémentaires pour le bois d'oeuvre et le bois énergie ; 40 % des surfaces non valorisées rendues accessibles, soit 8 000 kilomètres de dessertes forestières ; la résorption du déficit commercial de la filière, 500 millions d'euros par an ; une forte contribution aux objectifs bois-énergie du Grenelle de l'environnement ; enfin, la création de 25 000 emplois durables en milieu rural.
À ce jour, suite à l'adoption de l'article 30 de ce PLF, seule l'ANAH va bénéficier d'une partie des recettes des quotas carbone, sans que l'on sache vraiment si cette décision d'affectation répond réellement aux objectifs fixés par Bruxelles.
C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de nous dire clairement si vous vous engagez à ce que la filière bois reçoive une part substantielle des recettes issues de la vente des quotas carbone.
Monsieur le député, je l'ai dit et je partage votre avis : la forêt est un puits de carbone essentiel pour lutter contre les particules carbonées dans l'atmosphère, particules responsables du réchauffement climatique. Nous devons donc avoir une stratégie pour la forêt.
Il a été décidé d'affecter la recette de la taxe carbone à l'isolation des logements. Première étape, j'ai demandé au ministre de l'égalité des territoires et du logement, qu'une partie de cette isolation se fasse avec de l'isolant bois.
Seconde étape essentielle : conformément à l'engagement pris lors de la conférence environnementale, une part de la taxe carbone doit être affectée à la forêt, compte tenu de son rôle dans la lutte contre le réchauffement climatique, de sa capacité à stocker le carbone. C'est tout le débat qui va s'engager. Je compte sur votre soutien pour faire avancer l'idée simple que la forêt étant un puits de carbone, elle doit bénéficier des recettes de la taxe carbone.
Plusieurs députés du groupe SRC. Très bien !
Nous en venons aux questions du groupe Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. Yannick Favennec.
Monsieur le ministre, j'estime que votre budget, en diminution, adresse un message bien négatif au monde agricole, qui n'a pourtant pas besoin de cela.
À titre d'exemple, vous diminuez les exonérations pour le travail occasionnel, ce qui revient à retirer environ 90 millions d'euros aux agriculteurs. Alors que la crise menace particulièrement l'emploi, cette mesure va compromettre la compétitivité de nombreuses entreprises agricoles. Elle représente en effet une hausse de charges de 140 millions d'euros pour ces employeurs.
Mais ce choix du Gouvernement va surtout pénaliser encore davantage les secteurs de production les plus exposés à la concurrence internationale du fait d'un poids considérable du coût du travail dans le prix de revient des produits. Pour le département de la Mayenne, dont je suis élu, c'est près de 400 000 euros de charges supplémentaires que les employeurs agricoles devront supporter, ce qui mettra en danger la compétitivité de notre agriculture.
S'agissant de l'installation, mon groupe parlementaire a déposé un amendement, que je soutiendrai, visant à rétablir le montant des crédits attribués à la dotation aux jeunes agriculteurs. Cette aide est capitale. Dans un département comme la Mayenne où le nombre d'installations est heureusement encore important, elle contribue à la pérennité de l'activité agricole et de l'emploi. Je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître vos intentions en la matière. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)
Plusieurs députés du groupe SRC. Mais la réponse est déjà donnée !
Monsieur le député, vous venez de préciser que les employeurs agricoles de la Mayenne, département que je connais bien, devront supporter 400 000 euros de charges supplémentaires. Vous avez fait vos calculs. Mais je ne répéterai pas ce que j'ai dit tout à l'heure. Cessez de considérer que la mesure que nous avons prise remet en cause les exonérations de cotisations sociales dont bénéficient les entreprises et les exploitations ! Cessez de répéter que la catastrophe sera là demain, alors que je vous ai donné des chiffres précis, lesquels laissent effectivement apparaître une réduction, un ciblage, sans, pour autant, remettre globalement en cause les exonérations déjà concédées !
Comme je l'ai également précisé, cette exonération sera, de plus, complétée, comme cela figure dans un rapport présenté hier. Nous allons ainsi faire beaucoup plus que ce que vous avez fait vous-mêmes pour améliorer, dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire, la compétitivité « coût » de nos exploitations et, surtout, ne l'oubliez pas, de nos entreprises. Je ne ferai pas à chaque fois la même réponse. Mais j'ai bien compris que c'était le seul sujet que vous aviez trouvé pour occuper cette matinée !
S'agissant de l'installation, de quoi parle-t-on ? Nous devons nous fixer un objectif. Notre objectif est-il en deçà de celui que vous vous étiez fixé ? Non ! Est-il en deçà du nombre d'installations que l'on constate cette année ? Non ! Est-il au-delà ? Oui, car nous constatons aujourd'hui 5 000 installations et nous en prévoyons 6 000 !
Plusieurs députés du groupe UMP. On verra !
Encore une fois, de quoi parle-t-on ? D'une ambition. Telle est ma réponse, monsieur le député ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, cette année, les documents budgétaires ne présentent plus le moindre élément susceptible de cerner les hypothèses retenues dans le cadre de l'élaboration du programme 143 « Enseignement technique agricole ». Dans le PLF de 2012 ont déjà disparu les éléments relatifs à la ventilation des crédits entre les maisons familiales rurales et l'UNREP ainsi que les hypothèses de calcul tenant compte de la répartition des élèves selon le niveau : quatrième, troisième, niveaux 5, 4 et 3. Dans ce PLF pour 2013, les derniers paramètres relatifs à la ventilation du coût d'un poste – valeur de l'indice de la fonction publique et nombre de points d'indice – ont également disparu. La justification de la dépense au premier euro, un des principes de base de la transparence due aux parlementaires, n'est ainsi plus respectée. Mon interrogation est dès lors légitime. Les besoins de financement pour 2013 calculés sur la base des effectifs de la rentrée 2012 et sur les évolutions de la revalorisation des taux d'encadrement prévue pour 2013 par l'accord Barnier laissent entrevoir un différentiel important, de l'ordre de 13 millions d'euros, avec les crédits inscrits dans le PFL 2013.
Ma question est donc simple, monsieur le ministre : comment l'État envisage-t-il de faire face à l'insuffisance de crédits pour 2013 ? Je vous remercie, par avance, de nous rassurer.
Cette question sur l'enseignement agricole est quelque peu différente de celles qui ont été posées jusqu'ici. Vous savez, je l'ai précisé hier, que cet enseignement fait partie des priorités fixées pour le ministère. Ainsi, 200 postes d'enseignants et 30 postes d'auxiliaires seront-ils créés. Nous devons trouver, parallèlement, l'équilibre nécessaire entre l'enseignement public et l'enseignement privé…
Les résultats sont, en effet, globalement excellents dans l'enseignement agricole. C'est pourquoi nous en avons fait une priorité. Je pense que nous disposons là d'un outil majeur en termes de formation et, demain, d'intégration des jeunes dans l'emploi. Les résultats, encore une fois, le prouvent.
Une négociation est en cours, et je réponds maintenant à votre question. Des calculs sont faits. Ils prennent en compte des éléments qualitatifs qu'il conviendra de revoir. En effet, vous avez décidé, pour l'enseignement public, de plafonner le nombre d'élèves permettant ainsi de réduire le nombre d'enseignants, ce qui n'a pas été le cas dans l'enseignement privé.
Ainsi, le calcul du coût à l'unité ne peut-il pas être considéré aussi simplement qu'auparavant. J'ai rencontré hier des représentants de l'enseignement privé. Nous avons engagé une discussion. J'ai l'intention, je vous le dis très clairement, de faire de l'enseignement agricole une priorité et j'ai envie de créer une dynamique de l'enseignement public et privé. C'est ce que je tenais à vous répondre ce matin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous en venons aux questions du groupe écologiste.
La parole est à Mme Laurence Abeille.
Monsieur le ministre, ma question portera sur le développement de l'agriculture biologique en France. Un « plan bio » doit être présenté en juin 2013 et une loi d'orientation est prévue d'ici à la fin 2013. Mais si rien n'est fait en début de mandat dans ce domaine, il sera peut-être alors très difficile d'imprimer un mouvement d'ampleur en faveur de la transition écologique de l'agriculture.
La filière de l'agriculture biologique a de nombreux atouts. J'en citerai trois : elle est créatrice d'emplois puisqu'elle compte 7 % de la main-d'oeuvre agricole pour 4 % de la surface agricole utile ; elle est en croissance avec une progression du marché de 47 % entre 2008 et 2011 ; enfin, les importations de produits biologiques sont en baisse, ce qui est bénéfique pour notre balance commerciale. Pourtant, 3,1 % seulement de la surface agricole utile en France est en agriculture biologique, alors que la moyenne européenne est de plus de 5 %. Pour atteindre 20 % de la surface agricole en 2020, ne serait-il pas nécessaire de consacrer au moins 20 % du budget de l'agriculture à la filière bio ? Dans cette optique, on ne peut que regretter la baisse de 5 % du budget de l'Agence bio.
Je m'interroge sur plusieurs points. Vous avez parlé de l'enseignement de l'agriculture. Pourrait-on donner, aujourd'hui, la priorité à l'enseignement de l'agriculture biologique ? L'innovation dans ce secteur ne devant pas être laissée de côté, interviendrez-vous pour que la future banque publique d'investissement s'engage dans ce secteur ? Les aliments bio n'ont représenté que 2,1 % du total des achats alimentaires dans les établissements de restauration collective. Le coût n'est pas la seule raison : le problème est plutôt celui de l'approvisionnement en grande quantité de produits déjà transformés dans des légumeries bio. Quelles actions immédiates, avant la prochaine loi d'orientation, comptez-vous entreprendre à cet égard ?
Ma dernière question porte sur un sujet différent. J'ai déposé, au nom du groupe écologiste, une proposition de résolution sur la préservation des abeilles et l'interdiction des pesticides néonicotinoïdes. Quelle est votre position à ce sujet et quand sera dévoilé le « plan abeille » annoncé lors de la conférence environnementale ?
Madame la députée, vous l'avez dit vous-même, nous atteignons, s'agissant de l'agriculture bio, le taux de 3,2 %, alors que l'objectif du Grenelle était de 20 %. Je pense qu'il convient de changer la stratégie, donc notre ligne sur la bio. Considérer, en effet, que la bio se résume simplement aux surfaces agricoles utilisées en bio, c'est prendre le risque que la production bio ne trouve pas de débouchés et qu'elle ne s'effondre, car, pour exister, elle doit produire des produits bio, les transformer et trouver des débouchés sur le marché.
Un plan « ambition bio » concernera non seulement les surfaces, mais également, et pour l'essentiel, l'organisation de la filière. Telle sera ma stratégie.
Je ne veux pas remettre en cause l'équilibre de la filière. Vous l'avez vous-même reconnu, ce marché se tient et se développe. Nous devons résister aux importations et, pour cela, produire davantage. Mais je tiens à ce qu'il y ait un équilibre entre ce qui sera produit, ce qui sera transformé et ce qui sera vendu sur le marché. C'est ainsi que nous favoriserons cette filière.
En ce qui concerne les néonicotinoïdes, j'ai pris une première décision sur le Cruiser. J'ai ensuite saisi la Commission européenne. Nous nous sommes accordés sur une vision globale. Un rapport sera remis sur ces molécules.
Nous sommes bien obligés d'attendre la parution d'un rapport, puisque nous nous situons à l'échelle de l'Europe !
Ce rapport évaluera les risques que présentent ces molécules et les conséquences exactes de leur utilisation. Cela ne nous empêche pas de continuer à travailler, comme je l'ai indiqué hier, sur la partie « Cruiser maïs » et sur ces molécules qui, semble-t-il, soulèvent dans certains pays, en Europe, plusieurs questions. Nous devrons revoir tout cela. Nous pourrons alors prendre les décisions qui s'imposeront.
Monsieur le ministre, vous avez fait le choix de prolonger jusqu'en 2015 les aides aux agrocarburants. Or nous aurions pu faire des économies substantielles à cet égard dans une période où les agrocarburants concurrencent les productions de céréales alimentaires et font peser une forte pression, notamment sur les éleveurs.
Vous avez expliqué hier que vous étiez obligé de prendre en compte le fait que certains établissements avaient fait des investissements et que l'on ne pouvait pas arrêter ainsi un programme. Je vous rappelle que ces établissements savaient dès le départ que l'aide ne portait que sur cinq ans, ils ont donc dû en tenir compte.
Au lieu de maintenir les aides aux agrocarburants, nous aurions pu soutenir le développement de l'agriculture biologique et aussi mettre en place un plan un peu plus ambitieux pour les bâtiments d'élevage.
Ma question porte donc sur les choix qui sont faits, une aide à l'investissement pour les uns, un peu moins pour les autres.
Sachez, madame la députée, qu'il pouvait y avoir des agréments jusqu'en 2018. Nous avons choisi de terminer leur renouvellement en 2015. L'aide aux agrocarburants représentera 270 millions dans le budget de 2013, et elle ira ensuite en diminuant pour disparaître en 2016.
C'est la solution que nous avons choisie, en toute responsabilité, parce qu'il existe une industrie, avec des emplois derrière, et que l'on ne peut pas bouleverser un équilibre qui a été construit. J'ai visité un certain nombre de sites industriels. Je tiens à maintenir la possibilité de produire des agrocarburants, mais j'ai été clair sur le signal que nous devons envoyer : nous ne continuerons pas à augmenter le volume devant être obligatoirement incorporé. La pause a été décidée, notre position relayée au niveau européen et même à l'échelle mondiale, la FAO en ayant souligné l'intérêt.
Nous aurons donc en 2013 une aide de 270 millions. Il faudra ensuite discuter, et j'attends l'amendement de Charles de Courson à ce sujet, pour savoir comment la diminuer en 2014 et 2015 pour qu'il n'y ait plus de défiscalisation et donc plus d'aide de l'État aux biocarburants en 2016, l'équilibre de la filière étant atteint.
Ce dispositif permet à la France de répondre à l'objectif d'incorporation obligatoire avec une production française et de tenir compte des objectifs fixés il y a des années pour les énergies en partie renouvelables nécessaires à la substitution aux énergies fossiles.
Nous revenons aux questions du groupe UMP.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart.
Monsieur le ministre, vous nous avez beaucoup parlé hier de votre volonté de rendre compatible la compétitivité agricole avec la nécessaire protection de l'environnement.
L'article 13 de ce projet de budget prévoit une augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes. Je ne citerai que deux exemples. Vous proposez de tripler le taux en vigueur en 2012 sur les émissions d'oxyde de soufre et de diverses autres substances et de réduire de 50 à 5 tonnes le seuil au-delà duquel sont taxées les émissions de poussière.
Comme dans de nombreux autres secteurs, ce gouvernement triple, voire quintuple les taxes sans prévoir de mesures d'adaptation pour ceux qui y sont assujettis.
En ce qui concerne les émissions d'oxyde de soufre et autres substances, nous savons très bien qu'il est obligatoire de recourir à de telles techniques à certaines périodes des cultures et qu'il n'y a pas de techniques alternatives. Pour les poussières, vous choisissez de taxer plutôt que d'encourager la récupération et la transformation.
De telles mesures auront de grandes conséquences sur la compétitivité. Les recettes iront au budget général de l'État alors qu'elles pourraient être utilisées pour encourager des techniques alternatives ou le reconditionnement de ces poussières. Dans les deux cas, vous avez choisi de détruire la compétitivité plutôt que d'améliorer les moyens de protéger l'environnement.
Monsieur le député, je ne crois pas que ce soit le sujet du débat d'aujourd'hui. Cela dit, vous connaissez ma position sur l'augmentation de la TGAP. Nous sommes dans un budget contraint, avec l'objectif de financer des priorités tout en réduisant le déficit budgétaire. Tout ce qui est polluant, c'est un choix, sera touché par une fiscalité écologique, dont l'objectif est d'inciter, d'orienter. Les produits que l'on taxe davantage sont ceux dont nous essayons de réduire l'utilisation ou la consommation.
Cela peut avoir un impact sur la compétitivité, mais à court terme, parce que les adaptations réalisées ensuite permettront de réduire les pollutions et, au bout du compte, les entreprises pourront améliorer leurs marges puisqu'elles économiseront une partie de ce qu'elles utilisaient auparavant comme produits ou comme intrants.
C'est une recette qui a déjà été votée mais, oui, une fiscalité écologique est là pour orienter des choix et éviter des pollutions !
Budget agricole en régression, diminution des exonérations de charges patronales dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles, inquiétude sur les aides à l'installation et notamment au titre du FICIA, tensions sur le marché du lait, interrogations sur la PAC, inquiétudes des éleveurs, craintes sur le foncier agricole : les interrogations et incertitudes sont nombreuses quant au devenir du monde agricole et de ses emplois. Or, sans paysans et sans agriculture, il n'y aura plus de France des terroirs et des territoires…
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est vrai !
L'Europe, vous le savez, s'est construite sur un principe simple, assurer l'autosuffisance et l'indépendance alimentaire de chacun d'entre nous sur notre continent.
Le devoir de la France et du gouvernement français, c'est de défendre nos agriculteurs, à Paris comme à Bruxelles, sans hésitation, sans reculade, sans faux-semblants ni discours double. N'est-il pas contradictoire de vouloir réduire le budget agricole national et de prôner à Bruxelles la stabilité des crédits en faveur de la PAC ?
Par ailleurs, quelles mesures envisagez-vous de prendre afin d'améliorer la relation entre les éleveurs et les céréaliers en faveur des éleveurs ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Je vous ai connu un peu plus optimiste, monsieur le député. Je ne sais pas si c'est le fait d'avoir quitté le Parlement européen qui vous a fait ainsi changer.
Plusieurs députés du groupe UMP. Vous aussi alors !
Oui, mais moi, je reste optimiste, ambitieux, volontaire.
Je ne suis pas défaitiste.
L'ambition pour l'agriculture, nous la partageons. J'ai suffisamment expliqué ce qu'elle était dans ce budget, mais surtout au niveau de la politique agricole commune. Il n'y a pas de contradiction entre le budget actuel du ministère et l'idée de maintenir le budget européen, et je ne crois pas que vous vouliez défendre le contraire.
Je défends donc le budget de la politique agricole, avec des priorités et des contraintes. C'est simple et cohérent, sachant que c'est le budget de l'Europe qui est l'essentiel. Nous discutons d'un budget d'environ 5 milliards, enseignement agricole compris, avec 3,4 milliards pour les mesures spécifiques, tandis que 10 milliards d'euros viennent de l'Europe. L'enjeu est donc bien européen, avec des objectifs que j'ai définis : diversité de l'agriculture et surtout protection de l'élevage.
Sur la question des céréales et de l'élevage, la mécanique la plus intelligente serait un basculement d'une partie des aides des céréaliers vers les éleveurs lorsque les prix des céréales sont élevés…
…et inversement lorsque les prix baissent. C'est un problème de technique budgétaire et nous sommes bien placés tous les deux pour savoir qu'un tel transfert n'est pas possible aujourd'hui à l'échelle européenne.
Nous aurons donc des choix à faire, et je compte sur vous.
Vous attendez des résultats, je verrai vos positions lorsqu'il faudra répartir les aides et opérer une péréquation. J'attends des députés présents ce matin le soutien nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous le savez bien, monsieur le ministre, l'agriculture est un secteur fondamental de l'économie montagnarde.
Les aides spécifiques à l'agriculture de montagne telles que l'indemnité compensatoire de handicap naturel ou la prime herbagère agro-environnementale et certaines autres mesures sont indispensables pour assurer la viabilité de l'agriculture de montagne.
Face aux légitimes inquiétudes autour de certains dispositifs, comme la disparition de la prime à l'herbe en 2014 ou des quotas laitiers, quelle position le Gouvernement compte-t-il défendre dans le cadre des négociations de la future PAC ? Un renforcement significatif de l'indemnité compensatoire de handicap naturel pourra-t-il être envisagé comme le demandent les associations d'élus de la montagne et les professionnels ?
Par ailleurs, je suis particulièrement inquiet face à la baisse drastique des crédits d'intervention et d'accompagnement destinés à financer l'installation des jeunes agriculteurs…
…ainsi que des crédits affectés au plan de modernisation des bâtiments d'élevage, si importants en zone de montagne. Envisagez-vous toutefois d'aider tout particulièrement les territoires spécifiques telle la montagne, où le handicap naturel est si contraignant pour les exploitations agricoles ?
Tout comme l'agriculture, la forêt est une composante essentielle de l'économie en montagne. Avec un budget de la forêt le plus faible depuis dix ans et une baisse de près de 43 % des crédits consacrés au développement économique de la filière forêt-bois et de la gestion durable des forêts, comment envisagez-vous d'améliorer la compétitivité économique de cette filière ? Quelles garanties comptez-vous apporter aux acteurs qui la composent pour contribuer, comme vous vous y êtes engagé, à leur permettre de répondre aux nouveaux enjeux de production auxquels ils sont confrontés ?
Par ailleurs, bien que je me réjouisse de la forte augmentation des crédits servant à financer la mesure « grands prédateurs », quels moyens supplémentaires comptez-vous mettre à la disposition des éleveurs pour les accompagner dans les zones principales de prédation du loup ? Quelle est votre vision pour le futur « plan loup » qui est en cours d'élaboration, alors que cet animal est en forte expansion dans tous les massifs ?
Enfin, et je crois que cette demande est partagée sur tous les bancs de cet hémicycle et notamment par tous les élus de l'Association nationale des élus de la montagne, pouvez-vous nous réaffirmer votre soutien au service RTM, si important pour les territoires de montagne, si précieux en conseils et en accompagnement, notamment pendant les gestions de crise, pour les élus des communes de montagne ?
Vous avez posé, monsieur le député, de nombreuses questions qui tournent autour de la montagne.
Dans les négociations sur la réforme de la politique agricole, je vous l'ai dit hier soir, tout ce qui concerne la montagne sera pris en compte.
Je rappelle que le couplage des aides, qui touche directement toutes ces productions, avait donné lieu à une bataille contre la logique du découplage total, et c'est parce qu'il y a encore un couplage que nous aurons des mesures spécifiques pour la montagne.
Pour les prairies permanentes, on devra prendre en compte aussi les espaces pastoraux, qui devront être intégrés, même si ce n'est bien sûr pas au même niveau, pour l'aide à l'hectare. Il y aura des mesures spécifiques.
La compensation de handicap est maintenue à 248 millions d'euros dans le budget. L'objectif majeur, l'intérêt même d'une politique publique en agriculture, c'est d'abord de prendre en compte les handicaps naturels et de les compenser pour que l'agriculture reste présente dans l'ensemble du territoire. Sur cette question, vous savez avec quelle détermination je poursuis les objectifs que j'ai fixés.
Sur l'installation, je ne vais pas reprendre tout ce que j'ai indiqué. La pédagogie est une vertu qui consiste à répéter encore ce qu'on a déjà dit plusieurs fois, et je sens que, ce matin, je vais faire beaucoup de pédagogie. Vous connaissez ma priorité, qui sera de cibler le plus possible l'élevage, et je salue les jeunes qui veulent s'engager dans cette voie. Voir des jeunes passionnés par ce métier d'éleveur comme j'en ai vu au Sommet de l'élevage, c'est un encouragement énorme à préparer l'avenir. C'est à eux aussi que nous devrons nous adresser de manière directe.
Vous avez parlé du loup. Il y a un plan en discussion, et je ne vais pas rappeler les propos d'un grand philosophe qui avait évoqué la présence du loup partout. Nous devrons tenir compte de l'équilibre nécessaire entre le pastoralisme, qui est un élevage spécifique, et la présence de ce prédateur. Nous ne pouvons pas remettre en cause la convention de Berne – je l'ai dit en Corse il y a peu – mais nous devons trouver des solutions pour un juste équilibre.
On ne peut pas, ne cherchez pas à discuter là-dessus ! Un engagement a été pris, il faut garantir la biodiversité. Que dirait-on aux pays d'Asie qui ont des tigres ? Il faut être responsable mais, en même temps, nous ne pouvons laisser penser que le pastoralisme sera mis en cause ; dans les discussions avec le ministère de l'environnement, je ferai donc des propositions pour le défendre. Le Gouvernement présentera un plan permettant à la fois d'assumer les engagements de la France en matière de biodiversité et de préserver le pastoralisme.
Monsieur le ministre, les indemnités compensatoires de handicaps naturels sont destinées à compenser les handicaps structurels tels que l'altitude ou la pente pour maintenir une activité agricole et l'entretien des terres dans les zones défavorisées. Une enveloppe de 550 millions d'euros est consacrée à ce dispositif, et un zonage distingue zones de piémont, de montagne et de haute montagne. Au sein même du zonage de montagne, sont distinguées zones sèches et non sèches.
Appliqué au Massif central, ce dispositif laisse apparaître une disparité entre éleveurs. La récurrence des années de sécheresse, sept années sur les dix dernières, aggrave fortement cette disparité. En effet, le différentiel d'aide entre zones sèches et non sèches est de près de 2 500 euros par part. Ce dispositif a déjà connu des modifications importantes : d'une part, la revalorisation des vingt-cinq premiers hectares, et, d'autre part, le basculement de certaines EARL en GAEC.
C'est pourquoi je souhaite vous poser deux questions. Est-il envisagé ou envisageable d'étendre la zone sèche méditerranéenne, comme y incitent les études scientifiques menées récemment, ce qui permettrait de rééquilibrer les aides pour les éleveurs de montagne ? De manière plus générale, pouvez-vous me dire comment sont utilisés les reliquats au sein de l'enveloppe des indemnités compensatoires de handicaps naturels ?
Vous posez, monsieur le député, une question précise et technique qui porte sur la ressource en eau des zones sèches. Vous savez qu'il y a aujourd'hui un débat global à l'échelle européenne autour de la redéfinition des zones en difficulté. Je vous informe qu'au niveau du ministère nous souhaitons obtenir le maintien du zonage existant en France pour les zones défavorisées. C'est très important, car il peut exister quelques inquiétudes. Nous sommes engagés avec la Commission européenne dans une discussion lourde, avec cet objectif à l'esprit.
Vous avez évoqué les zones sèches et non sèches de piémont et de montagne. La récurrence des épisodes de sécheresse est constatée partout. J'en ai discuté dans le Sud-Ouest, dans le Gers : partout, le problème se pose. Une mission est en cours sur la question de la gestion de l'eau et sur les possibilités, non pas d'utiliser cette ressource pour favoriser une production plus intensive, en particulier pour le maïs, mais de maintenir partout une agriculture durable, notamment à base d'herbe, car il ne faut pas oublier que le maïs n'est pas seul à avoir besoin d'eau : l'herbe en a aussi besoin. Nous travaillerons sur cette question.
Techniquement, l'extension de la zone sèche méditerranéenne à des zones de piémont nécessite un examen attentif des conséquences potentielles d'une telle mesure. Sur ce sujet, je n'ai pas ce matin de réponse précise, mais j'ai bien entendu le message et nous regarderons cela, avec l'idée peut-être aussi de faire évoluer les MAE vers des « MAE systèmes » qui intègrent des dimensions telles que la gestion de la ressource en eau, en particulier pour faire face aux sécheresses. Ce pourrait être, en partie, une réponse aux questions que vous vous posez.
Monsieur le ministre, le thème que je souhaite aborder est celui de la défense de l'agriculture de montagne.
Vous souhaitez, en 2013, garantir le maintien de l'activité des agriculteurs et développer leur compétitivité en soutenant 6 000 installations, mais je ne vois pas de mesures positives en ce sens dans le budget que vous nous présentez. Avec 10 % de baisse des crédits de la mission « Agriculture », et même 30 % pour les crédits liés à l'installation, le compte n'y est pas.
Comment voulez-vous soutenir les petits agriculteurs et les jeunes, alors que vous abaissez la dotation pour les jeunes agriculteurs de 55 à 51 millions d'euros, que vous réduisez de moitié les prêts bonifiés jeunes agriculteurs, que vous mettez fin aux exonérations de cotisations patronales pour les saisonniers agricoles, que vous limitez le crédit d'impôt pour les services de remplacement et que vous diminuez les crédits à la modernisation des exploitations ?
En zone de montagne, où nous devons aider à l'installation de jeunes agriculteurs, à la valorisation des produits et au développement des filières courtes, les exploitations sont de petite taille et ont aujourd'hui des difficultés à s'en sortir. Or 30 % de l'économie des territoires ruraux provient de l'activité agricole ; si nos petits agriculteurs de montagne disparaissent, c'est tout simplement la vie des territoires ruraux qui disparaîtra avec eux. Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions pour aider nos petits agriculteurs de montagne à vivre décemment ?
Sur la question de l'installation, je ne sais décidément pas, y revenant sans cesse depuis hier soir, comment il faut que je m'explique.
Ou le budget est sincère ou il ne l'est pas. Ce que vous avez voté l'an dernier, avec les dotations que vous évoquez, a conduit à 5 000 installations. Ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les chiffres. La question vous est donc posée à vous. J'ai, pour ma part, conçu un budget avec un objectif précis : faire mieux, en termes d'installation, que ce que vous avez fait avec la loi de finances pour 2012. C'est notre ambition, et notre budget est sincère car il est calibré pour parvenir, non à 5 000 mais à 6 000 installations, en y mettant l'argent qu'il faut.
Votre problème, monsieur le député, c'est que vous confondez ce qui est inscrit avec ce qui est fait ; moi, je vous explique ce que nous allons faire plutôt que ce qui est inscrit. C'est la différence entre nous deux ce matin, mais je suis sûr qu'à force de me répéter, je finirai par vous convaincre. Nous verrons d'ailleurs, l'année prochaine, les résultats.
Dans ce budget, l'ambition est clairement affichée. J'ai engagé une réflexion et une concertation en lançant les assises de l'installation. Je ne me contente pas d'inscrire des listes d'actions sur des lignes budgétaires : je discute, je concerte, parce que mon ambition est claire : faire mieux que ce qui a été fait. Cela doit vous rassurer, en particulier pour les zones de montagne et l'élevage.
Je connais très bien les zones de piémont et de montagne, et je partage l'idée que l'agriculture est essentielle pour y maintenir une activité. C'est pourquoi les objectifs que nous avons fixés sont focalisés en priorité sur ces zones, où il y a notamment beaucoup d'élevage. Nous sommes parfaitement au clair pour les objectifs ; il vous reste un tout petit effort à faire : intégrer la certitude que ce qui est inscrit sera fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ma question concerne l'aménagement du territoire et les affaires rurales, puisqu'elle porte sur l'attractivité de nos territoires ruraux. Il faut investir dans les secteurs porteurs de développement pour aujourd'hui et demain, en complément d'un soutien indispensable aux activités traditionnelles du monde rural.
Afin de favoriser cet essor de nos territoires et, surtout, de pallier les inégalités de développement, l'État a créé des zones bénéficiant de dispositions particulières, aides financières et régimes fiscaux dérogatoires : pour la ruralité, les fameuses zones de revitalisation rurale ; pour la politique de la ville, les zones franches urbaines.
Les zones de revitalisation rurale pourraient être plus attractives si elles bénéficiaient d'une fiscalité dérogatoire, baisse des charges notamment, incitant à l'installation. On pourrait ainsi évoquer des zones franches rurales : il serait intéressant que des zones comparables aux zones franches urbaines soient expérimentées dans la ruralité. J'aimerais savoir, monsieur le ministre, ce que vous en pensez, car il existe aujourd'hui une véritable crise du monde rural, crise visible par les chiffres de l'installation d'agriculteurs, et qui concerne aussi d'autres activités, les professions libérales, les médecins.
La question amène à réfléchir, je vais m'y prêter ce matin avec vous. Je n'en ai pas discuté avec le Premier ministre ni avec Cécile Duflot, qui est chargée de l'aménagement du territoire ; j'engage donc la réflexion de manière libre et personnelle.
Je mets en garde contre l'idée d'appliquer des zones franches dans le monde rural, car je sais ce qui s'est passé dans le monde urbain. On a concentré sur une toute petite portion de territoire des exonérations, qui attirent certes des entreprises – vous avez parlé de santé : les cabinets médicaux, les cabinets de dentistes se sont souvent installés dans ces zones franches pour bénéficier d'exonérations fiscales – mais, au bout du compte, cela n'a pas eu d'effet globalement positif.
Tout à fait. Si nous l'appliquons aux zones rurales, le risque est qu'un tel zonage concentre ces activités sur quelques territoires et dépeuple, par des effets d'aubaine, d'autres territoires. Je serais donc extrêmement prudent.
Le Gouvernement veut engager une réflexion globale sur la perspective d'une compétitivité transversale soutenue par des exonérations de charges. Cela me paraît plus intelligent que de revenir à des systèmes de zonage, en raison du risque que je viens d'évoquer. Ayons une conception plus transversale.
Monsieur le ministre, je vous poserai deux questions.
D'abord, je souhaite vous faire part du désarroi des producteurs de fruits et légumes alsaciens et vous alerter à mon tour sur la nécessité de redonner de la compétitivité aux exploitations spécialisées en fruits et légumes. Le différentiel du coût de la main-d'oeuvre saisonnière entre la France et ses pays voisins, notamment l'Allemagne, handicape tous les producteurs français, qu'ils fassent de la vente directe au consommateur ou produisent à destination des grandes surfaces.
Certes, le problème n'est pas nouveau mais aujourd'hui les heures supplémentaires défiscalisées ont disparu, ainsi que l'allègement des charges dans le secteur agricole par affectation de la moitié du montant de la taxe soda. Il faudrait d'ailleurs que l'article 60 disparaisse aussi, car il pénalise notamment les employeurs ayant une main-d'oeuvre saisonnière fidèle.
Dans la production d'asperges, par exemple, chaque hectare nécessite 1 200 heures de travail. Compte tenu du différentiel du coût de la main-d'oeuvre saisonnière, le producteur allemand économise 6 000 euros par hectare par rapport à son homologue français. Le PLF 2013 accentue encore ce différentiel de 400 euros. Monsieur le ministre, quelles solutions préconisez-vous pour rendre de la compétitivité à nos producteurs d'asperges et à tous les autres ?
Ensuite, vous vous êtes déclaré favorable à la promotion des démarches collectives pour accroître les performances économiques et écologiques de notre agriculture. Aussi soulèverai-je le problème des CUMA, les coopératives d'utilisation de matériel agricole. Vos ambitions ne se retrouvent pas dans votre budget : je n'ai rien trouvé qui lève les freins à l'investissement collectif. Là non plus, le problème n'est pas nouveau, mais l'enveloppe attribuée aux prêts bonifiés pour les CUMA a été sérieusement amputée. Quels dispositifs fiscaux envisagez-vous en faveur de l'investissement collectif ?
Monsieur le député, vous avez posé deux questions en une : d'autres en ont posé beaucoup plus, ce n'est donc déjà pas mal ! (Sourires.)
Vous êtes d'une zone frontalière avec un grand pays, l'Allemagne. Comme vous l'avez souligné, les différences constatées entre le coût du travail en Allemagne et en France dans l'agriculture et l'agroalimentaire – il ne s'agit pas de généraliser – sont extrêmement importantes, du fait qu'il n'y a pas dans ce secteur, en Allemagne, de convention collective, alors que ce sont de telles conventions qui fixent le salaire minimum dans notre pays.
C'est le sujet, que j'ai évoqué hier, de l'harmonisation sociale et fiscale, qu'il faut remettre sur la table, car nous n'avons pas convergé mais divergé. De nombreux commentateurs évoquent M. Schröder : il a fait le choix de la divergence à l'échelle européenne et de la compétitivité de l'Allemagne contre les autres pays européens. Il faut revenir sur ce choix et je pense donc que, dans le débat qui va s'ouvrir en Allemagne sur l'instauration d'un salaire minimum, il convient de soutenir les partis qui y sont favorables, et il y en a quelques-uns. J'ai même cru comprendre que certaines voix s'étaient élevées à la CDU pour que l'on discute du sujet.
Cependant, tout ce que nous pourrons faire ne compensera pas l'énorme delta que vous avez évoqué. Vous êtes bien placé pour le constater puisque, en Alsace, il y a eu quelquefois des confusions dans ce domaine. Je tiens donc à rappeler pour tous ceux qui doivent revisiter leur géographie que l'Alsace, bien que située juste à côté de l'Allemagne, reste en France.
Votre seconde question portait sur les CUMA. J'ai une ambition s'agissant des gestions collectives, et il est vrai que, du fait de la situation, il n'y a pas dans le budget ce que l'on pourrait attendre pour les CUMA. Mon objectif est de reprendre l'idée de ce dispositif, mais qui ne serait plus centré sur le matériel agricole. La modernisation de l'agriculture dans les années 60-70 passait en effet par le matériel agricole : c'était le tracteur ; ce ne sera plus le cas pour la modernisation du XXIe siècle, qui passera, je l'ai dit, par notre capacité à combiner économie et écologie pour que l'agriculture soit productive mais surtout durable dans les objectifs qu'elle se fixe. C'est en faisant une telle combinaison que l'on augmentera la marge brute à l'hectare et qu'on trouvera les moyens de mieux assurer les revenus des agriculteurs. Voilà l'objectif à atteindre. J'ai bien entendu votre préoccupation, et je recevrai d'ailleurs les présidents de CUMA. Ces coopératives ont trouvé une manière de concevoir le collectif, mais c'était pour du matériel agricole ; maintenant, il faut que nous ayons une ambition collective beaucoup plus grande, centrée sur l'économie et l'écologie.
Monsieur le ministre, je sais que vous aimez l'agriculture, vous nous l'avez dit en commission des affaires économiques, et nous sommes tous ici de fervents soutiens de l'agriculture française, mais cela ne se traduit tout de même pas dans votre budget. Il ne fait pas partie des quatre budgets prioritaires. Le budget de l'agriculture semble aujourd'hui faire quelque peu office de variable d'ajustement : il est en baisse historique.
Au-delà de cette remarque générale, je veux vous interroger sur les charges qui pèsent sur les agriculteurs. Le Gouvernement est en séminaire au sujet du rapport Gallois qui a été remis hier, et je rappelle que ce rapport pointe le poids des charges et la nécessité de les diminuer. Or, dans votre budget, vous faites tout l'inverse puisque, pour un grand nombre d'entreprises agricoles, il va se traduire par une augmentation des charges, en particulier pour les emplois saisonniers : 91 millions d'euros en 2013, 110 millions d'euros en 2014. Vous dites que c'est la même enveloppe, mais vous la répartissez différemment. Il y a tout de même un certain nombre d'entreprises aidées aujourd'hui et qui ne le seront plus demain, et que vous allez ainsi mettre en difficulté. Pouvez-vous répondre à cette contradiction entre les conclusions du rapport que le Gouvernement a commandé et votre budget ?
Le rapport Gallois préconise également de développer les formations en alternance. J'ai trois MFR – maisons familiales et rurales – dans ma circonscription. Elles font un travail absolument formidable et veulent aujourd'hui proposer des formations nouvelles, notamment en alternance. Dans quelle mesure pouvez-vous les soutenir et leur permettre de se développer ? Comment allez-vous traduire dans votre budget cette priorité, voulue par le rapport Gallois, en faveur de l'alternance ?
S'agissant des exonérations de cotisations, je répète qu'il y a en effet un recalibrage en ce domaine. Je note que dans les deux dernières lois de finances votées par l'ancienne majorité, le calibrage était à 506 millions d'euros, que le dépassement constaté sur l'année 2012, de l'ordre de 110 millions d'euros, l'avait déjà été l'année précédente, mais que vous-même et vos collègues n'en aviez tiré aucune conséquence sur la ligne budgétaire des TO-DE – travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi agricole – puisque vous aviez réinscrit chaque année la même somme. Tandis que moi, j'en tire les conséquences en ciblant autour d'un SMIC à un SMIC et demi. Il est vrai que cela va remettre en cause, comme vous l'avez dit, certaines situations. J'en ai donné des exemples : alors que l'exonération de cotisations tourne aujourd'hui autour des 16 000 euros pour une exploitation moyenne, elle va s'élever à 14 600 euros, mais en maintenant les aides et les exonérations sur les heures supplémentaires. Il ne s'agit donc pas d'une remise en cause comme vous le prétendez, mais d'un recalibrage dans un contexte budgétaire qui nécessite des efforts. J'entends beaucoup dire : « Vous faites des efforts et ce budget lui-même a baissé. » En effet, et je rappelle que c'est la première fois qu'un gouvernement prend des mesures aussi importantes pour réduire le déficit budgétaire : il s'agit de 10 milliards d'euros. Je vous entends souvent répéter, vous et vos collègues : « Il faudrait faire plus, et encore plus d'économies. » Mais dès que l'on fait des efforts, vous êtes les premiers à protester en disant que vous voulez des aides et encore des aides. Je vous renvoie donc à votre propre contradiction. C'est vous qui êtes fondamentalement contradictoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, dans le cadre des projets de loi de finances 2011 et 2012, j'avais interrogé votre prédécesseur sur les moyens que le Gouvernement comptait employer pour accélérer la recherche sur l'esca et les autres maladies du bois de la vigne. Elles affectent gravement notre viticulture, notamment dans le Val-de-Loire et dans un vignoble que je connais bien, les coteaux du Cher, situés en Loir-et-Cher. En effet, depuis la suppression, en 2001, de l'autorisation d'utiliser certains produits à base d'arsenic de sodium, ce que l'on peut appeler le phylloxéra du XXIe siècle fait perdre par an 5 à 6 millions d'euros de récolte dans mon département. Au plan mondial comme en France, il y a une très inquiétante course de vitesse entre le développement de l'esca et la recherche, laquelle n'a malheureusement toujours pas abouti à des solutions permettant d'éradiquer ou même seulement de contenir cette maladie mortelle pour la vigne. Permettez-moi de vous poser quatre questions et non pas deux.
La première : quel est l'état d'avancement des recherches et quels besoins de financement complémentaires ont été identifiés pour accélérer les travaux de recherche dans ce domaine ?
Deuxième question : par quels moyens la loi de finances pour 2013 développe-t-elle le financement de la recherche au niveau national, notamment à l'INRA, à l'institut de la vigne et du vin ?
Troisième question : quelle action le Gouvernement compte-t-il entreprendre pour obtenir au niveau européen un effort financier supplémentaire et surtout une meilleure coordination des programmes nationaux en ce domaine ? Prévoit-il d'obtenir l'inscription de cette thématique de recherche parmi les priorités des fonds de financement européens et internationaux dédiés à la protection de la santé des végétaux ?
Dernière question, monsieur le ministre : quelles suites votre gouvernement compte-t-il donner à la proposition qui avait été faite par votre prédécesseur, Bruno Le Maire, à savoir que les professionnels constituent des fonds privés de mutualisation des risques pour couvrir les dommages liés à la maladie du bois de la vigne, possibilité prévue par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche de juillet 2010 ?
Monsieur le député, cette maladie du bois qui touche la vigne est un vrai sujet scientifique et un vrai problème pour la production viticole puisque autour de 20 % des cépages sont touchés sans que l'on ait aujourd'hui trouvé de solution. Il faut donc activer tous les éléments de recherche. C'est pourquoi un projet CASDAR a été lancé, auquel l'État apporte son soutien à hauteur de 1,5 million d'euros sur un total de 3,8 millions d'euros. Il faut non seulement que l'on avance au travers de ce projet mais aussi, vous avez raison de le dire, qu'on soit capable de mettre en réseau tous les éléments de la recherche, en particulier à l'échelle européenne, parce que cette maladie du bois devient un fléau sur le continent européen et même à l'échelle mondiale. Voici donc ce que nous avons fait concrètement : un million et demi tout de suite pour le projet CASDAR d'étude sur la maladie du bois.
Mais je pense, comme vous, qu'il va falloir agir plus largement en mettant en synergie tous les réseaux parce que c'est une menace très sérieuse pour l'avenir de la vigne et de la viticulture. Je partage donc tout à fait votre avis et la réflexion qui est la vôtre sur les réseaux, et je vous confirme mes deux réponses : un projet de recherche CASDAR, avec 1,5 million de l'État sur un total de 3,8 millions d'investissements, et je m'engage à ce que l'on mette en synergie à l'échelle européenne l'ensemble des réseaux qui travaillent sur le sujet. Cela ne sert à rien que chacun travaille dans son coin.
En effet, monsieur le député. Je retiens donc votre idée et je la mettrai en oeuvre.
Monsieur le ministre, dans un monde nouveau, où l'agriculture est devenue un enjeu de puissance majeur, nous avons les atouts pour réussir, mais cela suppose de prendre des décisions économiques courageuses. Pour pérenniser l'avenir de notre agriculture, il faut maintenir des crédits importants pour soutenir et moderniser les exploitations en matière de gains de compétitivité, d'innovations agro-alimentaires, de défense du budget de la PAC ainsi que de maîtrise de la spéculation sur les matières premières.
À l'heure où de nombreuses filières sont déjà fragilisées par la crise économique et la hausse importante du prix des matières premières, une large majorité des volets du budget agriculture connaît une baisse significative de ses crédits par rapport à 2012 : les aides à l'installation des agriculteurs, les aides à la reconversion professionnelle, les crédits relatifs à la modernisation des exploitations ou encore le fonds d'allégement des charges. Plus que jamais, le Gouvernement doit renforcer sa mobilisation pour soutenir la trésorerie des exploitants, pour alléger le fardeau des procédures administratives, lourdes et complexes, réel outil de persécution et de découragement des producteurs, et aussi pour mettre fin aux distorsions de concurrence avec les pays voisins, notamment en répondant aux demandes de la profession sur l'allégement du coût du travail.
Sur ce dernier point, les producteurs employant des travailleurs occasionnels bénéficient d'une exonération de charges sociales patronales depuis 2010. Or le Gouvernement propose de revenir sur ce dispositif alors qu'il a fait ses preuves en matière de sauvegarde de l'emploi dans un secteur malheureusement confronté à une concurrence internationale féroce. Alors que les salaires agricoles français sont déjà les plus onéreux d'Europe, revenir sur cette exonération, c'est dégrader notre compétitivité au profit de nos concurrents. J'ai déposé un amendement visant à supprimer cette mesure bien inopportune du Gouvernement, qui pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la production française.
Monsieur le ministre, face aux inquiétudes ressenties, que comptez-vous faire pour pérenniser la production et la productivité sur notre territoire, et ainsi soutenir les exploitants et les ouvriers agricoles, qui souffrent de plus en plus ? À ce propos, j'évoquerai à titre exceptionnel la situation douloureuse vécue en ce moment par les agriculteurs du Nord-Pas-de-Calais : après trois semaines au cours desquelles la pluviométrie a atteint le niveau qu'elle n'atteint habituellement qu'en six mois, toute la récolte de lin textile a été perdue, et quant à la pomme de terre, en Flandre, c'est le cas pour 30 à 80 % de la production selon les terroirs. Les agriculteurs attendent du Gouvernement un soutien fort. Merci pour eux.
Monsieur le député, vous avez rappelé à la fin d'une question qui n'en était pas vraiment une le bilan des inondations dans le Pas-de-Calais. J'irai moi-même sur place. J'ai vu comme d'autres les dégâts causés, en particulier sur la production de lin et de pommes de terre. Je partage donc votre préoccupation quant à la situation difficile que connaissent aujourd'hui nos concitoyens du Nord-Pas-de-Calais, en particulier les agriculteurs.
Second point : les exonérations de cotisations sur les travailleurs occasionnels. Je ne vous fais pas de procès d'intention, mais vous avez eu une formule malheureuse en parlant de « salaires onéreux ». Je ne pense pas que vous souhaitiez que l'on fasse baisser les salaires en France, n'est-ce pas ?
Nous sommes donc d'accord au moins sur ce point. Je le répète ; les exonérations de cotisations sociales ne sont pas remises en cause mais recalibrées. Sur une exploitation moyenne, nous avons constaté avec la MSA que si, dans le système précédent, l'exonération s'élevait à 16 000 euros, elle se situera encore avec le dispositif que je propose autour de 14 600 euros. Il n'y a donc pas de remise en cause et surtout aucune raison de laisser penser que cette décision compromettrait l'équilibre financier des exploitations. Je vous rappelle en effet qu'au-delà des exonérations de cotisations, le dispositif est maintenu pour les heures supplémentaires. Dans la loi de finances rectificative votée en juillet, la défiscalisation des heures supplémentaires est maintenue pour les entreprises de moins de vingt salariés, c'est-à-dire pour la grande majorité des exploitations dont nous discutons ce matin, qu'elles soient maraîchères, fruitières ou autres. Le dispositif que je propose garantit l'emploi dans ce domaine.
J'appelle maintenant les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », inscrits à l'état B.
Monsieur le ministre, concernant les crédits réservés au plan de modernisation des bâtiments d'élevage, la réduction de l'enveloppe risque d'entraîner une concurrence à l'accès au soutien entre les éleveurs.
Quelles orientations seront-elles données pour que ces fonds aillent aux plus nécessiteux et que soient abolies les habitudes de guichet qui bénéficient trop souvent aux initiés porteurs de projets de restructuration vers des outils surdimensionnés et intransmissibles, et qui conduisent à terme à la perte de fonds publics ?
Madame la députée, beaucoup de choses ont été dites sur la modernisation des bâtiments d'élevage. Dès cette année, nous avons assuré une augmentation des crédits budgétaires de 10 millions d'euros d'abord, puis de 5 millions d'euros ensuite, ce qui fait un total de 15 millions d'euros. Pour l'année prochaine, nous ferons en sorte de débloquer autour de 20 millions d'euros.
Je suis d'accord avec vous : il ne s'agit pas de créer un guichet, mais de moderniser des exploitations afin de leur assurer les meilleures conditions de production pour l'avenir. Ce débat et nos objectifs doivent suivre cette ligne. Il ne s'agit pas de faire de la modernisation pour la modernisation avec des aides publiques. Il s'agit de donner à des exploitations les moyens d'améliorer leurs coûts énergétiques, le bien-être animal et la lutte contre les pollutions de leurs bâtiments d'élevage, afin qu'elles puissent s'adapter et être pérennes, notamment en montagne.
Je veillerai particulièrement à cibler les exploitations des agriculteurs en installation ou des plus jeunes puisqu'il s'agit de préparer l'avenir.
Nous en venons aux amendements à l'état B.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 246 .
Cet amendement vise à tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du transfert de la compétence « Production et multiplication de plans forestiers et autres végétaux » à la collectivité territoriale de Corse à compter du 1er janvier 2013.
Il minore de 23 325 euros les crédits du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture ». Ce montant correspond à la compensation provisionnelle des charges de fonctionnement et d'investissement transférées, valorisées en année pleine pour 2013.
Cette compensation est calculée à partir des moyennes des dépenses actualisées sur cinq ans s'agissant des dépenses d'investissement et sur trois ans s'agissant des dépenses de fonctionnement, minorées du produit des recettes transférées. Vous voyez que c'est parfaitement encadré.
Les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », programme 121 « Concours financiers aux régions » sont majorés à due concurrence par un amendement distinct.
La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour les politiques de l'agriculture et le développement agricole et rural.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission mais à titre personnel je ne vois aucun inconvénient à son adoption puisqu'il vise à tirer les conséquences d'un transfert de compétences à la collectivité territoriale de Corse pour un montant mineur de 23 325 euros. Avis favorable.
(L'amendement n° 246 est adopté.)
Ce sujet, que nous avions déjà abordé lors des travaux en commission, concerne les moyens alloués à FranceAgriMer et à l'ODEADOM.
La création de FranceAgriMer visait à regrouper plusieurs établissements publics, des offices, et à améliorer l'organisation du travail. Elle a permis d'accroître la productivité, de réduire les effectifs, d'optimiser les moyens mis à disposition. Cette phase étant terminée, il serait imprudent de poursuivre sur la lancée.
Dans le bleu budgétaire est prévue une suppression de 54 postes équivalents temps plein pour l'exercice 2013 de FranceAgriMer. Je veux vous alerter, monsieur le ministre, sur l'impact très négatif d'une telle suppression pour la qualité du service que cet établissement pourra rendre : une bonne analyse de la situation des filières et la fourniture, en temps et en heure, des éléments nécessaires pour faire face à d'inévitables situations de crise.
C'est pour cette raison que je propose de réabonder les moyens de ces établissements à hauteur de 51,3 millions d'euros.
La commission n'ayant pas examiné cet amendement, je ne donnerai qu'un avis personnel. En fait, c'est un appel au Gouvernement puisqu'il reviendrait à réduire de 51,3 millions d'euros les moyens généraux du ministère, ce qui n'est pas, me semble-t-il, l'intention d'Antoine Herth. Eu égard au gage, l'amendement ne me semble pas raisonnable et j'émets donc un avis défavorable.
Nous saluons le travail de FranceAgriMer. Compte tenu des objectifs fixés, nous avons augmenté ses interventions d'un montant de 15 millions d'euros en faveur de la modernisation des bâtiments d'élevage, notamment de la mise aux norme des porcheries pour truies gestantes. Nous prévoyons de mobiliser encore 20 millions d'euros pour le fonds de roulement de l'office.
Cela étant, je ne saurais accepter cet amendement qui conduirait au titre du gage à effectuer dans le budget de fonctionnement du ministère des coupes qui ne sont pas envisageables.
En y apportant peut-être une mauvaise réponse, l'amendement pose une bonne question, celle de la compétitivité hors coûts, qui est au coeur des débats actuellement. FranceAgriMer constitue en effet le levier pour développer cette compétitivité hors coûts.
Quand bien même cet amendement ne contribue pas, en raison de ses conséquences pratiques, à la solution du problème, nous ne devons pas esquiver cette vraie question : si on touche aux exonérations, donc à la compétitivité par les coûts, que va-t-il rester aux agriculteurs pour rester compétitifs ? De ce point de vue, la baisse des moyens accordés à FranceAgriMer est extrêmement préoccupante.
Par conséquent, je voterai cet amendement qui m'apparaît donner un bon signal.
(L'amendement n° 174 n'est pas adopté.)
Depuis hier soir, vous nous expliquez, monsieur le ministre, que le renouvellement des générations dans l'agriculture – et donc l'installation des jeunes – figure parmi vos priorités. Je tiens à ce que la dotation aux jeunes agriculteurs mais aussi les prêts bonifiés à l'installation soient au moins maintenus au même niveau que l'an dernier. Cela me paraît être la priorité des priorités. Votre objectif de 6 000 installations est d'ailleurs ambitieux.
Cet amendement traduit à la fois ma volonté et celle des élus du groupe UDI de consacrer des crédits d'un même montant que l'an dernier aux prêts à l'installation.
La commission n'ayant pas examiné cet amendement, je m'exprime donc à titre personnel.
Ma première observation porte sur le gage : il s'agit en réalité d'un amendement d'appel de notre collègue Thierry Benoit.
Ma deuxième observation concerne le fond : la forte baisse de ces bonifications dont je m'étais inquiété dans mon rapport s'explique par le fait qu'elles sont exprimées non pas en points mais en différentiels. La baisse des taux d'intérêt explique leur propre baisse, mais les enveloppes sont maintenues en volume de prêts. M. le ministre pourra vous le confirmer.
Pour cette raison technique, j'émets un avis défavorable.
Les crédits inscrits en loi de finances 2012 n'ont pas eu d'impact sur le nombre d'installations. Il ne s'agit donc pas d'inscrire des chiffres dans des lignes budgétaires pour aboutir à des installations.
Depuis hier soir, je vous le répète : nous avons prévu une enveloppe de 300 millions d'euros et fixé un objectif de 6 000 installations, que nous devons tenir. Sa réalisation dépendra de notre capacité à créer ces installations et de la dynamique elle-même, mais les moyens sont là. Il ne faut pas être fétichiste de chiffres mais voir la réalité et les objectifs. Je répète que notre objectif est de 6 000 installations l'an prochain.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
J'ai écouté les arguments du ministre et du rapporteur et je suis quelqu'un de raisonnable Si un ministre de la République nous garantit que les agriculteurs bénéficieront des crédits nécessaires pour nourrir ces prêts à l'installation, je lui fais confiance. Si j'ai la certitude que les installations seront soutenues par des prêts bonifiés d'un montant similaire à celui de l'an dernier et que l'objectif des 6 000 installations pourra être atteint, je retire mon amendement.
C'est le cas.
(L'amendement n° 220 est retiré.)
Comme je suis également quelqu'un de raisonnable, j'ai bien compris, monsieur le ministre, que vous ne pouviez pas vous priver de 51 millions d'euros dans le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » et je réduis donc mes prétentions à 16,4 millions d'euros au bénéfice, cette fois, du plan de modernisation des bâtiments d'élevage.
Vous avez affirmé à plusieurs reprises en commission que l'élevage était votre priorité. Vous avez répété ce matin qu'en matière de politique agricole commune vous attendiez l'opposition au tournant lorsqu'il s'agira de faire des arbitrages. Eh bien nous sommes là, présents, et nous vous proposons d'ores et déjà de faire un arbitrage en faveur de l'élevage en abondant le plan de modernisation des bâtiments.
Cet amendement n'ayant pas été examiné en commission, je m'exprime donc à titre personnel. Notre collègue pose un vrai problème, celui de la forte chute des crédits destinés au PMBE, et il propose d'augmenter quelque peu ces crédits. Une fois encore, en tant que rapporteur, je signale que le redéploiement de 16,4 millions d'euros sur les crédits des directions régionales suscite quelques difficultés.
D'ailleurs je ne crois pas que notre collègue accepterait le gage s'il était ministre de l'agriculture.
Je pense donc qu'il s'agit plutôt d'un appel du pied pour voir si le Gouvernement peut faire un effort en faveur du PMBE. Parce qu'on ne peut pas dire qu'il faut maintenir l'élevage, monsieur le ministre, et fortement réduire ses moyens de modernisation et de mise aux normes. À moins que vous ne soyez prêt à abaisser les normes, ce qui serait une autre solution…
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est ce qu'il faut faire !
Je constate que les ambitions diminuent : 51 millions, puis 16… J'espère que les derniers amendements seront à zéro ! Je reconnaîtrais là votre sens des responsabilités.
Je l'ai déjà dit, les moyens de la modernisation des bâtiments d'élevage et de la mise aux normes ont été augmentés de 15 millions dès 2012. L'objectif que je me fixe pour l'année prochaine est de les augmenter encore sur les fonds de roulement de FranceAgriMer de 20 millions.
Si, il en reste.
Mais cela ne suffit pas : il faut aussi se fixer des objectifs et je les ai déjà précisés tout à l'heure, que ce soit dans la durée ou pour s'assurer que ces moyens serviront à améliorer effectivement la productivité et les conditions de la production, ou en tout cas ses coûts. C'est cela le but, en particulier pour les plus jeunes. Je suis donc bien entendu défavorable à votre amendement.
Quant au gage sur le fonctionnement du ministère… Vous prenez là un risque pour 16 millions. Moi, je vous attendrai pour plusieurs milliards.
Une précision, monsieur le ministre – et je ne m'exprime pas en tant que rapporteur : vous savez que les petites exploitations, notamment en zone de montagne, n'ont souvent pas les moyens qu'ont les grandes pour se mettre aux normes.
Je pense que vous avez conscience du problème et de l'attention toute particulière qui doit être apportée à ces exploitations par rapport aux grosses, notamment en zone de montagne, en milieu très karstique.
Ce sont des milieux très vulnérables et cet effort budgétaire est donc très important non seulement pour la survie économique de ces exploitations, mais aussi pour la protection du milieu. Mais je suppose que vous avez ces éléments en tête.
Ce que vous dites est très juste, monsieur Alauzet. Un des objectifs que nous devons nous fixer est d'être là où les besoins sont les plus importants et les capacités de s'adapter les plus faibles. C'est là que la puissance publique doit mettre ses priorités.
Je retiens donc cette proposition. Nous fixerons au travers des différentes enveloppes allouées et de l'action des DRAF cet objectif d'être là pour les plus petites exploitations, en particulier dans les zones de montagne mais ailleurs aussi, bien sûr. Et nous avons déjà commencé à le faire : dans la filière porcine par exemple, s'agissant de la mise aux normes, en particulier en matière de bien-être animal, nous sommes là. Nous avons dégagé la semaine dernière 10 millions d'un côté et 5 millions de l'autre, lors de la rencontre que Guillaume Garot et moi avons organisée avec la filière porcine. L'ensemble des acteurs ont été satisfaits des propositions qui ont été faites.
(L'amendement n° 175 n'est pas adopté.)
Cet amendement aurait pu faire l'objet d'une discussion commune avec le précédent. Il vise à rétablir les crédits réservés au PMBE au niveau de la loi de finances pour 2012.
Je suis le député d'une région d'élevage, la Bretagne, et je sais que nous n'en avons pas fini avec la modernisation de nos bâtiments d'élevage. Qui dit modernisation des bâtiments d'élevage parle de compétitivité et de performance des outils de production. C'est pour cette raison que je m'étonne que vous ayez fait le choix, monsieur le ministre, de réduire de manière aussi drastique les crédits qui y sont dédiés.
Voilà le sens de cet amendement que je dépose au nom de tous mes collègues du groupe UDI. La modernisation, c'est vraiment la performance des exploitations agricoles. En Bretagne, s'agissant de la production laitière et porcine, mais aussi de la volaille, ces crédits sont majeurs.
Comme M. Benoit vient de le dire, c'est le même amendement que le précédent et ma réponse est la même. J'espérais qu'ils seraient en discussion commune…
Même avis aussi, puisqu'il s'agit presque du même amendement.
Il est bien entendu que la question de la modernisation des bâtiments d'élevage se pose. Des efforts ont déjà été faits, et la filière porcine, dans la réunion de la semaine dernière au ministère, les a bien mesurés. Nous allons continuer, mais dans le cadre que vous connaissez et avec des objectifs précis, parce qu'il faut être rigoureux dans la manière de gérer cette action.
Permettez au député de Saint-Trimoël, entre autres, de s'exprimer sur cette question.
Belle commune !
Nos bâtiments d'élevage sont vieillissants. C'est particulièrement net dans l'élevage hors-sol, en aviculture et en production porcine, et cela occasionne de multiples difficultés, y compris environnementales.
Il faut donc absolument moderniser ces bâtiments. Cela passe par deux types de mesures : des mesures financières – et je souscris totalement à l'amendement de Thierry Benoit : il faut effectivement que l'État soit au rendez-vous – et des mesures réglementaires. Je m'étais investi lors du mandat précédent et j'avais déposé des amendements pour atténuer les difficultés, les lourdeurs et les coûts touchant aux installations classées.
Par définition, à chaque fois que nous créons une norme, nous favorisons les grosses structures, qui ont les moyens de s'adapter, par rapport aux petites, qui ne les ont pas.
Cessons donc d'être hypocrites. Sachons dire clairement que toutes les normes que nous imposons à nos agriculteurs ont pour effet de concentrer la production autour d'un petit nombre d'exploitations, ce qui, nous en conviendrons tous, ne va pas dans le bon sens.
Je regrette donc que ce budget ne fasse pas d'effort pour les bâtiments d'élevage. Cela crée un décalage par rapport à nos concurrents. Allez voir en Allemagne ! Ils ont modernisé leurs bâtiments et cela contribue à leur faire gagner des parts de marché.
Que nos efforts, que notre budget s'adaptent à cette nécessité. Vous organisez des tables rondes, monsieur le ministre, vous y invitez des parlementaires, y compris de l'opposition. J'y ai assisté, en Bretagne, et le diagnostic était clair : nos bâtiments sont vieillissants, il faut absolument les moderniser.
D'abord, un point d'ensemble : par définition, la plupart des mesures proposées vont finir par être gagées quelque part. Si l'on nous explique à chaque fois qu'elles ne peuvent être retenues pour des raisons techniques, cela limite l'intérêt de l'exercice parlementaire… Je suis pour l'initiative politique dans ce domaine.
Pour ce qui est de l'élevage, notre collègue socialiste parlait tout à l'heure des zones de montagne. Il faut bien voir qu'il s'agit d'un environnement de plus en plus difficile, avec les attaques de nuisibles, le problème du loup… Le message que nous sommes en train d'envoyer à ces petits éleveurs, c'est qu'ils sont confrontés à une réglementation croissante qui les étrangle, à des problèmes de compétitivité coûts, à des problèmes de nuisibles contre lesquels on ne fait pas grand-chose, et qu'en plus, on les abandonne également dans leurs difficultés à s'adapter à la concurrence hors coûts.
J'ai été extrêmement sensible à ce qui a été dit sur le fait de centrer le dispositif. C'est un point essentiel. Nous sommes en train de mélanger des filières qui parfois sont très différentes, des enjeux qui le sont aussi. Chez moi, sur le plateau de Sault, un éleveur qui disparaît ne revient pas. Cela entraîne des problèmes d'aménagement du territoire. Il s'agit de petits troupeaux, de petites sommes. Je crois que cet amendement envoie également un signal politique à ces éleveurs. On ne peut pas d'un côté dire qu'on veut soutenir les éleveurs et de l'autre réduire de moitié les crédits affectés à leur adaptation.
(L'amendement n° 230 n'est pas adopté.)
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l'amendement n° 210 .
, rapporteur spécial. Il s'agit d'un amendement d'appel. Nous sommes nombreux à avoir été un peu étonnés, monsieur le ministre, que la vente des quotas de CO2, qui rapporterait officiellement 550 millions par an, et probablement quelques dizaines de plus, ait été entièrement consacrée à l'ANAH dans le but de relancer les économies d'énergie. La forêt capte entre 20 et 25 % des émissions de CO2 en France, et pas un sou de ces 550 millions ne revient à la filière ! Nous en avons longuement discuté en commission, sur tous les bancs d'ailleurs.
L'objet du présent amendement donc est de reverser 15 de ces 550 millions à la filière forêt. C'est un minimum : la logique commanderait plutôt de demander un peu plus de 20 % du total, soit entre 110 et 120 millions ! Pourriez-vous nous expliquer votre point de vue sur cette affaire ? Pourquoi un compte d'affectation spéciale a-t-il capté ces 550 millions pour les redonner à l'ANAH ? Quelle est votre position sur le recyclage partiel des ventes des quotas de CO2 vers la forêt ?
Le choix qui a été fait en faveur de l'isolation des logements est un choix stratégique. Cette dimension du logement doit être intégrée dans toute discussion macroéconomique. Elle a des impacts aussi bien globaux que pour les particuliers.
Le choix qu'a fait l'Allemagne et que fait le Gouvernement aujourd'hui est donc de s'attaquer à cette question, en bloquant en particulier l'évolution de certains loyers. Cela permet de dégager des marges de pouvoir d'achat pour les particuliers. Les premières décisions prises par le Gouvernement ont donc érigé le logement en priorité, s'agissant à la fois de la construction et de l'isolation. Moins on consomme d'énergie, moins on a de charges et mieux c'est pour les locataires.
Mais, je l'ai dit, on ne s'arrêtera pas là. La forêt a besoin de financements et la taxe carbone me semble être l'outil adéquat. Car nous avons besoin de moyens nous permettant d'entretenir cette forêt, et surtout de fixer des objectifs ambitieux de développement de la filière, dans tous les domaines : énergie, protection, isolation, maisons en bois, matériaux…
Enfin, pour répondre rapidement à ce qui a été dit précédemment, il est vrai que nos bâtiments d'élevage, monsieur Le Fur, sont vieillissants, en particulier dans la filière porcine. Mais cela fait dix ans que vous étiez aux responsabilités ! Nous n'allons pas tout régler tout de suite. C'est un de nos objectifs, mais avouez que je ne vais pas pouvoir régler en cinq mois ce qui ne l'a pas été pendant dix ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
(L'amendement n° 210 n'est pas adopté.)
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l'amendement n° 261 .
Cet amendement, qui vise à réorienter 15 millions vers le programme « Forêt », n'a pas été examiné en commission. Je m'exprime donc à titre personnel, mais après un long débat à ce sujet en commission.
Le président Emmanuelli m'a en effet interrogé sur la forte chute des crédits liés à la reconstitution de la forêt landaise suite à la tempête Klaus. Il estimait, d'après les informations des propriétaires forestiers de ce massif, que ces crédits n'étaient pas suffisants pour honorer les subventions accordées. Je me suis engagé à approfondir la question et j'en ai parlé avec le M. le ministre, qui m'a confirmé qu'il manquait effectivement une quinzaine de millions dans les crédits budgétaires, pour la simple raison que cette somme avait été dégagée sur le Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER.
J'ai demandé au ministre s'il était sûr que ces 15 millions supplémentaires du FEADER permettraient de faire face au paiement en 2013 des subventions accordées aux propriétaires qui reconstituent leur forêt.
M. le ministre m'a répondu que, dans l'hypothèse où les crédits prévus seraient encore insuffisants, d'autres seraient redéployés afin de répondre aux demandes.
J'avais déposé cet amendement avant que ne me fût donnée cette réponse détaillée. Peut-être M. le ministre veut-il donner des éléments supplémentaires à la représentation nationale, mais je suis disposé à retirer mon amendement s'il confirme ces deux points.
Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur spécial, les discussions que nous avons eues sur cette affaire Klaus, qui ont parfois porté sur des problèmes de chiffrage. L'objectif est clair, je l'ai dit hier, la forêt landaise doit être reconstituée, replantée et régénérée, et je salue encore une fois ceux qui font le choix de la forêt, alors que les hectares de maïs irrigué qui se trouvent juste à côté sont bien plus rémunérateurs. Il faut donc les aider.
Deuxième point, la réalité, c'est que 286 à 288 millions d'euros ont été dépensés au cours des quatre dernières années, soit une consommation annuelle moyenne de 70 millions d'euros. L'objectif a donc été de réévaluer l'aide, laquelle a été d'un montant de 44 plus 12 millions d'euros sur cinq ans, et d'y ajouter – je le confirme ce matin devant la représentation nationale, monsieur le rapporteur – 15 millions d'euros liés à des redéploiements sur le FEADER, le Fonds européen agricole pour le développement rural.
Avec l'ensemble de ces moyens, nous arrivons à un montant d'environ 59 millions d'euros. Selon toutes les estimations faites, cela correspond à peu près à l'enveloppe nécessaire pour engager les travaux dans l'année qui vient. Si cela ne suffisait pas, nous pourrions reconsidérer cela pour essayer d'atteindre l'objectif visé.
Je le répète : 44, plus 12, plus 15 millions d'euros, c'est l'engagement pris par le Gouvernement, par le ministre de l'agriculture, pour signifier notre attachement à ces sylviculteurs.
Je confirme donc ce que je vous ai dit, monsieur le rapporteur spécial, et je souhaite que vous retiriez votre amendement.
Cet amendement concerne les programmes d'installation, plus particulièrement le programme pour l'installation et le développement des initiatives locales, le PIDIL. Je propose cette fois-ci de redéployer 4 millions d'euros pour abonder ce programme. Cela entre, monsieur le ministre, dans le cadre des objectifs que vous vous êtes fixés en matière de soutien à l'installation.
Précisons l'importance de ce programme. Nous constatons depuis des années un taux très élevé de réussite et de pérennité des installations en agriculture, plus élevé que dans d'autres secteurs d'activité, comme l'artisanat par exemple. C'est dû à un investissement très fort des pouvoirs publics, mais aussi à une mobilisation très forte des acteurs de ce secteur socio-économique, en particulier grâce à ce type de programme qui permet d'informer parfaitement le candidat à l'installation, de le préparer à s'insérer dans un territoire, dans un tissu social et économique, et à bien mesurer les conditions de réussite de son projet.
C'est pourquoi je pense qu'il ne faut pas réduire les crédits de ce programme.
Cet amendement n'ayant pas été examiné en commission, c'est un avis personnel que j'exprimerai.
Nous avons débattu, avec le ministre, du PIDIL et de son alimentation par le FICIA, le Fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture. Effectivement, je le rappelais tout à l'heure, on parle trop des installations aidées, et pas assez des installations non aidées.
Or, en 2011, il y a eu – je cite ces chiffres de mémoire – 17 000 installations en agriculture, dont 5 000 aidées. Nous parlons de celles-ci mais pas des 12 000 autres et des problèmes liés aux conditions d'âge et autres règles d'éligibilité aux aides.
Cela dit, le PIDIL, qui ne vise pas simplement les installations de jeunes agriculteurs, me paraît utile.
Nous en avions parlé avec le ministre, et j'attends sa réponse, mais je ne désespère pas qu'il puisse faire un effort. En tant que rapporteur, je rappelle aussi le problème des gages, mais peut-être M. le ministre pourrait-il justement lever le gage.
Si j'ai bien compris, beaucoup d'amendements gagent des dépenses sur celles de fonctionnement du ministère.
Je comprends un peu cette logique.
Je vous renvoie cependant à la contradiction que j'évoquais tout à l'heure : vous formulez de nombreuses demandes, mais, si l'on veut faire preuve de sérieux en matière budgétaire, on ne peut pas demander toujours plus de subventions et d'engagements de l'État.
S'agissant de la question de l'installation et du FICIA, ce dernier se voit attribuer 7,4 millions d'euros, alors que c'est un montant de 11,4 millions d'euros qui était prévu par la loi de finances pour l'année 2012. Les 4 millions d'euros qui nous permettront de passer de 7 millions d'euros à 11 millions d'euros seront trouvés sur la gestion du ministère ; cet engagement a été pris devant les jeunes agriculteurs.
Je pense effectivement que cette information, cette communication, est nécessaire. Il faut d'ailleurs l'ouvrir, et c'est pour cela que les assises de l'installation sont importantes, car on ne cible aujourd'hui qu'une partie des installations ; une grande partie nous échappe, que nous aurions intérêt à intégrer pour savoir où il faut mettre l'accent.
Je réitère ce matin l'engagement que j'ai pris : le FICIA disposera bien de 11 millions d'euros, et les 4 millions d'euros qui manquent seront pris sur la gestion au niveau ministériel.
Après une réponse aussi claire du ministre, je veux donner un gage de responsabilité de l'opposition. Lorsque vous prenez des engagements fermes sur certains sujets, nous savons le reconnaître.
Je retire donc cet amendement, qui nous aura permis d'obtenir des assurances quant à la pérennité de ce programme.
(L'amendement n°173 est retiré.)
Je m'étonne que des amendements identiques fassent l'objet de discussions distinctes, alors qu'ils devraient faire l'objet d'une discussion commune ; c'est la deuxième fois que cela arrive ce matin. On me dit que c'est normal mais, pour moi, ces amendements reposent sur les mêmes fondements.
Je répète les arguments déjà rappelés tout à l'heure. À partir du moment, monsieur le ministre, où vous faites vôtre, et où nous faisons nôtre, le choix ambitieux de privilégier un accroissement du nombre d'installations de jeunes agriculteurs en France, j'ai l'impression que l'argument budgétaire que vous avez évoqué à propos des prêts bonifiés ne vaut pas. Dès lors que nous relevons l'objectif pour atteindre le nombre de 6 000 installations, il me paraît naturel que la dotation progresse pour correspondre au nombre d'installations souhaitées.
Tel est le sens de cet amendement, dont je vous préviens que, contrairement à celui qui concernait les prêts bonifiés, je ne le retirerai pas, à moins que vous ne nous donniez de nouveaux éléments.
C'est le même amendement que celui que nous venons d'examiner, et le Gouvernement nous a indiqué qu'il était d'accord avec nous.
Un petit problème technique n'a peut-être pas été suffisamment éclairci : comment le Gouvernement fera-t-il pour parvenir au résultat souhaité ? Il le fera en gestion ; c'est pourquoi il n'a pas déposé d'amendement qui majore les crédits de quatre millions d'euros. Il procédera à un redéploiement en interne.
Je pense, monsieur Benoit, que comme M. Herth, et comme moi-même vous avez eu satisfaction. Il serait donc logique que vous retiriez votre amendement.
Je souhaite entendre M. le ministre à propos du développement du FICIA. Pardonnez ma ténacité mais ce n'est pas tout à fait le même sujet que précédemment. J'ai beaucoup d'estime pour vous, monsieur le ministre, comme pour M. le rapporteur spécial, et je suis convaincu de votre connaissance du sujet et de votre bonne volonté.
Je n'en souhaite pas moins que nous puissions développer le sujet précis de la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs, à moins que vous ne nous expliquiez la manoeuvre à laquelle vous allez procéder, notamment entre FICIA et DJA. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je vous ai expliqué ce matin que vous partiez d'une ligne du budget pour l'année 2012. C'est cela que vous évoquez en parlant de la DJA.
Laissons de côté le FICIA : je vous ai répondu. Comme vous l'a rappelé M. le rapporteur spécial, l'engagement est pris, il est clair : nous compenserons cette différence de 4 millions d'euros.
Qu'avons-nous fait à propos de la DJA ? Nous avons considéré le nombre d'installations. Ce qui a été prévu ne correspond pas à ce qui fut la réalité : 5 000 installations financées, alors que l'objectif était de 6 000 installations financées. Il n'est pas besoin d'inscrire un montant supérieur si l'on n'est pas en mesure de le dépenser. C'est ce que j'essaie simplement de vous expliquer depuis tout à l'heure : notre propos est de faire preuve de sincérité budgétaire. Si vous voulez débattre uniquement des chiffres inscrits sur des lignes, c'est différent. La DJA est calculée de telle manière que l'on puisse financer 6 000 installations, mais, je vous le répète, il n'y en aura eu que 5 000 en 2012. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
C'est pour cette raison que je ne suis pas favorable à l'amendement.
Si le ministre garantit la dotation aux jeunes agriculteurs… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) S'il vous plaît, on peut tout de même s'exprimer. Je veux pouvoir retourner dans ma Bretagne dire aux jeunes agriculteurs qu'au-delà des arguties et des gymnastiques budgétaires qui peuvent être expliquées dans cet hémicycle, la dotation sera maintenue et que personne n'en sera privé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
En conséquence, et ayant entendu les arguments et les explications de M. le ministre, je retire l'amendement. Veuillez, mesdames et messieurs de la majorité, nous excuser de demander des précisions somme toute naturelles !
(L'amendement n° 218 est retiré.)
Je mets aux voix les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », modifiés par l'amendement n° 246 .
(Les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », ainsi modifiés, sont adoptés.)
J'appelle maintenant l'article 60 du projet de loi de finances, rattaché à cette mission.
Je suis saisi de plusieurs amendements identiques de suppression.
La parole est à Mme Valérie Lacroute, pour soutenir l'amendement n°6 .
Monsieur le ministre, les agriculteurs en ont gros sur la patate, en Seine-et-Marne, l'un des premiers départements français pour les cultures maraîchères ! Je prends pour exemple le secteur du Pays de Bière, au nord de Fontainebleau. Cette vaste plaine de plusieurs centaines d'hectares, première zone de production nationale de salades de plein champ, fournit chaque jour des milliers de salades et de plantes aromatiques au marché de Rungis.
La profession est très gourmande en main-d'oeuvre saisonnière, et les conséquences de la mesure que vous proposez à l'article 60 seraient, je le tiens de la propre bouche des maraîchers, dramatiques. En effet, 90 % des vingt-cinq maraîchers de ce secteur emploient de vingt à vingt-cinq saisonniers sur les six mois du printemps et de l'été, des saisonniers de plus en plus difficiles à recruter du fait de la pénibilité particulière de cette profession ; des saisonniers qu'il faut de surcroît héberger.
Les agriculteurs ont sorti leur calculatrice. Dans le sud de la Seine-et-Marne, le projet du Gouvernement augmenterait les charges de plusieurs centaines de milliers d'euros. Un producteur de pommes de terre de ma circonscription m'indique que la masse salariale représente déjà 59 % du prix de vente d'un kilo de pommes de terres. Augmenter les charges grèverait les revenus mais aussi la capacité d'investir, d'acheter du matériel, de renouveler les plantations et les variétés.
Quelle solution reste-t-il aujourd'hui aux maraîchers ? Augmenter les prix ? Comment voulez-vous être compétitif ? Le coût d'une heure de travail est, pour l'employeur, de 6,10 euros en Allemagne et de 10,92 euros en France. Aujourd'hui, on parle de compétitivité dans l'industrie, mais il ne faudrait pas oublier la compétitivité dans l'agriculture !
La colère des agriculteurs se teinte d'inquiétude pour leur emploi et celui de leurs salariés. L'emploi agricole, qu'il s'agisse des exploitants, des permanents et des saisonniers, c'est un millier de postes dans le sud du département de Seine-et-Marne. Demain, si vous remettez en question les exonérations de charges, une exploitation sur deux sera en déficit, voire trois sur quatre pour certains types de productions.
Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, je demande la suppression de l'article 60.
Je compléterai l'argumentaire de notre collègue : l'article 60 n'est pas la bonne réponse au défaut de compétitivité de nos entreprises agricoles car il modifie le périmètre de l'exonération dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles. Il créerait une charge pour les employeurs agricoles de 91 millions d'euros en 2013 et de 135 millions d'euros en 2014, alors même que ceux-ci doivent faire face à des distorsions de concurrence au sein de l'Union européenne.
Je le répète : la réduction de l'exonération prévue par cet article pénaliserait en particulier les employeurs voulant fidéliser leurs saisonniers.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 33 .
L'article 60 modifie le périmètre de l'exonération en excluant de son champ les cotisations d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Actuellement, l'exonération est totale pour les rémunérations égales ou inférieures à 2,5 fois le SMIC puis devient dégressive entre 2,5 et 3 SMIC. Afin de recentrer le bénéfice de l'exonération sur les bas salaires, le projet de loi réduit le principe de dégressivité du dispositif aux salaires compris entre 1,25 et 1,5 SMIC au lieu de 2,5 et 3 SMIC. L'exonération prendra ainsi fin pour tout salaire supérieur à 1,5 SMIC.
La cotisation d'accidents du travail, qui serait exclue de l'exonération, est variable selon les secteurs de production. Pour le secteur viticole, le taux des charges non exonérées passera de 4,94 % à 8,39 %.
Cet article n'entraîne pas seulement un recentrage sur les bas salaires mais bien une réduction de l'exonération pour tous les employeurs de travailleurs saisonniers agricoles, même pour les salaires compris entre 1 et 1,25 SMIC. Cette mesure constitue dès lors un frein inadmissible à la compétitivité de notre agriculture, pourtant soumise à une concurrence internationale sévère.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement vise à supprimer l'article 60.
Ces amendements de suppression sont un peu, d'une certaine manière, des amendements Gallois.
Si l'on examine le rapport qu'il a remis hier, on se rend compte que l'article 60 n'est plus d'actualité puisque, d'un côté, on vous demande de réduire les charges sociales patronales et salariales de 30 milliards d'euros et que, de l'autre, on réduit le périmètre de l'exonération dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles – créant ainsi une charge de 91 millions d'euros pour les employeurs agricoles en 2013 et d'environ 135 millions d'euros en 2014, cela en dépit de fortes distorsions de concurrence en Europe.
Vous m'avez demandé de me montrer optimiste, monsieur le ministre. Je le serai avec la suppression de cet article, voire, sinon, avec l'adoption d'un amendement de repli visant à mieux lisser les exonérations de charges pour les saisonniers agricoles. Il s'agirait de la première traduction concrète du rapport Gallois.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l'amendement n° 51 .
Le monde agricole est traversé de très vives inquiétudes ; je le perçois bien en Bourgogne, dans l'Yonne, notamment en Puisaye, parmi les éleveurs et les jeunes agriculteurs. Ces inquiétudes viennent pour une part des incertitudes relatives aux négociations de la PAC et sont aggravées par votre budget. J'ai le sentiment, en suivant les débats, que ce dernier inflige une double peine, qu'il s'agisse de la très forte diminution des crédits affectés à la modernisation des bâtiments d'élevage, et, avec cet article 60 particulièrement funeste, d'une remise en cause des exonérations de charges sociales sur les travailleurs occasionnels.
Je vous invite en toute franchise, monsieur le ministre, à écouter les inquiétudes du monde agricole. Il faut surtout que vous y répondiez. C'est le sens de ces amendements de suppression. Nous savons, certes, en les présentant, que nous n'aurons malheureusement pas de succès ; et il faudra bien que les députés de la majorité aillent expliquer au monde agricole pourquoi ils ont voté cet article, et qu'ils assument ces remises en cause de la compétitivité des exploitations agricoles.
Monsieur le ministre, vous êtes le ministre de l'agriculture ; il vous reste quelques mois ou quelques années pour prouver que vous êtes aussi le ministre des agriculteurs.
L'article 60 modifie le périmètre de l'exonération dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles – le TO-DE. Cette modification crée une charge pour les employeurs agricoles de 91 millions d'euros en 2013 et de 135 millions d'euros en 2014, alors même que ceux-ci doivent faire face à des distorsions de concurrence au sein de l'Union européenne, certains pays n'imposant aucun minimum salarial.
Cette mesure revient donc sur un dispositif qui a fait ses preuves pour la sauvegarde de l'emploi. Dans un secteur fortement soumis à la concurrence internationale et qui emploie plus d'un million de salariés, cette disposition va à contre-courant de la politique de maintien des activités de production sur notre territoire.
De surcroît, il ne paraît pas cohérent de faire évoluer un dispositif d'exonérations de charges patronales sans attendre les conclusions du Haut conseil sur le financement de la protection sociale, saisi par le Gouvernement, qui doit nous donner des pistes d'évolution dès l'an prochain. La sagesse commande d'attendre le résultat de ces réflexions.
Enfin, quant à l'argument de la responsabilisation de l'employeur due au fait qu'il paierait une cotisation d'accidents du travail, il convient de rappeler qu'en agriculture cette cotisation est mutualisée secteur de production par secteur de production. Ainsi, pour toutes les entreprises de moins de vingt salariés, soit plus de 85 % des entreprises du secteur agricole, le taux ne varie pas selon le volume d'accidents dans l'entreprise, mais selon le volume dans l'ensemble du secteur. Le raisonnement du Gouvernement fondé sur la responsabilisation individuelle n'a donc pas de sens.
Pour ces motifs, il est proposé de supprimer l'article 60.
Monsieur le ministre, vous n'êtes pas sans savoir qu'hier près de 400 arboriculteurs, viticulteurs, maraîchers et horticulteurs ont manifesté devant l'Assemblée contre votre projet de revenir sur les exonérations de charges patronales pour les travailleurs occasionnels. Cette manifestation est assez rare pour être soulignée.
La mesure que les députés du groupe UMP avaient prise au cours de la précédente législature permettait d'aider le secteur agricole à gagner en compétitivité. Chacun s'accorde à reconnaître que le niveau atteint par le coût du travail en France ne permet plus aux entreprises agricoles de faire face à la concurrence des pays européens qui n'imposent aucun salaire minimum.
Si l'article 60 était adopté, les exonérations seraient entières jusqu'à l'équivalent de 1,25 SMIC puis dégressives jusqu'à 1,5 SMIC, alors qu'aujourd'hui elles sont dégressives à partir de 2,5 SMIC pour finir à 3 SMIC. Le seuil de dégressivité se calcule d'après le salaire effectivement versé et non par rapport au salaire de base. Il faut ajouter à cela les primes, dont celles de fin de contrat, et les heures supplémentaires. Si l'article 60 est adopté, quand le total dépassera l'équivalent de 1,5 SMIC, l'employeur ne bénéficiera plus d'exonérations. Or les heures supplémentaires, vous le savez, monsieur le ministre, sont monnaie courante : c'est la seule manière, pour les travailleurs occasionnels, de toucher des salaires intéressants.
En outre, pour l'ensemble de l'agriculture française, cette mesure coûterait 140 millions d'euros et se révélerait donc insupportable alors que, dans les filières spécialisées, de nombreuses exploitations se trouvent déjà à la limite de la rentabilité. Nous vous demandons donc de supprimer cet article qui menace clairement nos entreprises agricoles.
La parole est à M. Jean-Claude Bouchet, pour soutenir l'amendement n° 84 .
J'entends bien la position du Gouvernement à propos de la lutte pour la compétitivité, contre le chômage. Tout le monde, bien sûr, y souscrit. J'ai bien entendu, monsieur le ministre, vos arguments au sujet de l'article 60, selon lesquels il s'agit d'un ajustement des exonérations et non pas de leur suppression. Je rappelle néanmoins que le monde de l'agriculture vit aujourd'hui malheureusement très mal, subit une baisse de compétitivité, un coût du travail trop élevé.
En 2009, nous avons mis en place, avec Bruno Le Maire, cette exonération de charges ; nous y avions travaillé avec plusieurs députés au cours de la précédente législature.
Je rappelle en outre que je suis élu dans le Vaucluse, troisième département employeur et qui sera donc particulièrement concerné par cet « ajustement » qui mettrait à mal toute l'activité économique d'une région mais également celle de la France entière. Cette mesure inciterait au développement d'entreprises de main-d'oeuvre étrangère.
Cet amendement de suppression de l'article 60 vise donc à éviter la mise à mal de l'activité économique agricole.
Notre collègue Morel-A-L'Huissier pourrait tout aussi bien que moi défendre cet amendement. Il faut supprimer l'article 60. Pourquoi ? Parce que, monsieur le ministre, nous nous trouvons dans un univers concurrentiel, parce que les Allemands sont en train de nous damer le pion dans le secteur des asperges, dans celui de la fraise… Ils bénéficient en effet d'un coût du travail plus faible.
Vous avez toujours refusé cette évidence. Or vous commencez de l'admettre si j'en juge par les dépêches de l'AFP qui annoncent que le Gouvernement serait en train de prendre des décisions très importantes en matière de coût du travail.
On doit d'autant plus maintenir le dispositif en vigueur pour l'emploi saisonnier que vous avez supprimé les avancées que nous avions obtenues pour l'emploi permanent. Rappelez-vous les amendements Reynès, financés en particulier par la fameuse taxe sur les sodas, que vous avez supprimée. Maintenons donc au moins ce qui existe pour l'emploi saisonnier, ce que vous ne faites que très partiellement en toisant les salaires, en faisant en sorte qu'ils restent bas alors que nombre de ces travailleurs effectuent des heures supplémentaires et parviennent à gagner un peu plus que le SMIC – heureusement pour eux et pour la filière.
Il est donc indispensable de supprimer l'article 60 qui est un hold-up de plus au détriment de l'emploi dans l'agriculture. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.)
J'invoquerai d'autres raisons que celles déjà avancées pour supprimer l'article 60. La filière viticole, depuis des années, vit justement parce que nous avons pris l'initiative des contrats-vendange, qui ont permis de maintenir une certaine compétitivité et d'éviter le recours à des entreprises étrangères pour permettre à des Français de trouver un travail agricole occasionnel.
Un certain nombre d'exploitations se sont ainsi organisées et cet article 60 représente un coup de bambou puisque l'on revient, dans une conjoncture difficile, sur la mise en oeuvre de ces moyens qui permettent à nos entreprises de survivre. Dans un contexte de crise de l'emploi, je ne vois pas comment on pourrait ne pas donner à l'agriculture les mêmes moyens que ceux qu'on essaie de donner à d'autres secteurs.
L'article 60, au surplus, qui s'appliquerait dans des territoires ruraux, pénaliserait les employeurs qui s'efforcent de fidéliser une main-d'oeuvre saisonnière nécessitant des compétences particulières ; il constitue ainsi un frein redoutable au recrutement de salariés, au profit de solutions alternatives telles que le coup de main familial ou la prestation de services externalisée.
Dans un contexte de crise où l'emploi est particulièrement menacé, on ne peut pas faire le choix d'une politique qui mettrait des milliers d'entreprises en difficulté, notamment dans le secteur agricole, où se maintiennent encore des activités importantes.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l'amendement n° 139 .
Je ne reviendrai pas sur les motifs de suppression de l'article 60, qui modifie le périmètre de l'exonération dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles. Vous avez l'habitude de considérer la répétition comme un moyen pédagogique. Nous nous livrons donc à cet exercice aujourd'hui.
Dans les secteurs du maraîchage et de l'horticulture périurbaine typiques de l'Ile-de-France, l'article 60, s'il n'est pas supprimé, constituera un coup fatal pour de nombreuses exploitations. L'agriculture périurbaine doit déjà subir la pression foncière, le coût des logements pour les saisonniers, sans compter différents types de maraudage, de non-respect des exploitations. L'application de cet article entraînera la disparition d'un certain nombre d'exploitations du monde périurbain. C'est pourquoi je demande moi aussi la suppression du dispositif envisagé.
Monsieur le ministre, près de 500 arboriculteurs, viticulteurs, maraîchers et horticulteurs ont manifesté hier devant l'Assemblée contre votre projet de revenir sur les exonérations de charges patronales pour les travailleurs occasionnels. L'article 60 ampute le dispositif d'exonération de cotisations patronales mis en place par l'ancienne majorité pour l'emploi des travailleurs occasionnels agricoles.
Vous voulez d'une part baisser le plafond d'exonération à 1,5 SMIC au lieu de 3, avec une dégressivité dès 1,25 SMIC contre 2,5 aujourd'hui. D'autre part, vous voulez exclure de l'exonération les cotisations pour les accidents du travail et les maladies professionnelles qui se montent à 3,5 % en moyenne dans le secteur agricole. Dans un contexte de crise menaçant particulièrement l'emploi, une mesure qui mettrait des milliers d'entreprises en difficulté ne semble pas vous déranger. Louis Gallois a encore redit hier combien il était nécessaire de redonner de la compétitivité aux entreprises ! C'est bien ce qui avait justifié l'instauration de cette exonération.
Nous savons pertinemment que le dispositif d'exonération des charges sociales atteint aujourd'hui ses limites et qu'il faut repenser en profondeur le financement de la protection sociale en France. À l'heure où le Haut conseil du financement de la protection sociale, installé à l'hôtel Matignon le 26 septembre dernier, commence tout juste ses travaux sur l'évolution du financement de la protection sociale, il est plus sage de maintenir en l'état dans le projet de loi de finances pour 2013 les exonérations de charges patronales et de cotisations sur les accidents du travail et maladies professionnelles pour les travailleurs saisonniers. C'est pourquoi, monsieur le ministre, je propose la suppression de l'article 60 et vous réitère mon invitation à venir participer prochainement à une table ronde dans notre beau département de la Loire.
La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l'amendement n° 172 .
Je crois qu'il faut préserver l'exonération dont bénéficient les employeurs de saisonniers agricoles. Je pense en particulier aux maraîchers et aux horticulteurs, notamment dans ma circonscription sur le littoral dunkerquois, qui font appel à une main d'oeuvre saisonnière importante. Ces producteurs sont en secteur frontalier et subiront une nouvelle distorsion de concurrence avec nos voisins, dont le coût du travail est inférieur au nôtre. Cela sera préjudiciable à la profession.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement n° 179 .
Monsieur le ministre, en juillet dernier, vous et votre majorité avez porté un coup dur à l'économie de notre pays dans son ensemble en supprimant l'exonération des heures supplémentaires. Cela a été un véritable coup de poignard pour les grandes entreprises, pour les PME et pour les TPE, ainsi qu'une véritable supercherie pour les Françaises et les Français. Les neuf millions d'entre eux qui sont concernés et ont reçu leurs feuilles de paie des mois de septembre et octobre comprennent maintenant le véritable fondement de cette mesure.
Vous vous apprêtez à reproduire avec l'article 60 exactement la même chose dans le secteur agricole, à la compétitivité duquel vous vous attaquez. Les exploitations qui sont les plus grosses employeuses de main-d'oeuvre et qui sont soumises à la plus forte concurrence internationale sont particulièrement visées. Pour cette raison et comme l'ont fait nombre de mes collègues UMP, j'ai déposé cet amendement de suppression. Je suis certain que vous nous rejoindrez pour mettre un terme à ces coups de poignard successifs portés à l'économie de notre pays depuis le début de la nouvelle législature.
Monsieur le ministre, chers collègues, le coût du travail horaire est de 13 € en France pour les travailleurs saisonniers, d'environ 5 € en Espagne et au Portugal. Nous avons perdu en quinze ans 5 000 hectares de fraises en France quand l'Allemagne en gagnait 8 000.
Le Vaucluse, que je représente, est le troisième département, après la Marne et la Gironde, bénéficiaire de ces exonérations de cotisations agricoles. Parlons chiffres : il s'agit de 45 millions d'euros pour le seul Vaucluse, soit trois fois ce que les exploitants reçoivent au titre de la PAC. La FNSEA a fait un sondage auprès d'un tiers des entreprises agricoles du département, dont il ressort qu'une sur deux sera dans le rouge si vous adoptez cette mesure. Une sur deux ! Nous parlons ici d'une filière qui emploie 26 000 travailleurs saisonniers. C'est donc un sujet important ! Je vous fais remettre une pétition initiée par la FDSEA du Vaucluse et signée par 5 000 agriculteurs inquiets qui ont voulu protester, car il s'agit d'une question de vie ou de mort !
Après les pigeons, les poires ? Vous avez aujourd'hui décidé de virer votre cuti en augmentant la TVA. Cela montre bien que ce gouvernement n'est pas toujours mû par l'idéologie ! Montrez-nous donc que vous êtes capable d'appliquer le rapport Gallois, y compris à l'agriculture ! Soyez un ministre du développement durable ! C'est bien de protéger les loups, mais n'oubliez pas les humains ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Quelle contradiction entre le contenu du rapport Gallois, dont nous avons tous pris connaissance hier, et le séminaire gouvernemental qui se tient actuellement à Matignon ! Oui, le coût du travail, ou plutôt de production, est un vrai problème en France !
Oui, le coût du travail doit être allégé pour conforter la compétitivité ! Au moment même où le Premier ministre s'efforce de digérer le rapport Gallois avec force contorsions, vous allez une fois de plus alourdir la charge de travail pour nos agriculteurs et nos exploitants agricoles. Quel message contradictoire ! Les Français ne comprennent plus la position économique du Gouvernement, qui tue le pouvoir d'achat en supprimant les heures supplémentaires défiscalisées et tue la compétitivité de l'un des seuls secteurs excédentaires de notre économie, puisque le secteur agricole réalise 11 milliards d'euros d'excédents. C'est ce secteur que vous allez tuer avec cet article dont nous demandons la suppression. Mes chers collègues, soyez clairvoyants ! Je sais qu'au sein de votre majorité une grande partie d'entre vous est d'accord avec nous. Supprimez donc cet article ! Suivez-nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Avec nous ! Avec nous !
Plusieurs députés du groupe SRC. Votre bilan ! Votre bilan !
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l'amendement n° 214 .
Mes chers collègues, vous avez entendu hier les agriculteurs, viticulteurs et vignerons venus de toute la France manifester pour réclamer l'abrogation de cet article 60. Le dispositif que vous voulez sinon supprimer du moins sérieusement réduire a fait la preuve de son efficacité ces dernières années en diminuant le coût des salaires. Vous le savez, l'agriculture française est soumise à une concurrence féroce de nos voisins européens et du nord de l'Afrique. Nous finançons les productions agricoles de ces pays, luttant donc contre nos propres producteurs. Les charges sociales très importantes qui pèsent sur notre agriculture grèvent lourdement sa compétitivité et lui font perdre des parts de marché au profit de ses concurrents.
Si cet article est adopté, cela conduira à réduire le nombre d'emplois saisonniers en augmentant le coût du travail pour les agriculteurs employeurs. Dans le contexte de crise économique où nous sommes et alors que le chômage ne fait qu'augmenter, il convient de protéger les secteurs créateurs d'emplois, notamment l'agriculture, par la diminution du coût des emplois saisonniers. Je crois que le bon sens commande de supprimer l'article 60 et j'ose espérer que vous le ferez.
Monsieur le ministre, j'apprends à vous connaître et je suis intimement convaincu que vous êtes animé par un bon état d'esprit et par la bonne foi. Je suis non moins intimement convaincu que cet article 60 est fâcheux au moment même où le Gouvernement fait des annonces tournant autour des questions de compétitivité, de coût du travail en France et de transfert des charges et des cotisations qui pèsent aujourd'hui sur la production vers la consommation. J'en veux pour preuve l'ajustement du taux de TVA prévu pour 2014, alors que la TVA sociale vient d'être supprimée. Vous voyez que vous y revenez beaucoup plus vite que vous ne le pensiez !
La suppression de l'exonération de cotisations est manifestement exagérée puisque cela représente pour 2013 91 millions d'euros de charges supplémentaires et 135 millions d'euros en 2014. Vous et votre ministre délégué à l'industrie agroalimentaire passez votre temps dans les régions à lancer les assises de l'agriculture et de l'agroalimentaire en disant que vous allez donner aux agriculteurs français les armes pour lutter sur la scène européenne et internationale. Nous, nous consacrons notre temps à mobiliser autour de ces questions d'harmonisation sociale et environnementale. Et vous voilà pris, avec ce budget, le doigt dans le pot de confiture, supprimant massivement l'exonération de charges sociales, ce qui est très grave pour la compétitivité de l'agriculture française ! Hier soir, monsieur le ministre, j'ai pourtant trouvé que vous aviez donné à la politique agricole une ligne, contrairement à certains membres du Gouvernement et à son chef.
Je souhaite que vous nous disiez clairement quelle est votre ligne politique sur la question de la compétitivité de l'agriculture française.
Mes chers collègues, comme vous le savez, j'avais déposé un amendement identique en commission. Il avait été repoussé après un long débat. Avant d'entrer dans le détail, je voudrais resituer le problème. Le débat progresse au sein de la classe politique française, puisque même nos collègues de la majorité reconnaissent en grand nombre qu'il y a un problème de coût du travail en France.
Gardons-nous de croire que la compétitivité est simplement un problème de coût du travail. Ce n'est qu'un élément parmi d'autres.
Pour l'agriculture, je voudrais vous rappeler ce qui a été fait jusqu'à aujourd'hui, avant que nous ne votions. Il y a eu des mesures spécifiques et des mesures générales. Il y en a une que tout le monde a oubliée, c'est le contrat vendange. En étant l'auteur, je me permets de rappeler que ça ne coûte pas cher, 19 millions de mémoire, et beaucoup de filières dont la filière fruits et légumes souhaiteraient son extension. C'est en outre une simplification.
Excellent !
Nous avons pris une deuxième mesure, celle dont nous discutons, qui a été votée en 2010 et porte sur le travail occasionnel. Elle a beaucoup mieux marché qu'on ne le croyait d'un point de vue économique mais a eu une conséquence sociale négative qui est la précarisation de la main-d'oeuvre agricole. Beaucoup d'exploitants ont transformé des CDD, voire des CDI, en travail occasionnel, il faut en être conscient. Cela a eu un autre effet socialement négatif, la trappe aux bas salaires, phénomène dont on parle depuis des années en commission des finances. C'est d'ailleurs l'un des problèmes posés par le texte gouvernemental, qui accentue ce phénomène. Augmenter les salaires coûte en effet à l'exploitant beaucoup plus que l'exonération proportionnelle, puisqu'il en résulte des cotisations sociales.
Puis l'amendement Reynès-de Courson, qui permettait de rétablir un équilibre entre les CDI et le travail occasionnel et évitait la précarisation a été adopté. Un nouveau dispositif, dans la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, le remplace.
Parmi les mesures générales, personne n'est revenu sur les allègements Fillon. En revanche, le Gouvernement a supprimé en juillet les exonérations sur les heures supplémentaires et la TVA anti-délocalisation, qui, je le rappelle, ne portait que sur 13 milliards – 11 milliards financés par la TVA et 2 milliards par la CSG.
Les hasards du calendrier parlementaire veulent que nous discutions de ce sujet alors même que le Gouvernement vient d'annoncer de nouvelles mesures dont l'orientation me réjouit ! Il s'apprête à proposer un dispositif de réduction de 6 % des charges, avec un plafond qui, aux dernières nouvelles, se situerait aux alentours de 1,5 SMIC, pour un coût total de 20 milliards – 10 milliards financés par l'économie et 10 milliards par une hausse de la TVA. Je ne suis pas de ceux qui lanceront une polémique sur cette décision.
Je me permets de le dire car c'est dans ce contexte que l'article 60 vient en débat.
J'ai dit au ministre et à nos collègues de la majorité, qui ne sont pas insensibles, je crois, au problème de la précarisation de l'emploi dans l'agriculture, que, des deux parties de l'article, la première – qui supprime l'exonération de cotisations sociales sur les accidents du travail – pouvait faire l'objet d'une discussion. Nous sommes, dans l'opposition, favorables à la responsabilisation des entreprises en matière d'accidents du travail, dont les taux varient de façon extraordinaire d'une sous-filière à l'autre. Cette suppression ne me choque pas.
Mais le problème central – la réduction de l'exonération de cotisations sociales – demeure. Je pense, monsieur le ministre, qu'il y a eu trop de zigzags gouvernementaux depuis le mois de juillet. J'espère vous voir revenir dans le droit chemin, celui que nous avions réussi à tracer après bien des débats, y compris dans l'ancienne majorité : il faut être courageux et prendre des mesures fortes et impopulaires. Je me réjouis que le Gouvernement aille dans le bon sens.
En attendant, et même si les mesures annoncées s'appliquent au travail occasionnel, je pense que vous êtes allé trop loin pour ce qui est de l'agriculture. Vous êtes descendu trop bas dans l'application de la mesure et, s'agissant de la précarisation entre CDI et travail occasionnel, vous avez commis une erreur, non seulement en termes économiques, mais en termes sociaux.
En tant que rapporteur spécial, j'étais favorable à la suppression de l'article – ou du moins de sa seconde partie. La commission a rejeté ces amendements, mais elle m'a demandé de déposer un amendement pour atténuer la descente de 2,5 à 1,5 SMIC. En tout état de cause, je pense qu'il est nécessaire que vous exposiez la stratégie globale du Gouvernement en matière de compétitivité, puisque les décisions sont tombées avant que nous ne votions.
Je constate que l'opposition est parvenue à adopter une position à peu près cohérente en cette fin de matinée sur un seul sujet, celui des exonérations de cotisations sociales pour le travail saisonnier. Cela ne va pas sans les exagérations inséparables de la logique d'opposition – pour le coup stérile –, puisque certains ont pu parler de centaines de milliers d'euros.
Je veux en revenir au fond. Qu'avez-vous fait lorsque vous êtes arrivés aux responsabilités en 2007 ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez fait voter une loi, dite du bouclier fiscal, qui consistait à donner des chèques à des personnes qui n'en avaient pas besoin.
Ce n'est pas le problème. C'est votre budget dont nous discutons : assumez-le !
Aujourd'hui, vous vous réveillez pour nous parler des petits salaires. Il est temps que vous réfléchissiez un peu à ce que vous avez fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ce gouvernement a pris des décisions dès son arrivée.
Les objectifs sont clairs, à la fois sur l'agriculture – nous en avons discuté hier soir et toute la matinée – et sur la question des exonérations. C'est bien parce que j'ai compris que le travail occasionnel et saisonnier était un sujet d'importance que nous avons maintenu une ligne budgétaire similaire à celle que vous aviez votée en 2011. Vous êtes en contradiction avec vous-mêmes !
Nous avons fait le choix de considérer qu'une politique de la compétitivité était nécessaire pour l'agriculture, en particulier pour le travail saisonnier. Le Gouvernement a pris cette décision cinq mois après sa formation, quand vous avez attendu plus de quatre ans pour agir sur la compétitivité. Il s'agit bien d'une ligne stratégique ; nous savons que nous devons traiter cette question.
S'agissant des plus petits salaires, il est frappant de vous voir vous réveiller aujourd'hui. Vous venez expliquer qu'il y aurait des salaires de saisonniers égaux à 3 SMIC… Je sais bien qu'une pétition de la FDSEA du Vaucluse, que vous avez citée abondamment, en fait mention. Mais à qui allez-vous le faire croire ? À moi, ministre de l'agriculture – et des agriculteurs, pour répondre à une question qui m'a été posée ? Aux députés présents ?
Vous intégrez dans ces rémunérations les heures supplémentaires, les primes. On est dans un autre débat que celui sur les bas salaires : vous défendez une position qui consiste à tout intégrer, afin d'obtenir des exonérations de cotisations sociales. Vous-mêmes n'y aviez pas pensé puisque, lorsque vous avez pris cette mesure en loi de finances, vous aviez prévu un financement de 506 millions d'euros – que je reconduis. Nous avons constaté sur le terrain qu'il y avait eu des dépassements. Il nous a fallu les corriger, et renflouer la MSA, que vous aviez oubliée, car la solidarité, ça n'est pas votre priorité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Non, je ne change pas de ligne ! Vous avez voté une mesure d'allègement des charges sur le travail permanent, que M. Le Fur a évoquée, mais elle n'a pas été appliquée. Cela ne vous a-t-il pas posé question, alors que le Premier ministre de l'époque, François Fillon, avait dit qu'elle serait mise en oeuvre dès le début de 2012 ? En revanche, la taxe sur les sodas a été payée et cette recette nous permet de rééquilibrer une partie des comptes de la MSA. C'est bien de lutter contre la consommation de sucre, mais ne dites pas que vous avez mis en oeuvre cette mesure ! Vous ne vous êtes jamais posé la question de savoir pourquoi. Vous ne vous êtes pas beaucoup mobilisés à l'époque !
Où étiez-vous ? Pourquoi ces crédits, qui étaient inscrits, n'ont-ils pas été dépensés ? C'est à moi que vous venez poser la question aujourd'hui ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Posez-la à M. Fillon, à M. Le Maire, et vous aurez la réponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Quand on veut débattre, il faut des arguments et de la sincérité. Vous en avez manqué ce matin. Pour répondre à la question qui m'a été posée : je n'ai pas changé d'objectifs. J'ai fait de la jeunesse et de l'installation une priorité. J'ai fixé aussi des objectifs en termes de développement durable et d'élevage : 474 millions d'euros y sont consacrés.
Vous avez cité de nombreux chiffres concernant l'exonération des cotisations sociales. Je vais répéter ceux qui ont été donnés par la MSA. Ces exonérations représentent, pour une exploitation moyenne, 16 000 euros, non pas sur la base de ce que vous avez voté, mais selon la réalité constatée. Avec la mesure que nous proposons, le montant des exonérations serait de 14 600 euros.
Et vous me donnez des leçons, vous m'apportez des pétitions pour m'expliquer qu'entre 16 000 et 14 600 euros se jouent la vie ou la mort ? Pouvez-vous, pour une fois, être sincères, et présenter des arguments convaincants, au lieu de pratiquer une opposition stérile et quelquefois ridicule ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
S'il le faut, nous le répéterons, nous ferons de la pédagogie. Pour vous et pour tous les agriculteurs.
Ce n'est pas une question de moyenne, les réalités sont diverses. C'est absurde !
Ce débat s'est déroulé dans d'excellentes conditions, jusqu'au moment où vous avez laissé penser que la seule question qui était posée était celle du TO-DE. Vous avez alors usé de toute une série d'arguments qui ne sont pas valables. Il y a une réduction de l'exonération des cotisations sociales. Il est inacceptable de vous entendre dire que c'est une histoire de vie ou de mort.
Vous avez dit également que l'on emploierait des salariés pour le travail saisonnier à 3 SMIC. Vous-mêmes n'y croyez pas !
À l'article 60, nous avons fait une proposition réaliste, qui permettra aux entreprises et aux exploitations d'assurer leur pérennité et leur compétitivité. Cela entre dans le cadre des propositions exposées ce matin. Voilà une politique cohérente, qui s'adresse aux Français, qui pose les bonnes questions, et ce après cinq mois au pouvoir. Voilà pourquoi le Gouvernement ne peut accepter ces amendements. Il continuera à défendre ce budget, avec une haute ambition pour l'agriculture et son avenir, la jeunesse. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
En réponse, deux orateurs du groupe UMP pourront s'exprimer. La parole est à Mme Claude Greff.
Après son exposé d'un grand lyrisme, je veux dire au ministre qu'il devra cesser un jour de nous demander ce que nous avons fait. Assumez votre budget pour 2013 : c'est vous qui l'avez élaboré !
Ce n'est pas, selon vous, une question de vie ou de mort. Mais pour un agriculteur, confronté à une telle difficulté, c'est une question de vie ou de mort de l'entreprise ! Pour les salariés, c'est une question de vie ou de mort ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ceux-ci ne demandent qu'une chose, travailler, et vous, vous faites le maximum pour que personne ne puisse travailler dans notre pays. Vous vous êtes déjà attaqués aux familles, puis aux artisans et aux commerçants. Vous vous en prenez aujourd'hui aux agriculteurs ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Après ce tour de passe-passe, il vous faudra tenir un langage de vérité. C'est ce que nous attendons. Croyez-moi, nous ne faisons pas erreur. Nous ne sommes pas engagés dans un combat politique, de droite ou de gauche, nous sommes en train de travailler pour l'agriculture, pour l'avenir de notre pays, pour permettre simplement aux hommes et aux femmes qui travaillent la terre de pouvoir en vivre.
Vous pouvez bien être lyriques mais, dans vos communiqués de presse, vous vous félicitez du maintien de la dotation, au titre de l'exonération des charges patronales.
Vous vous vantez de maintenir, pour 2013, la dotation de 2012, qui est en effet strictement égale en valeur puisque l'engagement de dépenses est de 506 millions d'euros. En revanche, vous ne dites pas que cette mesure va engendrer une charge supplémentaire de plus de 100 millions d'euros pour les employeurs agricoles. Vous ne tenez pas un langage de vérité, mais les agriculteurs ont compris votre tour de passe-passe. Du reste, s'ils manifestent, c'est parce que vos mesures ne les satisfont pas.
Monsieur le ministre, descendez de votre piédestal et regardez en face la réalité que vivent les hommes et les femmes qui travaillent la terre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, le journal L'information agricole du Rhône titrait cette semaine : « L'article 60 du projet de loi de finances pour 2013 : une calamité agricole annoncée d'avance ». La décision du Gouvernement d'inscrire dans son projet de loi de finances pour 2013 une mesure qui ampute de plus de 20 % les exonérations de charges patronales prévues pour les salariés saisonniers a du mal à passer et suscite une forte mobilisation des agriculteurs, qui étaient présents hier devant l'Assemblée nationale pour contester cet article et exprimer leur ras-le-bol. Auraient-ils tort ? N'ont-ils rien compris ? On peut se poser la question, lorsqu'on vous entend affirmer que cette mesure est satisfaisante. Savez-vous que, si celle-ci était maintenue en l'état, 2 000 emplois disparaîtraient immédiatement en Rhône-Alpes et près de 8 000 seraient en sursis.
Hier après-midi, M. Gallois a rendu son rapport sur la compétitivité. Une de ses propositions phares est la baisse de 30 milliards d'euros, soit 1,5 point du PIB, des cotisations sociales. Ces baisses ne cibleraient d'ailleurs pas que les bas salaires ; elles s'appliqueraient également aux salaires allant jusqu'à 3,5 SMIC. Or l'article 60 que la majorité s'apprête à voter va renforcer la distorsion de concurrence liée à l'écart entre les coûts du travail qui existe avec les autres pays de l'Union européenne. Vous savez, monsieur le ministre, que l'un de nos principaux concurrents dans le domaine agricole est l'Espagne. Dans ce pays, le coût horaire est de six euros, alors qu'en France il est de onze à douze euros et sera, demain, avec l'application de l'article 60, de quatorze euros environ.
Il est encore temps de changer d'avis et d'accepter les amendements de suppression de l'article 60 que vous proposent l'ensemble des groupes de l'opposition. Il y va de la pérennisation de nos filières viticoles, arboricoles, horticoles et maraîchères. Il y va de la préservation de l'agriculture française ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Sur le vote des amendements de suppression de l'article 60, je suis saisi par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
M. Le Fur m'a demandé la parole pour un rappel au règlement.
Je suppose, monsieur Le Fur, qu'en tant que vice-président vous serez attentif à ce que votre intervention soit un véritable rappel au règlement.
Absolument, monsieur le président. Il se fonde sur l'article 58, alinéa 1.
Monsieur le ministre, dans votre réponse, longue et argumentée, à aucun moment vous n'avez évoqué la concurrence…
Je ne peux pas vous laisser poursuivre, monsieur Le Fur. Ce n'est pas un rappel au règlement.
Oui, mais nous étions convenus que deux orateurs de votre groupe interviendraient, et M. le rapporteur spécial souhaite également s'exprimer.
La parole est à M. Germinal Peiro.
Avant qu'il ne soit procédé au vote, je souhaiterais faire quelques remarques.
Tout d'abord, j'ai le sentiment que, dans l'opposition, on n'est guère conscient de la situation dans laquelle se trouve notre pays (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI) : nous examinons un budget contraint. J'ajoute que certains semblent avoir oublié l'état dans lequel se retrouve l'agriculture française après dix ans de majorité de droite. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Faut-il leur rappeler qu'en dix ans le nombre des exploitations agricoles dans notre pays a régressé de 26 % : un quart des exploitations ont disparu ? Faut-il leur rappeler que notre pays est passé du premier au troisième rang des exportateurs agricoles et agroalimentaires en Europe ? Faut-il leur rappeler que 10 % des agriculteurs de notre pays sont bénéficiaires du RSA ? Voilà le bilan de votre politique, chers collègues de l'opposition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
S'agissant des exonérations sur les salaires des travailleurs permanents, M. le ministre a fort justement rappelé que cette mesure n'a pas été mise en place par le gouvernement précédent.
Je vous défie de me présenter un seul agriculteur qui a pu bénéficier d'une exonération de charges sur les salaires de travailleurs permanents.
Et, si elle n'a pas été appliquée, c'est parce que M. Fillon lui-même savait qu'elle ne pouvait pas l'être, puisqu'elle était euro-incompatible. Voilà la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Cette mesure n'est qu'un chiffon que vous avez agité pendant la campagne ; elle n'a aucune réalité.
Par ailleurs, vous tentez de faire croire que nous supprimerions les exonérations sur les salaires des travailleurs occasionnels. S'agissant des exonérations de cotisations accidents du travail, M. de Courson, qui est un homme honnête,…
…a rappelé qu'aucune exonération, quel que soit le secteur d'activité, ne porte sur ces cotisations. Il n'est donc pas raisonnable d'envisager une mesure de ce type pour l'agriculture.
Pour le reste, dois-je rappeler que le Gouvernement a maintenu le même montant d'exonérations – 506 millions d'euros – que celui que vous aviez fixé pour 2012 et, surtout, que, selon les chiffres de la MSA, 91 % des contrats vont bénéficier des exonérations sur les salaires des travailleurs occasionnels : seuls 9 % en seront exclus ? Il est donc injuste de dire qu'il s'agit d'unecatastrophe annoncée.
Je terminerai en évoquant deux points. Tout d'abord, j'estime que nous pourrions nous rassembler pour soutenir le ministre, qui défend une nouvelle répartition, plus juste, des aides de la PAC, nouvelle répartition que nous ne vous avons pas beaucoup entendus réclamer ces dix dernières années, mes chers collègues de l'opposition. Ce sont en effet les filières les plus pourvoyeuses de main-d'oeuvre qui perçoivent le moins d'aides au titre de la PAC. Enfin, comment ne pas comprendre que le rapport Gallois est un véritable réquisitoire contre la politique que vous avez menée pendant dix ans ?
Avant que nous ne votions (« Vite, vite ! » sur les bancs des groupes UMP et UDI), je voulais préciser que la proportion des contrats exclus du bénéfice des exonérations est, non pas de 9 %, mais de 22 %.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Votons, votons !
Monsieur le président, on sent bien que l'opposition (Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI)…
Silence, s'il vous plaît : le président de la commission a droit à la parole.
…n'a pas l'intention d'écouter les arguments qui sont développés, que l'agitation qui règne dans l'hémicycle l'empêche d'entendre la vérité qui vient d'être exprimée longuement par M. le ministre et par Germinal Peiro. Il serait donc souhaitable – mais je ne sais pas si j'ai le droit de faire une telle demande – que nous puissions suspendre la séance (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations prolongées sur les bancs des groupes UMP et UDI), afin d'apaiser les esprits et de retrouver le chemin de la sérénité dans laquelle l'Assemblée nationale doit conduire ses travaux.
En tant que président de la commission, je vous demande donc une suspension de séance, monsieur le président. (Huées et claquements de pupitres sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Je demande une suspension de séance, monsieur le président. (Mêmes mouvements.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Le scrutin est annoncé !
Article 60
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à douze heures trente.)
Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l'article 58, alinéa 1, de notre règlement. Je ne sais pas à quel jeu vous jouez, mais on ne peut pas accepter un tel mépris du règlement, une telle forfaiture ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous vous êtes assis sur le règlement de notre assemblée ! Jamais on n'autorise une suspension de séance lorsqu'un vote a été annoncé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Vous étiez minoritaires, chers collègues, parce que les sujets agricoles ne vous intéressent pas, parce que vous les traitez par le mépris ; c'est pourquoi vous avez accordé une suspension de séance, monsieur le président. Votre attitude étant inacceptable, je demande la réunion immédiate de la Conférence des présidents et la venue dans l'hémicycle du président de notre assemblée. Nous ne pouvons pas continuer à siéger avec un président qui méprise à ce point notre règlement ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Jacob, je ne vous laisserai pas accuser la présidence de ne pas appliquer le règlement. Vous savez très bien qu'il y a une différence entre l'annonce d'un vote par scrutin public et l'ouverture d'un vote par scrutin public. (Tumulte. – Les députés du groupe UMP, debout, invectivent le président.) En l'occurrence, la plupart des députés de vos rangs connaissent très bien le règlement pour en avoir usé et abusé lorsqu'ils étaient dans la majorité, et savent donc parfaitement qu'il est possible de suspendre la séance après l'annonce d'un scrutin public, du moment qu'il n'a pas été ouvert. (Mêmes mouvements.)
La parole est à M. Bruno Le Roux.
Je veux dire à M. Jacob qu'il est absolument choquant d'employer de tels procédés, en mettant ainsi la présidence en cause. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Le débat doit se tenir de façon sereine, ce que ne permettent pas, depuis de nombreuses semaines, les excès de ceux qui représentent actuellement l'opposition. Alors que, sur ce budget important qu'est l'agriculture, nous avions un débat d'une excellente tenue, ils font preuve d'une volonté absolument scandaleuse de pourrir le débat politique ! (Les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent.)
Par ailleurs, les attaques portées à l'encontre de la présidence ne sont pas dignes des propos qui doivent être tenus dans notre hémicycle. Afin de calmer l'opposition, je vous demande une suspension de séance de dix minutes, monsieur le président. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, je demande une réunion exceptionnelle de la Conférence des présidents. La situation est inacceptable et, en l'état actuel des choses, nous refusons de continuer à participer aux travaux de notre assemblée. Par ailleurs, nous demandons que le président de l'Assemblée vienne dans l'hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
À la demande du président du groupe socialiste, je vais suspendre la séance pour dix minutes environ.
Rappels au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à douze heures quarante-sept.)
La séance est reprise.
Mes chers collègues, pour faire droit à la demande du président du groupe UMP, M. Christian Jacob, j'ai joint le président de l'Assemblée nationale. La Conférence des présidents est convoquée immédiatement.
Rappels au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à treize heures vingt, sous la présidence de M. Claude Bartolone.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Ah ! Des explications !
Mes chers collègues, je rappelle que je suis saisi par le groupe UMP d'une demande de scrutin public sur le vote des amendements de suppression de l'article 60.
Une suspension de séance nous a permis de réunir la Conférence des présidents afin de fixer à nouveau la règle du jeu pour ce qui concerne les scrutins publics. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Cette interprétation plus précise vous sera communiquée par les présidents de groupe au cours de cet après-midi. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. L'Assemblée nationale n'est pas un jeu !
Un peu de calme, s'il vous plaît ! (Protestations persistantes sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Ce n'est pas un jeu !
Nous avons réuni la Conférence des présidents pour préciser les modalités de fonctionnement de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.) Nous n'avons pas fixé une nouvelle règle du jeu, nous avons simplement précisé l'application du règlement !
Plusieurs députés du groupe SRC. Très bien !
Dorénavant, il est acquis que, dès lors que l'ouverture du scrutin aura été annoncée, il ne sera plus possible d'interrompre la procédure de vote par une suspension de séance. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je rappelle à certains de nos collègues, qui semblent plus prompts à recourir à leur voix qu'à leur intelligence, que cette règle a déjà été appliquée dans cette assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je vous renvoie à nombre de débats qui ont eu lieu dans l'hémicycle.
Je vais maintenant mettre au voix l'ensemble des amendements de suppression de l'article 60.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 277
Nombre de suffrages exprimés 277
Majorité absolue 139
Pour l'adoption 99
contre 178
(Les amendements de suppression ne sont pas adoptés.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Seconde partie de la loi de finances pour 2013 (n°s 235, 251).
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures vingt-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron