La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l’article 58, alinéa 1, du règlement de notre assemblée. Un grave incident s’est en effet produit ce matin. Si l’unité nationale s’affiche aujourd’hui sur nos écrans de télévision à travers de forts beaux gestes, dans l’hémicycle, le Gouvernement et la majorité portent en catimini des coups bas à l’opposition, qui plus est sur un texte consensuel, en faisant examiner les cinq premiers articles de celui-ci – il en compte quatorze – dix minutes avant la suspension de la séance, sans laisser aux députés de l’opposition le temps de gagner l’hémicycle, puisque le texte devait être examiné à quinze heures.
Pour grandiloquentes que soient les déclarations en faveur du débat démocratique et du consensus républicain, surtout lorsqu’il s’agit de lutte contre la délinquance et le terrorisme, force est de constater que ces déclarations ne servent que des discours électoraux, qui sont bafoués par les actes de la majorité et du Gouvernement. Voilà pour la forme.
Il y a plus grave : sur le fond, ce procédé a tout simplement permis d’empêcher tout débat sur les cinq premiers articles du texte, et d’examiner des amendements qui visaient par exemple à permettre aux agents des services de sécurité de la SNCF et de la RATP de procéder à des fouilles, à des palpations de sécurité, et, en cas de refus d’obtempérer, d’empêcher l’accès au réseau de transport, ou à pouvoir enquêter et, le cas échéant, évincer des fonctions sensibles, au regard du risque sécuritaire, qui n’a jamais été aussi élevé, outre les personnes en cours de recrutement ou d’affectation que visait déjà l’article 3 bis, les personnes déjà affectées à ces postes, ou encore à autoriser les agents de sécurité des transports, lorsqu’ils sont mis à disposition d’un officier de police judiciaire, à contrôler l’identité des voyageurs, respectant ainsi, d’ailleurs, la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Voilà pour mes amendements.
Ceux d’Éric Ciotti prévoyaient quant à eux de supprimer la condition de consentement à la fouille des bagages d’une voiture particulière, disposition indispensable à la sécurité des transports – peut-être y reviendrons-nous tout à l’heure.
Vous avez préféré censurer le débat, sans laisser à l’opposition le seul droit qui lui reste, celui de défendre ses amendements, sans doute parce que vous êtes pleinement conscients des insuffisances majeures de cette proposition de loi. Quel sectarisme !
Je suis désolé que vous le preniez ainsi, monsieur Goujon. Il n’y a pas eu de grave incident, ni de manoeuvre de la part de la majorité : il y a eu une grave absence des députés de l’opposition. Je le regrette, car nous ne nous sommes jamais dérobés au débat sur ces sujets – je vous renvoie aux comptes rendus des débats en commission, qui ont été très approfondis.
Il n’a jamais été dit que l’examen de cette proposition de loi aurait lieu à quinze heures. Comme tout le monde, nous avons campé dans les couloirs de l’Assemblée en attendant que l’examen des trois textes précédents soit achevé. Nous pensions d’ailleurs que ce serait beaucoup plus tôt. Lorsque c’est arrivé, il restait encore vingt minutes avant l’heure traditionnelle de suspension de la séance. Il semble que l’incident tienne plus de la difficulté de mobilisation que d’une quelconque manoeuvre de notre part ; je le dis à M. Goujon en toute sincérité. Personnellement, je ne me déroberai à aucun des débats que nous allons aborder sur le fond : il a raison, ils sont importants.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Le Gouvernement n’a qu’une seule obligation, monsieur Goujon : être à la disposition du Parlement lorsque celui-ci délibère. Il n’a évidemment – et c’est heureux – aucune possibilité d’influencer l’organisation des travaux. Comme le rapporteur, j’attendais depuis deux heures à quelques mètres de l’hémicycle, puisque j’ignorais quand s’achèverait l’examen des autres textes inscrits à l’ordre du jour, non seulement pour des raisons démocratiques, mais aussi par politesse, afin d’être présent au moment où l’examen du texte pourrait commencer. Vous pouvez le vérifier. Il n’y a donc eu aucune manoeuvre : le Gouvernement attendait, et nos travaux ont démarré dès que possible, conformément à ce qu’avait prévu la Conférence des présidents.
Il peut certes y avoir des difficultés dans les relations entre majorité et opposition, mais puisque nous essayons de faire du droit dans ce texte, considérons que la règle Nemo auditur propriam turpitudinem allegans peut aussi s’appliquer à ces relations. S’il y a eu des absences, qui peuvent avoir leurs justifications, il ne me semble pas raisonnable de rejeter la faute sur la majorité et le Gouvernement. Quoi qu’il en soit, les articles du texte sont plus ou moins répétitifs sur le fond, et le débat pourra donc avoir lieu.
La parole est à M. le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.
En tant que président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, je me dois de répondre à M. Goujon. Ainsi que l’a indiqué Gilles Savary, nous avons longuement dialogué en commission. Les discussions ont parfois été un peu serrées, notamment avec M. Darmanin, qui a été très assidu tout au long de nos débats. À aucun moment, que ce soit en commission ou dans l’hémicycle, la majorité n’a eu la volonté de fuir le débat ou de se comporter comme le laisse entendre M. Goujon.
Ce qui s’est passé ce matin devait arriver. La Conférence des présidents avait arrêté de manière très précise l’ordre du jour de l’Assemblée nationale pour aujourd’hui : l’examen de ce texte, commencé hier soir, devait se poursuivre après celui des trois textes – projet de loi de finances pour 2016, projet de loi de finances rectificative pour 2015 et projet de loi relatif à la santé – inscrits ce matin. Comme M. le secrétaire d’État et Gilles Savary, j’ai donc attendu, de manière à être présent lorsque ces articles seraient examinés. Le procès d’intention me paraît donc exagéré, et je tenais à le dire en tant que président de la commission.
L’incident est d’autant plus dommageable que nous avons eu un débat constructif en commission, où le rapporteur s’est tenu à la disposition des députés de l’opposition comme de ceux de la majorité. Vous en êtes témoin, monsieur le rapporteur : j’ai renoncé hier soir à défendre ma motion de renvoi en commission, puisque nous nous sommes abstenus sur le vote du texte en commission, faisant ainsi gagner au moins une demi-heure à notre assemblée, ce qui nous a permis, à la satisfaction de tous, de terminer la discussion générale.
Certes, le secrétaire d’État est à la disposition du Parlement, et aucun horaire n’avait été précisé. Mais convenez que reprendre l’examen du texte à une heure moins dix quand on sait qu’on va lever à treize heures pose tout de même un problème de politesse, surtout lorsqu’on examine cinq articles aussi rapidement. Aurait-il mieux valu que l’opposition ne se montre pas constructive et défende hier, tard dans la soirée, une motion de renvoi en commission absurde, puisque nous nous sommes abstenus en commission et que j’ai indiqué que nous étions prêts à voter le texte en séance publique si certains amendements étaient acceptés ? Nous ne sommes guère récompensés de notre approche constructive ou de notre politesse !
Il y a les paroles et il y a les actes, monsieur le secrétaire d’État. Il se trouve que ce matin, cinq articles ont été discutés en moins de dix minutes, et qu’il a fallu qu’un député de l’opposition demande une suspension de séance pour que l’on n’aille pas au terme de l’examen d’une proposition de loi présentée comme si importante. Nos débats auraient été plus constructifs si nous avions été davantage respectés, tout simplement par politesse.
Permettez-moi de rappeler quelques éléments. L’examen des articles de cette proposition de loi a en effet commencé à douze heures quarante-cinq. Le président de séance a souhaité, comme il en avait la faculté, mais non l’obligation, engager ce débat. Le Gouvernement et la commission étaient présents. L’ordre du jour avait explicitement prévu que l’examen de ce texte interviendrait à la suite de celui des autres. Tout cela était donc parfaitement licite.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs (nos 3109 rectifié, 3314, 3307).
Ce matin, l’Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’article 6.
La parole est à M. Gilles Savary, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour soutenir l’amendement no 53 rectifié .
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, pour donner l’avis du Gouvernement.
Favorable.
L’amendement no 53 rectifié est adopté et l’amendement no 19 rectifié tombe.
La parole est à M. Gilles Savary, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 93 .
Les alinéas 4 et 5 de l’article 6 visent à faire en sorte que les agents contrôleurs, qui sont agréés par le procureur de la République et doivent en principe travailler dans le ressort du tribunal de grande instance où est situé le siège de l’exploitant, puissent être missionnés pour intervenir dans d’autres départements si besoin est. Cela correspond une demande forte des exploitants. Il peut en effet être nécessaire de déplacer des personnels pour procéder à des opérations de contrôle de plus grande envergure. Néanmoins, nous avons constaté que la législation actuelle n’y faisait pas obstacle. Les alinéas 4 et 5 sont donc superfétatoires. C’est pourquoi la commission propose leur suppression.
Favorable.
L’amendement no 93 est adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
Cet amendement vise à autoriser les policiers et les gendarmes nominativement habilités à porter une arme à porter celle-ci en permanence en-dehors du service. Il est vrai que cette disposition est actuellement satisfaite par l’état d’urgence, mais nous souhaitons la pérenniser pour faire face à une menace terroriste qui ne disparaîtra pas avec la fin de l’état d’urgence. Ce serait d’ailleurs cohérent avec la faculté qui est accordée à ces personnes de voyager gratuitement sur l’ensemble du réseau transilien – même si le Gouvernement, qui en a été empêché par les syndicats de police, souhaitait remettre cet avantage en cause. Généraliser cette autorisation ne constituerait donc qu’une extension de la pratique actuelle.
J’émets un avis défavorable, pour une raison de fond que vous comprendrez bien. Nous faisons une loi de droit commun, et non une loi d’état d’exception. D’autres dispositifs permettent de mettre en oeuvre des dispositions d’exception telles que celle que vous proposez – à savoir que les services de sûreté puissent porter leur arme même en-dehors du service. L’état d’urgence autorise des mesures exceptionnelles, prises pour des moments exceptionnels. Mais pour ce qui est du droit commun, nous ne souhaitons pas ouvrir aux services de sûreté une autorisation de port d’arme indéfinie, perpétuelle et universelle, y compris pendant leurs vacances ou dans la vie civile. La raison en est simple : plus il y a d’armes en circulation, plus il y a de risques – et le risque de suicide n’est pas le seul. Cet amendement nous apparaît donc inopportun dans un État de droit qui entend le rester et échapper aux ravages du port d’arme généralisé que l’on peut constater aux États-Unis.
L’amendement pose d’abord un problème de forme. Vous visez l’article L. 315-1 du code de la sécurité intérieure, monsieur le député, et l’adoption de votre amendement donnerait la possibilité de port d’arme permanent aux personnels auxquels sont confiées des missions de gardiennage. Telle n’est pas, je crois, votre intention. À cet égard, le champ d’application de votre amendement pose problème.
Vos explications portent sur la possibilité, pour les policiers et les gendarmes, de porter leur arme en permanence. Or, cette possibilité existe déjà et relève du champ réglementaire. L’article R. 411-3 du code de la sécurité intérieure et l’arrêté du 6 juin 2006 prévoient en effet des dérogations au principe de l’interdiction du port d’arme hors service.
Faut-il aujourd’hui généraliser ce qui a été décidé dans le cadre de l’état d’urgence ? Cela n’a pas été fait auparavant, y compris lorsque vous avez tenté de traiter les questions de sécurité de manière générale, fût-ce par des textes qui ne faisaient pas consensus. On voit bien qu’il y a là un seuil très important. Vous ne proposez pas d’armer toute la population, je vous en donne acte, mais vous souhaitez permettre à beaucoup de gens d’être armés en permanence. Cela mérite un autre débat, me semble-t-il. Nous discutons ici de la sécurité dans les transports en commun. Le Gouvernement s’en tient à cet objectif et considère à cet égard que cet amendement n’est pas du tout opportun, comme l’ont également montré les observations formulées par M. le rapporteur au sujet des libertés publiques. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
La réponse de M. le rapporteur à notre collègue Goujon est caricaturale !
Peut-être M. le secrétaire d’État a-t-il été lui aussi un peu général, quoiqu’en usant de propos plus choisis ! Il ne s’agit ni d’armer beaucoup de gens, ni de confier des armes à la population comme aux États-Unis d’Amérique ! Nous parlons de policiers et de gendarmes. Quant aux agents de sécurité privés, il me semble que le débat, avant que vous n’émettiez un non réprobatif, si vous me permettez ce pléonasme, monsieur le rapporteur, fait écho aux propositions de M. le Premier ministre et de M. le ministre de l’intérieur d’armer des gens qui ne sont ni policiers ni gendarmes. Vous devriez en outre éviter de schématiser les choses s’agissant de ce qui se passe aux États-Unis d’Amérique, car le gouvernement que vous soutenez va manifestement plus vite que vous en matière de mesures sécuritaires.
La parole est à M. Sébastien Pietrasanta, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Sur la forme, cet amendement est satisfait car l’état d’urgence prévoit déjà ce qu’il préconise. La question est de savoir s’il faut pérenniser cette possibilité au-delà de l’état d’urgence, mais vous avez bien vu qu’une circulaire a suffi pour mettre en oeuvre une telle mesure. Nous sommes donc dans le domaine réglementaire.
En outre, il est un peu tôt pour tirer toutes les conclusions de l’expérimentation menée dans le cadre de l’état d’urgence. Voyons ce qu’elle donne sans rien nous interdire pour plus tard, je vous en donne quitus. Ne gravons pas dans le marbre de la loi une expérimentation menée dans le cadre de l’état d’urgence.
Je préfère entendre les propos de M. le rapporteur pour avis qui laissent une porte ouverte. M. Pietrasanta a raison : il ne faut pas préjuger de l’avenir. Si cette disposition a été prise dans le cadre de l’état d’urgence, c’est bien parce qu’un attentat a eu lieu. C’est ce qui motive la possibilité ménagée aux policiers et aux gendarmes de porter leur arme en dehors des heures de service pendant l’état d’urgence, mais il ne faut pas fermer la porte. Nous sommes en effet nombreux à penser que des menaces très graves subsisteront encore de longs mois, voire de longues années, et il nous faudra pourtant bien sortir de l’état d’urgence.
Il ne s’agit pas d’armer toute la population, encore moins des agents de sécurité privés. Les personnes concernées sont les policiers, les gendarmes et les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP habilités à porter une arme de service.
Enfin, nous pouvons avoir un débat juridique. Certains considèrent en effet que ces dispositions sont de nature législative car le périmètre du décret indiquant les catégories de personnels et les modalités d’utilisation des armes est fixé par l’article L. 2251-4 du code des transports, dans sa partie législative et non dans sa partie réglementaire.
Je vous donne acte, monsieur Goujon, que j’ai formulé une position plus personnelle que collective en affirmant que je n’étais pas très favorable à ce que des armes circulent partout dans ce pays. En l’occurrence, nous discutons bien de l’amendement no 4 ?
Donc acte. Je pensais que nous débattions uniquement des services de sûreté, c’est pourquoi j’ai expliqué, comme M. le secrétaire d’État, qu’appliquer la mesure aux agents de la SUGE ou du GPSR impliquait de l’étendre aux stadiers et aux agents des Galeries Lafayette, ce dont il n’est pas question. Vous n’évoquiez donc que la police et la gendarmerie, cher collègue. L’avis de la commission est également défavorable, mais le débat est beaucoup plus ouvert.
L’amendement no 5 n’est pas adopté.
Il est de même nature que le précédent, mais va plus loin puisqu’il concerne les agents de sécurité de la SUGE et du GPSR. Cela dit, je connais la réponse du Gouvernement.
L’amendement no 4 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
C’est un amendement d’appel visant à lancer un débat en appelant l’attention du Gouvernement sur la nécessité d’améliorer les dispositifs de sécurisation des cabines des conducteurs de train et d’arrêt à distance des trains afin de prévenir le risque terroriste. Nous avons été mis en garde par des responsables de la SNCF. Contrairement aux avions, les trains ne nécessitent qu’un seul conducteur. La sécurité des passagers repose donc sur le professionnalisme d’une seule personne.
Il faut bien reconnaître que cet isolement constitue une faille de sécurité au regard du risque terroriste. Les systèmes de sécurité présents à bord peuvent être désactivés au moyen de certaines techniques. Les butoirs situés dans les gares ne résisteraient pas à un train lancé à grande vitesse par un conducteur suicidaire ou terroriste. Je souhaite donc, par cet amendement, obtenir des garanties formelles que les dispositifs existants prémunissent contre ces risques ou, à défaut, soient renforcés afin de protéger les cabines des conducteurs.
Cet amendement ne pose pas de problème de fond. Il concerne essentiellement les TER, car la locomotive des autres trains est séparée des wagons et n’est donc pas accessible lorsque le train roule. Je ne vois donc pas d’inconvénient à son adoption, même si je m’interroge sur le délai de remise du rapport. Cela dit, nous devons bien intégrer à notre réflexion le fait qu’à Barcelonnette c’est un dispositif anti-intrusion qui a tué. Il faut donc envisager toutes les dimensions du problème.
Le rapport dont il est question vise à mener une réflexion dont on peut d’abord penser qu’elle procède par assimilation. En réalité, la question ne se pose pas dans les transports en commun car certains sont protégés et d’autres moins. Surtout, la comparaison avec les avions ou d’autres moyens de transport n’est pas opératoire car il existe des contrôles à distance. Cela étant, lorsque l’on approfondit le débat, on voit bien que cette préoccupation est largement partagée. Même si certains, dont je suis, ont quelques certitudes sur les réponses, encore faut-il arriver à les faire admettre.
La meilleure façon de le faire consiste probablement à poursuivre la réflexion et à accepter la remise d’un rapport comme vous le proposez. Le Gouvernement souhaite fixer le délai au 30 juin pour pouvoir travailler sérieusement. Un tel rapport sera utile, car il nous permettra de faire vérifier par des experts internes à l’administration ce qui est accompli dans les autres pays, d’examiner l’ensemble des problèmes soulevés et surtout de saisir à nouveau la représentation nationale afin de débattre des mesures à mettre en oeuvre. Je partage en tout cas vos interrogations, monsieur le député. Peut-être nos réponses sont-elles différentes, mais nous souhaitons que ce travail soit mené. Le Gouvernement est donc favorable à l’adoption de cet amendement sous réserve que la date de remise du rapport soit fixée au 30 juin 2016.
L’amendement no 6 , tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.
La commission du développement durable a adopté un amendement visant à rendre obligatoire le port d’un document d’identité dans les transports pour les personnes ne disposant pas d’un titre de transport valable. J’ai proposé une rédaction plus large, car il ne me semble pas pertinent de limiter l’obligation de justifier de son identité dans les transports aux seules personnes n’ayant pas de titre de transport valable, ce qui peut d’ailleurs être inopérant. La proposition de loi relative à la protection de l’identité dont j’ai été rapporteur prévoyait de rendre obligatoire la justification de l’identité pour toute personne empruntant les transports publics de voyageurs. Cet amendement ne ferait pas peser une contrainte excessive sur les libertés selon nous, car l’identité se prouve par tous moyens. Il prévoit également d’interdire l’accès aux réseaux de transports à toute personne qui ne serait pas en mesure de justifier de son identité lors d’un contrôle d’identité.
Ce débat a été très largement ouvert lors de la précédente campagne électorale et dépasse un peu le cadre du texte, car porter une carte d’identité n’est pas obligatoire dans ce pays. Je vois donc mal comment introduire une obligation de cet ordre uniquement dans le domaine des transports. En outre, si l’on cherche à sécuriser notre pays, il n’y a pas de raison de se cantonner au domaine des transports, puisqu’il y a d’autres cibles : on l’a vu, hélas, au Bataclan et dans bien d’autres endroits ! J’ajoute que la protection proposée serait faible vis-à-vis de gens déterminés à commettre un acte terroriste, car il suffirait d’avoir une carte d’identité volée ou contrefaite pour circuler librement dans un train sans aucun empêchement.
La vraie question, comme l’ont montré les débats, c’est celle du contrôle de l’identité qui souffre actuellement de carences très importantes car les agents de sûreté ne peuvent pas retenir quelqu’un s’ils ont un doute sur son identité. Il arrive assez fréquemment que des agents de la SUGE, du GPSR, de la SNCF ou de la RATP ou d’autres agents travaillant sur les réseaux locaux procédant soient obligés de laisser partir une personne refusant de justifier son identité sans que celle-ci soit poursuivie. Nous avons réglé ce problème par un amendement de Sébastien Pietrasanta visant à instaurer le nouveau délit de soustraction au relevé d’identité permettant de basculer dans le contrôle d’identité sous l’autorité d’un officier de police judiciaire sans franchir la barrière sanitaire, très importante en droit français, qui transformerait nos agents de sûreté en contrôleurs d’identité, mission actuellement assumée par les forces de l’ordre sous l’autorité d’un officier de police judiciaire.
En dehors de son aspect cosmétique, nous ne voyons donc pas l’utilité de cet amendement.
Nous avons par ailleurs introduit une disposition qui permet d’exiger d’un passager, en cas de fraude, la justification de son identité, et de l’extraire du train en l’absence d’une telle justification.
Tels sont les éléments de réponse qui expliquent notre position. J’ajoute que cet amendement nous ferait courir un risque d’inconstitutionnalité dans la mesure où la jurisprudence sur le port de la carte d’identité est assez claire. Je vous invite, sur ces questions-là, à vous en référer au Défenseur des droits, qui ne vous est pas étranger.
C’est la raison pour laquelle nous avons préféré renforcer les contrôles plutôt que rendre obligatoire le port de la carte d’identité. En outre, la majorité des titres de transport n’étant pas nominatifs, il n’est pas possible dans notre pays de recouper l’identité de la personne avec celle du porteur du titre de transport. Nous préconisons néanmoins, par un amendement qui viendra plus tard en discussion, que cette possibilité soit envisagée pour les TGV et les trains internationaux. Aujourd’hui, comme vous le savez, un marché noir du billet de Thalys s’est développé et nous avons des progrès à faire dans ce domaine. Les Pass Navigo seront peut-être un jour totalement traçables. Personnellement, je suis convaincu que nous aurons à notre disposition des solutions billettiques parfaitement traçables, dématérialisées, qui fonctionneront probablement avec les téléphones portables. Cela existe déjà en Suède. Un tel système supposera des investissements colossaux, bien entendu, notamment pour s’équiper de portiques capables de détecter les téléphones portables.
Tels sont les motifs pour lesquels nous demandons le rejet de cet amendement.
Le débat a déjà amplement eu lieu en commission. Il n’est d’ailleurs pas nouveau. Il touche cependant à des questions fondamentales, qui correspondent non seulement à la réalité à laquelle notre pays est aujourd’hui confronté, mais aussi à des exigences juridiques auxquelles ne peuvent se soustraire ni le gouvernement d’aujourd’hui ni celui d’hier.
De ce point de vue, il paraît utile de rappeler tout d’abord la décision du Conseil constitutionnel du 10 mars 2011 qui avait censuré la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure dite « LOPPSI 2 » dès lors qu’elle autorisait les policiers municipaux à opérer des contrôles d’identité. Vous aviez donc déjà essayé d’introduire une telle mesure, et le Conseil constitutionnel l’a censurée. C’est la première difficulté, et le Défenseur des droits ne dit pas autre chose.
Ensuite, sur le fond, et le rapporteur vient d’en parler, le texte de loi permet non pas de vérifier, mais d’exiger – la sémantique retenue est importante – le relevé de l’identité d’une personne qui n’aurait pas de titre de transport, ce qui permet de répondre à l’objectif du texte de loi. En revanche, il ne paraît pas nécessaire de généraliser les contrôles d’identité, c’est-à-dire la possibilité de vérifier la nature du document, sa portée vis-à-vis de la personne concernée. Cela n’a pas été évoqué, mais il me paraît utile de le porter au débat général : malheureusement, dans beaucoup de situations auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés, si l’efficacité est réelle en termes de fraude, elle ne peut l’être en matière de lutte contre le terrorisme. Ne faisons donc pas croire – et vous ne l’avez pas dit, cher collègue – qu’une telle mesure apporterait une réponse.
Les mesures qui figurent dans la proposition de loi, notamment grâce au travail du rapporteur et du rapporteur pour avis, permettent de répondre à vos préoccupations tout en nous prémunissant contre une censure du Conseil constitutionnel.
Ce débat est très important, car il s’agit d’un des points sensibles de ce texte, point sur lequel nous étions en désaccord avec M. le rapporteur en commission, désaccord qui s’est réduit après l’adoption de plusieurs de ses amendements. Nous n’avons cependant pas très bien compris la subtile différence entre le port obligatoire de la carte d’identité, mesure proposée par Valérie Pécresse et que j’avais défendue, et celle de votre amendement, monsieur le rapporteur.
Permettez-moi d’ailleurs, en préambule, de vous rappeler qu’il n’y a pas de réseaux locaux, monsieur le rapporteur ; il y a des réseaux de transports. La France, ce n’est pas Paris et tout autour le désert. Voilà plusieurs fois que je vous surprends – le président de la commission pourrait en témoigner – en flagrant délit de parisianisme, ce qui est très surprenant de votre part. Dans un pays qui n’est plus très jacobin, ou qui du moins a adopté plusieurs lois de décentralisation, il me paraît plus juste de parler des régions que de la province. La sémantique a son importance.
Autre sujet, monsieur le secrétaire d’État : si nous sommes bien d’accord sur le fait qu’il s’agit de lutter contre la fraude, je ne vous suis pas tout à fait au sujet de la LOPPSI 2. Certes, des dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel, car un policier municipal ne peut contrôler l’identité d’un citoyen. Cependant, il peut le faire en cas de flagrant délit. À cet égard, dans la Métropole européenne de Lille, où je suis vice-président en charge des transports publics, de la sécurité et du contrôle d’accès dans les transports publics – ce sont les joies du cumul, monsieur le président –, nous avons le même problème de fraude qu’à l’échelle nationale ; 14 % des procès-verbaux dressés sont recouvrés. Certes, certains passagers ont des faux documents d’identité, mais rendre obligatoire le port de la carte d’identité nous permettrait de recouvrir une partie des procès-verbaux non payés.
Jusqu’à présent, lorsqu’un contrôleur demandait à un passager sans ticket de métro un papier d’identité en l’absence de policier municipal, à la sortie Tourcoing Centre, par exemple, monsieur le secrétaire d’État, si cette personne refusait de le donner, il ne se passait rien. Avec la mesure de M. Savary, le contrôleur pourra signifier verbalement au passager de rester où il se trouve, mais il ne pourra pas le retenir physiquement, car il n’y a pas toujours des policiers municipaux ou nationaux à proximité des stations de transports et des gares. Indépendamment de ce sujet, je mets aujourd’hui à disposition ma police municipale pour que le policier puisse demander son identité au passager qui n’a pas de ticket de métro à présenter au contrôleur et, en cas de non-coopération, l’amener de force au commissariat de la police nationale. Que de temps perdu pour recouvrir un procès-verbal !
Si on rendait obligatoire le port de la pièce d’identité, on faciliterait le travail des polices municipale et nationale dans les opérations de contrôle en commun. C’était l’objet de mon intervention en discussion générale. Nous voyons tous des opérations de ce type quand nous prenons le train, l’Eurostar ou le Thalys, lequel passe d’ailleurs par Lille Europe, monsieur le rapporteur, ce qui montre que les réseaux locaux peuvent parfois être internationaux.
Il me paraît très important d’ajouter qu’il s’agit également d’une question de sécurité, monsieur le rapporteur, même s’il n’est pas question de lutte contre le terrorisme. Lorsque les agents de la police municipale et de la police nationale de ma ville procèdent à des contrôles en commun, des contrôles d’identité dans les transports avec le personnel de Transpole, la société qui exploite notre réseau, ils tombent chaque fois sur des personnes placées sous main de justice, des personnes qui auraient dû se trouver dans des maisons d’arrêt ou des personnes présentes illégalement sur le territoire français.
Enfin, les transports en commun sont un mode particulier d’utilisation du domaine public, et il ne s’agit pas d’imposer le port d’une pièce d’identité partout et pour tous. Le recouvrement d’un procès-verbal requiert un document d’identité.
Je conclurai mon intervention par un exemple absurde, car vous n’avez pas su me répondre en commission, monsieur le rapporteur. Dans un supermarché, un client qui souhaite payer par chèque peut se voir demander une pièce d’identité, et il doit la présenter à la caissière, qui est tout sauf un officier de police judiciaire, un policier municipal ou un contrôleur. La coutume veut en effet qu’on accepte de présenter ce document pour garantir un paiement. À défaut, le chèque n’est pas accepté, et le service non accessible. Pourquoi ce qui est valable dans un supermarché ne le serait-t-il pas dans un réseau de transports en commun ?
Votre amendement est relativement excessif, cher collègue, et susceptible de gâcher la vie de beaucoup de gens. Je rappelle les termes de l’article L. 2241-6 du code des transports : « Toute personne qui contrevient aux dispositions tarifaires ou à des dispositions dont l’inobservation est susceptible soit de compromettre la sécurité des personnes ou la régularité des circulations, soit de troubler l’ordre public, peut se voir enjoindre […] de descendre du véhicule de transport ferroviaire ou routier ». Autrement dit, un passager qui n’a pas de titre de transport peut être sorti du train.
L’amendement que vous proposez va plus loin, en ce qu’il permet d’expulser du véhicule ou de la gare une personne qui n’aurait pas de pièce d’identité à produire, mais qui aurait payé son billet et qui ne troublerait pas l’ordre public. Une personne qui, une fois, oublie sa carte d’identité par distraction parce qu’elle a changé de sac mais a son Pass Navigo pourrait être sortie du train ; c’est un peu excessif, vous en conviendrez.
Par ailleurs, je rappelle que nous avons introduit par amendement une amende supplémentaire de troisième classe pour le fraudeur qui ne porte pas de pièce d’identité, ce qui répond un peu aux attentes. Le fait de rendre obligatoire le port de la carte d’identité poserait en revanche un certain nombre de problèmes. En outre, quelle légitimité les agents de la SUGE auraient-ils pour contrôler l’identité d’une personne qui détient un billet et qui ne trouble pas l’ordre public ? C’est une réelle difficulté.
Cet amendement, s’il était adopté, risquerait de compliquer la vie des Franciliens et n’apporterait rien en matière de sécurité.
Je souhaite brièvement répondre à la question que M. le rapporteur pour avis a posé à l’instant. Il n’y a pas que les Franciliens.
À vous entendre, on croirait que, en dehors de Paris, il y aurait le désert modéré de la petite couronne, puis éventuellement le grand désert de la Seine-et-Marne, et au-delà… Sur le plan sémantique, je regrette de quitter cette assemblée, monsieur le président, car je n’aurai plus l’occasion de faire du provincialisme malvenu.
Plus sérieusement, la question que vous posez est intéressante, monsieur le rapporteur pour avis. Les agents de la SUGE seraient légitimes pour contrôler l’identité au même titre qu’ils le sont, du fait de votre texte de loi, pour regarder le contenu des sacs des passagers et leur interdire l’entrée dans le train le cas échéant, mesure que nous soutenons. M. Goujon vise les agents de la SUGE et la police, mais on pourrait ne viser que la police, et ce serait déjà un progrès ; nous pourrions en débattre. Les circonvolutions gymnastiques franciliennes que vous évoquez ici ne sont pas tout à fait à la hauteur du débat juridique.
Certes, nous pouvons comprendre la difficulté en termes de constitutionnalité, car nous ne souhaitons pas que le texte soit censuré. Pour autant, la solution que M. Goujon, Mme Pécresse et moi-même avons proposée dans différents amendements visait à améliorer un peu la sécurité, mais plus certainement la lutte contre la fraude. Recouvrer uniquement 14 % des procès-verbaux est une anomalie.
Sourires.
Monsieur Darmanin, vous allez me faire gagner des voix dans ma circonscription en essayant de me caricaturer en parisianiste : je suis un enfant de la décentralisation et j’ai fait toute ma carrière dans des collectivités qualifiées de « locales » sans que ce terme soit considéré comme péjoratif. Je qualifie donc les réseaux de ces collectivités locales comme des réseaux locaux, et j’ai peut-être tort. Cela semble vous offusquer ; pas moi. Ce terme est parfaitement reconnu par l’ensemble des collectivités et des maires de France. Ce terme est courant, il est même juridique.
Cela étant dit, sur le fond, le débat est sérieux. Il n’est pas simplement politique, il ne s’agit pas d’une simple divergence entre des élus aux vues sécuritaires, partisans du port de la carte d’identité, et des élus laxistes parce qu’opposés à une telle mesure. Tel n’est pas le sujet.
L’exemple auquel vous vous êtes référé dans les supermarchés n’est pas une coutume : il s’agit de recouper les informations figurant sur la pièce d’identité et l’identité du porteur du chèque. C’est un acte commercial qui ne fait l’objet d’aucune prescription légale. Une caissière de supermarché vérifie l’identité de la personne qui lui remet un chèque. Cela n’a rien à voir avec ce que vous voulez introduire. Votre amendement vise à sanctionner le fait de ne pas porter sa carte d’identité, y compris lorsqu’on s’est acquitté du prix du billet de train.
Ce délit n’existe pas en droit français.
Tel est le coeur du sujet. Les dispositions que vous vous proposez d’insérer dans le texte ne tiendront pas une seconde devant le Conseil constitutionnel pour une raison simple : faire sortir quelqu’un d’un train parce qu’il n’a pas de pièce d’identité – ce qui, je le répète, ne constitue pas un délit – alors qu’il a payé son billet, serait considéré comme un acte disproportionné au regard de la liberté de circulation. Celle-ci concerne la vie quotidienne des gens. C’est un principe fondamental dont on ne peut limiter l’application par l’emploi de sanctions disproportionnées, en empêchant quelqu’un de circuler alors même qu’il n’a commis aucun délit.
L’amendement no 7 n’est pas adopté.
L’article 6 bis, amendé, est adopté.
Article 6
Cet amendement, qui n’avait pas été présenté en commission, me paraît extrêmement important. Nous sommes tombés d’accord sur tous ces bancs pour dire qu’il fallait accorder l’opportunité aux réseaux de Bordeaux, de Nîmes, ou encore de Bécon-les-Bruyères – bref, à tous les réseaux français, métropolitains comme ultramarins, de se doter de forces de sûreté pour leurs transports locaux. Il n’y a pas que l’Île-de-France qui doit bénéficier de mesures de sûreté renforcées.
Le dispositif proposé, dont nous allons discuter, offre une grande souplesse aux collectivités territoriales, en leur permettant de choisir les modalités d’accès à des équipes de sûreté. Elles peuvent continuer à recourir à des sociétés de sûreté privées adhérant au Conseil national des activités privées de sécurité – le CNAPS. Elles peuvent aussi, en vertu d’une disposition introduite en grande partie sur l’initiative de M. Darmanin, recourir aux polices municipales : vous verrez les dispositifs que l’on vous propose en ce domaine. Elles peuvent, enfin, sur le fondement d’une disposition que nous avons introduite, se doter de leur propre service de sûreté, qui serait placé sous l’égide du CNAPSet ne bénéficierait pas d’un statut spécial comme la Surveillance générale – la SUGE – ou le Groupe de protection et de sécurisation des réseaux – le GPSR. En effet, ces deux dernières entités disposent de statuts particuliers qui ne sont pas reproductibles.
Afin que ces dispositions soient effectives, et qu’elles ne soient pas laissées au bon vouloir de chaque élu local – les uns souhaitant les mettre en oeuvre, les autres s’y refusant –, cet amendement vise à ce qu’un contrat d’objectif de sûreté dans les transports associe, au niveau départemental, toutes les autorités organisatrices de transport, à savoir la région, le département, s’il lui reste des compétences déléguées par les régions, car il a vocation à ne plus en avoir, éventuellement les communes, qui ont compétence sur les réseaux de bus intracommunaux, mais aussi les exploitants, sous l’autorité du préfet, pour déterminer des objectifs de sûreté et veiller à ce que les mesures soient appliquées dans chacun des départements de France. Cela s’apparente quelque peu aux contrats locaux de sécurité ou aux contrats de prévention de la délinquance mais, cette fois, en matière de sûreté dans les transports.
Sur le principe, le Gouvernement juge tout à fait intéressante la démarche engagée par le rapporteur. Elle répond à la préoccupation qui a été exprimée et qui a notamment donné lieu à une petite opposition sémantique. Cette question concerne l’ensemble de la France. Les réponses qui y ont été apportées ont souvent été définies de manière pragmatique en raison de la présence de grands opérateurs ou parce que les choses avaient déjà été organisées.
Il est nécessaire de généraliser les solutions qui ont été trouvées. C’est pourquoi le Gouvernement est d’accord avec le rapporteur, non seulement pour jouer un rôle d’acteur, puisque le préfet, représentant du Gouvernement, est l’une des parties à l’initiative de la signature de ce contrat, mais aussi pour instituer une obligation : la démarche dont nous parlons doit en effet être animée par le respect de la volonté générale, ce qui est la définition même de la loi, et doit donc s’appliquer sur l’ensemble du territoire – nous aurons l’occasion de revenir, lors de l’examen d’autres amendements, à la manière de décliner ce principe. Au contraire des solutions proposées à travers d’autres amendements et visant à répondre à la même préoccupation, la démarche en question, plutôt que de procéder par assimilation ou généralisation à partir de situations différentes, prend en compte, nous semble-t-il, la spécificité d’une politique de territoire, tout en définissant les moyens de parvenir aux objectifs impartis dans ces territoires, notamment en dehors des grandes métropoles. Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
Monsieur le rapporteur, cet amendement nous paraît tout à fait intéressant et recueillera notre soutien – je vois M. Goujon acquiescer. Toutefois, vous avez bien dit que les départements, du fait des lois que le Gouvernement a proposées et qui ont été votées par le Parlement, n’exercent quasiment plus de compétences en matière de transports. Il est possible qu’ils en assument encore quelques-unes, mais de manière très résiduelle, conformément aux principes retenus.
Je vois donc un grand intérêt à ce que les départements soient associés à cette action, aux côtés des agglomérations, qui sont les plus impliquées dans l’organisation des AOT, pourquoi pas des communes, mais aussi et surtout des régions, au regard, notamment, des compétences qu’elles exercent s’agissant des trains express régionaux, les TER.
Ne serait-il pas possible, dans la mesure où cet amendement n’a pas été discuté en commission et que le travail législatif habituel n’a pu avoir lieu, que vous le rectifiiez, soit en supprimant les mots : « dans le département » après les mots : « Le représentant de l’État », soit en rendant obligatoire la conclusion de ce contrat par les régions
Prenons l’exemple d’une grande région – au hasard, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, qui est traversée par plusieurs lignes de transport ferroviaire, qui relient le Nord au Pas-de-Calais, et, dans certains cas, à la Picardie. Je crains que le contrat d’objectif de sûreté ne soit réalisé par silos, au lieu d’être global. Or, ces lignes ferroviaires traversent plusieurs départements, et relèvent d’une seule compétence, d’un seul vice-président et d’une seule politique publique des transports.
C’est pourquoi je suggère que l’on supprime les mots : « dans le département ». Le préfet de région discutera de sujets tels que les TER avec le président de la région, tandis que le préfet de département interviendra, par exemple, en présence d’un contrat local de département. Une autre possibilité consisterait à prévoir une exception en faveur du président de région et du préfet de région. Cette rectification me paraîtrait de bon sens.
Monsieur Darmanin, j’ai éprouvé les mêmes scrupules que vous. De fait, deux grandes collectivités détiendront une compétence d’AOT : la région et les structures intercommunales. Néanmoins, j’en suis convaincu, il subsistera, en certains lieux, des subdélégations aux départements et, en deçà, à des syndicats, s’agissant notamment des transports scolaires, qu’il ne faut pas non plus laisser de côté. Je me suis posé la question de savoir s’il fallait attribuer cette prérogative au préfet de région, qui conclurait un contrat sur l’ensemble de sa région. Mais les régions sont tellement vastes – la taille de la mienne est comparable à celle de l’Autriche – que je crains qu’il y ait une multiplicité de signataires, que ce contrat se dilue pour devenir plus formel qu’opérationnel. C’est pourquoi l’amendement que je vous propose a pour objet de faire signer tant les AOT que les exploitants. J’ai opté pour une approche territoriale de proximité, ce qui m’a conduit à privilégier l’entrée départementale.
Vous avez raison de le souligner, la région est tenue de signer un certain nombre de contrats – douze contrats particuliers en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes – mais en respectant une très grande cohérence locale, puisque la région devra travailler, au plus près du terrain, aux correspondances avec les tramways, les métros et les transports urbains. Par ailleurs, dans la mesure où elle détiendra la compétence ultime en la matière, elle devra, le cas échéant, veiller à ce qu’un contrôle fin – plus fin, en tout cas, que si le document était signé à la préfecture de région par le seul président de région – soit exercé sur cette politique, quand bien même elle a subdélégué des compétences aux départements ou à des syndicats communaux de transports collectifs.
Telles sont les raisons pour lesquelles j’ai adopté cette approche. Je ne doute pas qu’elle va donner lieu à un certain nombre de réactions, peut-être de la part de l’Association des régions de France, mais je pense, très franchement, que l’approche territoriale départementale constitue la bonne maille s’agissant de réseaux aussi fins. Cela étant, les réflexions sont totalement ouvertes.
Nous partageons votre point de vue, monsieur le rapporteur, quant au choix de l’échelle départementale. Mais, s’agissant du réseau régional, qui nécessite des moyens de sécurisation importants, on est loin de la simplification administrative voulue par le Gouvernement : en région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, douze contrats seront signés avec douze préfets. Cela rend peu lisible la politique de sécurisation.
Par ailleurs, j’insiste sur le fait qu’il serait opportun de supprimer les mots : « dans le département ». Le représentant de l’État, par nature, dans notre pays qui demeure jacobin, est le préfet de département, mais il est tout à fait possible de concevoir – du moins les débats de ce jour permettront-ils de l’expliciter en cas de contestation – que le président de région contractualise avec le préfet de région, sans que ce soit une obligation.
Le département du Nord, historiquement, est un département frontalier. En allant de Lille à Arras, vous traversez en quelques minutes la frontière entre le Nord et le Pas-de-Calais. Il serait donc un peu absurde de prévoir la signature d’un contrat par département. Si vous procédiez à la correction que je vous suggère, quitte à effectuer un travail plus approfondi au Sénat, chacun y gagnerait : la sécurisation, la région, les préfets, sans oublier la politique de simplification.
Tout en étant ouvert aux arguments de M. Darmanin qui, je le sais, a beaucoup travaillé sur ce dossier, je suis néanmoins réticent à accepter sa proposition. On souhaite rendre obligatoire la mise en oeuvre de politiques de sûreté…
…ce qui nous conduit à les placer sous l’autorité, ou la coordination, du préfet. Cet objectif est complémentaire de celui que vous exprimé, à savoir la nécessité de doter les collectivités territoriales de compétences en matière de sûreté.
Vous proposez de supprimer les mots : « dans le département » pour ne laisser que les termes : « Le représentant de l’État ». Quelle serait la valeur juridique d’une rédaction qui ne qualifie pas le représentant de l’État ?
Que ce soit le représentant de l’État ou le préfet, cela revient au même. Si l’on ne conserve que les mots : « Le représentant de l’État » et qu’un contrat est conclu entre le préfet de région et la région, ceux-ci peuvent se dispenser de faire intervenir les autres acteurs.
Bien sûr que si, car il n’y a nulle obligation d’entrée territoriale. Votre proposition ne constitue pas une référence territoriale mais une référence institutionnelle. Vous nous dites que l’on entre par l’institution, c’est-à-dire par le préfet ; vous n’entrez pas par le territoire. Aussi je pense que cela ne nuira pas aux grandes régions de revenir quelque peu à la proximité et de veiller à ne pas trop recentraliser autour des capitales régionales. Chez nous, on y est très sensible, bien que les Bordelais pourraient considérer que le sort réservé à la Corrèze ou à la Creuse est moins important, dans la mesure où ce sont des « fins de terre ». Tel n’est pas le cas. Je pense que l’entrée territoriale est importante – ce qui explique mon attachement à cette rédaction – car il faut absolument que des AOT de petite taille soient engagées dans cette démarche. Elles ne pourront pas l’être si le contrat est conclu à l’échelle régionale.
Le Gouvernement juge ce débat légitime ; on voit bien que les deux entrées ont leur cohérence. Quelques questions n’ont pas été abordées, qui peuvent être source de difficultés. Il en est une, notamment, qui tient à l’organisation de l’État : le préfet de région, en tant que tel, n’exerce pas de pouvoirs de police au-delà du département dont il est également chargé. Nous serions, de ce point de vue, confrontés à une difficulté pour atteindre votre objectif.
Le Gouvernement suggère qu’en l’état, on vote le texte proposé par le rapporteur. Naturellement, la navette parlementaire a un rôle important à jouer pour essayer de trouver une articulation entre les objectifs, également légitimes, qui ont été exprimés par les uns et les autres.
L’amendement no 92 est adopté.
L’article 6 ter, amendé, est adopté.
Article 6
Je suis saisi d’un amendement de suppression, no 101.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour le soutenir.
L’article 6 quater prévoit qu’il peut être procédé à la fouille des bagages d’un passager, sans le consentement de celui-ci, lorsqu’il est pris en flagrant délit de fraude et n’est pas en mesure de présenter un titre d’identité valide.
S’il est cohérent de considérer que la sécurité et les incivilités, au premier rang desquelles la fraude, doivent recevoir une réponse politique homogène, il est excessif de considérer que les fraudeurs sont des auteurs potentiels d’actes terroristes. Il faut dire que la rédaction de cet article a été quelque peu incitée par le choix de traiter des deux sujets dans le même texte. Nous considérons qu’il est plus raisonnable de ne pas passer intellectuellement de l’un à l’autre dans le même article, et vous demandons en conséquence de bien vouloir supprimer l’article 6 quater.
Marie Le Vern et un certain nombre de nos collègues ont déposé un amendement similaire. Le texte vise deux objectifs différents, la lutte contre la fraude et la lutte contre le terrorisme. Il est évident que l’on ne peut assimiler celui qui ne serait qu’un fraudeur à un supposé terroriste et il convient, par conséquent, de se rallier à l’amendement du Gouvernement.
Nous sommes d’accord sur un point, monsieur le secrétaire d’État : les fraudeurs ne sont pas des terroristes en puissance. D’ailleurs, l’article 6 quater – qui, à ma connaissance, n’est pas de la plume d’un membre de l’opposition – ne suggère pas que le voyageur en question est un terroriste potentiel.
Mais, s’il est vrai que les fraudeurs ne sont pas tous des délinquants – les fraudes sont très bien réparties dans l’échelle des catégories socio-professionnelles, cols blancs inclus – et que la majorité d’entre eux ne font que frauder, force est de constater que les auteurs d’actes de délinquance dans les transports en commun sont rarement porteurs d’un titre de transport en bonne et due forme ou d’un abonnement payé dans sa totalité ! Je l’ai suffisamment constaté en tant que vice-président chargé des transports publics à la métropole de Lille.
Par ailleurs, et sans faire de procès d’intention au secrétaire d’État, dont je reconnais le travail, comme celui du rapporteur, je trouve étrange que les mesures annoncées dans les médias avant les régionales – en l’occurrence, M. le rapporteur s’est exprimé sur la fouille des bagages des fraudeurs – se voient supprimées, pour les raisons contraires à celles avancées lors des débats publics.
Vos explications ne me convainquent guère et je continue de penser qu’il faut maintenir cet article, qui établit un lien non pas avec la lutte terrorisme, mais avec la lutte contre les délinquants potentiels dans les réseaux de transport, plus nombreux que ce que l’on pense.
Cet amendement n’est en aucune façon dicté par la conjoncture. Le texte introduit la possibilité pour les agents de sûreté de procéder à des fouilles de façon aléatoire, sans nécessairement qu’une fraude soit constatée. Il couvre donc le cas prévu par l’article 6 quater.
Par ailleurs, les actes de délinquance déclenchent théoriquement l’intervention des services de sûreté. Il est alors procédé, du moins je l’espère, à un contrôle d’identité et à la vérification d’identité. Ensuite, les actes de délinquance sont couverts par des incriminations légales. Cet article assimilait une fraude, qui peut être totalement accidentelle, à une suspicion de terrorisme. La rédaction n’était pas bonne, et je fais amende honorable en tant que rapporteur. Avis favorable.
Article 6
La parole est à M. Gilles Savary, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 60 .
L’amendement no 60 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 6 quinquies, amendé, est adopté.
Face au fléau que représente l’usurpation d’identité – plus de 200 000 victimes chaque année en France, avec des préjudices matériels considérables –, les moyens publics font défaut. Je regrette d’ailleurs que l’État ait renoncé, faute de moyens sans doute, mais aussi pour des raisons juridiques, à éditer des documents sécurisés par biométrie et à relancer la réforme de la protection de l’identité.
Dès lors que vous ouvrez aux agents de sécurité des transports la possibilité de constater par PV le délit de vente à la sauvette – introduit dans le code pénal par un amendement à la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2 – il serait logique de les autoriser aussi à constater le délit d’usurpation d’identité, que les fraudeurs commettent souvent pour échapper aux sanctions. Tel est le sens de cet amendement.
Bien qu’il ne soit pas mauvais dans l’intention, cet amendement est léonin. Les agents de sûreté ne peuvent procéder qu’à des relevés d’identité, sans caractère coercitif. Seules les forces de l’ordre, sous l’autorité d’un officier de police judiciaire, peuvent procéder au contrôle de l’identité et à sa vérification, laquelle suppose une garde à vue. Il est impossible, par définition, de constater une usurpation d’identité sans contrôle de l’identité.
Cet amendement est donc inopérant sur le plan juridique. En outre, d’autres dispositions du texte, très importantes, répondent à votre demande.
Je comprends la cohérence de votre démarche, monsieur Goujon, mais vous conviendrez que si ces agents ne sont pas compétents pour procéder à des contrôles d’identité, ils ne peuvent constater un délit d’usurpation d’identité. Il conviendrait que vous retiriez cet amendement, si ce n’est par adhésion à ce que nous pensons, du moins par cohérence avec le droit positif. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Cet amendement, juridiquement irrecevable, serait par ailleurs inapplicable, puisque les agents de sûreté n’ont pas les moyens matériels – logiciel ou autres – de constater l’usurpation d’identité. Tout au plus pourraient-ils appeler la police, qui peut procéder au contrôle de l’usurpation d’identité.
Vous avez exposé le droit positif mais je regrette que nous ne puissions mettre en place les conditions permettant ces contrôles. ll faudrait envisager que les agents, placés bien sûr sous l’autorité d’un OPJ, puissent procéder à de véritables contrôles d’identité. Je retire l’amendement.
L’amendement no 9 est retiré.
L’article 7 est adopté.
Cette proposition de loi fixe à cinq au lieu de dix le nombre de fraudes à partir duquel est caractérisé le délit d’habitude. Nous considérons que ce nombre doit être abaissé à trois. La récidive doit être fermement réprimée, et le plus tôt possible, afin de ne pas laisser prospérer le sentiment d’impunité. Le fait de fixer à trois le nombre de fraudes serait de nature à améliorer l’efficacité de la sanction et son caractère dissuasif.
Certes, comme l’indiquait le rapporteur en commission, une personne peut, de bonne foi, oublier son titre de transport, mais frauder trois fois de suite est excessif, surtout lorsque l’on sait que la comptabilisation des fraudes ne prend en compte que les contraventions impayées, la transaction éteignant les poursuites et effaçant le délit.
De surcroît, un seuil abaissé à trois fraudes, associé à leur pénalisation, permettrait de mettre à mal les « mutuelles de fraudeurs », contre lesquelles d’autres dispositions sont prévues.
Il est vrai qu’abaisser le seuil à trois fraudes constitue un durcissement, et nous sommes conscients de l’effort que vous avez déjà consenti, monsieur le rapporteur. En outre, la commission a adopté, sur mon initiative – et je vous remercie de l’avoir accepté –, un amendement permettant d’inclure dans ce nombre les contraventions ayant fait l’objet d’un règlement.
Il n’en demeure pas moins que ces contraventions sont comptabilisées sur une période très réduite – les fichiers étant placés sous le contrôle de la CNIL. Encore faudrait-il, par ailleurs – et je m’adresse là au Gouvernement –, que les procureurs de la République acceptent l’idée de réserver des demi-journées d’audience aux délits d’habitude. Ils sont très peu nombreux à le faire. Cela m’amène à dire que, pour être jugé coupable d’un délit d’habitude, il faut être très chanceux, surtout quand on sait que, en moyenne, seules 4 % des personnes sont contrôlées.
M. Goujon a raison de dire que l’adoption de cet amendement constituerait un beau message envoyé aux mutuelles de fraudeurs. Un seuil de trois fraudes ne sera pas retenu partout, mais il permettra, à ceux qui le souhaitent, d’éviter la fraude massive. Souvent, ce sont les mêmes personnes qui fraudent, car elles ont compris comment les choses fonctionnaient.
M. Darmanin a apporté un début de réponse en évoquant lui-même l’encombrement des parquets, qui ne parviennent déjà pas à juger des délits d’habitude caractérisés par dix occurrences annuelles. À trois occurrences, la saturation serait totale et l’évolution asymptotique irait vers une disparition de ces jugements.
Par ailleurs, nous abaissons le nombre d’occurrences à cinq, ce qui est déjà très sévère. Un seuil de trois fraudes serait difficile à faire accepter devant une haute juridiction, car cela frapperait les personnes les plus captives des transports collectifs, celles qui ont plus de chance d’oublier trois fois leur titre de transport dans l’année que le voyageur qui prend le train une seule fois en décidant de ne pas le payer. Avis défavorable.
Sourires.
Si réprimer trois fraudes par an ne fera pas de nous des liberticides, n’en sanctionner que cinq ne nous rendra pas laxistes.
Il s’agit là de modifier le droit actuel, lequel prévoit de ne sanctionner qu’à partir de dix fraudes. L’objectif de ces amendements est donc partagé.
Certains inconvénients du dispositif proposé ont été évoqués. S’agissant de la réponse qui doit être apportée par la justice – à ce titre, le Gouvernement doit se mobiliser dans son ensemble –, notamment au travers des audiences, vous avez raison de souligner que le passage devant la justice, en tant qu’il suscite une prise de conscience, a également une fonction dissuasive.
Une question d’acceptation se pose également. Le rapporteur a évoqué ce point : il peut être difficile de ne jamais frauder quand on est obligé de prendre le train tous les jours, pour des raisons souvent professionnelles.
Enfin, ces amendements soulèvent des problèmes juridiques, qui ont motivé l’opposition du Gouvernement. Nous nous sommes demandé comment le principe bien connu de proportionnalité des peines, que le législateur et le Gouvernement doivent garder à l’esprit, pourrait être retenu dans des situations de ce type. Répondre à cette question ne va pas de soi car les cas de figure ne sont pas légion. Une affaire de recel a du moins conduit à s’interroger sur la notion d’habitude, telle que définie par la loi pénale : le Conseil constitutionnel a ainsi refusé de reconnaître trois situations litigieuses de recel comme répondant à cette notion.
En abaissant le seuil à cinq récidives, le rapporteur et le Gouvernement vous proposent une réponse qui envoie un message fort aux fraudeurs puisque, dorénavant, la loi sera beaucoup plus répressive. Il sera bientôt question des mutuelles de fraudeurs, que vous évoquez. C’est une invention scandaleuse : l’imagination de ses auteurs semble sans limite ! Si nous prenions un risque d’inconstitutionnalité, peut-être verrions-nous quelqu’un encourager de potentiels délinquants à souscrire une telle mutuelle et à ne pas payer leurs amendes, au motif qu’une question prioritaire de constitutionnalité pourrait faire annuler le texte.
De ce point de vue, si vous voulez envoyer un message déterminé aux éventuelles mutuelles de fraudeurs, vous ne devriez déjà pas prendre ce risque sur le plan juridique. Nous parlerons des autres risques par la suite.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Ces amendements sont typiques des « MM. Plus ». Le rapporteur a consenti un effort important, afin de diviser par deux le nombre d’infractions caractérisant le délit d’habitude : cela n’est pas rien. En revanche, passer de cinq à trois fraudes n’a rien d’un débat idéologique.
S’agissant de l’encombrement des tribunaux et du nombre de condamnations, évoqués par M. Darmanin, on a recensé, en 2010, 406 condamnations pour délits d’habitude, ayant conduit dans 231 cas à des peines de prison ; en 2014, 710 condamnations ont été prononcées, dont 370 à une peine de prison.
Vous voyez bien, messieurs les députés de l’opposition, que, sur ce sujet non plus nous n’avons pas forcément une justice laxiste. Le délit d’habitude était jusqu’à présent caractérisé par l’accumulation de plus de dix contraventions. Diviser ce nombre par deux conduira à augmenter le nombre de dossiers traités. Nous ne souhaitons pas encombrer inutilement les tribunaux : ce sujet, quoique très important, est moins prioritaire que d’autres. Si abaisser le seuil des contraventions de dix à cinq constitue une avancée très importante, passer de cinq à trois fraudes n’aurait pas grand intérêt.
Enfin, une personne qui utilise les transports en commun pour se rendre à son travail effectue en moyenne 600 trajets par an. Avec un seuil abaissé à trois contraventions, elle serait passible d’un délit d’habitude en fraudant une fois tous les 200 trajets. Comme M. le secrétaire d’État l’a souligné, ce ratio ne respecterait pas la proportionnalité des peines : un risque d’inconstitutionnalité pèserait ainsi sur le dispositif.
L’article 8 est adopté.
Article 8
L’article 8 bis est adopté.
Article 8
Je suis saisi d’un amendement, no 11 , visant à supprimer l’article 8 ter.
La parole est à M. Philippe Goujon, pour le soutenir.
Cet amendement vise à privilégier le délit introduit à l’article 13 par les députés de notre groupe, notamment par Gérald Darmanin, qui sanctionne d’une peine de cinq ans de prison et de 45 000 euros d’amende les mutuelles de fraudeurs, que nous évoquions à l’instant. Il rend superflu le dispositif introduit par le rapporteur pour avis de la commission des lois, M. Pietrasanta, à l’article 8 ter, lequel ne sanctionne ces faits que de deux mois de prison – et non six mois comme le rapporteur pour avis nous l’avait indiqué –, rendant alternatif le prononcé de la peine de prison et l’amende de 45 000 euros.
Nous considérons que seule une peine lourde sera à même de dissuader les fraudeurs de commettre un tel délit, lequel on le sait, coûte extrêmement cher aux opérateurs de transport.
Vous allez dire à nouveau, monsieur Pietrasanta, que nous sommes des « MM. Plus ». Oui : nous sommes des « MM. Plus-de-sécurité ». Et cela ne nous dérange pas d’être qualifiés ainsi.
Avis défavorable, mais pas sur le fond, qui concerne les mutuelles de fraudeurs, que vous avez évoquées à plusieurs reprises, monsieur Goujon.
Nous sommes défavorables à cet amendement car nous ne voudrions pas que la disposition tombe du fait d’un éventuel recours. Nous pensons en effet que la peine est disproportionnée : il n’est pas possible de l’alourdir sans risquer, à un moment ou à un autre, de voir annuler l’article. Nous pensons donc préférable d’adopter l’amendement no 14 rectifié à l’article 13, afin de sécuriser le texte.
Même avis. Le Gouvernement ne comprend pas très bien cette démarche. Aujourd’hui, après les élections – je pourrais renvoyer à M. Darmanin l’argument qu’il a employé tout à l’heure –, la situation est apaisée. Il n’y a donc pas lieu de faire de surenchère : personne ne nous en donnera acte.
Tous ceux qui ont essayé de répondre à la question de la répression des mutuelles de fraudeurs ont bien compris l’importance de mettre fin à ce type d’errements dans notre société. Pour certains, en effet, la société numérique permettrait à tout le monde de faire n’importe quoi, y compris de s’exonérer de la loi.
Quand on s’interroge sur l’état d’esprit dans la société, on trouve parfois, dans ces excès de modernité, des personnes qui ne voient que la modernité, et pas les excès. Or ils sont très importants au regard du contrat républicain : qu’il s’agisse des règles régissant le transport ou d’autres domaines – règles sociales ou de vivre ensemble –, ce n’est pas parce que la fraude s’exprime sur internet qu’elle n’est plus une fraude.
De ce point de vue, notre réponse doit être forte, cohérente et sans risque. Or, comme le rapporteur vient de l’évoquer, la proportionnalité des peines est une question majeure dans notre droit pénal.
On ne peut pas ici, pour essayer de se présenter comme plus royaliste que le roi, prendre un risque, qui se retournera contre l’effort collectif que nous essayons de fournir.
Voilà pourquoi je pense qu’en réalité, votre amendement n’est pas une surenchère, monsieur Goujon, mais une prise de risque. En effet, excusez-moi de le rappeler car, comme vous le savez, d’une manière générale, une peine inscrite dans la loi ne change rien à la décision des tribunaux, puisqu’ils ne sont pas tenus à la respecter et qu’il n’y a pas de peine minimale.
En l’espèce, la France applique le principe général de personnalisation des peines.
Aussi, votre amendement, monsieur Goujon, constitue une prise de risque, au-delà du signal fort que vous lancez.
Et, pour les mêmes raisons que celles que j’ai citées précédemment, nous préférons être efficaces : dans cette situation, ce sont ceux qui défendent ce texte qui le sont. En apparence, vous voulez être plus répressif ; en réalité, vous aggravez le risque pris par la volonté collective que nous exprimons ici.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Là encore, monsieur Goujon, vous apparaissez en « M. Plus » et j’en suis désolé. Il est assez facile, à partir des textes et des amendements, de proposer des amendes plus fortes ou d’abaisser certains seuils.
Tout cela n’est pas sérieux. Je vous le dis d’autant plus franchement que j’ai moi-même introduit l’amendement relatif aux mutuelles de fraudeurs, adopté en commission des lois et en commission du développement durable, qui prévoit une peine de six mois de prison et de 45 000 euros d’amende.
Monsieur Goujon, j’appellerai tout d’abord votre attention, comme l’a fait M. le secrétaire d’État, sur la proportionnalité des peines. Vous proposez de condamner autant les auteurs d’un blog incitant à créer une mutuelle de fraudeurs que les personnes ayant commis des violences volontaires sur mineurs ou vendu des stupéfiants. Or on ne peut pas vraiment comparer ces délits car ils présentent des dangers bien différents pour nos concitoyens.
Aussi, l’amendement introduisant une peine de six mois de prison et de 45 000 euros d’amende semble plus juste, en tant qu’il respecte mieux la proportionnalité des peines. Une peine de cinq ans de prison présente une disproportion manifeste avec le risque encouru pour l’ordre public.
En revanche, monsieur Goujon, nous nous rejoignons sur la peine d’amende, que nous avons tous deux fixée à 45 000 euros. Si la prison peut évidemment être un moyen de condamnation – il faut laisser les magistrats en juger librement –, la question est davantage d’atteindre au portefeuille ceux qui incitent à la fraude financière. Nous pouvons nous accorder sur ce sujet, mais pas sur la peine de prison : celle que vous proposez, monsieur Goujon, n’est ni proportionnelle ni sérieuse.
Je propose que M. Pietrasanta garde pour lui ses jugements. Nous aurons la possibilité de savoir ce qui est sérieux et ce qui ne l’est pas.
Le débat est de bonne tenue. Monsieur Pietrasanta, vous ne feriez qu’énerver M. Goujon : bien que vexé de ne pas avoir participé au début de cette discussion, il tenait pourtant des propos plutôt constructifs…
Sourires.
Revenons à votre démonstration, monsieur Pietrasanta : vous comparez la disposition à d’autres délits passibles d’une peine de cinq ans. Mais les violences contre mineurs entrent dans le champ de la contrainte pénale. Nous sommes donc à peu près certains que les créateurs d’une mutuelle de fraudeurs qui passeront devant le juge n’iront pas en prison…
…puisque, depuis la loi Taubira, c’est déjà le cas pour les auteurs de violences sur mineurs, lesquels, parce qu’ils sont passibles d’une peine de moins de cinq ans, peuvent être condamnés à une contrainte pénale.
Ce qui n’est donc pas sérieux, c’est votre comparaison des deux ans ou des cinq ans – loi Dati contre loi Taubira. Le juge, qui est libre de fixer la peine, peut commuer celle-ci, notamment en travail d’intérêt général. Une condamnation à deux mois de prison ou à trois, quatre ou cinq ans, ce n’est pas la même chose !
Certes, nous partageons l’opinion selon laquelle c’est au portefeuille qu’il faut toucher les fraudeurs, donc avec les 45 000 euros d’amende. Il est sans doute un peu absurde d’envoyer en prison des créateurs de mutuelles de fraudeurs, mais notre code pénal est ainsi fait. Il ne prévoit pas une condamnation directe pour travail d’intérêt général : l’intéressé doit en faire la demande. Ainsi, nous avons fixé la peine de prison à cinq ans parce qu’une telle peine laisse la possibilité au juge de la transformer en travail d’intérêt général.
La fraude est une maladie financière qui coûte annuellement, on l’a dit, 500 millions d’euros. C’est du vol contre la société – contre la société dite « capitaliste », car il peut aussi y avoir des motifs idéologiques –, mais aussi du vol pour ceux qui doivent payer des tarifs plus élevés. Je rappelle à cet égard que vous avez été la majorité qui a relevé la TVA sur les transports de 7 à 10 %, ce qui oblige aujourd’hui les AOT à augmenter leurs tarifs. Les honnêtes gens qui achètent leur ticket paient très cher. Pour le réseau métropolitain de Lille, ce prix représente un tiers du coût total, le reste étant payé par les impôts.
Je le répète, vous avez été le gouvernement qui a augmenté de trois points la TVA sur les transports. Nous vous donnons acte aujourd’hui d’essayer de lutter contre la fraude, alors peut-être pourriez-vous écouter sans les caricaturer les propos de notre excellent collègue Goujon !
J’entends bien ce que vous dites, monsieur Darmanin, et j’y vois une raison de plus pour ne pas encourir le risque de voir cet article disparaître au Conseil constitutionnel. Vous proposez de fixer une peine énorme en arguant qu’elle ne sera jamais appliquée. Mais si le Conseil constitutionnel passe derrière et annule l’article, nous n’aurons plus aucun dispositif contre les mutuelles de fraudeurs.
Notre souci est le même. Il est inutile d’en tirer des arguties politiques pour s’accuser mutuellement.
L’amendement no 11 n’est pas adopté.
Nous en venons à l’amendement no 61 . Il est rédactionnel, monsieur le rapporteur…
L’amendement no 61 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 8 ter, amendé, est adopté.
Cet amendement vise à compléter le troisième alinéa de l’article 9 en prévoyant que, dans le cas où l’échange d’informations nominatives entre les différentes administrations et les services de recouvrement des amendes des opérateurs de transports ferait apparaître des identités multiples, ou que la personne à qui serait adressée la contravention nierait avoir été l’auteur de la fraude et affirmerait avoir été victime d’une usurpation d’identité, les opérateurs de transports devraient alors le signaler à l’autorité judiciaire. L’objectif est de systématiser la remontée de l’information au niveau du procureur, qui centraliserait ainsi la connaissance des infractions.
À peine la moitié des amendes pour fraude sont recouvrées sur la base des déclarations d’identité et de domiciliation des contrevenants. Cette mesure contribuerait à mettre un terme aux agissements délictueux des 57 % de fraudeurs qui allèguent une fausse identité ou une fausse adresse pour échapper à leurs responsabilités.
C’est un amendement utile pour pouvoir poursuivre l’usurpation d’identité. Avis favorable.
Je tiens à préciser la position du Gouvernement, dans la mesure où ces textes pourront éventuellement, demain, être contrôlés à la suite d’un recours constitutionnel.
La première réaction face à cet amendement est de se demander ce qu’il apporte par rapport au principe général posé par l’article 40 du code de procédure pénale, lequel fait obligation, dans de telles situations, de saisir l’autorité judiciaire. On peut néanmoins se demander si certaines situations entrent bien dans le champ de cet article, ce qui me conduit à ne pas émettre un avis défavorable mais à donner un avis de sagesse.
La navette nous permettra d’approfondir notre réflexion, car il existe probablement des agents ou des personnes morales de droit public ou de droit privé qui se trouvent confrontés à de telles situations sans que la disposition de l’article 40 – « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République » – leur soit applicable.
Cet amendement permettrait donc au parquet d’être destinataire d’un signalement même en dehors du champ d’application stricto sensu de l’article 40. C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse de votre assemblée.
L’amendement no 12 est adopté.
Vous avez de nouveau la parole, monsieur le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 74 .
La question peut paraître très technique mais, si l’on ne supprimait pas les alinéas 12 et 13 de l’article 9, les fichiers des fraudeurs aux transports feraient l’objet du même traitement que les fichiers de terroristes potentiels ou identifiés. Il faut savoir raison garder : je propose donc la suppression de ces alinéas.
Ce sera là ma seule divergence sensible avec le rapporteur au fond.
Ces alinéas résultent de l’adoption en commission du développement durable d’un amendement de la commission des lois, proposé initialement par le président Jean-Jacques Urvoas. Alors que la rédaction initiale de l’article 9 ne renvoyait la création du fichier qu’à un décret en Conseil d’État, il est apparu inconcevable qu’un tel instrument voie le jour en dehors du contrôle de la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés. La rédaction actuelle prévoit donc le double avis de la CNIL et du Conseil d’État sur le décret de création.
En supprimant les alinéas 12 et 13, on place implicitement le fichier sous l’empire de l’article 26 de la loi de 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, article relatif aux fichiers « qui ont pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des infractions pénales ou l’exécution des condamnations pénales ou des mesures de sûreté ». L’avis de la CNIL, dans ce cas, est toujours obligatoire et public, mais la création est effectuée par un simple arrêté et non par un décret. Le Gouvernement serait donc privé de l’expertise du Conseil d’État au moment de mettre en application l’article 9.
Pour ces raisons, la commission des lois est défavorable à l’adoption de cet amendement.
Le Gouvernement partage l’opinion de la commission saisie au fond, considérant que la procédure visée à l’article 27 de la loi de 1978 concerne habituellement le traitement de données particulièrement sensibles, par exemple « le numéro d’inscription des personnes au répertoire national d’identification des personnes physiques », ou encore les « données biométriques nécessaires à l’authentification ou au contrôle de l’identité des personnes ». On voit donc quels sont l’ambition et l’objet de ces procédures spécifiques. Cela ne retire rien au fait que le traitement de données en question respectera, après l’adoption de cet amendement, tous les autres points de la loi de 1978 et les règles de protection des données personnelles. Il nous semble seulement, compte tenu des exemples que j’ai donnés, que les alinéas visés procèdent d’une surinterprétation de la portée des dispositions à adopter. Même si la lutte contre la fraude est très importante, le dispositif n’a rien à voir, du point de vue de l’ampleur du traitement, avec le répertoire national d’identification des personnes physiques ou les données biométriques des personnes.
Le Gouvernement pense donc que l’amendement de la commission saisie au fond est sage et lui donne un avis favorable.
L’amendement no 74 est adopté.
L’article 9, amendé, est adopté.
Je suis saisi de deux amendements, nos 71 rectifié et 72 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 71 rectifié .
L’amendement no 71 rectifié est retiré.
Cet amendement de repli tend à repousser d’un mois seulement le délai de recouvrement des amendes, lequel est actuellement de deux mois. En effet, le texte institue une plate-forme d’interrogation dont le fonctionnement exigera lui-même des délais. Pour être sûr de recouvrer les amendes, il convient donc d’allonger un peu le délai, mais pas trop, de façon à ce que la transmission des informations par la plate-forme ne traîne pas trop.
Vous proposez donc de faire passer de deux à trois mois la durée de la phase pendant laquelle le contrevenant peut s’acquitter de la somme due à l’exploitant dans le cadre d’une transaction. Le Gouvernement partage votre préoccupation de donner au transporteur la plus grande marge de manoeuvres possible pour obtenir le paiement effectif des sommes. Une telle mesure empêcherait néanmoins l’administration et l’exploitant de décider d’un commun accord, dans certains cas, de basculer plus rapidement dans la phase de recouvrement avec l’émission d’une amende, comme le proposaient d’autres amendements. Aussi le Gouvernement s’en remet-il à la sagesse de l’Assemblée. Nous aurons la possibilité de retravailler le sujet à la faveur de la navette.
L’amendement no 72 est adopté.
L’article 10 est adopté.
L’amendement no 64 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 11, amendé, est adopté.
Vous avez de nouveau la parole pour soutenir l’amendement no 96 , mon cher collègue.
Il s’agit de la déclinaison du fameux contrat départemental. Nous avons travaillé avec M. Darmanin sur cette disposition qui, pour tout ou partie des communes d’une AOT intercommunale, pour peu que ces communes le souhaitent, ouvre la possibilité de donner une compétence aux polices municipales en matière de transports. Cela suppose de faire sortir celles-ci de leur ressort. Aussi prévoyons-nous que des communes pourront conclure entre elles des conventions permettant de déterritorialiser, pour l’exercice de la compétence transports, les missions des polices municipales. Le dispositif est très souple. Il pourra associer deux communes ou plus. La seule exigence est évidemment que ces communes soient concernées par une ligne de transport. L’idéal serait que toutes les communes d’une AOT intercommunale s’associent de la sorte, car toutes les polices municipales auraient alors une compétence générale sur l’ensemble du réseau. Mais nous laissons aux pouvoirs locaux le soin de s’organiser comme ils le souhaitent.
Le Gouvernement est très favorable à l’amendement. Cette initiative vient compléter heureusement le dispositif législatif proposé, qui permettra ainsi de traiter les questions au plus près du terrain et avec le plus d’efficacité possible, moyennant l’implication des élus et des acteurs locaux.
Je remercie le rapporteur d’avoir donné suite aux travaux assez longs que nous avons menés depuis le dépôt de cette proposition de loi. Nous sommes évidemment très favorables à cet amendement.
L’amendement no 96 est adopté.
L’article 12, amendé, est adopté.
Les deux amendements, nos 65 et 66 rectifié , qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée, sont rédactionnels monsieur le rapporteur…
Les amendements nos 65 et 66 rectifié , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
Nous en venons à l’amendement no 14 rectifié , dont les auteurs ne sont pas présents mais qui est repris par la commission.
La parole est donc à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Favorable.
L’amendement no 14 rectifié est adopté.
L’article 13, amendé, est adopté.
Nous arrivons presque au terme de cette proposition de loi avec des mesures de sécurité et de compétences de police. Nous en avions discuté avec M. le rapporteur : il semble assez étonnant de donner la compétence relative à la mobilité à des EPCI sans leur permettre d’assurer également la sécurisation des transports, alors que c’est une demande récurrente des usagers et parfois même des exploitants, de leurs contrôleurs et de leurs agents.
Le rapporteur a répondu à une partie de notre demande avec son amendement permettant de constituer, mais à quelques communes seulement, une police intercommunale qui pourrait intervenir sur une section de ligne de métro, de tramway, de bus, voire sur une ligne entière. Cet amendement prévoit d’ouvrir la possibilité, pour le président d’un EPCI – pas de n’importe quel EPCI, sans doute : ce sont les métropoles qui sont principalement concernées –, de se doter d’une vraie police intercommunale des transports.
Il existe de très rares cas de police intercommunale des transports, comme à Orléans, ville centre desservie uniquement par le tram et le bus. M. Grouard – dont je regrette qu’il ne soit pas parmi nous pour parler de sa ville – a rencontré les plus grandes difficultés pour construire ce service car certaines communes, au départ, ne voulaient pas déléguer leurs policiers municipaux. Or, pour créer une police intercommunale, les maires doivent déléguer leurs policiers municipaux. C’est assez compliqué et ce n’est possible que dans les petites AOT. Mais pour les métropoles de Lille ou de Lyon, qui regroupent beaucoup de communes et de polices différentes, certaines questions doivent être débattues : ces polices sont-elles armées ou pas, quels sont leurs horaires, disposent-elles de la vidéosurveillance ?
La création d’une police intercommunale n’est naturellement pas une obligation mais certaines AOT auraient intérêt à la mettre en place. La métropole lilloise, par exemple, compte 60 stations et deux lignes de métro. Il faut parfois une heure dix pour couvrir deux stations de métro, notamment sur la ligne 2 qui est la plus longue de la métropole. Chaque jour, ce sont 420 bus qui circulent ainsi que deux lignes de tram. Seul le service de police nationale dévolu à la sécurité des transports en commun, le SISTC, qui emploie 220 agents, assure la sécurité de tous ces transports, sans oublier les TER et les gares de Lille-Flandres et de Lille-Europe.
C’est un fonctionnement très complexe. Si nous adoptons cet amendement, et j’espère que le sourire du rapporteur cache une appréciation positive, nous pourrons permettre aux communes ou bien de ne pas assumer de compétences de sécurité dans les transports, ou bien de créer, à l’échelle d’une, deux ou trois communes, une petite police intercommunale, ou encore de créer une vraie police intercommunale sous l’égide du président de l’EPCI.
Avis défavorable, pour la modalité choisie et non pour la possibilité donnée à une structure intercommunale de se doter de services de sûreté. Elle peut le faire de deux façons : soit elle se dote en tant qu’AOT de son propre service de sûreté qui, sans avoir le statut de la SUGE ou du GPSR, aura celui d’un service de sûreté spécialisé dans les transports, placé sous le contrôle du CNAPS ; soit elle contracte avec une société privée de sécurité pour couvrir l’ensemble du réseau ; enfin, troisième possibilité, toutes les communes sont d’accord pour mettre leur police municipale à disposition de l’intercommunalité.
J’ajoute qu’il existe un autre élément de souplesse car si l’exploitant ne met pas en place un service de sûreté, dans le cadre du cahier des charges de la DSP, c’est l’AOT qui le met en place.
Mais nous ne souhaitons pas, pour prévenir toute confusion, favoriser le début du commencement de l’apparition d’une sorte de police intercommunale qui serait, au départ, en charge des transports puis se superposerait aux polices communales, avec naturellement incrémentation à toutes les AOT, à la région, qui aurait sa police régionale des transports, et ainsi de suite… Nous pensons que ce serait une source de confusion et que le dispositif actuel, compte tenu de la souplesse qu’il offre et du fait qu’il préserve totalement la compétence communale en matière de police de la voie publique, est très équilibré. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.
En réalité, à travers cet amendement, monsieur le député, vous envisagez la création d’une police intercommunale des transports, placée sous l’égide du président de l’EPCI.
Première observation, votre amendement aboutit, c’est un passage obligé, à confier la qualité d’OPJ – officier de police judiciaire – au président de l’intercommunalité, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Cela crée une difficulté car confier la qualité d’OPJ à une personne qui n’est pas investie d’un pouvoir de police générale est assez complexe. D’ailleurs vous ne le faites pas, ce qui nous ramène à ce qu’a indiqué le rapporteur.
On voit bien que s’il existe un jour une solution de cette nature, on n’y entrera pas par le biais d’une compétence ou d’un pouvoir en matière de transports, sauf si nous voulons le faire au niveau intercommunal, mais reconnaissons qu’il est plus facile d’entrer dans cette démarche par le biais des transports. S’il faut un jour affronter cette question, il conviendra de saisir les grandes associations d’élus. Or je ne sais pas ce que penseraient les élus de cette démarche – qui n’est pas la vôtre, pour l’instant, puisque vous vous limitez aux transports.
On voit bien qu’il n’est pas possible, pour l’instant, de mettre en place un OPJ qui ne soit pas doté d’un pouvoir de police générale. Mais il est clair que, derrière cette demande, se cache l’objectif de mettre en place une police intercommunale qui aurait les mêmes prérogatives que les polices municipales.
Soit vous souhaitez – vous ne le dites pas, mais c’est à cela qu’aboutit votre proposition – que ces questions ne soient plus de la compétence des maires, ce qui peut donner lieu à un débat très intéressant, qui ne serait pas illégitime, soit vous faites cette proposition, mais alors il faut aller jusqu’au bout de la démarche et l’assumer dans sa globalité, en tenant compte de sa difficulté et en saisissant l’ensemble des associations d’élus qui sont les interlocuteurs du Gouvernement.
La réponse proposée ici, qui est le fruit du travail auquel vous avez participé, est beaucoup plus pertinente. Elle évite les obstacles juridiques et, il me semble, améliore l’efficacité du dispositif tout en respectant les pouvoirs des différents niveaux, notamment celui des maires auquel le Gouvernement est très attaché. Avis défavorable à l’amendement.
« Être raisonnable en toutes circonstances ? Il faudrait être fou », disait Raymond Devos, grand Tourquennois s’il en est… Je comprends bien que le Gouvernement et le rapporteur ne puissent accepter cet amendement parce qu’il bouscule un certain nombre de choses, mais la question mérite largement d’être posée, et pas simplement aux associations d’élus. Le secrétaire d’État chargé des transports que vous êtes ne pourrait-il utilement en saisir l’Association des régions de France et l’Association des maires de France, dans un proche délai ?
La difficulté est que, par définition, les réseaux de transports traversent souvent plusieurs communes, le transport étant par nature intercommunal. L’officier de police judiciaire dépendant soit du ministre de l’intérieur, soit du maire, cela oblige l’OPJ qui passe d’une commune à une autre de descendre du tram ou du métro pour laisser la police de l’autre commune monter dans le tram ou le métro suivant. C’est une situation absurde. Il faut instaurer une réelle coordination, en espérant qu’aucun acte de délinquance ne se produise dans le tunnel, ou, par exemple, dans le passage entre Roubaix et Tourcoing. Et j’ai été sympathique, je ne vous ai pas parlé de la police transfrontalière ! Dans ma région, nous avons des réseaux, comme il en existe beaucoup en France, qui desservent l’autre côté de la frontière.
Ce qui est réellement important, c’est de comprendre les caractéristiques du domaine public des transports. Cela a été fait pour la fraude et l’identité et manifestement cela doit l’être aussi pour la sécurisation.
Certes, le rapporteur apporte certaines réponses et c’est pourquoi, monsieur le président, nous voterons cette proposition de loi, ce qui témoigne de notre attitude positive – et j’associe mon collègue Goujon à ce vote. Mais nous déplorons quelques petits manques.
Ainsi le rapport du sénateur Vandierendonck prévoit une police intercommunale qui ne soit pas uniquement dévolue aux transports. L’amendement que je propose permettait de créer cette police sans qu’il y ait prise en charge de l’OPJ mais une délégation sur le modèle expérimental d’Orléans, modèle intéressant pour les AOT.
Je pense aussi, monsieur le ministre, qu’au moment où le Gouvernement cherche des moyens pour éviter que la police nationale ne perde pas trop de temps à effectuer des tâches un peu moins intéressantes, si j’ose dire, que la lutte contre le terrorisme, dans l’intérêt de la nation ou du maintien de l’ordre, nous donnerons de plus en plus aux maires et aux intercommunalités des pouvoirs de police – et les transports seront sans doute les premiers concernés. C’en sera fini du maire qui contrôle sa propre police dans sa ville parce que les délinquants, eux, n’ont manifestement pas de règles et passent assez facilement les frontières intercommunales sans étudier le code général des collectivités territoriales ou le code des transports.
Je vous remercie, monsieur le ministre, mais, j’espère que vous ne m’en voudrez pas, je vais maintenir l’amendement et, seul contre tous, je le voterai.
L’amendement no 42 n’est pas adopté.
Défendre cet amendement, même si je suis certain qu’il sera rejeté, me donne l’occasion de poser à M. le rapporteur une question qui n’est pas tout à fait en lien avec cet amendement, dont l’objet a déjà été autorisé par le rapporteur dans un autre amendement. Il s’agit de faire en sorte que les AOT, dans le cadre de la DSP, puissent assurer la sécurisation des transports. J’espère, pour ma part, qu’elles n’utiliseront pas uniquement des agents de sécurité privés mais des agents reconnus par la DSP. Ce point a donné lieu à un débat philosophique qui rejoint celui que nous avons eu sur les polices municipales.
Monsieur le ministre, le président d’un club de football a le droit, conformément au code du sport, de demander à la police nationale, notamment aux CRS, de sécuriser le stade, l’État étant dédommagé pour cette présence. Il ne s’agit pas de prestations offertes à des sociétés, nous sommes bien d’accord, mais d’un dédommagement, pour reprendre le débat très intéressant que nous avons eu en commission.
Aujourd’hui les polices, nationale mais surtout municipales, mettent des effectifs à disposition des sociétés privées, quand elles ne sont pas en régie et en l’absence de délégation de service public, afin de lutter contre la fraude. Or, nous l’avons vu, il est plus facile de récupérer les recettes lorsque des OPJ effectuent les contrôles d’identité puisqu’ils permettent de recouvrer plus facilement les amendes.
Les policiers municipaux mis à disposition par le maire auprès de la société chargée de contrôler les titres de transport permettent à la société de gagner de l’argent, mais cela entraîne aussi des dépenses publiques puisque pendant qu’ils effectuent ces contrôles, ces policiers ne se trouvent pas ailleurs dans la commune.
Il y a une sorte de flou dans la législation, si j’ose dire, et quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup, comme le disait une dame qui n’habite pas très loin de chez moi…
Sourires.
Il est apparemment impossible que la police municipale, par exemple celle de Tourcoing, soit dédommagée – étant entendu qu’il ne s’agit pas de prestations de service – par une convention passée avec la société X, qui exploite le transport au nom de la DSP, alors que la présence des policiers lui permet de gagner beaucoup d’argent.
La sécurisation, cela ne consiste pas simplement à se balader dans le métro, dans le tram ou dans le bus, cela peut être aussi la lutte contre la fraude ou le fait d’aider les contrôleurs à faire leur travail.
Monsieur le rapporteur, les villes ne pourraient-elles signer, pourquoi pas sous l’autorité du préfet, si cela est prévu dans la DSP, des conventions avec ces sociétés afin qu’elles soient dédommagées, et ainsi effectuer, contractuellement, des opérations communes contre la fraude ?
C’est une question intéressante, mon cher collègue, et je comprends tout à fait qu’un maire puisse se la poser. Je pense que nous devrons en étudier la possibilité sur le plan juridique.
Mais mettre à la disposition d’une activité privée, comme la sécurisation d’un stade et de deux équipes de football, et mettre à la disposition d’une activité de service public, fût-elle assurée, sous délégation de service public, par une entité privée, ne sont pas des opérations de même nature. Pourquoi ? Parce que ces entités de service public sont le plus souvent subventionnées, sous forme de subventions d’équilibre, et, le plus souvent, le tarif ne paie pas le coût. Lorsque vos polices municipales participent au recouvrement de sommes qui pourraient provenir de la réduction de la fraude, elles rendent aussi service à l’AOT puisque celle-ci a moins besoin de contribuer, en tant que de besoin, par le biais de subventions d’équilibre.
Je ne suis pas du tout certain que nous puissions transposer une prestation de service d’une collectivité publique à un acteur privé en prestation de service d’une collectivité publique à cette autre collectivité publique qu’est l’AOT.
En tout état de cause, je ne suis pas sûr que la police nationale, dans le cadre de sa mission régalienne, vous demande des dédommagements, dans l’exercice de ses missions sur votre territoire, puisqu’elle le fait au service de la collectivité publique communale.
En bref, il serait intéressant d’étudier la question mais ce n’est pas, me semble-t-il, un contrat de même nature puisque vous êtes partie au contrat aux deux bouts, si je puis dire : au niveau de la délégation de service public, puisque vous faites partie de l’AOT si celle-ci est intercommunale. C’est en quelque sorte un service que vous vous rendez à vous-même.
C’est un point qui mérite d’être approfondi et étudié de près, et je suis sûr que le Sénat nous apportera des éclaircissements.
Avis défavorable.
L’amendement no 39 n’est pas adopté.
Je suis saisi de l’amendement rédactionnel, no 67, de M. Gilles Savary, rapporteur.
L’amendement no 67 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisi de l’amendement de précision, no 68, de M. Gilles Savary, rapporteur.
L’amendement no 68 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisi de l’amendement rédactionnel, no 69, de M. Gilles Savary, rapporteur.
L’amendement no 69 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 14, amendé, est adopté.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Philippe Duron, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord, au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, féliciter notre rapporteur Gilles Savary pour le travail considérable et très technique qu’il a effectué ; je voudrais également féliciter et remercier le rapporteur pour avis Sébastien Pietrasanta qui a enrichi le texte et l’a éclairé, en particulier sur ses aspects juridiques, qui étaient fort complexes, et enfin remercier M. le secrétaire d’État qui a pleinement soutenu et enrichi cette initiative parlementaire.
Nous voterons ce texte, qui nous donne satisfaction pour deux raisons.
D’une part, il renforce la lutte contre la fraude, véritable fléau pour les compagnies de transport. Nous l’avons rappelé au cours de la discussion. Je remercie particulièrement la commission dont les amendements, à l’article 14, introduisent un dispositif de lutte contre les harcèlements sexistes dans les transports. La mesure fera date.
D’autre part, il était essentiel d’agir après l’attentat du Thalys. Il existait des dispositifs très puissants, comme le plan Vigipirate ou la vidéosurveillance, mais nous avons perçu, après la série d’attentats auxquels nous avons malheureusement été confrontés, qu’il fallait aller plus loin. Ce texte permet de le faire, notamment dans les transports, avec la vérification d’identité, la fouille des bagages et les fouilles au corps, mais il préserve les libertés essentielles, notamment la liberté de circulation des Français.
C’est pourquoi le groupe SRC le votera avec enthousiasme.
Avec une certaine satisfaction, mais sans emballement non plus, notre groupe votera la proposition de loi. Hormis le petit raté de cet après-midi, dont il n’est pas le seul responsable, le rapporteur a su écouter l’opposition lors du travail mené en amont sur les deux propositions de loi, puis lors de l’examen du texte par la commission.
Sur certains points, nous aurions pu aller plus loin, mais sans doute la frustration que j’exprime est-elle le lot de parlementaires et d’un rapporteur essayant de faire voter la rédaction la moins exposée à la censure et la plus facile à appliquer.
L’heure est à l’urgence en matière de lutte contre le terrorisme, de lutte contre la fraude, qui est très coûteuse, et de sécurisation. Celle-ci a été très absente des transports en commun, quels qu’ils soient, ces dernières années. On peut toutefois regretter que nous n’ayons pas adopté une vision plus globale. Il aurait été bon de mener une petite mission d’information sur les questions qui nous occupent.
Nous savons que le secrétaire d’État saura saisir les élus locaux comme le Parlement sur ces questions. Il évaluera les politiques publiques. Il aidera la police nationale, les usagers et les élus, à qui les régions ou les intercommunalités confient souvent des compétences en matière de mobilité, sans toutefois y ajouter de compétences en matière de sécurisation des lieux. Cette vision que l’on pourrait qualifier de schizophrénique reflète l’état de notre droit.
Quoi qu’il en soit, je le répète, nous voterons le texte.
La proposition de loi est adoptée.
Nous avons mené à bien un travail honorable, qui fera date. La situation d’urgence et le calendrier du débat expliquent que les bancs de l’hémicycle ne soient pas très remplis. Nous nous sommes beaucoup réunis ailleurs. Le plus souvent, en effet, c’est hors de l’hémicycle que nous travaillons, inlassablement. En vue de ce texte, nous avons procédé à de nombreuses consultations.
Monsieur le président, je vous remercie d’avoir présidé cette séance avec une grande impartialité, et vous, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir participé au débat.
Je remercie le rapporteur pour avis de son apport décisif. Merci également à nos collaborateurs du ministère de l’intérieur, du secrétariat d’État chargé des transports et de l’Assemblée nationale.
Je rends hommage à nos collègues de l’opposition, notamment à M. Darmanin, qui a fourni un travail considérable en commission, et à M. Goujon. Ce texte honore l’Assemblée nationale.
Je remercie enfin tous nos collègues présents ou non dans l’hémicycle, qui ont travaillé sur le texte. Nous attendons à présent que le Sénat l’enrichisse. J’espère qu’il sera opérationnel dès février.
Le Gouvernement s’associe aux remerciements que les députés ont adressés au rapporteur. M. Savary a effectué un travail de qualité en un temps bref, et s’est mis à la disposition de tous les interlocuteurs.
Chacun s’en souvient, après la tentative d’attentat du Thalys, lors de la réunion organisée par Bernard Cazeneuve, nous avons essayé de répondre concrètement à la question : que pouvons-nous faire ? Dès le 29 août, certaines réponses induisaient des modifications législatives, car le cadre juridique de la SUGE ne permettait pas d’augmenter l’efficacité des pouvoirs, donc du personnel.
Le Gouvernement a soutenu l’initiative du groupe SRC. Je remercie les groupes de l’opposition qui se sont associés à sa démarche. Chacun connaît la suite. Puisque nous devions aussi nous pencher sur le problème de la fraude, nous nous sommes demandé si nous pouvions aborder les deux sujets dans le même texte. Les débats ont montré qu’il fallait être vigilants pour adopter des réponses spécifiques à chacun d’eux, en évitant de glisser par inadvertance de l’un à l’autre.
Le texte que vous venez de voter rapidement, après un travail sérieux, est important. Le Sénat l’examinera en janvier, après quoi, la procédure d’urgence ayant été déclarée, les dispositions entreront rapidement dans le droit positif.
Nous avons besoin d’outils juridiques pour mener efficacement la lutte pour la sécurité et contre le terrorisme, qui constitue aujourd’hui une priorité aux yeux des Français. Nous savons tous – les représentants des groupes l’ont rappelé – qu’il existe une fragilité, une situation de risque dans les transports. Il nous faut des outils afin que nos concitoyens puissent de déplacer en toute sécurité, assurés que nous prenons toutes les dispositions pour répondre à leurs préoccupations.
Par ailleurs, si nous pouvons faire baisser la fraude anormalement élevée dans les transports, ce sera une démarche honorable du point de vue de la responsabilité de la puissance publique. Au moment où chacun parle de la citoyenneté, il faut savoir que, dans la République, il existe des droits et des devoirs. Ceux-ci ne sont pas tous du même niveau, mais payer son déplacement quand on emprunte un transport public participe de ce qu’est la citoyenneté au quotidien.
Je vous remercie tous d’avoir contribué à ce travail, auquel le Gouvernement s’associe largement.
Applaudissements sur tous les bancs.
Prochaine séance, lundi 11 janvier 2016, à dix-sept heures :
Questions sur la politique de la gestion des déchets et l’économie circulaire.
Mes chers collègues, je vous souhaite de bonnes vacances, à vous ainsi qu’aux fonctionnaires de l’Assemblée nationale et aux collaborateurs des groupes. Joyeux Noël et, par anticipation, bonne année !
La séance est levée.
La séance est levée à dix-sept heures dix.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly