Séance en hémicycle du 14 janvier 2016 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de Mme Brigitte Allain visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation (nos 3280, 3355).

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Brigitte Allain, rapporteure de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la présidente, monsieur le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, madame la présidente de la commission des affaires économiques, chers collègues, le 15 décembre 2015, la commission des affaires économiques adoptait cette proposition de loi, qui vise à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation.

Cette proposition de loi répond à une réelle attente citoyenne. La crise financière, économique, sociale et environnementale a d’abord créé des frustrations individuelles et un sentiment d’impuissance des élus territoriaux. Mais, ces dernières années, les citoyens ont au contraire décidé de relever le défi. Selon un sondage IFOP, réalisé à la demande de l’association « Agir pour l’environnement », 76 % des Français soutiennent cette proposition de loi, ce dont je me réjouis.

Face à une concurrence mondiale exacerbée, qui détruit nos emplois et notre environnement, de très nombreux consommateurs prennent conscience qu’en choisissant de manger local, ils concourent au maintien de l’agriculture paysanne française. Pour s’impliquer réellement dans la durabilité de ces productions, ils ont permis les premières contractualisations avec les associations pour le maintien d’une agriculture paysanne – AMAP. À la recherche de produits sains pour leur santé et celle de leurs enfants, et sensibilisés au respect de la nature, ils ont permis le développement de fermes en agriculture biologique. Ce faisant, les citoyens ont intégré leur capacité à intervenir dans les politiques agricoles.

Toutes ces démarches, ici et ailleurs dans le monde, ont contribué à l’émergence du droit à la souveraineté alimentaire, opposable au droit des accords du commerce mondial. Enfin, en 2014, je me félicite que notre travail législatif ait permis d’inscrire la souveraineté alimentaire dans le droit français.

De là découle naturellement la proposition de loi que je vous présente. L’un des axes novateurs de la loi d’orientation agricole réside dans l’ancrage territorial de la production pour l’alimentation. Ce dernier nous permet de refonder une politique agricole adaptée aux enjeux actuels et à venir. Refonder une politique agricole ambitieuse et moderne ne consiste pas à faire table rase du passé ou de ce qui a réussi. Il ne s’agit pas davantage d’opposer filières agro-industrielles et circuits courts.

Pour les agriculteurs, comme pour les élus, les projets alimentaires territoriaux, désormais inscrits dans la loi, permettent de retisser le lien social entre citoyens, de garder la valeur ajoutée de nos productions sur nos territoires et de créer des emplois, autour du besoin alimentaire quotidien de chacun d’entre nous. Dorénavant, ce sont les élus des territoires, les citoyens et les agriculteurs qui définiront ensemble leurs besoins alimentaires. Sur le fondement d’un diagnostic partagé, ils décideront quoi produire, et comment le produire.

Cette proposition de loi résulte d’un travail collectif d’auditions, de consultations et de discussions mené au sein d’une mission d’information, qui a donné lieu à la publication d’un rapport, intitulé « Et si on mangeait local… ». Nommée rapporteure, j’ai invité mes collègues à participer à un groupe de travail afin de recueillir leurs avis. Et, depuis l’examen en commission, des échanges ont eu lieu pour affiner les contours de cette proposition de loi.

Quelle est, précisément, l’ambition de cette proposition de loi ? Son objectif est de créer un ancrage territorial de l’alimentation, par le biais de la restauration collective, publique comme privée. L’ancrage territorial de l’alimentation est étroitement lié au développement d’une alimentation de qualité. Les circuits de proximité et les pratiques agricoles agro-écologiques sont pourvoyeurs d’emplois, économes en intrants, moins polluants, et respectueux de l’environnement et des hommes. De nombreux élus des collectivités locales et des acteurs associatifs en font un levier de développement local. En effet, l’alimentation est l’affaire de tous.

Ce texte prolonge la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, du 13 octobre 2014, et place l’ancrage territorial de la production agricole au rang des objectifs de la politique alimentaire. Il répond par ailleurs à l’engagement du Président de la République d’introduire 40 % de produits bio et durables dans les restaurants collectifs. La demande citoyenne fait évoluer nos politiques. Quand les cantines se rebellent, les enfants sont au coeur de la loi.

L’article 1er de la présente proposition de loi vise à introduire, dès 2020, 40 % de produits issus de l’alimentation durable, dont 20 % devront être issus de l’agriculture biologique, conformément à l’objectif gouvernemental du plan Ambition bio 2017. L’État et les collectivités territoriales s’engagent dans des dynamiques de territoire, afin de sécuriser les approvisionnements et les débouchés.

La définition de l’alimentation durable a fait l’objet de discussions en commission et nous avons travaillé, avec le ministère de l’agriculture et nos collègues, sur les contours de cette définition – nous y reviendrons lors de l’examen des amendements à l’article 1er. La restauration collective sert annuellement plus de 3 milliards de repas et concerne 78 000 restaurants. Il est nécessaire de fixer des objectifs chiffrés, mais réalisables, pour le secteur public, et d’accompagner, aussi bien le secteur public que le secteur privé, dans cette démarche.

L’article 2 confie à l’observatoire de l’alimentation la mission de suivre l’évolution des circuits courts et de proximité. En liaison avec les observatoires régionaux existants, il s’assurera du respect des objectifs définis à l’article 1er de la loi.

L’article 4 prévoit d’intégrer à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises des exigences en matière de consommation alimentaire durable : choix de plats bio et locaux, cuisine sur place, lutte contre le gaspillage alimentaire et valorisation des déchets. Dans les restaurants d’entreprise, tous ces éléments pourront être valorisés.

L’article 5 permettra aux cuisiniers de la restauration collective de mentionner les plats « faits maison », afin de motiver les cuisiniers et personnels de service dans la promotion de leurs savoir-faire. Lors du déplacement de la mission d’information en Dordogne, les cuisiniers de la restauration collective, fidèles à la réputation du Périgord, ont déploré que leur volontarisme pour favoriser les produits locaux soit ignoré. Les producteurs eux-mêmes ont à coeur de faire connaître leurs pratiques respectueuses de l’environnement et les conditions de production. Tous peuvent ainsi s’impliquer dans une équipe pédagogique et encourager les consommateurs à partager leurs recettes. Manger local, c’est intégrer un territoire. La gastronomie française est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO : cela se cultive !

À l’article 3, dans le prolongement de la loi d’orientation agricole, les plans régionaux de l’agriculture durable – PRAD – deviennent les plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durable – PRAAD – et les acteurs de l’alimentation, aujourd’hui regroupés dans les comités régionaux pour l’alimentation – CRALIM – sont intégrés à la gouvernance des PRAAD. L’échelon régional est à même d’intégrer les politiques alimentaires et de favoriser une alimentation de proximité, et diversifiée, pour répondre à la demande.

Tous les signaux sont au vert. Tous ensemble – État, élus locaux, producteurs et acteurs économiques de l’agroalimentaire –, nous partageons l’ambition de créer une politique alimentaire qui renforcera l’attractivité de nos territoires et, par extension, des produits français dans leur ensemble.

Mes chers collègues, voter cette loi, c’est donner aux malades hospitalisés, aux résidents des établissements d’hébergement pour personnes âges dépendantes – EHPAD – et des institutions publiques un lien avec leur histoire gastronomique ; c’est donner à nos enfants et à nos jeunes le bonheur de savourer les fruits de leur territoire ; c’est leur donner le goût de leur pays, leur faire aimer notre terre, leur faire aimer la vie. Aussi, j’ai confiance en vous, et je pense que nous allons voter cette loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste, du groupe socialiste, républicain et citoyen, et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, c’est un texte d’initiative parlementaire que nous allons examiner aujourd’hui, mais il s’inscrit dans le droit fil d’une politique gouvernementale, que je voudrais commencer par rappeler.

L’ancrage territorial de l’alimentation est un sujet que j’ai voulu promouvoir dès mon arrivée à la tête de ce ministère. La première étape de cette politique a consisté, pour le ministère de l’agriculture, à reconnaître trois plateformes numériques qui existaient déjà, et qui avaient permis de développer des stratégies d’approvisionnement local à l’échelle de notre territoire et à l’échelle départementale : la plateforme Agrilocal, qui a connu un développement très important depuis lors, puisqu’une trentaine de départements l’utilise aujourd’hui ; la plateforme d’achats locaux des chambres d’agriculture, liée à l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture – APCA ; la plateforme de la Fédération nationale de l’agriculture biologique, enfin, qui existait déjà, mais que nous avons refondue et validée pour favoriser l’achat local.

Pourquoi l’achat local est-il important ? C’est d’abord une question d’ancrage territorial, mais c’est aussi, me semble-t-il, une façon de prendre en compte les évolutions à venir de nos économies. Aujourd’hui, le marché local a une grande importance, et il s’articulera de plus en plus avec des marchés régionaux, nationaux, européens et internationaux. Il importe de bien avoir à l’esprit que tous ces marchés offrent des débouchés et il faut, pour chacun d’entre eux, adopter une politique stratégique spécifique.

Vous avez rappelé, madame la rapporteure, qu’il ne s’agit pas d’opposer marché local et marché national, et encore moins de décider qu’un jour tout se fera au niveau local et qu’il n’y aura plus d’exportations au niveau international : non seulement cela ne marchera pas, mais cela ne correspond pas à la réalité économique. En revanche, développer des stratégies territoriales de circuits courts, comme on les appelle, voilà une stratégie qui existe déjà et qu’il faut encourager et développer. Tel est l’objectif que je poursuivais avec les fameuses plateformes.

Mais il faut aller plus loin, et votre proposition de loi cherche justement à fixer des objectifs ambitieux pour les collectivités locales et pour les achats en produits locaux, avec un objectif de 40 % de produits de qualité et de produits locaux, dont 20 % de produits de l’agriculture biologique. Ce sont là de grandes ambitions, qui marquent la volonté qui est la vôtre, mais aussi la nôtre, de développer ces circuits courts et cet ancrage territorial.

Après ce travail autour des plateformes, j’ai ouvert, dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, un autre champ de réflexion, qui a débouché sur la création des plans alimentaires territoriaux, issus d’un amendement que vous aviez vous-même présenté, madame la rapporteure. Il y a donc une parfaite continuité entre le débat sur la loi d’avenir pour l’agriculture, auquel vous avez participé, et la proposition de loi que vous présentez aujourd’hui.

Notre objectif était de construire un ancrage territorial pour l’alimentation, et surtout d’intégrer l’alimentation locale dans la stratégie du plan national pour l’alimentation. Mais il s’est également agi de faire de l’approvisionnement local une partie de la réponse à la crise de l’élevage, en lui trouvant de nouveaux débouchés, notamment dans la restauration collective des collectivités locales et des grandes administrations.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Ces initiatives commencent à voir le jour, avec les plans alimentaires territoriaux, et il faut absolument les encourager, car la crise de l’élevage, qui a commencé cet été, se poursuit malheureusement…

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

…avec des prix qui restent très bas.

Dans cette idée d’ancrage local de l’alimentation, il y a aussi, et je ne l’oublie pas, une piste ouverte pour tous les éleveurs qui connaissent aujourd’hui de grandes difficultés.

À la suite des plateformes et de la loi d’avenir, le ministère de l’agriculture a édité un guide visant à favoriser les achats locaux en donnant la capacité aux collectivités locales de fixer des critères et d’assurer des méthodes leur permettant de choisir l’achat local tout en respectant les règles des marchés publics. Avant d’être ministre – c’est, d’ailleurs, toujours le cas depuis que je le suis devenu –, j’ai souvent entendu des élus locaux accuser les marchés publics de les empêcher de faire le choix de l’ancrage local. C’est pourquoi ce guide, que nous avons envoyé sous format numérique à tous les maires de France et qui est à la disposition de tous les élus, rend, je le répète, tout à fait compatibles l’objectif de fixer des critères d’achat de produits locaux avec le respect des règles des marchés publics. C’est une étape importante dans la construction de la stratégie nationale de développement de l’alimentation locale.

L’ancrage local est enfin un des quatre piliers stratégiques du plan national pour l’alimentation, avec l’éducation à l’alimentation, la question sociale de l’accès à l’alimentation et la lutte contre les gaspillages. Ce corpus, qui prend désormais en compte ce souci et cette stratégie, sera utilement complété par la proposition de loi que vous examinez cet après-midi. Cette stratégie est à mes yeux déterminante aux plans non seulement économique mais également territorial, du fait qu’elle peut susciter une dynamique territoriale par la mise en oeuvre de choix de production. En effet, si l’alimentation locale est évidemment synonyme de circuits courts, encore faut-il être capable, dans une démarche volontariste, d’assurer à l’échelle territoriale un approvisionnement répondant, en quantité et en qualité, à la demande locale, ce qui implique d’organiser la production et de coordonner tous les acteurs. Il ne suffit pas que les élus, les collectivités locales ou les administrations prennent les bonnes décisions : à la volonté d’acheter au niveau local doit correspondre une offre locale suffisante. C’est un des défis qui restent à relever pour atteindre pleinement l’objectif que nous nous sommes fixé ensemble.

Les administrations de l’État ont pris leurs responsabilités en la matière en remettant à plat les accords sur les approvisionnements, ce qui permet de les renégocier en recourant à des critères favorisant l’achat local et de qualité. C’est un enjeu majeur.

Nous éditerons également, je l’espère avant l’ouverture du salon de l’agriculture, des guides plus simples encore, à destination de tous les acheteurs, pour faciliter l’application des critères nécessaires à la mise en oeuvre de l’approvisionnement local. Nous continuerons de travailler en la matière pour atteindre pleinement l’objectif de développement de l’alimentation locale et de l’ancrage territorial, ce qui implique, je le répète, d’assurer une offre locale suffisante pour répondre à la demande locale. C’est ainsi seulement que nous pourrons, concrètement, assurer des approvisionnements locaux et garantir des circuits courts.

Ce texte apporte un complément nécessaire en fixant des objectifs chiffrés ambitieux aux collectivités locales : pour les atteindre, je le répète, il faudra, à chaque étape, coordonner la demande locale et l’offre locale. Des délais de mise en oeuvre et d’organisation seront nécessaires pour assurer cette coordination afin de constituer des circuits d’alimentation locaux qui, pour les territoires, constitueront un élément sociologique d’organisation tout en provoquant une dynamique économique et en répondant, partiellement, à la crise que traverse l’élevage dans toutes les régions françaises. Voilà pourquoi je suis satisfait de l’examen de ce texte, auquel je participerai. Avec cette proposition de loi, l’Assemblée fera franchir une étape supplémentaire à une stratégie que le Gouvernement partage.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Cécile Duflot.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, la question est simple : et si on mangeait local, bio et de qualité ? C’est une aspiration de plus en plus forte des Français, qui en ont compris l’intérêt à la fois économique, sanitaire et environnemental.

Une pétition de plus de 110 000 signatures soutient la proposition de loi qui a été présentée par Brigitte Allain, car relocaliser la production est tout d’abord extrêmement favorable à l’emploi local, première préoccupation des Français. Je tiens à rappeler qu’un hectare cultivé de manière biologique crée deux fois plus d’emplois qu’un hectare cultivé de manière conventionnelle. Les circuits courts sont capables de susciter de nouvelles filières de transformation et de distribution et de créer du lien social entre le producteur et le consommateur dans une société qui en manque cruellement. Le travail de qualité du producteur est valorisé. Le consommateur est satisfait et l’économie locale est revivifiée. De plus, l’expérience montre que les producteurs biologiques et ceux qui pratiquent les circuits courts sont moins touchés par les crises.

L’agriculture durable et de proximité est également plus protectrice des sols, des réserves en eau et du climat, car elle limite le recours aux produits phytosanitaires, préserve les ressources naturelles et respecte le vivant. Une alimentation, comme le propose ce texte, mieux ancrée dans son territoire, ce sont moins de camions sur les routes, moins de polluants dans nos sols et moins d’atteintes à la biodiversité.

Manger bio, local et de qualité protège enfin notre santé. En effet, l’épidémie de maladies chroniques à laquelle notre pays est confronté n’est pas sans lien avec la détérioration de la qualité de notre alimentation. Or les produits de l’agriculture biologique présentent des qualités nutritives et sanitaires bien supérieures aux produits standards. Ils nous évitent d’ingérer des produits phytosanitaires, des antibiotiques, des OGM et des hormones. De plus, les circuits courts diminuent le recours aux procédés de conservation, dont la nocivité a été démontrée, ainsi que les risques, en termes de traçabilité et de fraude, que l’affaire de la viande de cheval nous a sinistrement rappelés. Partout, en France et dans le monde, la question de la qualité de l’alimentation et celle de son lien avec le territoire prennent de l’ampleur. Nombre de collectivités locales s’en sont emparées.

Manger local, manger mieux, manger bio, manger des produits de saison et de qualité doit être accessible à tous dans notre pays. Or quel meilleur vecteur que la restauration collective, qui sert en France 11 millions de repas par jours, s’adresse souvent à des publics fragiles comme les personnes âgées, les enfants et les jeunes, et a toujours eu, historiquement, dans notre pays, une vocation sociale ? Avec près de 3 milliards de repas servis en France chaque année par la restauration collective, le restaurant scolaire, d’entreprise ou d’établissement public est un lieu idéal et facile de démocratisation de la nourriture de qualité.

Nous voici donc aujourd’hui réunis pour débattre de mesures pragmatiques, accessibles et efficaces pour activer ce levier. Je salue ma collègue Brigitte Allain pour le travail acharné qu’elle a mené depuis plusieurs années pour défricher le sujet, en préparer la traduction législative conjointement avec le ministère de l’agriculture – je vous en remercie, monsieur le ministre – et des parlementaires de tous les bords, construire une mobilisation associative et citoyenne allant jusqu’à saturer nos boîtes mail – chacun ici peut en témoigner – et, surtout, nous et vous convaincre, mes chers collègues. Le tout dans une période où notre pays est en proie à une crise démocratique sévère que nous, députés, ne pouvons plus nier.

« À quoi servent les politiques ? » entend-on souvent sur le terrain… Eh bien, ce texte constitue justement une réponse. Une telle initiative parlementaire, madame Allain, est capable de réconcilier les Français avec les politiques car elle touche à leur quotidien immédiat. Elle est capable de rassurer les Français car elle leur dessine un monde meilleur pour eux, leurs enfants et les générations futures. Elle est capable d’apaiser notre pays car elle propose des solutions concrètes aux problèmes qui le préoccupent au premier chef – l’emploi, la santé, l’environnement –, problèmes qui sont évidemment liées.

Cette ambition de 40 % de produits locaux, de saison, bio et de qualité dans les cantines est à notre portée. Elle a été esquissée lors du Grenelle de l’environnement, partagée par le Président de la République actuel et rappelée par le Premier ministre lors de la Conférence environnementale. L’heure est venue de passer à l’action. Tous les Français veulent une alimentation plus durable. En votant pour ce texte, vous saisirez une formidable occasion d’engager la restauration publique et d’accompagner la restauration privée dans cette très bonne direction.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur certains bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, chers collègues, permettez-moi tout d’abord de féliciter la rapporteure pour cette belle proposition de loi. Depuis longtemps, chaque fois que les médias s’intéressent à la question de l’ancrage territorial de l’alimentation et relatent la provenance invraisemblable des aliments entrant dans les menus de nos enfants à la cantine, nous sommes éberlués. Comment en sommes-nous arrivés là ? Est-ce inéluctable ? Alors que la France possède une agriculture puissante et que sa gastronomie est reconnue dans le monde entier, la pression sur les coûts aboutit à la recherche d’aliments toujours moins chers et donc de moins bonne qualité.

Aujourd’hui, 70 % de la viande consommée dans les cantines françaises est importée quand 70 % de la viande consommée dans les cantines allemandes provient d’Allemagne. Alors même que les filières françaises de viande et de bétail sont parmi les meilleures du monde, nous sommes en recul. Les cantines et restaurants de l’Assemblée nationale proposent des kiwis bios du Chili ou de Nouvelle-Zélande alors que les kiwiculteurs français sont parmi les meilleurs. Dans les cantines de certains départements du sud-ouest, cher à notre groupe parlementaire, départements dont on connaît l’appétence pour les bonnes choses, on servait aux enfants, il y a quelques mois encore, tenez-vous bien, du lapin chinois ! Non, mes chers collègues, ce n’est pas un canular. Le lapin chinois ne coûte quasiment rien. Il permet de réduire au maximum le prix des menus.

Or, la généralisation de ces pratiques à l’échelle de la France provoque une crise structurelle chez nos paysans, avec des phases aiguës et douloureuses pour les plus fragiles. Voilà à quoi aboutit la logique de l’industrialisation extrême de notre agriculture mondialisée et d’une économie fondée sur un libéralisme totalement dérégulé. On va finir par marcher sur la tête.

Malheureusement, les exemples comme celui du lapin chinois ne sont pas isolés : Mme la rapporteure pourrait probablement en citer de nombreux autres, tout aussi extravagants. Il s’agit donc maintenant de dépasser le stade du constat : tel est l’objectif de votre proposition de loi, madame la rapporteure. Depuis plus d’un an, vous vous consacrez à un travail de fond comme rapporteure de la mission parlementaire d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires créée en novembre 2014. Des dizaines d’heures d’auditions, une liste des personnes auditionnées impressionnante, des visites effectuées partout en France : le rapport que vous avez remis en juillet 2015 est excellent et fait autorité.

Sa lecture permet de comprendre la complexité technique et juridique du sujet, qu’il a fallu maîtriser pour aboutir à une proposition de loi, à la fois ambitieuse et solide au plan juridique, visant à favoriser la relocalisation de notre alimentation. Vous avez formulé quarante-neuf propositions déclinées aux niveaux européen, national et local, dont certaines sont audacieuses et beaucoup sont très attendues tant par nos paysans que par nos concitoyens.

Toutes ces propositions ne relèvent pas du domaine législatif, mais vous avez réussi à extraire les plus importantes pour construire la remarquable proposition de loi qui arrive aujourd’hui dans cet hémicycle.

Madame la rapporteure, relocaliser l’alimentation en passant par un encadrement de la restauration collective publique et privée est un objectif louable et déjà ancien. La loi Grenelle 2 de 2009 contenait des mesures en la matière, puis il y eut divers plans visant à encourager les circuits courts et un très bon travail de l’actuel gouvernement et du ministre de l’agriculture pour sensibiliser les collectivités locales.

Monsieur le ministre, l’engagement de l’État est utile, mais la principale faiblesse de ce travail gouvernemental réside dans le caractère facultatif des mesures adoptées. Vous croyez dans les bonnes volontés : tant mieux ! Mais vous n’avez pas passé le cap de l’inscription dans la loi d’obligations et de sanctions.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Ce n’est pas possible !

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Il a donc fallu le travail de notre rapporteure pour proposer d’inscrire dans la loi l’obligation de servir dans les restaurants collectifs un pourcentage de produits relevant de l’alimentation durable privilégiant des produits de saison et de qualité, en veillant à la proximité géographique. La présente proposition de loi vient donc compléter utilement le travail du Gouvernement.

Je me félicite que l’article 1er fixe des seuils de produits issus de l’agriculture biologique – 40 % en 2020 –, mais je regrette qu’il n’impose aucune norme contraignante sur leur proximité géographique. La rédaction actuelle de l’article n’interdit pas que ces produits bio viennent d’autres pays ou d’autres continents. Je serai donc attentif à vos précisions sur ce sujet lors de notre discussion.

Vous l’aurez compris, madame la rapporteure : nonobstant ces quelques remarques, le groupe RRDP est très favorable à votre proposition de loi. La France est une nation agricole puissante, et elle doit le rester. Nous avons tous hérité du modèle agricole français, nous sommes tous redevables du travail des paysans. Cette proposition de loi est une pierre supplémentaire permettant de renouer avec une agriculture paysanne de qualité, une agriculture correspondant aux exigences de qualité, d’authenticité et de connaissance des produits. Cette proposition de loi satisfait tous les gourmets – ils sont nombreux dans notre pays ! –, mais elle est aussi un bon instrument pour notre santé, pour notre environnement et pour notre économie. Le groupe RRDP la votera donc avec bonheur.

Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, l’enjeu qui nous réunit aujourd’hui est essentiel au regard de l’approfondissement des logiques libérales, au niveau mondial comme au niveau européen – des logiques qui refusent plus que jamais de prendre en compte la spécificité, la singularité d’un domaine qui touche à la satisfaction d’un besoin humain fondamental.

Votre texte, madame la rapporteure, revient sur deux sujets essentiels : celui de la qualité de notre alimentation et des repas servis dans la restauration collective, et celui de la relocalisation des productions agricoles. Nous avons là deux volets de la politique alimentaire qui doivent être traités de façon conjointe : en effet, l’action politique ne peut se résumer à essayer d’améliorer la qualité de notre alimentation sans agir sur le changement de nos modes de production agricole.

Le contenu des repas servis par la restauration hors-domicile, en particulier par la restauration collective, est un sujet inscrit dans le débat public et parlementaire depuis quelques années, en lien avec une prise de conscience générale en faveur d’une alimentation saine et d’une agriculture durable. Depuis la loi Grenelle 1 sont même fixés des objectifs relatifs à la part de produits biologiques et sous signe d’identification de la qualité et de l’origine dans la restauration collective de l’État. J’avais alors vivement défendu l’idée que toutes nos productions sous signe d’identification de la qualité et de l’origine, c’est-à-dire nos appellations d’origine contrôlée ou protégée – AOC et AOP –, nos indications géographiques protégées – IGP – et nos labels rouges, devaient bénéficier des mêmes objectifs que les productions en agriculture biologique. Cette disposition avait été reprise dans le texte, mais sans y adjoindre les indispensables moyens de suivi et de contrôle.

Rappelons aussi pourquoi nous sommes globalement tous convaincus de la nécessité d’engagements forts en faveur d’une alimentation durable dans la restauration collective : c’est avant tout parce que les volumes concernés sont importants et qu’ils croissent chaque année. En effet, quelque 3 milliards de repas sont servis chaque année par la restauration collective publique et privée, sans compter près de 10 milliards de repas servis par la restauration hors-domicile. Devant l’importance de ces volumes, l’action publique peut exercer des effets de levier considérables pour garantir des débouchés stables à nos productions locales et nationales de qualité, souvent porteuses de valeur ajoutée, et surtout permettre un meilleur partage de cette valeur ajoutée au bénéfice des producteurs.

Si je partage pleinement l’ambition de ce texte, je vous invite toutefois à faire un constat lucide : sans moyens financiers et humains supplémentaires, il est relativement illusoire de penser que les collectivités publiques s’inscrivent spontanément, et surtout massivement – car c’est bien là l’enjeu –, dans des démarches favorisant les productions de proximité, saisonnières ou sous signe d’identification de la qualité et de l’origine.

Nous ne pouvons faire ici abstraction du contexte dans lequel nous placent des choix budgétaires qui contraignent chaque jour les services de l’État et des collectivités territoriales à rogner sur leurs dépenses de fonctionnement. Malheureusement, ces coupes sombres dans la dépense publique se répercutent directement sur la capacité d’adapter, voire de maintenir les services publics locaux comme celui de la restauration scolaire. Nous le savons : plus de produits en circuits courts, plus de produits de proximité, de saison et sous signe de qualité, ce sont des prix d’achats souvent supérieurs et des besoins humains supplémentaires pour transformer ces produits bruts jusqu’à l’assiette.

C’est d’ailleurs, de mon point de vue, l’un des enseignements majeurs que nous devrions tirer des belles envolées du Grenelle de l’environnement et des lois sur l’agriculture adoptées successivement ces dernières années : sans engagement budgétaire à la hauteur, l’action publique n’est pas efficace.

Bien sûr, en disant cela, je ne minore absolument pas les efforts et les initiatives locales, départementales, régionales voire gouvernementales conduites depuis une dizaine d’années en faveur d’une alimentation relocalisée. Elles tiennent souvent à la grande détermination d’associations citoyennes, mais aussi d’élus locaux et d’agents du service public venant démontrer que d’autres choix sont possibles. Mais admettons que nous sommes très loin d’un effet d’entraînement conduisant à remettre en cause les dynamiques agricoles dominantes et les modes de consommation du plus grand nombre.

Il faut donc des moyens nouveaux pour répondre à des exigences nouvelles en matière de restauration collective. Ce devrait même être une priorité pour toutes nos cantines scolaires, quand des dizaines de milliers d’enfants, de collégiens, de lycéens et d’étudiants ne bénéficient que d’un seul repas équilibré par jour. Pourquoi ce repas ne serait-il pas à la fois équilibré nutritionnellement et de grande qualité ? C’est pourquoi j’ai souhaité aborder cette question fondamentale des moyens dans le cadre d’un amendement.

J’ai également souhaité déposer un autre amendement portant sur la formation des agents et gestionnaires de la restauration collective en matière de connaissance des moyens réglementaires et techniques pour faciliter l’achat de produits nationaux, locaux ou sous signe de qualité. Si les contraintes réglementaires en matière de passation des marchés publics sont souvent dénoncées, les décisionnaires des collectivités disposent déjà de réelles possibilités, notamment en matière de rédaction des appels d’offres. Ces possibilités sont insuffisamment connues ou apparaissent trop contraignantes : il y a donc un vrai besoin de formation dans ce domaine. Le ministère a d’ailleurs diffusé une information sur cette question.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Une excellente information !

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C’est bien entendu sans surprise, madame la rapporteure, que les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine – pas seulement ceux du Front de gauche – voteront cet excellent texte qui va dans la bonne direction et donne du sens à notre volonté partagée. Mais notre soutien appuyé à votre initiative ne saurait nous dispenser d’un débat plus global sur le modèle agricole et alimentaire européen que nous devons reconstruire.

La dérive libérale dans laquelle entendent nous enfermer les fondamentalistes du marché et de la concurrence libre et non faussée est profondément contraire à l’esprit de ce texte comme à nos convictions communes. Nous avons besoin d’un nouveau pacte alimentaire européen, d’une politique globale, seule capable de transformer en profondeur tout à la fois nos modes de production et nos modes de consommation alimentaires. Aujourd’hui, les conditions structurelles d’un vaste plan de démantèlement de ce qui reste du tissu agricole de nos territoires sont réunies. La dérégulation des marchés, les accords de libre-échange, le développement d’une agriculture industrielle et la pression permanente sur les prix d’achat verrouillent littéralement tout volontarisme politique national. Surtout, ces choix idéologiques portent d’abord atteinte aux productions les plus qualitatives, les plus respectueuses de l’environnement, et aux exploitations agricoles familiales implantées au coeur de nos territoires.

Nous venons d’en avoir une illustration la semaine dernière : l’acharnement de la Commission européenne à traquer tous ceux qui entendraient discuter de la question des prix agricoles et de la relocalisation des productions est sans limite ! Nous apprenions en effet qu’une enquête venait d’être ouverte « sur des comportements anticoncurrentiels allégués », sur des infractions suspectées aux traités communautaires « du fait de la conclusion d’un ou plusieurs accords sur les prix ou sur des restrictions aux importations », après les tables rondes organisées l’été dernier par vous-même, monsieur le ministre, pour tenter de répondre à la chute des prix des filières bovine, porcine et laitière.

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Nul doute que les propositions que je porte, avec les députés du Front de gauche, appelant à une action publique forte en faveur de l’encadrement des marges des prix alimentaires et d’une garantie des prix d’achat aux agriculteurs seraient, si elles devaient être adoptées, vécues comme un véritable traumatisme idéologique pour la police libérale de Bruxelles !

Toujours plus éloignée des réalités du terrain, de la mutation économique, écologique et sociale à opérer du niveau local jusqu’au niveau communautaire, la Commission européenne s’arc-boute sur son vieux logiciel inadapté aux enjeux du XXIe siècle et parfaitement contraire à l’intérêt général alimentaire des 500 millions d’Européens.

Je crois, mes chers collègues, que nous avons besoin d’affronter encore plus clairement et plus collectivement ces orientations politiques contraires aux principes fondateurs de souveraineté et de sécurité alimentaires. Nous avons besoin d’affronter politiquement des choix qui tournent le dos à l’agroécologie et à toute perspective de relocalisation des productions et de réappropriation territoriale de notre alimentation. Il faut créer de nouveaux rapports de force au niveau européen. La représentation nationale doit mener une action bien plus déterminée en ce sens, aux côtés des autres parlementaires européens, des agriculteurs et des citoyens de toute l’Europe. C’est en tout cas le voeu que je formule dans ce domaine pour l’année 2016.

Madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés du groupe écologiste, votre proposition de loi va dans le bon sens. Elle n’est pas seulement symbolique : elle contient des dispositions précises. Nous allons évidemment la soutenir sans aucune ambiguïté, sans aucune retenue. Pour autant, nous sommes conscients des efforts que nous avons à faire pour mettre en oeuvre une politique agricole véritablement durable, sans laquelle tous les efforts que nous pouvons déployer sont voués à l’échec.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, le groupe UDI se félicite que nous examinions aujourd’hui un texte dont l’objectif principal est de valoriser une alimentation durable et de qualité au sein de la restauration collective. Notre groupe a toujours été très attaché à la défense d’une alimentation de proximité, reposant sur la richesse et la diversité de nos territoires. Notre savoir-faire, en matière d’agriculture notamment, mérite d’être davantage mis en valeur, aussi bien sur les étals de nos supermarchés que dans le domaine de la restauration. En ce sens, nous ne pouvons que saluer l’initiative prise par le groupe écologiste de proposer un texte ambitieux – peut-être un peu trop, d’ailleurs, j’y reviendrai par la suite – visant à favoriser l’ancrage territorial dans notre alimentation.

Depuis la loi d’avenir pour l’agriculture, le groupe UDI n’a eu de cesse de défendre une vision plus responsable de l’agriculture, en soutenant notamment le concept d’agroécologie. L’alliance de la performance économique et de la performance environnementale est désormais possible. Elle est surtout de plus en plus ancrée dans l’esprit de nos agriculteurs et transformateurs, qui font progressivement évoluer leurs pratiques dans une voie plus vertueuse. Au nom du groupe UDI, je souhaite leur témoigner une nouvelle fois notre reconnaissance et notre gratitude.

Cette proposition de loi s’inscrit également dans la lignée du texte que nous avons récemment voté, dans cet hémicycle, sur le gaspillage alimentaire. Il est en effet devenu urgent de bâtir un nouveau modèle de société, davantage soucieux de l’avenir des consommateurs et des générations futures, un modèle capable de relever le défi qui nous attend en 2050, à savoir celui de nourrir 9 milliards d’individus avec des ressources naturelles de plus en plus rares.

Nous sommes finalement face à un véritable devoir moral : celui de développer des modes de production plus responsables et plus respectueux de nos ressources naturelles.

Dès à présent, nous devons préparer notre pays à cette transition vers une alimentation plus biologique qui saura davantage s’appuyer sur les circuits courts et les circuits de proximité. Plus qu’un gage de qualité pour les consommateurs, c’est également devenu une nécessité pour notre environnement. Est-il nécessaire de rappeler que le secteur alimentaire est le troisième élément le plus pollueur au monde après la Chine et les États-Unis ?

La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui participe, dans un sens, à la construction de ce nouveau modèle, en proposant de modifier notre façon de consommer.

Ainsi, l’article 1er propose d’instaurer, d’ici à 2020, un quota de 40 % d’alimentation dite « durable » dans les menus de restauration collective publique. Cet objectif est bien entendu louable. Pour autant, il pose plusieurs questions qui méritent des éclaircissements, madame la rapporteure.

Tout d’abord, que recouvre précisément le concept d’ « alimentation durable » ? Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – l’ADEME –, l’alimentation durable contribue à la sécurité alimentaire, tout en préservant les ressources naturelles et l’environnement. Elle repose essentiellement sur deux modes de commercialisation : les circuits courts et les circuits de proximité. Cette définition, plutôt vague, peut laisser place à différentes formes d’interprétation.

L’article 1er de ce texte définit, quant à lui, 1’ « alimentation durable » comme une alimentation reposant sur des produits de saison ou sur des produits dont l’origine et la qualité ont été certifiées. Elle est également définie par la proximité géographique entre les producteurs agricoles, les transformateurs et les consommateurs.

Si la proximité n’est pas nécessairement une assurance de qualité, elle participe néanmoins au respect de l’environnement. Aujourd’hui, une denrée alimentaire parcourt en moyenne 3 000 kilomètres avant d’arriver dans nos assiettes ! Le transport est un secteur très émetteur de gaz à effet de serre : nous devons donc tout faire pour réduire les trajets qui ne sont pas nécessaires.

Recourir aux circuits courts et de proximité présente également des atouts économiques de poids. En premier lieu, cela permet aux producteurs de trouver de nouveaux canaux de diffusion sans passer obligatoirement par un intermédiaire. Ce mode de vente est également générateur d’emplois non-délocalisables, ce qui est appréciable dans un contexte de crise économique durable.

Selon Mme la rapporteure – dont je tiens à saluer l’engagement et le travail sur un sujet qui nous est particulièrement cher – ce secteur pourrait créer entre 80 000 et 100 000 emplois si la vente en circuits courts atteignait 10 % du chiffre d’affaires de l’alimentation en France.

Actuellement, ce taux se situerait plutôt entre 6 % et 7 %, selon l’ADEME. C’est pourquoi il est nécessaire de faire des efforts dans ce domaine afin de créer de la richesse au sein du monde agricole, et plus généralement dans nos zones rurales.

Le recours aux circuits courts et aux circuits de proximité témoigne d’une volonté massive des citoyens de revenir au « goût du terroir », en rétablissant une relation privilégiée avec le producteur. Les récents scandales sur la traçabilité des aliments ont, plus que jamais, renforcé ce sentiment : les consommateurs sont désormais à la recherche de sens et d’éthique dans l’acte d’achat.

Si le groupe UDI est évidemment favorable à ce genre de mesures, nous pensons, en revanche, qu’il est indispensable de bien cibler les produits qui entreront dans les critères d’une « alimentation durable ».

La notion de proximité peut, en effet, s’avérer dangereuse car je le rappelle, proximité ne signifie pas nécessairement qualité. Ainsi, un producteur de pommes bio situé à 35 kilomètres d’une cantine risque d’être désavantagé par rapport à un producteur peut-être moins vertueux situé à 10 kilomètres.

Par ailleurs, aucune différence n’est faite entre les territoires. Quid par exemple des produits de la mer dont l’acheminement dépassera forcément les distances maximales fixées par ce texte ?

Nous nous interrogeons également sur la faisabilité d’une telle mesure. Nos collectivités seront-elles capables de mettre en oeuvre cet objectif, alors même qu’elles subissent des baisses de dotations toujours plus importantes ? Dans mon département de la Mayenne, je n’ai qu’un seul exemple sur 261 communes.

Et si l’objectif n’est pas atteint par une collectivité, des sanctions seront-elles prévues ? J’ai peur que, sans sanction, ce soit, une nouvelle fois, un voeu pieux.

L’article 1er propose également d’arriver à un taux de 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. Limiter le recours aux produits phytosanitaires est une ambition évidemment louable et partagée de tous. C’est à la fois indispensable pour la préservation de nos écosystèmes, mais également de notre santé.

En 2009, le Grenelle de l’environnement avait déjà fixé un tel objectif pour 2012. Si cette mesure – dans son principe général – ne peut que recueillir notre adhésion, elle soulève néanmoins une interrogation.

Instaurer un seuil minimal de 20 % de produits « bio » ne doit pas devenir une fausse bonne idée. En effet, le risque est d’inciter les professionnels à se focaliser sur cet objectif, quitte à être moins exigeants sur l’approvisionnement des autres marchandises.

Pour compenser les frais liés à l’achat de produits « bio », souvent plus coûteux, les restaurateurs pourraient être tentés de privilégier, pour les 80 % restants, des produits à bas coûts et de moindre qualité. Sur ce point, le groupe UDI se montre donc plutôt réticent à l’idée d’inscrire dans la loi un tel objectif.

Nous nous félicitons, en revanche, de l’approche territorialisée de ce texte, matérialisée par l’article 3. Le choix de l’échelon régional, pour développer une alimentation et une agriculture plus durables, est évidemment une très bonne chose. Intégrer les collectivités territoriales dans un tel projet est absolument nécessaire, notamment si nous voulons créer une proximité entre les acteurs de l’alimentation durable et nos concitoyens.

Agir au niveau des régions, c’est faire confiance à nos territoires, à leur dynamisme, à leurs compétences, mais aussi à leur capacité d’adaptation face à un environnement qu’il convient de protéger.

Inciter la restauration collective à consommer local, c’est aussi donner l’opportunité à de nombreux citoyens de renouer avec les saveurs de leur territoire, en leur permettant, par exemple, de manger des produits certifiés ou labellisés. Les ménages les plus modestes ne doivent plus être exclus d’une alimentation dite de « qualité ».

Grâce à cette mesure, ils pourront en bénéficier quotidiennement, mais surtout à des prix plus abordables que dans les commerces. Cet aspect social me paraît absolument déterminant, car il participe directement à l’éducation alimentaire de chacun de nos concitoyens. Je m’étonne, d’ailleurs, que cette proposition de loi n’aborde qu’en surface cette question.

Éduquer nos enfants sur la manière dont on produit et on consomme est pourtant l’une des solutions clés si nous voulons généraliser une alimentation « durable ».

Organiser des rencontres entre les élèves et les producteurs ; profiter du réseau des fermes pédagogiques : ce sont autant d’outils qui permettent de sensibiliser les jeunes générations aux enjeux de santé et d’environnement auxquels notre siècle est confronté.

C’est dans cet esprit que le groupe UDI ne peut qu’approuver l’idée de responsabiliser davantage les grandes entreprises sur ce sujet. En ce sens, l’article 4 est particulièrement intéressant. Cependant, il nous semble préférable de demeurer dans une démarche de sensibilisation plutôt que dans une démarche de sanctions qui pourrait se révéler contre-productive. Les entreprises ne peuvent plus supporter les poids et les contraintes. Nous resterons donc attentifs à l’évolution de cet article dans les faits.

Enfin, nous nous satisfaisons de l’inscription de la mention « fait maison » au sein de la restauration collective. Les différents scandales alimentaires qui ont ébranlé notre pays, ont poussé les consommateurs à être plus vigilants sur leur façon de consommer.

Nous devons donc prendre en compte cette évolution, en renforçant l’information et la transparence sur ce qui est produit et transformé. Cependant, avant de l’imposer à la restauration collective, ne devrions-nous pas attendre un premier bilan de cette mesure dans les restaurants ?

Mes chers collègues, le groupe UDI rappelle, une nouvelle fois, son soutien au développement d’une agriculture et d’une alimentation plus durables. Néanmoins, ce texte présente encore quelques faiblesses qui risquent d’introduire des contraintes supplémentaires tant pour les collectivités que les entreprises. C’est pourquoi le groupe UDI s’abstiendra sur cette proposition de loi en l’état.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner la proposition de loi de notre collègue Brigitte Allain visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation. Cette initiative fait suite à la mission d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires que j’ai présidée et dont vous étiez, madame Allain, la rapporteure.

D’emblée, je souhaite rappeler la définition des circuits « courts » et des circuits de « proximité », notions que l’on confond bien souvent. En ce qui concerne les circuits courts, il ne s’agit pas d’une question de distance, mais du nombre d’intermédiaires entre le consommateur et le producteur.

Je m’explique. En un clic sur internet, il est possible de commander à un agriculteur situé en Alsace, par exemple, une pièce de boeuf, qui sera expédiée sous vide : dans ce cas, il s’agit d’un circuit court. Le circuit de proximité signifie la proximité géographique et implique de trouver à proximité de chez soi un agriculteur qui fournira la même pièce de boeuf.

À mon tour, je tiens à me féliciter de l’organisation des travaux et de la qualité des auditions. J’y ai participé pendant six mois. La diversité des personnalités auditionnées ainsi que les déplacements sur le terrain ont permis aux membres de la mission parlementaire d’avoir une vision d’ensemble, ce qui était indispensable.

Il n’est nullement question de contester l’utilité des circuits courts ou de proximité tant pour les consommateurs – lesquels recherchent de plus en plus la qualité, la fraîcheur des produits et des prix intéressants – que les producteurs dont les relations avec la grande distribution sont déséquilibrées.

Je souligne néanmoins que l’intérêt du consommateur ne va pas toujours de pair avec celui du producteur, et inversement.

La présente proposition de loi présente comporte cinq articles. L’article 1er vise à introduire des produits issus de l’agriculture durable – de saison, IGP ou indication géographique protégée, AOC ou appellation d’origine contrôlée, biologiques – dans la restauration collective publique en veillant à la proximité géographique. L’introduction de ces produits dans la restauration publique n’est pas sans rappeler les objectifs de l’article 48 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement.

Eu égard à la Commission de Bruxelles, il faut prendre garde que la proximité ne soit pas considérée comme une entrave à la liberté de la concurrence. En outre, toujours s’agissant de la proximité, il faut s’interroger sur la réaction des artisans et des commerçants si la proposition de loi est adoptée. Ne voudront-ils pas, à terme, bénéficier de la même disposition ? Les artisans ne demanderont-ils pas au maire de leur commune d’acheter les produits qu’ils fabriquent dans la commune si le maire en a besoin au motif de l’ancrage local ? L’ancrage local n’est pas réservé qu’à l’agriculture.

Il ne faudrait pas non plus que les maraîchers soient totalement dépendants des cantines scolaires, donc de la fermeture éventuelle de classes. Il faudra les prévenir que réaliser 70 ou 80 % de son chiffre d’affaires avec une ou deux cantines dans un même secteur peut être gênant pour l’entreprise.

À l’heure où nos entrepreneurs ont besoin de gagner en compétitivité, nous regrettons non pas les nouvelles mesures, mais leur volet contraignant, notamment les délais trop courts. Rendre obligatoires de tels objectifs en imposant des délais trop courts posera de nombreux problèmes non seulement aux collectivités locales, mais également aux producteurs. On a d’ailleurs constaté que la production de produits bio ne suivait pas la demande.

Les entreprises seront donc confrontées à un nouveau casse-tête car, sur certains territoires, il est difficile de bénéficier d’une diversité de production agricole suffisante pour respecter cet objectif. Il serait préférable de laisser aux acteurs de la restauration publique la liberté de valoriser les produits de proximité.

L’article 2 élargit les missions de l’observatoire de l’alimentation et le transforme en observatoire de l’alimentation et des circuits cours et de proximité. Nous craignons de nouvelles contraintes administratives.

L’article 3 élargit le périmètre des plans régionaux de l’agriculture durable qui deviennent des plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durable. L’article 4 vise à intégrer dans la responsabilité sociétale des entreprises des exigences en matière d’alimentation durable.

Monsieur le ministre, ces entreprises subissent déjà suffisamment de contraintes pour que l’on n’en rajoute pas. C’est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer l’article 4.

L’article 5 vise à étendre le dispositif « fait maison » aux restaurants collectifs. Nous n’y sommes pas opposés, mais j’appelle cependant votre attention sur la complexité de cette notion. On n’est pas toujours d’accord sur ce qu’elle recouvre.

Notre groupe partage l’objectif louable de promouvoir les filières de proximité et de valoriser les produits de nos terroirs. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes inscrits dans une démarche résolument constructive afin que la mise en oeuvre de la proposition de loi soit pragmatique et efficiente.

Ainsi, nous vous avons mis en garde quant à la confusion possible entre circuits courts ou de proximité et produits de qualité. En effet, un produit dit « de proximité » ou issu d’un circuit court n’est pas automatiquement gage de qualité, et un produit de qualité peut très bien avoir été produit et transformé au-delà du périmètre établi pour un circuit de proximité.

Par nos amendements, nous souhaitons améliorer la rédaction de la proposition de loi pour faciliter son application. D’une part, nous entendons intégrer une vision plus large de l’ancrage territorial de l’alimentation en privilégiant la notion d’ « alimentation durable », qui concernerait les filières garantissant une production et une transformation faites en France, c’est-à-dire en métropole et dans les territoires ou départements d’outre-mer. D’autre part, nous souhaitons que la notion de proximité géographique tienne compte des spécificités territoriales en termes de productions agricoles. Enfin, nous avons exprimé nos préoccupations sur l’impact budgétaire de ces nouvelles obligations pour les collectivités territoriales, qui sont déjà mises en difficulté, monsieur le ministre, par la baisse de la dotation générale de fonctionnement.

Aux termes de la dernière phrase de l’article 1er, « Ce taux est fixé à 40 % à compter du 1er janvier 2020, dont 20 % de produits issus de l’agriculture biologique ». Pour preuve de notre volonté d’améliorer le texte, je vous avais signalé, en commission, que cette rédaction conduisait à un taux de 8 % de produits issus de l’agriculture biologique, soit 20 % de 40 %.

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Il aurait fallu écrire « 40 %, dont la moitié » de produits biologiques. Je l’ai dit en commission et le redis ici, pour éviter qu’une erreur ne figure dans le décret d’application.

Je regrette que l’on puisse laisser à penser que les circuits courts sont l’alpha et l’omega de l’agriculture française.

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Je n’ai pas dit que cela a été dit, mais que l’on pouvait le laisser à penser. De la même façon, je regrette que l’on puisse laisser à penser qu’il faut bouleverser les conditions d’exercice de l’agriculture pour assurer la relocalisation de nos productions. En effet, l’agriculture est un secteur économique à part entière de notre pays, qui s’inscrit pleinement dans son histoire et sa culture. L’agriculture française ne peut pas faire abstraction de l’accroissement de la compétitivité – M. le ministre le sait bien –, de la recherche de marchés à l’export et de la création d’emplois. Or, je crains et je regrette que la philosophie sous-jacente de ce texte mette de côté ces objectifs. Mieux vaut convaincre que contraindre nos agriculteurs et, plus largement, les entrepreneurs de France, qui n’en peuvent plus de devoir assumer les sujétions administratives liées à leur métier, devenu parfois impossible à exercer.

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Madame la rapporteure, vous avez dit, au début de votre intervention, que 76 % des Français soutenaient cette proposition de loi. De fait, on ne peut qu’y être favorable et 100 % des Français devraient l’approuver. Mais, parmi ces 76 %, combien se rendent compte de la complexité de l’application de ce texte dans des délais, encore une fois, trop courts ?

Monsieur le ministre, je vous ai écouté attentivement. Je pense que la consommation locale, même si elle peut se révéler utile, ne va pas régler les problèmes de débouchés que rencontrent les éleveurs.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

En effet !

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On est d’accord sur ce point. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour rassembler et non opposer les modes d’agriculture.

Notre vote sera fonction des amendements apportés au texte. Nous attendons de voir si vous allez concrétiser votre volonté de co-construire.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, le droit à l’alimentation n’est pas uniquement le droit de s’alimenter en quantité suffisante. C’est également celui de consommer des produits de qualité, qui s’inscrivent dans la tradition de nos savoir-faire agricoles et culinaires. Le rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme de l’ONU a précisé que toute personne devait avoir accès une alimentation – je le cite – « quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple auquel le consommateur appartient () » Ce n’est donc pas seulement la notion de qualité de l’alimentation qui est consacrée, mais également celle d’ancrage territorial. L’emploi des termes « traditions culturelles » n’est pas anodine : elle renvoie à notre attachement à nos territoires et aux habitudes alimentaires qui en découlent. L’histoire de la région Bretagne, pour ne citer qu’elle, est intimement liée à l’élevage, à ses cultures marines et à ses cultures végétales traditionnelles. Y aurait-il eu autant de crêperies en Bretagne et à travers le monde si nous n’avions pas cultivé le blé noir ?

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La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à renforcer le droit fondamental de s’alimenter dans des conditions respectueuses de l’environnement et répondant aux différentes réalités sociales et culturelles de notre territoire.

Ce texte est le fruit du travail de longue haleine mené par notre collègue Brigitte Allain dans le cadre de la mission d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires, à laquelle j’ai eu le grand plaisir de participer activement. Le rapport, rendu en juillet dernier, à l’issue de cette mission, préconisait d’axer nos politiques sur une relocalisation des filières et une économie de circuits courts. Il a fortement inspiré la proposition de loi examinée aujourd’hui. Il nous a également donné l’occasion de dresser un bilan des nombreuses initiatives existantes.

Le projet de plateforme numérique Agrilocal, présent dans vingt-six départements français, en est un bel exemple. Dans ma circonscription, j’ai pu soutenir des initiatives telles que le Projet Alimen’Terre, piloté par le groupement d’intérêt public du pays de Vannes, qui réunit des élus, des agriculteurs, des commerçants, des restaurateurs et leurs organisations professionnelles. Parmi les 62 communes de ce territoire, 80 % ont déjà mis en place des démarches qualité, notamment en utilisant des produits biologiques. Elles réfléchissent en commun aux moyens de lever des freins bien connus, qui sont souvent dus à une mauvaise connaissance de l’offre locale. On constate que 60 % des producteurs engagés dans les circuits courts sont intéressés par la restauration collective et que 50 % des communes souhaitent intensifier leur démarche qualité. De très nombreuses villes et communautés d’agglomération et de communes se saisissent ainsi de ce dossier alimentaire et proposent des solutions collectives utiles aux agriculteurs et aux gestionnaires de la restauration collective. Les citoyens se sentent particulièrement concernés par cette question, et la proposition de loi ne fait qu’entériner cette forte mobilisation. Plus des trois-quarts de nos compatriotes approuveraient ce texte. Les sollicitations reçues par les parlementaires ces derniers jours en attestent.

Au coeur de cette proposition de loi réside un objectif qui doit être impérativement atteint : faire en sorte que la restauration collective publique inclue dans la composition des repas servis 40 % de produits relevant d’une alimentation durable d’ici 2020. La loi dite « Grenelle 2 » de 2009 incitait l’État à atteindre 40 % de produits de qualité, biologiques et locaux. Ce sont désormais toutes les collectivités publiques et leurs groupements qui seront concernés. Le Président de la République s’était engagé, en 2012, à réaliser cet objectif, et c’est donc avec une très grande satisfaction que j’accueille le texte présenté aujourd’hui. Nous devons remplir cet objectif, qui fait écho aux projets alimentaires territoriaux définis dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Nous avons fait le choix de nous diriger vers un système d’approvisionnement local, écologique et de qualité. Et nous confirmons, avec ce texte, cette conception nouvelle de l’agriculture et de notre façon de consommer.

En outre, cette proposition de loi intervient un mois après l’adoption, à l’unanimité des groupes politiques, de la proposition de loi visant à lutter contre le gaspillage alimentaire. Il est important que ces deux combats soient menés de façon convergente. Inscrire notre modèle de développement dans une logique de circuits courts permet de jeter beaucoup moins de denrées alimentaires. Nous partageons donc pleinement l’objectif affiché de favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation. Des améliorations étaient cependant nécessaires afin de donner à ce texte toute la portée qu’il mérite.

L’article 1er, on l’a dit, est au coeur du dispositif. Il nous semblait important que l’objectif des 40 % de produits issus de l’alimentation durable ne soit pas assorti d’une mesure transitoire. Il faut en effet respecter les échéances des marchés publics en cours et ne pas complexifier les nouvelles mesures introduites. Je présenterai donc un amendement en ce sens au nom de mon groupe. La restauration collective publique devra veiller à ce que 40 % de la composition des repas servis inclue des produits de qualité locaux. Cela concerne les produits sous signe d’identification de la qualité et de l’origine, issus d’approvisionnements en circuits courts et répondant à des critères de développement durable, notamment la saisonnalité des produits. Surtout, la moitié d’entre eux devront provenir de l’agriculture biologique.

Afin d’aider les professionnels de la restauration à appréhender cette nouvelle exigence, le Gouvernement devra définir ce que la notion de développement durable implique concrètement pour chaque filière. La bonne application de ce seuil de 40 % repose sur l’Observatoire de l’alimentation, puisque l’article 2 en fait l’acteur principal du respect de cet objectif, et ceci en lien avec les observatoires régionaux de circuits courts et de proximité existants. Cet observatoire devrait voir sa branche économique et sociale se doter d’une nouvelle fonction, afin d’y intégrer des missions liées au développement des circuits courts et de proximité. Un amendement de notre groupe sera présenté en ce sens.

Je veux surtout insister sur deux modifications importantes à apporter à cet article 2. La première porte sur la suppression du recueil obligatoire des données, qui est très contraignant pour les organismes publics et privés chargés de leur collecte et de leur transfert à l’Observatoire. Dans un contexte de simplification administrative, il nous paraît disproportionné d’imposer une telle contrainte à ces organismes. Cela ne remet pas en cause la compétence de l’Observatoire en ce qui concerne le recueil de ces données ; sa démarche est simplement orientée vers une approche plus qualitative que quantitative.

La deuxième modification me tient particulièrement à coeur et répond, du moins en partie, à la question de la méthodologie du comptage de ces fameux 40 % : parle-t-on en valeur d’achat ou en volume acheté ? S’agit-il de la composition de chaque plat servi ou de l’ensemble du menu ? Comptabilise-t-on de la même manière l’entrée, le plat de résistance, le fromage et le dessert ? Quid du pain ? En assistant aux auditions menées par Mme la rapporteure, j’ai eu l’occasion de poser ces questions à plusieurs reprises : aucun interlocuteur n’avait la même méthode de comptage. Il me semble donc primordial d’introduire une disposition visant à préciser les modalités du comptage. L’Observatoire devra fournir des outils méthodologiques à destination des organismes de la restauration collective pour les aiguiller sur ce point. Il serait judicieux qu’un état des lieux soit réalisé par l’Observatoire, en lien avec les différents acteurs concernés, afin de parvenir à des propositions d’outils techniques qui soient acceptées par tous.

Par ailleurs, si l’article 3 poursuit le but louable d’intégrer la notion d’alimentation durable dans les plans régionaux d’agriculture, sa mise en application était trop rapide. Elle imposait à des régions qui venaient de mettre en oeuvre ces plans de les revoir. C’est pourquoi, lors de l’examen du texte en commission des affaires économiques, les députés socialistes ont fait adopter un amendement qui donne aux régions jusqu’à 2020 pour se plier à cette obligation. L’article 3, tel que modifié en commission, remplit donc parfaitement cet objectif.

Le quatrième article de cette proposition de loi illustre le souhait de ne pas se limiter à la restauration collective publique. Le choix d’intégrer, dans la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, des exigences en matière de consommation alimentaire durable permet ainsi de toucher directement la restauration des grands groupes privés.

Enfin, le label « fait maison » rencontre désormais un franc succès auprès des restaurateurs. En l’étendant, via l’article 5, aux restaurants collectifs qui choisissent de s’impliquer dans cette démarche, on reconnaît le travail et le savoir-faire des chefs cuisiniers de ce secteur, au même titre que les autres. Cela les valorise, tout en mettant en valeur le service public.

De multiples actions existent partout dans notre pays pour favoriser les circuits courts et les démarches de qualité. Outre qu’elles permettent aux agriculteurs impliqués dans ces questions d’améliorer leurs marges et de développer l’emploi local, elles offrent aussi la possibilité de nouer une relation plus directe entre les consommateurs et les agriculteurs, de mener des projets d’établissement, de mettre en valeur le repas, de responsabiliser davantage les gestionnaires et les cuisiniers, de les associer, de leur permettre de se rencontrer pour offrir à tous l’accès à une alimentation de qualité. Cette proposition de loi et les amendements déposés en ce sens aujourd’hui ont pour but de faire de cette proposition de loi un texte d’équilibre, susceptible de recueillir le soutien de tous. Je vous appelle donc à voter en sa faveur.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, je tiens avant toute chose à saluer le travail remarquable qu’a mené depuis de longs mois ma collègue écologiste Brigitte Allain, en concertation avec le ministère de l’agriculture, pour parvenir à cette proposition de loi ambitieuse qui fait suite à son rapport intitulé « Et si on mangeait local… », rendu public cet été.

J’espère que ce texte fera l’objet d’un consensus au sein de cet hémicycle car c’est l’avenir de notre alimentation qui se joue aujourd’hui sur ces bancs.

La proposition engage la France à structurer une réorientation durable de sa politique alimentaire. Nous espérons d’ailleurs que cela constituera un exemple et incitera l’Union européenne à un véritable changement de cap en la matière.

Au lendemain de la COP21, ce texte montre la voie en direction d’une autre politique agricole commune, tournée vers des modes de production durables plus respectueux de l’environnement.

On ne peut en effet que regretter le manque de soutien aux petites fermes dans la nouvelle PAC, de même que des aides bien peu ciblées vers les circuits courts.

Favoriser la mise en place d’une alimentation de qualité et de proximité répond à une exigence de santé publique et à une attente forte de nos concitoyens.

De la ferme à la table, nos aliments parcourent souvent des milliers de kilomètres avant de se retrouver dans nos assiettes, engendrant ainsi une pollution environnementale considérable et une baisse sensible de la qualité gustative.

Nous devons donc penser globalement et agir localement, produire mieux pour manger mieux : c’est tout le sens de cette proposition de loi.

Très engagée sur les problématiques liées à la responsabilité sociétale des entreprises, je me réjouis que ce texte se propose d’intégrer des exigences en matière de consommation alimentaire durable dans les reporting RSE des grandes sociétés.

Concernant sa proposition phare qui prévoit d’atteindre 40 % de produits issus de l’alimentation durable, locaux et de saison dès 2020 dans la restauration collective publique, j’aimerais insister sur la nécessité d’en conserver le caractère obligatoire.

Lors des débats en commission, des réserves ont été émises quant à cet objectif jugé trop contraignant et difficilement applicable.

Je tiens ici à rassurer les collègues qui ont des doutes : un travail en concertation avec le ministère et les professionnels de la restauration collective a depuis lors été mené afin de mieux délimiter les contours de cette mesure.

Je fais pleinement confiance au débat et je ne doute pas que nous allons réussir à trouver un terrain d’entente sur ce sujet.

Rappelons par ailleurs que cette dynamique est déjà à l’oeuvre dans les régions – et pas seulement en France. Peu à peu, ce sujet émerge partout en Europe. En Vénétie, une loi régionale, justifiée par une exigence environnementale – « zéro kilomètre » – dispose ainsi que la restauration collective doit utiliser 30 % à 40 % de produits du territoire.

Notre territoire comporte également un bon nombre d’exemples de réussite : 40 % d’alimentation durable et locale dont 20 % de bio, c’est un objectif ambitieux mais tout à fait possible à atteindre. J’espère qu’un jour, dans les cantines, l’alimentation 100 % bio sera la règle – c’est d’ailleurs déjà le cas dans le deuxième arrondissement de Paris grâce à l’action de son maire écologiste, Jacques Boutault. Je pense aussi à l’Auvergne, chère à mon coeur, qui a engagé une démarche exemplaire de restauration collective responsable en mettant en place des outils inédits comme un guide de la restauration collective et une charte qualité ETIQ.

Grâce à ce dispositif, près de 518 000 repas de qualité ont été servis en 2014 aux lycéens auvergnats et 48 établissements peuvent désormais proposer des menus incluant des produits de qualité ou portant le label « fait maison ».

L’extension de ce dernier aux restaurants collectifs proposé dans ce texte permettra ainsi de valoriser le travail des cuisiniers qui s’engagent dans cette démarche de qualité.

Soutenir l’agriculture paysanne et bio en favorisant le développement de filières alimentaires localisées est un enjeu qui nous tient à coeur, tous autant que nous sommes mais particulièrement aux élus de la montagne – je ne suis pas la seule dans ce cas aujourd’hui !

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C’est pourquoi je défendrai tout à l’heure un amendement à l’article premier visant à étendre la notion d’alimentation durable aux produits sous mentions valorisantes afin d’y intégrer les produits fermiers et de montagne.

Je vous propose aussi, chers collègues, de réfléchir à inscrire à l’avenir dans la loi l’obligation pour les collectivités de prévoir des emplacements de vente dédiés aux circuits courts afin d’assurer une possibilité de vente de proximité aux producteurs locaux.

Consommer localement, renforcer le lien entre ruraux et citadins, rapprocher producteurs et consommateurs tout en participant à la vie économique de son territoire, tels sont nos objectifs communs !

Valoriser les produits des territoires et les savoir-faire locaux, soutenir ainsi les agriculteurs, créer des emplois non délocalisables constituent autant d’enjeux de ce texte que je vous appelle, chers collègues, à voter unanimement.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens également à commencer mon intervention en saluant le travail de notre collègue Brigitte Allain qui, depuis plusieurs mois, a beaucoup réfléchi à cette question du « manger local ».

Outre qu’elle est donc l’auteur de la proposition de loi visant à favoriser l’ancrage territorial dont nous débattons aujourd’hui, elle a rédigé un rapport intitulé « Et si on mangeait local… » adopté au mois de juillet 2015. Je la remercie donc et la félicite du travail qu’elle a accompli ces derniers mois.

J’ajoute que ce travail répond à de véritables préoccupations qui se sont exprimées dans notre pays depuis de nombreuses années.

En effet, depuis plus de dix ans, la commission nationale agricole et rurale du Parti socialiste, que j’ai l’honneur de présider – la commission, pas le Parti

Sourires

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! – a mis en avant et défendu l’idée de la relocalisation de l’agriculture.

Nous la soutenons sur le plan mondial parce que nous devons agir afin de supprimer des déplacements inutiles – je pourrais citer des exemples – alors même que la responsabilité des transports est reconnue quant à l’émission d’une part importante des gaz à effet de serre.

Nous la soutenons aussi parce qu’il convient de produire où les gens ont faim, comme le disait Jacques Diouf, l’ancien directeur général de la FAO. Oui, il faut produire où les gens ont faim et où ils habitent en évitant de leur faire produire des denrées qu’ils ne consomment pas ou, à l’inverse, de recevoir des produits largement subventionnés en provenance d’Europe – s’agissant en l’occurrence de l’Afrique.

Nous la soutenons également sur le plan national en essayant de satisfaire les besoins locaux. Cette idée a cheminé lentement dans les milieux professionnels et syndicaux qui étaient entièrement mobilisés voilà quelques années sur les productions exportatrices.

Ensuite, les jeunes agriculteurs ont évoqué la re-territorialisation de l’agriculture et, surtout, les consommateurs ont exprimé d’une manière de plus en plus prégnante un regain d’intérêt pour l’alimentation de proximité.

Le Président de la République et le Gouvernement ont aussi exprimé cette préoccupation du « manger local » en faisant de l’ancrage territorial un objectif de la politique agricole et alimentaire dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, que j’ai eu l’honneur de rapporter.

En inscrivant dans la loi les projets alimentaires territoriaux, le Gouvernement a clairement affirmé sa volonté de structurer les systèmes alimentaires par un approvisionnement local, ce qui est pleinement cohérent avec l’objectif du développement de l’agro-écologie.

Il a également annoncé sa volonté d’introduire 40 % de produits de proximité, de qualité et bio dans les menus de la restauration collective.

Les avantages pour notre collectivité sont nombreux : rapprocher les consommateurs des producteurs, limiter les déplacements, créer des emplois agricoles de proximité, créer des richesses et de la valeur ajoutée dans les territoires, créer des richesses pour la « ferme France » grâce à l’impact économique du « consommer local ».

Les chiffres parlent d’eux-mêmes, l’un de nos collègues les a évoqués précédemment. En Allemagne, 70 % de la viande consommée en restauration collective est de provenance intérieure – contre 30 % de viandes importées. En France, c’est exactement l’inverse.

Il ne s’agit pas de prétendre que cette politique résoudra tous les problèmes de l’agriculture : nous le savons, la France doit rester un « produit » d’exportation et nombre de départements ne pourraient pas consommer leurs propres productions.

Imaginez la souffrance des Périgourdins s’ils devaient consommer tout le foie gras qu’ils produisent, ou toutes leurs noix, ou toutes leurs truffes, ou toutes leurs fraises !

Imaginez la souffrance des Bergeracois s’ils devaient consommer l’ensemble du vin que nous produisons à Bergerac ou à Domme !

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Déjà que…

Sourires.

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Si je vous dis cela aujourd’hui c’est que, compte tenu de l’intensité de la production agricole dans notre pays, la place de la production locale est extrêmement importante. Je ne sais pas s’il est possible de l’évaluer à 10 %, 15 % ou 20 % mais elle est aujourd’hui indispensable à la vie de nos agriculteurs.

Enfin, et j’en termine, je souligne que de très nombreuses expériences existent, depuis plusieurs années, concernant le « retour au local » via la mise en place des magasins de producteurs de pays, des marchés de producteurs, des associations pour le maintien d’une agriculture paysanne – les AMAP – ou la restauration collective.

De nombreux départements comme le Gers, la Drôme, la Dordogne ont réalisé de telles expériences mais, aussi, de nombreuses régions, dont l’Auvergne, comme cela a été dit précédemment. Il est de même dans de nombreux pays, en Europe mais aussi aux États-Unis où le « consommer local » est devenu une véritable réalité.

Vous l’avez compris, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’approuve totalement cette proposition de loi et c’est avec beaucoup de plaisir que je la voterai.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe des écologistes.

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Monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, ce texte nous ramène à ce défi global qu’est l’alimentation – cette année encore réaffirmé par les Nations-Unies – mais aussi, plus directement, au paradoxe qui oppose ce défi immense à la crise structurelle et actuelle de nos capacités de production.

Si notre agriculture reste l’une des meilleures du monde, cette performance macro-économique ne rend pas compte de la vulnérabilité extrême dans laquelle se trouvent aujourd’hui nos filières d’élevage et du lait ainsi que de l’absolue nécessité de trouver des voies d’avenir.

Avec ce texte, madame la rapporteure, vous avez recherché précisément un élément de sortie de crise en consolidant la diversification de l’activité agricole en complément de l’agriculture traditionnelle et en renforçant les circuits courts et de proximité, ce qui peut contribuer à valoriser les revenus. De ce point de vue, cette proposition est utile et positive.

En tant qu’élue du Pays d’Auge ayant soutenu, à travers deux pôles d’excellence rurale, la promotion des filières les plus prestigieuses de Normandie, je constate que ce texte non seulement favorise un retour positif à certaines pratiques anciennes mais, surtout, constitue un contrepoint utile à la globalisation des marchés et à la volatilité des prix qui en résulte.

Enfin, c’est une façon de répondre directement à l’exigence nouvelle des consommateurs en termes de qualité, de respect de l’environnement et d’éducation à l’excellence et au goût des produits, ce dont je me félicite.

Mais, monsieur le ministre, je suis d’abord et avant tout préoccupée par les conditions d’efficacité d’une telle proposition au regard de l’urgence qui touche la survie même de nos exploitations et de nos producteurs.

Vous l’avez dit tout à l’heure, nombre d’entre eux sont proches du renoncement voire du désespoir faute de distinguer une issue à venir tant la situation est délicate.

Ce sera ma première remarque en forme de préalable. Il me paraît en effet essentiel que la mise en oeuvre du plan d’urgence que vous avez installé soit accélérée et menée à bien afin que les exploitations les plus en difficulté ne soient pas aussi les plus éloignées de ces dispositifs de soutien.

Nous devons également garder à l’esprit cette urgence mais, aussi, la nécessité d’une approche globale.

S’agissant de l’évaluation de la contractualisation laitière – vous l’avez évoquée – il serait, me semble-t-il, intelligent de revoir la façon dont le dialogue entre les industries laitières et les producteurs pourrait intégrer ces nouveaux modes de production et de commercialisation mais, aussi, de faire en sorte que l’approche de fixation des prix soit redéfinie. Ce sujet nous préoccupe beaucoup.

J’ai évoqué les pôles d’excellence rurale pour accompagner la mise en oeuvre de votre proposition de loi, madame la rapporteure. Il me semble qu’ils favorisent une approche globale et une stratégie territoriale fédérant l’ensemble des acteurs, notamment touristiques, ce qui peut constituer un élément tout à fait utile.

S’agissant des marchés publics, je crois qu’il faut aller plus loin.

Notre département du Calvados a été l’un des premiers à mettre en forme la plateforme « Agrilocal ». Pour autant, l’utilisation des critères d’attribution indirects implique que les producteurs passent encore beaucoup de temps à répondre aux appels d’offre.

Il semble que cette démarche soit encore trop complexe. En vertu du principe d’égalité de traitement des candidats, le code des marchés publics ne permet toujours pas aux collectivités de sélectionner des produits en fonction de leur provenance. Une évaluation de ces dispositifs serait particulièrement opportune si on veut rendre efficaces les procédures que vous voulez généraliser.

Je voudrais également connaître, monsieur le ministre, votre point de vue sur les circuits de distribution proposés par les jeunes agriculteurs pour 2017 car ces propositions me paraissent intéressantes.

La question des terres agricoles reste centrale. Chacun mesure le risque que les conflits d’usage, notamment dans les régions côtières, font peser sur l’existence même d’une agriculture durable et rentable. Ne faudrait-il pas imaginer un dispositif de classement de ces terres d’un intérêt productif exceptionnel en zones agricoles d’intérêt général, sur le modèle de ce que nous faisons pour les sites remarquables ? Cela contribuerait à leur valorisation financière, leur affectation durable à l’agriculture et leur transmission dans des conditions qui ne soient pas pénalisantes. Si je dis cela, c’est que je crains que la disparition de ces terres agricoles productives n’ait un caractère irréversible, au moment même où l’alimentation et la production agricole nous paraissent si importantes.

Enfin rien ne s’impose davantage qu’un allégement significatif des normes et des contraintes. L’insécurité économique et financière liée aux incertitudes quant aux délais de paiement et au montant des primes attendues par les exploitants agricoles pèse sur l’environnement quotidien de nos producteurs.

C’est donc une approche globale que je souhaiterais, au-delà de ce texte qui recueille néanmoins notre approbation compte tenu de son intérêt et de la vision qu’il propose d’une agriculture moderne, en complément de l’agriculture traditionnelle.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous considérons, sur la majorité de ces bancs, que les circuits courts sont l’une des réponses à la fois à la crise de l’agriculture et à la crise sociale que traverse notre pays.

Depuis plus de cinquante ans et le développement d’une agriculture de plus en plus productiviste et standardisée, la production et la consommation de produits alimentaires sont deux opérations de plus en plus distinctes. Alors que nos supermarchés mettent chaque jour à notre disposition des produits venus des quatre coins de la planète, nous y trouvons de moins en moins de produits de proximité.

On est sans doute allé trop loin. Je me souviens qu’en février 2013 Pascal Lamy, alors directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, faisait l’apologie devant la commission des affaires économiques du bilan carbone, à ses yeux excellent, de la production de haricots en Afrique, et recommandait d’en importer davantage. Je le cite : « ce qui importe, c’est la sécurité alimentaire, non la souveraineté alimentaire. »

Dans le contexte actuel, il semble au contraire utile de raccourcir la chaîne alimentaire et de faire renaître la confiance entre la société et les agriculteurs, face aux doutes suscités par l’hyper-industrialisation et la mondialisation de notre alimentation.

Comme nous l’avons collectivement affirmé au cours de nos débats sur le gaspillage alimentaire, nous sommes conscients de la nécessité de faire évoluer notre mode de consommation. Le « manger local », implique un plus grand respect de la nature, des sols, de l’eau, de l’air et des animaux, bref un mode de vie plus sain.

Alors que la vingt et unième conférence sur le climat, ou COP21, a remis cette préoccupation au centre du débat public, l’agriculture étant responsable de 25 % des émissions de gaz à effet de serre en France, l’ancrage territorial de l’alimentation doit être considéré comme une des principales solutions pour diminuer les émissions de C02 de l’agriculture.

Face à ce défi, nous ne sommes pas restés inactifs ces trois dernières années. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, votée à votre initiative, monsieur le ministre, et pour laquelle nous avons tant oeuvré, a fait de l’ancrage territorial de la production agricole l’un des objectifs essentiels de notre politique alimentaire.

Au travers des projets alimentaires territoriaux, les PAT, cette loi a créé un instrument permettant de structurer des systèmes alimentaires pour assurer un approvisionnement local.

Il faut préciser en outre que depuis cet été, le Gouvernement incite les collectivités locales à s’engager davantage pour sauvegarder l’agriculture de proximité. Je le souligne d’autant plus que je suis l’élue d’un département qui s’est engagé dans cette voie depuis près de deux ans.

La mission d’information dont vous étiez la rapporteure, madame Allain, et qui a abouti à la rédaction du rapport « Et si on mangeait local… » a permis de dégager des pistes et de faire des propositions pour favoriser le développement de filières agricoles et alimentaires et je vous en félicite. La proposition de loi qui en résulte et que nous examinons aujourd’hui nous met face à la responsabilité de traduire au mieux notre volonté en actes.

À l’heure actuelle, la part des circuits courts et de proximité est déjà conséquente en France puisqu’on estime qu’ils représentent entre 6 et 7 % des achats alimentaires et que 21 % des exploitations vendent au moins une partie de leur production en circuits courts.

Mais les obstacles sont encore nombreux. Les stratégies territoriales sont souvent inadaptées et les possibilités de privilégier des produits locaux et de qualité ouvertes par le code des marchés publics sont elles aussi trop méconnues. Dans certaines régions, la spécialisation trop marquée de certains terroirs fait obstacle aux circuits courts. Je ne multiplierai pas les exemples mais du manque du foncier agricole disponible aux importations excessives de produits standard à destination de la restauration collective, les pistes pour améliorer cette situation sont très nombreuses.

Il nous appartient de préciser aussi les contours exacts des différents éléments qui composeront ce dispositif de manière à nous assurer de son efficacité.

Sous réserve de l’intégration de certaines dispositions relatives aux grandes enseignes de distribution et visant à lutter contre le gaspillage alimentaire, ce texte sera un nouveau pas vers l’évolution de notre modèle de consommation. Dans ces conditions, vous comprendrez que j’apporte mon soutien à cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure – chère Brigitte – j’ai, ces dernières quarante-huit heures, fait deux rencontres passionnantes qui font écho à notre débat d’aujourd’hui.

J’ai d’abord rencontré Thomas Huriez, le fondateur de 1083, une marque de jeans et de pulls totalement conçus et fabriqués en France, dont le nom fait référence à la distance qui sépare Menton, au sud de la France, de Porspoder, dans le Finistère. Ce jeune entrepreneur a inventé un modèle économique révolutionnaire qui lui permet de rivaliser avec les tarifs low cost de la production des esclaves du Bangladesh. Il a pensé autrement son système de financement, la fin des intermédiaires, ses modes de commercialisation, ce qui lui a permis de donner vie à une marque crédible, locale et naturelle.

Ma deuxième rencontre a eu lieu cet après-midi même, à l’occasion du trentième anniversaire du SIVAL, le Salon international des productions végétales, où je me suis rendu après vous, monsieur le ministre, à l’invitation de Bruno Dupont, pour parler Ecophyto.

Quelle n’a pas été ma surprise d’y voir deux révolutions. La première est technologique. Le nombre d’innovations en matière de biocontrôle et de machinisme est impressionnant. Cette fabuleuse innovation montre que le marché va plus vite que les institutions et que la profession ; les consommateurs et les producteurs sont plus rapides que ceux qui devraient réformer ce pays.

Ce salon du fruit et du légume m’a également surpris par le nombre d’innovations technologiques pour la commercialisation directe, les conditionnements de proximité, les hubs de filières locales, etc. Je n’étais pourtant pas à un CIVAM – centre d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural – mais au SIVAL, qui est le lieu de rencontre des filières de production spécialisées.

Une révolution technologique, culturelle, économique est en cours. Elle nous invite à accélérer et de ce point de vue l’initiative de Brigitte Allain, ancrée dans un travail parlementaire de longue haleine et une expérience personnelle acquise sur son territoire, est bienvenue aujourd’hui.

Désormais ce gouvernement et cette majorité ont un axe politique fort : consommer mieux, produire autrement.

Je me réjouis de votre initiative, Brigitte Allain, parce qu’elle permet aux agriculteurs, même de façon partielle, de sortir de deux impasses. La première est celle du corporatisme, de l’enfermement dans l’entre-soi, de la certitude que l’on a raison et de la méconnaissance des attentes et du dialogue avec l’altérité. Le deuxième risque est celui d’une mondialisation low cost qui exclut.

Votre proposition de loi porte une promesse : celle de la valeur ajoutée, de l’emploi de proximité. Elle est une partie de la solution. Elle permet de produire du symbole – et les débats que nous avons actuellement nous ont appris combien les symboles peuvent être importants – et du sens et de redonner à nos producteurs une certaine fierté.

J’y vois trois avantages, chers collègues, et j’aimerais qu’ils soient mis en avant lorsque nous voterons cette proposition de loi après l’avoir légèrement amendée.

Le premier est d’engager un dialogue entre la ville et la campagne car, mes chers collègues, les politiques rurales du XXIe siècle associeront la ville et la campagne.

La deuxième piste est celle de l’égalité entre nos concitoyens. Il ne s’agit pas de réserver la production alimentaire d’excellence, fraîche et savoureuse, aux plus riches, aux privilégiés ; il s’agit – c’est un impératif pour notre famille politique, et au-delà pour tous les républicains – de produire le meilleur pour tous. Lorsqu’on sait que seuls 3 % du budget de la santé sont consacrés à la prévention, on mesure combien une alimentation de qualité pourrait contribuer, non seulement à la qualité de vie de nos concitoyens mais aussi à l’équilibre de nos comptes sociaux.

Enfin le plan alimentaire territorial fait écho à des innovations législatives que nous avons défendues durant cette législature. Je pense notamment à la réforme des documents d’orientation introduite par la loi ALUR afin que ceux-ci tiennent compte des attentes socio-économiques des territoires. Je pense évidemment aux territoires à énergie positive : la lutte contre le gaspillage comme le bilan carbone des produits contribuera à la formation de tels territoires.

Mais je pense surtout aux programmes de santé publics inscrits dans la loi de santé de Marisol Touraine que nous avons votée il y a quelques semaines.

Il y a une trajectoire : celle d’une politique agricole commune plus juste, de l’agro-écologie, d’une alimentation qui peut devenir le fil conducteur d’un récit républicain associant égalité, qualité et dialogue.

Là où la république sociale est fragile, là où la nature est fragile, ce plan doit permettre de mettre les acteurs en mouvement. Il fait écho aux mots du grand Fernand Braudel, qui disait que les systèmes territoriaux les plus résistants étaient ceux qui avaient un pied dans l’économie-monde et l’autre dans un écosystème dense et solide.

Il fait également écho à ceux d’Olivier De Schutter nous rappelant que pour nourrir le monde, il faudra, non seulement, comme le disait Pisani, tous les agriculteurs du monde, mais surtout des échanges équitables et justes et l’inscription dans une diversité d’agrosystèmes locaux.

Il fait écho – et je terminerai là-dessus – à la belle phrase de Paul Houée, l’homme du Mené, qui, il y a quelques décennies, avait écrit un très beau livre, Les Chemins creux de l’espérance.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe Les Républicains

Mais non ce n’est pas du tout creux !

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La discussion générale est close.

La parole est à Mme la rapporteure.

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Je vais essayer d’être très brève, d’autant que je n’ai pas besoin de répondre à chacune de vos interventions : la plupart des questions que vous avez posées faisant l’objet d’amendements, nous y reviendrons en détail à l’occasion de l’examen des articles.

Je voudrais cependant vous remercier, monsieur le ministre, ainsi que les membres de votre cabinet, d’avoir oeuvré avec nous pour que l’écriture, de ce texte et les modifications que nous allons y apporter permettent de répondre aux diverses interpellations faites en commission.

L’objectif intermédiaire que vous avez évoqué, monsieur Taugourdeau, monsieur Pellois, ne figurera pas dans le texte définitif si l’Assemblée adopte certains amendements proposés par la majorité. J’ai entendu les observations faites en commission à ce sujet et nous avons travaillé à ce que le texte tienne compte de toutes ces critiques.

Je remercie tous ceux qui m’ont adressé des félicitations, mais je tiens à les partager avec vous tous, puisque la loi que nous allons voter ce soir est le résultat d’un travail collectif.

J’ai entendu un certain nombre d’observations, parfois contradictoires, sur le fait que cette loi ne serait pas suffisamment contraignante mais que, pour les entreprises du secteur privé, l’article 4 le serait trop. La cohérence de l’argumentation m’a un peu échappé. J’espère que l’examen des amendements nous permettra de mieux comprendre ces incohérences.

Si tout le monde s’accorde pour dire que la proposition de loi apporte une vraie dynamique aux territoires, certains ont parlé de renoncements. Au contraire, cette loi refuse les renoncements pour prendre en main nos politiques sur le terrain. Ce n’est pas parce que c’est compliqué qu’il ne faut pas le faire. Nous allons travailler sur les amendements et nous donnerons à ce texte, je l’espère, toute la teneur qu’il mérite.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.

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La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.

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Je souhaiterais souligner le travail de longue haleine qui a été mené sur ce sujet au sein de la commission des affaires économiques et dans cet hémicycle, lors de l’examen de plusieurs lois, notamment celle pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, mais également par le ministre et le Gouvernement, ainsi que la ténacité de Brigitte Allain qui, en juillet 2015, avait présenté un bon rapport « Et si on mangeait local… ». En me l’envoyant, elle l’avait accompagné d’un petit mot où elle espérait qu’il ne resterait pas lettre morte. Nous avons collectivement tenu parole, madame la rapporteure !

Quelques mois après le dépôt de votre rapport, ce qui est peu au regard de tout le travail accompli, des consultations et des auditions, nous sommes parvenus à un texte qui sera équilibré. Nous avons entendu les réticences formulées, peut-être à juste titre, sur certains points. C’est pourquoi, comme s’y était engagée Mme la rapporteure en commission, nous nous sommes remis au travail, surtout pendant la période des fêtes, pour présenter des amendements satisfaisants.

Ce texte contribue à un équilibre global. Nous avons travaillé sur la loi d’avenir, mais nous avons également lancé, il y a peu, une mission sur l’avenir des filières d’élevage, menée par Annick Le Loch, Thierry Benoit et Damien Abad. Ses conclusions seront le support de nouveaux textes qui nous permettront d’avancer sur ce dossier. La cohérence, relativement à l’avenir de notre agriculture, est globale, car il est hors de question d’opposer les agricultures les unes aux autres. Nous faisons un pas supplémentaire.

Par ailleurs, un certain nombre de collectivités se sont déjà engagées dans ces processus. Ce n’est donc pas impossible. Il existe peut-être des réticences à cause de fonctionnements anciens qu’il convient de réactualiser. Cette loi le permettra. Merci, madame la rapporteure, pour votre travail. Avec Hervé Pellois, qui a été notre chef de file, nous aurons pu parvenir à ce texte que nous allons voter à une majorité plus large peut-être que ce que vous aviez escompté.

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J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

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La parole est à M. Frédéric Reiss, premier inscrit sur l’article.

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L’article 1er vise à introduire des produits issus de l’alimentation durable, notamment de l’agriculture biologique, dans la restauration collective publique en veillant à la proximité géographique. Les enjeux environnementaux, économiques et sociaux sont considérables dans un secteur qui représente 3 milliards de repas par an, soit 7 milliards d’euros d’achats alimentaires annuels. Dans un contexte de crise agricole, il devient urgent de privilégier les circuits courts et une alimentation durable. L’introduction de ces notions dans la restauration publique est conforme aux préconisations du Grenelle de l’environnement.

Monsieur le ministre, vous avez dit tout à l’heure que se posait la question du code des marchés publics. Est-il compatible avec la relocalisation des approvisionnements dans la restauration collective ? Je rappelle que son article 53 mentionne « l’offre économiquement la plus avantageuse ». En 2011, Bruno Le Maire, alors ministre de l’agriculture, avait à plusieurs reprises assuré de son intention de modifier les critères de choix et d’y inclure la proximité. Choisir des critères adéquats d’évaluation des offres peut en effet permettre de valoriser les performances des producteurs locaux, que ce soit en termes de fraîcheur, de qualité, de respect de la saisonnalité ou du bilan carbone, à condition qu’elles soient supérieures à celle des producteurs non locaux.

Il faut également se méfier des normes trop contraignantes qui risquent de malmener un peu plus les finances des collectivités locales et territoriales. Je suis favorable aux mesures de cette proposition de loi, tout en souhaitant que nous ayons une vision un peu plus large de l’alimentation durable, afin de nous diriger vers des filières de production et de transformation en France qui tiennent compte des spécificités territoriales en termes de production agricole.

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Je partage les objectifs de la proposition de loi de Brigitte Allain et de l’article 1er. La relocalisation et les circuits courts sont un impératif économique général et non pas seulement au niveau de l’alimentation. C’est un principe économique que nous devrions avoir en tête. L’objectif de 40 % me semble mobilisateur. J’ai tendance à rapprocher le débat entre objectif et obligation de celui entre réforme et révolution que nous avons parfois à gauche. Que voulons-nous fixer ? Comment allons-nous vers l’idéal ? Comment comprendre le réel ?

De ce point de vue, nous devons avoir conscience qu’il est difficile de fixer un minimum légal dans la loi, car il faut tenir compte de la maturité des différentes filières et des différents territoires, c’est-à-dire de la diversité existante. Les collectivités locales peuvent y parvenir, en tant que puissances publiques, en maîtrisant les coûts, mais il faut intégrer la question de la maturité de la filière et la nécessité de faire un effort pédagogique et éducatif. Je crois que la proposition peut nous y conduire et j’espère que notre débat fera de même.

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Je voudrais à mon tour saluer l’initiative de Brigitte Allain sur ce sujet. Pour une fois, on peut conjuguer des intérêts parfois contradictoires entre consommateurs et producteurs. Bon nombre de consommateurs sont sensibles à ces préoccupations et la crise que connaissent nos producteurs aujourd’hui fait que nous devons envisager toutes les solutions. À l’évidence, celle-ci n’est pas la seule. Il faut s’atteler prioritairement aux exigences de compétitivité, en faisant baisser les charges et les contraintes. Il n’empêche que, dans l’ensemble des politiques qui peuvent être menées, la proposition esquissée par notre collègue est intéressante.

Elle intervient à un moment où nos productions nationales connaissent des difficultés considérables. Les productions de nos concurrents européens s’accroissent. Pour prendre l’exemple de la production porcine, nous stagnons alors que les Néerlandais, les Espagnols et les Allemands voient leur production croître.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Ce n’est pas vrai !

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La restauration hors foyer représente un vecteur massif d’importation, que ce soit pour la volaille ou le porc. Nous sommes donc très loin de la proximité. S’agissant de la viande fraîche, le « consommer français » est en progrès, mais ce n’est pas le cas dans la restauration hors foyer.

Je veux également vous faire part d’un exemple aussi anecdotique peut-être que scandaleux. J’ai l’honneur de représenter ici le département des Côtes-d’Armor, où l’élevage constitue un secteur très important. On a découvert que le principal donneur d’ordre dans le domaine de la commande publique, l’hôpital de Saint-Brieuc, importait massivement de la viande polonaise. Je ne remets pas en cause cette viande, mais c’est un paradoxe absolu d’importer une viande d’origine étrangère, alors que l’on dispose à proximité de tout ce qu’il faut, dans des conditions de qualité et de prix tout à fait satisfaisantes.

Nous pouvons également progresser dans bien des établissements scolaires. Dans les lycées bretons par exemple, 14 millions de repas sont servis chaque année. C’est un levier parmi d’autres qu’il faut utiliser pour gagner en proximité en ces périodes si difficiles pour nos producteurs.

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Nous en venons aux amendements à l’article 1er. La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir l’amendement no 28 .

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Cet amendement vise à intégrer le dispositif d’ancrage territorial de l’alimentation dans les objectifs généraux de la politique de l’alimentation, qui sont d’assurer à la population l’accès à une alimentation sûre, saine, diversifiée, de bonne qualité et en quantité suffisante, produite dans des conditions économiquement et socialement acceptables par tous, favorisant l’emploi, la protection de l’environnement et des paysages et contribuant à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du changement climatique.

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Favorable. Il est intéressant de replacer ce dispositif dans un contexte plus large. Il ne vous échappe pas que cette proposition de loi visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation fait explicitement référence à l’un des quatre axes de la politique alimentaire définie par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, que nous avons retranscrit dans le code rural.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Favorable, d’autant qu’il fait référence à l’article 1er de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Nous avons besoin de replacer l’ensemble de ce débat dans un tel cadre.

L’amendement no 28 est adopté.

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Je suis saisie de trois amendements, nos 29 , 1 et 2 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir l’amendement no 29 .

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Cet amendement vise à supprimer l’objectif intermédiaire qui ne permettait pas au dispositif d’ancrage territorial de l’alimentation collective publique de se déployer dans les meilleures conditions. Il prévoit donc une date de déploiement au 1er janvier 2020.

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Je suis saisie de deux amendements, nos 1 et 2 , qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour les soutenir.

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Si je lis et entends bien mon collègue, son amendement est plus favorable que les miens, et il y a fort à parier que le texte de loi sera appliqué avant le 1er janvier 2020.

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J’avais choisi cette date intermédiaire, parce que tout doit être fait, notamment au niveau régional, pour que cette loi devienne une réalité et atteigne ses objectifs en 2020. À partir du moment où cette échéance est conservée et que tous les acteurs concernés sont déjà, pour une grande partie, à l’oeuvre dans les territoires, j’émets un avis favorable à cet amendement, en vous encourageant les uns et les autres à faire en sorte que la proposition de loi devienne une réalité.

Comme on l’a rappelé tout à l’heure, la campagne menée par « Agir pour l’environnement » qui interpelle les élus locaux a recueilli plus de 100 000 signatures. Notre proposition répond à une vraie demande sociétale.

Dès lors que la période intermédiaire va être supprimée, je suppose, monsieur Taugourdeau, que vous êtes prêt à retirer vos amendements. Pour ce qui me concerne, je suis favorable à l’amendement de M. Pellois.

M. Marc Le Fur remplace Mme Sandrine Mazetier au fauteuil de la présidence.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je suis favorable à l’amendement no 29 , afin que l’obligation soit effective en 2020.

L’amendement no 29 est adopté et les amendements nos 1 et 2 tombent.

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La parole est à Mme Brigitte Allain, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 12 rectifié .

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Cet amendement vise à mentionner explicitement les établissements publics, pour qu’ils entrent dans le champ d’application de l’article 1er : bien que rattachés à une collectivité locale, ils bénéficient d’une autonomie administrative et financière, qui risquerait de les exclure du dispositif. Les communautés de communes et les hôpitaux, en tant qu’établissements publics, se trouveraient ainsi inclus dans le dispositif. Il serait en effet dommage, comme j’en ai fait l’expérience, que l’on continue de manger aussi mal dans des lieux de soins.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Favorable. Vous avez évoqué il y a quelques minutes, monsieur le président, l’approvisionnement des hôpitaux, qui pose de sérieux problèmes en termes de régularité et de quantité.

Dans ma région, les grands hôpitaux du Mans, d’Angers ou de Nantes servent tous les jours plusieurs centaines de milliers de repas. Il m’a ainsi fallu recourir aux marchés d’intérêt national pour regrouper une offre permettant à ces deux derniers établissements d’assurer localement une partie de leur approvisionnement, en garantissant sa diversité et sa qualité. C’est pourquoi il faut maintenir l’échéance de 2020 car l’organisation d’un tel approvisionnement nécessite du temps : les donneurs d’ordres au sein de l’hôpital ont besoin de visibilité et de sécurité afin d’assurer la quantité d’approvisionnement nécessaire.

L’amendement no 12 rectifié est adopté.

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Je suis saisi d’un amendement no 30 qui fait l’objet de quatre sous-amendements, nos 34 rectifié , 40 , 35 rectifié et 39 .

La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir l’amendement.

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Cet amendement vise à mieux coordonner le volontarisme et l’ambition dans la sélection des critères de qualité des produits avec le droit existant. En effet, la volonté d’inscrire l’utilisation de produits de qualité doit pouvoir s’articuler avec l’ambition de développement durable et de respect de la saisonnalité des produits.

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La parole est à Mme Brigitte Allain, rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 34 rectifié .

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Ce sous-amendement vise à réintroduire la notion d’alimentation durable. En effet, l’amendement de M. Pellois, qui transforme partiellement le dispositif de l’article 1er, conserve l’ambition d’atteindre 40 % de produits issus de l’agriculture biologique à l’horizon 2020, tout en modifiant son périmètre. Bien que M. Pellois pourrait préciser ce que représentent les « produits sous signe d’identification de la qualité », « issus d’approvisionnements en circuits courts », et, plus encore, ceux « répondant à des critères de développement durable », la rédaction de son amendement reste satisfaisante.

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La parole est à Mme Danielle Auroi, pour soutenir le sous-amendement no 40 .

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Ce sous-amendement vise à inclure dans les 40 % de produits durables ceux bénéficiant des mentions valorisantes. Ce mode de valorisation des produits agricoles et agroalimentaires, qui concerne notamment des produits de montagne, des produits fermiers et des produits d’outre-mer, fait l’objet d’un étiquetage particulier qui, certes, n’est pas obligatoire, mais par lequel les producteurs peuvent mettre en avant un savoir-faire ou un terroir. Ces dispositifs créent donc de la valeur ajoutée sur le territoire, dans des exploitations souvent petites. Le maintien de ces références permettra de créer des emplois et de développer le tourisme.

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La parole est à Mme Brigitte Allain, rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 35 rectifié .

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Ce sous-amendement, quoique rédactionnel, a son importance. La commission ainsi que M. Taugourdeau ont soulevé le risque d’une mauvaise interprétation, qui ramènerait la part de produits durables à 8 %. Pour lever cette ambiguïté, je propose d’ajouter, après un point, que « 20 % des produits servis sont issus de l’agriculture biologique ».

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La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir le sous-amendement no 39 .

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Il s’agit d’ajouter la mention : « en veillant à la proximité géographique entre les producteurs agricoles, les transformateurs et les consommateurs » après la deuxième occurrence du mot « produits ». La notion de proximité géographique est définie dans le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime. Il importe de favoriser la proximité géographique pour faire émerger des systèmes alimentaires locaux et intégrés, entre producteurs, intermédiaires, transformateurs et consommateurs. C’est bon pour l’environnement, pour l’écologie, pour l’emploi et pour l’économie, mais aussi pour la santé publique.

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Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et sur les sous-amendements – en dehors, naturellement, de ceux dont vous êtes l’auteur, madame la rapporteure ?

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La commission a émis un avis favorable sur l’amendement no 30 ainsi que sur les sous-amendements nos 40 et 35 rectifié . Si ce dernier était adopté, le sous-amendement no 39 tomberait, car les deux rédactions sont concurrentes.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Cet amendement nous conduit à débattre des critères qui régissent les achats dans le cadre de marchés publics. Or le Gouvernement est tenu de respecter scrupuleusement les règles de ces marchés, les latitudes existantes étant limitées à ce qui peut être accepté. Il a donc émis un avis favorable sur l’amendement no 30 ainsi que sur les sous-amendements nos 40 et 35 rectifié , dont l’adoption ferait tomber le sous-amendement no 39 .

Le Gouvernement a en revanche émis un avis défavorable sur le sous-amendements no 34 rectifié ainsi que sur le sous-amendement no 39 , qui porte sur la difficile définition juridique de la proximité géographique.

Les sous-amendements nos 34 rectifié , 40 et 35 rectifié , successivement mis aux voix, sont adoptés et le sous-amendement no 39 tombe.

L’amendement no 30 , sous-amendé, est adopté et les amendements nos 3 , 17 et 4 tombent.

L’article 1er, amendé, est adopté.

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Je suis saisi de deux amendements, nos 14 rectifié et 10 , portant article additionnel après l’article 1er. Ces amendements peuvent être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 14 rectifié .

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Pour reprendre le fameux aphorisme de René Char, « Signe ce que tu éclaires, non ce que tu assombris », je dirais que cet amendement n’a pas pour objectif d’affaiblir ou d’assombrir la proposition de loi mais plutôt de l’éclairer. Un problème de transparence semble en effet se poser s’agissant des coûts : ce type d’alimentation entraîne-t-il véritablement un surcoût ? Les avantages, notamment en termes d’externalités, n’excèdent-ils pas ces surcoûts ?

Les gestionnaires tenus de proposer une alimentation différente font en effet souvent part de difficultés financières. Aussi, cette proposition de loi, que nous voterons majoritairement – et peut-être unanimement –, doit inciter à une plus grande transparence sur les coûts et les moyens supplémentaires induits par son application.

L’article 2, qui traite notamment des missions confiées aux observatoires des circuits courts et de proximité, dispose : « Les gestionnaires, publics et privés, d’activités de restauration collective recueillent et communiquent à l’observatoire les données quantitatives et qualitatives utiles à l’accomplissement de sa mission de suivi des circuits courts et de proximité ». Si l’évaluation des coûts était intégrée aux missions des observatoires, je retirerais mon amendement. Il est cependant nécessaire de connaître plus précisément les surcoûts induits par la proposition de loi.

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La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 10 .

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Avis défavorable et, pour ce qui me concerne, je suis moi aussi défavorable à ces amendements. Peu entendent ce que de nombreuses idées reçues affirment : il est possible d’intégrer des produits biologiques et locaux dans les cantines à coûts constants.

Vous trouverez, dans le rapport d’information sur les circuits courts que j’ai remis cet été – il y a donc déjà eu un rapport sur le sujet, monsieur Chassaigne –, plusieurs exemples de communes, d’intercommunalités ou de départements qui ont engagé une politique d’achats responsables tout en maîtrisant les coûts. Certes, les produits bios ont un coût de production supérieur, mais ils sont créateurs d’emplois non délocalisables – ce à quoi j’imagine que vous êtes favorable – et sont source de valeur ajoutée pour les territoires. Il existe en outre des leviers pour compenser ces coûts plus élevés, en particulier la lutte contre le gaspillage alimentaire : aujourd’hui, 30 % de ce qui est acheté dans la restauration collective est jeté. Les marges de manoeuvre sont donc extrêmement importantes.

On peut prendre l’exemple de la ville de Mouans-Sartoux, qui a fait passer son coût matière de 2,02 euros en 2012 à 1,86 euro en 2013 grâce à une politique anti-gaspillage, tout en passant entièrement au bio au cours de la même période. Il y en a d’autres : le département des Deux-Sèvres a créé RÉSALIS, un « réseau pour une alimentation locale innovante et solidaire » ; la Dordogne a mis en place un programme à destination des collèges sans jamais avoir besoin de mobiliser la somme prévue pour financer les éventuels surcoûts ; de même, la région Île-de-France a réalisé des programmes sans coût supplémentaire.

Avis défavorable aussi sur l’amendement no 10 .

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Avec la belle citation de René Char que vous avez faite, j’aurais tendance à être favorable à votre amendement, monsieur Chassaigne !

Il semblerait, d’après ce que j’en sais, que dans les départements où de telles stratégies d’approvisionnement local ont été mises en oeuvre, les coûts soient restés stables, voire aient diminué, comme dans la Drôme. Un tel rapport aurait l’intérêt, au-delà de nous informer sur les moyens et les coûts globaux, de nous expliquer pourquoi l’on obtient de tels résultats. Il semblerait – mais je le dis avec beaucoup de prudence – que ce qui pouvait être capté par les intermédiaires disparaissant, au bout du compte les coûts ne soient pas forcément plus élevés : les réseaux créés réduisent non seulement les distances, mais aussi le nombre des intermédiaires.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Grâce à ce rapport, on pourrait analyser, d’un point de vue économique et dans le cadre de l’économie de marché chère à André Chassaigne,

Sourires

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

comment ces systèmes locaux permettent d’obtenir des résultats qui ne sont pas si éloignés que cela des objectifs de bonne gestion. Les conclusions que nous en tirerions permettraient d’aboutir à des principes plus généraux.

Avis favorable à l’amendement no 14 rectifié , donc.

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Si le Gouvernement veut faire un rapport, l’Assemblée ne s’y opposera pas ! Je me rallie à la proposition de M. Chassaigne.

L’amendement no 14 rectifié est adopté et l’amendement no 10 tombe.

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La parole est à M. Christophe Premat, inscrit sur l’article.

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L’article 2 prévoit la transformation de l’Observatoire de l’alimentation en Observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité.

On se focalise sur la question de l’alimentation et de la consommation alors que la notion d’ancrage territorial suppose en réalité d’interroger l’idée d’une agriculture urbaine. Les villes modernes ne cessent en effet de s’étendre et d’absorber les ceintures maraîchères qui leur procuraient une grande partie de leur alimentation. Cette proposition de loi s’inscrivant dans le droit fil de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, il faudra bien à terme s’interroger de la relocalisation de l’activité agricole. On pourra peut-être ainsi préciser la notion de proximité – la question étant de savoir s’il faut créer des outils juridiques contraignants afin de protéger les sols à usage agricole dans les espaces urbains et périurbains.

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La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir l’amendement no 31 .

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Cet amendement vise à optimiser le fonctionnement de l’Observatoire de l’alimentation, notamment en ce qui concerne les circuits courts et de proximité.

L’amendement no 31 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et l’amendement no 5 tombe.

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La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir l’amendement no 32 .

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Il s’agit d’optimiser le fonctionnement de l’Observatoire de l’alimentation, notamment dans son rôle de veille et d’assistance prévu par l’article 1er. La notion d’observatoires interrégionaux n’est plus pertinente compte tenu du redécoupage territorial effectué par la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions.

L’amendement no 32 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et l’amendement no 15 tombe.

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La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir l’amendement no 33 rectifié .

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Nous proposons de doter l’Observatoire de l’alimentation d’une compétence d’accompagnement méthodologique dans le cadre de ses nouvelles fonctions.

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Cet amendement permettra de compléter utilement le rôle de contrôle de l’Observatoire en donnant à celui-ci la responsabilité d’élaborer des outils méthodologiques à destination des organismes privés ou publics de la restauration publique.

Comment fera-t-on pour calculer la part de produits relevant de l’alimentation durable ? On compte dans les menus de restauration scolaire cinq composantes : on n’obtiendra pas la même chose suivant que l’on raisonne à partir de volumes, de pourcentages ou de coûts. Une des missions de l’Observatoire sera de définir les bons critères et de faire en sorte qu’ils soient les mêmes pour tout le monde.

Avis favorable, donc.

L’amendement no 33 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.

L’article 2, amendé, est adopté.

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La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 6 .

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Il s’agit de modifier la rédaction de l’alinéa 3 de l’article, qui aboutirait à faire disparaître du plan régional de l’agriculture durable – PRAD – toute action en matière de politique agro-industrielle. Or il ne nous semble pas opportun d’opposer « alimentation » et « agro-industrie ». C’est pourquoi l’amendement vise à maintenir les compétences actuelles du PRAD en matière de politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle, tout en y ajoutant une compétence en matière alimentaire.

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La loi fait actuellement mention de la compétence des PRAD en matière de politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle. Ces deux derniers mots paraissent redondants, car l’agro-industrie fait partie de l’agroalimentaire. D’autre part, la référence à l’alimentation était manquante. Notre objectif est d’améliorer la loi et d’apporter une précision.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Les termes « agriculture », « alimentation » et « agroalimentaire » sont des termes régulièrement utilisés dans les débats sur ces questions. Si l’on ajoutait « agro-industrielle », il faudrait être capable de définir ce que ce terme recouvre : certains produits issus de la très grande industrie peuvent être considérés comme « agro-industriels », mais quid de ceux issus de la petite industrie ? Je préfère pour ma part conserver les termes « alimentation », « agriculture » et « agroalimentaire », suivant la terminologie usuelle. L’agroalimentaire correspond au stade où la transformation des produits agricoles prend une dimension industrielle, ce qui inclut la petite, la moyenne et la très grande industrie. Je ne suis pas favorable à l’amendement.

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Cet amendement avait pour but de vous faire donner des explications – qui nous conviennent fort bien. J’en prends bonne note et je retire l’amendement.

L’amendement no 6 est retiré.

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La parole est à Mme Brigitte Allain, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 13 .

L’amendement no 13 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

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La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement no 27 .

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Il s’agit d’inscrire la préoccupation de l’approvisionnement local dans les SRADDET, les schémas régionaux d’aménagement, de développement et d’égalité des territoires. La région ayant compétence sur les lycées, elle est un donneur d’ordre dans ce domaine ; en outre, aux termes de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, elle est désormais chargée de l’économie ; enfin, elle signe les contrats avec les établissements publics de coopération intercommunale.

Vous l’avez dit, monsieur le ministre : un des problèmes que l’on rencontre, c’est l’approvisionnement. Localement, on arrive à développer certaines filières à partir de la production locale ; mais il serait bon que la région soit partie prenante de façon à ce que l’on dispose, à cet échelon, d’un ensemble de fournisseurs, par exemple de légumeries, qui forme réseau. Cela faciliterait l’approvisionnement, tout en conservant à celui-ci sa dimension locale.

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Avis favorable. Par cet amendement, les PRAD deviendraient le volet agricole des SRADDET. L’objet de ces derniers est d’ailleurs de faire en sorte qu’il y ait une cohérence des différentes politiques régionales.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je voudrais appeler votre attention sur un élément qui me paraît très important. Il s’agit de schémas qui seront discutés et mis en oeuvre de manière décentralisée, et fondés sur la capacité qu’aura chaque territoire à répondre localement aux demandes. Je crains que votre volonté d’imbriquer les dispositifs ou de faire en sorte qu’il y ait une cohérence entre eux ne complique les choses et ne finisse par nous éloigner de l’objectif visé, à savoir l’approvisionnement local.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Certes, des avancées ont été réalisées, des choses ont été mises en place et commencent à prendre forme, mais il vaut mieux, pour l’instant, ne pas compliquer les choses. Restons-en à une logique d’encouragement.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Nous devons agir pour pousser les acteurs à aller un peu plus loin. Envisager de mettre en cohérence les schémas et le PRAD, pourquoi pas, mais il ne serait pas pertinent de l’imposer par la loi. Je ne sais pas, d’ailleurs, si ces schémas ont été adoptés ; ils doivent encore être en phase de discussion. Je vous dis simplement : attention, car une idée qui paraît positive peut se révéler facteur de blocage.

Puisqu’il s’agit d’une proposition de loi, et que cet amendement provient d’un député, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Toutefois, je tiens à vous dire ceci : prenez garde, car en compliquant les règles applicables, on ne pourra pas avancer suffisamment vite pour atteindre les objectifs fixés par l’article 1er de cette proposition de loi, à savoir un taux de 40 % de produits relevant de l’alimentation durable.

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Ce débat illustre bien le piège des normes, des contraintes, de la complexité administrative. Soyons pragmatiques, choisissons l’incitation, l’innovation, et certainement pas la complexité. Ces initiatives seront, par la suite évaluées.

Mes collègues du groupe Les Républicains et moi sommes d’accord avec ce que vient de dire M. le ministre. Nous ne voterons donc pas cet amendement, précisément au motif que nous devons faire le choix de la simplicité, et non d’emblée celui de la complexité.

L’amendement no 27 n’est pas adopté.

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La parole est à Mme Brigitte Allain, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 16 rectifié .

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Il s’agit d’un amendement de coordination, qui vise à tirer les conséquences d’un amendement adopté en commission à propos des PRAD.

L’amendement no 16 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.

L’article 3, amendé, est adopté.

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La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement, no 18 , portant article additionnel après l’article 3.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je souhaite que personne ne se croie dispensé de s’engager dans cette stratégie. Nous avons mené une discussion assez large avec les chambres d’agriculture, afin qu’elles puissent intégrer les dimensions rurales et territoriales. Je souhaite, par cet amendement, préciser que les chambres d’agriculture sont partie prenante, dans le cadre de l’exercice de leurs missions, de la mise en oeuvre des projets alimentaires territoriaux.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Nous avons parlé de la structuration de l’offre : il faut que tout le monde soit impliqué dans ce processus. Je considère que cette proposition de loi nous offre une bonne opportunité pour assumer des responsabilités supplémentaires, avec les chambres d’agriculture.

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J’ai pris connaissance récemment d’une étude commandée par la chambre régionale d’agriculture d’Aquitaine à des jeunes en formation à l’école d’ingénieurs Bordeaux Sciences Agro, à propos de la perception, par les collectivités locales, de leur action sur les circuits courts et de proximité. Cette étude est riche d’enseignements : elle montre qu’il existe encore d’importantes marges de manoeuvre pour faire progresser l’implication des chambres d’agriculture dans la mise en oeuvre des projets alimentaires territoriaux, et dans l’appui aux filières locales. Malgré la volonté de l’APCA, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture, de travailler sur ce sujet – qui fait partie de ses objectifs –, au niveau local, les chambres d’agriculture n’ont pas toujours pris en main ce sujet.

Elles sont sollicitées pour des tâches de réflexion, de concertation, de mise à disposition de listes, mais très peu pour des travaux d’ingénierie, ou même pour la mise en place de plateformes de logistique. De nombreux autres organismes sont partenaires des collectivités locales, et accompagnent depuis des années la restructuration d’une économie agricole et alimentaire locale. En Aquitaine, toujours selon la même étude, les collectivités citent l’association AgroBio Périgord, qui appartient à la FNAB, la Fédération nationale d’agriculture biologique, pour la restauration hors domicile, les collectifs de producteurs pour les magasins de producteurs et les plateformes, les CIVAM, les centres d’initiative pour valoriser l’agriculture et le milieu rural, pour les diagnostics, les études et les montages de projet, Terre de liens, pour l’accès au foncier et l’installation, les espaces test et les coopératives pour le groupement d’approvisionnement et l’agrotourisme.

Vous voyez que les chambres d’agriculture ne sont pas citées en premier. Cet amendement permettra de préciser clairement que le développement des filières locales fait partie des missions des chambres d’agriculture régionales. J’y suis donc favorable.

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C’est bien dans les chambres d’agricultures que se rencontrent tous les acteurs : cela permet de sensibiliser tout le monde.

L’amendement no 18 est adopté.

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La parole est à M. Christophe Premat, inscrit sur l’article.

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Je ferai deux remarques très brèves sur la notion de responsabilité sociale et environnementale des entreprises.

Premièrement, cet article opère une modification lexicale importante, quoique marginale dans le code, puisqu’elle ne touche que deux mots. Je pense néanmoins qu’il serait important de bien relier cela avec l’émergence d’une écocitoyenneté urbaine. Nous insistons beaucoup sur la question de la simplification des normes, mais je pense que l’idée d’un développement économique acceptable sur le plan écologique doit être intégrée dans le code du commerce.

Deuxièmement, comme l’a fait remarquer tout à l’heure ma collègue Danielle Auroi, il est vrai que l’activité touristique est quelque chose d’essentiel dans le développement du label « Fait maison ». Il y a une demande de plus en plus forte, y compris dans le tourisme national, de visiter les territoires dans leur entier : pour cela, il faut aussi comprendre les relations entre les modes de vie, d’une part, et les façons de produire dans les entreprises, d’autre part.

Je pense que nous devrions faire ressortir ces deux aspects de façon plus marquée.

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La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 7 , qui vise à supprimer l’article 4.

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Cet article a pour objet d’intégrer, au sein des indicateurs de la responsabilité sociétale des entreprises, des exigences en matière d’alimentation durable. J’ai bien entendu Mme la rapporteure nous dire tout à l’heure – en substance – : « Ce n’est pas parce que c’est compliqué qu’il ne faut pas le faire. »

Je préfère dire plutôt : ce n’est pas parce que c’est difficile qu’il ne faut pas le faire. En l’occurrence, cet article compliquera vraiment la tâche des entreprises, qui ont plutôt besoin d’un choc de simplification. Or la complication n’amène pas la simplification, c’est clair ! Nous proposons donc de supprimer cet article, car les ambitions de ce texte – notamment l’objectif de 40 % de produits relevant de l’alimentation durable en 2020 – deviendront réalité au fur et à mesure, au fil du temps.

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Avis défavorable.

Il est important que les grandes entreprises soient actives dans la démarche de responsabilité alimentaire, pour favoriser la qualité et la durabilité de l’alimentation de leurs salariés. Ce ne peut être qu’une bonne chose pour ceux-ci. Plus largement, la RSE connaît, depuis sa création, un grand succès en France. Notre pays a été précurseur en matière de reporting extra-financier des entreprises. Nous avons d’ailleurs auditionné de nombreux responsables de ce reporting en matière de RSE, ainsi que des responsables du MEDEF : ils soutiennent notre démarche. Certes, ils préféreraient que des règlements la précisent ; c’est pourquoi ils appellent de leurs voeux la rédaction d’un guide pratique opérationnel. Je pense qu’ils seront capables de le réaliser.

Les grandes entreprises sont bien engagées dans cette démarche. Celle-ci, encouragée par la Commission européenne, se diffuse dans de nombreux pays. Dans les faits, seules les grandes entreprises – plus de 500 salariés, avec un chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros – et les entreprises cotées en bourse sont concernées. Je pense donc qu’elles auront les moyens de mener à bien cette tâche. De fait, c’est un outil supplémentaire à faire valoir dans la RSE. Je pense donc que cet article représente une avancée pour celle-ci ; il n’est certainement pas défavorable aux entreprises.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je rappelle d’abord à M. Taugourdeau que les engagements en matière de RSE sont facultatifs. Deuxièmement, vous savez que les cantines des grandes entreprises sont confiées à de grandes entreprises de l’alimentation hors domicile. La question de l’origine des viandes et de l’utilisation des surgelés revient souvent : sur ce point, nous devons faire des efforts.

Ainsi, cet article permettrait de valoriser, dans le cadre de la RSE, les initiatives des grandes entreprises dans le domaine de l’alimentation. Cela resterait facultatif : je considère donc qu’il ne s’agit pas d’une complexification.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

C’est simplement un outil qui peut aider les entreprises à rendre leur image plus positive. Il ne s’agit pas, d’ailleurs, uniquement des entreprises elles-mêmes : au-delà des grandes cantines et des restaurants centraux d’entreprise, c’est tout le secteur de la restauration hors domicile qui est concerné.

Je souhaite donc, monsieur Taugourdeau, que vous retiriez votre amendement.

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Il m’avait échappé que cette mesure resterait facultative. Je retire donc cet amendement.

L’amendement no 7 est retiré.

L’article 4 est adopté.

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La parole est à M. Jean-Luc Laurent, inscrit sur l’article.

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Cet article est important : il vise à étendre à la restauration collective le label « fait maison », dont nous avons longuement discuté à l’Assemblée, et que nous avons adopté à l’occasion de l’examen de la loi relative à la consommation, dite loi Hamon. Ce label est issu d’un amendement déposé par notre collègue Pascal Got.

Je voudrais insister sur la qualité de ce label, créé après de longs débats. Rappelons-nous ces débats, notamment en commission : nous trouvions que ce label était trop mou, trop flou. La réalité est tout autre, car nombre de restaurateurs ont adopté cette démarche, et amélioré leur qualité. Ce label est reconnu, identifié et compris par les consommateurs.

Ce qui a été fait pour le secteur privé pourrait être étendu à la restauration collective. Je n’y vois que du positif. D’abord, parce qu’il y aura un effet de masse. Ensuite, parce que dans maint domaine – je pense au logement, mais cela s’applique également à l’alimentation –, la puissance publique parvient à stimuler l’innovation pour la satisfaction du plus grand nombre. C’est donc une excellente démarche, qui permettra de reconnaître et de valoriser les savoir-faire culinaires des personnels des services de restauration collective, en particulier dans le service public.

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La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement no 8 , qui tend à supprimer l’article 5.

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Cet article vise à étendre le champ d’application du label « fait maison ». Je rappelle qu’à l’heure actuelle, ce label n’est toujours pas clair !

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Non, non, ce n’est pas si clair que cela ! Certains plats sont marqués « fait maison » mais ne sont pas nécessairement faits dans le laboratoire de préparation en question. C’est pour cela qu’à mon avis, ce label n’est pas clair. Les consommateurs ne peuvent être certains, quand ils le voient, que le produit est bien réalisé sur place, dans la charcuterie ou la boucherie en question. Nous le savons, nous en avons déjà parlé, et je tenais à appeler votre attention sur ce point.

Par ailleurs, je tiens à signaler que certaines sociétés de restauration collective font elles aussi des plats maison, du potage par exemple. Mais je répète que ce n’est pas gagné d’avance : ce n’est pas en étendant le champ de ce label peu clair que nous simplifierons les choses.

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Défavorable. L’utilisation du label « fait maison » est possible depuis quelques mois. Il faut un certain temps pour que les professionnels s’emparent de l’outil, mais l’idée, ici, est de l’étendre à la restauration collective. Les services du ministère de Mme Pinville, que j’ai bien entendu consultés sur la faisabilité d’une telle extension, ont émis un avis positif.

Les cuisiniers de la restauration collective ont besoin d’être valorisés dans leur travail car, si l’on se contente, dans certains de ces restaurants, d’ouvrir des sachets préparés, dans d’autres, on fait l’effort de cuisiner des produits locaux.

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Là où l’on fait cet effort, les cuisiniers et l’ensemble du personnel doivent être valorisés, de même que les fournisseurs – les charcutiers, par exemple. Lorsqu’un bon travail est accompli, il doit être mis en avant.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Défavorable également.

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Je me réjouis de l’ensemble de la proposition de loi de Mme Allain, et tout particulièrement de cet article.

Un décret de mai 2015, monsieur Taugourdeau, simplifie la mise en oeuvre du « fait maison » ; il rappelle notamment que, pour bénéficier de ce label, les restaurateurs doivent fabriquer, à partir de produits crus, des plats préparés dans leur cuisine. La simplification que vous appelez de vos voeux est donc effective.

L’extension de ce label ne peut que nous réjouir, car il garantit au consommateur davantage d’informations sur ce qu’il a dans son assiette – et de qualité.

L’amendement no 8 n’est pas adopté.

L’article 5 est adopté.

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Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 5.

La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 19 .

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Si vous en êtes d’accord, monsieur le président, je présenterai en même temps mes amendements nos 26 et 22 .

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Je veux soumettre une proposition à la rapporteure et au Gouvernement. Un plan alimentaire territorial peut être considéré comme une contribution à un projet territorial de santé, tel que le définit dorénavant la loi, ou à un territoire à énergie positive, à travers un volet de lutte contre le gaspillage alimentaire et la réduction des coûts carbone. Il pourrait aussi être pris en compte dans le cadre de l’élaboration d’un plan d’urbanisme, qu’il s’agisse, par exemple, d’un schéma de cohérence territoriale – SCOT – ou d’un plan local d’urbanisme intercommunal – PLUI. Écrire que les plans alimentaires territoriaux peuvent être des « contributions » à ces différents documents est une manière de mettre en valeur leur portée, non seulement dans l’ordre du symbole, mais aussi sur le terrain.

Les plans ou projets que j’ai cités sont des innovations législatives de la majorité ; nous en sommes fiers car ils donnent des outils pour le développement territorial ; il n’y a d’ailleurs dans ce que je propose, je le dis pour anticiper d’éventuelles critiques, aucun caractère normatif ou obligatoire : ces dispositions pourraient anoblir la portée des plans alimentaires territoriaux…

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…en laissant aux acteurs la possibilité de les considérer comme des contributions à des plans qui dépassent leur objet premier.

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Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

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Défavorable. En considérant les projets alimentaires territoriaux comme de simples « contributions » à d’autres documents, on risque d’introduire une hiérarchie qui les dévaloriserait par rapport à ces derniers.

J’entends vos arguments, monsieur Potier, sur les programmes de prévention territoriaux – qu’il s’agisse des plans de santé ou des territoires à énergie positive – comme sur les documents d’urbanisme, mais ceux-ci peuvent d’ores et déjà réserver du foncier aux terres destinées à l’alimentation. Il faut donc se garder d’alourdir la législation, me semble-t-il.

Cependant, à titre personnel, et tout en rappelant l’avis défavorable de la commission, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je comprends bien le sens de votre démarche, monsieur Potier, qui est de suggérer une connexion entre les projets alimentaires territoriaux et l’urbanisme, les territoires à énergie positive ou la santé.

Cependant, je le répète, nous n’en sommes qu’à la mise en oeuvre : il ne me semble pas opportun, à ce stade, d’inscrire dans la loi des dispositions susceptibles de soulever des questions parmi les volontaires. L’objectif doit rester simple : assurer la réussite des plans territoriaux d’alimentation. Nous devons nous en tenir à cette priorité simple.

Plusieurs de vos observations sont justes, monsieur Potier : ces différents documents formeront un ensemble cohérent, et le lien sera peut-être établi par les acteurs eux-mêmes ; mais inscrire la démarche dans la loi lui donne un caractère d’injonction qui, je le répète, ne me semble pas utile dans cette période de mise en oeuvre. Je suis donc défavorable à l’amendement, non dans son esprit, mais pour les raisons que je viens d’indiquer.

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Les explications du ministre sont claires, et j’ai bien compris qu’il s’agit plutôt d’amendements d’appel. Cela dit, l’idée d’inclure dans un même récit les projets alimentaires et, par exemple, les territoires à énergie positive – même si les premiers ne sont que des « contributions » – me paraît intéressante : peut-être pourrons-nous reprendre ce débat.

À l’été 2014, lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, nous avions débattu des indications géographiques. L’idée d’ancrage territorial inclut la dimension touristique. Valoriser une indication géographique à travers des notions telles que la croissance verte ou les territoires à énergie positive me semble aller dans le bon sens : peut-être faudra-t-il s’en inspirer dans un futur texte législatif.

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Je n’ai pas réussi à convaincre le ministre, et j’ai compris les réserves exprimées par Mme la rapporteure. Nous partageons l’esprit de mes amendements, non leur lettre. À n’en pas douter, la cohérence sera la règle sur les territoires. Dans celui où je suis élu, le programme leader inclut une dynamique qui le connecte à un plan de santé : cela donne du sens sans alourdir les choses. La République sociale s’ancre dans les territoires ; aussi avons-nous besoin de récits politiques cohérents et forts, qui donnent du sens ; de surcroît, cela ne coûte rien.

Je suis désolé d’avoir échoué à vous convaincre, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mais je ne voudrais pas que cela apparaisse comme un signe de division entre nous, car nous partageons le même combat. Aussi je retire mes amendements.

Les amendements nos 19 , 26 et 22 sont retirés.

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Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi.

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La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour une explication de vote au nom du groupe Les Républicains.

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Nos amendements amélioraient le texte sans le dénaturer : vous nous avez entendus, puisque vous en avez subtilisé quelques-uns…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Nous les avons récupérés !

Sourires.

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C’est ce que j’avais compris.

Nos collègues défendent l’idée qu’il faut consommer mieux et produire autrement, ce qui est déjà le cas, même dans l’agriculture traditionnelle. M. Potier, d’ailleurs, a pu constater qu’il était question, au SIVAL, d’agriculture « écologiquement intensive ».

Nous avons aussi besoin d’agriculteurs qui produisent de gros volumes, afin que la France reste un pays exportateur de produits agricoles et agroalimentaires : ce n’est pas M. le ministre de l’agriculture qui dira le contraire.

Bien sûr, nous sommes sensibles à l’émulation mise en oeuvre par les élus ruraux pour animer leur territoire, madame la rapporteure, et nous sommes exigeants, comme vous, sur la qualité de l’alimentation dans les cantines scolaires. C’est pourquoi nous voterons ce texte, pour la population, pour la ruralité, et pour favoriser les circuits de proximité davantage encore que les courts. Un circuit court, je le rappelle, n’implique pas la présence de produits « de chez nous » : des sociétés mondialement connues font aujourd’hui fortune dans ce type de commerce.

Nous pensons aussi, monsieur le ministre, à l’intérêt économique de l’agriculture française, aux agriculteurs dans l’ensemble des filières et à notre économie agroalimentaire. Nous continuerons, pour eux, à exiger de vous des signaux et des actes très forts autant qu’efficients. Le groupe Les Républicains votera donc le texte.

« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur tous les bancs.

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Je remercie l’Assemblée d’avoir adopté ce texte qui redonnera de l’espoir dans nos territoires ; et, plus encore que de l’espoir, la possibilité de reprendre la politique en main. Il s’agit là, je crois, d’un message fort.

Nous avons parlé de territoires à énergie positive, de santé et d’environnement, autant de sujets auxquels l’ancrage territorial de l’alimentation fait écho, car elle constitue un véritable levier en matière de lien social.

Je me réjouis donc beaucoup de ce vote unanime, auquel je ne m’attendais pas forcément, et je vous en remercie une nouvelle fois, mes chers collègues. Beaucoup reste à faire pour convaincre, mais les plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durables, qui remplaceront donc les PRAD, permettront la mobilisation de financements européens. Les régions pourront désormais donner aux territoires la possibilité d’utiliser ce texte de loi pour mettre en oeuvre les politiques qu’ils souhaitent.

Applaudissements sur tous les bancs.

La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures cinq, sous la présidence de M. Denis Baupin.

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L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique (nos 3164, 3360).

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La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, je suis très sensible à votre démarche et je partage votre préoccupation de limiter les effets de la pression publicitaire sur les enfants.

Cependant, je ne suis pas convaincue que cette proposition de loi, telle qu’elle a été votée par le Sénat, soit le bon moyen d’y parvenir, et ce pour plusieurs raisons. Je me réjouis donc des améliorations apportées par la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Tout d’abord, le lien entre la réduction ou la suppression de la diffusion de messages publicitaires destinés aux plus jeunes et l’obésité ne doit pas être surestimé : ce qui est en cause, c’est le temps passé devant la télévision, beaucoup plus que le contenu des programmes regardés ou de la publicité diffusée.

C’est la raison pour laquelle peu de pays ont fait le choix d’une prohibition de cette publicité. En outre, ce questionnement ne devrait pas se réduire à la diffusion de messages publicitaires sur les seules chaînes publiques. Les enfants et les jeunes adolescents sont également exposés aux messages publicitaires sur les chaînes privées, ainsi que, de plus en plus, sur internet : 58 % des enfants âgés de sept à dix ans regardent les programmes jeunesse sur YouTube.

Par ailleurs, ne cibler que les programmes jeunesse, c’est occulter tous les autres, alors qu’ils peuvent être largement visionnés par les plus jeunes. Comme l’indique le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, un grand nombre d’émissions de télé-réalité figure au palmarès des programmes les plus regardés par les enfants âgés de quatre à dix ans.

Enfin, France Télévisions a déjà pris des engagements forts pour réduire l’exposition des enfants à la publicité. Ainsi, les programmes diffusés sur les antennes de France 5 et France 4 dans l’émission Les Zouzous, destinée aux enfants de trois à six ans, ne contiennent aucun message publicitaire.

De fait, les démarches entreprises ces dernières années ont été celles d’une co-régulation associant l’ensemble des professionnels concernés. France Télévisions y a d’ailleurs toute sa place.

Cette démarche a pris corps avec la signature, en 2009, d’une charte visant à promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision. Cette charte a été reconduite et renforcée en 2014.

Elle réunit, sous l’égide des pouvoirs publics dans leur ensemble, le mouvement associatif, les industriels de l’agro-alimentaire, les professionnels du secteur audiovisuel et ceux de la publicité.

Le mérite de cette charte, dont six ministères sont désormais signataires, est d’envisager la problématique dans toutes ses composantes, qu’il s’agisse de la régulation du contenu des spots publicitaires par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, l’ARPP, des campagnes de prévention de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, des messages sanitaires apposés sur les spots publicitaires pour des produits alimentaires, ou, surtout, de la création et de la diffusion d’émissions faisant la promotion d’une bonne hygiène de vie.

Par l’insertion de ces nouvelles dispositions, qui permettent d’aller plus loin encore dans ce travail collectif, les professionnels ont montré leur réelle volonté d’engagement.

En matière de publicité, le recours à ce type d’encadrement souple s’est avéré être une solution très constructive, permettant de mettre en cohérence les intérêts de chacun autour d’actions concrètes et concertées.

Il me paraît donc préférable de poursuivre cette démarche pédagogique et d’en évaluer l’impact dans la durée, comme le prévoit l’article 1er de la proposition de loi, plutôt que d’envisager des mesures de prohibition.

Enfin, et c’est mon troisième point de désaccord, je suis convaincue que le service public audiovisuel a besoin de stabilité, dans sa structure comme dans son financement.

Comme vous le savez, la situation financière de France Télévisions est préoccupante. Entre 2010 et 2014, les recettes publicitaires du groupe ont diminué de plus de 100 millions d’euros tandis que ses ressources publiques demeuraient stables, du fait de sa participation à l’effort national de redressement des comptes publics.

En dépit de mesures d’économies importantes, notamment la mise en oeuvre d’un plan de départs volontaires, l’exploitation de la société est demeurée déséquilibrée jusqu’en 2015, du fait de la progression automatique de certaines charges.

Pour permettre à la nouvelle présidente de France Télévisions de réduire ce déficit après trois années de pertes, le Gouvernement a obtenu, par amendement, l’augmentation de 28 millions d’euros du montant de la ressource publique allouée à l’entreprise.

Pour autant, ce coup de pouce n’exonérera pas France Télévisions d’un effort d’économie important et le contrat d’objectifs et de moyens 2016-2020 devra définir, au-delà du budget de 2016, les conditions d’un retour durable à l’équilibre.

Or le dispositif adopté au Sénat se traduirait par un manque à gagner de l’ordre de 15 à 20 millions d’euros : s’il était mis en oeuvre, il compromettrait donc durablement la capacité de l’entreprise à retrouver l’équilibre.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Il n’est en effet pas envisageable, à court terme, d’augmenter les ressources des sociétés de l’audiovisuel public.

Pour toutes ces raisons, je suis favorable à la nouvelle rédaction de la proposition de loi telle qu’adoptée par votre commission des affaires culturelles et de l’éducation.

En effet, elle permettrait au Gouvernement et au Parlement de disposer, lors de l’élaboration et l’adoption du projet de loi de finances, et grâce à l’application combinée des éléments des rapports prévus aux articles 1er et 2 de la présente proposition de loi, de l’ensemble des éléments qualitatifs et quantitatifs nécessaires pour envisager de mener une telle réforme.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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La parole est à Mme Michèle Bonneton, rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

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Madame la ministre de la culture et de la communication, je vous remercie particulièrement de votre présence ici aujourd’hui, car je sais que votre emploi du temps est très chargé actuellement.

Mes chers collègues, je suis heureuse de vous présenter cette proposition de loi relative à la suppression de la publicité commerciale dans les programmes de la télévision publique destinés à la jeunesse. Il s’agit en effet d’une revendication ancienne des parlementaires écologistes. Cependant, le vote de cette proposition de loi au Sénat a montré qu’il s’agissait d’une cause trans-partisane.

Je rappelle d’ailleurs qu’en 2008, la précédente majorité, notamment Mme Roselyne Bachelot, alors ministre de la santé et des sports, avait eu des velléités d’interdire, dans l’ensemble des programmes du service public de la télévision, toute publicité pour des produits alimentaires à destination des enfants.

Finalement, le choix a alors été fait d’interdire toute publicité sur les chaînes publiques entre vingt heures et six heures, et de protéger ainsi un public essentiellement adulte. N’aurait-il pas été préférable de commencer par protéger les publics les plus fragiles, c’est-à-dire les enfants ?

La situation actuelle est donc paradoxale : France Télévisions ne peut diffuser de messages publicitaires en soirée, au moment où ils sont vus par les adultes et où ils sont les plus rémunérateurs, mais elle est en revanche autorisée à en diffuser en journée, à un moment où ils sont vus notamment par les enfants, souvent en l’absence de leurs parents, et où ils rapportent de moins en moins.

L’article 2 de la proposition de loi, dans sa rédaction initiale, suggérait de remédier à cette situation en interdisant, à compter du 1er janvier 2018, la publicité commerciale pendant la diffusion des programmes de la télévision publique destinés aux enfants de moins de douze ans.

Il prévoyait également d’étendre cette restriction pendant un délai de quinze minutes avant et après cette diffusion, ainsi que sur les sites internet des chaînes publiques qui proposent ces mêmes programmes.

A été substituée à cette proposition, par un amendement adopté en commission, une demande de rapport que le Gouvernement serait chargé de remettre au Parlement avant le 30 juin 2017.

Ce rapport évaluerait l’impact d’une suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique, les possibilités d’évolution de la contribution à l’audiovisuel public, les modalités de la compensation financière ainsi que les moyens de renforcer l’indépendance des sociétés de l’audiovisuel public.

J’estime que cet amendement, adopté en commission au mois de décembre dernier, a vidé l’article 2 de la proposition de loi de sa substance. Par conséquent, la rédaction actuelle de la proposition de loi en limiterait le contenu à la demande de deux rapports : c’est du jamais vu ! Je vous proposerai donc un amendement visant à rétablir la rédaction de cet article 2 telle qu’issue des travaux du Sénat.

L’article 1er du texte soumis à votre examen propose d’inscrire dans la loi le principe d’un contrôle du CSA sur les mécanismes d’auto-régulation mis en place par les services de communication audiovisuelle publics et privés pour garantir le respect des objectifs de santé publique et de lutte contre les comportements à risque dans les messages publicitaires diffusés autour des programmes destinés à la jeunesse.

Néanmoins, la commission a adopté un amendement prévoyant que, désormais, le rapport remis par le CSA au Parlement évaluera non seulement les actions menées par les chaînes de télévision publiques et privées, mais aussi celles des annonceurs publicitaires. Il s’agit d’assurer une meilleure visibilité au travail mené par l’ARPP.

Toutefois, je vous proposerai un amendement visant à supprimer cette référence aux actions menées par les annonceurs publicitaires. En effet, l’inclusion des annonceurs publicitaires dans le périmètre du contrôle exercé par le CSA pourrait poser des difficultés, car, en l’état du droit, ils n’entrent pas dans le champ de la régulation mise en oeuvre par cette même autorité, si ce n’est au titre des engagements pris dans la charte alimentaire.

Mes chers collègues, si je vous propose des amendements visant à une adoption conforme de la rédaction de la proposition de loi résultant des travaux du Sénat, c’est parce qu’il est ressorti de la vingtaine d’auditions que je suis parvenue à mener – dans le peu de temps qui m’a été imparti – que le dispositif retenu par la Haute assemblée recueillait l’assentiment d’une très forte proportion et donc d’un très grand nombre de personnes entendues.

Des experts, comme M. Serge Tisseron, psychanalyste et spécialiste de l’image, tout autant que les représentants des associations familiales, des associations de parents d’élèves – comme la Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public, la PEEP, et la Fédération des conseils de parents d’élèves, la FCPE –, des associations de consommateurs ou encore d’associations particulièrement investies sur ce sujet, comme Résistance à l’agression publicitaire : tous ont salué une initiative intéressante.

Ils ont formé le voeu qu’elle constitue une étape marquante. En effet, les spécialistes ont démontré que la publicité a, entre autres, des conséquences sur le psychisme des enfants.

Le rythme accéléré des séquences a pour objectif de capter les émotions, de faire appel à la pulsion au détriment de la réflexion. L’attention des enfants est altérée en hyper-attention et sous-attention, ce qui n’est pas sans incidence sur les apprentissages scolaires. De plus, l’image renvoyée est celle du bonheur dans l’hyper-consommation, ce qui peut entraîner des frustrations et parfois des comportements violents. Cela ne va pas dans le sens de la formation de citoyens responsables.

J’estime pour ma part que, si cette proposition de loi peut paraître modeste de prime abord, la sanctuarisation des programmes de la télévision publique destinés aux enfants de moins de douze ans constituerait un premier pas important vers une réforme plus ambitieuse.

À la suite de son excellent rapport sur le financement de l’audiovisuel public, le sénateur André Gattolin a commandé un sondage. Ce sondage, réalisé par l’Institut français d’opinion publique, l’IFOP, a révélé que 71 % des personnes interrogées étaient favorables à la mesure d’interdiction de la publicité commerciale autour des programmes pour enfants diffusés par la télévision publique.

Lors des auditions que j’ai menées et lors de l’examen du texte en commission, l’une des principales objections qui m’a été faite était d’ordre financier. Les pertes de recettes pour France Télévisions résultant de la mesure de suppression proposée sont estimées, selon mes différents interlocuteurs, à un montant compris entre 10 et 20 millions d’euros, ce qu’a confirmé Mme la ministre.

S’il est vrai que, sur l’initiative de sa rapporteure, Mme Corinne Bouchoux, le Sénat a supprimé les dispositions organisant la compensation financière, c’est pour faire coïncider l’entrée en vigueur de la mesure d’interdiction au 1er janvier 2018 avec celle d’une potentielle réforme ambitieuse du financement de l’audiovisuel public, qui s’imposera à court terme compte tenu de la montée en puissance des autres écrans et du numérique. La suppression de la publicité entrant en vigueur au 1er janvier 2018, cela laisserait deux ans au Gouvernement et au Parlement pour mettre en oeuvre une telle réforme, que le Président de la République lui-même avait annoncée le 2 octobre 2014.

Sans attendre cette éventuelle réforme, je fais des propositions dans mon rapport.

Une part non négligeable de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communication électronique est aujourd’hui affectée au budget général, alors qu’elle avait été conçue à l’origine pour compenser la perte de recettes de France Télévisions lorsque la publicité a été supprimée entre vingt heures et six heures. Ainsi, France Télévisions ne recevra que 140 millions d’euros en 2016 alors que cette taxe s’est élevée en 2014 à 213 millions d’euros. Il reste donc plusieurs dizaines de millions d’euros de marge.

Il existe d’autres sources de financement possibles. On pourrait imaginer par exemple que France Télévisions soit mieux rémunérée de ses investissements dans la création, ou puisse diffuser de la publicité lors de grands événements sportifs.

Remarquons aussi que la perte de recettes due à la suppression de la publicité proposée correspond à une augmentation inférieure à 50 centimes d’euros de la contribution à l’audiovisuel public.

Autre piste à explorer, l’élargissement de l’assiette de la contribution à l’audiovisuel public à tous les écrans numériques.

Finalement, les sommes en jeu sont très faibles comparées au coût que représente chaque année le seul échec scolaire, estimé à 24 milliards d’euros.

La question de la publicité commerciale diffusée autour des programmes pour enfants ne doit pas être envisagée seulement sous un angle comptable et financier. Il s’agit de protéger la santé des enfants au sens de l’Organisation mondiale de la santé, à savoir « un état complet de bien-être physique, mental et social » qui « ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».

C’est, de notre point de vue, l’un des devoirs du service public de la télévision à l’égard d’une jeunesse dont il est démontré aujourd’hui qu’elle pâtit physiquement et psychologiquement d’une surexposition aux messages publicitaires, dont les conséquences sur les apprentissages scolaires et le comportement social ne sont plus à prouver.

Il s’agit de redonner au service public de la télévision ses lettres de noblesse en exigeant de lui une exemplarité, qui permette aux parents d’avoir confiance lorsque leurs enfants regardent les programmes des chaînes publiques.

Comme l’a rappelé Mme Geneviève Avenard, défenseure des enfants, « l’intérêt supérieur de l’enfant doit toujours, selon la Convention des droits de l’enfant, constituer la préoccupation primordiale ».

Les parents comprendraient difficilement que notre assemblée n’adopte pas les dispositions visant à mieux protéger la jeunesse, qui, en 2012, je le rappelle, avait été érigée en priorité du quinquennat par M. le Président de la République.

Je vous invite en conséquence, mes chers collègues, à adopter les amendements que je vous présenterai afin de rendre à la présente proposition de loi la substance et la portée qui étaient initialement les siennes.

Cette proposition de loi est modeste, c’est un premier pas indispensable pour l’éducation du citoyen de demain, ce qui est en soi un enjeu considérable.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Barbara Pompili.

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Comme vous venez de le dire, madame la rapporteure, la jeunesse a été érigée en priorité du quinquennat, et nous avons une fois encore l’opportunité de montrer que cette priorité se traduit en actes, car interdire la publicité commerciale dans les programmes dédiés aux enfants de moins de douze ans et autour, c’est avant tout protéger la jeunesse.

Les conséquences de la publicité sur la santé psychique et physique des enfants sont indéniables.

Les troubles liés à l’alimentation en sont un premier exemple. La publicité pour les produits alimentaires concerne en effet essentiellement des produits connus pour être trop gras, salés ou sucrés. On le sait, les habitudes de grignotage s’installent très vite, première étape vers la malbouffe, l’obésité, voire la boulimie. Il y a en outre un facteur d’inégalité sociale qu’il convient de souligner, car ceux qui regardent le plus la télévision et qui sont plus sujets à l’obésité sont issus des milieux défavorisés.

Certes, le but des annonceurs n’est pas de renforcer les risques d’obésité ou de boulimie, mais il est vrai que les enfants constituent une cible de choix car ils sont particulièrement perméables à leurs messages.

Cibler les jeunes, c’est fidéliser une clientèle dès le plus jeune âge. Cibler les jeunes, c’est s’adresser aux prescripteurs familiaux des achats réalisés.

Le facteur caprice, théorisé par les publicitaires dans les années 80, en est l’illustration extrême. Or, lorsque les parents cèdent à ce caprice, les enfants se retrouvent dans une situation d’angoisse, confrontés à une toute-puissance sans fondement qu’ils ne savent pas gérer.

En outre, les enfants de moins de douze ans sont d’autant plus perméables aux messages diffusés qu’ils ne sont pas capables d’identifier ce qui relève de la publicité, de l’information ou de la fiction. Ils prennent au premier degré le monde tel qu’il leur est proposé. La confusion est aggravée par l’apparition des personnages de dessins animés dans les publicités.

Ce manque de discernement est également problématique compte tenu des valeurs promues à travers les publicités : individualisme, compétition, stéréotypes de genre.

Enfin, autre effet notoire dont il faut mesurer la gravité, l’attention est morcelée, ce qui peut générer des troubles de l’attention, avec les conséquences que l’on connaît sur la scolarité.

C’est pourquoi protéger les enfants de moins de douze ans des effets psychiques et physiques de la publicité relève d’un impératif et, par là même, des missions de service public confiées à France Télévisions.

C’était le sens de la proposition de loi débattue et adoptée au Sénat grâce à un soutien transpartisan et à l’excellent travail de mes collègues André Gattolin et Corinne Bouchoux, c’était le sens cette proposition de loi dans sa version initiale, celle présentée en commission fin décembre pour les écologistes par Michèle Bonneton, et c’est donc le sens des amendements que nous vous proposerons d’adopter.

Soutenue par 71 % de l’opinion publique, cette réforme a une utilité publique que nul ne peut remettre en question en conscience.

Le prétendu argument économique selon lequel une telle interdiction nuirait aux entreprises françaises ne tient pas. Cela a été dit, ces publicités font avant tout la promotion de produits de marques qui appartiennent à des multinationales et ne sont pas réalisés par l’artisanat français.

Quant à l’argument sur les conséquences pour le financement de France Télévisions, il faut là aussi être très clair. Les pertes pour le groupe sont estimées à un montant compris entre 7 et 20 millions, ce qui d’ailleurs représente peu au regard du budget global de France Télévisions, du montant de la CAP ou encore de la part de la taxe Copé fléchée sur l’audiovisuel public, mais, surtout, la protection des enfants de moins de douze ans relevant, me semble-t-il, des missions de service public de France Télévisions, il serait paradoxal et même grave de ne pas lui en donner les moyens.

Cela m’amène à l’autre enjeu de taille auquel il convient de s’atteler, enfin, la question du financement de l’audiovisuel public, qui revient inlassablement chaque année.

Oui, il est grand temps de donner réellement et définitivement à l’audiovisuel public les capacités financières de travailler dans de bonnes conditions, et ce de façon pérenne.

Outre la question de la réinternalisation d’une partie de la production et du financement par la création, des pistes existent : augmenter la part de la taxe Copé fléchée sur le financement de l’audiovisuel public, faire évoluer la contribution à l’audiovisuel public vers une contribution forfaitaire universelle, ou réintroduire en soirée la publicité, sans revenir pour autant à une invasion sans limite et sans éthique.

Des rapports très sérieux existent déjà à ce propos – je pense notamment à celui remis récemment par André Gattolin et Jean-Pierre Leleux.

Le temps est donc aux décisions, et non à la transformation de cette proposition de loi en un énième rapport sur le financement de l’audiovisuel public. Renvoyer aux calendes grecques cette réforme, alors que personne n’en conteste le bien-fondé et que, de toute façon, la question du financement de France télévisions doit être tranchée n’est pas raisonnable.

Pour conclure, permettez-moi d’espérer que la protection des enfants de moins de douze ans contre les effets physiques et psychiques de la publicité commerciale sera bien l’enjeu qui animera nos votes lors des discussions sur les amendements de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, avant d’entrer dans le fond du sujet, je tiens à dire que je regrette l’opposition du groupe socialiste lors de l’examen de cette proposition de loi en commission. Je regrette également votre position, madame la ministre. Avec la suppression de ses articles principaux, le texte est totalement vidé de sa substance. C’est dommage. Les motivations de ce refus constituent pour moi un mystère. J’espère que notre débat va permettre de l’éclaircir.

Pour ma part je soutiens la proposition de loi initialement déposée par le groupe écologiste et adoptée par le Sénat. Cette proposition vise à protéger nos enfants de la pression publicitaire lorsqu’ils regardent les programmes pour la jeunesse à la télévision.

Il est temps, en effet, de prendre des mesures face à un phénomène qui ressemble de plus en plus à du harcèlement publicitaire. Il n’y a qu’à faire l’expérience : installez-vous devant l’écran aux heures de diffusion de programmes pour la jeunesse et tentez de vous mettre à la place d’un enfant de huit ans. Promotion de produits sucrés hypercaloriques, diffusion de messages véhiculant des stéréotypes de genre, hypersexualisation des enfants mannequins à but marchand, pour vendre des cosmétiques ou des vêtements… Tout cela n’est pas bon pour la santé des enfants.

Les marques et les communicants débordent d’imagination pour vendre leurs produits. Parfois même, leurs messages publicitaires frôlent la mise en scène mensongère. Voyons ces publicités pour de magnifiques poupées ou de célèbres petits personnages, forts sympathiques par ailleurs, qui s’agitent tout seuls dans des montages fantastiques, sans l’intervention d’enfants. C’est surréaliste de voir à l’écran des enfants acteurs aux côtés de personnages virtuels.

Tout cela n’est pas raisonnable. Nos enfants sont plus que de simples cibles publicitaires, de simples consommateurs à influencer pour qu’ils dépensent leur argent de poche ou l’argent de leurs parents. Ils doivent être protégés de cette logique mercantile.

Bien sûr, il faudrait certainement que les enfants passent moins de temps devant la télévision, que les parents sortent davantage leurs enfants, leur fassent faire plus de sport, les emmènent plus souvent au musée ou au spectacle, mais, malheureusement, ce monde idyllique n’est pas pour tout de suite, pas pour tous les enfants en tout cas.

En attendant, il faut bien tenir compte de la réalité. Aussi suis-je favorable à un contrôle beaucoup plus strict de la quantité et du contenu des programmes publicitaires.

Voilà maintenant des années que nous savons que l’acharnement publicitaire dont les enfants font l’objet est nuisible à leur santé. Laisser faire est devenu intolérable, irresponsable. C’est donc un enjeu de santé publique évident, que de nombreux pays ont d’ailleurs pris en compte.

Néanmoins, madame la rapporteure, on peut regretter que le champ de votre proposition de loi soit restreint aux seules chaînes du service public : cela limite la portée d’une telle législation. Les études le montrent : les enfants passent plus de temps sur les chaînes privées. Je suis donc favorable à l’extension de cette mesure aux chaînes privées.

Chers collègues, je garde encore en mémoire la déclaration de Patrick Le Lay, le P.-D.G. de TF1 de l’époque, qui affirmait : « Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective business, soyons réalistes : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit […]. Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible. […] Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible. » Vous vous souvenez certainement de cette phrase, madame la ministre.

Certes, cette déclaration de 2004 date un peu, mais cette logique mercantile et très cynique est malheureusement toujours d’actualité. En constatant la pauvreté et la bêtise de certains programmes pour enfants, on peut légitimement craindre que cette logique soit également sciemment appliquée aux émissions qui sont destinées aux jeunes.

Notre groupe a donc déposé un amendement visant à prendre les mêmes dispositions d’interdiction sur les chaînes publiques et sur les chaînes privées. En plus d’être plus efficace pour protéger les enfants, ce serait aussi plus juste au regard des recettes publicitaires qui diminueront, à ce stade de notre discussion, uniquement pour la télévision publique.

De même, il convient d’étendre cette législation aux contenus vidéo à destination des jeunes enfants diffusés sur internet, dont les recettes publicitaires sont importantes et pas du tout contrôlées. Au final, madame la rapporteure, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste soutiendra le texte, tout en proposant des amendements en séance.

Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe écologiste.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, nous voici en présence d’une proposition de loi dont le contenu a été profondément modifié en commission. La proposition initiale affichait un objectif juste – supprimer le danger pour les enfants de la publicité dans les programmes de télévision qui leur sont réservés –, mais elle ne s’appliquait qu’à la seule télévision publique.

Aussi avons-nous été nombreux à nous interroger sur le bien-fondé d’une telle proposition, en raison de la discrimination financière que cela engendrerait à l’égard de la télévision publique, mais surtout, madame la rapporteure, de l’inefficacité d’une telle loi sur le problème posé : les conséquences sur les jeunes enfants et adolescents de la publicité qui leur est destinée, quels que soient le support et la chaîne qu’ils regardent.

Si, au coeur de la démarche, que vous avez rappelée tout à l’heure, il y a l’intérêt des enfants, on ne peut s’arrêter si vite sur le chemin. Nous sommes parvenus, avec la réunion de notre commission, contrairement au projet initialement soumis par notre collègue, à un texte élargissant le champ d’intervention de la loi à l’ensemble des moyens de communication audiovisuels et responsabilisant la représentation nationale vis-à-vis de la télévision publique. Pour autant, ce texte n’apporte pas de réponse satisfaisante puisqu’on en reste à la publication de rapports.

Nous sommes très loin de ce qu’attendaient de nombreux défenseurs des enfants, à savoir une loi permettant de faire reculer la publicité en direction des enfants et concernant l’ensemble des moyens de communication. Nous avons, en effet, été nombreux à recevoir des courriels nous alertant sur les dangers encourus par les plus jeunes. Et, comme je l’avais évoqué en commission, parmi ces dangers figurent bien sûr les questions liées à l’obésité, mais aussi la reproduction de stéréotypes de genre, comme nous l’avons encore constaté dans les publicités pour les jouets au moment des fêtes.

J’ai donc proposé en commission un certain nombre d’amendements pour que la loi porte sur l’ensemble du champ de l’audiovisuel, afin d’empêcher que les enfants ne soient emportés dans la société de consommation.

Cela aurait mérité une loi portant une grande ambition, en vue d’agir sur la totalité du problème. Nous savons en effet que les enfants consomment les programmes jeunesse principalement sur les chaînes privées : TF1, M6 et Gulli. En outre, les enfants de moins de 12 ans regardent davantage les chaînes de France Télévisions entre dix-neuf heures et vingt et une heures – on peut le regretter – que le matin, quand sont diffusés les programmes pour la jeunesse.

Par le biais de ses deux marques – Les Zouzous pour les enfants âgés de 3 à 6 ans et Ludo pour les 6 à 12 ans –, France Télévisions diffuse 200 heures de programmes, contre 640 heures pour la seule chaîne Gulli, et aucune publicité commerciale n’est diffusée dans les émissions ou sur les applications liées aux programmes de France Télévisions pour les enfants de 3 à 6 ans. Madame la ministre a en outre souligné que France Télévisions s’est engagée, à travers une charte, sur les contenus diffusés en direction des plus jeunes.

Ainsi, la télévision publique donne déjà l’exemple, montre le chemin, et on peut rêver demain d’une chaîne publique débarrassée de toute publicité pour l’ensemble de ses programmes, mais il faut alors s’en donner les moyens en abordant la question des compensations financières. Mme la rapporteure, dans l’exposé sommaire de ses propositions d’amendement, indique la nécessité d’y réfléchir, mais sans toutefois en préciser dans la loi les modalités.

Si la publicité n’est pas nocive que sur la télévision publique pour les jeunes enfants, elle ne l’est pas non plus que sur la seule télévision. De récentes études montrent en effet que la place qu’occupent les autres écrans dans la consommation médias des enfants ne cesse d’augmenter.

Les enfants et les jeunes sont les tranches d’âge dont la consommation de télévision baisse le plus vite et le plus fort : dix-sept minutes de moins en moyenne entre 2012 et 2014 pour les 4 à 14 ans, contre neuf minutes de moins pour la population en général. Aussi, c’est à un dispositif législatif permettant d’agir sur l’ensemble des programmes télévisés et des moyens de communication utilisés par les enfants aujourd’hui qu’il faudra travailler.

Enfin, madame la rapporteure, rien ne serait plus immoral qu’une politique de vases communicants qui supprimerait la publicité pour les enfants sur un support ou une antenne publique pour la reporter sur des chaînes privées. Avec le règne de la loi du marché sur les écrans, ce n’est malheureusement pas la générosité qui serait à l’ordre du jour, mais l’appât du gain.

Vous argumentez, madame la rapporteure, sur le danger que ferait courir le retrait de la publicité dans les programmes jeunesse pour les chaînes privées. En effet, les annonceurs du secteur alimentaire pour la catégorie « enfants » investissent d’abord dans les chaînes privées : TF1 reçoit 83 millions d’euros et M6 48 millions d’euros, pour seulement 1,4 million pour France 3 et 900 000 euros pour France 4. Mais que représente cette somme par rapport au budget publicitaire de TF1 ? S’attaquer à la publicité aussi sur les chaînes privées ne ferait pas tomber les maisons TF1 ou Gulli et ne les obligerait pas, comme vous nous l’avez dit en commission, à aller émettre de l’étranger.

Vous faites référence au rapport de nos collègues sénateurs Gattolin et Leleux sur le financement de l’audiovisuel public, mais nous pourrions aussi nous référer au rapport de Marc Schwartz au Sénat sur France Télévisions, qui se disait « pessimiste sur les perspectives d’évolution de la publicité pour la chaîne publique ».

Si, dans l’intérêt des enfants et de la qualité des programmes de l’ensemble des moyens de communication, nous pensons qu’il faut travailler à des mesures visant à interdire la publicité commerciale dans tous les programmes destinés à la jeunesse, il faut permettre au secteur public de mettre en place cette nouvelle législation. Pour cela, il est nécessaire de travailler dans le même temps à une grande réforme de la contribution de l’audiovisuel public, afin de permettre au service public de vivre et de créer.

Nous avons déjà eu l’occasion d’aborder cette question lors de nos débats sur les contrats d’objectifs et de moyens de France Télévisions. Nous avons de grandes exigences de contenu à l’égard de notre télévision publique et nous avons raison. Son rôle est en effet décisif pour la création et l’accès aux oeuvres du plus grand nombre de nos concitoyens.

Permettez-moi ici cet aparté : j’espère que l’audiovisuel pourra avoir une meilleure place dans le contenu de la loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine lors de sa deuxième lecture, que nous espérons très rapide, madame la ministre.

Oui aux exigences de qualité pour le service public, oui à une grande ambition pour ses missions, mais alors, oui à des moyens à la hauteur pour la réalisation de ces objectifs.

Pour ce qui concerne la proposition de loi qui nous est soumise, si elle reste en l’état, nous la voterons mais, vu son contenu, sans grand enthousiasme.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, madame la rapporteure, mes chers collègues, l’étude de cette proposition de loi nous permet de réfléchir à la place qu’occupe la publicité dans notre société. Déclinée sur de nombreux supports, elle est en effet très présente dans notre quotidien ; elle est même, sans aucun doute, trop présente. Supprimer la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique est une proposition à laquelle je souscris donc pleinement.

Cette proposition de loi vise à protéger les plus jeunes publics – en l’occurrence, les enfants de 3 à 12 ans – de la publicité commerciale, mais uniquement dans les programmes jeunesse des chaînes du groupe France Télévisions.

Cette question est importante pour le développement des enfants car, nous le savons, certaines campagnes publicitaires peuvent favoriser une mauvaise alimentation, des comportements à risque, une exposition à des images choquantes mais également véhiculer des stéréotypes.

Je salue, à nouveau, le travail de Mme la rapporteure, qui a auditionné nombre d’acteurs des secteurs de l’audiovisuel et de la publicité, afin de faire concrètement le point, entre autres, sur l’autorégulation en matière de films publicitaires.

Il ressort de ces auditions que la publicité télévisée à destination des enfants fait déjà l’objet de plusieurs contrôles importants, en particulier sur les chaînes publiques. Contrôle par l’État, d’abord, qui encadre strictement les publicités diffusées à la télévision, à travers les dispositions du décret du 27 mars 1992 définissant les obligations des éditeurs de services en matière de publicité, mais aussi par l’action du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA.

Nous pouvons citer à ce propos la signature par l’ensemble des chaînes de télévision d’une charte dite « alimentaire », afin de prévenir les comportements à risque dans les publicités et permettant de financer en parallèle des programmes d’éducation à la nutrition, lesquels ont représenté 1 410 heures de diffusion en 2014 – un chiffre en constante augmentation depuis 2009.

Contrôle également par les annonceurs eux-mêmes, dans une démarche d’autorégulation efficace, par délégation du CSA : ainsi, l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, l’ARPP, administrée par les annonceurs, les agences et les médias, exerce un contrôle préalable sur l’ensemble des spots publicitaires diffusés.

Les situations de grignotage, de surconsommation alimentaire ou de repas pris devant un écran, qui sont les cibles de cette proposition de loi, sont par exemple déjà proscrites afin de lutter contre le développement des comportements alimentaires à risque.

Ensuite, des jurys de déontologie publicitaire, composés de magistrats, peuvent être saisis par des citoyens ou des associations a posteriori, en cas de diffusion d’une campagne jugée choquante. Cet outil de contrôle est fortement sollicité puisque l’on recense aujourd’hui environ 2 000 plaintes par an, principalement en raison de références à des stéréotypes genrés dans certaines publicités.

Enfin, contrôle par la régie publicitaire de France Télévisions, puisque la publicité est déjà absente des programmes jeunesse à destination des enfants de 3 à 6 ans. De plus, les campagnes publicitaires du secteur alimentaire, principalement visées par cette proposition de loi, ne représentent que 8 % des publicités diffusées dans les programmes jeunesse, contre 92 % pour le secteur des jeux et jouets ou de la distribution.

À l’inverse, le secteur alimentaire est le premier investisseur en termes de publicité sur les autres créneaux horaires, toutes chaînes confondues. Ce constat atteste donc bien une autorégulation du service public en matière d’exposition des plus jeunes à la publicité, en particulier alimentaire.

Ce qui est apparu également durant les auditions, c’est le flou sur les conséquences financières qu’aurait la suppression de la publicité dans les programmes jeunesse de la télévision publique. En effet, le CSA et France Télévisions, qui utilisent pourtant des méthodes de calcul divergentes, évaluent les pertes de recettes à environ 20 millions d’euros ; le sénateur Gattolin, défenseur du texte au Sénat, annonce, lui, un chiffre d’environ 7 millions d’euros.

Comme vous l’évoquez vous-même dans vos travaux, madame la rapporteure, il existe donc une forte incertitude sur le chiffrage des pertes financières à prévoir pour la télévision publique. Or, madame la ministre l’a indiqué, le groupe France Télévisions fait déjà face à une équation budgétaire difficile, nous le savons tous.

Pour résorber le déficit, estimé à 50 millions d’euros environ, nous avons, lors du projet de loi de finances pour 2016, abondé les crédits de France Télévisions de 25 millions, tandis que le groupe s’est engagé dans un programme courageux de 25 millions d’euros d’économies sur les coûts de fonctionnement, sans suppression d’emplois.

Les conséquences d’une perte sèche d’un montant allant de 7 à 20 millions pourraient donc s’avérer désastreuses pour le groupe France Télévisions, qui investit chaque année, à titre de comparaison, 29 millions d’euros dans la production de programmes d’animation.

Il est donc important de s’assurer que l’objectif de ce texte, partagé par un grand nombre d’entre nous, sur les différents bancs de l’hémicycle, ne se traduise pas par un affaiblissement du service public de la télévision, voire par des pertes d’emplois.

Le même constat peut être fait concernant les chaînes privées ciblées par plusieurs amendements. Les recettes publicitaires de celles-ci diminuent en effet actuellement du fait de l’émergence du digital.

C’est pourquoi le texte adopté par la commission des affaires culturelles et de l’éducation renforce les objectifs de la proposition de loi initiale, tout en se garantissant de toute conséquence négative imprévue.

Ainsi, l’article 1er renforce le contrôle du CSA sur la maîtrise par l’ensemble des chaînes de leur espace publicitaire et sur l’autorégulation du secteur de la publicité, un contrôle qui devra déboucher sur des préconisations concrètes et une protection renforcée des jeunes publics.

L’article 2 pose, lui, le principe de la suppression de la publicité commerciale dans l’ensemble des programmes jeunesse de la télévision publique et prévoit un rapport sur l’impact concret de cette mesure sur le secteur de la publicité comme sur les finances du groupe France Télévisions. Ce rapport devra présenter des pistes de compensations financières et permettre au législateur de définir, en toute connaissance de cause, les modalités de la suppression de la publicité. Il devra être remis au plus tard le 30 juin 2017, c’est-à-dire six mois avant la date d’entrée en vigueur prévue, à savoir le 1er janvier 2018 afin, je tiens à le préciser, de ne pas décaler dans le temps l’application de cette disposition.

La proposition de loi représente donc une avancée importante pour les enfants et aussi pour le service public de la télévision sans risquer d’en affaiblir la compétitivité.

Mais je souhaite que ce texte soit également l’occasion d’amorcer un débat plus large sur la place de la publicité sur internet, média qui ne fait pas aujourd’hui l’objet d’une régulation satisfaisante. En effet, de plus en plus d’enfants délaissent les programmes jeunesse de la télévision au profit de portails vidéo de type YouTube, sur lesquels les publicités diffusées ne ciblent pas spécifiquement les jeunes enfants. Cela peut donner, par exemple, un épisode de dessin animé introduit par une publicité au profit d’un jeu vidéo déconseillé au moins de dix-huit ans… On voit l’aberration. De plus, l’exposition des plus jeunes à la publicité ne se limite pas aux médias ou aux programmes jeunesse puisqu’elle fait, et on peut le regretter, partie intégrante de notre société.

La protection des plus jeunes publics passe peut-être avant tout par une éducation aux médias et, en ce qui concerne notre débat, à la publicité afin de développer chez eux le sens critique, la capacité d’analyse et le recul nécessaire sur les messages véhiculés.

Cet éveil est, en complément d’éventuelles nouvelles mesures législatives, le plus sûr moyen de lutter contre une trop grande influence de la publicité sur leurs modes de vie et de consommation.

Je salue, à ce titre, le programme Media Smart Plus, soutenu par la Commission européenne et la CNIL, qui propose des kits pédagogiques à destination des enseignants du premier et du second degré afin d’éveiller les enfants au décryptage des publicités présentes dans leur environnement. Depuis sa création, ce sont ainsi 430 000 élèves du primaire et 380 000 collégiens qui ont bénéficié de ce programme, dorénavant mieux armés pour appréhender en tant que citoyens les messages publicitaires.

Je souhaite donc que la notion d’éducation à la publicité et aux médias, notamment dans le cadre des enseignements complémentaires nouvellement prévus, ne soit pas oubliée dans le débat sur la préservation des plus jeunes publics vis-à-vis de la publicité.

Nous devons ainsi nous saisir de toutes les dimensions du débat dès aujourd’hui pour assurer l’efficacité des intentions de cette proposition de loi et, de ce fait, déboucher sur une grande loi de protection des publics en matière de publicité.

C’est la raison pour laquelle, partageant pleinement les intentions du texte adopté en commission, le groupe socialiste, républicain et citoyen votera en faveur de cette proposition de loi, modifiée pour en améliorer la mise en oeuvre.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, madame la rapporteure, mes chers collègues, cette proposition de loi vise à protéger les enfants d’une exposition aux messages publicitaires lors de la diffusion des émissions jeunesse sur les chaînes du service public et leurs sites internet.

Il est à noter que, pour éviter aux enfants d’être instrumentalisés à des fins mercantiles, bon nombre de pays européens ont déjà encadré, voire interdit, la publicité à leur encontre. Il est indéniable, suffisamment d’études l’attestent, que la publicité destinée aux enfants influence les habitudes de consommation des familles, même si c’est à ces dernières que revient leur éducation, notamment en développant leur sens critique – mais sachant que les jeunes sont livrés à eux-mêmes devant la télévision dans 40 % de leur temps disponible, cela devient souvent mission impossible. D’où l’intérêt de cette proposition de loi.

La version issue du Sénat ne pouvait qu’être accueillie favorablement par le groupe Les Républicains, d’autant plus que la loi de 2009 prévoyait la fin totale de la publicité sur le service public à l’horizon 2011. Mais c’était sans compter avec la crise budgétaire et l’enchaînement de moratoires qui ont d’ailleurs conduit certains de nos collègues à présenter un amendement de pérennisation de la publicité en journée sur France Télévisions lors des débats sur la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, en 2013, un revirement dicté par le principe de réalité budgétaire.

Lors de l’examen du texte par la commission, le groupe SRC a fait voter deux amendements qui ont totalement vidé la proposition de loi de sa substance.

Madame la ministre, quand vous affirmez sans sourciller que la commission a enrichi le texte du Sénat, personne ne peut vous croire. En matière de suppression de la publicité dans les programmes jeunesse de France Télévisions, le Gouvernement veut visiblement procrastiner.

La production de rapports évaluant l’impact de la suppression de la publicité dans les programmes jeunesse de France Télévisions et la possibilité de son financement par la redevance va-t-elle éclairer le législateur pour le futur ? Pas sûr !

Dans la continuité de ce que souhaitaient les sénateurs, l’article 2 issu de la commission propose une évaluation des différentes possibilités d’évolution de la contribution à l’audiovisuel public et semble anticiper une possible réforme de ses paramètres. Nous verrons bien.

À ce propos, s’agissant des options de financement, je rappelle que, selon le sénateur André Gattolin, déjà cité, le coût de la mesure, dans sa version restreinte aux moins de douze ans, s’élèverait à 7 millions d’euros. Rappelons que le budget de l’opérateur pour 2016 ne sera pas à l’équilibre. De fait, la rallonge de 25 millions d’euros issue de l’augmentation de la taxe télécoms, dite « taxe telco », votée à l’Assemblée dans le dernier projet de loi de finances ne suffira pas à combler le déficit annoncé de l’opérateur en 2016, qui devrait se situer entre 40 millions et 50 millions d’euros. Je ne redirai pas notre opposition de fond sur l’affectation partielle des 25 millions d’euros – quand c’est l’ensemble du produit de cette taxe qui devrait être reversé à France Télévisions, conformément à la volonté du législateur de 2009 –, mais force est de constater que si ce Gouvernement n’avait pas décidé de supprimer la dotation publique à France Télévisions, nous aurions pu envisager différemment cette proposition de loi, notamment dans sa version initiale.

La tutelle a clairement déclaré son opposition au texte lors de son examen au Sénat, les amendements adoptés en commission l’ont confirmé, et en l’absence de certitude sur le financement de la mesure, il nous était impossible de nous prononcer en faveur du texte lors de son examen en commission.

Pourquoi priver France Télévisions d’une recette supplémentaire quand la protection des jeunes publics ne sera que très partiellement assurée ? En effet, limiter la mesure à l’audiovisuel public au titre de sa spécificité éditoriale ne sera pas d’une efficacité extraordinaire puisque les enfants savent se servir d’une télécommande et zapper sur les chaînes privées qui leur sont dédiées – c’est d’ailleurs pourquoi nous avons soutenu l’article 1er tel qu’il avait été rédigé au Sénat. Avant de rouvrir le chantier de la publicité sur France Télévisions, il importerait de renforcer l’autorégulation de l’ensemble des chaînes privées et publiques en matière d’exposition des enfants aux messages publicitaires.

Pour conclure, nous entendons l’appel lancé à travers ce texte et nous comprenons son objet. Aussi, lors de la remise de ces rapports, nous serons vigilants aux suites qui leur seront données. Permettront-ils de faire ce premier pas – c’est toujours celui qui coûte ! – pour protéger les enfants de la publicité et de la surconsommation ? Acceptons-en l’augure. Le groupe Les Républicains s’abstiendra sur cette proposition de loi.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons a pour objet de supprimer la publicité à caractère commercial dans les programmes destinés à la jeunesse sur les chaînes de télévision publiques.

Sur le principe, ce sujet ne semble pas poser de difficulté particulière. Chacun, sur tous les bancs, partage en effet le souhait d’éviter aux jeunes enfants une exposition excessive à la publicité alors que nous savons que le taux d’écoute quotidienne des enfants de quatre à quatorze ans est d’environ deux heures par jour, sans compter le temps passé sur les ordinateurs ou sur les tablettes. Nombre de ces enfants sont livrés à eux-mêmes et regardent la télévision seuls dans leur chambre. Outre le risque de visionner des programmes non appropriés à leur âge, cette surexposition médiatique a indéniablement des effets sur leur comportement alimentaire puisque la promotion de produits nutritifs représente la plus grande part de la publicité à la télévision. Nos enfants sont, n’en doutons pas, des cibles privilégiées pour les distributeurs.

Lors des travaux préalables à l’examen de cette proposition de loi, la portée de celle-ci a été précisée, la suppression de la publicité dans les programmes jeunesse ne concernant alors plus que le service public audiovisuel, c’est-à-dire France Télévisions.

Mes chers collègues, vous n’êtes pas sans savoir que, lors de l’examen de cette proposition de loi en commission, le groupe UDI était plus que réservé sur la faisabilité d’une telle réforme. Au moment du débat en séance publique, il nous semble toujours impossible de faire abstraction des enjeux financiers qui se cachent derrière.

Nous ne sommes pas opposés à la suppression de la publicité qui entoure les programmes jeunesse, nous sommes mêmes ouverts à une réflexion sur la suppression de la publicité dans l’ensemble du service public audiovisuel, mais il faut que cette démarche s’inscrive dans une réforme globale de l’audiovisuel public qui réaffirmerait la position particulière de France Télévisions en révisant son format. Le groupe comporte déjà cinq chaînes, et on nous en annonce même une sixième pour le mois de septembre. Je crois qu’un jour ou l’autre, il faudra se poser la question de savoir si le service public peut être aussi important tout en diluant ses missions à travers des chaînes qui ne correspondent plus aux finalités qui leur ont été fixées – je pense à France 4 par rapport à la jeunesse, à France Ô, qui ne traite plus d’outre-mer ou encore à France 3, qui assure de manière assez insuffisante sa mission régionale.

En outre, les avis divergent sur le coût d’une telle mesure : 2 millions ou 10 millions ? Vous conviendrez que la marge est importante. En ces temps de contraintes budgétaires, il ne nous est pas permis de légiférer dans de telles conditions. Quant à la future chaîne d’information, nous sommes dans le flou le plus artistique sur son coût alors que l’audiovisuel public n’arrive pas à boucler son budget.

On ne peut pas se contenter d’estimer dans l’approximation les effets potentiels de la suppression de la publicité dans les programmes jeunesse tant sur le secteur de la publicité que sur les chaînes de télévision. Comment France Télévisions pourrait-elle compenser cette perte alors que les conditions budgétaires sont déjà contraintes pour le groupe ? Chacun d’entre nous se dit attaché au service public audiovisuel : comment dès lors ne pas voir que cette mesure risquerait de mettre en péril la réalisation de ses missions ? En effet, une baisse des recettes aurait, à n’en pas douter, une incidence terrible sur la création audiovisuelle et cinématographique.

Mes chers collègues, nous voilà donc face à un débat qui dépasse très largement l’objectif initial de cette proposition de loi en ce qu’il touche non seulement aux sources du financement de l’audiovisuel public, mais également au coeur même de ses missions.

En commission, la majorité a fait preuve de sagesse en proposant que le Gouvernement remette un rapport au Parlement évaluant l’impact sur le marché publicitaire et sur les ressources de France Télévisions d’une suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique. Un rapport de plus. La solution proposée par la commission me paraît satisfaisante, mais a-t-on désormais besoin d’une loi dont l’unique objet serait de proposer un rapport ?

On sait bien, monsieur le président de la commission, que, chaque fois que l’on nous propose un rapport, chacun lève les bras au ciel en disant : « Non, ça suffit ! » On n’a pas suffisamment d’étagères à l’Assemblée pour ranger tous les rapports que personne n’a lus.

Pourquoi ne pas imaginer plutôt une mission d’information sur la régulation de la publicité, qui proposerait des pistes afin de rééquilibrer le marché publicitaire entre les différentes chaînes et les différents médias ? Il y aurait là un véritable travail à fournir, non seulement au niveau national, mais aussi au niveau européen.

Par ailleurs – c’est un constat avéré – le marché publicitaire se déplace de plus en plus vers internet, qui représente un quart du marché publicitaire global en France. Pourquoi ne pas évaluer la recomposition du paysage publicitaire, d’une part, et préparer la réforme du financement de l’audiovisuel, d’autre part, en s’inspirant par exemple du modèle britannique et de la BBC ? Je vous rappelle que la BBC ne diffuse aucune publicité, ce qui lui évite de courir après l’audimat des chaînes privées et lui permet de proposer, à des heures de grande écoute, des programmes originaux et conformes à la mission du service public.

Mes chers collègues, nous sommes tous ici attachés à l’audiovisuel public. Nous exigeons beaucoup de lui, tant en matière d’indépendance, que de création, de pluralisme, ou encore de bonne gestion. Le modèle économique actuel n’est pas viable, dans la mesure où il est fondé sur une surévaluation quasi systématique des objectifs publicitaires de France Télévisions et conduit invariablement à une course à l’audience.

Depuis 2009, la situation de France Télévisions est encore plus paradoxale, dans la mesure où les chaînes du groupe, qui ne peuvent plus diffuser de messages publicitaires en soirée, à destination d’un public adulte, et au moment où les spots publicitaires sont les plus rémunérateurs, en diffusent en journée, lorsque les programmes sont notamment destinés à des jeunes téléspectateurs. Cette absence de cohérence n’est pas à la hauteur de l’exigence que chacun formule pour le service public.

Nous nous inquiétons également du positionnement stratégique de France Télévisions par rapport à ses concurrents privés. En effet, comment ne pas être troublé par la similitude de l’offre proposée par France 2 et TF1 ? Comment définir la ligne éditoriale de France 4 ? Peut-on vraiment présenter cette chaîne comme une chaîne jeunesse ? Je dirais plutôt qu’il s’agit d’une chaîne bouche-trou, destinée à occuper un créneau de la TNT. Quant à la chaîne France O, chacun reconnaît qu’elle souffre malheureusement d’un problème d’identification, et ce, au détriment des territoires ultramarins, pourtant riches d’un patrimoine multiculturel.

Enfin, je ne parlerai pas du projet de nouvelle chaîne d’information en continu, car ce n’est pas le sujet de ce texte, mais vous conviendrez que ce nouvel acteur ne pourra que fragiliser un secteur déjà dense. Madame la ministre, je suis désolé du flou qui entoure ce projet : nous avons entendu Mme Ernotte déclarer que cette chaîne ne serait diffusée que sur les tablettes et les téléphones, mais tout le monde sait bien, à présent, qu’elle chaîne figurera sur la TNT. Il faut que vous clarifiiez les choses rapidement et que nous sachions, in fine, combien ce projet nous coûtera.

Ainsi, bien que nous adhérions à l’esprit initial de cette proposition de loi, il nous semble impossible de soutenir le texte en l’état. Pour lutter contre les effets néfastes de la publicité, il nous faut agir de manière pragmatique et raisonnée, et en dehors du cadre législatif, en approfondissant par exemple l’autorégulation des chaînes. La charte alimentaire mise en place en 2013, plus ambitieuse encore que celle de 2009, a eu des effets concrets, à la fois sur la démarche qualité de la publicité, et sur les engagements des chaînes de télévision en matière d’éducation nutritionnelle auprès des jeunes publics. S’agissant du texte, tel qu’issu des travaux de la commission, il nous semble inutile, puisqu’il prévoit seulement la publication de ce fameux rapport.

Aussi, pour des raisons, tant de forme que de fond, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants confirmera la position qu’il avait adoptée en commission et votera contre la proposition de loi.

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Monsieur le président, pourriez-vous, s’il vous plaît, nous accorder une suspension de séance de trois minutes ?

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.

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La séance est reprise.

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la rapporteure.

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Je vous remercie, mes chers collègues, de l’intérêt que vous portez à cette proposition de loi, et du soutien que vous apportez à son principe, puisqu’il me semble que tout le monde s’est exprimé dans ce sens. Nous ne sommes pas tous d’accord sur ses modalités d’application, c’est vrai, mais nous aurons l’occasion d’en discuter plus précisément lors de l’examen des articles.

Madame Pompili, vous avez bien décrit les différents troubles du psychisme, de l’attention et de l’alimentation que la publicité peut causer chez les enfants, et je vous en remercie.

Monsieur Carpentier, j’apprécie tout particulièrement votre soutien au texte, tel qu’il a été voté au Sénat, et je retiendrai votre phrase : « Nos enfants valent plus que d’être considérés comme de simples cibles publicitaires. »

Vous avez été nombreux à regretter que le champ proposé par le texte initial de la proposition de loi soit restreint aux seules chaînes du service public. Ce fut le cas de Mme Marie-George Buffet et de MM. Jean-Noël Carpentier et Frédéric Reiss. Nous aurons, là encore, l’occasion de revenir sur cette question lors de l’examen des articles.

Mme Buffet, vous craignez aussi l’effet des vases communicants. Nous avons réfléchi à cette question durant les auditions et il est apparu que, lorsque la publicité a été supprimée entre vingt heures et six heures du matin, rien de tel n’a été constaté sur les chaînes historiques privées, et seulement marginalement sur les nouvelles chaînes. Il est vrai que les enfants regardent la télévision entre dix-neuf et vingt et une heures, mais leurs parents sont généralement présents, et nous considérons que ceux-ci sont suffisamment éclairés et responsables pour contrôler les émissions que regardent leurs enfants.

Madame Corre, vous avez apporté de nombreux éléments de réflexion sur cette proposition de loi. Je ferai remarquer que si l’on adoptait le texte en l’état, tel qu’il est sorti de la commission, la date du 1er janvier 2018 n’y figurerait plus et qu’il n’y aurait plus aucune référence à une interdiction de publicité ou à un dispositif contraignant. Vous avez jugé que les conséquences financières de la mesure votée au Sénat demeuraient floues, et je voudrais vous apporter quelques éléments de réponse. Les prévisions de recettes publicitaires concernées par ce texte étaient de 13,5 millions d’euros pour 2015. Nous n’avons pas encore le réalisé, mais sachez que, au cours des dernières années, il a souvent été inférieur aux prévisions. Vous me demandez des prévisions à l’horizon 2018 : elles ne peuvent être qu’imprécises, mais disons que ces recettes pourraient représenter entre 10 et 20 millions d’euros. Malgré la marge d’erreur, cela vous donne tout de même un ordre de grandeur.

Nous avons par ailleurs bien entendu M. Reiss réaffirmer que la taxe instaurée en 2009 sur les opérateurs de communication numérique avait pour finalité d’être affectée entièrement à France Télévisions.

Monsieur Salles, vous avez suggéré une grande réforme, visant à revoir entièrement le format de France Télévisions. Pourquoi pas ? C’est toutefois une proposition de très grande envergure qui, vous en conviendrez, dépasse complètement le périmètre d’une initiative parlementaire – pour laquelle notre groupe ne dispose de surcroît que d’un seul jour par an.

Vous regrettez également que la proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, propose deux nouveaux rapports – deux de plus. Je suis d’accord avec vous. Je tiens d’ailleurs à rappeler qu’un an après la suppression de la publicité entre vingt heures et six heures en 2008, un rapport devait être rendu sur l’impact de la mesure : nous l’avons cherché sans succès. Nous ignorons donc s’il existe. Sans même parler de ses effets, la réalisation d’un rapport reste donc bien aléatoire.

Du reste, de nombreux rapports existent déjà qui formulent de nombreuses propositions visant à améliorer le service public ainsi que son financement. Celui des sénateurs Leleux et Gattolin a été cité : il date de l’automne dernier et est donc récent. Tout aussi récent est celui qu’ont rendu nos collègues Eric Woerth et Jean-Marie Beffara fin septembre.

Je vous remercie de toutes vos contributions. Cette proposition de loi a déjà été discutée par de nombreuses associations à travers tout le pays. C’est déjà un point très positif.

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J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

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La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 2 .

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Cet amendement vise, à l’alinéa 2 de l’article 1er, à supprimer les mots : « et les annonceurs publicitaires ».

En effet, si tel n’était pas le cas, le Conseil supérieur de l’audiovisuel – CSA – devrait également se pencher sur le comportement des annonceurs publicitaires, ce qui ne serait pas sans poser des difficultés juridiques puisque cette évaluation ne fait pas partie de ses attributions en l’état actuel de notre droit.

Je comprends fort bien le souci des auteurs de l’amendement adopté en commission, qui est d’assurer une meilleure visibilité du travail mené par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité – ARPP. Toutefois, ce travail demandé au CSA serait redondant puisque l’ARPP vérifie déjà et contrôle systématiquement avant leur diffusion les projets de publicité télévisée de ses 600 adhérents, qui représentent 1 000 entreprises et 80 % de la publicité diffusée en France.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

On peut effectivement s’interroger, comme vous le faites, madame la rapporteure, sur la pertinence de demander au CSA d’évaluer dans le rapport annuel qu’il transmet au Parlement les actions menées par les annonceurs publicitaires en matière de santé publique, puisque à la différence des éditeurs de services de communication audiovisuelle, cette catégorie d’acteurs n’entre pas dans le champ des opérateurs qui sont régulés par le CSA.

La loi soumet en effet les éditeurs à des obligations et assigne au CSA la mission d’en contrôler le respect. Pour remplir cette mission il dispose d’un pouvoir d’enquête et de sanction. Il paraît donc difficile de lui imposer, à l’article 1er de la proposition de loi, de rendre compte de l’action de cette catégorie d ’acteurs.

En réalité, c’est de manière indirecte, par l’intermédiaire des éditeurs qui diffusent les messages publicitaires des annonceurs et de l’ARPP, que le CSA pourrait satisfaire à cette demande.

C’est la raison pour laquelle je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

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Monsieur le président, je demande une suspension de séance de cinq minutes.

La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.

Article 1er

suite

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L’amendement no 2 a pour premier objectif, me semble-t-il, de revenir à la rédaction initiale issue du Sénat afin de permettre un vote conforme. Or il revient sur un apport réel de la commission.

En effet, l’amendement adopté par la commission à l’article 1er, en précisant que le CSA, dans le rapport qu’il adresse chaque année au Parlement, évalue également les initiatives des annonceurs publicitaires en matière de respect des jeunes publics par les émissions publicitaires, est cohérent avec le texte issu du Sénat, puisque celui-ci prévoit que le rapport formule des recommandations s’appliquant également aux annonceurs.

Si le rapport formule des recommandations aux annonceurs, il est normal qu’il puisse également procéder à une évaluation. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre l’amendement.

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La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

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Je souhaite souligner que la commission, lors de sa réunion au titre de l’article 88, a émis un avis défavorable sur cet amendement pour les raisons que Mme Corre a rappelées de manière pertinente.

Nous avions en effet souhaiter, lors de l’examen de la proposition de loi, inscrire dans le texte cette référence directe aux annonceurs publicitaires dans le cadre du pouvoir de régulation que le CSA exerce sur l’application de la charte alimentaire.

Disons-le honnêtement : la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui ne doit faire la part trop belle ni aux chaînes privées ni aux annonceurs publicitaires. Je rappelle que nous sommes là pour voter la loi en fonction de l’intérêt général, avec un souci particulier à l’endroit du service public de l’audiovisuel. Je ne voudrais donc pas que le texte issu de nos débats soit déséquilibré et pénalise ce dernier de manière excessive. Les représentants de la nation que nous sommes sont en effet garants des missions qu’il exerce et du financement qui doit être consacré à l’exercice de ces missions.

L’amendement no 2 est adopté.

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La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour soutenir l’amendement no 4 .

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La commission a émis un avis défavorable à l’amendement, tout d’abord parce qu’elle a estimé qu’il reviendrait à déposséder le Parlement de tout regard sur la réglementation des messages publicitaires dans les programmes destinés à la jeunesse. De plus, l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication prévoit déjà que, « compte tenu des missions d’intérêt général des organismes du secteur public et des différentes catégories de services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre, des décrets en Conseil d’État fixent les principes généraux définissant les obligations concernant : 1° La publicité, le télé-achat et le parrainage ».

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Monsieur le député, il faut être prudent, puisqu’une limitation, voire une prohibition de diffusion des messages publicitaires dans les programmes destinés à la jeunesse des chaînes de télévision privées compromettrait non seulement la viabilité économique des chaînes pour enfant telles que Gulli, Canal J ou Télétoon, mais également la rentabilité des cases jeunesse des chaînes généralistes comme TF1, qui pourraient être tentées ainsi de supprimer de telles cases.

Elle affaiblirait par voie de conséquence le secteur de l’animation française qui dépend directement de l’investissement consenti par les chaînes dans la production audiovisuelle.

Tout à l’heure, il a été fait mention de l’impact économique d’une telle interdiction sur les entreprises : cela ne concernait pas tant les annonceurs qui proposent des publicités pendant les cases réservées à la jeunesse que les entreprises du secteur de l’animation, qui sont bien entendu financées par les diffuseurs. Or, vous le savez, il s’agit d’un secteur très dynamique, dont les programmes s’exportent beaucoup à l’international.

Au demeurant, la commission de la culture du Sénat a elle-même rejeté cette disposition, qui figurait à l’origine dans la proposition de loi.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement soutient la démarche pédagogique d’autorégulation initiée en 2009 par la conclusion d’une charte professionnelle. Cette démarche a porté ses fruits et continuera de se développer.

Pour toutes ces raisons, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée nationale.

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Après mûre réflexion, nous avons été convaincus par les arguments de M. Carpentier. Nous voterons donc cet amendement.

L’amendement no 4 est adopté.

L’article 1er, amendé, est adopté.

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La parole est à Mme Isabelle Attard, inscrite sur l’article 2.

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Chers collègues, si la suppression de la publicité à destination des enfants s’impose effectivement pour protéger ceux qui sont l’avenir de notre nation, il nous importe aussi d’anticiper les conséquences autres que sanitaires d’une telle mesure. Je pense bien évidemment aux conséquences économiques, en premier lieu pour France Télévisions.

Nous savons que notre proposition de loi a suscité bien des inquiétudes, qui sont compréhensibles et légitimes. Pour autant, il nous appartient, en tant que législateurs, de penser à l’avenir. La publicité n’est pas un mode de financement durable. Les signes d’essoufflement du modèle publicitaire traditionnel sont nombreux, et les budgets qui y sont consacrés sont en constante réduction. Les spectateurs attendent plus de respect, de sincérité et moins d’intrusion de la part des marques. D’ailleurs, les annonceurs eux-mêmes sont déjà en train de passer à autre chose que le modèle traditionnel. Brad Jakeman, le président de PepsiCo Global Beverage Group, l’a dit lui-même : « Arrêtons d’employer le terme "publicité", qui est basé sur un modèle de pollution ! »

Les chaînes de télévision seraient-elles les seules à se voiler la face ? Une telle attitude n’est-elle pas périlleuse pour se préparer à l’avenir ? Si même les annonceurs prévoient la sortie du modèle actuel de publicité, il est plus que temps d’anticiper : c’est ce que fait notre proposition de loi.

Pour appuyer mon raisonnement, permettez-moi de faire un petit détour par la proposition de loi précédente, qui visait à développer l’alimentation bio. Hier, un internaute m’a laissé un message soulignant que les aliments bio étaient peut-être un peu plus chers à l’achat, mais que les coûts indirects de la pollution et des soins causés par la nourriture non bio étaient infiniment plus élevés. Il concluait ainsi : « Plus de bio, c’est moins d’impôts. » Je fais mienne cette conclusion, qui s’applique aussi à la publicité pour enfants à la télévision : moins de publicité pour les enfants, c’est moins de coûts pour la collectivité. Nous recommandons donc au Gouvernement de réaffecter ces économies au financement de la télévision publique pour compenser le manque à gagner : c’est le choix qu’a fait le Royaume-Uni.

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Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 et 5 .

La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 3 .

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Cet amendement vise à rétablir le texte voté au Sénat à une large majorité. Il s’agit de supprimer la publicité dans les programmes jeunesse destinés aux enfants de moins de 12 ans. Cette suppression s’appliquerait « durant la diffusion de ces programmes ainsi que pendant un délai de quinze minutes avant et après cette diffusion » ; elle s’appliquerait également « à tous les messages diffusés sur les sites internet de ces mêmes services nationaux de télévision qui proposent des programmes prioritairement destinés aux enfants de moins de 12 ans ». Cette mesure prendrait effet à compter du 1er janvier 2018.

Je dois préciser que la commission a donné un avis défavorable à cet amendement.

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La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour soutenir l’amendement no 5 .

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Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Défavorable. J’ai développé mes arguments tout à l’heure, lors de la présentation du texte, mais je voudrais insister sur un point : il faut avoir bien conscience de ce qu’impliquerait la suppression de la publicité pendant les programmes jeunesse sur France Télévisions.

Depuis trois ans, le Gouvernement a déployé tous ses efforts pour renforcer l’indépendance des entreprises de l’audiovisuel public, tant dans le mode de nomination de leur président que dans leur financement. Ainsi, nous avons supprimé la dotation budgétaire, qui faisait dépendre ces entreprises des aléas en gestion, les faisait vivre sous la menace de décisions budgétaires défavorables et limitait donc leur visibilité dans le temps en matière financière : elle ne leur permettait pas d’avoir une vision stratégique extrêmement claire de leur avenir. Le Gouvernement a fait de nombreux efforts pour consolider les entreprises de l’audiovisuel public, en particulier France Télévisions, tout en continuant de demander à leurs présidents de faire des efforts pour que leur gestion soit exemplaire, puisque leur financement provient des deniers publics. Ainsi, il serait totalement paradoxal que le législateur vienne aujourd’hui fragiliser considérablement l’audiovisuel public que nous nous efforçons de renforcer.

Au-delà des critiques que vous pouvez formuler à l’encontre des annonceurs, dont beaucoup sont des entreprises étrangères de l’agroalimentaire, il est important de souligner qu’il y a aussi, derrière les ressources que vous envisagez de supprimer pour France Télévisions, des salariés, des techniciens, des journalistes et des entreprises d’animation qui sont aussi le terreau créatif de notre pays.

Exclamations sur les bancs du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Il faut avoir conscience de la responsabilité que vous prendriez en diminuant considérablement les ressources de l’audiovisuel public.

Voilà pourquoi je suis défavorable à ces deux amendements identiques. J’ai indiqué tout à l’heure que j’étais évidemment disposée à réfléchir sur ce sujet. Je crois d’ailleurs que les rapports prévus dans le texte adopté par la commission nous permettront d’avoir une réflexion sur la lutte contre l’obésité, sur l’influence que peuvent avoir un certain nombre de messages publicitaires sur la jeunesse. Je souhaite que cette réflexion porte sur un cadre plus large, incluant internet et l’audiovisuel privé.

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Évidemment, la réflexion n’a pas sa place au Parlement !

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Ce serait manquer de logique que de se focaliser uniquement sur l’audiovisuel public, alors que l’on constate que les pratiques de la jeunesse sont aujourd’hui bien plus orientées vers internet, vers l’audiovisuel privé ou vers des émissions qui ne sont pas réservées à la jeunesse.

Ouvrons cette réflexion. Faisons-le en responsabilité,…

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

…en étudiant bien l’impact des décisions qui pourraient être prises. Réfléchissons aussi aux vies des professionnels et des créateurs qui travaillent dans l’audiovisuel public et qui pourraient être très durement touchés par les décisions que vous pourriez prendre.

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Comme je l’ai déjà dit lors de la discussion générale, il me paraît difficile de décider des modalités de suppression de la publicité dans les programmes jeunesse de France Télévisions sans connaître de manière précise l’impact financier d’une telle mesure pour le service public de la télévision, ni sans arrêter en parallèle une source de compensation financière. Madame la rapporteure, vous évoquez vous-même, dans votre rapport, l’incertitude qui pèse sur l’évaluation de cette perte de recettes.

Je le répète, pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté entre nous : la date de remise du rapport prévu à l’article 2, dans le texte adopté par la commission, est le 30 juin 2017, c’est-à-dire six mois jour pour jour avant celle d’entrée en vigueur de la proposition de loi dans sa rédaction originelle. C’est ce qui se fait traditionnellement dans notre hémicycle, et cela ne remet donc pas en cause la date du 1er janvier 2018 – d’ailleurs, rien n’empêchait l’un de nos collègues de déposer un amendement visant à la faire à nouveau figurer dans le texte.

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La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

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Je voudrais que nous soyons bien conscients de ce que nous sommes en train de faire, et que nous prenions nos responsabilités à l’égard de celles et ceux qui font quotidiennement les programmes de l’audiovisuel public.

Depuis un certain nombre d’années, nous posons dans cet hémicycle la même question lors de l’examen de chaque budget : comment finance-t-on l’audiovisuel public ? Cela a été rappelé par Frédéric Reiss, mais aussi par Rudy Salles et d’autres orateurs lors de la discussion générale : cette question se pose depuis qu’il a été décidé, en 2009, de supprimer la publicité en soirée. Nous en supportons encore les conséquences aujourd’hui. Comme Frédéric Reiss l’a rappelé, il était même prévu à l’époque de supprimer définitivement la publicité sur l’ensemble de l’audiovisuel public.

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Il ne s’agit pas de refaire toute l’histoire ou d’aller chercher les responsabilités des uns et des autres : cela n’a plus aucun intérêt. Pour autant, Gilles Carrez et moi-même rappelons régulièrement que nous étions tous les deux membres de la commission Copé, et que nous nous étions alors opposés à la suppression de la publicité en soirée : il s’agissait pour nous de garantir le financement de l’audiovisuel public.

Depuis 2009, une question est posée chaque année au Parlement, plus particulièrement à l’Assemblée nationale : comment assure-t-on les ressources de l’audiovisuel public ? C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a pris la responsabilité, à deux reprises, d’une mesure dont personne ne conteste qu’elle n’est pas populaire, à savoir d’augmenter la redevance audiovisuelle de 6 euros en 2013, de manière exceptionnelle, et encore de 4 euros l’année dernière. Avec vous, madame la ministre, nous avons réussi, en portant de 0,9 % à 1,3 % la taxe dite « telco » sur les opérateurs télécom, à assurer un financement permettant l’équilibre du budget de France Télévisions en 2016, pour la première fois depuis plusieurs années. Par la même occasion, nous avons fait en sorte que le budget de France Télévisions ne dépende plus de celui de l’État, afin d’ajouter l’indépendance budgétaire à l’indépendance garantie par la nomination de son président par le CSA – cette indépendance budgétaire est peut-être la plus importante pour les dirigeants de France Télévisions, notamment pour sa présidente.

Le déficit prévisionnel de France Télévisions était de 50 millions d’euros en 2016. À l’issue d’une discussion budgétaire difficile et d’un vote du Parlement, l’État s’est engagé à verser à l’entreprise 28 millions d’euros de ressources publiques supplémentaires – pas seulement 25 millions. Quant à Mme Ernotte, elle s’est engagée à trouver, par des économies, les 22 millions d’euros nécessaires pour que France Télévisions ne présente pas de déficit en 2016.

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Le vote des amendements identiques nos 3 et 5 conduirait à remettre France Télévisions en situation de déficit, alors que, depuis plusieurs années, les 10 000 salariés de l’entreprise sont inquiets pour leur avenir. Un plan de départs volontaires a même été mis en oeuvre par M. Pflimlin, à la demande de la tutelle.

En outre, les dispositions de cette proposition de loi ne concernent pas les chaînes de télévision privées. Je voudrais donc que nous prenions conscience, en responsabilité, de ce que nous allons voter et des conséquences que cela aura pour l’audiovisuel public dans notre pays. Par son vote, chacune et chacun prendra des décisions qui auront des conséquences non seulement sur la qualité des programmes audiovisuels, mais également sur tous les salariés de France Télévisions. Je vous le dis sincèrement : je pense que cette proposition de loi est vraiment un mauvais service rendu à l’audiovisuel public.

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M. le président de la commission a raison : nous assistons aujourd’hui à un coup de force de la part du groupe écologiste qui s’est mobilisé en nombre (Exclamations sur les bancs du groupe écologiste)…

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C’est le jour de notre niche parlementaire !

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C’est le jour de notre niche parlementaire !

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C’est le jour de notre niche parlementaire !

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…face à un groupe socialiste qui, sur un sujet ô combien important, a déserté les bancs de l’Assemblée nationale…

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…et à un Gouvernement qui n’a pas pris la mesure des difficultés auxquelles l’audiovisuel public est confronté. Il y a pourtant un accord général sur le sujet, car tout le monde est favorable à la suppression de la publicité dans les programmes destinés aux enfants. Mais pas à n’importe quel prix, et pas dans n’importe quelles conditions !

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Je le répète, nous sommes tous attachés à l’audiovisuel public. Mais dans ce domaine comme dans bien d’autres, et depuis des années, on empile, on entasse ; on crée des chaînes supplémentaires, des dépenses supplémentaires. J’ai évoqué pendant la discussion générale la chaîne d’information qui devrait voir le jour au mois de septembre et dont on ne connaît ni le début du financement, ni l’organisation – bref dont on ne connaît rien – : cette initiative va aggraver le déficit endémique de France télévisions. Et on veut aujourd’hui, par cette proposition de loi, supprimer certains subsides, au risque de fragiliser encore davantage le service public et de mettre à mal ses missions ?

Je suis fondamentalement opposé aux dispositions proposées, quand bien même on en différerait l’application pour laisser le temps à une réforme de l’audiovisuel public Mais de quelle réforme parlons-nous ? Chacun sait qu’entre aujourd’hui et 2018 se tiendra une élection présidentielle, que d’ici à 2017, le programme de travail du Parlement est quasiment bouclé. On est en train de tirer des plans sur la comète. Mais nous sommes le Parlement de la France ! Nous ne sommes pas Mme Soleil, nous ne parlons pas de n’importe quoi, ou alors, c’est grave !

Ce débat est surréaliste ! Je déplore, je le répète, que les députés du groupe socialiste, supposé majoritaire, ne soit pas plus nombreux afin de ramener à la raison des alliés qui, aujourd’hui, sont leurs adversaires !

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Nous tenons tous à ce que les enfants ne soient pas, sous l’influence de la publicité, transformés en consommateurs dès l’âge de trois ans. Nous sommes donc tous favorables à la suppression de la publicité dans les programmes pour enfants. Mais notre objectif doit être de la supprimer sur toutes les télévisions.

Lorsque la majorité précédente a supprimé la publicité le soir sur France télévisions, c’était d’abord pour servir les intérêts des chaînes privées…

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…et en espérant un report des annonceurs qui améliorerait leur financement.

Oui, il faut aller vers une suppression de la publicité, mais à condition de donner à la télévision publique les moyens de répondre aux exigences de ses missions. Cela passe nécessairement par une réforme de la redevance audiovisuelle, en ne se contentant pas d’en augmenter le montant, mais en révisant l’assiette et le mode de calcul. Une telle réforme est indispensable si nous voulons doter la télévision publique des moyens dont elle a besoin.

On ne peut donc prétendre que cette proposition de loi va dans le sens de l’intérêt des enfants : la suppression de la publicité est en effet dans leur intérêt, mais à condition d’être appliquée partout. Et pour cela, il faut trouver des financements pour France télévisions.

Les amendements identiques nos 3 et 5 sont adoptés et l’article 2 est ainsi rédigé.

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La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour soutenir l’amendement no 6 .

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Le présent amendement vise à étendre l’interdiction de la publicité aux chaînes de télévision privée, et répond ainsi aux interrogations de Mme Buffet sur un éventuel effet de « vases communicants » entre le secteur public et le secteur privé.

L’objectif de la proposition de loi est simple : protéger les enfants. Certes, son application pose, sur le plan financier, des difficultés que je ne cherche pas à ignorer, mais rappelons que nous parlons de 20 millions d’euros sur un budget qui totalise 3 milliards. Il faut donc raison garder et s’en remettre à l’intérêt général. Or l’intérêt général conduit à protéger les millions d’enfants soumis à un harcèlement publicitaire devenu intolérable. Plusieurs pays ont pris des mesures de régulation.

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Pourquoi, en France, resterions-nous en retard sur cette question ? C’est notre honneur de nous mobiliser. Si les députés socialistes sont si peu nombreux ce soir, monsieur Salles, c’est peut-être qu’ils ne considèrent pas cette proposition de loi d’un si mauvais oeil.

Sourires.

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L’objectif d’étendre l’interdiction de publicité aux chaînes de télévision privée est tout à fait louable, mais il faudrait en mesurer les conséquences. En l’état actuel, l’impact d’une telle disposition n’a pas été suffisamment mesuré. Comme Mme la ministre et monsieur le président de la commission l’ont rappelé, elle pourrait provoquer la faillite de certaines chaînes,…

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Que ne faut-il pas entendre ! Pensez-vous vraiment que TF1 peut craindre la faillite ?

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…entraîner des pertes d’emploi et causer des dégâts dans certaines de nos belles entreprises productrices de films d’animation.

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Quant aux pertes d’emplois dans le service public, elles n’ont pas d’importance !

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Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

L’avis du Gouvernement est également défavorable pour les raisons que j’ai exposées tout à l’heure.

Mme la rapporteure vient d’y faire allusion : pour continuer à développer ses talents, tout un secteur extrêmement créatif dépend des programmes jeunesse et donc des revenus publicitaires perçus par ceux qui les diffusent – qu’ils soient publics ou privés.

Je rappelle que la filière de l’animation, du dessin animé fait vivre de très nombreux salariés en France et constitue une vitrine de l’excellence française. Nous avons d’ailleurs la chance d’avoir des écoles extrêmement performantes, qui forment les techniciens et les créateurs de demain. Les films d’animation, qui s’exportent très bien, contribuent ainsi à faire rayonner un savoir-faire français particulièrement reconnu.

Il serait donc inconséquent de prendre une décision sans en avoir évalué correctement les conséquences en termes d’emplois, en termes économiques, mais aussi sur le plan des compétences et des savoir-faire.

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Le Parlement est irresponsable, nous le savons !

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Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication

Certains talents qui trouvent aujourd’hui à s’exercer sur le territoire français pourraient, demain, être tentés de se rendre au Canada ou en Asie, dans des endroits où la fiction et l’animation seraient mieux reconnues et bénéficieraient probablement de meilleurs soutiens financiers.

Pour ces raisons, et à cause des dangers qu’il fait peser sur les diffuseurs privés et sur un secteur de l’animation qu’en tant que ministre de la culture, j’ai le devoir de protéger, de promouvoir et de soutenir, je suis évidemment défavorable à l’amendement.

J’y suis défavorable également en raison de l’effort réalisé par le Gouvernement, avec l’aide du législateur – Patrick Bloche le rappelait – en vue de garantir le retour à l’équilibre des comptes de l’audiovisuel public. Le budget de l’audiovisuel public est important, mais la feuille de route que nous avons confiée à la nouvelle présidente de France télévisions est également ambitieuse. Si nous avons apporté 28 millions d’euros supplémentaires par rapport à ce qui avait été initialement prévu, c’est dans le but d’aider la nouvelle présidente à combler le déficit de 50 millions d’euros qu’elle a découvert en arrivant à son arrivée.

Nous avons réalisé cet effort important afin de permettre au groupe d’assainir ses finances tout en conservant une ambition forte – en tant que ministre en charge de la communication, j’ai en effet assigné à l’audiovisuel public un niveau élevé d’exigence. Soyons responsables : la somme dont le groupe serait privée, entre 15 et 20 millions d’euros, paraît faible en considération de l’ensemble de son budget, mais elle est considérable si on la rapporte au déficit que l’entreprise doit combler cette année.

Après des années au cours desquelles l’ambition de l’audiovisuel public était peut-être moins prise en compte que celle des entreprises privées, nous devons donner un signal clair aux salariés et à la présidence de France télévisions et, compte tenu des efforts déjà réalisés, nous montrer cohérents avec les dispositions récemment adoptées.

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Le groupe socialiste votera contre cet amendement pour les raisons que vient d’indiquer Mme la ministre, en particulier en raison de l’absence d’étude d’impact et de l’absence d’échanges réels sur le sujet au Parlement.

Permettez-moi de souligner l’ironie du moment. Nous avons entendu, de la part de la rapporteure, un vibrant plaidoyer en faveur des chaînes privées, au risque de mettre en péril les chaînes publiques.

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Avouons que la situation est cocasse. Et s’il nous restait un peu d’humour à cette heure, nous pourrions tous en rire !

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Je rejoins tout à fait les propos de Mme Corre. Lorsqu’elle parle du service public ou du service privé, Mme la ministre fait preuve de cohérence, puisque ce qui est mauvais pour les uns est mauvais pour les autres.

En revanche, les propos de Mme la rapporteure sont totalement incohérents. Comment ce qui serait mauvais pour les chaînes de services privés – en termes sociaux ou pour la création – pourrait-il être bon pour le service public ? Mme Buffet, à l’instant, en riait aux éclats, et moi aussi,…

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…mais c’était un rire crispé.

Nous faisons en effet n’importe quoi dans cette assemblée. Au nom de grands principes, le service public est mis en péril ! Vous avez relevé, madame la rapporteure, l’absence d’études d’impact s’agissant du secteur privé, mais il n’en existe pas plus concernant le service public. Nous sommes dans le flou artistique le plus absolu ! Les décisions que nous sommes en train de prendre seront lourdes de conséquences pour le service public. Et vous viendrez ensuite nous dire que vous en êtes les défenseurs ! C’est une honte ! Je le dis de façon modérée, mais très fermement, car le débat auquel nous assistons aujourd’hui est surréaliste.

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Nous n’avons pas mesuré l’impact qu’aurait l’amendement de notre collègue Carpentier sur l’ensemble des services audiovisuels. C’est tout.

L’amendement no 6 n’est pas adopté.

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La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour soutenir l’amendement no 7 .

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Je vous suggère de retirer cet amendement qui n’est plus vraiment en cohérence avec le texte voté.

L’amendement no 7 est retiré.

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Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Discussion de la proposition de loi relative à l’enseignement des langues régionales.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly