La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Monsieur le ministre de l’économie et des finances, alors que le projet de budget pour 2014 vient d’être déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, un récent rapport de la Commission européenne fait état de l’importance de la fraude à la TVA en Europe et en France. D’après ce rapport, le manque à gagner pour notre pays s’élèverait à 32 milliards d’euros par an et représenterait près d’un cinquième des recettes potentielles de TVA. Il s’agit d’une somme considérable, qui échappe ainsi au budget de l’État.
Si les impayés dus à la crise expliquent une partie de ces pertes, la grande majorité d’entre elles sont clairement dues à une fraude volontaire et organisée. Vous avez estimé, monsieur le ministre, que cette fraude était moins importante que celle annoncée. Il n’en reste pas moins que le phénomène pèse lourdement sur les finances de l’État. En effet, la fraude fiscale se monte à plusieurs dizaines de milliards d’euros par an, qui échappent au budget de la nation.
Récemment, le syndicat majoritaire du ministère des finances, Solidaires Finances publiques, a révélé un chiffre qui souligne l’utilité des agents contrôleurs : tous les ans, chacun d’entre eux fait rentrer en moyenne 1,5 million d’euros dans les caisses de l’État. Or, ces dernières années, l’État n’a cessé de diminuer leurs effectifs. Alors que l’on demande de nombreux efforts à nos concitoyens, ceux-ci supportent difficilement cette fraude de grande ampleur.
Dans le cadre des actions déjà menées par le Gouvernement pour lutter contre la fraude fiscale, quelles mesures spécifiques allez-vous prendre, monsieur le ministre, pour enrayer la fraude à la TVA ? De quels moyens humains supplémentaires les Français peuvent-ils espérer la mise en oeuvre, dans l’intérêt
Applaudissements sur les bancs du groupe écologistesur quelques bancs du groupe SRC.
Je vous remercie, madame la députée, d’avoir, par cette question, rappelé l’importance de la fraude fiscale – entre 40 et 60 milliards d’euros selon les organisations syndicales – et en particulier de la fraude à la TVA. Contrairement au rapport de l’Union européenne, Nous estimons que cette dernière s’élève à11 milliards plutôt qu’aux 32 milliards mentionnés dans le rapport de la Commission. Mais peu importe le montant : nous devons lutter résolument contre la fraude à la TVA, car chaque euro que nous récupérons sur ceux qui fraudent est un euro de moins d’impôt payé par les Français.
Nous avons, dès l’an dernier, engagé des actions extrêmement fortes pour lutter contre la fraude à la TVA. Nous l’avons fait en très étroite liaison avec l’Union européenne, dans le cadre des réflexions en cours sur la modification des directives TVA. Nous avons pris des dispositions importantes concernant la vente des véhicules d’occasion mobilisant l’ensemble de la filière, jusqu’au concessionnaire ; nous avons également pris des dispositions fortes pour modifier les règles relatives à l’achat d’électricité et de gaz. Dans le projet de loi de finances pour 2014, nous poursuivons dans cette voie, en préconisant l’autoliquidation de la TVA dans le secteur du bâtiment, et en mettant en place une procédure d’urgence qui permet, à chaque fois qu’il y a suspicion de fraude à la TVA dans un secteur, de déclencher des procédures d’autoliquidation de la TVA, pour éviter que cette fraude ne se généralise.
Madame la députée, comme vous l’avez vous-même souligné, nous sommes très déterminés à lutter contre la fraude fiscale. Le projet de loi que nous défendons avec Christiane Taubira devant la représentation nationale en témoigne. Cette loi donnera davantage de moyens à l’administration de la justice et des finances pour être plus efficace face à ceux qui fraudent.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs des groupes écologiste et RRDP.
La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, la fiscalité des entreprises est un sujet sensible et sérieux. Pourtant, nous avons l’impression qu’elle n’est, pour vous et votre Gouvernement, qu’une variable parmi d’autres, déconnectée de toute logique économique et des défis que les entreprises ont à relever.
En effet, vous venez d’innover en créant une nouvelle taxe portant sur l’excédent brut d’exploitation. Cette taxe, qu’aucun autre pays n’avait encore osé inventer, est un véritable contresens économique.
C’est une taxe qui touchera directement l’outil de production et qui pénalisera fortement les entreprises industrielles de taille intermédiaire, celles-là même dont la France a le plus besoin.
C’est une taxe dont l’effet sera inversement proportionnel à la santé de l’entreprise : plus l’entreprise sera fragile, moins son bénéfice imposable sera important, plus son imposition totale sera forte. Je tiens à votre disposition les simulations que nous avons faites et qui montrent que l’imposition peut osciller entre 35 et 75 % du bénéfice imposable selon les cas.
C’est une taxe dont les effets collatéraux n’ont pas été évalués et qui incitera, par exemple, nos entreprises à diminuer leurs amortissements en renonçant à leurs investissements ou en les externalisant.
C’est une taxe qui, pour de nombreuses entreprises, neutralisera l’effet du CICE.
Enfin, monsieur le Premier ministre, c’est une taxe qui apparaît comme une provocation quand le Président de la République annonce ce week-end des Assises de la fiscalité. On crée une taxe et on discute après !
N’avez-vous, monsieur le Premier ministre, qu’un objectif de rendement ? Ne pouvez-vous pas imaginer une solution qui stimule l’investissement plutôt que de le pénaliser ? Êtes-vous conscient de l’impact d’une telle mesure sur l’emploi ? Êtes-vous conscient de réveiller une opération comme celle des « pigeons » l’année dernière ? En quoi consistent les ajustements dont le ministre du budget vient de parler ? Merci, monsieur le Premier ministre, de nous donner des éclaircissements sur ce sujet grave.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Si vous devez échanger entre vous, soyez plus discrets !
La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.
Monsieur le député, je vous remercie d’avoir abordé ces sujets.
La manière dont vous avez posé votre question vous a conduit à évoquer un ensemble d’interrogations que nous avons nous-mêmes mises sur le métier lorsque nous avons engagé la concertation avec le monde de l’entreprise pour moderniser la fiscalité des entreprises.Je veux donner quelques éléments précis concernant les dispositions qui s’appliqueront aux entreprises en 2014.
D’abord, les entreprises bénéficieront en 2014 d’un allègement net de charges de 10 milliards d’euros en raison de l’entrée en vigueur du crédit d’impôt compétitivité emploi. En outre, 4,5 milliards d’euros ont été prélevés l’an dernier sur les entreprises ; or ce prélèvement s’élève cette année à 3,5 milliards d’euros, soit un milliard de moins. Ainsi, les entreprises bénéficieront, parce que nous voulons restaurer leur compétitivité dans un contexte de plus en plus concurrentiel, d’un allègement de charges de 11 milliards d’euros.
Par ailleurs, nous avons voulu moderniser la fiscalité des entreprises : c’est la raison pour laquelle nous supprimons l’impôt forfaitaire annuel qui pèse sur le chiffre d’affaires. Au terme de la discussion avec le monde de l’entreprise, nous aurions souhaité aller plus loin en supprimant tous les impôts qui taxent la production, parce qu’un très grand nombre d’entreprises voient s’appliquer à un chiffre d’affaires important des impôts dont les taux sont significatifs ; or, lorsqu’une entreprise a un chiffre d’affaires important mais un petit résultat, elle se trouve empêchée d’investir. Notre préoccupation est bien d’aider les entreprises à investir : c’est pourquoi nous avons préféré un impôt qui taxe le résultat après que les marges ont été constituées plutôt que la production.
Monsieur le député, j’entends l’interrogation que vous formulez sur le fait que la non prise en compte des amortissements dans l’assiette de cet impôt peut grever l’investissement. C’est la raison pour laquelle nous proposerons, au terme de la concertation qui se poursuit, une solution technique qui permettra d’éviter cet écueil et qui nous conduira à proposer un dispositif qui encourage l’investissement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Michel Liebgott, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Jeudi dernier, le Président de la République est revenu à Florange, en privilégiant le dialogue avec les salariés et les représentants syndicaux. Cet échange fut franc et utile pour expliquer les accords de Matignon de novembre 2012 que le Président de la République a dit assumer pleinement.
Monsieur le Premier ministre, avec le Président de la République, vous avez engagé un véritable plan industriel et territorial pour conforter la sidérurgie et l’économie lorraines. Ce plan stratégique se décline en trois piliers complémentaires.
D’abord, il consiste en un accord avec ArcelorMittal pour des investissements structurants, à hauteur de 180 millions d’euros au moins, afin de pérenniser ses produits phares et l’emploi d’au moins 2 000 salariés.
Ensuite, il prévoit un double programme de recherche, avec d’une part le centre de recherche publique annoncé par le Président de la République pour un coût de 20 à 50 millions d’euros, permettant de sécuriser les brevets, et d’autre part le projet LIS, en partenariat avec le centre de recherche d’ArcelorMittal pour un montant de 32 millions d’euros, permettant de trouver des solutions techniques pour produire des aciers encore plus propres et toujours aussi haut de gamme.
Enfin, il repose sur un plan particulier de soutien à la région Lorraine intégrant de nombreuses aides à la filière des matériaux regroupées sous le label « Lorraine, vallée européenne des matériaux et de l’énergie ». Celles-ci représentent 300 millions d’euros de crédits qui, avec un effet de levier, pourraient atteindre 1,5 milliard d’euros pour moderniser et rendre plus compétitives plusieurs filières économiques, dont la sidérurgie et la métallurgie.
En comparaison, Nicolas Sarkozy n’avait pu annoncer en 2012 que 17 millions d’euros.
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous indiquer les grandes lignes de la stratégie que vous mettez en oeuvre pour la région Lorraine, qui pourrait servir pour d’autres territoires en reconversion
« Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP
et mérite à ce titre une attention toute particulière de l’État stratège ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député Michel Liebgott, je vous remercie pour votre question qui me permet de rappeler
« Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP
que, le 17 septembre dernier, j’ai signé avec la région Lorraine un contrat spécifique pour l’avenir de cette région.
Vous êtes bien placé pour savoir, comme d’autres élus de cette vieille région industrielle, que celle-ci a connu des périodes difficiles dans son histoire, sur les plans non seulement politique et militaire, mais aussi industriel. Bien des mutations et des souffrances ont marqué cette région, cette culture, cette identité. En même temps, j’observe le courage de ceux qui habitent et vivent dans cette région, et qui veulent relever le défi de l’avenir.
C’est le message que le Président de la République a voulu porter en se rendant à Florange la semaine dernière. Cette visite, il l’avait souhaitée et envisagée comme un retour après une campagne électorale, mais avec des perspectives, des propositions et le respect des engagements pris. Vous l’avez rappelé : même si cela a été difficile et douloureux, des engagements ont été pris…
…pour que l’activité du groupe Mittal – la « filière froide » – soit maintenue et développée.
Sur le site, 2 200 salariés voient aujourd’hui leur avenir conforté.
L’engagement qui a été pris d’investir sur ce site est respecté.
Sourires.
Le comité de suivi est chargé d’y veiller, les élus y sont associés, et le Président de la République a pu constater sur place que ces engagements avaient été tenus.
De même, nous avions obtenu et nous nous étions engagés à ce qu’aucun salarié ne soit inscrit à Pôle Emploi : c’est le cas.
Tournez-vous aussi vers nous, monsieur le Premier ministre ! Il y a des parlementaires à droite !
Mais nous avons voulu aller plus loin. En effet, le Président de la République a annoncé, pour cette région, un plan stratégique en vue d’aller le plus loin possible s’agissant de la haute valeur ajoutée des métiers de la sidérurgie.
Monsieur le Premier ministre, il y a aussi des parlementaires à droite !
Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
…de recherche et de valorisation des brevets, c’est l’engagement qui a été pris.
Quant au contrat que j’ai signé, il vise à renforcer les filières d’excellence de cette région, de former davantage la jeunesse, d’investir dans les technologies de l’avenir.
« On est là ! » sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Le Président de la République s’est rendu à Florange, mais aussi à Pompey. Vous le savez fort bien : la région de Pompey a été sinistrée dans les années quatre-vingts, lorsque des milliers d’emplois ont été détruits dans la sidérurgie.
Mêmes mouvements.
Arrêtez, mes chers collègues ! Le Premier ministre s’adresse au député qui a posé la question !
Mêmes mouvements.
Aujourd’hui, il y a davantage d’emplois dans cette région. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Le Gouvernement et la région ont décidé de mettre sur la table 150 millions d’euros chacun, avec un effet de levier de 1,5 milliard d’euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le Gouvernement n’est pas indifférent aux souffrances des territoires.
Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Il négocie les contrats de planet, lorsque les régions connaissent des difficultés particulières, il agit davantage. Cela vaut pour la Lorraine comme pour d’autres territoires. Je l’ai dit l’autre jour en Bretagne, dont le secteur agroalimentaire est également sinistré : nous sommes prêts à faire pour la Bretagne la même chose que pour la Lorraine.
J’aurais aimé qu’au lieu de hurler, la droite, qui se veut responsable, ait été dans le passé à la hauteur de ses responsabilités.
Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et RRDP. – Les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent vivement.
Avenir de Florange
La parole est à Mme Anne Grommerch, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Un peu de calme, chers collègues. Il y a trop de bruit dans l’hémicycle.
Ma question s’adresse au Premier ministre et j’espère que c’est vous, monsieur le Premier ministre, qui me répondrez ainsi que vous venez de le faire pour la question de M. Liebgott.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Le 24 février 2012, chez ArcelorMittal à Florange, le candidat Hollande, juché sur une camionnette avait harangué les salariés en leur promettant une loi qui sauverait les hauts fourneaux.
Les hauts fourneaux se sont éteints.
La loi dite Florange ne s’appliquera même pas à Florange ! Les Lorrains en gardent comme un arrière-goût de trahison.
Jeudi dernier, François Hollande est revenu sur le site d’ArcelorMittal à Florange. Mais revenir pour dire quoi ?
Désavouant au passage son ministre du redressement productif Arnaud Montebourg, qui ne faisait pas partie du voyage alors que directement concerné, (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP) il est venu proclamer sa foi en la Lorraine. Quel cynisme ! Il fait de Florange son nouveau lieu de pèlerinage, j’espère qu’il ne se transforme pas en chemin de croix.
Applaudissements sur certains bancs du groupe UMP.
En effet, que de nouvelles promesses ! 20 millions d’euros pour un laboratoire de recherche publique à Florange qui pose beaucoup de questions, monsieur le Premier ministre. Pour qui, pour quoi ? Avec quel argent ?
Vous avez évoqué 300 millions d’euros pour le Pacte Lorraine. Seulement 150 millions d’euros, soit 10 % de financement viendront de l’État alors que dans certaines régions, votre participation s’élève à 25 % ! Pourquoi la Lorraine est-elle ainsi sous-dotée ?
D’ailleurs ces 150 millions d’euros ne représentent-ils pas simplement un recyclage des fonds prévus pour le projet Ulcos, projet que François Hollande avait promis de défendre et qui lui aussi est définitivement mort et enterré ?
Les autres 150 millions annoncés proviennent du conseil régional. Monsieur le Premier ministre, avez-vous conscience d’avoir signé avec le président du conseil régional un pacte fictif, voire illégal, car cet engagement de 150 millions d’euros du conseil régional n’a fait l’objet d’aucun vote de l’assemblée l’y autorisant !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.– Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le Gouvernement choisit le ministre qui répond ! C’est la règle !
Monsieur le président, mesdames messieurs les députés, madame la députée, la Lorraine fait partie de ces régions qui ont une culture industrielle, qui aiment leur industrie…
Sourires.
…mais qui ont perdu des emplois, faute d’innovation. Au cours de ces dix dernières années, aucune innovation, aucun investissement en direction de cette industrie !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Ce qui explique son état actuel. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault vient de le rappeler. Aujourd’hui, un pacte industriel, un pacte de recherche et développement a été mis en place en Lorraine. C’est pourquoi c’est la ministre de la recherche vous répond.
Si nous ne faisons pas monter en gamme les produits de la sidérurgie lorraine, si nous ne donnons pas un nouvel avenir industriel à la Lorraine dans le domaine des matériaux, des métaux, la Lorraine ne sera plus un pays industriel et nous aurons perdu tous les emplois. Le Premier ministre a pris cette responsabilité et François Hollande est venu, courageusement réaffirmer cet engagement, vous l’avez dit, madame la députée. Il viendra tous les ans faire le compte des emplois ainsi créés grâce aux partenariats qui se sont noués entre les entreprises privées que sont ArcelorMittal, Air Liquide et les laboratoires publics, avec en fer de lance l’université de Lorraine. Je travaille avec Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
sous la coordination du Premier ministre Jean-Marc Ayrault pour redonner un avenir technologique et industriel à ce pays. Après Saclay, Grenoble, Bordeaux, Nantes et Toulouse, nous avons mis en place un centre technologique de transferts d’innovation qui, à court terme, pérennisera les emplois et permettra de créer des emplois durables et porteurs d’avenir. C’est le projet CEA Tech. Nous jouons l’avenir ensemble. Nous ne perdons pas d’emplois industriels. Nous voulons en regagner, vous ne l’avez pas fait. Nous le faisons !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Gérald Darmanin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur si M. le Premier ministre veut bien le laisser répondre à la représentation nationale sur la question des Roms.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le ministre de l’intérieur, plus personne ne comprend rien à la politique du Gouvernement envers les Roms. Ce matin, nous avons compris que le Président de la République avait sifflé la fin de la récréation. Cela doit être la dix-huitième ou la dix-neuvième fois en un an et demi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Qui de Mme Duflot ou de M. Valls a raison sur la question des Roms ? Ce ne sont pas les explications embarrassées de M. Jean-Marc Ayrault, hier, qui apporteront plus d’éclaircissements sur la question. On a compris, monsieur le ministre de l’intérieur, que vous avez reconnu, hier, une maladresse. Or ce matin, vous n’avez pas reconnu avoir reconnu une maladresse !
Ma question est simple. Pensez-vous avoir tenu des propos antirépublicains comme le pensent vos amis, Mme Duflot, M. Hamon et Mme Taubira ?
« Très bien » sur les bancs du groupe UMP.
Alors que la cacophonie règne au sein du Gouvernement, les Français subissent l’inanité de votre politique. J’en veux pour preuve ce qui se passe dans la métropole lilloise où votre camarade Martine Aubry a, en 2010, voté un moratoire, que je tiens à votre disposition, refusant au préfet l’expulsion des caravanes Roms. Entre 2010 et aujourd’hui, on est passé de sept cents à quatre mille Roms, selon les chiffres du ministère de l’intérieur.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Que fait désormais Mme Martine Aubry ? Les bons sentiments ont disparu. Et elle veut construire un supermarché, en vue des élections municipales, et expulse des milliers de familles. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre de l’intérieur, qu’allez-vous faire pour la métropole lilloise, pour les élus locaux ? Mais surtout, est-ce vous qui, aujourd’hui, serez autorisé à répondre au nom du Gouvernement sur des politiques qui concernent votre ministère ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. le Premier ministre. (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Cachez votre joie et écoutez le Premier ministre !
Je vous en prie, chers collègues. Êtes-vous conscients de l’image que vous donnez ?
Mesdames, messieurs les députés, monsieur le député, rassurez-vous, j’ai toute confiance dans le ministre de l’intérieur.
Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Sa tâche est difficile : assurer la sécurité des Français. Quand on connaît la situation que nous avons trouvée, cela demande de la ténacité !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Mais cela demande aussi de la cohérence et une cohésion gouvernementale
Mêmes mouvements.
La politique du Gouvernement, c’est la politique de tout le Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.– Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Ce matin, au conseil des ministres, après des désaccords exprimés publiquement entre ministres, le Président a tenu à faire une mise au point
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
sur la question des Roms.
Je vous appelle à un peu de sérénité. Je ne suis pas sûr que vous vous grandissiez en vous comportant de cette façon. Pour ma part, je n’ai qu’une ligne et je m’y tiendrai.
Le Président de la République a rappelé, s’agissant de la question des Roms dans notre pays, quelle était la politique du Gouvernement.
Cette politique, je l’ai rappelée hier ici devant la représentation nationale. Il n’y en a pas deux.
Celle que j’ai rappelée hier, celle qu’a rappelée le Président de la République, c’est la politique de tout le Gouvernement
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
fermeté, respect de la loi, humanité. Voilà la ligne du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.– Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Que cela vous plaise ou non, nous nous y tiendrons. Le Président de la République a tenu à apporter une précision quant au comportement et à la méthode. Il a rappelé ce qui doit guider l’action et le comportement de tous les membres du Gouvernement : collégialité, solidarité et responsabilité.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Il semble que vous, à droite, n’en fassiez pas vraiment preuve. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Un Gouvernement, c’est un ensemble de personnalités. Tant mieux qu’il y ait des personnalités diverses dans un Gouvernement. Mais un Gouvernement, ce n’est pas une addition d’individualités, c’est une équipe qui consacre l’essentiel de son énergie au service du pays et rien d’autre ! Voilà le comportement auquel chacun a été rappelé. En ce qui me concerne, je veillerai qu’il en soit ainsi chaque jour, au service de la France et des Français !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre de l’éducation nationale, vous avez le courage d’appliquer la réforme des rythmes scolaires et vous avez tout notre soutien…
… dans cette réforme (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP), réforme que tous les spécialistes attendaient et qui a été préconisée ici par l’ensemble de notre assemblée dans un rapport voté à l’unanimité en décembre 2010.
Ce rapport de la mission d’information présidée par Mme Michèle Tabarot, proche de M. Copé, dont le co-rapporteur était un autre député de l’UMP, M. Xavier Breton, était clair dans ses conclusions : nous préconisons tous la suppression de la semaine de quatre jours imposée de force par M. Xavier Darcos et le retour à la semaine de quatre jours et demi avec l’organisation d’activités périscolaires en lien avec les communes.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.
Nous nous sommes rendus à Épinal, où M. le maire UMP nous a vanté la réforme et que nous avons tous pris en exemple. De même, nous avons reçu toutes les organisations syndicales, les associations de parents et d’élus : la concertation a bien eu lieu !
Ces préconisations, ce sont aussi les vôtres, chers collègues de l’UMP : vous les avez votées.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Vous devriez aujourd’hui en être fiers car vous en êtes comptables. Pourquoi rejeter aujourd’hui ce que vous aviez préconisé hier ?
Ces préconisations, qui sont aussi les vôtres sont simples : nos enfants souffrent de journées trop lourdes et cette réforme des rythmes scolaires est urgente.
Monsieur le ministre, vous avez, je le répète, tout notre soutien. Pouvez-vous nous dire où en est l’application de cette réforme qui mérite que l’on élimine toute posture électorale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, l’ensemble de la représentation nationale, vous l’avez rappelé, a souhaité mettre fin à une exception française négative pour nos élèves, …
…qui se manifeste dans les résultats scolaires et se traduit par un accroissement des inégalités mesuré année après année. Pour mettre fin à cette exception – 144 jours de classe par an seulement et des journées surchargées –, il faut non seulement mettre en place la semaine de quatre jours et demi, mais aussi raccourcir les journées de classe, qui durent six heures pour les élèves de cours préparatoire.
C’est ce que nous faisons.
Cela suppose une collaboration étroite entre l’éducation nationale, qui a pris ses responsabilités, et les collectivités locales et les associations pour l’accueil des élèves dans le cadre des activités périscolaires.
Là où la réforme est mise en oeuvre, les enfants de France sont accueillis le mercredi matin par le service public de l’éducation nationale : cela leur assurera un meilleur temps scolaire. Et pour que l’accueil après la classe soit le meilleur possible, nous avons prévu des financements pour assurer la gratuité.
Exclamations sur certains bancs du groupe UMP.
Nous avons aussi organisé un an et demi de concertation.
« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.
Le décret a été publié en janvier dernier et nous avons répondu à vos demandes en permettant que ce soit sur le terrain que les choses s’organisent.
Le défi que nous avons à relever tous ensemble est un défi pour la France et pour l’ensemble des élèves. Il y a ceux qui se découragent, il y a ceux qui se contredisent, il y a ceux qui pensent que leurs intérêts électoraux valent davantage que l’intérêt du pays.
Mais, même à droite, et j’en salue beaucoup parmi ses rangs, il y a ceux qui considèrent que cette réforme est essentielle. Nous irons jusqu’au bout, nous le ferons dans la concertation et nous réussirons ensemble. Soyez présents à ce rendez-vous !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le ministre des transports, le 21 septembre, les habitants du Blanc-Mesnil et de Drancy manifestaient avec leurs élus autour de la gare de triage. Ce qui a motivé leur colère, c’est la décision du préfet de Seine-Saint-Denis, en application de la loi du 30 juillet 2003, d’interdire toute construction, tout apport de population, en raison de la présence de wagons de matières dangereuses. Au Blanc-Mesnil, 20 % du territoire est affecté par cette décision, qui n’assure en rien la sécurité des habitants ou des cheminots, mais qui, en revanche, dévalorise le patrimoine des habitants et freine tragiquement le développement des villes.
Avec le maire du Blanc-Mesnil, je me suis tournée vers la SNCF et RFF. Vous nous avez reçus, monsieur le ministre. Mais pour l’instant aucune solution n’a été dégagée.
Si le danger est là, à moins d’évacuer les 25 000 personnes concernées, il faut bien s’attaquer à réduire le danger à la source.
L’État, RFF, Fret SNCF ont déjà travaillé sur la sécurité. Il est possible d’aller plus loin, nous disent les cheminots, grâce à des mesures de confinement. Mais, cela ne dissipera pas les incohérences de la loi de 2003 qui pénalise les victimes éventuelles. Notre groupe demande d’ailleurs un moratoire dans son application.
Aussi, monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre, alors que l’État est actionnaire principal des entreprises concernées, pour assurer une pleine sécurité aux riverains et aux cheminots ?
Vous avez annoncé hier une nouvelle étude sur la sécurité, pouvez-vous nous indiquer les conséquences possibles qu’elle impliquerait pour les riverains ? Allez-vous travailler à modifier la loi de 2003 pour mieux responsabiliser les auteurs du danger ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Madame la députée, chère Marie-George Buffet
Murmures sur les bancs des groupes UMP et UDI
…le transport de matières dangereuses relève d’une problématique sensible, qui inquiète souvent et qui nécessite une grande vigilance. C’est la vôtre – je vous sais très impliquée dans ce dossier – et c’est la nôtre également : la gare de Drancy est un élément central du transport ferroviaire de fret et donc de matières dangereuses.
Des réglementations internationales et communautaires imposent de mettre en place des mesures organisationnelles de suivi des wagons mais aussi des procédures liées aux dangers, en cas d’accident. C’est précisément le sens de l’arrêté pris par M. le préfet en mars dernier qui impose à la SNCF et à RFF d’appliquer certaines mesures. Par ailleurs, le code de l’urbanisme comprend des dispositions contraignantes pour les communes qui découlent de ces obligations.
Comme vous l’avez rappelé, je vous ai reçu avec M. le maire du Blanc-Mesnil et je peux vous indiquer que j’ai d’ores et déjà demandé une étude de risques à mes services. Elle permettra de conclure sur la nécessité d’adapter les dispositions qui sont prises. Avec RFF et la SNCF, nous pourrons réexaminer, en concertation avec les élus locaux, le dimensionnement du périmètre où la réalisation d’opérations d’urbanisme, sans être interdite, est assortie de contraintes.
Une fois encore, la sécurité est une priorité pour le Gouvernement. Le fret ferroviaire est le mode de transport le plus sécurisé pour les matières dangereuses, mais il est important que nous puissions répondre aux préoccupations exprimées par les habitants de votre circonscription, madame la députée.
La parole est à M. Damien Abad, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, de vos explications embarrassées, nous retenons en fait que les ministres en cause se sont fait réprimander par le Président de la République tout à l’heure !
Sur la question des Roms, nous ne connaissons toujours pas la ligne du Gouvernement, et nous ne pouvons que le regretter, comme tous les Français qui nous regardent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.)
« I want my money back », dirait-on Outre-Manche ; « Rendez-nous notre argent », clament haut et fort des millions de Français, qui sont aujourd’hui victimes de l’overdose fiscale de votre gouvernement.
À chaque fois qu’on vous interroge, monsieur le Premier ministre, vous nous parlez du passé ! Alors aujourd’hui, je veux vous parler de la réalité, je veux vous parler du terrain, je veux vous parler de 2013.
Près d’un million de ménages sont devenus imposables alors qu’ils ne l’étaient pas l’an dernier. C’est le cas de Daniel, retraité dans l’Ain, qui doit aujourd’hui payer 663 euros ; ou encore de Nicole, femme isolée, qui doit s’acquitter de 862 euros alors même que sa situation n’a pas changé ; ou encore de Sylvain, jeune actif, qui voit ses impôts augmenter de 50 % entre 2012 et 2013, tout simplement parce qu’il ne peut plus défiscaliser ses heures supplémentaires !
Ces feuilles d’impôts, monsieur le Premier ministre, je les tiens à votre disposition, parce que c’est cela, la réalité, c’est cela, le concret : ce sont les hausses d’impôts !
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Alors, vous pouvez nous faire croire que 9 Français sur 10 ne sont pas concernés par ces hausses ; vous pouvez nous parler de la « pause fiscale » ! Mais tout cela, c’étaient vos promesses d’hier, et ce sont aujourd’hui vos mensonges. Le « ras-le-bol fiscal » a atteint ses limites !
Je vous invite à méditer cet adage : « Il faut demander plus à l’impôt et moins aux contribuables » ; or vous faites exactement l’inverse.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous dire la vérité aux Français ? Quand allez-vous mettre fin à cette surenchère fiscale permanente ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Monsieur le député Abad, lorsque vous êtes confronté à la réalité dont vous parlez dans votre circonscription,…
…des contribuables vous présentent leur feuille d’impôt en prétendant qu’ils sont entrés dans l’impôt sur le revenu cette année.
Est-ce que vous leur expliquez, avec la même fougue, que s’ils sont entrés dans l’impôt sur le revenu cette année, c’est parce qu’en 2011, vous avez décidé de procéder à la fin de la réindexation de l’impôt sur le revenu ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Est-ce que vous faites cela ? Si vous le faisiez, monsieur Abad, cela serait extrêmement honnête de votre part, et cela donnerait à votre question une tonalité infiniment plus honnête et moins démagogique !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Lorsque vous montrez cette feuille d’impôt aux électeurs de votre circonscription et notamment aux plus âgés, est-ce que vous leur dites que s’ils sont désormais soumis à l’impôt sur le revenu, c’est parce que vous avez décidé en 2011 de supprimer la demi-part des veuves,…
…soumettant ainsi à l’impôt sur le revenu des milliers de Français qui n’avaient pas vocation à l’être ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.
Lorsque vous êtes devant vos électeurs, monsieur Abad, et qu’ils vous présentent cette feuille d’impôt, avez-vous l’honnêteté de leur expliquer que nous avons pris l’an dernier une mesure de décote qui a permis à un très grand nombre de contribuables français de ne pas entrer dans l’impôt sur le revenu, parce que nous corrigeons les mesures que vous avez prises, qui étaient extraordinairement injustes ?
Lorsque vous avez ces contribuables devant vous, monsieur Abad, avez-vous le courage et l’honnêteté intellectuelle de leur dire que cette majorité, dans le projet de loi de finances pour 2014, va réindexer le barème de l’impôt sur le revenu, parce qu’elle ne supporte pas les injustices dont vous êtes les auteurs ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Monsieur Abad, je vous le dis très sincèrement, sur la question fiscale comme sur la question des économies, l’honnêteté intellectuelle et la rigueur doivent être convoquées !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Or dans votre question, je n’ai trouvé ni l’une, ni l’autre !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
La parole est à M. Christophe Castaner, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre du budget, vous nous avez présenté la semaine dernière le projet de budget 2014.
Alors que nous faisons face à la crise avec détermination, quelle n’a pas été notre surprise d’entendre, il y a quelques instants encore, la droite nous donner des leçons en matière de gestion !
Jusqu’à présent, elle avait fait de mauvais budgets ; aujourd’hui – variante ! –, elle invente le contre-budget ! Mais la droite ose tout, et c’est même à cela qu’on la reconnaît. Ne vient-elle pas de découvrir les vertus de l’éducation nationale après l’avoir affaiblie pendant cinq ans ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Aujourd’hui, pour le budget, elle se veut vertueuse alors que, de 2007 à 2012, la dette de la France a augmenté de plus de 600 milliards ; alors que, de 2007 à 2012, la croissance s’est effondrée en passant de 2,3 % à zéro ; alors que, de 2007 à 2012, le déficit de la balance commerciale a augmenté de 30 milliards d’euros ; alors que, enfin et surtout, de 2007 à 2012, le nombre de chômeurs a explosé d’un million de personnes ! Sans compter les 350 000 emplois perdus dans l’industrie, et le déficit de la Sécurité sociale augmenté de 8,7 milliards !
Vous l’avez rappelé, monsieur le ministre : le gel du barème de l’impôt sur le revenu, c’est la droite, et nous l’aurons corrigé en deux ans.
Et nous, nous la gauche, nous serions de mauvais gestionnaires ? Faut-il parler de la TVA réduite sur la restauration, qui a coûté 3,5 milliards d’euros ? Luc Ferry, ancien ministre, a déclaré hier à Manosque qu’elle avait surtout permis à ses amis restaurateurs de changer leur voiture. Sinon, a-t-il ajouté : « Cela n’a servi à rien ! »
Depuis dix-huit mois, nous stabilisons les prélèvements obligatoires, nous maîtrisons l’augmentation de la dette, et nous faisons baisser la dépense publique de 15 milliards d’euros cette année.
Monsieur le ministre, comment rendre compatible une gestion rigoureuse avec une politique volontariste qui soutient la croissance et le pouvoir d’achat ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
Monsieur le député, je voudrais en quelques mots rappeler un certain nombre de réalités, parce qu’il est important, sur ces questions budgétaires et fiscales, d’être extrêmement précis.
D’abord, je voudrais rappeler que, depuis que nous sommes en situation de responsabilité, les déficits diminuent de façon continue et régulière. Le déficit que nous avons trouvé en 2011 était de 5,3 % ;…
…après les mesures que nous avons prises en 2012, il était de 4,8 % ; à la fin de l’année, nous serons à 4,1 %, et le budget qui vous est présenté affiche un déficit nominal de 3,6 %.
Certains, qui ont fait augmenter les déficits de façon très significative au cours des dernières années, constatant que les déficits diminuent moins vite aujourd’hui qu’ils n’augmentaient hier, essayent de faire croire qu’ils augmentent. Non ! Ils diminuent !
Ils diminuent régulièrement, et nous allons poursuivre cette stratégie pour nous conformer aux engagements que nous avons pris devant les Français et devant l’Union européenne.
Le deuxième point sur lequel je voudrais insister concerne la dépense publique : ceux qui expliquent aujourd’hui qu’il faudrait aller plus loin dans la maîtrise de la dépense publique sont ceux qui l’ont fait augmenter en moyenne, entre 2007 et 2012, de plus de 2 %, alors qu’avec le budget qui vous est présenté, nous avons divisé par quatre en dix-huit mois le rythme d’augmentation de la dépense publique ! Voilà la réalité de ce que nous faisons !
Pour ce qui concerne les économies en dépenses, nous présentons un budget, vous l’avez indiqué, qui affiche 15 milliards d’économies en dépenses pour 2014 :…
…soit 9 milliards sur l’État – l’augmentation des dépenses de l’État étant de 7,5 milliards, cela permet d’afficher 1,5 milliard de diminution des dépenses – et 6 milliards sur la protection sociale.
Jamais un tel effort n’avait été fourni : les 15 milliards que nous faisons cette année, c’est plus que les 10 milliards de la révision générale des politiques publiques en trois ans ! Nous sommes dans le rétablissement des comptes ; nous n’avons aucune leçon à recevoir de ceux qui ont mis la France dans la situation que l’on sait !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Philippe Houillon, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur Cazeneuve, les Français ne seront pas dupes, malgré tous les discours ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, que je ne vois pas…
Le 25 janvier dernier, madame la garde des sceaux, vous adressiez aux parquets et aux greffiers de métropole et d’outre-mer une circulaire enjoignant la délivrance de certificats de nationalité française aux enfants nés à l’étranger de Français, lorsqu’il apparaît – je reprends vos termes – « avec suffisamment de vraisemblance, qu’il a été fait recours à une convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui », reconnaissant donc de fait une pratique interdite en France.
Nous avions appelé votre attention sur le fait que votre circulaire ne pouvait rendre légal ce qui était proscrit par un texte de loi. Mais vous aviez évidemment méprisé cette observation.
Or la Cour de cassation a rendu, le 13 septembre dernier, deux arrêts en matière d’état civil, aux termes desquels elle refuse de donner effet à une convention de gestation pour autrui conclue à l’étranger par un Français, convention qui, rappelle-t-elle, est nulle d’une nullité d’ordre public fût-elle licite à l’étranger.
Dans son avis préalable l’avocat général, visant expressément votre circulaire, reprend ce principe selon lequel une circulaire, émanation du pouvoir exécutif, ne peut pas dans une démocratie, encourager les fraudes à la loi, quand celle-ci est d’ordre public et la priver de son effectivité sans empiéter sur le pouvoir législatif.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
« Fraude à la loi », « processus frauduleux » : ces termes employés par la Cour de cassation sont clairs et nous amènent forcément à vous poser la question de l’abrogation immédiate de votre circulaire…
…dont il n’est plus besoin de démontrer qu’elle prend appui sur une infraction et qu’elle détourne un principe d’ordre public.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Taubira qui assiste à un congrès des greffiers.
Vous disiez à l’instant que les Français n’étaient pas dupes. J’aimerais qu’ils ne soient pas dupes à l’audition de votre question,…
…car la circulaire que Mme Taubira a effectivement signée au mois de janvier dernier ne fait que permettre à des enfants d’attester de leur nationalité, ce qui est conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant…
…dont, je n’en doute pas un seul instant, vous êtes d’ardents défenseurs.
Par ailleurs, cette circulaire est conforme à l’article 18 du code civil selon lequel un enfant est Français quand au moins un de ses parents est Français. Donc, ces enfants sont effectivement Français.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Vous ne voulez en fait que remettre, si j’ose dire, un sou dans le juke box pour reparler de la gestation pour autrui, mais celle-ci connaît déjà ses interdictions avec l’article 16 du même code, sachant en outre que la position du Président de la République est en la matière on ne peut plus claire. Cette question n’set pas à l’ordre du jour et elle ne le sera pas tout au long du quinquennat.
Je vous le dis tout simplement : vous essayez de raviver la flamme d’un mouvement qui est en train de s’éteindre parce que les Français sont beaucoup plus ouverts et acceptent l’application de la loi sur le mariage pour tous !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Alain Fauré, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, mes chers collègues, si les Français ne seront pas dupes, en tout cas je pense qu’ils n’apprécieront pas le spectacle que nos collègues auront montré ici cet après-midi ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre de l’économie et des finances, d’avril 2011 à juin 2012, date à laquelle la majorité a été élue, le pays comptait tous les mois 25 000 chômeurs supplémentaires, ouvriers, employés, cadres dans presque tous les secteurs de l’économie. Parallèlement, les déficits de l’État ne cessaient de se creuser jusqu’à atteindre un niveau jamais inégalé dans l’histoire du pays depuis soixante-dix ans. En juillet 2012, des plans sociaux retardés pour cause d’élection présidentielle sont venus aggraver la situation.
Dès sa prise de fonction, le Gouvernement a décidé de faire de la lutte contre le chômage la priorité du quinquennat.
Dans un premier temps, pour répondre à une urgence et une attente, le Gouvernement et la majorité ont décidé de décréter la création d’emplois en direction des jeunes les plus éloignés du marché du travail. Contrairement à ce que veut faire croire l’opposition plutôt amnésique sur ses résultats dans ce domaine, nous avons également engagé des mesures structurelles d’ampleur qui amélioreront durablement la compétitivité des entreprises dans tous les secteurs d’activité. C’est le cas du crédit impôt compétitivité emploi dont le mérite est d’être simple à activer et qui contribue à diminuer le coût du travail et inciter les entreprises à embaucher. Il était urgent d’agir. C’est également le cas, avec la création de la BPI pour répondre aux besoins de financement notamment des PME. En quinze mois seulement, les premiers effets positifs de ces mesures semblent se dessiner. Il est temps d’en tirer un premier bilan.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire le point sur ces actions engagées et en préciser les premiers résultats ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, vous avez rappelé, à juste titre, la situation que nous avons trouvée lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, ce qui devrait conduire certains à faire preuve parfois d’un peu plus de pudeur.
La stratégie économique de ce Gouvernement, qui a une finalité, l’emploi, passe par la croissance, est cohérente et se déploie autour de plusieurs axes.
Le premier est européen. Nous avons engagé, avec nos partenaires européens, une discussion pour remettre la croissance au premier plan des priorités de l’Union, ce qui a débouché sur le fait que, certes, nous réduisons les déficits, mais nous le faisons à un rythme compatible avec la croissance.
Le deuxième axe de notre stratégie vise à favoriser l’investissement. En tant que chef d’entreprise, vous savez comment on conquiert des marchés. A cet égard, il nous fallait rétablir la compétitivité de l’économie française. Nous l’avons fait à travers un pacte global et je veux évidemment souligner que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi qui représentait une baisse du coût du travail pour les entreprises de 4 % en 2013, représentera 6 % en 2014. C’est ainsi que l’on conquiert des marchés.
Le troisième axer tient à la réorientation du financement de l’économie. Nous avons une épargne abondante ; nous voulons l’orienter vers l’investissement. A cet égard, je citerai la création de la Banque publique d’investissement, la banque des PME, la banque des entreprises intermédiaires, la banque de ceux qui veulent investir et exporter, ainsi que la création d’un PEA PME qui permettra d’orienter davantage l’épargne vers les petites et moyennes entreprises.
Enfin, dernier axe que je veux citer, l’action qui est menée sur l’emploi trouvera sa traduction dans le budget avec la création de 150 000 emplois d’avenir, le financement de 100 000 contrats de génération, de 340 000 emplois aidés et de 2 000 emplois à Pôle emploi.
Nous avons une stratégie : la reprise durable, la croissance durable. Elle porte ses fruits et elle réussira !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre, mais auparavant je veux rassurer Mme Bertinotti qui nous a fait le coup de la grande braderie du droit : les braises sont bien chaudes, nul besoin de souffler dessus pour que la flamme se rallume ! (Interruptions sur les bancs du groupe SRC.)
Le Comité consultatif national d’éthique a été renouvelé de plus d’un tiers, en réalité de 40 % de ses membres, le dimanche 22 septembre dernier. Quinze nouvelles personnalités ont été nommées. Or, le CCNE se prononcera, dans les mois qui viennent, sur d’importantes questions de société telles que la PMA, la fin de vie, l’euthanasie. Dès lors, on peut légitimement se demander si l’objectif du Président de la République n’est pas d’avoir un Comité d’éthique à sa botte.
En effet, François Hollande a déclaré avant les vacances qu’il respecterait l’avis de ce Conseil sur la PMA. Il est donc tentant de changer sa composition pour faire évoluer l’avis, qui semblait plutôt négatif.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Dommage, aussi, l’éviction des représentants des grandes religions : je crois qu’elles ne faisaient pas obstacle à la laïcité à la française. Le Président, comme les autres autorités de nomination – on pense au président du Sénat qui a nommé la très neutre, c’est ironique, sénatrice Meunier –, ont sciemment pris le risque d’un trouble grandissant de l’opinion publique et d’une manipulation d’une instance jusqu’alors respectée et écoutée.
Trop, c’est trop ! La méfiance s’est installée durablement entre la majorité et une grande partie de l’opinion publique. On note une hypersensibilité sur les sujets de société, qui bouleversent nos fondamentaux.
Dès lors, le Président de la République aurait été bien inspiré d’envoyer des signaux d’apaisement. Tel n’est pas le cas ! Avec le changement de composition du CCNE dans une telle proportion, c’est même l’inverse qui se produit.
On rêvait d’une République irréprochable ? Chiche ! Dès lors, monsieur le Premier ministre, qu’entendez-vous faire pour rétablir la neutralité de ce Comité consultatif national d’éthique ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.
Monsieur le député, je vous confirme mes propos.
Quel mépris vous avez pour tous ces intellectuels, pour tous ces scientifiques !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
C’est une insulte à l’intelligence de ces hommes et de ces femmes. Pensez-vous que sur de telles questions éthiques, ils soient uniquement d’esprit partisan ? Vous vouliez qu’il y ait un débat de qualité. Ce sont des hommes et des femmes de qualité qui ont été nommés au sein du Comité consultatif national d’éthique.
Et pourquoi redoutez-vous les travaux de ces hommes et de ces femmes ? Vous leur déniez la capacité du libre arbitre. Vous leur déniez la capacité d’exprimer des avis étayés, circonstanciés. Pour ma part, je me félicite d’appartenir à un Gouvernement qui a saisi le CCNE sur ces questions de bioéthique et respecte le calendrier du président du Comité consultatif national d’éthique : il a fixé au mois de mars 2014 l’émission de cet avis et ensuite la tenue d’États généraux largement ouverts au cours desquels des opinions contrastées et diverses vont pouvoir s’exprimer afin, précisément, de retrouver ce climat de sérénité qui est indispensable pour aborder des questions de bioéthique.
Vous doutez de nos élites.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Eh bien nous, nous leur faisons confiance. C’est une autre conception de la démocratie.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Fabrice Verdier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre du redressement productif.
Monsieur le ministre, hier, avec Nicole Bricq, votre collègue du commerce extérieur, vous avez présenté les référents uniques pour les investissements.
Ces vingt-deux référents installés dans chacune des régions métropolitaines ont, comme vous l’avez indiqué, une mission offensive. Ils doivent détecter, conseiller, guider, orienter les investisseurs français comme étrangers qui souhaitent venir renforcer notre appareil productif.
Oui, ces référents sont bien les nouveaux attaquants du « made in France » chargés de réussir cette relocalisation des activités industrielles et commerciales à laquelle le gouvernement de gauche est attaché. Ils vont permettre à notre pays de retrouver de manière durable le chemin de la croissance.
Ils complètent parfaitement notre dispositif offensif de lutte contre les délocalisations. Avec le pacte de compétitivité, le CICE, les mesures réglementaires et institutionnelles favorables au dynamisme des entreprises, avec les dispositifs de redressement productif, la Banque publique d’investissement, Colbert 2.0 qui permet aux décideurs de mesurer très concrètement les avantages du redéploiement d’une activité en France, avec les trente-quatre plans de reconquête industrielle présentés en septembre à l’Élysée, le Gouvernement et la majorité recréent un environnement favorable aux créateurs d’emploi.
Le site France regagne chaque jour en attractivité. Il renoue, grâce à notre volontarisme, avec son passé fait d’innovations, d’initiatives et de conquêtes sur lesquelles s’est construite la prospérité française.
Alors, monsieur le ministre, ma question est simple. Quelle mission assignez-vous aux vingt-deux référents uniques pour les investissements, nos nouveaux ambassadeurs du « made in France » ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Monsieur le député Verdier, nous avons créé, en état de mobilisation nationale pour défendre nos outils industriels, les commissaires au redressement productif l’année dernière. Ils sont dans toutes les régions et je me réjouis de recevoir de ces bancs, quels qu’ils soient, des remerciements de la part des parlementaires sur le travail fait par ces fonctionnaires qui se battent au quotidien pour défendre nos outils industriels, préserver les technologies et les brevets, maintenir le maximum d’emplois.
Nous avons tenu le compte de ce travail, dans cette stratégie d’endiguement : sur 941 dossiers, avec 148 717 emplois menacés, nous en avons préservé, avec ces commissaires, 134 180. Ce sont 15 000 emplois perdus, mais c’est quand même une stratégie d’endiguement qui fonctionne sur les territoires.
Nous avons décidé de faire la même chose avec les activités nouvelles. C’est donc une stratégie offensive que nous avons mise en oeuvre pour inviter l’État à changer ses méthodes de soutien aux entreprises en accueillant les investisseurs. Un référent unique dans chaque région travaillera avec les collectivités locales, débrouillera les embrouillaminis administratifs, obtiendra les autorisations administratives : permis de construire, problèmes d’alimentation énergétique, difficultés sans nom pour les autorisations environnementales… Les préfets rappellent souvent que, si elles étaient mises bout à bout, les procédures d’autorisation dureraient trois ans.
Certains parviennent à les comprimer en quelques mois. Nos amis et partenaires allemands sont à trois mois. Nous voulons, avec ces référents, raccourcir les délais, simplifier, soutenir les entreprises, obtenir des résultats : c’est la Nouvelle France industrielle !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, le président socialiste de la Cour des comptes vous a enjoint, dernièrement, de modifier votre politique. Il vous a rappelé que la spirale de la dette sociale est anormale et dangereuse et nous rappelons quant à nous que vos prévisions n’étaient pas bonnes puisqu’elles étaient fondées sur des mensonges en termes de croissance, de recettes et de chômage. Malgré vos déclarations, le déficit de l’assurance maladie reste entier.
La Cour des comptes considère qu’il est urgent de s’attaquer à ce déficit et assure que des gisements d’économies considérables existent. Encore faut-il accepter de les voir ! Je vous pose donc les questions suivantes.
Vous attaquerez-vous aux problèmes de l’hôpital, où plus de cinq milliards peuvent être économisés ? Vous attaquerez-vous aux prestations idéologiques comme l’aide médicale d’État ou les dérives de la couverture maladie universelle ? Vous attaquerez-vous à la mise en oeuvre de réformes structurelles et intelligentes de notre système social ? Renoncerez-vous au « tout gratuit », la généralisation du tiers payant conduisant inexorablement à l’hyperconsommation, aux dérives financières et à une certaine étatisation de la médecine libérale ?
Renoncerez-vous à démanteler notre politique familiale ? Renoncerez-vous à créer de nouveaux assistés avec le « RSA jeunes » ? Renoncerez-vous à stigmatiser les transfrontaliers ? Renoncerez-vous à détruire toujours plus l’industrie pharmaceutique ? Renoncerez-vous, enfin, à l’avalanche de taxes et d’impôts pour compenser votre manque de réalisme ? Je vous demande d’écouter la Cour des comptes, pour une fois !
Enfin, madame la ministre, ne vous cachez pas derrière le paravent d’un héritage que vous décriez et que nous assumons ! Vous et vos collègues usez de cette pratique depuis les dernières élections afin de masquer un argumentaire chancelant.
Je vous remercie de répondre uniquement aux questions posées.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Vous êtes un fin connaisseur de l’assurance maladie, monsieur le député Jean-Pierre Door, vous êtes un fin connaisseur de notre système de protection et de sécurité sociales et, comme tel, vous auriez pu éviter de sombrer dans l’idéologie et la stigmatisation alors que cela vous ressemble si peu !
À vous entendre, monsieur le député, j’ai eu l’impression que, pour vous, faire des réformes, c’est renoncer : renoncer à la solidarité nationale, renoncer à l’assurance maladie pour tous, renoncer à une politique familiale ouvrant de nouveaux droits aux femmes qui travaillent, renoncer à une politique des retraites qui intègre la pénibilité pour définir les conditions de départ !
La réforme que nous présenterons avec le PLFSS dans quelques jours dans cet hémicycle, monsieur le député, s’appuie sur des réformes de structure fortes et sur la volonté de garantir une protection en matière de santé à l’ensemble de nos concitoyens.
Je m’en étonne, monsieur le député, mais alors que vous nous avez laissé une Sécurité sociale en déficit de 21 milliards, vous n’avez pas relevé que nous avons ramené ce dernier à 16 milliards et qu’il sera inférieur à 13 milliards l’année prochaine,…
…cela sans procéder à aucun déremboursement ni à l’instauration d’aucune nouvelle franchise ni d’aucun forfait à la charge de nos concitoyens.
Contrairement à vous, monsieur le député, nous voulons concilier la réalisation d’économie et le maintien de notre système de protection sociale sans pour autant peser sur les ménages modestes non plus que sur la protection de l’ensemble des Français. C’est pour cela que nous engageons la grande réforme du tiers payant, laquelle permettra de garantir l’accès de tous à des consultations de qualité sur notre territoire.
Monsieur le député, contrairement à vous, nous avons la volonté de concilier responsabilité et solidarité !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Ary Chalus, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés pour les communes d’outre-mer de mener à terme des projets dans les secteurs littoraux.
Ces opérations qui sont situées dans des secteurs sensibles nécessitent que toutes les mesures soient prises pour veiller à l’environnement dans le respect des sites et des paysages.
De très nombreuses lois sont intervenues ces dernières années pour contribuer au respect de ces objectifs. Personne ne remet en cause la légitimité de leurs dispositions. Il s’agit pour nous d’appliquer cette législation dans les meilleures conditions pour préserver notre environnement qui représente notre richesse essentielle.
Mais la multiplication de procédures nouvelles, si légitimes soient-elles, soulève pour les communes des problèmes incommensurables dès lors que celles-ci ne bénéficient pas de l’assistance qu’elles sont en droit d’attendre de la part des services de l’État. Si bonnes que soient les lois, elles sont difficiles à appliquer quand on ne dispose pas du mode d’emploi.
Dans un contexte de concurrence féroce et d’offre touristique internationale, les collectivités communales, noyées dans un maquis législatif, n’ont pas toujours le sentiment de trouver à leurs côtés les services de l’État ainsi que des partenaires capables de les aider et de les accompagner pour renforcer l’attractivité de leurs territoires.
Monsieur le ministre, développer, aménager et valoriser le littoral constitue un enjeu de développement et représente pour nos régions ultramarines en grande difficulté une réelle opportunité de croissance économique et de créations d’un millier d’emplois. Dans la seule Guadeloupe, les études qui ont été réalisées montrent que nous pouvons créer plus 500 emplois.
Quelles mesures entendez-vous prendre pour concrétiser les projets validés, financés par l’État et les collectivités publiques, conformes à la philosophie des schémas de mise en valeur de la mer et s’intégrant parfaitement aux schémas d’aménagement régionaux ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, dans les outre-mer, l’élaboration des schémas d’aménagement régional et des schémas de mise en valeur de la mer dépend des régions. Une nouvelle génération de ces documents importants arrive à maturité après de nombreux échanges et discussions avec les services de l’État, lesquels sont au service des collectivités afin de les aider dans l’encadrement et la réglementation applicables. La spécificité des communes littorales et de l’interface terre-mer implique un tel accompagnement.
Les plans locaux d’urbanisme – PLU – doivent eux-mêmes être compatibles avec les schémas d’aménagement régional.
La loi littoral, à laquelle vous faites référence, date de 1986 et demeure le cadre juridique permettant d’aménager, de valoriser et de développer le littoral. Son application dans les outre-mer dans le cadre des cinquante pas géométriques permet précisément de définir les usages des différents territoires.
Avec Philippe Martin, Victorin Lurel et Cécile Duflot nous travaillons à l’adaptation des réglementations. La loi littoral ne doit pas être modifiée mais il est vrai que ces dernières sont parfois complexes en fonction des différentes situations. Quoi qu’il en soit, la loi littoral ne bloque pas l’aménagement des littoraux, bien au contraire, puisqu’elle permet de clarifier les différentes « vocations » territoriales.
S’agissant des conflits d’usage, la stratégie nationale de la mer et du littoral que nous adopterons en 2014 nous permettra de décliner les différents documents bassin par bassin, façade maritime par façade maritime.
Je vous invite à vous inscrire dans cette logique et dans cette dynamique voules par le Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
La séance, suspendue à seize heures sept, est reprise à seize heures vingt.
L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi organique, adopté par le Sénat, portant actualisation, de la loi organique no 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie (nos 1301, 1381), et du projet de loi, adopté par le Sénat, portant diverses dispositions relatives aux outre-mer (nos 1302, 1382).
La Conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.
Monsieur le président, monsieur le président et monsieur le rapporteur de la commission des lois, mesdames et messieurs les députés, nous entamons ensemble une riche séquence de travail parlementaire qui va nous conduire, cet après-midi et durant cette soirée, à examiner successivement pas moins de trois textes concernant les outre-mer : tout d’abord le projet de loi modifiant la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, puis le projet de loi portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, enfin la proposition de loi dite « cinquante pas géométriques » qui porte sur la problématique foncière dans nos territoires.
Le premier de ces textes, le projet de loi modifiant la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie, est de toute première importance. J’étais jusqu’à ce lundi sur le territoire, afin de préparer le prochain Comité des signataires de l’Accord de Nouméa qui se tiendra à Paris dans quelques jours, le 11 octobre. Et je peux vous confirmer, à la lueur des échanges que j’ai eus avec l’ensemble des forces politiques calédoniennes, que cette modification – la dixième en un peu moins de quinze ans – est très attendue. Il s’agit en effet, par ce texte, de contribuer à un meilleur fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie, au moment où ce territoire va entrer dans une phase cruciale pour son avenir.
Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui a déjà été adopté à l’unanimité par le Sénat, après avoir été notablement enrichi et amélioré par les sénateurs, en commission et en séance. Et je tiens à saluer le travail remarquable de la commission des lois de l’Assemblée nationale, de son président, de son rapporteur et de ses administrateurs qui ont à leur tour…
C’est mérité ! Ils ont contribué à bonifier un texte d’apparence technique mais qui, en réalité, comporte des dispositions essentielles au bon fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie.
Je veux également profiter de ce propos liminaire pour saluer l’engagement et l’implication des députés qui, comme Dominique Bussereau notamment, ont démontré leur intérêt pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie et ont compris avec nous que ce territoire ne doit en aucun cas constituer un enjeu partisan au niveau national. La mission parlementaire, composée du président Jean-Jacques Urvoas, de votre rapporteur René Dosière et de Dominique Bussereau, qui s’est rendue sur le territoire au mois d’août, rendra ce 9 octobre son rapport que le Gouvernement attend de lire avec impatience. Je veux enfin saluer le travail considérable de l’ensemble des parlementaires calédoniens qui, au Sénat et maintenant à l’Assemblée nationale, grâce leur expérience et leur regard d’élus de terrain, ont amélioré le texte du Gouvernement, et ce, dès le stade de la commission.
Ces quelques mots ont vocation à souligner, ici comme je l’ai fait au Sénat, le remarquable esprit qui a présidé à cet exercice de modification de la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie. Cet esprit à un nom : c’est l’esprit de l’Accord de Nouméa. Signé il y a quinze ans, il suivait lui-même les Accords de Matignon signés, eux, il y a vingt-cinq ans. Cet Accord de Nouméa nous engage tous car, comme le souligne René Dosière dans son rapport, il a valeur constitutionnelle. Mais il vit et nous devons le faire vivre quotidiennement sur le terrain. Ceci implique de faire évoluer le texte fondamental au fur et à mesure que les questions se posent et que des problèmes pratiques doivent être résolus quant à la gouvernance de ce territoire.
Pour cette modification de la loi organique, comme pour les neuf autres qui l’ont précédée, nous nous sommes inscrits dans le strict respect de l’esprit et de la lettre de l’Accord de Nouméa. Nous avons poursuivi le chemin de la réconciliation et de la concorde tracé par les signataires historiques, devenant à notre tour les héritiers de la poignée de main entre Jacques Lafleur et à Jean-Marie Tjibaou, auxquels je me dois ici de rendre hommage, en ayant aussi une pensée pour les Premiers ministres, Michel Rocard et Lionel Jospin.
C’est lors du dernier Comité des signataires, le 6 décembre dernier à Paris, que le Gouvernement a pu entendre les demandes des partenaires calédoniens de l’État d’une modification de la loi organique. Il fallait en effet prendre en compte les conséquences pratiques des derniers transferts de compétences effectués en faveur de la Nouvelle-Calédonie. Il fallait préciser davantage le périmètre de certains domaines transférés et des instruments de gouvernance plus modernes devaient être confiés aux institutions du territoire pour leur permettre de mettre en oeuvre ces compétences. Nous avons entendu ces demandes et nous avons souhaité faire diligence pour y donner une suite favorable, conformément à notre volonté de soutenir et d’accompagner la Nouvelle-Calédonie dans ses projets.
C’est tout le sens de ce texte qui améliore le fonctionnement des institutions, clarifie les compétences des collectivités et de l’État, modernise les dispositions budgétaires, financières et comptables. Comme je l’ai dit au Sénat, notre ambition est de permettre à la Nouvelle-Calédonie de relever les défis politiques, économiques et sociaux qu’elle aura à affronter dans les années à venir en améliorant, d’une part, l’exercice par le gouvernement local de ses compétences, d’autre part, le fonctionnement même des institutions.
Ainsi, la nouvelle mouture de la loi organique doit permettre notamment à la Nouvelle-Calédonie de créer, dans les domaines relevant de sa compétence, des autorités administratives indépendantes dotées de pouvoirs allant au-delà des fonctions de médiation, de recommandation et d’évaluation. Ces autorités administratives indépendantes pourront réguler mais aussi enquêter, sanctionner et régler des différends.
Dans le domaine du droit de la concurrence, l’autorité administrative indépendante que la Nouvelle-Calédonie pourra ainsi créer sera une arme pour assurer une régulation des marchés afin de favoriser la concurrence et, indirectement, de lutter contre la vie chère. Je tiens à saluer le travail de la commission des lois qui a amélioré notre texte pour mieux garantir l’impartialité et l’indépendance de l’autorité. Et je tiens à souligner à ce sujet que désormais la Nouvelle-Calédonie est, si je puis dire, « équipée » pour faire vivre la future autorité locale de la concurrence : hier, le Conseil constitutionnel a validé l’ensemble de la loi du pays relative à la concurrence qui lui était déférée. La Nouvelle-Calédonie a donc désormais un droit à appliquer. Il lui reste à créer l’autorité administrative indépendante qui le fera respecter.
Autre demande des partenaires calédoniens de l’État : la dévolution d’un pouvoir de police administrative au gouvernement local, afin d’exercer pleinement les compétences récemment transférées ou qui vont bientôt l’être comme la sécurité maritime, la circulation aérienne ou la sécurité civile.
Je citerai aussi l’ajout de la compétence environnementale au Conseil économique et social de la Nouvelle-Calédonie, les dispositions relatives au statut de l’élu, la simplification de certaines règles de marchés publics, ou encore la possibilité pour la Nouvelle-Calédonie, les provinces et leurs établissements publics de créer des sociétés publiques locales. Ces évolutions sont positives pour le territoire, les institutions, les élus et pour les citoyens. Elles ont été, je le répète, utilement enrichies par le travail parlementaire et elles peuvent encore l’être dans notre débat.
Le projet de loi organique que nous vous présentons ne dénature pas le texte initial. Il n’est pas non plus un texte de circonstance qui évolue au gré des envies des uns et des autres. Il est le fruit d’un consensus. En l’adoptant – à l’unanimité je l’espère, comme cela a été le cas en commission – vous permettrez en tout cas à la Nouvelle-Calédonie d’être mieux armée pour relever les défis nombreux qui se présentent à elle.
J’ai eu à le redire sur place aux uns et aux autres : l’État est dans une approche constante, ouverte et constructive sur ce sujet comme sur la suite du processus qu’il faudra conduire à l’issue des élections de 2014.
Quelques mots sur le deuxième texte que nous examinerons dans la foulée qui porte sur diverses dispositions relatives aux outre-mer et concerne différents territoires en apportant des réponses spécifiques à des problématiques elles-mêmes souvent spécifiques. Nous les discuterons en détail.
Nous les discuterons en détail.
Il a été, lui aussi, remarquablement enrichi par la commission, singulièrement en ce qui concerne la Guyane. Des propositions fortes et adaptées aux problématiques de pêche illégale et d’orpaillage clandestin y figurent désormais. À cet égard, je remercie Mme la députée Chantal Berthelot pour son apport.
Certes, les autres dispositions peuvent avoir l’apparence de mesures techniques ou symboliques, mais ce gouvernement a pour priorités le retour de l’État dans les outre-mer et de placer les outre-mer au coeur de la République. Le législateur est un allié naturel dans l’accomplissement de ce grand dessein mobilisateur. Je vous remercie.
Applaudissements sur tous les bancs.
La parole est à M. René Dosière, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, la Nouvelle-Calédonie – « Terre de parole, terre de partage », selon la devise identitaire qu’elle s’est donnée – constitue une particularité au sein des institutions françaises. Dotée d’une législation dérogatoire issue de l’Accord de Nouméa, signé le 5 mai 1988, et rendue applicable par une révision de notre Constitution, la Nouvelle-Calédonie dispose d’une autonomie inégalée. Son Congrès dispose en effet, dans certains domaines importants, d’un pouvoir législatif.
Cette autonomie est encadrée par la loi organique du 19 mars 1999, que j’ai eu l’honneur de rapporter devant notre Assemblée. Pour autant, avec le temps, il s’avère nécessaire de modifier, de compléter, d’actualiser ce texte, tout en restant fidèle à la règle fondamentale qui a présidé à son élaboration : le consensus local entre les forces indépendantistes et les forces anti-indépendantistes.
Nous avons déjà modifié ce texte à neuf reprises. Cette actualisation sera donc la dixième. Elle résulte d’une demande du Comité des signataires – sous-entendu : des signataires de l’Accord de Nouméa. Cette demande a été validée, à l’unanimité, par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Elle a été examinée attentivement par la commission des lois, qui a – pour la première fois depuis dix ans – repris le chemin de la Nouvelle-Calédonie, à l’initiative de son président, manifestant ainsi l’intérêt particulier que la gauche accorde à l’évolution de ce pays.
En l’occurrence, ainsi que l’a rappelé M. le ministre, il ne s’agit pas de bouleverser la loi organique, mais tout simplement de l’actualiser. Les principales dispositions de ce projet de loi sont les suivantes : création d’autorités administratives indépendantes, en particulier d’une autorité de la concurrence ; clarification des compétences entre les autorités calédoniennes dans les domaines minier, routier, et en matière de police administrative ; actualisation du fonctionnement des institutions par le renforcement de la transparence et de la sécurité juridique ainsi que par l’amélioration du statut des élus ; renforcement des moyens d’intervention économique en Nouvelle-Calédonie, notamment grâce à la possibilité de créer des sociétés publiques locales ; enfin, clarification des règles budgétaires et comptables concernant les finances locales. Sur ce dernier point, il s’agit en particulier d’accroître la transparence de l’utilisation des subventions accordées aux organismes et associations.
Au cours des travaux de la commission, nous avons légèrement modifié ce texte. Nous avons ainsi renforcé les conditions d’indépendance des autorités administratives indépendantes, ainsi que M. le ministre l’a souligné. En ce qui concerne le statut des élus, nous avons limité la progression des rémunérations qui figurait dans le texte initial et que le Sénat avait validée, sans doute par inadvertance. Enfin, nous avons appliqué aux collectivités de Nouvelle-Calédonie un texte sur la transparence des avantages en nature qui sont accordés aux élus.
Je dois, en évoquant le travail qui a été réalisé en commission, de souligner le rôle positif et important joué par le député de la deuxième circonscription de Nouvelle-Calédonie, notre collègue Philippe Gomes.
En revanche, de nombreux éléments ont été ajoutés au projet de loi ordinaire portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, concernant les diverses collectivités de l’outre-mer. Ces éléments ont été ajoutés en commission, peut-être d’autres le seront-ils au cours des débats en séance publique. Il est vrai que ce texte ne porte pas uniquement sur la Nouvelle-Calédoniemais sur l’ensemble des collectivités d’outre-mer.
Pour éclairer le débat, comme je l’ai fait en commission, je vous signale que mes observations seront guidées par quatre préoccupations. Premièrement, s’en tenir aux demandes du Comité des signataires et donc refuser toute extension à des aspects nouveaux qui n’ont pas été examinés par lui.
En second lieu, prendre en compte l’avis unanime du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, à l’exclusion de tout autre avis local, fût-ce celui d’une commission de ce Congrès. En troisième lieu, respecter le travail d’amélioration significatif réalisé par le Sénat, notamment à l’initiative de la rapporteure de sa commission des lois, notre collègue Catherine Tasca, qui connaît bien la Nouvelle-Calédonie, puisqu’elle était présidente de notre commission des lois au moment de l’Accord de Nouméa. D’autres modifications sénatoriales sont dues aux initiatives de notre collègue calédonien Pierre Frogier.
Enfin, compte tenu du contexte politique local, qui se complexifie de plus en plus à l’approche de la campagne électorale – qui va bientôt s’ouvrir, si elle n’a pas déjà, de fait, commencé –, éviter toute disposition nouvelle susceptible d’interférer avec les thèmes de cette campagne électorale.
À ces conditions, je pense que ce texte pourra recevoir l’accord unanime de notre assemblée, comme il a obtenu celui du Sénat. Ce vote unanime constituera une marque de confiance dans les Calédoniens et dans leur capacité à bâtir, par-delà les querelles politiciennes et personnelles, le destin commun qui permettra le développement de la Calédonie nouvelle.
Aussi, à la veille de cette importante campagne électorale, me revient cette pensée de Charles Péguy, que je vous laisse examiner : « Le triomphe des démagogies est passager, mais les ruines sont éternelles. »
Applaudissements sur tous les bancs.
La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, c’est la première fois, au cours de cette législature, que nous sommes saisis d’un texte qui traite de la réalité complexe de la Nouvelle-Calédonie. Comme M. le ministre et M. le rapporteur l’ont rappelé, les débats en commission des lois ont montré que ce texte recueillera – c’est en tout cas ce que nous souhaitons – l’assentiment de tous. Dès lors, cette brève intervention portera moins sur son contenu, aussi utile soit-il, que sur son objet.
Il est prévisible que nous aurons à examiner, au cours de cette législature, des évolutions nécessairement importantes pour ce territoire. Peut-être devrons-nous nous prononcer sur ce que le Premier ministre a appelé, lors de son discours à Nouméa, le 26 juillet dernier, « une solution consensuelle réunissant l’ensemble des forces calédoniennes » qui pourrait « entraîner une révision de la Constitution », car cette solution conduirait à poser au corps électoral une question différente de celle qui figure dans l’Accord de Nouméa et dans la loi organique. Vous avez d’ailleurs, monsieur le ministre, rappelé cette position lors de votre déplacement en Nouvelle-Calédonie qui s’est terminé hier.
Comme les uns et les autres l’ont déjà dit, vingt-cinq ans ont passé depuis les accords de Matignon, et quinze ans depuis l’Accord de Nouméa. Quelques mois nous séparent des prochaines élections qui mandateront le Congrès de Nouvelle-Calédonie pour organiser, avant 2018, la consultation prévue par l’Accord du 5 mai 2008. Il est donc logique que la commission des lois décide d’accorder une attention soutenue à l’avenir de ce territoire.
Si ce dernier a pris en main son destin, afin de définir un avenir partagé entre les différentes communautés, ce fut grâce à des décisions juridiques audacieuses. La Nouvelle-Calédonie est ainsi une collectivité d’outre-mer à statut constitutionnel particulier. Un titre de la Constitution, le treizième, lui est exclusivement consacré. Après avoir été abrogé en 1995, ce titre a été ressuscité trois ans plus tard par la loi constitutionnelle du 20 juillet 1998. Il comporte depuis lors deux articles tout à fait différents. Preuve de sa dimension dynamique, il s’intitule « Dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie ». Son contenu est exceptionnel : la révision n’a pas donné dans la demi-mesure !
Ainsi, la République n’a pas hésité à questionner ses fondements. La définition de la citoyenneté connaît en effet, sur le territoire, une définition restrictive. On peut ainsi considérer qu’il s’agit moins de dispositions constitutionnelles particulières que d’une autre Constitution, celle de la Nouvelle-Calédonie que le texte de 1958, bien accueillant, abrite dans son titre XIII. Aussi est-ce utile de bien comprendre la spécificité des mécanismes qui régissent les institutions calédoniennes. C’est l’un des objets de la mission que j’ai eu l’honneur de conduire au début du mois de septembre, avec René Dosière et de Dominique Bussereau, qui sont sans doutes les membres de la commission des lois qui connaissent le mieux la réalité complexe de la Nouvelle-Calédonie. D’ailleurs, nous présenterons très rapidement à l’Assemblée nationale nos observations.
Je vous livrerai d’ores et déjà quelques convictions personnelles. J’espère le faire avec la modestie qui convient à une histoire aussi lourde, et à des mémoires où se côtoient des ombres et des lumières. J’espère aussi le faire avec la distance que permet l’observation froide d’une réalité qui connaît le prix de l’unité et de la sagesse.
Les prochains défis de la Nouvelle-Calédonie seront économiques et sociaux. Hier, ils étaient avant tout institutionnels. La réponse fut la création, par les accords de Matignon et d’Oudinot, d’un axe horizontal suivant lequel le territoire fut structuré en trois provinces permettant de confier à chacun des espaces de contrôles et de gestion. Ces collectivités territoriales sont administrées par des assemblées élues au scrutin proportionnel. Les principes de collégialité et de proportionnalité organisent la composition et le fonctionnement du Gouvernement comme du Congrès de la Nouvelle-Calédonie.
Puis les défis furent principalement politiques. L’accord de Matignon dessina alors un axe vertical suivant lequel la métropole transférait la plupart des compétences de gestion, ne prévoyant de conserver, après trois étapes de cinq années, que les compétences de souveraineté. Selon un processus graduel et irréversible, les institutions du territoire élargissent ainsi leur pouvoir législatif autonome, puisque le législateur national ne peut plus intervenir dans les domaines de compétence reconnus au législateur calédonien.
Il y a beaucoup à dire sur le rythme auquel ces transferts ont été effectués. Je regrette notamment que l’Assemblée nationale ne s’y soit pas intéressée de plus près. Mais si la situation n’est pas aussi idyllique que certains le disent, ce n’est pas, à mes yeux, dans ce domaine que s’accumulent les principaux nuages. Ces nuages jettent une ombre sur le domaine économique. La Nouvelle-Calédonie a connu ces dernières années une prospérité économique tout à fait exceptionnelle. Ses taux de croissance ont été soutenus, l’inflation a été contrôlée, la construction des usines et l’exploitation des ressources minières ont permis de procurer des emplois et des revenus à bien des familles.
Mais cette prospérité est fragile. Les prix élevés sont symptomatiques des dysfonctionnements d’une économie où subsistent des déséquilibres importants. Pour prendre un exemple, le niveau des inégalités est globalement très élevé. Or il est rare d’entendre des propositions pour résorber ces difficultés à venir – c’est en tout cas le sentiment que j’ai eu pendant les huit jours que nous avons passé en Nouvelle-Calédonie. Pour prendre un autre exemple, dans une conjoncture de baisse des prix du nickel et de l’impôt sur les sociétés minières, le territoire a besoin de nouvelles recettes fiscales.
Il faut à ce titre saluer l’engagement personnel du Haut-commissaire, qui a su permettre la signature du protocole d’accord sur la vie chère, signé le 27 mai 2013 après douze jours d’une grève dite « générale ». Le fait que le Haut-commissariat soit devenu le centre de la négociation est d’ailleurs en lui-même révélateur. En effet, cela ne marque pas tant le retour de l’État que l’effacement du Congrès et du Gouvernement.
Il faut en effet rappeler que l’État n’a plus de compétence économique ou sociale en Nouvelle-Calédonie. Curieusement, c’est pourtant l’État qui a su devenir à la fois extérieur et central sur cette question.
Pour autant, aussi précieux qu’ait été ce protocole, il n’engage aucune réforme structurelle dans les domaines économiques et sociaux. L’urgence est pourtant là.
Oui, l’avenir institutionnel passionne ce que Bachelard aurait appelé « les forces imaginantes ». Mais il est frappant de constater que cette passion immodérée de la spéculation institutionnelle inquiète, alors que sa légitime ambition est de rassurer. Cela paraît d’ailleurs inévitable car il n’existe plus de personnalités fédératrices, et les deux grands partenaires du passé ont laissé la place à des mosaïques politiques assez morcelées. Les élections provinciales vont peut-être éclaircir ce paysage – il faut le souhaiter.
Mais elles n’effaceront pas une autre évidence : parce qu’il est neutre, l’État devra être plus qu’un médiateur. Parce qu’il est garant d’un processus, l’État ne devra pas s’interdire de prendre des initiatives. Parce qu’il est cohérent, il appartiendra à l’État de fédérer le cycle qui s’ouvre.
Applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, monsieur le ministre des outre-mer, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, c’est un honneur pour moi de m’exprimer du perchoir aujourd’hui, car nous ne modifions pas la loi organique concernant la Nouvelle-Calédonie toutes les cinq minutes – c’est la deuxième fois en quinze ans que cette opportunité nous est offerte – mais aussi, bien évidemment, parce que c’est l’occasion pour le député de ce territoire lointain de la France dans le Pacifique de s’exprimer sur son pays, son histoire, et son avenir.
Je voudrais au préalable remercier le président et le rapporteur de la commission des lois, ainsi que notre collègue M. Bussereau de leur visite dans notre territoire. Il est vrai que cela fait bientôt plus de dix ans que la commission des lois n’avait pas foulé cette terre lointaine. Je crois que cela n’est pas une bonne chose pour notre pays. Il est indispensable que le lien avec la représentation nationale puisse être maintenu d’une manière plus proche, au-delà des députés des deux circonscriptions. À ce titre, j’espère que ce déplacement en augure d’autres, et que les échanges qui en résultent nourriront notre réflexion commune sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie.
Je remercie également le ministre des outre-mer, qui ne connaissait pas du tout la Nouvelle-Calédonie avant d’exercer ses responsabilités…
…et qui, depuis lors, a appris à la connaître. Je l’en remercie pour cette attention particulière portée à notre pays depuis sa prise de responsabilité.
Sourires.
Il est souhaitable qu’il apprenne vite car, comme le disait le général de Gaulle : « vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples. » Il ne faut pas aller vers la Nouvelle-Calédonie compliquée avec des idées simples.
Cette loi s’inscrit dans le prolongement d’une histoire, même si ses dispositions sont assez techniques – j’y reviendrai au terme de mon propos. La Nouvelle-Calédonie a connu, comme chacun sait, une histoire heurtée, qui s’est soldée par une période de souffrance : la souffrance d’un peuple qui n’arrivait plus à se comprendre, à s’entendre, et qui aurait pu au bout du compte ne plus arriver à vivre ensemble.
Ce sont d’abord les hommes qui ont su, lorsque notre pays était au bord de l’abîme, transcender leur histoire propre pour tenter d’écrire une histoire commune. Je pense bien sûr à Michel Rocard, Premier ministre à l’époque, à Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, aujourd’hui disparus – l’un d’entre eux a perdu sa vie parce qu’il a signé cet accord. C’est grâce à eux que la Nouvelle-Calédonie, au terme d’une quasi-guerre civile, a réussi à retrouver le chemin du vivre ensemble.
Ces accords de Matignon ont été des accords fondateurs. D’abord parce qu’ils sont sortis de la logique du fait majoritaire. Nous étions jusqu’alors dans un régime démocratique classique où les non indépendantistes, étant majoritaires à l’échelle du pays, gouvernaient l’ensemble du pays.
Les accords de Matignon entérinent également le principe du rééquilibrage : oui, il faut donner plus à ceux qui ont moins. C’est ce qui a été fait en matière financière, en matière d’infrastructure, en matière de responsabilité au sein des administrations et des entreprises, au profit de l’ensemble des Calédoniens, mais aussi de la population Kanak.
C’est sur la base de ces deux principes que les accords de Matignon ont été fondés. Ils ont permis entre 1988 et 1998 de retisser les fils du dialogue entre les communautés, comme l’avait dit François Mitterrand, le Président de la République de l’époque.
Mais, une échéance était prévue en 1998 par les accords de Matignon : il s’agissait d’un référendum. Nous devions nous prononcer pour ou contre l’indépendance du pays. Une fois de plus, les hommes ont été au rendez-vous de l’histoire, puisque sous la houlette du Premier ministre Michel Rocard, ou plutôt Lionel Jospin – j’ai failli dire Michel Jospin, une heureuse synthèse !…
…avec, au nom des indépendantistes, toujours Jacques Lafleur, et Rock Wamytan, au nom du FLNKS, un nouvel accord a été signé : l’accord de Nouméa. Celui-ci prévoyait un dispositif très particulier – le président de la commission des lois l’a rappelé – de décolonisation et d’émancipation au sein de la République française.
Cela a conduit à la révision constitutionnelle que vous connaissez, permettant à la Nouvelle-Calédonie de disposer à elle seule d’un titre au sein de la Constitution de la République – ce qui n’est pas une mince affaire.
Cet accord de Nouméa a prévu des dispositions très particulières. La citoyenneté, d’abord : nous avons une citoyenneté calédonienne en sus de la citoyenneté européenne et française. La capacité pour notre congrès d’adopter des lois, à l’instar du Parlement de la République. Des transferts de compétences progressifs jusqu’au terme de l’accord, c’est-à-dire dans un an maintenant. À l’orée des élections provinciales de 2014 ne resteront dans les mains de l’État que les compétences régaliennes. La possibilité également d’adopter des signes identitaires.
La possibilité aussi de tester une notion extrêmement intéressante dans notre pays : la souveraineté partagée. Par exemple, dans le domaine des relations internationales, le pouvoir est partagé entre la France et la Nouvelle-Calédonie, notamment dans le cadre régional.
Nous arrivons aujourd’hui au bout de cet exercice. Nous avons une échéance : les élections provinciales de 2014. À partir de ce moment-là, la Nouvelle-Calédonie devra une nouvelle fois faire face à son avenir. Un référendum est prévu, entre 2014 et 2018 : les Calédoniens devront décider s’ils veulent l’indépendance du pays, ou s’ils souhaitent poursuivre leur émancipation au sein de la République française.
Ce référendum peut être organisé à trois reprises ; il aura obligatoirement lieu en 2018, s’il n’a pas été décidé par le Congrès à la majorité des trois cinquièmes.
La question qui se pose aujourd’hui – comme l’a indiqué le président de la commission des lois –, c’est celle de l’attention particulière des forces politiques locales sur cette sortie de l’accord, et non pas sur des sujets qui paraissent de prime abord plus importants, eu égard notamment aux difficultés concrètes que rencontre la population dans le domaine économique et social.
La raison est toute simple : la capacité pour un pays et sa population de continuer à vivre ensemble dépend aussi de sa capacité à trouver des équilibres politiques qui permettent cette vie ensemble. Toutes les perspectives économiques et sociales de réduction des inégalités, d’amélioration des conditions de vie sont possibles dès lors qu’on conserve la paix dans un pays. Nous sommes particulièrement sensibles à ce sujet parce qu’on a vécu ce qu’on a vécu, parce qu’il y a eu du sang et des morts.
On se dit qu’avant tout, il y a la paix. Comment faire pour la conserver ? Comment faire pour franchir cette étape de 2014-2018 sans que cette paix ne se brise sur les idéologies des uns ou des autres ? C’est peut-être la raison pour laquelle vous avez été frappés par cette attention particulière des forces politiques locales sur le sujet.
Ce que nous souhaitons au nom de « Calédonie ensemble », la formation politique à laquelle nous appartenons en Nouvelle-Calédonie avec ma collègue Sonia Lagarde, c’est de pouvoir engager un dialogue nourri, constructif, avec l’ensemble des forces politiques. Cette solution de sortie ne sera pas celle des uns contre les autres, mais une solution commune que nous devons apprendre à construire.
Je crois qu’il y a un chemin possible, même s’il est escarpé. Il demandera de la part des uns et des autres de la modestie, de l’humilité, et une part de compromis. Sans ce compromis, aucune solution commune n’est envisageable. En ce qui nous concerne, nous sommes tout à fait favorables à développer cet esprit de dialogue et de compromis pour nous permettre de sortir par le haut de l’échéance qui nous attend.
En ce qui concerne plus particulièrement cette loi, j’insisterai sur un seuil point, car il est fondamental : il s’agit de la possibilité pour la Nouvelle-Calédonie de créer des autorités administratives indépendantes. Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur, il s’agit certes d’un point entériné dans le dernier comité des signataires, mais il a été porté par nous, Calédoniens, ensemble, à bout de bras, contre un certain nombre, afin qu’il aboutisse.
Oui, la loi évoquée, dite loi antitrust est une loi déposée par notre groupe, au congrès de la Nouvelle-Calédonie, et non par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. C’est cette loi qui a été adoptée, à la majorité absolue du congrès. C’est cette loi qui a été validée récemment par le Conseil constitutionnel. C’est une loi qui permettra que la concurrence puisse à nouveau s’exercer en Nouvelle-Calédonie dans un certain nombre de secteurs qui sont aujourd’hui monopolistiques ou duopolistiques, ce qui contribue fortement à la vie chère dans notre pays.
Bien évidemment, cette loi n’a de sens que si un gendarme peut la faire respecter. Ce gendarme, c’est l’autorité de la concurrence : une autorité indépendante, disposant d’un pouvoir d’enquête, et de sanctions, et à l’abri des influences politiques ou économiques. C’est bien sûr indispensable lorsque l’on a vocation à faire respecter un certain ordre économique dans notre pays.
Oui, le Gouvernement de la République a proposé, dans le cadre de cette loi organique, la possibilité de créer des autorités administratives indépendantes. C’est une bonne chose. Cette loi antitrust donnera, je l’espère, sa pleine mesure dans les années qui viennent, de façon à ce que la cherté de vie évoquée par un certain nombre d’intervenants soit demain un petit peu plus acceptable par les populations du pays qu’elle ne l’est aujourd’hui. Je vous remercie.
Applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, en tant que jeune député, intervenir ici à la tribune de l’Assemblée nationale sur la Nouvelle-Calédonie renvoie à mes premiers engagements politiques. Comment ne pas oublier d’où l’on vient, d’où vient la France, après le drame de la grotte d’Ouvéa ? Une France qui était tentée par une guerre coloniale, et qui, bien au contraire, a su trouver la voie de la paix, de la liberté, et – on le souhaite notamment pour le Nouvelle-Calédonie –, d’une prospérité retrouvée. Il ne faut jamais l’oublier, dans l’histoire de la France, dans celle de la Nouvelle-Calédonie, et dans nos travaux.
Aujourd’hui, la Nouvelle-Calédonie est un territoire en pleine expansion économique, grâce notamment aux ressources minières et au tourisme, ce qui lui permet de concurrencer son voisin, la Nouvelle-Zélande.
Pourtant, la Nouvelle-Calédonie doit faire face à de fortes inégalités sociales et le débat sur la « vie chère » s’y impose de plus en plus.
C’est bien là tout le paradoxe de nos territoires d’outre-mer, des territoires dynamiques, avec une richesse de vie et des spécificités locales qui sont des atouts majeurs pour diversifier leurs économies, créer des emplois stables et de qualité, et qui doivent trouver leur voie.
Ces territoires doivent à terme constituer de véritables pôles d’excellence dans les domaines de la biodiversité et des énergies renouvelables, mais aussi dans la perspective d’un changement de modèle de développement pour sortir d’un système linéaire, mortifère et comportant de trop nombreux relents coloniaux et rentrer dans une économie plus circulaire, recentrée sur la préservation des ressources, riches et abondantes, de ces territoires.
Le tourisme est aussi une réelle opportunité s’il s’appuie sur un véritable développement local. La loi relative à la régulation économique outre-mer allait dans le bon sens sur ces dispositions.
Cependant nos territoires d’outre mer doivent bénéficier de marge de manoeuvres plus importantes pour continuer leur développement.
La Nouvelle-Calédonie est aujourd’hui au coeur de nos discussions. Ainsi cette loi vise à dépoussiérer le texte organique, dans les limites des accords de Nouméa, qui ont valeur constitutionnelle.
La mesure principale est d’offrir la possibilité à la Nouvelle-Calédonie de créer des autorités administratives indépendantes dans le champ de ses compétences. Il suffirait qu’elle adopte une loi du pays. Dans un contexte de vie chère, il s’agirait aussi de permettre à la Nouvelle-Calédonie de créer une autorité locale de la concurrence. Mon collègue Paul Molac reviendra plus précisément sur tous ces points.
Le Gouvernement agit, encore une fois, toujours selon le même objectif : celui d’aérer nos territoires. Il faut casser les positions dominantes hégémoniques déjà présentes et permettre une régulation et un contrôle des marchés plus efficace. Il est capital d’assurer la concurrence en outre-mer pour revenir à des prix raisonnables.
Je vous remercie ! De même, parler de contrôle, c’est aussi s’assurer que chaque opérateur économique n’exerce pas son activité de façon anarchique, nuisible pour l’environnement, pour le pacte social et pour la santé ou en dehors de toute règle morale. Je pense plus particulièrement à l’orpaillage illégal, véritable fléau, notamment en Guyane. Mes collègues guyanais Chantal Berthelot et Gabriel Serville peuvent en témoigner. Je sais qu’ils luttent contre ce véritable pillage des ressources dans leurs territoires.
Un des amendements que nous défendrons à l’article 12 consistera, notamment, à prévoir techniquement, pour le corps de pompe et le concasseur utilisés pour cet orpaillage, que puisse être précisée par décret une liste des moyens de preuves possibles afin de cadrer le processus de vérification et d’éviter, ainsi, toute dérive qui entraîne, aujourd’hui, cette illégalité dans les territoires, en Guyane notamment.
Ces moyens de preuves devraient attester de la réalisation de l’activité minière dans un cadre légal. Il est, de plus, et c’est évident, urgent de lever une ambiguïté en précisant que l’interdiction de la détention de mercure est absolue et qu’aucun délai, ne serait-ce que d’un mois, ne peut être prévu. On ne peut plus laisser le champ libre aux destructeurs de nos territoires, en Guyane en particulier, donc à ces sociétés qui, dans le cadre de leurs activités minières, fournissent des études d’impact sur l’environnement falsifiées, comme nous l’avons constaté cet été avec la société Rexma.
On ne doit jamais oublier, monsieur le ministre, et vous le savez peut-être mieux que nous, que nombre de prédateurs tournent autour des ressources de ces territoires d’outre-mer. L’encadrement doit être ferme à tous les niveaux et dans les moindres détails. Cette transition doit se dérouler dans un climat social apaisé, mais qui ne pourra l’être que lorsque chaque population et chaque territoire se sentira enfin maître de son avenir.
Vous l’aurez compris, les écologistes attachent une attention particulière à nos territoires d’outre-mer. Il y va de la capacité de ces derniers à agir, de leur capacité à se défendre, à se développer et à conserver leur spécificité. Nous avons conscience de tout cela et nous sommes résolus à donner aux territoires d’outre-mer les moyens d’y parvenir.
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, RRDP et SRC.
Monsieur le président, mesdames, messieurs, inlassablement, la représentation nationale a l’impérieux devoir de poursuivre l’application de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, signé par l’ensemble des partenaires lors de la visite du Premier ministre Lionel Jospin. Cet accord, lequel détermine pour une période transitoire de quinze à vingt ans, l’organisation institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie, les modalités de son émancipation et dessine les contours de la future société calédonienne, a été largement approuvé par la population de l’archipel lors de la consultation du 8 novembre 1998 avec, rappelons-le, 72 % de votes positifs.
Les accords de Nouméa résultent de la conviction des protagonistes de l’époque de la nécessité de repousser la consultation référendaire sur l’autodétermination prévue dix ans plus tôt par les accords de Matignon, résultant de la déclaration signée à Matignon par le Premier ministre Michel Rocard, vous l’avez tous rappelé, et de l’accord Oudinot. Ces accords avaient ramené la paix civile sur l’archipel, paix civile qu’il faut à tout prix sauvegarder, comme notre collègue Philippe Gomes vient de le rappeler.
La mise en oeuvre de l’accord de Nouméa avait déjà fait l’objet de la loi constitutionnelle de juillet 1998, qui a créé l’actuel titre XIII de la Constitution, et de la loi organique subséquente du 19 mars 1999, modifiée dix ans plus tard, et qu’il convient aujourd’hui d’actualiser. Rappelons que le statut de la Nouvelle-Calédonie, vous l’avez également souligné, est spécifique.
Il est, en effet, traité à part dans la Constitution et il déroge à certains principes à valeur constitutionnelle de droit commun : caractère irréversible des transferts de compétences, compétence du congrès pour prendre des « lois du pays » de nature législative, citoyenneté propre se fondant sur un corps électoral restreint et figé, restrictions d’accès à l’emploi local, capacité d’accéder au statut civil coutumier pour les personnes qui en ont perdu le bénéfice.
L’organisation des transferts de compétences par la loi organique de 1999 s’effectue par étapes intermédiaires correspondant aux renouvellements du congrès de Nouvelle-Calédonie de 2004 et de 2009. La mise en oeuvre des nouveaux transferts intervenue avant 2014, fin de la période transitoire, portait sur des compétences normatives lourdes, notamment le droit civil et l’enseignement, et faisait l’objet de la loi organique précédente.
Aujourd’hui, il s’agit d’actualiser, dans le respect des propositions unanimes du comité des signataires de l’accord de Nouméa, nous l’avons tous réaffirmé, les dispositions de la loi organique dans la perspective des élections provinciales de mars prochain après lesquelles le congrès aura la possibilité de lancer la phase finale de l’accord de Nouméa : demander un référendum sur l’autodétermination et poser la question de l’accession de la Nouvelle-Calédonie à une souveraineté pleine et entière entraînant, alors, le transfert de compétences régaliennes restées dans le giron de l’État central.
Ainsi, les projets de loi qui nous sont proposés se limitent à améliorer et à perfectionner le bon Gouvernement de l’archipel et ne concernent que de manière subsidiaire les compétences qui lui sont dévolues selon le schéma que je viens de rappeler et dont notre rapporteur est non seulement un excellent connaisseur, mais un fin architecte puisqu’il a grandement contribué à son parachèvement. Je veux ici rendre hommage à l’excellence de son travail et à la qualité d’écoute des forces politiques en présence qu’il a toujours manifestée.
Il ne s’agit pas, par ces textes, d’organiser de nouveaux transferts de compétences et d’en déterminer les modalités. Nous accompagnons ici la fin du processus de l’accord de Nouméa. C’est pourquoi, législateurs nationaux, nous devons faire oeuvre de prudence et de mesure tant la situation politique locale est complexe et mouvante. Comme nous l’avons entendu tout à l’heure, cette fragilité a d’ailleurs suscité les inquiétudes légitimes des membres de la délégation de la commission des lois qui se sont rendus sur le territoire en septembre dernier.
Il s’agit donc de permettre au Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de créer des autorités administratives indépendantes sur le modèle de celles qui existent déjà à l’échelon national, autorités qui seront composées de membres indépendants dotés d’un régime d’incompatibilité sévère et dont les comptes seront soumis au contrôle de la chambre territoriale des comptes. Nous n’en attendions pas moins de votre part, monsieur le rapporteur.
Par ailleurs, le président du Gouvernement néo-calédonien disposera d’un pouvoir de police administrative générale et spéciale, pouvoir indispensable pour l’exercice plein et entier des compétences dévolues, le président de l’assemblée de province se voyant aussi doté d’un pouvoir de police spéciale lié à la gestion du domaine routier domanial, ainsi que de la faculté de déléguer son pouvoir en matière de passation de marchés publics. Quant à la clarification des compétences exercées par la Nouvelle-Calédonie, la notion d’éléments de « terres rares » est introduite, le droit positif ne reconnaissant, en effet, à l’archipel que des compétences en matière minière.
La compétence des provinces en matière de chasse et d’environnement a été, pour sa part, précisée par le Sénat. Autre évolution : la dénomination du Conseil économique et social est alignée avec celle de son homologue métropolitain, ses membres ne pouvant, en outre, être également sénateurs coutumiers, et le régime indemnitaire des membres du Gouvernement et des assemblées de province a été renforcé, même si notre rapporteur, toujours soucieux d’économiser les deniers publics, en a limité la progression.
En matière de dispositions financières et comptables, la possibilité de créer des sociétés publiques locales permettant aux collectivités territoriales d’exercer des prestations in house en toute sécurité est une avancée, cette souplesse de gestion étant, en quelque sorte, contrebalancée par une plus grande transparence et un meilleur contrôle des aides financières octroyées par les personnes publiques. Les règles budgétaires sont, quant à elles, rationalisées
Enfin, quant à la compétence du juge pénal pour examiner une demande de dommages et intérêts formée par une personne de statut civil coutumier à l’encontre d’une autre personne de même statut, la rédaction de l’amendement à l’article 20 du projet de loi organique de notre collègue Philippe Gomes devrait recueillir l’assentiment de tous.
Quant à la loi ordinaire, outre la ratification d’ordonnances et l’habilitation délivrée au Gouvernement d’en prendre d’autres, elle prolonge, s’agissant de la Nouvelle-Calédonie, les dispositions contenues dans la loi organique. Je citerai l’exemple de mon territoire, donc de l’article 9, issu d’un amendement de notre collègue Karine Claireaux, sénatrice de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui vise à étendre les compétences du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon en matière de formation, amendement adopté après que la commission des lois sénatoriale et le Gouvernement s’en sont remis à la sagesse de nos collègues, le Gouvernement ayant en outre fait voter, en commission à l’Assemblée, un amendement visant à préciser les missions du centre qui seront celles du CNFPT.
Je me félicite de la clarification des compétences du centre ainsi opérée, tout en étant attentive au montant des crédits subdélégués nécessaires à la réalisation de programmes de formation adéquats. Des évolutions statutaires seront également nécessaires à Saint-Pierre-et-Miquelon, monsieur le ministre. Nous examinerons cela ensemble avec un prochain véhicule législatif.
Pour conclure, les élus du groupe RRDP soutiendront ces textes qui soulignent la confiance du législateur national à l’endroit du processus de l’accord de Matignon et renforcent les moyens du Gouvernement de l’archipel pour mener à bien l’exercice des compétences qui sont les siennes. La Nouvelle-Calédonie est un territoire passionnant et fantastique par sa richesse culturelle, sa situation géographique exceptionnelle, son potentiel économique et politique. Nous devons l’accompagner. Cette richesse, comme celle des autres territoires d’outre-mer, mériterait, monsieur le ministre, une meilleure lisibilité et promotion dans l’hexagone. Chacun aura compris que je fais, ici, allusion sans humour et avec regret à la place des outre-mer sur la chaîne France Ô !
« Très bien ! » et applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, mesdames, messieurs, le projet de loi organique que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans le cadre de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, lequel définit pour vingt ans l’organisation politique de la Nouvelle-Calédonie et les modalités de son émancipation. Il vise à moderniser le statut de la Nouvelle-Calédonie et constitue, ainsi, une nouvelle étape du processus engagé, voici déjà vingt-cinq ans.
Ce projet de loi est également la traduction des demandes unanimement exprimées en décembre 2012 par le dixième comité des signataires de l’accord de Nouméa. À cette occasion, ceux-ci ont insisté sur la nécessité de prendre en compte les conséquences pratiques des derniers transferts de compétences et de mieux les accompagner en dotant les institutions calédoniennes d’instruments de gouvernance modernes en matière budgétaire et financière.
La principale mesure du projet de loi organique figure à l’article 1er : il s’agit de la faculté désormais reconnue à la Nouvelle-Calédonie de créer des autorités administratives indépendantes relevant de son champ de compétences. Toute autorité administrative indépendante, créée par le congrès à l’issue de l’adoption d’une loi du pays, pourra se voir reconnaître des pouvoirs de réglementation, de sanction et d’investigation. Elle disposera d’un budget et de moyens affectés par la Nouvelle-Calédonie et pourra conclure une convention avec les autorités indépendantes nationales pour l’exercice de ses missions.
En pratique, il s’agit, dans l’immédiat, de mettre en place une autorité administrative indépendante chargée de la concurrence disposant d’un véritable pouvoir d’enquête et de sanction afin de lutter contre la vie chère. Le phénomène de la vie chère est, en effet, récurrent outre-mer, tout particulièrement en Nouvelle-Calédonie, laquelle a connu, voici quelques mois, un mouvement social de grande ampleur. C’est au terme de longues négociations qu’un protocole d’accord mettant fin à la grève générale a été signé en mai dernier.
Le texte prévoit principalement une baisse immédiate des prix de 10 % pour 300 produits d’alimentation et d’hygiène ainsi qu’une baisse de 10 % sur 200 produits non alimentaires. Si les signataires du document ont aussi acté le gel des prix jusqu’au 31 décembre 2014, le problème de la vie chère en outre-mer est cependant loin d’être réglé puisque les prix y sont supérieurs de 30 à 40 % à ceux pratiqués en métropole.
Des avancées ont incontestablement été obtenues, mais beaucoup reste à faire. C’est pourquoi nous soutenons la création de cette autorité de la concurrence afin que la Nouvelle-Calédonie puisse mettre en oeuvre la loi dite antitrust et, ainsi, éviter qu’une concentration excessive dans certains secteurs d’activité ne porte gravement atteinte au pouvoir d’achat des Calédoniens. À notre sens, l’autre grande priorité doit être l’emploi des jeunes, tant le chômage des jeunes atteint un taux inacceptable en Nouvelle-Calédonie comme dans tout l’outre-mer.
Le projet de loi clarifie par ailleurs utilement les compétences de la Nouvelle-Calédonie et, plus spécialement, du Congrès. Il améliore le fonctionnement des institutions calédoniennes et comporte des dispositions techniques relatives à l’actualisation des règles administratives et financières, dans le respect, et c’est évidemment essentiel, de l’équilibre issu de l’accord de Nouméa.
C’est pour toutes ces raisons que les députés du Front de gauche voteront le projet de loi organique sur la Nouvelle-Calédonie comme le projet de loi portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, ces deux textes constituant une étape, consensuelle, dans l’évolution des territoires concernés.
Applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte sur lequel nous allons nous prononcer aujourd’hui, après son examen en première lecture au Sénat au mois de juillet dernier, représente un pas en avant essentiel dans le processus de transfert de compétences engagé en Nouvelle-Calédonie, dans le prolongement de l’accord de Nouméa.
Je me félicite, au nom du groupe SRC, de la qualité des débats qui ont eu lieu en commission des lois. Animés par un esprit constructif, conscients de la responsabilité qui est la nôtre vis-à-vis des populations calédoniennes, nous avons donc pu travailler sur ce texte de façon consensuelle. Je tiens à ce sujet à saluer le travail entrepris par la rapporteure du texte au Sénat, Mme Catherine Tasca, ainsi que celui de notre rapporteur, M. René Dosière, qui a apporté toute son expérience sur ces questions ainsi que son souci d’un fonctionnement rigoureux des institutions.
Si nous remettons brièvement en perspective le sort qui a été celui de ce territoire, nous devons rappeler que l’histoire de la Nouvelle-Calédonie, souvent, a été empreinte de souffrances et de difficultés. Annexée par Napoléon III en 1853, elle devint dès 1864 une « colonie pénitentiaire », les Français s’inspirant alors du comportement de l’Angleterre vis-à-vis de l’Australie. Par la suite, partenaire loyale des forces françaises lors des deux conflits mondiaux, la population calédonienne a pu accéder à un statut de citoyenneté à part entière en 1946. Lors des années 1970, les revendications indépendantistes se firent entendre de manière de plus en plus nette, et c’est une décennie plus tard que les tensions furent les plus vives, notamment la triste année 1984, l’épisode de la prise d’otages d’Ouvéa en 1988 en représentant la plus tragique expression.
Loin de moi l’idée de vouloir rouvrir des plaies aujourd’hui cicatrisées, mon propos tient au contraire à montrer que cet héritage historique mouvementé n’empêcha pas la France de mener à bien, ces trente dernières années, un processus pacifique de transfert progressif de compétences. Je me rappelle à ce sujet la poignée de main fondatrice, historique, échangée entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou au mois de juillet 1983 lors de la table ronde de Nainville-les-Roches, sous le Gouvernement de Pierre Mauroy. Depuis ce dialogue symbolique entre ces deux leaders, loyaliste pour l’un, indépendantiste pour l’autre, un nouvel avenir, de nouvelles perspectives ont alors commencé à poindre pour les Calédoniens, alors qu’un « droit inné et actif à l’indépendance » leur était dorénavant reconnu.
La suite des événements, nous la connaissons. Le retour d’un gouvernement de gauche au pouvoir en 1988 et l’arrivée de Michel Rocard à Matignon permirent de résoudre une situation qui semblait bloquée, grâce à la signature des accords de Matignon, ouvrant une période transitoire de dix ans. Ensuite, l’accord de Nouméa, conclu en 1998 par Lionel Jospin, permit de franchir une nouvelle étape dans ce processus, nous menant jusqu’à l’horizon 2018.
Le statut spécifique accordé à la Nouvelle-Calédonie fut alors à l’origine de la révision constitutionnelle de 1999, qui intègre à la Constitution française, en son article 77, avec la loi organique à laquelle nous adjoignons des modifications, quelque chose qui ressemble fortement à un embryon de constitution à part entière. En effet, la Nouvelle-Calédonie se trouve déjà dotée de son propre Gouvernement, et l’influence de l’État, donc de la France, reste, dans son ensemble, prépondérante en ce qui concerne les seuls domaines dits régaliens.
Unis dans la même volonté de voir mener à bien un processus complexe, nous avons été soucieux d’apporter les précisions nécessaires permettant de coller à l’esprit qui a été celui des signataires de l’accord de Nouméa réunis en décembre dernier à Paris. Notre travail législatif a répondu à la double exigence de ne pas trahir cet esprit originel, tout en n’allant pas à l’encontre du travail mené au Sénat.
Cette réactualisation doit à la fois répondre à un contexte, une urgence sociale qui nécessitent des mesures fortes, tout en pérennisant le processus sur le long terme engagé par l’accord de Nouméa : cet équilibre entre mesures d’urgence et préparation de l’avenir est, j’en suis persuadé, la meilleure méthode à adopter.
Ainsi, il est apparu que la préoccupation première des Calédoniens, à l’origine de tensions récentes, était la forte montée des prix sur le territoire. Ce texte répond de manière claire à cette préoccupation en permettant, avec son premier article, la création d’autorités administratives indépendantes, par exemple d’une autorité de la concurrence.
Par l’article 6, notre commission a permis de clarifier les montants de rémunération des élus calédoniens.
L’article 5, quant à lui, élargit le domaine de compétences du Conseil économique et social à l’environnement, enjeu essentiel pour un territoire comme la Nouvelle-Calédonie.
La Nouvelle-Calédonie est à un seuil crucial de son histoire, et, en dépit de ce que j’entends ici et là ces derniers temps, je ne crois pas qu’il soit pertinent de se diriger vers un accord à l’amiable sur l’évolution du statut de ce territoire. La Constitution de la Ve République prévoyant la tenue d’un référendum d’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie à la suite des accords de Nouméa, seule une révision constitutionnelle offrirait la possibilité aux Calédoniens de ne pas en organiser un. Cette hypothèse paraît aujourd’hui hautement improbable.
Quoi qu’il en soit, quelle que soit la formule adoptée par les autorités calédoniennes dans les prochains mois, les prochaines années, nous pouvons être sûrs que, comme l’a affirmé le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, l’État accompagnera en permanence la Nouvelle-Calédonie vers le destin qu’elle se choisira elle-même.
Quelques mots, pour finir, du projet de loi relatif aux diverses dispositions relatives aux outre-mer qui doivent aujourd’hui être ratifiées par le Parlement. Ces mesures, aussi diverses qu’essentielles, montrent bien l’importance que revêtent les questions relatives à l’outre-mer pour notre Gouvernement et sa majorité, qui, sans cesse, se doivent d’adapter la législation aux réalités complexes et changeantes du terrain.
Ainsi, à ce sujet, je me félicite de l’ajout des articles 12 et 13, à l’initiative de Chantal Berthelot, à laquelle je me suis associé. Grâce à ces articles, la lutte contre l’orpaillage illégal ainsi que la lutte contre la pêche illégale en Guyane pourront bénéficier de nouveaux outils plus performants, afin de préserver la biodiversité et les richesses de cette région, qu’on ne peut plus laisser piller. J’ai compris, monsieur le ministre, que le Gouvernement reprenait à son compte ces propositions, en tout cas s’agissant de l’orpaillage clandestin en bande organisée, puisque nous avons adopté tout à l’heure en commission un amendement que vous aviez déposé.
Le groupe SRC votera les deux textes qui nous sont soumis car ils vont dans le sens d’une gestion des outre-mer pragmatique et émancipatrice.
Applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, deux projets de loi, l’un organique, portant actualisation de la loi du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, et un second, ordinaire, portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, sont soumis aujourd’hui à l’examen et au vote de notre Assemblée.
En commission des lois, la discussion a davantage porté sur le premier des deux textes, que le rapporteur, dans ses propos liminaires, a tenu à présenter comme un texte technique et consensuel, consensuel parce qu’il répond à une demande et un accord du congrès de la Nouvelle-Calédonie, mais aussi parce que le texte issu de l’Assemblée entend respecter le vote unanime du Sénat, en première lecture. Dès à présent, et pour rompre tout suspense, je tiens d’ailleurs à vous dire que le groupe UMP, que je représente, votera ces deux projets de loi.
Applaudissements sur tous les bancs.
Concrètement, que contiennent les deux textes ?
Le projet de loi ordinaire prévoit, pour l’essentiel, la ratification de huit ordonnances. Trois d’entre elles ont été adoptées sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution et concernent différentes collectivités d’outre-mer ainsi que la Nouvelle-Calédonie. Elles y étendent et adaptent des dispositions en vigueur dans l’hexagone, notamment en matière de droit civil, de protection juridique des majeurs et de surendettement. Les cinq autres ont été adoptées dans le cadre d’une habilitation fondée sur l’article 38 de la Constitution. Elles concernent plus particulièrement l’instauration en Guyane et en Martinique d’une collectivité unique, collectivité qui tarde d’ailleurs un peu à se faire jour.
Plusieurs modifications ont été apportées par les deux chambres, non pas sur les ordonnances, mais pour ajouter diverses dispositions en profitant de ce véhicule législatif ultramarin. Pour ma part, je tiens à souligner, parmi les modifications apportées par la commission des lois de l’Assemblée nationale, l’introduction de l’article 12, qui permettra, je l’espère, de mieux lutter contre l’orpaillage illégal en Guyane. En effet, il permet d’instaurer, dans certaines zones de Guyane, un régime de déclaration préalable de la détention de certains matériels, comparable au régime de déclaration des armes à feu. Il faudra ainsi désormais déclarer la détention de mercure, de concasseurs et corps de pompe, utilisés pour l’orpaillage illégal. La détention et le transport de ces matériels sans récépissé de la préfecture seront passibles de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Le Saint-Martinois que je suis se réjouit également du maintien d’un article 7 introduit lors de l’examen du texte par la commission des lois du Sénat, relatif à l’artisanat à Saint-Martin. Cet article précise qu’à titre dérogatoire, à Saint-Martin, l’État peut, par convention avec la chambre consulaire interprofessionnelle de Saint-Martin, confier à celle-ci l’exercice de missions, autres que consultatives, dévolues aux chambres de commerce et d’industrie, aux chambres de métiers et de l’artisanat et aux chambres d’agriculture, des dispositions attendues depuis plusieurs années par notre CCISM.
S’agissant du projet de loi organique, et conformément aux souhaits émis par le dixième comité des signataires de décembre 2012, la loi organique donne au président du Gouvernement de Nouvelle-Calédonie un pouvoir de police administrative spéciale, destiné à permettre la mise en oeuvre des compétences d’ores et déjà transférées, comme la circulation maritime et la circulation aérienne, ou qui vont l’être, à l’instar de la sécurité civile.
À ce titre, la lecture de l’étude d’impact annexée au projet de loi organique, s’agissant de la sécurité civile, est à la fois éclairante et troublante. L’on comprend bien la nécessité de donner au président du Gouvernement la possibilité de prendre des décisions réglementaires et individuelles en matière de police administrative, car le système institutionnel actuel, avec des décisions à caractère collégial et solidaire du Gouvernement, rend difficile la prise de décision dans un contexte d’urgence, mais, à détailler le type de décisions que le président de Gouvernement est amené à prendre, telles que la réquisition des moyens privés, parce que l’État ne dispose pas de moyens aériens de lutte contre l’incendie en Nouvelle-Calédonie et qu’il est amené à réquisitionner des hélicoptères appartenant à des sociétés privées, on obtient un aperçu inquiétant de l’insuffisance des moyens humains et matériels pour l’exercice de cette compétence par la Nouvelle-Calédonie, même si ce n’est pas l’objet de ce texte d’y répondre.
Ensuite, et c’est sans doute la mesure la plus innovante du projet de loi, est prévue la faculté pour la Nouvelle-Calédonie de créer, par des lois de pays, des autorités administratives indépendantes relevant de son champ de compétences. Ainsi, la Nouvelle-Calédonie pourra créer de telles autorités dans divers domaines : concurrence, concentration économique, aménagement commercial, consommation, répression des fraudes, postes et communications électroniques, droit du travail, droit syndical, droit de la sécurité sociale. La Nouvelle-Calédonie définira l’ensemble de leurs prérogatives, dont leurs pouvoirs réglementaires, de contrôle et de sanction. Cependant, l’État restera garant de l’indépendance de ces autorités. Il lui reviendra d’encadrer ceux de leurs pouvoirs qui pourraient mettre en cause les libertés publiques, heurter la liberté individuelle ou le droit de propriété. Il lui reviendra également de déterminer les voies de recours contre leurs décisions.
En l’espèce, à court terme, il s’agit de mettre en place une autorité administrative indépendante chargée de la concurrence. D’ailleurs, je ferai remarquer que cette création répond à une préconisation de l’Autorité de la concurrence elle-même, en septembre 2012 : elle avait alors recommandé au Gouvernement de Nouvelle-Calédonie que la nouvelle autorité soit chargée du contrôle des pratiques anticoncurrentielles et des opérations de concentration.
Quant au reste des dispositions, je ne crois pas utile de m’y arrêter plus avant ; les échanges en commission des lois ont montré que cette « actualisation » – si l’on peut dire – de la loi organique de 1999 ne faisait pas particulièrement débat.
Mais je crois que, si nous nous sommes entendus pour décrire ce projet de loi organique comme un texte technique, c’est surtout par prudence, pour ne pas dire par pudeur. Et il est nécessaire d’user de prudence et de pudeur avant de voter des dispositions ou de faire des propositions qui concernent des compatriotes vivant à plus de 20 000 kilomètres de cet hémicycle – la Nouvelle-Calédonie étant le deuxième territoire le plus éloigné de Paris après Wallis-et-Futuna –, au risque autrement de fragiliser l’équilibre trouvé par les signataires de l’accord de Nouméa.
Il est vrai que si l’on raisonne en juristes, nos outre-mer sont un défi technique permanent : les statuts des collectivités ultramarines sont très souvent des modèles uniques en leur genre, plutôt éloignés du modèle des collectivités territoriales hexagonales.
Reste que la spécificité du modèle calédonien, qui a nécessité une révision constitutionnelle en juillet 1998, est sans équivalent.
Mais lorsqu’on raisonne en républicains avec nos outre-mer, et avec la Nouvelle-Calédonie en particulier, rien n’est technique, tout est affectif, car derrière le projet de loi organique, il y a toute la logique historique et institutionnelle propre à la Nouvelle-Calédonie. Derrière le projet de loi organique, il y a le caractère irréversible des transferts engagés. En l’espace de quelques années, la Nouvelle-Calédonie a bénéficié de nouvelles compétences fondamentales : l’enseignement primaire privé et secondaire en 2012, la police et la sécurité de la circulation aérienne et maritime intérieure, le droit civil, le droit commercial en 2013, et en janvier 2014 ce sera la sécurité civile.
Derrière ce projet de loi, il y a, quoi qu’on en dise, un processus engagé depuis trente ans, depuis la signature, cela a été dit, des accords de Matignon, qui fait que la Nouvelle-Calédonie exerce aujourd’hui toutes les compétences à l’exception des compétences régaliennes. La Nouvelle-Calédonie a sa propre citoyenneté ; elle peut adopter des lois, comme le Parlement de la République ; pour elle-même, elle décide pratiquement de tout en matière fiscale, sociale, économique, commerciale, environnementale, sanitaire, et j’en passe.
Alors, derrière ce caractère technique, il y a le passé, le présent et l’avenir de la Nouvelle-Calédonie : le passé irréversible, comme le sont les transferts de compétences, le présent particulièrement complexe d’un point de vue politique – un présent au corps électoral transitoirement gelé –, l’avenir, enfin, à construire dès 2014, prometteur mais incertain.
En réalité, ce projet de loi organique tisse en filigrane toute la contrainte qui pèse sur les solutions d’avenir. S’il ne reste plus à ce stade que les compétences régaliennes à transférer, les contours de la Nouvelle-Calédonie de demain n’en sont pas plus nets pour autant.
À ce propos, Jean Courtial et Ferdinand Mélin-Soucramanien, deux experts du comité de pilotage sont en train de finaliser leur réflexion sur les hypothèses d’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Ils ont mis en lumière quatre scénarios possibles. Le premier est la pleine souveraineté-indépendance, dont ils reconnaissent qu’il n’est pas le plus simple, mais qu’il est le plus connu en termes de contours, puisque la France a connu la décolonisation en Afrique. Le deuxième est la pleine souveraineté du type du partenariat privilégié, situation que les experts comparent avec les relations entre la France et Monaco. Les deux autres hypothèses sont deux scénarios de maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la République française : le statut d’aujourd’hui, mais pérennisé, installé dans la longue durée, ou un maintien dans la France avec plus d’autonomie, notamment en matière de relations extérieures.
Une de leurs conclusions, c’est que ce qui fait le plus sens dans la décision à prendre, c’est la question de la transformation de la citoyenneté calédonienne en nationalité, et qu’il y aurait alors pleine souveraineté. Autrement dit, pour eux, la question des transferts régaliens n’est, d’une certaine manière, que symbolique, et non centrale. Ce qui me ramène à notre texte organique d’aujourd’hui, sur le point de savoir si, comme les transferts régaliens seraient symboliques, ce texte ne serait que technique.
Alors oui, ce texte est technique, si le terme technique ne devient pas synonyme d’anodin. C’est une manière de dire qu’on ne peut se résoudre à considérer que la Nouvelle-Calédonie seule a les clefs de son avenir en main.
Je refuse de m’exclure de cet avenir par passivité. Je refuse de nous en exclure, même par prudence, même par pudeur, et de laisser seule la Nouvelle-Calédonie face à son destin.
C’est la raison pour laquelle je voudrais, pour conclure, reprendre les termes de l’hymne calédonien, en le modifiant légèrement, et dire aux Calédoniens : « Soyons unis, restons frères », et ce quels que puissent être les termes de cette union.
Applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission de lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, la Nouvelle-Calédonie est une île que nos concitoyens métropolitains connaissent mal.
Située aux antipodes, proche de pays comme la Nouvelle-Zélande et d’un pays-continent comme l’Australie, elle est une partie intégrante du territoire national.
Pourtant, la République a su faire preuve d’originalité, voire d’audace, pour prendre en compte les spécificités de ce territoire.
Parmi ces spécificités, l’insularité, un riche sous-sol, une position géographique dans l’hémisphère austral, à vingt heures d’avion de la métropole, et je terminerai par la population. Cette population est composée de diverses minorités : la population d’origine, les Kanaks, représente un peu plus de 40 % des habitants, celle d’extraction européenne environ 30 %, les 30 % restants se partagent entre Polynésiens et Asiatiques. La population est globalement marquée par un fort métissage.
La principale originalité, à mes yeux, de ce territoire, c’est bien son organisation administrative et politique. Tout en étant au sein de la République, l’accord de Nouméa repose sur une double légitimité reconnue, d’une part, à la population kanake, celle de premiers occupants, d’autre part, aux autres communautés, au titre de leur participation à la construction de la Nouvelle-Calédonie. On peut même dire qu’il existe une triple citoyenneté.
Ensuite, l’organisation territoriale mise en place en 1989 et confirmée par le statut de 1999 est totalement différente de ce que l’on trouve en métropole. Il repose sur un fédéralisme dit asymétrique. Quel contraste saisissant avec notre dernière discussion de la loi sur les métropoles, où l’organisation doit être la même partout sur le territoire métropolitain !
Il semblerait donc que ce qui est bon pour les collectivités d’outre-mer et la Corse ne le soit pas pour la France métropolitaine. Par exemple, l’expérimentation doit être généralisée, ce qui empêche toute décentralisation différenciée. Il est pourtant évident que les problèmes ne sont pas les mêmes d’une région à l’autre. Quand la Bretagne demande la gestion de l’eau, c’est évidemment pour juguler les algues vertes. Je pourrais vous parler également des langues régionales ; vous savez que c’est un sujet cher à mon coeur. En fonction de la région, l’existence d’une ou plusieurs langues régionales sur un territoire déterminé, avec une demande sociale plus ou moins importante, impose de faire du sur-mesure. Nous pourrions également parler d’économie. Dans les régions d’agriculture intensive et productive du Grand Ouest, les besoins économiques spécifiques obligent à mettre en place des stratégies qui ne seront pas les mêmes dans les zones de montagne ou dans les zones d’agriculture céréalière.
La prise en compte des différences, c’est tout simplement la prise en compte de la réalité. Loin d’affaiblir notre pays, cela le rend plus adaptable, plus efficace, plus démocratique. Cela nous permet de perdre moins de temps dans des procédures administratives complexes, où il faut parfois réunir cinq ou six acteurs alors que deux suffiraient. Ce serait un véritable gain de productivité pour notre administration et, à mon sens, nous engagerions tout un pan, inexploré pour l’instant, du choc de simplification, par exemple en allégeant notre mille-feuilles administratif.
Vous l’aurez donc compris de mes propos : nous voterons ce projet de loi.
Il vise à parfaire les transferts de compétences déjà effectués ou qui le seront prochainement. Ainsi, la collectivité aura le droit de créer des autorités administratives indépendantes dans les domaines qui relèvent de sa compétence, qui pourront déroger aux dispositions en vigueur. Le président de l’assemblée de province disposera de pouvoirs de police dans le domaine des infrastructures de circulation. Un ensemble de dispositions techniques, avec le renforcement du rôle du président et des différentes assemblées, vise des domaines variés, comme l’enseignement ou le droit commercial. Il sera également possible de voter des lois de pays.
Nous accompagnons de nos voeux cette dévolution au profit de la Nouvelle-Calédonie. Nous saluons cette ouverture que la République sait mettre en place pour le bien des populations d’outre-mer. La République sait être ouverte ; on ne peut que regretter qu’elle fasse parfois la sourde oreille aux demandes légitimes de ses peuples de France métropolitaine, qui n’ont même pas le droit d’être reconnus comme des minorités. Ainsi, la France a en commun avec la Grèce le fait de nier l’existence de minorités nationales, linguistiques ou culturelles, sur son territoire, alors qu’elle les défend dans les autres parties du monde. Allez comprendre !
La République ne s’affaiblit pas en écoutant les demandes légitimes des populations ; au contraire, elle fait ainsi oeuvre de cohésion politique et sociale. La Nouvelle-Calédonie, et plus généralement l’ensemble des collectivités d’outre-mer, sont pour nous une source d’inspiration et d’expérimentation.
Je terminerai en citant François Mitterrand : « La France a eu besoin de la centralisation pour se faire, elle aura besoin de la décentralisation pour ne pas se défaire. »
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, la Guyane, enclave de la République française en territoire amazonien, se caractérise par l’abondance de ses richesses, qu’elles soient issues de sa population, de sa biodiversité terrestre et marine, ou encore de son sous-sol. De manière incontestable, cette richesse attise la convoitise, notamment des pays voisins. Ainsi assiste-t-on depuis longtemps au pillage systématique des ressources guyanaises, alors même que la société locale souffre d’un retard chronique de développement vis-à-vis de la France hexagonale.
La lutte contre le pillage de ses ressources, en particulier halieutiques et aurifères, et celle contre leurs externalités négatives, sont depuis toujours des préoccupations majeures des élus guyanais. C’est pourquoi, aujourd’hui, nous souhaitons vivement encourager Chantal Berthelot, ma collègue de la deuxième circonscription de la Guyane, qui porte les articles 12 et 13 du projet de loi. En effet, ces dispositions relatives à la Guyane vont permettre une répression plus efficace à la fois de l’orpaillage illégal et de la pêche clandestine, ce qui était attendu depuis longtemps par les populations locales autant que par les opérateurs économiques légaux.
Ces deux problématiques, qui ont fait couler beaucoup d’encre, ont toutefois connu des fortunes diverses. En effet, si le mouvement social engagé par les pêcheurs l’année dernière a permis une meilleure coordination des efforts de lutte contre la pêche illégale des deux côtés de la frontière franco-brésilienne, la lutte contre l’orpaillage illégal, quant à elle, doit faire face à une industrie minière souterraine toujours mieux formée, bénéficiant d’un système d’information efficace, qui s’appuie sur des effectifs grossissant de façon inquiétante.
Comme je le rappelle dans une tribune publiée ce matin, on estime à près de 15 000 le nombre de garimpeiros, c’est-à-dire d’orpailleurs clandestins généralement en provenance du Brésil, illégalement présents sur le territoire guyanais et opérant sur plus de 700 sites d’exploitation aurifère. Ces sites, dont le chiffre d’affaires annuel est estimé à 405 millions d’euros, sont souvent identifiés au coeur même du parc amazonien. Par ailleurs, ils sont le théâtre d’un scénario insupportable qui voit se mêler climat social dégradé, destruction massive du biome amazonien, déversement de mercure et de cyanure dans des cours d’eau dont sont tributaires les populations amérindiennes et bushiningués. À ce sujet, nous noterons au passage que les campagnes sanitaires ont révélé chez plus de 70 % des enfants du haut-Maroni des taux de mercure supérieurs à la norme de l’Organisation mondiale de la santé
En outre, on ne saurait manquer de faire un rapprochement entre ce fléau ignoré par une partie du grand public et les chiffres alarmants de la délinquance observés sur l’ensemble du département, et notamment sur le taux à peine croyable de 10,2 homicides volontaires pour 100 000 habitants.
Aussi, ce projet de loi, en instaurant un régime de déclaration préalable à la détention de certains matériels à destination exclusive des carrières aurifères, devrait permettre un meilleur contrôle de cette activité, qu’elle soit légale ou illégale.
Pour répondre à la détention de ces matériels sans déclaration, la sanction prévue à l’article 13 – deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende – nous paraît suffisamment dissuasive pour envisager une diminution durable du trafic observé dans l’intérieur guyanais. Vraisemblablement, cela devrait aboutir au tarissement de l’approvisionnement des sites illégaux en matériels indispensables à leur subsistance.
Parallèlement, l’article 14, qui modifie le code rural et de la pêche maritime, devrait apporter une dimension dissuasive accrue aux opérations de lutte contre le pillage des ressources halieutiques, en faisant encourir aux contrevenants une sanction dès qu’une infraction est commise. De ce fait, il supprime un délai souvent trop long entre le délit et son jugement. Or souvent, ce temps de latence est mis à profit par les pêcheurs incriminés pour récupérer leurs embarcations. Cette mesure conservatoire spécifique semble particulièrement adaptée au scénario guyanais puisque la quasi-totalité des infractions de pêche illicite sont commises par des personnes en situation irrégulière au moyen d’embarcations dépourvues de pavillons.
Toutefois, si nous saluons les dispositions contenues dans ce projet de loi, nous ne pouvons faire l’impasse d’un rappel quant à l’impérieuse nécessité d’appréhender la lutte contre le pillage des ressources guyanaises à travers le spectre de la coopération interrégionale. Cette coopération, aujourd’hui enclenchée dans la lutte contre le pillage des ressources halieutiques, fait encore cruellement défaut quand il s’agit de combattre le pillage des ressources minières. Rappelons que le Brésil n’a toujours pas ratifié les accords de coopération en matière de lutte contre l’orpaillage clandestin signés en décembre 2008 et ratifiés par le Parlement français le 20 juillet 2011.
Nous resterons donc particulièrement vigilants quant à l’évolution de ce dossier et nous espérons que l’avancée promise par ce texte ne sera qu’un premier pas vers une solution pérennisée qui devra passer par la refonte complète du droit minier dont la modernisation semble avoir pris un retard que nous ne pouvons que regretter, au regard de l’urgence de la situation. Je vous remercie. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi portant diverses dispositions relatives aux outre-mer me donne l’occasion de vous faire partager le désastre que subissent nos compatriotes guyanais à 7 000 kilomètres de cet hémicycle et de vous présenter une première réponse législative qui, bien que satisfaisante, ne peut être considérée comme suffisante. Je veux parler du pillage de nos ressources nationales en Guyane et, en premier lieu, de nos ressources aurifères et halieutiques.
Loin d’être révolues, les activités liées à l’exploitation aurifère illégale sur le territoire guyanais ont connu une croissance exponentielle entre les années 2004 et 2008. Et malgré une stabilisation effective en 2009, suite à la mise en place du dispositif de lutte baptisé HARPIE, une reprise de l’accroissement des activités illégales s’est faite dès la fin de l’année 2011 et s’est même accélérée en 2012 et 2013. Aussi a-t-on constaté, entre septembre 2011 et juillet 2013, une hausse du nombre de chantiers d’orpaillage clandestin sur le territoire du Parc amazonien de Guyane. Les conséquences sur les communautés locales et leur environnement sont multiples. Elles demeurent inacceptables et se pérennisent.
Sur le plan sanitaire et environnemental, tout d’abord, les métaux toxiques utilisés par les orpailleurs clandestins, en particulier le mercure, sont déversés dans les cours d’eau environnants, qu’ils polluent et rendent impropres à la consommation. Les populations qui puisent une grande partie de leurs ressources du fleuve et de la forêt considèrent la qualité de l’eau comme l’indicateur essentiel. Or aujourd’hui, les eaux boueuses et souillées demeurent leur réalité quotidienne, avec le cortège de préjudices qui en découle et, en premier lieu, la contamination et la raréfaction des ressources alimentaires. La déforestation représente également un dommage important avec plusieurs centaines de kilomètres carrés touchés. En 2010, 4 000 hectares de terrain étaient déforestés et 1 000 kilomètres de cours d’eau pollués par les boues de l’orpaillage – soit l’équivalent de la Loire !
À ces désastres sanitaires et écologiques s’ajoutent des conséquences politiques et sociales préoccupantes. Des atteintes graves à la sécurité de nos concitoyens sont constatées chaque jour : braquages, vols à main armée de pirogues et de moteurs ou pillage d’abatis, mais aussi intimidations et menaces. Cette montée de l’insécurité à proximité des villages du Maroni et de l’Oyapock ainsi que dans les villes comme Maripasoula et Camopi attise une forme de ressentiment contre l’État et se traduit également par une radicalisation croissante des orpailleurs illégaux, qui n’hésitent plus à s’équiper lourdement en armes et à en faire usage contre les autorités françaises. Depuis 2011, pas moins de quarante atteintes aux forces de l’ordre ont été recensées, avec pour triste point d’orgue, la mort de deux gendarmes le 27 juin 2012.
Les désastres liés à la pêche illicite sont également importants et préoccupants. La zone économique exclusive de la France au large de la Guyane représente une surface de plus de 130 000 kilomètres carrés. Par sa richesse en poissons et en crevettes, elle revêt une importance particulière. Si ce n’est en droit, mais dans les faits, ses frontières sont contestées par les innombrables infractions des bateaux de pêche surinamiens, guyaniens, vénézuéliens et brésiliens. Faisant fi des règles et restrictions édictées par l’Union européenne concernant notamment les zones de pêches autorisées, la longueur et la taille des filets, les pêcheurs illégaux viennent directement piller les ressources halieutiques et menacer la reproduction des espèces. Ils concurrencent de manière déloyale les pêcheurs légaux guyanais qui voient leur productivité diminuer d’année en année. Pour vous donner un ordre d’idée, sachez, mes chers collègues, que le volume de la pêche illégale représenterait trois fois celui de la pêche légale. Depuis le 1er janvier 2013, quarante-huit tonnes de poissons ont été saisies et plus de 150 kilomètres de filets, qui n’étaient pas aux normes, ont été détruits.
En plus de l’impact économique certain que ces intrusions ont sur le secteur de la pêche guyanaise, celles-ci remettent en cause l’autorité de l’État français sur une zone dont le droit international lui a reconnu l’exclusivité.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, ce qui se joue sur les bords des fleuves Maroni et Oyapock jusqu’aux confins de notre forêt amazonienne et au large de nos côtes, c’est aussi et surtout le maintien de notre souveraineté nationale. L’État se doit de tout mettre en oeuvre pour faire respecter ses pouvoirs régaliens et tenir ses engagements de préservation des ressources et des espaces naturels. C’est ainsi que nous réaffirmerons notre souveraineté nationale et garantirons la sécurité et la santé de nos concitoyens.
Or pour cela, il faut couper le mal à la racine : en remontant les filières et en traquant les commanditaires, ceux qui sont à la tête de ces réseaux mafieux, car ce sont eux les véritables coupables. Il faut donc s’attaquer aux moyens d’approvisionnement. Tel est l’objet de la proposition de loi visant à lutter contre l’orpaillage illégal et la pêche illicite que le groupe socialiste, républicain et citoyen a adoptée en juin dernier et que la commission des lois a votée et inscrite au projet de loi que nous examinons aujourd’hui. Je veux vous remercier de votre appui, monsieur Urvoas, et préciser, à la suite de mon collègue de Nouvelle-Calédonie, que rien ne vaut la connaissance du terrain pour convaincre nos collègues. J’espère donc que d’autres parmi vous auront l’occasion d’aller en Guyane afin de se rendre compte par eux-mêmes des réalités de ce territoire.
L’article 12 prévoit ainsi la mise en place d’un régime particulier pour les matériels qui sont utilisés spécifiquement par les orpailleurs illégaux, à savoir le mercure, les concasseurs et les corps de pompe. Ce régime s’insère dans les dispositions législatives particulières à la Guyane dans le code minier. Il comprend l’obligation pour un détenteur de mercure, de tout ou partie d’un concasseur ou d’un corps de pompe de déclarer celui-ci directement auprès du préfet de Guyane et d’être porteur du récépissé délivré, sous peine d’être sanctionné pénalement. L’objectif de l’article 13 de ce projet de loi vise à compléter, sous certaines conditions, l’arsenal répressif du code rural et de la pêche maritime en instituant une peine complémentaire de destruction immédiate des navires ayant servi à commettre l’infraction de pêche illégale, dès lors qu’ils ne relèvent pas de la souveraineté d’un autre État, soit lorsqu’ils sont dépourvus de pavillon ou sans nationalité.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, par ces différentes mesures, nous complétons le corpus législatif existant en dotant les forces de l’ordre d’un arsenal juridique qui leur permette de répondre plus efficacement aux fléaux que constituent l’orpaillage illégal et la pêche illicite. Pour enrichir et compléter cette première réponse législative, le Gouvernement a mandaté une mission interministérielle qui a rendu un rapport sur l’orpaillage illégal et la pêche illicite. Les conclusions et les propositions qui en découleront dans les prochains mois sont déjà très attendues par nos compatriotes en Guyane. Elles permettront d’orienter et de préciser l’action de l’État face à ces deux fléaux.
Je serai vigilante quant aux solutions préconisées. Je suis convaincue que des mesures pertinentes et efficaces seront appliquées. L’amendement que je vais vous présenter dans quelques minutes s’inscrit pleinement dans les recommandations de ce rapport. Cet amendement propose de permettre à la police judiciaire de pouvoir bénéficier du régime spécial de procédure applicable à la criminalité organisée. Le combat contre l’orpaillage illégal et la pêche illicite est également lié à une meilleure structuration de l’exploitation des ressources aurifères et halieutiques. Les apports législatifs seront complétés à l’occasion de la réforme du code minier. Cette réforme permettra de fixer un cadre plus clair et plus serein pour exploiter ces ressources au service de notre territoire et de son développement économique, dans l’intérêt de la France et des Guyanais mais aussi dans le respect de l’environnement.
Comme l’a dit avant moi Gabriel Serville, les réponses que nous devons apporter passeront aussi et surtout par un renforcement de la coopération transfrontalière avec nos voisins du plateau des Guyanes, en premier lieu, le Brésil et le Surinam. Cette coopération doit être à la fois politique, policière et judiciaire mais aussi économique et sociale. De fait, c’est en développant de manière équitable et concertée nos bassins de vie que nous lutterons plus efficacement contre ces fléaux et que nous garantirons un environnement harmonieux à nos populations.
Applaudissements sur tous les bancs.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes appelés à nous prononcer sur un texte qui concerne les outre-mer et très largement les terres du Pacifique. La Nouvelle-Calédonie connaît depuis un quart de siècle une évolution institutionnelle profonde. Je veux m’associer à l’hommage qui a été rendu aujourd’hui aux hommes de bonne volonté qui n’ont eu de cesse de défendre la paix, tout particulièrement ceux qui nous ont quittés ces dernières semaines. Rien de ce qui se passe en Nouvelle-Calédonie ne peut laisser insensible l’élu de Wallis-et-Futuna que je suis : le Pacifique nous rassemble. La présence en Nouvelle-Calédonie de 30 000 habitants originaires de Wallis et de Futuna nous permet de parler entre nous d’une véritable communauté de vie.
Les Mini-Jeux du Pacifique, dont vous venez d’être le spectateur monsieur le ministre – soyez-en remercié –, sont la plus belle expression de cette communauté qui nous unit. Nos compatriotes wallissiens et futuniens sont revenus en nombre sur la terre de leurs ancêtres pour assurer bénévolement la réussite de cette manifestation. Plus encore, de très nombreux néocalédoniens ont aussi souhaité participer à l’organisation de ces Jeux. La convention signée entre nos territoires pour sa réalisation n’est que l’une des nombreuses illustrations de cette communauté qui nous unit. Sans le matériel, sans la compétence professionnelle, sans l’aide et la gentillesse de nos voisins, le succès n’aurait pas été au rendez-vous.
Je dois en effet saisir l’opportunité qui m’est offerte à l’occasion de l’étude de ces textes pour remercier particulièrement les autorités grâce auxquelles tout cela a été possible : le président du Gouvernement évidemment, M. Harold Martin, mais aussi le président du Congrès, M. Roch Wamytan. Leur présence à nos côtés a illustré le lien qui unit nos territoires, tout comme celui des nombreux membres de l’association Tokoni Fenua autour de son président, M. Amole.
La loi organique de 1999 dispose, dans son article 225, que les relations de la Nouvelle-Calédonie avec les territoires de Wallis-et-Futuna seront précisées par un accord particulier. Signé le 1er décembre 2003 à Paris, cet accord de coopération trouve sa source dans l’accord de Nouméa, plus précisément dans son document d’orientation. Aujourd’hui même, une mission menée par M. François Bockel, chef du service de la coopération régionale de la Nouvelle-Calédonie, se trouve à Wallis pour préparer la quatrième commission de suivi, prévue en fin d’année. Toujours dans le cadre de l’accord particulier, la présidente de l’Assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna, accompagnée de plusieurs élus, est actuellement en Nouvelle-Calédonie pour la signature d’une convention de partenariat avec le Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Cette convention de partenariat sera l’expression éclatante de la communauté d’intérêts que je suis heureux de rappeler, avec force, ici même.
Derrière ces textes, il y a des hommes et des femmes.
La communauté wallisienne et futunienne est heureuse en Nouvelle-Calédonie ; elle y est fortement impliquée dans la vie culturelle et économique. Le développement économique de la Nouvelle-Calédonie a largement fait appel, dans les années 1950, à la main-d’oeuvre de Wallis-et-Futuna, notamment pour le travail du nickel. Les habitants de Wallis-et-Futuna ont, de leur côté, besoin de la Nouvelle-Calédonie, où ils se rendent régulièrement ; ils y bénéficient de tout ce que la taille de leurs îles ne leur permet pas d’avoir, qu’il s’agisse de certains soins médicaux ou d’établissements où poursuivre leurs études. Ces liens, tissés depuis de nombreuses générations, rassemblent les communautés. Il faut donc veiller à maintenir ces bonnes relations. Dans le cadre de la loi sur la citoyenneté calédonienne, par exemple, nos compatriotes doivent être pleinement considérés. Ils doivent pouvoir exercer tous leurs droits en Nouvelle-Calédonie dès lors qu’ils ont choisi d’y vivre et d’y faire vivre leur famille, d’y travailler et de prendre toute leur place dans l’activité culturelle et économique du pays. Il ne faut pas laisser se développer des tensions qui pourraient apparaître entre les communautés. Nous devons réfléchir à la manière d’aider la communauté wallisienne et futunienne à s’épanouir sur ces terres. À cette fin, il nous faut imaginer des mécanismes adaptés. Il ne faut pas que se répètent les événements dramatiques, les heurts entre communautés que nous avons connus. C’est pourquoi j’en appelle à votre vigilance, monsieur le ministre, et à celle de chacun et chacune de ceux qui sont sensibles au devenir de cette France du Pacifique.
Il nous est également demandé de nous prononcer sur des ordonnances qui concernent les habitants de Wallis-et-Futuna. L’ordonnance du 25 janvier 2013 relative aux dispositions applicables à certains agents relevant de l’État ou des circonscriptions, exerçant leurs fonctions sur le territoire des îles Wallis-et-Futuna décide de mutations importantes des fonctions publiques. Le Gouvernement, à travers vos services, a reçu les représentants des personnels concernés. Ceux-ci y ont été sensibles. Associés à la préparation des textes, ils souhaitent l’être également pour ce qui concerne les décrets d’application, qu’ils attendent avec impatience. Ils seront très vigilants quant à leur contenu. Ils demandent que la création d’un nouveau statut soit bénéfique à chacun et que ceux pour qui il n’apporterait aucun progrès puissent le refuser. Ils souhaitent ainsi que les décrets offrent un droit d’option et instaurent des passerelles entre les statuts, d’autant que cela concerne peu de personnes et pour peu d’années. Les personnels jugeront surtout ces décrets en fonction de l’index de correction retenu. Je rappelle qu’il existe, sur le territoire, trois index de correction différents. Nous devons donc être très attentifs aux décisions qui seront prises à ce sujet. Monsieur le ministre, il y a de la part des personnels une forte attente. Ce dossier est en négociation depuis longtemps, et il ne faut pas décevoir ceux pour qui la décision finale sera lourde de conséquences. Enfin, je vous demande de nous éclairer sur le financement de ces mesures. En effet, une collectivité telle que Wallis-et-Futuna n’a pas les moyens de prendre à sa charge de telles mutations.
Monsieur le ministre, il nous faut donc demeurer vigilants pour répondre à l’attente du plus grand nombre.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je me réjouis de constater aujourd’hui, à travers ces deux textes, les efforts consentis par le Gouvernement afin de respecter la parole que l’État a donnée aux Calédoniens en les accompagnant le plus efficacement possible dans le chemin qu’ils ont choisi. Je salue surtout la méthode, fondée sur le dialogue et le consensus, qui permet d’entrevoir un avenir apaisé pour ce pays. Nos outremer étant diverses, le projet de loi ordinaire que nous examinerons en second lieu apporte des ajustements dans diverses collectivités, soit qu’il prenne en compte des préoccupations avérées et qu’il est urgent de traiter, comme en Guyane, soit qu’il apporte des corrections à des processus statuaires récents en cours en Martinique, en Guyane, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. Tel est le cas des dispositions correctives qui, je l’espère, seront adoptées par voie d’amendement pour le département-région de Mayotte, ce qui me donne l’occasion, monsieur le ministre, d’évoquer brièvement le processus de départementalisation de l’île et son pilotage.
Conçu pour être évolutif et adapté, ce processus a été encadré par les accords du 27 janvier 2000, puis par le pacte pour la départementalisation de Mayotte du 16 décembre 2008, qui fut une feuille de route unilatérale proposée par le précédent gouvernement à la population de Mayotte à la veille de la consultation décisive de 2009. Ce pacte, souvent vague et très incomplet, est aujourd’hui de facto caduc, soit que ses dispositions n’aient pas été mises en oeuvre en temps voulu, comme d’ailleurs nombre des dispositions des accords du 27 janvier 2000, soit que l’actuel gouvernement ait corrigé nombre des dispositions injustes qu’il contenait, conformément aux engagements que François Hollande a pris devant les Mahorais le 31 mars 2011.
En effet, depuis juin 2012, le Gouvernement a pris à bras-le-corps les dossiers les plus lourds prévus dans les deux documents cités, et qui avaient souvent pris des retards préjudiciables. Je pense à l’énorme chantier de la réforme fiscale devant entrer en vigueur au 1er janvier 2014 et pourtant prévue depuis 2001, qui a été conduit au pas de charge durant les douze derniers mois, et que nous serons appelés, je l’espère, monsieur le ministre, à approfondir et améliorer dans les mois qui viennent avec le Gouvernement. Je pense également au chantier de la « rupéisation » de Mayotte, qui va intervenir comme prévu au 1er janvier 2014, alors que les retards pris auparavant dans sa défense auprès des instances européennes pouvaient menacer les échéances prévues. Je pense encore au chantier de la fonction publique, avec le traitement des questions de rémunération et des autres dispositions permettant d’offrir aux agents publics exerçant à Mayotte les mêmes droits que leurs homologues ultramarins – un amendement viendra tout à l’heure prolonger ces efforts sur les congés bonifiés. Je pense enfin au chantier de l’égalité sociale, qui de facto a été mis sur les rails avec, dans la plupart des cas, un calendrier resserré au lieu des vingt à vingt-cinq ans envisagés par le précédent gouvernement.
Mais d’autres chantiers ont pris du retard que le Gouvernement sera, là encore, appelé à rattraper, au risque de perturber l’édifice législatif d’ensemble : c’est le cas des dispositions relatives à l’intercommunalité, dont nous allons recadrer tout à l’heure le calendrier de mise en oeuvre, et, au-delà, du chantier de la réforme en profondeur du fonctionnement de nos communes, que l’on a tendance à oublier au seul profit de l’échelon départemental. Le retard pris dans le traitement des questions communales commence à se faire sentir lourdement dans la vie de tous les jours, car les outils actuels sont insuffisants, s’effondrent parfois – par exemple ceux destinés à la construction des écoles – alors que les nouveaux outils intercommunaux tardent à naître, notamment en matière de gestion de déchets, et que d’autres encore sont nécessaires à l’exercice des nouvelles compétences ou à la prise en charge de besoins manifestement non traités dans le domaine social, l’urbanisme ou le développement local.
Je suis persuadé que les efforts que le Gouvernement déploie dans la mise en oeuvre du processus de départementalisation de Mayotte gagneraient, aujourd’hui que le pacte susmentionné est caduc, à être clarifiés dans un nouveau document-cadre dont la mise en oeuvre, davantage concertée, pourrait être lisible par tous. Cela faciliterait notre action législative à l’heure où l’on parle de simplification tous azimuts des normes. Pour l’heure, les dispositions que nous allons, je l’espère, adopter ce soir par voie d’amendement, notamment celles concernant la gouvernance et le financement du service départemental d’incendie et de secours, sont les bienvenues dans ce long processus.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRCUDI.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, ces deux textes sont aussi de nature politique ; il s’agit de textes d’évolution. En Guyane, par exemple, la question de l’orpaillage clandestin n’est pas que technique ; c’est une question fondamentalement économique. A cet égard, je soutiens mes deux collègues de Guyane, qui souhaitent non seulement que la répression soit effective, mais aussi que la filière soit organisée économiquement – et cela vaut également pour la pêche. J’ai eu l’occasion de constater la situation en Guyane, et je compte sur le Gouvernement pour trouver de manière urgente des solutions ; autrement, nous courons à la catastrophe. Quant à la Nouvelle-Calédonie, elle a, au cours de ces vingt-quatre dernières, trouvé, avec beaucoup de difficulté, qu’Éric Gomes a rappelées, et au prix de sacrifices humains, une voie d’émancipation très structurée. Je lui souhaite donc de parvenir au résultat auquel aspire le peuple calédonien, dans la paix et conformément à une volonté qui me semble extrêmement claire.
Nous débattons par ailleurs de quelques règles techniques, concernant notamment la collectivité unique de Martinique et de Guyane, laquelle structure les choses de la manière la plus rationnelle possible pour éviter, par exemple, les difficultés que connaissent d’autres départements ultramarins, faute de n’avoir peut-être pas suffisamment bien négocié les accords financiers et fiscaux. Cela devrait permettre de revoir certaines clauses. Je pense que ce qui se passe aujourd’hui dans les outre-mer, c’est la reconnaissance de la nécessité d’une politique de différenciation. Nous sommes face à une réalité plurielle, à des cultures extrêmement différentes, à des histoires diverses, et la configuration constitutionnelle peut parfaitement se traduire par une appréciation institutionnelle, et surtout en termes d’émancipation, très diverse.
Je suis séduit par le modèle calédonien et je respecte le choix de Mayotte, qui souhaite se « rupéiser » et devenir un département. Mais nous, particulièrement à la Martinique, nous considérons que la différence n’est pas l’ennemie de l’égalité. Le droit à l’égalité est attaché à la citoyenneté tout en étant un droit universel, et le droit à la différence peut constituer un fondement nécessaire à de nouveaux modes de développement dans nos pays et à de nouvelles cultures. C’est dans ce sens qu’en Martinique, nous voulons, même si ce n’est pas de manière identique à la Nouvelle-Calédonie, que la Constitution française permette de mieux reconnaître le droit à la différence et le droit à l’égalité. Cela n’est pas tout à fait le cas avec l’article 74, qui a ses avantages mais aussi des inconvénients totalement incontrôlables.
Monsieur le président, je voudrais conclure sur deux points.
S’agissant de la ratification de l’ordonnance du 13 décembre, je tiens à rappeler à l’Assemblée mais aussi aux Martiniquais que cette fusion des deux collectivités en une n’est pas un exercice facile.
Il a fallu beaucoup de temps pour harmoniser les normes comptables et budgétaires et pour transférer les biens. Par cette ratification, on rassure les personnels de ces deux collectivités, qui emploient près de 3 500 personnes au total. Les personnels, qu’ils soient titulaires ou non titulaires, savent qu’ils seront pris en compte et qu’ils ne seront pas écartés ou éjectés à l’occasion de cette fusion.
En ce qui concerne le transfert des biens des départements et des régions vers cette nouvelle collectivité – point extrêmement important –, toute la difficulté sera de procéder à l’évaluation de ces biens. Il faut que la Martinique dispose d’un outil politique de gouvernance unique, pour éviter que le département et la région ne se marchent sur les pieds sur un territoire de 1 100 kilomètres carrés. La mise en place de cette collectivité est essentielle, et nous veillerons à ce qu’elle se déroule dans les meilleures conditions possibles en 2015.
J’en viens à mon second point. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, ainsi que le ministre du transport, d’avoir accepté de reprendre l’amendement que nous avons proposé en matière de transport. S’il y a un problème crucial dans nos pays, c’est bien l’inorganisation des transports, terrestres et maritimes, de passagers comme de marchandises. C’est la raison pour laquelle cet amendement, qui a été retravaillé par le ministère de l’outre-mer et par celui des transports, tend à instaurer une autorité unique de transport. On en compte en effet dix-sept aujourd’hui, ce qui crée forcément des situations incohérentes : dans certaines îles, les transports maritimes ne sont pas organisés ; dans d’autres, il n’existe pas de connexion entre le transport terrestre et le transport maritime. Il faut mettre fin à l’application mimétique des règles et des droits sur des territoires très différents. Je pense à ce qu’on appelle les « taxi-cos », qu’il faut absolument respecter, parce que ce sont eux qui, pendant des années, ont assuré un transport public. Monsieur le président de la commission, je serais heureux que vous donniez un avis favorable à cette demande d’habilitation, pour que des normes et des règlements soient édictés sur place.
Je voudrais, pour finir, faire un clin d’oeil à M. Molac, qui a dit tout à l’heure qu’il faudrait « décoloniser l’hexagone ». C’est une très belle formule, qui a son importance. Nous avons, dans nos pays, des richesses incroyables, qui tiennent à notre humanité et à notre manière de concevoir la société ; si nous arrivions à en faire profiter une France qui doit se reconnaître comme multiculturelle, ce serait, pour elle, une richesse supplémentaire et inestimable.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et UDI.
La discussion générale commune est close.
La parole est à M. le ministre des outre-mer.
Même s’il convient d’être bref, je ne peux pas laisser sans réponses les interrogations qui se sont exprimées à cette tribune.
Je tiens à tous vous remercier pour la qualité de vos interventions et pour les remarques et les propositions que vous avez formulées. Je répondrai brièvement à chacun d’entre vous.
Merci à vous, monsieur le rapporteur, pour la sagesse de votre intervention, sagesse qui s’est nourrie de vos expériences, de votre connaissance précise du territoire, mais aussi de votre grande expérience politique, grâce à laquelle il vous arrive parfois, sans le dire, de voir plus loin que ce que l’on voit, comme on dit en Nouvelle-Calédonie. Au-delà du visible, il y a de l’invisible : cela, vous le comprenez presque intuitivement, et je vous en remercie. Vous comprenez ce que je veux dire, contrairement peut-être à ceux qui ignorent tout de la civilisation mélanésienne.
Il faut s’en tenir aux commandes du Comité des signataires et nous souscrivons parfaitement à ce qui figure dans le rapport de la commission des lois. Il faut respecter, premièrement ce qu’a fait le Sénat, deuxièmement la commande du Comité des signataires, et troisièmement, autant que possible, les demandes formulées à l’unanimité par le Congrès. C’est selon moi une bonne méthode de travail, même s’il n’est évidemment pas question de supprimer le pouvoir d’amendement des parlementaires que vous êtes.
Je veux saluer l’intervention du président de la commission, Jean-Jacques Urvoas, qui a brossé, en quelques mots forts – très forts – les enjeux qui se poseront à court et à moyen termes pour la Nouvelle-Calédonie, à l’approche des échéances de 2014, puis des suivantes. L’État est neutre et doit le rester, sans pour autant être inerte. Nous ferons donc preuve, si j’ose dire, d’une neutralité active et bienveillante. C’est, me semble-t-il, ce que nous avons fait au Gouvernement, au Sénat hier, et à l’Assemblée nationale aujourd’hui.
Monsieur le député Gomes, j’ai déjà salué le travail de vos collègues sénateurs, mais je tiens également à saluer le vôtre, qui a été actif lors de l’examen de ces deux textes. Merci pour l’ardeur que vous y mettez, la passion qui vous anime et les connaissances précises que vous mobilisez. J’ai été, il est vrai, sensible à l’évocation des heures graves et sombres que votre pays a connues, ainsi qu’à la patience avec laquelle vous avez retissé des liens et construit un nouveau vouloir-vivre ensemble. Cette volonté de vivre ensemble, j’ai encore pu la constater récemment, en me rendant sur place : j’ai vu que vous vous êtes relevés.
J’ai également été sensible aux problèmes économiques et sociaux qui se posent en Nouvelle-Calédonie, et qu’a évoqués le président Urvoas. Il importe en effet de respecter la feuille de route définie par l’accord de Nouméa, sans pour autant – mais vous le savez tous – ignorer le réel. Prendre en compte le réel, cela signifie répondre aux attentes et aux problèmes de la population, à savoir l’école, l’éducation, le savoir, la qualification, la formation, l’emploi, le logement, la santé, l’accès aux soins, la préservation de l’environnement, les loisirs à portée de tous. Chacun d’entre vous a fait allusion à ces questions, et le Gouvernement y reste attentif, même si tous ses pouvoirs en la matière ont à présent été transférés. Il importe de gérer simultanément les deux problématiques que sont le niveau institutionnel, avec l’accord de Nouméa, et les attentes de la population.
Monsieur le député François-Michel Lambert, je crois pouvoir dire que nous avons ressenti votre émotion, lorsque vous avez évoqué le territoire que vous aimez. Je remercie votre groupe pour le soutien qu’il nous apporte sur ces deux textes. Nous accueillons favorablement votre amendement relatif à l’orpaillage en Guyane.
Madame la députée Annick Girardin, je vous remercie de votre soutien et de celui du groupe RRDP. Je m’associe aux félicitations que vous avez adressées à notre rapporteur et au président de la commission. S’agissant de l’article 9 du projet de loi ordinaire sur le centre de gestion et de formation de Saint-Pierre-et-Miquelon, le Gouvernement a effectivement tenu à compléter le dispositif introduit par la sénatrice Karine Claireaux.
Monsieur le député Dolez, vous avez insisté sur le problème de la vie chère en Nouvelle-Calédonie : vous savez que nous en avons fait notre priorité dès la nomination du Gouvernement.
Monsieur le député Bernard Lesterlin, je vous remercie pour votre soutien et pour celui que nous apporte le groupe SRC. Nous agissons de manière pragmatique – et j’ose dire émancipatrice – en faveur des outre-mer : ces deux textes en sont l’illustration. Sur la question de l’orpaillage en Guyane, que vous avez évoquée, vous avez compris que la démarche du Gouvernement consiste à tenir compte des propositions de la députée Chantal Berthelot et d’atteindre les objectifs d’efficacité dans la répression, que nous partageons.
Monsieur le député Daniel Gibbes, je vous remercie vraiment pour le soutien que nous apporte votre groupe, qui avait jusqu’ici l’habitude de s’abstenir, même s’il disait mener une abstention constructive. Aujourd’hui, vous faites un choix clair et je vous en remercie, car nous sommes vraiment ainsi dans l’esprit de l’accord de Nouméa, qui est transpartisan par essence. Je vous renouvelle mes remerciements et vous prie de les transmettre aux membres de votre groupe.
Monsieur le député Paul Molac, vous avez proposé une belle formule : « décoloniser la métropole ». Au-delà de la formule, il m’est déjà arrivé de rappeler dans ces murs, lorsque j’étais moi-même parlementaire, que les outre-mer sont un formidable laboratoire institutionnel. Ils prouvent que notre République dispose des ressources constitutionnelles qui lui permettent de tenir compte des spécificités de ses territoires, sans remettre en cause leur appartenance à l’ensemble national. Je crois comme vous qu’il ne faut pas voir cela avec une méfiance excessive, mais ce n’est pas évident.
Monsieur le député Gabriel Serville, vous êtes intervenu sur la lutte contre l’orpaillage et la pêche illégale en Guyane et j’ai noté avec satisfaction votre soutien aux initiatives prises par votre collègue Chantal Berthelot. Nous allons nous retrouver sur ces textes, et j’espère par ailleurs pouvoir présenter, dans le nouveau texte relatif à la compétitivité et à l’emploi dans les outre-mer, un dispositif précis et innovant pour la Guyane.
Madame la députée Chantal Berthelot, vous avez décrit avec des mots très forts la situation de la Guyane, qui souffre du pillage de ses ressources aurifères et halieutiques. Je tiens à souligner tout particulièrement combien vous vous êtes impliquée pour enrichir notre projet de loi ordinaire. Je vous en remercie du fond du coeur, car vous avez vraiment amélioré ce texte. La chancellerie nous soutient – c’est une très bonne chose – et, tout à l’heure, le Gouvernement présentera un certain nombre d’amendements allant dans le sens que vous demandez. Je le répète, vous avez utilement complété ce texte, et vous l’avez amélioré.
Monsieur le député Napole Polutélé, de Wallis-et-Futuna, merci pour vos paroles, qui donnent une consistance supplémentaire à la fraternité qui unit le Pacifique, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna. Il est vrai que j’ai pu la mesurer à l’occasion des Mini-Jeux du Pacifique. J’ai écouté attentivement les demandes que vous avez formulées, notamment au sujet de l’accord particulier, et nous aurons l’occasion d’y revenir.
Monsieur le député Ibrahim Aboubacar, merci pour vos propositions. Merci pour Mayotte. Nous aurons l’occasion de nous retrouver très bientôt sur d’autres chantiers, notamment la départementalisation, la « rupéisation » et la fiscalisation, et j’espère que nous parviendrons à améliorer les textes.
Monsieur le député Serge Letchimy, enfin, je vous remercie pour votre intervention. La Constitution française présente une plasticité suffisante pour permettre certaines évolutions, qui dépendent de la volonté des peuples. Il est vrai que ces textes ne sont pas seulement techniques et qu’il y a encore des efforts à faire. L’amendement que vous proposez est une bonne tentative d’adapter les textes aux réalités de nos territoires.
Applaudissements.
J’appelle en premier lieu, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi organique portant actualisation de la loi organique no 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.
Il s’agit là de l’article essentiel du projet de loi organique, comme cela a été dit au cours de la discussion générale. Nous en sommes d’autant plus satisfaits que nous souhaitions que les autorités administratives indépendantes créées par la Nouvelle-Calédonie soient véritablement indépendantes et que toutes les dispositions nécessaires dans la loi, dès lors qu’elles relèvent de la compétence de l’État, puissent contribuer à cette indépendance.
Un certain nombre de contraintes ont donc été prévues : les membres de ces autorités administratives indépendantes sont soumis à certaines incompatibilités, qui sont de nature à garantir ; les crédits nécessaires au fonctionnement des autorités seront inscrits au budget de la collectivité Nouvelle-Calédonie ; enfin – c’est là une disposition très importante pour nous –, les membres de ces autorités administratives indépendantes devront être auditionnés par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Ces auditions seront publiques et le Congrès devra valider les candidatures à la majorité des trois cinquièmes.
Il s’agit donc d’un dispositif assez novateur, qui n’a pas, à ma connaissance, d’équivalent au sein de l’organisation institutionnelle de la République, même s’il existe dans d’autres systèmes juridiques. Il est, selon moi, de nature à garantir de manière forte l’indépendance de cette autorité, ce qui est indispensable.
Je rappelais tout à l’heure que nous avons désormais une véritable loi antitrust en Nouvelle-Calédonie, qui prévoit des dispositifs extrêmement contraignants pour faire en sorte que la concurrence puisse s’exercer de manière libre et efficiente dans un certain nombre de secteurs d’activité qui sont aujourd’hui dans une situation duopolistique ou monopolistique. Ce gendarme aura donc toute sa place dans notre dispositif, et c’est pourquoi nous soutenons, bien évidemment, cet article 1er .
Nous en venons aux amendements à l’article 1er.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 32 .
Cet amendement porte sur la question de l’indépendance de l’autorité. Il est ajouté dans la loi organique statutaire qu’un membre d’une autorité administrative indépendante ne peut pas occuper d’emploi public ; nous proposons de préciser qu’il est question d’emploi public « au service de la Nouvelle-Calédonie, d’une collectivité locale ou d’un établissement public local ».
En effet, nous considérons que des magistrats ou des professeurs d’université, par exemple, peuvent avoir leur utilité en tant que membres d’une autorité administrative indépendante ; pour autant, ils ne sont pas prêts à abandonner entièrement leur emploi. En interdisant de manière aussi large à un membre d’une autorité administrative indépendante d’occuper un emploi public, nous nous priverions donc de compétences.
Cet amendement vise donc à renforcer encore, si besoin était, l’indépendance de l’autorité, et à s’assurer que celle-ci puisse accueillir toutes les compétences requises pour être la plus efficace possible.
L’amendement de M. Gomes est beaucoup plus fragile que le texte adopté en commission, puisqu’il fait référence à « tout autre emploi public au service de la Nouvelle-Calédonie », expression sujette à des interprétations diverses et donc potentiellement source de contentieux. Par ailleurs, l’adoption de cet amendement reviendrait à modifier un texte adopté à l’unanimité par la commission, ce qui ne se pratique pas dans cette assemblée. J’émets donc un avis défavorable.
Je pense que la rédaction proposée par mon amendement est claire, mais s’il existe un doute juridique sur l’opportunité de son adoption, j’accepte de le retirer.
L’amendement no 32 est retiré.
Il s’agit une nouvelle fois de renforcer l’indépendance de l’autorité administrative. Il conviendrait que celle-ci puisse être elle-même ordonnatrice de ses dépenses et de ses recettes. L’amendement que j’avais déposé en ce sens n’a pas été retenu, au motif qu’il était irrecevable au titre de l’article 40. Dès lors, je propose un dispositif différent, qui prévoit qu’un rapport sur les modalités permettant de garantir l’indépendance des autorités administratives indépendantes locales puisse être rendu au Parlement par le Gouvernement.
Il est possible que la compétence de donner à l’autorité la possibilité d’ordonnancer elle-même ses recettes et ses dépenses ne soit pas une compétence de l’État, mais une compétence de la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de son pouvoir d’organisation de l’autorité. Si cela m’était confirmé, je retirerais bien évidemment mon amendement.
Monsieur Gomes, la jurisprudence constante de la commission des lois est d’émettre un avis défavorable à chaque fois qu’est proposée la rédaction d’un rapport. En effet, nous avons une grande capacité à demander des rapports mais nous ne faisons absolument rien de ceux qui nous sont remis ! Soit nous en avons vraiment besoin, et le Parlement en prend alors l’initiative dans le cadre d’une mission d’information, soit nous n’en avons pas besoin, et il ne sert alors à rien de les rédiger. Je n’ai pas la paternité de cette jurisprudence constante : au cours de la précédente législature, Jean-Luc Warsmann tenait les mêmes propos et, de ce point de vue, je suis pour la continuité du service public !
À cela s’ajoute, dans le cas d’espèce, un article de notre règlement qui prévoit depuis 2009 que l’Assemblée nationale décide de vérifier l’applicabilité d’un texte six mois après son entrée en vigueur. D’ailleurs, depuis le début de cette législature, nous désignons, en même temps que le rapporteur, un co-rapporteur d’application qui est nécessairement un député membre de l’opposition. En l’espèce, le co-rapporteur d’application sera Dominique Bussereau : vos demandes sont donc satisfaites par anticipation.
Même avis. Il me semble que la demande est déjà satisfaite : je demande donc à M. Gomes de bien vouloir retirer cet amendement.
Dès lors que l’avenir de cette disposition est dans les mains de Dominique Bussereau, je retire bien évidemment mon amendement.
Sourires.
L’amendement no 8 est retiré.
L’article 1er est adopté.
Les articles 2 et 3 sont successivement adoptés.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 9 rectifié .
Il s’agit d’une amélioration visant à éviter une modification de la loi organique à chaque fois qu’une substance minière est identifiée. Jusqu’à présent, la loi organique statutaire mentionne « les hydrocarbures, le nickel, le chrome et le cobalt » ; le présent projet de loi organique prévoit d’ajouter à cette liste les « terres rares ».
Lorsque cet amendement a été débattu en commission, il m’a été répondu qu’il n’était juridiquement pas envisageable de renvoyer à la législation nationale. Je le retire donc.
L’amendement no 9 rectifié est retiré.
L’article 4 est adopté.
Article 4
Puisqu’il s’agit d’une demande de rapport, j’ai compris que mon amendement était mort-né.
Mais je vais quand même le présenter, monsieur le président. Vous n’y échapperez pas ! Le rapporteur et le ministre non plus, d’ailleurs !
Sourires.
Le sujet est important pour nous.
La convention de Montego Bay définit les droits des États côtiers sur les fonds marins et le sous-sol d’une zone dénommée « plateau continental ». En application de ces dispositions, la France a déposé auprès des Nations unies, le 22 mai 2007, un dossier de demande d’extension de son plateau continental, qui inclut en particulier deux zones situées l’une au sud-ouest et l’autre au sud-est de la Nouvelle-Calédonie. Le Gouvernement a demandé aux Nations unies, en juillet 2007, que l’examen de la première de ces deux zones soit repoussé sine die, du fait du désaccord entre la France et le Vanuatu concernant leur frontière maritime commune. En revanche, la seconde zone, d’une surface d’environ 80 000 kilomètres-carrés, a fait l’objet, le 2 septembre 2009, d’une recommandation positive de l’organe des Nations unies chargé de l’application de la convention. Les limites de cette zone coïncidant avec les coordonnées retenues par l’accord bilatéral de 1982 entre la France et l’Australie, cette extension doit être considérée comme définitive.
Cet amendement prévoyait la remise d’un rapport par le Gouvernement sur l’opportunité d’anticiper l’adoption du décret devant permettre à la Nouvelle-Calédonie d’exercer sa responsabilité sur cette zone du plateau continental. J’ai bien compris que le rapport ne serait pas remis : après avoir exposé le sujet, je retire donc cet amendement.
L’amendement no 11 est retiré.
L’article 4 bis est adopté.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 12 tendant à insérer un article additionnel après l’article 4 bis.
Plusieurs orateurs ont évoqué la question des transferts de compétences. C’est un sujet majeur pour notre pays. Nous nous émancipons au sein de la République : c’est formidable. Dès lors, nous décidons qu’un certain nombre de compétences normalement exercées par l’État sont exercées par la Nouvelle-Calédonie : une nouvelle fois, c’est formidable.
Cependant, une fois la compétence transférée, encore faut-il être capable de l’exercer de manière efficiente, de sorte que les habitants de Nouvelle-Calédonie considèrent que l’exercice de cette compétence par les institutions locales en lieu et place de l’État est facteur d’amélioration dans leur vie quotidienne. Or ce n’est pas toujours le cas. Un certain nombre de compétences ont été transférées. Le droit des assurances est régulièrement cité : nous en disposons depuis plus de vingt ans mais il n’est pas exercé, et le président de la commission des lois a signalé très récemment que c’est le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie qui a dû réunir l’ensemble des acteurs économiques et sociaux pour régler des problèmes de vie chère pour lesquels l’État n’exerce quasiment plus aucune compétence.
Mon amendement se situe dans cette perspective. Conformément à l’accord de Nouméa, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a décidé le transfert du droit civil et du droit commercial. Or, s’agissant du droit civil, nous devons faire face à un problème de conflit de normes : le droit civil métropolitain et le droit civil calédonien seront très proches, mais comporteront tout de même un certain nombre de différences. Comment traite-t-on le sujet dès lors que nous sommes confrontés à des personnes relevant de deux droits civils distincts ?
Tel est le sens de mon amendement, dont l’exposé sommaire fait référence à un avis du Conseil d’État selon lequel le traitement du conflit de normes relève de la loi organique.
Il est vrai qu’il s’agit d’un sujet important, mais M. Gomes sait parfaitement que les compétences détenues par l’État en matière d’état et de capacité des personnes ont été transférées à la Nouvelle-Calédonie en juillet 2013. Par conséquent, si nous adoptions cet amendement qui prévoit l’élaboration d’une future loi organique pour fixer des « critères de rattachement à appliquer en matière de statut personnel », le législateur n’exercerait pas pleinement les compétences qu’il tient de l’article 77 de la Constitution. Surtout, nous encourrions un risque de censure du Conseil constitutionnel pour incompétence négative. En ce domaine, ni le comité des signataires ni le Congrès n’ont émis la moindre observation. Je propose donc de rejeter cet amendement, à moins que son auteur ne le retire.
Vous le verrez bien : d’ici six mois, un an ou deux ans, nous adopterons des dispositions organiques sur les conflits de normes. L’affaire sera obligatoirement traitée juridiquement de cette manière ! Le congrès a répété cette nécessité, non dans le cadre de l’avis officiel qu’il a rendu sur ce projet de loi organique mais dans le cadre de la commission qui s’est réunie ensuite. Le texte de cet amendement avait été préparé à l’origine par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie – c’est le seul dans ce cas –, car il s’agit d’un vrai sujet sur lequel le Gouvernement lui-même est aujourd’hui en difficulté. J’espère avoir suffisamment attiré l’attention du ministre sur cette question pour qu’elle soit traitée dans les meilleurs délais possibles. Je retire mon amendement.
L’amendement no 12 est retiré.
L’amendement no 33 prévoit la remise d’un rapport sur cette question. Le retirez-vous également, monsieur Gomes ?
L’amendement no 33 est retiré.
L’amendement no 13 est retiré.
Nous sommes, bien sûr, favorables à ce que la composition du conseil économique, social et environnemental de la Nouvelle-Calédonie soit complétée par des représentants d’associations de défense de l’environnement désignés parmi ceux qui composent le comité consultatif de l’environnement. Cependant, ce comité est constitué de deux catégories de personnes : d’une part, les représentants des institutions et, d’autre part, six représentants des associations – cinq associations de défense de l’environnement et une association de consommateurs.
Le présent amendement vise à préciser que ces deux nouveaux membres sont choisis « parmi les représentants des associations déclarées ayant pour objet la protection de l’environnement ». Il m’a été répondu en commission que cela allait de soi, et que l’on faisait confiance au discernement des autorités de nomination ! Je veux bien considérer également que cela va de soi : je retire mon amendement.
L’amendement no 14 est retiré.
L’article 5 est adopté.
Les articles 6 et 6 bis sont successivement adoptés.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 17 tendant à insérer un article additionnel après l’article 6 bis.
J’ai du mal à comprendre pourquoi les chantres de la transparence ne veulent pas étendre à la Nouvelle-Calédonie des dispositifs extrêmement transparents.
Le projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique, en cours d’examen par le Conseil constitutionnel, prévoit deux niveaux de transparence : l’un pour les parlementaires, les présidents des exécutifs et les grands maires, l’autre pour la majorité des autres élus.
Cet amendement et quelques autres – nous pourrons le cas échéant les retirer, une fois que le débat aura eu lieu – proposent qu’en Nouvelle-Calédonie, puisque nous sommes dans une situation particulière de très large émancipation où nous nous gouvernons nous-mêmes, exception faite des compétences régaliennes, et où nous avons la capacité à édicter la loi, les exigences de l’État à l’égard de ses élus soient les mêmes que celles de l’État à l’égard des parlementaires de France métropolitaine.
Tel est le sens de cet amendement, ainsi que d’un ou deux autres amendements qui suivent. Il n’a pas été considéré comme pertinent en commission des lois : je le regrette. Dans le cas présent, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a émis un avis unanime lorsque sa commission de la législation s’est réunie sur ce sujet.
Cet amendement a déjà été présenté à l’Assemblée nationale et rejeté à deux reprises dans le cadre de la discussion du projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique. Il vise à soumettre l’ensemble des membres du congrès et du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à l’obligation de rendre publiques, sous forme de droit de consultation, leurs déclarations de patrimoine. Or l’Assemblée nationale a choisi de traiter la Nouvelle-Calédonie comme les collectivités locales de métropole et comme toutes les collectivités ultramarines : seuls les présidents du congrès et du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie verront leurs déclarations de patrimoine rendues publiques, tandis que les déclarations des autres membres du congrès et du Gouvernement demeureront confidentielles. Il n’y a donc aucune raison de revenir sur le choix de l’Assemblée nationale.
En tout état de cause, il serait techniquement impossible d’adopter un amendement dont les dispositions seraient directement concurrentes du projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique, qui a été définitivement adopté par le Parlement et qui est actuellement en cours d’examen par le Conseil constitutionnel. La commission a donc émis un avis défavorable.
Le dispositif qui a été étendu à notre territoire est celui qui est applicable à toutes les collectivités locales métropolitaines et aux autres collectivités ultramarines. Or nous différons de ces collectivités en ce que nos compétences sont beaucoup plus larges que les leurs.
En outre, nous sommes dans une petite île où par définition, l’interpénétration des intérêts politiques et économiques peut être importante. C’est la raison pour laquelle il nous semblait pertinent qu’une exigence de transparence plus forte soit prévue pour la Nouvelle-Calédonie. Eu égard aux avis défavorables de la commission et du Gouvernement, je retire, à regret, mon amendement.
L’amendement no 17 est retiré.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 16 , qui relève de la même logique.
Non, l’amendement no 16 concerne l’incompatibilité – sujet qui aurait dû être traité de longue date – entre des fonctions exécutives. Peut-on, en métropole, être président de conseil général, président de conseil régional et maire ? Non, depuis 2000, l’affaire est réglée : ce cumul n’est pas possible. Le Parlement avait décidé d’étendre ce dispositif à la Nouvelle-Calédonie, mais le Conseil constitutionnel l’a censuré au motif que l’extension avait été introduite par une loi simple et non par une loi organique. Comme sur le sujet des présidents de province, il est proposé ici de faire en sorte que le droit positif applicable en matière de cumul des mandats soit, en Nouvelle-Calédonie, équivalent à celui qui prévaut en France métropolitaine.
Cet amendement vise à étendre à l’ensemble des membres du gouvernement de Nouvelle-Calédonie – un amendement concernera spécifiquement le président – l’interdiction d’être simultanément maire. Il ne s’agit pas d’une disposition irréaliste et il pourrait être souhaitable qu’une telle disposition finisse par s’appliquer en Nouvelle-Calédonie. Toutefois, je considère que le moment n’est pas opportun. Nous sommes en effet à quelques mois des élections municipales et les stratégies de campagne, de carrière, se sont déjà mises en place. Décider qu’à partir du 1er juin 2014, autrement dit dès maintenant, un certain nombre de responsables politiques de province et du gouvernement ne pourraient plus être maires créerait localement des difficultés supplémentaires qu’il convient d’éviter. En revanche, dans une période non électorale, il pourrait être possible d’aboutir à une solution de ce type, qu’il faudrait du reste compléter car il s’agit de cumul de mandats horizontaux. De même qu’en métropole, on n’a pas réglé tous les cas de cumuls horizontaux, il faudrait alors traiter l’ensemble de ces cumuls de manière plus globale en Nouvelle-Calédonie.
En dépit de l’intérêt que pourrait présenter cet amendement, ses conséquences risquent d’être particulièrement négatives. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.
L’amendement no 16 n’est pas adopté.
Il s’agit toujours de transparence, mais je n’ai guère de succès avec ce sujet…
Il me semble que, dans sa rédaction actuelle, le texte soustrait les membres des assemblées de province qui ne sont ni membres du congrès, ni vice-présidents de l’assemblée aux obligations de déclaration qui s’imposent aux autres élus. C’est pourquoi nous proposons de remplacer au dernier alinéa de l’article 161 le mot « vice-présidents » de l’assemblée de province par le mot « membres ». Un éclairage nouveau pourrait-il nous être donné par le ministre ou le rapporteur ?
L’amendement vise à étendre aux membres des assemblées de province les obligations de déclaration de patrimoine et d’intérêts qui sont prévues par la loi sur la transparence de la vie publique. La question a été réglée par ce texte. Les membres des assemblées de province ne sont effectivement pas concernés par les déclarations de patrimoine et d’intérêts : seuls les présidents et vice-présidents des assemblées de province le sont. Je fais remarquer que la même solution a été retenue pour la métropole. L’ensemble des conseillers généraux et des conseillers régionaux ne sont pas concernés par les obligations déclaratives : seuls ceux qui détiennent une délégation de fonction de leur président le sont. Le texte résultant de la loi sur la transparence est parfaitement cohérent en métropole et en Nouvelle-Calédonie. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.
L’amendement no 18 est retiré.
Une nouvelle fois, je propose une disposition qui vise à éviter le cumul de mandats. Il s’agit, en l’espèce d’un cumul qui est toujours possible dans notre pays, alors qu’il ne l’est plus en métropole depuis quatorze ans. Actuellement, en effet, il est possible de cumuler les fonctions de président d’une assemblée de province avec celles de maire. Mon amendement vise à rendre cette pratique impossible, à partir du 1er juin 2014, après les prochaines élections.
Lors de l’examen d’un amendement similaire, j’ai souligné, tout à l’heure, que si la question n’était pas illégitime, le moment de légiférer en la matière était inopportun, puisque nous sommes à la veille d’une période électorale. C’est la raison pour laquelle j’émets le même avis que tout à l’heure, à savoir un avis défavorable.
M. Gomes va répondre, mais je ne suis pas certain que la disposition proposée soit d’application immédiate.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Je partage l’avis du rapporteur. À quelques mois d’une élection, il serait inopportun de donner l’impression de régler quelques cas concernant des personnes particulières. Toutefois, puisque l’entrée en vigueur de cette disposition est fixée au 1er juin 2014, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
Je remercie le ministre de l’outre-mer pour cet appel à la sagesse qui, je n’en doute pas, sera entendu. Comme en métropole et dans les DOM, les élections municipales renouvellent l’ensemble des responsabilités à l’échelle communale. Il en va de même pour les élections provinciales, qui vont permettre de renouveler les responsabilités au niveau des trois provinces, du congrès et du gouvernement. Il ne s’agit pas d’interférer dans la situation actuelle. Mon amendement vise seulement à mettre en place une règle pour l’avenir afin qu’après les élections, la situation soit équivalente en Nouvelle-Calédonie à celle de la métropole. Cela me paraît être de saine administration.
L’amendement no 15 n’est pas adopté.
L’amendement no 19 concerne toujours la transparence. Mais, étant donné le peu de succès rencontré par ceux de mes amendements ayant trait à ce sujet, je le retire.
L’amendement no 19 est retiré.
Les articles 7, 7 bis sont successivement adoptés.
Il s’agit d’un amendement important pour la Nouvelle-Calédonie, qui n’est pas une collectivité comme les autres. On peut s’en féliciter ou s’en attrister, mais les choses sont ainsi. L’accord de Nouméa prévoit le dispositif particulier suivant : « Les Néo-Calédoniens seront formés et associés à l’exercice de responsabilité dans le domaine des compétences régaliennes dans un souci de rééquilibrage et de préparation à cette nouvelle étape. » Voilà ce que dit l’accord de Nouméa, qui a été constitutionnalisé.
Quant au comité des signataires de l’accord de Nouméa – dont j’ai noté que le rapporteur et le président de la commission des lois faisaient, à juste titre, grand cas de ses conclusions –, il s’est réuni le 6 décembre 2012 sous l’autorité du Premier ministre et a établi que « s’agissant de la représentation des Calédoniens, et plus particulièrement des Kanaks, dans la fonction publique d’État régalienne, le comité prend acte de la volonté affirmée par le Premier ministre de conduire une politique volontariste afin que des progrès significatifs soient accomplis pendant la précédente législature. »
Tous les ingrédients sont réunis : l’accord de Nouméa, le comité des signataires et l’avis favorable unanime du congrès de la Nouvelle-Calédonie. C’est sur cette base que nous proposons que, dans les affections prononcées dans la fonction publique de l’État en Nouvelle-Calédonie, priorité soit donnée aux fonctionnaires bénéficiant de la citoyenneté calédonienne. La même priorité s’applique aux affectations de magistrats et de militaires en Nouvelle-Calédonie.
En clair, lorsqu’un poste est vacant dans une administration de l’État en Nouvelle-Calédonie – essentiellement désormais des administrations régaliennes –, le fonctionnaire d’État, citoyen calédonien, qui est en poste en métropole et fait acte de candidature est, dès lors que son profil correspond au profil du poste, prioritaire pour être retenu sur ce poste. Je citerai un exemple concret. Nous avons aujourd’hui soixante à quatre-vingts fonctionnaires de police calédoniens en poste en France métropolitaine et plus particulièrement dans la région Ile-de-France, qui souhaitent revenir au pays après avoir accompli les cinq années statutaires. Or ils ne le peuvent pas, étant donné le nombre extrêmement réduit de postes qui se libèrent chaque année – trois à quatre par an – et le fait qu’ils ne peuvent y être affectés en priorité.
Mon amendement vise à traiter cette question, dans le prolongement de l’accord de Nouméa et du comité des signataires.
L’article 24 de la loi organique permet à la Nouvelle-Calédonie de prendre des mesures permettant de favoriser l’accès à l’emploi des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes qui justifient d’une durée suffisante de résidence. Sont ainsi concernés par ce droit de préférence locale, l’emploi salarié dans le secteur privé ainsi que la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie et la fonction publique communale. S’agissant de l’emploi salarié dans le secteur privé, les règles sont aujourd’hui définies par la loi de pays relative à la protection, à la promotion et au soutien de l’emploi local.
S’agissant de la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie et de la fonction publique communale, il n’y a pas eu de loi de pays prise pour favoriser l’emploi local des citoyens calédoniens. L’amendement qui nous est proposé concerne la fonction publique d’État. Or, aussi longtemps que la Nouvelle-Calédonie n’aura pas accédé à la pleine souveraineté, la gestion des personnels de l’État relèvera de la seule compétence de l’État.
Au demeurant, dans sa philosophie, cet amendement me surprend, venant de vous, monsieur Gomes. Il signifie en effet que la Nouvelle-Calédonie veut dès maintenant détenir un pouvoir de décision concernant un secteur régalien de l’État. Ce sera le cas quand la Nouvelle-Calédonie sera souveraine : elle fera alors ce qu’elle veut s’agissant de ses fonctionnaires. Mais, actuellement, la Nouvelle-Calédonie fait partie de l’ensemble français, elle n’est pas souveraine en matière de police. Par conséquent, les règles qui doivent s’appliquer sont les dispositions fixées par l’État.
J’ajoute d’ailleurs que l’accord, s’il vise à favoriser la formation de cadres calédoniens, ne prévoit aucune obligation de les affecter sur place, contrairement à l’analyse que vous en faites. S’agissant de fonctionnaires d’État, les mêmes règles s’appliquent à l’ensemble du territoire français.
C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.
La fonction publique d’État demeure une compétence de l’État. Avis défavorable.
Je n’ai pas bien compris où le rapporteur a voulu nous emmener. À quel moment ai-je dit que je souhaitais que la Nouvelle-Calédonie exerce des compétences régaliennes ? Là n’est pas la question. Ce sujet-là, il appartiendra au peuple de le trancher dans le cadre du référendum.
La question qui nous occupe se pose en termes beaucoup plus simples : les fonctionnaires d’État originaires de Nouvelle-Calédonie qui travaillent aujourd’hui dans l’Hexagone souhaitent revenir travailler dans l’administration d’État en Nouvelle-Calédonie.
Mon collègue polynésien parle d’ «océanisation » des cadres, nous parlons de «calédonisation » des cadres.
Est-ce une invention du député Philippe Gomes et des signataires de l’amendement ? Nullement ! J’ai lu – le document est facilement accessible – ce qu’a dit le comité des signataires – ce qui équivaut aux tables de la loi, comme cela nous a été dit et rappelé en commission : « S’agissant de la représentation des Calédoniens et plus particulièrement des Kanaks dans la fonction publique d’État régalienne, le comité prend acte de la volonté affirmée par le Premier ministre de conduire une politique volontariste afin que des progrès significatifs soient accomplis ». Les choses sont claires.
Je propose donc que des progrès significatifs soient accomplis pour que dans les administrations régaliennes de l’État en Nouvelle-Calédonie, il y ait plus de Calédoniens. Cela est possible, dès lors que l’on permet à ceux qui sont déjà formés et qui exercent en métropole de revenir au pays.
Rappelons pour finir que la loi de 1984 sur la fonction publique d’État établit déjà des priorités dans les affectations, pour rapprochement de conjoints notamment. Il s’agirait seulement d’y ajouter le rapprochement d’un fonctionnaire avec son pays. Je ne vois pas en quoi cela nous ferait sortir de la République. Cela nous ancre, au contraire, davantage dans la République car cela permet aux Calédoniens qui réussissent aux concours de revenir exercer dans leur pays. Et je suis certain que cette disposition, si elle était mise en oeuvre en Nouvelle-Calédonie, s’appliquerait utilement dans le reste de l’outre-mer.
Je maintiens donc mon amendement.
La gestion des fonctionnaires d’État, monsieur Gomes, répond à des normes définies par l’État, comprenant système de points et commissions paritaires. Par conséquent, je ne vois pas au nom de quoi un fonctionnaire, parce qu’il serait kanak ou calédonien, devrait obligatoirement être nommé en Nouvelle-Calédonie. S’il répond aux conditions de points, d’ancienneté en vigueur dans la fonction publique, il pourra naturellement être affecté là où il le désire. Mais pour l’heure, je vois mal comment nous pourrions aller au-delà s’agissant encore une fois d’une compétence qui est une compétence d’État.
Certes, c’est une compétence d’État et je ne veux pas que le débat soit troublé : il ne s’agit pas de se placer en dehors des statuts. Il existe des conditions de durée de service, de points et elles ont toutes vocation à être respectées sur l’ensemble du territoire de la République par l’ensemble des fonctionnaires d’État.
Simplement, la loi de 1984 prévoit des priorités dans l’affectation, dès lors que le fonctionnaire remplit les conditions fixées par les statuts. Avec ma collègue Sonia Lagarde et mes collègues du groupe UDI, je propose simplement qu’une priorité complémentaire soit prévue : un fonctionnaire d’État citoyen calédonien oeuvrant en France métropole pourra être prioritairement affecté à un poste vacant en Nouvelle-Calédonie dès lors que celui-ci correspond à son profil et que plusieurs candidats sont en concurrence. Cela relève du simple bon sens, croyez-moi.
J’aimerais m’associer à M.le rapporteur. Je peux entendre et comprendre la position de M. Gomes mais je ne peux l’approuver en l’état. La fonction publique est régie par des règles d’affectation et de mutation qui font partie intégrante de la gestion des corps. Une mission a été confiée à un parlementaire sur les collectivités régies par l’article 74. On pourrait inventer, il est vrai, certains dispositifs compte tenu du statut de la Nouvelle-Calédonie. Mais pour le moment, les règles qui prévalent s’appliquent intégralement, notamment aux magistrats et aux militaires, que vous avez évoqués. Dans le cadre des compétences qui sont les vôtres, nous ne pouvons souscrire à votre proposition.
L’amendement no 20 n’est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 22 rectifié .
Cet amendement vise à donner une assise juridique au recours à des moyens de communication électronique pour la transmission de documents. J’y ai apporté une rectification à la suite des observations formulées par le service de la séance.
L’amendement no 22 rectifié , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement vise à lever une ambiguïté dans la rédaction actuelle de l’article 86 concernant les compétences des agents assermentés chargés de faire appliquer les textes de la Nouvelle-Calédonie ou des collectivités calédoniennes.
Si cette ambiguïté est levée par les explications du ministre et du rapporteur, je retirerai cet amendement.
Par rapport au droit existant, il s’agit d’étendre le pouvoir de constater les infractions aux agents assermentés des établissements publics et des autorités administratives indépendantes de la Nouvelle-Calédonie.
D’une part, je relève que dans son avis, le congrès ne s’est pas prononcé en faveur d’une telle extension.
D’autre part, selon les informations que nous avons pu recueillir lors de notre mission sur place, aucun établissement public n’est aujourd’hui concerné par cette disposition. S’agissant des autorités administratives indépendantes, leurs agents se sont déjà vu reconnaître par l’article 1er du présent projet de loi organique des pouvoirs de sanction, d’investigation et de règlement des différends, nécessaires à l’accomplissement de leurs missions. Par conséquent, sur ce point, l’amendement est déjà satisfait. Il serait donc préférable que vous le retiriez, monsieur Gomes.
L’amendement no 23 est retiré.
Le présent amendement vise à permettre au congrès de la Nouvelle-Calédonie de prévoir des sanctions contre toute personne s’étant opposée ou ayant tenté de s’opposer à l’action des agents assermentés.
Un avis du Conseil d’État sur une loi comprenant des sanctions analogues semble indiquer que le congrès, en l’état actuel de la législation, ne peut prévoir de telles sanctions.
Là encore, si des éclaircissements étaient apportés sur ce point, cet amendement pourrait être retiré.
En application de l’article 21 de la loi organique statutaire, seul l’État est compétent en matière de procédure pénale. Il ne peut donc pas déléguer au congrès de la Nouvelle-Calédonie le soin de définir le régime de sanctions à l’encontre des personnes ayant tenté de s’opposer à l’action des agents assermentés de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et des communes. Il faudra attendre le transfert de cette compétence, lequel s’opérera automatiquement lorsque la Nouvelle-Calédonie aura décidé d’être souveraine.
Avis défavorable donc.
Je demanderai à M. le député de bien vouloir retirer son amendement au bénéfice de l’engagement suivant.
L’objectif de l’amendement paraît légitime puisqu’il vise à réprimer des comportements inadmissibles. Pour ce faire, je vous propose de recourir aux dispositions prévues au dernier alinéa de l’article 86 de la loi statutaire qui prévoit que les agents assermentés peuvent constater les infractions locales dans les conditions fixées par la loi. C’est dans ce cadre que le Gouvernement pourra présenter un projet de loi créant un délit d’obstacle à l’exercice des fonctions des agents assermentés de la Nouvelle-Calédonie, après avoir procédé à la consultation des institutions locales concernées.
Pour toutes ces raisons et en m’engageant sur ce point, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Je remercie M. le ministre de l’outre-mer pour cet éclaircissement et cette proposition qui satisfont notre amendement. Je le retire donc.
L’amendement no 24 est retiré.
Cet amendement aborde un sujet important qui n’est sans doute pas aisé à traiter juridiquement.
Aujourd’hui, dans le cadre de la modification constitutionnelle intervenue en 2008, un groupe au sein du Parlement peut déposer une proposition de loi ou une proposition de résolution concernant la Nouvelle-Calédonie qui serait examinée lors d’une niche parlementaire, sans que pour autant, le congrès de la Nouvelle-Calédonie, dont on fait grand cas de l’avis, soit consulté.
Cet amendement vise donc à faire en sorte que toute proposition de loi organique concernant la Nouvelle-Calédonie soit soumise pour avis au congrès de la Nouvelle-Calédonie avant d’être examinée au Parlement. Il ne s’agirait pas pour lui d’apporter une quelconque modification mais de donner un simple avis afin d’éclairer le législateur, qui se déterminerait ensuite de manière souveraine.
Le présent amendement propose une modification du fonctionnement et de l’équilibre institutionnel de la Nouvelle-Calédonie puisqu’il prévoit de convoquer le congrès en dehors des sessions pour émettre des avis, en lieu et place de la commission permanente.
Je note que, sur ce point, le congrès n’a pas été consulté. C’est manifestement une disposition qui ne fait pas l’objet d’un consensus local. C’est la raison pour laquelle la commission a rejeté cet amendement.
M. Gomes a fait référence à l’Assemblée nationale. Toutefois, si le congrès de Nouvelle-Calédonie dispose d’un pouvoir législatif – pouvoir déjà tout à fait considérable –, il ne peut pour autant être considéré comme une assemblée législative. Par conséquent, les références à l’Assemblée nationale ou au Sénat ne sont pas nécessairement les mieux venues.
J’aurai un avis un peu plus nuancé que celui de M. le rapporteur.
Le 2° du présent amendement ne saurait être adopté en l’état puisqu’il modifie en effet l’équilibre institutionnel et constitutionnel national.
En revanche, le 1° pourrait être utilement conservé, sous réserve d’un sous-amendement qui supprimerait le 2° pour ne garder que la rédaction suivante : « Le huitième alinéa de l’article 90 de la même loi organique est ainsi rédigé : " Le congrès est, de droit, convoqué par son président afin d’émettre, dans les délais mentionnés au précédent alinéa, les avis prévus par le présent article, lorsqu’ils portent sur des projets ou propositions de loi organique, la création ou la suppression de communes ou la modification des limites territoriales de communes. Le congrès peut également être convoqué, de droit, par son président, afin d’émettre, dans les délais mentionnés au précédent alinéa, les autres avis prévus par le présent article. À défaut, la commission permanente se réunit à cet effet. " »
J’indiquerai tout d’abord que la commission permanente est l’émanation du congrès de la Nouvelle-Calédonie. Composée de onze membres élus à la proportionnelle, elle a vocation à siéger entre les sessions du congrès. Commission permanente ou congrès, cela revient donc au même.
Un instant, s’il vous plaît, monsieur Gomes.
Si je comprends bien, je suis saisi d’un sous-amendement gouvernemental sur l’amendement no 25 . J’aimerais donc disposer d’une version écrite de ce sous-amendement.
Tout le monde le souhaite. Si ce sous-amendement est simple, je le lirai, ce qui permettra de ne pas retarder nos débats. S’il est compliqué, il faudra alors le distribuer.
Vos collaborateurs pourraient-ils avoir l’amabilité de m’en communiquer une version écrite, même manuscrite, monsieur le ministre ?
Veuillez poursuivre, je vous prie, monsieur Gomes.
La commission permanente a vocation à délibérer en lieu et place du congrès dans pratiquement tous les domaines durant l’intersession.
Je remercie le ministre de l’outre-mer d’avoir bien voulu prendre en considération une partie de la demande formulée dans cet amendement. Elle vise simplement à permettre à la Nouvelle-Calédonie de s’exprimer lorsque, dans cette enceinte, il est délibéré à son sujet ; elle pourra ainsi éclairer les parlementaires. S’il était accepté sous cette forme, le sous-amendement du Gouvernement serait alors soutenu par le groupe UDI.
La rédaction du sous-amendement est relativement simple : le Gouvernement souhaite conserver le 1° et supprimer le 2° de l’amendement no 25 .
Monsieur le président, cela ne me paraît pas aussi simple que cela. Pour ma part, je ne sais pas ce que l’on me propose avec ce sous-amendement.
Je vous demande donc une suspension de séance afin que les esprits se calment et que nous puissions clarifier ce point.
La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à dix-neuf heures vingt-cinq.
La séance est reprise.
Je suis donc saisi d’un sous-amendement gouvernemental, no 38, à l’amendement no 25 . Monsieur le ministre, souhaitez-vous le présenter à nouveau ?
Ce sous-amendement procède à une rationalisation. Le Gouvernement souhaite maintenir l’amendement no 25 , mais dans une rédaction différente : il propose donc de supprimer les alinéas no 4 à 6.
Je suis tenu de maintenir un avis défavorable, pour la bonne raison que la commission s’était déjà prononcée en ce sens. De plus, l’avis défavorable de la commission avait, pour l’essentiel, porté sur la première partie de l’amendement, celle qui subsisterait après l’adoption, le cas échéant, du sous-amendement gouvernemental.
Le 1° de l’amendement dispose en effet : « Le congrès est, de droit, convoqué par son président afin d’émettre, dans les délais mentionnés au précédent alinéa, les avis prévus par le présent article, lorsqu’ils portent sur des projets ou propositions de loi organique, […] ».
Or, cette formulation est redondante, car ce droit existe déjà actuellement. La commission permanente ne peut pas émettre d’avis sur des propositions de loi organique : cela relève obligatoirement de la compétence du congrès. Par conséquent, prévoir que le congrès devra émettre un avis sur les propositions de loi organique est superfétatoire ; je ne vois pas l’intérêt d’une telle disposition.
En revanche, l’amendement précise que le congrès doit être réuni pour émettre des avis sur « la création ou la suppression de communes ou la modification des limites territoriales de communes », et même sur tous les autres sujets prévus par cette loi. Or, comme dans toutes les collectivités, le congrès ne se réunit pas systématiquement : il existe toujours une commission permanente, dont le rôle est de régler les questions mineures.
M. le ministre pourrait en outre faire observer que, tel qu’il est rédigé, cet amendement pourrait tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution : il est en effet plus coûteux de réunir systématiquement le congrès pour émettre des avis plutôt que la commission permanente.
Je répète donc que cela revient à modifier les compétences respectives de ces instances sur des questions qui ne me paraissent pas essentielles – les questions essentielles, c’est-à-dire les lois organiques, relevant bien de la compétence du seul congrès.
Si, désormais, le congrès se prononce en lieu et place de la commission permanente sur des questions plus secondaires, cela modifiera et compliquera le jeu institutionnel local – le fonctionnement institutionnel, devrais-je dire, car ce n’est pas un jeu ! –, alors même qu’il n’existe pas de consensus sur ce point.
L’adoption de cet amendement créerait donc plus de complications qu’elle n’apporterait d’avantages. Je maintiens donc un avis défavorable.
Le sous-amendement no 38 n’est pas adopté.
L’amendement no 25 n’est pas adopté.
L’Assemblée nationale et le Sénat peuvent désormais, depuis la révision constitutionnelle de 2008, adopter des résolutions en application de l’article 34-1 de la Constitution. Ces résolutions peuvent concerner la Nouvelle-Calédonie, comme tout autre sujet entrant dans la compétence du Parlement.
Le but du présent amendement est toujours le même : dès lors qu’une résolution concerne la Nouvelle-Calédonie, il est proposé de prévoir la consultation de son congrès dans un délai n’entravant pas la délibération par l’assemblée parlementaire. Tel est le sens de l’amendement proposé, monsieur le président.
L’amendement no 26 est retiré.
Les articles 8, 9, 10 et 11 sont successivement adoptés.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 27 rectifié .
Cet amendement visait à résoudre un problème juridique. Toutefois, je le retire, monsieur le président.
L’amendement no 27 rectifié est retiré.
Les articles 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19 et 19 bis sont successivement adoptés.
M. Gomes et Mme Lagarde ayant déposé un amendement identique, sur lequel je ne peux d’ailleurs qu’émettre un avis favorable, je leur laisse le soin de présenter leur amendement.
La mesure proposée dans cet amendement, qui est identique à celui du rapporteur, a déjà fait l’objet d’un débat lors de l’examen d’un amendement similaire, qui n’avait pas été accepté, au projet de loi contre la vie chère outre-mer. Nous sommes donc satisfaits que le rapporteur ait repris cette disposition qui permettra aux victimes de statut civil coutumier de subir, non pas deux procès, mais une seule et même procédure.
Il s’agit effectivement d’un amendement auquel nous sommes attachés. Pour en avoir discuté avec le premier président de la cour d’appel à Nouméa, j’ai pu constater que tout le monde s’accordait sur la nécessité d’une telle mesure. Le Sénat a donc adopté un amendement en ce sens, mais, après analyse, il est apparu que cette disposition rendait en réalité les choses plus compliquées. La solution proposée par M. Gomes et Mme Lagarde, reprise par le rapporteur, est beaucoup plus pertinente.
Nous en venons à une série d’amendements portant articles additionnels après l’article 20.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 37 .
La loi organique du 19 mars 1999 dispose, en son article 208, que le jugement des comptes de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et de leurs établissements publics, ainsi que l’examen de leur gestion par la chambre territoriale des comptes sont soumis aux dispositions ayant valeur de loi organique du titre VI de la deuxième partie du livre II du code des juridictions financières.
Dans cette perspective, l’objet du présent amendement est de compléter l’article LO. 262-2 du code des juridictions financières qui prévoit déjà l’examen de la gestion du territoire, des provinces et de leurs établissements publics par l’examen de la gestion d’organismes, quel que soit leur statut, à l’instar de qui est prévu à l’article LO. 272-12 du code des juridictions financières pour la chambre territoriale des comptes de Polynésie française, qui résulte de l’article 34-I de la loi organique du 7 décembre 2007, qui constituent des satellites du territoire, des provinces ou de leurs établissements publics.
Cet amendement étend en fait le champ des contrôles de la chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie corrélativement à l’extension des compétences des collectivités territoriales. ce faisant, il contribue à l’effort de transparence budgétaire et à l’efficacité des mécanismes de contrôle.
Pour que l’Assemblée n’ait aucun doute sur les bonnes relations qui existent entre le Gouvernement et sa majorité – un vote antérieur pourrait laisser croire à l’existence de quelques difficultés –, j’émets un avis très favorable sur cet amendement.
Sourires.
Monsieur le président, pour que l’Assemblée n’ait aucun doute sur les excellentes relations que nous entretenons avec le ministre des outre-mer (Sourires), j’émets un avis très favorable sur cet amendement.
L’amendement no 37 est adopté.
Cet amendement vise à étendre au président du gouvernement les dispositions des articles 45 à 48 de la loi du 21 décembre 2001 relative aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes. Bien entendu, il ne s’agit pas d’un amendement ad hominem. Il permet seulement de régler une situation qui pourrait, le cas échéant, se produire. Je précise que la disposition proposée ici est déjà applicable en métropole et dans d’autres collectivités territoriales de la République – je vois M. Fritch sourire car il sait que la mesure est applicable en Polynésie.
Pour prouver que le Gouvernement respecte parfaitement l’indépendance du Parlement, il émet un avis très favorable.
Sourires.
L’amendement no 2 est adopté.
Cet amendement vise à permettre aux comptables et aux créanciers de saisir la chambre territoriale des comptes aux fins d’inscription d’une dépense obligatoire en ce qui concerne également le territoire de la Nouvelle-Calédonie, les provinces et leurs établissements publics.
L’amendement no 4 est adopté.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour une explication de vote au nom du groupe Union des démocrates et indépendants.
Au terme de l’examen de ce projet de loi organique, je tiens à dire, au nom du groupe UDI, que nous sommes heureux que l’initiative que nous avions prise il y a deux ans, afin qu’une loi anti-trust soit adoptée dans notre pays et qu’un gendarme veillant à son application soit créé par la loi, arrive à son terme.
Le processus législatif est donc achevé, mais beaucoup reste encore à faire. Le congrès de la Nouvelle-Calédonie devra délibérer sur l’organisation de cette autorité puis décider de sa composition et procéder à la nomination de ses membres. L’État a également vocation à intervenir, dans le cadre de l’adaptation à la Nouvelle-Calédonie du livre IV du code de commerce en ce qui concerne différents aspects de procédure pénale et d’organisation judiciaire qui sont applicables à cette autorité. Il a six mois pour prendre cette ordonnance. Ce n’est qu’au terme de ce parcours que nous disposerons enfin une autorité de la concurrence pleinement opérationnelle. Je crois que c’est une bonne chose pour notre pays.
La premier projet de loi présenté par le ministre des outre-mer visait à lutter contre la vie chère dans nos territoires ultramarins. En ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, il est clair que la loi anti-trust d’abord, la création de l’autorité de la concurrence ensuite, constituent des réformes structurelles afin que la concurrence s’exerce davantage dans un certain nombre de secteurs d’activité et contribue en définitive à ce que la vie soit moins chère dans notre pays qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Pour toutes ces raisons, nous voterons, bien évidemment, ce projet de loi organique portant actualisation de la loi organique de 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.
Le projet de loi organique est adopté.
Monsieur le président, je tiens à saluer les députés qui, en votant ce texte à l’unanimité, démontre que l’esprit de l’accord de Nouméa règne dans cette assemblée.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi portant diverses dispositions relatives aux outre-mer.
L’article 1er est adopté.
La parole est à M. Édouard Fritch, pour soutenir l’amendement no 4 , portant article additionnel après l’article 1er.
Pour donner plus rapidement force législative aux dispositions de l’ordonnance no 2013-792 du 30 août 2013, il convient de la ratifier au plus tôt dans le cadre du présent projet de loi.
Par ailleurs, il convient de réintégrer, parmi la liste des organismes polynésiens tenus à déclaration des incidents de paiement touchant des opérations de crédit à caractère non professionnel souscrits par les personnes physiques, ceux relevant du titre 1er du livre V du code monétaire et financier omis par erreur dans l’ordonnance précitée.
Il s’agit d’un sous-amendement de précision. Sous réserve de son adoption, je suis tout à fait favorable à l’amendement de M. Fritch.
Le sous-amendement no 44 est adopté.
L’amendement no 4 , sous-amendé, est adopté.
Le Gouvernement souhaite que vous l’habilitiez à prendre des ordonnances dans trois domaines.
Tout d’abord, il s’agit d’étendre à Mayotte, devenue une collectivité de droit commun, la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques. Actuellement, seules certaines des dispositions limitativement énumérées dans ce code s’appliquent sur ce territoire avec des adaptations dont certaines ne sont plus à jour. Cette ordonnance répond bien à un besoin de modernisation important afin de disposer d’outils de gestion des biens de l’État et des collectivités territoriales fonctionnelles et de tenir compte des effets de la départementalisation, mais aussi dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution qui ne disposent pas d’un code à jour qui tienne compte d’une répartition stricte des compétences entre elles-mêmes et l’État. C’est le cas à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie mais aussi à Saint-Barthélemy et Saint-Martin qui disposent, depuis 2007, de compétences étendues en matière de voirie, droit domanial et biens de la collectivité. Il devient indispensable qu’elles disposent de l’ensemble des outils modernes de gestion du domaine public comme du domaine privé.
Ensuite, cet amendement sollicite une habilitation pour moderniser l’organisation de la police municipale en Nouvelle-Calédonie. Comme dans nombre de territoires d’outre-mer, les agents de police municipale accomplissent, aux côtés de la police et de la gendarmerie nationale, un travail largement apprécié de la population locale. Les policiers municipaux en métropole disposent cependant de pouvoirs de verbalisation et de prescription en matière contraventionnelle au titre de plusieurs réglementations insérées dans divers codes : code de la construction et de l’habitation, code de l’environnement ou encore code rural et de la pêche maritime. Sur ce modèle, il semble utile d’habiliter les policiers municipaux de la Nouvelle-Calédonie à disposer de pouvoirs similaires dans des matières réglementées, notamment par les provinces ou la Nouvelle-Calédonie.
Enfin, le Gouvernement entend tirer les conséquences, dans un délai extrêmement restreint de six mois, de la compétence donnée à la Nouvelle-Calédonie par la présente loi organique en matière de création d’une autorité administrative indépendante de la Nouvelle-Calédonie, notamment dans le domaine de la concurrence, l’État conservant des compétences régaliennes, notamment en matière de garantie des libertés mais aussi de procédure pénale et administrative.
Il est donc prévu d’étendre, en concertation avec le territoire, les dispositions pertinentes du code de commerce en matière de pouvoirs d’enquête, de voies de recours, de sanctions et d’infractions.
Monsieur le ministre, je souhaiterais obtenir quelques précisions concernant les pouvoirs de la police municipale. En effet, dans votre amendement, vous ne mentionnez pas expressément l’ivresse publique. En revanche, vous évoquez la santé et la salubrité publiques. Faut-il comprendre que ces dernières comprennent l’ivresse publique ? L’alcool est en effet un véritable fléau en Nouvelle-Calédonie. Aussi nous semble-t-il absolument nécessaire d’habiliter la police municipale à verbaliser en cas d’ivresse sur la voie publique.
Le sous-amendement no 55 vise à mentionner expressément la notion d’ivresse publique. Toutefois, si vous nous indiquez que celle-ci est bien comprise dans les domaines visés par votre amendement, nous retirerons ce sous-amendement.
Le Gouvernement a déposé un amendement visant à l’habiliter à procéder par voie d’ordonnance en ce qui concerne la constatation de certaines infractions aux réglementations édictées localement, sans en limiter les matières. Votre demande est donc satisfaite, d’autant que l’habilitation comprend déjà expressément le domaine de la santé publique. Aussi, je vous demande de retirer votre sous-amendement.
La commission n’a pas eu la possibilité d’examiner le sous-amendement de Mme Lagarde, mais après avoir examiné l’amendement du Gouvernement, il m’a semblé que je pouvais y donner un avis favorable. Le ministre venant de nous dire que celui-ci est en quelque sorte superfétatoire, puisqu’il est déjà contenu dans l’amendement du Gouvernement, peut-être Mme Lagarde retirera-t-elle son sous-amendement. Si tel est le cas, nous n’aurons qu’à voter l’amendement du Gouvernement, sur lequel j’émets également un avis favorable.
Le sous-amendement no 55 est retiré.
L’amendement no 39 est adopté et l’article 1er bis est ainsi rédigé.
L’article 2 est adopté.
Article 2
L’article 2 bis est adopté.
La parole est à M. René Dosière, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 5 .
Il s’agit de lever toute ambiguïté sur la faculté désormais reconnue aux communes de participer, avec la Nouvelle-Calédonie, les provinces et leurs établissements publics, au capital d’une même société publique locale. La seule condition posée sera celle du droit commun, à savoir un minimum de deux actionnaires publics. Je le détaille, puisque M. Gomes avait soulevé ce point en commission : il a donc satisfaction avec cet amendement.
Je remercie le rapporteur d’avoir bien voulu déposer cet amendement et apporter cette précision qui lève toute ambiguïté sur le sujet.
Je veux également remercier le Gouvernement pour son amendement no 39 : je vise non pas le point dont nous avons débattu, mais la possibilité d’adapter le livre IV du code du commerce pour permettre à l’Autorité de la concurrence de fonctionner : c’est indispensable. Nous avions déposé un amendement en commission ; il est repris par le Gouvernement, que je remercie.
L’amendement no 5 est adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
L’article 4 est adopté.
Il existe, à l’échelle nationale, un établissement public d’insertion de la défense, qui a vocation à s’occuper de l’insertion des jeunes en difficulté. C’est, chez nous, un problème récurrent, comme dans d’autres territoires. Je cite quelques chiffres qui font froid dans le dos : en zone gendarmerie, les mineurs représentaient, en 2012, 51 % des mis en cause, soit plus de 10 % de plus qu’en 2011. En zone police, leur part est de 37 %, soit 6 % de plus que l’année précédente. La comparaison avec les statistiques nationales est extrêmement douloureuse, puisque les mineurs représentaient moins de 20 % des mis en cause, zone gendarmerie et zone police confondues.
En Nouvelle-Calédonie, la délinquance des mineurs se développe de manière exponentielle et les outils pour la traiter sont très limités. Or, l’EPIDE pourrait être un outil supplémentaire. C’est pourquoi j’avais déposé un amendement en ce sens en commission, mais il est passé sous les fourches caudines de l’article 40. J’ai donc déposé un autre amendement rédigé de manière différente. Hélas ! je sais qu’il n’obtiendra pas l’agrément du rapporteur ni du ministre, puisqu’on propose qu’à titre expérimental, pour une durée maximale de trois ans, les chapitres I et II de l’ordonnance sur l’EPIDE soient appliqués en Nouvelle-Calédonie.
Si le sujet ne peut pas être traité aujourd’hui, je souhaite que le ministère de l’outre-mer puisse examiner, en liaison avec le ministère de la défense, la possibilité d’étendre l’action de cet établissement à la Nouvelle-Calédonie…
…et peut-être à d’autres territoires qui rencontreraient des difficultés similaires et souhaiteraient bénéficier de l’expertise de l’armée en matière d’insertion.
Comme vient de le dire M. Gomes, son amendement n’a pas été examiné en commission, puisqu’il s’est heurté à l’article 40. À titre personnel, j’y suis défavorable, pour une raison que tous les élus de l’outre-mer présents dans cette assemblée comprendront facilement : c’est qu’il existe outre-mer le service militaire adapté, qui accueille des hommes et des femmes âgés de dix-huit à vingt-six ans, volontaires, en risque important de désocialisation.
Quand nous avons mis en place l’EPIDE en métropole, c’était au fond pour s’inspirer de cet exemple. Le président de la commission a pu voir l’intérêt du SMA dans la province Nord. Les deux dispositifs ne remplissent pas tout à fait les mêmes missions, mais puisqu’ils ont une vocation similaire, il n’y a pas lieu d’étendre celui de métropole à la Nouvelle-Calédonie, même à titre expérimental, puisque le SMA fonctionne parfaitement.
Défavorable, même si le SMA et l’EPIDE ne s’adressent pas tout à fait au même public.
Mais le rapporteur a raison, l’un s’est inspiré de l’autre et de ce que d’aucuns ont appelé « un encadrement militaire de la jeunesse ».
Il y a deux autres raisons à cet avis défavorable. L’expérimentation coûtera quelque argent, il faudrait donc prévoir un financement. Et vous ne bénéficieriez pas des fonds européens. Cela signifie alourdir une charge.
Par ailleurs, cette mesure nécessiterait le déploiement de nouveaux effectifs, qui ne sont pas forcément proportionnés aux besoins.
La mort dans l’âme, monsieur le président. Le SMA est un dispositif très efficace et, en Nouvelle-Calédonie, nous avons investi lourdement pour favoriser le développement du SMA qui accueille cinq cents jeunes, avec des résultats remarquables.
Vous vous doutez bien qu’avant de déposer cet amendement, j’ai pris contact avec le directeur du SMA pour savoir ce qu’il pensait d’une intervention de l’EPIDE. Il m’a bien sûr indiqué que les publics étaient différents : pour des missions auprès de mineurs délinquants, l’EPIDE aurait toute sa place. C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement. Toutefois, eu égard à la foultitude d’arguments qu’on lui oppose, je le retire.
L’amendement no 19 est retiré.
Il s’agit de deux amendements de suppression de l’article 5, mais comme ils sont la conséquence de l’adoption de l’amendement déposé par M. Gomes à l’article 20 du projet de loi organique, je lui laisse défendre le sien.
Comme vient de l’indiquer M. le rapporteur, cet amendement est la conséquence directe de l’amendement à l’article 20 du projet de loi organique que nous avons adopté de manière unanime.
Le Gouvernement reprend à son compte un souhait qu’a exprimé le congrès de la Nouvelle-Calédonie dans son avis sur le projet de loi organique que vous venez d’adopter, souhait renouvelé par plusieurs membres de cette assemblée, en commission notamment. L’amendement que je vous propose d’adopter vise à étendre à toutes les administrations de la Nouvelle-Calédonie les dispositions de l’ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives, ainsi qu’entre ces mêmes autorités.
Cette ordonnance n’a été rendue applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna qu’aux seules administrations de l’État et à ses établissements publics. Je partage l’intérêt manifesté par les élus calédoniens pour le développement de l’administration électronique sur leur territoire, intérêt qui s’est traduit par l’adoption récente d’un plan stratégique pour l’économie numérique, le 6 août dernier, par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Nous avions déjà déposé un amendement similaire en commission. Nous souhaitons en effet que cette ordonnance ne s’applique pas qu’aux rapports entre les administrations de l’État et les usagers, mais qu’elle s’étende aux rapports avec toutes les administrations de Nouvelle-Calédonie. L’amendement du Gouvernement permet d’atteindre cet objectif, dès lors, Sonia Lagarde et moi-même nous retirons notre amendement.
L’amendement no 22 est retiré.
L’amendement no 38 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement no 23 rectifié .
C’est un sujet important pour nous. La Nouvelle-Calédonie est habilitée à édicter, pour certaines infractions, des peines d’emprisonnement, dans la limite de celles que le Parlement édicte pour des faits de même nature au plan hexagonal, sous réserve que le Parlement homologue les peines prévues par la Nouvelle-Calédonie ou par les provinces.
C’est le sens de cet article 6, qui vise à homologuer un certain nombre de peines d’emprisonnement, parmi lesquelles certaines ont une pertinence toute particulière : celles qui s’appliquent au braconnage, qui est devenu un fléau.
En commission, j’avais émis des réserves, mais les vérifications faites ont permis de les lever. Avis favorable.
L’amendement no 23 rectifié est adopté et l’article est ainsi rédigé.
Saint-Barthélemy a adopté un projet d’acte déterminant les dispositions pénales et les sanctions applicables en matière d’environnement. Saint-Barthélemy peut assortir de sanctions pénales les infractions aux règles qu’elle fixe, dans les matières qui relèvent de sa compétence, comme c’est le cas en matière d’environnement. Le présent amendement a pour objet de ratifier le décret qui a approuvé ce projet d’acte.
L’amendement no 52 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 7 est adopté.
Article 7
L’article 7 bis est adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite du projet de loi portant diverses dispositions relatives aux outre-mer ;
Proposition de loi visant à prolonger la durée de vie des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron