La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, alors que vous affichez l’emploi comme une priorité, le chômage a une nouvelle fois bondi au mois de février. Interrogé sur ce sujet, vous avez osé déclarer que vous ne vous occupiez que d’une chose en même temps. Triste réalité d’un Premier ministre avouant son échec et préférant faire campagne plutôt que de s’occuper de l’avenir des Français !
Tout cela pour perdre une nouvelle fois les élections et faire monter les extrêmes…
Dans le même temps, votre ministre du travail, ignorant les 30 400 nouveaux inscrits à Pôle emploi, se félicitait que sur les deux derniers mois cumulés, le chômage baisse. Alors cumulons, monsieur le Premier ministre. Depuis mai 2012, il y a 940 000 demandeurs d’emploi en plus en France. Depuis mai 2012, il y a eu une augmentation de 20 % du chômage. Et ce matin encore, votre ministre du travail annonçait « on peut toujours faire pire » !
Alors que vous êtes totalement dépourvus, votre ministre du travail annonçait également ce matin qu’il ne serait pas « le ministre du travail qui réformera le code du travail ». Tous les acteurs s’accordent pour dénoncer la complexité de ce code qui entrave la création d’emplois, y compris le porte-parole de votre Gouvernement. Et pourtant, vous ne faites rien.
Par trois fois, après trois défaites électorales, vous avez déclaré que vous aviez entendu le message des Français. Pourtant, le chômage augmente, la précarité augmente, alors que la situation s’améliore partout en Europe. Nos partenaires profitent pleinement des réformes courageuses qu’ils ont mises en place et de la conjoncture mondiale.
Contrairement à ce que vous avez déclaré dans cet hémicycle, l’UMP, à l’inverse de votre majorité, a des propositions fortes en matière de croissance, de fiscalité, d’emploi, de formation et d’apprentissage.
Monsieur le Premier ministre, il ne reste dans votre boîte à outils que des incantations comme « l’emploi, l’emploi, l’emploi ». Mais l’emploi ne se décrète pas, il se travaille. Quand allez-vous enfin entendre le cri de souffrance des Français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, je sais qu’en deux minutes il est difficile d’aller à l’essentiel : très vite, on tombe dans la caricature. Je pourrais rappeler qu’en 2012, il y avait 1 million de chômeurs de plus et que vous avez aussi échoué sur cette question essentielle. Je pourrais vous redire, parce que je pense que nous avons un devoir de vérité à l’égard des Français, que notre pays vit avec un chômage de masse depuis des années.
La stratégie du Président de la République et celle du Gouvernement sont les mêmes : favoriser la compétitivité et la croissance. Parce que sans compétitivité et sans croissance, il n’y a pas de création de richesse et il n’y a pas d’emplois. C’est ce que je veux dire quand j’affirme que le cap est maintenu.
Bien sûr, il faut être à l’écoute, bien sûr un infléchissement ou un changement sont toujours possibles. Mais sur l’essentiel, c’est-à-dire le soutien aux entreprises, la baisse du coût du travail, l’action pour favoriser l’emploi, notamment dans les petites et moyennes entreprises où travaillent l’immense majorité de nos concitoyens et qui sont celles qui peuvent créer de l’emploi, oui, ce cap doit être maintenu.
Et puis, s’agissant de l’investissement privé et public, le Gouvernement fera un certain nombre de propositions très concrètes dès la semaine prochaine dans le cadre d’un séminaire autour du Président de la République, parce que nous devons favoriser le retour de la croissance au moment où des indicateurs affichent une reprise.
Vous prenez des exemples à l’étranger : comparons, bien sûr ! Des pays comme le Portugal ou l’Espagne, qui ont subi des politiques d’austérité d’une brutalité sans précédent et connaissent des niveaux de chômage majeurs, au-dessus de 20 %, retrouvent aujourd’hui davantage de compétitivité.
Le débat peut avoir lieu sur l’Allemagne, mais puis-je vous rappeler, monsieur le député, qu’en 2004, nos deux pays, l’Allemagne et la France, demandaient un délai supplémentaire pour la résorption de leur déficit ? L’un s’est engagé dans la voie des réformes et obtient aujourd’hui des résultats. C’est l’Allemagne. L’autre pays, sous la droite, n’a pas fait ces réformes, et nous l’avons payé pendant des années.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Si vous voulez vraiment discuter de qui a le courage de mener des réformes et de qui obtient des résultats, je suis prêt au débat. Mais ne vous énervez pas, monsieur Jacob, ce n’est pas bon pour votre santé en général !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Continuons à réformer, continuons à engager le pays sur la voie du redressement, c’est la seule voie possible.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Joëlle Huillier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, le directeur d’une école primaire de Villefontaine, dans le Nord de l’Isère, a été mis en examen et écroué pour des viols commis sur des enfants de 6 et 7 ans. Cet enseignant avait déjà été condamné, en 2008, à six mois de prison avec sursis pour recel et détention d’images pédopornographiques. Depuis cette date, il a exercé dans plusieurs écoles avant que ses agissements pervers ne fassent l’objet d’une plainte de plusieurs familles.
Cette affaire très grave me remplit bien évidemment de compassion pour les enfants victimes, pour les familles, dont je partage la douleur, et pour le corps des enseignants, choqués par cette histoire épouvantable et dont le professionnalisme ne doit pas être remis en cause par le crime de l’un d’entre eux.
Je ressens également, comme vous tous ici, une profonde colère, car il est incompréhensible qu’un individu déjà condamné en 2008 ait pu continuer à approcher de jeunes enfants innocents.
Des mesures doivent être prises pour garantir à chaque enfant un encadrement par des enseignants fiables à tout niveau. Elles devraient, à mon sens, concerner aussi toute personne s’occupant d’enfants.
Des enquêtes sont en cours, tant au niveau de la justice que de l’éducation nationale. Mais, ces derniers jours, d’autres cas d’enseignants précédemment condamnés ou présumés pédophiles ont été signalés à Rennes puis en Moselle, ce qui tend à montrer qu’il existe un manque, depuis plusieurs années, dans la transmission des informations entre les services de la justice et ceux de l’éducation nationale.
Madame la ministre, pouvez-vous nous dire où en sont ces enquêtes, si elles permettent d’analyser les défaillances du service public, et quelles sont les solutions envisagées pour que de telles horreurs ne puissent plus se produire ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la députée, les crimes de viols commis par un directeur sur des élèves d’école primaire à Villefontaine sont abjects. Apprendre que ce directeur avait pu continuer à enseigner depuis des années, alors même qu’il avait été condamné en 2008, est révoltant. Je partage totalement la colère, l’indignation et l’émotion des parents.
Vous connaissez ma détermination implacable à lutter contre les violences sexuelles, qui plus est contre des enfants. Vous pouvez compter sur moi : je ne laisserai rien passer. Aussitôt suspendu, cet enseignant, qui fera l’objet de sanctions judiciaires, a dès hier été radié à vie de l’éducation nationale.
Cependant, vous avez raison : au-delà de cette affaire, nous devons désormais garantir aux familles que les défaillances constatées dans l’affaire de Villefontaine – en particulier la non-transmission par la justice à l’éducation nationale de la condamnation de cet enseignant en 2008 pour des faits de pédopornographie – ne puissent plus jamais se reproduire. C’est la raison pour laquelle, avec la garde des sceaux, Christiane Taubira, nous avons immédiatement diligenté une enquête administrative conjointe des services de la justice et de l’éducation nationale, afin de faire la lumière sur tous les dysfonctionnements, tous les manquements et toutes les fautes, qui seront sanctionnés comme la situation l’exige.
Madame la députée, c’est l’ensemble de la chaîne de signalement qui doit être revu, car aucun prédateur sexuel condamné ou avéré ne doit se retrouver au contact d’enfants. C’est une évidence. En réunissant dès la semaine prochaine les procureurs généraux et les recteurs, nous ferons en sorte, avec Christiane Taubira, de marteler ce principe simple : la justice doit transmettre à l’éducation nationale chaque condamnation d’enseignant pour des faits de prédation sexuelle.
Nous ne devons plus jamais nous retrouver dans cette situation. Les parents doivent être rassurés, et ils peuvent compter sur moi. Si nous devons revoir nos procédures, nous les reverrons. L’école est un sanctuaire : vous pouvez compter sur nous pour le garantir.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le ministre des affaires étrangères et du développement international, la situation internationale en matière de terrorisme appelle nécessairement une réponse forte, déterminée et unie des États. Dans la réponse apportée, notre pays occupe une place de premier rang, comme le démontre encore la présence du Président de la République, François Hollande, ou du président de notre assemblée, Claude Bartolone, à la grande marche contre le terrorisme ce dimanche à Tunis.
Cette réponse des États passe aussi par des mesures d’ordre administratif, notamment de contrôle aux frontières. Or, si ceux-ci sont justifiés, il convient d’en identifier toutes les conséquences en vue d’une mise en oeuvre mesurée et humaine.
À ce titre, j’appelle votre attention sur l’annonce récente, par le gouvernement fédéral du Canada, de l’instauration prochaine d’un système d’autorisation électronique de voyage, sur le modèle du système ESTA aux États-Unis, qui imposera, avant tout départ au Canada, pour séjour ou transit, des délais, des procédures et des frais aux ressortissants de la quasi-totalité des pays tiers, dont les Français.
Compte tenu des liens privilégiés entre la France et le Canada, nous pouvons regretter cette mesure. Mais elle est encore plus regrettable pour les habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon qui, jusqu’à présent, bénéficiaient d’un régime dérogatoire et réciproque de circulation entre l’archipel et le Canada voisin. Si la prise en compte de la situation spécifique de Saint-Pierre-et-Miquelon n’était pas maintenue dans le nouveau dispositif, cela entraînerait pour mes compatriotes de graves conséquences d’ordre sanitaire, économique et social.
En effet, je vous le rappelle, en l’absence de ligne aérienne directe avec la métropole, nous n’avons pas d’autre choix que de passer par le Canada pour sortir ou entrer sur le territoire. Nous serions donc les seuls citoyens français à devoir demander l’autorisation d’un pays étranger, payer et obtenir un visa pour sortir ou rentrer chez nous. C’est inacceptable !
Aussi, monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend-il agir afin de prévenir de telles conséquences néfastes pour les Saint-Pierrais et Miquelonnais, mais aussi pour tous nos compatriotes qui désireraient se rendre à Saint-Pierre-et-Miquelon, donc en France ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
Comme vous venez de le rappeler, monsieur le député, la lutte contre le terrorisme appelle une mobilisation et une détermination internationales. C’est en effet ce qu’ont rappelé le Président de la République et le président de l’Assemblée nationale lors de la grande marche contre le terrorisme organisée ce dimanche à Tunis, à laquelle j’ai également pris part.
J’ai bien entendu votre préoccupation quant à la décision du gouvernement du Canada de mettre en place un système d’autorisation de voyage électronique. Comme vous le relevez, cette autorisation est similaire au système ESTA mis en place par les États-Unis ; il répond d’ailleurs à un engagement du Canada auprès de ces derniers. Selon les informations dont je dispose, le système d’autorisation électronique de voyage, dont la mise en oeuvre a été repoussée à 2016, diffère cependant d’ESTA en ce que l’autorisation sera accordée pour une durée plus longue, de cinq ans, et pour un coût limité, de sept dollars canadiens soit environ cinq euros.
« Regardez M. Claireaux ! » et exclamations sur plusieurs bancs des groupes UMP, UDI et RRDP.
M. le secrétaire d’État se retourne. – Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP, UDI et RRDP.
Nous avons été alertés sur la difficulté spécifique qui se pose pour les Français de Saint-Pierre-et-Miquelon qui doivent, en l’absence d’une desserte directe entre la France et l’archipel, transiter par le Canada quand ils souhaitent se rendre ailleurs dans le monde, notamment en métropole. Le même problème se pose pour les évacuations sanitaires vers le Canada.
Un premier contact a donc été pris avec les autorités canadiennes à ce sujet. Il en ressort que le Canada compte mettre en place une exemption pour les voyages au départ de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cependant, cette exemption ne règle pas la question du retour vers Saint-Pierre-et-Miquelon pour les Français résidant dans l’archipel. C’est la raison pour laquelle, en lien avec Annick Girardin, Laurent Fabius a donné instruction
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP
qu’une démarche formelle soit effectuée auprès des autorités canadiennes afin de les appeler à tenir compte de la situation particulière dans laquelle se trouve l’archipel, compte tenu de sa proximité géographique avec le Canada.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, dimanche dernier, les électeurs ont crié leur colère, leur désespoir et leur lassitude.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
La gauche a subi une nouvelle fois une lourde défaite, nourrie des inégalités croissantes, de la précarité et de la division.
Monsieur le Premier ministre, je vous le dis solennellement, j’ai mal à ma France
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
quand je vois l’extrême droite progresser en mettant en cause nos valeurs républicaines, quand je vois la droite gagner pour mettre à bas les politiques de solidarité menées par la gauche dans les départements.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, l’heure est trop grave pour que les anathèmes remplacent le débat et que le refus de tout dialogue soit l’unique réponse. Il ne faut ni ignorer le message, ni s’exonérer de l’effort de réflexion et d’ouverture nécessaire pour répondre à la souffrance sociale, à la peur du déclassement, à la perte de substance industrielle, à la montée des frustrations et de la haine.
La situation est telle qu’il ne sert à rien de répéter en boucle qu’il n’y a pas d’autre politique possible, qu’il faudrait s’accommoder des recettes du MEDEF, de la finance ou de Bruxelles. Il faut rassembler les femmes et les hommes de bonne volonté qui n’acceptent pas la dictature des marchés et attendent d’un gouvernement de gauche qu’il porte une grande ambition sociale.
Nos concitoyens aspirent à l’emploi, au renforcement de leur pouvoir d’achat, à des services publics et une protection sociale de qualité. Il est nécessaire d’engager une grande réforme fiscale, de baisser l’impôt des plus modestes, d’augmenter celui des plus riches, de baisser l’impôt des PME et de pénaliser la finance.
Nous avons besoin d’un programme ambitieux de relance de l’investissement public pour doper l’emploi et réussir la transition énergétique. Sur un tel programme, vous pourriez rassembler toute la majorité de gauche élue en 2012.
Monsieur le Premier ministre, c’est l’échec de la politique menée et l’entêtement à la poursuivre qui créent la division. Oui, pour la France, pour le peuple, au-delà des postures, dessinons un nouveau cap !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Monsieur Nicolas Sansu, je suis heureux de votre question car je n’ai pas eu l’occasion de répondre hier à votre groupe, alors que je me suis adressé à la quasi-totalité de ceux qui siègent dans cette assemblée.
Vous avez eu raison de souligner que le résultat des élections départementales est clair : la droite républicaine l’a emporté et la gauche, toute la gauche a perdu. Il est de notre devoir…
…je l’ai dit dès dimanche soir, de tirer les leçons de ce scrutin.
Le Gouvernement se veut à l’écoute des Françaises et des Français, et bien sûr, mais pas seulement, de la majorité parlementaire et de la majorité présidentielle. Notre conviction, ma conviction est qu’il faut continuer à redresser l’économie de notre pays, condition indispensable, nécessaire pour faire baisser chômage et améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens.
Cette colère, et c’est le mot que j’ai utilisé dimanche, cette souffrance, ce sentiment d’abandon, nous les vivons, nous les entendons tous. Les solutions doivent être discutées. C’est aussi pour cette raison que nous voulons aller plus loin pour soutenir l’investissement privé et public sans dégrader nos comptes publics. Nous voyons bien en effet que nous avons besoin – cela peut être une différence avec d’autres pays – à un moment où la croissance revient, mais sans résultats concrets pour les Français, de faire davantage en faveur de la compétitivité de nos entreprises et de l’investissement public et privé.
Nous devons aussi, vous l’avez rappelé, répondre à la crise de confiance des Français envers leurs élus, qui s’est traduite par un vote massif en faveur de l’extrême droite dans un certain nombre de territoires et par une abstention qui, scrutin après scrutin, reste trop élevée.
La question essentielle, vous le rappeliez également, est de mobiliser autour des valeurs de la République. Nous poursuivrons donc des chantiers essentiels à mes yeux en matière de citoyenneté, d’égalité des territoires, qu’ils soient ruraux, péri-urbains ou urbains, d’école, mais aussi de laïcité républicaine.
Mais au-delà des mots, vous l’avez dit à juste titre, il faut des résultats concrets. Quand on parle de ruralité, de maisons de services publics, de centres de santé, de haut débit, cela doit se traduire concrètement pour les Français. Quand on parle de retour à l’emploi, avec la prime d’activité dont nous allons parler ensemble, au Parlement, on parle d’un vrai retour au travail.
Il existe un débat, très répandu et qui personnellement me gêne, sur l’assistanat. Beaucoup de nos compatriotes, souvent des ouvriers, des chômeurs, se plaignent que l’on ne fasse rien pour eux et tout pour « l’autre », parfois avec des ambiguïtés qu’il faut dénoncer au nom de nos valeurs.
Mais nous devons entendre le message : la valeur travail, vous le comprendrez parfaitement, monsieur Sansu, est profondément ancrée dans notre pays et il faut le prendre en compte. Eu égard au chômage de masse qui sévit depuis des années, nous voyons bien que c’est incontestablement cette réponse qu’il faut apporter.
Alors oui au rassemblement, mais un rassemblement sur le fond. Pas l’unité pour l’unité, même si elle est indispensable, mais le rassemblement. Mon gouvernement est ouvert à toute proposition, à toute discussion qui permettent d’avancer pour l’intérêt des Français.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, et j’y associe ma collègue Danielle Auroi.
Lundi soir, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi qui instaure une obligation de vigilance des multinationales vis-à-vis de leurs filiales et sous-traitants.
« Très bien » sur les bancs du groupe écologiste.
Il s’agit d’un premier pas que nous saluons, mais que nous aurions aimé plus important, à l’image de la proposition de loi que notre groupe avait déposée avec l’ensemble des groupes de gauche de l’Assemblée nationale.
Nous regrettons ainsi que seules les entreprises de plus de 5 000 salariés en France aient à se conformer à cette nouvelle loi. De fait, la plupart des entreprises françaises impliquées directement ou indirectement dans le drame du Rana Plaza au Bangladesh, qui a entraîné pas moins de 1 200 morts, n’auraient pas été visées par cette loi.
Aujourd’hui, ce sont les conditions de travail dans un autre pays qui font régulièrement la une, je veux parler du Qatar.
Sur l’enfer des chantiers de la coupe de monde de football pour 2022 travaillent des esclaves modernes, dépouillés de leur passeport et de nombreux droits élémentaires. On estime qu’au rythme actuel, près de 4 000 ouvriers pourraient trouver la mort d’ici à la fin de l’événement sportif.
La semaine dernière, l’ONG Sherpa a déposé plainte pour des infractions de travail forcé, réduction en servitude et recel contre VINCI Construction Grands Projets et les dirigeants français de sa filiale qatarie, commises à l’encontre des migrants employés sur leurs chantiers au Qatar. Nous laissons évidemment la justice faire son travail en toute indépendance dans cette affaire. Encore faut-il qu’elle ait à sa disposition les outils pour le faire, et c’est bien là qu’un arsenal juridique renforcé est nécessaire.
En attendant que s’applique une obligation effective de vigilance, rappelons que le respect des droits fondamentaux par nos entreprises à l’étranger participe pleinement au rayonnement de notre pays.
Monsieur le secrétaire d’État, comment le Gouvernement peut-il peser auprès de nos entreprises pour qu’elles ne soient pas complices de tels scandales, au Qatar ou ailleurs, mais aussi au sein des organisations internationales pour que certains pays cessent de faire du dumping social et environnemental, très préjudiciable à la fois à notre économie et à notre environnement ?
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et RRDP.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.
Monsieur le député Paul Molac, vous m’interrogez sur un sujet fondamental qui a retenu cette semaine encore l’attention de votre assemblée puisque celle-ci a adopté, à l’initiative du groupe SRC, la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre. Dominique Potier, Serge Bardy, Annick Le Loch et d’autres membres du groupe SRC en furent à l’initiative. Des membres du groupe écologiste, notamment Mme Auroi, avaient quant à eux déposé une proposition de loi partageant le même état d’esprit.
Le Gouvernement a soutenu ces travaux et se félicite de l’adoption de ce texte. Vous m’interpellez aujourd’hui sur la situation au Qatar. Conformément à l’usage, je ne commenterai pas les procédures judiciaires en cours, mais je veux vous indiquer comment le Gouvernement travaille sur ce sujet.
Sur place, notre ambassade est un interlocuteur reconnu par les autres ambassades et par les autorités qataries sur ce sujet. Des échanges ont lieu régulièrement. En mai dernier, des travaux avec les autorités ont eu lieu spécifiquement sur la responsabilité sociétale des entreprises, la RSE.
Lorsque je me suis rendu au Qatar, j’ai auparavant tenu à recevoir des ONG, notamment Amnesty international. Nous avons élaboré à l’intention de toutes les entreprises qui m’ont accompagné un guide pratique de la RSE pour les sensibiliser sur ce sujet. C’est du concret, et ce travail doit être poursuivi, y compris par rapport aux grands travaux en cours.
Dans les organisations internationales, à l’OCDE, à l’OMC, à l’ONU, nous poussons également en ce sens. La diplomatie économique de la France n’est pas contraire à nos valeurs, celles des droits de l’homme et du respect des droits sociaux que nous portons.
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et RRDP et sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Franck Riester, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, voilà quatorze jours que Radio France est en grève. Quatorze jours que les Français sont privés de leurs émissions. C’est profondément choquant, particulièrement dans une période d’élections, où le débat démocratique doit vivre. La situation est grave, monsieur le Premier ministre, et que faites-vous ?
Vous faites l’inverse de ce qu’il faudrait faire. La Cour des comptes rappelle aujourd’hui même l’importance des réformes à conduire pour assurer l’avenir de Radio France mais, au lieu d’accompagner ces réformes, vous ajoutez cyniquement de la crise à la crise.
Vous ne tenez pas les engagements budgétaires de l’État envers Radio France.
Ce sont plus de 87 millions d’euros qui manquent sur la période 2012-2014. Aujourd’hui, vous détournez les ressources prévues pour l’audiovisuel public en les affectant à d’autres dépenses de l’État. En effet, en 2015, ce sont 130 millions d’euros issus de la taxe « telco » qui resteront dans le budget de l’État. Les contribuables français qui paient cette taxe pour financer l’audiovisuel public en veulent pour leur argent.
Dans ce contexte, monsieur le Premier ministre, comment pouvez-vous vous étonner des difficultés financières de Radio France ? Vous vous posez en recours mais, en réalité, vous jouez au pompier pyromane. C’est votre gouvernement qui est responsable de la crise actuelle de Radio France. Votre ministre de la culture et de la communication brasse du vent en convoquant deux fois en une semaine le président de Radio France – mais pour quoi faire ? On aimerait bien le savoir !
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous mettre fin à la crise ? Les salariés de Radio France sont prêts à des réformes, à condition que l’État fixe un cap clair, qu’il ait le courage de soutenir les réformes et qu’il honore sa signature en consacrant bien à Radio France les moyens financiers prévus.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Franck Riester, je vous entends beaucoup ces temps-ci. Vous évoquez un scandale d’État concernant l’audiovisuel public et je voudrais vous répondre très calmement.
D’abord, je ne vous laisserai absolument pas porter d’attaques démagogiques et politiciennes contre cette belle maison de service public qu’est Radio France et contre ses salariés.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC – Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Ensuite, je considère avec vous qu’il y a en effet un scandale d’État : il est dans votre amnésie sur votre responsabilité.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Et, puisque vous citez le rapport de la Cour des comptes, je vous invite à le lire dans le détail, puisqu’il est en ligne depuis ce matin : ce rapport est un réquisitoire accablant sur la gestion de Radio France lorsque vous étiez aux responsabilités, pendant dix ans.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC – Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Aujourd’hui, vous appelez l’État à faire des réformes, que nous faisons. Ce sont celles que vous n’avez pas conduites pendant dix ans.
J’assume mes responsabilités, mais assumez les vôtres et lisez bien ce rapport de la Cour des comptes.
En outre, il y a aussi un scandale d’État à mettre en cause comme vous le faites l’indépendance de l’audiovisuel public. Nous sommes fiers, en effet, d’avoir, par une loi sur la transparence votée dans cet hémicycle, confié à un organisme indépendant le soin de nommer les présidents de l’audiovisuel public.
Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Il faut quand même se rappeler comment cela se passait de votre temps !
Mêmes mouvements.
Les nominations et l’avis, c’était simple comme un coup de fil du Président de la République, dans le secret de son bureau.
Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.
Pouvez-vous me dire où sont la modernité et la transparence là-dedans ? Nous sommes fiers de ce que nous avons fait et nous le sommes aussi de respecter l’indépendance des rédactions.
Sourires.
Il ne me viendrait pas à l’idée, par exemple, de menacer des journalistes dans les coulisses d’un plateau de télévision parce que leurs propos ne nous auraient pas plu.
Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.
Je prends mes responsabilités, qui sont de me prononcer et de prendre des décisions. Ce sera le cas dans les prochains jours, car le président de Radio France m’a remis son projet stratégique. Je prendrai mes responsabilités et je serai au rendez-vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC– Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement répète à l’envi qu’il ne faut pas opposer territoires ruraux et territoires urbains. Pourtant, le constat est sans appel : le décrochage s’accentue. La fracture sociale que dénonçait le président Jacques Chirac voilà vingt ans…
Cette cassure est un fait. Il ne s’agit pas seulement de la nommer, il faut la surmonter. Or, l’action du Gouvernement se révèle à ce jour largement insuffisante. Si les récentes annonces en faveur de la ruralité semblent aller dans le bon sens, votre réforme territoriale, monsieur le Premier ministre, restera le grand rendez-vous manqué de ce quinquennat.
L’espoir était pourtant immense de voir une France enfin réconciliée entre des métropoles dynamiques, connectées à la mondialisation, et des territoires périphériques toujours plus éloignés de celle-ci.
Au bout du compte, la carte de France que vous avez dessinée ne propose aucune solution durable pour inverser cette tendance. Le conseiller territorial, qui aurait permis d’arbitrer avec souplesse entre les intérêts de territoires, a été abandonné. Surtout, nous n’avons à ce jour aucune vision de moyen et long terme du Gouvernement, ni sur l’avenir de cette armature territoriale, ni sur la répartition réelle des compétences.
Approbations sur les bancs du groupe UMP.
Le Gouvernement affirme que les départements auront deux missions essentielles : la solidarité sociale et la solidarité territoriale. Cette dernière sera renforcée, selon vous, grâce à la capacité d’ingénierie des territoires.
Monsieur le Premier ministre, par quelles dispositions concrètes le département pourra-t-il soutenir les territoires les moins favorisés ? Est-ce à dire qu’un droit à l’expérimentation sera enfin reconnu ?
Surtout, comment l’État, garant de la solidarité territoriale, entend-il agir pour adapter les territoires ruraux et périurbains au XXIe siècle ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Thierry Benoit, je regrette comme vous qu’on n’ait pas voté cette loi. Nous devions commencer le débat en octobre au Sénat, mais la nouvelle majorité UMP et UDI nous a demandé de remplacer le début de la discussion du projet de loi par un débat, si possible en présence du Premier ministre. Celui-ci l’a accepté le 28 octobre et nous avons passé un accord avec la nouvelle majorité sénatoriale. Je ne crois pas qu’il y ait eu, sous la Ve République, tant d’accords que cela avec l’opposition ou avec la majorité d’une assemblée et je pense donc que vous devez vous aussi assumer ce retard.
Un accord ayant été passé, le Gouvernement ne bougera pas pour ce qui est des compétences des départements. Vous avez raison de dire que nous voulons – avec bientôt, je l’espère, l’ensemble de cette Assemblée – faire des départements les porteurs de la solidarité envers les individus et de la justice entre les territoires.
Non seulement on a créé cette compétence de solidarité – et donc de justice – entre les territoires, que chacun appelait de ses voeux, mais on a en outre donné compétence aux régions de garder l’oeil ouvert sur tous les incidents d’aménagement du territoire – comme à Fougères, monsieur Benoit–, car c’est important.
Enfin, comme vous le savez, les dotations aux communautés de communes rurales, dont vous craignez le décrochage, ne subiront pratiquement aucune baisse, car les communes qui seront éligibles à la dotation de solidarité rurale, la DSR, et à la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, ne seront pas touchées par les baisses de dotation, non plus que les départements à faible population. Si vous conjuguez ce que nous vous avons voté et ce que, je l’espère, vous voterez,…
La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux. Madame la ministre, nous avons bien entendu tous été choqués d’apprendre que le directeur d’une école primaire de Villefontaine, dans l’Isère, avait été mis en examen et écroué après avoir avoué des actes de pédophilie sur neuf de ses élèves de cours préparatoire. À ces plaintes se sont ajoutés les signalements de quatorze autres parents. Mais la stupeur a atteint son comble lorsque nous avons appris que cet homme avait été condamné en 2008 à six mois de prison avec sursis pour détention d’images pédopornographiques, une décision de justice dont l’éducation nationale dit ne pas avoir eu connaissance.
Devant ce drame, il ne s’agit pas de renvoyer dos à dos les responsabilités des administrations de l’éducation nationale et de la justice. L’enjeu est de tout mettre en oeuvre pour que de tels dysfonctionnements ne se reproduisent plus jamais, à la suite de l’enquête que vient de nous annoncer Mme la ministre de l’éducation nationale.
Or nous sommes inquiets car le laxisme de votre politique pénale depuis trois ans
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
– eh oui ! – n’est pas compatible avec la fermeté qui doit en l’espèce s’appliquer.
Mêmes mouvements.
Depuis que cette affaire est connue, d’autres cas semblent apparaître, ce qui laisse penser que la non-transmission par la justice des condamnations à l’éducation nationale est chose fréquente. En outre, la réforme des rythmes scolaires a multiplié, en dehors du corps enseignant, l’intervention de professionnels – ou non – travaillant avec des enfants dans les écoles.
Madame la ministre, la loi prévoit que des peines complémentaires peuvent être prononcées, telles que l’interdiction d’exercer une profession. Dans les affaires de pédophilie ou de pédopornographie, le rappel par les juges de l’existence de ce type de peines complémentaires, qui permet l’interdiction d’exercer une activité professionnelle en contact avec des enfants, devrait être systématique. Par conséquent, madame la ministre, entendez-vous prendre une circulaire en ce sens ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.– Huées sur les bancs du groupe SRC.
Madame la députée, il appartenait naturellement à la garde des sceaux de vous répondre ; elle aurait repris les mêmes mots et les mêmes termes que ceux employés par la ministre de l’éducation il y a un instant.
Elle aurait répété notre détermination, qui doit être commune à tous, à la fois responsables, élus, citoyens mais aussi parents, face à ces drames et à ces prédateurs sexuels.
Madame la députée, la première partie de votre question soulignait, à juste titre, qu’il ne fallait pas renvoyer les uns et les autres dos à dos. Nous pourrions rappeler les circulaires qui ont été établies par Marylise Lebranchu, quand elle était garde des sceaux en 2001 et par la garde des sceaux Christiane Taubira sur cette question.
Nous pourrions rappeler l’action qui est menée sur ces sujets extrêmement difficiles et délicats. Ces débats peuvent avoir lieu. Mais, madame la députée, quand la démagogie prend le pas sur la raison, je peux aussi vous rappeler que l’affaire de Villefontaine a commencé en 2008 !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
En 2008, madame la députée, Najat Vallaud-Belkacem le rappelait tout à l’heure !
Mais vous voulez un débat de ce type, pas un débat sérieux, qui serait digne, qui serait à la hauteur de la colère des familles, de leur indignation, de la marche blanche qui a eu lieu samedi,
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste
Vous cherchez une nouvelle fois, comme vous l’avez fait pendant toute la campagne, la polémique avec le Gouvernement, la polémique avec la majorité, la polémique avec la garde des sceaux, pour la salir comme certains ont voulu salir Mme Najat Vallaud-Belkacem !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Alors assez ! Cela suffit ! À chaque fois c’est pareil, sur ces sujets, sur la sécurité, sur la délinquance, sur la justice. Assez !
Les députés des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR se lèvent et applaudissent longuement. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Je le dis à la majorité, madame la députée, je le dis à toute la majorité : il ne faut plus se laisser faire par les attaques, par la démagogie, par l’outrance qui est en permanence la vôtre !
Mêmes mouvements.
Je n’accepterai plus, madame la députée, que vous nous traîniez à chaque fois dans la boue sur des sujets aussi graves ! La dignité des parents vous aurait obligée aujourd’hui à avoir, madame la députée, un autre ton, une autre manière d’aborder les problèmes, une autre manière de traiter un sujet aussi grave. Nous, nous agirons avec la plus grande détermination, pas pour vous, mais pour les familles !
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
La parole est à M. Olivier Véran, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, toutes les grandes lois de santé publique sont prises entre deux feux : l’impératif d’améliorer la santé de notre population et les impacts que nos décisions peuvent avoir sur les libertés individuelles et collectives, mais aussi sur l’industrie.
Dans un pays, la France, qui voit chaque année près de 90 000 personnes mourir prématurément du tabac, avons-nous le droit de ne pas faire le maximum sachant, en regard de ce décompte macabre, que le chiffre d’affaires pour les quatre plus grands cigarettiers dans le monde est de 326 milliards et leurs bénéfices en hausse de 14 % ?
Comme vous, je ne suis pas favorable à une société de contraintes, mais lorsque les vies de personnes fragiles sont en jeu, il faut poser des limites. Alors oui, le paquet neutre est une innovation nécessaire. Oui, nous devons protéger les plus jeunes, dans les voitures, dans les espaces de jeu.
Mais l’addiction, dans notre pays, c’est aussi bien sûr le problème de l’usage de drogues, et notamment des drogues dites dures. Tandis que la mobilisation des acteurs associatifs et sanitaires a permis, en trente ans, de réduire considérablement le nombre de morts par overdose, la propagation du VIH ou encore des hépatites, est-il impensable d’espérer un débat serein à l’heure de renforcer notre arsenal sanitaire en direction des publics les plus marginalisés, notamment en expérimentant en France des salles de consommation à moindre risque qui existent depuis trente ans chez nos voisins suisses ?
Nous subissons depuis des mois un intense lobbying des uns et autres, visant à amoindrir la portée des politiques publiques de prévention que le Gouvernement a souhaité mettre en place : c’est là notre rocher de Sisyphe.
Madame la ministre, pouvez-vous confirmer la feuille de route du Gouvernement pour tendre vers de légitimes objectifs de santé publique ?
Puisqu’il me reste une poignée de secondes, et si vous m’y autorisez, monsieur le président, j’aimerais vous dire, mes chers collègues, la fierté et le plaisir que j’ai eu de pouvoir travailler à vos côtés.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Qu’il vous soit donné, sur les bancs de la majorité comme de l’opposition, de montrer aux Français que leur message de défiance vis-à-vis de l’action publique, leur message de méfiance vis-à-vis de l’action politique, renouvelé à chaque échéance électorale à travers l’abstention et pour une part à travers le vote extrême, a été entendu. Dans cette assemblée, les chemins peuvent être différents mais l’objectif doit être le même : servir l’intérêt général.
Les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent longuement.– Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste.
Merci, monsieur Véran, pour le travail que vous avez effectué dans cette assemblée.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député Olivier Véran, avant de répondre à votre question, je voudrais vous rendre hommage, rendre hommage au travail que vous avez accompli dans cet hémicycle puisque, dans quelques jours, vous allez quitter cette assemblée, Geneviève Fioraso reprenant sa place parmi les parlementaires.
Je vous remercie tout particulièrement pour le travail que vous avez accompli au service de la santé publique, et encore maintenant comme rapporteur du volet de prévention de la loi de modernisation de notre système de santé.
Je veux vous dire, monsieur le député, que, pour le Gouvernement, l’engagement d’actions fortes en matière de prévention est une exigence pour lutter contre les inégalités de santé. C’est bien là la priorité parce que, aujourd’hui, pour faire reculer certaines maladies, nous devons nous attaquer à certains comportements : nous devons faire en sorte de lutter contre l’obésité par une meilleure alimentation ; nous devons faire en sorte qu’il y ait moins de morts chaque année du tabac en empêchant les jeunes d’entrer dans le tabac et en permettant aux plus âgés d’en sortir.
Votre texte, c’est la généralisation du tiers payant ! Tout le reste sert à masquer le tiers payant !
C’est pour cela que j’ai présenté un programme national de réduction du tabagisme, qui trouve sa place dans cette loi et dont l’une des mesures importantes est le paquet neutre.
Oui, monsieur le député, l’adoption du paquet neutre est une mesure importante, qui placera la France à la tête des pays engagés dans la lutte contre le tabac. C’est ce qu’a annoncé publiquement l’Organisation mondiale de la santé il y a quelques jours, en rendant hommage à la France pour son travail.
Avant l’été, avec l’Organisation mondiale de la santé, je réunirai à Paris les ministres de la santé des pays qui ont lancé le paquet neutre, ou qui s’apprêtent à le faire, pour donner le signal du refus des morts du tabac.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Nicole Ameline, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères, mais avant de la poser, je voudrais vous dire, monsieur le Premier ministre, que rien ne justifie le ton que vous avez employé à l’égard de notre collègue Marie-Louise Fort.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Protestations sur les bancs du groupe SRC.
Ma question porte sur le financement des opérations extérieures militaires de la France, ainsi que sur la place et le rôle de l’Europe dans la lutte contre le terrorisme.
Chacun le sait, Daech est à nos portes. Ce groupe terroriste vient d’ailleurs de revendiquer l’attentat de Tunis, en indiquant que les auteurs de cette attaque ont été formés en Libye. Daech menace donc l’ensemble de la région du Sahel et du Levant, mais aussi notre propre continent, notre propre sécurité collective.
Si nous savons tous que les réponses sont bien sûr politiques, diplomatiques et pas seulement militaires, force est de constater que cette réponse militaire est quand même essentielle et que la France est engagée, mais qu’elle est seule.
Elle est seule par rapport à ses alliés européens, elle est seule au moment où il faudrait consolider tous les budgets de défense des pays alliés, et notre propre budget de défense pour répondre à une action qui va s’inscrire dans la durée.
J’en profite, au nom je crois de tous ceux qui siègent sur ces bancs, pour saluer la façon exemplaire dont nos forces armées servent aujourd’hui cette cause internationale.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Monsieur le ministre, le temps est venu pour l’Europe de s’engager, à tous les niveaux. Dans le cadre de la nouvelle Very High Readiness Joint Task Force – VJTF – qui va être créée dans le cadre de l’OTAN et qui est une brigade internationale renforcée, il est chaque jour plus essentiel que nous nous orientions vers la mutualisation financière des actions militaires.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
Mesdames et messieurs les députés, madame la députée Nicole Ameline, je vous remercie de poser cette question extrêmement importante. Comme vous le dites, face au terrorisme international, compte tenu des enjeux de sécurité en France et en Europe, la France est engagée : ses armées agissent de façon remarquable et nous avons besoin que ce soit toute l’Europe qui, à l’avenir, s’engage à nos côtés.
Mais la France n’est pas seule…
… car d’ores et déjà, nous l’avons vu au Mali, d’autres pays, après que nous avons décidé, nous, de prendre nos responsabilités, ont accepté de venir participer notamment à la formation de l’armée malienne. C’est ce qu’on appelle l’opération European Union Training Mission in Mali ou EUTM. Je veux saluer le fait que la Brigade franco-allemande, les Suédois qui exercent des missions de surveillance dans le Nord du pays, mais aussi un général espagnol, assument des responsabilités dans cette mission.
Nous venons, le 16 mars à Bruxelles, d’obtenir une décision en faveur d’une nouvelle mission européenne en Centrafrique et je sais que vous êtes particulièrement attachée à la présence, aux côtés des forces françaises, de partenaires espagnols, portugais, polonais, néerlandais, suédois, roumains, mais aussi serbes et géorgiens, qui soient là pour aider l’armée centrafricaine à monter en puissance.
Mais il nous faudra aller plus loin. C’est pourquoi nous avons demandé que le Conseil européen du mois de juin prochain soit consacré à l’Europe de la défense, à la mise en oeuvre des décisions prises par les chefs d’État et de gouvernement en décembre 2013, pour avancer sur quatre sujets : la capacité d’action commune, c’est-à-dire le groupement tactique en alerte de l’Union européenne ; la révision des règles de financement des opérations militaires extérieures, parce que ce financement européen est limité à 10 % du montant et nous voulons aller au-delà car il n’est pas juste qu’un seul pays, la France, assume l’essentiel de la charge de ces opérations ; troisièmement, le financement sur des fonds européens de programmes de recherche, et enfin les investissements dans l’industrie….
La parole est à M. Guy Delcourt, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, la semaine dernière, les chiffres des comptes publics pour 2014 ont été publiés. Ils révèlent une vérité simple : la gauche gère bien les comptes de la nation.
Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.
2012 : 4,8 % ; 2013 : 4,1 % ; 2014 : 4 %. Sous Sarkozy, ce même déficit public annuel a culminé à 7,5 % en 2009 et 7,1 % en 2010 !
Qui donc est Nicolas Sarkozy pour donner des leçons de bonne gestion aujourd’hui, lui qui a fait exploser la dette publique de la France de 622 milliards d’euros en cinq années ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
« Grand diseux, petit faiseux ! », comme on dit dans le Pas-de-Calais.
Mes chers collègues, oui, la vérité est simple. Elle l’est d’autant plus qu’elle est factuelle. Rappelons-nous les années 1997-2002. Avec la gauche, les finances publiques sont bien gérées. La gauche protège les futures générations d’une faillite financière qui guettait après la gestion désastreuse de l’UMP.
Cette gestion rigoureuse, c’est le bouclier indispensable qui doit permettre de protéger notre modèle social. Cette gestion rigoureuse, c’est la clé du redressement. Cette gestion rigoureuse n’est pas l’ennemie du progrès social, mais le levier qui nous permet de réformer la dépendance, de créer le compte pénibilité, de rétablir la retraite à soixante ans pour les carrières longues, de créer la prime d’activité pour les salariés modestes, de généraliser le tiers-payant.
Monsieur le ministre, élu du bassin minier, au nom de tous mes collègues députés, je veux vous dire que je suis le député d’une terre frappée par les difficultés…
Monsieur le ministre, quelle analyse faites-vous de la situation économique ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député Guy Delcourt, merci d’avoir rappelé simplement des faits.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Devant des faits, d’ailleurs, il n’y a pas de raison de s’insurger.
Mêmes mouvements.
Il n’y a pas de raison de pousser des hurlements. Les faits sont très simples : de 2012 à 2014, les déficits publics ont diminué. De 2007 à 2012, ils ont augmenté. Ce sont des faits ! Chacun peut en juger.
Avec la majorité précédente, les déficits ont augmenté. Avec cette majorité, les déficits diminuent et nous continuerons de les réduire.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Mais nous voulons agir en respectant deux éléments fondamentaux. D’abord, financer nos priorités : l’éducation, la sécurité, la question sociale. Ce sont nos priorités, nous nous donnons les moyens de les financer.
Ensuite, nous devons soutenir l’activité économique de notre pays. Nous ne diminuerons pas les déficits à l’avenir, si cette politique est contraire à ce supplément de croissance dont nous avons besoin. Nous le ferons donc dans des conditions respectueuses de cette croissance supplémentaire et, dès lors que nous aurons dépassé 1,5 % de croissance, nous pourrons créer les emplois dont nous avons absolument besoin. Réduire les déficits, ce n’est pas contradictoire avec la croissance : au contraire, tout dépend de la manière dont nous procédons.
Le Premier ministre l’a dit et répété : nous allons amplifier les aides aux investissements. La croissance aujourd’hui, dont nous voyons les premiers signes, se nourrit de la consommation, qui est meilleure que ce que nous pouvions attendre.
Elle se nourrit des exportations, grâce à l’évolution du cours de l’euro. Elle doit maintenant se nourrir de l’investissement des entreprises. À chacun ses responsabilités ! Nous avons pris les nôtres, aux entreprises de prendre les leurs !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Philippe Goujon, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à Mme la ministre de santé et j’y associe Yannick Moreau.
Cette semaine, madame la ministre, vous allez lever un tabou : celui de l’interdiction d’injection de drogue par intraveineuse. Avec la fausse bonne idée des salles de shoot, vous rompez le consensus des politiques contre les toxicomanies menées par tous les gouvernements successifs.
En autorisant l’intoxication médicalement assistée, vous légitimez et banalisez l’usage de drogue dispensée sous supervision de l’État, premier pas vers la légalisation. En levant l’interdit, en négligeant le sevrage, seul objectif médical acceptable, vous adressez un message contradictoire aux thérapeutes et aux familles comme aux milliers d’usagers qui cherchent à rompre avec leur addiction, alors que vous luttez si sévèrement contre le tabac.
N’est-ce pas un ancien ministre de l’intérieur, aujourd’hui Premier ministre, qui affirmait qu’en matière de lutte contre la drogue, les interdits sont essentiels ?
Par idéologie, vous sapez les fondements d’une politique de désintoxication et de réduction des risques qui a divisé par cinq les décès par overdose – cinq fois moins qu’en Allemagne, pays des salles de shoot ! – et par quatre les contaminations par le VIH, avec une consommation d’héroïne quatre fois moins élevée qu’en Suisse – autre pays des salles de shoot.
Outrepassant la censure du Conseil d’État, vous ignorez les condamnations des Académies de médecine et de pharmacie, de l’Ordre des médecins, des Nations unies et des riverains du Xe arrondissement, où la Mairie de Paris ouvrira la première salle.
Consacrez plutôt le million alloué à chaque salle de shoot à ouvrir des lits d’addictologie, des appartements et des communautés thérapeutiques
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP
et à réduire la morbidité liée à l’hépatite C !
Bref, madame la ministre, comptez-vous renoncer à votre projet afin d’aider les toxicomanes à guérir plutôt qu’à s’autodétruire ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe UDI.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député Goujon, s’il suffisait de tenir un discours moralisateur, de stigmatisation et de culpabilisation,
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
on se demande pourquoi, après dix ans où vous avez été au pouvoir, il y aurait encore des toxicomanes dans notre pays !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La vérité, nous le savons, c’est que nous devons aujourd’hui redoubler d’efforts en matière de prévention, comme la loi le prévoit.
Nous avons aussi besoin d’accentuer les efforts en matière de sevrage, et c’est ce que la loi prévoit.
Malheureusement, il n’en reste pas moins que des hommes et des femmes échappent à tous les réseaux, à tous les systèmes, à tous les accompagnements. Aujourd’hui, des hommes et des femmes, que cela vous plaise ou non, monsieur le député, se droguent dans les cages d’escalier, dans les halls de gare et, la nuit, dans les jardins publics.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
S’il vous plaît ! Une question comme celle-ci mérite un peu de silence.
Trouvez-vous normal, monsieur le député, de laisser ces hommes et ces femmes aller à la dérive ?
En Europe, des pays n’ont pas accepté une telle situation : la Suisse, l’Allemagne, l’Espagne ont bien avant nous engagé des démarches…
…pour accompagner et soutenir des hommes et des femmes loin de tout afin qu’ils puissent sortir de la drogue, s’ils le peuvent.
Monsieur le député, ne faites pas comme si cette mesure de soins…
…correspondait à une légalisation de la drogue. Les interdits sont nécessaires et nous les réaffirmons. Il n’en reste pas moins que soigner est une exigence.
Vous, vous ne parlez que de sécurité et de morale. Nous, nous parlons de santé et d’accompagnement.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC et écologiste.
La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la ministre des affaires sociales, à travers l’exemple particulièrement marquant de la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail Nord-Pas-de-Calais Picardie, je tiens à vous interpeller une nouvelle fois sur le véritable scandale que constitue le non-paiement par les CARSAT des pensions des nouveaux retraités.
Depuis des mois, vous avez été alertée à de nombreuses reprises sur ce dramatique problème, tant par des élus locaux que par des collègues parlementaires, notamment Francis Vercamer et Laurent Degallaix. Ainsi, pour ce qui est de la CARSAT du Nord-Pas-de-Calais Picardie, des milliers de dossiers sont toujours en instance et il est compliqué, voire quasiment impossible pour les intéressés de joindre les services par téléphone, sans parler d’obtenir une réponse claire.
Cette situation est vraiment intenable pour les nouveaux retraités, qui ne touchent toujours pas leurs pensions, intenable pour les veuves et les veufs en attente d’une pension de réversion, intenable pour les futurs retraités qui demandent un dossier.
Le Gouvernement a annoncé bruyamment dans les médias une aide exceptionnelle de 800 euros, mais seule une minorité des 9 000 personnes concernées ont pu à ce jour en bénéficier. C’est dire l’ampleur du travail qui reste à accomplir.
Face à ce désastre, vous avez répondu en diligentant une enquête de l’IGAS alors que chacun sait, sans besoin d’une étude approfondie, que le fond du problème réside dans le manque de moyens dont souffre la CARSAT.
Cerise sur le gâteau, la direction de la CARSAT envisagerait la fermeture de certaines agences de proximité, comme celle de Péronne par exemple. Courage, fuyons !
Il ne faut vraiment pas s’étonner des votes d’exaspération qui s’expriment dans le pays…
Madame la ministre, alors que de très nombreux retraités nous regardent en ce moment même, quels moyens allez-vous débloquer pour que cesse enfin le scandale des pensions non payées par les CARSAT ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et GDR.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député, oui, la CARSAT du Nord a été et reste encore confrontée à des difficultés pour répondre aux demandes légitimes des retraités. J’ai été saisie par plusieurs parlementaires, issus de tous les bancs, afin d’apporter des réponses à cette situation anormale, je le dis clairement.
Des moyens exceptionnels ont été dégagés, qui font que le nombre de dossiers en attente a été aujourd’hui réduit de manière très significative : sur plus de 7 000 dossiers à traiter, il n’y en a plus environ que 2 000. Certes, cela n’est pas entièrement satisfaisant, je le concède bien volontiers monsieur le député, mais une grande partie du chemin a été parcourue.
Comment avons-nous fait ? Nous avons demandé à des caisses moins surchargées de travail d’assumer le traitement d’un certain nombre de dossiers. C’est ainsi qu’au mois de mars, 2 300 dossiers ont été envoyés depuis la CARSAT du Nord vers d’autres caisses afin d’être traités de manière accélérée. Par ailleurs, des moyens supplémentaires ont été attribués et des renforts ont été apportés afin que la CARSAT gère ces dossiers.
Vous indiquez, monsieur le député, que le Gouvernement a débloqué une aide exceptionnelle reconductible de 800 euros pour les cas où les pensions n’ont pas été versées. Je rappelle que cette aide est acquise, c’est-à-dire qu’elle n’aura pas besoin d’être remboursée, ce qui est bien la moindre des choses.
Au-delà, monsieur le député, il s’agit de s’assurer que cette situation ne se reproduira pas. J’aurai prochainement l’occasion d’annoncer un certain nombre de dispositions qui doivent permettre à la CARSAT du Nord mais aussi à l’ensemble de ces caisses de traiter correctement les dossiers qui leur sont présentés.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Madame la ministre, nous discutons depuis hier du projet de loi santé, qui fait l’unanimité contre lui. Cela ne semble pas vous interpeller, tant vous êtes enfermée dans des postures moralisatrices.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
N’entendez-vous pas les médecins ? N’entendez-vous pas les buralistes et les viticulteurs ? Madame la ministre, n’entendez-vous pas que votre texte, loin d’améliorer notre système de santé, le fragilise ? Que loin de garantir l’accès aux soins de nos concitoyens, il le restreint ? Que loin de préserver les conditions de travail des professionnels de santé, il les dégrade ?
La façon dont vous avez mené l’examen de ce projet, en commission notamment, n’a pas été à la hauteur de votre mission. En réécrivant les articles les plus importants de votre texte en catimini, par des amendements de dernière minute, vous êtes passée en force et vous avez méprisé le législateur ! Sur la généralisation du tiers payant, vous auriez pu – vous auriez dû ! – écouter les solutions proposées par les médecins pour rédiger la nouvelle version de votre texte. Si la première était floue, la seconde sera pire, car totalement contraignante.
Que dire de l’ajout de dernière minute, toujours par voie d’amendement, du plan de lutte antitabac ! Ne trouvez-vous pas qu’il y a suffisamment de chômeurs, pour ne pas y ajouter des centaines d’employés de bureaux de tabac ? Vous proposez un paquet neutre, dont l’efficacité n’est pas prouvée, au lieu de vous lancer dans la lutte contre les marchés illégaux, et en faveur de l’harmonisation européenne des prix.
Que dire, enfin, des silences de ce texte ! Je pense en particulier aux déserts médicaux et à la revalorisation de la médecine générale.
Madame la ministre, votre loi restera un rendez-vous manqué. Manqué avec les professionnels de santé, manqué avec le Parlement et, au bout du compte, manqué avec nos concitoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Mesdames et messieurs les députés, madame la députée Geneviève Levy, nous avons entamé hier l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé. Le débat est ouvert et des amendements sont examinés – nombre d’entre eux viennent d’ailleurs des bancs de l’opposition. Il vous appartiendra de faire valoir vos propositions pour améliorer notre système de santé, pour réduire les obstacles que rencontrent nos concitoyens dans l’accès aux soins, pour mettre la prévention à l’honneur et pour faire en sorte que l’on puisse trouver des professionnels de santé dans chacun de nos territoires.
Puisque le débat est entamé, je voudrais réagir à l’un des points de votre intervention, madame la députée. Je trouve tout de même étonnant qu’au nom de la santé publique, vous invoquiez les médecins pour dire qu’un plan de lutte contre le tabagisme n’a pas lieu d’être dans cette loi.
Tout cela relève du règlement, et vous ne faites de la communication politique sur ce sujet que pour dissimuler le tiers payant !
Alors que le tabac tue 73 000 personnes chaque année dans notre pays, alors que la France est l’un des pays d’Europe les plus mal placés en termes de mortalité par le tabac et de nombre de fumeurs, vous ne devriez pas, madame la députée, invoquer la santé publique pour récuser le paquet neutre et l’ensemble des mesures qui sont prises pour lutter contre le tabagisme.
Je vous rappelle que l’Australie a adopté avant nous le paquet neutre, et que les résultats sont au rendez-vous !
Le nombre de consommateurs de tabac a baissé de 3,5 % en 2013, et la proportion de jeunes de 18 à 24 ans n’ayant jamais fumé a augmenté, passant de 72 % à près de 80 % au cours de la même année. Les résultats sont là, madame la députée.
Vous pouvez contester un projet de loi qui fait de l’égalité d’accès aux soins sa priorité, mais n’invoquez pas des mesures de santé publique pour récuser un projet dont les Français ont besoin aujourd’hui.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, je souhaite aujourd’hui me faire l’interprète d’un très grand nombre de maires de petites villes dites « bourgs centres », situées dans les territoires fragilisés par la crise économique et par la baisse des dotations.
S’il est indispensable – je le comprends – que ces collectivités locales participent à l’effort national, leur situation est néanmoins disparate et l’effort qui leur est demandé varie d’un territoire à l’autre. Dans ces territoires difficiles, l’effort de gestion a déjà été fait – je peux en témoigner – et il paraît désormais impossible de baisser le niveau de services pour des populations qui en ont tant besoin !
Il paraît également légitime de permettre l’accès aux services publics pour la ruralité la plus éloignée. Nous assumons donc notre rôle de centralité, mais il nous est de plus en plus difficile de faire plus avec moins. L’effet de ciseaux sur les budgets de fonctionnement est plus que préoccupant sur les niveaux d’investissements que peuvent encore consentir les budgets de ces petites villes. D’un point de vue économique, les chiffres sont inquiétants, puisque 70 % des petites villes devraient connaître une baisse de 10 à 40 % de leurs investissements.
Là où la richesse privée n’est pas au rendez-vous, la commande publique doit trouver toute sa place, notamment au service du secteur des bâtiments et des travaux publics. Certes, le Gouvernement soutient l’investissement à travers l’augmentation de la dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR – ou les appels à projets pour les bourgs centres. Mais il devient urgent d’agir pour un meilleur partage des richesses entre les territoires. La péréquation doit être un véritable outil. Nos concitoyens le crient : nos campagnes ne mendient pas, elles souhaitent simplement que la solidarité puisse s’exprimer dans ce qu’elle a de plus juste.
Monsieur le Premier ministre, je sais que le Gouvernement entend ce cri. Que répond-il ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Vous avez raison, monsieur le député, et le Premier ministre a rappelé avec fermeté que nous devions tous nous engager en faveur de la ruralité, où s’exprime un vrai sentiment d’abandon. Plusieurs mesures ont déjà été prises en ce sens. Rappelez-vous !
Premièrement, lorsque les bourgs centres ont exprimé leur inquiétude face à la disparition des chefs-lieux de canton, nous nous sommes engagés, sous l’autorité du Premier ministre, à garantir la dotation globale de fonctionnement – DGF – à ceux qui perdaient ce statut de chef-lieu. Deuxièmement, il a été décidé, lors des assises de la ruralité, de soutenir les maisons de services publics et les maisons de santé. C’est un engagement de dépenses publiques, mais c’est un engagement juste.
Par ailleurs, nous nous sommes rendu compte, en travaillant avec des petites villes et des communes rurales, que si les appels à projets et les appels à manifestation d’intérêt venant de l’État, de la région ou du département, ne reçoivent pas de réponse de la part des communautés de communes, c’est parce que celles-ci n’ont pas de moyens suffisants en ingénierie. C’est pourquoi nous nous sommes engagés à mettre à disposition de ces territoires ruraux, de ces petites villes, de ces bourgs centres, des fonctionnaires de l’État, qui auront pour mission de détecter les projets et de les porter. Il s’agira de soutenir des projets dans le secteur du numérique, de la transition énergétique, mais aussi pour les petites sociétés et le dernier commerce. C’est un engagement global. J’espère qu’il sera fructueux – j’en suis persuadé.
Nous devons également veiller à ce que le discours relatif à la baisse des dotations soit entendu différemment. Oui, nous baissons les dotations de façon globale, parce qu’il faut participer à la compétitivité nationale, mais, dans le même temps, nous augmentons la dotation de solidarité rurale. Oui, nous augmentons la dotation d’équipement des territoires ruraux, parce qu’il faut être juste et soutenir tout le territoire.
Ce n’est pas du baratin, monsieur le député, et nous pourrons vous donner les résultats, commune par commune.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Catherine Vautrin.
Hier soir, l’Assemblée a commencé la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 75 rectifié à l’article 1er.
suite
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 75 rectifié .
Je retire cet amendement, madame la présidente, car les travaux de la commission, notamment des commissaires UMP, ont permis d’introduire dans le texte la notion de handicap. L’amendement no 75 rectifié n’a donc plus lieu d’être.
L’amendement no 75 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement no 1810 .
Cet amendement vise à intégrer parmi les objectifs de santé publique les spécificités de chacun des patients, liées à leur identité, leurs pratiques et leur environnement. Notre système de santé doit être adapté à chacun et ne pas systématiser les procédures qui visent à soigner chaque Français. Un diagnostic médical ne sera pas le même selon l’orientation sexuelle du patient, si elle est connue. Les prescriptions ne seront pas les mêmes pour une personne en surpoids. Les explications différeront selon le niveau de compréhension de la personne et bien d’autres situations. L’importance d’intégrer cette disposition dans la loi ne doit pas être sous-estimée. En effet, la médecine se concentre trop souvent sur les aspects biologiques – la maladie, ses symptômes, parfois la douleur – et une dimension essentielle est trop fréquemment oubliée : l’humain.
La parole est à M. Olivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
La commission a repoussé cet amendement. Nous partageons son objectif mais la rédaction actuelle du texte le satisfait. En effet, celui-ci prévoit notamment que la politique de santé prenne en compte les principaux déterminants pour la santé liés à l’éducation, aux conditions de vie et de travail, à l’environnement et à la situation sociale.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, pour donner l’avis du Gouvernement.
Même avis.
Ma remarque sur cet amendement me permet de revenir sur nos débats d’hier soir. Les écologistes ont souhaité parler de réels problèmes de santé mais n’ont pas utilisé le bon vocabulaire. Les maladies chroniques qu’ils ont souhaité combattre me semblent en fait davantage correspondre aux microparticules ou aux nanoparticules susceptibles par exemple de franchir la barrière hémato-encéphalique et de provoquer des troubles. Il faudrait utiliser les termes qui conviennent.
En médecine, existait dans le temps la notion d’habitus. De fait, lors de l’examen clinique du patient auquel nous procédons à nos débuts en tant qu’externe, nous devons l’interroger pour connaître son environnement. Parce que la médecine est une science clinique, tous les médecins examinent leurs patients, y compris les psychiatres – à leur manière –, et font donc ce travail. Dès lors, il me semble aberrant d’introduire dans la loi ce qui est le propre du travail des médecins et des professions paramédicales. Si nous continuons ainsi, nous pourrions ajouter que les lois font de la sodomie de diptères.
L’amendement no 1810 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 2212 rectifié .
Cet amendement vise à prendre en compte les spécificités de nos territoires. Vous le savez, je suis particulièrement attachée à la prise en compte de celles-ci dans les zones de montagne, où les temps de déplacement sont parfois mesurés, non pas en kilomètres, mais en heures. On ne peut pas faire venir un hélicoptère en raison des conditions climatiques et les vallées sont particulièrement embouteillées, parfois pour de bonnes raisons. La politique en matière de santé doit tenir compte de ces spécificités territoriales. Cet amendement vise donc à compléter l’alinéa 19 par les phrases suivantes : « Elle tend à assurer l’accès effectif de la population à la prévention et aux soins et concourt à l’objectif d’équité territoriale. À cet effet, elle tient compte des spécificités géographiques, démographiques et saisonnières. »
Le texte intègre déjà un objectif en matière de réduction des inégalités territoriales et de santé, notions qui renvoient à celle d’équité territoriale, sujet extrêmement important. Chacun connaît votre engagement sur les sujets relatifs à la médecine, notamment dans les zones de montagne, et à l’accès aux soins dans les territoires marqués par la saisonnalité. La commission a repoussé l’amendement,…
…car les notions d’« inégalités sociales et territoriales », inscrites dans le texte, sont plus larges que celles de « spécificités géographiques, démographiques et saisonnières ».
M. le rapporteur a rendu compte des discussions en commission et il est vrai qu’une lecture stricte du texte aboutit à cette analyse. Néanmoins, compte tenu de l’importance de l’objectif de réduction des inégalités territoriales et de la situation spécifique de certaines zones isolées, pour lesquelles je me suis particulièrement mobilisée, y compris en apportant des financements aux structures, je donnerai un avis favorable à cet amendement.
En France, il fut un temps où nous avions un État, dont l’administration s’occupait du plan et de l’aménagement du territoire. Il y a quelques semaines, nous avons un examiné un merveilleux texte, le projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République – la loi NOTRe –, qui désorganise encore plus l’organisation territoriale. Je comprends les interrogations de Mme Laclais, mais à quoi sert-il d’introduire dans le présent projet de loi des voeux pieux, qui ne se traduiront pas en espèces sonnantes et trébuchantes et sont contradictoires avec la politique actuelle du Gouvernement, qui délaisse les zones rurales avec la loi NOTRe ? Chers collègues de la SFIO…
Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC
Nous avons souligné hier soir qu’il était incohérent de n’avoir pas abordé une seule fois la question de la santé dans le cadre de la loi NOTRe, madame la ministre. Le présent projet de loi est à nouveau un texte bavard, qui multiplie les voeux pieux, alors que tous les professionnels de santé sont vent debout contre lui car il détruira la médecine française.
Au-delà de l’héritage de la SFIO, mon collègue a parfaitement raison : nous sommes, madame la ministre, monsieur le rapporteur, en train d’écrire la loi, qui est normative.
L’amendement, qui va sans doute être adopté, prévoit que la politique de santé « tend à assurer l’accès effectif de la population à la prévention et aux soins et concourt à l’objectif d’équité territoriale. » Vous allez donc, madame la ministre, engendrer des actions en justice, et, bien sûr, de la jurisprudence. De nombreux justiciables seront en effet en droit de dire : « Je suis saisonnier à tel endroit, et, ce jour-là, je n’ai pas bénéficié du secours que j’attendais, or dans la loi, il est marqué que vous me devez l’accès effectif aux soins. »
Nous sommes donc en train de créer des normes complètement absurdes : finalement, nous allons adopter des dispositions uniformes pour l’ensemble du territoire, en réaffirmant ce qui était une évidence. On doit en effet porter secours à toutes les personnes qui sont blessées. Mais à quoi cela sert-il de le récrire, sinon bien sûr à faire plaisir à notre collègue ? Tout le monde, évidemment – les services de secours, tout comme les hôpitaux et les médecins – doit se mettre en quatre pour secourir, aider et soigner les personnes, partout sur le territoire.
Pourquoi faudrait-il donc, chère madame Laclais, aider spécialement les habitants de votre circonscription et pas les autres ? Qu’est-ce que c’est que cette loi et que cet amendement que le Gouvernement vient d’accepter ? Ailleurs que dans cette circonscription, c’est-à-dire sur le reste du territoire, il ne serait donc pas nécessaire, madame la ministre, d’assurer un accès effectif aux soins ? Cela n’est pas sérieux.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Nos collègues de l’opposition oublient peut-être un peu vite qu’il existe une loi de 1985 qui s’appelle la loi montagne.
Monsieur le député Tian, je vous ai écouté, et je pense avoir été très respectueuse de votre expression. Je le suis également dans le ton que j’emploie : je vous demande, si c’est possible, la réciproque.
Cette loi, disais-je, rappelle que les territoires de montagne ne sont pas tout à fait semblables aux autres territoires, y compris d’ailleurs à des territoires isolés qui ont été évoqués et pour lesquels j’ai le plus grand respect.
De même, à travers cet amendement, il s’agit simplement de rappeler qu’il existe des spécificités liées à la géographie, aux difficultés d’accès, et également au fait que la population de certains espaces peut, en quelques heures, passer de quelques dizaines de milliers d’habitants à plus de 100 000 ou 200 000 habitants.
Les différents documents qui régissent la politique nationale de santé, ainsi que les décisions qui sont prises sur son fondement, doivent donc les prendre en compte.
Je tiens à souligner le manque de cohérence de Mme la ministre. Hier, un amendement a été déposé par Mme Fraysse concernant la stratégie nationale de santé : il visait à ce que soit prise en compte la spécificité des territoires, afin que ladite stratégie « colle » le plus possible à nos concitoyens ainsi qu’à nos territoires. Or aujourd’hui, l’amendement de notre collège Mme Laclais reprend cette logique, en ciblant un territoire bien spécifique, et vous l’acceptez ! Il y a donc un problème de cohérence dans la position du Gouvernement – ce qui ne nous étonne pas, car ce texte, dans son ensemble, se caractérise par un manque de cohérence.
L’amendement no 2212 rectifié est adopté.
Je suis saisie de huit amendements, nos 162 , 1176 , 194 rectifié , 968 , 2372 , 1098 , 76 et 783 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 968 et 2372 , de même que les amendements nos 76 et 783 , sont identiques.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement no 162 .
Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, mon cher collègue, je vous propose de défendre simultanément l’amendement no 1176 .
Effectivement, ces deux amendements sont quasiment identiques.
Madame la ministre, vous prévoyez, et c’est une très bonne chose, une consultation préalable à la révision de la stratégie nationale de santé. Il faut que cette consultation soit réussie car, dans le domaine de la santé, on voit bien que l’appropriation des enjeux n’est pas réellement collective. Dans un système vraiment centralisé comme le nôtre, il est particulièrement important d’impliquer tous les acteurs ainsi que les populations concernés.
Vous voulez faire en sorte que cette consultation soit publique : dont acte. Ces amendements ont pour objectif de présenter une méthode qui consiste d’abord à impliquer l’ensemble des organisations représentatives des acteurs de la santé, dans un format adapté au dialogue entre les différentes parties prenantes. Quelles sont les grandes catégories d’acteurs concernés ? Ce sont le Conseil national consultatif des personnes handicapées, le CNCPH, ainsi que les représentants des usagers, des professionnels et des établissements de santé et des établissements médico-sociaux.
Cette concertation est nécessaire. Ensuite, comme toute concertation bien organisée, elle doit être soumise à la population – c’est l’objet de l’amendement no 1176 –, c’est-à-dire aux citoyennes et aux citoyens, lors de débats publics. Nous pensons vraiment que l’adoption de ces amendements clarifierait le dispositif et faciliterait la consultation prévue, qui doit être réussie.
Le projet de loi prévoit la consultation publique des acteurs préalable à la révision de la stratégie nationale de santé. Cette consultation publique, qui est une bonne chose, s’impose comme une évidence. Certains amendements qui seront présentés tout à l’heure visent à supprimer son caractère public : ils sont donc, par nature, destinés à être rejetés d’emblée. D’autres visent à déterminer, dans la loi, alors que cela relève du décret, la nature des interlocuteurs qui participeront à cette participation publique.
Je peux vous rassurer sur un point : l’ensemble des acteurs qui figurent dans ces différents amendements, quels qu’ils soient – ces deux amendements et les suivants –, prendront part, naturellement, à la consultation publique. Il n’est pas nécessaire de connaître le contenu du décret pour savoir que les associations d’usagers, ou les représentants des professionnels ou des établissements de santé, seront très impliqués à toutes les étapes des révisions de la stratégie nationale de santé.
Toutefois, inscrire dans la loi un certain nombre d’acteurs revient d’office à exclure les autres. En outre, cela revient à mettre au niveau législatif ce qui relève clairement du décret, voire de la politique réglementaire. L’avis de la commission est donc défavorable sur ces deux amendements, comme sur ceux qui font l’objet de cette discussion commune : je n’en dirai donc pas plus lorsque l’avis de la commission sera sollicité à leur propos.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 194 rectifié .
J’irai dans le même sens que mon collègue M. Pancher. Monsieur le rapporteur, vous connaissez, comme nous tous, le problème du handicap. Les handicapés souhaitent véritablement que cette mention figure dans la loi. Notre amendement vise donc à associer le secteur du handicap, et particulièrement le CNCPH, à la consultation.
Vous savez, cette proposition leur tient à coeur, de la même façon que leur tient à coeur, dans le cadre des collectivités territoriales, les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. Ce sont des lieux de rencontre où ils peuvent avoir quelque chose à quoi se raccrocher. Je vous demande donc d’inscrire, à la première phrase de l’alinéa 20, le Conseil national consultatif des personnes handicapées.
Nous avons noté tout à l’heure, avec l’avis favorable émis par Mme la ministre, qu’il y avait, s’agissant des amendements, deux poids, deux mesures. Quoi qu’il en soit, celui-vise à corriger un manque flagrant, celui de ne pas avoir prévu d’associer à la consultation les acteurs essentiels qui font vivre et fonctionner le système sanitaire et médico-social.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2372 .
Monsieur le rapporteur, j’ai bien entendu vos propos, mais le terme de consultation publique est trop peu précis, et il fait courir le risque d’une consultation, au final, peu efficace.
Cet amendement vise donc à prévoir l’exercice de la démocratie sanitaire par l’intermédiaire des organisations représentatives des acteurs de la santé que sont les représentants des usagers, des professionnels de santé, des établissements de santé et des établissements médico-sociaux.
Monsieur le rapporteur, il ne s’agit pas d’exclure les acteurs qui ne seraient pas mentionnés. Il s’agit de donner une importance, dans la stratégie nationale de santé, que ce soit dans le domaine médical ou dans le domaine médico-social, au monde du handicap. Je n’oublie pas non plus les aidants. Il ne s’agit donc pas d’exclure. En outre, vos propos sont discordants par rapport à ceux tenus par Mme la ministre concernant l’approche territoriale, que je reconnais partager.
Mais, en l’espèce, il faut prendre en compte la dimension humaine, car elle est importante dans la stratégie nationale de santé et dans l’écriture de notre projet public. Vous nous dites que cela figurera dans la loi. Les déclarations d’intention, c’est bien, mais qu’est-ce qui nous empêche de nous répéter et d’inscrire dès aujourd’hui dans la loi le principe d’une représentation de ces personnes ?
L’avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées doit être pris en compte dans la définition de la stratégie nationale de santé.
Cet amendement vise à associer le secteur du handicap à la stratégie nationale de santé, tant à l’étape de la consultation publique préalable à son adoption ou sa révision, que lors de son suivi et son évaluation.
Pour compléter brièvement les propos que j’ai tenus, je veux dire à M. Aboud que, malheureusement, déterminer dans la loi la nature des acteurs qui sont consultés dans le cadre d’une consultation publique exclut de fait, et d’office, les autres.
Je vous garantis que c’est le cas, car nous avons vérifié ce point.
Le Conseil national consultatif des personnes handicapées, dont il a été fait état, peut d’ores et déjà se saisir « de toute question relative à la politique concernant les personnes handicapées », comme le prévoit expressément le troisième alinéa de l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles. Votre intention est donc pleinement satisfaite.
J’ajoute que l’alinéa 19, inséré par la commission à l’article 1 er, dispose : « La politique de santé est adaptée aux besoins des personnes en situation de handicap et de leurs aidants familiaux. »
Il n’y a donc, je le répète, pas d’inquiétude à avoir : évidemment, les associations seront pleinement impliquées à toutes les étapes de la définition et des révisions de la stratégie nationale de santé.
Le préciser dans la loi est non seulement inutile mais péjoratif au regard de l’objectif sous-tendu par l’article.
Même avis. Il va de soi que ces associations seront consultées, mais il n’est pas possible, au risque d’en oublier d’autres, de n’inscrire dans la loi que certains des interlocuteurs qui participeront à cette élaboration. La première option consiste à établir une liste totalement exhaustive, et dans ce cas – la valeur de la loi étant supérieure à celle du décret – il va de soi que ce qui figurerait dans la loi apparaîtrait comme nécessaire et ce qui n’y figurerait pas comme inutile ou superfétatoire.
La seconde option consiste à élaborer un décret en bonne et due forme. L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Je tiens juste à rappeler à M. le rapporteur et à Mme la ministre que le Président de la République a annoncé, il y a quelques mois, que les projets de loi comporteraient tous un volet d’adaptation aux personnes handicapées. Cela sous-entend que les associations, mais aussi – et d’abord – le CNCPH, devaient cités dans la loi.
Je voudrais répondre aux interrogations tout à fait légitimes des mes collègues concernant la participation du Conseil national consultatif des personnes handicapées, que j’ai l’honneur de présider depuis deux ans.
Mes chers collègues, comment fonctionne le Conseil aujourd’hui ? Effectivement, cela a été rappelé, nous avons, depuis deux ans, par décision du Président de la République et du Premier ministre de l’époque, obligation que chaque texte comporte un volet relatif au handicap. Pour ce faire, un référent handicap a été nommé dans chaque ministère. Je vais d’ailleurs, dans quelques semaines, réunir tous ces référents afin de dresser le bilan de leur action et de vérifier comment, dans chaque texte, il a été possible d’avancer et comment il sera possible d’aller plus loin.
S’agissant des projets de loi – qu’il s’agisse de celui que nous examinons en ce moment ou d’autres –, le CNCPH tient régulièrement des auditions avec les cabinets ministériels. Elles nous permettent d’obtenir les renseignements nécessaires, notamment sur le suivi des textes. En matière de santé, nous avons d’ailleurs eu deux échanges sur ces sujets, et un rapport sur l’accès aux soins et à la santé des personnes handicapées a été rédigé par Pascal Jacob. Un certain nombre des mesures qu’il préconisait figure d’ailleurs dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé.
Aujourd’hui, nous ne pouvons pas aller plus loin, puisque chaque ministère fait en sorte que ses propositions soient prises en considération. Je rappelle par ailleurs que le CNCPH peut s’autosaisir en cas de doute ou d’oubli sur un sujet sur lequel il pense que les choses ne sont pas allées assez loin. Il le fait, d’ailleurs, régulièrement. Actuellement, cette question est donc tout à fait prise en considération. Je comprends l’inquiétude de certains mais, très honnêtement, dans les fonctions que j’exerce avec l’ensemble des associations et des organismes qui siègent au CNCPH, je pense que nous allons tout à fait dans le sens que vous souhaitez – à juste titre d’ailleurs.
De votre part, ma chère collègue – je le dis avec beaucoup de respect –, c’est un peu décevant.
Au-delà des valeurs symboliques, il y a des valeurs politiques. Nous sommes en train de dire au monde du handicap que nous ne pouvons pas l’inscrire dans cette loi qui concerne la santé publique parce qu’il ne faut pas oublier les autres associations. Avec tout le respect que nous devons aux autres, je pense qu’il y a une différence énorme entre le Conseil national consultatif des personnes handicapées et telle ou telle association militant pour telle ou telle cause ou telle ou telle territorialité.
C’est une erreur symbolique et politique que nous commettons envers le monde du handicap.
La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour soutenir l’amendement no 1086 .
Il me paraît primordial d’aborder la prévention et la promotion de la santé de manière transversale et pluridisciplinaire.
Cet amendement vise à faire en sorte que tout projet de loi fasse l’objet, de la part du Gouvernement, d’une réflexion préalable sur l’insertion de dispositions relatives à la prévention et à la promotion de la santé. Dans une loi concernant par exemple le logement, on pourrait prévoir des dispositions relatives à la prévention des risques domestiques ou de la pollution intérieure. Si ce n’est pas adapté, le Gouvernement pourra donner les raisons pour lesquelles le volet prévention santé n’est pas développé.
L’intérêt, c’est que l’on oblige le Gouvernement à mener systématiquement une réflexion et que l’on crée ainsi un réflexe de prévention santé. Est-ce compliqué, est-ce inadapté ? Non, puisque cela existe déjà en matière de handicap et d’égalité entre femmes et hommes ou pour l’outre-mer.
Défavorable, non pas sur le fond mais sur la forme.
Ce n’est pas une loi organique. Prévoir une telle procédure serait donc sans effet, puisque ni le Gouvernement ni le législateur ne serait lié. Il vaut mieux s’en tenir à la mise en oeuvre de la stratégie nationale de santé, dont certaines des composantes seront mises en oeuvre par le biais de dispositions législatives.
Un comité interministériel pour la santé a également été mis en place. Il a pour mission, sous la présidence du Premier ministre, de favoriser la prise en compte de l’éducation à la santé, de la promotion de la santé dans l’ensemble des politiques publiques.
Sur le fond, votre amendement est donc satisfait et, sur la forme, malheureusement, il serait sans effet.
Comme je l’ai déjà fait, je vous demande, madame Khirouni, de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, j’y serai défavorable.
Des structures ont été mises en place par ce gouvernement. Le fameux comité interministériel pour la santé sera installé, l’intention étant justement de faire partager par l’ensemble du Gouvernement les mêmes objectifs en matière de santé et les mêmes préoccupations pour que les différents départements ministériels puissent les intégrer en amont, lors de l’élaboration des textes. L’on travaille à ce que cette préoccupation de la santé soit intégrée par l’ensemble de mes collègues – le comité interministériel a été mis en place précisément pour cela.
Il est vrai que nous sommes parfois surpris par ce que nous propose le Gouvernement,
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
mais il serait tout de même étonnant que le Gouvernement ne se livre pas à un minimum de réflexion avant d’élaborer une stratégie.
« Tout projet de loi, à l’exception des projets de loi de finances, fait l’objet d’une réflexion préalable sur l’insertion de dispositions relatives à la prévention et à la promotion de la santé », est-il proposé. Si un gouvernement ne faisait pas cela, ce serait tout de même assez pitoyable.
Je sais bien que nous approchons d’une période miraculeuse mais, à force de vouloir faire l’ange, on fait la bête.
La vie est un risque, qui se termine en général, statistiquement, par la mort. Dans cette assemblée, nous savons bien que nous avons des soldats qui se battent, qui peuvent éventuellement mourir au combat, et qu’il y a une loi de programmation militaire. Si l’on adopte ce type d’amendements, cela signifie que, de manière totalement absurde, toutes les lois que nous allons voter, y compris la loi de programmation militaire, devront intégrer de telles dispositions.
Vous avez des hauts fonctionnaires responsables, un corps médical parfaitement responsable dans ce pays, public et privé, qui a systématiquement le souci de créer un lien avec ses patients, de les soigner au mieux et, d’abord, de ne pas leur nuire. Or le Gouvernement est en train de détruire le système de santé français…
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
…de détruire l’équilibre qu’il y avait entre le public et le privé, de décourager les vocations. Qui, en effet, voudra devenir chirurgien, médecin dans ce pays avec ce que les adultes sont en train de préparer aujourd’hui ?
C’est totalement surréaliste de proposer ce type d’amendements. Je me demande où nous sommes !
Ce qui est vraiment surréaliste, monsieur Dhuicq, c’est votre intervention. En tout cas, je regrette le manque de finesse des interventions de mes collègues de l’opposition.
Écoutez un petit peu lorsque nous argumentons et lorsque nous présentons des amendements.
Madame la ministre, les éléments que vous m’avez apportés me satisfont, je retire mon amendement.
L’amendement no 1086 est retiré.
La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour soutenir l’amendement no 1119 .
J’espère vous convaincre, monsieur le rapporteur, madame la ministre, mes chers collègues.
Cet amendement vise à définir un cadre formel de concertation pour tout projet de loi de réforme de la politique de santé – à l’exclusion, bien évidemment, des projets de loi de financement de la Sécurité sociale et des projets de loi de finances –, pour relancer la démocratie sanitaire.
La loi de 2004 prévoit la consultation des acteurs majeurs de notre système de santé, l’UNCAM, l’UNOCAM, l’UNPS. L’amendement vise à renforcer la participation des usagers en intégrant l’organisation représentative des associations des usagers agréées, conformément à l’une des propositions du comité des sages.
Vous allez me répondre qu’il existe déjà des concertations, des consultations avant l’élaboration des projets de loi, mais le cadre actuel n’est pas performant – le projet de loi que nous examinons illustre met d’ailleurs en évidence certaines limites. Vous le savez, madame la ministre, car même si vous avez consulté et organisé des concertations, certains acteurs ne reconnaissent pas cette concertation. Le fait de poser un cadre formalisé permettrait d’améliorer la concertation. Je vous en propose un sur le modèle de celui qui existe pour les partenaires sociaux en matière de dialogue social.
Au cours des longues conversations que notre proximité dans l’hémicycle nous a permis d’avoir, madame Khirouni, j’étais presque convaincu de vous avoir convaincue que, malheureusement, cet amendement n’est ni justifié ni même bénéfique au regard des objectifs de la loi, et ce pour plusieurs raisons.
D’abord, comme j’ai eu l’occasion de le souligner tout à l’heure, la consultation publique sera large et les conditions de la consultation seront définies par décret de manière à n’exclure personne, ce que Mme la ministre a rappelé à des députés de l’opposition.
J’ajoute que vous proposez de consulter une seule organisation représentative des associations des usagers agréées, qui, en plus, devrait être désignée par le préfet, ce qui ne va pas sans poser un certain problème en termes de représentativité et de démocratie sanitaire, ce sur quoi vous voulez mettre l’accent.
Je vous fais donc part à nouveau de mon désir très fort de vous voir retirer cet amendement. La commission, en tout cas, y est défavorable.
Même avis.
C’est plutôt un bon amendement. Il gêne à la fois le rapporteur et le Gouvernement puisque nous sommes en train d’examiner un texte qui fait l’objet d’une opposition unanime de l’ensemble des professionnels de santé.
Globalement, aucune association représentative n’est favorable au texte que vous présentez, madame la ministre. Il est rejeté par tous les professionnels, par le monde médical évidemment, mais aussi par l’ensemble des professionnels de l’agroalimentaire, et même les chocolatiers, par ceux qui vendent des cigarettes électroniques. Tout le monde est contre.
Nous vous avons proposé hier de revenir en commission pour réexaminer le texte. Vous le modifiez de manière quasiment constante, vous réécrivez les articles, nous ne savons plus où nous en sommes, et vous continuez la concertation. Vous l’avez dit vous-même au banc du Gouvernement, ce texte sera enrichi, y compris grâce aux professionnels que vous n’arrêtez pas de consulter. Un exemple : l’article sur la psychiatrie a été réécrit dans l’urgence ce week-end.
Vous avez totalement raison, madame Khirouni, il faut absolument qu’une concertation véritable et démocratique s’établisse avec les professionnels de santé. C’est la raison pour laquelle nous soutenons votre amendement.
L’amendement no 1119 est adopté.
La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement no 1584 .
Nous souhaitons que le décret précise que le suivi annuel et l’évaluation pluriannuelle dont fera l’objet la stratégie nationale de santé s’appuient sur des indicateurs sexués. Ce n’est pas très difficile à faire. Lors des enquêtes, on sait toujours s’il s’agit d’un homme ou d’une femme. Le fait d’avoir des indicateurs sexués permettra d’avoir un suivi plus intéressant de l’état de santé.
Nous avons adopté hier un amendement très important sur la prise en compte des différences entre les hommes et les femmes dans les politiques de santé. Cet amendement permet de répondre à vos objectifs.
C’est un décret en Conseil qui fixera les conditions d’évaluation et de suivi pluriannuel de la stratégie nationale de santé. La disposition que vous proposez est un peu ambiguë. Faut-il parler seulement d’indicateurs sexués, ne faut-il pas prévoir des données selon le sexe pour l’ensemble des indicateurs ?
Dans la mesure où l’amendement que nous avons adopté hier me semble plus fort et plus pertinent que celui-ci, la commission lui a donné un avis défavorable.
Défavorable.
Je retire l’amendement. Je pense que les indicateurs sont pris en compte.
L’amendement no 1584 est retiré.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 1408 rectifié .
L’amendement no 1408 rectifié , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Dans le cadre de ce projet de loi qui prévoit la création d’un service territorial de santé au public visant à organiser de manière administrée la coopération entre les professionnels libéraux sur les territoires, il est indispensable, dans cet article qui redéfinit le schéma régional de santé, de réaffirmer de manière forte le respect de la liberté d’installation mentionné à l’article L. 1434-7 du code de la santé publique.
Mme la ministre a eu l’occasion à de nombreuses reprises, lors des travaux en commission, de rappeler l’attachement du Gouvernement à la liberté d’installation des professionnels.
Un amendement a été adopté à l’article 38 pour préciser que c’est « dans le respect de la liberté d’installation » qu’est élaboré le schéma régional de santé.
De plus, l’article L.162-2 du code de la Sécurité sociale prévoit déjà que, dans l’intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, « le respect de la liberté d’exercice et de l’indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix du médecin par le malade, la liberté de prescription du médecin, le secret professionnel » et « la liberté d’installation du médecin ».
Cette notion figurera donc déjà deux fois dans la loi.
Comme vient de le dire M. le rapporteur, ces principes ont été inscrits dans la loi sur la base d’un amendement gouvernemental. Il ne sert à rien de sauter comme un cabri sur votre siège pour dire que nous remettons en cause la liberté d’installation, alors qu’il n’y a rien – rien ! – dans ce texte et qu’il n’y a jamais rien eu qui remette en cause la liberté d’installation des professionnels de santé.
Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, ce n’est pas des bancs de la gauche qu’a émané une récente proposition de loi visant à imposer de manière particulièrement contrainte un lieu d’installation aux jeunes professionnels, afin de lutter contre la désertification médicale.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous avons fait le choix de l’incitation et de l’attractivité de l’exercice. On peut en débattre, mais non pas dire au Gouvernement qu’il devrait faire preuve de coercition pour installer les médecins dans les déserts médicaux et lui reprocher dans le même temps de remettre en cause l’exercice libéral de la médecine à l’occasion de cette loi.
Il faudrait savoir de quel côté on tombe. À courir tous les lièvres à la fois, on finit par ne plus être entendu et n’arriver à rien !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Madame la ministre, je ne saute pas comme un cabri, dont je n’ai d’ailleurs plus ni la ligne ni la capacité à bondir !
Sourires.
Cela fait assez longtemps que nous parlons de ces sujets-là ensemble, à l’occasion de débats, à l’Assemblée ou en dehors. Il est impératif que la liberté d’installation soit inscrite dans la stratégie nationale de santé. Vous avez été alertée par le Conseil national de l’ordre des médecins, qui vous a confirmé l’indépendance de l’exercice de la médecine. Cette indépendance va de pair avec la liberté d’installation du corps médical, en médecine de ville. Il est indispensable que cela soit écrit, marqué et que l’on n’y revienne pas !
Madame la ministre, nous ne pouvons pas accepter vos attaques concernant la position de l’opposition, et particulièrement du groupe UMP, sur son attachement à la liberté d’installation pour les médecins. Au contraire, c’est ce gouvernement qui montre qu’il a un vrai problème avec l’ensemble des professions libérales – je ne reviendrai pas sur la question des avocats et des notaires dans la loi Macron. Cette fois-ci, avec une autre stratégie mais le même objectif, qui est d’attaquer et de supprimer les professions libérales, Mme la ministre étatise le système de santé…
…et essaie de fonctionnariser les médecins de la médecine générale. Il semblerait intéressant, pour montrer votre attachement à la liberté d’exercice, d’inscrire dans ce texte le respect de la liberté d’installation.
Les remarques de mes collègues montrent à quel point il est important d’inscrire la liberté d’installation dans l’article 1er de ce texte. Je comprends les arguments que vous avez invoqués – plus qu’évoqués d’ailleurs. Cependant, la défiance des professionnels de santé et des médecins libéraux est aujourd’hui telle vis-à-vis de la politique que vous conduisez et des mesures proposées dans ce texte qu’il me semble absolument indispensable de les rassurer et de les conforter, en garantissant dans l’article 1er leur liberté d’installation. Sans quoi, ils le prendraient comme une nouvelle attaque contre leur exercice. Vous dites que cette liberté est inscrite ailleurs dans la loi, mais pourquoi n’y aurait-il pas quelque chose de redondant dans un texte ? Ce ne serait pas la première fois qu’on légiférerait sans légèreté !
Il n’y a aucun problème, à mon sens, pour l’inscrire dans l’article 1er, d’autant que vous venez de dire que la liberté d’installation est garantie. Je ne vois à cela que des avantages, notamment celui d’envoyer un signal d’apaisement aux professionnels de santé qui sont particulièrement inquiets, à cause de tout ce que vous venez de proposer, et qui manifestent encore aujourd’hui.
L’amendement no 309 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 786 rectifié et 1099 .
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 78 rectifié .
Cet amendement vise à rendre obligatoire la prise en compte de l’accessibilité au handicap des actions de promotion de la santé, en complétant l’article L. 1411-1-1 du code de la santé publique, renforçant ainsi l’égalité des chances en santé des personnes handicapées, notamment scolarisées, tel que le prévoit l’article 2 du projet de loi.
Madame la ministre, vous aviez besoin d’envoyer des ondes positives au corps médical, et je le comprends. Mais ne le faites pas en reprenant à votre compte la question de liberté d’installation et en accusant le groupe UMP ! La liberté d’installation des médecins est inscrite dans notre ADN. Il ne faut pas être hypocrites, mes chers collègues ! Nous nous attendions à discuter, avec ce projet de loi, de la ruralité et de la démographie médicale, mais vous avez préféré parler du tiers payant généralisé.
Veuillez m’excuser, monsieur Aboud, d’évoquer une expérience personnelle, mais si la liberté d’installation des professionnels de santé est dans les gènes des députés de droite, ils ont bien muté depuis 2008 !
Sourires.
En 2008, j’étais sous les fenêtres de l’avenue de Ségur, vêtu d’une blouse au dos de laquelle il était écrit : « En grève ». Nous avions été 15 000 internes à nous mobiliser contre le premier PLFSS du quinquennat Sarkozy, qui prévoyait de supprimer purement et simplement la liberté d’installation et d’instaurer un conventionnement sélectif.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je m’en souviens ! Vous ne pouvez pas m’enlever cela ! Des photos sont disponibles sur internet, si vous ne vous souvenez plus du texte de loi.
Aujourd’hui, la défense de la liberté d’installation est manifestement partagée sur l’ensemble des bancs, à l’exception de quelques députés de droite qui ont signé une proposition de loi visant à la supprimer. Vous n’entendrez pas ce type de discours sur les bancs de la majorité. Tournons cette page, s’il vous plaît, d’autant qu’elle ne va ni dans votre sens, ni dans votre intérêt !
S’agissant de l’accessibilité aux personnes handicapées, l’alinéa 19 inséré par la commission prévoit que la politique de santé est adaptée aux besoins des personnes en situation de handicap et de leurs aidants familiaux. Par ailleurs, les actions de promotion de la santé recouvrent le développement des compétences individuelles. Elles sont donc, par définition, conçues de manière à être accessibles en fonction des conditions de vie de chacun. L’amendement me paraît donc satisfait.
Même avis.
Monsieur le rapporteur, votre départ prochain de l’Assemblée nationale ne vous autorise pas à raconter n’importe quoi, ni en particulier à affirmer froidement des mensonges aussi conséquents que celui que vous venez de nous asséner !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
S’agissant du fond de l’amendement, le paragraphe 23 de l’article 1er prévoit la création d’environnements physiques, sociaux et économiques favorables à la santé.
Madame la ministre, comment pouvez-vous refuser de préciser, par l’amendement que nous défendons, l’accessibilité de ces installations pour les handicapés ? Il y va du plus élémentaire respect des droits des citoyens, quels qu’ils soient. C’est pour cette raison qu’il faut accepter cet amendement.
Monsieur le rapporteur, nous étions tous sensibles, même sur les bancs de l’opposition, au message envoyé par vos collègues de la majorité ; mais finir avec une contre-vérité sur le PLFSS et la liberté d’installation, c’est inadmissible ! Pardonnez-moi de le dire : ce n’est pas vrai ! C’est faux, et nous ne pouvons pas vous laisser dire cela !
Les amendements identiques nos 786 rectifié et 1099 ne sont pas adoptés.
Madame la ministre, vous avez évoqué une proposition de loi qui aurait été signée par l’UMP. Or, ce n’est pas l’UMP qui a proposé de limiter la liberté d’installation, ce ne sont que quelques parlementaires qui se sont peut-être égarés en signant ce texte. Cela peut arriver, et cela arrive aussi dans vos rangs, comme vous le savez. Ce n’était pas une proposition de loi émanant de l’UMP.
Votre projet de loi est très mal né, comme nous le voyons aujourd’hui. Pourquoi n’avez-vous pas fait un projet de loi sur la prévention et la stratégie nationale de santé, soit sur tous les sujets concernés par les premiers articles – la drogue, le tabac, l’alcool ou encore les maladies – ? Sur ces points, nous aurions probablement été d’accord avec vous. Vous auriez ensuite rédigé un deuxième projet de loi sur l’organisation des soins. Cette séparation des sujets aurait facilité les débats parlementaires. Or, là, vous proposez une loi fourre-tout qui mêle la stratégie de santé, la prévention… Par exemple, nous parlerons tout à l’heure du vin, de l’alcool, de la drogue et de je ne sais quoi encore.
Puis nous reviendrons sur l’organisation des soins, dont nous avons grand besoin en France. C’est bien cela le principal, même si le reste ne doit pas être éliminé. Il aurait simplement fallu le traiter dans un projet à part, qui aurait reçu notre assentiment. L’organisation des soins, en particulier, nous importe beaucoup. C’est pour cela qu’il faut que nous ayons un cadre déontologique confirmant la liberté d’installation et l’indépendance des médecins de médecine générale, de médecine ambulatoire et de médecine libérale, qui sont le fondement de la médecine française.
Nous verrons dans de prochains articles que vous allez donner beaucoup plus de pouvoirs aux ARS, ce qui risque de mettre en péril cette indépendance des médecins. C’est pour cela qu’il faut inscrire la liberté d’installation dès l’article 1er, dans la stratégie nationale de santé.
Madame la ministre, vous allez encore dire que nous sautons comme des cabris, chaque fois que nous parlons des professions libérales en matière de santé ; mais j’ai du mal à vous comprendre. Les professionnels de santé sont inquiets et ils veulent que nous leur garantissions leur liberté d’installation et de fonctionnement par la suite. Je ne vois pas pourquoi vous vous obstinez à refuser une telle inscription dans le texte de votre loi. Réaffirmer dans ce texte la liberté d’installation et des initiatives individuelles est important. Si cela va bien en le disant, cela va mieux en l’écrivant.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 969 .
Dans le paragraphe 26 de cet article 1er qui n’en finit pas, il est écrit que les objectifs sont définis par les agences régionales de santé et qu’elles définissent la répartition territoriale homogène de l’offre de services.
Madame la ministre, mes chers collègues, vous conviendrez que si l’on ne spécifie pas à ce niveau qu’il faut respecter la liberté d’installation, celle-ci sera immanquablement remise en cause par deux mécanismes : les décisions des agences régionales de santé ; mais également le tiers payant généralisé qui donnera à l’assurance maladie un droit de vie et de mort immédiate sur les cabinets des médecins, en décidant de cesser de les régler, dès lors qu’ils ne respecteraient pas l’ordre et les décisions des agences régionales de santé.
Il est donc absolument indispensable de préciser, dans ce paragraphe, que la liberté d’installation sera respectée. Madame la ministre, compte tenu de la tension qui existe actuellement dans le pays entre le Gouvernement, vous-même et les professions de santé, en particulier le corps médical toutes tendances confondues, je pense que vous seriez bien inspirée d’essayer de faire baisser la pression en acceptant cet amendement.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2371 .
Madame la ministre, j’ai bien entendu vos propos tout à l’heure, mais je pense qu’il est essentiel qu’il n’y ait aucun doute. Le rôle des ARS dans ce texte est ambigu.
Il faut donner un signal fort aux jeunes professionnels de santé, y compris aux internes et aux médecins, en rappelant dans le texte même de la loi le respect du principe de la liberté d’installation. Sinon, madame la ministre, vous allez émettre un signal extrêmement négatif, et ils se détourneront de leur choix initial. Il est extrêmement important de rappeler le principe de la liberté d’installation dès l’article 1er.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et UMP.
Toute mesure coercitive à l’installation serait inefficace, injuste, inappropriée et ne marcherait pas. Il y a manifestement un consensus dans l’hémicycle sur ce point, mais je vais raisonner par l’absurde : si nous introduisions ces amendements à l’alinéa 26 de l’article 1er, on se retrouverait avec le texte suivant : « Les organismes gestionnaires des régimes d’assurance maladie » – lesquels doivent respecter la liberté d’installation des professionnels, du fait du renvoi à un autre article – « concourent à la mise en oeuvre de la politique de santé et des plans et programmes de santé qui en résultent […], dans le respect de la liberté d’installation des professionnels. » Au minimum, c’est redondant ; au pire, c’est illisible. Ce principe est réaffirmé à l’article 38 alors qu’il était déjà inscrit dans le code de la Sécurité sociale. Passons à autre chose !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Même avis que la commission.
Madame Orliac, je tiens à vous rappeler que le principe de la liberté d’installation est inscrit dans la loi. Ne dites donc pas le contraire : c’est à l’article 38. Pour vous rassurer, je précise qu’il a fait l’objet de discussions avec des représentants des organisations des jeunes professionnels que vous avez évoqués.
Monsieur le rapporteur, je conteste tout à fait la lecture que vous avez faite de ce que donneraient ces alinéas si nos amendements étaient adoptés. Voici ce que serait le texte ainsi amendé : « Les organismes gestionnaires des régimes d’assurance maladie concourent à la mise en oeuvre de la politique de santé et des plans et programmes de santé qui en résultent dans le cadre de leurs compétences et dans le respect des conventions les liant de l’État.
« Ils poursuivent les objectifs, définis par l’État et déclinés par les agences régionales de santé, visant à garantir la continuité, la coordination et la qualité des soins offerts aux assurés, ainsi qu’une répartition territoriale homogène de l’offre de services de prévention et de soins, dans le respect de la liberté d’installation et des initiatives individuelles. » Tout est parfaitement cohérent.
Il se pose un vrai problème : celui des zones blanches, là où il n’y a pas de médecins alors que les gens en auraient besoin. On a eu la tentation, à droite comme à gauche, d’être plus coercitif pour les internes et même quelquefois pour les médecins confirmés.
J’ai manifesté à ce sujet en 2008, aux côtés de médecins qui venaient de la droite comme de la gauche…
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC
…parce qu’il s’agissait globalement de la politique de santé.
Il ne serait pas complètement absurde d’inscrire à cet endroit du texte le principe de la liberté d’installation car, comme dans toute loi, l’article 1er résume l’essentiel de l’ensemble du texte. L’indiquer à l’article 1er, c’est montrer que ce principe est indispensable.
Madame la ministre, vous rétorquez que c’est inscrit à l’article 38… Mais pourquoi ne pas l’inscrire à l’article 1er ? Ce serait une affirmation forte qui entraînerait l’adhésion de tout le monde.
La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement no 1585 .
Les organismes gestionnaires des régimes d’assurance maladie doivent poursuivre plusieurs objectifs dans le cadre de la déclinaison de la politique de santé. Cet amendement vise à y adjoindre un baromètre de santé des femmes. En effet, lors des auditions menées par la délégation, nous avons constaté que les statistiques étaient très fragmentaires sur le sujet, et de surcroît fournies irrégulièrement. Ainsi, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, ne recense que tous les cinq ans la population des fumeuses. De même, les données sur l’IVG sont relativement anciennes – l’étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques est la plus récente, mais remonte tout de même à 2006 ou 2007. Il faudrait pouvoir avoir un suivi des données tous les deux ans afin de faire de la prévention s’agissant du tabagisme ou de l’obésité et de pouvoir évaluer l’accès à l’IVG et à la contraception, accès qui doit être assuré par les agences régionales de santé.
Madame Coutelle, ce serait un problème de prévoir dans la loi des priorités spécifiques alors que c’est l’élaboration de la stratégie nationale de santé qui permettra justement de les définir. Ce fut l’erreur commise par M. Jean-François Mattei que de fixer des priorités dans la loi de 2004. Je rappelle que le Haut conseil de la santé publique est déjà compétent pour suivre les résultats de la SNS et qu’il pourra tenir compte des indicateurs existants sur la santé des femmes. Nous avons déjà affirmé hier dans la loi l’égalité entre les hommes et les femmes et pris en compte les différences sexuées, à la suite d’un autre de vos amendements.
Madame la députée, je vous demande de retirer cet amendement qui n’a pas sa place dans une loi et qui ne relève probablement pas même du décret. C’est une décision du Gouvernement que de mettre en place un baromètre santé pour suivre telle ou telle pathologie ou telle ou telle situation. Nous disposons d’indicateurs sur la santé des femmes, ce qui me permet d’apporter des éléments sur la consommation de tabac ou sur l’obésité. Je comprends bien que vous souhaitiez que ces indicateurs soient agrégés afin de pouvoir d’un seul coup d’oeil avoir tous les éléments sur la santé des femmes. Je le souhaite moi aussi, mais cela n’a pas sa place dans la loi.
Si on a l’assurance de disposer de tels indicateurs, je vous en remercie, madame la ministre, parce qu’il est vrai que nous avons eu du mal à en trouver pour nos auditions à la délégation aux droits des femmes. Je le retire.
L’amendement no 1585 est retiré.
Cet amendement, dont Mme Boyer est une des signataires, vise à supprimer les alinéas 33 et 34 parce qu’il ne s’agirait que d’un transfert de charges dont les entreprises seraient, une fois de plus, victimes.
En effet, vous prévoyez, madame la ministre, que l’application de la politique de santé incombe aussi aux services de santé au travail alors que c’est à l’État d’assumer cette mission, puisque le texte dispose que la politique de santé relève de l’État. C’est à lui de la mener et de la financer, pas aux entreprises.
Avis défavorable. Vous proposez, monsieur Tian, la suppression d’une disposition, adoptée en commission, qui prévoit expressément la contribution des différents services de prévention collective à la politique de santé parce que vous craignez que cela ne crée une surcharge de travail, notamment pour la médecine du travail. Or il s’agit ici non pas de créer une compétence nouvelle, mais d’établir une compétence de coordination entre la protection maternelle et infantile, la santé scolaire, la santé universitaire et la santé au travail pour des actions de prévention collectives.
Même avis.
Je ne comprends pas cet alinéa : on sait parfaitement que les services de santé au travail sont confrontés à une pénurie de temps médical…
…et que des réflexions sont en cours afin de prioriser les différentes missions de ces services et d’en améliorer le fonctionnement. Il est donc tout à fait paradoxal d’étendre leur champ d’action alors que cela conduirait à une diminution de la qualité d’un dispositif déjà à bout de souffle.
Par ailleurs, la santé publique est une mission qui relève du domaine de l’État. Les services de santé au travail ne sont pas tenus de contribuer à sa mise en oeuvre, et devraient au contraire se focaliser sur l’amélioration de la santé au travail.
Votre réponse, monsieur le rapporteur, est dès lors aberrante. Il faudrait voter cet excellent amendement.
L’amendement no 169 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement no 1843 .
Par cet amendement, nous voulons rendre hommage au travail réalisé dans le cadre du plan national santé-environnement, présidé par notre cher collègue Gérard Bapt. Et quel meilleur hommage que d’inscrire dans la loi que ce plan est intégré dans la stratégie nationale de santé ?
Trop souvent, les plans sont juxtaposés, sans aucune articulation. Il serait donc important que la stratégie nationale intègre non seulement ce plan, mais aussi son calendrier, puisqu’il s’agit d’un plan quinquennal – en l’espèce, pour la période 2015-2019.
J’insiste vraiment sur la qualité des travaux qui y sont menés, et j’invite les collègues du groupe UMP qui semblent l’ignorer à venir à ces réunions : non seulement on y trouve des représentants des organisations professionnelles, qu’elles soient patronales ou salariales, mais il y a aussi un comité scientifique, avec des chercheurs éminents de l’INSERM, qui travaillent sur les liens entre santé et société. C’est très instructif. Il est bon que les parlementaires puissent se hisser au meilleur de la recherche du moment.
Cet amendement a reçu un avis défavorable de la commission. L’alinéa 23 de l’article 1er prévoit que les actions de promotion de la santé reposent sur la coordination de l’ensemble des politiques publiques. Les objectifs du troisième plan national santé-environnement, dit « PNSE 3 », seront donc repris dans les différentes composantes de la stratégie nationale de santé. Par ailleurs, vous prévoyez une date butoir pour sa mise en oeuvre, le 1er janvier 2020, ce qui ne semble pas très heureux puisqu’aucune date n’a été fixée pour l’instant pour la mise en place de la stratégie nationale de santé.
Je demande à M. Roumegas de bien vouloir retirer son amendement. Les enjeux environnementaux sont pris en considération dans le projet de loi, y compris le plan santé-environnement. Des démarches sont déjà engagées à ce sujet. L’amendement serait donc redondant et source d’incertitudes en raison de la date qu’il propose. On pourra discuter du fond de la question dans d’autres lieux.
J’entends les assurances de Mme la ministre et j’accepte donc de retirer mon amendement. Mais je maintiens mon invitation à M. Dhuicq et à M. Accoyer pour qu’ils viennent assister aux réunions du PNSE 3.
L’amendement no 1843 est retiré.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 972 .
L’importance de ces amendements mérite d’être soulignée. En effet, il convient de préciser que les organisations représentatives des professionnels de santé doivent faire partie des interlocuteurs des organismes gestionnaires des régimes d’assurance maladie lorsque seront préparés les éléments de la stratégie nationale de santé. Brandissant la double contrainte des ARS et du tiers payant, vous pouvez faire ce que vous voulez, madame la ministre, des professions individuelles et libérales. Alors que si vous avez face à vous les organisations professionnelles, la situation sera différente. C’est la condition absolument indispensable au respect du système de soins ambulatoires tel qu’il existe actuellement.
La commission a donné un avis défavorable, mais à titre personnel, monsieur Accoyer, j’émettrai un avis favorable – je vous jure que ce n’est pas un poisson d’avril – car l’article 1er introduit les associations représentant les usagers et non les usagers eux-mêmes, comme un nouveau partenaire de la CNAM pour mettre en oeuvre la politique de santé, et il paraît donc cohérent, par symétrie, d’y introduire aussi les organisations représentatives des professionnels de santé.
Avis favorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement no 1388 .
Madame la présidente, je suis sous le coup de l’émotion : des amendements de l’opposition viennent d’être adoptés à l’unanimité !
Sourires.
L’amendement no 1388 vise à insérer les mots : « , les centres de santé » après la première occurrence du mot ; « santé », à l’alinéa 40.
L’article 1er du projet de loi affirme en effet que l’assurance maladie et les acteurs du système de santé liés par la voie conventionnelle concourent à la mise en oeuvre de la politique nationale de santé définie par l’État. Or les centres de santé, qui sont régis par un dispositif conventionnel à l’instar des professionnels de santé libéraux, ne sont pas visés par l’article.
Cet amendement a pour objectif d’y remédier, afin que les centres de santé soient des acteurs à part entière de la mise en oeuvre de la politique nationale de santé.
Hélas, madame Boyer, la série s’arrêtera là – du moins, pour le moment !
Sourires.
La commission a émis sur votre amendement un avis défavorable, que je renouvelle. Il est bien entendu très important qu’il existe une relation contractuelle entre l’assurance maladie et les centres de santé. Toutefois, si ces derniers étaient explicitement mentionnés dans la loi, cela exclurait de fait les autres établissements sanitaires : établissements publics, établissements privés, réseaux de santé, pôles de santé, maisons de santé, etc.
Même avis.
J’ai sur ce point un avis différent de celui de ma collègue Valérie Boyer – mais je pense qu’il y aura eu amalgame entre des dénominations voisines.
En effet, les centres de santé sont des dispositifs inspirés d’une médecine collectiviste et salariée,
Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC
qui s’opposent aux maisons médicales pluridisciplinaires que nous entendons défendre.
C’est pourquoi, exceptionnellement, je ne soutiendrai pas l’amendement de Mme Boyer.
Rires.
L’amendement no 1388 n’est pas adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
L’amendement no 2103 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 1206 .
Je précise que M. Marie-Jeanne est le premier signataire de cet amendement, qui vise à inscrire dans la loi que la stratégie nationale de santé prend en compte le développement de la coopération régionale en outre-mer en matière sanitaire.
Cette coopération régionale est absolument indispensable, dans la mesure où des épidémies telles que le chikungunya ou la dengue touchent, au-delà des collectivités d’outre-mer, de vastes territoires.
Favorable : c’est aussi une manière de reconnaître la spécificité et la place de l’outre-mer dans la stratégie nationale de santé. Or je sais que de nombreux parlementaires ultramarins y sont attachés.
Je soutiens cet amendement, mais si la stratégie nationale de santé comprend un volet coopération, il serait logique de faire de même en matière de plan régional de santé. L’article 38 prévoit en effet la mise en oeuvre, région par région, d’un plan régional de santé sous l’égide de l’agence régionale de santé. La coopération s’envisage à l’échelon du territoire ; il me semblerait donc pertinent d’intégrer dans ces plans un volet coopération de portée très pratique, qui ne s’appliquerait pas uniquement aux cas d’épidémies, mais qui s’attacherait aussi à la coopération technique et médicale avec les pays limitrophes – et pas seulement entre la Martinique et le reste de la Caraïbe, mais aussi dans l’océan Indien. C’est pourquoi je proposerai un amendement à l’article 38, tendant à mettre en oeuvre un volet coopération qui suppléerait celui proposé par notre collègue Marie-Jeanne.
J’abonde dans le sens de notre collègue Letchimy : si l’article 1er du projet de loi ne concernait pas initialement les outre-mer, il paraît important que la stratégie nationale de santé soit également déclinée dans les collectivités ultramarines, mais en tenant compte de nos spécificités. Nos réalités sont en effet bien différentes de celles de la métropole et varient d’un outre-mer à l’autre.
Je soutiens moi aussi l’amendement présenté par Mme Fraysse relatif à la coopération régionale. Pour nous, à Saint-Pierre-et-Miquelon, la coopération avec le Canada voisin est incontournable et indispensable.
L’amendement no 1206 est adopté.
La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement no 2176 .
La France comprend en son sein des collectivités d’outre-mer régies par les articles 73 et 74 de la Constitution. La diversité de nos territoires crée une diversité de situations parfois complexe – c’est notamment le cas en matière de santé. La commission a donc adopté un amendement, que j’avais déposé, visant à fixer dans la stratégie nationale de santé des objectifs propres à l’outre-mer. Dans ce cadre, l’État peut proposer à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie de s’associer, par convention et dans le respect de leurs compétences, aux programmes de santé qu’il définit.
Ces collectivités étant régies par les articles 74 et 74-1 de la Constitution, il serait souhaitable, dans un souci de cohérence, d’ouvrir cette possibilité aux îles de Wallis-et-Futuna, dont le statut relève du même régime juridique.
La stratégie nationale de santé fixe des domaines d’action prioritaire pluriannuels en prenant en compte les données de santé et les risques sanitaires spécifiques aux collectivités d’outre-mer où l’État est compétent en matière de santé. En ce qui concerne la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, l’État n’est pas compétent en matière de santé ; il peut néanmoins leur proposer de s’associer à ces programmes par convention.
Aux îles Wallis-et-Futuna, l’État est compétent en matière de santé : la stratégie nationale de santé s’y déploiera donc d’emblée, sans avoir besoin de recourir à des conventions, dans le respect de la Constitution. C’est d’ailleurs ce qui est précisé au troisième alinéa de l’article 1er bis.
Votre amendement est donc satisfait, et la commission y a donné un avis défavorable.
Hier, dans son intervention à la tribune, Mme Orphé avait demandé que les territoires ultramarins puissent bénéficier de coopérations régionales dans le cadre de la stratégie nationale de santé : c’est ce qui vient d’être adopté. En revanche, comme l’a indiqué M. le rapporteur, la stratégie nationale de santé, de même que l’ensemble de la politique de l’État, s’appliquera de plein droit aux îles Wallis-et-Futuna. Je demande donc à Mme Orphé de bien vouloir retirer son amendement.
L’amendement no 2176 est retiré.
L’article 1er bis, amendé, est adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel avant l’article 2.
La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour soutenir l’amendement no 1686 .
Il importe de concevoir la promotion de la santé et la prévention très amont, dès la grossesse. Pour lutter contre les inégalités, il serait nécessaire d’intervenir de façon décloisonnée. On sait le rôle essentiel des services de protection maternelle et infantile – PMI – dans l’accompagnement et le suivi des enfants des familles les plus fragilisées. L’approche devrait être globale, précoce et coordonnée avec les autres professionnels du soin, de l’éducation et du domaine social. Tel est l’objet de cet amendement.
L’objectif visé par l’amendement me semble satisfait par les dispositions adoptées en commission. Pour mémoire, nous avons introduit un volet de la stratégie de santé fixant les priorités de la politique de santé de l’enfant, l’éducation a été identifiée comme un facteur déterminant de la santé et la politique de santé comprendra l’animation nationale des actions conduites par les services de PMI. Nous savions en effet que la PMI soulevait des interrogations et c’est pourquoi nous avons déposé en commission plusieurs amendements visant à améliorer le dispositif. La coordination de ces actions avec les missions du médecin traitant de l’enfant sera en outre précisée à l’article 16.
Je vous propose donc, madame Khirouni, de retirer cet amendement.
L’amendement étant satisfait, je demande moi aussi à Mme Khirouni de bien vouloir le retirer.
L’amendement no 1686 est retiré.
Cet amendement tend à insérer, avant l’article 2, l’article suivant : « Au 1° de l’article L. 2111-1 du code de la santé publique, les mots : et des enfants sont remplacés par les mots :, notamment pendant la période autour de la conception et la grossesse, ainsi que des enfants en bas âge. »
L’exposé des motifs du projet de loi souligne la nécessité d’accorder une priorité à la prévention et à l’action sur les déterminants de santé. Le texte précise qu’il convient en la matière de promouvoir l’équité dès le départ et, à ce titre, met l’accent sur les actions auprès des jeunes.
Or cette période de la jeunesse mérite d’être précisée, car elle couvre des périodes où la prévention des maladies chroniques non transmissibles est plus efficace, ce qui contribuera à accroître les économies de santé. C’est notamment le cas de la période qui s’étend de la conception de l’enfant jusqu’à deux ans environ, appelée « période des mille premiers jours de vie », qui devrait faire l’objet de mesures de préventions spécifiques, car elle conditionne le reste de la vie. Or elle n’est pas considérée dans le projet de loi.
En effet, si l’article L. 2111-1 du code de la santé publique prévoit que les services de protection maternelle et infantile conduisent des mesures de prévention médicales, psychologiques, sociales et d’éducation pour la santé en faveur des futurs parents et des enfants, la période à couvrir par ces actions de prévention reste à préciser, notamment dans le cadre de la recherche de stratégies de plus en plus fines affirmée par la stratégie nationale de santé. Tel est l’objet du présent amendement.
Des recherches internationales ont en effet prouvé que ces mille premiers jours pouvaient être à l’origine de maladies chroniques apparaissant à 50 ou 60 ans et qu’ils jouent par conséquent un rôle important dans la morbidité.
J’ajouterai juste quelques mots.
Les données scientifiques actuellement disponibles montrent qu’il convient de prendre en considération la période des mille premiers jours de la vie aussi bien dans le domaine de la santé et de la nutrition que dans celui de l’environnement en général. C’est pourquoi nous proposons qu’aux côtés des autres stratégies de prévention aux différents âges de la vie figure une stratégie de prévention concernant cette période particulièrement importante. La prévention précoce serait un bon moyen de sensibiliser les parents et les femmes enceintes et d’accompagner au mieux la famille durant les premiers jours qui suivent la naissance.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 2286 .
L’argumentaire sera le même qu’en commission : il s’agit d’une période extrêmement importante, et même cruciale, qui suppose une attention particulière eu égard aux risques sanitaires, mais l’article L. 2111-1 du code de la santé publique évoque déjà les missions de protection de la santé maternelle et infantile, en direction des futurs parents et des enfants, des femmes enceintes et des jeunes mères de famille, ainsi que des enfants de moins de 6 ans.
Dans l’état actuel du droit, l’amendement me semble pleinement satisfait. Avis défavorable, donc.
Même avis.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 2.
Je rappelle que la durée de chaque intervention est limitée à deux minutes.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Cet article instaure un parcours éducatif de santé dans les écoles, ce qui est positif. Mais je veux en profiter pour appeler l’attention de tous sur l’état très préoccupant de la santé scolaire dans notre pays.
Il y a aujourd’hui 1 100 médecins scolaires pour 12 millions d’élèves, soit moins d’un médecin pour 10 000 élèves. La profession, dont la moyenne d’âge est de 53 ans, peine à recruter. Les salaires ne sont pas attractifs, et les démissions sont nombreuses. Pourtant, le rôle des médecins scolaires est essentiel : ils sont censés examiner tous les enfants entre 5 et 6 ans pour dépister le plus tôt possible les handicaps et les problèmes relatifs à la vision, au langage ou au comportement. Or ils ne reçoivent plus, suivant les régions, que 30 % à 40 % de la classe d’âge : c’est un problème !
Je pense, en effet, que l’école est, comme l’indique d’ailleurs l’exposé des motifs du projet de loi, le lieu essentiel de la promotion de la santé, mais il faut évidemment, encore une fois, s’en donner les moyens.
J’ajoute que, dans le cadre de leur mission, les médecins scolaires sont amenés à prescrire des actes de prévention, notamment des bilans orthophoniques, mais aussi des actes de vaccination ou une contraception orale. Ce droit de prescrire des actes de prévention est reconnu par le ministère de la santé et le conseil de l’ordre. Pourtant, certaines CPAM refusent de prendre en charge les actes en question et renvoient les familles vers leurs médecins, lesquels se trouvent finalement invités à refaire eux-mêmes la prescription. Et certains médecins scolaires nous ont fait part de leur crainte d’avoir, avec l’introduction dans ce projet de loi d’un médecin traitant de l’enfant, encore davantage de difficultés à faire prendre en charge les actes de prévention qu’ils prescrivent. Cela nuirait évidemment aux familles et aux enfants concernés.
Je voulais donc appeler votre attention sur ces problèmes ; peut-être me donnerez-vous votre avis.
Nous sommes tous favorables à la mise en place d’un véritable parcours de soins de l’enfant, qui soit intégré au cursus scolaire. Un tel parcours garantit un bon suivi, cohérent, notamment pour les enfants issus des milieux les plus fragiles.
Néanmoins, ces derniers jours, j’ai rencontré des représentants des associations familiales de ma circonscription – Forez et Pilat rhodanien –, et ils regrettent vivement, madame la ministre, que vous écartiez les parents de décisions relatives à leurs enfants. Ainsi confortez-vous la jeunesse dans l’idée erronée que les adultes ne peuvent pas la comprendre et détruisez-vous le dialogue, pourtant fondamental, entre les parents et les enfants. L’école n’a pas à se substituer une fois de plus aux parents. Les parents sont et doivent rester les premiers éducateurs de leurs enfants.
Faire de la prévention, ce n’est pas agir dans le dos des parents, c’est agir avec eux, en toute confiance et dans la transparence. J’espère par conséquent que vous accepterez de rappeler le rôle prépondérant des parents. Votre politique ne saurait être efficace si les parents ne sont pas étroitement associés aux actions qui seront proposées.
Nous abordons le titre Ier de la loi, qui vise à renforcer la prévention et la promotion de la santé – cet objectif fait bien entendu consensus entre nous.
L’article 2 est relatif aux actions de promotion de la santé en milieu scolaire. Il dispose que la coordination des actions est conduite par les autorités académiques, en lien avec les ARS, les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladie. Se pose immédiatement, pour moi, la question du pilotage. À qui celui-ci va-t-il échoir : aux ARS ou aux autorités académiques ? Je m’interroge de même sur les liens entre les services de santé scolaire et ceux de la PMI : qui sera le pilote ? Le rectorat ou le conseil départemental ?
Qu’en est-il, enfin, des moyens dévolus à la santé scolaire – Mme Fraysse vient d’évoquer le problème – et du lien avec les médecins traitants ? En dix ans, le nombre de médecins scolaires a chuté, et l’hémorragie devrait se poursuivre, puisque 50 % des effectifs partiront à la retraite dans les cinq prochaines années. Aujourd’hui, on compte 15 000 élèves par médecin ! Il en va de même en ce qui concerne les infirmiers ou infirmières : les besoins sont évalués à un infirmier ou une infirmière pour 500 élèves. Dans les faits, on compte une infirmière ou un infirmier pour 1 500 à 2 000 élèves, avec des inégalités entre les régions. Voilà qui témoigne d’une dévalorisation des métiers et du fait que des postes ne sont pas pourvus.
Dans ces conditions, les meilleures intentions du monde se révéleront n’être que des leurres si l’organisation et les moyens ne suivent pas.
L’article 2 parle en fait de maillage, de passerelles entre les services de santé scolaire, de prévention territorialisée, il traite de services ambulatoires, de soins hospitaliers et de coordination, il évoque la promotion de la santé maternelle et infantile, les missions conduites dans les écoles. Nous défendrons donc beaucoup d’amendements, mais je crois que des sujets comme la santé bucco-dentaire, le rôle des infirmiers et des infirmières, ou encore celui de l’éducation nationale peuvent faire l’objet d’un consensus dans cet hémicycle.
Enfin, en ce qui concerne le rôle des parents, j’abonderai dans le sens de mes collègues : attention à ne pas les déresponsabiliser ! Ils doivent rester au coeur du système.
Oui, mes chers collègues, l’école est bien sûr un lieu essentiel de promotion de la santé, non seulement d’ailleurs pour les enfants mais également pour les familles. Le but visé est parfaitement louable, et nous y souscrivons, mais, madame la ministre, monsieur le rapporteur, aurez-vous les moyens nécessaires pour mettre en place ce que vous préconisez, pour assurer cette articulation avec la stratégie nationale de santé afin de développer un véritable parcours éducatif de santé ?
Chaque établissement pourra se saisir d’une question spécifique, pourra définir un parcours éducatif, mais disposera-t-il des moyens nécessaires, des moyens humains, notamment en termes d’infirmières ?
De même, dans l’emploi du temps des élèves, des plages horaires seront-elles prévues pour les sensibiliser aux problèmes de santé ?
Je crois que c’est bien à l’école qu’un certain travail peut être fait, dès le plus jeune âge, qui peut se poursuivre plus tard, dans les collèges et les lycées. Cependant, il ne suffit pas de le dire. Comment allez-vous faire ? Avec quels moyens ? Avec quelle organisation de l’emploi du temps ? Nous attendons vos réponses.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Je veux souligner l’importance de cet article, car l’éducation à la santé, plus encore que la promotion de la santé, est absolument capitale : c’est elle qui déterminera quelle image les enfants auront de leur corps, et cette image les accompagnera tout au long de leur vie. Cette éducation aux comportements de santé est déterminante pour toute la vie – je l’ai expérimentée, par exemple, en matière de protection contre l’excès de soleil. Et, pour répondre à certains orateurs précédents, cela ne se fait pas contre les parents. Il faut relever que les enfants sont même des vecteurs positifs de l’éducation des parents ! Ce sont effectivement eux qui disent : « Je n’ai pas mon écran solaire » ou : « Papa, tu ne dois pas fumer comme ça, j’en ai assez », etc. Ils ont un grand pouvoir sur les parents et transmettent de manière très libre les messages de santé.
Bravo, donc, pour cet article !
J’entends beaucoup parler d’interaction précoce, mais je suis étonné de ne jamais entendre le terme de pédiatrie, quand on sait la difficulté de la pédiatrie française, dont sont pourtant issus quelques grands noms de la discipline ; je suis également étonné de ne pas entendre parler des secteurs de psychiatrie infanto-juvénile. Je voudrais appeler votre attention, madame la ministre, sur la situation très difficile de la pédopsychiatrie en France.
Je veux aussi appeler votre attention, chers collègues, sur deux points. Le premier a déjà été évoqué : lorsqu’on travaille avec des préadolescents et des adolescents, on sait combien il est important que les deux parents, père et mère – j’insiste sur les termes de « père » et « mère » (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC) – collaborent avec le thérapeute, avec le praticien. La deuxième chose, c’est que, encore une fois, la logique qui sous-tend les propos que je viens d’entendre consiste à renverser les choses, à détruire la généalogie et à mettre les enfants en position de toute-puissance. Or c’est déjà leur tendance naturelle, et ils ont besoin d’un cadre parental, ils ont besoin de limites. En pédopsychiatrie, on travaille en particulier avec la mère, qu’on est là pour soutenir. J’ai donc toujours peur de cette vision assez collectiviste, parce que c’est ce dont il s’agit, nous y reviendrons, et nous parlerons de votre maître, madame la ministre : le Premier ministre britannique Harold Wilson, travailliste, qui a détruit, dans les années soixante, la médecine britannique, en la socialisant et la sectorisant, c’est-à-dire en détruisant la liberté d’installation et la liberté de choix du médecin.
Vous pouvez rigoler, mon cher confrère !
Si vous êtes un médecin hospitalier comme moi, c’est une réalité. Regardez l’histoire de la médecine britannique. C’est exactement ce que vous êtes en train de faire.
Alors, madame la ministre, si votre projet de loi consistait à défendre la pédiatrie française, s’il consistait à défendre les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile, et la pédopsychiatrie française, qui est en train de disparaître, là, je vous soutiendrais. Las, aucun moyen n’est mobilisé pour donner quelque corps à vos paroles, qui sont du vent !
L’article 2 crée, en milieu scolaire, un parcours éducatif de santé par des actions de promotion de la politique de santé. L’article 6 de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République disposait déjà que les actions de promotion de la santé des élèves font partie des missions de l’éducation nationale. On a un peu le sentiment de tourner en rond. N’y a-t-il pas une sorte de concurrence instituée entre l’éducation nationale et la santé ? Par ailleurs, a-t-on des retours sur l’application de cet article 6 de la loi de refondation de l’école ? Enfin, concrètement, quelle forme cela prendra-t-il, quel niveau sera concerné, et quels seront les moyens mobilisés, en termes d’infirmiers et de médecins scolaires ?
Cet article a effectivement pour objet la création d’un parcours éducatif en santé. Et, bien évidemment, pour créer et travailler ce parcours éducatif en santé, il faut l’inscrire dans le texte de cette loi sur la santé, même si nous y avons également travaillé dans le cadre de la loi de refondation de l’école. Il est bien évident qu’il faut travailler à cette articulation entre l’éducation nationale et les agences régionales de santé – c’est écrit dans le texte même de l’article – et créer cet outil pour que les enfants et les jeunes en milieu scolaire, que ce soit en école primaire, au collège ou au lycée, puissent acquérir un certain nombre de comportements qui leur permettront ensuite d’éviter certaines conduites. C’est tout le sens des travaux qui ont été menés, et l’articulation décrite dans cet article est nécessaire : la conduite de la promotion de la santé à l’école par les autorités académiques se fera non seulement en lien avec les ARS mais également avec les collectivités territoriales, avec la PMI et avec la médecine libérale. C’est ce qu’il faut construire aujourd’hui.
Avec cet article, nous abordons tout ce qui concerne la santé scolaire, sa promotion, ses liens avec les services de prévention territorialisés, les services de santé ambulatoires et les services hospitaliers. Cet article prévoit aussi la coordination des actions conduites dans le cadre de la protection et de la promotion de la santé maternelle et infantile avec des missions conduites dans les écoles maternelles et infantiles. Enfin, il prévoit que cette politique est conduite dans tous les établissements d’enseignement, ce qui me paraît effectivement tout à fait souhaitable. Je tiens d’ailleurs à en profiter pour rendre hommage aux infirmiers et infirmières scolaires, trop peu nombreux, qui jouent un véritable rôle de prévention, de coordination et même, parfois, un rôle de confident ou de confidente dans les établissements, quand les jeunes adolescents n’arrivent pas à se confier à leurs parents.
Il y a, cependant, un réel problème, qui a déjà été signalé il y a quelques instants : un médecin scolaire pour 12 000 élèves ! Comment voulez-vous mettre en place tout ce que vous prévoyez dans cet article 2 dans de telles conditions ? Actuellement, aucun effort n’est fait pour recruter des médecins scolaires, et tout ce qui est proposé dans votre article me paraît totalement inapplicable dans de telles conditions.
Oui, je pense que c’est un sujet important que ce parcours scolaire sanitaire pour les enfants puisque c’est dès le plus jeune âge qu’il nous faut agir. Et l’enfant peut créer, on le sait, de nouvelles habitudes au sein de sa famille, il peut même devenir un vecteur positif de changement de mentalité. C’est par eux, souvent, que les habitudes de vie peuvent s’améliorer, qu’il s’agisse de la consommation de tabac, d’alcool ou de drogue ou d’alimentation – mais ça peut aussi se dégrader. Les enfants d’aujourd’hui seront dès 2030 des adultes. Il faut donc agir très tôt. Vous avez raison d’instaurer cela et vous constaterez, lorsque nous défendrons l’amendement no 195 , que nous approuvons bien entendu ce véritable parcours de soin de l’enfant, à condition, bien entendu, qu’il y ait une coordination – d’abord avec les parents, mais aussi avec les élus locaux, qui ont leur mot à dire, notamment parce qu’ils sont responsables des écoles municipales.
Il faut donc prendre en compte, par exemple, les conseils d’école, où les élus municipaux sont présents, pour pouvoir être informés. À ce sujet, je dois vous dire que malheureusement, les rythmes scolaires sont catastrophiques pour la santé de nos enfants dans les écoles. C’est ce que l’on voit aujourd’hui : beaucoup d’enfants sont fatigués, beaucoup ont du mal à dormir, beaucoup s’énervent, parce que les rythmes scolaires sont parfois mal conçus. Il y a là un réel problème. Les activités physiques sont même parfois supprimées, que ce soit le mercredi après-midi ou le vendredi, parce qu’ils sont obligés de rentrer chez eux.
Voilà ce que je voulais dire dans cette intervention sur l’article.
Il convient de rappeler que la loi de refondation de l’école comporte des dispositions relatives à l’éducation à la santé et à la promotion de celle-ci. L’article 2 conforte cette orientation en faveur d’une politique de santé de l’enfant globale et concertée. Il instaure en effet un parcours éducatif de santé pour les enfants, afin que tous les établissements élaborent une réflexion globale sur les compétences à acquérir à chacune des étapes de la scolarité. Je trouve que cela va dans le bon sens.
Si la promotion de la santé est déjà inscrite dans les programmes, en particulier en sciences de la vie et de la terre, elle relève aussi des médecins et infirmiers scolaires, ainsi que des personnels des services de restauration et – pour le secondaire – des personnels de la vie scolaire. Avec cet article, les initiatives prises par ces professionnels gagneront à être mises en oeuvre de manière transversale par l’ensemble de la communauté éducative à l’échelle des établissements, en partenariat avec les agences régionales de santé.
Il s’agit de renforcer les liens entre les services de santé scolaire, les services départementaux de protection maternelle et infantile, et les autres acteurs locaux dans le domaine de la santé. Les élus pourront également inscrire au coeur de leur projet éducatif territorial des actions de prévention et de promotion de la santé. Le temps scolaire et le temps périscolaire contribuent conjointement à cet apprentissage. Les activités sportives, les ateliers scientifiques ou ayant trait au développement durable, complètent les enseignements transmis en classe. Ainsi, la pause méridienne, consacrée au repas, permet de mettre en pratique l’éducation nutritionnelle.
À côté de l’indispensable objectif de prévention des conduites à risque, cet article renforce la promotion de la santé dans sa dimension positive. Il s’agit d’apprendre aux enfants à prendre soin d’eux-mêmes et d’autrui ; certes, ce projet est ambitieux, mais ses effets seront très positifs au cours du temps. Les élèves, rendus conscients de cet enjeu, s’en feront les relais auprès de leurs proches, de leurs familles, en les impliquant efficacement dans la démarche de santé publique.
De plus, sachant que les comportements psychosociaux des enfants se déterminent avant l’âge de dix ans – c’est ce que nous disent les experts –, le travail éducatif consenti avant cet âge constitue la meilleure des préventions contre les comportements à risque, qui touchent trop largement les adolescents. Je trouve, par conséquent, que cet article est très intéressant et très positif.
J’ai deux casquettes : je suis à la fois député et maire. Je mettrai en place des actions de prévention par le biais d’ateliers.
Madame la ministre, c’est à raison que vous avez placé les plus jeunes d’entre nous au coeur de votre politique de prévention. Pourtant, vous ne disposez pas de tous les leviers. La santé scolaire ne devrait-elle pas relever de la compétence de votre ministère ? Et quand nos collèges et lycées seront-ils enfin dotés de médecins et d’infirmiers véritablement confortés dans leur rôle ? On sait bien les difficultés dans lesquelles ils sont plongés aujourd’hui. Il faut aussi qu’ils soient en nombre suffisant pour mener cette politique de prévention. Beaucoup de jeunes ne rencontrent pas d’autres professionnels de santé pendant une assez longue période : il est donc important de conforter leur rôle et d’augmenter leur nombre.
S’il est important de réfléchir à l’éducation sanitaire des enfants, et à un certain nombre de mesures qui relèvent de la médecine scolaire, il convient d’abord de dénoncer une situation extrêmement grave : l’insuffisance criante de moyens – en personnels, tant médecins qu’infirmiers – des services scolaires. Il n’y a rien dans ce texte, malheureusement, qui puisse faire évoluer cette situation.
Pourtant, qu’il s’agisse de l’hygiène en général, et de l’hygiène bucco-dentaire en particulier, qu’il s’agisse de la diététique, de l’hydratation, ou de bien d’autres choses encore, beaucoup de points doivent être développés. Plus spécifiquement, dans le domaine sanitaire, et même médical à proprement parler, ce sont les dépistages qui sont défaillants. Il s’agit notamment des tests psychologiques – notre collègue Nicolas Dhuicq a dénoncé il y a quelques instants des insuffisances très graves dans ce domaine et dans celui du dépistage des déficits sensoriels, qu’il s’agisse des troubles auditifs ou de l’amblyopie. J’insiste sur ce dernier point : il y a là une défaillance très grave que vous seriez bien inspirée de corriger. Je serais heureux que vous me répondiez sur ce point, car si l’amblyopie n’est pas dépistée à une certaine période de la vie, vers l’entrée à l’école maternelle, alors l’acuité visuelle est diminuée pour toute la vie.
Enfin, cet article laisse penser qu’il y aurait un transfert : ce poste budgétaire, qui était jusque-là chichement assuré par l’État, serait dorénavant assumé par les collectivités territoriales. J’appelle votre attention sur ce point, madame la ministre, car je souhaite obtenir une réponse ! Nous dénonçons ce transfert – dont notre collègue Martine Pinville s’est félicitée – car financer la santé infantile ne relève pas du rôle des collectivités territoriales.
L’article 2 de ce projet de loi met en place un parcours éducatif de santé pour les jeunes enfants. C’est très important, et tout à fait louable ; il nous faut cependant relever plusieurs points.
Il s’agit, premièrement, du rôle des collectivités territoriales. L’État ne peut rien faire seul ; c’est d’ailleurs la raison du parcours éducatif de santé prévu par ce texte. Comme l’a souligné notre collègue Dominique Orliac, vous n’avez pas tous les leviers pour agir. En outre, cela fait plusieurs années que les collectivités territoriales s’engagent dans la prévention et la sensibilisation. Soigner, ce n’est pas dans le rôle des collectivités territoriales ; elles agissent surtout dans le domaine de la prévention.
Permettez-moi de vous donner un exemple concret de mesure prise par la ville de Reims, et la communauté d’agglomération Reims Métropole : les contrats locaux de santé, avec l’Agence régionale de santé et la Caisse nationale d’assurance maladie. Nous mettons en oeuvre, dans le cadre d’activités périscolaires ou autres, des actions pour sensibiliser les jeunes aux risques de l’obésité et de l’alcoolisme – même si nous faisons par ailleurs, bien entendu, la promotion de notre vin. Pour lutter contre l’obésité, nous avons décidé de prendre en charge le goûter des jeunes, afin d’éviter qu’il soit déséquilibré. Avec l’argent du contribuable, la collectivité leur offre un goûter équilibré, afin qu’ils apprennent ce que cette collation doit être : un fruit, un laitage, ou autre.
Je donne cet exemple, pour montrer qu’aujourd’hui l’État ne peut pas mettre en place seul ce parcours éducatif de santé. Il faut une vraie concertation avec l’ensemble des acteurs, notamment les acteurs locaux.
Je ne reviendrai pas sur ce qu’a dit notre collègue Jean-Pierre Door, mais puisque nous nous occupons de la santé des enfants, il nous serait utile de disposer d’un bilan des nouveaux rythmes scolaires, notamment leurs effets sur la santé de nos enfants. Nous voudrions en savoir plus sur le manque de sommeil et la fatigue dus à ces nouveaux rythmes.
Beaucoup de choses ont été dites sur cet article. En examinant les amendements, nous aurons l’occasion de revenir plus précisément sur un certain nombre de points. Tout d’abord, je salue le travail fondateur accompli par Martine Pinville ; grâce à ce travail, la commission a adopté le parcours éducatif de santé pour l’enfant.
Je voudrais répondre à Jacqueline Fraysse. Vous avez abordé la question – qui était déjà parvenue à nos oreilles – du remboursement aléatoire – en tout cas non systématique – des prescriptions en matière de dépistage et de soins orthophoniques. En théorie, les médecins scolaires n’ont pas vocation à prescrire, mais en matière de dépistage et de soins orthophoniques, cela peut être très intéressant. Selon les territoires, les pratiques ne sont pas forcément les mêmes ; j’en ai d’ailleurs parlé au directeur de la CNAM lors de son audition : cela relève moins de la loi que d’une lettre au réseau de l’assurance maladie. La sensibilisation a été faite : nous veillerons à ce qu’elle soit suivie d’effet, car c’est une question importante, que de nombreux acteurs des soins aux enfants ont évoquée.
Je dirai quelques mots de cet article important ; je préciserai ce qu’il est, mais aussi ce qu’il n’est pas. Ces précisions seront utiles à la discussion des amendements, au cours de laquelle je me permettrai d’être plus brève.
À mon tour, je salue Mme Pinville, et l’ensemble des parlementaires qui l’ont accompagnée, pour leur travail qui a abouti à ce parcours éducatif de santé.
Il est exact que la médecine scolaire ne dépend pas du ministère de la santé. Dans notre pays, les personnels de santé libéraux ou hospitaliers dépendent du ministère de la santé, qu’ils relèvent de la Sécurité sociale ou soient directement liés à l’État. La médecine du travail, elle dépend du ministère du travail, et la médecine scolaire dépend du ministère de l’éducation nationale. Il va de soi que le parcours éducatif de santé sera placé sous la responsabilité des rectorats, et donc du ministère de l’éducation nationale, qui adressera des instructions à l’ensemble des établissements. Le rectorat travaillera en partenariat avec les agences régionales de santé, comme c’est déjà le cas dans certaines régions, en particulier en Midi-Pyrénées et en Bretagne.
Au fond, quel est l’objectif de cet article ? Pour répondre à cette question, je dirai aussi quel n’est pas cet objectif. M. Pueyo – ainsi qu’un certain nombre d’entre vous – a assez bien résumé l’esprit de cet article : il s’agit de faire en sorte que la santé soit appropriée par l’ensemble de l’équipe pédagogique. Il ne s’agit pas de donner aux médecins scolaires, aux infirmières scolaires, à la communauté médicale scolaire dans son ensemble du travail ou des responsabilités supplémentaires. L’ensemble de la communauté pédagogique devra aborder les questions liées à la santé de manière transversale, au quotidien, et pas une heure par semaine ou tous les quinze jours !
Le parcours éducatif de santé pourra être consacré à l’alimentation dans tel établissement, et à la santé bucco-dentaire dans tel autre ; il appartient au rectorat, en lien avec l’Agence régionale de santé, de promouvoir les bons parcours, et d’appeler l’attention des équipes pédagogiques sur les problèmes de santé spécifiques à leur territoire.
Certains diront que ce n’est pas suffisant, mais c’est la première fois que la loi met en cohérence les objectifs de santé publique définis par le ministère de la santé et les actions pédagogiques menées au sein de l’éducation nationale. Je salue l’engagement de l’éducation nationale dans ce travail partagé. C’est évidemment avec l’éducation nationale que nous pourrons aller de l’avant, avec l’ensemble des communautés pédagogiques. Avec cet article, nous ferons un pas important pour la prévention dès le plus jeune âge. Le Haut conseil pour la santé publique a annoncé il y a quelques jours qu’il soutenait cette démarche.
Cet amendement est simple : il vise à insérer un alinéa mentionnant « l’inscription du petit déjeuner dans le parcours éducatif de santé. » De nombreuses études montrent que beaucoup d’enfants – et même d’adultes – ne prennent pas de petit déjeuner. En tant que médecin généraliste, j’ai été appelé à de nombreuses reprises en urgence dans les collèges et les écoles, vers onze heures du matin ou midi, pour des cas d’hypoglycémie apparus après les activités physiques, ou encore par simple fatigue scolaire. Ces cas sont souvent dus à l’absence de petit déjeuner.
Trop d’enfants de familles défavorisées prennent des barres Mars ou d’autres saletés au lieu d’un petit déjeuner équilibré. Il est donc important que dans les écoles, les collèges, les mairies, on apprenne aux enfants à prendre un petit déjeuner. Pourquoi pas, même, fournir ce petit-déjeuner aux enfants défavorisés qui n’en prennent pas à la maison ?
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 2278 .
Comme le disait notre collègue Fernand Siré, l’habitude de sauter le petit déjeuner est de plus en plus répandue. Il est donc nécessaire de sensibiliser les plus jeunes à l’importance de cette étape, qui est incontournable pour débuter une bonne et saine journée.
La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement no 1822 .
L’enseignement à la santé est un apprentissage qui doit commencer dès le plus jeune âge. Cet enseignement doit être actif et englober une approche positive afin que les élèves puissent acquérir un regard critique vis-à-vis de leurs comportements et de leur environnement. C’est pourquoi nous proposons d’instaurer un parcours éducatif à la santé qui, de la maternelle à la terminale, permette de faire des élèves de véritables acteurs de leur santé et de leur bien-être.
Ce parcours doit regrouper beaucoup de choses qui sont déjà faites dans les écoles, allant de l’apprentissage de l’hygiène pour les tout-petits à l’éducation à la sexualité pour les adolescents, en passant par les visites médicales régulières de médecins scolaires. Mais il doit être fait de manière plus coordonnée que cela ne l’est actuellement. Pour cela, les infirmiers et médecins de l’éducation nationale doivent jouer un rôle central, notamment au sein des comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté des établissements.
Ce parcours ne doit pas se résumer à des visites médicales, et l’ensemble de la communauté éducative doit y être associé dans un souci de coéducation, essentielle lorsque l’on parle de santé. C’est pourquoi les élèves et leurs familles doivent être au centre de ce parcours.
Avis défavorable, puisque suite à la réécriture de l’article 2 en commission, tout y est. Les objectifs sous-tendus par votre amendement sont pleinement satisfaits, je vous suggère donc de le retirer.
Je demanderai à Mme Massonneau si elle veut bien retirer son amendement, pour l’argument qui a été avancé par le rapporteur, mais aussi pour les raisons que j’ai indiquées tout à l’heure. La précision du parcours éducatif, son contenu, va se décliner territoire par territoire, peut-être parfois même groupement d’établissements par groupement d’établissements, non par le biais de la loi, mais par le biais d’une circulaire qui dépend du ministère de l’éducation nationale. Ce sont les rectorats qui définiront le contenu de ces parcours éducatifs, après avoir pris contact, bien sûr, avec les agences régionales de santé.
Je vous demande donc de retirer cet amendement, dans la mesure où ce n’est pas un enjeu d’objectifs, mais bien de moyens et de vecteur juridique.
Je veux bien retirer cet amendement, mais la dernière phrase est importante : nous demandons que les élèves et leurs familles soient associés à ce parcours.
L’amendement no 1822 est retiré.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2368 .
L’amendement no 2368 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 1480 .
Cet amendement tend à préciser que dans l’acception définie par Mme la ministre, il s’agit bien de renvoyer aux responsables in fine, c’est-à-dire aux rectorats, que cette sensibilisation à la question de la santé en direction de la jeunesse au sens large peut non seulement se décliner dans l’enseignement scolaire, mais aussi dans le monde universitaire, j’y tiens beaucoup.
Bien entendu, il ne s’agit pas de médecine préventive, il s’agit que les institutions, y compris universitaires et d’enseignement supérieur, se préoccupent de la question de la santé de leurs étudiants. De plus en plus d’étudiants – près de la moitié – sont boursiers et vivent dans des conditions de précarité. Beaucoup d’entre eux travaillent, souvent le soir, la nuit ou le week-end, pour payer leurs études. Il importe que l’institution, au sens le plus large du terme, y compris au niveau des rectorats ou de l’autorité régionale de santé, s’en préoccupe et envoie un message en direction du monde universitaire et des grandes écoles. C’est le sens de ma proposition.
Pour être plus précise encore, je suggère de remplacer le mot « universitaire », que j’avais initialement prévu, par les mots « scolaire et étudiant ». Ce serait plus clair.
Afin que chacun comprenne bien, vous suggérez cette modification à l’alinéa 4 ou à l’alinéa 10 ?
Tous les alinéas que j’ai mentionnés renvoient à la même situation. Cette modification s’applique donc à tous, dans l’hypothèse où la ministre le souhaiterait.
Madame la députée Le Dain, la commission a donné un avis défavorable à cet amendement que je renouvelle, pour plusieurs raisons. Si la transition entre l’école et l’université doit attirer notre attention, il ne paraît pas possible d’instituer, pour chaque établissement scolaire, une obligation de coordonner les actions de la médecine universitaire, d’autant que les actions de promotion de la santé à l’école visent expressément des enfants et des adolescents.
Les dispositions applicables à la santé universitaire, qui est un sujet fondamental, figurent déjà dans l’article L. 831-1 du code de l’éducation qui prévoit : « Des services de médecine préventive et de promotion de la santé sont mis à la disposition des usagers ». En outre, ces actions relèvent de l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur.
Je demanderai à Mme Le Dain de bien vouloir retirer son amendement, sinon je rendrai un avis défavorable. Il existe des difficultés juridiques pour construire un tel parcours, compte tenu du statut juridique des établissements d’enseignement supérieur. Un amendement qui sera présenté plus tard permettra de renforcer le service de prévention des universités, mais il n’est pas possible, compte tenu des différences juridiques qui existent entre les établissements, d’inscrire les universités dans ce parcours qui commence à la maternelle.
Je vais retirer cet amendement. J’entends bien la réponse du rapporteur et de la ministre, et je les en remercie, car elle montre que nous avons un vrai souci sur ces questions. Nous devons nous en préoccuper, et nous allons le faire.
L’amendement no 1480 est retiré.
La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement no 1823 .
L’éducation nationale manque cruellement de médecins et d’infirmières scolaires. Les enfants ne peuvent pas toujours les rencontrer dès que le besoin s’en fait sentir. Pourtant, cet accès est essentiel car il permet de détecter au plus tôt d’éventuels problèmes de santé ou troubles de l’apprentissage.
De plus, il est important que les infirmiers et les médecins de l’éducation nationale puissent suivre de manière régulière les élèves qui ont ces problèmes de santé, d’autant plus que tous les enfants n’ont pas un suivi régulier en dehors du système scolaire.
Cet amendement va donc dans le sens du projet de loi, puisqu’il vise à renforcer l’égalité d’accès aux soins des élèves.
Madame Massonneau, la commission a rendu un avis défavorable, car cette possibilité est déjà offerte par l’article L. 121-4-1 du code de l’éducation, que votre amendement propose de compléter, puisque cet article fait figurer dans la liste des missions du service public de l’éducation la promotion de la santé, l’accueil, l’écoute, l’accompagnement et le suivi individualisé des élèves. Votre amendement me semble donc satisfait au regard du droit, je vous suggère de le retirer.
Même avis.
L’amendement no 1823 est retiré.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1188 .
Cet amendement tend à compléter la démarche, que notre groupe soutient, en ajoutant la lutte contre la sédentarité aux actions de promotion de la santé en milieu scolaire.
L’obésité, qui s’est progressivement développée, est considérée comme une des premières causes de mortalité dans le monde. Pour agir sur l’état de santé, il faut par conséquent limiter la sédentarité et promouvoir l’activité physique. Je citerai d’ailleurs la proposition de loi qu’a déposée ce matin notre collègue Laurence Arribagé, qui consiste à rendre obligatoire un footing républicain de dix kilomètres pour l’ensemble des députés avant la séance des questions au Gouvernement.
Sourires.
Il m’a bien fallu trente secondes pour me rendre compte que nous étions le 1er avril ! C’était très bon !
Le code de l’éducation, dans son article L. 121-5, prévoit déjà que l’éducation physique et sportive contribue à l’éducation à la santé et à la réduction des inégalités sociales et culturelles. De plus, le parcours éducatif de santé permettra de sensibiliser les élèves à l’impact de la sédentarité sur la santé, selon des modalités qui seront définies par les équipes éducatives. Si vous êtes d’accord, je vous propose de retirer cet amendement qui nous paraît satisfait.
L’amendement no 1188 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1184 .
Il s’agit toujours de compléter la démarche de l’article 2, que notre groupe soutient. L’amendement vous propose d’ajouter la prévention de l’obésité et l’apprentissage de l’équilibre nutritionnel.
C’est un peu l’esprit de l’amendement qu’avaient présenté nos collègues sur le petit-déjeuner, mais de façon un peu plus conceptuelle.
Comme précédemment – mais si je ne vous ai pas convaincu tout à l’heure, je n’y arriverai pas plus – le code de l’éducation prévoit déjà, dans son article L. 312-17-3, qu’une information et une éducation à l’alimentation – y compris le petit-déjeuner – cohérentes avec les orientations du programme national relatif à la nutrition et à la santé et du programme national pour l’alimentation sont dispensées dans les écoles.
L’amendement no 1184 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1185 .
Il s’agit d’ajouter la préoccupation de la santé bucco-dentaire aux actions de promotion de la santé en milieu scolaire, sujet éminemment important qui, je le sais, tient éminemment à coeur à la ministre.
La santé bucco-dentaire est un sujet qui me tient aussi à coeur, notamment chez les élèves, et plusieurs auditions ont permis de montrer à quel point il est important de faire de la prévention de l’état bucco-dentaire chez tous les enfants, et en insistant particulièrement dans les milieux les plus défavorisés.
Toutefois, c’est une précision inutile à ce stade dans la loi. Il y a déjà des dispositions dans le code de l’éducation, mais je vous ferai grâce de la lecture. Cela fait partie de la définition englobante du parcours éducatif de santé, et il n’est pas nécessaire de le décliner dans la loi.
L’amendement no 1185 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1182 .
J’espère que cette fois-ci, le rapporteur ne va pas me faire le coup de la définition englobante ! Il s’agit de la formation aux gestes de premiers secours, notamment en ce qui concerne les arrêts cardiaques. Il convient en effet de favoriser l’information et l’apprentissage des gestes de premiers secours pour lutter contre les arrêts cardio-respiratoires extra-hospitaliers, qui sont responsables de 40 000 décès par an en France, ce qui représente, mes chers collègues, 110 décès par jour.
Sauf à vous lire tout le code de l’éducation, je ne peux que vous renvoyer vers l’article L. 312-13-1 qui prévoit : « Tout élève bénéficie, dans le cadre de sa scolarité obligatoire, d’une sensibilisation à la prévention des risques et aux missions des services de secours ainsi que d’un apprentissage des gestes élémentaires de premier secours. » Votre amendement est donc pleinement satisfait.
Même avis.
Je ne voudrais pas que notre collègue nous quitte sans avoir réussi une fois dans sa vie à me convaincre ! Il m’a convaincu, je retire donc l’amendement.
L’amendement no 1182 est retiré.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour soutenir l’amendement no 332 .
Cet amendement tend à intégrer, à l’alinéa 8, après le mot :« enseignement », les termes : « y compris les instituts médicaux éducatifs ». Le parcours doit concerner aussi les établissements médico-sociaux, et en particulier les instituts médicaux éducatifs qui accueillent des enfants et des adolescents handicapés. De plus, il s’agit de permettre que cette égalité des chances en santé soit assurée à tous d’une manière efficace. C’est une précision importante, qui n’est pas forcément toujours prise en considération.
L’amendement no 332 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Il s’agit de pointer ce que vient de confirmer M. le rapporteur : la santé bucco-dentaire donne beaucoup d’inquiétudes à l’heure actuelle, et nous l’avons constaté lors des auditions. Mais je crains que la réponse ne soit la même que celle donnée précédemment à M. Arnaud Richard.
Le fait que la convention d’objectifs et de gestion signée entre l’assurance maladie et l’État ait restreint pour la période 2014-2017 aux seules écoles de zones d’éducation prioritaire le programme de visites fait naître des inquiétudes pour la santé bucco-dentaire dans les écoles qui n’entrent pas dans ce classement, d’autant plus que l’on sait que ce sont les enfants des milieux populaires qui sont aujourd’hui les plus affectés par les problèmes de santé bucco-dentaires.
Voilà pourquoi il serait peut-être opportun de signaler que les actions de promotion conduites par les autorités académiques – sûrement éclairées par le code de l’éducation – en lien avec les agences régionales de santé pourraient comporter un volet relatif à la santé bucco-dentaire.
Il faut reconnaître que l’assurance maladie a permis, depuis ces dernières années, de mettre en oeuvre un certain nombre d’actions de prévention des maladies bucco-dentaires.
Comme l’a souligné notre collègue Gérard Bapt, la convention d’objectifs entre l’État et l’assurance maladie prévoit aujourd’hui uniquement des actions dans les écoles situées en zones d’éducation prioritaire. Or, pour moi, il n’y a pas deux catégories d’enfants ou de familles : il serait donc intéressant que ces actions puissent être menées sur l’ensemble du territoire, c’est-à-dire dans l’ensemble des écoles de notre pays.
La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement no 1457 .
J’irai dans le même sens que mes collègues : nous nous inscrivons dans la continuité de la loi de 2004, dont l’objectif 91 consistait notamment à réduire le nombre de caries par enfant et mettait en place les fameux indicateurs que nous connaissons.
Effectivement, ce sont essentiellement les enfants vivant dans les zones les plus difficiles, les moins favorisées socialement, qui sont touchés par ces actions. Il faut à la fois faire de la prévention et former les personnels s’occupant de ces jeunes enfants. Aujourd’hui, les actions obligatoires de la CNAM sont insuffisantes : nous sommes un petit peu en retard par rapport aux pays étrangers, notamment aux pays du Nord, même si nous avons fait des progrès assez considérables dans la prévention des caries.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
Même avis que tout à l’heure. Évidemment, la prévention bucco-dentaire est absolument essentielle. Parce que ma belle-famille compte nombre de dentistes et d’orthodontistes,
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP
Il est vrai que c’est un détail de ma vie dont vous auriez pu vous passer.
Sourires.
La prévention bucco-dentaire dans les écoles est effectivement un sujet extrêmement important, mais le parcours éducatif de santé l’englobera, pour faire plaisir à M. Richard. Avis défavorable de la commission.
Même avis.
Sourires.
Néanmoins, cet amendement a beaucoup d’importance, d’autant que ce texte contient peu d’actions en matière de santé bucco-dentaire ou de soins prothétiques, comme j’ai pu le dire hier lors de la discussion générale. Aujourd’hui, il faudrait vraiment développer ce dispositif.
L’article 2 prévoit que la politique de santé scolaire est déclinée dans les établissements d’enseignement conformément aux orientations de la politique nationale de santé. Cependant, il est indispensable qu’elle prenne la forme d’un parcours éducatif en santé, tout au long de la scolarité et sur l’ensemble des domaines de l’éducation à la santé, en ne se limitant pas simplement aux informations relatives aux addictions ou à la sexualité. Ce parcours de santé doit également inclure une information sur le fonctionnement du système de santé, et concerner aussi les établissements médico-sociaux qui assurent des fonctions d’enseignement à destination des enfants. C’est la raison pour laquelle il convient de compléter l’alinéa 8 en adoptant mon amendement.
Défavorable.
Puisque nous débattons de santé dans le milieu scolaire, je veux souligner que le socle commun de connaissances, de compétences et de culture adopté le 12 mars par le Conseil supérieur de l’éducation comprend un domaine no 4, intitulé « Les systèmes naturels et les systèmes techniques », qui prévoit d’inviter l’élève à « comprendre et assumer ses responsabilités individuelles et collectives », notamment à travers l’étude de la biologie.
Je cite le document : « L’élève adopte un comportement responsable vis-à-vis de l’environnement et de la santé. […] Il sait que la santé repose sur des fonctions biologiques coordonnées, susceptibles d’être perturbées par des facteurs physiques, chimiques, biologiques et sociaux de l’environnement et que certains de ces facteurs de risques dépendent de conduites sociales et de choix personnels. Il est conscient des enjeux de bien-être et de santé des pratiques alimentaires et physiques. Il observe les règles élémentaires de sécurité liées aux techniques et produits rencontrés dans la vie quotidienne. »
Tels sont les objectifs de connaissances, de compétences et de culture adoptés par le Conseil supérieur de l’éducation le 12 mars : à partir de la prochaine rentrée, ils feront partie des objectifs pédagogiques de toute la scolarité obligatoire, de la maternelle à la fin du collège.
La préoccupation des adultes pour les enfants, les préadolescents et les adolescents de ce pays est tout à fait louable – c’est d’ailleurs l’une de leurs fonctions premières. Mais je veux appeler votre attention sur les conséquences perverses de ce dont nous sommes en train de discuter.
Encore une fois, nous allons faire reposer sur des enfants une responsabilité qui n’est pas la leur. Non, ce sont les adultes qui sont responsables des enfants. Ces derniers ne doivent pas être responsables de leurs camarades de classe – ce n’est pas leur fonction première.
Non, je refuse cette société sans aucune liberté individuelle, qui veut encadrer l’action des enfants de bout en bout, en faisant en sorte de mettre en place de bons parcours de santé, madame la ministre. En permanence, on empêche les enfants de rêver, on leur enlève l’espace qui leur permet de former leur personnalité et de prendre le minimum de risques nécessaires pour avoir, plus tard, une vie d’adulte.
À force de vouloir normer la vie, à force de vouloir légiférer sur tout et sur n’importe quoi, vous allez détruire ce qui reste d’élan vital et de jeunesse dans ce pays.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Nous ne cessons de parler de la mort : nous avons parlé de l’euthanasie il y a quelques semaines, et nous parlons du parcours de santé en permanence. Où est la liberté, que diable ? Où est la part d’enfance qu’il faut laisser aux enfants de ce pays ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Que faites-vous pour donner des moyens aux pédiatres, aux pédopsychiatres et aux vrais professionnels qui vont travailler auprès des médecins et des infirmiers scolaires ?
Madame la ministre, votre projet de loi est un vrai scandale.
Vous êtes en train de détruire totalement le système de santé français. Pendant ce temps-là, nous débattons d’amendements visant à faire en sorte que le ciel soit bleu.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Contrairement à notre collègue, je n’irai pas dans la voie de l’enflure des mots.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
L’environnement familial est effectivement important dans la construction d’un parcours éducatif de santé. Je citerai un exemple tiré de mon expérience personnelle de maire. Dans les écoles de ma commune, nous avons conduit une expérimentation de prévention de l’obésité juvénile dans le cadre du programme « Ensemble prévenons l’obésité des enfants » – le programme EPODE –, qui n’impliquait pas seulement l’équipe pédagogique proprement dite, mais l’ensemble des fonctionnaires municipaux, notamment les personnes qui s’assoient à table avec les enfants à la cantine. J’ai été très frappé par deux réflexions de mères de famille que j’avais rencontrées au marché, à l’occasion d’une opération de promotion des produits frais locaux et de saison. L’une m’a dit : « Vous êtes terrible, avec votre programme EPODE ! Maintenant, mon fils me dit le soir qu’il n’a pas mangé ses cinq fruits et légumes. » Une autre m’a dit : « C’est terrible ! Nous avons un petit espace privatif avec une pelouse, et voilà que mon enfant veut planter un potager pour éviter les pesticides ! »
Voilà comment l’entourage familial peut aussi être sensibilisé par le parcours éducatif…
…lorsque ces bonnes pratiques en matière de santé sont transmises dans un cadre scolaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
L’amendement no 438 n’est pas adopté.
La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir l’amendement no 1638 .
J’ai bien compris qu’il fallait absolument diaboliser ce texte, et j’entends parfois des interventions un peu excessives.
Enfin, réalistes… Je respecte le sens du réalisme de certains, même si je ne le partage pas.
Il est de notre devoir de dire aussi que l’excès conduit à des dérives, notamment dans un domaine qui nous intéresse énormément. Les questions sanitaires placent l’enfant au coeur de la problématique de l’évolution humaine. Permettre à des enfants de suivre un parcours éducatif en lien avec une politique de santé, qui les accompagne au fil de l’eau, me semble indispensable quand on sait que des maladies comme l’obésité ou le diabète, que l’on connaît bien chez nous, sont liées à des comportements. Cela me semble essentiel. Il ne s’agit pas de construire un parcours éducatif se substituant aux formations classiques suivies à l’école, mais d’organiser une sensibilisation qui me semble extrêmement importante pour éviter que nous ayons à supporter demain des coûts supplémentaires pour réparer les dégâts commis à un certain âge.
Une autre chose me semble essentielle. Monsieur le rapporteur, vous avez dit que l’article 2 était complet, puisqu’il a été réécrit par la commission. Or il manque un volet, déjà évoqué par notre collègue Bapt : c’est celui de l’environnement familial. Cette question est essentielle. Certes, l’enfant doit être sensibilisé dans un contexte éducatif, mais si ses parents sont insuffisamment sensibilisés, cela peut poser des problèmes. Tout à l’heure, notre collègue Delaunay a parlé du rôle de l’enfant qui sensibilise ses parents, en leur recommandant par exemple de ne pas trop fumer, mais le rôle de la famille, qui intéresse beaucoup nos collègues de l’opposition, est aussi essentiel pour l’éducation de l’enfant au quotidien. Nous ne pouvons pas nous permettre d’éduquer ou de former des enfants dont les parents ne s’inscriraient pas dans une dynamique de responsabilité vis-à-vis de la santé. C’est pourquoi je vous propose de compléter l’article 2, dans sa nouvelle rédaction, en adoptant mon amendement.
Elle a accepté cet amendement. En effet, des études sociologiques montrent qu’une sensibilisation de l’enfant aux questions de santé, de prévention et aux bonnes pratiques alimentaires a des conséquences positives sur l’état de santé, notamment cardiovasculaire – mais pas seulement –, de la famille et de l’environnement proche. L’amendement de M. Letchimy apporte donc une précision utile : la commission y est favorable.
Favorable également. Il est utile de spécifier le rôle des accompagnants, et de la famille en particulier.
L’amendement no 1638 est adopté.
Il s’agit de préciser le rôle des médecins de l’éducation nationale en prévoyant leur coordination et en leur confiant l’animation de la mise en oeuvre de la promotion de la santé. Cet amendement vise également à prévoir la participation des infirmiers de l’éducation nationale à cette promotion.
En fait, il s’agit de soutenir les jeunes pour favoriser l’égalité des chances en matière de santé. Les médecins et infirmiers de l’éducation nationale sont les seuls professionnels de santé que nombre de jeunes pourront rencontrer.
Je veux enfin revenir sur les propos de mon collègue Accoyer : dans les diagnostics de déficience sensorielle, il est absolument essentiel de dépister l’amblyopie avant l’âge de 6 ans, car à cet âge, tout est joué.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 488 .
Je serai très bref, madame la présidente, car nous nous retrouvons de temps en temps avec Mme Orliac.
Sourires et exclamations.
C’est un très bon amendement. Effectivement, il est absolument nécessaire de redonner toute sa place au médecin de l’éducation nationale, qui doit être le coordonnateur et l’animateur des réseaux et des équipes.
Monsieur Lurton, l’amendement no 813 est-il défendu ? Vous retrouvez-vous aussi ?
Sourires.
À l’alinéa 8, on évoque les autorités académiques, les agences régionales de santé, les collectivités territoriales – ce qui est très bien – et les organismes d’assurance maladie concernés, mais on ne parle à aucun moment des médecins scolaires. Or ils sont des acteurs essentiels de cette politique.
La présentation de cet amendement est aussi l’occasion de vous rappeler ce que j’ai dit en discussion générale et dans mon intervention sur l’article 2. J’ai bien compris que les médecins scolaires faisaient partie du personnel de l’éducation nationale ; il n’empêche que le faible nombre de médecins scolaires pose un gros problème. J’aurais aimé savoir ce que la ministre de l’éducation nationale comptait faire pour pallier cette difficulté.
L’avis de la commission est défavorable car ces amendements sont satisfaits. L’article L. 121-4-1 du code de l’éducation prévoit expressément que la promotion de la santé à l’école relève en priorité des médecins et infirmiers de l’éducation nationale.
Même avis.
L’amendement no 2369 n’est pas adopté.
Je supplée mon collègue Poisson pour présenter cet amendement qui propose de mettre en place en milieu scolaire une politique de déstigmatisation, d’information, de repérage des élèves en souffrance et d’orientation vers une première consultation. Dans ce cadre, les enseignants ont besoin d’interaction, de soutien ou d’appui de la part du milieu médical et médico-social.
C’est pourquoi cette politique doit être conduite par les autorités académiques en lien avec les agences régionales de santé. Il est également indispensable d’informer en amont et d’associer les parents ou tuteurs à ces actions qui concernent la santé et l’intimité de leur enfant.
L’amendement no 1746 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 1489 .
Le présent amendement vise à promouvoir, sur tout le territoire, une sensibilisation et une information en direction de nos jeunes en matière de consommation de substances addictives, licites ou illicites. Certes, les textes le précisent déjà, car il y a eu des améliorations dans ce domaine, avec les ARS, les rectorats, les collectivités territoriales. Mais cela reste à la discrétion des uns ou des autres et à leur bonne volonté.
Les politiques publiques en la matière sont assumées de manière très différenciée sur l’ensemble du territoire. En fonction de la personnalité de tel proviseur, de tel directeur d’ARS, de telle rectrice ou de tel recteur, il se passe quelque chose ou il ne se passe rien. C’est pourquoi je suggère qu’un cadre soit défini en Conseil d’État, indiquant clairement à l’ensemble de nos hauts fonctionnaires et des responsables en matière d’éducation et de santé que cette sensibilisation et cette formation « doivent » être faites. Il ne s’agit pas d’une hypothèse, d’une suggestion ou d’une opportunité, mais d’une obligation que la loi impose.
La commission a émis un avis défavorable non sur le principe, car la lutte contre les addictions et les conduites toxicomaniaques est importante et doit débuter très tôt chez les enfants. Cela doit être mené partout, dans le cadre familial et scolaire.
L’article L. 312-18 du code de l’éducation prévoit qu’ « une information est délivrée sur les conséquences de la consommation de drogues sur la santé… ». Je ne lis pas l’article dans sa totalité, mais je vous y renvoie car il est très complet. S’agissant de l’alcool, l’article L. 312-17 prévoit une information sur « les conséquences des abus de consommation d’alcool… ». Là aussi, je vous renvoie à la lecture de l’article en question.
Bref, des dispositions existent déjà dans le code de l’éducation. En outre, la définition du parcours éducatif en santé n’implique pas d’entrer dans le détail et de mentionner dans la loi ce qui concerne le sujet de la santé mentale ou des addictions. Nous définissons un cadre général qui sera ensuite décliné. La lutte contre l’entrée dans les addictions chez les jeunes fera évidemment partie des priorités.
C’est un vrai sujet de préoccupation, madame Le Dain, et il doit nous mobiliser collectivement. Les remarques du rapporteur montrent que des dispositions existent, ce qui me conduit à vous demander de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable. Je n’en désapprouve pas le principe, mais des actions sont déjà menées en ce sens.
J’ai bien entendu Mme la ministre et M. le rapporteur qui a indiqué que ma demande sera prise en compte et qu’il y aura une obligation de sensibilisation et de formation. Comme cela figurera au compte rendu, je pourrais m’en servir le cas échéant.
Lorsque je me suis occupée de la commission d’évaluation et de contrôle des politiques publiques en matière de substances illicites, j’ai pu observer qu’il existait une considérable disparité en dépit de ce qui figure dans le code de l’éducation ainsi que dans le code de la santé publique.
J’espère que les propos tenus ce soir seront appliqués et auront force de loi. Je retire donc l’amendement.
Madame Le Dain, vous avez présenté deux amendements de bon sens. Je regrette vraiment que vous ayez accepté de retirer l’amendement relatif aux étudiants et à la vie universitaire.
Autant il existe des « airbags » pour les collégiens et les lycéens, autant les étudiants sont laissés de côté et livrés à eux-mêmes alors que la puissance publique pourrait intervenir au même titre.
Madame la présidente, nous reprenons donc l’amendement.
Je vais encore une fois, mes chers collègues, aller contre l’idéologie dominante.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Nous pouvons assister à des effets paradoxaux et constater qu’après des réunions d’information dans les collèges sur la consommation de produits toxiques, les élèves en viennent à consommer ces produits. C’est peut-être ainsi que fonctionnent les adolescents et les préadolescents. À force de vouloir bien faire, mes chers collègues, nous aboutirons à l’effet inverse en termes de consommation.
Quant à nous, adultes, faisons-nous preuve de cohérence lorsque dans un même texte, on matraque les enfants, les préadolescents d’informations les persuadant que le monde est tellement dangereux, tellement mauvais qu’il faut faire des parcours de santé, de l’éducation à tout et à n’importe quoi et on légalise l’emploi de substances illicites dans des salles qui ne répondent en rien à la dignité humaine (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), aux problèmes de ces patients qui jouent avec la mort et que l’on appelle trop rapidement des toxicomanes ? Des patients dont on sait pertinemment lorsqu’on les a soignés combien le parcours est difficile pour arriver à les aider et à leur rendre leur part d’humanité et de confiance dans la vie. Votre message est totalement délirant, totalement contradictoire par rapport à ces amendements que consomment mes collègues de manière déraisonnable. C’est pourquoi je suis contre.
L’amendement no 1489 n’est pas adopté.
Le présent amendement vise à mettre l’accent sur l’importance de la sphère familiale, notamment des parents. La mise en place du parcours de soins de l’enfant telle que proposée par le rapporteur va dans le bon sens. C’est une action positive.
En outre, vous cherchez à favoriser un décloisonnement des différents acteurs – éducation nationale et médecine scolaire, PMI, et autres – que nous ne pouvons que soutenir. Pour autant, cela ne saurait être efficace que si les parents sont étroitement associés aux actions qui seront proposées dans ce cadre.
Tel est l’objet de l’amendement pour souligner l’importance de la sphère familiale et du rôle des parents dans le cadre du parcours de soins de l’enfant.
Avis défavorable, car on ne peut pas concevoir de parcours éducatif en santé sans l’implication des parents de la même façon qu’on ne peut pas concevoir que des actions pédagogiques soient menées à l’école sans la participation des parents.
Sauf à jeter une forme de soupçon sur l’école, parce que les parents font évidemment partie de la communauté éducative. L’article L. 111-1 du code de l’éducation prévoit la participation des parents : « Pour garantir la réussite de tous, l’école se construit avec la participation des parents, quelle que soit leur origine sociale. »
L’État garantit le respect de la personnalité de l’enfant et de l’action éducative des familles. Si l’on ajoute cette précision dans la loi en ce qui concerne le parcours éducatif en santé, cela reviendrait à considérer que tel n’est pas forcément le cas pour d’autres catégories d’actions menées au sein de l’école. Cela n’irait du reste pas dans le sens de votre amendement.
Avis défavorable.
Étant cosignataire de l’amendement, je veux indiquer que je suis tout à fait d’accord avec le propos de mon collègue Arnaud Robinet. Il importe que les parents soient cités dans la loi. Vous avez, monsieur le rapporteur, parlé de suspicion sur les parents.
En l’occurrence, vous jetez la suspicion sur l’école et même sur les professionnels de santé. Pourquoi ne cessez-vous de dire ce que doivent faire les professionnels de santé, infirmières et médecins scolaires ? En fait, vous voulez occulter le fait qu’il y a très peu de médecins et d’infirmières scolaires, lesquels ne peuvent malheureusement pas remplir leurs missions. C’est pourquoi vous voulez que la communauté éducative s’en charge. Mme la ministre n’a pas dit autre chose.
Je dénonce l’absolutisme de votre loi, madame la ministre. Vous procédez par amalgame, vous mélangez tout. C’est à la communauté éducative qu’il revient d’apprendre aux enfants l’importance du petit-déjeuner, ce qu’est la santé, le civisme, la sexualité. Et bientôt, ce sera les salles de shoot.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Mais quand la communauté éducative aura-t-elle le temps d’apprendre à lire, à écrire et à compter aux enfants ? Pourquoi ne faites-vous pas confiance aux professionnels de santé, tels les infirmières scolaires, les médecins scolaires qui ont des missions qui leur ont été confiées par l’éducation nationale et non par les ARS ?
Demain, il y aura deux tutelles. Vous savez ce qui se passe avec une tutelle qui donne les ordres et l’autre qui paie.
Cela sera très compliqué pour le personnel de santé et négatif pour les enfants. Je dénonce l’absolutisme de votre loi, madame la ministre, car vous avez bien spécifié, et l’enregistrement en témoignera, que le parcours éducatif en santé se ferait région par région, établissement par établissement, secteur par secteur. Vous êtes donc en train d’introduire de réelles inégalités entre les enfants, car c’est cela qui se produira, dans les territoires et le système éducatif.
Je souhaite revenir sur le refus de notre rapporteur, qui n’accepte pas cet amendement. Je l’invite à relire l’exposé sommaire.
Nous avons dit que la mise en place du parcours de soins de l’enfant était positive. Pour autant, nous avons insisté sur la nécessité d’y associer les parents, la parentalité. Monsieur le rapporteur, vous êtes père de famille, vous savez comme moi que la parentalité est parfois en faillite ici ou là, dans certains quartiers et qu’il faut la renforcer.
Il est donc impératif d’écrire dans la loi que les parents doivent être associés à ces actions. En cas de faillite des parents, qui prend le relais ? Ce sont les élus locaux, qui sont obligés d’intervenir par l’intermédiaire des conseils d’école dans lesquels les élus sont présents ou tout simplement parce que les personnels de l’éducation nationale nous appellent au secours.
Afin que votre proposition soit efficace, monsieur le rapporteur, il est impératif que les parents soient associés.
L’amendement no 195 n’est pas adopté.
L’amendement no 1505 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Le présent amendement vise à associer le monde sportif à la prévention en matière de santé. C’est bien de prévoir la prévention au sein du système scolaire classique, mais l’un des grands oubliés de votre projet de loi, madame le ministre, est le sport. Or chacun reconnaît l’importance des activités sportives et par là même des associations sportives qui constituent un maillage territorial très intéressant. Vous auriez ainsi une plus-value en matière de prévention.
L’amendement a pour objet d’associer le sport, le mouvement sportif et les associations sportives à cette politique de prévention en matière de santé.
La commission a émis un avis défavorable. Si la promotion du sport et de façon générale de l’activité physique fera partie intégrante du parcours éducatif en santé, il n’est pas nécessaire de le préciser à ce stade dans la loi. C’est déjà présent dans le code de l’éducation à l’article L. 121-5, ainsi qu’à l’article L. 551-1 qui prévoit que « le projet éducatif territorial vise notamment à favoriser, pendant le temps libre des élèves, leur égal accès aux pratiques et activités culturelles et sportives. » Enfin, votre amendement prévoit que chaque établissement devra promouvoir la santé au sein même des associations, ce qui paraît difficile à appliquer.
Je suggère donc que vous retiriez votre amendement.
Avis défavorable.
L’amendement no 134 n’est pas adopté.
L’article 2, amendé, est adopté.
Au-delà de sa mission éducative, il convient de conférer au service public de l’éducation une responsabilité dans le bien-être des élèves. En effet, l’inclusion de tous les enfants dans la vie scolaire et la lutte contre les inégalités ont pour corollaire la nécessité de se soucier de leur équilibre quotidien. Cette observation fait écho à celle que j’ai faite tout à l’heure en réaction aux propos de Mme la ministre, car ces actions seront menées secteur par secteur.
Alors que les troubles des conduites alimentaires se manifestent à l’âge de la puberté, l’école a donc un rôle à jouer dans leur diagnostic, en particulier pour l’anorexie mentale, qui concerne en France 40 000 personnes âgées de 12 à 19 ans.
Il s’agit donc d’inscrire cette mission dans le code de l’éducation, afin d’éveiller l’attention de la communauté éducative, mais aussi celle des personnels de la restauration scolaire, à ces troubles des conduites alimentaires.
L’amendement no 1033 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Je souhaiterais que l’éducation nationale puisse s’impliquer dans le domaine important de l’information et de la sensibilisation aux troubles auditifs et aux moyens de les prévenir.
En effet, de nombreux spécialistes s’accordent à dire que la génération actuelle des 15-30 ans pourrait devenir une « génération de sourds ». De fait, un récent sondage a montré que trois jeunes sur quatre ont déjà ressenti des troubles auditifs, tels que des acouphènes ou une perte d’audition à la suite d’une forte exposition sonore. Quatre-vingt-neuf pour cent des jeunes utilisent un casque ou des écouteurs pour une écoute individuelle pendant près d’une heure quarante-cinq par jour en moyenne. C’est dire combien les conséquences de cette exposition peuvent être graves.
On pourrait alors penser qu’il faut limiter ce niveau sonore, mais je crois qu’il faut au contraire éduquer les jeunes, non seulement aux risques, mais aussi et surtout aux moyens de s’en protéger.
L’amendement tend donc à ce que l’éducation nationale, qui est déjà très impliquée dans ces domaines, puisse désormais fournir aussi une information écrite et orale sur les conséquences et les dangers d’une écoute forte et prolongée pouvant provoquer des troubles graves pour les jeunes.
Il faut prendre les mesures qui s’imposent car, très souvent, les jeunes nous le disent, l’utilisation des casques, des appareils et des téléphones ou la présence dans des salles…
…où le niveau sonore dépasse tous les critères normaux peuvent avoir des conséquences terribles.
La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement no 121 .
Cet amendement, cosigné par vingt-cinq de nos collègues, fait suite à la proposition de loi que j’ai déposée en novembre 2012.
Ces dernières années, les troubles de l’audition ont connu une hausse exponentielle, au point de devenir un réel problème de santé publique. Certaines pratiques de loisirs ont incontestablement des effets préjudiciables pour l’ouïe, via des techniques de sonorisation accrue se traduisant également par une hausse exponentielle des niveaux sonores.
C’est pourquoi le présent amendement vise à instituer des séances de prévention dans les établissements scolaires, afin d’informer et de sensibiliser les jeunes, premières victimes de l’acouphène et de l’hyperacousie, qui ont un effet dévastateur sur l’audition.
Avis défavorable, car la commission a introduit des dispositions spécifiques pour la lutte contre le bruit, notamment pour la protection des plus jeunes – et des moins jeunes aussi – utilisant des baladeurs ou fréquentant des équipements collectifs comme les boîtes de nuit. Les articles 11 ter et 11 quinquies sont ainsi consacrés aux mesures de prévention dans ce domaine et je propose donc le retrait de ces amendements.
Même avis.
La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement no 1787 .
Nous observons depuis plusieurs années dans les écoles une présence importante de groupes d’intérêts privés qui promeuvent la consommation de certains produits en en minimisant les impacts sur la santé ou en alléguant des vertus sanitaires très souvent biaisées.
C’est le cas par exemple du partenariat conclu en 2013 entre le Centre d’études et de documentation du sucre – le CEDUS –, lobby de l’industrie sucrière –, et l’éducation nationale. Ce partenariat prévoyait des actions de sensibilisation à la nutrition et la distribution de brochures d’information dans les écoles par le CEDUS. Or, en tant que lobby du sucre, le CEDUS défend un intérêt particulier et ces outils de communication et de sensibilisation sont très souvent biaisés, minimisant ou éludant le lien entre une consommation excessive de sucres industriels et la recrudescence de certaines maladies.
Ces partenariats existent également au niveau des rectorats ou des établissements.
Sans les interdire, le présent amendement tend à ce qu’ils soient validés par les ARS lorsqu’ils concernent les établissements et par le ministère de la santé lorsqu’ils concernent le ministère de l’éducation nationale.
Je suis déjà intervenue à de nombreuses reprises sur ce sujet, en particulier à l’occasion d’une question au Gouvernement posée le 13 février 2014, qui a donné lieu à une discussion et à la signature, le 19 juin 2014, d’un avenant à cet accord avec le CEDUS, puis à d’autres discussions portant sur le haut patronage accordé par les ministères de l’agriculture et de l’éducation nationale à l’événement intitulé « Semaine du goût ».
Je vous invite, si vous ne l’avez pas encore fait, à regarder le contenu de cette manifestation, qui promeut notamment un label « Approuvé par les enfants ». Je vous invite également à regarder qui sont les lauréats de ces labels et les partenaires de la Semaine du goût.
Nous pourrions espérer, avec cet amendement, en finir avec la méthode biaisée qu’emploie l’agro-industrie pour entrer dans l’école et promouvoir des produits qui n’ont rien à voir – bien au contraire ! – avec la santé.
Madame Abeille, il s’agit là d’un sujet très important. L’article 2 modifié stipule que, désormais, les actions de promotion de la santé sont conduites sous l’autorité des autorités académiques, mais qu’elles devront faire l’objet d’un conventionnement avec les agences régionales de santé. Ainsi, les partenariats entre les établissements et les organismes représentant un intérêt privé pourront d’ores et déjà être mieux définis dans ce cadre.
Votre amendement est donc satisfait et je vous invite donc à le retirer.
Même avis.
Votre réponse n’aborde pas complètement le sujet. J’entends bien votre argument, mais l’adoption de l’amendement permettrait de clarifier les choses.
Le partenariat entre l’éducation nationale et l’industrie du sucre, qui semble intéresser certains de nos collègues, est très ancien, historique. L’amendement permettrait d’affirmer beaucoup plus clairement que nous souhaitons sortir de ces partenariats biaisés. Certes, des dispositions sont prévues, mais elles manquent de clarté.
L’amendement no 1787 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement no 1791 .
Cet amendement tend lui aussi à renforcer l’éducation à la santé dans le cadre de l’éducation à l’alimentation, en spécifiant plus explicitement le lien entre l’alimentation et la santé. En effet, si le code de l’éducation prévoit déjà l’éducation à l’alimentation, nous proposons d’y intégrer la notion de santé, notamment à propos de l’introduction de produits biologiques – dont la justification est, bien entendu, essentiellement sanitaire.
Augmenter la part de bio dans les menus scolaires est un objectif auquel je souscris tout à fait à titre personnel, mais qui ne me paraît pas relever du domaine de la loi. Les initiatives intéressantes que vous proposez passent d’abord par une codification et nous venons précisément de doter les équipes éducatives des outils permettant de mener à bien ce type d’actions dans le cadre du parcours éducatif de santé que nous venons de voter.
Même avis.
L’amendement no 1791 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1894 rectifié et 2296 .
La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement no 1894 rectifié .
Le projet de loi a fait de l’accès aux soins de premier recours l’un de ses objectifs prioritaires. Le présent amendement se propose de l’étendre aux étudiants par le biais des services de médecine préventive et de promotion de la santé. En effet, les services universitaires et interuniversitaires de médecine préventive et de promotion de la santé sont de plus en plus nombreux à se constituer en centres de santé, permettant ainsi aux étudiants d’accéder aux soins de premiers recours et à des médecins spécialistes. Il s’agit donc de le reconnaître dans le libellé de leurs missions telles qu’elles figurent dans le code de l’éducation.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 2296 .
Les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé, composés d’équipes pluridisciplinaires comportant notamment des infirmières, des médecins, des psychologues et des personnels administratifs, s’efforcent d’être plus proches du quotidien des étudiants. Outre l’examen préventif au cours des trois premières années d’études, ils assurent un accueil permanent et personnalisé pour les étudiants qui souhaitent demander conseil, mettre à jour une vaccination, obtenir un certificat médical, consulter pour toute question ou problème médical, gynécologique, psychologique, psychiatrique, diététique ou social.
Fin 2012, le Gouvernement avait annoncé par la voix de l’ancienne ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Geneviève Fioraso, sa volonté d’ouvrir trente centres de santé dans les universités. Cet amendement donne une base légale à cette volonté politique. Vous l’aurez compris, il a dès lors pour objet d’adapter la loi aux évolutions des services universitaires et interuniversitaires de médecine préventive et de promotion de la santé, mais le dispositif qu’il contient permet également de mobiliser les acteurs de la santé des étudiants, afin d’atteindre les objectifs du présent projet de loi en faveur de l’accès aux soins de premier recours.
Avis favorable. Je précise que, bien sûr, les centres de santé, fussent-ils universitaires, sont ouverts à toute la population, car il n’existe pas de structure de santé qui puisse être réservée à une partie de la population.
J’ai indiqué tout à l’heure à Mme Le Dain qu’un amendement renforcerait les structures de santé et la prévention des étudiants : c’est ce que font ces deux amendements identiques.
Les amendements identiques nos 1894 rectifié et 2296 sont adoptés.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l’amendement no 1960 .
Cet amendement tend à faire reconnaître dans la loi le rôle de prévention, d’éducation et d’orientation que jouent déjà les missions locales en ce qui concerne la santé des jeunes qu’elles accompagnent pour leur insertion sociale et professionnelle. En effet, les missions locales, dans leur rôle d’accompagnement des jeunes, prennent en compte de façon globale la situation des jeunes qu’elles accompagnent et toutes leurs difficultés. L’état de santé du jeune accompagné est donc systématiquement pris en compte. Le rôle des missions locales est de favoriser l’accès des jeunes aux droits sociaux, et donc à la santé, elles ont donc aussi une mission de prévention et d’éducation à la santé.
En outre, la situation d’exclusion que vivent une partie des jeunes peut avoir des conséquences sur leur équilibre psychologique, voire sur leur santé mentale, qui doivent être prises en compte dans le cadre des schémas régionaux de santé.
Je rappelle en outre qu’une bonne partie des missions locales comprennent au sein de leur personnel un psychologue.
Il est donc indispensable que les acteurs de la santé, au niveau national comme au niveau régional, puissent prendre en compte et reconnaître le rôle important que jouent les missions locales en matière de prévention et d’éducation à la santé.
Tel est donc le sens de cet amendement, qui précise et confirme cette dimension d’acteurs des réseaux de prévention et de santé que revêtent les missions locales, à destination d’environ 1,5 million de jeunes qui les fréquentent, et leur rôle en termes de repérage, de prévention et d’accompagnement vers les soins et vers la prise en charge de ces soins.
Avis très favorable.
Quelle que soit ma sympathie pour M. Gille, pour sa gentillesse et sa bonne volonté innées, nous sommes ici dans la confusion.
Nous sommes dans la confusion car les professionnels de santé dans ce pays sont en grande souffrance ; ils sont inquiets lorsqu’ils regardent nos débats et lorsqu’ils voient la nature du texte, lequel sera probablement le texte final du fait de votre majorité présente – mais peut-être pas à venir, madame le ministre !
Or, dans le même temps, alors que nous manquons de médecins, en particulier de spécialistes, voilà que nous voulons donner une compétence à des institutions qui ne sont pas faites au départ pour cela – qu’elles orientent éventuellement les jeunes, oui, c’est possible.
Deuxième point, sans provocation : du fait de l’évolution de la société, est-il encore cohérent d’imaginer que nous avons, par rapport à l’emploi, un marché spécifique des moins de vingt-cinq ans ? Étant donné que nous sommes malheureusement dans une société de préadolescents ou d’adolescents éternels, y compris au niveau du chef de l’État dans son comportement actuel,…
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
Quel dérapage ! C’est bien parce qu’on est le 1er avril qu’on vous le permet !
Vous ne vous êtes pas privés, pendant le mandat précédent, d’attaquer le chef de l’État, donc souffrez que de notre côté, nous puissions jouer une partie de tennis à la Connors avec vous !
Mon cher collègue Gille, je crois que vous entretenez cette confusion avec votre amendement. Il vaudrait mieux soutenir un gouvernement qui donne de l’argent et des moyens aux services hospitaliers, qui laisse les professions libérales vivre, créer de l’argent, du travail et employer des personnes, et améliorer ainsi les caisses de l’État, plutôt que de demeurer dans cette confusion !
Votre amendement, même s’il relève d’une bonne intention et fait preuve de bonne volonté, ne sert à rien !
Mes chers collègues, je rappelle que dans cet hémicycle, nous sommes là pour discuter des textes, dans le respect, bien sûr, de la fonction présidentielle.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Je ne doute absolument pas de la bonne volonté de mon collègue Gille, que je connais bien au demeurant puisqu’il est du même département que moi. Je sais qu’il s’investit beaucoup dans les missions locales, qui ont un intérêt majeur ; je ne dirai pas le contraire.
Mais l’explication de son amendement n’était pas claire à mes yeux : qui va opérer, en matière de promotion de santé et surtout d’accompagnement au niveau santé, dans les missions locales ? Que je sache, et sauf erreur de ma part, je n’ai pas le sentiment qu’il y ait une majorité de médecins ou d’infirmiers dans les missions locales. On est en train de transférer les compétences médicales à du personnel qui est certainement compétent, mais peut-être pas au point d’être médecin ou infirmier.
Avec ce style d’amendement, on crée une confusion majeure entre la professionnalisation de ce métier de médecin ou d’infirmier et celui d’accompagnateur social, qui remplit tout à fait son rôle. Cela me perturbe terriblement parce que, d’un côté, la ministre empêche les médecins de s’installer où ils veulent (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC),…
Eh oui ! C’est la vérité !
Et, d’un autre côté, on transfère cette compétence « médicale » ou paramédicale, comme vous l’entendez, au sein des missions locales.
La raison pour laquelle je suis intervenue, mon cher collègue, c’est que j’aimerais que vous précisiez véritablement les compétences que vous voulez transférer aux personnels des missions locales.
Une très brève intervention pour conforter mon collègue Gille, même s’il répondra, puisque Mme Greff vient de poser la bonne question. Mais quand on a vécu au coeur des missions locales, en tant qu’élu local, on sait que lors de l’entretien avec les conseillers des missions locales, ces jeunes abordent non seulement leurs problèmes de formation, d’emploi et d’insertion, mais également les problèmes de santé : c’est ce que veut souligner particulièrement M. Gille dans son amendement.
Je remercie mes collègues pour leurs gentils propos, même si je suis un peu déçu : comme ils ont dit que ma gentillesse était innée, je n’ai aucun mérite !
Sur le fond, je pense qu’il y a une incompréhension : il est clair qu’il n’y a pas de médecin dans les missions locales. Ce n’est pas du tout un transfert de compétences, il ne s’agit pas d’inscrire cela dans le code de la santé. Si vous lisez bien l’amendement, celui-ci a pour objet de préciser le rôle des missions locales dans le code du travail et donc de reconnaître un travail qu’elles font déjà. Voilà le sens de l’amendement ! Relisez l’exposé sommaire, qui le dit très clairement.
Il s’agit donc d’un travail de repérage – les jeunes viennent, poussent la porte et, comme le disait mon collègue, exposent leurs difficultés –, de prévention, d’accompagnement et d’orientation vers les systèmes de soins. Il est également arrivé que les missions locales mettent en place localement un système de mutuelle si les jeunes n’arrivent pas à y avoir accès. Mais on n’est pas du tout dans le médical à proprement parler : c’est un système de repérage et d’accompagnement des jeunes. Je pense que cela est de nature à lever vos inquiétudes ou vos soupçons.
L’amendement no 1960 est adopté.
La parole est à M. Élie Aboud, pour soutenir l’amendement no 1234 rectifié .
Je tiens à excuser Mme Pécresse, qui devait défendre cet amendement que j’ai cosigné. Cet amendement a été adopté par la commission, à la condition de le remettre en forme, ce qui a été fait.
L’idée est simple : faire reculer la consommation d’alcool et de drogues dans les établissements scolaires. Le sens de cet amendement est donc de responsabiliser l’équipe pédagogique et les chefs d’établissement, sans les sortir du système, sans imposer un schéma, parce qu’ils sont au plus près des préoccupations des jeunes.
Justement, monsieur Aboud ! Le problème est qu’il ne faut pas imposer un schéma aux établissements. Nous venons de voter un parcours éducatif de santé. Je vous ai écouté présenter cet amendement, auquel la commission a donné un avis favorable : à titre personnel, j’en suis désolé, j’émettrai plutôt un avis défavorable.
Vous dites en effet qu’il faut imposer un schéma.
Or nous venons de voter un parcours éducatif de santé qui permettra à chaque établissement de mettre en place les mesures nécessaires. Laissons vivre ce parcours éducatif de santé ! La prise en charge des addictions – alcool, drogues, stupéfiants, etc. – fera bien évidemment partie intégrante des missions de promotion et de prévention de la santé : elle sera intégrée dans ce parcours éducatif de santé, nous avons beaucoup insisté sur ce point tout à l’heure.
Nous avions dit qu’il fallait revoir des choses dans cet amendement parce que son problème principal est qu’il inscrit dans la loi quelque chose qui en fait ne relève pas de la loi, mais plutôt de la circulaire – c’est-à-dire qu’il rend législative une circulaire de l’éducation nationale. J’en suis absolument confus et désolé, mais je donne à titre personnel un avis défavorable à cet amendement.
Défavorable.
Très bien pour le parcours éducatif, vous l’avez bien développé ; mais il ne s’agit là que de nommer un référent, rien de plus ! Et cela a été accepté par la commission !
L’amendement no 1234 rectifié n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1727 .
L’amendement no 1727 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Dino Cinieri, premier orateur inscrit sur l’article 2 bis.
Madame la ministre, cet article relance le débat sur la sécurité vaccinale et sur l’obligation vaccinale. La question de l’aluminium utilisé comme adjuvant vaccinal est une problématique essentielle mais complexe, car elle interroge à la fois les connaissances scientifiques, l’éthique médicale, la vigilance sanitaire et la responsabilité politique, mais aussi l’économie, les processus de production et les acteurs de cette production.
J’ai été récemment interpellé par des familles de malades de la myofasciite à macrophages, qui souhaitent savoir pourquoi vous permettez aux industriels de retirer du marché des vaccins qui ne contiennent pas de sels d’aluminium alors qu’en novembre 2012, le Conseil d’État a reconnu un lien de cause à effet entre l’aluminium utilisé comme adjuvant dans un vaccin contre l’hépatite B et la survenue d’une myofasciite à macrophages.
Vous avez demandé à notre collègue Sandrine Hurel de formuler des recommandations afin de faire évoluer le principe de l’obligation vaccinale et de lever les obstacles financiers à la vaccination.
Néanmoins, parce qu’il y a urgence, parce que je pense à Justine, jeune fille de vingt-cinq ans qui vit à Saint-Marcellin-en-Forez, dans ma circonscription, et qui se bat contre cette maladie très invalidante, je veux vous poser deux questions, madame la ministre : allez-vous permettre le financement de la recherche sur la myofasciite à macrophages menée à l’hôpital Henri-Mondor ? Et un vaccin DT-polio sans aluminium sera-t-il prochainement à disposition du public ?
Cet article permet de dispenser d’obtenir le consentement des titulaires de l’autorité parentale. Il nous semble, madame la ministre, qu’un tel article est susceptible de faire pencher la décision de l’enfant en faveur de ce que l’on appelle le « non-lien affectif » et le « non-lien familial ». Il est demandé au législateur de conforter des enfants, par l’existence même de ce dispositif, dans le sentiment relativement naturel chez les adolescents que leurs parents ne peuvent pas les comprendre. Attention à ce genre de clivage dans l’article 2 bis, et laissons quand même les parents – appelez-les comme vous voulez : père et mère ou parent 1 et parent 2 – au coeur du dispositif.
Cet article 2 bis porte sur la dérogation au consentement parental pour les actes de prévention et de soins réalisés par les sages-femmes ou les infirmiers. Un dispositif existe actuellement dans le cadre de dérogations réservées au médecin pour des opérations de traitement ou d’intervention sur des personnes mineures de quinze ans ou plus refusant que leurs parents soient informés.
L’article proposé vise donc à étendre ce dispositif à d’autres professionnels, mais plusieurs points me paraissent devoir être abordés. Le premier concerne la communication de ces dispositions à l’égard des mineurs, parce qu’il n’y aurait pas d’utilité à l’étendre à la fois à d’autres professionnels ou à certaines actions si on ne consolide pas le niveau d’information : ce point est relativement important.
Le deuxième point porte sur la confidentialité de la procédure : puisque la personne mineure est généralement ayant droit d’une personne majeure et bénéficie à ce titre de la couverture maladie d’un tiers, a-t-on aujourd’hui, madame la ministre, toutes les assurances et tous les moyens de garantir qu’au cours de la procédure, aucune information, notamment au titre de la prise en charge financière, ne parviendra directement au responsable de l’autorité parentale ?
Je souhaite évoquer un troisième point : si l’article L. 1111-5 du code de la santé publique prévoit actuellement des dérogations en matière de traitement ou d’intervention, l’article 2 bis étend le mécanisme de dérogation aux actions de prévention, de dépistage ou de diagnostic. Dans le cadre de ces actions de prévention, il y a les opérations de vaccination. Je comprends tout à fait les situations ciblées par cette extension, mais je m’interroge sur la légitimité de l’ouverture à toutes les vaccinations qui pourraient intervenir sur des enfants mineurs, sans consentement ni information des parents.
Pour conclure, si ces dérogations répondent à des cas précis et à des situations que nous avons tous en tête, il n’en demeure pas moins que ces dérogations peuvent contribuer à rompre le dialogue ou le lien familial, qui est important – d’où la nécessité de l’information et de la communication.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 1215 .
L’amendement no 1215 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 1301 présenté par Mme la présidente de la commission des affaires sociales est également rédactionnel.
L’amendement no 1301 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 2 bis, amendé, est adopté.
Article 2
Il s’agit de prendre en compte l’enjeu en matière de santé auditive et le dépistage de la surdité présente dans la petite enfance ou apparue au cours de la scolarité, en ajoutant dans le deuxième alinéa de l’article L. 114-3 du code du service national une phrase ainsi rédigée : « Par ailleurs, une information est dispensée sur la prévention des conduites à risque pour la santé, notamment celles susceptibles de causer des troubles de l’audition. »
En clair, mes chers collègues, il s’agit de revenir sur un amendement adopté à mon initiative, qui avait échappé à l’article 40 mais qui, suscité par l’obligation de réaliser des tests d’évaluation des apprentissages fondamentaux, prévoyait un test de dépistage de la surdité qui avait une incidence budgétaire que je ne soupçonnais pas. Voilà pourquoi, tout en conservant l’esprit de l’information sur la prévention des conduites à risque susceptibles de causer des troubles de l’audition, je vous propose d’adopter cet amendement qui corrige le texte de la commission.
Des discussions portaient sur la rédaction initiale de l’amendement. Je suis à présent favorable à cet amendement.
L’amendement no 495 , accepté par le Gouvernement, est adopté et l’article 2 ter est ainsi rédigé ; les amendements nos 1360 , 1483 , 1594 rectifié et 1639 tombent.
Non, madame Le Dain, vous ne pouvez pas sous-amender car c’est une nouvelle rédaction de l’article qui vient d’être adoptée. Ce sera pour la deuxième lecture, madame Le Dain – ou plutôt pour le Sénat, car le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce texte.
La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir l’amendement no 1642 rectifié .
Il s’agit d’un dispositif qui pourrait permettre aux jeunes des écoles de la deuxième chance, aux volontaires du service civique, aux apprentis et aux stagiaires du service militaire adapté d’effectuer des examens conformément aux dispositions classiques.
Le code de la Sécurité sociale prévoit que toute personne affiliée au régime général peut bénéficier gratuitement d’un bilan de santé tous les cinq ans. Cette information n’est pas très connue. Il s’agit donc d’apporter automatiquement cette information aux jeunes, de telle sorte qu’ils puissent demander à bénéficier de ces diagnostics de santé.
Monsieur le député, vous proposez de fournir une information sur la possibilité d’effectuer un examen de prévention à un public ciblé : les jeunes des écoles de la deuxième chance, les volontaires du service civique, les apprentis, les stagiaires du service militaire adapté et les personnes sous contrat de professionnalisation.
Ce sont des jeunes qui sont souvent sortis précocement du système scolaire, mais que la politique de santé peut encore toucher dans un cadre collectif. Il nous est apparu particulièrement bienvenu de faciliter leur accès aux soins et surtout aux examens de prévention. Avis favorable de la commission.
L’amendement no 1642 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Depuis quelques heures, nous assistons une fois de plus à un renversement des générations. Nous avons mis les enfants en position d’être les thérapeutes et les juges de leurs parents : je pense que c’est une très mauvaise chose à long terme et un très mauvais service que nous rendons aux enfants et aux préadolescents de ce pays, confrontés à bien des difficultés et à un monde extrêmement dur – beaucoup plus dur que celui qu’ont connu nos générations.
Vous avez déjà déséquilibré la loi de Mme Veil en supprimant la clause de détresse. À l’article 3 de votre projet, madame le ministre, vous poursuivez votre oeuvre de destruction, au mépris des conséquences psychologiques extrêmement lourdes de ces prescriptions données à des adolescentes qui, pour beaucoup, commencent bien trop tôt leur vie sexuelle.
Madame le ministre, j’appelle très solennellement votre attention sur cet article 3 qui n’a rien d’anodin : il continue une oeuvre de destruction, en niant la douleur et l’angoisse psychique des préadolescentes et des adolescentes. Il nie aussi la spécificité de ces prescriptions et fait porter un poids très lourd aux infirmières scolaires.
L’article 3 est adopté.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2304 .
L’amendement no 2304 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement no 2204 .
Cet amendement de Christian Paul et de Catherine Coutelle porte sur l’article du code de la santé publique relatif à la délivrance des contraceptifs oraux. En effet, aujourd’hui, cet article prévoit que le pharmacien peut, lorsque la durée de validité d’une ordonnance datant de moins d’un an est expirée, délivrer ces contraceptifs. Nous souhaitons transformer cette possibilité en obligation, sur une durée de trois mois non renouvelable, et dans un second temps, prévoir une possibilité sur six mois.
À titre personnel, je ne suis pas très favorable à cet amendement. Nous avons connu, sur les contraceptifs oraux, des difficultés qui auraient pu dégénérer en crise si elles n’avaient pas été très bien gérées par Mme la ministre.
Je crois que la plupart des pharmaciens dépannent, même si certains, réfractaires, ne le font pas. Ces contraceptifs nécessitent un suivi biologique et je ne voudrais pas qu’on se retrouve, à trois mois près, avec des accidents thrombo-emboliques parce que la prise de sang n’a pas été faite.
J’entends les arguments sur les déserts médicaux et la difficulté d’accès aux soins. Néanmoins, en un mois, on peut tout de même trouver un médecin généraliste pour prescrire une prise de sang.
Je ne voudrais pas renouer avec les difficultés que nous avons rencontrées au sujet des contraceptifs oraux de troisième ou de quatrième génération, parce qu’on aura voulu dépanner, sur une bonne intention. C’est en tout cas mon avis.
Même avis. Les contraceptifs sont des médicaments : vous le savez parfaitement, monsieur Sebaoun, vous qui êtes médecin. Or, les médicaments comportent des risques. Il est important d’être suivie lorsqu’on prend des contraceptifs. Un assouplissement a été apporté, qui permet de légaliser le cadre de ce que Mme la présidente de la commission a appelé le « dépannage ». Une ordonnance peut être prolongée, ce qui permet à une jeune femme, à une jeune fille, d’avoir le temps de prendre un rendez-vous. Il me semble donc que le cadre existant est suffisamment souple pour permettre aux jeunes filles qui s’y prennent un peu tard de faire renouveler leur prescription, en consultant un médecin ou une sage-femme. Je donnerais donc un avis défavorable si vous ne retiriez pas votre amendement, comme je le souhaiterais, monsieur le député.
Autant je peux comprendre l’idée que le pharmacien soit là pour conseiller la jeune patiente et lui délivrer si nécessaire la plaquette de contraceptifs qui lui est nécessaire, autant je réfute l’argument du risque thrombo-embolique. Quand on regarde très sérieusement comment sont suivies celles qui prennent des contraceptifs oraux, la réalité du suivi thrombo-embolique est extrêmement faible.
Excusez-moi, ce n’est pas un argument recevable. Les précautions qui devraient être prises ne le sont généralement pas par les médecins qui prescrivent les pilules : je vous demande de regarder les statistiques.
Je ne retirerai pas cet amendement, madame la ministre, puisque Christian Paul a souhaité le soumettre à notre assemblée.
Quant à l’idée que le pharmacien fait au mieux, je veux bien la croire.
Sur cet amendement, deux éléments doivent être pris en considération.
Le premier, c’est la responsabilité. La personne qui suit un traitement est censée être en pleine possession de ses moyens : il est de sa responsabilité de suivre son traitement. Il faut arrêter de prévoir partout des garde-fous. Le risque fait partie de la vie.
Le second, c’est que nous parlons de mineures. C’est toujours la même dérive : nous avons une vision adultique de nos adolescentes et de nos adolescents.
Nous vivons dans une société éminemment violente pour les adolescents, qui ont accès par la télévision à toutes les turpitudes de l’espèce humaine : meurtres, violences, à un niveau incroyable.
Dans cette société paradoxale, nous, ici, sommes des Bisounours voulant à tout prix protéger et défendre des mineurs.
Je pense que l’argument de Mme la présidente de la commission est parfaitement recevable et j’ajoute les miens pour repousser cet amendement.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Je ne peux pas partager la lecture que vous faites de l’observance sur les contraceptifs oraux. La preuve : quand un professionnel de santé, médecin, sage-femme, gynécologue médical, reçoit ces jeunes filles, toujours est évoqué dans la conversation l’oubli de la pilule. Toujours ! Le risque d’oubli est mentionné dans la notice et les professionnels qui font bien leur travail leur rappelle que cela peut arriver.
Si vous êtes un élu de terrain, vous le savez : la plupart des professionnels de santé conseillent de faire sonner le portable, quand la patiente en a un, pour respecter l’heure. Mais on sait qu’il y a quand même des jeunes filles qui oublient.
L’amendement no 2204 n’est pas adopté.
La parole est à M. Olivier Véran, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 1573 .
L’amendement no 1573 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 3 bis, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Catherine Quéré, pour soutenir l’amendement no 1587 .
Cet amendement vise à la publication d’une étude sur la possibilité et la pertinence de la mise en vente libre de micro-progestatifs dans les pharmacies.
À la différence de la contraception hormonale régulière, la contraception d’urgence peut être délivrée en pharmacie sans prescription médicale obligatoire. Cette question pourrait être étudiée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Avis défavorable de la commission. Les contraceptifs oraux micro-progestatifs sont des médicaments hormonaux qui ont des effets indésirables, cela a été dit. Il faut pouvoir détecter les contre-indications. Il paraît donc difficile de les mettre en vente libre.
Quoi qu’il en soit, il existe un organisme, l’Agence nationale de sécurité du médicament, qui est habilité à évaluer les risques et les bénéfices liés à l’utilisation des produits contraceptifs et contragestifs : cette agence peut décider de procéder à une évaluation et publie d’ailleurs un rapport annuel d’activité qui est communiqué au Gouvernement et au Parlement.
Il ne me paraît donc pas utile de prévoir un rapport spécifique sur cette question, qui relève déjà de l’ANSM.
Je souhaite le retrait de cet amendement. Je comprends la démarche qui est la vôtre, mais je suis certaine que vous comprendrez que la prise de contraceptifs oraux comporte des risques : il est nécessaire qu’une jeune fille ou jeune femme consulte un professionnel de santé.
L’amendement no 1587 est retiré.
Sur l’article 4, de très nombreux orateurs sont inscrits. Nous allons commencer la discussion sur l’article. Je je rappelle que chacun dispose de deux minutes pour s’exprimer.
La parole est à M. Bernard Perrut.
Madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes tous attachés aux fondements de la politique publique en matière de lutte contre l’alcoolisme et les comportements excessifs car ceux-ci peuvent effectivement mettre en péril la santé et la vie – je pense en particulier à la pratique du binge drinking chez les jeunes. Bien évidemment, il faut agir.
Mais nos efforts, à mon sens, doivent porter sur l’information, l’éducation et la prévention, objectifs d’ailleurs mis en oeuvre par une filière que je qualifierais d’exemplaire : la filière viticole.
En effet, seule une consommation qualitative et responsable est à même de lutter contre les abus.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, vous avez exprimé votre souhait de ne pas remettre en cause le cadre législatif actuel, c’est-à-dire la loi Évin. Le Président de la République et le Premier ministre se sont également engagés en ce sens.
Nous sommes toutefois favorables à la clarification de la loi, comme en témoigne l’amendement adopté en commission visant à définir la publicité et à distinguer clairement ce qui relève de l’information, de la création artistique, culturelle, de la promotion de nos communes et de nos territoires, bref, à ne pas faire condamner les journalistes qui parlent de nos régions.
Néanmoins, madame la ministre, on peut s’inquiéter de ce que ce texte présente un certain nombre d’évolutions inacceptables qui porteraient un grave préjudice à la filière viticole, laquelle représente à la fois un patrimoine, une histoire, une culture, une économie, une activité touristique. Elle est notre fierté.
Par conséquent, ne sombrons pas dans cette facilité qui consiste à assimiler le vin à un produit nocif et à laisser la définition du message à la volonté du seul ministère de la santé, qui serait peut-être tenté d’enfermer la politique de santé dans une logique prohibitionniste,…
…ce qui n’est pas acceptable.
Il n’est pas non plus acceptable de modifier les règles d’affichage de la publicité, ni en limitant la taille des panneaux – ce qui n’est d’ailleurs pas applicable sur notre territoire en raison d’un certain nombre de règles sur lesquelles nous reviendrons –, ni en interdisant la publicité partout où se trouvent des établissements scolaires et des lieux de formation car cela reviendrait à l’interdire dans toutes nos communes…
…et dans toutes nos villes, ni en mettant un visuel sur les emballages et les bouteilles qui stigmatiserait le vin, c’est-à-dire ce patrimoine que les uns et les autres nous avons en partage.
Nous aurons l’occasion d’y revenir pendant le débat.
Madame la ministre, mes chers collègues, un amendement du rapporteur concernant la définition du message sanitaire à associer au vin a été ajouté à cet article.
Solidairement, madame la ministre, vous vous confiez ainsi le soin de définir le message et la publicité en fonction des publics.
Vous avez beau le nier, c’est là revenir sur la loi Évin, qui différenciait clairement, en la matière, le tabac et le vin, M. Évin lui-même fondant son raisonnement sur l’idée que seul l’excès est dangereux dans la consommation d’alcool. C’est du bon sens, cela est confirmé par les autorités sanitaires et cela peut être constaté chaque jour.
Revenir sur la loi Évin avec ce regard caricaturalement « anti-vin », c’est stigmatiser un secteur représenté par des hommes et des femmes, souvent travailleurs indépendants.
Mais, surtout, cet amendement n’a à mon sens rien à faire avec cet article qui concerne un sujet grave, le binge drinking, lequel mérite une attention toute particulière.
Cela vient d’être dit, le vin, en France, fait partie de notre patrimoine et constitue une richesse que le monde entier nous envie. Casser son image avec des messages décalés et stigmatisants, ce serait briser le dynamisme d’une économie…
…qui participe aussi de l’économie touristique, bien défendue par votre collègue ministre des affaires étrangères chargé de ce secteur, lequel apporte tant au milieu rural.
Je suis champenois, comme d’autres ici, et où que j’aille dans le monde, je vois que quand on prononce le mot « champagne », les yeux commencent à pétiller.
Vous voyez-vous offrir au bout du monde une bouteille de nos vins, savoir-faire historique de nos vignerons, barrée d’un message autre que celui déjà inscrit à ce jour et qui, à juste titre, prévient des dangers de l’abus d’alcool et non de celui du premier verre ?
Ce serait casser une dynamique économique qui fait vivre le monde rural et qui apporte plusieurs milliards d’excédents à notre balance commerciale.
Le fait même d’avoir proposé cet élément dans l’article 4 témoigne d’un certain état d’esprit et d’un regard particulier en contradiction complète, d’ailleurs, avec les propos qui ont été tenus lors du Salon de l’agriculture par le chef de l’État et le Premier ministre, lequel a bien affirmé que la loi Évin ne serait pas renforcée.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, très honnêtement, je pensais que nous ne reprendrions pas le débat picrocholien de la loi Évin dans le cadre de la discussion d’une loi relative à la santé publique.
Nos inquiétudes résultent en effet d’amendements, concernant notamment le message sanitaire, qui me semblent inappropriés aujourd’hui.
Souvenez-vous : la loi Évin, en 1991, n’était bien évidemment pas une loi parfaite puisqu’elle n’évoquait pas internet – qui en était à ses balbutiements – mais son message n’en était pas moins très clair.
C’était celui de l’époque, de M. Évin lui-même, et j’ai cru comprendre que c’est aussi le message sur l’agriculture du gouvernement auquel vous appartenez et de son Premier ministre : ce n’est pas le produit qui est un poison mais son abus.
Éviter le binge drinking et l’alcoolisation des jeunes n’implique pas de remettre en cause ce patrimoine universel qu’est le vin : il faut simplement éviter les signaux négatifs.
Un message défini par le seul ministère de la santé et non par le Parlement – qui a compétence pour cela –, c’est évidemment très réducteur.
Je reviens sur un élément déjà débattu antérieurement : le conseil de la modération. Pourquoi l’avoir supprimé – un amendement a été rédigé en ce sens – alors qu’il permettait de réunir l’ensemble des intervenants afin de définir une politique équitable qui permette de parler du vin sans parler du caractère dangereux de ce produit ? Aujourd’hui, le message est très clair : l’abus d’alcool est dangereux. On ne dit pas : le vin est dangereux. Il convient de garder ce message.
Certains amendements concernant la publicité, dont nous discuterons tout à l’heure, seraient totalement inapplicables compte tenu de la proximité des établissements scolaires. Dans certaines villes, il y a des établissements scolaires dans à peu près tous les quartiers. L’adoption de tels amendements reviendrait purement et simplement à interdire toute publicité par affichage. Telle n’était pas la volonté du législateur initial et ce ne doit toujours pas être la nôtre, aujourd’hui, dans un texte de santé publique.
Madame la ministre, la loi Évin de janvier 1991 a encadré toute la promotion du vin, avec l’obligation d’émettre un message sanitaire concomitamment à la diffusion de la publicité du produit.
Depuis vingt-quatre ans, cette mesure, issue d’un équilibre accepté par tous, a permis de ne pas confondre dégustation et enivrement.
Depuis vingt-quatre ans, les vignerons de France ont assuré la promotion de leurs produits tout en rappelant la dangerosité de l’abus d’alcool. Aucun ne confond l’alcoolisme et la production de vins de qualité.
Or la commission a modifié cette disposition. Par un amendement, elle a transféré au ministère de la santé la définition du message sanitaire figurant sur les bouteilles d’alcool.
Le ministère pourrait alors définir par arrêté le contenu du message sanitaire devant figurer dans les publicités des boissons alcoolisées, cet arrêté pouvant adapter ce message sanitaire « en fonction des supports et des modalités techniques de diffusion du message publicitaire ou promotionnel, du public visé ainsi que des boissons concernées ».
Cette disposition permettrait au ministère de revenir sur le message édicté par la loi Évin concernant la consommation d’alcool et précisant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.
Bientôt, ce ne sera plus l’abus de consommation qui sera considéré comme dangereux mais la consommation elle-même. Notre viticulture ne pourra qu’en pâtir.
Outre l’importance de la vigne et du vin dans notre civilisation, outre l’art de vivre et la promotion du goût – qui sont la passion de nombre de nos concitoyens –, l’entretien des paysages, l’aménagement de l’espace, le développement économique ou encore l’équilibre de la balance commerciale constituent autant d’éléments militant en faveur d’une production d’excellence et d’une consommation responsable.
Il faut donc en rester à un système qui, depuis 1991, a permis d’allier la qualité de vie et la promotion sanitaire dans notre pays.
Je trouve que la proposition qui nous est faite est un non-sens économique et, surtout, culturel.
Je suis étonnée que Mme la ministre, qui a été députée d’un secteur viticole, nous fasse une telle proposition.
En outre, il s’agit d’une atteinte à la liberté d’entreprendre et au patrimoine culturel viticole. Dois-je vous rappeler, madame la ministre, que plusieurs AOC d’Indre-et-Loire seront évidemment touchées par vos décisions ?
Il s’agit aussi d’une remise en cause de la loi Évin, qui supprime la notion de modération et donc de prévention, sur laquelle les vignerons travaillent beaucoup.
Je ne vois pas pourquoi vous voulez stigmatiser les consommateurs et la filière viticole. Votre décision, à mes yeux, sera inopérante.
Je ne pense pas que nous soyons confrontés à un surinvestissement publicitaire sur internet ou via l’affichage, et je suis tout à fait convaincue que les vignerons et les viticulteurs en général sont soucieux de mettre en avant la modération en expliquant aux consommateurs combien il importe de ne jamais abuser.
Madame la ministre, toutes les sociétés humaines, à un moment de leur histoire ou constamment, ont utilisé des produits aux effets psychotropes.
En outre, la création d’une dépendance suppose toujours la rencontre d’une personnalité, d’un produit et d’une culture. Or, le vin est un produit de consommation civilisationnel et convivial, qui fait partie de la tradition gastronomique française. Pour le monde entier, il fait partie de notre culture.
Ce n’est pas parce que nous prendrons un verre de vin que nous deviendrons automatiquement dépendants.
S’il y a dépendance, ce sera d’ailleurs moins au vin qu’à l’alcool.
Autre élément de réflexion : la consommation aiguë et massive d’alcool chez nos jeunes provient de l’Europe du Nord et ne concerne pas le vin mais les alcools forts. La vodka, malheureusement le plus souvent non russe, est ainsi l’alcool le plus consommé dans le monde. Le danger résulte d’ailleurs plutôt de l’association, auprès des jeunes, en boîte de nuit, entre cet alcool et les boissons sucrées ou gazeuses.
Il est donc déraisonnable, madame la ministre, de valider dans votre texte l’association entre consommation et dépendance, entre habitude alimentaire et terrible esclavage des patients alcooliques.
J’ai prêté serment en homme libre au vin des rois et au roi des vins – que je vous invite à venir déguster en Champagne, chez nous, puisque je pense non seulement à mes collègues marnais mais aussi à mes collègues aubois.
C’est en homme libre que je défends notre culture et notre civilisation.
C’est en homme libre que je défends le travail de nos vignerons.
C’est en homme libre que je défends l’excellence rurale et gastronomique française.
C’est en médecin, madame la ministre, que je vous dis que les tannins contenus dans un verre de vin rouge pris chaque jour lors d’un repas constituent un élément protecteur contre les démences séniles.
De grâce, madame la ministre, retirez cet article !
Madame la ministre, les dispositions de l’article 4 visent à renforcer les moyens de lutte contre les nouvelles pratiques de la jeunesse en matière d’alcoolisation massive connues sous le nom de « beuveries express ».
Je souscris bien entendu à de telles mesures en faveur de la protection des plus jeunes face aux dangers de la consommation excessive d’alcool.
Pour autant que de telles dispositions soient nécessaires, il n’en demeure pas moins qu’elles doivent être accompagnées d’un volet relatif à la prévention et à l’information des consommateurs, notamment auprès des plus jeunes, tel que cela était le cas au sein du Conseil de la modération. En la matière, la répression ne peut être la seule réponse.
J’appelle d’ailleurs votre attention à ce propos, madame la ministre : cela reviendrait à remettre en cause les fondements sur lesquels repose la loi Évin, à savoir la prévention, l’information, l’éducation à une consommation modérée d’alcool, ce qui aurait des conséquences économiques sans précédent pour toute la filière viticole française.
Avec l’adoption de la loi Évin en 1991 et depuis lors, l’économie de la viticulture française a été profondément bouleversée.
Vouloir favoriser une logique prohibitionniste, comme le souhaitent certains parlementaires de votre majorité, en orientant notre politique de santé publique non plus contre l’excès de consommation mais contre la consommation elle-même, risque de se traduire par la suppression de tous les repères des consommateurs et de faire peser sur les exploitations viticoles françaises un poids que nombre d’entre elles ne pourront supporter.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, je vous demande donc de ne soutenir aucune disposition qui transformerait notre politique de santé publique de prévention en une politique de santé publique de répression…
…en matière de consommation d’alcool.
La France doit rester capable de continuer à favoriser le développement économique de la filière viticole. La viticulture française fait partie intégrante de notre patrimoine, elle est l’un de nos fleurons à l’étranger et participe dans une large mesure à notre balance commerciale. Votre gouvernement se félicite d’ailleurs du développement de l’oenotourisme.
Les viticultrices et les viticulteurs français sont des gens responsables, qui aiment leur métier et mettent en valeur nos terroirs. Ils doivent être en mesure de poursuivre leur travail sans subir de nouvelles contraintes. Vous ne pouvez les sanctionner injustement. La modération ; oui, la prohibition, non !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Nous entendrons les autres orateurs inscrits sur l’article 4 au début de la prochaine séance.
La parole est à Mme la ministre, qui souhaitait s’exprimer.
J’aurai l’occasion de clarifier ce soir la position du Gouvernement sur l’article 4 et sur les amendements qui ont été déposés. Mais ce n’est pas de cela que je voulais parler.
Je crois savoir que c’est aujourd’hui l’anniversaire de M. Jean-Pierre Door. Je voulais donc lui souhaiter un excellent anniversaire, lui qui est l’un de mes plus anciens adversaires dans l’hémicycle, et lui offrir cette boîte de chocolat, ce qui permettra de démontrer que je n’ai absolument rien contre le chocolat.
Applaudissements sur tous les bancs.
Merci, madame la ministre. Je pense que l’ensemble des collègues va se joindre à vous pour souhaiter un bon anniversaire à M. Door.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à la santé.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly