La séance est ouverte.
La séance est ouverte à seize heures.
J’informe l’Assemblée qu’un hommage aux victimes de l’attentat de Nice sera rendu en notre nom à tous par le président de l’Assemblée nationale en séance publique, mercredi 20 juillet à quinze heures, avant les questions au Gouvernement.
Le président de l’Assemblée nationale a reçu du Premier ministre, le 16 juillet, communication du décret du Président de la République complétant le décret du 17 juin 2016 portant convocation du Parlement en session extraordinaire.
L’ordre du jour appelle la discussion, en lecture définitive, du projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2015 (no 3965).
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mesdames et messieurs les députés, en application du dernier alinéa de l’article 45 de la Constitution, votre assemblée examine aujourd’hui en lecture définitive le projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2015. Je voudrais revenir sur certains sujets abordés au cours des discussions sur l’exécution de ce budget 2015 car ils appellent à mon sens plusieurs précisions.
Tout d’abord, la Cour des comptes a beaucoup été citée, en particulier son analyse de l’évolution du solde budgétaire qui, retraitée de certains événements exceptionnels, ne s’améliorerait pas entre 2014 et 2015.
Une première précision : la Cour ne remet pas en cause les chiffres d’exécution. C’est vrai pour le solde budgétaire, puisqu’elle a elle-même certifié les comptes de l’État, et c’est également vrai pour le solde de toutes les administrations publiques, calculé en toute indépendance par l’INSEE. Les comptes sont donc sincères et nous nous appuyons sur des chiffres incontestables.
La Cour calcule cependant une évolution corrigée par certains événements, je dis bien certains seulement, qu’elle qualifie d’exceptionnels. Mais les événements exceptionnels, c’est la vie même des finances publiques ! L’année dernière, nous avons dû faire face à des dépenses imprévues ou encore à une inflation plus basse qui a pesé en partie sur les recettes. En quoi ces événements sont-ils moins exceptionnels que d’autres ? En quoi ne serait-il pas légitime de corriger l’évolution du solde budgétaire de ces événements ? Vous voyez donc que cet exercice est subjectif. Je préfère donc m’en référer à la comptabilité de l’État et à l’article 1er de ce projet de loi : le déficit budgétaire baisse objectivement de 15 milliards d’euros.
Par ailleurs, les mêmes commentaires que l’an dernier sont revenus sur le fait que l’État ne participerait pas à l’effort de réduction des déficits publics. Je vous rappelle que l’État prend à sa charge la grande majorité des politiques économiques qui sont menées. En particulier, c’est bien le budget de l’État qui compense systématiquement les pertes de recettes de la Sécurité sociale. En 2015, près de 5 milliards d’euros ont ainsi été compensés.
J’insiste sur cette compensation. J’insiste aussi sur les transferts massifs de l’État vers la Sécurité sociale ou les administrations publiques locales. Il ne faut donc pas comparer sans analyse plus approfondie l’évolution des différents soldes, sinon le risque est grand de faire des raisonnements non pertinents.
Sur l’évolution de la dépense de l’État, j’ai également entendu bien des remarques. Mais les faits sont là : non seulement le niveau de dépenses voté en loi de finances a été respecté, mais il a encore été réduit de 700 millions d’euros en cours d’exécution, et cela, sans reports de charges supplémentaires.
La richesse de ce projet de loi, c’est aussi de vous présenter les résultats en comptabilité générale de l’État. Non seulement les dépenses de l’État sont en diminution, mais ce bon résultat s’est accompagné de l’apurement de la dette de l’État envers la Sécurité sociale et également d’une baisse globale des reports de charges.
Un mot également à propos des comparaisons européennes et du fait que la France serait à la traîne. Rappelons tout de même que, sur le plan économique, la richesse créée en France – le PIB – a retrouvé son niveau d’avant crise et l’a dépassé depuis. À l’inverse, la zone euro en moyenne n’y est pas encore. Et c’est notamment parce que nous avons adapté le rythme de réduction du déficit public au contexte économique que nous avons retrouvé ce niveau d’avant crise.
Dernier point et non des moindres : la dette. Certains d’entre vous ont critiqué, voire dénoncé un prétendu artifice comptable sur l’utilisation des primes à l’émission. Mais il n’y a aucun trucage dans le calcul de la dette publique. Ce calcul est réalisé par l’INSEE, institut indépendant, et certifié par Eurostat, qui n’a émis aucune réserve sur ce sujet.
Je ne vais pas entrer à nouveau dans les détails, mais le procédé utilisé n’est pas propre à la France. Nos voisins comme l’Espagne ou le Royaume-Uni ont également enregistré en 2015 un volume équivalent – 1 point de PIB – de ce que l’on appelle les primes à l’émission. Le recours à ce procédé n’a pas pour but de minorer le volume de dette mais bien d’en assurer la liquidité. En outre, et j’insiste sur ce point, ces primes ont servi à réduire le volume de titres de dette à court terme, ce qui limite l’exposition de la France a une remontée des taux. C’est donc également une décision dans l’intérêt du contribuable.
Pour conclure, je tiens à rappeler le résultat principal de cette exécution 2015, car à écouter les précédents débats, on en oublie l’essentiel : le déficit public baisse de manière ininterrompue depuis le début de la législature, signe que les comptes publics sont bien en train d’être remis en ordre, n’en déplaise aux Cassandre.
Voilà pour ce qui est des quelques précisions que je souhaitais apporter pour éclairer ce dernier vote sur le projet de loi de règlement et d’approbation des comptes qui, malgré les tentatives d’en faire un objet de clivage politique, se contente de constater l’exécution et de passer des opérations de régularisation comptable. Comme la semaine dernière et celle d’avant, je vous invite donc à adopter ce projet de loi, cette fois-ci dans sa version définitive.
La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui en lecture définitive le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015 proposé par le Gouvernement.
Cette lecture définitive intervient dans un contexte particulier : il s’agit de la première séance de notre assemblée depuis la barbarie qui a été perpétrée à Nice, le 14 juillet, jour de la fête nationale. Nos pensées vont aux victimes. En cet instant grave et douloureux, nous avons tous entendu l’appel du Président de la République à l’unité et à la cohésion de notre pays.
La séance de ce jour porte sur le vote final de la loi de règlement pour 2015. Voter ce projet de loi de règlement, c’est dire si oui ou non le budget 2015 de l’État a été exécuté conformément à ce que nous avions voté en loi de finances. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire à deux reprises dans cet hémicycle, la réponse est oui. Et c’est pour cela, mes chers collègues, que je vous invite à voter ce projet de loi de règlement.
Lors de la première lecture, notre Assemblée a adopté deux amendements. Le premier amendement, déposé par le Gouvernement, limitait le solde créditeur reporté d’un compte de commerce lié au secteur de la défense. Autrement dit, la Défense récupère 77 millions d’euros par rapport à ce que le ministère de l’économie et des finances souhaitait initialement reprendre. Pour ma part, je m’en félicite.
Un second amendement, adopté en commission à l’initiative de Monique Rabin, rapporteure spéciale des crédits du commerce extérieur, prévoyait la création d’un nouveau document de politique transversale relatif au développement international de l’économie française et au commerce extérieur. Il est bienvenu que nous puissions avoir une vision globale et synthétique des efforts budgétaires consentis pour le commerce extérieur et des résultats obtenus.
Le 7 juillet dernier, le Sénat a rejeté, en première lecture, ce projet de loi. Puis la commission mixte paritaire a échoué. Le 12 juillet, l’Assemblée nationale a voté à nouveau le projet de loi de règlement, conformément à ce qu’elle avait adopté en première lecture. Mais le lendemain, soit le 13 juillet, le Sénat l’a de nouveau rejeté. Par conséquent, nous sommes une nouvelle et dernière fois saisis de ce texte. Je vous invite donc à réitérer le vote qui avait été le vôtre en première et deuxième lecture.
Ce projet de loi, rappelons-le, est marqué par trois axes majeurs. Le premier concerne la baisse du déficit public. Cette baisse a été réelle, elle a été enregistrée en milliards d’euros sonnants et trébuchants, cela a été confirmé par la comptabilité nationale, et a été plus importante que ce que nous avions prévu en loi de finances initiale.
Deuxième axe : cette baisse du déficit s’est faite sans augmentation des prélèvements obligatoire ; ils ont même un peu baissé. C’est la première fois que cela se produit depuis 2000. Il est donc important de le souligner. Troisième axe : la baisse des dépenses publiques ne s’est pas faite au détriment des priorités qui ont été fixées par le Gouvernement et notre majorité.
Je souhaiterais, parce que j’ai entendu beaucoup de choses, notamment de la part de ceux qui souhaiteraient faire naître une polémique, rappeler quelques chiffres qui montrent que ces priorités ont été respectées en dépit de l’effort que nous avons fait s’agissant des dépenses publiques.
Entre 2007 et 2012, les plafonds d’effectifs de la police nationale et de la gendarmerie nationale, c’est-à-dire les effectifs maximums autorisés par le Parlement, ont baissé de 12 519 équivalents temps plein travaillé sur l’année – les fameux ETPT : ainsi, si vous travaillez à temps plein mais seulement depuis le 1er juillet, vous comptez pour 0,5 dans le comptage de l’État. Ce chiffre signifie concrètement que le Parlement a autorisé des plafonds d’effectifs en forte réduction. Cette baisse du plafond s’est traduite par une baisse réelle des effectifs à hauteur de 9 780 ETPT.
Depuis 2012, nous avons souhaité rehausser ces plafonds, parce que nous considérions qu’il était inacceptable de demander plus aux forces de l’ordre en leur donnant moins de moyens. Entre fin 2012 et fin 2015, les plafonds de la police nationale et de la gendarmerie nationale ont été augmentés de 3 002 ETPT.
Comme un recrutement ne se fait pas du jour au lendemain, car la procédure de recrutement est suivie, et c’est bien naturel, de la procédure de formation, cela s’est traduit par une augmentation des effectifs de la gendarmerie et de la police nationale de 1 901 ETPT. Sur la seule année 2015, ce sont 1 508 postes à temps plein qui ont été créés et pourvus – j’insiste sur ce dernier mot, car c’est un point qui peut donner lieu à débats. C’est donc bien une augmentation des effectifs, des agents présents, qui a été réalisée.
Cette augmentation s’est accompagnée d’un renforcement des moyens financiers. Ainsi, les budgets de la gendarmerie et de la police nationale ont augmenté, depuis 2012, plus vite que l’ensemble des dépenses publiques, alors qu’ils avaient progressé quasiment deux fois moins vite que celui-ci entre 2007 et 2012.
L’année 2015 a également renoué, et je tiens à le saluer en présence de M. le secrétaire d’État, avec le déblocage de fonds pour l’immobilier de la gendarmerie nationale, afin de résorber des situations indécentes constatées dans les casernes. Plus de 70 millions d’euros ont été débloqués à cette fin.
La sécurité de notre pays passe aussi par notre défense. Sur ce point aussi, je tiens à être très claire. Entre 2007 et 2012, les plafonds d’effectifs de la défense ont baissé de 36 709 ETPT, ce qui s’est traduit par une baisse réelle des effectifs de 34 426 ETPT. Lors de la révision de la loi de programmation militaire, nous avons acté la fin de la baisse des effectifs de la défense. Concrètement, ces suppressions d’effectifs devaient s’élever à 25 794 équivalents temps plein au sein de ce ministère sur la période 2015-2018. Or, depuis l’adoption du second plan de lutte antiterroriste de novembre 2015, la programmation prévoit la création de 2 300 équivalents temps plein. Le total s’élève à 28 094 équivalents temps plein.
Donner des moyens ne saurait certes régler toutes les questions et les difficultés qui traversent et heurtent profondément notre société, mais notre responsabilité de parlementaires est aussi d’allouer des moyens aux priorités que nous nous fixons. Cela a été le cas en 2015c comme les années précédentes et plus encore, face notamment aux attaques terroristes que notre pays a subies. Ces priorités peuvent, bien entendu, évoluer au fil du temps, pour la simple raison que la physionomie du monde bouge aussi. Cela fera partie des enjeux de la discussion budgétaire que nous aurons à l’automne prochain.
Pour ce qui est de l’exercice 2015 et de ce projet de loi de règlement, je vous invite, mes chers collègues, à voter comme en nouvelle lecture, c’est-à-dire à adopter de manière définitive le texte que notre assemblée avait alors adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous sommes réunis pour cette lecture définitive du projet de loi de règlement pour 2015, dans les circonstances particulières qu’a rappelées Mme la rapporteure générale et qui nous obligent à la dignité et à la responsabilité.
Sur ce projet de loi de règlement, nous avons déjà tout dit en première, puis en deuxième lecture. J’ai du reste déjà dit la semaine dernière que cette deuxième lecture ne s’imposait pas. Vous avez procédé, monsieur le secrétaire d’État, à certaines mises au point utiles, qui figureront au compte rendu de nos débats et sur lesquelles je ne reviendrai pas davantage.
Si nous sommes ici aujourd’hui, c’est que, contrairement à des traditions anciennes, mais rompues voilà déjà quelques années, ce débat sur la loi de règlement est instrumentalisé à d’autres fins, dans le but de mettre en cause la politique générale, économique et budgétaire du Gouvernement – les membres de l’opposition ne s’en sont du reste pas cachés.
Comme vous l’avez en effet rappelé, monsieur le secrétaire d’État, ce qui nous est présenté en comptabilité générale et, surtout, en comptabilité budgétaire, n’est pas contesté dans les chiffres. Les comptes sont certifiés par la Cour des comptes, avec certes encore des réserves, mais inférieures à ce qu’elles étaient dans le passé, et l’exécution, comme vous l’avez rappelé, madame la rapporteure générale, est conforme à l’autorisation parlementaire donnée en loi de finances rectificative, laquelle intégrait des décrets d’avance pris dès le début de l’année 2015 pour les raisons que nous savons et que vous avez rappelées, liées notamment à la sécurité et sur lesquelles notre commission avait émis un avis. Rien ne peut donc s’opposer juridiquement à l’adoption de ce projet de loi de règlement.
Cela signifie que la question est ailleurs. Pourtant, tout a été dit, au cours de nos débats, sur la signification de ces chiffres.
Les recettes sont finalement supérieures de 1,2 milliard d’euros aux prévisions, témoignant ainsi de la prudence et de la sincérité des hypothèses sur lesquelles le Gouvernement construit ses budgets, ce qui représente une rupture par rapport au passé. Les dépenses, inférieures de 1,8 milliard à celles de 2014, sont certes probablement supérieures à celles que nous avions inscrites en loi de finances, mais pour des raisons sur lesquelles je reviendrai et que vous avez parfaitement décrites, madame la rapporteure générale. Le solde budgétaire est inférieur de 15 milliards d’euros à celui de l’année précédente ; de 3 milliards hors dépenses exceptionnelles du programme d’investissements d’avenir ; et de 4 milliards au solde prévisionnel de la loi de finances initiale. La trajectoire de redressement des finances publiques que nous avions votée en loi de programmation des finances publiques a été respectée, de même que nos engagements européens, à la suite des discussions que nous avons eues avec la Commission européenne, avec laquelle nous avions quelques divergences.
Au vu de ces chiffres, rien ne devrait donc plus s’opposer à l’adoption de ce projet de loi de règlement.
Si nous sommes là, c’est probablement qu’en première comme en deuxième lecture, ainsi qu’en lecture définitive, comme l’actualité le montre hélas sur d’autres sujets, l’opposition a des problèmes avec la vérité – en l’espèce, avec la vérité des chiffres, comme peut-être avec son histoire et avec son propre bilan.
Or, la vérité des chiffres et la vérité politique obligent à dire qu’en 2015, nous avons à la fois maîtrisé l’évolution de la dépense publique, qui a évolué en moyenne de 0,9 point, contre 3,6 points pour le quinquennat précédent, et avons dans le même temps fait baisser le déficit public et les prélèvements obligatoires, tout en remettant l’économie française sur le chemin de la croissance. Comme je l’ai souligné en deuxième lecture, nous l’avons fait dans un contexte économique peu propice à l’ajustement budgétaire, en raison d’une inflation faible et d’une croissance certes repartie, mais encore insuffisante.
Nous avons surtout fait des économies : pas n’importe lesquelles, pas n’importe comment, mais en sachant répondre aux circonstances ! Cet effort avait commencé avant 2015 – vous avez eu raison madame la rapporteure générale, de rappeler l’ensemble de ces chiffres – en prenant en compte les enjeux de la défense et de la sécurité sans toutefois abandonner la préparation de l’avenir et la préservation de notre cohésion sociale et nationale.
Oui, nous avons su tenir la dépense publique et faire des économies, en sachant créer, plutôt que supprimer, des emplois de policiers et de gendarmes et en sachant créer et maintenir la loi de programmation militaire, ce qui n’avait jamais été fait auparavant.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste, écologiste et républicain votera ce projet de loi de règlement.
Les moments tragiques que vit notre pays nous conduisent à rappeler ici, tous ensemble, combien la démocratie nous est précieuse et combien elle exige de notre part de dignité dans le débat public. C’est ce qui nous rassemble cet après-midi.
La démocratie est née de débats budgétaires et, aussi aride que soit la matière, ceux-ci sont essentiels à la vie de la démocratie – dans la préparation du budget, dans son exécution et dans le compte rendu que l’exécutif en fait auprès du Parlement. Le débat sur la loi de règlement est donc bien un débat important, au cours duquel des questions peuvent et doivent être posées. C’est le débat de la loi de règlement tel que nous l’avons eu ces dernières semaines. Ce sont aussi les commentaires et les rebonds de l’analyse économique, financière et budgétaire de ces derniers jours.
Qu’il me soit donc permis de dire, monsieur Lefebvre, dans cette intervention qui prend place au terme de la discussion de la loi de règlement, que sur les chiffres, la majorité et l’opposition n’ont décidément pas la même lecture. Plus exactement, les chiffres, y compris ceux que vous présentez vous-mêmes dans vos documents, sont une réalité dure.
Le 14 juillet, le Président de la République a osé affirmer que les prélèvements obligatoires baisseraient pour les entreprises et les ménages. La réalité – est-il besoin de le rappeler, car vous le savez tous parfaitement ? – est qu’en 2011, dernière année pleine du mandat précédent, les prélèvements obligatoires étaient, dans notre pays, inférieurs à 43 % du produit intérieur brut et qu’en 2015, données sur lesquelles nous délibérons à l’occasion de ce projet de loi de règlement, ils s’élèvent à près de 45 % du PIB – 44,7 % précisément. J’ai du mal à considérer cela comme une baisse.
Pour ce qui est des ménages, gardez-vous de les confondre et de les tromper dans vos analyses. De fait, s’il y a eu des allers-retours de la part du Gouvernement à propos des prélèvements obligatoires sur les entreprises – et le retour a été meilleur que l’aller – la réalité a été très douloureuse pour un très grand nombre de ménages de notre pays, tout au long de ce mandat. Cette situation est très pénalisante sur le plan international. En effet, des prélèvements obligatoires supérieurs de dix points à la moyenne de l’OCDE pèsent sur la compétitivité de notre pays et sur notre avenir, y compris et particulièrement dans les périodes troublées que nous connaissons.
Quant à la dette, vous vous flattez aussi. La dette financière négociable était, comme le rappelle Mme la rapporteure générale, de 1 313 milliards d’euros en 2011 et de 1 576 milliards en 2015, et nous avons déjà évoqué le niveau record des primes d’émission. Tout cela ne signe pas une gestion remarquable de la dette.
Pour en revenir au projet de loi de règlement, je tiens à relever un point d’analyse très intéressant que Mme Rabault nous a livré dans son rapport et que nous avons déjà évoqué, mais qui est passé trop discrètement dans le débat et mérite d’être souligné, à savoir la faible part que représentent, du fait des initiatives prises par différents gouvernements, les cotisations patronales sur les salaires du niveau du SMIC : 10 % du salaire brut. C’est révélateur des priorités des pouvoirs publics, et l’on peut du reste contester cette smicardisation et cette tiers-mondisation de l’économie française.
Il est donc essentiel, d’un point de vue pédagogique, de dire et redire à nos concitoyens cette réalité claire, mais pas intuitive : un salarié français payé au SMIC et dont l’employeur paie les charges sociales françaises coûte aujourd’hui moins cher qu’un travailleur détaché venant d’un quelconque autre pays de l’Union européenne et payé au SMIC français avec les charges sociales du pays d’origine. Cela signifie donc bien que, dans notre pays, les problèmes d’emploi pour cette catégorie de population ne tiennent pas au niveau des salaires et des charges, mais bien à l’organisation du marché du travail, à la flexibilité de l’emploi et au droit du travail. C’est une réalité que vous vous êtes certes efforcés d’aborder avec le projet de loi El Khomri, certes insuffisant et mal défini, et qu’il est indispensable de partager avec nos concitoyens.
Je tiens à ce propos à dire solennellement, sans esprit de polémique, combien insatisfaisante est la réponse apportée par M. le Premier ministre à cet égard. Il a en effet déclaré, exprimant une vision de l’État que nous ne partageons pas, qu’il fallait « suspendre » la directive sur le travail détaché.
Qu’il faille, dans la révision engagée, défendre nos positions, différentes de celles d’autres pays, j’y souscris et je l’assume volontiers. Cependant, monsieur le secrétaire d’État, « suspendre » une directive, cela n’existe pas. C’est un terme inventé pour les besoins de la polémique et de la communication. Lorsque le Premier ministre de la République utilise ainsi des mots, des concepts juridiques qui ne se rapportent à rien, ce n’est pas sérieux. Or, monsieur le secrétaire d’État, l’action et la parole publiques exigent aujourd’hui beaucoup de sérieux, dans ce domaine comme dans d’autres. Lorsque le Premier ministre dit aux Français ce qui n’est pas, qu’il propose un objectif politique strictement impossible dans le cadre européen, c’est toute l’action publique que l’on abîme – et l’époque demande tout, sauf cela.
J’aimerais d’abord exprimer et transmettre, au nom des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, mes plus sincères condoléances à l’ensemble des familles touchées par l’odieuse tragédie niçoise du 14 juillet.
Aujourd’hui, c’est bien évidemment aux victimes, aux blessés et à leurs familles que nous pensons. Nous leur transmettons, bien entendu, l’expression de notre plus profonde solidarité face à cet acte d’une violence inouïe. Toute une ville, toute une région – ma région – tout un pays éprouvent une tristesse immense.
Malgré la rudesse des événements, malgré cette violence que l’on ne peut décrire, saluons les services de secours et de santé, une nouvelle fois exemplaires. Saluons les forces de l’ordre, qui ont agi avec courage et rapidité. Saluons les Niçois pour leur solidarité, cette entraide dont ils ont fait preuve face aux événements.
Difficile, dans ces conditions, d’aborder ce qui nous réunit aujourd’hui, à savoir l’examen, en dernière lecture, du règlement du budget et de l’approbation des comptes 2015. Je reprendrai de manière synthétique les deux interventions que nous avons déjà faites au cours de cet examen.
La réalité du pays est là : 6 millions de nos concitoyens sont au chômage, des territoires sont abandonnés. Pire, nous avons aujourd’hui bien du mal à identifier une cause commune, un ressort collectif auxquels pourraient adhérer nos compatriotes. Nous devons donc nous y atteler. Nous sommes dans une sorte d’impasse collective, qui alimente le rejet et la division.
Face à cela, les orientations budgétaires retenues ne nous semblent pas à la hauteur ; elles nous paraissent même de nature à aggraver ce ressentiment qui mine la cohésion sociale et le pacte républicain.
Le budget 2015 est marqué du sceau du bien mal nommé « pacte de responsabilité », ce pacte budgétaire qui vise à réduire inconditionnellement la fiscalité des entreprises, une réduction financée par le recul des services publics, de l’investissement local et de la sécurité sociale. Pourtant, cela fait des années que de tels cadeaux fiscaux sont accordés aux entreprises, avec des effets quasi invisibles sur l’emploi et l’investissement. Très clairement, la situation oblige à un changement de cap et réclame de l’imagination et de l’innovation.
Malgré cela, l’exécutif semble continuer dans cette voie sans issue après l’annonce de M. le Président de la République, qui veut renforcer le CICE – crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – dont le coût total pour nos finances publiques passerait ainsi à 25 milliards d’euros par an, près de deux fois plus que le déficit de la Sécurité sociale, alors que le Gouvernement annonce un plan de réduction des dépenses dans les hôpitaux publics de 3 milliards d’euros.
Ce faisant, l’impôt sur les sociétés, qui rapportait à l’État près de 50 milliards d’euros annuels, aura été divisé par deux au cours de ce quinquennat. Cela pose bien des questions. D’une part, au lieu de lutter contre cette concurrence fiscale européenne, notre pays prend en quelque sorte sa juste part dans cette déplorable compétition qui ruine le continent et tire le bien commun vers le bas. D’autre part, prétendre vouloir lutter contre les déficits publics et la dette tout en accordant 25 milliards d’euros annuels aux entreprises, sans contrepartie et surtout sans résultat, nous semble tout à fait contradictoire.
Par ailleurs, la multiplication des allégements fiscaux et sociaux sur les bas salaires risque de créer une trappe à bas salaires, puisque l’on renchérit toute augmentation de salaire. Or, nous avons un véritable problème de salaires dans notre pays : rappelons que le SMIC mensuel est de 1 135 euros, soit à peine 100 euros de plus que le seuil de pauvreté !
Enfin, nous assistons à un phénomène de transfert de la fiscalité : les impôts reposent de plus en plus sur les ménages et de moins en moins sur les entreprises. Ainsi, la diminution de la fiscalité des entreprises est d’abord compensée par la fiscalité indirecte, la TVA – l’impôt le plus injuste car le plus régressif. Cela n’est plus supportable.
Fondamentalement, aujourd’hui, c’est d’un budget d’émancipation dont a besoin notre pays, non d’un budget de soumission. Il nous faut rompre très clairement avec cette politique de l’offre qui ne mène nulle part.
En s’attaquant véritablement à cette finance prédatrice ; en refusant l’asservissement à l’égard des sacro-saints indicateurs de déficit et de dette publics ; en revenant sur le CICE ; en privilégiant les aides directes, ciblées vers les secteurs exposés à la mondialisation, conditionnées aux embauches et à l’investissement ; en orientant l’action de la Banque centrale européenne vers la transition ; en encadrant les rémunérations dans les entreprises pour garantir le pacte social ; en faisant sauter le « verrou de Bercy » pour améliorer la lutte contre la fraude fiscale ; en faisant la lumière sur les pratiques d’optimisation fiscale des entreprises ; en dénonçant les règles budgétaires européennes, qui gravent dans le marbre l’austérité, cette « saugrenuité » économique, nous parviendrons peut-être à redonner de l’air et de l’espoir à notre société.
Il n’est jamais trop tard pour le faire. La rentrée budgétaire sera la dernière occasion de ce quinquennat pour aller dans ce sens. Nous nous y emploierons.
Avant de commencer, vous me permettrez à mon tour d’avoir, au nom de mon groupe, une pensée très forte pour les victimes de l’attentat de Nice et pour leurs familles, ainsi que pour les forces de l’ordre et pour toutes celles et tous ceux qui ont contribué à entourer les personnes durement touchées.
Cela étant, le quotidien nous requiert – et c’est notre devoir. J’en viens donc au texte relatif au règlement du budget et à l’approbation des comptes pour l’année 2015.
Ce projet de loi de règlement, le dernier que nous examinerons sous cette législature, confirme, hélas, l’échec de la majorité à redresser notre pays.
En premier lieu, alors que le Gouvernement se félicite que le déficit soit facialement inférieur de 15,1 milliards d’euros à celui de 2014, nous devons constater qu’il n’a en réalité baissé que de 300 millions, après retraitement des éléments exceptionnels.
En second lieu, cette baisse modeste du déficit est surtout réalisée grâce aux efforts des collectivités locales, alors que la part de l’État ne diminue pas. Le groupe UDI dénonce la méthode du Gouvernement consistant à demander aux collectivités locales des efforts dont la brutalité a entraîné une baisse sans précédent de leurs investissements, sans contraindre l’État dans les mêmes proportions.
Faut-il ajouter que la dette de l’État, qui représente plus des trois quarts de la dette des administrations publiques, a atteint 1 576 milliards d’euros en 2015 et que, loin de décroître, comme l’avait promis le président François Hollande, elle continue d’augmenter de 48 milliards d’euros ?
La Cour des comptes souligne d’ailleurs que la dette française dépasse de près de vingt points celle de l’Allemagne et – c’est peut-être encore plus grave – de cinq points celle de la moyenne de la zone euro qui, elle aussi, évolue à la baisse.
Quant aux recettes fiscales, elles ont encore augmenté de 5,8 milliards d’euros par rapport à 2014, démentant une nouvelle fois la promesse de pause fiscale. Au total, les prélèvements obligatoires auront donc augmenté de 96 milliards d’euros sur la durée du quinquennat.
La Cour des comptes rappelle enfin que la maîtrise des dépenses publiques demeure partielle et que ces résultats restent fragiles. Alors que le Président de la République avait initialement promis de réaliser, en 2015, 21 milliards d’euros d’économies sur les 50 milliards du plan annoncé, il a progressivement, je devrais même dire « lentement mais sûrement », reporté cet effort vers la fin du quinquennat.
Ainsi, la Cour des comptes ne recense que 12 milliards d’économies en 2015 et, alors que 7,3 milliards d’euros d’économies devaient être réalisés sur les dépenses de l’État et de ses opérateurs, elle n’a identifié là que 1,7 milliard d’euros. Non seulement ces économies sont bien inférieures à l’objectif du Gouvernement, mais elles ne sont également, pour la majorité d’entre elles, pas reconductibles les années suivantes.
Le groupe UDI n’a cessé de demander au Gouvernement, depuis le début du quinquennat, de mettre en place des réformes structurelles touchant aussi bien la réforme de l’État et des collectivités territoriales que celles de la protection sociale et de la santé ou du paritarisme, sans oublier la gestion des ressources humaines ou la transition écologique – autant de chantiers que vous avez soit ignorés, soit contournés, sacrifiant le long terme qui conditionne l’avenir des plus jeunes à un court-termisme désolant parce que sans perspectives.
Mes chers collègues, à l’instar de la Cour des comptes, nous appelons le Gouvernement à un véritable effort de redressement de nos comptes publics, pour permettre à notre pays de renouer avec la compétitivité avec une croissance solide et durable et, donc, avec l’emploi.
En se refusant à prendre des mesures structurelles courageuses pour redresser notre pays, le Gouvernement fait encore un choix : or ce choix condamne un nombre toujours plus important de nos concitoyens au drame du chômage. Nous le déplorons et c’est la raison pour laquelle nous voterons contre ce projet de loi de règlement des comptes de l’année 2015.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
Je dirai quelques mots, puisque ce débat a été soulevé à plusieurs reprises. Oui, monsieur Mariton, les circonstances nous appellent à la dignité et à la responsabilité.
Je souhaite remercier Valérie Rabault d’avoir fait un point très précis des efforts que nous avons accomplis en matière budgétaire et d’effectifs. Je ne devrais du reste pas parler d’« efforts », puisqu’il s’agit des mesures prises en faveur des différents dispositifs liés à la sécurité.
Elle a également indiqué que cela ne suffisait pas. Concernant les moyens et les effectifs, des mesures sont encore à prendre, tandis que d’autres ont été prises : vous avez ainsi adopté trois textes donnant des moyens juridiques supplémentaires à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme.
Mais la dignité, monsieur Mariton, consiste aussi à ne pas dire n’importe quoi. Vous ne l’avez pas fait, je le reconnais. Mais puisque vous affirmez que le Premier ministre a tort lorsqu’il parle de suspendre une directive, que dire alors du président du parti auquel vous appartenez, qui a présidé aux destinées de notre pays et qui, lui, propose non seulement de suspendre des directives, mais également de ne pas respecter notre Constitution, en souhaitant l’adoption de mesures dont il sait pertinemment qu’elles lui sont contraires ! Il propose d’aller à l’encontre de traités européens ou de conventions internationales que la France a signés. Or la signature de la France engage tous les gouvernements – et, par conséquent, tous les présidents !
Il ne s’agit pas là de jouer à comptabiliser ceux qui proposent des mesures selon vous irréalistes, mais d’en rester à la vérité des faits. Le Conseil d’État s’est prononcé à plusieurs reprises sur des dispositifs dont chacun sait qu’ils sont contraires à la Constitution. L’émotion légitime que nous partageons ici ne doit pas nous entraîner à des outrances comme celles que l’on a malheureusement entendues ces derniers jours.
Sur le reste, le débat est légitime. Il y a des différences de points de vue : je les comprends et je les reconnais car elles sont la source de la démocratie. Mais, et nous avons souvent eu ce débat, le vote d’une loi de règlement n’est qu’une reconnaissance de la comptabilité, tenue rigoureusement, calculée par l’INSEE et Eurostat et certifiée par la Cour des comptes.
Je persiste donc à ne pas très bien comprendre le rejet d’une loi de règlement, même si je comprends qu’elle puisse susciter des débats. Ces débats ont eu lieu et vont trouver leur terme d’ici quelques minutes. Je remercie l’ensemble des orateurs qui sont restés dans les limites tout à fait normales d’un débat démocratique.
Je souhaite toutefois vous répondre d’un mot, monsieur Charroux, parce que vous êtes un participant assidu à nos débats – et ils ne sont pas si nombreux ! Il s’agit de ce que vous avez appelé le « verrou de Bercy » lorsque vous avez évoqué la lutte contre la fraude.
Ce terme est impropre. Un « verrou », cela suggère que l’on ferme quelque chose. Or, s’il existe en effet un monopole des poursuites en matière de fraude fiscale pour le ministère que je représente aujourd’hui, il ne constitue en aucun cas un verrou. Il s’agit d’un monopole donc, dont les dispositions ont d’ailleurs été modifiées récemment pour permettre à la justice de se saisir ou d’être saisie d’un certain nombre de situations.
Ce débat est normal, mais il ne faudrait pas l’aborder avec un a priori selon lequel ce « verrou » serait facteur de blocage et empêcherait de poursuivre les fraudes. Nous avons eu l’occasion de communiquer largement sur les résultats du travail de nos administrations sur ce sujet. Nous aurons l’occasion d’en reparler, puisque le Conseil constitutionnel a rendu des décisions qu’il nous faudra intégrer dans nos réflexions. Elles sont d’ailleurs plutôt rassurantes concernant l’avenir des procédures que nous utilisons.
Je voudrais juste rappeler deux points. D’une part, lorsque la justice est saisie, les procédures sont deux à dix fois plus longues que lorsqu’elles sont conduites par l’administration, ce dont on ne peut se réjouir. D’autre part, les peines prononcées par la justice sont presque toujours inférieures aux pénalités et sanctions infligées par l’administration. La procédure en justice comporte donc peut-être une dimension publique d’exemplarité, je vous le concède, mais en termes d’efficacité, de volume et de rapidité, on voit qu’il ne faut pas aborder ce débat avec des a priori.
Je souhaitais revenir sur ce point, parce qu’il s’agit d’un sujet important : l’équité fiscale contribue à cimenter le sentiment républicain, qui est parfois remis en question aujourd’hui.
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi tel qu’il résulte du texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.
Le projet de loi est adopté.
La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à seize heures cinquante.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, mesdames et messieurs les députés, avant d’engager la discussion sur le texte, je voudrais évoquer le terrible attentat qui nous a frappés le 14 juillet à Nice.
Ce sont des enfants, des femmes et des hommes qui ont été frappés avec une violence inouïe alors qu’ils partageaient collectivement un moment de fierté et de joie, un moment paisible. À travers leur chair, c’est aussi un symbole qui a été frappé : celui de la Nation réunie le 14 juillet, date qui nous rappelle notre histoire et le combat de la France pour les libertés. Ce sont ces libertés qui ont été attaquées, et aussi notre unité.
Notre défi collectif, c’est de nous défendre sans céder sur nos valeurs. Notre devoir, c’est de protéger l’idée de la France, la vocation de la France, c’est-à-dire ses libertés.
Cela passe notamment par la liberté de création et la liberté de diffusion, proclamées et garanties dans les deux premiers articles de la loi relative à la création, à l’architecture et au patrimoine, à laquelle nous avons oeuvré ensemble et qui a été promulguée le 8 juillet. Car notre sécurité à tous sera plus forte quand chacun d’entre nous comprendra qu’il est à la fois acteur et prescripteur de la résilience et de la force de résistance de la société.
Notre société sait que la création, par sa capacité d’interrogation et de rassemblement, est le bastion irréductible où réside la force de notre pays. Je pense aussi à ces festivals, à ces artistes qui rendent hommage aux victimes et qui rassemblent plus que jamais.
La liberté d’information est au coeur de la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui. Je vois à cet égard un fil avec ce qui a été fait pour la liberté de création et de diffusion.
Cette nouvelle lecture de la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias vient après l’échec de la commission mixte paritaire du 14 juin dernier. Il est vrai que les positions exprimées par le Sénat, notamment sur la question de la protection du secret des sources des journalistes, divergeaient très largement de celles adoptées à l’unanimité par votre assemblée.
Il faut que la loi garantisse et protège l’indépendance de l’information diffusée par les médias. Ces garanties sont essentielles pour la vitalité de nos démocraties, mais aussi pour les médias eux-mêmes. C’est bien tout l’enjeu de la proposition de loi défendue par Patrick Bloche, qui entend graver dans notre droit des principes forts pour la liberté et le pluralisme de l’information.
Au terme de la première lecture à l’Assemblée, le 7 mars 2016, et au Sénat le 26 mai, des dispositions importantes ont été adoptées, ce dont je me réjouis.
J’évoquerai d’abord la création d’un nouveau droit d’opposition pour l’ensemble des journalistes de tous types de médias. Cela faisait longtemps que la loi n’avait pas créé de droit nouveau pour les journalistes dans l’exercice de leur profession. C’est pourquoi je me réjouis avec vous que la proposition de loi crée ce nouveau droit : elle étend à l’ensemble des quelque 36 000 journalistes les principes qui prévalent déjà pour ceux de l’audiovisuel public, en leur donnant le droit de refuser une atteinte à leur travail au nom des intérêts des annonceurs ou des actionnaires.
C’est la raison pour laquelle, dans les médias qui n’en sont pas déjà dotés, les éditeurs et les journalistes sont invités à adopter des chartes définissant les règles de déontologie sur lesquelles ils s’engagent vis-à-vis de leur public. Il est important que ces chartes déontologiques ne soient pas en retrait par rapport aux droits et devoirs que les journalistes considèrent historiquement comme des lignes rouges en matière professionnelle, comme la stricte distinction entre le travail de journaliste et la communication.
En outre, afin de couvrir tous les cas de figure possibles et pour éviter tout vide juridique, je présenterai un amendement qui permettra aux journalistes et aux entreprises éditrices de se référer, en l’absence de charte conclue à la date d’entrée en vigueur de la disposition, aux déclarations et usages professionnels en vigueur.
Cependant, pour ne pas créer de confusion entre la déontologie professionnelle des journalistes et d’autres sujets soumis à la négociation sociale dans l’entreprise, nous préconisons que le comité d’entreprise soit « informé » annuellement du bon respect de la charte et non pas « consulté », ce qui pourrait le faire sortir de ses attributions.
Cette proposition de loi comporte aussi des dispositions spécifiques adaptées à la régulation de l’audiovisuel.
Le secteur audiovisuel fait en effet l’objet de modalités de régulation particulières, sous l’égide du Conseil supérieur de l’audiovisuel – CSA. Le texte de votre commission reprend celui issu de la première lecture, et je m’en réjouis car sont ainsi reprises des avancées et des garanties nouvelles. Je vous proposerai simplement deux amendements de précision, en particulier pour mieux cerner les programmes concernés dans le champ des missions de l’instance de régulation.
Certaines dispositions issues du débat au Sénat ont été maintenues par votre commission. C’est un choix d’ouverture qui me semble bienvenu sur le fond des mesures conservées : je pense en particulier à l’article 10 ter nouveau qui, après une discussion qui a couvert plusieurs textes législatifs, introduit une disposition relative à la reprise de la numérotation des chaînes de la TNT par les distributeurs de services.
S’agissant des comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes, le retour au texte de l’Assemblée nationale me semble également bienvenu. Nous aurons l’occasion d’examiner plusieurs amendements qui permettent de parfaire cette novation importante de la proposition de loi. Ces comités pourront se saisir et intervenir à tout moment auprès des directions des médias concernés et le CSA devra tenir compte de leurs avis.
J’en viens au renforcement de la protection des sources des journalistes.
La proposition de loi issue du débat à l’Assemblée nationale représentait une avancée majeure sur le secret des sources des journalistes, grâce notamment à l’adoption de l’amendement que je vous avais proposé.
Rappelons que la loi du 4 janvier 2010 est, de manière notoire, estimée insuffisamment protectrice par de nombreuses organisations de journalistes mais aussi d’éditeurs de presse qui demandaient qu’elle soit améliorée – une demande entendue par le Président de la République puisqu’une telle réforme figurait dans ses engagements de campagne.
Cependant, le débat au Sénat s’est soldé par un très net recul sur cet enjeu démocratique majeur. L’échec de la commission mixte paritaire est essentiellement lié à ces dispositions du texte pour lesquelles la majorité sénatoriale s’est opposée à toute tentative de compromis. Votre commission a donc décidé de réintroduire le dispositif voté à l’unanimité par l’Assemblée nationale, ce dont je me réjouis.
Elle a notamment rétabli deux éléments fondamentaux : l’intervention préalable du juge des libertés et de la détention pour autoriser les mesures d’enquête portant sur les sources des journalistes ; et la protection des journalistes contre d’éventuelles poursuites pour recel de violation du secret professionnel, du secret de l’instruction ou d’atteinte à la vie privée, ce qui est déterminant pour la liberté de l’information.
Pour autant, et c’est le sens des amendements que je défendrai, le Gouvernement souhaite le rétablissement de dispositions adoptées en première lecture, afin de garantir l’équilibre et la cohérence du texte que je vous avais présenté et que vous aviez adopté.
Il s’agit tout d’abord d’harmoniser à sept ans le quantum de peine qui permet de mesurer la gravité des délits dont la prévention ou la répression peut justifier que le secret des sources soit levé. Cette modification me semble nécessaire pour concilier la protection de la liberté d’information et les exigences de sûreté et de sécurité nationales.
Il s’agit par ailleurs de prévoir que ces mesures d’enquêtes puissent intervenir pour la prévention ou la répression de ces délits, mais étant entendu qu’en matière de répression, la nécessité de faire cesser le délit en train d’être commis ou le risque élevé de le voir se reproduire devraient être des éléments pris en compte par le juge lorsqu’il apprécie la nécessité et la proportionnalité des mesures.
Mesdames et messieurs les députés, cette proposition de loi constitue je crois une avancée majeure pour l’activité professionnelle des journalistes et des rédactions, et donc pour notre démocratie. Elle permet, et nous savons combien cela est nécessaire, d’engager la réflexion sur la déontologie de l’information dans chaque entreprise de média.
Dans l’environnement médiatique foisonnant que nous connaissons aujourd’hui, les médias professionnels qui emploient des journalistes pourront ainsi offrir à leur public une garantie supplémentaire quant à l’honnêteté de l’information et mener ce débat au sein de leurs entreprises. Grâce à ce texte, les professionnels pourront renforcer leur crédibilité et la qualité de leur relation avec nos concitoyens.
De même, le renforcement de la protection du secret des sources et la protection des lanceurs d’alerte facilitent l’accès à l’information pour les journalistes, qui doivent pouvoir enquêter, collecter, vérifier et diffuser des éléments en toute indépendance. C’est une mesure nécessaire. Pour ceux qui ont pu en douter lorsque les débats sur cette proposition de loi ont commencé, la réalité du contexte économique dans lequel l’information est recueillie et diffusée s’est rappelée à nous au cours du cheminement de nos discussions : les Panama Papers nous ont ainsi rappelé la nécessité d’adapter la protection des journalistes à ces réalités. Aussi, il faut s’en féliciter, le législateur est pleinement dans son rôle lorsqu’il permet aux citoyens d’accéder à une information pluraliste et indépendante.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Patrick Bloche, président et rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comment ne pas traduire, ici et à cet instant, après vous, madame la ministre, l’intense émotion qui nous étreint à la pensée des femmes, des hommes et peut être encore plus des enfants qui ont perdu la vie à Nice, le jour de la fête nationale, victimes de l’insoutenable barbarie d’un terroriste ?
Que notre débat cet après-midi dans cet hémicycle témoigne de notre détermination à faire vivre la démocratie parlementaire tout comme la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias que veulent précisément abattre les assassins de Charlie, du Bataclan, des terrasses parisiennes et, aujourd’hui, de la Promenade des Anglais !
Nous sommes donc réunis cet après-midi pour examiner en nouvelle lecture la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias. En effet, la commission mixte paritaire réunie le 14 juin dernier pour examiner ce texte n’est pas parvenue à un accord.
Sur les 31 articles que comporte la proposition de loi, 21 restent en discussion pour cette nouvelle lecture. Parmi ces derniers, neuf n’ont fait l’objet d’aucune modification lors de l’examen de la proposition de loi en commission, il y a deux semaines.
En effet, nous n’avons pas voulu remettre en cause de bonnes initiatives du Sénat en matière de numérotation logique des chaînes de télévision, de sécurisation juridique des décisions de la commission du réseau du Conseil supérieur des messageries de presse et des compétences de la Commission des droits d’auteur des journalistes.
En revanche, nous avons souhaité revenir sur des modifications substantielles que la Haute assemblée a apportées, notamment aux dispositifs relatifs au droit d’opposition des journalistes, à la protection du secret de leurs sources ou encore à la généralisation des comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes.
Ces modifications, dont certaines, en matière de protection du secret des sources des journalistes, constitueraient une dangereuse régression par rapport au droit actuel, expliquent nos divergences parfois profondes avec la majorité sénatoriale. C’est pourquoi, à l’initiative de Stéphane Travert et des membres de son groupe, la commission a rétabli les dispositifs adoptés par l’Assemblée nationale en première lecture et prévoyant la consultation annuelle du comité d’entreprise sur le respect du droit d’opposition – article 1er bis – ; et la sanction de la violation du droit d’opposition des journalistes et des obligations de transparence faites aux entreprises de presse par la suspension, totale ou partielle, des aides publiques à la presse – article 11 bis.
Par ailleurs, afin de répondre aux interrogations parfois exprimées quant au caractère subjectif de la notion d’« intime conviction professionnelle » – pourtant présente dans la loi depuis 2009 à l’initiative, justement, du Sénat et qui n’a généré à ce jour, rappelons-le, aucun contentieux – la commission a témoigné de sa bonne volonté en décidant, sur ma proposition, de fonder le droit d’opposition, étendu à l’ensemble des journalistes par l’article 1er, sur la seule notion de « conviction professionnelle », formée dans le respect de la charte déontologique de l’entreprise éditrice.
Cette « conviction » ne sera en rien arbitraire : il ne s’agira pas de l’expression d’une simple opinion ; elle devra être « professionnelle », c’est-à-dire fondée sur le respect des précautions fondamentales qui constituent l’exercice loyal et professionnel du métier de journaliste.
En outre, la commission a rétabli le principe selon lequel les chartes déontologiques devront être rédigées conjointement par la direction et les représentants des journalistes. Cette rédaction conjointe devra résulter de véritables « négociations » – n’ayons pas peur du mot – tendant à la recherche d’un accord, et non de simples « discussions » susceptibles d’être closes par une initiative unilatérale de la direction.
Le Gouvernement nous proposera tout à l’heure un amendement bienvenu pour répondre à la question soulevée en commission visant à savoir ce qu’il adviendrait en cas d’échec des négociations d’ici le 1erjuillet 2017.
Pour ce qui concerne l’article 1er ter, qui renforce la protection du secret des sources des journalistes, la commission, sur ma proposition et sur celle de Michel Pouzol ainsi que des membres de son groupe – qui est également le mien – a rétabli la rédaction que l’Assemblée nationale avait votée à l’unanimité en première lecture en y apportant quelques modifications purement rédactionnelles de coordination.
Il me paraît important de ne pas remettre en cause l’équilibre auquel nous étions parvenus en première lecture sur cette question éminemment sensible et qui avait été favorablement salué par les organisations syndicales et les associations défendant la liberté d’informer. C’est là un acquis qu’il me semble essentiel de préserver en cette nouvelle lecture.
Par ailleurs, à l’article 2, la commission a réintroduit le principe selon lequel le Conseil supérieur de l’audiovisuel devra veiller à ce que les conventions qu’il conclut avec les éditeurs de services de radio et de télévision garantissent le respect du droit d’opposition des journalistes.
Au risque de me répéter, je tiens à souligner que le contrôle du CSA s’exercera bien a posteriori. Les éditeurs de services de radio et de télévision, à travers les conventions qu’ils auront conclues avec le CSA, prendront ex ante des engagements visant à garantir l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes et le respect du droit d’opposition des journalistes. Ce n’est qu’ensuite que le CSA sera amené à exercer ex post son contrôle et à prononcer des sanctions en cas d’éventuels manquements.
Pour ce qui est du dispositif généralisant les comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes – article 7 – la commission a rétabli la rédaction que nous avions adoptée en première lecture et qui avait le mérite d’asseoir leur crédibilité en leur permettant d’être consultés par toute personne et en définissant des règles d’indépendance exigeantes.
Stéphane Travert et les membres de son groupe proposeront tout à l’heure un amendement particulièrement opportun qui tend à simplifier la procédure de nomination des membres de ces comités sans pour autant réduire les garanties de leur indépendance.
Je tiens par ailleurs à souligner que la commission a adopté sans modifications autres que rédactionnelles ou de coordination l’article 7 bis qui étend aux chaînes parlementaires le dispositif des comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes.
Enfin, la commission a supprimé l’article 11 sexies A qui, adopté par le Sénat contre l’avis du Gouvernement, visait à limiter le bénéfice de l’exonération d’impôt sur le revenu prévu au profit des journalistes mais, aussi, des rédacteurs, des photographes, des directeurs de journaux et des critiques dramatiques et musicaux – ce qui fait quand même du monde.
Mes chers collègues, je vous invite donc à poursuivre la démarche qui nous mobilise depuis déjà quelques mois et qui vise à relever les défis que pose la concentration actuelle des médias.
Je ne reviendrai pas ici sur les événements qui ont pu révéler à quel point l’enjeu de la garantie de la liberté et de la crédibilité de nos médias était crucial face aux tentatives d’intrusion des intérêts particuliers dans le traitement de l’information. Dans le prolongement de la loi de 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, poursuivons donc le travail que nous menons depuis le début de cette législature pour renforcer dans notre pays l’expression démocratique tant des idées que des opinions !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la ministre, monsieur le président-rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi avant tout, au nom de mes collègues du groupe socialiste, écologiste et républicain, d’avoir une pensée émue pour les victimes du lâche attentat perpétré à Nice ces jours derniers.
Des médias libres, indépendants et pluralistes offrant à chacun la liberté d’informer et d’exprimer des opinions sont le socle d’une démocratie en bonne santé. L’indépendance des médias contribue donc dans une large mesure à la protection des droits de l’homme et du citoyen. Tous ici, nous considérons que garantir l’indépendance des médias, c’est faire vivre et donner tout son sens à la promesse républicaine.
Depuis les années quatre-vingt, le paysage audiovisuel a été bouleversé : création des chaînes de télévision et de radio privées, naissance des réseaux sociaux, multiplication des sources d’information. Nous le savons, de plus en plus nombreux sont nos concitoyens qui ne « s’informent » qu’à travers les réseaux sociaux, lesquels, eux, ne proposent pas un travail journalistique de recueil de l’information, de sélection et de vérification des sources. Il faut donc protéger l’information et par là même les seuls professionnels qui la fabriquent dans le respect de la déontologie : les journalistes de la presse écrite et audiovisuelle.
La question, aujourd’hui, est de savoir où en est l’indépendance de la presse dans notre pays, et comment concilier les conflits d’intérêts qui peuvent survenir dès lors qu’un groupe de presse ou audiovisuel appartient à une structure capitalistique qui gère d’autres intérêts – industriels, investissements, infrastructures – sur le territoire.
Le financement des médias dépend aujourd’hui en grande partie de capitaux privés qui peuvent vouloir modifier l’information en fonction de leurs intérêts ou peser sur le travail des rédactions. Les tendances à la concentration auxquelles nous assistons depuis plus de deux ans, les épisodes récents de censure et de sélection de l’information posent la question du pluralisme et de l’indépendance des médias de notre pays.
Les médias ne sont pas égaux. La télévision, média de masse, est accusée de simplifier les débats et de « faire l’opinion » dans une course à l’audience qui laisse peu de place au débat démocratique. Ces événements doivent donc nous conduire à légiférer. C’est ce à quoi répond ce texte proposé par Patrick Bloche qui vient ici, en seconde lecture, fixer un cadre législatif clair et précis pour la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias.
Permettez-moi de revenir sur le texte de loi que nous examinons aujourd’hui, fruit d’un beau travail collectif au sein de notre commission la semaine dernière.
L’article 1er de la proposition de loi étend à tous les journalistes, quel que soit le média dans lequel ils exercent, un droit d’opposition réservé aujourd’hui aux seuls journalistes de l’audiovisuel public à l’article 44 de la loi de 1986. Cet article avait été vidé de son sens par le Sénat. Jugez plutôt : suppression de la référence à l’intime conviction professionnelle, négation du rôle des représentants du personnel dans l’adoption des chartes déontologiques d’entreprise, suppression des sanctions adossées au droit d’opposition – rien que cela !
Le groupe socialiste, écologiste et républicain a donc soutenu les amendements de notre rapporteur visant à réintroduire ces dispositions tout en retirant le terme « intime » après « conviction » afin de se prémunir de contentieux qui pourraient voir le jour au regard du caractère imprécis de ce terme.
Le groupe SER a également réintroduit un amendement visant à renforcer la dimension collective de ce droit d’opposition individuel en permettant la consultation du comité d’entreprise chaque année sur le respect de ce nouvel article de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
Permettez-moi de revenir rapidement sur l’article 1er ter, relatif à la protection du secret des sources des journalistes. Alors que cet article avait été adopté à l’unanimité par notre commission, sur la base de la version adoptée par la commission en 2013, les débats au Sénat l’ont totalement vidé de sa substance. En commission, le Sénat a ainsi exclu du régime de la protection des sources les collaborateurs de rédaction et supprimé la notion d’ « atteinte indirecte aux sources ».
S’agissant des atteintes possibles au secret des sources, le Sénat a proposé d’aménager une possibilité d’enquêter, qui pourrait porter atteinte aux sources, en cas d’impératif prépondérant d’intérêt public. Cette position du Sénat est pour le moins incompréhensible. Notre groupe a donc défendu un amendement destiné à rétablir la version votée en première lecture au sein de notre commission, ce dont je me félicite.
L’article 2 définit le rôle joué par le CSA, afin de garantir le triptyque que nous mettons au coeur de cette loi : honnêteté, indépendance et pluralisme de l’information et des programmes. Cet article étend la possibilité donnée au CSA d’émettre des recommandations en matière d’honnêteté et d’indépendance de l’information et des programmes.
Le Sénat avait supprimé toute référence au respect du droit d’opposition des journalistes dans l’appréciation que doit faire le CSA du critère d’indépendance des journalistes, alors qu’une infraction à ce droit serait la preuve la plus criante de l’intrusion d’un intérêt particulier dans l’information. Nous avons donc soutenu l’amendement rétablissant la version votée par notre assemblée en première lecture. Le CSA garantit l’indépendance de ses décisions et je m’explique mal la posture qui consiste à refuser d’étendre les prérogatives de cette autorité indépendante, libre de toute pression.
L’article 7 instaure, dans chaque société audiovisuelle, un comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes. Si certaines sociétés ont d’ores et déjà instauré des comités en leur sein, la loi vient définir ce qui est entendu par « personnalité indépendante », tout en laissant ensuite à la société le loisir de définir la composition et les modalités de son fonctionnement dans la convention qui la lie au CSA. Le Sénat avait, ici encore, apporté des modifications importantes, en modifiant la dénomination du comité, en supprimant la possibilité, laissée à tout un chacun, de consulter ce comité pour avis, et en abandonnant les règles exigeantes d’indépendance des membres du comité.
On voit bien ici comment la majorité sénatoriale a souhaité limiter les marges de manoeuvre de ce comité, tant dans son champ d’intervention que dans sa composition. Je me félicite que notre commission ait voté en faveur de la proposition du rapporteur de réintroduire le dispositif adopté en première lecture. Celui-ci donne une pleine crédibilité aux comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes, en permettant la consultation de ces derniers par toute personne qui le souhaite, et en définissant des règles exigeantes d’indépendance.
Enfin, j’avais déposé, au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, un amendement visant à suspendre les aides publiques aux entreprises de presse en cas de violation des obligations de transparence et du droit d’opposition des journalistes, créé à l’article 1er de la présente proposition de loi. Renforcés par la loi Warsmann de 2011, les articles 5 et 6 de la loi de 1986 obligent les entreprises éditrices à publier, dans chacun de leurs numéros, les noms des personnes physiques ou morales détenant au moins 10 % de leur capital. Or il est quotidiennement constaté que cette disposition est peu, voire pas, appliquée.
Le Sénat, au stade de l’examen en commission, a supprimé cet article, au motif que les manquements aux obligations de transparence de l’actionnariat, comme les aides publiques, sont d’ores et déjà conditionnés à un certain nombre d’obligations et que cet article serait donc contre-productif. Nous pensons au contraire que les obligations de transparence sont aujourd’hui peu respectées et que la sanction pécuniaire aura un effet plus dissuasif. Je me félicite donc que cette disposition ait été réintroduite par notre commission. Qui possède quoi ? Les Français exigent de la transparence dans la vie publique et dans la vie politique, ce qui est bien normal. Je ne vois pas pourquoi les organes de presse devraient s’affranchir de cette nécessaire transparence.
La liberté d’expression, l’indépendance des médias et le pluralisme constituent le fondement d’une démocratie saine : c’est le respect de ces principes qui permet d’en mesurer la vigueur. L’existence de médias libres, capables de refléter la diversité et la pluralité des opinions, est indispensable à notre démocratie. Le rôle que pourraient jouer des propriétaires de médias pour réduire l’indépendance des journalistes et limiter le pluralisme suscite de vives préoccupations dans certains pays. Nous devons donc nous prémunir contre ce risque et adapter notre législation pour faire face à la tentation que d’aucuns pourraient avoir d’infléchir, de diriger ou d’empêcher le travail d’investigation de leurs journalistes.
Ce texte vise à faciliter le travail d’investigation et à faire en sorte que la publicité de ce travail ne soit pas entravée. Dans ce cadre, la protection du secret des sources des journalistes est l’une des pierres angulaires de la liberté d’expression ; c’est une avancée majeure que nous inscrivons dans notre droit. La République doit porter haut et fort ces valeurs fondamentales. La presse, espace permanent du débat politique et sociétal, contribue à l’expression des principaux courants d’opinion. Pour réaliser notre ambition d’avoir une presse libre, indépendante et pluraliste, nous avons le choix entre deux options : laisser faire, ou encadrer les pratiques pour protéger la liberté et l’indépendance des médias.
Notre pays, une fois encore, traverse des heures sombres. Notre cohésion, notre unité, la vitalité de la République seront garanties par des médias respectant les règles fondamentales d’indépendance de l’information et de liberté de la presse. Nous avons choisi d’agir, et c’est pourquoi les élus du groupe socialiste, écologiste et citoyen voteront ce texte, garant des valeurs de la République et porteur de droits nouveaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la ministre de la culture et de la communication, monsieur le président et rapporteur de la commission des affaires culturelles, je vous remercie d’avoir inscrit notre débat à l’ordre du jour dans le contexte dramatique que nous connaissons.
Pour ma part, j’ai le sentiment que nous n’aurions pas dû débattre de ce texte aujourd’hui. Pour dire les choses franchement, je n’avais pas envie de venir. Pas parce que nous sommes au mois de juillet, parce que c’est lundi ou parce que je méprise la presse, mais parce que je redoute que nos concitoyens ne comprennent pas qu’avant même de nous être prononcés sur la prolongation de l’état d’urgence et sur la sécurité du pays, nous examinions un texte qui peut apparaître, dans ce moment-là, comme un texte de boutiquier.
Vous savez bien, madame la ministre, monsieur le rapporteur, que nos concitoyens se préoccupent aujourd’hui de la France et de leur identité nationale. Il est donc délicat de venir traiter aujourd’hui d’un problème qui est certes important, monsieur le rapporteur, mais qui doit être relativisé dans le contexte actuel. Je ne voudrais pas que nous donnions le sentiment, collectivement, d’une sorte d’indifférence souveraine à la réalité – il faut absolument nous en garder.
Monsieur le rapporteur, le fait que ce texte soit examiné en urgence témoigne peut-être du triomphe de votre volonté. Mais cette exigence de l’urgence, c’est le premier argument de notre manifeste contre votre proposition de loi. Vous avez voulu un texte qui cible expressément un groupe et son dirigeant, et vous l’avez fait. Son cheminement, au cours de la navette parlementaire, a été difficile, et il vous a conduit dans une sorte d’impasse où vous vous êtes enfermé – on l’a bien constaté avec l’échec de la commission mixte paritaire. Mais vous continuez, et vous revenez avec les mêmes arguments. Il faut au moins vous reconnaître cette ténacité, cette pugnacité.
Vous savez pourtant, monsieur le président et rapporteur, vous qui avez une grande expérience parlementaire, que les textes traités en urgence sont rarement bien ficelés. J’ai eu l’occasion de vous rappeler la boutade prononcée à cette même tribune par un ministre issu de nos rangs, Christian Blanc, qui déclarait avec sagesse : « La vie m’a appris une chose : quand il y urgence, il faut parfois ne pas se presser » !
Vous connaissant, monsieur le rapporteur, je ne veux même pas croire que ce texte soit un texte de circonstance – c’est un procès que certains seraient tentés de vous faire – visant à ressouder un peu les rangs d’une majorité à l’agonie autour de quelques idées nobles, telles que la liberté, l’indépendance, la transparence ou l’éthique. En fait, comme chaque fois que vous êtes au pouvoir, et je m’adresse là à la majorité dans son ensemble, vous souhaitez imposer votre conception de la justice, de la responsabilité et même, oui, du bonheur, ce qui me laisse croire en votre bonne foi dans cette aventure législative qui est tout de même en train de vous glisser entre les doigts comme le sable du temps.
Le second argument qui nous fait repousser votre texte, c’est, une fois de plus, la relation que vous établissez avec le CSA. Cette fois, vous renforcez son pouvoir de régulation en le chargeant de s’assurer que les intérêts économiques des actionnaires ne pèsent pas sur le projet éditorial des chaînes et ne portent pas atteinte aux principes d’honnêteté, d’indépendance et de pluralisme. Nous n’allons pas rejouer la partie : je vous ai déjà dit ce que nous pensions de ce droit de regard nouveau.
L’ambiguïté des missions du CSA a pourtant été relevée par un parlementaire issu de vos rangs, Marcel Rogemont. La discussion en commission a par ailleurs montré qu’un doute est apparu quant à la nature de ce contrôle. Des témoignages vous ont été apportés, selon lesquels les journalistes sont hostiles à cette formule. Mais vous persistez ! Vous auriez dû bavarder avec l’écrivain Jean-Christophe Rufin, qui a dit : « La presse est libre, vous le savez, elle est libre et responsable. Quand une vérité se dégage, il faut la respecter. » Nous aimerions bien, dans l’opposition, que vous respectiez cette vérité.
Mais c’est peut-être avec l’article 7 et la création des comités d’éthique, désormais dénommés « comité relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes », que vous donnez le meilleur de votre mesure ! En réalité, en inscrivant dans la loi l’obligation de créer ces comités, vous restez au milieu du gué, entre deux conceptions : l’éthique de responsabilité et l’éthique de conviction. Quelqu’un a écrit que, depuis Rabelais, « on a la chance, en France, de vivre en grande liberté ». Ce quelqu’un, c’est Wolinski, madame la ministre. Le citer aujourd’hui, en cet après-midi de deuil, c’est une façon de lui rendre hommage – et vous m’accorderez que je ne vais pas forcément chercher mes références chez les auteurs qui ont fait preuve de la plus grande indulgence à mon égard. « En grande liberté », dit-il.
Vous le savez, l’éthique suppose la liberté. Or, avec les contraintes que vous imposez dans la composition de ces comités, on est loin du postulat de Paul Valéry : « Mon éthique est simple : essayons de faire quelque chose de l’homme. ». On serait plutôt dans l’éthique du crépuscule chère à Emil Cioran, d’autant que vous en rajoutez en facilitant les possibilités de saisine pour avis. Façon de dire aux patrons de presse : « Nous ne sommes pas là pour vous faciliter les choses » ! N’ayez aucune crainte, ils l’ont bien compris.
J’en viens à l’article que je qualifie de « philosophique » de la proposition de loi : l’indépendance de la presse, qui passe par celle du journaliste. L’idée est certes généreuse, qui consiste à généraliser à l’ensemble des journalistes le statut de protection spécifique dont bénéficiaient, jusqu’à présent, les seuls journalistes de l’audiovisuel public. Mais, dès la première lecture du texte, nous avons exprimé nos doutes quant à l’opportunité de reconnaître à tous les journalistes le droit de refuser toute pression en opposant leur « intime conviction professionnelle ». Aussi, nous sommes sensibles au fait que le texte, dorénavant, ne retienne que la seule notion de « conviction professionnelle », adossée aux chartes déontologiques dont devront se doter toutes les entreprises ou sociétés éditrices de presse ou audiovisuelles qui n’en disposent pas encore avant le 1er juillet 2017.
La crainte de voir naître un rapport de force entre la direction et les représentants des journalistes lors de l’élaboration de cette charte nous a amenés à vous proposer d’autres rédactions, qui n’ont pas abouti. Toutefois, nous vous proposerons un ultime amendement, tendant à substituer le mot « discussions » au terme « négociations », qui renvoie au code du travail et peut créer une ambiguïté. Le débat assez libre qui s’est instauré en commission sur cette question, et notre tentative de trouver une rédaction commune, nous incline à penser, de façon peut-être trop optimiste, que notre amendement pourrait être retenu.
Je ne reviendrai pas sur l’article relatif à la protection des sources qui, lors de la première lecture, avait fait l’objet d’un vote à l’unanimité et qui a été réintroduit en commission, accompagné de quelques modifications rédactionnelles. Il est vrai qu’il existe, sur ce sujet, une certaine opposition avec la commission des lois du Sénat. D’autres points rencontrent notre adhésion, comme le maintien de 1’article 10 ter, qui porte sur la numérotation des chaînes, ou la suppression de l’article 11 sexies A, visant à l’encadrement de la niche fiscale des journalistes, qui n’a pas lieu de figurer dans cette proposition de loi mais plutôt dans une loi de finances.
Au-delà de tous les considérants évoqués au cours de nos débats, peut-on s’interroger un instant sur la conscience de chacun et non pas seulement sur la loi ? En effet, je crois, comme vous, qu’un homme doit faire ce qu’il a à faire, quels que soit les compétences, les pressions et les dangers. C’est cela, la base de toute morale humaine.
On a beaucoup parlé d’éthique au cours de nos débats successifs, et tant mieux ; c’est sans doute, monsieur le rapporteur, l’un des avantages de votre texte. Mais l’éthique ne peut pas être une science, dans la mesure où celle-ci implique un lien direct avec la signification ultime de la vie. L’argument de la raison juridique, que vous invoquez, ne suffit pas pour adopter une éthique. Il faut aussi qu’il y ait adhésion des esprits. À l’évidence, cette adhésion ne passe aujourd’hui pas forcément par la loi. Pour nous, c’est là le défaut de votre texte, que nous continuerons à repousser.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
J’ai, à mon tour et au nom de mon groupe, une pensée particulière pour tous ceux dont la vie a été tragiquement interrompue lors des attentats de Nice, notamment pour les enfants, leur famille, leurs proches, et aussi les forces de l’ordre et tous ceux qui ont apporté secours et aide aux victimes, dans des circonstances que chacun connaît. Pour autant, notre devoir aujourd’hui est bien de continuer à faire notre travail quotidien, et en l’occurrence à essayer de dépasser le quotidien, puisque votre proposition de loi porte sur l’expression libre, à travers le statut de la presse.
Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur, et il n’y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits, s’exclamait le Figaro de Beaumarchais.
Cette citation mise quotidiennement en exergue ne souligne-t-elle pas, s’il le fallait, que l’indépendance de la presse demeure solidement ancrée dans nos consciences, et n’explique-t-elle pas que l’émergence de nouveaux groupes de presse et les prises de participation d’actionnaires dans les médias créent autant d’émoi dans notre pays ? Aujourd’hui, la proposition de loi que nous examinons a pour objectif déclaré de répondre aux différents mouvements de concentration qui animent le paysage audiovisuel. L’ambition serait tout à fait noble si la réalité n’était peut-être autre.
Comme vous le savez, nous étions dès le départ réservés sur ce texte. Cette proposition de loi regorge certes de bonnes intentions, mais survit-elle à l’épreuve de la pratique et à l’avis des professionnels du secteur ? S’agissant de l’article 1er, nous étions, dès la première lecture, assez dubitatifs quant à l’opportunité de reconnaître à tout journaliste le droit de refuser toute pression en opposant son « intime conviction professionnelle » – M. le rapporteur vient d’en parler. Voilà pourquoi nous sommes sensibles à l’amélioration qu’il a apportée avec la seule notion de « conviction professionnelle ». En effet, ou la conviction est professionnelle et elle est alors objective et n’a rien d’intime, ou elle est intime, auquel cas elle est subjective et n’a rien de professionnel.
Par ailleurs, comment ne pas soutenir les initiatives qui visent à renforcer la protection du métier de journaliste ? La liberté d’information, l’indépendance vis-à-vis du pouvoir politique et le pluralisme sont intrinsèquement liés à la démocratie et à la richesse du débat politique.
Pour autant, il nous faut ici rappeler que les journalistes disposent déjà d’une protection juridique qui leur garantit une certaine indépendance contre les éventuelles dérives de leurs propriétaires. Ainsi, la clause de cession permet au journaliste de démissionner tout en bénéficiant de l’assurance chômage lorsque l’entreprise pour laquelle il travaille change d’actionnaire. En outre, un dispositif similaire s’applique si le journaliste apporte la preuve d’un « changement notable dans le caractère ou l’orientation du journal », y compris en l’absence de transformation de l’actionnariat. Il semble donc qu’à force de réécriture, l’article 1er de ce projet de loi complexifie plus qu’il ne renforce la protection des journalistes contre d’éventuels abus.
Si nous pouvons comprendre le souhait du rapporteur d’affirmer que chaque entreprise éditrice de presse ou audiovisuelle doit se doter d’une charte déontologique, il apparaît également qu’une telle charte relève du domaine éditorial de chaque média concerné. À nos yeux, elle doit résulter d’une discussion – j’emploie sciemment ce terme – au sein des rédactions, et non pas devenir le sous-produit d’une négociation sociale. Nous espérons que notre amendement sur ce point fera l’objet d’un avis favorable, car sa rédaction a au moins le mérite de simplifier la procédure d’élaboration de la charte.
Par ailleurs, d’autres dispositions restent en suspens et nous attendons encore d’être convaincus de leur pertinence à l’occasion de ce débat. Si le maintien du nouvel article 10 ter, qui porte sur la numérotation des chaînes, nous semble être une mesure importante pour les téléspectateurs car elle permet un traitement équitable, transparent, homogène et non discriminatoire des chaînes de télévision, nous restons plus réservés concernant les articles renforçant les prérogatives ex ante du Conseil supérieur de l’audiovisuel. Nous considérons qu’ils témoignent surtout d’une conception quelque peu désuète de sa mission de régulation dans un paysage audiovisuel bouleversé notamment par le développement de l’économie numérique et des réseaux sociaux.
Il est certain que la défiance des citoyens envers les médias doit collectivement nous interpeller. Certes, on ne peut se satisfaire que seul un quart des Français juge les journalistes indépendants du pouvoir, comme l’indiquent de récentes études, mais croyez-vous sincèrement que le renforcement des missions du CSA contribuera à apaiser ce climat de suspicion ?
Vous le savez, le groupe UDI est depuis longtemps réservé sur le rôle du CSA, en raison notamment des modalités de nomination de ses membres. En effet, puisqu’ils ne sont soumis à aucune exigence ni de compétences ni d’expérience, l’absolue impartialité de cette institution peut au moins être questionnée. Par ailleurs, nous avons déjà eu plusieurs occasions de constater que le CSA éprouve déjà des difficultés à s’acquitter de ses missions traditionnelles, notamment celle de veiller au respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion, comme en témoignent régulièrement les distorsions entre les différentes formations politiques en ce qui concerne les temps d’antenne.
Plus précisément, le fait que le CSA formule des recommandations au moment de la signature des conventions et définisse en amont les dispositions censées empêcher une ingérence future des actionnaires rompt avec sa mission de contrôle a posteriori. En outre, la volonté d’ériger le CSA en juge, voire en arbitre, sur le plan déontologique, alors qu’il possède également une compétence de désignation, peut s’avérer conceptuellement gênante.
Vous conviendrez également que, mises à part de très rares exceptions, sévèrement condamnables, force est de constater que les publications françaises travaillent et éditent librement. Les rédactions de Libération, d’I-Télé, de l’Express ou encore du Monde, pour n’en citer que quelques-unes, s’organisent et se sont déjà mobilisées afin que les organes de presse demeurent indépendants de leurs actionnaires respectifs. Les industriels et les dirigeants ont bien compris les risques évoqués par Chateaubriand et en ont accepté, en bonne intelligence, les contraintes. Comme le précisait, en effet, l’auteur des Mémoires d’outre-tombe : « Plus vous prétendez comprimer [la presse], plus l’explosion sera violente. Il faut donc vous résoudre à vivre avec elle ».
Mes chers collègues, avant de conclure, permettez-moi d’aborder enfin le délicat sujet de la protection des sources. Parce qu’ils informent le citoyen et peuvent éclairer l’opinion, les journalistes sont les fers de lance de la démocratie et de la liberté d’expression, mais cette liberté doit s’accompagner de sérieuses garanties quant à la véracité des propos rapportés. La protection des sources est ainsi le corollaire d’une parole crédible. L’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales le dit sans ambages : « Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière ».
Dernière réforme dans ce domaine en France, la loi du 4 janvier 2010 relative à la protection du secret des sources des journalistes a constitué une indéniable avancée puisqu’elle a fait de la protection des sources des journalistes un principe général en l’inscrivant dans le cadre hautement symbolique de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Aujourd’hui, ce droit peut toutefois être amélioré pour assurer une prévention suffisamment efficace des atteintes injustifiées au secret des sources. Prévue dans un projet de loi en 2013, la protection du secret des sources des journalistes n’a jamais été inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée. Nous saluons donc l’inscription dans la loi de manière plus claire et plus limitative des conditions permettant de porter atteinte à ce secret, tout en veillant à ce que « protection » ne rime évidemment pas avec « impunité ».
Les récentes attaques qui ont frappé notre territoire nous conduisent à être particulièrement vigilants sur les critères permettant une atteinte au secret des sources, notamment celui de la prévention ou la répression soit d’un crime, soit d’un délit constituant une atteinte grave à la personne ou aux intérêts fondamentaux de la nation, voire sur l’intégration à ces critères du terrorisme ainsi que du crime organisé. Aussi bien, si nous avons souligné nos points de divergences sur le rôle du CSA, madame la ministre, nous ne saurions, pour autant, nous opposer à un texte qui propose de définir de façon plus claire et plus limitative les conditions permettant de porter atteinte au secret des sources. C’est pourquoi, jusqu’à la fin de son examen, nous demeurons perplexes sur cette proposition de loi.
Permettez-moi d’exprimer à nouveau, au nom des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, mes plus sincères condoléances à l’ensemble des familles touchées par l’odieuse tragédie du 14 juillet dernier.
Légiférer pour la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, voilà une ambition à laquelle nous souscrivons pleinement. Comme nous l’avons dit en première lecture, la liberté de la presse est un des fondements de la vie démocratique de notre pays, à laquelle nous tenons et qu’il s’agit de défendre en toutes occasions. Le drame de Charlie Hebdo nous l’a cruellement rappelé : chaque fois que cette liberté s’est trouvée menacée ou entravée, c’est notre République et ses valeurs fondatrices qui ont été attaquées. Et cette liberté de la presse ne peut exister sans le travail libre des journalistes.
Nous savons que certains peuvent et ont pu y laisser leur vie, aujourd’hui comme hier : en 2016, ce sont quarante journalistes et professionnels des médias qui ont péri dans l’exercice de leur métier. Depuis la loi de 1881 sur la liberté de la presse, nous avons écrit, comme législateurs, d’autres pages pour la conforter et l’élargir : pour cette législature, je pense, par exemple, à la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public ou à la loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, présentée par notre collègue Michel Françaix.
Néanmoins, il restait une faille importante dans le dispositif législatif qui empêchait d’assurer une liberté pleine et entière de la presse : une véritable protection du secret des sources des journalistes par la loi. Combler ce vide était un engagement du Président de la République avant son élection et nous étions satisfaits lorsque, en 2013, un projet de loi sur ce sujet avait été amendé dans le bon sens en commission des affaires culturelles pour être présenté en séance à notre assemblée.
Or nous savons que, depuis trois ans, la mise à l’ordre du jour de cette question a requis de nombreux combats. Notre collègue Marie-George Buffet n’a eu de cesse de demander ce débat, de proposer d’inclure cette proposition par voie d’amendement. Rappelons aussi qu’elle a été à l’initiative du dépôt d’une proposition de loi transpartisane en juillet dernier, répondant ainsi au souhait exprimé par l’intersyndicale des journalistes.
Aujourd’hui, nous avons enfin intégré dans une proposition de loi soumise à nos débats, et à notre vote, le contenu d’un texte permettant une véritable protection du secret des sources des journalistes. On le sait, la loi de 2010 n’avait pas empêché le scandale des fadettes utilisées contre deux journalistes du Monde. Il était à l’époque reconnu que cette loi, loin de permettre aux rédactions d’opérer de véritables travaux d’investigation dans le but de livrer l’information la plus exacte possible, offrait en fait des opportunités à ceux qui voulaient les encadrer.
La condamnation récente par la justice du Luxembourg du journaliste Antoine Deltour et du lanceur d’alerte Raphaël Halet à respectivement douze et neuf mois de prison avec sursis et une amende de 1 500 et 1 000 euros pour leurs révélations sur l’évasion fiscale dans l’affaire LuxLeaks nous incite, ici, à produire des actes forts pour défendre à la fois la liberté de la presse et celle des journalistes. Au moment où trois journalistes restent en prison en Turquie pour l’avoir exercée, on mesure aussi combien il est indispensable de garantir par la loi la liberté et l’indépendance des médias et des journalistes.
Pourtant, le Sénat n’a pas souhaité aller dans ce sens. Nous sommes satisfaits de la décision de M. le rapporteur de refuser le texte d’une commission paritaire mixte qui aurait avalisé ce recul. Nous avons donc pu, en commission, revenir à l’esprit et à la lettre du texte adopté en première lecture, sur ce sujet et sur l’ensemble de la loi.
Le texte qui nous est soumis témoigne de cette modification en profondeur des dispositions adoptées par le Sénat. Nous exprimons donc ici notre satisfaction quant au rétablissement des dispositions concernant cette question décisive qu’est la protection des sources des journalistes.
Le combat pour la liberté et l’indépendance de la presse et des médias est un combat nécessaire, à mener en permanence. Il relève bien sûr de l’action des rédactions et des journalistes, mais il a également besoin de l’engagement de la représentation nationale car il doit trouver des points d’appui dans l’urgence : urgence face aux phénomènes d’hyperconcentration, ouvrant la porte à des restrictions de fait du pluralisme à travers la remise en cause de l’indépendance des rédactions, comme face à l’aggravation de la précarité de cette profession, qui soumet toujours un peu plus le contenu du travail des journalistes à l’insécurité de leur situation.
Oui, il nous paraît indispensable de garantir par la loi la liberté de conscience professionnelle des journalistes et d’étendre à l’ensemble de ceux-ci la protection prévue en faveur des journalistes de l’audiovisuel public par l’article 44 de la loi du 30 septembre 1986.
« Le monde bouge », entend-on souvent dire : hélas, ce n’est pas toujours dans le bon sens. Aussi la loi doit-elle à nos yeux donner davantage de moyens de résister à des retours en arrière. Dans le domaine qui nous occupe aujourd’hui, le poids de l’argent et l’évolution des médias, qui deviennent de plus en plus sources de profit au détriment de leur contenu informatif et émancipateur, sont sources de dérives. Nous assistons en effet à des concentrations quasi quotidiennes au profit de grands groupes industriels et bancaires et de géants des télécommunications. Cette proposition de loi nous donnera plus de moyens pour agir contre les phénomènes qui portent atteinte au pluralisme et à la liberté d’informer.
Nous continuons toutefois de penser que des améliorations sont nécessaires pour répondre vraiment à ces objectifs, notamment pour renforcer l’indépendance des rédactions et le pluralisme des médias, en les préservant du pouvoir exercé par les actionnaires des plus grands groupes de ce secteur. Nous craignons ainsi que la mise en place de chartes de déontologie dans les entreprises ne prenne la place du contenu de ce qui reste pour la profession la référence incontournable : la charte des droits et des devoirs des journalistes adoptée à Munich en 1971.
Le risque existe que s’installe, pour les rédactions, une obligation de se voir imposer, dans l’exercice de leur métier, la volonté directoriale de leur entreprise, malgré la réaffirmation du droit au respect de la conviction professionnelle de chaque journaliste, qui a été réintroduite dans le texte. De même, le contenu de la loi reste encore un peu frileux, s’agissant de la lutte contre la course au profit et à l’hyperconcentration, qui se fait au détriment du pluralisme et de la liberté d’informer les citoyens et citoyennes.
L’existence d’un titre comme L’Humanité, après la disparition de France-Soir papier, peut aujourd’hui être menacée, alors que des concentrations s’opèrent avec comme seule exigence le retour de la rentabilité. Dans un pays comme le nôtre, attaché à l’exception culturelle et au fait que les oeuvres de l’esprit ne sauraient être considérées comme de simple marchandises, nous espérons que la rédaction finale du texte permettra de mieux considérer le droit à l’information des citoyennes et citoyens de notre pays.
Madame la ministre, avec cette proposition de loi vous vous donnez pour objectif d’agir sur ces problèmes : nous ne pouvons que nous en féliciter. Mais nous ne sommes pas encore au bout des dispositions à prendre pour garantir une vraie indépendance des rédactions à l’égard de leur propriétaire ou pour agir efficacement contre l’hyperconcentration dans les médias, afin non pas de brider les investissements nécessaires à la vie et au développement de la presse et des médias, mais de conserver, dans ce cadre, les conditions de l’existence d’un véritable pluralisme éditorial.
Nous abordons donc ce débat avec l’espoir de voir encore s’améliorer un texte qui, grâce au travail parlementaire, devient un outil législatif non négligeable au service de l’indépendance et du pluralisme des médias. Il s’agit en effet d’un aspect essentiel de la souveraineté de notre peuple et de l’exercice de sa citoyenneté. C’est dans cet esprit positif et vigilant que nous voterons pour cette proposition de loi.
Comme le disait George Orwell, « Parler de liberté n’a de sens qu’à condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre ».
La liberté d’expression, la liberté de l’information et la liberté des médias sont les veines de notre démocratie. En les bafouant, on met à mal la République. Pourtant, le tabou ou la sensibilité de l’opinion ne sont pas les seules grandes menaces qui pèsent sur la liberté des médias. L’immixtion d’intérêts privés dans l’information, la censure exercée sur les journalistes et la concentration des groupes de médias sont les dangers les plus graves. Cette censure est subtile et invisible : d’abord, parce que lorsqu’on lit un journal, qu’on regarde la télévision ou qu’on écoute la radio, le nom de l’entreprise propriétaire, lorsque ce n’est pas l’État, n’est pas identifié ; ensuite, parce que ce qu’il y a derrière l’information ne transparaît pas.
C’est pour ces raisons que les Français ne savent pas toujours que leur pays est bien mal classé par Reporters sans frontières : en un an, la France est passée, en matière de liberté de la presse, de la trente-huitième à la quarante-cinquième place sur 180 pays évalués.
Il ne faut pas se méprendre : si la fondation Louis-Vuitton embellit indéniablement Paris, elle apporte aussi à Bernard Arnault et au groupe LVMH qu’il dirige une incroyable publicité, qui s’étale également en pleines pages du journal Le Parisien depuis qu’il l’a acquis en 2015. Si les milliardaires achètent et forment des grands groupes de médias, c’est moins pour leur rentabilité que pour la capacité d’influence qu’ils procurent. Les journalistes subissent alors une pression et s’autocensurent par contrainte insidieuse, en l’absence de contrepoids. L’objectif de cette proposition de loi se situe précisément là.
Grâce aux avancées de ce texte, les journalistes seront moins démunis face aux pressions de leur direction. Je soutiens ainsi le choix de notre rapporteur Patrick Bloche et de la commission des affaires culturelles de rétablir le droit de rétractation des journalistes confrontés à un acte contraire à leur « conviction professionnelle » formée dans le cadre des chartes déontologiques. Je ne pense pas qu’on puisse supprimer une liberté fondamentale au métier de journaliste simplement parce qu’elle semble juridiquement trop floue. Ce raisonnement nous mènerait beaucoup trop loin et remettrait en cause les fondements constitutionnels de notre démocratie.
Je me réjouis également que nous puissions enfin remédier aux lacunes de la protection du secret des sources des journalistes. Cela a été possible grâce au rétablissement en commission du fait justificatif d’éventuels délits d’atteinte à l’intimité de la vie privée, de recel du secret professionnel et de recel du secret de l’enquête et de l’instruction, lorsque ces délits ont permis d’obtenir des informations dont la diffusion au public constitue un but légitime dans une société démocratique.
L’article 7 va également dans le sens d’un renforcement de la liberté de la presse française. Des comités chargés de veiller au respect des principes d’honnêteté, d’indépendance et de pluralisme de l’information et des programmes sont généralisés. Ils concernent des services de télévision ou de radio à vocation nationale, désormais aussi bien publics que privés. Nous pouvons néanmoins regretter que ces comités soient exclusivement dédiés aux radios et aux télévisions, ignorant de ce fait la presse écrite et les nouveaux supports électroniques qui transforment radicalement aussi bien les rapports des journalistes avec leurs sources que leurs relations avec leurs lecteurs.
Bien que beaucoup reste à faire, je pense personnellement que cette proposition de loi mérite d’être soutenue car elle constitue un pas de plus vers un véritable encadrement de la concentration des médias. Alors que nous assistons à un déploiement de moyens exceptionnels en matière de sécurité à la suite des récents événements tragiques, il y a une vraie cohérence à renforcer dans le même temps la liberté d’expression et à garantir le secret des sources, éléments constitutifs de l’État de droit.
La liberté d’expression, fruit de longs combats, n’est jamais définitivement acquise. Elle est encore une réalité minoritaire à travers le monde et il faut toujours lutter pour l’acquérir ou la préserver. Comme l’a dit le journaliste André Guillois : « Dans la plupart des pays, les citoyens possèdent la liberté de parole. Mais dans une démocratie, ils possèdent encore la liberté après avoir parlé. »
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Permettez que mes pensées aillent tout d’abord aux victimes du terrible attentat de ce week-end à Nice, à leurs familles, ainsi qu’à tous ceux qui sont intervenus ou ont été touchés par ce drame national.
La commission des affaires culturelles et de l’éducation a adopté, le mardi 5 juillet dernier, la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias : nous nous retrouvons aujourd’hui en nouvelle lecture pour peaufiner encore ce texte d’une importance majeure.
Je tiens tout d’abord à souligner que ce texte d’initiative parlementaire démontre encore une fois, s’il en était besoin, que notre commission et plus largement l’ensemble des parlementaires ont à coeur de doter le secteur de l’audiovisuel de moyens nouveaux, à même de renforcer l’exercice libre de son expression, en dehors des prises de position partisanes et des conflits d’intérêts. Depuis quatre ans, nous avons engagé des réformes structurantes en matière d’indépendance, comme par exemple la disposition qui redonne au CSA le pouvoir de nommer les présidents de l’audiovisuel public. Le texte qui nous est présenté aujourd’hui permet d’aller encore plus loin, en cohérence avec ceux que nous avons déjà votés.
Cette proposition de loi, je le répète, s’inscrit non seulement dans le travail mené par notre commission depuis le début de la législature, mais aussi dans un contexte nouveau qui nécessite une nouvelle intervention du législateur. La concentration en marche dans les médias depuis deux ans, qui s’est accélérée ces derniers mois, montre s’il en était besoin que la problématique de l’indépendance est devenue un enjeu majeur. C’est bien, l’esprit et la substance du texte qui se retrouvent entièrement dans son titre : « indépendance et pluralisme ».
La nécessité de légiférer part d’un constat terrible : les grands médias appartiennent à des grands groupes financiers. De fait, les journalistes peuvent, dans l’exercice de leur profession, être soumis à des pressions, des influences et des censures, bien loin de la garantie d’impartialité qui est la pierre angulaire de l’information du public. Nous devons dès lors les protéger face à un changement de ligne éditorial ou d’actionnaires ou à un rachat. C’est pour cette raison que l’article 1er étend à chaque journaliste, quels que soient les médias dans lesquels il travaille, le droit d’opposition pour lui éviter « un acte contraire à son intime conviction professionnelle ».
Le deuxième élément fort de ce texte est la protection des médias vis-à-vis des pressions économiques, puisque l’article 2 confie au CSA le soin de veiller à ce qu’aucune atteinte ne soit portée aux principes d’indépendance et de pluralisme de l’information.
Je souhaite également saluer la création des comités relatifs à l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes, qui ont émergé au cours de ces dernières années, d’abord au Monde puis à France Télévisions, avant que les questions de déontologie soulevées par les terribles attentats de 2015 n’encouragent leur création au sein des chaînes d’information continue. Nous avons malheureusement pu constater les dysfonctionnements intolérables liés au traitement médiatique de l’attentat de Nice par certaines chaînes d’information continue, ainsi que par les chaînes généralistes, y compris, il faut le reconnaître, celles du service public. Ces dérives illustrent malheureusement parfaitement l’urgence qu’il y a à mettre en place ces comités de manière efficace.
Ce texte contient par ailleurs une disposition particulièrement importante, dont l’initiative, encore une fois, revient aux parlementaires et qui me tient particulièrement à coeur pour y avoir travaillé longuement : la protection du secret des sources des journalistes, qui est un des engagements forts du programme du Président de la République. La détermination parlementaire à voir enfin aboutir ces dispositions est totale et absolue et je remercie particulièrement mes collègues du groupe SER ainsi que Marie-George Buffet et Isabelle Attard, qui m’ont rejoint dans ce combat tenace. Mes remerciements vont également à nos collègues de l’opposition, même s’ils sont aujourd’hui largement absents, qui, au sein de notre commission, ont su à de nombreuses reprises placer l’intérêt général sur ce sujet précis au-delà des postures partisanes. Je regrette toutefois que cette attitude n’ait pas persisté durant tout l’examen du texte.
Peu importe : la profession journalistique tient particulièrement à cette question. La loi relative à la protection du secret des sources des journalistes, dite loi Dati, qui va en ce sens, reste, nous l’avons déjà dit, très floue quant à l’application de cette protection. Lorsque nous étions dans l’opposition, nous avions affirmé avec force qu’il serait nécessaire de clarifier les dispositions en vigueur afin de permettre aux journalistes d’effectuer leur travail en toute intégrité, en particulier en matière d’investigation.
La tentative de coup d’État survenue ce week-end en Turquie est venue nous rappeler que la presse est et doit rester une des clefs de voûte de la démocratie et que les peuples qui l’oublient s’exposent souvent au pire.
Pour cette raison, je vous invite, mes chers collègues, à soutenir, dans le cadre de cette nouvelle lecture, les avancées du texte qui garantiront une réelle protection du secret des sources des journalistes, d’autant que notre travail commun a permis de construire un consensus très large, tant entre nos différents groupes qu’au sein de la grande majorité des organisations syndicales du secteur. Alors que notre pays, plus que jamais, a besoin d’unité et de clarté, ce n’est pas le moindre mérite du texte que nous examinons aujourd’hui.
C’est pourquoi je vous invite à en respecter l’équilibre au cours des débats qui vont suivre.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, pourrions-nous bénéficier d’une courte suspension de séance avant d’entamer la discussion des articles ? Nous n’avons pas pris de retard – c’est le moins qu’on puisse dire, puisqu’il n’est que dix-huit heures.
La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures quinze.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
Je crois qu’il faut se garder de la polémique pour la polémique dans les circonstances que nous connaissons.
Je crois aussi que la division de notre nation, qui est réalité, difficile à entendre ou non, tient beaucoup à un rejet des principaux canaux d’information.
La réalité, c’est qu’il y a une presse dont les méthodes et les attitudes sont serves, sont politiques. J’en ai connu tous les excès : mensonges, manipulations, trucages et puis interdictions de passage.
Telle est la réalité d’un milieu journalistique où de grands capitalistes commandent à une immense majorité d’idéologues.
Prenons un exemple avec le service public. France 2 a utilisé il y a quelques années un militant d’extrême gauche, membre de la Ligue communiste révolutionnaire, pour faire fermer une école libre. Dans tout un montage, des provocations commises par ce personnage ont manipulé des millions de personnes.
Les médias français, plus récemment, ont été la risée du monde entier pour leur traitement du Brexit, des élections en Autriche, du débat présidentiel aux États-Unis.
C’est à cela que la charte et la déontologie devraient s’atteler. Les grands prêtres du politiquement correct et de l’absence de pluralisme exaspèrent les Français et je crains que, hélas, cette loi n’y change rien.
La mise en place d’un comité d’éthique est une bonne chose mais il faut préciser la protection dont bénéficient ceux qui témoigneront auprès du comité ou du CSA.
C’est pourquoi cet amendement définit concrètement les mesures de protection. Il vise à garantir qu’aucun journaliste ne puisse être sanctionné pour avoir refusé ou dénoncé une pression. C’est d’autant plus important pour les journalistes dits pigistes reconnus par l’article L. 7112-1 du code du travail, pour lesquels les conséquences pour avoir refusé de signer un article ou une émission pourraient être dramatiques, du fait de leur précarité.
Défavorable parce que cela va de soi. Dès lors qu’est instauré un droit d’opposition, toute sanction disciplinaire liée à l’exercice de ce droit pourra être contestée devant le juge du travail, qui ne manquera évidemment pas d’annuler toute décision prise en infraction avec la loi dont nous débattons aujourd’hui.
La seule innovation est votre dernier alinéa, madame Attard, qui place la charge de la preuve entre les mains du seul employeur. Cela nous est apparu quelque peu excessif.
S’agissant de la protection du journalisme en cas de discrimination ou de licenciement abusif, cet amendement est effectivement satisfait. Le juge pourrait déjà prononcer la nullité des mesures de rétorsion mises en place par l’employeur sans qu’il soit besoin d’apporter plus de précisions sur ce point. Le Gouvernement y est donc défavorable.
L’amendement no 4 n’est pas adopté.
Les Français n’ont plus confiance en leurs médias. Devant une presse et une télévision qui ne sont pas assez diverses dans leurs orientations intellectuelles et politiques, les Français se détournent majoritairement vers de nouveaux canaux d’information. Ils ont pour beaucoup choisi de se réfugier dans des communautés, vers la presse locale ou sur internet.
À force d’invasions idéologiques et de concentration de capital dans la presse, ce sont les réseaux sociaux qui servent de détour pour nombre de nos compatriotes.
Évidemment, tous ces moyens ne sont pas toujours sérieux mais ce qu’ils indiquent l’est. Le Journal du Dimanche rappelait en janvier dernier que seuls 24 % des Français faisaient confiance aux médias et beaucoup moins achètent la presse. Il s’agit donc ici de rétablir un peu de ce lien de confiance.
Évidemment, cet amendement ne vient proposer qu’une petite option et rien ne remplacera notamment une sortie des écoles de journalistes de la fabrique de l’idéologie conformiste, mais la publicité de cette charte, qui me semble être une bonne idée, participerait d’une amélioration de l’accessibilité des médias et des manières de traiter l’information. Cette clarification dans la loi serait un signal de clarté.
La commission a donné un avis défavorable à votre amendement, monsieur Bompard, parce qu’il est de fait satisfait, l’article 7 de la proposition de loi prévoyant que les comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes sont consultés lors des travaux d’élaboration des chartes déontologiques et qu’ils devront rendre publics leurs bilans annuels, ce qui répond à votre souci de transparence.
Je vous demande de retirer votre amendement. Sinon, j’y serai défavorable.
Même avis.
L’amendement no 6 n’est pas adopté.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement no 22 rectifié .
Lors de la discussion générale, j’ai bien écouté et entendu les arguments de Christian Kert sur la charte déontologique. Au nom du groupe Les Républicains, il prône la discussion plutôt qu’une négociation, qui pourrait devenir source de difficulté. L’UDI a d’ailleurs défendu la même position.
Je retire donc mon amendement au bénéfice des deux amendements suivants.
L’amendement no 22 rectifié est retiré.
C’est un amendement qui ne nous semble pas négligeable, nous en avons déjà parlé en commission.
Exiger des négociations, c’est une formulation dont la portée juridique, on le sait, fait plus référence au droit du travail qu’à une charte correspondant à une ligne éditoriale, qui n’est pas forcément pas la même d’un journal à l’autre.
Nous proposons donc de remplacer le mot « négociations » par le mot « discussions », dans le respect des lignes éditoriales de chacune des rédactions, afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté et que ce mot « négociations », mal choisi à nos yeux, ne nous entraîne pas vers une espèce de sous-produit de contrat de travail, qui n’a rien à voir avec l’esprit même du mot charte.
Nous avons déjà eu cette discussion en commission et la commission, réunie en application de l’article 88, a donné, par cohérence, un avis défavorable à votre amendement, monsieur Piron.
Cela dit, par respect pour votre démarche et votre argumentation, je vais essayer de vous convaincre que la notion de négociation est plus adaptée que celle de discussion en faisant explicitement référence au dictionnaire Littré ainsi qu’au Vocabulaire juridique du doyen Gérard Cornu, qui font tous deux autorité et auxquels, je sais, vous ne sauriez être insensible :
La notion de discussion désigne plus précisément le débat contradictoire qui ne tend pas nécessairement vers la recherche d’un accord et qui peut donc être clos de manière unilatérale, et la notion de discussion s’entend d’une manière générale d’un examen par débat, voire d’une dispute ou même d’une contestation. En revanche, la négociation désigne d’une manière générale l’action d’arranger les différends et, plus particulièrement en droit, les opérations préalables diverses – entretiens, démarches, échanges de vues, consultations – tendant à la recherche d’un accord.
L’objectif visé, c’est bien qu’il y ait un accord à l’arrivée. C’est la raison pour laquelle il me semble opportun de garder le terme de négociations vu les éminentes références que je me suis permis d’évoquer, sinon d’invoquer.
Dans le droite ligne du Littré ou du doyen évoqué, que le terme de négociations implique une négociation collective de portée nationale relevant du code du travail ne nous semble pas exact puisqu’il est couramment employé pour définir des relations précontractuelles, qu’elles relèvent ou non du droit du travail,
Le terme de discussions que vous souhaitez voir introduit à la place ne porte pas en lui l’idée d’aboutissement. Nous y sommes défavorables.
Je ne peux qu’être impressionné par le recours à de tels auteurs, en quelque sorte par l’utilisation de ce que les Pères de l’Église appelaient l’argument d’autorité, mais il me semble tout de même que vous sollicitez un peu les deux auteurs en question s’agissant du sujet qui nous préoccupe.
Les discussions, dites-vous, ne sont pas censées aboutir, mais l’objet même de ces discussions, c’est une charte et il me semble donc évident qu’elles ont bien pour but de tenter d’aboutir à cette charte.
Quant aux négociations, et vous avez d’ailleurs parlé d’opérations tendant à la recherche d’un accord, il y en a qui n’aboutissent pas, et elles sont nombreuses, les diplomates le savent tous.
Je me permettrai donc, dans le cadre de l’exégèse à laquelle vous venez de vous livrer, d’apporter ma petite contribution interprétative en disant que je ne suis pas vraiment convaincu par l’utilisation du mot négociations, préférant celui de discussions. Il me semble, en effet, plus respectueux des lignes éditoriales que chacun des journaux peut avoir envie de se donner.
Vous aviez présenté un amendement identique, monsieur Kert, l’amendement no 14 .
Nous ne voulons pas paraître obstinés, monsieur le rapporteur, mais il y a une ambiguïté entre cette notion de négociations et les modalités de la négociation collective qui relève du code du travail, vous ne pouvez pas le nier.
Ce que nous voulons, c’est permettre aux rédactions de définir de manière informelle leurs propres processus de dialogue. Nous étions d’un optimisme délibéré en pensant que vous l’accepteriez. Vous n’avez pas l’air d’en convenir, mais nous avons le sentiment que c’est nous qui avons raison. Il semblerait que ce soit vous qui vous obstiniez dans une vision un peu confinée. Nous, nous avons le sentiment que les rédactions ont besoin d’oxygène et vous faites l’inverse. Voilà pourquoi, sans obstination, nous persévérons.
C’est un amendement dont le premier signataire est M. Ciotti, qui, compte tenu des événements dans son département, n’a pu se joindre à nous.
La commission a rétabli, à l’initiative du président rapporteur, le principe selon lequel les chartes déontologiques devront être rédigées conjointement par la direction et les représentants des journalistes.
L’exigence d’une rédaction conjointe par la direction et les représentants des journalistes ne paraît pas appropriée.
Cette exigence est inadaptée à la réalité des entreprises de presse, dont certaines ne comptent que quelques journalistes. Plus globalement, dans la pratique, la mise en oeuvre de cette rédaction conjointe apparaît trop complexe et pourrait nuire à l’objectif poursuivi, en provoquant un effet boomerang. Le présent amendement prévoit que les chartes déontologiques seront rédigées par la direction, après consultation des représentants des journalistes. C’est une mesure de prudence. Nous ne retirons rien, mais proposons une logique différente, qui nous semble plus souhaitable.
Défavorable. Cet amendement vise à ce que les chartes déontologiques relèvent d’une initiative unilatérale de la direction, même si les représentants des journalistes sont consultés. Or nous avons suffisamment discuté, pour ne pas revenir sur le fait que ces chartes, qui sont des droits mais aussi des devoirs, doivent être l’objet d’une corédaction.
J’en profite pour rappeler que les sociétés éditrices disposent de solides bases textuelles sur lesquelles engager des négociations, qu’il s’agisse de la Charte d’éthique professionnelle des journalistes publiée en juillet 1918, à l’initiative du syndicat des journalistes, et révisée en janvier 1938, puis en novembre 2011, ou de la très célèbre Déclaration des devoirs et des droits des journalistes, adoptée en 1971 à Munich.
Défavorable également. Cet amendement s’écarte trop de l’esprit du texte, en passant d’une corédaction à une simple consultation des journalistes, pourtant directement concernés par ce qui sera édicté.
L’amendement no 13 n’est pas adopté.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 30 rectifié .
Cet amendement a pour objectif de combler le vide juridique susceptible de naître, en cas d’absence de charte déontologique à la date limite fixée par le législateur. Il permettrait aux journalistes, en cas de litige relevant des relations professionnelles et en l’absence de charte, d’invoquer les déclarations et les usages professionnels en vigueur. Le journaliste pourrait donc invoquer devant le juge, le cas échéant, les usages en vigueur dans son entreprise ou, plus généralement, dans la profession, notamment la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes de 1971 ou la Charte d’éthique professionnelle des journalistes de 1918, revue en 1938 et en 2011, sans que nous ne donnions pour autant une portée législative à ces textes, qui seraient des référents utiles en cas de carence.
La commission a donné un avis favorable à cet amendement. Nous avions eu une discussion à ce sujet en commission, à laquelle Michel Piron, ici présent, avait d’ailleurs activement participé. Nous nous étions donné rendez-vous en séance pour poursuivre l’échange. Je remercie donc le Gouvernement d’avoir pris cette bonne initiative de fixer comme socle commun à l’ensemble des chartes déontologiques négociées dans l’entreprise les déclarations et usages professionnels en vigueur.
Cela permettra aux journalistes et aux entreprises éditrices, en cas d’échec des négociations sur les chartes – ce cas avait été soulevé par Michel Piron –, de se référer aux déclarations et aux usages professionnels en vigueur. Cela évitera des situations de blocage au 1er juillet 2017, dans le cas où des entreprises seraient sans charte, suite à l’échec des négociations. Il y aura une charte, comme le veut la loi, et il sera fait référence aux déclarations et usages professionnels en vigueur. Je suis heureux de cet amendement qui est l’aboutissement d’un échange que nous avons eu en commission.
Mais Michel Piron, avant même que je ne donne l’avis favorable de la commission, avait demandé la parole…
Merci, monsieur le président. J’avais bien noté que M. Piron avait demandé la parole et je la lui donne bien volontiers.
Je ne voudrais surtout pas que M. le rapporteur croie que ses propos n’alimentent pas ma réflexion. Bien au contraire, vous l’avez même encore un peu plus stimulée.
Sourires.
Mais je tiens à faire une observation et à poser une question. Vous confirmez, tout d’abord, monsieur le rapporteur, qu’une négociation peut ne pas aboutir. Par ailleurs, j’entends bien la réponse de Mme la ministre : s’il n’y avait pas moyen de trouver un accord pour élaborer une charte, on ne serait pas sans rien.
Cependant, en l’absence de cet amendement gouvernemental, la situation ne serait-elle pas exactement la même ? Quel est l’apport juridique de cet amendement ? Je veux bien admettre que la clause de style n’est pas négligeable pour indiquer qu’il n’y a pas obligation d’aboutir à un accord, mais je ne vois pas bien la portée juridique de l’amendement.
L’intérêt de cette disposition, si vous l’adoptez, est de sécuriser, en cas de conflit devant un juge, l’invocation de ces textes par le journaliste.
L’amendement no 30 rectifié est adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
L’article 1er bis A est adopté.
Ni le comité d’entreprise, ni le conseil d’administration des groupes de médias ne sont compétents pour juger de la déontologie. Cet amendement propose de confier ce rôle à une commission paritaire, à l’image de France Télévisions où une telle commission existe et fonctionne depuis 2011. Cet amendement définit la composition d’une telle commission.
J’ai pris connaissance avec beaucoup d’attention des amendements qu’a déposés notre collègue Reiss, car ils ne sont pas tout à fait, si j’ose dire, dans la ligne, s’il y en a une, de son groupe. Je salue cette originalité, qui est toujours réjouissante.
Sourires.
Je saluerai un peu plus tard votre démarche autonome, dans des conditions que je vous laisse découvrir… Je dis cela, pour que mon avis défavorable sur cet amendement-ci ne vous décourage pas pour la suite.
Mêmes mouvements.
Vous proposez de créer une commission nationale paritaire qui serait consultée deux fois par an sur le respect du droit d’opposition des journalistes par les entreprises ou sociétés éditrices de presse. Si j’ai bien compris votre exposé des motifs, il s’agirait d’une commission chargée, en quelque sorte, de juger les questions de déontologie. Je ne peux que partager votre intention de créer une commission nationale paritaire de déontologie. Mais je me dis également qu’elle existe déjà, d’une certaine manière, aujourd’hui, avec l’observatoire des médias, lequel en représente l’élément précurseur.
Cela dit, je crains qu’il ne soit pas dans la vocation de la loi de se substituer, sur ce point précis, aux professionnels pour l’imposer. C’est à la profession de se prendre en charge et, en l’occurrence, de s’organiser s’agissant des questions de déontologie. On ne peut évidemment que l’encourager à se doter d’une telle instance. De ce fait, je préfère que nous en restions à l’équilibre de l’article 1er bis, tel que nous l’avons trouvé en commission, d’autant que votre amendement fait courir le risque que les journalistes et les éditeurs composant cette instance ne soient juges et parties.
L’avis serait donc défavorable. C’est pourquoi je me permets de vous demander plus simplement et plus courtoisement de retirer votre amendement, estimant que, s’il l’adoptait, le législateur franchirait un pas qui n’est pas souhaitable.
Il est également défavorable. Je comprends que ces commissions paritaires existeraient dans chaque entreprise. Cela existe bien à France Télévisions depuis 2011, mais c’est un cas particulier. Le déploiement de France 3 sur l’ensemble du territoire explique et justifie peut-être une telle création. De là à l’imposer à l’ensemble des éditeurs et des entreprises de presse, cela me semble un pas qu’il n’est pas aisé de faire.
Je retire mon amendement, compte tenu des explications qui viennent d’être données.
L’amendement no 23 est retiré.
Cet amendement vise à permettre que les membres du comité d’entreprise soient informés de l’application de charte de déontologie et de l’article 2 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Le comité d’entreprise doit avoir annuellement connaissance du respect des engagements figurant dans la charte de déontologie. Pour ce faire, il nous semble que l’information du comité d’entreprise est à la fois nécessaire et suffisante. Le comité d’entreprise n’étant pas composé exclusivement de journalistes ou de représentants de journalistes, il n’apparaît pas opportun que les questions liées à la déontologie professionnelle des journalistes donnent lieu à un vote de l’ensemble des représentants du personnel. C’est pourquoi le Gouvernement propose de remplacer la notion de consultation par celle d’information.
Cette précision, qui va un peu au-delà de la modification rédactionnelle, est bienvenue. Vous avez raison, madame la ministre, et votre amendement a convaincu la commission qui lui a donné un avis favorable. Ce n’est en effet pas le rôle des membres du comité d’entreprise d’être consultés sur le respect du droit d’opposition des journalistes par l’entreprise éditrice. Par contre, ils doivent être informés.
L’amendement no 32 est adopté.
L’article 1er bis, amendé, est adopté.
Avant de présenter cet amendement, je voudrais rappeler quelques éléments du présent projet, relatifs à la protection du secret des sources des journalistes. Je connais votre attachement à cette réforme. Vous connaissez aussi ma détermination à la voir adoptée, comme le Président de la République s’y était engagé durant la campagne présidentielle. Il nous appartient de trouver ensemble une rédaction qui soit une avancée réelle pour la protection du secret des sources des journalistes. Nous avons bien vu, dans la discussion générale, tout l’intérêt que cela revêt pour le fonctionnement de notre démocratie. J’étais d’ailleurs heureuse de constater, une fois encore, que cette réforme était attendue par l’ensemble de la représentation nationale, ici, à l’Assemblée.
Sur des points particulièrement importants, et je vous en remercie, la commission des affaires culturelles a rétabli des dispositions que l’Assemblée nationale avait adoptées en première lecture, la plupart sur proposition du Gouvernement, et que le Sénat avait écartées de façon brutale. Les modifications introduites par le Sénat avaient pour effet de maintenir la loi actuelle, dont on connaît les insuffisances, et dans certains cas, étaient même en retrait par rapport au texte de 2010, en contradiction avec l’objet même de la proposition de loi.
Les quatre points majeurs rétablis par la commission des affaires culturelles sont les suivants : la protection du secret des sources pour tous les collaborateurs de la rédaction ; la définition des atteintes indirectes au secret des sources afin d’encadrer au mieux les mesures d’enquête portant sur les proches du journaliste ; les cas où le secret des sources peut être levé… En effet, la commission a veillé à supprimer la notion floue de « motif prépondérant d’intérêt public ». Elle l’a remplacé, comme cela était proposé dans l’amendement du Gouvernement, par une liste précise de motifs définis par la gravité des infractions en cause. Enfin, la commission a rétabli la protection du journaliste contre les poursuites pour recel de la violation du secret de l’instruction ou d’un secret professionnel. Il s’agit d’une avancée importante du texte, indispensable à l’exercice de la liberté d’informer.
Au-delà de ces avancées manifestes par rapport au texte issu du vote du Sénat, que votre commission a rendues possibles, je proposerai trois amendements. Le premier vise à harmoniser à sept ans le quantum de peine permettant de mesurer la gravité des infractions pour lesquelles le juge est fondé à enquêter sur les sources, afin de couvrir certaines infractions graves qui ne seraient pas couvertes par un quantum à dix ans. Nous sommes là au coeur de l’équilibre nécessaire entre protection du secret des sources des journalistes et enjeux de sécurité nationale, puisque certains délits qui ne seraient pas couverts par le quantum de peine à dix ans concernent la protection des forces de sécurité. Le deuxième amendement prévoit que les mesures d’enquête puissent intervenir tant pour la prévention que pour la répression des délits en cause. Enfin, le troisième tend à supprimer le caractère nécessairement exceptionnel des mesures d’enquête dès lors que le texte prévoit déjà une liste limitative des cas où le juge peut lever ce secret ; en effet, cette précision ne paraît pas absolument nécessaire. Vous le voyez, nous sommes très proches et je vous présenterai des amendements en conséquence.
L’amendement est défendu.
Je vous épargnerai le propos liminaire sur l’article 1er ter, mais j’expliquerai à chaque fois les raisons pour lesquelles la commission a donné un avis défavorable à certains amendements du Gouvernement.
L’amendement no 38 que vous nous proposez, madame la ministre, vise à supprimer la référence au caractère exceptionnel du recours à des mesures portant atteinte au secret des sources des journalistes, pour des motifs d’ordre constitutionnel. Sans redire ce que j’ai évoqué dans la discussion générale et lors de la présentation de mon rapport, je ne souhaite pas que soit remis en cause l’équilibre que nous avions atteint en première lecture sur l’article 1er ter, et notamment le vote du sous-amendement no 6 de Mme Isabelle Attard, qui précisait que le recours à des mesures susceptibles de porter atteinte au secret des sources ne pouvait avoir lieu qu’à titre exceptionnel. Vous aviez alors, madame la ministre, émis un avis de sagesse au sujet de ce sous-amendement qui a été adopté.
Je reviens sur les motifs d’ordre constitutionnel invoqués dans l’exposé sommaire de cet amendement no 38 . Dans leur version initiale, tant le projet de loi relatif à la protection du secret des sources des journalistes, déposé en 2008 sur le bureau de notre Assemblée et devenu la loi dite Dati du 4 janvier 2010, que le projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes, déposé en 2013 par l’actuelle majorité et qui n’a pour l’instant fait l’objet d’aucun examen en séance publique, prévoyaient tous deux qu’il ne pouvait être porté atteinte au secret des sources des journalistes « au cours d’une procédure pénale qu’à titre exceptionnel ». Les gouvernements de M. Fillon en 2008 et de M. Ayrault en 2013 avaient nécessairement soumis ces deux textes à l’avis du Conseil d’État, qui n’avait alors trouvé rien à redire en matière constitutionnelle. C’est la raison pour laquelle la commission a donné un avis défavorable à l’amendement no 8 du Gouvernement.
J’aimerais que Mme la ministre argumente mieux sa position sur cet amendement no 3 et les deux suivants. Je ne comprends pas pourquoi nous irions dans le sens de l’uniformisation à sept ans au lieu de dix. Je sais que cette proposition vient après, mais j’ai peur que l’adoption de certains amendements ne fasse tomber les autres, en particulier ceux du Gouvernement. J’aimerais avoir plus d’informations pour comprendre ce retour en arrière par rapport au texte de 2010 voté par la commission des lois, qui limitait l’atteinte au secret des sources aux délits du livre IV du code pénal passibles de dix ans de prison. Je ne me sens pas à l’aise devant ce changement d’attitude.
L’amendement no 38 n’est pas adopté.
Cet amendement reprend la position que le Gouvernement avait défendue en première lecture : il prévoit que les mesures d’enquête que le juge pourra autoriser dans le cadre d’une procédure judiciaire peuvent intervenir aussi bien pour la répression que pour la prévention des délits désormais énumérés de façon limitative dans le texte. En matière de répression, l’amendement prévoit que le juge devra examiner un élément supplémentaire pour apprécier la nécessité et la proportionnalité des mesures : le besoin de faire cesser le délit en train d’être commis ou le risque élevé de répétition. Votre commission a bien intégré ce dernier critère, mais dans un paragraphe relatif aux conditions qui doivent être systématiquement vérifiées. Il nous paraît préférable de revenir à la rédaction que nous vous avions proposée, c’est-à-dire d’en faire un élément d’appréciation de la proportionnalité pour le juge, afin de ne pas enserrer de façon trop stricte cette capacité protégée par le droit constitutionnel.
Cet amendement vise à revenir à la définition des mesures susceptibles de porter atteinte au secret des sources proposée par le Gouvernement en première lecture dans son amendement no 64 rectifié : prévention ou répression soit d’un crime, soit d’un délit. Comme il remet en cause l’équilibre atteint sur cette question en première lecture, notamment le vote des trois sous-amendements nos 71 , 73 et 74 de Michel Pouzol, la commission, par cohérence, s’est montrée défavorable à l’amendement no 39 . Pour ceux qui ont suivi le feuilleton depuis 2013, j’indique que cet amendement remet également en cause le vote sur le projet de loi renforçant la protection du secret des sources, intervenu en commission des lois – alors présidée par qui vous savez… – en décembre 2013. Pour toutes ces raisons, notamment par respect pour le travail accompli par Michel Pouzol et par la rapporteure de la commission des lois, Marie-Anne Chapdelaine, et pour permettre au garde des sceaux de rester cohérent par rapport aux positions qu’il tenait quand il présidait la commission des lois, notre commission a donné un avis défavorable à l’amendement no 39 .
M. le rapporteur a brillamment rappelé le travail que nous avons fait sur cet amendement. Nous comprenons la logique du Gouvernement et partageons sa préoccupation, mais nous privilégions la logique inverse. La disposition que nous défendons sera plus efficace tant pour le bon fonctionnement de la justice et la répression des délits que pour la protection du secret des sources des journalistes – notre préoccupation première aujourd’hui.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, vu l’importance du sujet, vous auriez pu vous mettre d’accord ! Nous allons nous abstenir, sans que cela change grand-chose au résultat ; en effet, nous devons rester conformes à notre vote sur l’article 1er, auquel nous étions favorables. Mais le sujet qu’évoque Mme la ministre prend une coloration particulière dans la période que nous vivons. Vous auriez pu vous concerter pour trouver un consensus entre vous !
Monsieur Kert, vous avez un petit temps d’avance ; nous irons dans le sens que vous souhaitez…
…celui de la parfaite cohérence entre la majorité de l’Assemblé et le Gouvernement, à propos de l’amendement no 40 . Je voulais toutefois vous rappeler que vous aviez voté les trois sous-amendements de Michel Pouzol, ainsi que l’article 1er ter, tel qu’il avait été rédigé en première lecture. C’est cet équilibre que la commission a voulu préserver en donnant un avis défavorable à l’amendement no 39 du Gouvernement. Mais avec l’amendement no 40 , nous avons pris en compte votre préoccupation.
L’amendement no 39 n’est pas adopté.
Cet amendement est l’exact contraire de l’amendement no 40 qui suivra, déposé par le Gouvernement. Il vise à mieux protéger le secret des sources – un des objectifs de ce texte, comme l’a rappelé Michel Pouzol. Il s’agit de restreindre au mieux les cas d’atteinte au secret des sources : un enquêteur pourra avoir accès aux fadettes d’un journaliste si la source a commis un délit, mais uniquement pour les délits du livre IV du code pénal passibles de dix ans de prison ou plus. Mon amendement va dans le sens opposé du vôtre, madame la ministre, mais nous devons en rester au texte voté par la commission des lois en 2010. Je ne vois pas pourquoi nous changerions d’avis aujourd’hui ! Le texte de 2010 allait dans le sens de la protection du secret des sources, et nous devons aujourd’hui le respecter en le laissant en l’état.
Madame Attard, si nous votions votre amendement, non seulement nous remettrions en cause l’équilibre que nous avons collectivement trouvé – je rappelle qu’en première lecture le texte avait été voté à l’unanimité –, mais surtout je serais privé de mon argument précédent. En effet, votre proposition remettrait en cause la version votée par la commission des lois en décembre 2013 puisqu’il avait alors été décidé de viser les délits d’atteinte à la personne humaine punis d’au moins sept ans d’emprisonnement et non ceux punis d’au moins dix ans d’emprisonnement, comme vous le proposez.
Mes références restent le vote de la commission des lois en décembre 2013 et celui de l’Assemblée en première lecture. Avis défavorable, à moins que vous ne retiriez votre amendement ; mais comme ce n’est pas forcément dans votre culture politique, je ne saurais vous faire violence…
Sans surprise, le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Porter de sept à dix ans le quantum de peine servant à mesurer la gravité des délits dont la prévention et la répression peuvent justifier que le juge lève le secret des sources ne permettrait pas d’englober certaines atteintes – pourtant graves – aux intérêts de la Nation. Je peux, si vous le souhaitez, vous donner la liste de ces atteintes.
Le quantum de sept ans permet de maintenir l’équilibre entre la protection des sources des journalistes et les nécessités de la poursuite et de la répression des infractions les plus graves. Il semble au Gouvernement que cette durée est la mieux adaptée. Dans cette perspective, je défendrai dans quelques instants l’amendement no 40 , qui vise lui aussi à modifier l’article 1er ter.
Je suis surprise par ce que vous avez dit de la loi du 4 janvier 2010. Précisément, celle-ci ne mentionnait que la notion, d’ordre général, d’« impératif prépondérant d’intérêt public », et ne dressait pas une liste limitative – comme nous le faisons par cette proposition de loi – des cas dans lesquels le secret des sources pourrait être levé.
L’amendement no 5 n’est pas adopté.
Cet amendement important vise à garantir l’équilibre et la cohérence de ce texte, et à harmoniser le droit en fixant partout à sept ans le quantum de peine servant à mesurer la particulière gravité des délits dont la prévention ou la répression peut justifier qu’on lève le secret des sources d’un journaliste. C’est un grand progrès, car ces cas seront ainsi limitativement énumérés ; ils ne seront plus définis par une notion floue, imprécise. Ce quantum de peine permet d’englober un certain nombre de cas qu’il ne faudrait pas laisser de côté, afin de mieux prévenir ou réprimer les atteintes aux intérêts de la Nation – ce qui est par ailleurs une demande explicite du Conseil d’État.
Par exemple, le seuil unique de sept ans permettrait de rechercher une source qui serait à l’origine des délits suivants : divulgation d’identité d’un agent des services de renseignement, atteinte au secret au secret de la défense nationale, ou encore fourniture de fausses informations aux autorités françaises de nature à les induire en erreur et de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, lorsque ces faits sont commis en vue de servir les intérêts d’une puissance, entreprise ou organisation étrangère.
En tout état de cause, la fixation d’un seuil de sept ans n’entraîne pas de risque d’atteinte abusive au secret des sources, puisque le texte exige en outre que l’atteinte soit « strictement nécessaire » et qu’elle soit « proportionnée au but légitime poursuivi », étant précisé qu’« il est tenu compte, pour apprécier la nécessité et la proportionnalité, de la gravité des faits, des circonstances de la préparation ou de la commission de l’infraction et du nombre et de la qualité des victimes et des mis en cause. »
Cet amendement est important pour concilier la protection du secret des sources avec les impératifs prépondérants de sécurité – qui relèvent, comme je vous le disais, des exigences constitutionnelles que le Conseil d’État a rappelées dans son avis sur le projet de loi de 2013 qui a été évoqué. Son adoption par l’Assemblée nationale me semble donc nécessaire.
Nous avons souhaité conserver l’article 1er ter dans sa rédaction issue des travaux en commission, c’est-à-dire dans sa rédaction issue de l’examen de ce texte en première lecture dans notre assemblée. La commission a donc décidé de donner un avis défavorable à tous les amendements déposé sur cet article.
Toutefois la discussion dans l’hémicycle ne peut être la répétition exacte de la discussion en commission, ne serait-ce que parce que le Gouvernement est présent en séance, alors qu’il ne l’était pas en commission. Mme la ministre a ainsi déposé un amendement sur cet article. En tant que rapporteur, je me dois de relayer l’avis défavorable de la commission, pour les raisons que je viens d’indiquer – à savoir : il ne faut pas modifier le texte, pour ne pas modifier l’équilibre que nous avions trouvé.
L’intervention de M. Kert a trouvé d’une certaine manière un écho dans l’argumentation développée à l’instant par Mme la ministre. Quoi qu’il en soit, pour ma part, en tant que rapporteur, je propose d’en rester là : c’est ici que mon rôle s’arrête.
Nous avons beaucoup discuté de cet amendement, entre nous et avec le Gouvernement. Nous avions fixé le quantum de peine à dix ans, pour limiter les restrictions au secret des sources des journalistes – je précise que ce quantum s’applique aux délits, non aux crimes. Cela nous tenait particulièrement à coeur, car nous estimons qu’il y a d’autres moyens pour réprimer les délits que de lever le secret des sources.
Toutefois nous avons bien pris note de ce que nous a dit le Gouvernement : certaines personnes, notamment les militaires en opération extérieures ou les membres des services de renseignement, pourraient être dangereusement concernées par ces dispositions. Nous nous rallions donc à cet amendement.
Nous voulons avancer collectivement pour que le secret des sources soit vraiment inscrit dans la loi. C’était une bataille longue et difficile ; c’est un pas que nous accomplissons pour trouver un accord global. Comme vous le voyez, il y a une totale cohérence entre le Gouvernement et la majorité.
Cet échange constructif est le signe d’une véritable coconstruction législative. Je tiens à saluer l’investissement de Michel Pouzol sur cette question depuis trois ans. Il était en effet rapporteur pour avis de notre commission sur le projet de loi initial du Gouvernement, relatif à la protection du secret des sources des journalistes. Je rends donc hommage à Michel Pouzol et à Marie-Anne Chapdelaine. En n’adoptant pas l’amendement no 39 , il y a quelques instants, nous avons bien maintenu la distinction des régimes applicables aux crimes et aux délits. Cette distinction est centrale : vous y tenez énormément. Vous nous avez convaincus qu’on ne peut mêler prévention et répression des délits comme on mêle prévention et répression des crimes.
L’amendement no 40 touche, quant à lui, à une question liée au quantum de peine, dans une démarche d’harmonisation et pour les raisons évoquées par Mme la ministre. Pour répondre aux préoccupations que vous avez exprimées, monsieur Pouzol, sachez que l’équilibre de la première lecture se trouve, de fait, maintenu. J’espère que cette intervention vous rassurera complètement – bien que vous vous soyez déjà, d’une certaine manière, rassuré vous-même.
Je suis un peu surprise, monsieur le rapporteur, que vous demandiez à notre assemblée d’être cohérente avec le Gouvernement concernant cet amendement no 40 , alors que vous avez demandé le rejet des amendements nos 38 et 39 . Je suis déçue que le texte initial ait été modifié, et que les négociations interministérielles aient été plus favorables au ministère de l’intérieur, voire au garde des sceaux, qu’au ministère de la culture, qui est en charge de la protection des sources des journalistes. Ce recul me déçoit : j’aurais aimé qu’on s’en tienne à l’avis initial de la commission, qui était défavorable.
L’amendement no 40 est adopté.
Il s’agit d’un amendement de précision. Cette précision était présente dans la version adoptée par la commission des lois en 2013. Il s’agit de préciser que les atteintes au secret des sources, dans les cas précis dont nous venons de parler, doivent non seulement respecter le principe de proportionnalité, mais au-delà, être absolument nécessaires.
Compte tenu des amendements du Gouvernement, tant ceux que nous avons rejetés que celui que nous avons adopté, cet amendement est retiré.
L’amendement no 36 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 2 , qui reste en discussion ?
L’amendement no 2 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Cet amendement vise à compléter l’alinéa 11 de l’article 1er ter. J’ai bien noté que la commission, réunie conformément à l’article 88 de notre règlement, a donné un avis défavorable à cet amendement. J’ai toutefois cru déceler chez M. le rapporteur un intérêt pour cet amendement – intérêt confirmé par le fait qu’il a déposé un sous-amendement.
Dans une rédaction simplifiée, cet amendement vise à ajouter deux notions très importantes pour l’appréciation de la proportionnalité des atteintes au secret des sources. Ceux deux notions figurent dans la loi du 4 janvier 2010 ; il s’agit de « l’importance de l’information recherchée » et de « son caractère indispensable à la manifestation de la vérité ».
La commission a donné un avis défavorable à cet amendement, pour la bonne raison qu’elle avait décidé de donner un avis défavorable à tous les amendements déposés sur l’article 1er ter. La commission maintient, bien entendu, cet avis.
Je me suis cependant permis, monsieur Reiss, d’aller dans votre sens en déposant le sous-amendement no 42 , qui vise à améliorer la cohérence de votre amendement no 24 . Vous souhaitez maintenir dans notre droit la formulation retenue par la loi du 4 janvier 2010 dite loi Dati, en la faisant figurer à l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881. En l’état actuel, cet article prévoit qu’ « Au cours d’une procédure pénale, il est tenu compte, pour apprécier la nécessité de l’atteinte, de la gravité du crime ou du délit, de l’importance de l’information recherchée pour la répression ou la prévention de cette infraction, et du fait que les mesures d’investigation envisagées sont indispensables à la manifestation de la vérité. »
Vous souhaitez donc, par cet amendement, apporter une précision à cette proposition de loi. Le sous-amendement no 42 que j’ai déposé vise à ce que cette précision figure aussi dans les dispositions similaires du code de procédure pénale – en l’occurrence, le deuxième alinéa de l’article L. 706-185 nouveau du code de procédure pénale. Je suis favorable à ce que nous puissions nous rassembler sur ces dispositions. Voilà le signe, monsieur Reiss, que je souhaitais vous donner.
Par cette proposition de loi, vous avez choisi de remplacer les critères flous de la loi du 4 janvier 2010 par des critères précis et énumérés de façon limitative. En introduisant dans cette proposition de loi des formules issues de la loi du 4 janvier 2010, cet amendement vise à revenir à des critères généraux. Cela ne me semble pas nécessaire : il vaut mieux en rester aux critères précis et limitatifs qui ont été fixés par la commission.
Cela me gêne de revenir sur le travail accompli jusqu’ici, qui consistait à dresser une liste de critères précis. Certes, cela reviendrait, d’une certaine manière, à maintenir une partie du droit en vigueur, mais cela ne me semble pas cohérent avec le reste des dispositions de cette proposition de loi.
Je m’en remets cependant à la sagesse de l’Assemblée, tant pour l’amendement no 24 que pour le sous-amendement no 42 .
Je vous remercie, madame la ministre, de vous en remettre à la sagesse de l’Assemblée. Si nous sommes amenés à légiférer en ce domaine, revenant sur la loi du 4 janvier 2010 dite « loi Dati », c’est parce qu’il y a une imprécision juridique qui insatisfait tout le monde – au premier chef les journalistes, bien entendu, mais pas uniquement. Cette imprécision tenait à la fameuse notion d’ « impératif prépondérant d’intérêt public ». Avec cette proposition de loi, cette notion disparaîtra, et l’amendement de M. Reiss ne vise pas à faire rentrer par la fenêtre ce que l’on a fait sortir par la porte !
Tous les éléments que vous approuvez de cette proposition de loi subsisteront, madame la ministre : il ne s’agit pas de substituer des critères à d’autres, mais de les ajouter. Il s’agit de préciser que les atteintes doivent être nécessaires à « la manifestation de la vérité » : cette affirmation généreuse, qui nous plaît tant, ne doit pas disparaître dans ce travail de clarification.
Il s’agit donc d’un ajout qui n’enlève rien, madame la ministre, à la suppression d’une imprécision juridique dommageable concernant des motifs prépondérants d’intérêt public, imprécision qui était la cause principale de l’insécurité juridique en la matière. Le Gouvernement s’en remettant à la sagesse de notre Assemblée, nous pouvons voter en toute sérénité l’amendement ainsi sous-amendé.
Le sous-amendement no 42 est adopté.
L’amendement no 24 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Jacques Bridey, pour soutenir l’amendement no 34 .
La protection de l’anonymat des forces spéciales qui luttent contre le terrorisme doit être sujette aux mêmes conditions, qu’elles opèrent sur des théâtres extérieurs ou intérieur, et non seulement dans le cadre des services spécialisés de renseignement Or, en l’état actuel du texte, les peines et les amendes encourues par les personnes qui lèvent leur anonymat ne sont pas les mêmes puisque la modification prévue à l’alinéa 41 – faisant passer la peine maximale de cinq ans à sept ans d’emprisonnement et l’amende de 75 000 euros à 100 000 euros – ne concerne que les seuls agents des services de renseignement. L’amendement que je soutiens, dont Mme la présidente de la commission de la défense est l’initiatrice, propose d’harmoniser les sanctions encourues en modifiant l’article 413-14 du code pénal pour que les forces spéciales qui interviennent sur les théâtres d’opération extérieurs ainsi que les membres des groupes d’intervention des forces de sécurité intérieure soient, eux aussi, concernées par ladite modification, qu’ils relèvent du ministère de la défense pour les premiers ou du ministre de l’intérieur pour les seconds. Car ils luttent également contre le terrorisme et pour notre sécurité.
L’avis est défavorable pour les mêmes raisons qu’exprimées précédemment. Monsieur Bridey, vous n’en êtes en rien responsable, mais je regrette que cet amendement ne nous soit parvenu que ce week-end et que je le découvre donc à l’instant. En tant que rapporteur, je n’ai pu procéder à aucun travail préparatoire ni à aucun échange, que ce soit avec notre excellente collègue ou éventuellement avec le cabinet ministériel le plus concerné, susceptible de me forger une conviction. Je pense être un rapporteur ouvert qui ne cherche qu’à être convaincu, mais encore faut-il que je puisse l’être, au moins au terme d’un petit coup de téléphone.
Cet amendement me semble tout à fait utile et cohérent puisque les infractions prévues aux articles 413-13 et 413-14 du code pénal sont en effet similaires ; les sanctions applicables le seront ainsi également. Voilà une cohérence qu’il serait bon d’inscrire dans le texte.
Reprenant les remarques de notre rapporteur, je souligne à mon tour qu’on aurait eu une plus grande facilité à travailler sur cet amendement en commission si nous l’avions reçu plus tôt et qu’il ait pu alors nous être clairement expliqué, d’autant plus que l’objectif est de prévoir plus de cohérence en la matière entre des agents du Gouvernement qui travaillent à l’extérieur et ceux qui exercent leurs fonctions en France. Étant donné la période très troublée que traverse notre pays, on peut comprendre qu’il apparaisse plus que jamais nécessaire de leur assurer la même protection au regard de leur anonymat. Cela irait dans le sens de l’augmentation du quantum de peine que nous avons déjà adoptée – sept ans au lieu de cinq ans. Il est important que nos agents soient considérés de la même façon qu’ils agissent à l’extérieur ou à l’intérieur, et ce quel que soit le ministère dont ils dépendent. À titre personnel, je pense qu’il s’agit d’une bonne initiative tout en regrettant que nous n’ayons pas pu y travailler plus en amont.
Je vais essayer de convaincre M. le rapporteur, tout d’abord en lui présentant nos excuses puisque nous ne nous sommes aperçus que la modification de l’article 413-13 ne concernait que les services spécialisés de renseignement mercredi soir seulement, et c’est après en avoir discuté avec le cabinet du ministre de la défense que nous avons vu qu’il fallait déposer un amendement pour harmoniser le régime juridique de la protection de l’anonymat de l’ensemble des agents qui couvrent le champ de la lutte contre le terrorisme. On sait tous très bien que les actions contre le terrorisme, qu’elles se déroulent à l’extérieur ou dans notre pays, sont complètement liées. Il faut que nos agents qui oeuvrent à cet effet, quels qu’ils soient, soient protégés pareillement. Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement en urgence, à seize heures quarante-cinq alors que le délai maximal était fixé à dix-sept heures. Nous avons été pris par le temps, l’actualité justifiant encore plus ce dépôt en urgence.
L’amendement no 34 est adopté.
L’article 1er ter, amendé, est adopté.
L’article 1er quater est adopté.
Cet article est inspiré par l’article 3-1 de la loi de 1986 qui ne me convenait déjà pas. Je pense qu’à l’exclusion de la mise en avant des identités locales et de notre patrimoine culturel et religieux, ce qui est une bonne chose, l’État n’a pas à s’introduire encore plus dans les foyers en déterminant les contenus médiatiques. Les Français riront en lisant qu’il est prévu que le Conseil supérieur de l’audiovisuel garantisse « l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes ». Ils savent que les programme ne sont pas pluralistes mais que ceux-ci serinent les chemins suivre aux bons citoyens asservis et que la dépendance de l’information est totale depuis plusieurs décennies.
Je rappelle que l’histoire de la gauche et des médias, c’est aussi celle de plusieurs scandales financiers liés à des entreprises de presse. Vous ramenez le débat sans cesse à la IIIe République, et c’était en effet bien la réalité. Mais cessons de mentir à nos concitoyens qui ne croient pas une seconde à la définition du journaliste que vous évoquez. Il faut sortir les écoles de journalisme de l’idéologie, en revenir à la diversité des rédactions, cesser de jouer des aides publiques pour satisfaire des amis politiques, cesser de permettre les rabais fiscaux aux anciens biographes… Voilà ce que les Français veulent : la liberté réelle, pas une énième pétition de principe qui ne peut même pas laisser espérer des suites.
À la première phrase de l’alinéa 3, il est proposé de substituer aux mots : « [Le Conseil supérieur de l’audiovisuel] garantit l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes », les mots : « garantit l’indépendance de l’information, des programmes et des rédactions ». Il y a peu, Jean-Baptiste Rivoire, rédacteur en chef adjoint de l’émission « Spécial investigation », sur Canal+, a fait part à notre rapporteur qu’il trouvait cette proposition de loi intéressante, mais qu’elle ne prévoyait pas ce qu’il pouvait faire si on lui refusait ses sujets. Nous en avons longuement parlé avec mes collègues, en particulier Stéphane Travert et Michel Pouzol, lors de l’audition des responsables de Canal+. Que faire donc lorsqu’on lui refuse ses sujets alors que ceux-ci traiteraient des partenaires actuels et futurs de son patron, c’est-à-dire de M. Bolloré ? C’est bien l’indépendance des rédactions qui est alors en question. C’est pourquoi il nous paraît crucial que le Conseil supérieur de l’audiovisuel veille aussi à leur indépendance et qu’il convient à cet effet de modifier la formulation de l’alinéa 3. Quant à la notion d’honnêteté, nous estimons, comme en première lecture, qu’il n’est pas possible d’apporter une garantie similaire s’agissant de l’information, qui relève d’une logique très différente : les journalistes sont déjà tenus de vérifier la source de l’information qu’ils diffusent et de faire preuve de rigueur dans son traitement.
L’avis est défavorable car mon incompréhension reste aussi grande, madame Attard, qu’en première lecture. Je ne sais toujours pas pourquoi vous en voulez tant au principe de l’honnêteté de l’information, d’autant plus c’est celui qui fait l’objet dans les conventions des dispositions les plus précises et les plus homogènes parmi tous les principes défendus par le CSA. Je le rappelle car, contrairement à ce que j’ai entendu ici ou là, il ne s’agit pas de créer ex nihilo une nouvelle mission pour le CSA. Fort heureusement, il a déjà, parmi ses attributions, celles d’assurer la liberté, l’indépendance et l’honnêteté de l’information. Par conséquent, je trouverais regrettable et paradoxal de lui retirer une des missions dont il s’acquitte aujourd’hui le mieux eu égard à la démarche qui est la nôtre.
Même avis que celui excellemment exposé par Patrick Bloche : cette compétence du CSA en matière d’honnêteté de l’information existe depuis bientôt trente ans. Comme je l’ai dit en première lecture, c’est par exemple sur ce fondement que l’éditeur s’engage devant lui à ne pas recourir, dans les émissions d’information, à des procédés technologiques qui permettraient de modifier le contenu ou le sens des images. Il s’agit bien alors de garantir l’honnêteté de l’information. Il faut absolument maintenir cela parmi ses missions.
Certes, la notion d’honnêteté figure déjà dans la loi du 30 septembre 1986 instituant la Commission nationale de la communication et des libertés, et le CSA doit tenir compte de l’honnêteté de l’information, notamment en vue de l’attribution des fréquences, mais la réalité du contrôle n’a lieu qu’en cas de litige devant le juge. Par ailleurs, notre rédaction reprend celle présentée par le sénateur David Assouline et ses collègues socialistes dans leur proposition de loi relative à l’indépendance des rédactions débattue en février 2016 : « […] garantit l’indépendance de l’information, des programmes et des rédactions ». J’aimerais avoir aussi votre avis, monsieur le rapporteur, madame la ministre, non pas uniquement sur la première partie de notre amendement mais également sur ce que nous proposons pour renforcer la protection des rédactions.
L’amendement no 3 n’est pas adopté.
Cet amendement vise à clarifier le champ d’application de la nouvelle mission que la proposition de loi confie au CSA. La notion de « programmes » est essentielle puisqu’elle permet d’appréhender les documentaires, les magazines ou certaines parties des émissions de divertissement, qui font une large part à l’expression politique, afin de garantir une information honnête, indépendante et pluraliste de nos concitoyens. Il est en effet nécessaire que nous ne nous limitions pas à certaines émissions – journaux télévisés, par exemple.
C’est la raison pour laquelle, en première lecture, j’avais émis un avis défavorable à un amendement qui ne visait que les programmes d’information. En effet, comme on le voit, les différentes composantes peuvent être mêlées. La notion de programme reste toutefois trop large par rapport à l’objet de la proposition de loi.
Cet amendement offre donc un compromis en visant les programmes qui concourent à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information. À titre d’exemple, une émission strictement musicale ne participerait pas de cette mission. En revanche, un documentaire politique ou un magazine contribuant à l’information sur la société serait pleinement couvert par cette formulation. Celle-ci permet, me semble-t-il, d’atteindre le point d’équilibre que nous recherchons depuis le début de nos travaux.
À mon corps défendant, la commission a donné un avis favorable à cet amendement du Gouvernement, qui vise à circonscrire les programmes à ceux qui concourent à l’information. L’exposé de Mme la ministre introduit cependant des questionnements.
De mon point de vue, en effet, on complique la tâche du CSA, qui devra trier les programmes, compte tenu du développement de « l’infotainment »évoqué par Mme la ministre, c’est-à-dire de ces émissions de divertissement invitant des personnalités politiques. Or je crains que le CSA ne distingue difficilement les programmes qui concourent ou non à l’information. En première lecture, j’avais ainsi évoqué le risque de contentieux inutiles et d’une loi qui, dès sa rédaction, crée des difficultés d’interprétation.
Évoquer les programmes qui concourent à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information revient à introduire une autre notion. Aussi, votre exposé sommaire, madame la ministre, va dans mon sens, ce dont je me réjouis. Il revient toutefois à compliquer la loi. À mon sens, le pronom « y » fait davantage référence à l’information qu’à la liberté, à l’indépendance et au pluralisme.
Je me suis peut-être exprimée de façon trop floue : il s’agit bien de veiller à l’indépendance, à l’impartialité et au pluralisme des programmes qui concourent à l’information. Cette nouvelle mission s’applique donc non seulement aux journaux télévisés, mais à tous les programmes qui concourent à l’information – magazines, documentaires, émissions mixtes.
Les programmes qui concourent à l’information entrent donc dans le champ d’application de cette nouvelle mission.
En tant que rapporteur, je maintiens naturellement l’avis favorable de la commission à cet amendement. À titre personnel, cependant, je continue à faire part de mon scepticisme quant à la manière dont le CSA pourra distinguer les différentes missions, les frontières entre l’information et le reste des programmes étant, comme on le sait, de plus en plus poreuses.
Ces discussions sur un même amendement ne peuvent durer indéfiniment : veillez à les clore ! J’invite chacune et chacun à davantage de discipline sur ce point.
La parole est à Mme la ministre.
Je précise très rapidement que le CSA décompte les temps de parole pour ce type de programmes. Il effectue donc déjà un tel tri.
L’amendement no 31 est adopté.
Cet amendement efface la référence aux conventions, car comme je le disais dans la discussion générale, la réécriture de l’article par M. le rapporteur n’a pas levé tous les doutes quant au contrôle du CSA sur les relations entre les journalistes et leurs directions ou actionnaires. Certes, nous avons pu reconnaître certaines avancées. Pourtant, le fait de maintenir dans les conventions des stipulations relatives au contrôle par le CSA du droit d’opposition des journalistes n’est pas satisfaisant.
Il ne revient pas au CSA de réguler ce principe d’opposition, lequel relève uniquement de la compétence du juge du travail. Si le présent texte devait maintenir un contrôle du CSA sur ce droit d’opposition, celui-ci ne saurait être traité au sein des conventions.
Avis défavorable. Ce point a été abordé en première lecture, en commission comme en séance, puis, une nouvelle fois, en commission. Je l’évoquais également dans mon intervention liminaire. Je désespère de vous convaincre, monsieur Kert. Le contrôle du CSA, je le répète avec insistance, s’exercera évidemment a posteriori.
Avis défavorable.
L’amendement no 15 n’est pas adopté.
L’impartialité du CSA est un enjeu politique important. L’audiovisuel ne connaît pas, en France, la même liberté que dans bien d’autres pays. Chacun sait qu’un phénomène comme celui que connaissent les États-Unis avec Donald Trump serait impossible dans notre pays : des chartes, des arrangements, des règlements, viennent décider des personnalités visibles ou non à la télévision. La polémique sur la retransmission des photos et des films de l’attentat de Nice et sur l’auto-censure, qui n’a pas été parfaite, est hautement significative de ce qu’est le monde médiatique de notre pays. Cela vient d’un entre-soi que vous devriez être capables de dénoncer, mesdames et messieurs les députés.
Aujourd’hui, sur les écrans et dans les journaux nationaux, nous trouvons une minorité représentative des organes partisans, sans rapport avec le pays réel. En allumant BFM TV et iTélé, il semble que la France se réduise à 100 kilomètres autour de Paris. Cela a évidemment une incidence sur la crédibilité des discours et conduit près de la moitié des Français à refuser systématiquement de se rendre aux urnes.
Ce petit arrangement de la loi, je le répète, ne changera rien. C’est bien à une libéralisation du serpent médiatique qu’il faudra aboutir, afin de briser les empires de quelques magnats, qui prospèrent sur le politiquement correct. Commençons par mieux sélectionner les intervenants et par répondre à la critique de la majorité des Français.
Avis défavorable. Monsieur Bompard, vous voulez interdire aux anciens collaborateurs parlementaires ou aux membres de cabinets ministériels d’être membres du collège du CSA. Je suis étonné que cette interdiction ne vise pas les parlementaires que nous sommes. Il est vrai que d’anciens parlementaires siègent dans ce collège.
Cet amendement n’a aucun rapport avec l’objet de la présente proposition de loi.
Même avis défavorable. J’ajoute que, par une loi du 15 novembre 2013, cette majorité a considérablement renforcé les garanties d’indépendance relatives à la composition du CSA.
L’amendement no 7 n’est pas adopté.
L’article 2, amendé, est adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 11 , qui vise à supprimer l’article.
Le premier alinéa de cet article vise à préserver annonceurs et journalistes de tout stéréotype. Ainsi, les intérêts économiques des actionnaires, des éditeurs de services de communication audiovisuelle et de leurs annonceurs ne devront pas porter atteinte à ce principe.
L’article 17 de la loi relative à la liberté de communication, dite loi Léotard, visait à promouvoir les mesures en faveur de la cohésion sociale et relatives à la lutte contre les discriminations. Prenons un cas d’école intéressant, le traitement de l’affaire des Chorégies d’Orange : il y a quelque jours, madame la ministre, vous répondiez à L’Express, sans que ce journal ne m’accorde aucun entretien ni droit de réponse – la version que j’ai envoyée n’a pas été publiée –, alors que vous m’attaquiez gravement. Rappelons que votre respect des valeurs républicaines intègre le chantage aux subventions. J’y vois pour ma part une discrimination contre les Orangeois et la preuve d’un refus de la cohésion sociale. Selon vous, madame la ministre, une municipalité qui ne convient pas à vos cénacles ne devrait pas avoir de droit d’expression. C’est d’ailleurs le cas. Si ce principe vous paraît acceptable, craignez dès maintenant d’en subir les conséquences dans un temps électoral proche.
Cet article ne traite pas de ce point mais plutôt de la promotion du multiculturalisme et des comportements de marge. Je ne souhaite pas que ces derniers soient davantage mis en avant – ils le sont déjà énormément.
Avis défavorable, naturellement. Cet amendement fait tomber les moyens qu’a le CSA de contrôler le respect de la liberté, de l’indépendance et du pluralisme des médias à travers les conventions qui le lient aux éditeurs de radio et de télévision.
Même avis.
L’amendement no 11 n’est pas adopté.
L’article 3 est adopté.
Les articles 5 et 6 sont successivement adoptés.
Cet amendement vise à substituer à la notion de société éditrice celle de « personne morale éditrice » car certains éditeurs de presse peuvent être organisés en associations. Il est donc plus vaste qu’une simple correction rédactionnelle.
Cet amendement poursuit le même objectif que celui de M. le rapporteur, auquel je serai naturellement favorable.
L’élargissement en première lecture du champ des comités aux services de télévision locaux implique de tenir compte de la présence d’associations, donc de ne plus faire référence à des sociétés mais, comme cela a été fait par M. le rapporteur, de choisir un terme plus générique, comme le renvoi aux organes dirigeants.
La commission a donné un avis favorable à mon amendement. C’est pourquoi je souhaiterais que le Gouvernement retire le sien, qui lui est presqu’identique, à son bénéfice.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le président, j’ai demandé préalablement au Gouvernement s’il aurait la courtoisie de retirer son amendement.
Je me permets de le signaler dans la mesure où Mme la ministre a donné un avis favorable, au nom du Gouvernement, à l’amendement no 26 .
La parole est à Mme la ministre.
Je retire bien volontiers l’amendement no 33 .
L’amendement no 33 est retiré.
L’amendement no 26 est adopté.
Il s’agit d’un amendement de précision, sur lequel la commission a émis un avis favorable.
Favorable.
L’amendement no 27 est adopté.
Nous suggérons de supprimer la dernière phrase de l’alinéa 2 de l’article 7, qui précise : « Cette information est transmise concomitamment à la direction de la société. Il rend public son bilan annuel. »
Nous sommes en total désaccord avec cette disposition. Nous pensons que pour assurer le bon fonctionnement du comité au sein de l’entreprise et garantir son efficacité, la confidentialité de ses travaux est un préalable. Ce comité jadis « d’éthique » n’a pas vocation, nous semble-t-il – et cela nous paraît conforme à l’esprit de la proposition de loi –, à être jugé en fonction du nombre d’autosaisines qu’il aura réalisées annuellement. Nous pensons qu’il convient de prendre en considération le critère qualitatif plutôt que le quantitatif. Nous sommes par conséquent très hostiles au caractère public prévu par l’alinéa.
Je pense que, selon la tradition anglo-saxonne du « name and shame », le simple fait de rendre public les éventuels manquements constatés par les comités constituera à lui seul la plus forte des sanctions et, par conséquent, la meilleure garantie qu’ils ne se reproduisent pas. D’où l’avis défavorable qu’a émis la commission sur cet amendement.
Même avis.
L’amendement no 16 n’est pas adopté.
Le présent amendement tend à simplifier la procédure de nomination des membres des comités, sans pour autant réduire les garanties de leur indépendance.
Si cette procédure était fixée par le cahier des charges des sociétés nationales de programme, dont la modification doit être soumise pour avis au CSA, faire l’objet d’une consultation du conseil d’administration de la société en cause et être approuvée par décret, cela s’avérerait excessivement contraignant.
De même, si les conventions passées entre le CSA et les éditeurs privés devaient fixer la composition des comités propres à chaque service et intégrer, le cas échéant, toute modification ultérieure, cela reviendrait à imposer un travail fastidieux au régulateur.
L’amendement propose que, dans l’un et l’autre cas, les décisions de nomination soient notifiées au CSA, auquel il appartiendra de vérifier que les personnes en cause ne se trouvent pas en situation de conflit d’intérêts.
Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement no 41 . La parole est à M. Christian Kert, pour le soutenir.
Nous suggérons de substituer aux mots : « Les modalités de fonctionnement de ces comités sont fixées par » les mots : « La composition de ces comités est annexée à ».
Si la validation de la composition des membres des comités peut entrer dans le champ de compétence du CSA, ce n’est pas le cas des modalités de fonctionnement des comités, qui doivent relever des prérogatives des éditeurs concernés. Franchement, qu’est-ce que le CSA viendrait faire dans le fonctionnement des comités ? Je sais votre volonté d’associer au maximum le CSA aux décisions, mais le faire intervenir dans le fonctionnement des comités rendrait les choses à peu près illisibles !
Monsieur le président, si Mme la ministre et M. le rapporteur me font l’honneur d’accepter mon sous-amendement, cela remettrait bien évidemment en cause l’amendement.
S’agissant de l’amendement no 28 , je remercie Stéphane Travert et les membres du groupe socialiste, écologiste et républicain de leur initiative. Cette proposition de simplification de la procédure de nomination des membres des comités est bienvenue, et elle a l’avantage de ne pas réduire les garanties sur l’indépendance de ces comités.
S’agissant du sous-amendement no 41 , j’émettrai à titre personnel un avis défavorable, car la commission ne l’a pas examiné. Oui, il faut que les modalités de fonctionnement soient fixées non pas par le CSA, mais dans les conventions conclues entre le CSA et les éditeurs privés ou, pour les sociétés nationales de programme, dans les cahiers des charges : c’est une garantie optimale de l’indépendance desdits comités.
L’amendement no 28 propose, tout comme l’amendement no 17 d’ailleurs, un assouplissement utile des modalités de nomination, l’essentiel étant que le CSA puisse ensuite s’assurer que les conditions d’indépendance définies par l’article ont bien été respectées. Cet amendement fait donc oeuvre de simplification tout à fait utile.
Les amendements suppriment tous les deux le renvoi à la convention et au cahier des charges de la composition précise de ces comités. Cela me semble pertinent, car toute modification de la liste des membres obligerait à modifier à chaque fois les conventions et les cahiers des charges approuvés par décret : il faudrait donc à chaque fois revenir sur le décret, ce qui serait très lourd.
Par rapport à l’amendement no 17 , l’amendement no 28 offre plus de garanties car il attribue un rôle au CSA ou au cahier des charges dans la fixation des modalités de fonctionnement des comités, ce qui est très important. Il tient en outre compte de la présence d’associations et ne fait pas référence à la « direction de l’entreprise ».
Je suis donc favorable à l’amendement no 28 et défavorable au sous-amendement no 41 et à l’amendement no 17 .
Le sous-amendement no 41 n’est pas adopté.
L’article 7, amendé, est adopté.
Article 7
L’article 7 bis est adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 9 , visant à supprimer l’article.
J’aurais voulu, vous l’aurez compris, que ce texte marquât un véritable changement dans les relations entre l’État et la presse dans notre pays. La réalité, c’est que la presse n’est pas libre depuis des dizaines d’années.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Elle est le fruit d’une concentration du capital très favorable aux partisans du cosmopolitisme. D’ailleurs, l’État encourage cette tendance. Après qu’Anne Hidalgo a demandé la suppression des kiosques, vous remarquerez peut-être que l’on ne voit plus un journal aux terrasses des cafés, si ce n’est un journal régional. La presse quotidienne régionale, souvent aussi idéologique que la nationale, compense cependant ses faiblesses par les informations locales, et il est vrai que les problèmes concrets chassent un peu l’idéologie.
L’idéologie, nous la voyons bien apparaître dans l’article 3-1 de la loi de 1986 : c’est de considérer qu’il existe un pluralisme dans les médias français. Il n’y a pas de pluralisme dans les médias français : la multiplication des chaînes publiques, la dépendance des structures de production, la mise en avant du politiquement correct l’interdisent. Un énième rapport, hélas, n’y changera rien !
J’ai bien écouté votre argumentation, empreint d’une forte idéologie, monsieur Bompard, mais j’avoue que je n’ai rien compris à votre amendement, qui vise à supprimer le rapport public du CSA rendant compte des mesures prises par ce dernier pour mettre fin aux manquements constatés en matière d’honnêteté, d’indépendance et de pluralisme de l’information et des programmes. Tout à l’heure, vous déposiez un amendement pour demander plus de transparence ; maintenant, vous déposez un amendement qui représente une régression en la matière !
Ayant pointé cette incohérence, avis défavorable.
Même avis.
L’amendement no 9 n’est pas adopté.
Monsieur le rapporteur, la « forte idéologie » qui me porte, c’est celle de mes concitoyens : je ne suis que leur rapporteur. S’ils étaient un peu plus écoutés, peut-être les choses se passeraient-elles mieux !
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
L’article 3-1 est une énième injonction à magnifier le droit à la différence, le multiculturalisme, la mise en avant des comportements minoritaires. Bref, l’idéologie du « progrès » veut s’imposer sur tous les écrans, combattre au coeur des foyers et des intelligences les idées qu’elle ne supporte pas.
Je veux partager avec vous cette citation de Charles Péguy dans L’argent : « Quand on dit le peuple, aujourd’hui, on fait de la littérature, et même une des plus basses, de la littérature électorale, politique, parlementaire. Il n’y a plus de peuple. Tout le monde est bourgeois, puisque tout le monde lit son journal ». L’argent, que vous ne verrez jamais mis en scène à Avignon, madame la ministre, est un pamphlet contre l’argent qui étouffe, l’appel à la transcendance, aux racines et au dépassement des médiocrités partisanes.
Les Cahiers de la Quinzaine de Péguy seraient aujourd’hui mis au pilori par le Premier ministre et la ministre de l’éducation.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
À l’époque, ils témoignaient d’une liberté. Péguy affirmait qu’il devait blesser des lecteurs à chaque numéro pour avoir fait son travail. Dans votre esprit, il faut plutôt créer un magma insipide, qui n’existe que dans quelques salons parisiens. Alors, passez au moins au deuxième alinéa, qui traite de faits objectifs, et pas de fantasmes !
Il s’agissait là d’un amendement de « récupération ».
Pitié, monsieur Bompard, pas Péguy ! Pas Péguy pour servir votre argumentaire !
Avis défavorable.
Même avis.
L’amendement no 10 n’est pas adopté.
L’article 8 est adopté.
L’article 10 ter est adopté.
L’article 11 est adopté.
Article 11
Les aides publiques à la presse sont un dossier éminemment politique. On sait que bien des quotidiens ou des périodiques survivent grâce, outre à ces aides, aux commandes des grandes entreprises, des universités et des administrations publiques. Il ne viendrait en effet pas à l’idée de la majorité des Français d’acheter des titres qui copient et recopient une idéologie dominante qui ne satisfait plus personne.
Ce recul du débat a sa part dans la radicalisation de l’expression des opinions. Je citerai par exemple Claude Julien, ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique : « La presse la plus prospère, celle qui, dans la répartition des aides publiques, se taille la part du lion, est aussi celle qui chante avec le plus d’enthousiasme les vertus d’un libéralisme économique proscrivant toute intervention de l’État ».
L’État s’introduit donc abusivement dans la définition de ce que sont les libertés de la presse.
Notons ainsi que, de 2009 à 2013, Le Monde a été doté par l’État de 90 millions d’euros, alors que Valeurs actuelles, hebdomadaire plébiscité par les Français,
Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain
n’a reçu aucune aide en 2015.
Sortir du dispositif les entreprises de presse qui ne respectent même pas les dispositions de la loi du 1er août 1986 est un minimum : j’espère que vous le ferez.
Sourires sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Même avis.
L’amendement no 8 n’est pas adopté.
L’article 11 bis est adopté.
L’article 11 octies est adopté.
Même s’il est plus de vingt heures, nous allons examiner les quelques amendements restant en discussion, lesquels, monsieur le rapporteur, sont de nature rédactionnelle.
Vous avez la parole pour soutenir votre amendement no 18 .
Cet amendement effectivement rédactionnel, monsieur le président, a reçu l’avis favorable de la commission.
L’amendement no 18 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 11 nonies, amendé, est adopté.
Les articles 12 et 13 sont successivement adoptés.
La parole est à M. Patrick Bloche, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 19 .
Mon amendement, qui a reçu un avis favorable de la commission, tend à corriger une erreur de référence.
L’amendement no 19 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Vous avez de nouveau la parole, monsieur le rapporteur, pour soutenir votre amendement no 20 .
Cet amendement de coordination a reçu, lui aussi, l’avis favorable de la commission.
L’amendement no 20 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Votre amendement no 21 est lui aussi de coordination, monsieur le rapporteur…
Oui, monsieur le président ; il est vingt heures et une minute, c’est le dernier dont nous discutons et il a également reçu un avis favorable de la commission.
L’amendement no 21 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 14, amendé, est adopté.
Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi.
Je n’ai reçu aucune demande d’explication de vote.
La proposition de loi est adoptée.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Deux projets de loi de ratification d’accords internationaux (procédure d’examen simplifiée) ;
Discussion, sur les rapports des commissions mixtes paritaires, de la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales, de la proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France et de la proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des ressortissants d’un État membre de l’Union européenne autre que la France pour les élections municipales ;
Discussion de la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly