COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 16 octobre 2013
La séance est ouverte à seize heures vingt-cinq.
(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)
La Commission des affaires sociales poursuit l'examen, sur le rapport MM. Gérard Bapt, Christian Paul, Mme Martine Pinville, MM. Michel Issindou, Laurent Marcangeli, et Mme Marie-Françoise Clergeau, des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 (n° 1412).
Mes chers collègues, ce matin Mme Fraysse et M. Bapt se demandaient où prendre connaissance des remises consenties par l'industrie pharmaceutique aux termes des conventions conclues avec le comité économique des produits de santé (CEPS). Tous les ans, le CEPS rend un rapport sur ses activités. Le dernier, portant sur 2012, a été remis en septembre 2013 : les clauses conventionnelles et le montant des remises par types de clauses y figurent à partir de la page 35.
Article 45 : Réforme de la protection complémentaire d'assurance maladie
La Commission examine l'amendement AS225 de Mme Bérengère Poletti.
La création d'un appel d'offres pour les contrats proposés aux personnes éligibles à l'aide à la complémentaire santé (ACS) est une fausse bonne idée.
En effet, s'il convient naturellement de rechercher les meilleurs contrats, cet article pose, tel qu'il est rédigé, plusieurs questions. Comment l'appel d'offres sera-t-il conduit ? Qui jugera de ses résultats ? Quels niveaux de garanties seront demandés, sachant qu'il faut se garder de se contenter d'un minimum en la matière ? Enfin, combien de contrats seront choisis ?
Je vous rappelle que la clause de désignation, adoptée dans le cadre de la loi de sécurisation de l'emploi qui a transposé l'accord national interprofessionnel (ANI), a été invalidée par le Conseil constitutionnel. Du reste, même des députés socialistes s'étaient opposés à cette clause. Or, si un seul contrat était retenu, le dispositif pourrait être assimilé à une clause de désignation.
Il faut donc impérativement en retenir plusieurs et, pour parer au risque qu'il en aille autrement, notre amendement vise à supprimer les alinéas 5 à 12 de l'article.
L'article n'instaure pas des appels d'offres mais des mises en concurrence, qui devront prévoir plusieurs niveaux de garanties correspondant aux différents publics bénéficiaires de l'ACS. Il ne s'agit donc pas d'un marché public au sens juridique du terme. Un avis sera publié pour solliciter les candidatures. Le pouvoir adjudicateur pourrait du reste être confié par délégation – l'hypothèse a été évoquée au cours des concertations – au fonds CMU, qui serait le référent administratif de cette procédure.
Il conviendra également de veiller aux clauses de qualité de ces contrats, qui prendront notamment en compte, outre la tarification, la couverture territoriale dans un souci de proximité, la procédure de révision des tarifs et les conditions de sortie de ceux qui n'auront plus droit à l'ACS.
Le groupe SRC s'est également préoccupé du temps nécessaire pour faire migrer les dossiers des bénéficiaires de contrats dont les organismes ne seraient pas retenus à l'issue de la mise en concurrence.
Nous sommes donc attentifs au bon déroulement de cette procédure. Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, l'alinéa 6 de l'article 45 évoque « la procédure de mise en concurrence » : or une telle procédure est bien une forme d'appel d'offres.
De plus, comme un décret fixera les critères de sélection des contrats et le ou les niveaux de prise en charge des dépenses entrant dans le champ des garanties, le risque est grand de favoriser les contrats les moins-disants. C'est pourquoi nous vous demandons quelles seront les garanties.
Du reste, cet article inquiète même la Mutualité française : si un seul candidat est retenu, que deviendront les autres ?
Il convient de récrire cet article pour le préciser.
Il faut également prendre en considération le fait que les coûts de gestion du secteur mutualiste tournent autour de 17 % à 20 %, alors que ceux de l'assurance maladie se limitent à quelque 4 %. Or il est impératif que l'argent public consacré à l'ACS soit utilisé au mieux. C'est pourquoi ce dispositif doit s'accompagner d'une rationalisation de ces coûts dans le secteur mutualiste.
La création par Mme Aubry de la CMU-C avait donné lieu à un débat sur les organismes qui devaient la gérer. À l'époque, la sécurité sociale avait demandé la possibilité de créer à cette fin une complémentaire à son régime obligatoire, en raison précisément de ses coûts de gestion notoirement inférieurs à ceux du secteur mutualiste. Cette considération n'est pas sans intérêt quand l'écart atteint quinze points !
L'article 45 donne l'impression que le Gouvernement cherche de nouveau à rétablir un mécanisme invalidé par le Conseil constitutionnel.
La procédure de concurrence « vise à sélectionner les contrats offrant, au meilleur prix, des garanties au moins aussi favorables que celles prévues à l'article L. 871-1 ». Est-ce au législateur, au détour d'un article du PLFSS, de hiérarchiser les contrats en fonction de leur caractère plus ou moins favorable ? De plus, les mots « au meilleur prix » étant au singulier, cela n'implique-t-il pas qu'un seul contrat sera sélectionné ?
Je tiens tout d'abord à rappeler à mes collègues de l'UMP que les députés socialistes, lors de l'examen du projet de loi de sécurisation de l'emploi, avaient soutenu la possibilité pour les branches de recourir à la clause de désignation si elles le souhaitaient, dans la mesure où nous jugions que cette clause pouvait être un outil efficace et pertinent, notamment pour la mutualisation des actions de prévention.
La procédure de mise en concurrence, quant à elle, loin de favoriser les contrats les moins-disants, permettra d'améliorer les pratiques puisque ces contrats devront prendre en compte des critères de qualité préalablement définis.
La refonte du contrat solidaire et responsable ira dans le même sens, mais nous avons ici la première étape d'une démarche visant à une meilleure régulation en même temps qu'à faire bénéficier les assurés d'exigences de qualité renforcées.
Cette mise en concurrence est nécessaire parce que les contrats sont aujourd'hui trop souvent incompréhensibles pour les bénéficiaires.
Dans le PLFSS pour 2012, l'ancienne majorité avait mis en place, pour les bénéficiaires de l'ACS, une procédure de labellisation des contrats qui s'est révélée être un échec. C'est pourquoi nous souhaitons faire plus fortement pression sur le secteur par le biais de la mise en concurrence. Encore une fois, il ne s'agit ni d'appels d'offre ni même de contrats collectifs : il s'agit de contrats individuels. Le dispositif n'a donc juridiquement rien à voir avec la clause de désignation prévue dans l'ANI.
Je rappellerai que Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, a récemment déclaré qu'une quinzaine d'organismes serait retenue, soit cinq pour chacun des niveaux de qualité qui pourraient être au nombre de trois. Certains organismes pourront même concourir pour plusieurs niveaux. La crainte de voir n'en retenir qu'un seul est donc infondée.
Ce sera tout l'intérêt d'un échange public, dans l'hémicycle, avec le Gouvernement, que d'apporter les précisions nécessaires.
De plus, il ne faut pas confondre ce qui relève de la loi avec ce qui relève du décret. Or le détail d'une mise en concurrence relève d'un décret.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS59 rectifié de M. Jean-Pierre Door.
Conformément aux engagements pris par l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (UNOCAM) dans le cadre de l'avenant no 8 à la convention médicale, les complémentaires doivent au minimum prendre en charge, dans le cadre des contrats solidaires et responsables, le remboursement des compléments d'honoraires des médecins ayant adhéré au contrat d'accès des soins.
L'objet de l'amendement AS59 rectifié vise à le préciser dans l'article 45.
Nous partageons le même souci, monsieur Door. C'est pourquoi je vous renvoie à mon amendement AS274, dont l'examen suit, et qui satisfait le vôtre. Il prévoit en effet de plafonner la prise en charge des dépassements d'honoraires pratiqués par les médecins à 150 % du tarif opposable, en cohérence avec l'avenant no 8 à la convention médicale.
Il est en effet hors de question que les contrats responsables servent à solvabiliser les dépassements d'honoraires au-delà de cet avenant.
L'amendement AS274 étant plus précis, je vous demande de bien vouloir retirer le vôtre.
L'amendement AS59 rectifié est retiré.
La Commission examine l'amendement AS354 de M. Christian Paul, rapporteur.
Le panier de soins proposé dans le cadre des contrats responsables doit comprendre les prestations liées à la prévention.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie, en discussion commune, des amendements AS274 de M. Christian Paul, rapporteur, et AS364 de M. Jean-Pierre Door.
L'amendement vise à garantir un niveau minimal de prise en charge par les organismes complémentaires dans le cadre des contrats dits solidaires et responsables, dont je rappelle qu'ils font l'objet d'un soutien fiscal considérable. Il tend également à inclure les frais d'optique dans le panier de soins. Enfin, et conformément à l'avenant n° 8 à la convention médicale, il prévoit de plafonner la prise en charge des dépassements d'honoraires pratiqués par les médecins à 150 % du tarif opposable – un plafond susceptible d'être révisé en fonction des pratiques constatées. En ce sens, il répond à la préoccupation de M. Door.
L'amendement AS364 est retiré.
La Commission adopte l'amendement AS274.
Elle adopte ensuite l'article 45 modifié.
Après l'article 45
La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 45. Elle examine d'abord l'amendement AS164 de M. Jean-Louis Roumegas.
L'objectif fixé par le Président de la République de généraliser, à l'horizon 2017, l'accès à une couverture complémentaire de qualité se heurte à des obstacles, dont certains relèvent de la complexité administrative. Pour simplifier la procédure d'évaluation des ressources, au profit des ayants droit comme des services instructeurs, nous proposons de prendre en compte, non pas les revenus perçus sur douze mois glissants, mais le revenu fiscal de référence de l'année n-1.
L'intention est louable, puisqu'il s'agit à la fois de faciliter le travail des caisses et d'améliorer l'accès à une couverture complémentaire. Il convient cependant d'être très prudent lorsqu'on modifie les ressources prises en compte pour bénéficier des droits, dans la mesure où la notion de « foyer » n'a pas la même définition selon que l'on raisonne dans un cadre fiscal ou dans celui de la couverture maladie universelle. L'amendement ayant pour effet de produire des « gagnants » et des « perdants », il importe de s'assurer que les personnes les plus fragiles ne feront pas partie de ces derniers.
En outre, même si le dispositif proposé est très intéressant, il me paraît préférable de connaître les résultats des expérimentations actuellement menées en Loire-Atlantique et en Seine-et-Marne avant d'envisager une généralisation.
Pour ces raisons, je demande le retrait de l'amendement.
Une personne assurée d'être non imposable n'est pas tenue de déclarer ses revenus. Dès lors, tout le monde ne peut produire son revenu fiscal de référence.
C'est pourquoi l'amendement prévoit, à titre dérogatoire, la possibilité de prendre en compte les ressources des trois derniers mois.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques AS275 de M. Christian Paul, rapporteur, et AS251 de M. Jean-Louis Roumegas.
Cet amendement répond à la préoccupation exprimée par M. Roumegas, puisqu'il tend, en automatisant le renouvellement de leur droit, à améliorer l'accès des personnes âgées disposant de faibles revenus au dispositif d'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé – ACS. Une telle proposition figurait d'ailleurs dans le très bon rapport sur « l'accès aux soins des plus démunis » rédigé par la sénatrice Aline Archimbaud.
Ces amendements vont dans le bon sens. Mais il est possible d'aller encore plus loin et d'automatiser, non seulement le renouvellement, mais également l'attribution de l'ACS. Dans la mesure où le plafond de ressources pris en compte pour le bénéfice de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) est inférieur à celui de l'ACS, il serait possible, par un croisement des fichiers, d'affilier automatiquement à la seconde les bénéficiaires de la première. Aujourd'hui, en effet, de nombreuses personnes âgées aux faibles revenus ne savent pas qu'elles peuvent avoir accès à l'ACS.
Vous avez proposé un amendement en ce sens, mais il a été déclaré irrecevable en application de l'article 40. Cela étant, je ne suis pas hostile à ce qu'un débat ait lieu sur cette proposition.
Les amendements que nous examinons ont également un coût pour les organismes de sécurité sociale et pour les collectivités territoriales : ils sont d'ailleurs gagés.
Quant à l'octroi systématique de la CMU-C aux bénéficiaires de l'ASPA, le problème réside dans les désaccords dont l'évaluation de son coût fait l'objet.
La Commission adopte les amendements identiques.
Puis elle est saisie de l'amendement AS165 de M. Jean-Louis Roumegas.
Nous proposons que le Gouvernement présente au Parlement, avant un an, un rapport destiné à évaluer le coût et les bénéfices – financiers, mais surtout sociaux – d'une élévation du plafond de ressources de la CMU-C au niveau des ressources des bénéficiaires de l'ASPA et de l'allocation adulte handicapé (AAH).
Cette mesure, qui fait également partie des préconisations du rapport Archimbaud, irait dans le sens de la généralisation de la couverture complémentaire voulue par le Président de la République. Rappelons que les ressources des bénéficiaires de l'ASPA et de l'AAH sont d'un niveau proche de celles des personnes affiliées à la CMU complémentaire, et qu'elles sont de toute façon inférieures au seuil de pauvreté.
Si le plafond de l'AAH est supérieur à celui de la CMU-C, c'est en raison de la revalorisation de 25 % du montant de cette allocation. D'autre part, les plafonds de la CMU-C et de l'ACS ont été augmentés respectivement de 7 % et de 35 %, si bien que 750 000 personnes supplémentaires ont pu bénéficier de cette dernière. C'est donc un effort très important qui a été accompli récemment.
Je ne veux pas dire par là que la marche du progrès devrait s'interrompre. Je suis tout à fait d'accord pour qu'un débat sur ce sujet ait lieu avec le Gouvernement et que l'on essaie de programmer de nouvelles avancées – y compris dans le sens voulu par Jérôme Guedj. Il va sans dire que l'on peut faire encore plus pour les Français dont les revenus sont situés sous le seuil de pauvreté.
Vous n'avez même pas besoin d'un avis favorable : je sais que vous défendrez de toute façon l'amendement en séance. Cela donnera au Gouvernement l'occasion de s'exprimer sur ses intentions.
La Commission rejette l'amendement.
Elle en vient ensuite à l'amendement AS196 de Mme Jacqueline Fraysse.
La loi sur la sécurisation de l'emploi a confirmé le rôle croissant donné aux assurances complémentaires. Nous le regrettons, car nous sommes favorables à une prise en charge maximale des soins par l'assurance maladie obligatoire. Mais puisque telle est l'orientation choisie, il conviendrait que la Caisse nationale d'assurance maladie puisse, à son tour, proposer une assurance maladie complémentaire. En effet, non seulement l'assurance maladie obligatoire a un caractère universel et est plus égalitaire que les assurances privées, mais elle est mieux gérée : pour 100 euros de prestations versées, les frais de gestion de la sécurité sociale se limitent à 5,40 euros, contre 24,40 euros pour les organismes complémentaires.
Les exemples de la CMU-C et de l'assurance complémentaire proposée en Alsace-Moselle le montrent : en matière d'assurance complémentaire, il est possible de faire mieux et moins cher que ce que propose le secteur privé. C'est pourquoi la CNAM doit pouvoir également intervenir dans ce domaine.
Nous avions déjà défendu un amendement similaire, mais il s'était heurté à l'article 40 de la Constitution. L'amendement AS196 se borne donc à réclamer au Gouvernement un rapport sur le sujet. La transformation que nous proposons ne saurait être réalisée du jour au lendemain : il est donc temps d'engager la réflexion.
Merci, madame Fraysse, pour cet amendement qui permet à la Commission d'avoir un premier échange sur ce sujet. Il est vrai que vous proposez là une transformation complète d'un système que, pour l'instant, nous nous efforçons surtout d'améliorer et de réguler. L'idée que la Caisse nationale d'assurance maladie devienne un prestataire d'assurance complémentaire a déjà été lancée dans le débat public, même si elle ne me semble pas être portée par les responsables de la Caisse elle-même, ni par les partenaires sociaux siégeant au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM). Nous proposons donc, Mme Lemorton et moi, que la Commission des affaires sociales organise sur le sujet, après l'adoption du PLFSS, une table ronde à laquelle participeraient, outre les députés intéressés, l'ensemble des représentants de l'assurance maladie et des assurances complémentaires. Un tel débat ne relève pas, en effet, du projet de loi de financement de la sécurité sociale : c'est un débat de refondation. Et nous devons, en effet, réfléchir à une refondation de la protection sociale, qu'il s'agisse de son financement ou de sa régulation.
Votre proposition, pour intéressante qu'elle soit, va toutefois à contre-courant du mouvement actuel, caractérisé par une régulation significative du secteur des complémentaires santé. Je ne peux y donner un avis favorable à ce stade, car une évolution aussi importante nécessite des travaux préparatoires et ne peut s'inscrire dans l'examen d'un PLFSS.
Réclamer un rapport au Gouvernement, c'est bien appeler à ce que soient effectués des travaux préparatoires.
Vous demandez au Gouvernement de donner son avis, mais il l'a déjà fait en de nombreuses occasions, notamment en réponse aux travaux du HCAAM. Pour ma part, je propose de réaliser ce travail de façon collective, avec la participation des partenaires sociaux, de l'assurance maladie et de l'ensemble des groupes.
Je n'ai rien contre l'idée d'organiser une table ronde sur la protection sociale. Mais il aurait été plus utile d'avoir ce débat il y a quelques mois afin de répondre à certaines questions fondamentales : quelles sont les ressources disponibles ? Quelle doit être notre politique de santé, et à quel coût ? Il aurait fallu se doter d'un plan à partir duquel décliner le projet de loi sur les retraites et le PLFSS. À défaut, nous manquons d'une ligne directrice.
Ce travail a lieu au sein du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Des parlementaires y siègent, dont M. Paul et moi-même, qui y participons régulièrement.
Je ne remets pas en cause l'action de ceux qui nous représentent au sein des organismes extérieurs. Mais il appartient aux élus de la nation de définir les grands axes politiques.
Il me semble préférable que la réflexion sur la protection sociale soit menée au sein de notre Commission plutôt que dans d'autres lieux, si prestigieux soient-ils, où elle se fait à l'initiative d'intérêts privés.
Je ne mésestime pas votre volonté de mettre en avant la Commission des affaires sociales. Mais nous devons, dans ce débat, prendre la première place et être à la source des réflexions.
Je partage l'avis du rapporteur : en matière d'assurance complémentaire, les dispositifs tendent actuellement à évoluer. C'est aussi le cas en Alsace-Moselle, dans la mesure où le panier de soins prévu dans le cadre de l'accord national interprofessionnel est supérieur à celui que propose le régime local obligatoire de sécurité sociale. La question se pose donc de savoir si la gestion de la complémentaire santé doit être confiée à ce régime, ou si ce dernier doit constituer un étage intermédiaire au-dessus duquel prendrait place une assurance complémentaire supplémentaire, offrant un meilleur panier de soins.
Rappelons qu'à la différence du régime local, financé par des cotisations dont le montant est adapté en fonction des dépenses, le financement de l'assurance complémentaire prévue par l'ANI est assuré par les cotisations des salariés, mais aussi par celle des employeurs.
En tout état de cause, un débat sur la protection sociale doit avoir lieu dans les semaines ou les mois à venir.
Je note que l'on ne trouve nulle trace, dans le PLFSS, des dispositions promises sur le régime local d'assurance maladie d'Alsace-Moselle.
La Commission rejette l'amendement.
Article 46 : Simplification de la législation relative aux indemnités journalières pour les travailleurs indépendants et les exploitants agricoles
La Commission adopte l'amendement AS353 du rapporteur, corrigeant une erreur matérielle.
Elle adopte ensuite l'article 46 modifié.
Après l'article 46
La Commission examine l'amendement AS231 de la présidente de la Commission.
Alors même qu'ils ont cotisé, certains salariés travaillant à temps partiel n'ont pas droit aux indemnités journalières faute d'avoir atteint une durée minimum de 200 heures d'activité au cours des trois mois précédant l'arrêt de travail. Nous demandons au Gouvernement un rapport sur le sujet, dans le but de résoudre ce problème. Une solution pourrait être de réduire le nombre d'heures requis pour adopter, comme dans le projet de loi sur les retraites, un seuil de 150 heures.
Les travaux de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de sécurité sociale (MECSS) consacrés aux arrêts de travail ont permis de mettre en lumière la situation de nombreux salariés qui, en dépit des cotisations qu'ils versent, n'ont pas accès aux indemnités journalières. Le rapport que j'ai signé à leur issue proposait, dans sa préconisation n° 9, de « faire procéder à une évaluation du coût supplémentaire induit par une extension de la couverture des arrêts de travail liés à la maladie pour les assurés n'atteignant pas le plafond requis du nombre d'heures travaillées ou ayant une durée d'affiliation trop courte ». L'amendement proposé va dans le même sens, et c'est pourquoi nous souhaitons le cosigner, Pierre Morange et moi.
S'il est adopté, il deviendra en tout état de cause un amendement de la Commission.
Je regrette que l'on n'ait pas identifié plus tôt ce défaut dans la réglementation des indemnités journalières, malgré les signalements opérés par les responsables des caisses d'assurance maladie.
Je salue à nouveau l'excellent travail réalisé par Mme Poletti, qui a permis d'identifier de nombreuses incohérences dans la réglementation des indemnités journalières et de relever certains défauts en matière de couverture. Je suis heureux de voir que plusieurs amendements ont été déposés pour y remédier, et ce dans un esprit consensuel.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Article 47 : Financement du plan d'aide à l'investissement dans le secteur médico-social pour 2014 et mesure de déconcentration
La Commission adopte l'article 47 sans modification.
Après l'article 47
La Commission est saisie de l'amendement AS239 de Mme Bérengère Poletti, portant article additionnel après l'article 47.
Le coût d'une évaluation externe, pour un établissement médico-social, varie entre 10 000 et 20 000 euros. Pour économiser des ressources devenues particulièrement précieuses, nous proposons de permettre l'évaluation commune de plusieurs services complémentaires gérés par le même organisme gestionnaire – par exemple un institut médico-éducatif et un service d'éducation spéciale et de soins à domicile.
L'année dernière, j'avais émis un avis défavorable à cet amendement, en attendant que le Gouvernement prenne position sur ce sujet. Depuis, rien n'est venu. Il convient d'avancer, et c'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de la Commission.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Article 48 : Dotations annuelles des régimes obligatoires d'assurance maladie à divers établissements publics ; simplification des modalités de fixation de la dotation des agences régionales de santé
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 49 : Fixation des objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 50 : Fixation du montant de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2014 et de sa ventilation
La Commission adopte l'article sans modification.
Après l'article 50
La Commission est saisie de l'amendement AS197 de Mme Jacqueline Fraysse, portant article additionnel après l'article 50.
Cet amendement devrait faire consensus puisqu'il vise à concrétiser une promesse de Mme la ministre de la santé, qui souhaitait, en présentant la stratégie nationale de santé, « que chaque année le Parlement soit saisi, dans le cadre des PLFSS, non seulement des objectifs de dépenses de santé, mais aussi des éléments lui permettant d'apprécier la part de ces dépenses couverte par l'assurance maladie ». La ministre s'était alors engagée « à enrayer la tendance à la baisse de la part des dépenses prise en charge par l'assurance-maladie que l'on observe depuis 2004 ».
L'annexe 7 du PLFSS, intitulée « ONDAM et dépense nationale de santé », fournit l'essentiel des informations que vous demandez. Je vous renvoie notamment au tableau retraçant l'évolution depuis 2000 de la structure du financement de la consommation de soins et de biens médicaux et sa répartition entre le régime de base, l'État et la CMU-C, et les régimes complémentaires.
Votre amendement est donc satisfait, madame Fraysse.
Sur le même sujet, j'aimerais pour ma part appeler votre attention sur un facteur majeur d'augmentation annuelle des dépenses de santé, au-delà du vieillissement, de l'évolution des techniques et du coût des traitements : la hausse tendancielle de l'incidence des maladies chroniques, qu'il conviendrait d'étudier dans le cadre du débat sur le financement structurel de l'assurance maladie. Cela pose la question de l'investissement dans la prévention primaire, qui peut être gagé sur l'évolution des dépenses s'il apparaît que celle-ci dépend fortement de l'incidence de ces pathologies. Il serait en outre souhaitable que l'évolution depuis dix ans soit présentée d'une manière homogène, pour pouvoir en tirer des conclusions solidement étayées.
Madame Fraysse, la ministre des affaires sociales et de la santé a fixé un cap en présentant dans ses grandes lignes la stratégie nationale de santé : juguler et inverser la tendance à l'effritement de la prise en charge des dépenses par l'assurance maladie obligatoire. Votre objectif, que nous partageons, correspond aux attentes de nombreux acteurs, par-delà les clivages idéologiques et politiques : nous sommes tous attachés à notre système de protection sociale et solidaire, fondé il y a près de soixante-dix ans. Voilà pourquoi je me réjouis pour ma part des annonces faites par la ministre.
La Commission adopte l'amendement AS197.
Section 2
Dispositions relatives aux dépenses d'assurance vieillesse
Article 51 : Objectifs de dépenses de la branche vieillesse pour 2014
La Commission adopte l'article sans modification.
Après l'article 51
La Commission est saisie de l'amendement AS278 de M. Gérard Bapt, portant article additionnel après l'article 51.
C'est en présence de M. Jean-Pierre Dufau, coprésident du groupe d'études « Climatisme et thermalisme », que je défends cet amendement validé par le cabinet de la ministre de la santé et par la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), dans la mesure où il est le fruit d'une négociation entre la fédération professionnelle des représentants des établissements thermaux et l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM).
Je vous remercie de m'accueillir dans votre Commission.
Les remboursements des cures thermales, fixés par une convention de cinq ans entre les établissements thermaux et l'UNCAM, peuvent être actualisés au cours de la période. L'amendement tend à créer un tarif forfaitaire de responsabilité par orientation thérapeutique, qui restera remboursé par l'UNCAM aux mêmes conditions qu'auparavant, mais inchangées pour toute la durée de la convention. À titre de garantie sociale, le tarif facturé aux bénéficiaires de la CMU ou de l'ACS correspondrait à ce tarif forfaitaire. Toutefois, pour permettre aux établissements thermaux de faire évoluer la tarification au cours de la période quinquennale, un prix limite de facturation par orientation thérapeutique, variable, non remboursé par l'UNCAM à qui il ne coûtera donc rien, serait fixé par la convention, sur des fondements établis par l'UNCAM et par la profession – pour éviter toute dérive –, et proposé aux mutuelles qui pourront le prendre en charge. Cet amendement consensuel permet d'éviter une augmentation de la part de la sécurité sociale dans la prise en charge.
M. Bapt est un parfait avocat du thermalisme, que l'on parlait jadis de limiter, mettant en doute les effets sur diverses pathologies. Soit ; nous ne nous opposerons pas à cet amendement.
Monsieur Door, les cures thermales font partie des interventions thérapeutiques relevant des médecines douces, non médicamenteuses. Conformément aux préconisations du rapport Deloménie, publié il y a treize ans, leur efficacité a été étudiée du point de vue du service médical rendu (SMR) et confirmée par des études probantes. Vous avez donc la réponse à votre question.
J'ai d'ailleurs conseillé aux représentants des établissements thermaux de se tourner vers la Haute Autorité de santé pour que les cures thermales, si d'aventure elles correspondent à un véritable SMR, soient intégrées aux soins et aux stratégies thérapeutiques à titre de préconisations non médicamenteuses.
Le thermalisme, qui fait l'objet d'un groupe d'études depuis plusieurs années, a indéniablement prouvé ses vertus curatives. Après une cure de crénothérapie, les patients atteints de maladies chroniques peuvent rester plusieurs mois sans consulter. Le blocage tarifaire prévu par l'amendement n'avantage d'ailleurs pas les établissements thermaux dans la mesure où leurs dépenses sont vouées à augmenter. Il s'agit plutôt d'un compromis. Quoi qu'il en soit, le service médical rendu est indéniable pour toute une partie de la population.
Si l'assurance maladie a intérêt à passer cette convention pluriannuelle, c'est afin de stabiliser la prise en charge qu'elle assure, laquelle ne devrait être revalorisée qu'en fonction du coût de la vie. Le coût sera donc maîtrisé, le tarif étant réglé sur celui de l'assurance maladie pour les bénéficiaires de la CMU et de l'ACS. Le médecin-conseil de la fédération professionnelle m'a présenté des études cliniques qui attestent des effets positifs des cures dans certains cas.
En Midi-Pyrénées, le regretté Pierre Fabre a ressuscité la source thermale d'Avène – dont les agriculteurs locaux avaient découvert les vertus sur leurs chevaux atteints de psoriasis –, et avec elle le village, qui a ainsi pu rouvrir son école. Les laboratoires Pierre Fabre distribuent aujourd'hui les produits Avène dans le monde entier. Cette expérience témoigne de l'intérêt du thermalisme pour l'activité économique locale.
La Commission adopte l'amendement.
Section 3
Dispositions relatives aux dépenses de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles
Article 52 : Fixation des montants des dépenses de transfert instituées par des dispositions légales à la charge de la branche AT-MP
La Commission est saisie de l'amendement AS356 de M. Laurent Marcangeli, rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Pour la deuxième année consécutive, l'État ne prévoit en loi de finances aucune dotation pour l'indemnisation des victimes de l'amiante, alors qu'il versait à ce titre 47 millions d'euros par an jusqu'en 2012. La loi organise pourtant la contribution de l'État, qui assume ainsi sa responsabilité dans le drame de l'amiante. Ce désengagement équivaut à un transfert de charges indû vers la branche AT-MP du régime général. Je vous invite donc à placer le Gouvernement face à ses responsabilités en réduisant la dotation de la branche à due concurrence, ce qui ramènera son montant à 388 millions d'euros – bien plus, au demeurant, que les 115 millions votés en 2013, lorsque le Gouvernement a imprudemment mobilisé tout le fonds de roulement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA). Grâce au montant que je vous propose, le niveau du fonds de roulement sera en tout état de cause plus élevé fin 2014 qu'aujourd'hui.
Le drame de l'amiante est un scandale d'État. L'État y porte une terrible responsabilité. La sanctuarisation des deux fonds – le FCAATA, le Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, et le FIVA – représente donc une exigence morale, politique et financière, globalement respectée jusqu'à présent. L'année dernière, j'avais interrogé la ministre en séance et nous étions tous convenus qu'il n'était guère conforme aux principes de saine gestion de disposer, dans les circonstances actuelles, d'un fonds de roulement de 200 millions d'euros dont nous n'étions pas certains qu'il serait utilisé.
La pérennisation des deux fonds est garantie, conformément à notre devoir vis-à-vis des victimes. La loi nous assure que l'État les abondera quoi qu'il arrive. L'amendement risque en revanche d'entraîner une baisse supplémentaire de la contribution des caisses par rapport à ce qui est prévu. Évitons de créer une nouvelle source d'angoisse chez des malades déjà victimes d'un préjudice d'anxiété qui vient d'être reconnu. Même s'il nous faudra en demander la confirmation au Gouvernement en séance publique, nous pouvons faire confiance à l'État pour pérenniser les fonds.
Au prétexte de placer le Gouvernement devant ses responsabilités, ne nous défaussons pas des nôtres ! Si nous réduisons le montant de la contribution de la branche AT-MP au FIVA, l'article 40 ne nous permettra pas d'accroître d'autant le concours de l'État par voie d'amendement. En d'autres termes, la diminution est assurée, mais sa compensation par le Gouvernement ne l'est nullement. En ce qui me concerne, je ne suis pas disposé à me dérober à ma responsabilité de parlementaire à l'égard des victimes de l'amiante.
Il s'agit ici, en réduisant la dotation provenant de la branche AT-MP de l'assurance maladie, de détendre les comptes sociaux pour tendre les comptes de l'État. Mieux vaudrait, en effet, éviter de pressurer à l'excès la branche AT-MP, exclusivement financée par l'appareil de production. Il est d'autant plus regrettable que l'État, pour la deuxième année consécutive, omette de participer au financement du fonds. Ne lui jetons pas la pierre a posteriori, car la situation n'est pas facile. Mais il est naturel qu'il continue de financer le fonds, selon une juste répartition de la responsabilité. Or, dans le texte gouvernemental, l'État se défausse à nouveau sur l'appareil de production, que nous devons pourtant absolument éviter d'écraser de cotisations dans la période de chômage élevé que nous connaissons, y compris pour sauvegarder les recettes de la sécurité sociale. Je voterai donc l'amendement.
Pas moi ! Je comprends votre démarche, monsieur le rapporteur, mais je suis d'accord avec MM. Hutin et Robiliard : ne prenons pas en otages ceux qui ont besoin d'aide parce qu'ils ont été meurtris dans leur chair en exerçant leur métier ! Si nous voulons parler répartition de crédits entre l'État et la sécurité sociale, faisons-le donc sur d'autres sujets que le FIVA.
L'on s'apprête à mettre à la charge des entreprises, par l'intermédiaire de la branche AT-MP, les 47 millions d'euros manquants. D'autre part, nous aurons fin 2014 un excédent de 60 millions d'euros : le FIVA n'est pas déficitaire. Il convient donc de rappeler au Gouvernement que l'État doit prendre ses responsabilités. Il n'est pas logique que la branche AT-MP alimente le fonds en permanence. En réduisant sa contribution à due concurrence, l'amendement ne met pas à mal le FIVA. Je le voterai donc.
L'État se défausse de ses responsabilités : c'est une réalité. Sans l'impulsion parlementaire, il ne reviendra pas sur sa décision, qui prive le FIVA de 90 millions d'euros sur deux ans. En outre, le ministère de la défense, qui a joué un rôle majeur dans le drame de l'amiante, est aux abonnés absents ; chaque année, des millions d'euros ne sont pas versés. Les entreprises, elles, font ce qu'elles ont à faire !
Je le répète, la branche AT-MP est exclusivement financée par les cotisations des entreprises, ce qui est normal. Il ne s'agit donc pas tout à fait du régime général. Disons-le clairement : le Gouvernement fait passer en douce une hausse de 47 millions d'euros de ces cotisations ! Notre rôle est de défendre les citoyens, c'est-à-dire leurs emplois, c'est-à-dire les entreprises. Rien ne justifie que l'État se dispense de respecter la loi. Alors que des parlementaires ont voté cette disposition, d'autres parlementaires accepteraient qu'elle ne soit pas respectée ! Il en va des relations entre l'exécutif et le législatif ; cela n'a rien d'anodin.
Ne rouvrons pas le débat sur les responsabilités en jeu dans l'affaire de l'amiante. Tous les rapports convergent au moins sur un point : la responsabilité des employeurs – et celle de notre système de gestion des risques professionnels, qui les laisse choisir de mettre ou non les travailleurs au contact de l'amiante, indépendamment des recommandations, du contrôle et des sanctions de l'État. La question de la responsabilité de l'État et celle des responsabilités individuelles sont beaucoup plus complexes. Dès lors, sur le principe, il n'est pas choquant que la cotisation employeur finance le fonds.
En réduisant les moyens du FIVA, nous suggérerions aux victimes que leur indemnisation va diminuer parce que nous ne nous accordons pas sur les modalités de financement du fonds. Nous devons absolument éviter cela.
Ne mélangeons pas tout. Nous sommes tous solidaires avec les victimes de l'amiante. Mais certaines travaillaient dans des entreprises privées, d'autres dans des entreprises nationalisées, en particulier sur des chantiers navals où l'on construisait des porte-avions et des sous-marins et où le confinement rendait l'air respiré particulièrement nocif. Il en va de l'autorité de l'État, du contrôle qu'il exerce, de la responsabilité des exécutifs successifs, de celle du législateur. En somme, il s'agit d'une responsabilité collective même si, dans certains cas – dont la justice est saisie –, l'entreprise est plus lourdement responsable.
Cette catastrophe sanitaire a révélé peu à peu toute son horreur. Nombreux étaient ceux qui connaissaient l'effet cancérigène de l'amiante il y a quarante ou cinquante ans. Mais ce n'est qu'avec le temps que l'on a mesuré son caractère constamment cancérigène, alors que l'on croyait auparavant à l'existence de cofacteurs significatifs. L'ampleur du phénomène, sa gravité, l'effet direct de l'inhalation de particules d'amiante sur le développement de maladies professionnelles abominables et mortelles n'ont été découverts que plus tard, un peu comme s'il s'agissait d'une pathologie émergente.
De grâce, faisons la part de la responsabilité collective, de la grave responsabilité de certaines entreprises, et de notre propre responsabilité de législateur, qui nous impose de sauver l'équilibre du financement des régimes de sécurité sociale et de leurs branches. Un prélèvement supplémentaire de 47 millions d'euros sur les entreprises, dans notre économie totalement ouverte, c'est du chômage en plus ; cela se calcule facilement !
Ancien vice-président de la mission d'information sur les risques et les conséquences de l'exposition à l'amiante, j'ai évité jusqu'à présent de prendre la parole, car les victimes de l'amiante, nombreuses dans certaines entreprises de ma circonscription, ont besoin de sérénité.
Je suis surpris du débat que suscite l'amendement et choqué que l'État ne prenne pas ses responsabilités. Le FIVA a été créé pour aider les victimes de l'amiante, d'où qu'elles viennent – entreprises privées, mais aussi et surtout chantiers navals où l'on déchargeait à la pelle l'amiante venu du Canada, de sorte que c'est dans les ports que la situation est la plus dramatique. L'État doit donc assumer ses responsabilités, mais faut-il pour autant réduire les crédits de la branche AT-MP ? Quoi qu'il en soit, dans ce domaine, nous devons faire preuve d'unité, car l'État français, toutes tendances politiques confondues, a déjà failli à son devoir en attendant 1997, soit beaucoup plus tard que les autres pays, pour interdire l'amiante, dont l'effet cancérigène était connu depuis à peu près un siècle.
Je ne voterai pas cet amendement, qui donne un signal défavorable, mais l'État doit apporter sa contribution, conformément à ses engagements.
Monsieur Vercamer a raison de réclamer de la sérénité dans ce débat où il est délicat de parler d'argent compte tenu des drames humains en jeu. Ne mélangeons pas tout, ne serait-ce que par respect pour les victimes ! L'amiante est en effet un scandale d'État et les associations de défense des victimes défilaient encore le 12 octobre dernier pour réclamer un procès pénal qu'elles attendent depuis longtemps – durant des années, les industriels du comité permanent amiante ont « intoxiqué » la représentation nationale et les gouvernements afin de continuer leurs activités ! L'État ne doit pas se désengager, mais je ne crois pas qu'il le fasse : il apporte sa garantie, et il serait peu sérieux de retirer 47 millions d'euros du FIVA, même si sa directrice affirme que le financement du fonds est assuré jusqu'à l'année prochaine. Les deux fonds doivent impérativement être maintenus.
Nous ne devons pas oublier notre responsabilité collective dans ce dossier – pensons qu'il y a encore quelques années les pouvoirs publics envisageaient de faire désamianter un navire dans un pays lointain. S'agissant des maladies professionnelles et des accidents du travail, la priorité doit être donnée à la prévention plutôt qu'à la réparation. Cela n'a pas été le cas pendant trop longtemps : il n'est qu'à considérer le nombre de terrains pollués délaissés. Ne baissons pas la garde à un moment où certaines entreprises réussissent à presque éliminer les accidents au travail.
Il ne faut pas opposer les fonds provenant de la branche ATMP à ceux de l'État, car les deux sont nécessaires au vu de l'immensité des besoins, et il conviendrait de traiter plus rapidement les dossiers d'indemnisation.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement AS205 de M. Jean-Louis Roumegas.
Nous souhaitons rétablir la contribution des entreprises au financement des fonds de l'amiante, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale en 2005 et abrogée en 2009. Elle visait à prendre en compte la responsabilité des entreprises dans ce fléau sanitaire à l'origine des dépenses du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA), mais elle avait été supprimée au motif que son rendement était peu élevé depuis le début. De nombreux rapports parlementaires préconisent de la rétablir en simplifiant les modalités de son recouvrement et en augmentant son montant.
Les entreprises contributrices sont celles où des travailleurs ont été exposés au transport, à la fabrication et à la transformation de l'amiante ; elles sont inscrites sur une liste qui ouvre droit au bénéfice du fonds. Il y a lieu d'actualiser cette liste et d'y intégrer les entreprises actives depuis de nombreuses années dans les services de diagnostic et de désamiantage et dont les personnels, soumis à une exposition chronique à l'amiante, peuvent devenir les malades de demain.
Il ne me paraît pas utile de revenir sur la suppression de la contribution des entreprises au financement du FCAATA, car son rendement était effectivement faible et son recouvrement très lourd. Le rétablissement de cette contribution n'assouvirait pas l'ambition de faire davantage supporter à l'entreprise ayant exposé ses salariés à l'amiante le coût occasionné par le développement de pathologies. Les procédures de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, applicables à 40 % des dossiers, sont plus adaptées. Les entreprises financent déjà le FCAATA, à hauteur de 821 millions d'euros cette année, par le biais d'une contribution de la branche ATMP : cette charge se trouve répartie entre l'ensemble des entreprises et il ne convient pas de l'alourdir. En outre, il paraît inopportun de multiplier les systèmes de préretraite, celui lié à l'amiante étant souvent détourné de son objet pour être utilisé dans des plans de restructuration. J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle étudie l'amendement AS178 de M. Jean-Louis Roumegas.
Cet amendement réitère la demande, formulée lors de l'examen du PLFSS pour 2013, de la remise d'un rapport – attendue depuis le 1er juillet dernier – évaluant l'amélioration des conditions de traitement des dossiers des victimes de l'amiante pour l'accès au FCAATA et examinant l'incidence sur le financement du fonds de l'indemnisation des victimes ayant oeuvré sur des chantiers de désamiantage. Le Gouvernement avait pourtant estimé cette requête légitime et avait reconnu le caractère inéquitable du mode d'accès au fonds. Ce régime a en effet pu bénéficier à des salariés dont le degré d'exposition à l'amiante avait été beaucoup plus faible que celui de travailleurs qui n'ont pas été inscrits sur la liste ouvrant droit à la cessation anticipée d'activité.
Plusieurs pistes de réforme ont été avancées : en 2008, Jean Le Garrec avait remis un rapport préconisant notamment d'élargir les possibilités d'accès individuel au fonds, en fonction des métiers exposant à l'amiante. Il serait urgent que le Gouvernement se prononce à son tour.
M. Roumegas a de bonnes lectures : il reprend là mon amendement de l'an dernier, tendant à étudier la possibilité d'une indemnisation des intérimaires et des salariés des sous-traitants. Le rapport demandé accuse du retard, mais un inspecteur général de l'IGAS, M. Pierre Ricordeau, y travaille depuis deux mois et demi ; je l'ai invité, en tant que président du groupe d'études sur l'amiante, à une réunion d'étape qui se tiendra à la fin du mois de novembre. De nombreuses entreprises travaillent en effet dans le domaine du désamiantage, monsieur Roumegas, et, si la plupart exécutent cette tâche avec beaucoup de précautions, il n'est pas exclu que certains salariés contractent une maladie professionnelle. Attendons cependant la remise du rapport pour affiner votre proposition, étant entendu que l'on ne peut être contre le principe qui la sous-tend.
Je soutiens l'amendement présenté par M. Roumegas, ne serait-ce que pour débattre en séance publique de l'état de ce dossier avec Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Il importe d'avancer au plus vite sur ce dossier.
Les victimes de l'amiante vivent un drame pour lequel nous éprouvons tous une grande compassion, mais, comme il n'existe pas de problème de financement de leur indemnisation, il semble contre-productif de demander aux entreprises d'acquitter un prélèvement supplémentaire alors que notre pays est confronté à une grave désindustrialisation et à une crise de l'investissement. Cet amendement m'apparaît donc dangereux.
Monsieur Accoyer, cet amendement évoque la remise d'un rapport, pas le rétablissement de la contribution des entreprises supprimée en 2009.
Le texte de l'amendement confond l'indemnisation des victimes de l'amiante par le FIVA et l'accès à une préretraite servie par le FCAATA aux travailleurs exposés à l'amiante, mais qui ne développeront pas forcément de pathologie.
Comme l'expliquait M. Germain, il serait néanmoins opportun de voter sur le principe de cet amendement, afin que nous ayons une discussion en séance publique sur ce nouveau sujet du traitement des personnes exposées à l'amiante dans le cadre des chantiers de désamiantage.
Monsieur Roumegas, nous comprenons bien l'esprit de votre amendement, qui vise à ce que le Gouvernement remette un rapport qu'il devait transmettre le 1er juillet dernier ; sa rédaction pose néanmoins une difficulté et nous ne pouvons pas nous prononcer sur un amendement mal conçu.
Veuillez m'excuser, monsieur le rapporteur et madame la présidente, mais je maintiens mon amendement car je ne suis pas persuadé que sa rédaction soit erronée.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission adopte l'article 52 modifié.
Article 53 : Extension aux marins des droits attachés à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur
La Commission adopte l'article 53 sans modification.
Après l'article 53
La Commission examine en discussion commune les amendements AS355 du rapporteur et AS49 de M. Dominique Tian, portant article additionnel après l'article 53.
Cet amendement concerne l'interruption du délai de prescription du remboursement des cotisations ATMP en cas de recours contre les décisions de tarification ; des réformes en 2009 et en 2010 ont permis de simplifier les procédures pour limiter les recours abusifs des employeurs cherchant à échapper aux effets d'un sinistre sur leurs cotisations, ce qui a amélioré la récupération de ces cotisations par les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT). Il convient aujourd'hui de prendre une mesure de justice pour les entreprises auxquelles il arrive parfois de se voir imputer par les caisses des taux de cotisations trop élevés.
Lorsque l'entreprise obtient une correction de ce taux devant le juge de la tarification, elle a droit à un remboursement des montants indûment versés, mais les URSSAF opposent la prescription triennale : dès lors, certaines sommes ne sont jamais récupérées par les entreprises. La Cour de cassation a proposé d'interrompre dans ce cas le délai de prescription, afin que l'entreprise obtienne le remboursement de l'ensemble des cotisations acquittées à tort. Je vous propose donc d'adopter cette mesure d'équité qui sécurise juridiquement notre système de tarification.
Notre amendement AS49 est très proche. L'entreprise est responsable de l'assiette des cotisations à la branche ATMP, mais c'est la CARSAT qui fixe le taux. Or les procédures de contentieux portant sur celui-ci durent plusieurs années et l'entreprise pâtit de ces délais et du mécanisme de la prescription triennale. Il faut donc corriger cette situation.
Je soutiens ces amendements qui visent à traduire dans la loi la réforme préconisée par la Cour de cassation. Cette évolution s'inscrit dans la démarche de simplification de la vie des entreprises et répond à l'objectif de réduction des dépenses de fonctionnement et de maintien de la qualité du service poursuivi par les lois de financement de la sécurité sociale.
La Commission adopte l'amendement AS355. En conséquence, l'amendement AS49 tombe.
Article 54 : Objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2014
La Commission adopte l'article 54 sans modification.
Section 4
Dispositions relatives aux dépenses de la branche famille
Article 55 : Majoration du complément familial pour les familles sous le seuil de pauvreté
La Commission est saisie de l'amendement AS365 de la rapporteure.
Cet amendement rédactionnel vise à harmoniser les définitions des cas de majoration du plafond de ressources applicable au complément familial et à l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) ; je vous propose de retenir la rédaction de l'article L. 531-2 du code de la sécurité sociale, relatif à l'allocation de base de la PAJE et datant de 2004, plus précise que celle de 1977 sur le complément familial. L'article 55 permettra de doubler le montant du complément pour les 400 000 familles vivant sous le seuil de pauvreté, en leur attribuant 200 euros supplémentaires par an dès 2014, ce montant devant atteindre 1 000 euros à terme.
Le taux de pauvreté des couples ayant au moins trois enfants s'élève à 22,7 % et il dépasse 33 % pour les familles monoparentales. Depuis dix ans, le taux de pauvreté des enfants a augmenté de deux points et s'établit à près de 20 % ; l'intensité de la pauvreté s'est accrue – autrement dit, pour les enfants de ces ménages, la distance n'a cessé de se creuser par rapport au seuil de pauvreté. L'UNICEF a d'ailleurs montré que la France se situait au deuxième rang des pays riches en Europe pour l'ampleur des privations endurées par les enfants pauvres, qu'il s'agisse de la privation de fruits et légumes, de livres adaptés à leur âge ou de vêtements adaptés à leur âge et en bon état.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission adopte l'article 55 modifié.
Article 56 : Amélioration de la prise en compte du revenu des familles bénéficiaires de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant
La Commission aborde l'amendement AS226 de M. Gilles Lurton, tendant à la suppression de l'article.
L'article 56 modifie les conditions d'attribution de l'allocation de base de la PAJE ; son montant – aujourd'hui fixé à 184 euros par mois pour les 84 % de familles ne dépassant pas un certain plafond de revenu – sera divisé par deux pour 12 % des ménages éligibles à la PAJE, soit 280 000 familles. Cette mesure s'ajoute à la baisse du quotient familial, à la diminution du complément de libre choix d'activité (CLCA) et à la suppression de la réduction d'impôt pour les frais de scolarité ; il s'agit donc d'une nouvelle brèche dans notre politique familiale, ce qui nous conduit à demander la suppression de cet article.
Cet article constitue une nouvelle attaque contre les classes moyennes et contre la politique familiale car, alors que 16 % des familles ne bénéficient pas de la PAJE, 280 000 autres vont voir leur allocation réduite de moitié. Or, si la France possède un des taux de natalité les plus élevés d'Europe, elle le doit à sa politique familiale.
Cet article ne touche pas au complément de mode de garde ; en outre, un amendement au projet de loi de finances (PLF) maintiendra la réduction d'impôt pour frais de scolarité, et l'allocation de base de la PAJE est versée sous condition de ressources, mais le plafond fixé à cet effet est élevé, puisque seulement 14 % des familles le dépassent contre 52 % dans le cas de l'allocation de rentrée scolaire. L'instauration d'un second plafond rendra la PAJE plus redistributive, car nous souhaitons que les familles pauvres et modestes puissent vivre décemment. La mesure est d'ailleurs cohérente avec la décision d'augmenter le montant du complément familial pour les ménages les plus pauvres. Le nouveau plafond n'entraînera une baisse de l'allocation que pour 12 % des bénéficiaires actuels.
Il est nécessaire de dégager des économies pour redresser les comptes de la CNAF, mais cette action s'effectue dans la justice.
Madame la rapporteure, vous avez affirmé qu'il n'y aurait pas suppression de la réduction d'impôt pour frais de scolarité, mais cette mesure concerne les collégiens, les lycéens et les étudiants alors que la PAJE concerne les enfants de moins de trois ans. Le nombre des ménages – 280 000 – qui pâtiront de cette décision est tout sauf négligeable. Notre politique familiale fonctionne et il ne faut pas la déstabiliser, surtout à un moment où le pouvoir d'achat des familles est entamé.
Cet article considère l'enfant comme une base de taxation et il diminue les revenus des ménages ayant des enfants en les défavorisant par rapport aux couples sans enfant. Cette attitude est incompréhensible et rompt avec le pacte républicain qui repose sur la solidarité entre les générations : toute mesure qui stigmatise les familles avec enfants – quel que soit leur revenu – jouera contre la natalité, contre le renouvellement des générations et, en définitive, contre le système de retraite par répartition.
Le Gouvernement mène une réforme de la politique familiale simple : il veut corriger un système – presque unique au monde – dans lequel les familles sont d'autant plus aidées qu'elles sont riches, puisque la majorité des mesures de soutien repose sur des crédits d'impôt qui bénéficient davantage aux ménages qui en acquittent le plus, c'est-à-dire aux plus aisés. Nous souhaitons donc mieux cibler les aides sur les familles les plus modestes et la cohérence de notre politique, voulue par le Premier ministre, doit s'apprécier à la lecture du PLFSS et du PLF.
Nous favorisons également l'accueil des enfants pour permettre aux femmes de travailler ; là encore, il s'agit d'un choix clair que vous pouvez contester, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, mais il est inexact d'affirmer que nous ne défendons pas les familles. Les couples ne font pas d'enfants pour les incitations fiscales, monsieur Accoyer, et nous les aidons à assumer leurs charges de famille, conformément aux engagements pris lors de la campagne électorale de 2012 en faveur de la justice et de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Je me demande quelles sont vos motivations pour soutenir cet article. Vous présentez les choses de manière défensive en disant que celui-ci maintient le versement à taux plein de l'allocation de base de la PAJE à la très grande majorité de ses bénéficiaires actuels : mais pourquoi baisser cette allocation pour 12 % d'entre eux ? Quelles économies attendez-vous de la réduction qui frappera selon vous les allocataires aux revenus les plus élevés ?
Tout cela s'ajoute à la baisse du quotient familial, à celle du complément de libre choix d'activité et à l'éventuelle suppression de la réduction d'impôt pour frais de scolarité. Que vous ont fait les familles pour mériter un tel traitement ?
Je voudrais revenir sur l'impact des politiques publiques sur le taux de fécondité. La France est certes très bien placée par rapport aux autres pays, notamment européens, avec un taux de fécondité supérieur ou égal à 2 selon les années, mais si ce taux est de 1,4 en Allemagne, ce n'est pas en raison de l'absence d'allocations versées en fonction du nombre d'enfants, mais faute de solutions de garde, en particulier collectives, pour les moins de trois ans : dans ce pays, 30 % des femmes nées en 1965 n'ont pas d'enfant parce qu'elles seraient contraintes de le garder à la maison jusqu'à cet âge de trois ans !
Notre politique familiale est à l'opposé : nous favorisons la création de places en crèche et essayons prioritairement de mettre les enfants à l'école avant cet âge. Il s'agit d'une politique de qualité permettant aux femmes de concilier vie familiale et vie professionnelle.
Je trouve un peu hasardeux de chercher à expliquer un taux de natalité en fonction de telle ou telle politique familiale. Mais, quoi qu'il en soit, cet article reviendra à exclure 30 000 familles du bénéfice de l'allocation de base, soit 3 % des bénéficiaires, à en priver 10 000 de la prime à la naissance ou à l'adoption et à réduire le montant perçu par 30 000 autres : au total, 70 000 familles seront touchées !
Vous qui parlez toujours d'égalité de traitement, vous créez une inégalité entre les familles actuellement bénéficiaires de cette allocation et celles qui auront bientôt des enfants !
Pour être efficace, une politique familiale doit être au long cours. La différence entre les pratiques de la France et de l'Allemagne est à cet égard instructive : quand nous avons mis en place les dispositifs pour aider à la garde des enfants, les crèches n'ont pas été disponibles immédiatement et les familles ont d'abord dû recourir à des assistantes maternelles, mais cette politique a validé la démarche des femmes qui voulaient exercer un métier et elle a progressivement imposé un modèle culturel. Le travail féminin s'est ainsi développé, alors que cela n'a pas été le cas chez nos voisins, en l'absence de moyens financiers pour accompagner les familles.
Je trouve dommage, maintenant que nous avons un modèle assez exemplaire, que beaucoup nous envient, de dire qu'il ne s'agit pas d'un problème de moyens et de porter atteinte à cette politique de longue durée.
Réduction des avantages fiscaux consentis pour la garde d'enfant, du complément de libre choix d'activité, non-revalorisation du barème de l'impôt sur le revenu, remise en cause de l'allocation de base de la PAJE, etc. : toutes ces mesures se cumulent de sorte que nous recevons maintenant dans nos permanences des familles de la classe moyenne en situation très difficile, car faire garder des enfants coûte cher et les programmes de construction de crèches ne pourront jamais couvrir la totalité des besoins. Vous additionnez les dispositions contre les familles avec enfants en expliquant qu'elles sont riches. Mais ce n'est pas ce qu'elles nous disent ! D'ailleurs, les familles riches sont bien au-dessus des plafonds en question. Des mères se retrouvent en revanche dans une détresse terrible, d'autant que la réforme des rythmes scolaires complique encore l'accueil des jeunes enfants. Ce n'est pourtant pas le moment de s'en prendre aux familles avec enfants !
L'exécutif a lancé une série de réflexions sur le financement de la protection sanitaire et sociale – une structure particulière y a été affectée. Il réfléchit aussi à une réforme du financement de la politique de la famille, dont l'application a d'ailleurs été reportée à la mi-2014 – et, de son côté, le Parlement travaille sur le sujet, à travers la MECSS.
Cependant, si, depuis que la nouvelle majorité est en place, des mesures ont été prises pour limiter le déficit de la branche famille, elles n'ont qu'une portée assez ponctuelle, faute de s'intégrer dans une vision d'ensemble. Il y aurait donc lieu d'avoir une approche plus globale afin de dégager des lignes directrices pour agir dans la durée.
D'autre part, nous assistons à un changement de paradigme : alors que la politique familiale repose historiquement sur un principe d'universalité, de sorte qu'elle est déconnectée des revenus, voici que s'impose une logique redistributrice. Cette nouvelle logique peut s'admettre mais il faut que nous puissions en débattre. En tout cas, entre ce changement de paradigme et les mesures ponctuelles, cet article me paraît inopportun.
Vous avez bien résumé nos divergences, monsieur Morange ! Nous conservons le principe d'une politique familiale à visée universelle tout en essayant de promouvoir une plus grande redistribution, considérant que, comme l'a dit Jean-Marc Germain, la politique actuelle favorise les revenus les plus élevés. Cela dit, les allocations familiales ne sont pas remises en cause.
D'autre part, en raison en partie de la politique menée par la précédente majorité, le financement de la branche famille se trouve déséquilibré. Nous essayons donc de rétablir l'équilibre tout en consacrant les économies que nous pouvons réaliser à l'accueil de la petite enfance, fidèles en cela à l'un des traits caractéristiques de notre politique familiale qui vise à favoriser le travail des femmes. Je vous remercie donc M. Morange de son propos assez juste et équilibré.
Je ne répondrai pas en revanche à M. Accoyer, qui a additionné les poncifs sans vraiment les étayer.
La politique familiale est redistributive depuis longtemps : les prestations financées par la branche famille ne sont universelles qu'à 57 %. Mais ce serait une erreur de ne pas tenir compte de l'évolution de la société depuis 1945.
Je rappelle que nous occupons le deuxième rang mondial en ce qui concerne la pauvreté des enfants. Cela doit nous inciter à mieux répartir les prestations familiales.
Nous consacrons plus de 3 % de notre PIB à la politique familiale, ce qui nous rend exemplaires. Or les mesures que nous proposons ne concernent, sur les près de trois millions de familles de ce pays, qu'une petite partie d'entre elles, qui pourront tout de même faire face. La Cour des comptes avait d'ailleurs relevé que le niveau trop élevé du plafond de ressources écartait très peu de familles des prestations.
D'autre part, la politique de la famille ne repose pas seulement sur la branche famille, mais aussi sur les dispositions de la loi de finances. Y contribuent également la refondation de l'école et la convention d'objectifs et de gestion (COG) signée avec la CNAF il y a quelques mois, permettant de créer 270 000 places d'accueil collectif. C'est une nouveauté : si on fait le bilan de l'action menée en la matière au cours de la dernière législature, on constate que le solde entre le nombre de places créées et celui de places d'école maternelle supprimées est égal à zéro !
Nous cherchons donc à mieux concilier vie familiale et vie professionnelle, notamment par l'accueil de la petite enfance au travers de modes de garde diversifiés, et nous tenons nos engagements.
Je rappelle enfin que la caisse d'allocations familiales participe à la réforme des rythmes scolaires puisqu'elle finance les collectivités qui la mettent en place.
La Commission rejette l'amendement AS226.
Puis elle adopte l'article 56 sans modification.
Article 57 : Suppression de la majoration du complément libre choix d'activité de la prestation d'accueil du jeune enfant et simplification des conditions d'attribution aux non-salariés
La Commission est saisie de l'amendement AS227 de M. Gilles Lurton tendant à la suppression de l'article.
Cet article supprime le complément de libre choix d'activité (CLCA) majoré pour les familles qui dépassent le plafond de ressources au-delà duquel on perd le bénéfice de l'allocation de base de la PAJE, faisant ainsi largement baisser la rémunération de ce complément, pourtant déjà faible. En outre, il est totalement illogique que le Gouvernement affiche, dans le projet de loi sur l'égalité des hommes et des femmes, l'objectif de rendre attractif le recours au CLCA pour les hommes et que, dans le même temps, il en réduise la rémunération.
Cette mesure s'ajoute à d'autres, malheureusement trop nombreuses, et ouvre une nouvelle brèche dans notre politique familiale, qui est pourtant un investissement d'avenir pour notre pays. C'est grâce à elle que notre natalité est nettement plus élevée que dans la plupart des pays européens – qui envient nos résultats – et également répartie entre les couches sociales.
Aujourd'hui, le montant du CLCA est majoré lorsque le bénéficiaire ne perçoit pas l'allocation de base de la PAJE. C'est donc un avantage réservé aux familles les plus aisées puisque seulement 14 % d'entre elles sont exclues de cette dernière. Cela va au rebours d'une politique redistributive et nourrit un effet d'aubaine car, dans leur grande majorité, les personnes percevant le montant majoré auraient réduit leur activité en tout état de cause.
J'ai pris la mesure du caractère injuste de cette situation lorsque j'étais rapporteure des travaux de la MECSS sur la PAJE, en 2009. Ce point de vue, alors partagé par mon groupe politique, ne l'était pas, il est vrai, par l'UMP !
Je précise que le montant du CLCA non majoré n'est pas modifié. D'autre part, si vous supprimez cet article, vous ferez disparaître aussi les mesures visant à simplifier l'attribution du CLCA aux non-salariés.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article sans modification.
Article 58 : Simplification des modalités d'attribution du complément de mode de garde (CMG) de la prestation d'accueil du jeune enfant et plafonnement des tarifs des micro-crèches éligibles au CMG-structure
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 59 : Paramètres de calcul de l'allocation de logement familiale pour 2014
La Commission adopte l'article sans modification.
Après l'article 59
La Commission est saisie de deux amendements portant articles additionnels. Elle examine d'abord l'amendement AS358 de Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure.
Je vous propose de geler le montant de la première part du fonds spécial finançant l'Union nationale des associations familiales (UNAF) et les unions départementales (UDAF) pour 2014.
Toutes les institutions publiques sont en effet appelées à contribuer à l'effort commun de redressement des comptes sociaux. Or la loi a donné à ces unions un statut semi-public : elles ont la compétence légale de représenter les familles et disposent d'un fonds spécial prélevé sur les ressources de la CNAF et de la Mutualité sociale agricole (MSA). Elle a également indexé les montants du fonds : les ressources des unions croissent donc automatiquement et de façon assez rapide chaque année, en fonction du montant des prestations.
L'effort demandé l'an prochain à l'UNAF et aux UDAF sera raisonnable. La première part du fonds, qui finance les activités institutionnelles, c'est-à-dire les frais de fonctionnement du siège de ces organisations, serait maintenue au niveau de 2013, soit à 22 millions d'euros, ce qui représente 80 % du montant total de la subvention.
Quant à la seconde part, qui finance pour un montant d'environ 6 millions d'euros des actions conduites en faveur des familles, définies par voie de convention avec le ministère des affaires sociales, elle ne sera pas concernée.
Cette mesure ne concernera pas non plus les missions des UDAF en matière de tutelle des majeurs protégés ou de protection de l'enfance, qui sont financées par des subventions spécifiques.
D'autres associations voient-elles leur dotation ainsi gelée dans le projet de loi de finances pour 2014 ? Je ne voudrais pas que les associations s'occupant des familles fassent l'objet de mesures stigmatisantes…
Tous les opérateurs publics participent à l'effort d'économie : on le réclame donc aussi aux unions d'associations familiales du fait de leur statut semi-public.
Sont également concernées les chambres consulaires, les chambres de commerce, mais aussi la CNAF, puisque nous lui demandons de faire des économies de 15 % sur son budget de fonctionnement.
Je rappelle que la première part du fonds spécial a augmenté de 15 % depuis 2005, soit plus que toutes les autres subventions.
Le président de l'UNAF, avec lequel je me suis entretenue, m'a d'ailleurs indiqué qu'il s'organiserait pour prendre en compte cette mesure.
Il n'a pas d'autre issue ! Mais l'application de cette mesure dès le 1er janvier 2014 ne laissera que bien peu de temps à ces unions pour s'adapter.
En outre, cette mesure m'inquiète car les UDAF ont un rôle important de soutien aux structures intervenant dans nos territoires auprès des familles en difficulté ou dépendantes, ou des personnes isolées. On sait par exemple les problèmes de financement auxquels se heurtent aujourd'hui les associations de services à la personne, ne serait-ce que pour couvrir des frais de déplacement très substantiels et d'autant plus élevés que la densité de population est faible – comme dans le département de l'Orne. Il ne faudrait pas que ce gel de crédits affecte encore davantage ces associations.
Si j'ai bien compris, le fonds sera maintenu à 28 millions d'euros pour 2014 et sa seconde part, qui finance notamment des actions d'aide à la parentalité, sera préservée. Cela dit, les conventions passées avec le ministère des affaires sociales sont-elles aussi amenées à évoluer, sachant que si l'on fait des économies sur l'activité institutionnelle, il serait très dommageable d'en faire aussi sur les actions elles-mêmes, bénéfiques pour les territoires ?
Le gel ne portera que sur les activités institutionnelles. Il n'y a donc pas d'inquiétude à avoir : les conventions seront maintenues, de même que le travail des UDAF. On peut d'ailleurs saluer tout ce que font les travailleurs sociaux dans ces organismes en matière de tutelle ou d'accompagnement de la politique familiale, même si ces actions ne sont pas toujours très visibles dans nos départements ou nos communes. En tout état de cause, chacun doit contribuer à l'effort du redressement de nos comptes publics pour la préservation de notre politique familiale.
Je suis stupéfaite : il est inimaginable d'être confronté à une telle restriction alors que ces unions doivent gérer un budget, des activités, des personnels et un train de vie ! La seule manière de convaincre les associations du bien-fondé de cette démarche – alors qu'elles en sont très mécontentes – est de leur dire qu'on fait de même avec les autres associations dans tous les domaines.
Pas du tout ! Pourquoi impose-t-on un effort à certaines associations et pas à d'autres ? Il ne doit pas y avoir deux poids, deux mesures.
Madame Poletti, cet effort de gestion se limite à 3 000 euros par département. En outre, les UDAF sont également financées par les conseils généraux dans le cadre de conventions particulières. Ces associations vivent de façon adaptée à leurs besoins.
Il y a beaucoup d'autres associations qui souffrent depuis plusieurs années de réductions de crédits, comme les associations de jeunesse et d'éducation populaire ou les associations sportives, qui ont vu disparaître toute aide en faveur des petits clubs. Dans ces conditions, l'effort de gestion demandé – en une année où les communes verront leurs dotations amputées d'1,5 milliard d'euros – ne saurait être présenté comme scandaleux.
Mon propos concernera à la fois cet amendement et le suivant, qui traite de l'évaluation, grand sujet s'il en est pour la rationalisation des budgets publics finançant les structures associatives. J'ai rédigé en 2008, pour le compte de la commission des affaires familiales, culturelles et sociales, un rapport sur le financement du tissu associatif et ses relations avec les pouvoirs publics, dont les recommandations avaient été adoptées à l'unanimité. Permettez-moi donc de rappeler quelques chiffres. Le budget cumulé associatif (BCA) s'élève à quelque 60 milliards d'euros, dont la moitié financés sur fonds publics.
Ces amendements nous font entrer dans une logique légitime, celle de la rationalisation et de l'évaluation. Mais pour que sa légitimité reste entière, cette démarche doit s'appliquer à toutes les associations qui bénéficient de financements publics. Il n'est pas interdit d'imposer une baisse de 15 % des montants versés, mais encore faut-il expliciter les critères de cette décision et la justifier. J'appelle en outre votre attention sur l'inertie d'un certain nombre de charges, notamment les loyers et la masse salariale.
Je ne comprends pas cette initiative qui stigmatise les associations de militants familiaux. Nous n'osons penser que c'est parce que ces associations n'étaient pas toutes d'accord avec le mariage pour tous qu'elles se voient ainsi sanctionnées. (Exclamations parmi les commissaires du groupe SRC.)
Ne mélangeons pas tout ! Vous parlez d'une baisse de 15 %, monsieur Morange. En réalité, nous ne revenons que sur l'augmentation de 1 % qui aurait pu être envisagée. Il s'agit donc d'un gel – et non d'une baisse – des montants versés en 2014. En outre, il ne concerne que la première part du fonds spécial, à savoir le financement des activités institutionnelles de l'UNAF, autrement dit de son rôle d'interlocuteur des pouvoirs publics, qui est reconnu par la loi, ce dialogue ayant quasiment valeur constitutionnelle – au point que l'on pourrait oser un parallèle avec les organisations syndicales. Il me semble que les associations familiales peuvent comprendre l'effort qui leur est demandé.
Poursuivons le parallèle avec les organisations syndicales. Il nous faut définir de nouvelles règles, de même que nous devrons mettre en place dans les prochains mois un financement public du dialogue social, du paritarisme et des organisations syndicales. Je ne suis d'ailleurs pas sûr qu'il appartienne au Parlement de fixer les dotations à verser aux partenaires institutionnels, qu'il s'agisse des organisations familiales ou des syndicats. Il y a donc une réflexion à conduire sur ce sujet.
Autant on peut comprendre que les associations familiales se voient demander une contribution à l'effort collectif, autant je suis réservé sur le second amendement de la rapporteure, qui pourrait laisser penser que nous nourrissons une certaine suspicion à leur encontre. Au lieu de demander un rapport au Gouvernement, mieux vaudrait travailler nous-mêmes avec elles sur l'ensemble des points évoqués.
Nous ne parlons pas des associations familiales, mais de l'UNAF : ce n'est pas tout à fait la même chose. D'autre part, il n'y a pas de baisse de la subvention, puisque le montant de la première part du fonds est maintenu à environ 22 millions d'euros, tandis que celui de la deuxième augmente d'environ 100 000 d'euros.
De plus, le gel de la première part revient à diminuer les dépenses de la CNAF d'un montant équivalent, puisque c'est elle qui finance le fonds. Je rappelle d'ailleurs que, jusqu'en 2005, le montant de la subvention de la CNAF à l'UNAF dépendait de celui des prestations versées par la première : la subvention pouvait donc varier à la hausse ou à la baisse d'une année sur l'autre.
Enfin, le gel ne vise que les montants versés au titre des activités institutionnelles de l'UNAF. Il n'y a aucune inquiétude à avoir sur sa situation financière, qui est saine, avec un report à nouveau positif.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS363 de la rapporteure.
Cet amendement ne procède d'aucune suspicion à l'encontre des associations familiales, monsieur Gille. Il vise simplement à réunir les conditions d'un nouveau partenariat avec l'UNAF.
La contribution du mouvement associatif familial à notre politique familiale est ancienne et importante. Elle est organisée par des unions d'associations familiales, auxquelles la loi confère la mission de représenter les familles auprès des pouvoirs publics en contrepartie d'un financement public. Dans son rapport annuel de 2004, la Cour des comptes avait considéré que l'attribution de fonds publics à ces unions devrait être subordonnée à une amélioration de leur représentativité. Depuis cette date, la baisse du nombre des familles adhérentes s'est poursuivie, atteignant 12 % sur la décennie.
Cet amendement prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 1er juin 2014, un rapport sur les unions d'associations familiales évaluant les effets de la réforme du fonds, intervenue en 2005, qui a fixé des modalités de contrôle et d'évaluation assez formelles. Des objectifs partagés sont définis avec le ministère pour l'utilisation des 20 % du fonds, mais les effets du dispositif semblent limités. Sur la base de ce rapport, le Parlement pourra définir les conditions d'un véritable partenariat entre les unions et les autres acteurs de la politique familiale. Nous aiderons ainsi les premières à jouer pleinement leur rôle d'appui aux associations familiales, afin de mieux identifier les besoins de toutes les familles dans leur diversité.
Il est question d'améliorer la représentativité des unions d'associations familiales. En quoi celle-ci pose-t-elle problème aujourd'hui ?
Je le disais à l'instant, le nombre des familles adhérentes a baissé de 12 % en dix ans. En outre, il semble que les associations prestataires de services soient surreprésentées dans les unions d'associations familiales. Il faut donc remettre les choses à plat pour permettre la création d'un véritable partenariat ; en effet, tout en reconnaissant le rôle que joue l'UNAF pour faire entendre la voix des familles, les associations aimeraient parfois être davantage écoutées. Mais, quoi qu'il en soit, ne voyez aucune suspicion à l'encontre des unions familiales dans cet amendement.
Je poserai la même question que sur l'amendement précédent : existe-t-il aujourd'hui une volonté de « remettre à plat » les relations entre l'État et les associations qu'il soutient ? Si tel est le cas, il n'y a pas de problème. Mais il se trouve qu'on nous soumet ce soir deux amendements qui concernent les seules associations représentant les familles. Vous comprendrez que nous ne puissions les voter sans nous assurer que d'autres associations – les associations environnementales, par exemple – seront également concernées.
La France compte près de 1,1 million d'associations. Si nous voulons procéder à cette évaluation, nous devrons porter notre attention sur la quasi-totalité d'entre elles, ou tout au moins sur celles qui bénéficient des 30 milliards d'euros de financements publics, et sur leur capacité à assumer leurs missions.
Il n'est pas possible de parler des associations sans se référer à la loi fondatrice de 1901, qui définit de manière très claire la « démocratie associative » dont le rôle est irremplaçable dans la constitution du lien social au sein de la nation. Si nous avons le souci que les deniers publics alloués aux associations soient utilisés au mieux, nous partageons tous aussi un même attachement à la liberté d'association. Il est dès lors délicat de s'attaquer à ce sujet de la représentativité des associations. Ce serait au surplus s'avancer sur un terrain bien instable d'un point de vue juridique : on ne peut en effet s'y aventurer sans soulever également la question de la représentativité des syndicats.
Un commissaire du groupe SRC. Cela a été fait.
Certes – sous la législature précédente. Mais je rappelle que M. Michel Sapin souhaite voir assurer plus de transparence et une traçabilité du financement du dialogue social. Les représentants syndicaux, que le Comité d'évaluation et de contrôle auditionne actuellement dans le cadre d'une réflexion sur la formation professionnelle, ne manquent d'ailleurs jamais de nous rappeler eux aussi la nécessité de nous pencher à nouveau sur la représentativité. Cet amendement a le mérite d'aborder un vrai sujet, mais il le fait de manière périphérique. Il serait donc plus sage de le retirer.
L'exposé sommaire nous dit que la loi a confié à ces associations la mission de représenter les familles, qu'elles bénéficient – comme bien d'autres – de financements publics, et que la Cour des comptes a considéré que l'attribution de ces fonds aux unions d'associations familiales devrait être subordonnée à une amélioration de leur représentativité. Il n'y a rien d'extravagant à cela, et nous sommes dans notre rôle en prenant cette observation en compte.
Les modalités de financement de l'UNAF ont été revues par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005. Il est donc normal que nous nous penchions sur l'évolution des montants versés depuis cette date. Le rapport que le Gouvernement remettra au Parlement ne portera pas seulement sur le financement, mais aussi sur les actions menées. D'autre part, dans la mesure où nous discutons du PLFSS, il est naturel que nous nous intéressions aux associations familiales, et non aux associations sportives ou environnementales ! Enfin, je redis que ces amendements ne visent pas le budget des associations familiales, mais celui de l'UNAF.
Je réitère donc ma proposition : plutôt que de demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement pour évaluer la représentativité des unions d'associations familiales, saisissons-nous de cette question.
Puisque cet amendement vise à interpeller le Gouvernement, je vais le mettre aux voix. Nous verrons bien ce qu'il en adviendra dans l'hémicycle.
Je rappelle à nos collègues de l'opposition que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 avait opéré des coupes claires dans les subventions aux associations d'éducation populaire, comme la Ligue de l'enseignement. À l'époque, celles-ci avaient vu leur budget baisser de 25 % à 30% ; elles n'arrivaient plus à assurer l'accompagnement des jeunes et des familles. La mesure aujourd'hui proposée n'a rien à voir avec celle-ci, puisque l'enveloppe de l'UNAF est maintenue.
La Commission rejette l'amendement.
Article 60 : Objectif de dépenses de la branche famille pour l'année 2014
La Commission adopte l'article 60 sans modification.
Section 5
Dispositions relatives aux organismes concourant au financement des régimes obligatoires
Article 61 : Fixation du transfert du fonds de solidarité vieillesse au titre du financement du minimum contributif pour 2014
La Commission adopte l'article 61 sans modification.
Article 62 : Prévisions des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires en 2014
La Commission adopte l'article 62 sans modification.
Section 6
Dispositions relatives à la gestion des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement ainsi qu'au contrôle et à la lutte contre la fraude
Article 63 : Recouvrement des dettes et créances européennes et internationales
La Commission adopte l'article 63 sans modification.
Article 64 : Unification de la gestion des prestations maladie et accidents du travail des exploitants agricoles
La Commission est saisie de l'amendement AS78 de M. Jean-Pierre Door, tendant à la suppression de l'article.
L'article 64 prévoit de confier à la Mutualité sociale agricole (MSA) la totalité de la gestion des branches maladie – AMEXA – et accidents du travail – ATEXA – des exploitants agricoles. Cette mesure n'est ni justifiée dans son principe, ni fondée sur une analyse démontrant son utilité générale. L'organisation de ces deux régimes agricoles ne peut être rayée d'un trait. De plus, les références citées dans l'exposé des motifs de l'article sont inexactes.
Je m'étonne de cet amendement, car cette mesure était déjà souhaitée par la MSA l'an dernier.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 64 sans modification.
Article 65 : Exemplarité des donneurs d'ordre publics
La Commission adopte l'article 65 sans modification.
Article 66 : Renforcement des compétences des caisses du régime agricole en matière de fraude aux AT-MP et de travail dissimulé
La Commission adopte l'article 66 sans modification.
Article 67 : Perception frauduleuse d'aides au logement via des sociétés écrans
La Commission adopte l'article 67 sans modification.
Article 68 : Harmonisation des sanctions en matière de fraude aux prestations sociales
La Commission adopte l'article 68 sans modification.
Après l'article 68
La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 65. Elle examine d'abord l'amendement AS255 de Mme Bérengère Poletti.
Nous avons décliné un certain nombre des préconisations du rapport de la MECSS sur les arrêts de travail et les indemnités journalières sous forme d'amendements au PLFSS.
L'un des principaux enseignements que nous retirons de cette mission est la très mauvaise connaissance des dépenses effectuées au titre des indemnités journalières, notamment par les entreprises. Cet amendement tend donc à faire évaluer par les entreprises le montant des indemnités versées au titre du dispositif légal et d'un accord de branche ou d'entreprise, et d'introduire une disposition en ce sens dans la déclaration sociale nominative (DSN).
Je m'étonne que vous puissiez défendre un amendement de ce type. En effet, il ne simplifie pas la vie des entreprises, qui devront évaluer et déclarer chaque mois le montant des indemnités versées par les régimes de prévoyance. Il transforme la DSN – qui a d'abord vocation à faciliter la vie des entreprises – en outil statistique. C'est un détournement de l'esprit dans lequel M. Jean-Luc Warsmann avait conçu cette déclaration. Mieux vaudrait demander ces informations aux assureurs et aux organismes de prévoyance.
Cet amendement est en effet le fruit des travaux de la MECSS sur les arrêts de travail et les indemnités journalières, auxquels ont participé Jean-Marc Germain et notre excellente rapporteure Bérengère Poletti. Cette préconisation est issue d'un rapport de la Cour des comptes. La DSN a vocation à être mise en oeuvre dans un délai de dix-huit à vingt-quatre mois. Notre amendement ne vise pas à alourdir les tâches administratives des entreprises ; il s'inscrit au contraire dans une logique de simplification administrative validée par la Cour des comptes et approuvée par l'ensemble des membres de la MECSS, qui ont voté à l'unanimité en faveur de cette préconisation.
Nous avons constaté une profonde méconnaissance des volumes financiers consacrés à la participation financière que versent les entreprises en complément des indemnités journalières versées au titre du dispositif légal. Aucun organisme n'a été en mesure de répondre aux interrogations que nous avions formulées sur ce point. C'est pourquoi nous faisons cette préconisation, qui nous permettra de connaître aussi bien le volume de cette participation financière, qui avoisinerait 30 % des montants versés au titre des arrêts de travail, et les « zones d'ombre », certains travailleurs ne bénéficiant pas de cette aide complémentaire.
Cet amendement a d'abord une portée statistique. Non seulement la MECSS a eu beaucoup de mal à identifier les moyens mis en oeuvre, ce qui est tout de même une difficulté compte tenu de la place qu'occupe le dispositif complémentaire, mais il lui était difficile de formuler un jugement sur le respect de l'égalité des droits entre salariés. Il est important que nous ayons connaissance de ces éléments, d'autant que cela ne peut avoir qu'un impact positif sur les droits des personnes. Cette recommandation a d'ailleurs été adoptée à l'unanimité par la MECSS, puis par notre Commission lors de l'examen du rapport. À titre personnel, j'y suis favorable. Je soutiendrai donc l'amendement, sachant que nous aurons l'occasion d'en rediscuter dans l'hémicycle.
Je prends acte que les coprésidents de la MECSS souhaitent une réorientation de la DSN. Je m'en remets donc à la sagesse de la Commission.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement AS257 de Mme Bérengère Poletti.
Dans le même esprit que le précédent, cet amendement propose de privilégier un contrôle plus ciblé, par la transmission systématique, des caisses primaires aux services médicaux, des arrêts pour lesquels une obligation administrative n'a pas été respectée et de concentrer l'activité des services médicaux de l'assurance maladie sur le contrôle thérapeutique, cela grâce à l'établissement de référentiels qui permettent de contrôler plus efficacement les arrêts maladie arrivant à la caisse primaire. Les expérimentations qui ont été conduites par la CNAM dans plusieurs caisses ont montré qu'une bonne connaissance du profil général des arrêts maladie permettait de renforcer l'efficacité des contrôles.
Je suis d'accord avec l'idée de référentiel, mais il semble difficile d'apprécier ce qu'est une « durée anormalement élevée ».
Je le répète, ces préconisations, adoptées par la MECSS à l'unanimité, résultent de ce que nous avons constaté lors de nos auditions. Plutôt que de pratiquer des contrôles systématiques et aveugles qui aboutissent quasiment à culpabiliser les travailleurs frappés par les aléas de la vie, la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne a choisi de constituer des cohortes en se fondant sur des référentiels. Grâce à cette méthode, validée par la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAMTS) au niveau national, elle a obtenu des résultats significatifs. L'expérimentation a donc vocation à se généraliser. C'est le sens de notre proposition.
N'auriez-vous pu associer M. Jean-Marc Germain, coprésident de la MECSS, à la rédaction de ces amendements ?
Il est exact que la MECSS, puis la Commission des affaires sociales, ont approuvé le rapport d'information sur les arrêts de travail et les indemnités journalières, et que les amendements de Mme Poletti s'inscrivent dans le prolongement de ce travail. Il conviendrait néanmoins d'évaluer l'impact des mesures proposées et de les soumettre à une discussion approfondie avec le Gouvernement. Contrairement au précédent, cet amendement a des conséquences très importantes puisqu'il prévoit un contrôle systématique au-delà de seuils qu'il conviendrait à tout le moins de préciser.
Bref, nous sommes d'accord sur le principe mais nous considérons que la mise en oeuvre de ces dispositions peut se révéler problématique. Nous n'avons malheureusement pas eu le temps de mener un travail approfondi sur cet amendement et sur ceux qui suivent. Cela explique la gêne que le rapporteur et moi-même pouvons éprouver.
Expérimenter permet de mieux légiférer. En l'occurrence, l'expérimentation de référentiels et de contrôles ciblés a eu lieu et nous en avons constaté les effets positifs. Il faut maintenant étendre le dispositif à tout le territoire.
Pour maîtriser une dépense dynamique comme celle qu'engendrent les indemnités journalières, il serait très injuste de chercher à réduire les prestations versées aux personnes concernées. Il est bien préférable d'avoir une bonne connaissance du dispositif et de mettre en place un contrôle efficace sur le terrain. Rien n'est plus inégal que les indemnités journalières en France : elles varient selon les endroits, les médecins, les maladies, les prescriptions – parfois totalement différentes pour une même maladie –, les saisons, les événements... Un travail très sérieux a été mené au sein d'une caisse primaire ; on peut l'étendre sans crainte.
L'amendement présente l'avantage de définir une grille de lecture sans entrer dans le détail. Les critères du contrôle médical sont relativement dispersés. En les resserrant autour du référentiel validé par la Haute Autorité de santé et de critères administratifs simples comme celui de la présence à domicile, on gagnera à la fois en efficacité et en objectivité. On aura tout loisir, par la suite, d'affiner les modalités par un décret d'application, sachant que le dispositif est déjà opérationnel dans différentes régions.
Je rappelle aussi que, sur les quelque 2 000 médecins contrôleurs que compte notre pays, un peu plus d'un tiers seulement est affecté au contrôle médical, la part restante se consacrant essentiellement à des tâches administratives. Nous proposons de clarifier le paysage !
Je le répète, nous partageons l'esprit dans lequel ce rapport a été élaboré. Nous considérons qu'il comporte de nombreuses propositions de bon sens fondées sur un important travail d'observation. Certaines d'entre elles auront néanmoins des conséquences importantes sur les modalités et l'organisation du contrôle. Je vous suggère donc, mes chers collègues, de retirer vos amendements afin que nous les retravaillions avec le rapporteur et avec le Gouvernement avant la discussion en séance publique. Le sujet mérite mieux qu'une discussion un peu rapide.
Je ne comprends pas vos réticences. La MECSS a mené plusieurs dizaines d'heures d'auditions et a adopté le rapport de Mme Poletti à l'unanimité. Si l'on n'utilise pas ses conclusions, à quoi bon faire des rapports ? Nous avons ici l'occasion d'introduire dans la loi des recommandations longuement pesées. Nous gagnerions tous à cosigner de tels amendements, et nous ferions progresser aussi bien la démocratie que l'image du travail parlementaire.
Le 30 avril 2008, notre Commission avait également adopté à l'unanimité mon rapport sur la prescription, la consommation et la fiscalité des médicaments. Il a pourtant fallu attendre l'affaire du Mediator et l'action de M. Gérard Bapt, qui a largement contribué à sa médiatisation, pour que l'on adopte les amendements qui en étaient issus !
J'étais déjà coprésident de la MECSS à l'époque et je me rappelle que la Commission des affaires sociales avait adopté vos amendements contre l'avis du Gouvernement, madame la présidente. C'est bien la preuve que la MECSS est un espace privilégié où règne une grande ouverture d'esprit !
Comme pour la fraude sociale – sur laquelle j'avais formulé avec le coprésident de l'époque, M. Jean Mallot, des préconisations pragmatiques adoptées, là aussi, à l'unanimité –, on assimile trop souvent le sujet des arrêts maladie à une chasse aux malades ou à une chasse aux pauvres. Il faut en finir avec cette diabolisation. C'est pourquoi nous maintiendrons cet amendement et les suivants. Chacun doit prendre ses responsabilités, quitte à améliorer la rédaction par la suite si nous obtenons des assurances du Gouvernement.
Il est en effet important, madame Le Callennec, que les rapports de la MECSS trouvent une traduction législative. En l'espèce, cependant, le temps a manqué pour enclencher la phase de travail avec le Gouvernement. Le coprésident Morange et moi-même souhaitions auditionner la ministre, mais le calendrier était trop chargé pour que cela puisse se faire. Si vous maintenez l'amendement, interprétez notre vote non pas comme un rejet de ce que nous avons adopté précédemment, mais comme le souhait de mener à bien ce travail avec le Gouvernement.
Reprenons les trois critères que l'amendement met en exergue pour contraindre le service médical de l'assurance maladie à mener l'évaluation thérapeutique de l'arrêt sans même pouvoir décider de son opportunité.
Premièrement, l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale prévoit déjà des contrôles systématiques « lorsque l'activité de prescription d'arrêt de travail apparaît anormalement élevée ».
Deuxièmement, s'il est établi que les obligations administratives définies à l'article L. 323-6 du même code n'ont pas été respectées, cela signifie que le contrôle du respect des heures de sortie a déjà eu lieu. Par voie de conséquence, les indemnités journalières ont déjà été suspendues et l'intervention du service médical n'a plus lieu d'être – l'employeur pouvant toujours, de son côté, déclencher un contrôle patronal.
Le troisième critère, celui du signalement effectué par l'entreprise, revient à mettre le service médical de l'assurance maladie à la disposition de l'employeur. Ce n'est ni opportun ni souhaitable. L'employeur a déjà la possibilité de saisir ce service sur la base d'un contrôle patronal.
Bref, bien que l'amendement émane de la MECSS, je crois qu'il faut le retravailler.
La Commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS261 de Mme Bérengère Poletti.
Il s'agit de remédier à un problème technique simple. Le service du contrôle médical de la caisse d'assurance maladie applique strictement le délai de quarante-huit heures laissé au médecin ayant effectué un contrôle à la demande de l'employeur pour transmettre son rapport. En particulier, il ne tient pas compte des week-ends. L'envoi des résultats devant se faire, pour des raisons de confidentialité, par courrier, il retient, non pas le cachet de la poste, mais la date d'arrivée dudit courrier, ce qui rend particulièrement difficile la transmission des résultats d'un contrôle effectué un vendredi.
En conséquence nous proposons d'exclure le samedi et le dimanche du décompte du délai de quarante-huit heures.
En d'autres termes, si un médecin envoie les résultats d'un contrôle effectué le vendredi, son courrier ne sera pas traité. La mesure proposée est d'ordre purement administratif. Elle a été validée par la CNAMTS.
Si le problème est seulement un problème de délai, et non de fond, je m'en remets à la sagesse de la Commission.
Notre position reste la même : nous souhaitons un approfondissement d'ici à la séance publique.
La MECSS donne aux députés des pouvoirs propres. Votre volonté de toujours discuter avec l'exécutif, monsieur Germain, trahit une conception un peu particulière de nos institutions !
Chacun sait que nous légiférons beaucoup trop et que nous ne contrôlons pas assez ; chacun sait aussi que nous sommes beaucoup trop soumis à la férule de l'exécutif, et le pays en souffre ; or, au moment même où nous exerçons un peu de notre pouvoir, vous voulez demander l'autorisation de l'exécutif pour adopter telle ou telle mesure !
Je ne crois vraiment pas que l'on puisse faire une lecture « antisociale » ou « antimédicale » de notre amendement. Autant je peux comprendre le souhait de la majorité de préciser la grille de lecture qui faisait l'objet du précédent amendement, autant nous ne traitons ici que d'une question de délai. La MECSS est une instance paritaire, elle a la capacité de prendre ses distances avec des visions trop marquées sur le plan idéologique en se référant sereinement au critère du rapport coût-efficacité.
Il est exact que l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale fait état d'un délai maximal de quarante-huit heures sans autre précision. Mais la remarque que vous faites au sujet des week-ends vaut aussi pour les jours fériés. Il convient de revoir la rédaction de l'amendement, d'autant que la formule « en tenant compte de » pourrait laisser entendre que l'on inclut les samedis et les dimanches dans le délai.
Je propose donc la rectification suivante : remplacer les mots : « en tenant compte du samedi et du dimanche » par les mots : « en excluant le samedi, le dimanche et les jours fériés ».
Je veux répondre à M. Accoyer. Dans notre système institutionnel, le législateur légifère et le Gouvernement gouverne, notamment en prenant des décrets. L'amendement précédent renvoyait précisément à un décret. Il aurait été dès lors difficile de l'adopter sans une discussion approfondie avec l'exécutif. Je rappelle que, lorsque la MECSS consacre une étude à un sujet, la dernière étape consiste en un échange avec le Gouvernement sur les propositions – certaines de niveau réglementaire, certaines de niveau législatif – qui en résultent. En l'occurrence, cette discussion n'a pas eu lieu pour des raisons de calendrier indépendantes de la volonté des coprésidents.
Cela dit, je voterai le présent amendement. J'aurais seulement souhaité une discussion globale sur l'ensemble des propositions, qui ont leur cohérence.
Les sujets sur lesquels la MECSS a travaillé sont importants et sensibles. Alors que nous découvrons ces amendements portant articles additionnels, il me semble que leurs auteurs gagneraient à nous donner le temps d'y travailler collectivement d'ici à la séance publique. La MECSS est un outil précieux de contrôle et de proposition. Mieux vaut prendre le temps d'arriver à un point de vue et à un vote communs dans l'hémicycle, plutôt que de contraindre la majorité à repousser certains amendements faute d'une concertation suffisante.
Pour ma part, je ne voterai pas cet amendement. Quand bien même les propositions seraient d'excellente qualité, la bénédiction de la MECSS ne me semble pas suffisante pour emporter systématiquement la conviction. Nous avons besoin de temps.
Je veux vous rassurer : aucun loup ne se cache derrière ces amendements qui sont le fruit d'un long travail d'écoute. Bien sûr, certains peuvent paraître un peu difficiles aux députés présents aujourd'hui et je comprendrais très bien qu'ils ne les votent pas : ma réaction aurait été la même si je m'étais trouvée à leur place. En revanche, la liasse comprend aussi des amendements très simples à comprendre. Vous ne prenez aucun risque en les votant, mes chers collègues de la majorité : au contraire, vous affirmez votre rôle de députés et vous confortez la place du travail réalisé en Commission.
Le pouvoir d'amendement est la raison d'être de notre Commission. Si nous conditionnons tous nos votes à un dialogue avec le Gouvernement, nous vidons notre travail de sa substance. Évitons de nous soumettre à une telle sujétion ! Un dialogue entre la majorité et le Gouvernement est naturel, mais il ne faut pas non plus que l'exécutif dicte à la majorité l'ensemble de ses amendements. Nous connaîtrons de toute façon la position officielle du Gouvernement sur tel ou tel sujet lors du dialogue qui se nouera en séance publique.
Je vais maintenant mettre aux voix l'amendement AS261 tel qu'il a été rectifié par le rapporteur.
La Commission adopte l'amendement rectifié.
Puis elle examine l'amendement AS260 de Mme Bérengère Poletti.
Je propose de remplacer, à la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 315-2-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « peut convoquer » par le mot : « convoque ». Cette mesure garantirait un meilleur contrôle des arrêts de travail dont la fréquence semble dépasser certaines limites raisonnables.
Je suis résolument défavorable à cet amendement, qui imposerait une convocation de l'assuré au cas où le nombre d'arrêts de travail, mais aussi les dépenses de soins atteindraient des niveaux trop élevés : où fixer les limites ? Une telle rédaction est inacceptable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS256 de Mme Bérengère Poletti.
Cet amendement peut contribuer au « choc de simplification » voulu par le Gouvernement et par le Président de la République. Aujourd'hui, les agents des caisses primaires doivent recalculer le montant des indemnités journalières à chaque renouvellement de l'arrêt de travail. Je propose que ce montant soit, dans le cas d'arrêts répétés, calculé sur la base de l'indemnisation versée lors du premier arrêt. L'amendement bénéficierait aussi aux malades, car le mode de calcul actuel retarde souvent le versement de ces indemnités.
Avis défavorable. La mesure serait soit coûteuse, soit injuste, selon que le salaire perçu lors d'un nouvel arrêt sera plus ou moins élevé que le salaire perçu lors du premier.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS263 de Mme Bérengère Poletti.
Je propose de ramener à deux mois, contre trois actuellement, la durée à partir de laquelle peuvent intervenir les contrôles médicaux pour les arrêts longs. Cet amendement favoriserait la réinsertion professionnelle des assurés.
Cet amendement redéfinit les arrêts longs, sur lequel se concentrent les contrôles car, nous l'ont indiqué les représentants des instances nationales, le contrôle des arrêts courts est par trop « chronophage ».
Il s'agit moins, en l'espèce, d'un contrôle que d'une visite de pré-reprise d'activité. Dans ces conditions, je m'en remets à la sagesse de la Commission.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS270 de Mme Bérengère Poletti.
L'amendement tend à encourager les échanges entre le médecin conseil et le médecin du travail et, pour ce faire, à remplacer les mots : « peut solliciter » par le mot : « sollicite » à la première phrase de l'article L. 323-4-1 du code de la sécurité sociale.
Je suis très défavorable à cet amendement, qui systématiserait les contrôles pour les arrêts longs – en d'autres termes les contrôles destinés à étudier une éventuelle reprise du travail –, y compris, par exemple, pour les patients en soins palliatifs.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine enfin les amendements identiques AS13 de M. Jean-Pierre Barbier et AS243 de Mme Bérengère Poletti.
Cet amendement vise à assurer une meilleure coordination entre les différentes sociétés de contre-visites médicales, la CNAMTS, la MSA et le régime social des indépendants (RSI), conformément aux préconisations de la MECSS rendues publiques en 2013.
Ces organismes peuvent tout à fait signer des conventions pour améliorer leur coordination : ne surchargeons pas la loi. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte la quatrième partie du projet de loi modifiée.
Elle adopte enfin l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 modifié.
La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.