La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Mes chers collègues, nous avons appris avec une vive émotion qu’une fusillade avait eu lieu aujourd’hui au Parlement canadien. Qu’il me soit permis d’exprimer ce soir à nos collègues la solidarité de la représentation nationale.
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des articles de la troisième partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 335 portant article additionnel après l’article 8.
Madame la présidente, le Gouvernement souhaite, en application de l’article 95 du règlement de l’Assemblée nationale, réserver la discussion de l’article 10 jusqu’à demain, juste avant l’article 28, pour la raison très simple que la ministre de la santé, Marisol Touraine, qui ne peut être là ce soir pour les raisons que j’ai expliquées tout à l’heure, tient à répondre elle-même et à donner des arguments très précis sur l’ensemble des amendements qui sont présentés.
Nous avons été prévenus il y a quelques minutes et un tel report est logique, madame la secrétaire d’État. Nous souhaiterions savoir à quel moment nous pouvons envisager d’aborder la discussion de cet article, qui est important,
Juste avant l’article 28, à la fin de la troisième partie.
Nous en venons donc aux amendements portant article additionnel après l’article 8.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 335 .
Cet amendement, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, vise à vous aider encore. Lors de la dernière séance, nous avons accompagné le Gouvernement, malgré nous, je dois dire, et nous vous avons aidés à repousser un amendement d’une partie du groupe socialiste. Maintenant, nous allons vous aider à accompagner les entreprises vers la compétitivité.
Cet amendement va dans le sens de vos propos, monsieur le secrétaire d’État. Lorsque vous étiez rapporteur général du budget, vous n’étiez pas opposé, pour aider les entreprises, à un relèvement supplémentaire du taux normal de TVA. Vous souligniez à l’époque les effets d’aubaine garantis, les effets pervers du crédit d’impôt compétitivité emploi, et vous proposiez d’augmenter le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée pour financer la baisse du coût du travail.
Je vous ai suivi. Je vous propose de supprimer le CICE et de baisser fortement les charges des entreprises, cette baisse étant financée par une augmentation du taux de la TVA. Depuis que la majorité socialiste est au pouvoir, les entreprises ont payé 14 milliards d’impôts supplémentaires en 2012 puis bénéficié d’un allégement de charges de 13,2 milliards. Je vous propose de changer de paradigme en supprimant le CICE et en baissant fortement les charges de façon à améliorer la compétitivité des entreprises.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement.
Je suis surpris par les contradictions du discours de l’opposition et de M. Vercamer en particulier. Vous nous serinez sans arrêt que les entreprises doivent avoir de la lisibilité, de la stabilité,…
…et voilà une mesure qui a commencé à monter en charge cette année et que vous proposez déjà de supprimer.
Vous prétendez que cela ne sert à rien, mais une étude qui vient de sortir montre que le CICE a permis, par exemple, d’améliorer la trésorerie de petites entreprises en difficulté ou, dans certains cas, d’augmenter les salaires. Nous avons donc d’ores et déjà un certain nombre d’éléments prouvant que la montée en charge du CICE a quelques effets positifs.
Par ailleurs, une mission d’information travaille à l’Assemblée nationale et fera peut-être des propositions pour un éventuel reprofilage des mesures du pacte de responsabilité. Je suis d’ailleurs surpris d’entendre parfois annoncer déjà leur échec alors qu’elles ne seront mises en oeuvre que le 1er janvier 2015.
Je vous propose donc, mes chers collègues, de rejeter cet amendement, comme l’a fait la commission.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement.
Il ne s’agit de faire ni l’apologie ni le procès du crédit d’impôt compétitivité emploi, même si j’y suis prêt, mais je voudrais souligner un inconvénient majeur de votre amendement, monsieur Vercamer.
Le crédit d’impôt, comme son nom l’indique, est un crédit d’impôt. Les droits sont ouverts au titre de l’exercice en cours, et ils sont donc effectifs l’année qui suit, celle où l’on paie l’impôt. S’il y avait un allégement de charges comme vous le proposez – il y en a déjà un sérieux qui a été voté l’été dernier –, nous aurions en 2015 une année double.
J’avoue ne pas avoir fait de simulation mais, sur la TVA, cela devrait donner quelque chose d’assez détonnant. J’ai bien observé que, du côté droit de l’hémicycle, certains proposaient d’augmenter les deux taux les plus élevés de 3,5 %. J’ai calculé que cela représentait 25 milliards. Cela peut être un choix, il sera débattu le moment venu.
Pour ces raisons et pour d’autres, je ne peux que donner un avis défavorable à cet amendement.
Je voudrais dire tout le bien que je pense de cet amendement.
Certes, le CICE est une diminution de charges, monsieur le secrétaire d’État, nous sommes bien d’accord. Mais ce serait beaucoup plus lisible si l’on diminuait directement des cotisations sociales, et il est proposé en l’occurrence de diminuer les cotisations patronales familiales. Cela aurait un effet direct sur les charges sociales, sur le coût du travail.
Dans la mesure où le CICE se traduit par une réduction d’impôt, imputée sur l’impôt sur les sociétés ou l’impôt sur le revenu, cela ne se traduit pas directement dans les comptes des entreprises. Ainsi, il n’apparaît pas dans les comptes des entreprises individuelles puisqu’il s’agit d’un crédit d’impôt sur l’impôt sur le revenu. Il apparaît en revanche, c’est vrai, dans les comptes des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés.
Nous avons une vraie difficulté en termes de lisibilité. Il serait plus clair, comme cet amendement le propose, de diminuer les charges sociales qui apparaîtraient dans le montant de la masse salariale présenté dans les comptes des entreprises. Je crois que ce serait vraiment très intéressant pour les entreprises.
Toutes les entreprises n’ont pas demandé le remboursement du CICE, ce qui prouve qu’il y a une difficulté dans la compréhension du mécanisme. Si l’on diminuait les cotisations patronales, il n’y aurait pas de problème. C’est pourquoi cet amendement me paraît tout à fait pertinent.
D’abord, monsieur Bapt, la mission a déjà rendu son rapport et elle a justement proposé de supprimer le dispositif et de lui substituer une suppression de la part patronale des allocations familiales.
Le rapport Gallois le demande également, lui qui est bien antérieur.
J’entends bien vos arguments, monsieur le secrétaire d’État, mais, comme l’a souligné Mme Louwagie, le CICE ne concerne ni les travailleurs indépendants, ni les entreprises au forfait et encore moins les entreprises de l’économie sociale et solidaire.
Je veux bien que l’on dise que c’est la panacée pour la compétitivité, mais l’on a oublié une partie de l’économie française. L’économie sociale et solidaire, sur laquelle j’ai fait un rapport, représente 10 % des salariés en France, ce qui n’est tout de même pas rien. Il y a bien sûr des entreprises qui sont imposées à l’impôt sur les sociétés, notamment les grandes banques, mais un certain nombre de coopératives notamment ne sont pas concernées.
Par ailleurs, seuls 8,7 milliards ont été comptabilisés. On a toujours dit que le CICE représentait une baisse des charges de 20 milliards. Au mois de juillet, vous avez parlé de 16 milliards, et on est à 8,7, loin des 20 milliards annoncés. Il ne faut pas s’étonner que les entreprises ne soient toujours pas compétitives.
En plus, il y a un décalage d’un an, vous l’avez fait remarquer vous-même.
Bref, les entreprises ne sont toujours pas compétitives en raison de ce décalage et parce que le CICE n’atteint pas la totalité des entreprises.
Le débat que pose cet amendement est intéressant et nous l’avons également eu à l’occasion du projet de loi de finances. Vous avez raison sur un point : l’un des rapports rendus sur l’évaluation du CICE, le rapport parlementaire, conclut à la possibilité à terme de faire basculer ce crédit d’impôt vers une baisse des cotisations pour les entreprises. Mais, pour l’instant, je souhaite la stabilité sur les dispositifs fiscaux instaurés par la majorité – le CICE, mais également la C3S, dont nous aurons l’occasion de discuter.
Le CICE n’est, pour l’instant, pas une baisse généralisée des cotisations, mais un crédit de contrepartie créé par la loi pour favoriser l’emploi et l’investissement. Il faut aller plus loin : les entreprises doivent être annoncer l’utilisation qu’elles ont faite du CICE, au moins à leurs salariés et devant leurs instances représentatives. Il faut pouvoir dire à quoi a servi l’effort de la nation, alors que nos comptes publics traversent un moment difficile.
C’est pourquoi je plaide pour la stabilité : Il faut conserver pour l’instant le dispositif initial, indépendamment des effets possibles, que rappelait M. Eckert, sur l’année 2015. Tant que les entreprises n’auront pas montré la contrepartie réelle du CICE, à savoir favoriser l’emploi, l’investissement et la restauration des marges, il n’est pas question d’aller vers une baisse généralisée des cotisations en transformant le dispositif.
Je m’associe aux arguments donnés par le président Le Roux. Monsieur Vercamer, avant de parler, il faut regarder la réalité. Vous nous dites que le CICE, c’est aujourd’hui seulement, si j’ose dire, 8,7 milliards d’euros, alors que nous en avions promis 20. Monsieur Vercamer, en première année, le CICE était autour de 12 milliards d’euros et non pas de 20.
Absolument pas ! Lisez plutôt les documents, monsieur Vercamer ! 12 milliards la première année et 20 milliards en année pleine, voilà ce qui est posé clairement. Y a-t-il ou non les 12 milliards ? Vous l’avez rappelé, le CICE peut être « enregistré » dans les comptes des entreprises, contrairement à ce que vous disiez tout à l’heure, madame Louwagie, et qui a suscité mon mouvement de stupéfaction, car il me paraît tout à fait surréaliste de tenir de tels propos. L’impôt est rattaché à l’exercice en cours et les crédits d’impôt sont rattachés aussi aux exercices qui ont eu lieu.
Et pour celles ou ceux qui sont assujettis à l’impôt sur le revenu, même motif et la même punition.
Aujourd’hui, si le montant de 12 milliards n’est pas encore atteint, c’est que l’année n’est pas terminée.
Quand une entreprise paie l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt lui est déduit. Quand elle n’en paie pas, pour l’instant, le crédit d’impôt lui est versé directement. L’opération est terminée pour celles qui ont fait la demande dans les temps. Il existe également des situations intermédiaires : par exemple, des entreprises ont payé l’IS, et par rapport à cette base 100, elles ont droit à un crédit d’impôt de 150, et vont donc toucher un montant correspondant à 50 : c’est le cas des petites et moyennes entreprises. Pour les grosses entreprises, il s’agit d’une créance récupérée de façon étalée dans les années suivantes. Il y a toute une mécanique de calcul à appliquer sur ce qui relève de la créance et ce qui est déboursé. Vous faites allusion au chiffre de 8,7 milliards, mais il n’est plus d’actualité depuis quelques semaines. Aujourd’hui, de fait, nos estimations de la créance totale, soit de l’addition des sommes effectivement remboursées et des sommes déduites, avoisinent les 10,5 milliards d’euros. Nous ne sommes donc pas très loin des 12 milliards estimés pour la première année.
Ne me dites donc pas sur un ton péremptoire que nous sommes à 8,7 milliards alors qu’on en avait prévu 20 ! C’est totalement faux. Nous sommes aujourd’hui, en termes de créance, à plus de 10 milliards d’euros, alors que nous en avons prévu 12 et que l’année n’est pas terminée. J’ajoute que les entreprises qui n’auraient pas réclamé le CICE ont, comme pour l’impôt, trois exercices pour pouvoir le faire. Certaines ont fait le choix, pour des raisons qui leur appartiennent, de ne le réclamer que l’année prochaine ou l’année suivante. Il faut que les choses soient très claires pour éviter, au moins, les faux débats. Celui que vous avez lancé est, sinon, tout à fait légitime.
L’amendement no 335 n’est pas adopté.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 336 .
Vous allez être satisfait, monsieur Le Roux, puisque cet amendement ne supprime pas le CICE, mais la part patronale des allocations familiales.
Vous n’aimez pas les familles, monsieur Vercamer ! Vous en faites les boucs émissaires !
Vous me dites que le CICE est utile : cela tombe bien, je ne le supprime pas dans cet amendement !
Sourires.
Il s’agit d’un mécanisme d’exonération d’une partie des cotisations salariales, comparable à ce qui est prévu pour les fonctionnaires et les militaires. L’allégement sera au maximum de 2 % pour les fonctionnaires, dont le traitement est égal au salaire minimum interprofessionnel, et il sera progressivement dégressif à l’indice majoré 468. Le montant global de l’exonération des cotisations applicables aux fonctionnaires représentera un montant équivalent à l’application de la même exonération aux salariés du secteur privé.
La mesure doit ainsi bénéficier à 5,2 millions de travailleurs salariés et à 2,2 millions de fonctionnaires et de militaires, dont le salaire est compris entre 1 et 1,3 SMIC. Cela représente un allégement de 5,4 milliards d’euros du coût du travail. Cet amendement permet, à nouveau, d’améliorer la compétitivité des entreprises sans toucher au CICE. Voyez comme je vous écoute !
Dans c
et amendement, vous oubliez que les cotisations familiales sont d’ores et déjà nulles jusqu’au niveau du SMIC, réduites jusqu’à 1,6 SMIC et que le pacte de responsabilité comporte aussi une réduction importante des cotisations familiales pour les travailleurs indépendants. Par ailleurs, vous gagez votre mesure par une augmentation du taux de la TVA, qui est payée par toutes les familles, tous les retraités, tous les chômeurs et toutes les personnes modestes. C’est pourquoi la commission a donné un avis défavorable.
Nous avons déjà eu ce débat et je n’ai rien à ajouter aux arguments du rapporteur. Avis défavorable.
Je voulais revenir sur la discussion que nous avons eue sur la manière dont le CICE apparaît dans les comptes des entreprises. Dans les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés, le CICE apparaît en moins du montant de l’impôt sur les sociétés et en moins des charges de l’entreprise. En revanche, quand un chef d’entreprise bénéficie du CICE sur son impôt sur le revenu, ce montant figure sur sa déclaration de revenus et, en aucun cas, il n’apparaît dans les comptes de l’entreprise individuelle. Nous avons donc un vrai problème de lisibilité et d’identification des véritables charges de l’entreprise. Il existe une différence de traitement entre les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés et celles soumises à l’impôt sur le revenu.
Je reviens sur la question de la TVA, monsieur le ministre. Nous sommes dans un pays ouvert sur le monde. Or, des charges sur les salaires élevées pèsent sur le coût du travail et sur les produits fabriqués en France. Lorsque l’on augmente la TVA, on impose l’ensemble des produits et particulièrement ceux qui viennent de l’extérieur : les produits étrangers participent en fait à notre protection sociale. Je propose donc d’augmenter la TVA et de baisser les charges patronales afin d’alléger le coût du travail et la part du salaire dans les produits français et de faire payer les produits étrangers. Je vous rappelle d’ailleurs, monsieur Eckert, que c’est ce que vous aviez dit vous-même quand vous étiez rapporteur général du budget, le 17 janvier 2013. Je ne fais que reprendre vos propos, qui étaient à l’époque de très bon sens.
Enfin, je vous rappelle que, dans l’exposé du PLF 2015, il est écrit que le CICE est en baisse.
L’amendement no 336 n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 958 rectifié .
Le Gouvernement reprend un amendement proposé par Dominique Orliac, au nom du groupe RRDP, lequel ne pouvait le soutenir directement car il tombait sous le coup de l’article 40. Il a été sensible à cette proposition qui simplifie les règles d’affiliation des travailleurs indépendants. Elle prévoit que les travailleurs indépendants pluriactifs ou pensionnés bénéficient des prestations en nature de l’un ou l’autre des régimes d’assurance maladie ; mais se pose un problème d’affiliation, entre RSI et régime général, pour ceux qui changent d’activité ou ceux dont l’activité principale relève du RSI ou du régime général. Cet amendement prévoit, en quelque sorte, une possibilité d’option pour le salarié : il peut choisir de rester dans le régime où il est entré au moment de son affiliation, quelle que soit ensuite la durée d’activité et donc d’affiliation à chacun des régimes, cela à condition, bien sûr, qu’il reste dans la même région – s’il devait en changer, la question ne se poserait plus, puisqu’il peut alors revenir à la situation antérieure.
La commission n’a pu examiner l’amendement, mais c’est l’une des mesures de simplification qu’elle avait réclamée avec Mme Orliac. À titre personnel, j’émets donc un avis favorable.
Je remercie vivement le Gouvernement d’avoir repris cet amendement. Notre proposition vise à modifier les règles d’affiliation des travailleurs indépendants qui posaient un problème d’équité.
Cet amendement n’ayant pas été examiné en commission, les professionnels ont-ils été consultés, de même que les régimes sociaux comme le RSI et la MSA ou ceux des professions libérales ? Par ailleurs, vous nous dites que ces assurés pourront choisir le régime qui leur servira ces prestations. Ce sera l’objet d’un décret. Pouvons-nous avoir des éléments d’information sur les possibilités qu’il leur donnera ?
Je tiens tout d’abord à vous rassurer, madame la députée : les prestations demeurent les mêmes, il n’y a aucun changement pour l’affilié.
Il s’agit de résoudre le cas courant où un travailleur qui est affilié par exemple au RSI change d’activité principale et doit déchirer sa carte vitale et demander à basculer vers un autre régime d’assurance maladie ; nous recevons fréquemment des personnes dans cette situation dans nos permanences. Cela peut d’ailleurs parfois donner lieu à des loupés, compte tenu de la plus ou moins grande performance des différents régimes.
Tout ceci est vraiment complexe et il est inutile d’entrer dans les détails, puisque les prestations demeurent inchangées. Il me semble d’ailleurs que c’est le régime des indépendants qui avait fait cette proposition pour faciliter les choses. Très franchement, il s’agit d’une mesure de bon sens.
L’amendement no 958 rectifié est adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 964 rectifié , 116 , 349 , 573 , 150 , 46 , 117 , 338 , 350 et 814 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 116 , 349 et 573 sont identiques.
Les amendements nos 150 , 46 , 117 , 338 , 350 et 814 sont identiques.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 964 rectifié .
Il s’agit d’un amendement important – ce qui ne signifie pas que les autres ne le sont pas – qui vise à répondre à une préoccupation relative aux services à la personne.
De nombreux parlementaires, à l’instar du Gouvernement, s’inquiètent de la diminution du nombre d’heures déclarées, dont les explications peuvent être multiples et variées ; chacun les connaît, le sujet a souvent été évoqué dans cet hémicycle.
Je serai clair : le Gouvernement a constaté qu’un amendement voté en commission propose de passer de 75 centimes d’euro à 1,50 euro par heure déclarée la déduction forfaitaire de cotisations employeur qui avait été introduite par le Parlement sur l’initiative de quelqu’un que je connais bien. L’objectif était de réduire l’impact de l’obligation de se déclarer au réel et de l’abandon de la déclaration au forfait, une modification qui favorisait les salariés mais qui pouvait pénaliser un certain nombre d’employeurs en renchérissant leurs coûts. Votre commission propose, pour le dire simplement, de passer à 1,50 euro pour tous les employeurs. Le coût de cette mesure est de l’ordre de 200 millions d’euros.
Le Gouvernement ne souhaite pas aller jusqu’à ce niveau de dépense supplémentaire. On me dira sans doute qu’elle sera couverte par une augmentation du nombre d’heures déclarées. Un tel raisonnement n’est cependant pas très sécurisant objectivement en matière de gestion des finances publiques, car on pourrait le tenir sur presque toutes les mesures d’abaissement de cotisations alors que nul ne peut être certain de ce qui se produira réellement.
Le Gouvernement vous propose donc un dispositif ciblé, concentré sur la garde d’enfants à domicile, une préoccupation qui s’intègre dans un contexte précis. Il s’agirait de passer à 1,50 euro de réduction de charges par heure pour la garde à domicile d’enfants de six à quatorze ans. En effet, les parents d’enfants dont l’âge est inférieur à six ans bénéficient déjà par l’intermédiaire d’autres dispositifs existants d’une quasi-exonération de charges sociales, et on peut penser que le besoin d’avoir un salarié à domicile pour garder les enfants de quatorze ans et plus n’est pas impérieux.
Le Gouvernement vous fait donc cette proposition en remplacement d’une mesure qui nous semble trop coûteuse compte tenu de l’équilibre budgétaire que nous sommes contraints de tenir. Elle remplace et améliore, me semble-t-il, une disposition qui avait été retenue en loi de financement rectificative de la Sécurité sociale l’été dernier, dont le caractère opérationnel n’était pas complètement avéré et que le Conseil constitutionnel avait annulée pour des raisons de forme en vertu de la fameuse règle dite de l’entonnoir.
Le coût de cette mesure, pour laquelle il est prévu un plafond de quarante heures par mois, ce qui est déjà substantiel, est de l’ordre de 75 millions d’euros. Il s’agit donc d’un dispositif plus ciblé, qu’il faut d’ailleurs rapprocher d’une réflexion plus générale que beaucoup ont déjà eu l’occasion d’évoquer ici ; je crois que des parlementaires y travaillent, mais ils pourront s’exprimer. L’idée est de proposer des réductions d’impôts et des exonérations de charges sociales mieux ciblées dans ce secteur, c’est-à-dire des dispositifs qui non seulement présentent des avantages en termes d’emplois mais apportent aussi des services utiles.
Mes chers collègues, je constate qu’un certain nombre d’entre vous souhaite prendre la parole, mais de nombreux amendements sont en discussion commune. Je vais donc commencer par les appeler, puis je donnerai bien volontiers la parole à ceux qui n’auront pas pu s’exprimer sur les amendements.
Dans la discussion commune, nous en venons à une première série d’amendements identiques.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 116 .
M. le secrétaire d’État a présenté à l’instant un amendement qui ouvre le débat sur les services à la personne. Le Gouvernement propose de multiplier par deux le montant de la déduction forfaitaire de cotisations par heure déclarée, qui passerait de 75 centimes d’euro à 1,50 euro, pour les seules activités de garde d’enfants à domicile.
J’aimerais vous rappeler, monsieur le secrétaire d’État, que le plan Borloo sur les services à la personne était excellent. Ce fut un grand succès, des millions de personnes ont utilisé les mesures qu’il prévoyait dans le domaine non seulement de la garde d’enfants à domicile mais aussi de la garde de personnes à domicile et des services d’entretien pour les personnes âgées ou les personnes en difficulté.
Ce plan a ensuite été mis à mal, puisque les déductions de cotisations ont été supprimées. En 2013, nous avions eu un grand débat dans l’hémicycle mais également en commission mixte paritaire pour trouver une solution ; nous avons obtenu, à défaut de mieux, le rétablissement d’une déduction de cotisations de 75 centimes d’euro par heure déclarée.
Nous demandons par cet amendement que la déduction passe à 2 euros par heure. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez comme moi que cela fera rentrer des cotisations dans les caisses de l’État, de l’assurance maladie, de l’ordre de 120 millions d’euros par an ; nous avons chiffré approximativement ce retour vers les caisses de l’État. C’est donc un bon amendement.
Il ne faut pas s’arrêter à 1,50 euro, il faut aller jusqu’à 2 euros et, surtout, ne pas cibler le dispositif à une seule catégorie mais l’étendre à tous les services à la personne, car beaucoup de personnes en ont besoin. À défaut, vous ouvrirez le champ au travail au noir, qui a déjà repris de façon considérable en France, ce qui est dommageable.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 349 .
Cet amendement pose un vrai problème de fond sur l’emploi à domicile. Les emplois à domicile sont des emplois de proximité, non délocalisables, souvent occupés par des personnes faiblement qualifiées.
Vous qui, depuis maintenant deux ans et demi, avez comme priorité l’emploi, vous devriez prendre en compte certaines données. On a perdu 30 000 équivalents temps plein dans ce secteur-là. Je ne dis pas que vous êtes les seuls responsables. J’admets que la suppression de l’abattement forfaitaire de 15 %, votée par la majorité précédente et mise en oeuvre au 1er janvier 2011 a particulièrement touché ce secteur. Mais les mesures que vous avez adoptées le 1er janvier 2013, notamment la déduction forfaitaire de 0,75 euro par heure de travail effectuée, ont elles aussi eu pour conséquence la diminution du travail à domicile officiel.
On est revenu à des pratiques d’un autre âge, avec des emplois dissimulés. Ce n’est acceptable ni pour les caisses de la Sécurité sociale, ni pour les personnes employées, qui se retrouvent ainsi en grande précarité. L’idée est aussi de leur assurer un parcours. Si on veut travailler sur l’emploi, il devient donc nécessaire de rétablir une déduction forfaitaire de cotisations de 2 euros.
Je suis très étonnée de l’amendement du Gouvernement que M. le secrétaire d’État a défendu voilà quelques instants. Si j’ai bien compris, le champ de la déduction ne concernera que la garde d’enfants de six ans à quatorze ans.
Que faites-vous de tous les emplois dans le domaine de la dépendance ? Vous ne pouvez pas défendre les positions que vous avez sur l’accompagnement et le maintien à domicile des personnes âgées avec un dispositif aussi restrictif !
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 573 .
Le secteur de l’emploi à domicile concerne aujourd’hui 3,6 millions de particuliers employeurs et 1,6 million de salariés. C’était un des secteurs les plus dynamiques en matière de recrutement voilà encore deux ans. Du fait des mesures successives qui ont été mises en oeuvre, tant par le gouvernement de la majorité précédente – le groupe centriste ne les avait alors pas votées, je vous le rappelle – que par le gouvernement actuel, le nombre d’heures déclarées a baissé de 29,5 millions en 2013 par rapport à 2012 et 16 500 équivalents temps plein ont été détruits. En 2013, pour la première fois, la masse salariale nette du secteur de particuliers employeurs recule en rythme annuel de 2,2 %.
Le Gouvernement avait proposé un allégement de 75 centimes d’euro par heure ; c’était une première avancée, mais elle n’a visiblement pas suffi car le travail au noir continue de progresser et malheureusement l’activité dans le secteur des services à la personne continue de diminuer.
Nous avons proposé de passer la déduction forfaitaire à 2 euros. Monsieur le secrétaire d’État, vous proposez quant à vous un montant de 1,50 euro – nous avons à ce propos déposé un amendement qui viendra dans la suite de la discussion mais j’aurai l’occasion d’y revenir tout à l’heure – mais seulement pour un certain public.
Mme Dalloz a raison de dire que les services à la personne ne concernent pas que les enfants, et encore moins les seuls enfants de six à quatorze ans. Il y a aussi tout le domaine de la dépendance et des personnes âgées, des personnes qui restent à domicile. Vous ne pouvez pas, d’un côté, promouvoir la chirurgie ambulatoire et, d’un autre côté, ne rien prévoir pour les personnes auxquelles vous demandez de revenir à leur domicile et pour lesquelles il faudra nécessairement des personnels d’accompagnement.
Dans la discussion commune, nous en venons à une seconde série d’amendements identiques.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 150 .
L’amendement de la commission que je défends est identique à l’amendement de repli que M. Vercamer vient de mentionner.
La commission, monsieur le secrétaire d’État, s’est interrogée sur les effets des deux mesures prises successivement par l’ancienne majorité et par la nouvelle sur l’évolution du nombre d’employeurs et de la masse salariale. La baisse observée n’a pas commencé l’an dernier…
Elle a commencé – et c’est assez surprenant quand on consulte les données publiées par Acoss Stat – en 2009, avant même l’adoption de la mesure Baroin de suppression de l’abattement forfaitaire de 15 %. Elle s’est en effet aggravée ensuite, en 2012 puis en 2013.
L’évolution est préoccupante, avec une diminution tendancielle de 2,4 % par an du nombre d’employeurs et, surtout, de 4,8 % du nombre d’heures déclarées et de 3,7 % de la masse salariale nette déclarée. En d’autres termes, si le nombre d’employeurs diminue, un certain nombre d’employeurs renoncent à recourir à des services à domicile ou renoncent à déclarer le service.
D’autres encore peuvent diminuer le nombre d’heures déclarées et employer des personnes en heures non déclarées.
Bien entendu, la relation mécanique entre le niveau des cotisations sociales et la diminution tendancielle des indicateurs du secteur est difficile à établir. Quand on considère que cette diminution a commencé dès 2008-2009, c’est-à-dire au moment de la crise, on peut penser que la causalité est multiple, comme on dit. Il est cependant clair que l’argument selon lequel la déclaration au forfait pénalisait les salariés – le paiement des cotisations sur la base du SMIC quelle que soit la rémunération versée leur ouvrait moins de droits – se retourne en quelque sorte contre eux à l’heure actuelle alors qu’il visait à les protéger davantage. C’est dans cet esprit que la commission a voté à l’unanimité l’amendement que je viens de soutenir.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement no 46 .
La commission des finances, à l’initiative de M. Castaner, a adopté un amendement identique à celui présenté par la commission des affaires sociales. Ce faisant, nous savions que nous aurions une discussion avec le Gouvernement : il s’agit donc en quelque sorte d’un amendement d’appel.
Nous sommes tous, dans l’hémicycle, unanimes quant à la nécessité d’agir en faveur du secteur du travail à domicile. Mais nous devrions aussi avoir conscience de l’enjeu qui s’y attache concernant les finances publiques, notamment sur les bancs de la droite. En effet, deux mesures ont porté atteinte à ce système.
Elles n’ont pas le même motif, ni le même impact. Comme vient de le rappeler le rapporteur de la commission des affaires sociales, la gauche a supprimé la déclaration au forfait parce qu’il était défavorable aux salariés. La droite a supprimé la baisse de 15 points des cotisations patronales, après qu’elle a constaté que les dépenses fiscales et sociales associées à l’emploi à domicile atteignaient 6 milliards d’euros ! Nous sommes donc tous d’accord pour dire que l’emploi à domicile doit être soutenu, mais aussi pour constater qu’il a un coût pour les finances publiques.
La nouvelle proposition du Gouvernement n’a pas été examinée en commission des finances, et pour cause, mais je veux saluer l’avancée qu’elle constitue. Je considère qu’elle n’est pas en retrait par rapport à la mesure adoptée en juillet et censurée pour une raison de procédure, notamment parce qu’il existe des dispositifs en faveur des personnes âgées, qui se trouvent de ce fait exonérées du paiement des cotisations sociales. J’aimerais que M. le secrétaire d’État revienne plus précisément sur ce point. Si tel est le cas, la mesure est bien ciblée – familiale, elle concerne la garde d’enfants de 6 à 13 ans révolus – et budgétairement soutenable. À titre personnel, j’émets un avis favorable à l’amendement no 964 rectifié .
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 117 .
Beaucoup de mes collègues souhaitent intervenir car il s’agit d’un sujet important.
Plusieurs amendements sont en discussion commune. Une fois que chaque orateur aura présenté son amendement et que nous aurons recueilli l’avis de la commission et du Gouvernement, je donnerai la parole à ceux qui le souhaitent.
C’est entendu. Au sein de la commission des affaires sociales, nous nous sommes entendus avec le rapporteur, M. Bapt, pour présenter un amendement commun. Nous avons, pour cela, accepté de porter la déduction forfaitaire à 1,50 euro au lieu de 2 euros. Nous soutenons donc l’amendement de la commission des affaires sociales, ainsi que celui de la commission des finances. En revanche, nous ne pouvons pas soutenir l’amendement du Gouvernement qui est totalement en retrait, puisqu’il cible seulement les activités de garde d’enfants âgés de 6 à 13 ans révolus, excluant le reste des personnes concernées par le dispositif.
Monsieur le rapporteur pour avis, ne revenez pas en arrière, et continuez de soutenir l’amendement adopté par la commission des finances ! Nous demandons au Gouvernement de prendre acte que les deux commissions souhaitent, par cet amendement commun, une déduction des cotisations de 1,50 euro par heure travaillée.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 338 .
Comme je l’ai dit, il s’agit d’un amendement de repli, qui fixe l’allégement à 1,50 euro au lieu de 2 euros. Cet amendement a été adopté à l’unanimité en commission. J’ai déposé un amendement identique, non que je ne vous fasse pas confiance, monsieur le rapporteur, mais pour être certain d’avoir la parole et rappeler tout l’intérêt d’une telle proposition. Je reconnais que vous l’avez soutenue brillamment, mieux que le rapporteur pour avis, qui a défendu l’amendement de la commission des finances de façon cavalière, en le sabordant !
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 350 .
J’ai parlé de l’importance de ce secteur pour les territoires, qu’ils soient ruraux ou urbains, mais aussi pour les populations concernées. Je me suis livrée à un calcul : si l’on prend les tranches que vous n’appréciez pas – les tranches supérieures à 40 % – le coût patronal, après réduction d’impôt, est de 8,37 euros avec la déduction forfaitaire de 0,75 euro, et de 7,99 euros avec la déduction forfaitaire de 1,50 euro. Vous voyez que la différence n’est pas si importante.
Ce geste, qui porterait la déduction à 1,50 euro, est le minimum que l’on puisse faire pour maintenir durablement l’emploi, sans laisser penser que le Gouvernement accepte le travail parallèle. Il permettrait aussi de renouer avec un montant acceptable de cotisations sociales, car si le coût fiscal doit être considéré, les rentrées sociales sont importantes également.
Enfin, il faut rejeter la notion de travail illégal ou parallèle. Les salariés à domicile doivent jouir d’un véritable parcours professionnel. En matière d’ouverture de droits, l’emploi déclaré change vraiment la donne.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement no 814 .
Une déduction forfaitaire de 1,50 euro est un minimum, qui permet de considérer qu’un point d’équilibre est atteint pour la personne qui embauche et qui rend inutile le recours à un type d’emploi que l’on ne souhaite pas voir se développer et qu’il ne faut absolument pas encourager.
Par ailleurs, si le retour à des finances publiques plus saines peut justifier une mesure de ciblage, il convient d’insister sur le fait que ces quelques heures permettent à un certain nombre de nos concitoyens de ne pas opter pour des solutions beaucoup plus lourdes et beaucoup plus coûteuses, tant pour eux que pour la société.
Il ne s’agit pas seulement d’un calcul sur un exercice budgétaire, certes difficile – personne ne peut le contester – mais d’un enjeu de société. Avec ces quelques heures, de ménage ou de jardinage, des personnes pourront se maintenir à domicile. Si le ciblage sur les activités de garde des enfants âgés de 6 à 13 ans révolus est intéressant, il ne peut écarter une autre question, celle des personnes âgées. Je souhaite que, sur ce sujet, M. le rapporteur pour avis obtienne des réponses précises aux questions qu’il a posées.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement du Gouvernement et les deux séries d’amendements identiques ?
La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur la série d’amendements proposant une déduction de 2 euros. L’amendement de la commission des affaires sociales, comme celui de la commission des finances existe, il est là.
La commission des affaires sociales n’a pas examiné l’amendement du Gouvernement ; je ne peux donc m’exprimer qu’à titre personnel. Il m’est difficile, dans ma position, d’aller contre cet amendement.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Vous parlez en tant que rapporteur de la commission des affaires sociales !
Je vois bien que ces amendements sont exclusifs l’un de l’autre. Je soutiens donc l’amendement de la commission, qui a été adopté à l’unanimité, et prône la sagesse pour l’amendement du Gouvernement.
La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente-cinq.
La séance est reprise.
Sur l’amendement no 150 et les amendements identiques, je suis saisie par le groupe de l’Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les deux séries d’amendements identiques ?
Tout le monde plaide la nécessité de soutenir le secteur. Non seulement le Gouvernement est sensible à cet avis, mais il le partage !
Souvenez-vous tout de même, madame la députée, qu’une réduction d’impôt s’applique à tout le monde, à hauteur de 50 % des sommes engagées, charges comprises, lorsqu’il y en a. Puisque vous me provoquez…
….je soulignerai ce que certains – pas tous – ont eu l’honnêteté de rappeler : deux mesures ont pu peser sur le secteur. La première a consisté à supprimer l’abattement de quinze points de cotisation, mis en place parce que le particulier employeur, à la différence de l’entreprise, ne bénéficiait pas des allégements dits « Fillon », ce qui était complètement incompréhensible. L’entreprise de services à la personne à laquelle un particulier fait appel bénéficie des allégements « Fillon » sur les bas salaires mais un particulier employeur direct n’en bénéficie pas. C’est pourquoi il avait été instauré, dans le cadre du plan Borloo contre lequel je n’ai rien à dire, un abattement de quinze points en faveur du particulier employeur, pour essayer de remettre les gens sur un pied d’égalité.
M. Baroin, sous le Gouvernement Fillon, a supprimé cet allégement de quinze points. On peut penser, sans vouloir polémiquer, que cette décision a pu peser sur le secteur.
Une deuxième mesure, prise par le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault, a mis fin à un système qui, lui aussi, présentait un certain intérêt. Afin de décourager le recours au travail au noir, il avait été décidé qu’un salarié payé plus que le SMIC pourrait être déclaré au forfait, pour permettre à son employeur de ne payer les cotisations que sur la base du SMIC. Même si un employeur payait un salarié une fois et demie le SMIC, il ne payait de charges que sur le SMIC. Ce dispositif a d’ailleurs permis d’augmenter le nombre de personnes déclarées. Vous allez bien entendu me demander pourquoi nous l’avons supprimé.
Le fait de payer des cotisations sur la base du SMIC donnait des droits aux salariés sur la base, également, du SMIC. Ils avaient beau être payés deux fois le SMIC, leurs indemnités journalières, en période de congé maladie, étaient calculées sur la base du SMIC, leurs droits à la retraite également. Ce système nous a semblé injuste et de surcroît, soyons francs, nous avions besoin de faire entrer de l’argent dans le budget de l’État.
La première mesure obéissait déjà aux mêmes raisons. Cela étant, pour atténuer les effets de la seconde, nous avons décidé cet abattement de charge de 75 centimes car le passage au réel, en améliorant les droits des salariés, augmentait aussi les cotisations à la charge des employeurs. De vous à moi, je peux vous dire que ce fut une rude bataille, compte tenu du contexte budgétaire de l’époque, entre les défenseurs de cette mesure et le Gouvernement qui était déjà impécunieux. Tout dépendait, du reste, du niveau auquel les salariés étaient payés. Pour ceux rémunérés au SMIC, l’avantage tournait à la faveur de l’employeur. Je vous rappelle ces éléments pour rétablir les vérités et répartir les responsabilités.
Vous soulevez la question du secteur des personnes âgées.
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.
Non, vous verrez tout à l’heure ce à quoi elle a peut-être abouti. Rappelons que toutes les personnes dépendantes et toutes les personnes de plus de 70 ans sont exonérées de cotisations sociales. Le secteur est déjà couvert même si, pour être tout à fait honnête, je reconnais que l’on peut se poser la question pour les personnes de 65 ans, imposables ou pas, dépendantes ou pas. C’est en tout cas mon avis.
Concernant la garde des enfants de moins de six ans, la PAJE prend en charge tout ou partie des cotisations sociales.
C’est pourquoi nous avons ciblé l’aide que nous vous proposons sur les enfants entre 6 et 13 ans révolus. Tel est l’objet du dispositif, avec les arguments financiers que je vous ai présentés : 180 millions dans la version à 1,50 euro pour tout le monde, 75 millions dans celle que vous propose le Gouvernement. J’ajoute, comme je l’ai déjà fait au Sénat cet été et souvent dans cet hémicycle, que le Gouvernement est preneur de toute réflexion ou proposition qui permettrait de mieux cibler les dispositifs.
Tous les rapports de la Cour des comptes – pensez-en ce que vous voulez mais ils ont le mérite d’exister et d’être le fruit d’un travail fourni – ont montré que le dispositif était très large, pour ne pas dire trop large. Des effets de contournement sont d’ailleurs régulièrement pointés par la Cour.
La Cour estime que la diminution du nombre d’heures – et donc de salariés – tient davantage à la crise économique qu’aux effets des mesures prises par M. Baroin puis par le gouvernement de M. Ayrault.
Le Gouvernement est donc preneur d’autres propositions.
« La nôtre ? » sur les bancs du groupe UMP.
La proposition de la commission a un inconvénient : elle fait complètement abstraction du ciblage.
Or, analysons précisément les critiques qu’émet la Cour dans ses rapports : elle mentionne les cours à domicile, qu’il s’agisse de soutien scolaire ou des cours à domicile à proprement parler – même si la nuance est ténue.
Ajoutez-y les cours de claquettes ou de coaching…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Je n’ai tout de même pas inventé cela !
Ce secteur donne lieu à des abus.
J’ai retenu cet exemple parmi d’autres : le rapport de la Cour en dresse une très longue liste. Cela dit, puisque vous tournez tout en ridicule, j’arrête là mon argumentation, vous propose d’adopter l’amendement du Gouvernement, et émets un avis défavorable aux autres amendements en discussion.
Soyons sérieux ! Nous sommes à l’Assemblée nationale !
Revenons donc à un peu de sagesse et distinguons sur ce sujet entre le fond et la forme.
Sur la forme, tout d’abord : M. le rapporteur a fait une première proposition à laquelle l’opposition a ajouté les siennes, suite à quoi nous nous sommes mis d’accord.
Voici que vous nous dites que tout cela n’a pas de sens et, faisant comme si de rien n’était, vous imposez à chacun de voter comme vous le souhaitez.
Ne dites pas des choses pareilles !
Sur la forme, c’est pourtant bien ainsi que se sont passées les choses !
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
C’était trop cher : voilà l’explication !
A-t-on seulement calculé combien cette proposition rapporterait ? Je sais bien, monsieur le rapporteur, que l’on ne produit guère de chiffres à la commission des affaires sociales, mais au moins sait-on les lire.
En 2013, le nombre d’heures déclarées est inférieur de 30 millions à celui de 2012 : voilà les chiffres !
Enfin, madame la présidente de la commission, toutes les auditions auxquelles vous avez procédé l’ont montré : il existe parmi les personnes âgées – avec ou sans seuil limitatif à 70 ans – une niche considérable. On présente souvent les personnes âgées comme une charge, mais on ne se doute guère de ce qu’elles peuvent rapporter !
Je reviendrai à mon tour sur quelques chiffres certes déjà évoqués, mais sous une autre forme. Depuis huit trimestres, 16 500 emplois en équivalent temps plein ont été détruits dans le secteur de l’emploi à domicile. Autrement dit, c’est le plus grand plan social de ces deux dernières années.
Il est donc très important d’agir. On l’a souvent dit ici : ces emplois ne sont pas délocalisables et, le plus souvent, ils n’exigent pas de formation trop importante. Je vous interroge donc, monsieur le secrétaire d’État, sur le coût de la mesure que vous proposez.
Au fond, vous proposez quatre dispositifs de déduction : le premier à 0,75 euro et le deuxième à 1,50 euro en deçà de quarante heures – en d’autres termes, certaines personnes pourront bénéficier d’un abattement de 1,50 euro pour les quarante premières heures et de 0,75 euro pour les heures suivantes. Ensuite, vous proposez un troisième dispositif à 3,70 euros pour l’outre-mer et, enfin, un quatrième dispositif pour les personnes qui ne bénéficieront d’aucun abattement au motif qu’elles perçoivent déjà des déductions à d’autres titres. Que de dispositifs !
A-t-on pu valoriser le coût de gestion d’un tel mécanisme qui, soit dit en passant, est voué à changer compte tenu de l’évolution des âges ? Je reste donc très dubitative face à cette proposition.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez rappelé les exonérations décidées par M. Fillon qui ont ensuite débouché sur les mesures du plan Borloo. Cela dit, vous ne nous avez pas parlé du CICE, qui ne bénéficie nullement aux particuliers employeurs ; il s’agit pourtant de montants colossaux !
Nous sommes donc passés des exonérations Fillon au CICE, d’où une injustice très grave qui tient aux charges sociales et aux taxes que les particuliers employeurs doivent payer alors que les entreprises ne le doivent plus !
Le problème ne concerne donc pas le coût de la mesure proposée, mais bien davantage le fait que lorsque les charges sociales sont trop élevées, les particuliers employeurs se détournent du dispositif pour se tourner vers l’emploi non déclaré. Or, lorsque 16 500 personnes ont migré vers l’emploi non déclaré ou n’ont plus d’emploi du tout, les rentrées fiscales et les recettes de charges sociales diminuent d’autant ! Vous nous proposez donc de porter un coup violent à l’emploi d’une part et aux finances publiques de l’autre !
Il est vrai que nous avions proposé de majorer la déduction forfaitaire à 2 euros ; les deux commissions se sont ensuite accordées sur une position de repli à 1,50 euro – et voici que vous proposez de restreindre encore cette mesure aux activités de garde des seuls enfants âgés de six à quatorze ans !
C’est tout bonnement impossible. Il faudrait au contraire étendre la déduction de 2 euros à tout le monde : ce serait une mesure de justice, notamment pour les entreprises qui perçoivent le CICE !
Permettez-moi de commenter l’exposé sommaire de l’amendement du Gouvernement, qui vaut son pesant de demi-vérités. « Les salaires et cotisations sociales afférentes à l’emploi des salariés au domicile des particuliers ont diminué au cours de la période récente, ce qui s’explique, à titre principal, par l’évolution du revenu des ménages ». Non : cela s’explique d’abord par le matraquage fiscal de ces deux dernières années.
Je poursuis : « depuis le début de l’année 2010, le volume global de l’emploi à domicile a vu son évolution ralentie ». Depuis 2012, ce volume a baissé tandis que le travail dissimulé a explosé dans ce secteur !
On vient de le rappeler : 16 500 ETP ont été détruits en 2013. Et voici que vous proposez un abattement à 1,50 euro. Comment ne pas avoir l’impression de s’être fait avoir ? Nous nous étions en effet mis d’accord en commission avec M. le rapporteur, mais il n’a jamais été question des conditions nécessaires pour bénéficier de la déduction de 1,50 euro ! Vous en restreignez le champ…
Je n’ai pas dit le contraire.
…puisqu’elle ne s’appliquera plus qu’aux activités de garde d’enfants âgés de six à treize ans révolus. Vous vous êtes bien gardé de rappeler que vous excluez ainsi l’assistance aux personnes âgées – vous venez d’ailleurs de reconnaître que la tranche d’âge de 65 à 70 ans pouvait poser problème. Vous excluez également l’assistance aux personnes handicapées…
Elles sont déjà exonérées !
…et les travaux ménagers, mais je vous épargnerai le reste de la liste puisque vous l’avez présentée vous-même. Vous sortez également du champ de la déduction les allocations familiales qui ne sont pas majorées à partir de 14 ans – dois-je vous rappeler que cette limite a failli être portée à 16 ans dans le PLFSS ? Nous y avons heureusement échappé.
Enfin, « la déduction majorée s’appliquera dans la limite d’un plafond horaire et sous réserve que les salaires soient déclarés sur le site Pajemploi ». Ainsi, tout particulier employeur qui déclarera en CESU n’y aura même pas droit !
Je ferai deux constats. En premier lieu, la motion de renvoi en commission défendue hier se justifie pleinement au vu du débat que nous avons ce soir – sur cet amendement comme sur celui de nos ex-collègues de la commission des affaires sociales. À cet égard, je regrette vivement que nous ne puissions plus examiner les amendements en commission, car cela nuit au travail parlementaire.
D’autre part, M. le secrétaire d’État adopte une approche mathématique alors qu’il vaudrait mieux une approche de gestionnaire – puisque vous gérez précisément le budget de la France. Nous demandons que le dispositif proposé s’adresse à l’ensemble des emplois salariés chez les particuliers. Au contraire, vous le restreignez à un volume de quarante heures – c’est peu – pour un montant sans doute insuffisant de 1,50 euro. Surtout, vous limitez le dispositif à la garde d’enfants âgés de six à quatorze ans.
En somme, vous allez donner d’une main ce que vous reprendrez de l’autre demain ! En effet, les parents qui emploient des salariés à domicile sont ceux dont les revenus sont compris entre 6 000 et 8 000 euros par mois.
Or, vous allez leur supprimer des moyens. Non seulement il n’y aura plus d’emploi déclaré, mais il n’y aura plus d’emploi du tout.
Vous matraquez les gens qui ont des moyens au détriment de l’emploi à domicile ! En la matière, monsieur le secrétaire d’État, vous devriez faire l’effort d’accepter l’amendement adopté par les deux commissions.
M. Barbier m’ôte les mots de la bouche : les prestations familiales risquent d’être menacées et son argument est parfaitement légitime.
En outre, le fait d’imposer des conditions aussi restrictives vous empêche d’envoyer un message de confiance aux Français comme vous devriez le faire. Vous oubliez au passage plusieurs détails : Mme la ministre de la santé, par exemple, souhaite renforcer l’hospitalisation à domicile.
Or, en cas d’hospitalisation à domicile, l’aide ménagère se charge de l’ensemble des tâches annexes d’entretien – c’est le principe même de ce métier. Il en ira de même pour l’aide aux personnes âgées et aux personnes handicapées, ou encore les assistantes maternelles et le soutien scolaire.
N’exagérons pas au sujet des cours de claquettes, monsieur le secrétaire d’État : nous n’en sommes pas là.
Je rappelle simplement que l’emploi à domicile a reculé de 1,6 % depuis le premier trimestre de cette année. Un simple calcul, certes économique mais auquel je souhaite aussi donner une dimension humaine, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, révèle que l’adoption de l’amendement que vous propose l’opposition entraînerait la création de 50 000 nouveaux emplois en douze mois, et permettrait à 150 000 personnes de trouver un emploi en créant deux millions d’heures de travail pour les Français qui veulent travailler. En outre, cette mesure apporterait des recettes de cotisations supplémentaires. Vous avez donc tout à gagner à l’adopter, plutôt que d’imposer des conditions extrêmement restrictives au dispositif !
Faisons un peu d’histoire, faute de quoi nous n’y comprendrons plus rien. Nous avons là un scénario en quatre temps. Tout d’abord, l’emploi familial se casse la figure ; le Gouvernement de M. Valls s’engage donc à doubler la déduction forfaitaire de 0,75 euro à 1,50 euro pour les personnes les plus fragiles – petite enfance, personnes âgées dépendantes, personnes handicapées. Le dispositif est adopté dans le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, et tout le monde s’en satisfait.
Hélas, le bricolage étant de mauvaise qualité, le Conseil constitutionnel casse la mesure. Retour à la case départ : le dispositif proposé par le Premier ministre doit être adopté.
Il y a quelque temps, toutefois, la mesure disparaît et elle ne figure pas dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale présenté cette année en Conseil des ministres. Chacun s’en inquiète, y compris les députés de bonne foi, à gauche comme à droite, qui ne veulent pas en rester là et tiennent à respecter l’engagement du Premier ministre. Les uns et les autres se mettent donc d’accord en commission des finances et en commission des affaires sociales, comme la rappelé M. Bapt. L’UMP fait alors preuve d’un esprit de construction et de partage.
Mais voilà : M. Eckert, lui, n’est pas d’accord et recule sans même tenir compte de l’avis du Premier ministre. Il s’interroge sur l’utilité des 200 millions d’euros que représente la mesure.
La situation est donc très simple. C’est nous qui faisons la loi ; M. Bapt n’a qu’à maintenir son amendement et nous le voterons. Le Gouvernement sera donc battu – anticipant ainsi d’autres défaites à venir – et l’Assemblée aura bien travaillé !
Sourires.
Il est évident qu’au cours des dernières années, le nombre d’heures travaillées dans le domaine de l’emploi à domicile a considérablement diminué. Or, ne l’oublions pas, c’est un secteur créateur d’emplois, depuis les services mandataires encouragés par Philippe Séguin jusqu’au plan Borloo de développement des services à la personne autour de trois axes : les personnes âgées, les personnes handicapées et le soutien scolaire. Le secteur des emplois à domicile est d’autant plus important que ce sont des emplois non délocalisables.
Or les deux principales mesures prises pour le promouvoir ont provoqué un retour du travail au noir dans notre pays.
Comme Mme Laclais l’a fort bien expliqué, nous parlons beaucoup de coût mais dans notre pays, ce sont principalement des femmes qui occupent ces emplois. Or si elles ne veulent pas nécessairement travailler à temps plein, elles recherchent une certaine stabilité et préfèrent un CDI.
Nous parlons du coût d’une mesure qui pourrait développer le nombre d’emplois à domicile, mais nous ne parlons pas du coût des emplois d’avenir. Je ne suis pas opposé aux emplois d’avenir, mais quand je vois leur prolifération, je me demande s’ils ne sont pas simplement un traitement statistique du chômage. Est-il juste de consacrer plus d’argent aux emplois d’avenir qu’aux emplois à domicile ?
Quant au seuil de 40 heures par mois par employeur pour la garde d’enfants, il est nettement insuffisant et ne correspond pas à la demande.
Alors même que, pour une fois, les deux commissions, des affaires sociales et des finances, ont à l’unanimité approuvé cette disposition, je ne comprends pas très bien pourquoi le Gouvernement y serait opposé.
J’indique par ailleurs qu’en tant que rapporteur de la commission des affaires sociales, le rapporteur doit donner l’avis de cette commission. Je comprends son embarras devant la position du Gouvernement, mais je lui indique que s’il retire son amendement, le groupe UMP le reprendra.
L’aide à domicile est une question extrêmement importante, nous l’avons souligné lors de l’examen du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement. Elle est importante pour les personnes âgées, pour la prévention, pour le maintien à domicile, mais également pour les très jeunes enfants et les besoins de garde des familles.
Il se trouve que c’est dans le cadre d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous avons à examiner ces amendements. Avec Bérengère Poletti, en tant que membres du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, nous travaillons à la rédaction d’un rapport sur le développement de l’aide à domicile. Nous avons, dans le cadre de nos travaux, étudié le rapport de la Cour des comptes dont vous avez sans doute eu connaissance. Nous remettrons le mois prochain les conclusions de nos travaux qui nous ont amenées à dégager quelques pistes, sans aller jusqu’à faire des propositions.
Nous ne devons pas, sur cette question, être trop prudents car il nous faut avancer et faire des propositions. Nous avons une politique à mener en faveur des personnes âgées, des familles et des femmes, comme l’a mentionné Bernadette Laclais, notamment celles qui ont un emploi.
Qu’avons-nous retenu des auditions du comité ?
Tout d’abord, que le périmètre des services a une importance primordiale, or nous avons en France le périmètre des services couverts par l’aide à domicile le plus étendu.
Ce périmètre doit être étudié car un certain nombre de travaux à domicile bénéficient d’une aide, fiscale ou sociale.
Nous avons également entendu dire que le plafond de l’aide était élevé – de mémoire, il est fixé à 12 000 euros. Effectivement, il n’est peut-être pas adéquat.
De nombreux intervenants ont souhaité que les aides soient mieux ciblées. C’est en effet ce qu’exige une politique efficace en faveur des personnes âgées, notamment en termes de prévention.
Voilà quelques axes de réflexion. Je pense qu’il est un peu tôt pour que nous prenions uniformément des décisions concernant l’amendement qui nous a été présenté.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Chers collègues, nous avons engagé une discussion et je vous apporte des éléments susceptibles de nous aider à prendre certaines décisions. Lorsque le Gouvernement nous propose de cibler les gardes d’enfant, je considère que c’est, dans un premier temps, une option intéressante, mais cela ne nous dispensera pas de prendre, par la suite, d’autres décisions.
Je voudrais dire à nos collègues que nous ne sommes pas dans un débat entre la droite et la gauche car il porte sur l’emploi, dont la situation est grave, et sur des mesures qui créent de l’emploi.
Si les membres du groupe socialiste décidaient de l’adopter, l’amendement du Gouvernement ferait tomber tous les autres. Il faut que chacun en ait bien conscience.
Je tiens à rendre hommage à M. Eckert qui a un « job » difficile car il est d’accord avec nous mais il est là pour tenir la position du Gouvernement. Rendons-lui hommage car il se trouve dans une situation difficile, s’agissant d’une affaire qui coûte 100 millions d’euros.
Je voudrais également rendre hommage au rapporteur Gérard Bapt pour sa grande loyauté à l’égard du Gouvernement, et ce n’est pas tous les jours que nous rencontrons une telle attitude.
Enfin, je rends hommage à Mme Pinville qui nous propose un rapport, si ce n’est un groupe de travail. Merci encore à M. Eckert pour avoir salué le plan Borloo et précisé qu’il était opérationnel et avait créé de l’emploi.
L’adoption de l’amendement no 964 rectifié du Gouvernement ferait tomber une série d’amendements qui avaient été adoptés à l’unanimité par la commission des affaires sociales et par la commission des finances, ce qui se produit très rarement.
Nous parlons, monsieur Eckert, de 100 millions d’euros, sur un budget global de 466 milliards d’euros. Si l’Assemblée nationale n’est pas capable d’adopter un amendement qui contient une mesure susceptible de créer des emplois, mes chers collègues, je ne sais pas à quoi nous servons.
Je comprendrai tout à fait, chers collègues de la majorité, vous êtes très nombreux ce soir, et parmi vous se trouvent quelques frondeurs et d’autres qui ne le sont pas.
Nous sommes heureux de vous voir aussi nombreux. Mais nous devons prendre nos responsabilités, et je m’inclus dans cette exigence.
Ce vote ne sera pas compris comme un acte de fronde mais comme un acte intelligent, certes coûteux, je vous l’accorde – 100 millions d’euros, au lieu des 75 de M. Eckert.
Vous avez été notre collègue, monsieur Eckert, et vous étiez un membre brillant de la commission des finances. Vous savez très bien que le Gouvernement, dans ce genre d’exercice, est tout à fait capable de proposer des amendements qui n’ont ni queue ni tête et qui vident la mesure de tout sens.
Ce que je propose, si vous m’y autorisez, madame la présidente…
…c’est d’adopter une position raisonnable qui aboutira demain à la création d’emplois. Nous faisons chambre commune, j’espère que, sur le vote de cet amendement, nous ne ferons pas rêve à part.
Rires et exclamations sur divers bancs.
Monsieur le secrétaire d’État, il ne m’a pas échappé, en défendant mes deux amendements, que les personnes fragiles bénéficiaient d’un dispositif d’exonération. Mais que faites-vous d’une personne âgée de 65 à 70 ans qui a besoin d’un accompagnement, sous forme de quelques heures de ménage, par semaine ou par jour, ou pour la fabrication de ses repas ? Certes, cette personne ne relève pas de la dépendance totale, mais de toute façon elle ne bénéficie pas du dispositif puisque les personnes âgées de 60 à 70 ans, ainsi que les plus jeunes, en sont exclues.
D’autre part, pour les enfants jusqu’à six ans, vous évoquez la PAJE. Soit, mais à partir de trois ans, les parents choisissent souvent de ne plus bénéficier de ce dispositif, lui préférant d’autres systèmes alternatifs.
Bref, vous excluez du champ de votre dispositif un très grand nombre de bénéficiaires.
Monsieur le secrétaire d’État, pour ma part je ne vous rendrai pas hommage. Vous êtes conscient du fait que les deux commissions, des finances et des affaires sociales, ont travaillé ensemble afin de trouver un dispositif équilibré et ont proposé à l’unanimité 1,50 euro de déduction par heure. Pourtant vous avez demandé à vos services de trouver une solution pour montrer que vous êtes d’accord, mais du bout des lèvres, et de là est né l’exercice de duperie qui consiste à dire : je suis d’accord, mais j’exclus quasiment tout le monde du dispositif.
C’est de l’affichage, de la communication. Votre proposition vaut pour les enfants de six à quatorze ans, or à cet âge-là les parents n’ont plus besoin d’un dispositif de garde.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, vous qui êtes très sensible à la sortie de la précarité qu’offrent ces emplois, quarante heures par mois, si les personnes ont trois employeurs, ce qui semble être la moyenne, cela représente cent vingt heures, soit trente heures par semaine. Nous sommes loin des trente-cinq heures !
Martine Pinville a évoqué le rapport sur lequel nous travaillons ensemble et les auditions que nous avons menées, notamment celle de la Cour des comptes.
La Cour nous a transmis un certain nombre de tableaux. Elle nous invite à réduire le périmètre des aides, mais les aides qu’elle propose de supprimer ne représentent pas la majorité, loin s’en faut, de l’argent que nous dépensons. Elles sont une part infime de la totalité des aides. Exclure certaines aides relève plus d’une démarche intellectuelle et lorsque nous les aurons supprimées, nous n’aurons pas fait beaucoup d’économies.
La Cour des comptes nous a surtout appris une chose importante, à savoir que nous ne disposons d’aucune évaluation sur le travail clandestin. La Cour a reconnu qu’il était très difficile d’évaluer l’impact des aides à domicile dans la mesure où on ne peut évaluer l’étendue du travail clandestin.
Enfin, il nous a été dit au cours de nos auditions l’injustice que constituent le CICE et les mesures Fillon qui s’adressent aux entreprises mais pas aux particuliers employeurs, bien que les enjeux financiers soient plus importants.
J’ai bien entendu les propos de nos collègues qui siègent sur les bancs de l’opposition. Nous débattons d’un sujet qui ne peut pas supporter la caricature. Madame Le Callennec, quand vous dites que la cause de tout cela, ce sont deux ans de matraquage fiscal…
…vous devriez commencer par vous interroger sur la mesure qui a été prise par la précédente majorité s’agissant des quinze points d’abattement. Si nous voulons être objectifs, il faut regarder les choses en face.
Par ailleurs, je ne suis pas persuadée que le nombre d’heures travaillées a diminué et que des rémunérations ne sont pas versées…
Le problème, c’est que des rémunérations sont versées, mais elles ne sont pas déclarées.
C’est incroyable ! Cinq minutes de suspension de séance et elle change d’avis !
Et c’est ce qui rend ce sujet très complexe. Il s’agit à la fois de rendre un service, qui pour certains publics est indispensable, mais également de conserver la maîtrise en matière de déclaration d’un certain nombre d’emplois, d’abord pour éviter le travail au noir et surtout pour permettre à ces personnels de cotiser afin de bénéficier ultérieurement d’une retraite.
Je souhaite donc qu’au-delà de nos débats et de ce qu’a rappelé le secrétaire d’État, que je remercie, sur le dispositif tel qu’il se présente aujourd’hui, notamment pour les plus de 70 ans et ceux qui entrent dans la catégorie des personnes dépendantes.
Mais entre soixante et soixante-dix ans et pour les femmes, celles qui travaillent en particulier, le dispositif est lacunaire.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Quelles que soient les décisions qui seront prises ce soir et que nous pouvons parfaitement comprendre et soutenir, j’aimerais obtenir un tableau extrêmement précis des évolutions des deux tranches que j’ai évoquées, à propos desquelles nous ne disposons pas des données permettant de prendre position clairement sans engager démesurément les finances publiques.
Je suis signataire de l’amendement accepté en commission des affaires sociales et notre groupe a demandé qu’il fasse l’objet d’un scrutin public. Je rappelle deux choses. Tout d’abord, 42 % des foyers bénéficiant d’une aide à domicile sont non imposables et ne bénéficient par conséquent d’aucune déduction d’impôt. Ce qui dans l’amendement relève de l’imposition ne concerne donc que 60 % des foyers. En outre, comme l’a rappelé Arnaud Richard, la mesure proposée ne coûte que cent millions d’euros dans un budget de 465 milliards d’euros. Honnêtement, elle ne coûte pas extrêmement cher, d’autant moins que l’on ne mesure pas ce qu’elle est susceptible de rapporter ! Les exonérations ont certes un coût, mais combien rapportent-elles en termes de cotisations et surtout d’emplois ? Voilà qui n’est absolument pas mesuré ! Par ailleurs, pour des gens qui ont défendu la durée de vingt-quatre heures hebdomadaires obligatoires, limiter la mesure à quarante heures mensuelles est tout de même assez particulier, monsieur le secrétaire d’État !
En effet, les particuliers employeurs ne sont pas concernés par les vingt-quatre heures hebdomadaires mais tous les employeurs le sont pour le travail à temps partiel. Ils le seraient dans la limite de quarante heures par mois ? C’est tout de même assez curieux ! Enfin, vous ne vous rendez pas compte de la complication de la chose. Les particuliers employeurs devront déclarer pourquoi ils demandent une exonération, ce qui freinera encore les embauches. En fait de choc de simplification, nous vivons plutôt un choc de complication !
L’amendement no 117 du groupe UMP est exactement identique à celui de la commission et nous sommes donc disposés à le retirer. Par ailleurs, je suis surpris des circonvolutions verbales de Mme Laclais.
Elle était en effet applaudie il y a vingt minutes encore car nous allions dans le même sens en direction du même but : faire travailler des gens qui cherchent du travail. Il existe aujourd’hui en France, madame, deux mondes, ceux qui cherchent du travail et ceux qui en ont à offrir. Il faut les mettre ensemble pour réduire le chômage et le travail au noir !
Nous sommes parvenus à un consensus avec la commission des affaires sociales et celle des finances et voilà que vous venez nous l’enlever ! Autrement dit, depuis une heure, nous n’avons rien fait ! Si l’amendement du Gouvernement est voté, tout ce à quoi nous sommes parvenus s’écroulera et nous reviendrons au point zéro où coexistent le monde du chômage et celui de l’offre non satisfaite !
J’ai demandé un scrutin public sur l’amendement du Gouvernement. Si vous le votez, chers collègues, tous les autres tombent, je tiens à vous en avertir ! J’espère que vous voterez contre ! Je ne dis pas cela contre vous, monsieur Eckert, d’autant moins que je vous sais favorable à ce que nous disons. Vous étiez député il y a peu et savez très bien que les mêmes problèmes se posent dans votre circonscription. Nous ne vous visons pas, vous, mais l’ensemble du Gouvernement qui refuse d’aider les deux commissions parlementaires des affaires sociales et des finances.
Rires sur les bancs du groupe SRC.
Le débat a été riche et nourri, je me contenterai donc de répondre brièvement à quelques arguments. Vous affirmiez tout à l’heure, madame Louwagie, que les dispositifs s’empilent en cascade. Ce n’est pas vrai. Il ne vous a pas échappé qu’il existe par exemple des dispositifs spécifiques à l’outre-mer. Le seul changement par rapport à la situation antérieure, c’est l’ajout de 0,75 euro pour le public ciblé par l’amendement du Gouvernement. Quant à l’obligation de passer par Pajemploi, elle vise à éviter qu’on ne contourne le dispositif en déclarant comme garde d’enfants d’autres salariés à domicile. Ceux qui ont des enfants âgés de six à quatorze ans ont généralement pris l’habitude de Pajemploi quand leurs enfants étaient plus jeunes. La mesure proposée ne complique donc pas outre mesure le dispositif. Enfin, il est exact que le salarié à domicile ne bénéficie pas du CICE mais la réduction d’impôt à hauteur de 50 % charges comprises est quand même autrement plus favorable que le CICE. Tels sont les éléments que je souhaitais ajouter à votre réflexion, mesdames et messieurs les parlementaires.
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement no 250 .
Le Gouvernement s’est donné pour objectif de soutenir les entreprises françaises dans le cadre du pacte de responsabilité. Les associations et entreprises d’aide à domicile intervenant au domicile des personnes fragiles exclusivement sont hélas quasiment exclues de ce nouveau soutien, car une grande partie de leur personnel d’intervention bénéficie d’une exonération spécifique « aide à domicile » en lieu et place de l’abattement « Fillon ». L’amendement proposé vise à aligner l’assiette des cotisations patronales applicable à l’exonération « aide à domicile » sur celle de la réduction dégressive « Fillon ». Ainsi, les associations et entreprises d’aide à domicile intervenant auprès de publics fragiles bénéficieraient d’un avantage comparable à celui dont bénéficient les autres entreprises françaises. L’amendement fait bénéficier le secteur de l’aide à domicile, dont chacun sait qu’il est en grande difficulté, d’un différentiel positif constant et donc d’une aide appréciable.
Je rappelle à Mme Poletti, qui propose d’étendre le bénéfice des allégements généraux de cotisations sociales aux associations et entreprises intervenant au domicile des personnes fragiles, qu’elles bénéficient déjà d’une exonération totale des cotisations patronales sur les salaires des aides à domicile, ce qui est un régime très favorable. Par ailleurs, en l’absence de concurrence extérieure, les difficultés du secteur ne résultent pas d’un défaut de compétitivité, mais plutôt d’un problème de fixation du prix des interventions et parfois d’un problème de coût des structures de certaines associations. Voilà pourquoi la commission a repoussé l’amendement.
L’amendement no 250 n’est pas adopté.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 151 rectifié .
Il apporte une précision qui ne modifie pas le droit existant, mais clarifie le dispositif afin d’éviter d’éventuels contentieux. Il s’agit de préciser que l’exonération des cotisations patronales de Sécurité sociale s’applique bien à l’emploi à domicile des personnes fragiles, et de rappeler son champ d’application : celui-ci exclut les salariés dont l’activité est financée par une dotation globale de l’assurance maladie, car leurs salaires et les cotisations afférentes sont déjà pris en charge par la solidarité nationale au moyen de la dotation globale.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement très utile.
L’amendement no 151 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 358 .
Il vise à supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires. Pourquoi ? Parce qu’à l’heure où le Gouvernement cherche à réaliser des économies, supprimer un dispositif coûteux, inefficace et aux nombreux effets pervers constituerait selon nous une bonne disposition.
Le dispositif est coûteux car les exonérations absorbent chaque année près de 1 % du PIB. Au cours des dix dernières années, leur montant cumulé a atteint plus de 210 milliards d’euros, soit un montant équivalent à celui de la dette sociale.
Le dispositif est inefficace si l’on en croit une évaluation de l’OFCE, qui estime à 500 000 seulement le nombre d’emplois créés ou sauvegardés en cinq ans grâce à lui, sans compter les effets négatifs de son coût.
Inefficace et coûteux, ce dispositif d’exonérations manque en outre sa cible. En effet, celles-ci bénéficient principalement aux secteurs les moins exposés à la concurrence internationale comme l’hôtellerie-restauration, les services à la personne et la grande distribution. Enfin, il produit des effets pervers. Auditionné le 18 septembre dernier dans le cadre de la commission d’enquête sur les trente-cinq heures, M. Guillaume Duval, rédacteur en chef du magazine Alternatives économiques, a présenté les effets pervers des exonérations qui constituent une trappe à bas salaires et placent la France en concurrence avec des pays comme la Roumanie, la Pologne ou la Bulgarie où le coût de la main-d’oeuvre restera de toute façon moins élevé qu’en France. Notre pays devrait plutôt faire valoir le haut niveau de qualification de sa main-d’oeuvre. Pour ces raisons, il convient selon nous de supprimer ces exonérations qui tirent notre pays vers le bas.
Rires sur les bancs du groupe UMP.
Toutes les études, en particulier celles du conseil d’orientation de l’emploi, montrent que la suppression des allégements sur les bas salaires détruirait immédiatement plusieurs centaines de milliers d’emplois. À défaut de substitut aussi efficace pour les protéger, la commission a repoussé votre amendement.
Je reconnais bien là votre constance et la cohérence de vos propositions, madame Fraysse. Votre amendement propose un transfert massif et un retour à une situation antérieure que ne sauraient évidemment pas supporter les équilibres obtenus dans le secteur économique grâce aux allégements, fût-ce difficilement. On peut discuter des effets de ces derniers mais ils présentent selon le Gouvernement leur utilité. L’avis est défavorable.
L’amendement no 358 n’est pas adopté.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 339 .
En France, la part du financement des retraites du régime général issue des cotisations sur les salaires s’élève à 64 %. Le niveau des prélèvements obligatoires y est l’un des plus élevés au monde. La dégradation du marché de l’emploi est intrinsèquement liée à celle de nos comptes sociaux et des déficits de nos systèmes de retraite. Il convient donc de mettre en oeuvre des mesures fortes pour favoriser l’emploi.
Les salaires inférieurs à 1,6 SMIC ouvrent aujourd’hui droit à un allégement des cotisations patronales dues au titre des assurances sociales. Ces allégements représentent un manque à gagner de 23 milliards d’euros par an. Ils profitent aux grands groupes, notamment aux groupes de la distribution, sans effet avéré sur l’emploi, et peuvent parfois constituer une trappe à bas salaires. Cet amendement propose donc de concentrer les allégements pour soutenir les secteurs exposés à la concurrence, ainsi que l’emploi des jeunes et des seniors.
M. Vercamer nous propose de remanier à nouveau les allégements de charges salariales eu égard à la situation spécifique des moins de vingt-cinq ans et des plus de cinquante-cinq ans. Cela créerait un nouveau facteur d’instabilité dont les entreprises ne veulent pas. La commission a donc repoussé cet amendement.
Je veux bien entendre les explications du rapporteur. Rappelons toutefois que notre pays est celui qui a les plus faibles taux d’emploi des seniors et des jeunes. Cet amendement propose des mesures pour essayer de changer cet état de fait. Nous sommes en effet le seul pays au monde où les seniors et les jeunes sont ainsi écartés de l’entreprise. Nous proposons de concentrer les allégements sur les salaires où ils auront une efficacité. Vous me répondez que ce n’est pas la peine. Soit, mais ce n’est pas cela qui réglera le problème des jeunes et des seniors !
L’amendement no 339 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements, nos 695 rectifié et 694 rectifié , qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, pour les soutenir.
Ces amendements concernent le dispositif de pénalité financière que les URSSAF sont chargées de mettre en oeuvre pour les entreprises qui ne s’acquittent pas à temps de leur obligation de mettre en place une négociation annuelle obligatoire – dite NAO – sur les salaires.
Contrairement au dispositif de pénalité financière mis en place par le code du travail pour la sanction des obligations faites à l’article L. 2245 de mettre en place un accord sur l’égalité professionnelle hommes-femmes, aucune souplesse n’est laissée à l’autorité chargée de la sanction en ce qui concerne la NAO, sans doute parce que le dispositif est plus récent.
Les URSSAF, chargées de la réduction du montant des allègements de cotisations sociales en cas de non-respect de cette obligation, se trouvent ainsi souvent dans la situation de devoir appliquer cette sanction sans la moindre marge d’appréciation, ni même la moindre souplesse procédurale – j’entends par là une lettre recommandée mettant l’entreprise en demeure de se mettre en conformité. Elles se trouvent ainsi confrontées à des situations dans lesquelles la bonne foi de l’employeur, qui peut déposer avec retard le document requis, n’est pas en cause, voire à des cas dans lesquels la situation économique et sociale de l’entreprise est très difficile, et cela alors même que le champ des réductions applicables est très large, puisqu’il porte sur un ensemble d’allègements allant des allègements de charges patronales dits Fillon aux exonérations applicables en zone de revitalisation rurale – ZRR –, en zone franche urbaine – ZFU – ou en zone de restructuration de la défense – ZRD.
Nous proposons donc d’assouplir ce dispositif, avec deux options. L’amendement 695 rectifié propose un assouplissement plus large : le contrôleur de l’URSSAF pourrait bénéficier d’une certaine latitude, à l’image de celle laissée aux agents des DIRECCTE ou des DFIP, pour donner un délai à l’entreprise défaillante, selon une procédure fixée par décret en Conseil d’État qui s’inspirerait étroitement de ce que prévoit le code du travail en matière d’accords sur l’égalité professionnelle hommes-femmes. On pourrait aussi imaginer que l’autorité administrative dispose, comme dans les autres cas que j’ai cités, de la possibilité de moduler la sanction – qui est de 10 % pour la première année de défaillance et de 100 % au bout de trois ans. Si nous voulons qu’elle puisse le faire, il faut modifier la loi sur ce point.
À défaut, je vous proposerai d’adopter l’amendement 694 rectifié , qui donne simplement une souplesse procédurale à l’URSSAF, lui permettant d’envoyer une lettre recommandée à l’entreprise pour la mettre en demeure de se mettre en conformité avec ses obligations. Encore une fois, celles-ci peuvent échapper à la petite entreprise de bonne foi ou à l’entreprise en difficulté économique et financière.
Je comprends l’objet de ces amendements. On nous a en effet rapporté quelques cas d’entreprises dont les exonérations ont été réduites alors qu’elles paraissaient plutôt de bonne foi et qu’un geste favorable aurait pu être compris.
Néanmoins, il convient de remettre cela en perspective. Les redressements au titre du non-respect de la négociation annuelle obligatoire sont faibles : ils ont été inférieurs à 20 millions d’euros en 2013. Que prévoirait donc le décret que vous proposez ? Si l’on admet que la pénalité est annulée lorsque l’entreprise se met en conformité, le risque est que les entreprises attendent d’être mises en demeure pour lancer la négociation annuelle.
Or nous tenons à cette négociation. Qu’elle soit au moins ouverte : c’est un acquis ancien.
Compte tenu de ces arguments, la commission a repoussé les deux amendements.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements. Le droit actuel permet déjà de prendre en compte la bonne foi de l’employeur.
En effet, ce dernier peut déjà prouver par tout moyen qu’il a entamé des négociations loyales et sérieuses. Si la négociation n’est pas conclusive, il peut toujours adopter unilatéralement un plan d’action qui prouvera de facto qu’il y a eu un désaccord. L’URSSAF n’intervient qu’au titre du contrôle ex post et du recouvrement. Si l’employeur rencontre des difficultés dans ces négociations, il est préférable qu’il se rapproche en amont de la DIRECCTE. Il n’est pas souhaitable que ce point fasse l’objet d’un échange contradictoire avec les URSSAF lors des contrôles. Il n’appartient pas à celles-ci de vérifier que les motifs justifiant du non-respect de l’obligation de la NAO sont bien indépendants de la volonté de l’employeur, dès lors que les pièces sont disponibles. Ces amendements auraient même pour effet de créer une incertitude sur l’issue des contrôles URSSAF.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
Il est dommage que des propositions issues de remontées du terrain, qui viennent de chefs d’entreprise, sont défendues par une députée de gauche et sont de bon sens, ne puissent permettre à notre Assemblée d’avancer sur des sujets particuliers qui sont pourtant extrêmement simples. La bonne foi d’un employeur, cela existe. La mauvaise foi aussi – je la connais. Les amendements de Mme Bechtel peuvent nous faire progresser dans le sens d’un maintien de l’emploi dans le cadre d’une gouvernance de bonne foi, voire de mauvaise foi, puisque cela arrive aussi.
Je regrette la position du rapporteur et de M. le secrétaire d’État. Il s’agit d’amendements simples, qui donnent aux contrôleurs de l’URSSAF une latitude qu’ils réclament depuis longtemps…
… et sont issus du terrain. Je ne puis donc que déplorer la sévérité de votre attitude.
Nous avons là – je parle d’abord de l’amendement 695 rectifié – un très bon amendement, réaliste, qui nous vient des bancs de la gauche. Il a été bien défendu. Nous avons les mêmes remontées du terrain, à la fois de la part des chefs d’entreprise et de la part des agents de l’URSSAF, qui reconnaissent être dans une impasse, puisque la loi leur dit qu’ils sont obligés de redresser même s’ils savent que l’employeur est de bonne foi. Il est souhaitable de pouvoir exonérer celui-ci d’une amende qu’il ne méritait pas. La gauche évolue ; nous saluons cette évolution, et nous serons très heureux de voter cet amendement. Nous demandons d’ailleurs un scrutin public sur le vote.
Sur l’amendement no 695 rectifié , je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel.
Je n’ai pas grand-chose à ajouter à ce que M. Hutin a dit bien mieux que moi.
Qu’il n’y ait pas de confusion, monsieur le rapporteur. J’ai proposé deux amendements. Je peux comprendre que le Gouvernement ne veuille pas de l’amendement « maximal » qui prévoit que comme dans d’autres domaines du code du travail, le taux de la sanction – c’est-à-dire du retrait des allégements – puisse être modulé. Mais j’ai justement pris soin, pour laisser le choix au Gouvernement, au rapporteur et à l’Assemblée, de déposer un autre amendement, purement procédural, dont les agents de l’URSSAF que j’ai rencontrés se contenteraient.
Lorsqu’une petite entreprise, quelque peu submergée par la « paperasse », n’a pas déposé le document relatif à la NAO le jour J, elle est susceptible – aux termes de la loi, et quoi qu’on en dise – d’être sanctionnée par le retrait des allègements de cotisations. Vous pourriez donc au moins adopter le deuxième amendement, n° 694 rectifié , qui prévoit que dans ce cas, le contrôleur de l’URSSAF a la possibilité de la mettre en demeure par lettre recommandée de se mettre à jour de ses obligations dans un certain délai, au terme duquel elle se verra infliger les sanctions prévues par la loi sans modulation possible.
Je rappelle que c’est sur le vote de l’amendement no 695 rectifié que je suis saisie d’une demande de scrutin public.
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
On mesure en effet sur le terrain que certaines entreprises ont de vraies difficultés à mettre en place l’accord sur l’égalité professionnelle hommes-femmes. J’ai en tête une entreprise de 70 salariés du secteur des travaux publics, qui ne compte que 5 femmes pour 65 hommes.
Les amendements de notre collègue plaident donc pour laisser aux URSSAF une marge d’appréciation ou de souplesse. Vous avez parlé de bonne foi, monsieur le secrétaire d’État. Mais il ne s’agit pas ici de bonne foi. Ce qui est demandé au travers de cet amendement, c’est de faire preuve de discernement, en donnant la possibilité aux agents de l’URSSAF de prendre en compte des situations particulières. Ce serait un vrai service à rendre aux agents de la fonction publique, qui souhaitent avoir cette possibilité pour pouvoir prendre en compte la situation du terrain.
Cet amendement est donc tout à fait justifié. Je le voterai, comme l’ensemble des députés UMP.
Cet amendement a pour objet d’introduire un peu de souplesse. De fait, lorsque la loi est trop rigide, elle va à l’encontre de ses objectifs. Quel objectif la loi fixe-t-elle aujourd’hui ? C’est d’essayer de mettre en place un accord sur l’égalité professionnelle hommes-femmes, pas de pénaliser l’entreprise. La pénalité, c’est la sanction si l’entreprise ne fait pas ce qu’elle doit. Introduire une certaine souplesse, en laissant l’URSSAF discuter avec les entreprises pour les inciter à mettre en place l’accord précité, me paraît relever du bon sens.
Cet amendement, qui est signé par des députés de gauche – dont l’un s’était associé, tout à l’heure, aux frondeurs et ne peut vraiment pas être classé à droite (Sourires) – me semble plus incitatif que de nature à atténuer la pénalité infligée aux entreprises.
Le Premier ministre a dit qu’il aimait les entreprises et que le Gouvernement était « pro-business » : l’adoption de cet amendement irait dans le sens de ces propos.
Je voudrais remettre les choses à leur place. Premièrement, ce sujet ne présente pas une importance capitale.
Il me semble que c’est faire preuve d’ouverture que de dire cela.
Deuxièmement, donner un pouvoir d’appréciation aux URSSAF ne revient pas, à mes yeux, à leur faire un cadeau.
Que quelques-uns de ces agents aient pu réclamer cette disposition, c’est possible. Mais pour connaître des dispositifs de contrôle et de vérification dans d’autres instances, je répète que ce n’est pas faire un cadeau à nos fonctionnaires que de leur conférer trop de pouvoir d’appréciation. Tel est mon point de vue ; vous pouvez en avoir un autre.
Troisièmement – autre raison pour laquelle je ne souhaite pas voir ces amendements adoptés –, il ne me paraît pas normal de voir se substituer aux DIRECCTE les agents des URSSAF ; en effet, ce n’est pas leur métier. Conférer, même indirectement, aux URSSAF un pouvoir d’appréciation sur le fait que des entreprises aient de bonne foi ou non engagé des négociations annuelles obligatoires, n’est pas leur rendre service. En effet, leur métier n’est pas de déterminer si l’entreprise a délibérément refusé de mettre en place le dispositif de la négociation annuelle obligatoire – qui excède d’ailleurs le champ de l’égalité hommes-femmes. Elles n’ont donc pas à le faire.
Ceci dit, je le répète, cela ne va pas changer la face du monde.
Je m’exprimerai plus sur la forme que sur le fond. En effet, j’ai été touché par ce qu’a dit M. Hutin. Les amendements en discussion ont été examinés dans le cadre de la réunion de l’article 88 du règlement : on a vu 150 amendements en un quart d’heure ; je n’arrivais même pas à suivre la présidente, tant il fallait avancer. Monsieur Hutin, vous qui êtes membre de notre commission, vous auriez pu soumettre ces amendements à son examen. Mme Bechtel, pour sa part, s’y est prise trop tard. M. Woerth, enfin, a une connaissance très fine de ces questions de procédure.
Vous auriez pu m’en parler, ce qui nous aurait permis d’approfondir le sujet avec le Gouvernement.
J’estime être suffisamment ouvert à tous les arguments pour pouvoir me permettre de souligner, en l’occurrence, ces problèmes de procédure.
Je présente toutes mes excuses à la commission et à son rapporteur : je reconnais que j’ai rédigé tardivement – ce qui ne signifie pas légèrement – ces amendements. Prise par d’autres sujets, je n’ai pas accompli les démarches que j’aurais dû entreprendre auprès de la commission des affaires sociales.
Je veux dire à M. le secrétaire d’État que je retirerai volontiers mon premier amendement, que l’on peut qualifier de maximaliste. Il a en effet raison de dire que ce n’est pas nécessairement un cadeau que l’on fait au contrôleur de l’URSSAF que de lui permettre d’apprécier lui-même la réalité de la bonne foi. Je fais toutefois remarquer que ma rédaction aurait permis de conférer ces prérogatives à la DIRECCTE, puisque l’alinéa 4 dispose qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles « l’autorité administrative » – je ne précise pas laquelle – fixe le taux du montant de la réduction prévue à l’article L. 2242-8. On aurait donc pu imaginer que l’on recueille au préalable l’avis de l’inspection du travail.
Toutefois, je suis d’accord pour reconnaître que l’on ne va pas fabriquer cela sur le siège. Pour simplifier les choses, je retirerais volontiers mon premier amendement au profit du second, qui est purement procédural. De fait, l’amendement no 694 rectifié ne place l’agent de l’URSSAF devant aucune difficulté. Il vise simplement à ce que ce dernier, quand il constate que le document relatif à la négociation annuelle obligatoire n’a pas été déposé dans les délais, adresse une mise demeure au moyen d’une lettre recommandée. Si, au terme de ce délai supplémentaire, rien n’est fait, la pénalité, à laquelle on ne touche pas, sera appliquée.
L’amendement no 695 rectifié est retiré.
L’amendement no 694 rectifié n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 956 rectifié .
C’est un amendement de coordination avec la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014.
L’amendement no 956 rectifié , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 359 .
Il s’agit d’un amendement de repli qui vise à revenir sur l’extension des exonérations de cotisations sociales patronales prévues à l’article 2 de la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014. Cet article a élargi le champ de ces exonérations sur les bas salaires en l’étendant aux cotisations d’allocations familiales, à la contribution au Fonds national d’aide au logement et aux cotisations au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, de façon dégressive, pour les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC.
J’ai montré, en présentant mon amendement précédent, que les exonérations de cotisations sociales sont coûteuses, inefficaces, inutiles pour l’emploi et sources d’effets pervers qui installent notre pays dans une économie bas de gamme. La stratégie du Gouvernement semble consister exclusivement à baisser le coût de production, notamment le coût du travail, pour diminuer les prix des produits français.
Pour notre part, nous préconisons la démarche inverse. Nous pensons, rejoints en cela par un nombre croissant d’économistes, qu’il est au contraire impératif et urgent de monter en gamme, grâce à l’investissement, à la recherche, à l’innovation et à une formation initiale et professionnelle de qualité. C’est pourquoi nous vous demandons de revenir sur ces dispositions qui, de toute évidence, ne produisent pas les fruits attendus.
Madame Fraysse, vous entendez revenir sur un dispositif qui a été voté cet été et qui n’est pas encore entré en application. On ne peut donc pas préjuger de son inefficacité. Aussi l’avis de la commission est-il défavorable.
L’amendement no 359 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 619 .
En 2009, les femmes gagnaient, en moyenne, 24 % de moins que les hommes, pour des tâches et des fonctions similaires. L’inégalité salariale entre hommes et femmes est encore aujourd’hui, en 2014, une triste réalité. Cet amendement vise à inciter les employeurs à respecter les égalités salariales entre les hommes et les femmes. Il a pour objet de demander aux entreprises qui ne respectent pas cette égalité et cotisent donc moins à l’assurance vieillesse de verser une indemnité, correspondante à ce manque à gagner, au régime des retraites.
L’amendement de Mme Orliac est animé par un sentiment louable, à savoir assurer l’égalité de rémunération entre hommes et femmes. Je rappelle qu’est en effet interdite toute différenciation salariale fondée sur le sexe. Les prud’hommes peuvent d’ailleurs être saisis sur ce fondement.
En revanche, il ne me paraît pas souhaitable de transformer les cotisations sociales en pénalités visant à sanctionner ce manquement à la loi, d’autant plus que ces cotisations sociales ouvrent droit aux prestations de Sécurité sociale. Par ailleurs, le code du travail dispose que les entreprises d’au moins cinquante salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord ou un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle. Cette disposition est entrée en vigueur en 2012.
Voilà pourquoi, au vu de ces arguments, la commission a repoussé votre amendement.
Je partage l’avis du rapporteur. J’ajoute, madame la députée, que, depuis le 1er janvier 2013, 33 pénalités financières ont été prononcées et 1 200 mises en demeure adressées. De surcroît, grâce à la loi du 4 août 2014, le non-respect des dispositions sur l’égalité hommes-femmes sera sanctionné par une interdiction d’accès aux marchés publics. Enfin, votre amendement me paraît juridiquement fragile : en effet, au regard de la conditionnalité des sanctions, il convient que ces dernières soient en rapport direct avec l’objet du dispositif. En l’occurrence, il n’y a pas de lien réel entre le fait de présenter des écarts de salaires importants entre les hommes et les femmes et le fait de devoir acquitter des cotisations vieillesse majorées.
Pour toutes ces raisons, qui s’ajoutent à celles évoquées par votre rapporteur, j’émettrais un avis défavorable sur cet amendement si vous ne le retiriez pas.
L’amendement no 619 n’est pas adopté.
Cet article traite des assiettes forfaitaires ; il instaure un seuil pour l’application de l’abattement – limité à 30 % – pouvant être appliqué à la rémunération réelle et, dans le même temps, institue un plafonnement des assiettes forfaitaires, fixé à une fois et demie le plafond de la Sécurité sociale. En conséquence, le mécanisme instaure une double peine et ne peut aboutir qu’à augmenter les charges. Cet article mérite donc d’être supprimé.
La commission propose une rédaction globalement nouvelle de l’article 9 qui encadre les assiettes forfaitaires de cotisations et qui limite à 30 % le taux d’abattement pouvant être appliqué à la rémunération réelle afin de protéger les droits des assurés. Si cet article va dans le bon sens, il fait apparaître un cas d’incompétence négative de la loi. En effet, la détermination de l’assiette d’un prélèvement obligatoire relève du domaine de la loi.
Le présent amendement crée donc un cadre législatif à ces exceptions en conditionnant davantage la possibilité pour le pouvoir réglementaire de fixer des assiettes forfaitaires par décret – et non plus par arrêté. Ainsi, l’existence des assiettes protectrices en vigueur sera expressément prévue par une disposition précisant que des assiettes forfaitaires peuvent être créées pour les salariés ou assimilés non soumis au SMIC et pour ceux entrant dans le champ d’application de l’article L. 311-3 du code de la Sécurité sociale.
Le dispositif prévu par l’article 9 serait conservé en ce qui concerne les assiettes forfaitaires à vocation d’optimisation sociale : il limite à 30 % l’abattement d’assiette pouvant être prévu par décret lorsque la rémunération est supérieure à 1,5 fois la valeur du plafond de la Sécurité sociale correspondant à la durée du travail.
Enfin, une disposition transitoire, jusqu’au 31 décembre 2015 au plus tard, est prévue pour maintenir applicables les assiettes fixées par arrêté qui ne seraient pas conformes aux dispositions du code de la Sécurité sociale tel que modifié par l’article 9.
Ce sous-amendement vise à apporter deux précisions à l’amendement soutenu par votre rapporteur. Premièrement, remplacer les mots : « sous réserve que leur application vise à », par les mots : « afin de ». Deuxièmement et surtout, indiquer que les droits aux assurances sociales acquis par les personnes non soumises au SMIC ou assimilées salariés et bénéficiant d’assiettes forfaitaires protectrices ne peuvent excéder ceux acquis au niveau du SMIC. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement est favorable à l’amendement défendu par le rapporteur.
Quel est l’avis de la commission sur ce sous-amendement du Gouvernement ?
La commission ne l’a pas examiné, mais ce qu’il propose me semble une mesure d’équité et, à titre personnel, j’y suis favorable.
Cet amendement est motivé par le fait qu’il serait souhaitable d’avoir une assiette de cotisations qui se rapproche de la rémunération en plafonnant le taux d’abattement à 30 %. J’ai tout de même relevé dans l’étude d’impact un surcoût de 10 millions d’euros s’agissant des activités de formateur occasionnel et de 5 millions d’euros s’agissant des personnes exerçant une activité pour une personne morale à objet sportif, une association de jeunesse ou d’éducation populaire. Cet impact de 15 millions d’euros serait essentiellement supporté par les collectivités territoriales et par les associations qui oeuvrent auprès de celles-ci dans le cadre de gestion de formations, de centres aérés, d’activités sportives et à destination de la jeunesse.
J’attire donc tout de même l’attention sur les conséquences d’un tel amendement – je pense notamment aux centres aérés où nous embauchons des personnes pour moins de trente jours dans l’année –, car il entraînerait alors un surcoût relativement important. Je regrette que cet amendement n’ait pas fait l’objet d’un travail en commission permettant d’en évaluer tous les impacts.
M. Accoyer avait bien fait de soulever le problème parce que M. Bapt, sous prétexte de faire passer une disposition apparemment sans importance – la compétence ne serait plus au niveau de l’arrêté mais du décret –, soulève des loups. Comme le secrétaire d’État ne fait pas trop d’effort pour nous répondre et nous éclairer, il faut qu’on se débrouille nous-mêmes, mais ce n’est pas très grave. Mme Louwagie a complètement raison : un tel amendement n’est pas neutre. Proposer de réduire de 60 % à 30 % les abattements pour certaines professions, ce n’est neutre pour aucune des personnes concernées. Je crois que cette proposition mérite vraiment une explication et Mme Louwagie a bien fait d’intervenir à ce sujet.
« Eh oui ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP.
Le sous-amendement no 963 est adopté.
L’amendement no 152 , sous-amendé, est adopté, et l’article 9 est ainsi rédigé.
Cet article traite de la croissance du coût du poste « dispositifs médicaux », en effet significative, et prévoit, selon des termes assez décents, de simplifier les démarches administratives. Or il apparaît dans le détail de ses dispositions que tout est fait, au contraire, pour impacter le développement des dispositifs nouveaux. C’est particulièrement préoccupant car il se trouve que nous sommes probablement le pays le plus imaginatif en ce domaine et qui met au point le plus de nouveaux dispositifs médicaux. Comme le système inventé par le Gouvernement va en étouffer les prix, il se passera ce qui se passe déjà depuis un certain nombre d’années : les laboratoires et les autres entreprises du secteur seront rachetés par des groupes étrangers et les dispositifs, légèrement modifiés, reviendront en France encore plus chers. Il apparaît donc qu’un tel article n’a pas sa place dans le PLFSS.
Je suis saisie de deux amendements rédactionnels, nos 852 et 853, présentés à titre personnel par M. le rapporteur.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 957 .
C’est un amendement rédactionnel puisqu’il coordonne l’intitulé de la section qui regroupe désormais la contribution sur les dépenses de promotion des dispositifs médicaux et la taxe sur les premières ventes nouvellement codifiées, rectifiant ainsi une erreur matérielle antérieure.
L’amendement no 957 est adopté.
Je suis saisie de deux amendements rédactionnels, nos 854 et 855, présentés à titre personnel par M. le rapporteur.
L’article 11, amendé, est adopté.
Cet article vise à étendre à l’ensemble des régimes de Sécurité sociale les dispositions applicables dans le régime général en matière de recours contre les tiers responsables. C’est une bonne chose, et nous le voterons.
Mais j’aurais voulu profiter de mon intervention sur l’article pour interroger Mme la ministre de la santé. Elle me répondra lorsque ce sera possible. Je voudrais attirer son attention sur la façon dont l’assurance maladie exerce son droit de recours aux tiers responsables. Certains médecins mettent en effet en doute la volonté de la CNAM en la matière. Ainsi, lors de son audition au cours de la précédente législature, dans le cadre de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale consacrée à la lutte contre la fraude sociale, M. Claude Bronner, coprésident de l’Union des généralistes, invitait à se pencher sur l’accord d’intéressement qui lie les médecins-conseils à l’assurance maladie. Il déclarait notamment : « Sur les 800 points d’intéressement qui peuvent être attribués au médecin en vertu de cet accord, 160 points le sont au titre du contrôle des arrêts de travail contre 30 points seulement au titre du recours contre tiers. » Pourquoi ce décalage, alors que, poursuivait le Dr Bronner : « ce recours permet à l’assurance maladie de se faire rembourser par l’assurance du tiers responsable de l’accident les prestations versées à la suite de cet accident. Voilà qui pose problème aux médecins que nous sommes, surtout quand on sait que l’assurance maladie est actuellement dirigée par un ancien assureur. » Si Mme la ministre pouvait nous éclairer sur la façon dont l’assurance maladie utilise ses possibilités de recours, ce serait utile à notre réflexion.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 357 .
Cet amendement vise à permettre les recours des organismes d’assurance maladie complémentaires contre les tiers en cas d’accident. Il prévoit que ces organismes soient signataires de la convention conclue entre les caisses d’assurance maladie et les assureurs, posant ainsi l’obligation pour les victimes, les établissements, le tiers responsable et son assureur d’informer non seulement la caisse mais aussi, dorénavant, les organismes d’assurance complémentaire de la couverture de l’accident.
L’amendement de Mme Fraysse comporte deux parties. La première propose que les organisations les plus représentatives des organismes d’assurance maladie complémentaire soient concernés par la subrogation au titre du recours aux tiers. Mais cela impliquerait un conflit d’intérêts, puisque des assureurs pourraient être concernés à la fois au titre d’une éventuelle responsabilité civile et comme possible intervenant dans la procédure. Par contre, la seconde, qui traite de l’information – « le cas échéant, l’organisme complémentaire concerné » – ne me semble pas relever du conflit d’intérêts. Il serait donc peut-être possible de dissocier, si M. le secrétaire d’État en était d’accord, les deux parties de votre amendement.
La présidence n’a pas bien compris quel était l’avis de la commission. Je vous prie de clarifier sa position.
Sourires.
Sourires.
Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.
Avis défavorable au I, et favorable au II. Cela veut dire qu’il faudrait dissocier les deux.
Je partage l’avis du rapporteur sur la difficulté que pose la première partie de votre amendement, madame Fraysse. Il a évoqué un conflit d’intérêts. Il y aurait pour le moins une confusion puisque, à la différence de la Sécurité sociale, ces assureurs peuvent être à la fois tiers payeurs et tiers responsables.
Leur inclusion dans les conventions de recouvrement occasionnerait une confusion dans la mise en oeuvre des dispositions et les rendraient inopérantes.
Enfin, la notion d’« organisations les plus représentatives des organismes d’assurance maladie complémentaire » n’est pas, vous en conviendrez, très précise, ce qui pourrait générer une fragilité juridique.
Je serais par conséquent défavorable à cet amendement s’il était maintenu.
S’agissant de la deuxième partie de l’amendement, elle ne semble pas poser beaucoup de problèmes, si ce n’est qu’elle introduit un élément supplémentaire. Nous pourrions éventuellement réexaminer la question en deuxième lecture.
Quoi qu’il en soit, tel qu’il est rédigé, cet amendement ne me paraît pas fonctionner.
Madame Fraysse, êtes-vous d’accord pour répondre à la demande du rapporteur, c’est-à-dire supprimer le I de l’amendement et ne garder que le II ?
Compte tenu des explications qui m’ont été données, je propose de retirer mon amendement et de le retravailler en vue de la seconde lecture.
Le problème, c’est qu’il n’y aura probablement pas de seconde lecture !
La proposition qui vous est faite est de supprimer la première partie de votre amendement. Qu’en dites-vous ?
Le problème, c’est que la rédaction de la deuxième partie de l’amendement n’est non plus pas satisfaisante. Il faudrait la retravailler. Je sais bien qu’à moins que l’article soit amendé par le Sénat, nous ne pourrons pas examiner la nouvelle version de cet amendement en seconde lecture, mais je vous suggère de le retirer, car, en l’état, il présente une certaine fragilité.
À défaut, j’y serais malheureusement défavorable.
Oui, madame la présidente, parce qu’un problème de véhicule législatif se pose : si l’amendement, réduit au II, n’était pas adopté ce soir, il ne pourrait jamais l’être, sauf si le Sénat allait jusqu’au bout de la discussion du PLFSS – ce qui ne fut pas le cas au cours des deux précédentes années.
Cela risque d’être le cas !
Certes, mais il serait préférable que Mme Fraysse maintienne son amendement rectifié et que nous retravaillions le texte en seconde lecture.
L’amendement no 357 est donc ainsi modifié : le I est supprimé ; il reste :
« Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :
2° bis Au septième alinéa de l’article L. 376-1 et au cinquième alinéa de l’article L. 454-1, après le mot : « caisse », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, l’organisme d’assurance maladie complémentaire concerné, ». »
L’amendement no 357 , tel qu’il vient d’être rectifié, accepté par la commission, repoussé par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 856 .
L’amendement no 856 est adopté.
L’article 12, amendé, est adopté.
L’amendement no 334 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l’amendement no 94 .
Je reviens en deuxième semaine avec mon amendement sur les boissons au soja !
Sourires.
L’article 1613 ter du code général des impôts institue une contribution perçue sur les boissons sucrées ; sont exclus de son périmètre les laits infantiles, les laits de croissance et les produits de nutrition entérale pour les personnes malades. L’objet du présent amendement est d’ajouter à cette liste les boissons à base de soja contenant au minimum 2,9 % de protéines issues de la graine de soja.
Les boissons à base de soja ont avant tout un objectif nutritionnel. Elles peuvent, pour des motifs variés, être utilisées en complément ou remplacement des produits laitiers d’origine animale.
Puisque vous doutiez de leurs atouts, je me suis renseignée. Voici la composition comparée du lait de soja et du lait de vache demi-écrémé : glucides : 0,45 grammes pour le lait de soja, 4,8 grammes pour le lait de vache ; magnésium : 25 milligrammes pour le lait de soja, 11 milligrammes pour le lait de vache ; fer : 0,64 milligrammes pour le lait de soja, 0,028 milligrammes pour le lait de vache.
J’aurais aimé vous apporter une boisson à base de soja, mais il paraît que c’est interdit en séance.
Rires.
Franchement, monsieur le secrétaire d’État, je ne comprends pas pourquoi on n’a pas exclu les boissons à base de soja du périmètre de la taxe, car ce ne sont en rien des boissons sucrées.
Nous avons eu une discussion en commission sur cet amendement, qui a retenu notre attention.
Peut-être est-il en effet dommage que, lorsque la taxe sur les sodas a été instaurée, certaines boissons à visée nutritionnelle n’aient pas été exclues de son périmètre. Je vous avais dit que je m’adresserais au Gouvernement pour avoir des précisions sur la façon dont cela pourrait se faire. Ces précisions, je ne les ai pas encore eues.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Ce que je vous propose, c’est que nous demandions au Gouvernement, d’ici à la prochaine lecture, des précisions sur l’incidence que cela aurait sur l’assiette de la taxe et que nous l’incitions à travailler davantage sur le sujet. Mais dans l’état actuel des choses, je suis dans l’incapacité d’émettre un avis favorable à votre amendement.
Cela signifie-t-il que vous lui émettez un avis défavorable, monsieur le rapporteur ?
Madame la députée, vous nous dites que les boissons à base de soja peuvent remplacer le lait classique en cas d’intolérance, ce qui pourrait objectivement justifier leur exclusion du périmètre de la contribution perçue sur les boissons sucrées.
Toutefois, l’évolution que vous proposez mérite réflexion. Sur le plan de la méthode, une telle exclusion doit impérativement faire l’objet d’une évaluation. Faute d’analyse, nous ne pouvons pas modifier le périmètre de la taxe. Pour cette raison, si cet amendement n’était pas retiré, j’appellerais l’Assemblée à le rejeter.
À cet instant du débat, il apparaît que l’absence de la ministre de la santé fait problème.
Cet amendement concerne en effet la santé publique. Il aborde un sujet très important, particulièrement cher à l’esprit… « câblé » de M. Bapt sur ce qu’il appelle la « fiscalité comportementale », et qui n’est autre qu’une fiscalité nutritionnelle, diététique, bref, tout ce qu’il voudra.
Vous savez bien, monsieur le rapporteur, que cette fiscalité chère à votre coeur a été mise en cause par un rapport important du Sénat, qui en discute – c’est le moins que l’on puisse dire – la pertinence et l’efficacité, voire en souligne les effets pervers.
Ces effets pervers, monsieur le secrétaire d’État, on les connaît : la taxe a provoqué une crise de la fabrication de sodas et de jus de fruits en France et a soutenu les importations, en raison de la spécificité française que vous avez imposée.
Quant à l’amendement présenté par Mme Le Callennec, il est bien évidemment nécessaire de l’adopter pour des raisons de santé publique. Les intolérances au lait de vache sont particulièrement répandues, comme vous devez le savoir en raison de votre ancienne profession, monsieur le rapporteur.
Je ne comprends vraiment pas que vous émettiez un avis défavorable à cet amendement, qui répond à une nécessité de santé publique.
Bien sûr !
Ce n’est pas la première fois que je le présente : il avait déjà été défendu l’année dernière. À chaque fois, la réponse est la même : il faut que le Gouvernement l’évalue.
Dans ce cas, qui, au Gouvernement, doit s’en charger ? Est-ce à la ministre de la santé d’évaluer les qualités nutritionnelles des boissons à base de soja ? Ou au secrétaire d’État au budget d’examiner l’impact d’une telle disposition sur les finances publiques ? On nous mène en bateau !
Je ne sais pas ce que vous voulez comme preuve ; à chaque fois, vous invoquez une nécessaire évaluation, mais qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Cela fait déjà plus d’un an que j’ai appelé votre attention sur les boissons à base de soja !
Peut-être avez-vous vécu la même chose, madame la présidente de la commission, mais dans ce cas, soyez plus intelligents que vos prédécesseurs – puisque vous avez l’air de dire qu’ils étaient, eux, systématiquement contre ! Pourrait-on un jour changer de méthode de travail dans cette maison ? Cela fait un an que je fais cette proposition, et cela fait un an que l’on me répond que le Gouvernement doit l’évaluer. Mais qui, concrètement, va l’évaluer ? Le « Gouvernement », qui est-ce ?
Effectivement, madame Le Callennec, votre amendement peut sembler intéressant. Toutefois, je voudrais intervenir de manière plus globale, en tant que présidente du groupe d’études sur la santé à l’école.
Il est vrai que lorsqu’on travaille sur la santé, et plus particulièrement sur la santé des enfants et des jeunes, on doit se poser un certain nombre de questions. Et celle que je me pose en examinant votre amendement est la suivante : ne faudrait pas appréhender de manière globale le périmètre d’exclusion ; n’y a-t-il vraiment que le lait de soja qui doive être inclus dedans ?
J’entends bien, mais ne faudrait-il pas considérer les choses plus globalement ? Ce que je propose, c’est que nous regardions, globalement, ce qui doit être inclus dans le périmètre concerné.
Certes non, mais il faut bien travailler sur le sujet et évaluer avec précision les conséquences d’une telle disposition, non pas en termes de coût, mais en termes de santé, notamment sur les enfants et les jeunes.
Pardon de m’immiscer dans ce débat ; j’admets que, contrairement à beaucoup d’entre vous, je n’ai aucune compétence en matière sanitaire, mais il se trouve que la commission des affaires économiques a visité cet après-midi le salon de l’industrie agroalimentaire, à Villepinte.
Une filière industrielle de développement de produits à base de soja – boissons, yaourts et autres – est en train de s’organiser en France. Cela semble effectivement représenter une véritable alternative. Comme je ne connais pas l’impact financier de la disposition qui est proposée, je me garderai bien de prendre position sur l’amendement ; toutefois, je veux dire qu’il y a là un vrai sujet, qu’il faut prendre au sérieux.
Certaines personnes développent dans notre pays une filière qui constitue une alternative en matière énergétique et alimentaire.
En disant cela, j’ai conscience de ne pas faire beaucoup avancer le débat, mais il convient d’indiquer que cela existe et que c’est une alternative sérieuse.
« Merci ! » et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Madame Le Callennec, votre amendement est très sympathique, comme vous, d’ailleurs. Je ne me rappelle pas vous avoir fait la même réponse il y a un an, mea culpa. Pourrions-nous être d’accord pour demander son avis – qui peut, je pense, être rendu rapidement, et M. Brottes nous aidera sûrement pour ça – à l’ANSES sur la délimitation des produits qui ont une valeur nutritionnelle ?
Ainsi pourrions-nous statuer en disposant d’une évaluation sanitaire, comme le réclame M. le président Accoyer ? Cela donnera aussi au Gouvernement le temps de mieux borner, en quelque sorte, son évaluation du coût, parce que la mesure proposée, une fois de plus, est gagée sur le tabac, et, à l’évidence, on n’a aucune évaluation.
On a entendu les frondeurs tout à l’heure, et ça portait sur 40 milliards d’euros !
Le Gouvernement n’a pas besoin de siéger, de se réunir et de consulter pendant trois semaines pour connaître le coût de la mesure.
« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.
Je vous le dirai à la fin, mais je voudrais vous appeler à la raison.
Monsieur Accoyer, vous parlez d’urgence sanitaire.
Savez-vous de quoi on parle ? On parle de lait de soja, et vous en connaissez le prix. Combien coûte un litre de lait de soja ? Puisque vous savez de quoi on parle, ça coûte combien ?
Un litre de lait de soja, ça coûte entre deux euros cinquante et trois euros, mesdames et messieurs les députés ! Et puis savez-vous de combien on parle, avec cette taxe, qui pourrait être dissuasive ou incitative pour la filière ? On parle de sept euros cinquante à l’hectolitre ! Vous enflammez l’hémicycle, vous parlez d’urgence sanitaire pour une taxe qui représente 7,5 centimes d’euro sur un produit qui coûte entre 2,50 et 3 euros. Voilà, mesdames et messieurs les députés ! Une demi-heure de discussion sur une « urgence sanitaire » dont vous savez maintenant combien elle représente à l’échelle de l’unité !
En outre, vous me demandez, monsieur le député, combien ça coûte, alors que vous avez l’air de dire que le secrétaire d’État au budget est tout à fait inutile ici
« Non ! Non ! » sur les bancs du groupe UMP
et que seule la ministre de la santé, face à ce problème de santé publique majeur, pourrait donner un avis. Au niveau du budget de l’État, cela représente1,3 milliard… pardon, 1,3 million d’euros.
Même si l’État est impécunieux, pour 1,3 million d’euros, le secrétaire d’État au budget ne va pas se battre. Il dit qu’il est défavorable pour la raison indiquée tout à l’heure, c’est qu’en matière d’efficacité nous n’avons pas d’étude d’impact. En outre, cela m’ennuie un peu de déroger sur un dispositif qui est maintenant connu.
Cela dit, pour 7,5 centimes d’euros, sur un produit vendu de 2 à 3 euros… Je ne suis pas sûr que la suppression de la taxe dynamiserait la filière, et je suis à peu près sûr que son maintien ne la pénalisera pas. Vraiment, pour 1,3 million d’euros… on y a passé du temps, en parlant d’urgence sanitaire, pour se faire plaisir.
Je me délecte d’entendre M. Accoyer défendre le principe d’une taxe comportementale ou d’absence de taxe à visée comportementale.
Chaque fois qu’avec M. Bapt on a développé ce genre d’argumentaire, on a entendu de tout. Notons donc déjà un progrès du côté de nos camarades
Sourires
de ce côté-ci de l’hémicycle.
Cela dit, je voudrais qu’on ramène la problématique à sa juste proportion. M. Eckert l’a fait d’un point de vue financier, mais, sur le plan sanitaire et du point de vue de la consommation en général, on parle de taxes sur les boissons sucrées.
Eh bien, justement, on n’est pas obligé de vendre une boisson au soja sucrée ! J’aurais été un peu plus intéressé si vous aviez proposé du soja bio, non sucré, mais, en l’occurrence, vous voulez nous proposer de détaxer du soja sucré, OGM, peut-être issu des États-Unis… Écoutez, non merci !
Monsieur Accoyer, vous me demandez la parole, mais vous l’avez déjà prise une fois sur cet amendement. Nous allons donc passer au vote. Vous vous êtes déjà exprimé et d’autres orateurs l’ont fait, notamment Mme Le Callennec, par deux fois, je mets donc l’amendement aux voix.
L’amendement no 94 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 627 .
En ce qui concerne cet amendement, madame la présidente, je ne parlerai certainement pas de problème de santé publique. Il a pour objet de relever le niveau de la contribution prévue à l’article 1613 ter du code général des impôts, instaurée par le PLF pour 2012 et acquittée par les entreprises produisant des boissons sucrées, dont certaines sont bien connues et dominent largement le marché. Je regrette simplement de ne pas avoir ajouté dans le dispositif de cet amendement un relèvement de la contribution prévue à l’article 1613 quater du même code, qui porte, elle, sur les boissons avec édulcorant.
L’augmentation proposée est très faible. Elle est de l’ordre de 0,85 centime d’euro – moins de 1 centime ! – par canette ou de 2,55 centimes pour une bouteille d’un litre, ce qui nous rapproche du prix des boissons au soja. Elle fait passer la contribution de 7,45 euros à 10 euros par hectolitre, c’est-à-dire, comme je viens de le dire, à 2,55 euros pour 100 litres. Le produit de cette contribution augmenterait ainsi de 100 millions d’euros. Une telle somme affectée au budget de la Sécurité sociale, au moment où nous cherchons des économies, ce n’est pas rien. Nous venons d’avoir un débat qui a duré assez longtemps, j’en reparlerai.
La taxe sur les boissons sucrées est souvent présentée comme une taxe comportementale, et cette contribution, appelée parfois taxe soda, existe dans de très nombreux pays du monde. Elle est systématiquement présentée, dans les pays où elle est en vigueur, comme une contribution de santé publique pour lutter contre le surpoids et l’obésité. En fait, ce n’est pas la composition des boissons sucrées qui est en cause, ce sont les modalités de leur consommation.
…que la consommation excessive de produits sucrés favorise le surpoids, surtout lorsque ce sont des produits que l’on consomme froid,…
Merci ! On va essayer de respecter les temps de parole ; sinon, on ne s’en sortira pas.
Quel est l’avis de la commission ?
La commission était partagée sur cet amendement. Elle en comprend tout à fait l’objectif, à l’heure de ce scandale qui voit certains établissements de restauration offrir des boissons sucrées gratuites. Effectivement, ils attirent et sans doute abusent certains jeunes consommateurs, au mépris de tous les efforts de prévention de l’obésité.
Néanmoins, la commission a rejeté cet amendement. D’une part, l’augmentation nous a paru un peu trop importante. D’autre part, n’entrent pas dans son champ les boissons qui comportent des édulcorants, dont l’effet sur la santé est discuté.
Voilà pourquoi, chère collègue, quoique repoussé par la commission, cet amendement pourrait, à condition d’être rectifié, recueillir un accord assez large.
Je mettrai aux voix l’amendement tel qu’il est actuellement rédigé. On ne va pas sous-amender oralement en séance tous les amendements.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Le Gouvernement est du même avis que le rapporteur et aurait préféré que fussent aussi visées les boissons contenant des édulcorants. La navette parlementaire permettra probablement de l’améliorer.
En l’état actuel, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée nationale. Il pourra éventuellement proposer, si l’amendement est adopté, d’améliorer sa rédaction en incluant ce qui va bien pour conserver un équilibre avec la taxe sur les boissons avec édulcorants.
Il s’en remet donc à la sagesse de l’Assemblée nationale, en considérant cette proposition avec une certaine bienveillance.
L’année dernière, dans le cadre du PLFSS, nous avons souvent eu ce type d’amendement, et j’avais interpellé Mme Touraine, en lui indiquant qu’il faudrait une grande loi de santé publique et qu’on le lui demandait depuis un certain nombre d’années. Elle avait répondu favorablement. Cette loi est maintenant annoncée. Il s’agirait finalement d’une loi sur la santé, avec un volet consacré à la santé publique.
Cette année, je crois que c’est le seul amendement de ce type déposé dans le cadre de ce PLFSS. Je pense qu’il aurait plus sa place dans le volet de santé publique de la loi à venir que maintenant, isolé. Il faut travailler de manière extrêmement sérieuse. Le problème est celui de l’obésité, de l’obésité infantile et de ses facteurs. La réflexion doit avoir lieu non au détour d’un amendement isolé, mais dans le cadre d’une réflexion de la commission sur la santé publique.
C’est une question de santé publique, monsieur le secrétaire d’État, de même que l’intolérance au lactose et la maladie coeliaque sont un vrai problème de santé publique, mais il faut bien dire ce qu’il en est de cet amendement : il est seulement destiné à ramasser des recettes supplémentaires pour les finances publiques. C’est juste un impôt, c’est juste une taxation, dont aucune étude, strictement aucune, n’a montré qu’elle avait un effet sur le plan nutritionnel. Disons-le donc aux Français : nous inventons à nouveau des impôts, à nouveau des taxes, et nous voulons les augmenter. Aujourd’hui, c’est le sucre. Demain, ce sera le parfum, ou encore autre chose. Franchement, nous ne faisons qu’une chose : inventer des taxations nouvelles.
Non, la vérité, c’est qu’ici nous devrions parler d’éducation sanitaire pour faire de véritables économies et, surtout, pour servir la santé de nos compatriotes. Cette disposition qui consiste à taxer les boissons sucrées, à taxer un certain nombre d’aliments est contre-productive. On sait que les fabrications de sodas en France ont baissé depuis qu’on s’est laissés aller à mettre en place ce type de fiscalité nouvelle, que les importations ont augmenté, et qu’il n’y a, je le répète, aucun effet nutritionnel, aucun effet sur la santé publique.
J’avais présenté cet amendement en disant que ce n’était justement pas un problème de santé publique.
Oui, effectivement, c’est une taxation. Le problème de l’obésité est un problème multifactoriel, qui ne se résume pas à la seule prise de boissons sucrées. C’est beaucoup plus large, et je crois que les causes de surpoids et d’obésité sont extrêmement complexes et n’ont aucun rapport avec cette prise de boissons sucrées.
Donc, en fait, ces entreprises multinationales pourraient coopérer à hauteur de 100 millions d’euros. Leurs dépenses en termes de communication, de packaging, de publicité sont énormes. Je pense qu’elles ne répercuteraient même pas cette augmentation si modique, moins de 1 centime d’euro par canette, sur les consommateurs. D’autre part, il faut savoir que ces produits bénéficient du taux réduit de TVA comme les produits de première nécessité.
Ces arguments me paraissent donc quand même devoir être entendus.
Mme Orliac a déjà évoqué l’argument que je voulais opposer à notre collègue : ces produits sont actuellement taxés à 5,5 %. S’il y a un aspect à faire évoluer, c’est peut-être celui-là. M. le secrétaire d’État semble trouver qu’une taxe de 0,85 centime d’euros par cannette serait trop élevée. C’est vrai : pourquoi pas 3 ou 4 centimes d’euros, tant qu’on y est ?
Quoi qu’il en soit, la question principale est la suivante : ces produits doivent-ils être considérés comme de première nécessité, et être soumis au taux réduit de TVA de 5,5 % ?
Par ailleurs, il faut garder à l’esprit le fait que cet amendement, s’il était adopté, rapporterait 100 millions d’euros. Nous aurions alors pu adopter, tout à l’heure, l’amendement relatif aux services à la personne, qui aurait permis de créer énormément d’emplois.
C’est un peu dommage : si cet amendement passe, nous aurons manqué une occasion de créer des emplois grâce à ce PLFSS.
En effet, ce n’est pas un problème de santé publique, mais un problème de finances publiques. Tout à l’heure, vous avez dit non au soja. À présent, on propose d’appliquer une taxe supplémentaire sur les boissons contenant des sucres ajoutés. Une taxe sur ces boissons a déjà été créée en 2012, qui a rapporté 300 millions d’euros.
Après tout, les consommateurs sont libres d’acheter ces boissons rafraîchissantes ! Les statistiques montrent qu’environ 90 % des foyers français achètent ce type de boissons. Autant que je sache, l’espérance de vie continue à progresser dans notre pays, ce dont nous nous félicitons. Il ne s’agit donc pas de produits dangereux, toxiques, qu’il faudrait bannir !
En revanche, chers collègues, il ne faut pas ignorer qu’il existe une filière économique française liée à ces boissons. Elle représente environ 5 000 emplois directs et 48 000 emplois indirects, notamment dans le département où je suis élu. Sur le territoire français tout entier, il y a trente-huit sites de production de telles boissons. Pour 100 millions d’euros, nous fragiliserions encore plus une filière qui déjà ne va pas très bien – comme l’a dit le président Accoyer, on consomme moins de ce type de produits.
Pour finir, je rappelle que la Commission européenne s’est déjà intéressée à ce sujet. M. Bapt, je ne sais pas si vous êtes au courant de cela : une étude a été menée par la Commission européenne sur les taxes alimentaires. La conclusion de cette étude est très négative : ces taxes ne servent pas à grand-chose, ni sur le plan du rendement, ni sur le plan de la santé publique. En revanche, elles affectent de manière négative les résultats de l’industrie, sans atteindre leurs objectifs en matière de santé publique.
Ce genre de fiscalité est excessif et ne sert à rien. Ces 100 millions d’euros, c’est toujours de la fiscalité en plus : ce n’est donc pas une bonne décision. Ces boissons sont déjà très fortement taxées. Ça suffit : pourquoi la France serait-elle le seul pays d’Europe à taxer toujours plus les produits de consommation, sur le dos des consommateurs ? Je crois que ce n’est pas raisonnable.
J’ai déjà évoqué tout à l’heure le problème de santé publique posé par ces produits. Je voudrais recentrer le débat sur ce point, et notamment sur la santé des enfants. En effet, l’obésité est un vrai problème…
Cet amendement propose d’augmenter la contribution des fabricants de ces boissons au financement de la Sécurité sociale. Je n’y suis pas très favorable, car il ne répond pas suffisamment à l’enjeu de santé publique, notamment des jeunes, que j’évoquais tout à l’heure.
Nous nous sommes déjà penchés sur ce sujet lors de l’examen des précédents PLFSS. Nous avions renoncé à augmenter cette contribution car un projet de loi relatif à la santé publique avait été annoncé. Je dois dire que malheureusement, pour l’instant, ce projet de loi n’aborde pas les questions relatives à la santé environnementale. Sur ce point, il est très faible.
Pour en revenir à cet amendement, je crois que M. Accoyer n’a pas tort de dire que cela ne changera pas vraiment les comportements. Il faut être honnête : c’est vrai. Il faut simplement prendre cette augmentation comme un signal. Ce signal a quand même son importance, au moment où l’on voit une importante chaîne de fast-food, en France, distribuer à volonté des boissons sucrées aux jeunes, alors qu’on sait que cela pose un véritable problème de santé publique, un véritable problème sanitaire.
Peut-être faudrait-il trouver d’autres solutions ; il ne fait aucun doute que de ce point de vue, l’éducation est importante. Mais ne rien dire sur ce point, ne donner aucun signal, faire comme s’il s’agissait uniquement d’une question de chiffre d’affaires et d’emploi, ne pas dire qu’on est en train de bousiller la santé de jeunes qui consomment du sucre en quantité absolument phénoménale, cela n’est pas non plus possible.
Restons modestes. Cet amendement n’est qu’un modeste signal, mais un signal positif.
Je voudrais préciser quelques éléments. D’abord, contrairement à ce que disait M. Jacquat, je ne pense pas que cet amendement ait sa place dans le projet de loi santé. Pourquoi cela ? Je suis très attaché au fait que toutes les dispositions fiscales et financières soient rassemblées dans des lois financières. Je me bats pour faire respecter ce principe – y compris, parfois, avec certains de mes collègues.
On a vu ce que cela pouvait donner, monsieur Jacquat !
Deuxièmement, mesdames et messieurs les députés, vous avez essayé de faire oublier que cette taxe existe déjà. Il ne s’agit pas de créer un nouvel impôt !
Cette taxe a été créée par la loi de finances pour 2012.
J’ai fait très attention à ce que vous avez dit : vous n’avez pas donné la bonne date, monsieur le député !
Nous vérifierons le compte rendu. Si j’ai tort…
…nous réglerons cela à la buvette !
Sourires.
Rires.
Cette taxe a donc été créée par la majorité précédente.
Je réitère mon avis de sagesse.
Je vous remercie infiniment, madame la présidente, de me permettre de parler du surpoids.
Sourires.
Je suis assez d’accord avec l’avis de la commission. L’un des problèmes qui se posent, c’est que l’on ne peut pas changer les règles tous les ans. Cette taxe existe déjà : le signal a déjà été donné. Certains de nos collègues disent : « on n’a rien fait ». Si, nous avons déjà fait quelque chose !
Les acteurs économiques, notamment nos industriels, ont besoin de règles stables. C’est pourquoi je suis d’accord avec la commission, qui est défavorable à cet amendement.
« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.
L’amendement no 627 n’est pas adopté.
Je suis saisie d’un amendement no 876 rectifié qui fait l’objet d’un sous-amendement no 962 du Gouvernement.
La parole est à M. Gérard Bapt pour soutenir l’amendement.
Cet amendement vise à poursuivre le mouvement d’harmonisation des règles d’assujettissement social des dirigeants de sociétés qui tend à renforcer l’équité entre cotisants relevant de régimes distincts et à mettre fin à certaines voies d’optimisation empruntées au détriment des finances sociales. En effet, les dispositions adoptées dans les précédentes lois de financement de la Sécurité sociale doivent s’appliquer à l’ensemble des situations pour ne pas encourager des phénomènes d’optimisation.
Cet amendement propose ainsi de compléter le dispositif d’assujettissement social des dirigeants de société, d’une part, en étendant aux dirigeants majoritaires de sociétés anonymes et de sociétés par actions simplifiées affiliées au régime général le dispositif d’assujettissement social des dividendes existant dans les régimes des travailleurs indépendants non agricoles et agricoles, et d’autre part, en étendant à ces dirigeants et aux travailleurs indépendants le même dispositif d’assujettissement social de la quote-part des bénéfices versée aux associés membres de la famille de ces assurés existant dans le régime des non salariés agricoles. Cela permettrait, en effet, d’échapper à la cotisation. Le seuil de 10 % du capital social au-delà duquel ces revenus sont pris en compte au sein des revenus d’activité ne serait pas modifié.
La commission des affaires sociales est favorable à cet amendement.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir le sous-amendement no 962 .
Il s’agit d’un sous-amendement de coordination. Si vous voulez que je vous donne plus de précisions, je le ferai. En tout état de cause, si ce sous-amendement était adopté, le Gouvernement serait favorable à l’amendement de M. Bapt.
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement du Gouvernement ?
Le sous-amendement no 962 est adopté.
L’amendement no 876 rectifié , sous-amendé, est adopté.
Je suis saisie de deux amendements, nos 45 rectifié et 341 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement no 45 rectifié .
Cet amendement a été adopté à l’unanimité par la commission des finances, après un avis de sagesse du rapporteur, qui avait alors indiqué qu’il serait intéressant que ce débat ait lieu dans l’hémicycle. Je tiens à rassurer les députés siégeant sur les bancs de droite : c’est manifestement un amendement de rendement de l’impôt.
Il a été présenté à la commission des finances par nos collègues Philippe Vigier, Charles de Courson et Jean-Christophe Lagarde. Il vise à accomplir un pas de plus dans l’assujettissement aux cotisations de Sécurité sociale et à la CSG des indemnités conventionnelles de rupture, ou des indemnités liées à des modifications du contrat de travail.
Je rappelle que le Parlement a déjà modifié ces dispositions. Depuis deux ans, ces indemnités sont assujetties lorsqu’elles dépassent un montant égal à dix fois le plafond annuel de la Sécurité sociale, c’est-à-dire un peu plus de 375 000 euros. Auparavant, elles étaient assujetties lorsqu’elles dépassaient trente fois ce plafond. Par cet amendement, nos collègues du groupe UDI proposent de les assujettir dès qu’elles dépassent une fois le plafond.
Cet amendement pose plusieurs problèmes, qui ne semblent pas totalement réglés. Le débat mérite néanmoins d’avoir lieu : cela nous permettra de connaître l’avis de M. le ministre sur ce point. Je rappelle que l’assujettissement à la CSG et aux cotisations de Sécurité sociale sont deux sujets différents. S’agissant de la CSG, le droit en vigueur prévoit que ces indemnités sont assujetties pour la fraction qui excède le montant prévu par la convention collective, l’accord professionnel ou interprofessionnel, ou, à défaut, par la loi.
Au passage, monsieur le ministre, je voudrais vous faire remarquer la bizarrerie de ce dispositif : assujettir un revenu à l’impôt en fonction d’un montant déterminé par une convention, cela ne me paraît pas tout à fait conforme au principe d’égalité devant l’impôt – sans doute le Conseil constitutionnel n’a-t-il pas été saisi.
S’agissant des cotisations de Sécurité sociale, ce plafond existe également, avec une exonération égale à deux fois le plafond annuel de la Sécurité sociale. Cela signifie, mes chers collègues, que l’adoption de cet amendement conduirait à un système d’assujettissement pour les montants dépassant le plafond annuel, avec une exonération de cotisations sociales à hauteur de deux fois le plafond.
La commission des finances a adopté cet amendement : ce débat doit avoir lieu dans l’hémicycle. Personnellement, je pense que nous pouvons faire évoluer les choses par rapport au dispositif en vigueur, qui n’assujettit les indemnités qu’au-delà de dix fois le plafond annuel, mais passer de dix fois le plafond à une fois le plafond, cela me paraît une mesure très dure, d’autant qu’il n’y a pas eu d’étude sur l’impact de cette modification sur les indemnités conventionnelles.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 341 rectifié .
J’avais déposé un amendement no 340 rectifié , quasi identique à l’amendement no 45 de la commission des finances, que j’ai retiré avant discussion, car il a été défendu par M. le rapporteur pour avis. Il l’a défendu plutôt mollement,…
Sourires
La défense n’a pas été formidable.
L’amendement no 341 rectifié est un amendement de repli qui propose de taxer dès le premier euro les parachutes dorés des mandataires sociaux.
Il s’agit des golden parachutes, si vous préférez. Ces indemnités sont actuellement assujetties aux cotisations sociales seulement lorsqu’elles sont supérieures à 380 400 euros. Cet amendement propose de les assujettir dès qu’elles dépassent le seuil. Il nous paraît assez curieux que les golden parachutes ne soient pas assujettis aux charges sociales dès le premier euro, quel que soit le montant versé.
C’est à cause de ce genre de mesure que l’on délocalise les sièges sociaux !
Contrairement à la commission des finances, la commission des affaires sociales a rejeté cet amendement. Tout d’abord, comme l’a bien expliqué le rapporteur pour avis de la commission des finances, sa rédaction pose problème car les indemnités sont exonérées de cotisations jusqu’à deux fois le plafond de la Sécurité sociale.
Sur le fond, il nous a semblé que le dispositif proposé était éloigné du sujet des parachutes dorés. En effet, il pourrait toucher des personnes percevant des salaires inférieurs au salaire médian mais qui, en raison de leur ancienneté dans l’entreprise, obtiennent une indemnité de licenciement parfois supérieure à 37 000 euros. C’était notamment le cas de salariés en lutte pour la conservation de leur emploi dans certaines entreprises qui ont défrayé la chronique. Ils ont obtenu des indemnités de licenciement pouvant dépasser 37 000 euros.
Il ne serait pas équitable de taxer ce genre de parachutes dorés qui n’en sont pas : ce sont des indemnités de licenciement dont le niveau résulte de l’ancienneté. La commission a donc rejeté l’amendement présenté par la commission des finances.
Quant à l’amendement no 341 rectifié de M. Vercamer, le dispositif proposé était loin du sujet des parachutes dorés car il propose d’assujettir toutes les indemnités de rupture aux cotisations, y compris les indemnités modiques. La commission a aussi repoussé cet amendement.
En l’état actuel de leur rédaction, le Gouvernement n’est pas favorable à ces amendements, même s’il partage une préoccupation : dix fois le plafond de la Sécurité sociale, cela représente quand même 380 000 euros ! Cela fait des sous, comme on dit chez nous ! Ceci dit, une fois le plafond équivaut à 38 000 euros. Cela fait aussi des sous, mais beaucoup moins. S’agissant d’indemnités de rupture pour des salariés qui ont parfois occupé un poste de travail pendant de nombreuses années, cela me semble peu.
Je m’exprime à titre personnel – ce qui est rare – en faveur d’un seuil intermédiaire. Il me semblait que 150 000 euros…
Non, je n’ai pas l’intention de le sous-amender à ce stade. Il me semblait que la somme de 150 000 euros pouvait être à peu près raisonnable mais, à ce stade, je suis défavorable aux amendements. Nous pourrons y revenir ultérieurement.
Nous le voyons bien, nous sommes, avec cet amendement, en pleine improvisation. D’un côté, cet amendement pourrait toucher des travailleurs modestes …
Ce n’est pas un amendement du Gouvernement !
Nous pouvons être contre des amendements qui viennent de notre camp, nous ne sommes pas sectaires, nous !
Vous portez de drôles de jugements sur vos collègues !
Il s’agit bien d’improvisation, puisque le rapporteur et vous-même avez admis que cette disposition pouvait toucher des salariés bénéficiant d’émoluments normaux et d’indemnités dont le niveau dépend de leur ancienneté. De plus, ce type d’amendement est juste ce qu’il faut pour achever de perdre tous les sièges sociaux dont nous disposons encore dans notre pays. Quand les sièges sociaux sont partis, les décisions économiques se font ailleurs.
Entre le seuil de 380 000 euros et celui de 38 000 euros, il y a une marge dans laquelle se trouve un certain nombre d’entreprises, qui ne sont pas forcément les plus grosses. Cela peut concerner également les PME. Nous devrions effectivement faire en sorte que, en cas de ruptures de contrat, le plus souvent en raison d’un licenciement, soient privilégiés les fonds orientés vers la revitalisation des territoires. Cela intéresse tout le monde, aussi bien les entreprises que les salariés – quand ils sont représentés collectivement – et les collectivités territoriales.
En revanche, en cas de licenciement, chaque salarié retrouve au sein de l’entreprise un comportement individuel et essaie de négocier des indemnités de rupture assez importantes. À chaque fois, cela se fait au détriment de fonds destinés à la revitalisation des territoires et aux formations des salariés sur nos territoires. Il est important de trouver un moyen de favoriser l’accès aux fonds et leur orientation vers des dispositifs collectifs. Soumettre des indemnités à des cotisations peut être pertinent, mais il faut fixer un autre seuil. Cela mérite une discussion plus large que le présent débat.
J’ai l’impression que M. Vercamer et M. Accoyer ont confondu deux sujets très différents. Je rappelle qu’un membre du groupe UDI avait retiré en commission des finances son amendement sur les retraites chapeaux, à mon grand regret car, je l’avais dit, un amendement de l’UDI aurait pour une fois été voté conjointement par M. Emmanuelli, M. Cherki et M. Sansu !
Sourires.
Monsieur Accoyer, l’on parle ici, non pas des mandataires sociaux, mais des indemnités conventionnelles de licenciement. C’est vrai, j’avais indiqué en commission des finances que, au-delà du problème relatif aux exonérations, c’était une mesure extrêmement dure. Il aurait été probablement intéressant de trouver un seuil intermédiaire, car le plafond de 375 000 euros est effectivement extrêmement élevé.
Dans certains cas, ces indemnités de licenciement correspondent à vingt ou trente années de salaire et traduisent des conditions de licenciement difficiles. Aussi, j’appelle l’hémicycle à la sagesse sur le sujet, comme je l’avais fait en commission des finances, et l’on me reproche maintenant de le présenter au nom de la commission des finances avec autant de sagesse que je l’avais fait alors. Il a été adopté pour que nous puissions en débattre dans l’hémicycle. On a entendu la position du Gouvernement. En l’état, il n’est pas adoptable s’il n’est pas sous-amendé. S’il devait être sous-amendé, il serait difficile d’établir un seuil inférieur à cinq fois le plafond de la Sécurité sociale, ce qui représente 170 000 euros.
Les amendements nos 45 rectifié et 341 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 23 octobre 2014, à une heure dix.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly