Commission des affaires sociales

Réunion du 16 octobre 2012 à 16h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 16 octobre 2012

La séance est ouverte à seize heures trente.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission examine, sur le rapport de MM. Gérard Bapt, Christian Paul, Mme Martine Pinville, M. Michel Issindou et Mme Geneviève Levy, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 (n° 287).

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Nous entamons donc l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), qui est l'un des grands rendez-vous annuels de notre commission. Les ministres ont consacré trois heures à nous éclairer la semaine dernière ; nous en venons donc sans plus attendre à la discussion des articles.

PREMIÈRE PARTIE DISPOSITIONS RELATIVES À L'EXERCICE 2011

Article 1er : Approbation des tableaux d'équilibre relatifs à l'exercice 2011

La Commission adopte l'article 1er sans modification.

Article 2 : Approbation du rapport figurant en annexe A, retraçant la situation patrimoniale des régimes et organismes de sécurité sociale et décrivant les modalités de couverture du déficit constaté de l'exercice 2011

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 204, AS 205, AS 206 et AS 207 de M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, puis l'article 2 modifié.

Elle adopte ensuite la première partie du projet de loi.

DEUXIÈME PARTIE DISPOSITIONS RELATIVES À L'EXERCICE 2012

Section 1 Dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre financier de la sécurité sociale

Article 3 : Clarification des impositions et taxes affectées à l'État et à la sécurité sociale

La Commission adopte successivement l'amendement de précision AS 208, l'amendement de conséquence AS 210 et l'amendement de précision AS 209 de M. Gérard Bapt, rapporteur, puis l'article 3 modifié.

Article 4 : Prélèvement exceptionnel au profit de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales

La Commission adopte l'article 4 sans modification.

Article 5 : Rectification des prévisions de recettes et des tableaux d'équilibre pour 2012

La Commission est saisie de l'amendement AS 104 de M. Francis Vercamer.

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Cet amendement vise à affecter à la branche famille de la sécurité sociale les 470 millions d'euros attendus de la réforme du quotient familial. La semaine dernière, j'ai interrogé les ministres sur le coût et le financement des garderies périscolaires qui devront être créées dans le cadre de la réforme de l'école. Je n'ai pas eu de réponse, et je crains que ce financement ne soit à la charge des communes.

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Quel que puisse être le bien-fondé de cet amendement, il n'est pas possible d'affecter une recette du budget de l'État à la branche famille. J'appelle donc la Commission à le rejeter.

La Commission rejette l'amendement AS 104.

Elle adopte ensuite l'article 5 sans modification.

Article 6 : Objectif d'amortissement rectifié de la Caisse d'amortissement de la dette sociale et prévisions de recettes rectifiées affectées au Fonds de réserve pour les retraites et mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse

La Commission adopte l'article 6 sans modification.

Section 2 Dispositions relatives aux dépenses

Article 7 : Déchéance des crédits du Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins et du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés

La Commission adopte l'article 7 sans modification.

Article 8 : Rationalisation des modalités de prise en charge par l'État, au titre de la gestion des prestations servies pour son compte, des pertes sur créances d'indus enregistrées par les organismes de sécurité sociale

La Commission adopte l'amendement rédactionnel AS 211 de M. Gérard Bapt, rapporteur, puis elle adopte l'article 8 modifié.

Article 9 : Prévisions rectifiées des objectifs de dépenses par branche

La Commission adopte l'article 9 sans modification.

Article 10 : Rectification du montant et de la ventilation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2012

La Commission adopte l'article 10 sans modification.

Elle adopte ensuite la deuxième partie du projet de loi.

TROISIÈME PARTIE DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR 2013

Section 1 Dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement

Article 11 : Alignement des prélèvements sociaux à la charge des travailleurs non salariés non agricoles

La Commission est saisie des amendements AS 32 de Mme Bérengère Poletti et AS 49 de M. Dominique Tian de suppression de l'article.

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Nous proposons de supprimer l'article 11, qui prévoit une hausse des cotisations sociales des commerçants, artisans et professions libérales. Nous l'avons dit la semaine dernière devant le ministre délégué au budget, celle-ci est particulièrement dommageable pour ces gens qui travaillent et créent des emplois. Depuis 2007, la progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) est votée en dessous de 3 % et est strictement respectée ; le déficit de la branche maladie est revenu de 11,6 milliards d'euros en 2010 à 5,5 milliards en 2012 ; nous sommes donc dans une dynamique de redressement. Selon le ministre délégué au budget, il y aura des gagnants du fait de cet article – de l'ordre de 400 000 personnes. Pour ma part, je sais qu'il y aura plus de 800 000 perdants !

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L'article 11 vise à remédier aux difficultés du Régime social des indépendants (RSI), qui présente plusieurs défauts. Tout d'abord, l'effort contributif est très inégalement réparti : les assurés sociaux qui perçoivent plus de 180 000 euros par an ne payent pas de cotisations au-dessus de ce plafond. Ensuite, le niveau des contributions en vigueur dans le régime est inférieur à celui des autres régimes. De plus, les commerçants et artisans dénoncent la concurrence déloyale du régime des auto-entrepreneurs. Enfin, le conseil d'administration du RSI a approuvé cet article. Il y aura en effet 486 000 gagnants, puisque la cotisation minimale sera diminuée. Ce nombre est bien supérieur à celui des assurés que le déplafonnement contraindra à cotiser davantage.

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Le RSI est un régime nouveau, qui connaît des difficultés, notamment du fait de l'affiliation des auto-entrepreneurs. Il était donc temps de réagir si nous voulions sauver le régime, ce que son conseil d'administration a parfaitement compris. Cela se fera en fonction des capacités contributives de chacun.

Vous écrivez dans votre exposé des motifs que « le Gouvernement préfère augmenter les impôts pour tous les Français plutôt que de baisser les dépenses publiques improductives ». Faut-il vous rappeler que vous avez considérablement augmenté les impôts et taxes lorsque vous étiez au pouvoir ? Nous n'avons rien contre les artisans et les commerçants, mais il est juste qu'ils contribuent comme les autres à l'effort collectif.

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Les commerçants, artisans et professions libérales travaillent beaucoup et sont très présents dans nos territoires ruraux. Ne pas appeler leurs cotisations maladie au-delà de cinq fois le plafond de la sécurité sociale me paraît une juste reconnaissance du temps et de l'énergie qu'ils consacrent à leur métier.

D'autant plus que les calculs de cotisations sont particulièrement délicats dans ce régime : les appels de cotisations s'effectuent en année n sur les bases de n-2, avec une régularisation en n+1 en fonction des revenus réels de l'année n. Je crains donc que ces modifications n'entraînent d'importantes difficultés pour les assurés.

Enfin, vous supprimez la déduction de 10 % pour frais professionnels pour les gérants majoritaires, au motif que ces frais professionnels sont pris en charge par les sociétés. Mais cela n'est pas toujours le cas. Lorsqu'il y a plusieurs gérants, par exemple, chacun assume personnellement ses charges. Vous introduisez donc une inégalité.

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Ainsi, l'un de vos premiers amendements sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale tend à refuser un prélèvement qui s'applique à des revenus annuels supérieurs à 180 000 euros ! Pour nous, redressement va de pair avec justice. Il faut faire un exercice nouveau pour entrer dans la logique de ce projet de loi, monsieur Door : les ressources et les économies nouvelles financent les dépenses nouvelles qui sont nécessaires à la santé des Français et permettent de stopper la dégradation des comptes de l'assurance maladie et de notre protection collective.

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Le Gouvernement a indiqué récemment qu'il souhaitait faire évoluer le régime de l'auto-entrepreneur. Peut-on connaître ses intentions ?

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Ce sujet ne relève pas du projet de loi de financement ; il me semble, de plus, relever davantage de la compétence de la Commission des affaires économiques.

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Le RSI connaît des difficultés de gestion que ses responsables ont évoquées à plusieurs reprises devant notre Commission, à telle enseigne que le régime a pu être contesté par les artisans et les commerçants. C'est sans doute cela qui explique le vote de son conseil d'administration.

Cette hausse des cotisations des artisans et commerçants vient s'ajouter à la suppression des exonérations de charges sociales sur les heures supplémentaires de leurs employés. Vous nous dites que les assurés dont les revenus annuels sont inférieurs à 180 000 euros par an seront moins taxés que les autres : êtes-vous certain que ces différences de prélèvements n'entraînent pas un risque d'inconstitutionnalité ?

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Nous avons auditionné deux fois les responsables du RSI. Ce régime a été géré de façon approximative – pour ne pas dire avec un certain amateurisme –, et il y a eu des contentieux entre les gestionnaires et les assurés. Je ne voterai donc pas cette hausse des cotisations que la plupart des artisans et des commerçants ne sont pas en état de supporter.

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Certes, il faut faire des économies, mais cet article envoie un très mauvais signal à l'adresse des artisans et des commerçants de notre pays, qui sont déjà en proie à de grandes difficultés. Je pense en particulier aux artisans du bâtiment. Or, non seulement ces personnes travaillent énormément, mais elles s'efforcent d'embaucher et de former des jeunes, notamment dans les métiers manuels – que nous avons le devoir de revaloriser.

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Le seuil de 180 000 euros annuels conduit à toucher principalement les gros cabinets d'avocats, d'experts comptables ou de consultants. Les commerçants et artisans seront très peu concernés par ce déplafonnement qui ne concernera que 80 000 assurés. Convenez tout de même qu'il n'était pas équitable de voir disparaître toute cotisation au-delà de 180 000 euros de revenus annuels !

Parmi les 486 000 gagnants de la réforme figurent une majorité de commerçants et d'artisans, qui verront diminuer leurs cotisations minimales.

Quant aux heures supplémentaires, je vous rappelle, madame Louwagie que l'exonération n'a pas été supprimée pour les entreprises de moins de 20 salariés.

Le déficit de la branche maladie du RSI s'élève à 1,1 milliard d'euros, monsieur Door, et il est actuellement compensé par les autres régimes de sécurité sociale. Un amendement ultérieur vous proposera une recette supplémentaire pour tenter de le combler. Quoi qu'il en soit, il est de bonne pratique de réduire les disparités existantes aussi bien au sein du régime qu'entre celui-ci et le régime général.

La Commission rejette les amendements de suppression de l'article AS 32 et AS 49.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AS 50 de M. Dominique Tian.

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La grande majorité des entreprises françaises du secteur marchand non agricole sont dirigées par des chefs d'entreprise non salariés, les travailleurs indépendants. En proposant de réintégrer dans l'assiette des cotisations sociales les dividendes versés dépassant 10 % des capitaux propres, vous faites un amalgame entre les revenus du capital et ceux du travail. Les dividendes sont d'une autre nature que les revenus du travail : ce sont des revenus du capital, qui sont d'ailleurs imposés comme tels. Il convient de maintenir cette distinction.

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On ne peut parler de revenus du capital, puisqu'il s'agit ici pour l'entreprise de contourner la distribution de revenus du travail en distribuant les bénéfices par le biais des dividendes. La fiscalité sur les dividendes est en effet inférieure aux cotisations sur le salaire déclaré du gérant.

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Lorsqu'on est comme moi un professionnel libéral, ou encore un artisan ou un commerçant, et qu'on exerce dans une structure de ce type, le choix du mode de rémunération prend en considération la fiscalité. Il s'agit cependant bien de la rémunération d'un travail, et non d'un capital. À cet égard, la disposition proposée à l'article 11 est particulièrement pertinente.

L'exposé des motifs de l'amendement évoque la « confusion » partielle ou totale entre le patrimoine personnel des dirigeants indépendants et celui de l'entreprise. S'agissant des sociétés anonymes à responsabilité limitée (SARL) et des sociétés anonymes (SA), on est là dans l'abus de bien social. Comment peut-on justifier un amendement par une pratique délictueuse ?

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Comment pouvez-vous dire cela ? Ceux qui connaissent la réalité de l'entreprise personnelle et familiale savent que des apports personnels peuvent être faits, par exemple en cas de problème de trésorerie. De grâce, mesurez vos propos !

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La confusion de patrimoine est une cause d'extension d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire.

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Mettons-nous donc d'accord en qualifiant ces pratiques d'optimisation fiscale. Nous vous proposons simplement de limiter celle-ci.

La Commission rejette l'amendement AS 50.

Elle rejette ensuite l'amendement AS 52 de M. Dominique Tian.

Puis elle est saisie des amendements identiques AS 33 de Mme Bérengère Poletti et AS 51 de M. Dominique Tian.

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Nous souhaitons supprimer l'alinéa 5 de l'article 11, qui porte atteinte au statut d'auto-entrepreneur, dont chacun connaît le succès. Ce statut présente un double intérêt. Il permet aux entrepreneurs de développer leurs projets sans risque : si l'auto-entreprise se développe, elle peut dépasser le plafond de chiffre d'affaires et s'intégrer plus facilement dans le droit commun. Il permet aussi à de nombreuses personnes, par exemple les retraités ou les étudiants, de bénéficier d'un revenu complémentaire. Plusieurs aménagements y ont été apportés, notamment par la loi de financement pour 2012. En alignant ses cotisations sur le régime de droit commun, le Gouvernement tue le régime de l'auto-entreprise.

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Le statut d'auto-entrepreneur, qui a permis de créer des emplois et des entreprises, a donc aussi procuré des rentrées de cotisations. Y porter atteinte constitue un mauvais signal.

Beaucoup d'artisans, du bâtiment notamment, qui connaissent mal le dispositif, considèrent que les auto-entrepreneurs leur font une concurrence déloyale. S'il y a des problèmes, il faut y remédier, mais certainement pas en portant un mauvais coup à ce statut comme vous le faites en augmentant les cotisations.

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En réalité, la baisse du nombre de créations d'entreprises de droit commun a été compensée par la hausse des créations d'auto-entreprises – depuis 2009, de 40 000 à 50 000 seraient créées chaque mois. C'est dire l'effet de substitution ! Mais qu'est-ce qui se cache derrière ces pseudo-entreprises ? Souvent des petits boulots exercés par des retraités, dont la retraite est insuffisante pour vivre décemment, ou des étudiants, alors que ceux-ci devraient pouvoir étudier sans avoir besoin de travailler parallèlement ! Mais j'ai aussi connu dans ma ville un fonctionnaire qui avait développé une auto-entreprise avec sa femme, et qui était de surcroît sapeur-pompier. Est-il juste qu'une personne puisse ainsi cumuler trois revenus alors qu'à côté, des entreprises déposent leur bilan ?

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Le statut d'auto-entrepreneur visait aussi à lutter contre le travail au noir. Des personnes ayant des compétences en matière par exemple de maçonnerie, peinture, couture, jardinage, ont ainsi pu, en toute légalité, se procurer un petit revenu supplémentaire. Avec votre mesure, vous les condamnez à dissimuler de nouveau. Un retraité de 60 ans est tout à fait apte à travailler encore. Il n'est pas anormal qu'il puisse compléter sa pension. Et mieux vaut qu'il soit auto-entrepreneur que travailleur au noir ! Cet amendement est donc tout à fait justifié.

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Chers collègues de l'opposition, vous manquez de cohérence. Vous invoquiez tout à l'heure la défense des entreprises du bâtiment, alors qu'elles n'étaient pas concernées. Leur sort semble vous importer moins lorsque l'une de leurs revendications est d'être mieux protégées de la concurrence déloyale des auto-entrepreneurs ! S'il y a quelque chose de positif à retenir dans ce statut, c'est la simplification des démarches et le différé du règlement des cotisations. Pour le reste, il est normal d'aligner les taux de cotisation.

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Avec un chiffre d'affaires annuel limité à 32 600 euros dans les prestations de services et à 81 500 euros dans les activités d'achat et de vente, il ne peut s'agir que d'activités complémentaires, d'ailleurs souvent exercées par des fonctionnaires, des enseignants, des étudiants, des retraités, bref des personnes qui ont du temps libre et préfèrent travailler ainsi de façon déclarée plutôt qu'au noir. Vous commettez une grave erreur car vous allez favoriser le développement du travail au noir. Et vous touchez des personnes modestes.

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L'auto-entreprise ne doit pas être considérée comme une concurrente de l'entreprise de droit commun, mais un tremplin vers elle. C'est aussi, beaucoup l'ont dit, un moyen efficace de lutter contre le travail au noir.

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Ce statut est aussi parfois le seul moyen pour certains de nos concitoyens qui ont perdu leur emploi d'en retrouver un grâce à leur savoir-faire. Or, que je sache, les chiffres du chômage ne s'améliorent pas dans notre pays, loin de là. Vous commettez donc une faute sociale en réduisant l'intérêt de ce statut.

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Monsieur Paul, le secteur du bâtiment n'est pas celui dans lequel on trouve le plus d'auto-entreprises. Lorsque se posent des problèmes de concurrence, et je reconnais qu'il s'en pose dans le bâtiment, il faut y remédier, mais n'allez pas, sous ce prétexte, remettre en question toutes les auto-entreprises, lesquelles créent de l'emploi – je pense en particulier au secteur informatique. Et comme l'ont dit mes collègues, ce statut contribue à réduire le travail dissimulé.

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Le chômage, hélas, continue d'augmenter dans notre pays et les perspectives sont sombres. La disposition proposée est donc particulièrement inopportune. Le statut d'auto-entrepreneur peut constituer une solution pour certains chômeurs qui, au-delà de la cinquantaine, n'ont que peu de chances de retrouver un emploi. Sous ce statut, ils peuvent exercer quantité de petits métiers que plus personne ne veut exercer – laveur de vitres, dépanneur de petit matériel. En même temps que cela leur procure un supplément de revenu, ils y trouvent le moyen de se sentir de nouveau utiles à la société.

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Il faudrait dresser un bilan précis du développement des auto-entreprises car tout n'a pas été positif. Les représentants du Régime social des indépendants (RSI) nous ont expliqué que les auto-entrepreneurs constituaient plutôt une charge pour leur régime : ils y acquièrent en effet des droits alors qu'ils ne cotisent pas ou très peu. Il ne semble pas scandaleux qu'ils contribuent, comme les autres, à proportion de leurs revenus. Et ne nous dites pas que cela tuera ce statut !

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À entendre nos collègues de l'UMP, nous voudrions faire disparaître ce statut. C'est un mensonge, comme c'en était un de prétendre que nous voulions supprimer les heures supplémentaires lorsque nous avons décidé de les soumettre à cotisations sociales et à impôt dans les conditions de droit commun. Dans les deux cas, nous n'avons fait que corriger des anomalies que la situation dramatique des finances publiques de notre pays rend inacceptables. N'ayez crainte, il y aura encore demain des auto-entrepreneurs dans notre pays, comme il y a toujours des salariés qui font des heures supplémentaires.

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Cet article ne tue pas en soi le statut d'auto-entrepreneur mais il y conduira en lui faisant perdre tout intérêt. Dans ma ville, un professeur de musique, sollicité par diverses structures pour donner des cours, a pu répondre à la demande en créant son auto-entreprise sans avoir à payer trop de cotisations. Voilà ce qui demain ne sera plus possible, en tout cas n'aura plus d'intérêt ! Très vite, dans quelques mois seulement peut-être, le nombre d'auto-entreprises va s'effondrer.

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Cet article ne touche pas au régime de l'auto-entrepreneur. Je ne peux d'ailleurs pas répondre à la place du Gouvernement sur une éventuelle évolution de ce statut : une mission a été confiée sur le sujet à Mme Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme, suite aux vives protestations du monde de l'artisanat qui se plaint d'une concurrence déloyale. Cet article vise seulement à ce que les auto-entrepreneurs contribuent comme les autres, ni plus ni moins, au financement de leur protection sociale : comme ils paient moins aujourd'hui, ce sont les autres commerçants, artisans et indépendants qui paient pour eux !

Nous ne nions pas l'intérêt de ce statut, notamment pour favoriser le retour à une activité ou à un emploi – j'aurais d'ailleurs mieux compris vos amendements si vous aviez en même temps proposé une limitation de ce statut dans le temps. Mais lorsque nous voyons des cadres supérieurs ou des membres de la fonction publique se lancer, en sus de leur activité principale, dans une activité sous le régime de l'auto-entreprise, nous pensons qu'ils peuvent cotiser comme les autres. En tout cas, les dispositions proposées sont très attendues des artisans.

La Commission rejette les amendements AS 33 et AS 51.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS 212 de M. Gérard Bapt, rapporteur.

Elle examine ensuite l'amendement AS 105 de M. Arnaud Richard.

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Supprimer l'exonération de charges dont bénéficient les auto-entrepreneurs si leur chiffre d'affaires est nul reviendrait à casser un statut qui permettait à des personnes de prendre des risques pour se sortir du chômage. D'où notre proposition de supprimer l'alinéa 17.

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Cet alinéa fixe précisément les plafonds en dessous desquels l'auto-entrepreneur bénéficie de dispositions plus favorables. Le supprimer irait à l'encontre de votre objectif.

L'amendement AS 105 est retiré.

La Commission adopte successivement l'amendement rédactionnel AS 213, l'amendement de coordination AS 214 et l'amendement rédactionnel AS 215 de M. Gérard Bapt, rapporteur.

Elle examine ensuite l'amendement AS 203 de M. Gérard Bapt, rapporteur.

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Cet amendement remédie à une anomalie source d'inéquité. Par cohérence avec le déplafonnement de la cotisation d'assurance maladie des travailleurs indépendants, nous proposons de déplafonner celle sur les revenus d'activité et de remplacement perçus sur les revenus étrangers de personnes qui relèvent à titre obligatoire d'un régime français d'assurance maladie. Il s'agit d'harmoniser le taux de cotisation de tous les ressortissants d'un régime français, quel que soit le lieu d'origine de leurs revenus.

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Quelles sont les personnes réellement visées ? Quel type de métiers ou fonctions exercent-elles ? Je m'en inquiète quand on sait par ailleurs que le Gouvernement s'apprête à supprimer la liberté de choix de leur régime d'assurance maladie pour certains de nos compatriotes qui travaillent à l'étranger.

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Ce n'est pas de cela dont il est question ici. Seraient concernés des résidents percevant des revenus d'une activité à l'étranger. Pourquoi ne cotiseraient-ils pas comme les autres ? Permettez-moi de vous faire observer qu'il s'agit d'un amendement proposé en 2009 par la majorité de l'époque, qui avait été accepté à l'Assemblée nationale, avant d'être repoussé au Sénat.

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Cela concernerait-il aussi les revenus perçus à l'étranger ?

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Il s'agit seulement d'harmoniser les taux de cotisation de tous nos ressortissants. Je ne peux pas vous indiquer le rendement de la mesure.

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Comment allez-vous connaître les revenus perçus par nos compatriotes à l'étranger ? Par ailleurs, lorsqu'on travaille en Afrique, on paie ses impôts et ses cotisations en Afrique.

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Nous souhaitons seulement que des personnes résidant en France s'acquittent, dans les mêmes conditions que les nationaux, de leurs cotisations sur d'éventuelles activités qu'elles auraient exercées à l'étranger.

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En Moselle, beaucoup de gens travaillent au Luxembourg, où l'impôt est prélevé à la source. Que va-t-il se passer pour eux ?

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Il ne s'agit pas d'impôts, mais de cotisations sociales. Si les personnes que vous évoquez perçoivent également des revenus en France, elles doivent s'acquitter de cotisations en France.

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Ne pénalisez pas nos compatriotes expatriés, qui méritent au contraire tous nos égards. Ils contribuent au rayonnement de notre langue et de notre culture à l'étranger, mais aussi à notre économie en nous faisant gagner des marchés à l'exportation.

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Un avocat installé à Paris peut avoir une grosse activité à Londres. Il est normal qu'il paie ses cotisations sociales dans les mêmes conditions sur ses deux activités.

Je demanderai au Gouvernement des chiffres précis sur le rendement attendu de la mesure. Nous pourrons en reparler en séance.

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Ce serait bienvenu pour que nous puissions nous prononcer en toute connaissance de cause. Pour le dire sans détour, à qui pensez-vous ?

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Je pense aux finances sociales, au déficit public et à la dette de notre pays. Pourquoi certains verraient-ils leurs cotisations plafonnées alors que pour tous les autres, celles-ci sont déplafonnées ? C'est une question de principe.

La Commission adopte l'amendement AS 203.

Puis elle adopte l'article 11 modifié.

Après l'article 11

La Commission est saisie de l'amendement AS 139 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Nous proposons plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 11. Tous visent à donner des moyens supplémentaires à notre protection sociale, à empêcher certains excès inadmissibles et à corriger des inégalités flagrantes.

L'amendement AS 139 tend à assujettir les personnes morales à la contribution sociale sur les produits de placement, dont ne n'acquittent aujourd'hui que les personnes physiques. Le taux serait égal à celui de la CSG sur les revenus d'activité, additionné aux cotisations sociales assises sur les salaires. Les produits d'épargne comme les livrets d'épargne populaire, les livrets A, les livrets bleus, les comptes et plans d'épargne logement seraient exonérés.

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Je comprends l'intention de Jacqueline Fraysse : lutter contre les déficits et alléger pour l'avenir la charge de la dette. Néanmoins, le Haut Conseil du financement de la protection sociale mène actuellement une réflexion sur le sujet et un débat a été ouvert sur la compétitivité. Je propose à la Commission de rejeter, à ce stade, cet amendement.

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La piste proposée par Jacqueline Fraysse est intéressante. Si je comprends bien le rapporteur, il s'agit non pas d'évacuer le débat sur l'élargissement de l'assiette des cotisations aux personnes morales, mais de le renvoyer à une discussion plus générale.

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Deux débats ont, je le répète, été lancés : l'un par le Premier ministre au sein du Haut Conseil du financement de la protection sociale, l'autre sur la compétitivité. En outre, ce projet de loi de financement comporte de nombreuses mesures tendant à mettre davantage à contribution les revenus du capital par rapport à ceux du travail. Elles pourront être complétées à l'issue des débats que j'ai évoqués. Cet amendement me paraît donc prématuré.

La Commission rejette l'amendement AS 139.

Elle en vient à l'amendement AS 136 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Cet amendement procède de la même préoccupation que le précédent : dégager des moyens et dissuader certains excès. Actuellement, dans le cadre des régimes de retraite à prestations définies – retraites chapeaux –, une contribution additionnelle de 30 % à la charge de l'employeur est exigible sur les rentes excédant huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit 288 000 euros par an, ce qui est exorbitant. Nous proposons que la contribution soit prélevée dès que les rentes excèdent trois fois le plafond de la sécurité sociale, soit 108 000 euros an. C'est une mesure d'équité.

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Cette contribution additionnelle s'ajouterait à celle dont s'acquittent déjà les employeurs sur les retraites chapeaux et qui a été portée, sur notre initiative, à 32 %. Cela ferait une contribution totale de 62 %, qui apparaît élevée, y compris au regard des plafonds que vous indiquez. Avis défavorable.

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S'agissant de tels montants de rémunération, ce taux ne me choque pas.

La Commission rejette l'amendement AS 136.

Elle examine l'amendement AS 140 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Il s'agit de créer une nouvelle contribution s'appliquant à l'ensemble des rémunérations, indemnités et avantages visés aux articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du code de commerce, c'est-à-dire aux contrats instaurant des rémunérations différées au bénéfice des mandataires des sociétés cotées, qui sont soumis, depuis 2005, au régime des conventions réglementées. Nous proposons d'en fixer le taux à 30 %. Sont concernées, là encore, des rémunérations très élevées. Cette mesure équitable, source de recettes, vise également à dissuader les excès.

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Il s'agit des « parachutes dorés », sur lesquels nous avons déjà considérablement accru les prélèvements. Même remarque que sur l'amendement précédent. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement AS 140.

Elle est saisie de l'amendement AS 147 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Les opérateurs de marchés financiers, couramment appelés « traders », perçoivent une part de rémunération fixe, sur laquelle sont prélevées des cotisations sociales. Cependant, ils perçoivent également une part de rémunération variable non soumise à cotisations. Cette part variable peut être très importante et représenter jusqu'à dix fois la part fixe. Nous proposons de mettre à contribution les traders sur cette part variable, dès qu'elle excède le plafond annuel de la sécurité sociale, soit 36 000 euros par an.

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Les bonus accordés aux traders sont déjà concernés, d'une part, par les prélèvements sociaux supplémentaires instaurés récemment et, d'autre part, par les mesures fiscales contenues dans le projet de loi de finances en cours d'examen. Avis défavorable.

Néanmoins, je connais l'obstination de Jacqueline Fraysse : nous en reparlerons.

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Nous comprenons la logique exposée par le rapporteur. Cependant, il est bien question de salaires. Or, même si des mesures fiscales supplémentaires ont été décidées par ailleurs, il semble logique que tout salaire, quelles qu'en soient l'origine et la forme, soit appelé à contribuer au financement des régimes sociaux. C'est d'autant plus vrai du salaire des traders, même s'il ne s'agit pas de les stigmatiser. Le groupe écologiste soutient cet amendement.

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Mon obstination ne concerne pas les traders en tant que profession, mais les rémunérations excessives, que nous devrions ensemble limiter, voire supprimer.

Je suis heureuse des propos de Christophe Cavard : toutes les rémunérations devraient contribuer au financement de la protection sociale, à plus forte raison celles qui sont très élevées.

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Lorsque je parle d'obstination, je reconnais une qualité, qui devrait d'ailleurs être davantage cultivée en politique.

Ces revenus sont assujettis à la CSG, aux prélèvements sociaux et au forfait social. Ils seront en outre soumis à un impôt sur le revenu plus progressif. La mesure proposée est intéressante, mais superfétatoire dans la phase actuelle.

La Commission rejette l'amendement AS 147.

Elle examine l'amendement AS 142 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Nous déposons souvent cet amendement, qui tend à supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires. D'une part, il n'est, hélas, pas démontré que ces exonérations limitent le chômage. D'autre part, elles tirent l'ensemble des salaires vers le bas. Cette suppression permettrait de dégager des moyens, sinon pour le financement de la protection sociale, du moins pour le budget de l'État.

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Les exonérations générales de cotisations sociales patronales n'empêchent pas, il est vrai, la montée du chômage. En revanche, toutes les études montrent que leur suppression détruirait des emplois et serait dissuasive pour l'embauche dans un certain nombre de secteurs, notamment de services.

Ce débat renvoie plus généralement au problème du financement de la protection sociale. Des propositions devraient être faites en la matière dans les mois qui viennent.

Avis défavorable.

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L'obstination positive de Jacqueline Fraysse mérite d'être saluée. Dans le cadre d'une mission d'information présidée par Gérard Bapt, au cours de la précédente législature, nous avions essayé de mesurer l'impact de ces allégements. Nous avons constaté de nombreux effets d'aubaine : si ces exonérations pouvaient avoir du sens dans le cas d'entreprises tentées de délocaliser pour réduire leurs coûts, elles n'en avaient guère pour les entreprises de nettoyage ou de la grande distribution.

Pour autant, les enjeux sont considérables : le montant de ces exonérations s'établit aujourd'hui à 20 milliards d'euros, qui manquent au budget de l'État. Nous pourrions envisager des solutions intermédiaires, les exonérations s'appliquant de manière dégressive entre 1 et 1,6 SMIC. Il faudra revoir le dispositif dans son ensemble au cours de cette législature. Mais il n'apparaît pas opportun de procéder, au détour de l'examen de ce projet de loi de financement, à une suppression pure et simple de ces exonérations, qui serait lourde de conséquences.

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Lorsque ces allégements de charges ne sont pas conditionnés à des créations d'emplois, leur efficacité est très faible au regard de leur coût. Tel était le cas des premiers allégements instaurés par le gouvernement Balladur et étendus par le gouvernement Juppé. À l'inverse, lors du passage aux 35 heures, ces exonérations avaient une contrepartie claire et les créations d'emplois ont été au rendez-vous. La suppression de cette contrepartie en 2002 a eu des effets opposés.

Une nouvelle contrepartie sera instaurée dans le cadre des contrats de génération : dans les entreprises de plus de 300 salariés, le maintien des exonérations sera conditionné à l'embauche de jeunes en contrat à durée indéterminée et au maintien dans l'emploi de salariés seniors pendant trois ans. Les implications seront massives : il s'agit de conclure 500 000 contrats dont la moitié dans les entreprises de plus de 300 salariés. Mais nous ne sommes pas favorables, à ce stade, à une suppression pure et simple du dispositif.

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Cet amendement ouvre un débat très important sur le financement de la protection sociale, notamment sur notre spécificité nationale : un financement assis presque exclusivement sur la production, les entreprises et les salariés. La priorité est désormais, nous en convenons tous, la lutte contre le chômage. Il faut cesser de taxer l'emploi. Or, c'est ce que fait le financement actuel de la protection sociale. C'est paradoxal et schizophrénique. Il ne s'agit pas de trancher ce débat aujourd'hui, mais il devra avoir lieu.

En outre, un consensus existe parmi les économistes sur les effets positifs des exonérations de charges sur les bas salaires pour l'emploi des salariés peu qualifiés. Mais elles sont aussi, Jacqueline Fraysse l'a dit, une trappe à bas salaires, ce qui incite à réfléchir à un changement d'assiette.

Enfin, le passage aux 35 heures, décidé il y a douze ans par la France, seule contre tous les autres pays du monde, représente une exonération annuelle de charges sociales de 22 milliards d'euros. Sur douze ans, cela correspond à environ 30 % de notre dette publique.

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Les exonérations de charges instaurées par les gouvernements Balladur et Juppé ont coûté à l'époque 40 milliards de francs ; celles qui ont été instituées au moment du passage aux 35 heures n'ont représenté que 7 des 22 milliards d'euros que cite Bernard Accoyer ; les extensions décidées par M. Fillon en 2002 expliquent le reste.

Le coût des exonérations liées au passage aux 35 heures doit être rapporté aux 2 millions d'emplois créés entre 1997 et 2002. Certes, ces créations ne sont pas imputables aux seules 35 heures, mais à une politique de l'emploi vigoureuse et multiforme. Jamais notre pays n'avait connu un tel dynamisme en matière de créations d'emplois au cours de son histoire. Il faut en tirer des enseignements pour l'avenir. Nous aurons, je l'espère, un débat serein sur les contrats de génération, afin de donner à ces exonérations une efficacité maximale en matière d'emploi.

La Commission rejette l'amendement AS 142.

Elle en vient à l'amendement AS 141 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Cet amendement vise à favoriser l'égalité salariale entre les hommes et les femmes. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, que le dispositif d'exonérations de cotisations sociales ferait l'objet d'un débat approfondi et serait corrigé. Si nous ne le modifions pas à ce stade dans sa globalité, nous pourrions au moins le faire évoluer au regard de cet objectif – essentiel – d'égalité entre les hommes et les femmes. Aux termes de l'amendement que je propose, les entreprises n'appliquant pas l'égalité salariale entre les hommes et les femmes n'auraient pas droit au cadeau que constituent les exonérations de charges.

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L'objectif de Jacqueline Fraysse est très noble : combattre les inégalités professionnelles et de salaire entre les hommes et les femmes. Toutefois, cette question mérite d'être traitée dans un cadre plus large que celui d'un simple amendement à un article du projet de loi de financement. En outre, à la suite de la conférence sociale, les partenaires sociaux ont engagé un dialogue spécifique sur les questions d'égalité entre les hommes et les femmes. Avis défavorable.

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Comme Jacqueline Fraysse, j'estime nécessaire de renforcer les sanctions prévues en cas de non-respect des obligations en matière d'égalité salariale. Nous aurions tort de penser que la lenteur de la réduction – pour ne pas dire le maintien – des inégalités salariales résulte simplement d'une insuffisante application des lois. Il convient de renforcer les sanctions pour inciter à négocier sur ces questions. Il faut non seulement réaliser l'égalité salariale poste à poste, mais surtout l'égalité des parcours professionnels : les différences dans l'accès aux postes les plus qualifiés et les moins précaires expliquent 80 % des inégalités entre les hommes et les femmes.

Nous aurons, je l'espère, l'occasion de revenir sur ce sujet. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser passer un nouveau quinquennat sans avancées en la matière.

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Nous comprenons le souci de traiter la question de manière plus globale. Cependant, il est normal que nous en débattions dans le cadre du projet de loi de financement. Il serait dommage de n'obtenir aucune avancée aujourd'hui et de renvoyer à un hypothétique débat législatif ultérieur. En outre, il s'agit non pas de sanctionner des entreprises, mais de s'abstenir de faire un cadeau à celles qui ne respecteraient pas des règles que nous approuvons unanimement. Le groupe Écologiste soutient cet amendement.

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Il ne s'agit pas de choisir entre le vote de cet amendement et le renvoi à un débat lointain et illusoire. Cette proposition figure dans le projet socialiste, dans le programme du candidat François Hollande et dans celui que nous avons défendu pour les élections législatives. Nous irons dans cette direction, mais il convient de respecter le rythme propre à ce type de décisions et le cadre posé par la conférence sociale. Nous souhaitons des décisions rapides, si possible au cours de l'année 2013, et d'ici au prochain projet de loi de financement.

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Premièrement, nous ne sommes pas démunis : il existe déjà une possibilité de sanction à hauteur de 1 % de la masse salariale. Deuxièmement, dans le cadre de la loi portant création des emplois d'avenir, nous avons mis en place le chaînon manquant en matière de sanctions : il est désormais possible de constater l'absence de négociation et de transmettre un procès-verbal de carence à l'administration du travail pour déclencher le processus de sanction. Nous avons progressé et devons continuer à le faire pour que les négociations s'engagent.

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Nous voilà devenus spectateurs d'un dialogue un peu ubuesque entre les différentes forces de la gauche. Il m'avait pourtant semblé que vous étiez unis derrière le Président de la République et défendiez le même programme législatif. Ces discussions vont-elles durer encore longtemps ?

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Je vous remercie, cher collègue, de souligner le débat démocratique qui existe au sein de la majorité.

La Commission rejette l'amendement AS 141.

Elle examine l'amendement AS 148 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Il s'agit de lutter contre le recours excessif au temps partiel pratiqué par certaines entreprises. Je propose de majorer de 10 % les cotisations patronales dans les entreprises de plus de 20 salariés qui emploient plus de 20 % de leur effectif à temps partiel.

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Nous sommes d'accord sur le fond : il convient de réduire la part du travail à temps partiel subi. Les entreprises de la grande distribution sont particulièrement concernées. Toutefois, ce débat devrait plutôt avoir lieu dans le cadre de l'examen d'un texte relatif au droit du travail ou à l'emploi. Avis défavorable.

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La réponse est un peu la même que pour l'amendement précédent. À l'issue de la conférence sociale, un chantier très important a été ouvert sur la sécurisation des parcours professionnels, dans l'objectif à la fois d'améliorer la protection des salariés et de permettre aux entreprises de s'adapter à la mondialisation.

Trois sujets sont plus particulièrement abordés dans le cadre de ce chantier : les contrats précaires – il convient de favoriser les contrats à durée indéterminée et une négociation est en cours sur la réduction des cotisations pour les contrats de durée plus longue ; le temps partiel subi – il s'agit de décourager les entreprises d'y recourir de manière excessive ; les licenciements – il convient de donner aux salariés le pouvoir d'intervenir en amont des licenciements et d'éviter toutes les solutions défavorables à l'emploi.

Nous sommes tout à fait d'accord quant à l'esprit de votre amendement, madame Fraysse. Cependant, il convient de laisser la négociation aller à son terme. Les partenaires sociaux se sont donné jusqu'à la fin de l'année ; nous légiférerons ensuite sur ces questions fondamentales.

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Il me semble tout de même que l'amendement entre bien dans le cadre du financement de la sécurité sociale ! Dans un élan d'optimisme, je retiendrai de vos propos que ces mesures sont actuellement en débat – et j'espère que l'année prochaine, nous pourrons enfin remédier à toutes ces anomalies.

La Commission rejette l'amendement AS 148.

Elle en vient à l'amendement AS 138 de Mme Jacqueline Fraysse.

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Entreprises et banques engrangent aujourd'hui presque 318 milliards d'euros de revenus financiers : 218,4 milliards pour les premières et 99,5 pour les secondes. Dès lors que ces revenus ne sont pas investis pour favoriser l'emploi et le développement économique, ils devraient être soumis aux taux actuels de la cotisation patronale. Tel est l'objet de cet amendement, qui permettrait de dégager des recettes considérables pour la sécurité sociale et, surtout, engagerait les entreprises à investir plutôt qu'à spéculer. La financiarisation de l'économie est néfaste ; notre rôle est de faire en sorte que les richesses produites soient mises au service de l'intérêt général !

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Avis défavorable : votre amendement s'inscrit dans un débat bien plus vaste qui inclut l'instauration de la contribution sur les transactions financières, la discussion en cours dans l'hémicycle, et la modification de l'assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés prévue par l'article 12 du présent projet de loi.

La Commission rejette l'amendement AS 138.

Article 12 : Modernisation et simplification de l'assiette de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés dans le secteur des assurances et clarification de l'affectation du produit des placements financiers de cette contribution

L'amendement AS 106 de M. Francis Vercamer, visant à supprimer l'article, est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements de conséquence AS 216 à 218 du rapporteur.

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Le texte est-il si mal écrit qu'il faille adopter tant d'amendements de précision, de coordination ou de conséquence ?

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Comme si cela n'était jamais arrivé durant la précédente législature ?

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En effet, madame la présidente, et si le rapporteur a changé, les membres du secrétariat de la Commission des affaires sociales sont toujours aussi attentifs à la qualité rédactionnelle des textes. Ne faites pas d'esprit partisan !

La Commission adopte l'article 12 modifié.

Après l'article 12

La Commission examine l'amendement AS 54 de M. Dominique Tian.

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Comme chaque année, nous proposons de rendre la gestion des mutuelles plus transparente. L'enjeu est de taille, puisque les réserves de la Mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN) dépassent le milliard d'euros : sa marge de solvabilité est bien supérieure aux normes en vigueur !

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Dans le domaine du logement social, on appelle les organismes HLM qui disposent de fortes réserves les « dodus dormants » ! J'ai été étonnée de voir que certaines mutuelles entraient dans cette catégorie.

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Un amendement similaire avait été présenté l'an dernier ; ayant fait l'objet d'un avis défavorable du Gouvernement, il avait été rejeté par la majorité de l'époque. Je rappelle que les mutuelles sont astreintes à constituer des réserves de solvabilité et que ces exigences ont été accrues par les accords de Bâle. Avis défavorable, donc.

La Commission rejette l'amendement AS 54.

Elle examine ensuite l'amendement AS 53 de M. Dominique Tian.

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Cet amendement a déjà été adopté l'an passé : il est donc satisfait.

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À propos, le candidat Hollande n'avait-il pas affirmé, durant la campagne présidentielle, qu'il reviendrait sur l'application de la taxe sur les conventions d'assurance (TSCA) aux contrats de complémentaire santé ? Les responsables des organismes complémentaires y comptent !

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Je vous mets au défi de trouver une telle mesure parmi les engagements de campagne du Président de la République ! Quoi qu'il en soit, dans l'état actuel des finances publiques, il serait impossible de réduire cette taxe. D'autre part, les organismes de complémentaire santé auront, à l'issue des actuelles négociations sur les dépassements d'honoraires, à étudier la proposition de la ministre des affaires sociales et de la santé de mettre en place un contrat de solidarité d'accès aux soins, afin d'améliorer la couverture sociale de nos concitoyens.

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C'est la précédente majorité qui a institué cette taxe sur les mutuelles. À l'époque, vous aviez soutenu que la charge ne serait pas répercutée sur les tarifs. Résultat : les Français ont payé plus cher !

Aujourd'hui, nous sommes amenés à évaluer le coût de la santé pour les Français – et, en particulier, le « reste à charge ». C'est dans ce cadre que la question de la taxe sur les mutuelles a été soulevée. Toutefois, nous avons auditionné les représentants de la Mutualité française pour préparer ce texte : la question essentielle à leurs yeux, ce n'est pas la taxe, mais l'amélioration du système de protection sociale et le « reste à charge » pour chaque Français. Le Président de la République se rendra prochainement au congrès de la Mutualité, où il s'exprimera sur ces questions.

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Quel don pour le slalom verbal, monsieur Paul ! Nous assumons d'avoir pris la décision d'augmenter la TSCA, après avoir constaté, à la suite du rapport de l'IGAS et de l'IGF, que les organismes complémentaires d'assurance maladie disposaient de réserves de trésorerie et qu'ils présentaient des frais de gestion importants. Mais vous, pendant la campagne électorale, vous avez laissé entendre que vous supprimeriez cette taxe : souvenez-vous de vos pétitions et de vos grandes déclarations dans l'hémicycle ! Nous avons, nous aussi, reçu les représentants de la Mutualité française, qui s'étonnent que la mesure n'ait pas été encore prise – et ils poseront la question au Président de la République à la fin de la semaine à Nice.

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Pour en revenir à l'amendement, l'article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 prévoyait la communication annuelle aux assurés des frais de gestion des organismes complémentaires santé, mais un récent arrêté a reporté cette obligation d'un an. Pourquoi ?

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C'est à la demande des organismes complémentaires, pour des raisons techniques. Il reste que les frais de gestion des organismes complémentaires – qui, inclus dans les cotisations, font partie du « reste à charge » – sont bien plus importants que ceux de la sécurité sociale, et que nous sommes tous d'accord pour vouloir en accroître la transparence ; il serait bon de connaître le montant des frais de marketing organisme par organisme : on pourrait certainement faire des économies dans ce domaine !

Je suggère donc aux auteurs de retirer leur amendement, et de demander en séance publique des explications à Mme la ministre sur les raisons qui l'ont poussée à signer l'arrêté en question.

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Je maintiens l'amendement, car il n'est pas satisfait : il n'y a aucune raison que la loi de financement de la sécurité sociale ne soit pas appliquée.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement AS 53.

Article 13 : Élargissement de l'assiette et renforcement de la progressivité de la taxe sur les salaires

La Commission est saisie de deux amendements visant à supprimer l'article : l'amendement AS 34 de Mme Bérengère Poletti et l'amendement AS 55 de M. Dominique Tian.

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L'intéressement, la participation et la prévoyance sont des rémunérations complémentaires pour les salariés. Si on les inclut dans l'assiette de la taxe sur les salaires, dans nombre de cas le taux applicable passera à 13,60 %. Cette mesure, cumulée avec la récente hausse du forfait social de 8 à 20 %, aboutira à une augmentation de 25,60 % de la taxation sur les salaires de plus de 15 185 euros par an. C'est du matraquage social !

La taxe sur les salaires s'applique, non aux seuls organismes financiers, mais aussi aux petites entreprises, aux agents et courtiers d'assurance, aux cabinets médicaux, aux vétérinaires, aux associations, aux établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD) et aux services de soins infirmiers à domicile, où il n'y a pas de hautes rémunérations. Vous allez « tuer » les accords d'intéressement et les contrats de prévoyance, qui ne seront pas renouvelés !

Avec la création d'une tranche additionnelle à 20 % pour les rémunérations supérieures à 150 000 euros par an, l'augmentation atteindra 32 % : il est inconcevable de faire subir aux entreprises de telles charges, qui plus est sur des dispositifs louables, qui profitent aux salariés !

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Je crois que le Gouvernement a mal évalué les conséquences de l'élargissement de l'assiette de la taxe sur les salaires, qui s'en prend à des dispositifs jusqu'alors consensuels : la participation, l'intéressement, les plans d'épargne d'entreprise, l'actionnariat salarié. Ce changement de cap est préoccupant.

Quant aux rémunérations supérieures à 150 000 euros – bruts – par an, elles correspondent à des qualifications élevées, c'est-à-dire à des salariés jouant un rôle décisif dans l'entreprise. La mesure conduira soit à réduire leur performance, soit à externaliser ces emplois : ce ne seront plus des Français qui les occuperont. Le Gouvernement et la majorité devraient mieux évaluer les conséquences de l'article 13, qu'il serait raisonnable de supprimer.

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N'oublions pas que notre objectif est de trouver des recettes pour la protection sociale. Sans remettre en cause le principe même de l'intéressement et de la participation, convenons qu'il s'agit souvent d'un salaire différé en l'absence d'une véritable politique salariale d'entreprise !

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Si : cela permet de ne pas augmenter les salaires et d'échapper aux cotisations sociales !

Au départ, ces sommes étaient taxées à 2 %, mais vous avez fini par admettre qu'il fallait relever le taux – jusqu'à 8 %. Nous, nous estimons qu'il s'agit de salaires comme les autres, qui doivent être taxés comme tels.

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Il ne s'agit pas de salaires différés, mais de contrats de prévoyance signés à l'intérieur des entreprises, au bénéfice des salariés. Si vous augmentez la fiscalisation de ces contrats, l'employeur changera d'attitude à leur égard ; ce ne sont pas les entreprises, mais les salariés qui seront pénalisés. Ce que vous faites est grave !

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Il ne s'agit pas d'une mesure contre les entreprises. Nous n'avons rien contre l'intéressement et la participation, mais, pour nous, le coeur de la rémunération doit être le contrat de travail, qui seul permet de vivre et de se projeter dans l'avenir. Le salaire est principal, l'intéressement accessoire – et pas le contraire. Dans cette optique, nous souhaitons assurer la neutralité fiscale entre les revenus tirés de l'intéressement et de la participation et ceux tirés du salaire, afin que chacun contribue de manière égalitaire à la protection sociale, qui s'applique à tous. Nous en sommes encore loin !

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Le contrat d'intéressement n'est pas un salaire déguisé ! Il doit posséder un caractère aléatoire, sous peine d'être refusé par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE), au contrôle de laquelle il est soumis. L'entreprise ne supporte que des charges : ce sont les salariés qui profitent du dispositif. Il faut promouvoir ce type de contrat, qui assure le partage des richesses et renforce le lien entre l'entreprise et ses salariés. Une hausse de 32 % de la taxation aboutira à leur disparition et ce sont les salariés qui seront les perdants !

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Nous touchons là à une différence idéologique et sociale fondamentale entre la droite et la gauche. Le ministre Xavier Bertrand avait fait de l'intéressement et de la participation l'un des principaux axes de sa politique ; nous, nous souhaitons répartir au mieux les richesses de la Nation afin que chacun puisse trouver un emploi. Les lois que nous avons fait adopter entre 1997 et 2002 ont bien fonctionné, puisqu'elles ont permis de créer 2 millions d'emplois et de réduire de 1 million le nombre de chômeurs. Dans les années suivantes, vous avez préféré augmenter la rémunération des salariés qui avaient déjà un emploi, via des heures supplémentaires ou des procédures d'intéressement et de participation. Aujourd'hui, notre priorité est que chacun puisse trouver un emploi bien rémunéré.

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Le forfait social passant de 8 à 20 %, bien des chefs d'entreprise ont dû décider de geler l'intéressement et la participation. Augmenter sans cesse la taxation de l'épargne salariale finira par tuer ce dispositif qui est pourtant à double égard bénéfique pour notre économie. Outre l'avantage financier réel pour les salariés, il a en effet le mérite de susciter chez eux un attachement plus important à l'entreprise et un intérêt pour son devenir. Alors qu'on souhaite promouvoir le dialogue entre les partenaires sociaux, c'est non seulement dans le principe, mais également dans les faits qu'il faut soutenir ce dispositif.

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L'article 13 concerne l'élargissement de l'assiette et le renforcement de la progressivité de la taxe sur les salaires. Or, les indemnités versées en cas de licenciement ou de mise à la retraite seront également concernées. Devant une mesure aussi « sociale » et aussi « populaire », j'appelle mes collègues de gauche à mesurer la gravité de leurs décisions.

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Mme Louwagie fait une erreur : pour les revenus de 15 000 à 150 000 euros par an, le taux restera inchangé à 13,6 % ; en revanche, à partir de 150 000 euros par an – salaires élevés qui concernent essentiellement les cadres bancaires de haut niveau – on propose de le monter à 20 %. Le barème de la taxe n'ayant pas été modifié depuis trente ans, il s'agit de renforcer sa progressivité en tenant compte de l'évolution des rémunérations dans ce secteur. Je suggère donc d'adopter cet article.

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Jusqu'à présent, dans la tranche de 15 185 à 150 000 euros par ans, l'intéressement n'était pas taxé ; désormais il le sera au taux de 13,6 %. Le forfait social passant de son côté de 8 % à 20 %, cet intéressement sera bien, au total, taxé à 25,6 %.

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L'article propose uniquement de passer de 13,6 % à 20 % pour les salaires supérieurs à 150 000 euros par an. Les mesures qui ont été prises par ailleurs concernant le forfait social sur l'intéressement sont hors propos.

La Commission rejette les amendements de suppression AS 34 et AS 55 de l'article.

Puis elle examine les amendements identiques AS 8 de M. Arnaud Robinet, AS 57 de M. Dominique Tian et AS 107 de M. Arnaud Richard.

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Comme vous le savez, les établissements de santé dont l'objet social est d'intérêt général connaissent depuis plusieurs années de fortes contraintes budgétaires en raison de l'écart constaté entre l'évolution mécanique de leurs charges et celle de leurs recettes. Ainsi est-il proposé d'exclure ces établissements de la mesure prévue.

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Les établissements sanitaires sociaux et médico-sociaux ne sont pas concernés par cette mesure, les salaires de plus de 150 000 euros par an y étant rares.

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Si les établissements privés offrent un intéressement de ce niveau, il serait normal qu'il soit aussi concerné.

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Ces établissements ont généralement le statut d'associations ou de sociétés, et doivent à ce titre respecter les règles fiscales en vigueur.

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Le rapporteur laisse entendre que la mesure est sans conséquences pour ces établissements ; l'étude d'impact qui accompagne le texte précise pourtant qu'un effet, même minime, est attendu. L'amendement est donc fondé.

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Les revenus supérieurs à 150 000 euros par an doivent être très rares dans ces établissements, et en tout état de cause, ne doivent pas être encouragés. Par ailleurs, il faut être cohérent : si l'intéressement et la participation sont liés aux résultats de l'entreprise, en quoi concernent-ils les établissements en difficulté ? Nous sommes devant un faux problème : soit un établissement est en bonne santé, il verse de l'intéressement et de la participation, et il n'y a alors pas de raison qu'il soit soumis à un régime dérogatoire ; soit il est en difficulté, et alors il n'en versera pas.

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La vision de la société que vous avez, monsieur Germain, est celle où l'on coupe les têtes. Notre société a besoin de commerciaux, d'ingénieurs, de chercheurs qu'on se dispute au niveau international. Vous êtes convaincu qu'il faut niveler par le bas ; nous sommes convaincus du contraire : il faut regarder vers le haut, et ne partager les richesses qu'une fois qu'elles sont créées.

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Ma vision n'est pas celle que vous décrivez. J'ai simplement du mal à croire que le travail d'un homme puisse valoir plus de quinze fois celui d'un autre. Il s'agit non de nier tout écart de revenus, mais d'affirmer que ces écarts doivent rester décents. Dans les années 1960, il y avait des inégalités, mais chacun profitait de la croissance. Aujourd'hui, ses fruits sont captés par les milieux financiers qui ne représentent que 0,1 % de la population. Cet état de fait est inacceptable, et nous essayons de le corriger par une fiscalité qui aligne les revenus du capital sur ceux du travail, et par la création de nouvelles tranches d'impôt : celle de l'impôt pour le revenu pour les revenus supérieurs à un million d'euros par an, et celle de la taxe sur les salaires pour les rémunérations supérieures à 150 000 euros par an. On n'interdit pas ces revenus, mais on estime légitime que ceux qui les perçoivent contribuent au redressement de la Nation dont par ailleurs ils sont souvent responsables des difficultés.

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Un tiers des salariés n'ont aujourd'hui pas de mutuelle, et plus nombreux encore sont ceux qui ne bénéficient pas d'un contrat de prévoyance. En cas d'accident de travail ou d'invalidité, aucun complément de revenu ne leur est donc versé. Face à ces situations difficiles, il faudrait promouvoir la prévoyance, et non la taxer à hauteur de 25,6 %.

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Nous sommes d'accord, monsieur Accoyer, pour promouvoir l'entreprise et la réussite de l'entrepreneur individuel. Mais vous avez, depuis dix ans, développé un système de niches sociales exorbitantes, exonérant de cotisations tantôt l'intéressement, tantôt la participation, tantôt les hauts revenus, pour aboutir à un déficit de la sécurité sociale de 160 milliards d'euros. On ne peut pas exonérer un revenu sous le seul prétexte que celui qui le perçoit produit de la richesse pour la France. C'est un principe : tout revenu doit être soumis à une cotisation sociale, chacun contribuant en proportion de ses facultés. Ces exonérations permanentes seraient acceptables si les comptes étaient équilibrés et la croissance importante ; mais pour redresser les comptes, il faut inverser la tendance.

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En revenant sur certains plafonnements, vous remettez en cause tout le fonctionnement de notre économie. Si les 150 000 euros renvoient à une rémunération brute, le montant net sera d'au moins 20 % inférieur, ce qui correspond à un revenu – certes encore très élevé – d'environ 10 000 euros par mois. Les entreprises n'octroient un salaire aussi important que parce qu'elles ont besoin de collaborateurs capables d'assurer la survie et l'essor de l'entreprise dans un monde concurrentiel. Il faudrait en finir avec cette obsession de vouloir tout taxer, et surtout de vouloir limiter ceux qui, par leurs capacités, leurs compétences et leur mobilité, sont indispensables à leur pays.

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Je rappelle que nous ne sommes pas dans une discussion générale.

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Un mot encore. On cherche à promouvoir les accords d'entreprise et de branche ; or, qu'arrivera-t-il des accords d'intéressement déjà conclus dont les chefs d'entreprise pensaient connaître le coût, si ce dernier change pour monter à 20 % ? Leur remise en cause sera préjudiciable aux salariés ; il ne s'agit donc pas d'entretenir des niches, mais de préserver le pouvoir d'achat. Avec cette mesure, vous allez provoquer la dénonciation de plus en plus d'accords de participation, comme cela s'est passé récemment dans une entreprise aéronautique. Ne parlez plus de négociations entre les chefs d'entreprise et les syndicats, si la loi défait ce qu'ils ont essayé de mettre en place ensemble.

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Je propose de rejeter ces amendements dont l'incidence – l'étude d'impact le montre – serait totalement marginale. Je rappelle également que les revenus complémentaires tels que l'intéressement et la participation, exonérés de cotisations, ont augmenté, ces dernières années, deux fois plus vite que les salaires. Il est donc normal, alors qu'on cherche à combler des déficits, de solliciter davantage ces revenus pour le financement de la sécurité sociale.

Par ailleurs, chers collègues de l'opposition, si le coût de la prévoyance complémentaire pris en charge par les entreprises est passé de 11,7 milliards d'euros en 2010 à 13,9 en 2013, c'est à cause de vos décisions. Lorsque vous avez plus que doublé les prélèvements et les taxes sur les organismes complémentaires, l'augmentation s'est reportée sur le prix des contrats et les charges en matière de prévoyance complémentaire des entreprises. Vous avez donc vous-même contribué à cette augmentation des charges des entreprises que vous voulez aujourd'hui limiter.

La Commission rejette les amendements AS 8, AS 57 et AS 107.

Elle examine ensuite l'amendement AS 56 de M. Dominique Tian.

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L'élargissement de l'assiette de la taxe sur les salaires aux indemnités de rupture conventionnelle de contrat risque de remettre en cause ce dispositif qui représente pourtant une souplesse à la fois pour les salariés et pour les chefs d'entreprise.

Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement AS 56.

Puis elle est saisie de l'amendement AS 58 de M. Dominique Tian.

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On a le sentiment que tout est fait pour décourager le travail, y compris celui de ceux qui sont les plus utiles à l'entreprise.

Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement AS 58.

Puis, elle adopte l'article 13.

Après l'article 13

La Commission examine l'amendement AS 13 de M. Arnaud Robinet.

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L'article additionnel vise à exclure les établissements de santé de l'augmentation de la taxe sur les salaires que le Gouvernement veut mettre en place.

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Voilà qui me semble paradoxal. Dans l'exposé des motifs, Arnaud Robinet précise que les établissements de santé « connaissent depuis plusieurs années de fortes contraintes budgétaires ». Or, si le gouvernement précédent a fait subir à ces établissements ces contraintes budgétaires, c'était sans doute pour essayer de limiter le déficit de nos comptes sociaux. Et aujourd'hui, pour alléger les contraintes pesant sur ces établissements, vous proposez de diminuer les recettes de cette même protection sociale. Je propose le rejet de l'amendement.

La Commission rejette l'amendement AS 13.

Article 14 : Réforme des prélèvements sociaux applicables aux carried interests

La Commission examine l'amendement AS 35 de Mme Bérengère Poletti portant suppression de l'article 14.

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L'article 14 soumet les prestations complémentaires à la fois à la CSG et à la CRDS – qui représentent 7,5 % – et au forfait social de 20 %, la nouvelle contribution s'élevant au total à 27,5 %. Par ailleurs, il ne s'agit pas vraiment de revenus du travail, mais du capital, et qui profitent en plus à des entreprises innovantes, qui investissent et prennent des risques. La demande de suppression de cet article est ainsi motivée à la fois par le taux de prélèvement important qu'il instaure et par la nature des revenus qui y sont soumis.

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Ces prélèvements s'apparentent à des clauses de retour à bonne fortune. Mais si bonne fortune il y a pour l'entreprise, les sociétaires ou les salariés, elle doit également profiter à nos finances sociales. C'est ce que vise l'article 14.

La Commission rejette l'amendement AS 35.

Puis elle adopte l'amendement de coordination AS 219 du rapporteur.

La Commission adopte l'article 14 modifié.

Article 15 : Suppression de l'assiette forfaitaire pour les salariés des particuliers employeurs

La Commission examine les amendements AS 36 de Mme Bérengère Poletti et AS 59 de M. Dominique Tian portant suppression de l'article.

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L'article 15 supprime l'assiette forfaitaire pour les salariés des particuliers entrepreneurs, qui répondait pourtant à un double objectif : inciter à la régularisation du travail non déclaré et encourager le secteur des services à la personne qui représente 1,7 million d'emplois. Si cet article est adopté, la France pourra connaître un plan social d'ampleur avec la destruction de plus de 85 000, voire 100 000 emplois, et la disparition de certaines entreprises. Vous-même, monsieur le rapporteur, partagez cette inquiétude, notant dans le commentaire des articles qu'il est « difficile d'évaluer les incidences de la suppression de l'assiette forfaitaire sur les comportements des employeurs, qui auront le choix entre déclarer le salaire réel, mettre fin au contrat ou même ne pas déclarer, c'est-à-dire recourir au travail dissimulé ».

Le projet de loi méconnaît la limite contributive de la grande majorité des Français ; un récent sondage Ifop montre ainsi que le prix moyen d'une heure de service à domicile augmentant de 20 %, seuls 14 % des Français conserveront leur niveau de recours aux services. Les entreprises mandataires ne pourront pas non plus amortir ce renchérissement du coût, sous peine de ne plus être concurrentielles ; c'est donc l'offre illégale de travail à domicile qui se développera.

Nous sommes également en désaccord sur les chiffres : en évoquant 475 millions de ressources supplémentaires, vous ignorez la baisse du nombre de salariés concernés.

Nous sommes inquiets, et nos concitoyens également, comme le montrent les messages que nous recevons dans nos circonscriptions. Pour revenir sur cette disposition, vous invoquez la justice et l'efficacité ; mais lorsqu'il y a trois millions de chômeurs dans le pays, l'efficacité exige plutôt de soutenir l'emploi.

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L'article 15 est regrettable : grâce à un ancien ministre, M. Jean-Louis Borloo, les services à la personne – auxquels recourent aussi bien les particuliers employeurs que les associations – ont connu un essor important dans toutes nos petites villes au profit des personnes âgées, handicapées et seules – les personnes âgées s'étant en outre vu accorder des aides.

Or, cet article augmente le prix moyen d'une heure de service à domicile d'au moins 20 %, empêchant ainsi certaines personnes d'y recourir, contrairement au principe de solidarité que prétend promouvoir un projet de loi qui se dit « juste ». D'ici la fin de l'année, les députés de la majorité seront saisis par les associations de personnes âgées : lorsqu'on leur annoncera cette augmentation de 20 %, je vous laisse deviner leur réaction.

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Nous avons déjà enregistré de vives réactions dans nos circonscriptions : le dispositif présente en effet un risque réel de voir supprimer des contrats de personnes travaillant à domicile, diminuer le nombre d'heures travaillées et s'accroître le travail dissimulé. C'est pourquoi, si l'article 15 a pour objet d'augmenter les recettes de la sécurité sociale, ne va-t-il pas au contraire les faire diminuer ? Qui plus est, les particuliers employeurs ne sont pas uniquement des personnes aisées : les classes moyennes y font également appel.

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Il n'est pas question de remettre en cause des interventions créatrices d'emploi. Pour trois heures de ménage hebdomadaires, la différence ne dépassera pas 7,15 euros par mois. Cela ne menace en rien les publics susceptibles de faire appel aux services à la personne.

Comme vous le faites souvent, vous essayez d'opposer les employeurs aux bénéficiaires du dispositif. Pourquoi faudrait-il systématiquement choyer les employeurs, qu'il s'agisse de particuliers ou d'entreprises, sans prendre en considération la protection sociale des salariés qu'ils emploient ?

La mesure est équilibrée. Si l'on avait, dès le départ, fondé les cotisations sur une assiette non pas forfaitaire mais réelle, ces emplois à domicile se seraient également développés ; rien ne prouve, par conséquent, que le dispositif disparaîtra à la suite de la réforme proposée. Enfin, les autres avantages applicables sont maintenus, en particulier les réductions d'impôt en vigueur – non négligeables même si le projet de loi de finances en prévoit le plafonnement à 10 000 euros.

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Cette disposition aura les mêmes effets que la suppression de la défiscalisation et des exonérations de charges sur les heures supplémentaires : tous les députés, qu'ils soient de la majorité ou de l'opposition, ont pu juger des effets dévastateurs de cette suppression pour les salariés eux-mêmes. Et je m'étonne que la majorité propose une telle mesure alors que c'est elle qui fut à l'origine du chèque emploi service universel (CESU), véritable réussite ayant indiscutablement permis de déclarer des emplois souvent non déclarés auparavant.

Contrairement à ce qui vient d'être dit, la mise en oeuvre de l'article 15 entraînera une hausse du coût du travail comprise entre 10 et 50 % des charges sociales acquittées mensuellement par les particuliers ou associations employeurs, et, par conséquent, une diminution du nombre d'heures travaillées et du nombre de salariés employés ainsi qu'une augmentation du travail non déclaré. Surtout, il aura un effet dévastateur, une fois cumulé avec le plafonnement des niches fiscales. C'est donc bien davantage qu'un ménage sur dix qui sera touché par ces hausses.

De surcroît, les femmes, à qui ces services permettent de faire garder leurs enfants et donc de bénéficier de la liberté suffisante pour exercer leur activité professionnelle, vont voir cette liberté fondamentale remise en cause – ce qui est paradoxal puisque nous partageons tous le souhait de leur offrir les meilleures conditions possibles pour le faire.

Enfin, beaucoup de personnes âgées seront touchées de plein fouet par cet article alors qu'elles ne bénéficient pas toutes d'une retraite importante.

Pour toutes ces raisons, la majorité ferait mieux de reconsidérer cette mesure.

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La suppression du forfait, en 1985, avait abouti à une chute considérable des emplois et des heures travaillées. Il avait donc ensuite fallu le rétablir. Si on le supprimait à nouveau, le particulier employeur, aux revenus souvent modestes, deviendrait le seul employeur de France à ne bénéficier d'aucun allégement de charges associé à son statut.

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Les réactions à cet article sont extrêmement vives. En effet, la conjugaison de celui-ci avec le plafonnement des niches fiscales par le projet de loi de finances entraînera de toute évidence une diminution de ces emplois non délocalisables ainsi qu'une recrudescence du travail dissimulé.

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Le Gouvernement a-t-il bien calculé l'impact de la mesure ? Il espère faire économiser à l'État 300 millions d'euros par an. Or, selon certaines études indépendantes, la suppression du forfait détruirait à court terme 85 000 emplois, soit l'un des plus grands plans sociaux jamais connus, et coûterait 350 millions d'euros à l'État, du fait de la baisse d'activité salariale.

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Vous avez bien assimilé vos « éléments de langage » !

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En outre, en invoquant la justice sociale, la majorité considère les retraités comme des riches qu'elle va taxer de plus en plus, comme le montre d'autre part l'augmentation de la CSG. Les personnes âgées sont les premiers employeurs de services à domicile, dont le coût horaire va augmenter d'environ 2 euros. La justice sociale n'est donc pas définie de la même manière par la majorité et par l'opposition !

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Nous nous étranglons un peu en vous entendant défendre la justice sociale ! Qui plus est, le dispositif ne concerne pas les personnes âgées dépendantes !

Bien que le système du forfait existe depuis longtemps, chacun convient de son imperfection : en effet, aider un secteur à émerger en pénalisant les droits sociaux de salariés précaires n'est satisfaisant pour personne. Pour des raisons financières, l'exonération de 15 % qui avait été mise en place afin d'inciter les employeurs à déclarer sur une assiette réelle a été supprimée il y a deux ans par le Gouvernement précédent.

Avec l'amendement AS 234, nous proposerons un compromis, en rétablissant une exonération de 8 % de cotisations sociales pour les employeurs. J'associe Christian Eckert et Valérie Rabault à cet amendement car ils en déposeront un complémentaire, qui permet de compenser cette exonération dans le cadre du projet de loi de finances, afin de diminuer de 50 à 45 % le crédit d'impôt pour les contribuables dont le revenu est supérieur à 50 000 euros par an.

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Les préoccupations exprimées par nos collègues de l'opposition étant prises en compte dans l'amendement AS 234 qui suit, je propose donc le rejet de leur amendement de suppression.

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À la page 75 de l'étude d'impact, on lit que la mesure devrait permettre une économie d'environ 340 millions d'euros mais que « la perte de recettes pour l'État pourrait atteindre 200 millions d'euros ». Bien qu'affectant environ un million d'employeurs, elle ne permettra donc aucune économie mais fera augmenter le travail au noir tout en gênant les centres communaux d'action sociale et les associations.

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Vous confondez budget de l'État et finances sociales : cette perte de recettes pour l'État est en effet due à la hausse attendue des montants déclarés et, par conséquent, à une augmentation des sommes éligibles au crédit d'impôt dont bénéficient les contribuables exerçant une activité professionnelle.

La Commission rejette les amendements AS 36 et 59.

Elle en vient ensuite à l'amendement AS 234 du rapporteur.

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Comme je l'indiquais, cet amendement vise à tenir compte d'un certain nombre de préoccupations suscitées par cet article.

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Il institue une exonération de 8 % sur les cotisations sociales. La perte de recettes qu'il induit sera compensée par une augmentation des droits sur le tabac dans le cadre de ce projet de loi de financement et sera financée, dans le projet de loi de finances, par un aménagement du crédit d'impôt – diminué de 50 à 45 % pour les contribuables dont le revenu dépasse 50 000 euros par an.

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En somme, c'est un mea culpa. Nous aurions préféré la suppression de l'article, mais une exonération de 8 % n'est pas négligeable.

La Commission adopte l'amendement AS 234.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel AS 220 du rapporteur.

Puis, elle examine les amendements AS 60 à AS 63 de M. Dominique Tian.

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L'exposé des motifs de l'article 15 du projet dispose que « les ménages ayant des besoins importants d'aide à domicile (personnes âgées, personnes dépendantes et en situation de handicap, familles avec enfants en bas âge) bénéficient d'autres dispositifs d'aide ». Il peut notamment s'agir d'aides départementales. Or, ces dispositifs varient beaucoup d'un département à un autre. En outre, la définition figurant dans cet exposé des motifs est insuffisamment précise. C'est pourquoi nous proposons diverses exemptions.

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Ces amendements visent à exonérer tour à tour les personnes âgées de plus de 80 ans, les parents d'enfants âgés de 10 ans – mais pourquoi ce seul âge de 10 ans ? –, les structures de musique à domicile et les particuliers employeurs recourant au soutien scolaire.

Mais lorsque l'employeur opte pour le régime du forfait, indépendamment du niveau de salaire versé, le salarié se voit privé de certains droits à prestations : ainsi que le précise l'étude d'impact, page 73, selon que l'employeur aura déclaré au réel ou au forfait, la différence de montant de pension nette mensuelle d'une personne dont le salaire de référence s'élève à deux fois le SMIC sera de 459 euros. L'article 15 vise donc également à protéger les droits à pension du salarié et sans doute aussi ses droits à indemnités journalières en cas d'arrêt maladie. C'est pourquoi je propose le rejet des amendements AS 60 à AS 63.

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Il est toujours regrettable de regrouper les contribuables par tranche d'âge au lieu de le faire par tranche de revenus. Toutes les personnes âgées de plus de 80 ans n'ont pas nécessairement des revenus modestes.

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Certains particuliers employeurs ayant opté pour le forfait rémunèrent actuellement leurs salariés au-delà du SMIC. La remise en cause de ce régime risque de les inciter à ne plus les rémunérer qu'au niveau du SMIC, voire à diminuer le nombre d'heures d'emploi.

En outre, la rémunération varie d'une région à une autre : par exemple, une femme de ménage est sans doute mieux rémunérée en Île-de-France qu'en Bretagne.

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L'important, c'est que le choix du forfait résulte d'un accord entre l'employeur et l'employé.

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J'espère encore convaincre la majorité de ne pas adopter l'article. Certes, il permet d'un côté d'espérer une amélioration des recettes de la sécurité sociale, mais de l'autre, il conduit à réduire celles de l'État. De plus, après l'adoption de l'amendement AS 234, le texte prévoit un abattement de 8 points sur les cotisations versées par certains employeurs. C'est une véritable usine à gaz ! Il faudra changer les logiciels et recruter du personnel rien que pour faire fonctionner le dispositif. Pourquoi remettre en cause ce qui fonctionne ? Vous donnez vraiment des verges pour vous faire battre.

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Le salaire peut être beaucoup plus élevé que 12 ou 13 euros de l'heure. Dans ce cas, le calcul des charges sociales à partir du SMIC entraîne pour le salarié concerné une réduction considérable de ses droits à la retraite. Vous ne pouvez donc pas nier que cette disposition soit conforme à la justice. Quant à son efficacité, nous l'avons renforcée en adoptant l'amendement qui introduit un abattement de 8 points sur les cotisations patronales.

Je rappelle que les charges sociales versées par les particuliers employeurs avaient fait l'objet d'une première réforme, soutenue par nos collègues de l'actuelle opposition. Elle consistait à supprimer l'abattement de 15 % qui était alors appliqué sur ces charges, quelle que soit leur assiette, forfait ou frais réels. Il eût été préférable de supprimer le forfait tout en conservant l'abattement : de cette façon, les salariés n'auraient pas été pénalisés.

La Commission rejette successivement les quatre amendements AS 60 à AS 63.

Puis elle examine l'amendement AS 64 de M. Dominique Tian.

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Je propose un rapport pour faire le point dans un an. Compte tenu des nombreuses interrogations que suscite cette mesure, il serait souhaitable d'en mesurer l'impact en aval de son adoption. Nous verrons alors qui avait raison ou tort.

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Le débat sur cet article a permis d'identifier un certain nombre de préoccupations qui nous sont communes. Je suis donc favorable à ce qu'une nouvelle étude nous informe, dans un an, sur ses conséquences.

La Commission adopte l'amendement AS 64.

Elle adopte ensuite l'article 15 modifié.

La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.