La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (nos 1548, 1639, 1614, 1604).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de six heures treize pour le groupe SRC, dont deux cent quinze amendements sont en discussion ; cinq heures dix-huit pour le groupe UMP, dont six cent vingt-et-un amendements sont en discussion ; une heure trente-huit pour le groupe UDI, dont cent six amendements sont en discussion ; cinquante-neuf minutes pour le groupe écologiste, dont soixante-seize amendements sont en discussion ; une heure huit pour le groupe RRDP, dont vingt-six amendements sont en discussion ; une heure quatorze pour le groupe GDR, dont soixante-six amendements sont en discussion ; vingt-quatre minutes pour les députés non-inscrits.
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 145 portant article additionnel après l’article 4.
Monsieur le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, après la parution du décret du 27 décembre 2013, je me suis essayé à rédiger un contre-projet sur les installations classées pendant mes vacances.
Certes, vous avez eu quelques intuitions ; vous avez compris qu’il fallait évoluer un peu. Le Premier ministre nous avait promis ce décret en septembre dernier, lors du SPACE, le Salon des Productions Animales-Carrefour Européen, dans un délai d’un mois ; deux mois ont passé, puis trois. Finalement, vous l’avez publié entre Noël et le jour de l’an ; nous avons bien compris pourquoi vous l’avez fait dans cette période : vous ne vouliez pas heurter vos collègues écologistes, qui se reposaient à ce moment-là – ils ne sont plus là, au demeurant.
En vérité, votre projet est « petit bras ». Il faut changer de nature sur les installations classées, et c’est l’un des objectifs que je poursuis avec cet amendement no 145 . Sans vouloir être trop long, cet amendement entend apporter des précisions concernant les enquêtes d’utilité publique diligentées en cas de demande d’autorisation : s’il est bien normal de recueillir l’avis du voisinage et des habitants de la commune où se trouve l’installation classée agricole, on peut en revanche s’interroger sur la légitimité de l’opinion d’un touriste de passage. Celui-ci s’en retournera chez lui, loin de cet endroit où des gens travaillent, vivent et cherchent à élever correctement leurs enfants. Or ce touriste aura peut-être donné un certain nombre d’avis qui ne sont objectivement pas pertinents. De ce point de vue, nous considérons qu’il faut se montrer plus exigeant au sujet des enquêtes publiques.
L’amendement no 145 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Si vous m’y autorisez, madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement no 414 .
Que ne ferais-je pas pour vous être agréable !
Ces amendements ont pour objet de réduire les délais d’instruction. Il est vrai que, lorsque certains d’entre nous s’étaient battus il y a quelques mois sur ces projets d’installations classées, nous avions un peu progressé sur les délais d’instruction. D’après les informations qui me parviennent de ma circonscription, aussi bien des administrations que des personnes concernées, des pétitionnaires, les délais sont passés de deux ans, comme c’était le cas il y a encore quelques mois, à treize mois – c’est encore trop !
Comparons-nous à l’Allemagne, car le vrai sujet des installations classées agricoles, c’est la comparaison avec des investissements de même nature dans d’autres pays. Combien de temps cela prend-il ? Aujourd’hui, cela prend encore trop de temps en France. Le Président de la République nous explique, après avoir multiplié les normes,
« Oh ! » sur divers bancs du groupe SRC
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, pour donner l’avis du Gouvernement.
Même avis : cela relève du domaine réglementaire.
L’amendement no 415 est bien de nature législative puisqu’il traite des modalités de recours. Nous avons l’habitude du recours pour excès de pouvoir, dont le délai est de deux mois. En matière d’installations classées, le problème tient à ce que le droit de recours n’est pas de deux mois mais d’un an : cela crée une situation d’insécurité juridique.
Je propose donc de réduire les possibilités de recours. La possibilité d’un recours contre une décision administrative existe, et c’est bien normal : un administré doit pouvoir contester une installation classée. Encore faut-il qu’il le fasse dans des limites raisonnables !
Le sujet qui nous préoccupe est l’entreprise agricole et la stabilité de la situation juridique. Je propose donc que les délais de recours soient plus encadrés, de façon à rassurer les agriculteurs – nous sommes du côté des agriculteurs, du moins je l’espère ! – qui, pendant plusieurs mois, font fonctionner leurs installations classées sous la menace d’un recours pouvant aboutir à l’annulation de l’arrêté préfectoral autorisant l’installation classée. Vous voyez le paradoxe !
Chacun a compris le problème, et je crois que nous pouvons nous rassembler sur ce sujet. Il ne s’agit pas de changer les textes mais de réduire le délai de recours offert aux adversaires de l’installation classée, pour laquelle le pétitionnaire a obtenu l’autorisation. Que celle-ci soit contestée, c’est de l’ordre du possible ; mais je souhaite que ces délais de recours soient réduits à deux mois. Permettre la remise en cause de l’installation pendant un an constitue une véritable épée de Damoclès pour des exploitants qui, souvent, ont investi toutes leurs économies, toute leur épargne, qui ont emprunté et qui, pendant un an, vivent dans une situation à bien des égards inconfortable.
Même avis. Des expérimentations sont en cours pour réduire ces délais dans trois régions, dont la Bretagne pour ce qui est de la méthanisation. Même si cela relève du domaine réglementaire, nous sommes d’accord sur l’objectif. Ainsi que je l’ai dit tout à l’heure, lorsque nous avons débattu des recours de manière générale avec le ministère de l’écologie, nous avons engagé un travail pour améliorer les délais de recours et limiter les recours abusifs.
Cela étant dit, monsieur Le Fur, considérant qu’il s’agit d’installations classées, un délai de deux mois pourrait difficilement laisser aux riverains et aux autres personnes concernées le temps de prendre connaissance du dossier.
Quoi qu’il en soit, une expérimentation est en cours ; nous sommes en train de travailler et nous ferons des propositions. L’avis est donc défavorable à cet amendement visant à changer dès maintenant les dispositions législatives existantes.
L’amendement no 415 n’est pas adopté.
Si vous m’y autorisez, madame la présidente, je défendrai également l’amendement no 412 . Monsieur le ministre, vous découvrez la méthanisation et vous avez la foi du nouveau converti. Tout d’abord, la méthanisation n’est pas mon sujet, ou n’en constitue qu’un des aspects. Les installations classées agricoles sont des élevages.
Tous nos élevages sont soumis à la réglementation des installations classées agricoles – certes à des degrés divers, puisqu’il existait jusqu’à présent la déclaration pour les situations les plus simples et l’autorisation pour les situations les plus conséquentes. Vous créez aujourd’hui un système intermédiaire, qui est celui de l’enregistrement ; mais dans tous les cas, il s’agit d’installations classées. Vous comprenez donc bien, monsieur le ministre, que votre réponse sur la méthanisation est extrêmement partielle.
Au demeurant, sur le fond, je suis un militant de la méthanisation. Là n’est pas le problème. Mais n’exagérons pas la réponse offerte par la méthanisation ! Celle-ci, sans apport de déchets d’abattoirs, est très peu créatrice de capacité énergétique. Le lisier, à lui seul, ne suffit pas ou suffit rarement : il faut également des déchets d’abattoirs, qui se font vite assez rares, même dans des zones d’élevages importants, comme en Bretagne. Nous ne souhaitons pas en effet nous orienter vers une méthanisation à l’allemande – et j’espère, monsieur le ministre, que vous nous confirmerez qu’il n’en est rien –, où l’essentiel de la méthanisation provient du végétal. Ce serait, pour le coup, aberrant !
La France se place dans une logique de méthanisation des sous-produits animaux ; c’est d’ailleurs un des moyens de remédier au problème des déjections animales, chacun en conviendra. Cela signifie que la méthanisation a toute sa place, mais qu’elle ne constitue pas l’alpha et l’oméga pour remédier à toutes les difficultés.
Je souhaiterais défendre plus particulièrement l’amendement no 412 . Quand une installation classée agricole existe, elle vit : tout ne s’arrête pas pour l’exploitant le jour où il obtient l’autorisation. Cette installation classée agricole évolue. La question est donc la suivante : dans quelle mesure ces évolutions exigent-elles qu’il recommence l’ensemble de la procédure ? La règle, jusqu’à présent, veut que lorsqu’il existe un changement de nature substantielle, la procédure est à recommencer à zéro. Le problème, c’est que nos administrations ont une conception très étriquée de la modification substantielle ; ainsi, une modification mineure peut aboutir à une exigence de reprendre la procédure à zéro. Nous avons là, monsieur le ministre, une vraie difficulté.
Mon amendement consiste donc à mieux encadrer la définition de ce qu’est une modification substantielle : si on change complètement la nature et la capacité de l’installation classée, on comprend bien la nécessité d’une nouvelle autorisation, d’un nouvel enregistrement ou d’une nouvelle déclaration, selon les seuils concernés. Mais, dans bien des cas, il s’agit d’évolutions normales parce qu’une exploitation agricole vit, comme une famille, comme une entreprise. Je souhaite donc qu’on ne multiplie pas les obstacles à l’égard de nos agriculteurs qui, je le répète, sont soumis à la concurrence.
J’ajoute que les agriculteurs de Basse-Saxe n’ont pas à faire face à toutes ces difficultés. La notion de modification substantielle en matière d’installation classée ne doit pas être exagérément élargie. Elle ne doit intégrer que les grosses modifications.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
L’amendement no 412 remet totalement en cause la législation européenne en matière d’établissements classés, s’agissant notamment des études d’impact.
Monsieur le ministre, je ne peux pas vous laisser dire cela. Une réglementation européenne existe en matière d’installations classées et elle est autrement plus simple que la nôtre ! Nombre de pays se contentent de la réglementation européenne et s’en satisfont. En France, et cela ne date pas de vous, monsieur le ministre, la procédure est particulière. Comme on dit dans nos campagnes, on en a rajouté une couche. Le problème, c’est que ces règles compliquent la vie des gens. Vous souhaitez conserver la réglementation nationale. Mais dans ce cas, faisons en sorte qu’elle ne soit pas trop éloignée de la réglementation européenne et qu’elle nous permette d’agir, et surtout qu’elle permette aux exploitants agricoles de travailler.
J’espère que cet amendement recueillera votre agrément, monsieur le ministre, puisque vous avez évoqué ce sujet à plusieurs reprises. Il s’agit en effet du recours abusif des tiers contre les installations classées. J’évoquerai en particulier l’intérêt à agir des gens qui font ces recours. Le droit français comprend ce vieux principe selon lequel nul ne doit plaider par procureur, ce qui fait que, normalement, ne peuvent engager des recours que des gens qui sont objectivement lésés. Un voisin peut s’estimer lésé et personne ne conteste sa capacité à agir. Le problème se pose pour les associations qui font profession des recours et qui vivent des différents dommages et intérêts qui leur sont versés au terme de ces recours.
Je souhaite donc que nous ayons, en matière d’installations classées, une vision plus étroite de la capacité de recours, que les personnes du voisinage vraiment intéressées puissent le faire mais que celles qui n’ont qu’un lien très distant avec l’endroit où est située l’installation classée et les associations qui ne subissent pas objectivement de préjudice voient leurs capacités de recours limitées.
Vous savez, monsieur le député, que des tribunaux jugent de la pertinence des recours.
Mais cela existe. Comme nous l’avons dit tout à l’heure, un travail est déjà engagé en matière de recours abusif, qui est un vrai sujet. Mais il est difficile a priori de définir qui aurait droit ou non de faire des recours. Ce n’est pas cela qui permettrait de clarifier davantage les questions qui sont posées. Avis défavorable.
L’amendement no 416 n’est pas adopté.
Monsieur le ministre, je veux revenir un instant sur le recours abusif. Il est extrêmement rare que les juges statuent sur la pertinence d’un recours. J’aimerais que vos services juridiques, brillamment représentés ici, puissent nous permettre de disposer du nombre de recours abusifs qui ont pu être jugés par différentes instances juridiques. À mon avis, cela se compte sur les doigts d’une seule main. Il faut donc imaginer d’autres formules pour éviter la multiplication des recours. N’assimilons pas le producteur aux autres. Pour le producteur, c’est son métier, son argent, son avenir et sa capacité économique qui sont en jeu. Quant aux autres, ils peuvent avoir un intérêt à agir, mais leur existence n’est pas en cause.
J’en viens maintenant à l’amendement no 408 qui évoque le bilan réel simplifié. Jusqu’à présent, s’agissant des installations classées, les agriculteurs ont des obligations de moyens. Il s’agit de passer à des obligations de résultat, c’est-à-dire de savoir exactement quelle quantité d’azote est présente dans les champs au terme de la période végétale, c’est-à-dire en septembre, octobre. C’est techniquement possible aujourd’hui. Cela permettrait de simplifier la vie des agriculteurs et d’avoir une vision plus objective des choses. Or vos arrêtés et décrets n’en parlent pas. Je considère qu’il n’y a donc pas d’opposition. Mais un engagement de votre part serait précieux.
Pour illustrer mon propos, je prendrai un exemple concret. Les producteurs de porcs et de volailles ont de plus en plus des systèmes alimentaires qui leur permettent d’avoir beaucoup moins de déjections azotées. C’est très positif pour tout le monde. Or cela n’a pas de traduction concrète puisqu’on ne compte que les places ou les animaux et non la déjection objective. A priori, l’INRA a totalement validé ces techniques. Du point de vue scientifique, c’est un plus. Comme votre position ne figure ni dans les décrets ni dans les arrêtés, je veux croire qu’elle est plutôt positive. Mais une réponse de votre part serait précieuse.
Même avis que la commission. La question soulevée par M. Le Fur relève du domaine réglementaire. Les dispositions de la directive nitrates s’appliquent aussi sur les zones vulnérables et elles sont soumises aux réglementations liées aux ICPE.
Monsieur Le Fur, même si vous faites preuve de bonne volonté, on ne peut pas accepter ce que vous proposez.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 417 rectifié .
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je regrette que vos réponses soient objectivement un peu faibles et assez peu argumentées. Je laisserai le soin à ceux qui connaissent le sujet de lire nos travaux et ils ne pourront que le constater. J’attendais autre chose. J’espère qu’il y aura une revoyure écrite et que vous répondrez plus précisément aux questions que je vous adresse au nom de beaucoup d’éleveurs.
L’amendement no 417 rectifié est l’ultime amendement que j’ai déposé après l’article 4. S’il est très long, il est cependant très simple. La réglementation sur les installations classées est la même pour l’industrie et pour l’agriculture. Cela n’a pas de sens, et ce d’autant moins que cette réglementation n’a pas été faite pour l’agriculture. C’est au fil de l’histoire qu’elle a atteint l’agriculture.
Monsieur le ministre, je vous propose de renforcer vos pouvoirs et que cette réglementation, puisqu’elle doit exister, soit spécifique à l’agriculture et qu’elle relève, non d’un quelconque ministère de l’environnement ou de l’écologie, mais de vous-même, de façon que vous ayez les manettes. Puisque vous avez la responsabilité de la politique agricole, il me paraît assez logique que vous ayez également celle des installations classées, c’est-à-dire de la politique de l’élevage en quelque sorte. En vous proposant de renforcer vos pouvoirs, je suis attentif à vous faire un beau décret d’attributions !
Monsieur le ministre, êtes-vous au moins demandeur ou bien abandonnez-vous cette politique à votre collègue de l’environnement ?
Monsieur Le Fur, on me dit que la législation des établissements classés concerne l’agriculture et l’industrie depuis 1810.
Vous me posez beaucoup de questions, monsieur Le Fur, comme si je devais régler tout ce que vous n’avez pas fait pendant des années. Vous êtes extrêmement exigeant – et on verra si vous êtes aussi sympathique en adoptant ce projet de loi.
Je vous répondrai donc, comme l’ont fait mes prédécesseurs, qu’il ne me paraît pas souhaitable de changer d’un seul coup toute la réglementation, de séparer la partie agricole et la partie industrielle alors que tout semble indiquer qu’elles sont liées depuis 1810. En même temps, vous le savez, je fais en sorte que les agriculteurs puissent s’installer plus facilement.
Pour toutes ces raisons, je ne peux pas accepter cet amendement.
L’amendement no 417 rectifié n’est pas adopté.
Cet amendement vise à couvrir les risques de l’innovation, de l’expérimentation, et à sécuriser les nouvelles pratiques innovantes en agriculture. Il est cohérent avec le concept d’agro-écologie et surtout avec la mise en oeuvre des GIEE.
Pour que les risques non couverts ne soient pas un frein à l’innovation, il vous est proposé d’utiliser le Fonds national de gestion des risques en agriculture et d’insérer, après l’article 4, l’article suivant : « Dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant les possibilités et l’opportunité de créer une quatrième section au Fonds national de gestion des risques en agriculture, branche qui serait destinée à sécuriser les pratiques innovantes en agriculture afin de contribuer de façon dynamique à l’évolution des pratiques agricoles. »
Le ministère a engagé un travail sur ce sujet. Comme la discussion est en cours, la gestion des risques ne figure pas dans le présent projet de loi. Ce sujet ne nécessite pas nécessairement un débat législatif. Il s’agit surtout d’organiser les éléments financiers qui permettront d’assurer les agriculteurs et surtout de mutualiser les risques.
Un groupe de travail est en place, qui regroupe les établissements financiers et les établissements de réassurance, tout système de mutualisation devant avoir un système de réassurance.
Si nous allons au bout de l’objectif que nous poursuivons, le système s’appuiera sur le Fonds national de garantie des calamités agricoles, qui existe déjà et qui fonctionne, et sur la mutualisation, qui consiste à étendre les capacités des agriculteurs à pouvoir s’assurer. On a vu, notamment sur la vigne, que l’intensité et la fréquence des aléas climatiques s’aggravant, nous devons être capables d’y faire face en mettant en place un système plus performant que celui qui existe aujourd’hui.
D’ici deux ans, nous aurons avancé, mais sur le système global. Sagesse, parce que nous pourrons rendre un rapport. Mais je l’ai déjà dit, sur cette question de la mutualisation des risques, il faudra que je revienne devant la commission : c’est un sujet sur lequel je veux que la représentation nationale soit informée. En même temps, nous pourrons faire un rapport sur la gestion du fonds de calamités. Sagesse.
L’amendement no 944 est adopté.
Cet amendement est rédactionnel. Je pense que le rapporteur et le ministre ne s’y opposeront pas.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 456 .
En commission, j’ai proposé à mes collègues de reculer le moment où le bailleur peut donner congé au preneur. Il se trouve qu’il peut le faire au moment de l’âge légal de la retraite, ce qui équivaut à peu près à soixante-deux ans aujourd’hui. La commission a accepté et voté cette disposition.
Monsieur Cinieri, vous me proposez une rédaction qui me paraît – je vous prie de m’en excuser – moins précise que celle que je vous propose à l’amendement suivant. Mais nous sommes d’accord sur le fond. J’ai proposé qu’on puisse aller non pas à l’âge légal de la retraite, mais à celui de la retraite à taux plein, de façon qu’on ne puisse pas donner congé à un preneur trop tôt. C’est une mesure de protection en faveur du preneur, dans la mesure où il ne ferait pas valoir ses droits à la retraite. Je vous propose donc de retirer vos amendements et de vous rallier au mien qui supprime la fin de l’article 4 bis après le mot « plein ». La retraite à taux plein est une notion qui est parfaitement définie dans la législation de notre pays.
Oui, madame la présidente, nous les retirons, dans les conditions que nous propose le rapporteur.
La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 1728 .
Je viens de le présenter et je remercie mes collègues du groupe UMP d’avoir retiré leurs amendements au profit de celui-ci. Nous sommes absolument d’accord sur le fond : il s’agit de repousser l’âge du moment où le bailleur peut donner congé au preneur.
Le même que celui du rapporteur. Un grand merci aux députés du groupe UMP.
L’article 4 bis, amendé, est adopté.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1096 deuxième rectification.
L’amendement no 1096 deuxième rectification, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements, nos 703 rectifié et 1304 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement no 703 rectifié .
Il s’agit de compléter l’article L. 411-12 du code rural et de la pêche maritime par la phrase suivante : « Le bailleur ne peut notamment subordonner la conclusion du bail, ou son renouvellement, à la souscription par le preneur d’un engagement contractuel de fourniture de biens ou de services ou de commercialisation des produits de l’exploitation. »
En pratique, monsieur le ministre, il arrive que des bailleurs conditionnent la conclusion d’un bail rural à l’engagement du preneur, par exemple, de vendre sa production au bailleur lui-même ou à une société designée par lui.
Par exemple en Champagne, le grand négociant donne en location les vignes lui appartenant a un viticulteur, à la condition que celui-ci s’engage à lui vendre la production de son exploitation pendant la durée du bail. Couramment, cet engagement de vente doit porter sur la récolte d’une surface plusieurs fois supérieure a la surface donnee en location. Par exemple, la conclusion d’un bail de dix-huit ans sur un hectare de vigne est conditionnée à l’engagement du preneur de vendre au bailleur la récolte de cinq hectares de vigne pendant dix-huit ans.
Cette obligation, qui va beaucoup plus loin que la livraison en nature du fermage ou du métayage, autorisée par les dispositions du statut, porte atteinte a la liberté économique du preneur. Elle l’empêche, pendant toute la durée du bail, de choisir d’autres modes de valorisation de sa production. En contrepartie de la signature du bail, le preneur doit abdiquer le droit de tout exploitant agricole de transformer lui-même sa production pour en tirer une rentabilité suplémentaire. Cette pratique comporte, enfin, un effet pervers en incitant les négociants, désireux de sécuriser leurs approvisionnements, à capter la propriété foncière a des prix élevés qui la rendent progressivement inaccessible aux exploitants.
Dans le but de mettre fin à ces dérives, il est proposé de compléter l’article L. 411-12 du code rural en prévoyant expressément l’interdiction pour le bailleur de subordonner la conclusion du bail ou son renouvellement à la souscription par le preneur d’un engagement contractuel de fourniture de biens ou de services ou de commercialisation des produits de l’exploitation.
La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement no 1304 .
Monsieur le ministre, nous sommes au Parlement national. Visiblement, nous recevions des hôtes étrangers. Il est un vin qui est le vin des rois et le roi des vins : il a besoin pour assurer l’équilibre de la balance commerciale française d’un équilibre entre les négociants, les grandes maisons, et les producteurs individuels ou coopérateurs.
Je soutiens pleinement mon collègue Martin, car nous avons besoin, dans le vignoble champenois, que la liberté du preneur soit garantie. Il s’agit de mettre fin à des clauses abusives qui peuvent, à terme, renforcer la concentration du capital. Il est important que, dans sa sagesse, le Gouvernement entende la voix de la Champagne, qui, en récompense, se fera certainement un grand plaisir de vous accompagner, monsieur le ministre, dans les dégustations à venir.
Sourires.
La Champagne pétille !
M. Martin soulève un réel problème et j’ai moi-même, au cours de mes auditions, rencontré les représentants du syndicat des producteurs de champagne. Le droit actuel, et en particulier l’article L. 411-12 du code rural, prévoit que le bail est payé en espèces, mais que par accord entre les parties, le prix du bail est payable en nature ou en partie en nature. C’est déjà une disposition particulière pour les cultures permanentes, viticoles, arboricoles, oléicoles et agrumicoles. Cela crée une difficulté.
Mais, monsieur le député, je suis obligé de vous rappeler plusieurs choses. Le bail, c’est une procédure contractuelle. Dans ce contrat, il y a deux signataires, le bailleur et le preneur. Cela signifie que si le bail a été signé par les deux parties, il y a un accord. Je sais quelle peut être quelquefois la position dominante de l’un sur l’autre, mais il n’empêche qu’il est difficile, quand les deux parties ont signé, d’aller dire qu’il y a là quelque chose d’illégal.
Je veux vous dire aussi que votre amendement me paraît satisfait par le droit existant, notamment par l’article L. 411-12, qui dit que, par accord entre les parties, le prix du bail est payable en nature, ou partie en nature, partie en espèces. Cela veut dire que le preneur peut bien, dans le bail, indiquer de quelle façon il va rémunérer le bailleur.
Et je voudrais vous rappeler l’article L. 415-12 : « Toute disposition des baux restrictive des droits stipulés par le présent titre est réputée non écrite ».
Je sais, monsieur Martin, comment les choses se passent dans la réalité, mais en matière de droit, il me semble difficile de faire évoluer les choses. La commission a émis un avis défavorable.
Même avis.
Monsieur le rapporteur, vous ne répondez pas du tout à l’attente des viticulteurs, qu’ils soient de Champagne, du Bordelais ou d’ailleurs. Les conséquences sont tout de même considérables, puisque le foncier est en train de partir sous le contrôle de quelques grands groupes français ou étrangers.
Vous qui vous dites les défenseurs des petits exploitants et des jeunes viticulteurs, sachez qu’aujourd’hui, ils ne peuvent plus acquérir le foncier, d’où un déséquilibre qui va créer des difficultés au sein de l’interprofession. Vous allez vous retrouver avec un négoce qui va tenir 80 à 90 % du foncier et un viticulteur qui ne pourra plus réagir devant les grands groupes financiers. Nous allons retourner à l’époque du serf et du seigneur. Je suis désolé, mais le viticulteur sera soumis à la volonté du grand négoce. Ce sont tout de même des pratiques qui ne sont plus dans l’esprit du bail.
Il s’agit de baux écrits, à long terme : nous pouvons interdire de telles pratiques, il suffit pour cela de compléter l’alinéa visé. Nous pouvons légiférer dans ce domaine.
J’appuie cette demande de manière extrêmement forte. Nous connaissons des vignobles où de grandes maisons achètent, dans chaque village, des ares – même pas des hectares –, non pas forcément de terres plantées, mais même de terres à vignes. Nous assistons à une concentration du capital extrêmement forte qui, à terme, peut mettre en danger l’équilibre et la survie des vignobles français.
En effet, dans une économie ouverte, avec des investisseurs extérieurs et des marchés qui peuvent fluctuer, plus l’intensité de la capitalisation augmente et plus les entreprises familiales et un ancrage territorial permettent seuls de maintenir l’aménagement du territoire sur les communes ainsi que la production des capitaux, des emplois et de la richesse sur le territoire national.
Nous sommes ici pour faire la loi. Il me semble qu’il serait de bon sens et de bon ton d’accepter cet amendement.
Très clairement, la loi interdit ce que vous évoquez. Je suis prêt à rediscuter avec vous…
…de ce vrai problème : les viticulteurs sont-ils prêts eux-mêmes à dénoncer…
…des contrats contraires à la loi en créant un rapport de forces ?
Je serais prêt, quant à moi, à envoyer un courrier à tous les viticulteurs de Champagne rappelant très clairement aux acheteurs ce que sont les règles du code rural. Il n’est pas possible, en sus du fermage et du bail normalement contractualisés, demander aux viticulteurs de se plier à des obligations qui n’existent pas.
Essayons, si nous en sommes tous d’accord, d’enclencher un processus visant, en fait, à faire appliquer la loi, laquelle n’a pas besoin d’être modifiée.
Face à de grandes caves ou à certains grands groupes financiers, les viticulteurs se retrouvent seuls et n’osent pas – on parle de « grands groupes financiers », mais on voit à peu près de qui il s’agit. Mais la loi existe ! Je suis prêt à faire ce courrier – nous pouvons en rediscuter – pour faire en sorte que la loi soit rappelée à ceux qui exercent des pressions qui ne sont pas légales et pour donner des arguments aux viticulteurs.
Vous avez tout à fait raison, monsieur le ministre. Il faudra prendre une décision et sensibiliser les acteurs. Les conséquences de ce problème sont énormes : ces groupes font monter le prix du foncier, les droits de succession ont en outre augmenté au point que les petits propriétaires ne pourront pas transmettre leurs vignes aux jeunes et, enfin, vous avez supprimé la possibilité de faire passer une partie du rachat des vignes en charges dans le cadre du démembrement. C’est énorme ! Les petits vont disparaître ! Vous allez tuer la viticulture française, et même les petits négociants ! Seuls resteront trois ou quatre grands groupes en Champagne, dans le Bordelais et dans d’autres vignobles français.
Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour intervenir afin que nous puissions trouver une solution à court terme, en collaboration avec les interprofessions des différentes régions.
L’amendement no 703 rectifié n’est pas adopté.
Je rejoins les propos de M. Martin. Député d’une circonscription où l’on élève du Saint-Joseph et du Condrieu – le vin de Champagne n’est pas le seul à être concerné –, permettez-moi de vous dire qu’un petit vignoble s’y est vendu une fortune, le prix à l’hectare de certaines parcelles de terrains ayant été multiplié par deux voire par trois, ce qui empêche parfois les donations entre parents et enfants. Les familles ont au-dessus de leur tête l’épée de Damoclès des investisseurs qui viennent acheter la propriété à un prix qui n’est pas justifié.
L’amendement no 1304 n’est pas adopté.
La cession du bail rural est une nécessité pour transmettre une exploitation à un repreneur. Cependant, elle n’est aujourd’hui permise que dans le cadre familial, évinçant ainsi les transmissions-installations qui se réalisent en dehors de ce dernier. Aussi, nombreuses sont les exploitations qui ont de multiples bailleurs : le repreneur hors cadre familial se voit ainsi dans l’impossibilité de reprendre l’ensemble des baux du preneur sortant.
L’objectif de la modification proposée est de permettre aux nouveaux installés hors cadre familial, dont le nombre est croissant, de bénéficier des contrats déjà en cours de l’exploitation qu’il reprend. Tel est donc l’objet de cet amendement.
Je répondrai globalement à l’ensemble des amendements portant sur cette question.
Le statut du fermage indique que le bail rural n’est pas cessible, sauf s’il s’agit d’un repreneur qui se situe dans le cadre familial. Telle est la réglementation. Nous sommes attachés au statut du fermage, nous avons eu l’occasion de le dire précédemment.
Vous proposez de déroger au droit du statut du fermage et de faire en sorte que le bail puisse être transmis à quelqu’un qui ne fasse pas partie du cadre familial, qui ne soit donc ni un descendant direct, ni un conjoint, marié ou pacsé, etc.
Je suis au regret de vous dire, monsieur Lurton, que la commission a émis un avis défavorable à l’adoption de cet amendement, parce qu’il faut également tenir compte de l’avis du bailleur. Lorsqu’il signe un bail avec un preneur, il sait que la transmission de ce bail ne pourra se faire que dans le cadre familial. Si l’on change les règles du jeu, il faut que le preneur ait signé un bail cessible, disposition que vous avez vous-même créée dans le cadre d’une précédente loi agricole.
Je suis donc au regret de vous dire que j’émettrai un avis défavorable à l’adoption de tous les amendements qui portent sur ce même thème.
Même avis.
Cela entraîne tout de même d’importantes difficultés pour les exploitants qui reprennent les baux hors cadre familial et rend impossible la reprise des contrats en cours d’exploitation. Les situations de ce genre augmentant de plus en plus, je ne vois pas très bien comment les personnes concernées pourront s’en sortir.
L’amendement no 1214 n’est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 136 rectifié , 247 deuxième rectification, 628 deuxième rectification, 1196 deuxième rectification, 1592 deuxième rectification et 1645 troisième rectification.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 136 rectifié .
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 247 deuxième rectification.
Cet amendement tendant à favoriser l’installation des jeunes agriculteurs, je vous remercie de le soutenir, mes amis !
La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement no 628 deuxième rectification.
La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement no 1196 deuxième rectification.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1592 deuxième rectification.
Cet amendement vise à favoriser l’installation des jeunes agriculteurs, notamment en facilitant les cessions.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1645 troisième rectification.
Défavorable. J’ai développé précédemment mon argumentation concernant l’ensemble de ces amendements.
Même avis que celui de M. le rapporteur.
Les amendements identiques nos 136 rectifié , 247 deuxième rectification, 628 deuxième rectification, 1196 deuxième rectification, 1592 deuxième rectification, 1645 troisième rectification ne sont pas adoptés.
Le bail à co-preneurs s’est développé ces deux dernières décennies dans un souci de protection d’un conjoint, d’une part et, d’autre part, dans celui d’apporter une sécurité supplémentaire au propriétaire.
Or, certains schémas ont conduit à ce que des baux entre époux soient signés alors même que l’un d’eux n’a pas la qualité d’exploitant. Dans ce cas de figure, les terres sont toujours effectivement exploitées, les fermages toujours réglés et le bail ne peut être remis en cause. Mais l’un des co-preneurs ne revêt pas la qualité d’exploitant. Une jurisprudence récente de la Cour de cassation semble autoriser le bailleur à refuser la cession de bail au motif que l’un des co-preneurs n’est pas effectivement associé exploitant de la société à laquelle le bail est mis à disposition. La situation des exploitants individuels est, quant à elle, plus confuse du fait qu’un seul d’entre eux est déclaré exploitant alors même qu’ils y participent tous les deux.
Dans un souci de sécurité juridique et considérant que la transmission du bail n’est légalement possible qu’au conjoint, partenaire pacsé, et descendant du preneur, il est proposé de clarifier cette situation en assurant la possibilité de cette transmission alors même que l’un des conjoints co-preneurs ne participe pas à l’exploitation.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 486 .
La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement no 587 .
Il s’agit de conforter la situation du conjoint non exploitant par rapport au bailleur, qu’il soit co-preneur ou non. En cas d’accident de la vie, on peut tout de même imaginer que le conjoint peut éventuellement s’installer. Comme nous avons eu l’occasion de le dire en commission, il peut arriver que le conjoint reprenne l’exploitation pour en assurer la continuité. Cet amendement vise vraiment à préserver le conjoint.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1595 .
Je voudrais dire deux ou trois choses aux collègues qui ont soutenu ces amendements.
Monsieur Le Ray, si le co-preneur qui n’est pas à l’origine sur l’exploitation souhaite s’installer, la situation est totalement différente : il peut reprendre le bail – forcément, puisqu’il va s’installer. Un problème se pose lorsque le co-preneur travaille à l’extérieur et ne reprend pas l’exploitation. L’objectif étant d’assurer la continuité de l’activité agricole, ce bail cessible n’est pas transmissible au co-preneur. Telle est la difficulté que nous connaissons aujourd’hui.
Je suis au regret de vous dire que j’émets un avis défavorable à ces amendements. Je comprends parfaitement la situation, je la connais, je connais des cas. Si le co-preneur s’installe, il n’y a pas de problème, il reprend l’exploitation ; si le co-preneur ne s’installe pas et n’est pas agriculteur, forcément, le bail cessible n’est pas transmis. Il conviendra de le donner à quelqu’un qui l’exploitera.
Même avis. C’est très clair.
En matière de bail rural, le preneur exploite le fonds loué très souvent dans le cadre d’une société comme, par exemple, un GAEC. En cas de co-preneurs, il n’est pas rare que tous ne soient pas membres de la société ou que la mise à disposition du fonds loué n’ait été effectuée que par l’un ou l’autre des co-preneurs. Ainsi, en cas de conjoints co-preneurs, il est fréquent que l’un, membre de la société, ait réalisé la mise à disposition et que l’autre ait conservé un statut de conjoint collaborateur participant aux travaux d’exploitation sans avoir pris la qualité d’associé.
Dans de tels cas, alors même que le fonds loué serait bien exploité et le fermage bien payé, il apparaît que la jurisprudence considère les co-preneurs comme de mauvaise foi.
L’amendement qui vous est présenté vise à remédier, en pratique, aux graves inconvénients résultant de cette jurisprudence car la cession de bail constitue, dans les conditions prévues par la loi, un moyen juridique très précieux qui permet la transmission de nombre d’exploitations agricoles, en tout ou partie.
Sur le même sujet, je soutiens la même argumentation : si le co-preneur est conjoint collaborateur, il peut reprendre le bail ; dans le cas contraire, il ne le peut pas. Avis défavorable.
Même avis.
L’amendement no 1215 n’est pas adopté.
Le régime déclaratif du contrôle des structures met parfois en danger l’exploitant fermier en place, lorsque des propriétaires délivrent un congé en vue de reprendre leur bien pour l’exploiter eux-mêmes, ou au profit de leur famille proche.
Dans certains cas, la reprise des biens loués peut même entraîner la cessation d’activité du fermier, au regard de la part des parcelles soustraites à son activité.
Cet amendement vise à permettre au fermier de demander au tribunal paritaire d’examiner si la reprise prévue dans un congé met en péril la viabilité de son exploitation et, le cas échéant, de ne pas permettre celle-ci, ou d’en réduire la dimension.
La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement no 629 rectifié .
La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement no 1198 deuxième rectification.
La commission a émis un avis défavorable à l’amendement de M. Cinieri et aux amendements identiques, tout simplement parce qu’ils sont déjà satisfaits par l’article L. 411-62 du code rural et de la pêche maritime, qui précise que « sans préjudice des dispositions de l’article L. 411-57, le bailleur ne peut reprendre une partie des biens qu’il a loués si cette reprise partielle est de nature à porter gravement atteinte à l’équilibre économique de l’ensemble de l’exploitation assurée par le preneur ». Je vous propose donc de retirer ces amendements, qui sont déjà satisfaits.
Même avis.
Les amendements identiques nos 249 deuxième rectification, 629 rectifié et 1198 deuxième rectification ne sont pas adoptés.
Étant observée l’incidence parfois désastreuse du congé-reprise, que la reprise soit partielle ou totale, sur la structure de l’exploitation du fermier en place, il est proposé, en remplacement du premier alinéa de l’article L. 411-62 du code rural et de la pêche maritime, un amendement à l’article L. 411-58 tendant à éviter que l’exercice du congé-reprise porte gravement atteinte à l’exploitation du preneur.
Il vous est donc proposé d’ajouter à l’article L. 411-58 un alinéa visant à empêcher le bailleur de reprendre tout ou partie du bien loué, s’il est jugé que la reprise est de nature à porter gravement atteinte à l’équilibre économique de l’exploitation.
Même avis.
L’amendement no 1216 n’est pas adopté.
Cet amendement fait suite à la décision du Conseil constitutionnel rendue le 27 septembre 2013 en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité. L’article L. 411-74 du code rural et de la pêche maritime faisait référence, au sujet des baux et des demandes de remboursement, à un « intérêt égal au taux pratiqué par le Crédit agricole ». Le Conseil constitutionnel ayant considéré qu’il n’était pas acceptable de faire ainsi référence au Crédit agricole, nous vous proposons, par cet amendement, de faire référence au « taux légal prévu par l’article L. 313-2 du code monétaire et financier ». Il semble en effet préférable, même si cet établissement a un rôle financier important, de ne pas le présenter comme une référence dans la loi.
L’amendement no 1419 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Barbara Romagnan, première inscrite sur l’article 5.
Je voulais saluer cet article, mais aussi obtenir quelques précisions pour me rassurer pleinement concernant les groupements agricoles d’exploitation en commun entre conjoints, issus d’exploitations agricoles à responsabilité limitée.
La loi de modernisation de la pêche et de l’agriculture de juillet 2010 a consacré une avancée importante, qui était d’ailleurs réclamée depuis longtemps par les agricultrices, en permettant la création de GAEC entre conjoints. La question que je me pose, et qui m’a souvent été posée par des agricultrices de Franche-Comté et de mon territoire, est la suivante : qu’en est-il aujourd’hui des couples qui ont créé une EARL avant 2010 parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix, ne pouvant s’installer en GAEC ? S’ils veulent aujourd’hui s’installer en GAEC, seront-ils comptés comme une unité économique, ou peuvent-ils l’être comme deux ? Il s’agit là d’un point important, car c’est une façon de reconnaître le travail de ces agricultrices au même niveau que celui de leur conjoint et, d’une manière générale, de reconnaître le travail des femmes, dont il sera question dans quinze jours dans la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes.
Il ne s’agit pas de reconnaître tous les GAEC entre conjoints issus d’une EARL, mais seulement ceux pour lesquels cela semblerait légitime, c’est-à-dire ceux où chacun aurait apporté une ferme, ou en tout cas des terres suffisantes pour que deux personnes puissent y travailler et y vivre.
Au-delà de cette reconnaissance, le principe de la transparence des aides européennes, avec deux unités économiques, est ici fondamental. En cohérence avec moi-même, j’avais évidemment déposé un amendement dans ce sens, qui a été déclaré irrecevable par la commission des finances au titre de l’article 40. Je regrette cette décision et je ne la comprends pas, car mon amendement concernait la répartition des aides européennes, et en aucun cas le budget de l’État français.
Mais je suis sûre que vous aurez des éléments à me donner pour me rassurer sur ce point.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je me pose les mêmes questions que ma collègue Barbara Romagnan. Nous sommes du même département, qui est très agricole, et je souhaiterais vous interpeller à mon tour sur la transparence des aides, notamment au sein des GAEC entre époux. Il est nécessaire, dans un souci d’équité, d’améliorer la reconnaissance des associés d’un GAEC, notamment lorsqu’il s’agit de deux époux.
Il y a encore un an, il était impossible pour des associés de bénéficier du GAEC ou de la transparence s’il existait entre eux un lien conjugal. La réglementation communautaire semble désormais permettre la chose, à deux conditions. La première, c’est qu’il existe dans le droit national un principe d’équivalence du traitement fiscal, social et économique des membres du groupement avec les exploitants individuels. La deuxième, c’est que les membres aient effectivement contribué au renforcement de la structure du groupement, soit à partir de 1985, date de création des GAEC, soit peut-être à partir d’une autre date, ce point restant à préciser.
Il demeure malgré tout des incertitudes. Concrètement, quels sont les critères précis qui seront pris en compte en matière de temps de travail, de surface et de revenus ? Par ailleurs, je ne comprends pas non plus pourquoi les amendements que nous avions déposés ont été retoqués au titre de l’article 40.
Ils ont été retoqués une première fois ; nous les avons présentés à nouveau, en les gageant, et ils ont été retoqués à nouveau, au motif qu’ils créaient une charge nouvelle. Nous ne comprenons pas cette notion de charge nouvelle, dans la mesure où il s’agit en réalité de procéder à une nouvelle répartition des aides européennes.
Ce dossier est assez technique, mais ce qui est en cause sur le fond, c’est la question de l’égalité. En effet, vous pouvez trouver côte à côte un GAEC entre concubins bénéficiant de la transparence et de deux parts, et un GAEC entre époux, ne comptant que pour une part. Il y a là une injustice à réparer.
La loi n’en dit rien, et peut-être ne peut-elle rien en dire, je ne sais pas. Il semble en tout cas, monsieur le ministre, que vous ayez déclaré que le problème était réglé. Nous l’espérons, mais nous aimerions vous entendre clairement sur ce point, car votre réponse est très attendue des agriculteurs et des agricultrices concernés.
Alors que cet article 5 précise les notions de GAEC total et de GAEC partiel, alors qu’il règle le problème des GAEC totaux qui externalisent leur atelier de méthanisation, nous avons déposé sur cet article des amendements de suppression. En effet, comme vient de l’expliquer Mme Genevard, et avant elle Mme Romagnan, non seulement l’évolution que vous proposez quant à la transparence des GAEC est insuffisante, mais elle institutionnalise un problème réel.
Pour qu’un GAEC soit transparent, il doit, semble-t-il, remplir deux conditions : il faut qu’il soit total et que les associés pris en compte dans la transparence renforcent la structure. Si l’on croise cette réglementation avec la surprime pour les 52 hectares que vous avez mise en oeuvre dans le cadre de la PAC, on instaure, monsieur le ministre, un effet pervers, que je vous ai déjà exposé hier.
Si je dis que votre groupe, et même votre majorité, est favorable à l’agriculture familiale, je pense que vous allez dire oui. Cela tombe bien : nous aussi. Si je dis que vous êtes favorables à l’industrie agroalimentaire, à l’emploi dans l’industrie agroalimentaire et à l’exportation de produits agroalimentaires, vous allez certainement nous dire que ces idées sont effectivement positives pour vous. Pour nous aussi !
Et pourtant, lorsqu’on croise la mesure relative aux 52 hectares sur-primés avec cette définition des GAEC transparents, on constate un problème, en particulier dans les zones intermédiaires, dont font partie la Franche-Comté, la Lorraine et, grosso modo, une diagonale qui représente le tiers des agriculteurs français. Que se passe-t-il ? Comme tout le monde ici n’est pas expert en structures agricoles, je vais prendre un exemple, afin de me faire comprendre. Prenons un éleveur A : il installe son fils en reprenant une ferme voisine qui vient grossir le patrimoine familial et ils créent ensemble un GAEC. Dans ce cas-là, comme il y a renforcement de la structure, il y aura deux surprimes. Je ne vous le reproche pas : ils y ont droit et c’est très bien. Prenons maintenant un éleveur B : il installe son fils, mais n’a pas trouvé de terre. Il densifie simplement sa production, produit plus de lait et plus de viande et développe ses ateliers de production. Lui n’aura qu’une seule surprime. Le problème est là : je ne vous reproche pas de donner deux surprimes à l’éleveur A, mais de n’en pas donner deux à l’éleveur B.
Pire encore : l’éleveur B va payer très lourdement le passage des droits à paiement unique aux droits à paiement de base. Je m’explique : les éleveurs qui ont intensifié leur production il y a quelques années ont des DPU à l’hectare relativement élevés. Lorsqu’ils ont un atelier de production de viande ou un atelier de production de lait, ils touchent une somme relativement importante à l’hectare. Avec la convergence des DPU vers les DPB, ces exploitations vont connaître une chute considérable de leurs droits à paiement de base. Elles vont donc perdre beaucoup au niveau des dotations et n’auront, de surcroît, aucun droit à la surprime, à la différence d’autres exploitations.
En résumé, vous voulez aider les structures familiales qui ont cherché à développer davantage leur production que leur taille, mais vous les pénalisez. Vous allez donc exactement à l’encontre des objectifs que vous affichez.
De plus, dès lors que vous compromettez l’avenir de ces structures qui produisent de façon importante sur un territoire donné, vous affaiblissez les industries agroalimentaires qui vont forcément avoir de plus en plus de mal à trouver les matières premières dont elles ont besoin pour continuer à travailler, car les ateliers ainsi menacés par l’évolution que vous proposez vont évidemment arrêter leur spéculation et leur activité.
C’est donc faux sur toute la ligne : vous allez contre l’intérêt des structures familiales et vous allez contre le développement des industries agroalimentaires. Car on sait bien que les industries agroalimentaires qui ne disposent pas de matières premières sur place sont condamnées.
Vous ne réglez donc pas ce problème majeur qui concerne le tiers du territoire français, et surtout, c’est là le pire, la proposition que vous faites va graver ce problème dans le marbre.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Je veux simplement essayer de répondre à la question posée sur l’article 40, qui pose toujours mille et un problèmes à nos collègues, et, dans notre cas, notamment à Barbara Romagnan. Si l’on préconise de faire valoir la transparence dans les situations qu’elle a évoquées, on accroît les droits à prime. Accroître les droits à prime, c’est accroître la dépense publique.
C’est en tout cas pour cette raison que l’article 40 joue.
S’agissant de la possibilité que les EARL deviennent des GAEC, et que la transparence soit reconnue pour les GAEC, c’est au Gouvernement de nous dire quel est son point de vue et quelles sont les modalités qu’il évoque. Je me prononce simplement sur la recevabilité financière qui ne pouvait pas être accordée, compte tenu du fait que la mesure aurait pu accroître les droits à prime.
Merci, monsieur le président de la commission des affaires économiques, de votre solidarité avec le président de la commission des finances, qui aurait eu du mal à arriver jusqu’ici pour justifier de l’irrecevabilité financière de l’amendement de Mme Romagnan.
La parole est à M. le ministre.
Je ne reviendrai pas sur l’article 40, le président de la commission nous a parfaitement expliqué pourquoi l’amendement n’était pas recevable.
Mais la vraie question que soulèvent nos débats, que M. Lamblin a d’ailleurs expliquée à son insu, est celle de l’enjeu des cinquante-deux premiers hectares et de la transparence des GAEC qui va avec. Aujourd’hui, le GAEC est une forme juridique qui garantit la présence de parts sociales et de chefs d’exploitation. Je ne dis pas pour autant que dans les EARL, il n’y a pas de chefs d’exploitations, avec des parts, qui participent à l’activité économique de l’exploitation, mais aujourd’hui, dans le droit, la seule forme juridique qui nous l’assure, c’est le GAEC.
Je me suis battu à l’échelle européenne pour maintenir le statut des GAEC.
C’était un statut dérogatoire en droit européen, qui aurait pu disparaître dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune. Nous avons intégré, dans le droit européen, le statut des GAEC et la transparence qui va avec, parce qu’il importait qu’une structure juridique garantisse la présence de chefs d’exploitations.
Au cours de nos débats de ces derniers jours, la question de la financiarisation de l’agriculture a été posée. Lorsque nous discutons de la question du champagne, cette question est en arrière-plan.
Qu’est-ce qui nous garantit qu’il y ait vraiment des chefs d’exploitation, si ce n’est l’existence d’une forme juridique les imposant ? La transparence du GAEC est donc essentielle pour nous, et c’est pour cela que nous la proposons dans cet article.
Une deuxième question se pose sur la parité. Dans l’histoire, les GAEC ont précédé les EARL, mais les EARL regroupant un homme et une femme ont précédé les GAEC regroupant un homme et une femme. Par conséquent, à un moment donné, un homme et une femme dans une exploitation ne pouvaient pas choisir la forme du GAEC, puisque ce n’était pas juridiquement possible.
À partir du moment où l’on assure la transparence des GAEC, qui est la condition pour avoir des chefs d’exploitation dans des organisations collectives, il convient de revenir sur une injustice qui a fait que pendant une période, un homme et une femme souhaitant être à la tête d’une exploitation avaient pour seul choix la forme juridique de l’EARL. Une fois adoptée la transparence des GAEC, ils pourront passer du statut d’EARL au statut de GAEC pour bénéficier de la fameuse prime pour les premiers hectares.
L’exemple qu’a donné M. Lamblin était très intéressant ; il nous présentait un cas A, dans lequel un agriculteur agrandit sa ferme pour accueillir son fils ou quelqu’un d’autre. Ces deux associés vont créer un GAEC, et puisque ce sont deux chefs d’exploitations avec des parts sociales parfaitement identifiées, ils vont toucher deux fois la surprime pour les cinquante-deux premiers hectares. Dans le cas B, un exploitant accroît sa production, l’intensifie et augmente sa charge de travail, mais en restant sur la même surface.
Le vrai problème est que la politique agricole commune verse les aides du premier pilier à l’hectare, pas à la production ou au nombre d’emplois. Le seul moyen que nous ayons trouvé pour lier l’emploi et les aides à l’hectare a été de surprimer les premiers hectares. Voilà quelle est la logique.
Donc M. Lamblin a raison, mais nous voulons garder des exploitations agricoles avec des chefs d’exploitation à leur tête, c’est-à-dire des agriculteurs, des paysans et des éleveurs, et je sais que vous le souhaitez aussi. Pour le faire et avoir une garantie juridique, aujourd’hui, on doit s’appuyer sur le GAEC. Et nous devons corriger une inégalité car pendant un temps, seul le statut de l’EARL permettait le travail conjoint d’un homme et d’une femme, et nous devons donner la possibilité à ceux qui le souhaitent de passer du statut de l’EARL au statut de GAEC. Une fois que la transparence des GAEC sera actée, cela fera l’objet des négociations au niveau de la Commission européenne afin que cette transformation soit possible, car elle nous semble tout à fait logique.
Je comprends bien vos explications, monsieur le ministre, mais le problème au niveau de la structure est le suivant : si nous considérons des exploitations qui ont la même taille, la même production et le même nombre de travailleurs, certaines vont avoir des aides d’un certain niveau et d’autres auront des aides inférieures alors qu’elles font travailler le même nombre de familles, et peut-être même produisent encore plus. C’est vécu comme une injustice, car ces situations peuvent exister dans le même village, et il est possible qu’elles concernent des exploitations de taille similaire.
Je comprends que vous soyez coincés par la réglementation européenne, mais il faut alors imaginer des compensations pour que la situation soit plus juste. Peut-être cela doit-il se faire par un autre biais, mais on ne peut pas rester sur un système dans lequel des exploitations vont perdre beaucoup et d’autres beaucoup moins.
À cela s’ajoute le fait que ceux qui se sont développés en intensifiant leur production mais sans augmenter la taille de leur exploitation ont eu des DPU plus conséquentes. Si l’on prend l’historique d’une ferme qui avait de gros volumes de production de viande et de lait, à l’époque où il y avait des primes pour les vaches laitières et des primes à la viande, les primes étaient relativement conséquentes. Rapporté à l’hectare exploité, cela représentait des DPU importants pour chaque hectare exploité, en tout cas beaucoup plus que 260 euros l’hectare. Quand ces ex-DPU vont converger vers le règlement futur, ces fermes vont perdre des sommes considérables, au point de mettre en péril leur avenir économique.
Il faut donc essayer de trouver, pas forcément lors de l’examen de ce texte, des compensations à ce déséquilibre.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué le passage des EARL aux GAEC entre époux. Mais il faut aussi considérer la situation des GAEC entre époux qui ne bénéficient que d’une part et qui veulent, par équité, avoir une deuxième part.
Je voudrais avoir votre confirmation sur ce point : le texte prévoit que la transparence s’appliquera à tous les membres du GAEC dès lors qu’ils rempliront les nouveaux critères de transparence. Ces nouveaux critères sont le renforcement de la structure par l’apport de surface, le temps de travail, le revenu. L’alinéa 9 de l’article 5 prévoit que ces conditions seront définies par décret.
Définir ces conditions, et donc permettre la reconnaissance totale des membres du GAEC relève par conséquent de la responsabilité du Gouvernement. Je voudrais que vous me reprécisiez les choses sur ce point.
C’est inscrit dans le texte.
Vous confirmez donc que la situation des GAEC entre époux au sein desquels chaque membre ne bénéficie pas de la transparence changera et que chaque époux bénéficiera demain de la transparence – dès lors qu’il satisfait les critères de la transparence ?
Madame la députée, si un GAEC entre époux ou conjoints existe aujourd’hui et qu’il n’y a qu’une seule part, est-ce le résultat d’un choix qui a été fait à un moment, ou est-ce parce que l’activité économique dégagée ne permet pas d’avoir deux parts ? Il doit quand même y avoir une raison. Un GAEC est créé parce que l’on crée des parts et que l’activité permet d’avoir plusieurs chefs d’exploitation. C’est cela, la vocation du GAEC.
Avoir un GAEC avec deux personnes qui y participent sans qu’il y ait deux parts sociales, ce n’est pas ce qu’il y a de plus logique. On ne crée pas un GAEC tout seul, on le crée parce que l’on a un associé à qui l’on donne des parts et qui a une fonction économique. Et les critères que nous avons fixés sur la transparence s’appliqueront.
Donc, dans le cas que vous évoquez, il peut s’agir d’un GAEC à deux personnes dans lequel un des associés était là sans avoir de part. Et il faudra alors qu’il justifie de son droit à avoir des parts. C’est aussi simple que cela.
La transparence est faite pour assurer l’idée toute simple que lorsque l’on est dans une exploitation collective, ceux qui sont à sa tête ont des parts sociales et une activité qui est justifiée. C’est bien le sujet du nombre d’agriculteurs et du nombre d’exploitants demain. À défaut de critères juridiques permettant de le justifier, nous pourrions assister à une financiarisation très rapide de l’agriculture. Au lieu d’avoir des chefs d’exploitation – agriculteurs, paysans ou éleveurs –, il y aurait des salariés. Voilà l’enjeu.
Je n’ai toujours pas très bien compris. Je comprends qu’il faille justifier de l’activité, il ne s’agit pas de prévoir que tous les conjoints en EARL doivent forcément passer en GAEC avec deux parts. Mais pour ceux qui n’avaient pas eu le choix, et dans la mesure où c’est justifié parce que chacun amène sa ferme, qu’il y a suffisamment de terres ou que la structure dégage suffisamment d’activité, est-ce qu’il sera possible de passer en GAEC à deux parts, ou bien cela est-il encore l’objet d’une négociation ?
Au niveau européen, le problème est qu’avec la surprime aux premiers hectares, dans le cadre juridique qui existe, l’Europe ne souhaite pas que l’on se mette à diviser les exploitations pour bénéficier de la surprime aux cinquante-deux premiers hectares. Donc, si la situation d’une EARL entre époux ou conjoints justifie la création d’un GAEC dans les conditions de transparence qui sont évoquées, tout l’objet de ce que nous souhaitons mettre en route est de faire justice à ceux qui avaient été obligés de faire le choix de l’EARL parce que le choix du GAEC ne leur était pas ouvert. On ne peut pas les pénaliser pour les primes sur les premiers hectares si l’objectif de l’EARL qu’ils avaient créée était de regrouper des époux ou des conjoints. Ils pourront donc redevenir, dans les conditions de transparence qui sont évoquées, un GAEC entre époux ou conjoints.
Avec deux parts, oui. Si elles sont justifiées.
Monsieur le ministre, il faut prendre en compte l’histoire ! L’EARL a été créée en 1985, mais le GAEC entre époux est beaucoup plus tardif : très récent, il a été mis en place il y a seulement quelques années.
En 2010 !
En 2010, exactement. On compte très peu d’EARL aujourd’hui : il n’existe pratiquement que des GAEC entre époux.
Dans ce cas, il n’y a pas de problème !
Si, il y a un problème. Dans de nombreux GAEC entre époux, il n’y a pas de transparence pour chacun des membres du GAEC. Voilà le problème, et c’est la question que nous vous posons !
Un GAEC entre époux où il n’y aurait qu’une seule part n’est pas un GAEC,…
…puisqu’un GAEC est une organisation avec un objectif collectif : c’est la différence avec une exploitation agricole, dirigée par un chef d’exploitation – qui peut avoir une conjointe, d’ailleurs. Un GAEC comporte des parts sociales : c’est bien pour cela que l’on utilise cette forme juridique, et que la transparence des GAEC est importante et justifiée.
Sourires.
J’ai répondu à cette question de manière précise.
Nous avons oublié un élément : le comité d’agrément des GAEC. Ce dernier reconnaît les GAEC, et précise surtout le nombre d’exploitations reconnues au sein d’un GAEC, qui détermine le niveau des aides.
Prenons l’exemple d’une exploitation tenue par un couple. Si ce couple a réuni deux exploitations, alors il forme un GAEC avec deux exploitations reconnues et deux plafonds. Mais si ce couple ne détient, au départ, qu’une seule exploitation, alors il ne forme pas de GAEC, mais tout simplement une EARL.
Eh voilà ! Vous avez répondu à la question !
Nous évoquons là des questions techniques.
Vous avez raison, monsieur Le Ray. Un GAEC créé avec un exploitant et une exploitation ne comporte qu’une part. Arrive un deuxième associé. S’il n’y a pas de regroupement d’exploitations, c’est-à-dire si ce deuxième associé n’apporte pas une deuxième exploitation et ne constitue donc pas un deuxième exploitant, alors le GAEC ne comporte toujours qu’une seule part. Un regroupement d’exploitations est nécessaire pour qu’il y ait une part supplémentaire.
Chez moi, nous sommes cinq associés. Au fil du temps, nous avons regroupé trois exploitations : il y a donc trois parts pour cinq associés, et trois bases de 52 hectares. Les parts ne sont donc pas attribuées par un comité d’agrément des GAEC en fonction du nombre d’actifs ou d’exploitants, mais en fonction du nombre d’exploitations regroupées.
La question posée est la suivante : les GAEC sont-ils toujours régis par les règles du passé, dont vient de parler mon collègue Yves Daniel, en vertu desquelles on peut être cinq associés mais n’avoir réuni que trois exploitations, et donc ne voir pris en compte, au regard de la future réglementation relative aux aides européennes, que trois fois les 50 premiers hectares ? Ou bien les GAEC sont-ils régis par de nouvelles règles selon lesquelles, dès lors que l’on est plusieurs associés – disons deux, dans le cas d’un couple détenant une EARL avec le même nombre de parts sociales –, on peut former une exploitation GAEC avec la transparence, réunissant deux associés et permettant donc de prendre en compte deux fois les 50 premiers hectares ?
La question se pose à cause de cette nouvelle notion des 50 premiers hectares. Il est un peu surprenant que nous nous posions cette question ici, mais après tout, c’est très bien : cela signifie qu’il existe une incompréhension face à cette nouveauté.
Deux personnes associées dans une EARL dont elles détiennent chacune 50 % des parts peuvent-elles ou non former un GAEC permettant de prendre deux fois en compte les 50 premiers hectares ? La formation d’un tel GAEC est-elle possible avec une seule exploitation dont les parts sociales étaient partagées ? La question se pose dans ces termes. Efface-t-on l’histoire, monsieur le ministre ?
Pour la dernière fois, je rappelle une chose simple : si vous voulez toucher deux fois les aides correspondant à 52 hectares, il faut détenir au moins 104 hectares.
Si la question est de savoir par combien multiplier le nombre d’associés pour obtenir les 52 premiers hectares, alors je vous renvoie à vos cours de calcul – appelons Vincent Peillon rapidement !
Sourires.
Pour avoir deux fois 52 hectares, il est nécessaire de posséder 104 hectares. Et pour avoir trois fois 52 hectares ? M. Le Ray pourra répondre à cette question une fois qu’il aura voté le projet de loi !
Sourires.
Sourires.
Monsieur le ministre, je veux simplement vous préciser qu’il existe des exploitations de 156 hectares avec une seule part.
Oui !
Il faut donc faire évoluer les règles vers la prise en compte du nombre d’unités-travailleurs plutôt que de la taille des exploitations.
On essaie !
Pouvons-nous enfin examiner l’amendement no 94 ?
La parole est à M. Antoine Herth.
Après un débat extrêmement enrichissant et intéressant, je vais retirer cet amendement. Puisque le Gouvernement a créé un problème, nous lui laissons le soin de le régler.
L’amendement no 94 est retiré.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1596 .
Tout le monde étant d’accord pour dire que deux fois 52 font 104 et que trois fois 52 font 156,
Sourires
Même avis.
L’amendement no 1596 n’est pas adopté.
L’article 5 est adopté.
Article 5
La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures vingt-cinq.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 45 , portant article additionnel après l’article 5.
Je vais, dans un même mouvement, donner la position du groupe UMP sur l’article 6 et défendre les amendements cosignés par mes collègues.
L’article 6 aborde deux sujets de fond. Une fois de plus, monsieur le ministre, vous cherchez à résoudre un problème, celui des sociétés coopératives, en mettant en place la fameuse « clause miroir ». De notre côté, nous cherchons à vous alerter sur les effets indésirables de ce dispositif.
Nous comprenons bien votre motivation : les négociations dans le secteur laitier sont extrêmement complexes, difficiles, tendues, marquées par des rapports de force alors qu’elles devraient s’inscrire dans un souci de recherche de compromis. Cela explique votre démarche.
Dans l’idéal, le projet de loi devrait réserver l’application de la « clause miroir » au seul domaine laitier. C’est cela qu’il faudrait pouvoir inscrire dans le projet de loi. Malheureusement, la loi française se doit de poser des principes généraux qui s’appliquent dès lors à l’ensemble des structures coopératives. Du coup, en cherchant à régler le problème du secteur laitier, vous en créez de nouveaux dans les secteurs des céréales, de la betterave sucrière, et dans toutes les structures coopératives que nous connaissons traitant d’autres produits que le lait. Nous n’avons pas déposé d’amendements sur ce point, mais je tiens à vous alerter sur cette difficulté que crée votre dispositif.
Qui plus est, par effet de ricochet, vous remettez aussi en cause l’esprit et le fondement juridique de la relation entre le producteur agricole et la coopérative dont il est adhérent. La coopérative n’est pas qu’un acheteur, c’est le prolongement de l’exploitation – vous le savez très bien : c’est le fondement même de la conception et du fonctionnement des sociétés coopératives, tel qu’on l’enseigne dans l’enseignement agricole. Voilà deux éléments non négligeables et qui posent problème dans cet article 6.
Autre question, plus politique, celle du CICE. Vous reprocherez à la droite – et je sais bien que vous le ferez encore davantage lors de l’examen des articles suivants – de n’avoir pas fait ce qu’il fallait pour que les discussions sur la contractualisation se déroulent bien, de n’avoir pas assez régulé les interprofessions – j’en passe, et des meilleures –, d’avoir fait le lit de la grande distribution, etc. Reste que vos dispositifs, et particulièrement le CICE, favorisent considérablement et mécaniquement la grande distribution, dans la mesure où la masse salariale, considérable, constitue l’essentiel de ses charges, ce qui n’est pas le cas dans les entreprises de transformation et les coopératives. De ce fait, par effet de ricochet également, vous venez perturber l’équilibre des relations entre la distribution et la transformation.
Telle est, madame la présidente, notre appréciation générale et les arguments que nous mobilisons pour la défense des amendements cosignés par mes collègues.
L’amendement no 1133 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 960 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1067 .
Nous proposons de compléter la seconde phrase de l’alinéa 8 par les mots : « comprenant, s’il y a lieu, les acomptes et les compléments de prix », par cohérence avec la rédaction de l’article L. 521-3-1 du code rural et de la pêche maritime.
L’amendement no 1067 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1080 .
Notre collègue Franck Montaugé est à l’origine de cet amendement que je défends avec fierté au nom du groupe SRC. L’objectif est de moderniser la vie des coopératives en précisant que, parmi les associés non coopérateurs d’une coopérative, peuvent figurer les salariés en activité de ladite société, et en améliorant la représentation des salariés au sein de l’organe délibérant de la coopérative, qui disposeront, lorsqu’ils sont majoritaires parmi les associés non coopérateurs, d’un quart des voix en assemblée générale contre un cinquième aujourd’hui. Il s’agit donc de poursuivre l’évolution d’un processus déjà enclenché auquel le mouvement coopératif est favorable.
L’amendement no 1080 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Les amendements nos 1139 , 1145 , 1148 rectifié et 1154 de M. le rapporteur sont rédactionnels.
Les amendements nos 1139 , 1145 , 1148 rectifié et 1154 , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1066 .
Dans le cadre de la modernisation de la vie sociale des coopératives, nous proposons, par cet amendement préparé par notre collègue Hervé Pellois, de donner une base légale à la fonction de médiateur auquel un associé et sa coopérative peuvent recourir.
L’amendement no 1066 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 11 rectifié et 1597 .
La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement no 11 rectifié .
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1597 .
L’objet de cet amendement est d’élargir la possibilité de saisir le Haut Conseil de la coopération agricolede à toute personne intéressée.
Les amendements identiques nos 11 rectifié et 1597 , repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Yves Daniel, pour soutenir l’amendement no 1259 rectifié .
Deux commissaires du gouvernement siègent au Haut Conseil de la coopération agricole créé par la loi d’orientation agricole de 2006 : le premier est désigné par le ministre de l’agriculture, le second par le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Le projet de loi prévoit de supprimer le deuxième commissaire, ce qui semble contre-productif au moment où, plus que jamais, la cohérence entre les textes régissant les coopératives est une nécessité et où un projet de loi sur l’économie sociale et solidaire est en cours d’adoption.
La présence des deux représentants des autorités publiques auprès des coopératives est un gage de concertation et de cohérence. Nous proposons donc rédiger ainsi le début de l’alinéa 47 : « Deux commissaires du gouvernement sont placés auprès du Haut Conseil : l’un désigné par le minsitre chargé de l’agriculture et l’autre désigné par le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire. Le commissaire du gouvernement désigné par le ministre chargé de l’agriculture peut demander l’inscription », le reste sans changement.
L’amendement no 1259 rectifié , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
La parole est à M. Yves Daniel, pour soutenir l’amendement no 1492 , tendant à insérer un article additionnel après l’article 6.
Cet article additionnel serait ainsi fédigé : « A la première phrase du premier alinéa de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : "agricole", sont insérés les mots : "ou par une société coopérative agricole, telle que définie au titre II du livre V du présent code," ».
Les sociétés coopératives agricoles ont pour objet l’utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité. Elles favorisent donc la mutualisation et l’usage raisonnable des ressources et moyens nécessaires aux exploitants agricoles. Or certaines formes de sociétés coopératives agricoles telles que les CUMA sont considérées comme des entreprises de services et non comme le prolongement des exploitations agricoles. Du fait de cette définition restrictive du règlement national d’urbanisme et des règles applicables aux PLU qui ne permettent, en zones agricoles, que les constructions et les installations nécessaires à l’exploitation agricole, les CUMA se voient souvent refuser un permis de construire pour un bâtiment de stockage agricole dès lors qu’il se situe en zone agricole.
De fait, alors qu’une exploitation demandant un permis de construire pour un bâtiment non partagé en zone agricole se verra autorisée, un bâtiment servant à plusieurs exploitants rassemblés ne le sera pas. Aussi, cet amendement propose-t-il d’élargir la définition des activités agricoles mentionnée à l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime à celles exercées par les sociétés coopératives agricoles afin d’encourager le regroupement des besoins et, in fine, la protection du foncier face à l’artificialisation croissante des sols.
Précisons que les bâtiments des CUMA sont obligatoirement situés dans le périmètre d’activité où est utilisé le matériel agricole. Cette proposition va donc dans le sens de l’agro-écologie, des économies d’énergie et du développement durable.
Je suis du même avis que le rapporteur, pour une raison simple : cette proposition aboutirait à donner à l’ensemble des coopératives la possibilité de construire. On peut le comprendre pour les CUMA, mais une autorisation aussi générale n’est pas envisageable. Vous posez une vraie question s’agissant des CUMA, mais il n’est pas possible de l’inscrire ainsi dans la loi.
J’entends la réponse de M. le ministre. Il conviendra peut-être de retravailler, dans la suite de nos travaux, cette proposition pour qu’elle s’applique aux CUMA. En attendant, je retire mon amendement.
L’amendement no 1492 est retiré.
Sur l’article 7, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre.
J’interviens en mon nom et au nom de Mme Annick Le Loch qui a dû rejoindre ce soir sa circonscription.
L’article 7 du projet de loi que nous examinons vise à compléter les dispositions existantes concernant la contractualisation et le rôle du médiateur. Nous nous permettons, avec Mme Le Loch, un bref rappel du contexte : après la crise du lait subie au printemps dernier et en dépit de la tendance haussière actuelle de la demande en lait, donc de son prix, les éleveurs français sont à la peine et demeurent tout de même moins rétribués que leurs homologues allemands. Sont en cause l’explosion du cours des céréales, la fin des quotas prévue pour 2015 et surtout le partage de la marge avec les distributeurs et les industriels.
Le rôle du médiateur nommé par le Gouvernement a alors pris tout son sens. Un renforcement des outils est devenu nécessaire pour une meilleure organisation économique et pour des relations commerciales plus fluides dans les secteurs agricole et agroalimentaire plus équilibrés.
Je salue donc vivement le fait que le texte renforce le rôle et les missions du médiateur en les inscrivant dans la loi et en étendant sa compétence à l’ensemble de la chaîne agroalimentaire. Il pourra ainsi intervenir sur des questions structurelles. Son rôle sera également primordial pour favoriser une meilleure application des contrats et pour construire, du producteur au distributeur, des relations commerciales plus équilibrées.
Vous avez déclaré, monsieur le ministre, que cette médiation permettrait de fluidifier les relations commerciales et de renouer le dialogue. Cela s’inscrit parfaitement dans l’esprit et la continuité du travail effectué sur le volet « LME » du projet de loi relatif à la consommation dont Mme Le Loch était la rapporteure. La volonté reste inchangée : rétablir la confiance et le dialogue dans les relations commerciales. Nous nous félicitons, au passage, de la mise en cohérence entre les deux textes qui introduit une clause de renégociation des prix pour les coopératives dans le texte que nous examinons aujourd’hui, afin qu’elles puissent faire face, comme les autres, à la volatilité des prix des matières premières.
Je conclurai en évoquant les amendements que nous avons déposés sur ce texte avec Mme Le Loch et qui visent à conforter le rôle des organisations de producteurs. Afin quelles soient au coeur du dispositif de la contractualisation, l’un de ces amendements prévoit que les organisations de producteurs pourront saisir un médiateur et participer à la médiation au nom de leurs membres. Les autres visent à rendre obligatoire la transmission des données de l’acheteur à l’organisation des producteurs afin que celle-ci dispose de toutes les informations nécessaires à sa mission de négociation, notamment sur les volumes et les caractéristiques des produits livrés.
Renforcer les organisations de producteurs, c’est soutenir les producteurs, leur métier et protéger l’ensemble de la filière en permettant un rééquilibrage dans la relation commerciale. Il est donc impératif, monsieur le ministre, et vous le savez, de défendre réellement les producteurs sur le moyen et le long terme pour qu’ils retrouvent le moral et la confiance, donc de créer les conditions d’un système qui leur donne du poids. Telle est la volonté de ce texte.
Comme l’a fait mon collègue Antoine Herth à l’article 6, je m’exprime au nom des députés du groupe UMP sur l’article 7. Je veux rappeler notre attachement à la contractualisation, partagé du reste sur l’ensemble des bancs de cet hémicycle. Cette contractualisation a été mise en place en juillet 2010 lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture, dans un contexte d’annonce de fin des quotas laitiers, afin d’assurer des relations pérennes entre les fournisseurs et les acheteurs dans la détermination des volume et des prix, qu’il s’agisse du lait ou des produits agricoles en général.
Nous sommes favorables à tout ce qui peut améliorer la contractualisation dans un dispositif qui présentait à l’époque l’avantage, mais également l’inconvénient, d’être totalement nouveau. Nous sommes particulièrement attachés, vous le savez, monsieur le ministre, monsieur le président, et j’en veux pour preuve les débats que nous avons eus en commission, à l’encadrement du rôle du médiateur, particulièrement pour ce qui est des délais dans lequel il devra rendre ses réponses afin que le temps ne profite pas à l’acheteur au détriment du vendeur.
Voilà ce que je souhaitais souligner au nom des députés du groupe UMP, en précisant, madame la présidente, que cette intervention vaut défense des amendements que nous avons déposés sur l’article 7.
Nous avons essayé de faire en sorte que la question des coûts de production soit intégrée, ce qui n’était pas le cas. D’où les dispositions prises dans le cadre de la loi relative à la consommation et l’instauration de la clause miroir dans la loi agricole.
Dans les coopératives, l’objectif n’est pas de remettre en cause le fait que le coopérateur agriculteur est par définition un membre de la coopérative, mais d’amener le conseil d’administration à organiser un débat en assemblée générale sur la fixation des prix et toutes les grandes questions posées par les coûts de production.
Nous avions déjà discuté de la médiation en commission. Fixer un délai, qui plus est dans la loi, n’est pas le meilleur moyen d’aider le médiateur à négocier. Qui dit médiation dit, au départ, conflit d’intérêts. Si l’on impose un délai, celui qui n’a pas envie de bouger n’aura qu’à attendre le dernier moment et le médiateur se retrouvera en position de faiblesse. Il faut lui laisser la capacité de mener la négociation pour faire en sorte que les parties bougent, en particulier celles qui y ont le moins intérêt. En fixant une date, on affaiblit la capacité du médiateur à faire évoluer le rapport de forces.
Cet amendement vise à expliciter la notion de producteur ayant engagé une production depuis moins de cinq ans.
Favorable. C’est un engagement que j’avais pris en commission.
L’amendement no 1170 est adopté.
La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement no 1036 .
Les amendements nos 1036 , 1035 et 1031 rectifié , acceptés par la commission et le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L’amendement no 1386 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 821 .
Je voudrais profiter de cet amendement pour rappeler ce que j’ai dit lors de la discussion générale.
La mise en place d’un médiateur des relations commerciales agricoles est indéniablement une avancée sur le plan de transparence des relations entre le distributeur, particulièrement la grande distribution, et le producteur, pour connaître les marges et relever les abus. Cela étant, dans la mesure où l’on ne met pas en place un système mécanique pour garantir des prix à la production, son rôle restera à l’évidence considérablement limité : quand bien même il pourra émettre des recommandations, je suis assez sceptique sur les résultats de cette avancée.
Même si le texte encadre les relations entre les professionnels, on sait très bien qu’un donneur d’ordres, par exemple, peut très facilement annuler les liens qu’il a avec un producteur s’il estime que ce dernier abuse des possibilités que lui donnera la nouvelle législation. « Tout litige entre professionnels relatif à l’exécution d’un contrat ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit faire l’objet d’une procédure de médiation préalablement à toute saisine du juge, sauf si le contrat en dispose autrement ou en cas de recours à l’arbitrage ». Le seul fait d’écrire « sauf si le contrat en dispose autrement » risque fort, je le crains, d’ouvrir la porte à des clauses qui, de fait, excluront toute possibilité de saisir le médiateur.
Défavorable. L’esprit même de la médiation est l’une des clés de son succès : elle repose sur une volonté minimale des parties d’y participer. Si elles ne veulent pas de médiation, monsieur Chassaigne, il est très difficile de la leur imposer. Et si, par contrat, elles décident qu’elles n’y auront pas recours, je ne vois pas pourquoi la loi la leur imposerait. Cela ne fonctionnera pas. Il faut pouvoir laisser aux deux parties la possibilité de ne pas recourir à la médiation si, par contrat, elles le décident.
Défavorable.
Nous sommes bien dans un contexte conflictuel : exclure toute médiation supposerait que les parties sont persuadés que ce qu’elles signent sera appliqué et respecté quoi qu’il arrive. Il en n’est évidemment pas de même dans le cas d’espèce qui nous occupe : on considère a priori qu’il peut se poser un problème et je ne vois pas comment des agriculteurs pourraient dans ces conditions signer un contrat prévoyant qu’il n’y aura jamais de recours à la médiation – car s’agit bien d’une clause contractuelle, où la signature des deux parties est obligatoire.
Je comprends que l’on aimerait souhaiter cadenasser un peu plus le système, mais dès lors qu’il s’agit d’un contrat signé par deux parties, nous ne voyons pas comment on pourrait imposer une telle idée. Si le recours à la médiation est exclu, c’est qu’il y aura eu dès le départ un accord tacite là-dessus ; or, dans tout contrat agricole, on soupçonne toujours qu’il se posera quelques problèmes derrière.
Très franchement, je ne suis pas du tout convaincu par cet argument : il n’est qu’à voir ce que nous avons vécu avec la loi de modernisation de l’économie. La LME était censée mettre en place des garde-fous pour éviter les abus. Dans la réalité, toutes les dérives ont été possibles : la grande distribution en particulier use de multiples leviers pour contourner ce que l’on a essayé d’inscrire dans la loi.
Je ne mets aucunement pas en doute votre bonne volonté, monsieur le ministre, mais je suis persuadé que, lorsque l’on fera le bilan dans un ou deux ans, le résultat ne sera sans doute pas à la hauteur des attentes. Certes, on a une envolée, qui n’a rien d’une épopée napoléonienne, mais je pense que l’atterrissage sera beaucoup moins réjouissant.
L’épopée napoléonienne, vous savez comment elle s’est terminée… J’espère le résultat ne sera pas le même !
La loi de modernisation de l’économie visait un objectif totalement différent : donner à la grande distribution la possibilité de préserver le pouvoir d’achat des consommateurs. La médiation ne s’inscrit pas du tout dans cette logique. Nous l’avons déjà expérimentée lors de la crise laitière pour débloquer une situation totalement bloquée entre la grande distribution et les producteurs. Et on s’est aperçu par la suite qu’il en était de même avec les tranfsformateurs.
Dans la loi sur la consommation de Benoît Hamon, une clause a intégré la notion de coûts de production dans la relation entre transformation et grande distribution. Dans la loi d’avenir, la clause miroir vise la relation entre production et transformateurs : comme il faut désormais intégrer les coûts de production, nous mettons en place un cadre législatif pour imposer une renégociation lorsque les coûts de production augmentent. C’est là que la médiation présente également un intérêt dans la mesure où l’on change l’approche générale des relations commerciales entre la LME, la loi relative à la consommation et la LAAF aujourd’hui.
L’amendement no 821 n’est pas adopté.
Discussion commune, avis commun… Nous avons eu un grand débat en commission pour savoir s’il fallait limiter la durée de la médiation. Certains défendaient l’idée de la limiter à deux mois, et d’autres ont expliqué que celui qui ne voudrait pas négocier n’aurait qu’à attendre la fin du délai pour faire échouer la médiation.
Nous sommes donc convenus qu’il valait mieux s’en tenir au texte de l’alinéa 33 : c’est le médiateur qui fixe la durée de la médiation et qui se réserve la possibilité de la poursuivre de façon à aller jusqu’au bout.
La commission est donc défavorable à ces amendements.
Défavorable, avec les mêmes arguments.
Défavorable. Ces amendements n’ont qu’une portée pratiquement rédactionnelle. L’important est que la loi donne pour la première fois aux organisations de producteurs non commerciales la possibilité d’ester en justice. Jusqu’à présent, le producteur était amené à se défendre tout seul. Comment voulez-vous qu’un petit producteur puisse se défendre contre une grande entreprise, qu’elle soit coopérative ou privée ? Nous permettons désormais à l’organisation de producteurs non commerciale de défendre chacun de ses adhérents : c’est cela qui me paraît primordial.
L’amendement no 588 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Frédérique Massat, pour soutenir l’amendement no 1033 rectifié .
L’amendement no 1033 rectifié , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L’article 7, amendé, est adopté.
Nous proposons de remplacer le prix d’achat effectif par le prix de revient, prix d’achat majoré de la moyenne des coûts fixes, afin d’éviter notamment la revente à perte. Certaines enseignes de la grande distribution affichent clairement qu’elles pratiquent des prix en dessous de leurs coûts de distribution sur les références les plus connues des consommateurs, en compensant cette perte par des surcroîts de marge sur d’autres références, notamment les produits des PME qui perdent ainsi toute compétitivité. Cet amendement est une reconnaissance publique que la stratégie de ces distributeurs est un danger pour le tissu d’entreprises faisant vivre les territoires français au quotidien.
Malgré tout le mal que pense le rapporteur du travail de l’UMP, et plus globalement de tout ce qui a été fait par la majorité précédente, je fais un pas dans sa direction… C’est vous-même, monsieur le rapporteur, qui avez présenté cet amendement en commission, avant de le retirer aussitôt. Nous n’avons pas honte de notre bilan, bien au contraire. Nous sommes conscients que, quand on est aux affaires, comme vous l’êtes actuellement, on essaie sincèrement de bien faire. On constate, deux ou trois ans plus tard, qu’il y a des choses qui marchent et d’autres qui ne marchent pas. Dans ce dernier cas, il faut avoir le courage de chercher à les corriger. C’est ce que nous essayons de faire avec cet amendement.
Je ferai un clin d’oeil à notre collègue André Chassaigne qui a présenté un exposé intéressant sur la grande distribution. Le problème, dans les relations commerciales en général, c’est que la loi a toujours un temps de retard : c’est toujours le gendarme qui court après les voleurs… Il faut que cette loi soit la plus précise et la plus efficace possible, dans le temps où elle est votée, mais ne nous faisons pas d’illusions : on ne manquera pas de trouver des moyens dans relations commerciales pour contourner nos dispositifs.
S’il m’arrive, monsieur Herth, de dire du mal de la politique qui a été menée par les gouvernements de droite, je n’en ai jamais, pour ce qui me concerne, de mal ni de vous ni de nos autres collègues de l’UMP : vous savez à quel point j’ai de l’estime pour vous.
Ces amendements ont le mérite de poser un vrai problème et vous le savez pertinemment, tout comme Mme Alain, puisque c’est celui que j’avais déposé en commission et que vous avez recopié mot pour mot, et même photocopié… J’avais précisé qu’il s’agissait d’un amendement d’appel car je voulais appeler l’attention du Gouvernement – de reste pleinement conscient du problème – sur ce qui est en train d’advenir dans notre pays. La loi sur la consommation du ministre Benoît Hamon, a tenté d’y remédier ; si Mme Le Loch était présente, elle pourrait vous confirmer que ce texte a cherché à corriger la loi de modernisation de l’économie et à faire en sorte que la contractualisation soit plus respectueuse de la répartition de la valeur ajoutée – qui vous tient à coeur, monsieur Chassaigne, comme à nous tous –, mais aussi des contrats eux-mêmes.
Or la situation, et c’est pourquoi j’avais tenu à vous alerter, est devenue proprement catastrophique. Les quelques opérateurs de la grande distribution se livrent une guerre des prix effrénée, chacun essayant de manger les parts de marché de son voisin. On pourrait s’en satisfaire, comme c’est parfois le cas du côté de Bercy, en considérant que cela pèse sur les prix et donne par conséquent du pouvoir d’achat aux Français. Malheureusement, à force de vendre moins cher, on est en train de détruire une partie du tissu industriel agroalimentaire, une partie du secteur productif de notre pays. Or s’il y a bien un point sur lequel nous sommes tous d’accord depuis le début de cette discussion, c’est sur la nécessité de produire. Les uns et les autres, nous avons reconnu que la France a reculé, et que nous devons produire plus et mieux.
Un vrai danger guette notre pays, c’est que, petit à petit, cette guerre des prix fasse disparaître des pans entiers de la production française et que la grande distribution s’approvisionne de plus en plus sur les marchés extérieurs. On veut faire croire que l’on veut le bonheur des Français en leur offrant des prix très bas ; en réalité on détruit leur emploi. Notre pays sera-t-il gagnant au bout du compte ? Combien d’emplois détruits, à côté de ceux qui sont créés ? Chacun connaît le problème de la disparition des emplois dans les commerces de nos centres-villes, qui sont tous partis dans de grands ensembles à la périphérie ; mais désormais, la menace pèse sur la production et les industries de transformation. Nous paierons moins cher notre alimentation, mais elle sera produite ailleurs, et ce sera autant de chômeurs en plus dans notre pays.
Cette mécanique infernale, il faudra – c’est pour cela que j’avais déposé cet amendement et sans doute pour cela que vous l’avez repris – trouver les moyens de l’enrayer. Honnêtement, je n’ai pas de solution. Si j’en avais une qui soit simple et efficace, je vous la proposerais. Je ne l’ai pas, mais je voulais appeler l’attention de la représentation nationale sur ce phénomène. Tous les industriels de l’agroalimentaire nous disent à quel point les négociations se déroulent dans des conditions inacceptables, qui n’ont rien à voir avec des relations commerciales normales, établies, et qui s’apparentent davantage aux méthodes de la mafia. Ces industriels n’ont aucun moyen de résister contre la grande distribution, qui commence par leur dire qu’elle leur a déréférencé dix produits, ou qu’elle les a déférencés pendant un trimestre, ou qu’elle va le faire pendant six mois ou un an… Les relations sont totalement déséquilibrées, et ceux qui trinquent, ce sont les industriels de l’agroalimentaire et surtout les producteurs. Néanmoins, faute d’être en mesure de proposer une solution, la commission a donné un avis défavorable à ces amendements.
Défavorable.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour cette super-défense de mon amendement,
Sourires
mais je ne comprends pas pourquoi, dans ces conditions, vous ne l’acceptez pas ni pourquoi, après l’avoir déposé, vous l’avez retiré. M. le ministre a-t-il une explication ?
À force de mettre la pression sur la production et les prix, on finit par affecter la capacité productive. Par votre amendement, madame la députée, vous ajoutez au prix de revient des coûts fixes qui seraient ceux de la grande distribution, en considérant que, les deux ensemble assurant sa marge à ce secteur, celui-ci cessera de mettre la pression sur les producteurs et les fournisseurs. Malheureusement, on l’a vu en son temps, avec la loi Galland, le fait de garantir une marge à la grande distribution, cela ne l’empêchera pas de continuer à mettre la pression sur les producteurs, car il existe derrière tout cela une logique commerciale et concurrentielle entre grands distributeurs.
Dans ces négociations commerciales, et le vrai problème est là, il se passe des choses que nous ne maîtrisons pas. La seule chose que nous savons, c’est que l’on a affaire à des relations commerciales conflictuelles où chacun cherche à tirer le maximum de son fournisseur. Dès lors, qu’essayons-nous de faire ? De restructurer l’ensemble du dispositif, de garantir des rapports de force qui permettent aux plus faibles de pouvoir se défendre, grâce à clause d’action proposée, la médiation, etc.. Mais garantir une marge, comme vous le proposez, ne fera pas pour autant faiblir la pression commerciale. Voilà pourquoi nous n’y sommes pas favorables à ces amendements.
Juste pour remettre une balle au centre, avant de passer à la suite : il n’y a pas sur cette question de clivage gauche-droite, mais un clivage entre les partisans d’une politique de l’offre et ceux d’une politique de la demande. On le voit bien au Gouvernement : M. Montebourg est le champion de la politique de la production française, de la relance de l’économie par l’offre, mais il existe des débats contradictoires au sein de l’exécutif, d’autres ministres pensant différemment. Les gouvernements précédents ont connu des débats à peu près du même ordre. Généralement, le ministre de l’agriculture est plutôt du côté de la politique de l’offre, tout comme bon nombre de membres de la commission des affaires économiques – même si, à une époque, elle s’appelait commission de la production et des échanges, il s’agissait plus de production que d’échanges.
Il est important que les Français sachent qu’il ne s’agit pas de chamailleries entre la gauche et la droite, mais d’un vrai sujet de fond, entre le choix de soutenir la production nationale, en encadrant les acteurs de la distribution car ils ont des effets néfastes sur cette production – et cela va au-delà de la question agricole –, et celui de ne considérer que le consommateur, l’opinion publique, et tant pis si la production nationale disparaît.
Enfin, monsieur le rapporteur, je n’ai pas photocopié votre amendement…
Pas l’exposé sommaire en tout cas, car je précise que le CICE ne fait malheureusement qu’aggraver les choses. Je ne reviens pas sur le sujet, mais ce n’est pas une posture de ma part : je suis persuadé que vous aggravez le déséquilibre en donnant un avantage supplémentaire à la distribution. Je retire l’amendement no 1124 .
L’amendement no 1124 est retiré.
La loi consommation précise comment doivent s’établir les prix en amont des négociations, par le biais du prix de revient. Cet amendement visait à faire le pendant dans la LAAAF afin de compléter la loi Hamon. Je vais le retirer, mais je crois qu’il faut que l’on poursuive cette réflexion, car il y a un vrai problème. À force de la reporter on en arrivera à la catastrophe qu’a décrite M. le rapporteur.
L’amendement no 807 est retiré.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 301 rectifié .
Cet amendement vise à garantir la transparence en obligeant à indiquer le mode d’élevage des animaux utilisés pour la production d’aliments qui en sont issus, à l’état brut ou transformé, et destinés à la consommation humaine.
Tout le monde sait ici que je suis très favorable à la transparence. J’ai moi-même défendu des amendements à ce sujet, mais la rédaction de celui-ci a conduit la commission à lui donner un avis défavorable.
Sourires.
Le problème soulevé concerne l’étiquetage relatif aux modes de production : or cette question relève clairement du domaine de la réglementation européenne et non de celui de la loi. Avis défavorable.
J’ai cru comprendre, lors des débats relatifs à la loi sur la consommation, que des négociations étaient en cours au sein de l’Union européenne, pour faire évoluer la réglementation concernant l’étiquetage. Puis-je me permettre de vous demander, monsieur le ministre, si vous soutiendrez cet affichage du mode d’élevage des animaux au niveau de l’Union européenne ? Nous parlons d’indications très simple, en quelques catégories bien différenciées.
Pour certains modes d’élevage – le plein air ou l’élevage bio, par exemple –, l’étiquetage existe déjà. Du reste, les labels font référence aux modes d’élevage.
On va les défendre à l’article 10, les labels, monsieur le ministre ! On les attend !
Je ne parlerai pas d’un département que je connais bien et qui produit d’excellents poulets suivant un mode d’élevage clairement affiché. Autrement dit, cela se fait déjà. Le débat en cours au niveau européen concerne l’origine des produits transformés, et en particulier des viandes entrant dans ces produits. Pour information, ma rencontre avec le ministre allemand, il y a deux jours, a également porté sur ces questions, afin de reprendre le débat que nous avions eu au moment de la crise des lasagnes. L’objectif est de nous forger une position commune à présenter à la Commission, avec des États qui ont fait le choix de favoriser – comme c’est depuis le début la position de la France – l’indication de l’origine des viandes, en particulier dans les produits transformés.
Je reviendrai sur ce sujet au cours de la législature et je m’abstiendrai, pour l’heure, de lancer ce débat à l’occasion de cette loi de modernisation de l’agriculture pour ne pas mélanger les choses, mais je rappelle tout de même à la représentation nationale qu’en dehors de ce qui a été évoqué depuis hier par rapport au bien-être animal, se pose aussi la question du mode d’abattage et celle des dérogations légales liées à l’abattage rituel qui posera, à terme, un vrai problème sanitaire dans notre pays.
L’amendement no 301 rectifié est retiré.
L’amendement no 20 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 1131 .
L’amendement no 1131 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 549 .
Je vais prendre un peu de votre temps pour vous présenter cet amendement. Je vais commencer par une séquence « souvenirs » : nous avons déjà passé des heures dans cet hémicycle à discuter du dispositif des coefficients multiplicateurs, que je vous propose à nouveau de retenir ce soir. Les plus anciens parmi nous ont sans doute en mémoire la grande discussion que nous avions eue sur ce sujet à l’occasion de la loi sur le développement des territoires ruraux, en 2005 me semble-t-il. Nous avions beaucoup échangé sur ce dispositif que nous avions mis en place pour les fruits et légumes en cas de crise.
C’était peut-être le bon temps ; reste que le marché des fruits et légumes a connu bien des crises, pratiquement chaque été. Et si, à chaque fois, ce dispositif a été utilisé fois comme une arme de dissuasion, pas une seule fois le coefficient multiplicateur, pourtant prévu dans notre législation, n’a été actionné pour essayer de trouver des solutions et résoudre le problème de ces producteurs réduits à vendre à perte leurs fruits et leurs légumes chaque été ou presque.
De quoi s’agit-il exactement ? D’un mécanisme de garantie le prix à la production, qui est lié au prix à la distribution. Si le coefficient est de 1, par exemple, cela signifie qu’un produit payé 1 euro au producteur ne pourra pas être vendu par la distribution à plus de 2 euros ou que, si le prix de vente est supérieur, cela relèvera d’autant le prix au producteur.
Depuis cette époque, nous avons connu quelques évolutions intéressantes, notamment la création de l’observatoire des prix et des marges qui permet de disposer d’une lecture de l’évolution des prix et des marges. D’ailleurs, cet observatoire a tiré profit de son expérience et s’est amélioré : il y a désormais plus de possibilités d’obtenir une transparence sur l’évolution des prix à la production et à la distribution, ainsi que sur celle des marges.
Aujourd’hui, le projet de loi d’avenir va acter la création du médiateur, qui aura la possibilité – cela est écrit dans le texte – de faire des recommandations. On peut donc penser que le médiateur pourra jouer un rôle déterminant dans le déclenchement du coefficient multiplicateur, tel qu’il est prévu dans le cas des fruits et des légumes en période de crise. Il ne manquait en effet que la possibilité de le mettre en action : j’espère pour ma part que le médiateur aura un rôle bénéfique dans ce domaine.
Il faut également savoir que la majorité de gauche du Sénat – mais c’était, il est vrai, avant le changement de majorité dans le pays – avait voté l’amendement que je vous présente ce soir et qui consiste à étendre le mécanisme du coefficient multiplicateur à l’ensemble des denrées agricoles alimentaires périssables. Malheureusement, cela n’a pas eu de suite, puisque l’examen de la loi Lefebvre sur la consommation a tourné court.
Ainsi que je vous lai expliqué en défendant mon précédent l’amendement précédent, je ne crois pas – et cela ne vous étonnera pas de l’entendre de ma bouche – à une forme d’équilibre naturel, par la seule vertu du marché, dans les relations entre les producteurs et les distributeurs. Je n’y crois pas et, du reste, les interventions du rapporteur et du ministre vont dans ce sens. Les choses ne vont pas s’équilibrer d’elles-mêmes. Je suis persuadé qu’il nous faudra un jour ou l’autre en venir à un mécanisme de ce genre. D’ailleurs, quand je l’avais présenté dans le cadre d’une niche parlementaire, lors de la mandature précédente, le principe du coefficient multiplicateur avait reçu le soutien de trois organisations syndicales agricoles sur quatre : le MODEF, qui le défend depuis très longtemps, la Confédération paysanne et la Coordination rurale. Seule la FNSEA persiste à le juger non satisfaisant.
Mon amendement no 549 a pour objet de reproposer la mise en place de ce coefficient multiplicateur, en s’appuyant sur les évolutions dont témoigne le projet de loi. Je ne me fais bien évidemment pas trop d’illusions sur son adoption ; mais il me paraît pourtant important de revenir sur ce débat, car je suis persuadé qu’il faudra trouver le levier indispensable – le coefficient multiplicateur ou un autre outil – pour que les producteurs dans notre pays puissent voir leur travail payé au juste prix et cessent enfin de travailler à perte. Face à la domination sans partage de la grande distribution, qui trouve toujours des artifices pour s’en sortir et a toujours une longueur d’avance par rapport à ce que nous pouvons décider dans cet hémicycle, jamais nous n’obtiendrons les résultats attendus si les choses ne sont pas strictement encadrées.
Cela rejoint le débat que nous avons eu il y a quelques instants. Votre préoccupation, monsieur Chassaigne, est partagée sur l’ensemble des bancs, à gauche comme à droite puisque juste après votre amendement, M. Le Fur proposera d’étendre le coefficient multiplicateur aux viandes fraîches.
Nous avions cru au coefficient multiplicateur, au moment où nous l’avions mis en place. Vous vous en souvenez. Nombre d’autres collègues, de toutes sensibilités, y avaient cru aussi. Malheureusement, il faut se rendre à l’évidence : le coefficient multiplicateur n’a pas marché et cela ne fonctionne pas. Et comme on n’a pas le droit de l’appliquer aux produits importés, l’étendre aujourd’huui risquerait d’aggraver encore la situation en créant une forme de concurrence déloyale, puisque l’augmentation, artificielle en quelque sorte, ne toucherait que les prix des produits nationaux et ne s’appliquerait pas aux prix des produits importés. Je suis désolé, mais je suis obligé de vous dire que la commission a émis un avis défavorable. Ceci dit, monsieur Chassaigne, je suis d’accord avec vous sur le fond et il faudra qu’un jour ou l’autre nous arrivions à trouver une solution. C’est très difficile dans une économie de marché et de libre concurrence de réussir à intervenir de manière à ce que chacun puisse s’y retrouver. C’est ce que l’on essaie de faire avec le médiateur des relations agricoles ; j’espère que cela portera ses fruits.
Entre un coefficient qui s’appliquerait de manière mécanique et la médiation, je pense sincèrement que ce dernier outil est bien meilleur. Nous avons réussi à la mettre en place pour le lait ; nous avons engagé une démarche analogue pour les viandes fraîches, en particulier pour le porc. L’intérêt de la médiation tient au fait qu’elle s’immisce dans les négociations commerciales pour faire bouger les lignes et amender à s’accorder sur des constats et qu’il est capable d’aboutir à des constats. C’est d’ailleurs ainsi qu’était née l’idée du coefficient multiplicateur : il avait été prévu que si les prix étaient bas, les grands distributeurs devaient répercuter la baisse pour que la consommation en soit stimulée. Voilà des éléments de discussion tout à fait possibles dans le cadre de la médiation. En l’étendant à l’ensemble des produits agricoles et agroalimentaires, en particulier les périssables, nous en faisons un outil tout à la fois de régulation et de pression qui permettra un présence dans la négociation. S’en remettre à un coefficient, cela ne marchera pas s’il n’y a personne pour influer sur les rapports de force dans les négociations commerciale. Je suis convaincu que la médiation est un élément de réponse aux questions que vous vous posez, monsieur Chassaigne.
Je voudrais faire deux observations.
Premièrement, je ne suis pas convaincu, monsieur le rapporteur, quand vous affirmez qu’on ne peut pas appliquer le coefficient multiplicateur aux produits importés. J’avais travaillé sur cette question dans le cadre de notre niche parlementaire, et cet obstacle ne m’avait pas été opposé à l’époque. Par conséquent, cet argument me laisse très dubitatif. Bien au contraire, je suis persuadé que le coefficient multiplicateur peut aussi jouer un rôle pour limiter les importations, notamment de fruits et légumes. En effet, il est bien évident que si le coefficient est de un, les fruits et légumes achetés à un prix très bas à l’étranger donneront une marge beaucoup plus limitée puisque leur prix d’acquisition final sera très faible. Pour ce qui est de l’impossibilité de l’appliquer aux produits importés, c’est un élément qu’il conviendra de vérifier.
Je vais retirer mon amendement, mais je ferai observer que ce que nous avions voté en 2005 s’agissant des fruits et légumes est toujours inscrit dans notre législation, et je pense que le médiateur devrait avoir à cet égard un rôle important à jouer. Dans les étés à venir, si nous avons des crises dans le secteur des fruits et légumes, il faudra que chacun prenne toutes ses responsabilités. J’espère que, dans ses recommandations, le médiateur pourra demander que l’on actionne le dispositif du coefficient multiplicateur pour surmonter des crises récurrentes. Je laisse bien évidemment la voie libre à mes collègues du Sénat pour présenter un amendement identique – pour peut-être le faire adopter puisque la majorité est exactement la même qu’il y a deux ans et que le projet de loi arrivera en discussion avant son renouvellement: ceux qui ont voté il y a deux ans cette disposition ne manqueront pas de la revoter. Nous aurons donc vraisemblablement en deuxième lecture le dispositif du coefficient multiplicateur dans le texte et je n’ose imaginer que l’on mettra en exergue cette belle formule : « Vérité avant les élections, erreur au-delà. »
L’amendement no 549 est retiré.
L’amendement no 21 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement no 1112 .
L’amendement no 1112 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Je suis saisie d’un amendement no 924 , deuxième rectification, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.
La parole est à M. Dominique Potier, pour le soutenir.
Je me rapproche d’André Chassaigne, car il s’agit d’un amendement révolutionnaire.
Sourires.
Il permettra en effet aux entreprises conseil élevage de moderniser leurs contrôles laitiers en vue de l’évolution du champ concurrentiel et aussi à ces syndicats de se transformer en associations en conservant leurs statuts, leurs agréments et les avantages ad hoc. Les ECEL pourront ainsi apporter leur contribution, à travers leurs 4 000 salariés, notamment dans le contrôle de performance de l’élevage sur tout le territoire national. L’application de cet amendement transitoire et d’aménagement spécifique devrait cesser au 1er janvier 2020 au plus tard.
La parole est à M. le ministre, pour donner l’avis du Gouvernement et soutenir les trois sous-amendements, nos 1752 rectifié , 1753 et 1754 .
Ces trois sous-amendements visent précisément à répondre à la question que vous soulevez, monsieur le député : il faut en effet que ces syndicats puissent répondre à des appels d’offres et se transformer en associations.
Les sous-amendements nos 1752 rectifié , 1753 et 1754 , acceptés par la commission, successivement mis aux voix, sont adoptés.
L’amendement no 924 , deuxième rectification, sous-amendé, accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1602 .
Je vous indique, monsieur Benoit, que votre amendement est satisfait par l’alinéa 36 de l’article 7. L’avis est donc défavorable.
Même avis.
L’amendement no 1602 est retiré.
Je vais, comme sur d’autres articles précédemment, présenter par avance l’ensemble de mes amendements.
L’article 8 a trait aux interprofessions, sujet lui aussi compliqué puisqu’il s’agit de réunir des hommes et des femmes aux intérêts a priori communs, mais dont ce n’est pas toujours le cas. Se pose une autre difficulté : les interprofessions ont un problème avec la Commission européenne, plutôt chatouilleuse dès lors qu’elles peuvent être soupçonnées d’ententes et donc d’entorses à la libre fixation des prix. Autant dire que, là aussi, la législation est touffue, complexe, et que nous sommes revenus dessus à plusieurs reprises.
C’est ce que vous faites à votre tour, monsieur le ministre, en prenant le risque, je le dis sans esprit polémique, d’aggraver encore non pas nos rapports avec la Commission européenne, mais les relations au sein même des interprofessions. Il y avait déjà une équation parfois très difficile à résoudre pour certaines interprofessions ; voilà que vous y ajoutez, une fois de plus, le facteur du militantisme puisque vous souhaitez les ouvrir auxorganisations syndicales dites minoritaires…
Affreux !
Je n’en conteste pas le principe : Bruno Le Maire, votre prédécesseur, avait donné à la fin de ses fonctions une impulsion en ce sens. Je constate que les organisations professionnelles majoritaires ont également évolué sur le sujet. En revanche, les seuils de représentativité que vous avez fixé posent question. Vous aviez prévu un seuil de 80 % des voix : il nous est toujours apparu particulièrement élevé et source potentielle de blocage des interprofessions. C’est ce qui justifiait le dépôt de mon amendement no 96 , visant à supprimer l’alinéa 6 ; mais j’indique d’ores et déjà que je le retire, madame la présidente, car je me réjouis que le Gouvernement ait fait un pas dans notre direction en acceptant, dans son amendement no 1417 , de ramener le seuil à 70 %. Je vous propose, monsieur le ministre, de faire un petit pas supplémentaire en acceptant mon amendement no 98 qui prévoit une possibilité d’assouplissement du dispositif : si le Gouvernement constatait le refus avéré d’une ou plusieurs organisations syndicales de participer à la gouvernance de l’interprofession, il pourrait, par voie réglementaire, adapter le seuil légal en conséquence. N’y voyez qu’un souci d’efficacité et de bon fonctionnement des interprofessions.
Monsieur le ministre, nous souhaitons que les interprofessions fonctionnent car la France en a besoin. Bruno Le Maire s’est beaucoup investi sur ce sujet et je sais que vous ferez de même. Il a réussi à en réduire le nombre et les faire fonctionner de façon plus efficace ; je vous souhaite le même bonheur.
Nous en venons aux amendements.
La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement no 745 .
Dans le cadre de la procédure d’extension des règles, les organisations de producteurs ont la possibilité de prélever des cotisations auprès de non-membres. L’amendement no 745 a pour objectif de proposer une modalité de calcul complémentaire afin de nous mettre en conformité avec la réglementation européenne. Mais sans doute me direz-vous, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, que cette proposition est quelque peu précoce.
Je suis désolé de vous le dire, madame Erhel, mais c’est exactement notre position : votre amendement est effectivement un petit peu prématuré puisque le texte communautaire n’a pas encore été stabilisé. Avis défavorable.
Même avis.
L’amendement no 745 est retiré.
L’amendement no 242 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 488 .
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1603 .
Ces amendements concernent tous les interprofessions ; je vais donc leur apporter une réponse globale.
Nous avons ce débat depuis plusieurs années, et notamment en 2010. Depuis, il a considérablement évolué. Nous appelions à une représentation du pluralisme syndical dans les interprofessions : tout le monde se souvient de l’occupation de la Maison du Lait en raison de la difficulté des syndicats minoritaires à être représentés dans cette interprofession. Les choses ont de ce point de vue beaucoup évolué : il faut dire que le syndicat majoritaire s’est fait à l’idée du pluralisme et que les interprofessions, notamment celle du lait, commencent à le mettre en pratique, puisque la Confédération paysanne est entrée dans l’interprofession du lait le 1er janvier et qu’il est prévu que la Coordination rurale la rejoigne au mois d’avril.
Un point est ressorti au cours des auditions, : celui du risque de blocage. En effet, il ne faudrait pas se trouver dans la situation où une seule organisation pourrait empêcher l’extension des accords interprofessionnels. Je crois que l’amendement que le M. Le ministre va bientôt présenter permettra de lever cette difficulté et de donner satisfaction à l’ensemble des acteurs. En attendant, la commission a donné un avis défavorable.
Même avis. Comme rapporteur l’a très bien dit, les choses évoluent. Sur la question laitière une première réunion de l’interprofession au eu lieu le 12 décembre dernier avec les syndicats – moment important –, et même avec la grande distribution.
Le droit européen impose la reconnaissance d’un pluralisme qui exige de prendre en compte les pourcentages obtenus lors des élections, d’où les propositions que nous avons faites. Ainsi que l’a dit le rapporteur, nous saluons les avancées en cours et nous pensons qu’il faut poursuivre dans cette voie car le pluralisme syndical est important. Mais nous ne pouvons pas accepter les amendements proposés.
L’amendement no 96 est retiré.
Cet amendement propose d’abaisser de 80 % à 70 % le pourcentage des voix recueillies aux élections des chambres d’agriculture, ce qui garantit les conditions d’application du pluralisme dans le cadre européen tout en évitant les risques de blocage du fonctionnement de certaines interprofessions qui sont extrêmement importantes pour l’organisation de nos filières.
L’amendement no 97 a été retiré au profit de l’amendement du Gouvernement.
L’amendement no 1417 , accepté par la commission, est adopté.
L’amendement no 98 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 1604 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 490 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 1342 .
L’amendement no 1342 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 8, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement no 1509 , portant article additionnel après l’article 8.
Si vous le permettez, madame la présidente, je vais défendre en même temps mes amendements nos 1509 , 1511 et 1510 .
Pour la deuxième fois, je m’exprime dans cet hémicycle sur le problème des relations entre négociants et producteurs viticoles. La première fois, je m’étais exprimée dans le cadre de la loi sur la consommation ; M. Hamon m’avait répondu que ce n’était pas le bon véhicule législatif, qu’il fallait que j’utilise le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, ce que je fais ce soir.
Quel est le problème ? Je vais essayer d’être très claire et je vais prendre un exemple précis. Malgré les engagements contractuels, le vin vendu n’est retiré qu’au bon vouloir du négoce et le paiement n’intervient que soixante jours après la retiraison, ce qui génère des problèmes de trésorerie importants.
Une disposition, votée dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie prévoyait l’obligation pour l’acheteur de verser un acompte à la signature du contrat. Or, depuis 2008, l’expérience a montré que cet acompte n’est pas versé systématiquement et que les relations contractuelles entre viticulteurs et acheteurs restent totalement déséquilibrées.
Il est nécessaire de protéger les viticulteurs de ces pratiques. C’est pourquoi mes amendements proposent de rendre l’acompte obligatoire, sans possibilité d’y déroger, ce qui est essentiel pour les contrats « spot », autrement dit les contrats ponctuels.
Je tiens au préalable à saluer le travail que Mme Fabre réalise dans le domaine viticole pour essayer de faire évoluer la législation et surtout la situation des producteurs de vin.
Cela étant, votre amendement no 1509 , madame Fabre qu’il est satisfait par le code rural qui dispose : « Le premier acheteur de boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l’article 438 du code général des impôts doit verser au vendeur ou à son subrogé, dans un délai de dix jours francs suivant la conclusion du contrat de vente, un acompte représentant au moins 15 % du montant de la commande. »
Le problème est que cette disposition n’est pas appliquée et que l’acheteur ne respecte pas le contrat. La création du médiateur des relations agricoles doit permettre de régler cette affaire-là. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement, non que j’y sois opposé sur le fond, au contraire, mais parce qu’il est satisfait.
Je rajouterai juste un point : dans le secteur de la viticulture, les relations commerciales fonctionnent bien dans certains endroits et moins bien dans d’autres. Ce qui explique que tous les professionnels ne soient pas d’accord sur cette question : les positions varient suivant les régions et celle dont vous êtes élue, madame Fabre, apparaît à cet égard particulièrement difficile. Je me souviens même de certaines inscriptions, il n’y a pas si longtemps, avec une bonbonne de gaz, à propos d’ailleurs d’une question qui n’avait jamais été posée en tant que telle.
Traiter cette affaire pour l’ensemble de l’espace viticole français alors que les problèmes se posent seulement dans certains endroits aboutirait à remettre en cause le système dans les régions où il fonctionne. La médiation peut être une solution pour faire appliquer des règles qui devraient normalement être respectées. C’est pour cette raison que je partage l’avis défavorable du rapporteur.
L’amendement no 1509 n’est pas adopté.
Après le rapporteur, je voudrais rendre hommage au travail de Mme Fabre qui a présenté cet amendement en commission.
J’ai pensé qu’en séance nous pourrions peut-être trouver une unanimité sur un sujet compliqué : la publicité sur les produits viticoles et vinicoles qui se heurte régulièrement à la législation française. C’est un problème qui, pour le moment, est tabou : on n’a pas le droit de parler de revenir sur la loi Évin – puisque c’est ce dont il s’agit. Mais nous pourrons, madame Fabre, à gauche et à droite de cet hémicycle, travailler sur ce sujet à l’avenir.
Cela étant, je retire l’amendement no 613 .
L’amendement no 613 est retiré.
L’amendement no 1511 de Mme Fabre a déjà été présenté.
Quel est l’avis de la commission ?
Même avis.
L’amendement no 1511 n’est pas adopté.
L’amendement no 1510 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement no 1563 .
Avec votre permission, madame la présidente, je vais présenter en même temps l’amendement no 1571 .
Le dispositif que je vais présenter permettra peut-être d’ouvrir le débat. Il offre une solution alternative pour pallier cette crise qui existe entre le négoce et la production.
Il y a quelques jours, nous avons adopté la loi sur la consommation et, jusqu’à présent, dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, nous avons fait en sorte que les relations entre le négoce et la production soient les plus adaptées possible.
Mes deux amendements proposent une alternative à la suppression à la dérogation à l’acompte. Ils instaurent un régime de sanction administrative uniquement en cas de manquement aux obligations prévues dans les contrats-cadres sur les délais de retiraison. Ce dispositif plus circonscrit pourra sembler plus approprié de ce fait à certains, dans la mesure où il n’interdit pas à l’ensemble de la filière de déroger à l’acompte.
Je voudrais préciser que ce travail acharné tendant à équilibrer les relations entre le producteur et le négoce se fait actuellement au niveau des interprofessions où se créent des commissions de médiation. Celles-ci pourraient se porter parties de façon à défendre les producteurs qui se trouveraient en difficulté face au grand négoce.
Le négoce demande que l’on puisse encadrer au niveau de ces interprofessions et mettre n place la disposition prévue dans la loi sur la consommation en l’élargissant au secteur viticole.
Mme Fabre expose un problème absolument réel qui tient en quelques mots : il n’y a pas de respect des contrats. C’est absolument extraordinaire :il y a dans ce pays des gens qui signent des contrats et qui ne les respectent pas. Ils arrivent un an après pour retirer le vin ; non seulement c’est le producteur qui a payé les frais de stockage, mais en plus, ils annoncent qu’ils ne vont pas payer le prix convenu, mais le faire baisser ! Ce comportement est parfaitement inacceptable dans un État de droit.
Cela étant, je considère, madame Fabre, que le futur médiateur des relations agricoles, qui sera habilité à vérifier la bonne exécution des contrats, doit répondre à votre préoccupation. Avis défavorable.
Madame Fabre, je comprends votre préoccupation : cela fait plusieurs fois que vous évoquez ce problème et je connais le lieu spécifique où il se pose. Ce que vous me demandez, c’est de remettre en cause, en ma qualité de ministre, les dérogations concernant des avances, alors que le système fonctionne dans d’autres endroits. Vous me proposez également d’instaurer des sanctions extrêmement fortes lorsque les contrats ne sont pas respectés. Or, par définition, si l’on se trouve dans cette situation, cela constitue d’ores et déjà un manquement.
Voilà un certain nombre de fois que j’entends parler de ce sujet. Pourrait-on sortir de cette idée qui voudrait que le ministre doit appliquer les mêmes règles à toutes les régions viticoles alors que le problème soulevé est très spécifique ?
Si j’en crois les discussions que j’ai eues avec l’interprofession viticole, le problème ne se pose dans aucune autre région. Si je pensais que le problème était général…
Monsieur le ministre, nous avons auditionné les Vignerons indépendants…
Mais d’où sont-ils, les Vignerons indépendants ?
Madame Fabre, ce n’est pas ainsi que doit se dérouler le débat. M. le ministre a seul la parole ; vous la demanderez après et je vous l’accorderai.
Ne me dites pas que le problème se pose partout de la même manière. Je suis prêt à étudier et à régler le problème spécifique que vous soulevez, mais ne me demandez pas de changer la loi pour régler un problème qui est bel et bien particulier à une région, puisque nulle part ailleurs je ne suis pas saisi de difficultés du même ordre.
On sait bien que, dès qu’il y a un problème,il suffit de venir voir le ministre pour lui demander de le régler…
Souvent, il s’agit de difficultés dans des négociations ou des relations commerciales. Et c’est le ministre qui devrait remédier à tout cela ! Dans le cas qui vous préoccupe, je rencontre régulièrement l’interprofession. Le président de FranceAgrimer est d’ailleurs originaire de votre région ; il est donc bien placé pour connaître la situation.
Discutons et faisons ce que suggère le rapporteur, à savoir mobiliser le médiateur. Cela me paraît mieux que de tout changer, alors même que personne d’autre ne le demande. Je souhaite donc que l’on en reste là, mais, une fois encore, je suis prêt à régler le problème.
Cet amendement, dont nous avons déjà parlé en commission, concerne la non-retiraison du vin. Ce problème est donc différent du précédent. Le phénomène existe dans bien d’autres régions que celle de Mme Fabre.
C’est une réalité.
Les sanctions proposées, que vous jugez, monsieur le ministre, particulièrement fortes, sont tout simplement celles qui ont été votées dans le cadre de la loi de M. Hamon sur la consommation, à laquelle je faisais référence tout à l’heure, dans la partie qui vise à modifier et améliorer les dispositions de la LME. Elles sont du même niveau que celles que nous avons votées dans le cas de non-respect des contrats. Je me demande d’ailleurs si la loi Hamon ne suffirait pas à régler le problème: après tout, il s’agit bien de non-respect de contrats.
Quoi qu’il en soit, le problème de la non-retiraison se pose ailleurs que dans la région de Mme Fabre, notamment pour de tout petits chais. C’est une réalité.
Pour répondre à Mme Allain, la loi sur la consommation ne permet pas de résoudre ce problème, pour la bonne et simple raison qu’il existe un dispositif particulier pour la viticulture, notamment dans le cadre d’accords interprofessionnels. Mon amendement vise donc à faire rentrer l’échange entre le producteur et le négociant dans le droit commun.
Je sais très bien, monsieur le ministre, ce que vous me répondez depuis maintenant dix-huit mois, car ce problème n’est pas nouveau : j’ai saisi vos services à plusieurs occasions, notamment par le biais d’une proposition de loi et de multiples amendements. Le problème n’est donc pas nouveau pour vous.
Si je suis prête à ce que des négociations s’engagent, je regrette que, depuis dix-huit mois, nous n’ayons pas mis en place un certain nombre de choses.
Le problème est, certes, particulièrement important dans le bassin viticole dont je suis l’élue, mais ce n’est pas le seul endroit où il se pose. Lors du travail sur ce texte, j’ai assisté à l’audition des Vignerons indépendants de France, qui ont fait état de la même préoccupation au niveau national. Je ne dis pas que c’est le cas de toutes les interprofessions, mais force est de constater qu’il y en a encore trop qui rencontrent des difficultés. Trop de producteurs ont des problèmes de trésorerie.
Depuis dix-huit mois, j’ai pris mes responsabilités ; je vous demande, monsieur le ministre, de prendre les vôtres.
L’amendement no 1563 n’est pas adopté.
L’amendement no 1571 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
À l’UDI, nous croyons beaucoup au rôle de l’agriculture dans le domaine de la santé – j’ai eu l’occasion de l’exprimer dans la discussion générale.
L’amendement n° 1606 , proposé par François Sauvadet, vise à soutenir les actions d’information et de promotion collectives sur les produits frais menées par les organisations professionnelles et interprofessionnelles des filières agricoles.
Nous sommes tous d’accord sur la nécessité d’encourager et de promouvoir la consommation de produits frais en France, qu’il s’agisse de viandes, de fruits ou de produits laitiers, dans le cadre des recommandations du programme national nutrition santé. Certes, il existe aujourd’hui des campagnes d’information nutritionnelle initiées par le Gouvernement, mais elles ne produisent pas suffisamment de résultats. De leur côté, les filières s’organisent et assurent, du mieux qu’elles le peuvent, la promotion de leur démarche et de leurs produits.
Nous proposons d’organiser un accès gratuit aux sociétés de radio et de télévision publiques pour les campagnes d’information générique en faveur des produits frais issus des filières agricoles. Nous proposons également de permettre aux organisations de la filière de parrainer des émissions de radio ou de télévision, dès lors qu’elles diffusent des informations génériques, sans que des marques ou des opérateurs commerciaux soient mis en avant.
Il s’agit donc à la fois de soutenir l’agriculture de production et d’encourager les démarches liant l’agriculture à la santé. Produire sain et manger sain, voilà qui ne peut que trouver un écho favorable dans l’esprit du rapporteur et du ministre. Cela ne ferait que renforcer votre projet de loi sur l’avenir de l’agriculture, notamment sur la thématique de la nutrition et de la santé.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1461 .
Sourires.
Effectivement, monsieur Benoit, ce sujet trouve un écho dans l’esprit du rapporteur : je suis tout à fait favorable aux campagnes que mène le Gouvernement pour inciter les consommateurs à adopter un régime alimentaire équilibré. Cela dit, il nous paraît extrêmement difficile de solliciter pour une catégorie de produits des espaces gratuits sur les chaînes publiques. D’autres secteurs, vous vous en doutez, ne manqueront pas de faire pression pour promouvoir d’autres produits.
Pour ce qui concerne l’amendement de M. Potier, nous estimons qu’il est satisfait.
Même avis.
L’amendement no 1461 est retiré.
Je voudrais expliquer pourquoi je maintiens mon amendement.
Nousne parlons pas de produits ordinaires, mais de nutrition. Cela devrait donc pouvoir faire l’objet, pour peu qu’on le décide, d’une démarche spécifique de promotion, de communication et de valorisation.
Il fut un temps – Antoine Herth évoquait tout à l’heure la loi Évin – où l’on prenait des dispositions spécifiques et, en l’espèce, contraignantes à l’encontre de certains produits. Je pense moi aussi qu’il faudra avoir le courage, en France, grand pays producteur de grands vins – qu’il s’agisse de vins tranquilles, de vins effervescents ou pétillants – de réétudier, de manière apaisée, la question de la valorisation et de la compréhension des usages des produits vitivinicoles.
Quoi qu’il en soit, pour ce qui est de la nutrition, je pense sincèrement que l’on peut prendre des dispositions spécifiques dans un texte sur l’avenir de l’agriculture. Cela n’entache en rien la trajectoire que vous avez engagée sur l’agroécologie et cela ne grève pas non plus les finances publiques.
Monsieur le député, le Gouvernement s’est engagé avec le CSA en renouvelant une charte sur la promotion de la nutrition santé, en particulier sur les produits destinés aux jeunes et contenant des graisses et des sucres. Nous étions d’ailleurs quatre ou cinq ministres à la signer, dont la ministre de la culture et celui des outre-mer : on sait que l’obésité outre-mer atteint des niveaux catastrophiques. Il faut dire que les taux de sucre dans les produits qui y sont distribués sont supérieurs à ceux de la métropole. Victorin Lurel a d’ailleurs été salué pour avoir fait mettre un terme à ces pratiques.
Nous sommes donc totalement mobilisés dans ce domaine, mais il faut passer par des chartes faisant en sorte que les régies publicitaires des chaînes de télévision prennent des engagements et offrent des possibilités spécifiques. En effet, tout cela a un coût que l’on ne peut pas leur imposer : les encarts publicitaires réservés à cette fin sont autant de recettes en moins pour les télévisions. Si nous imposions de telles campagnes, il faudrait compenser leurs conséquences financières, ce que nous ne pouvons nous permettre. Il faut donc poursuivre dans la voie que j’ai indiquée. La charte signée avec le CSA participe de cet esprit. Je souhaiterais d’ailleurs – je le dis à mes services – que ce document soit envoyé à la représentation nationale, car je suis sûr que vous ne l’avez pas eu, ce qui ne me semble pas normal : les parlementaires doivent y avoir accès.
L’amendement no 1606 n’est pas adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 544 .
J’essaierai d’être assez rapide pour que nous examinions le plus d’amendements possible avant d’interrompre nos travaux.
Comme je l’ai dit dans la discussion générale, il y a beaucoup de points intéressants dans ce texte de loi. Le meilleur signe de l’intérêt de certaines dispositions est que l’opposition est vent debout contre.
Je relève toutefois une carence à laquelle vous devriez remédier.
Je veux parler du domaine sanitaire.
Certes, monsieur le ministre, depuis que vous avez pris vos fonctions, sans doute n’avez-vous pas eu le temps de travailler sur cette dimension. Peut-être allez-vous également renvoyer l’examen de cette question à une loi sur la santé. Quoi qu’il en soit, il existe bel et bien un vide sur ce sujet.
Évidemment, avec l’article 40 de la Constitution, il est compliqué de faire des propositions très précises, d’autant plus que cela aurait exigé un travail qui aurait peut-être dépassé mes possibilités.
Je propose donc de demander au Gouvernement un rapport sur l’amélioration de la prévention et de la reconnaissance des maladies professionnelles. Je m’appuie pour cela sur un travail réalisé par une mission d’information sénatoriale sur les pesticides et leur impact sur la santé. Cette mission d’information avait d’ailleurs été demandée par le groupe socialiste, et son rapport, qui contient une centaine de propositions, a été adopté à l’unanimité. Vous disposiez donc, monsieur le ministre, de tous les éléments nécessaires ! Je pense d’ailleurs que des amendements du même ordre que celui-ci seront défendus au Sénat. Pour ma part, je prendrai soin de transmettre cet amendement aux sénateurs communistes.
Il s’agit de préciser les mesures à prendre pour améliorer la prévention et la reconnaissance des maladies professionnelles. Cela permettrait de jeter les fondations d’une future loi qui – nous l’espérons – s’intéressera enfin aux enjeux sanitaires des professions agricoles.
Le problème soulevé par M. Chassaigne est extrêmement important et tout à fait d’actualité, puisqu’au cours des dernières années les maladies professionnelles dans le domaine agricole ont été reconnues par la MSA. Vous savez qu’un agriculteur, en Charentes, a attaqué une grande firme et a obtenu gain de cause : il a pu faire reconnaître que l’utilisation de produits dangereux avait nui à sa santé.
Cela dit, monsieur Chassaigne, vous avez vous-même cité un rapport du Sénat, particulièrement intéressant et très fourni. Je vous renvoie à un autre rapport publié par l’INSERM au cours de l’été dernier. Je vous engage à le consulter : il a trait exactement au sujet que vous abordez, c’est-à-dire aux effets des pesticides sur la santé. Je vous rappelle enfin que la MSA réalise un rapport annuel sur cette question. Je considère donc que votre demande, qui est tout à fait justifiée, est entièrement satisfaite.
Si j’ai bien compris, le sujet dont nous débattons touche aux questions sanitaires et aux maladies professionnelles : ces sujets ne concernent pas uniquement le ministère de l’agriculture, mais aussi les ministères de la santé et de l’emploi. Toutes ces questions relatives à l’agriculture et à l’agroalimentaire sont transversales. Les questions que nous abordons ont une spécificité, liée à l’agriculture et à l’agroalimentaire, elles sont aussi liées à la santé et aux maladies professionnelles. Le ministère de l’agriculture a-t-il les compétences nécessaires pour rédiger un tel rapport ? Je vous le dis très clairement : il faudrait un rapport interministériel, dans la mesure où que les conditions de travail relèvent aussi des ministères de l’emploi et de la santé. Je ne crois donc pas que ce soit la bonne solution.
La constitution d’une mission parlementaire spécifique sur les maladies et les problèmes de santé dans l’industrie agroalimentaire, à l’image de ce qui a été fait au Sénat, est un tout autre sujet, et relève de la responsabilité du Parlement.
Je rappelle que nous allons bientôt examiner un article prévoyant d’appliquer les règles de l’organisation internationale du travail, relatives à la sécurité et la santé des travailleurs dans l’agriculture. Cela est très important ; j’ai annoncé hier, à propos du label « Viande de France », que le cahier des charges de ce label contiendra des prescriptions relatives à l’environnement, aux conditions sanitaires, au bien-être animal et aux conditions sociales, en référence aux normes de l’Organisation internationale du travail. Nous essayons donc de progresser dans ce domaine, avec la MSA. Le rapport que vous demandez, monsieur Chassaigne, touche à des questions relevant de différents ministères ; sa rédaction par le seul ministère de l’agriculture ne permettrait pas d’apporter les réponses que vous attendez. Il faut donc examiner comment nous pourrions conduire un travail de réflexion plus large. J’évoquais tout à l’heure la mission d’information sénatoriale sur les produits phytosanitaires, à laquelle j’ai participé : elle a été importante.
Tout compte fait, je suis persuadé qu’avec les dispositions que nous allons voter dans peu de temps, et avec d’autres mesures que nous mettrons ensuite en application, la dimension sociale sera suffisamment prise en compte. Celle de la pénibilité dans le calcul des droits à la retraite est aussi un élément très important. Malheureusement, cette dernière réforme n’a pas été votée par nos collègues de l’UMP !
Monsieur le ministre, j’ai bien vu que vous manifestez un intérêt marqué pour ces questions. L’objectif de mon amendement était d’obtenir un échange, même bref, sur ces questions, car elles sont d’une extrême gravité. Pendant des décennies, elles n’ont jamais vraiment été abordées. Aujourd’hui, il y a réellement urgence.
Je vous fais tout à fait confiance, monsieur le ministre, pour que cette discussion aboutisse à des mesures concrètes, en lien avec d’autres ministères. La profession agricole tout entière est concernée : salariés, exploitants agricoles, mais aussi travailleurs de l’industrie agroalimentaire. On ne peut continuer à refuser de reconnaître la réalité des maladies professionnelles dans ce secteur et à ne pas mener d’action de prévention.
Il était important important de rappeler qu’il manque un volet social à ce projet de loi !
L’amendement no 544 est retiré.
La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement no 808 .
Cet amendement demande la réalisation d’un rapport sur les règles d’hygiènes. Sans remettre en cause les normes en la matière, les normes sanitaires devraient être davantage adaptées en fonction de la taille des structures. En effet, ces normes administratives dites de modernisation ne sont pas adaptées à un certain nombre d’exploitations, de petites entreprises agroalimentaires et d’outils de transformation de petite et moyenne taille. C’est le cas de nombre de salles d’abattages, privées ou publiques, dont le réseau structure étroitement le territoire.
Il s’agirait d’étudier la possibilité, pour le Gouvernement, de mettre en place des normes différenciées, en prenant en compte les règles européennes. Il s’agirait de fixer des obligations de résultat, plutôt que des obligations de moyens. Le « paquet hygiène » adopté en 2004 au niveau européen prévoit une application uniforme des règles sanitaires. Il laisse cependant aux États membres la possibilité, sur certains points, d’appliquer ces règles de manière différenciée en fonction de la taille des structures. Ce rapport permettrait ainsi d’identifier nos marges de manoeuvre sur cette question.
Des procédures ont déjà été prévues au niveau européen pour adapter les règles sanitaires, qui sont plutôt conçues pour les grandes et moyennes industries que pour les petites. Je rappelle également que des outils ont été mis en place pour permettre plus de flexibilité dans l’application de ces règles d’hygiène aux plus petits ateliers. Cette modulation doit être validée par l’administration. Un guide sur cette question a été publié au mois de janvier 2013, qui est disponible sur le site internet du ministère de l’agriculture.
Il doit être possible d’éviter de soumettre les petits ateliers à de trop fortes contraintes : des propositions ont déjà été formulées pour cela et un guide a été rédigé. Il serait donc inutile de rédiger un rapport supplémentaire sur ces questions. Voyez le nombre de rapports demandés au ministère de l’agriculture ! À chaque fois qu’il y a un problème, on nous en réclame un… Je veux bien faire le bilan sur un certain nombre de sujets, mais la rédaction d’un rapport sur cette affaire ne me paraît pas nécessaire dans la mesure où nous avons mis en ligne en janvier 2013 un guide permettant l’application de normes plus flexibles aux petits ateliers. Nous avons bien conscience que l’on ne peut pas appliquer exactement les mêmes règles aux grandes industries, aux PME, et aux petits ateliers.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces informations. On ne peut que regretter que les services de l’État dans les départements ne connaissent pas ce guide. Je vous demande donc de leur faire savoir, de façon à ce que les contrôles des directions départementales des services vétérinaires, ne soient pas plus sévères que nécessaire.
Je retire mon amendement.
En fin de séance, la nuit dernière, notre excellent collègue André Chassaigne nous a fait adopter un amendement qui employait le mot « goût ». Cela nous rappelle deux choses primordiales. Premièrement, les produits de l’agriculture française sont variés et d’excellente qualité. Leurs qualités sont nombreuses, qu’elles soient gustatives, mais aussi visuelles ou autres. Deuxièmement, ce soir, notre collègue Thierry Benoit a défendu un amendement qui nous rappelle que les campagnes d’information et de nutrition n’abordent jamais la question du plaisir. La présentation des aliments est toujours limitée à leur aspect nutritionnel, gustatif ; jamais on n’évoque le plaisir que leur consommation procure. C’est ce qui explique, me semble-t-il, que ces campagnes soient, à terme, vouées à l’échec.
La séance de cette nuit a été très intéressante, puisque nous avons examiné des amendements sur la retiraison.
Rires sur les bancs du groupe UMP.
Je suis très heureux d’être député : cela permet d’apprendre de nouvelles choses, comme celle-ci ! Cela montre combien nous avons de plaisir à nous retrouver les uns les autres dans cet hémicycle.
Quant à l’amendement no 808 , il est surréaliste, proprement extraordinaire. Lisons-le bien : cela signifierait qu’à terme, nous appliquerions des normes sanitaires totalement différentes selon que les travailleurs agricoles appartiennent à une entreprise exploitant 50 hectares, 100 hectares ou 150 hectares ! André Chassaigne l’a très bien rappelé tout à l’heure.
Je ne sais pas à quel principe obéit le dépôt de certains amendements. S’agit-il du principe de plaisir ? Du principe de réalité ? D’autre chose ? Je ne saurais le dire.
L’amendement no 808 est retiré.
Les articles 9 et 9 bis sont successivement adoptés.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Suite du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
La séance est levée.
La séance est levée, le 10 janvier 2014, à une heure trente.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron