La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe Les Républicains.
Madame la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, la lenteur des procédures législatives et des navettes parlementaires a au moins un mérite, celui de montrer aux Français à quel point vous êtes dans l’impasse avec votre politique.
Cette impasse commence avec un grand i.
I comme improvisation, tout d’abord sur le principe même de votre texte sur la santé. Annoncé en 2012, ce projet de loi n’arrive qu’en seconde moitié de quinquennat et ses principales mesures, comme le tiers payant généralisé, sont si mal préparées que leur application est renvoyée après 2017.
I comme indifférence, à l’égard des terroirs, à l’égard des femmes et des hommes qui ont fait progresser leurs appellations, qui font le rayonnement international de la France et qui n’ont pas à être traités comme les empoisonneurs de notre jeunesse, et je salue le vote de la commission des affaires sociales.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
I comme idéologie, avec cette méfiance à l’égard des industries de santé, qui subissent le yo-yo des taxes et des règles en tout genre.
I comme idéologie encore, avec cette obsession d’opposer le public au privé, des règles différentes étant appliquées à des praticiens qui font le même métier : soigner les Français. Madame la ministre, les Français ont le droit de choisir leur médecin et leur chirurgien en toute confiance.
I comme intolérance, l’intolérance au dialogue que vous développez face aux professionnels de santé, obligés de multiplier les journées de grève, comme ce vendredi, pour obtenir une autre réponse que votre condescendance technocratique.
I comme incapacité, devant les vrais enjeux de la santé au quotidien. Votre projet de loi ne dit rien sur la rémunération des médecins, et rien non plus sur les restes à charge à cause desquels des millions de Français renoncent aujourd’hui aux soins dentaires et optiques.
Enfin, I comme Icare, Icare que vous imitez depuis 2012. Icare s’est brûlé les ailes en voulant trop s’approcher du soleil. Comme lui, à trop vouloir vous approcher d’un modèle étatiste, vous allez détruire notre système de santé.
Oui, votre projet de loi nuit gravement à la santé. Alors changez-le pendant qu’il en est encore temps.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.
Monsieur le député, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Marisol Touraine, retenue dans l’autre assemblée.
Je pourrais peut-être continuer : I comme l’immodestie de votre question,
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains
I comme influence verbale… Pourquoi tant de mots ?
Avec ce projet de loi, nous misons sur la prévention, avec une simplification de l’étiquetage nutritionnel, nous luttons contre l’attrait du tabac, en particulier chez les jeunes, avec le paquet neutre,…
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
…nous combattons l’alcoolisation excessive, qui fait également tant de mal à la jeunesse, et nous créons le médecin traitant pour les enfants.
Avec ce projet de loi, nous permettons à notre système de santé de se moderniser en se réorganisant autour de la coordination de soins de proximité et du médecin traitant. Nous créons un numéro de garde pour que l’on puisse trouver un professionnel de santé près de chez soi à toute heure.
Avec ce projet de loi, enfin, nous franchissons une nouvelle étape de la démocratie sanitaire, l’ouverture des données de santé. Nous créons l’action de groupe en santé pour permettre aux patients, aux malades de porter leurs actions devant les tribunaux.
Cette loi sur la santé est attendue par l’ensemble des patients. Ce sera une loi juste, qui va parachever le travail que nous conduisons depuis 2012, réaffirmer notre attachement à la protection collective, assurer la Sécurité sociale, assainir les comptes de l’assurance maladie sans jamais ni dérembourser ni altérer l’accès aux soins, voire en améliorant celui-ci.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Jean-Yves Caullet, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre des affaires étrangères, ce mois de novembre est marqué par l’intensification de nos efforts et de notre mobilisation en faveur de la réussite de la COP 21. La France veut réussir ce grand événement qui doit permettre aux nations d’adopter un accord contraignant, limitant les effets du réchauffement climatique. D’ailleurs, mes chers collègues, le choix est simple et nous sommes tous convoqués devant le grand tribunal du climat. Il nous appartient de choisir si la planète sera notre procureur ou notre avocat, notre victime ou notre alliée.
Sous l’impulsion forte du Président de la République, la France conduit une action diplomatique d’une intensité remarquable.
Dimanche lors d’une rencontre exceptionnelle des ministres des affaires étrangères, dans nos relations bilatérales ou au sein des instances européennes et internationales, la France est le défenseur inlassable de la protection de la planète.
Quelques exemples récents témoignent de la qualité et de l’ampleur de cet engagement : la pré-COP qui a rassemblé soixante ministres des affaires étrangères ce week-end ; l’engagement historique de la Chine finalisé la semaine dernière lors de la visite du président Hollande ;…
…la mobilisation de nos partenaires africains rassemblés ce midi à l’Élysée pour un moment de travail et d’échange. De nouvelles avancées sont également à attendre, notamment du G20 qui se tiendra ce week-end en Turquie.
Monsieur le ministre, la France aborde méthodiquement l’ensemble des défis qui devront être traités. Rien n’est laissé au hasard : ambition, équité, prise en compte des écarts de développement, financement des engagements et définition des actions concrètes qui vont permettre de transformer les intentions en réalités utiles.
Les États se mobilisent, mais ils ne sont pas seuls. Les parlements, les collectivités, les citoyens et les ONG sont au rendez-vous. Nous pouvons voir émerger une nouvelle diplomatie et le climat, les océans et les forêts pourront prendre demain, aux yeux des citoyens du monde, une importance égale à celle des États.
Toutefois, rien n’est acquis et les prochains jours demeurent essentiels. Pouvez-vous, monsieur le ministre, détailler devant la représentation nationale qui se mobilise, elle aussi, les ambitions de cette période cruciale et le calendrier des travaux restant à accomplir pour concrétiser l’espoir que nous voyons désormais se construire ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Monsieur le député, il est vrai que beaucoup de travail est fait et que, dans la mesure où la France accueille cette conférence mondiale, elle doit être au premier rang. Le dernier événement en date, qui s’est clos peu avant le déjeuner, c’est la pré-COP où, avec mon collègue Manuel Pulgar-Vidal, qui avait présidé la COP 20, j’ai accueilli soixante ministres pour discuter pendant trois jours des préparatifs de la COP. Nous avons avancé, en particulier pour ceux qui s’intéressent vraiment à cette question, comme vous, monsieur Caullet,…
…sur ce point : il est quasiment acquis, ce qui n’était pas le cas il y a encore quelques semaines, que tous les cinq ans, l’ensemble des pays du monde se réuniront pour faire le point sur les émissions de gaz à effet de serre et réévalueront leurs propres engagements, afin que la courbe du réchauffement climatique qui se situe actuellement autour des 3 degrés redescende vers les 2 degrés voire vers 1,5 degré. Le spécialiste que vous êtes voit combien cela est décisif.
Il reste beaucoup de travail et d’autres événements sont à venir, comme le sommet entre l’Union européenne et l’Afrique, le G20 à Antalya la semaine prochaine ou le sommet du Commonwealth auquel est invité le Président de la République. Nous travaillons. Les difficultés sont considérables, mais l’état d’esprit de cette pré-COP était excellent et il y a eu des avancées. Je suis d’un optimisme actif et je pense que si le défi est immense, la France sera au rendez-vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Avec le président Philippe Vigier et le groupe UDI, nous souhaiterions interroger le Gouvernement sur le régime social des indépendants, deuxième régime de couverture sociale en France, qui concerne aujourd’hui plus de 6 millions de ressortissants. Dix ans après sa création, ce système qui se voulait simplificateur apparaît comme une véritable usine à gaz.
La situation s’aggrave de jour en jour et nous devons agir : agir pour répondre à la détresse des affiliés, parmi lesquels on compte un suicide tous les deux jours ; agir pour humaniser les relations entre les professionnels et le RSI ; agir pour corriger les innombrables dysfonctionnements qui persistent ; agir pour fonder un système assurantiel plus flexible, plus efficace et plus humain.
Plusieurs initiatives ont déjà été prises au cours des derniers mois. Je voudrais, à ce propos, saluer Bruno Le Maire et Julien Aubert pour leur proposition de loi, ainsi que Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier pour leur rapport, dans lequel ils font de vraies propositions. Nous devons aller plus vite.
Afin d’agir plus efficacement, nous proposons d’instaurer un moratoire sur le RSI.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et quelques bancs du groupe Les Républicains.
À titre provisoire, les cotisations sociales pourraient être versées sur un compte affecté, le temps de rendre le système plus simple et plus opérationnel.
Nous appelons également à des mesures d’urgence pour les travailleurs indépendants : allégement de charges, baisse des cotisations sociales et des prélèvements obligatoires. Osons, monsieur le ministre, un plan d’urgence à l’image de celui qui a été proposé aux agriculteurs. Enfin, nous proposons une harmonisation des taux de cotisation et des assiettes de recouvrement.
Monsieur le ministre, il y a urgence à agir. Êtes-vous prêt à agir rapidement en faveur des entrepreneurs, des artisans, des commerçants et des indépendants qui sont les forces vives de nos territoires ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire.
Monsieur le député, je crois bon de rappeler l’héritage que le Gouvernement a reçu de l’ancienne majorité,…
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains
…sur le RSI, que la Cour des comptes a qualifié de catastrophe industrielle. Nous avons tous conscience de ses dysfonctionnements et de la nécessité d’améliorer la qualité de ses services et d’augmenter sa lisibilité.
Notre majorité et notre gouvernement prennent leurs responsabilités pour remédier à cette situation : réinternationalisation de la plateforme téléphonique ; renforcement du système informatique entre le RSI et l’URSSAF ; simplification des règles de calcul par la modulation des paiements ou par le calcul des cotisations sur la base de l’année N-1 et non plus N-2.
Plusieurs mesures ont été prises dans le PLFSS dont la réforme du barème des cotisations, qui permettra d’avoir un seul taux de cotisation pour les cinq barèmes actuels et une validation de trois trimestres par an pour la retraite ; la mise en place du mi-temps thérapeutique et d’un délai de carence de trois jours comme pour les salariés.
L’urgence, nous la connaissons et nous la traitons. Changer la donne, ce n’est pas tout supprimer et provoquer une nouvelle catastrophe industrielle. Ce n’est pas notre conception de la responsabilité. Toutes les actions doivent être consolidées pour qu’un lien de confiance entre les assurés et le RSI puisse durablement s’installer et que nous conservions un régime adapté aux spécificités des indépendants.
Ma question s’adresse à la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Hier, des militants de la ligue de protection des oiseaux se sont fait agresser alors qu’ils menaient une action contre le braconnage des pinsons. Le pinson est une espèce protégée et en déclin, et sa capture est un délit passible d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende. Pourtant, chaque saison, des centaines de milliers de pinsons sont braconnés lors de leur migration afin d’être mangés en brochettes !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Ces pinsons sont capturés dans des pièges non sélectifs, les matoles, dans lesquels se font piéger également d’autres oiseaux, protégés ou non. Tout le monde a vu ces photos de chardonnerets pris par erreur dans ces cages et écrasés car non comestibles !
Dans un État de droit, on devrait pouvoir faire confiance à l’État pour lutter contre le braconnage… Eh bien non ! Par peur de s’opposer au lobby de la chasse, l’État ferme les yeux, laisse faire ce braconnage, comme en hiver dernier où vous avez décidé de ne pas sanctionner le braconnage des oies cendrées après la fin de la période de chasse, puisque la directive Oiseaux ne vous permettait pas de prolonger officiellement cette chasse ! Sous prétexte de « tradition », l’État laisse s’installer des zones de non-droit, des zones tellement déconnectées du respect des règles communes que ces délinquants-braconniers en deviennent agresseurs à coup de pelle plutôt que de faire profil bas.
Madame la ministre, vous vous dites choquée par cet incident, mais ce qui est choquant, c’est que l’État tolère un braconnage que la ligue de protection des oiseaux et d’autres lanceurs d’alerte dénoncent pourtant depuis des années ! Alors que nous subissons la sixième extinction massive des espèces et que le Gouvernement prétend faire de la France un pays exemplaire en matière de biodiversité, cette situation est inadmissible. Comptez-vous enfin lutter contre le braconnage, notamment en retirant aux braconniers leur permis de chasse, et ainsi faire respecter nos engagements en matière de sauvegarde des espèces protégées ?
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Madame la députée, cet incident est en effet tout à fait regrettable et j’ai eu l’occasion de dénoncer ces actes de violence contre les militants d’une association. Il y a des espèces d’oiseaux qui sont protégées. La loi doit être respectée, et le ministère est vigilant à cet égard.
Cela dit, je dois à la vérité de souligner que le propriétaire du champ en question avait une autorisation de chasse de l’alouette et, au vu des constations, il n’y a pas eu de prélèvement d’une espèce protégée, en l’occurrence le pinson. Le calme doit donc revenir. Je vais réunir les parties prenantes : nous devons respecter à la fois les droits des chasseurs quand ils sont légalement exercés, et la protection des espèces protégées pour laquelle les associations ont le droit de se mobiliser.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
« Madame la garde des sceaux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame le ministre, suite à l’évasion d’un criminel qui a profité d’une homonymie pour bénéficier d’une permission de sortie à la place d’un codétenu, j’ai visité de manière inopinée, vendredi dernier, la prison du Pontet et j’y ai rencontré son personnel. La manière dont le détenu s’est évadé est pour le moins incongrue. Il n’en reste pas moins que le problème est le manque d’expérience du greffe de cette prison, puisque le greffier le plus ancien n’était là que depuis un an !
Cette évasion peut sembler anecdotique, mais elle est la dernière d’une longue liste – pas moins de treize évasions au cours des trois derniers mois. À Nîmes, un détenu s’est évadé quelques heures ; à Réau et à Saint-Brieuc, les détenus ont profité d’une permission de sortie ; à Argentan, c’est au cours des obsèques de son papa que le détenu a mis les voiles ; à Nantes, c’est tout simplement par la fenêtre du CHU ; à Angers, c’est une évasion à l’aide d’un drap ;…
… à Grenoble, le détenu a profité d’une comparution devant le juge pour filer à l’anglaise ; à Foix, c’est une évasion digne d’une série télé – ils sont passés par les faux-plafonds et les canalisations de la prison – ; à Fresnes, le détenu a profité d’un tournoi de boxe, à Besançon, d’une sortie en VTT ; à Moulins, le prisonnier s’est même offert le luxe de prévenir les surveillants avant de se faire la belle ; à Amiens, les détenus ont scié les barreaux de leur fenêtre et utilisé les câbles anti-évasion pour s’évader.
Je sais que vous allez me fusiller du regard, gronder l’opposition telle une maîtresse d’école et faire vos effets de manche…
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Vous allez me répondre en évoquant votre plan de sécurisation, vos 33 millions d’euros, vos 800 millions d’euros, …
…mais, madame le ministre, il y aura une journée syndicale le 26 novembre : les syndicats disent que vous avez proposé en tout et pour tout 8 euros nets mensuels d’augmentation des indemnités des personnels ! Est-ce cela pour vous l’indépendance de la justice ? Il ne suffit pas d’être une ancienne indépendantiste pour garantir l’indépendance de la justice. Après avoir démissionné face à la délinquance, allez-vous démissionner tout court ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur Aubert, je ne suis pas persuadée que cette attitude à la Rambo soit tout à fait adaptée au sujet que vous avez essayé d’aborder. Vous ne pensez tout de même pas effrayer qui que ce soit ici.
Il y a eu une erreur vraiment regrettable à la prison du Pontet puisqu’une homonymie a permis que sorte en permission un détenu à la place d’un autre. Nous avons vérifié : l’erreur provient de l’ordonnance de permission de sortie, qui a entraîné une erreur dans le greffe. Le Parquet en a été avisé immédiatement, ce qui a évidemment permis d’engager les recherches. Nous avons également introduit une enquête administrative pour voir à quel niveau détecter ce genre d’erreur, parce que nous améliorons le dispositif de suivi et de vérification. Surtout, nous généralisons le logiciel de gestion informatisée des détenus en établissement – GIDE – que vous avez évité de mentionner, que nous avons installé l’année dernière et qui permettra un double contrôle. Nous avons en effet les moyens de le généraliser sur l’ensemble du territoire.
Cela dit, il vous aurait fallu beaucoup plus qu’une question d’actualité pour citer tous les exemples malheureux d’évasion sous le précédent quinquennat.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Je ne vais pas vous rappeler la libération d’un multirécidiviste violeur en octobre 2008 ou l’évasion d’un important trafiquant de drogue en 2011. Je vous dirai simplement que le taux d’évasion sous l’ancien quinquennat était de 0,61 % et qu’il est, sous ce quinquennat, de 0,47 %
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Sachez que que nous prenons ces faits au sérieux et que nous ne les avons jamais exploités lorsque nous étions dans l’opposition parce que nous avons du respect pour les citoyens de ce pays et une haute conscience de notre responsabilité pour améliorer la protection et la sécurité des Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à Mme Béatrice Santais, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, vous avez présenté hier les grandes lignes de votre projet de loi pour favoriser de nouvelles opportunités économiques. Cette initiative doit notamment permettre à la France de profiter à plein du bouleversement numérique en cours dans notre économie.
Comme vous l’avez dit : « ne pas anticiper les mutations, c’est se condamner à les subir. » Le devoir de la majorité est de comprendre, de déchiffrer les mutations en cours pour en tirer le meilleur parti au service de nos objectifs de croissance et d’emploi.
Votre ambition, monsieur le ministre, s’articulera autour de trois dimensions : tout d’abord, faire émerger une économie de l’innovation en soutenant les entreprises innovantes, en mettant en place de nouvelles voies de financement et en accompagnant les secteurs traditionnels vers cette nouvelle économie et ses atouts ; ensuite, accompagner les initiatives des créateurs et des entrepreneurs en termes de simplification, de formation et de soutien de la puissance publique ; enfin, construire des sécurités individuelles dans l’économie numérique.
Ce dont nous ne voulons pas, c’est de ce que l’on appelle l’ubérisation, c’est-à-dire le nivellement par le bas et la précarisation issus d’un usage non maîtrisé des nouveaux outils numériques.
Ce que nous voulons, c’est au contraire que ces nouvelles donnes soient porteuses d’opportunités pour les citoyens, travailleurs et consommateurs, et de développement pour les territoires.
Le numérique nous fait basculer dans un monde nouveau. Il revient à la puissance publique de convertir les incertitudes en atouts. C’est très précisément notre volonté.
Monsieur le ministre, le calendrier de vos propositions est connu. L’ossature des propositions gouvernementales sera dévoilée courant décembre avant le dépôt de votre projet de loi au début de l’année 2016. Pouvez-vous nous préciser vos ambitions et celles du Gouvernement,…
La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la députée, vous avez raison de dire que le numérique et, plus largement, la grande transformation économique dans laquelle nous vivons, sont faites de nombreuses opportunités, mais dans le même temps de risques, d’inquiétudes, parce que des secteurs entiers de notre économie sont en train d’être transformés.
Le défi qui est collectivement le nôtre, pouvoirs publics, acteurs publics et privés, est de créer le cadre pour réussir cette transformation. Il s’agit d’abord de faire réussir la France dans cette grande transformation, parce que les choses vont plus vite, les transformations sont plus brutales.
Il faut donc pouvoir innover. Ouvrir les données, c’est ce qu’Axelle Lemaire commence à faire dans son projet de loi relatif aux données publiques, qui vous sera soumis dans les prochaines semaines, mesdames et messieurs les députés. C’est ce que nous devons faire aussi, secteur par secteur : innover plus facilement ; investir, également, dans les domaines les plus stratégiques, pour que nous innovions davantage ;…
…investir pour que notre industrie se transforme également, en donnant sa place à chacun. C’est le projet de l’industrie du futur.
Ensuite, on doit trouver plus d’adaptabilité. C’est le projet qui est également porté par Myriam El Khomri, parce qu’il y a une cohérence à travers tout cela, c’est la politique de formation, c’est le compte personnel d’activité. Au-delà, c’est aussi notre investissement dans le capital humain…
…c’est la place que l’on donne à chacun ; c’est la réforme nécessaire que je veux porter avec Martine Pinville sur les qualifications et métiers, pour ouvrir, là aussi, d’autres professions, et que chacun trouve sa place.
Enfin, c’est apporter les sécurités : la formation initiale, les grandes infrastructures. Peut-on promettre cette grande transformation économique si trop de territoires, trop d’acteurs économiques, trop de particuliers sont encore loin de ces innovations ? C’est donc accélérer le plan France Très Haut Débit, accélérer encore la mobilisation de tous les acteurs pour une meilleure couverture mobile.
Et puis, il faut donner un cadre. C’est en particulier cela que nous attendons de la réflexion collective, des acteurs, mais aussi du travail parlementaire. Je veux à ce titre saluer le travail que Pascal Terrasse, à la demande du Premier ministre, conduira dans les prochaines semaines sur ce sujet.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Sophie Rohfritsch, pour le groupe Les Républicains.
Ma question s’adresse à madame la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la ministre, après la réforme des rythmes scolaires dans l’école élémentaire, imposée…
…sans aucune concertation aux acteurs de la communauté éducative, aux parents et aux communes – réforme dont soit dit en passant, vous refusez, malgré les demandes réitérées tant de notre groupe que de votre propre majorité, de nous communiquer l’évaluation –, vous avez imposé, malgré l’opposition des syndicats enseignants et, à nouveau, sans concertation avec la communauté éducative, une réforme du collège dont l’unique ambition est de niveler par le bas les connaissances acquises par les collégiens !
« Bravo ! » sur les bancs du groupe Les Républicains. – « Mensonges ! » sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Suppression des classes bilangues, suppression de l’apprentissage du latin et du grec et tant d’autres attaques qui ne font sens que si on les examine à la lumière d’un dogmatisme inégalé par vos deux prédécesseurs, et pourtant, Dieu sait que la compétition était rude !
Voici maintenant que, pour parachever la déstabilisation complète du collège, vous cherchez à en faire le lieu où, grâce à des formules que l’on peut, sans caricaturer, qualifier de loufoques, puisqu’elles se fondent par exemple sur le schéma des lignes du métro parisien,…
…vous prévoyez, toujours sans concertation, la refonte de la carte scolaire !
De grâce, laissez les collèges, leurs élèves et leurs enseignants revenir à leur mission initiale : stabiliser les connaissances fondamentales et développer un socle culturel commun sur lequel le lycée et l’université pourront s’appuyer ensuite.
Vouloir faire porter aux collèges le règlement de problèmes sociaux dont aucune politique coercitive n’a pu venir à bout, comme celui de la mixité sociale, est voué à l’échec !
Laissez aux établissements la liberté de construire une offre attractive, laissez-leur un espace de liberté pour inventer ce qui séduira les parents de tous horizons. En somme, arrêtez de contraindre !
En un mot, madame la ministre, pourquoi ne choisissez-vous pas de faire confiance à la communauté éducative ?
« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les parlementaires, laissez-moi rendre hommage au chancelier Helmut Schmidt, dont nous venons d’apprendre le décès. Nous savons quelle a été sa place à la tête de ce pays ami, l’Allemagne, et combien il a contribué aux liens entre la France et l’Allemagne. Il éclairait toujours, par son verbe et sa personnalité, la réflexion sur le rôle et la place de l’Allemagne en Europe, et sa relation privilégiée avec la France.
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent longuement.
Madame la députée, la ministre de l’éducation nationale participe à une rencontre avec les recteurs, aux côtés du Président de la République. Je réponds donc bien volontiers à cette question, qui est au coeur du projet pour le pays qui est le nôtre.
Plus que jamais, nous devons nous retrouver sur le sujet de la mobilisation de l’école pour les valeurs de la République, notamment dans la lutte contre les inégalités – je ne doute pas que c’est votre cas. Des réformes ont été engagées cette année, avec le renforcement de l’école prioritaire, les moyens supplémentaires que nous donnons à l’école et, bien sûr, la réforme des collèges. Cette réforme, qui s’appliquera l’année prochaine, va de pair avec une mobilisation importante pour la place du numérique à l’école. Je suis persuadé qu’elle est une réforme indispensable, nécessaire, qui vise à donner davantage de moyens à l’école et plus de chances aux élèves.
Face aux inégalités qui n’ont cessé de se reproduire, depuis des années, à l’école, en fonction du lieu de naissance, des origines sociales, des quartiers de résidence, il faut prendre à bras-le-corps la question de la mixité sociale.
Le choix fait par la ministre, s’agissant de la lutte contre cette ségrégation sociale ou spatiale, c’est de partir de l’expérimentation du terrain, à travers un certain nombre de départements – dix-sept –, en lien, bien sûr, avec les établissements, mais aussi avec les conseils départementaux. Nous partons de cette expérience du terrain, des échecs qui ont été ceux de la majorité précédente, qui a voulu remettre en cause la carte scolaire, ce qui n’a en rien réglé des problèmes de montée des inégalités, pour tirer les conclusions nécessaires pour améliorer cette situation, ce qui, honnêtement, devrait nous rassembler tous.
Tous ceux qui ont ou ont eu des enfants au collège, tous ceux qui sont élus sur le terrain savent combien nous faisons face aujourd’hui à des situations d’évitement, à des collèges en très grande difficulté. Alors, plutôt que de lancer des affirmations catégoriques, ou de vous opposer pour le plaisir,…
…de vous opposer, nous devrions nous retrouver autour de cette belle idée, qui est celle de l’école républicaine.
Croyez-moi, mesdames et messieurs les députés, nous sommes engagés. Si quelque chose peut peut-être nous différencier dans le débat public, c’est une certaine conception de l’égalité que, sans doute, nous ne partageons pas.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Seybah Dagoma, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre des affaires étrangères et du développement international, l’accord historique sur le nucléaire iranien de juillet dernier ouvre de nouvelles perspectives entre nos deux pays en matière commerciale. En effet, alors que les flux commerciaux entre la France et l’Iran s’élevaient à 3,7 milliards d’euros en 2004, ils ne représentaient plus, dix ans plus tard, que 500 millions d’euros.
Bien évidemment, pour agir, nos entreprises auront besoin de soutiens bancaires. Or, il apparaît que nos banques sont aujourd’hui tétanisées à la suite des très lourdes sanctions financières infligées à plusieurs d’entre elles aux États-Unis, au motif qu’elles avaient financé des transactions avec le Soudan ou l’Iran.
Dans ce contexte, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne ont mené une démarche commune à Washington pour obtenir des règles claires sur la levée des sanctions contre l’Iran. Pouvez-vous nous faire part, monsieur le ministre, du résultat de ces démarches ? Les clarifications du gouvernement fédéral engageront-elles aussi l’autorité de supervision bancaire de l’État de New York et la justice américaine ?
Plus fondamentalement, les sanctions prononcées aux États-Unis sont, de leur point de vue, justifiées notamment par l’utilisation du dollar dans les transactions incriminées. Cela me conduit à vous poser la question de la place de l’euro dans les transactions commerciales.
D’après les derniers chiffres disponibles, 80 % des crédits documentaires, qui constituent le moyen classique de règlement du commerce international, sont libellés en dollars, 9 % en yuan, du fait de la politique très volontariste de la Chine, et seulement 6 % en euros.
Monsieur le ministre, avons-nous, en Europe, une volonté politique de faire de l’euro une grande monnaie du commerce international, comme la Chine en a une pour sa monnaie ? Comment mobiliser nos partenaires ? Comment pourrions-nous agir ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Madame la députée, vous avez fort bien résumé les choses. Il est vrai qu’en raison de la situation politique internationale et de la question nucléaire, les transactions commerciales avec l’Iran furent pendant longtemps extrêmement réduites. Et puis, avec l’accord du 14 juillet et la levée des sanctions – qui n’est pas encore intervenue –, nous avons de nouvelles perspectives. Nous y travaillons ; je me suis moi-même rendu en Iran, une délégation du MEDEF aussi, de même que d’autres ministres. Espérons que la situation va se débloquer.
Mais – car il y a un « mais » – encore faut-il qu’il y ait les financements nécessaires. Je voudrais vous donner une information que vous n’avez peut-être pas : avant de terminer la négociation, j’avais demandé à mon collègue américain Kerry de me certifier que – pour le dire simplement – l’on n’adopterait pas envers nos entreprises qui pourraient travailler en Iran la même attitude que celle qui, en d’autres circonstances, avait été adoptée envers BNP Paribas et d’autres entreprises françaises. Vous en rappelez-vous ?
Cela ne manque pas de sel, d’ailleurs, car l’on a reproché à BNP Paribas de faire du commerce avec l’Iran et avec Cuba ; or on sait ce qui est advenu dans les relations entre les États-Unis, l’Iran et Cuba…
Bref.
Deux fois de suite, des missions se sont rendues aux États-Unis ; elles comprenaient des représentants de la France, de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne. Je puis dire que, d’après ce qui m’a été rapporté par nos envoyés, l’attitude des Américains fut plutôt encourageante ; mais nous attendons maintenant des traductions concrètes, pour qu’il n’arrive pas la même chose que par le passé.
Plus largement, cela pose en effet le problème du statut de l’euro. Je répondrai simplement qu’il faut que les Européens croient en l’euro. Il n’y a pas de raison qu’il y ait une extraterritorialité du dollar et que l’euro, qui est la monnaie d’une zone économique puissante, n’ait pas la même force ; mais encore faut-il que, collectivement, les Européens le demandent !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, ma question s’adresse, dans la continuité de la précédente, au ministre des affaires étrangères ; il s’agit de l’annonce, qui nous a surpris – mais les méandres de la diplomatie française nous surprendront toujours – de la prochaine visite en France du président iranien, M. Rohani.
Vous venez de donner une partie de la réponse, qui est de nature économique : c’est une démarche intéressée et commerciale – ce que nous entendons fort bien. Mais cette invitation peut paraître surprenante si l’on se souvient des fortes réticences que vous aviez exprimées lors de la signature de l’accord et des longues négociations qui l’ont précédée. Fallait-il signer cet accord ? Son application est actuellement, vous l’avez rappelé, suspendue à des réserves.
Il y a quand même un paradoxe : le gouvernement américain, qui s’était empressé de signer, campe désormais sur une attitude très dure s’agissant de l’interprétation des réserves, alors que vous, qui étiez le défenseur d’une ligne dure à la signature, vous donnez le sentiment, en partie confirmé par la réception du président Rohani par le Président de la République, d’opter désormais pour une attitude plus souple.
Si l’on dispose, après ce que vous venez de dire, d’un minimum d’éléments d’interprétation, quelle est en définitive votre position sur le sujet ? Nous aimerions le savoir.
Par ailleurs, peut-être serait-il opportun qu’à l’occasion de cette rencontre, le président Hollande rappelle au président Rohani un certain nombre de choses.
La question des droits de l’homme en Iran, par exemple : en la matière, M. Rohani est un « modéré » bien connu – il est vrai que son prédécesseur était un fou furieux et que l’on est toujours le modéré de quelqu’un ! Il y a néanmoins eu 700 exécutions capitales en Iran depuis le début de l’année.
Il pourrait aussi lui demander si le gouvernement iranien entend continuer à soutenir le Hezbollah, qui met en difficulté le gouvernement libanais et Israël. Je croyais que vous étiez le plus fervent défenseur de la lutte contre Assad ; or il s’agit là de son allié !
Et puis…
Merci, monsieur Goasguen.
La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Cher monsieur Goasguen, j’ai déjà répondu sur la partie commerciale. S’agissant de la visite du président Rohani, je rappelle que le Président de la République française a déjà rencontré par deux fois ce dernier aux Nations unies, et que, peut-être pas vous, mais vos collègues en général nous demandent à juste titre de mener une politique indépendante, qui ne s’aligne sur personne, et d’avoir des conversations avec les uns et avec les autres. C’est ce que nous faisons, sans jamais nous compromettre pour ce qui est des principes.
Lorsque le président Rohani viendra en France, la semaine prochaine, le Président de la République et moi-même – car j’aurai moi aussi l’occasion de le rencontrer – lui parlerons de tout ; il y aura bien évidemment un aspect commercial, mais il y aura surtout un aspect politique.
Nous parlerons du Liban, d’Israël, et de la Syrie.
Samedi prochain, je me rendrai à Vienne pour discuter de la Syrie. Mon collègue Zarif sera là, et je lui répéterai ce que je lui ai déjà dit il y a quelques jours, à savoir que sur le sujet, nous avons des divergences profondes. Nous considérons qu’il n’est pas possible qu’à terme, ce soit M. Bachar Al-Assad qui gouverne la Syrie, et nous considérons – point supplémentaire, monsieur Assad
Rires et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains
Oh ! Excusez-moi deux fois, monsieur Goasguen !
…nous considérons donc qu’il n’est pas possible que les Iraniens qui, en fait, ont des troupes en Syrie, même s’ils appellent cela des « conseillers militaires », restent là-bas durablement. Nous avons sur ce point une divergence fondamentale avec eux.
Nous tiendrons ce langage – car nous sommes, monsieur Goasguen, indépendants ; nous parlons avec les uns et les autres, mais nous ne mettons pas notre drapeau dans notre poche !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Thierry Robert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le Premier ministre, ma question concerne le régime social des indépendants, sujet sur lequel nous avons récemment échangé par écrit.
Nous savons tous que les affiliés du RSI souffrent de ses dysfonctionnements, qui vont jusqu’à mettre en danger le principe fondamental de solidarité nationale. Ces femmes et ces hommes se battent pour survivre. Ils sont des acteurs essentiels du maillage économique et des créateurs d’emplois ; aujourd’hui, ils sont en grande détresse.
Le moral et la confiance de ces indépendants sont au plus bas. Le régime social des indépendants n’a plus rien de social, il les asphyxie.
Les mouvements de contestation prospèrent. D’ailleurs, la décision du tribunal de grande instance de Nice du 11 décembre 2014 démontre la fragilité de ce régime : son avenir est remis en question, alors qu’un régime spécifique est indispensable.
En outre-mer, la situation est plus dégradée encore. Une fois le plafond annuel de la Sécurité sociale atteint, les indépendants sont assommés par le doublement des cotisations. Il faut absolument réfléchir à plus de progressivité dans les cotisations pour ne pas tuer dans l’oeuf la réussite.
Je pense aussi aux artisans et commerçants retraités. Certains pourraient ne bénéficier que d’une pension d’une centaine d’euros après une vie de travail. J’ai rencontré un homme, il y a quelques jours, qui ne touche que 80 euros de pension, rendez-vous compte ! Cette détresse est une réalité quotidienne et elle s’ajoute à des appels à cotisation injustifiés, souvent évoqués. C’est une véritable situation d’urgence.
Vous avez fait quelques propositions dans le cadre du PLFSS pour 2016. Cependant, quelles autres mesures efficaces allez-vous proposer aux artisans et commerçants qui les attendent, et dans quels délais ? Sur ce sujet, il faut aller vite.
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire.
Monsieur le député, je reviendrai sur deux points évoqués par votre question.
Le premier a trait au RSI dans les départements et territoires d’outre-mer. Les travailleurs indépendants y bénéficient d’un régime particulier, je tiens à le rappeler dans cet hémicycle : ils sont exonérés pendant deux ans de cotisations, puis leurs revenus professionnels inférieurs ou égaux au plafond annuel de la Sécurité sociale – que l’on appelle PASS, et qui est fixé à 38 040 euros – bénéficient d’un abattement de 50 %. Les cotisations, quant à elles, sont évidemment fonction du niveau de revenus.
Vous avez aussi évoqué le mouvement de désaffiliation. Je rappelle que la Sécurité sociale est fondée sur les principes de solidarité nationale et d’universalité. Concrètement, toute personne, quels que soient ses ressources et son état de santé, cotise en fonction de ses capacités et bénéficie de prestations sociales. Il relève de notre responsabilité d’élus, de décideurs, d’adapter ce régime aux spécificités des chefs d’entreprise. C’est bien notre feuille de route : nous le prouvons concrètement et nous continuerons à le faire pour rendre ce régime plus lisible, plus simple, dans l’esprit d’équité qui anime ce gouvernement.
La parole est à M. Jean-Sébastien Vialatte, pour le groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, ma question concerne la réforme de la dotation globale de fonctionnement des communes et la suppression de la dotation de péréquation qui a été adoptée hier soir.
Loin de moi l’idée de polémiquer avec le Gouvernement ; loin de moi l’idée que cette réforme a été mal préparée, non concertée, sans étude d’impact et sans que les conséquences sur certaines communes soient mesurées. J’appelle simplement l’attention du Gouvernement sur quelques dizaines de communes qui subiront en 2017 une triple peine : nous avons en effet appris, par un grand quotidien du soir, que ces communes subiraient en même temps la baisse de la DGF, la contribution au redressement des finances publiques et la perte de la dotation nationale de péréquation. Cela représente une perte brutale de 30 %, voire plus, de leurs dotations !
Les conséquences seraient dramatiques : remise en cause du service public de proximité, augmentation importante de la fiscalité, arrêt des investissements – avec des effets immédiats sur le chômage. Ces communes ont-elles commis une faute, pour risquer d’être aussi lourdement pénalisées ? Sont-elles si bien dotées à l’heure actuelle ?
Prenons une commune comme celle dont je suis maire, Six-Fours-les-Plages : la dotation est de 195 euros par habitant, alors que la moyenne de la strate est de 257 euros. Pourtant, elle subira la triple peine !
Monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré au Sénat que, par cette réforme, peu de communes seront perdantes, et beaucoup seront favorisées. Mais cette réforme est en réalité injuste ! Le vote de la nuit dernière a reporté d’un an l’entrée en vigueur de la réforme. Cependant la baisse des dotations n’a pas été rééchelonnée, comme les élus locaux le demandent. Le report de cette réforme ne fait que maintenir les maires dans l’incertitude ; dans ce climat d’instabilité, ils n’ont aucune visibilité sur leur budget. Pourquoi ne pas supprimer définitivement cette réforme, dans un climat de travail constructif et serein avec les élus locaux ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Monsieur le député, vous avez largement participé à ce débat. Nous avons commencé à préparer la réforme de la dotation globale de fonctionnement bien avant les mois de mars et avril ; au cours de ce travail de préparation, nous avons été guidés par un seul souci : réparer des injustices. Le ton de votre question était très apaisé, je vous réponds à présent avec autant d’apaisement : nous avons eu du mal à travailler avec le Comité des finances locales pour établir des simulations, et nous avons en outre été ralentis par un refus général de l’ensemble des associations d’élus.
Il est cependant important de rappeler qu’aujourd’hui, la répartition des dotations versées par l’État aux collectivités locales est très injuste. En effet, la moyenne des ressources des collectivités avant versement des dotations s’élève à 292 euros par habitant ; après dotations, elle est de 305 euros par habitant. Cela pose un vrai problème de justice !
Il y a également un problème de lisibilité : vingt et un indices entrent en compte pour le calcul de la DGF. Aucun maire ne peut calculer, à l’avance, sa propre DGF ! Enfin, les communes tant urbaines que rurales demandent que l’on prenne en compte deux aspects : d’une part, les éléments liés à la ruralité – les superficies, la montagne,…
…les forêts, les périmètres de protection des captages, etc. –, d’autre part, les charges de centralité pour les communes urbaines, qu’elles soient petites ou grandes.
Nous avons proposé trois indices : une dotation unique pour tous les habitants, une dotation de centralité et une dotation de ruralité. La DGF ne pourrait pas être plus simple ! Toutefois, devant l’opposition de l’ensemble – ou presque – des associations d’élus, du président du Sénat, du président de votre groupe et de quelques parlementaires de notre groupe, le Premier ministre a décidé de prendre un peu plus de temps.
Vous pourrez donc participer avec nous au travail intéressant qui sera mené sous l’autorité de M. Carrez.
La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la secrétaire d’État chargée des droits des femmes, quand un hebdomadaire politique national s’intéresse aux dessous d’une ministre et non à son action, on se dit que le combat contre le sexisme et pour l’égalité a de beaux jours devant lui.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.
Malheureusement, en France, au XXIe siècle, la femme, la jeune fille, restent encore perçues comme des objets sexuels.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Combien d’entre elles ont dû subir dans les transports en commun des comportements inadmissibles, des violences ?
Il s’agit d’un véritable harcèlement.
Alors oui, ne vous en déplaise, nous devons mener ce combat, encore et toujours, et nous devons le mener partout. C’est pourquoi notre majorité s’est mobilisée pour lutter contre les violences et le harcèlement sexuels dont beaucoup de femmes sont malheureusement victimes dans les transports en commun.
Se taire, devoir baisser les yeux et marcher plus vite, renoncer à prendre un bus, un tram ou un métro, voilà les réflexes qu’ont pris certaines femmes. Ce n’est pas tolérable. Il faut réagir, il faut accompagner celles qui portent plainte.
Madame la secrétaire d’État, vous avez lancé une campagne percutante. Elle rappelle aux femmes et aux hommes qui prennent les transports comment réagir. Afin de poursuivre la mobilisation nationale, nous devons encourager les collectivités locales et les sociétés de transport à se saisir de cette campagne et à la décliner au niveau local.
Stop, ça suffit, le harcèlement doit prendre fin. Quelles mesures engagez-vous donc, madame la secrétaire d’État, pour combattre le harcèlement sexuel dans les transports en commun ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des droits des femmes.
Je vous remercie de votre question, madame Khirouni : comme vous l’avez dit, nous avons d’abord levé un tabou, celui du harcèlement sexuel dans les transports. Je tiens à remercier de ce point de vue non seulement l’ensemble des transporteurs et des associations qui ont travaillé avec nous, mais aussi Bernard Cazeneuve et Alain Vidalies, qui, à mes côtés, se sont associés à l’élaboration de cette campagne. Nous avons également formulé douze propositions fortes pour lutter contre le phénomène dont vous avez parlé.
Celles-ci ne constituent pas des mesures « gadget » ; ce sont des mesures inscrites dans la réalité, destinées à agir sur le quotidien des femmes qui, jusqu’à présent, avaient intégré ce terrible désagrément.
Le sujet, effectivement, ne prête pas à rire : lorsque l’on est une femme, on doit avoir le droit de se rendre où on le souhaite, comme on le souhaite et à l’heure où on le souhaite.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.
Nous avons aussi, dans le cadre de ces mesures, des partenaires au sein des collectivités partout en France, et pas seulement en Île-de-France. Ces transporteurs et ces collectivités s’engagent à nos côtés : nous pourrons ainsi déployer cette campagne au cours des six prochains mois. On peut en citer quelques mesures concrètes, telles que le numéro d’appel 31 17 pour la SNCF, un numéro commun avec la RATP, une campagne de sensibilisation et des outils pédagogiques sur Internet. Il s’agit aussi de rappeler aux agresseurs que, aux termes de la loi, une main aux fesses est passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende, et de rappeler aux témoins qu’ils peuvent agir sans devenir des super-héros ou des super-héroïnes. Nous nous adressons enfin aux victimes pour leur dire : nous sommes avec vous, et vous avez le droit de porter plainte.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, deux commissions de notre assemblée ont auditionné conjointement, la semaine dernière, le PDG d’Air France et l’intersyndicale, et ce que nous avons entendu est préoccupant pour l’avenir de la compagnie nationale.
Air France en est à son quatrième plan de réduction d’emplois en quatre ans. Ce qui semble tenir lieu de stratégie se résume dans la recherche toujours plus poussée de la diminution du coût du travail. Les pilotes, les salariés coûteraient trop cher et ne travailleraient pas assez. Les purges s’opèrent ainsi dans un climat social détérioré entretenu par la direction.
Les incidents du 5 octobre en ont témoigné, mais ils ont été précédés par la longue grève de 2014 et par la décision de la direction, en juin 2015, d’engager une procédure judiciaire contre le syndicat des pilotes de ligne, accusés de n’avoir pas tenu les engagements du plan Transform 2015.
Il y eut encore l’annonce du plan B et de ses 2 900 suppressions de postes, puis l’interview du directeur des ressources humaines – DRH – à un quotidien national, à la lecture duquel les pilotes apprenaient qu’ils seraient soumis à trois niveaux de rémunération, selon le niveau de leurs sacrifices.
La situation est donc inquiétante et l’État actionnaire ne saurait rester impassible, non seulement pour qu’Air France se dote d’une vraie stratégie ambitieuse et renoue les fils du dialogue social, mais aussi pour que les compagnies low cost telles que Ryanair cessent d’être subventionnées par des fonds publics, tout comme les compagnies du Golfe, bénéficiaires de largesses qui accroissent les distorsions de concurrence.
Quand et comment l’État entend-il intervenir pour sortir Air France de l’impasse ? Je vous rappelle, monsieur le Premier ministre, que cette entreprise a les moyens de régler le problème puisqu’elle a engrangé 480 millions d’euros de bénéfices cette année.
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Chacun connaît, monsieur le député, la situation du pavillon national, qui a perdu dix points en dix ans sur un marché en croissance. Les raisons, que vous avez rappelées, sont connues également : l’émergence des compagnies low cost, plébiscitées par les consommateurs, la concurrence des compagnies du Golfe et un problème de compétitivité.
Comment apporter une réponse sur ces trois aspects ? S’agissant des compagnies low cost, le Gouvernement est très attentif, notamment, au respect des règles sociales. Je rappelle d’ailleurs que la compagnie Ryanair a été sévèrement condamnée de ce point de vue, et que d’autres enquêtes sont en cours. Par ailleurs, une offensive stratégique a été lancée avec la création de Transavia, qui disposera bientôt d’une flotte de trente-sept avions : cela permettra au pavillon français de devenir concurrent sur ce créneau.
Quant à la concurrence des compagnies du Golfe, c’est la France qui, avec l’Allemagne, a pris l’initiative de demander à l’Union européenne d’engager une négociation commune. Le mandat commun sera défini au début de l’année prochaine. Cette négociation est normale au vu des interrogations que soulèvent les conditions de la concurrence.
Reste enfin la question de la rentabilité. La comparaison avec, non les compagnies dont j’ai parlé, mais les principaux concurrents, comme Lufthansa, révèle des difficultés qui tiennent, notamment, à la nécessité d’abandonner un certain nombre de dessertes sur le long courrier.
Un contrat a été conclu avec les salariés, dont je veux rappeler qu’ils ont déjà consenti beaucoup d’efforts, mais il reste du chemin à parcourir. Aussi le Gouvernement souhaite-t-il voir aboutir le dialogue social sur la base du plan A : des perspectives de développement existent, à condition que le dialogue social ait lieu non pas dans la presse, mais entre ceux à qui il revient de négocier, à savoir les partenaires sociaux. Hier, le PDG d’Air France a indiqué que la négociation pourrait se poursuivre jusqu’à la fin du mois de février prochain : nous souhaitons que ce temps soit celui du dialogue, de la réussite et des perspectives de croissance pour Air France.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : quelle est la position du Gouvernement sur l’usage du cannabis dans notre pays ?
Est-ce celle portée par Mme Touraine, qui prétend s’opposer à la dépénalisation mais dont le projet de loi santé prévoit de punir la première prise de drogue d’une simple contravention d’un montant maximal de 180 euros et qui légalise les salles de shoot, zones d’impunité où l’État aidera les toxicomanes à se droguer dans un confort trompeur ?
Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Mes chers collègues, cela se fait malgré les avis négatifs des académies de médecine et de pharmacie, de l’ordre des médecins et même des Nations unies.
Il faudrait plutôt généraliser le dépistage au lycée, comme le propose Valérie Pécresse en Île-de-France.
La position du Gouvernement est-elle celle portée par Mme Taubira, chargé du respect de l’interdiction mais qui invite « à réfléchir à la légalisation du cannabis » ? Elle est d’ailleurs l’artisan de la transaction pénale, qui permet à tout usager de se droguer contre paiement d’une amende, et l’auteure de la contrainte pénale, qui permet aux petits trafiquants d’éviter la prison.
Monsieur le Premier ministre, les choses ne sont pas plus claires du côté de votre majorité : le président du groupe socialiste, républicain et citoyen, comme le Premier secrétaire du parti socialiste, ont déjà ouvert le débat sur la dépénalisation.
La députée Anne-Yvonne Le Dain va même jusqu’à proposer la vente de cannabis par l’État, se trouvant ainsi au diapason du député Daniel Vaillant, que je salue, et de la sénatrice écologiste Esther Benbassa.
Monsieur le Premier ministre, les Français ne s’y retrouvent pas : vos ministres et votre majorité contredisent vos déclarations de principe. Cette cacophonie atteint, une fois encore, votre autorité.
Vous rendez-vous également compte du message désastreux adressé à tous ceux qui luttent contre la drogue ? Alors je vous le demande solennellement, au nom de tous comme au nom des familles, des médecins, des éducateurs, et des toxicomanes qui veulent s’en sortir : allez-vous, oui ou non, dépénaliser l’usage de drogues ? Le pays attend une réponse claire.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.
Monsieur le député, vous connaissez tout à fait, en posant cette question, la réponse : la position du Gouvernement n’a, évidemment, pas changé sur cette question. Elle est très claire : nous ne sommes pas favorables à la dépénalisation de l’usage du cannabis, et encore moins, puisque cela faisait l’objet de la première partie de votre question, favorables à l’usage du cannabis.
Alors pourquoi le projet de loi santé ne contient-il rien sur le sujet ?
En effet, le cannabis est un produit extrêmement toxique, notamment pour nos jeunes qui, de ce point de vue, souffrent, lorsqu’ils en consomment, de graves troubles à la fois sur le plan neurologique et pathologique.
Il s’agit donc, monsieur le député, d’une question de santé publique.
Ce Gouvernement est tout particulièrement engagé dans la lutte contre le trafic : depuis le début de l’année, plus de quarante-quatre tonnes de cannabis ont été saisies – soit presque autant que pour l’année 2014 – ainsi que sept tonnes de cocaïne. Cela représente une augmentation de 22,5 % par rapport à l’année précédente.
C’est vous dire combien est résolue l’action du ministre de l’intérieur et de ses services dans ce domaine. Il n’empêche que, comme vous le savez, monsieur le député, la consommation de cannabis est particulièrement importante dans notre pays : elle fait donc des dégâts particulièrement importants en matière de santé publique.
Il est donc logique que tous ceux qui sont soucieux de santé publique et d’efficacité des politiques publiques se posent des questions relatives à l’amélioration de la lutte contre la consommation de cannabis chez les jeunes.
Telle est la question qui se pose, et y répondre ne peut se résumer simplement à des politiques ou à des déclarations qui n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, notamment lorsque vous étiez en responsabilité.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, le Président de la République déclarait il y a quelques jours à propos du logement : « Il s’agit de construire, de construire davantage, parce que construire c’est loger, et créer de l’activité et de l’emploi. Il ne s’agit pas d’opposer les locataires aux propriétaires ni le logement social au logement privé ».
Madame la ministre, vous avez traduit hier cette volonté politique en annonçant des mesures fortes concernant le prêt à taux zéro qui s’appliqueront dès le 1er janvier 2016 : plus de familles y auront accès, car le seuil des revenus sera relevé ; il sera étendu au logement ancien, dans tous les territoires et les remboursements pourront s’effectuer sur une période plus longue.
Les bénéficiaires pourront, en effet, commencer à rembourser le prêt au bout de cinq ans, voire de dix ou de quinze ans, selon leurs revenus. Enfin, il pourra financer jusqu’à 40 % de l’achat dans le neuf.
Cette réforme est la bienvenue, à la fois pour les ménages et le secteur du bâtiment. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer combien de ménages pourraient en bénéficier ? Quelles sont mesures d’accompagnement susceptibles d’être mises en place afin de mieux sécuriser les familles dans leur logement face aux accidents de la vie tel que le divorce ou le chômage ? Ce prêt sera t-il cumulable avec les mesures fiscales applicables aux économies d’énergie ? Quel sera l’impact de cette réforme sur l’emploi dans le secteur du bâtiment ?
Enfin, les professionnels de ce secteur ont-ils pris pris des engagements en vue de maîtriser le prix des travaux de construction ou de rénovation, afin qu’il n’y ait pas d’effet d’aubaine ?
La parole est à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Madame la députée, vous avez parfaitement rappelé le dispositif voulu par le Président de la République, qui vise à agir sur la relance de la construction et à favoriser l’accession à la propriété des jeunes ainsi que des classes moyennes et populaires.
En effet, depuis le plan de relance que nous avions – avec le Premier ministre – présenté l’année dernière, le secteur de l’accession à la propriété s’est trouvé en retrait par rapport aux augmentations que nous constatons.
Il était donc nécessaire d’améliorer ce dispositif et de le rendre plus lisible, plus simple et donc plus efficace en agissant sur l’ensemble des composantes et des paramètres du prêt à taux zéro. Vous les avez rappelés : ce prêt peut désormais représenter 40 % du financement, le plafond de revenu à été revu à la hausse, et il peut s’appliquer dans l’ancien.
Tout cela doit permettre aux jeunes de retrouver confiance et de devenir propriétaires, mais ce dispositif doit également soutenir ce grand secteur économique pourvoyeur d’emplois qu’est le bâtiment.
On estime qu’il permettra de créer 50 000 emplois dans ce secteur, notamment dans l’artisanat. En effet, je rappelle que, pour contenir et limiter les effets d’aubaine que vous avez évoqués, madame la députée, le prêt à taux zéro dans l’ancien sera accordé, comme c’est le cas actuellement, sous conditions de travaux : 25 % seront toujours nécessaires pour déclencher l’obtention de ce prêt. Cela permet d’agir très concrètement sur cette activité dans tous les territoires.
Par ailleurs, pour répondre à votre question concernant le nombre de bénéficiaires, 65 000 prêts à taux zéro sont accordés chaque année, et 47 000 l’ont été en 2014. Nous espérons que, grâce à ce dispositif, le nombre de prêts accordés atteindra, en 2016, 120 000.
Vous le voyez, la politique du Gouvernement est globale : nous souhaitons agir sur l’ensemble des secteurs du logement pour favoriser l’accession à la propriété et la relance de la construction et de la rénovation. Oui, le nouveau prêt à taux zéro est cumulable, pour tous nos concitoyens dans tous les territoires, avec l’éco-PTZ.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La séance des questions au Gouvernement est terminée. La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Sandrine Mazetier.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à la politique des territoires. (no 3110, annexes 34 et 35 ; no 3112, tome XIII ; no 3116, tome IX.)
La parole est à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Madame la présidente, monsieur le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, madame et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le fil conducteur de notre action en direction des territoires consiste à considérer que tous méritent notre attention, dans le respect de leurs spécificités, de leurs contraintes, mais aussi de leurs atouts.
Cela vaut pour les villes et les quartiers, Patrick Kanner y reviendra au cours de nos débats, et s’applique aussi dans les zones rurales et périurbaines, comme en témoignent les politiques que je conduis.
Les deux comités interministériels qui se sont tenus en 2015 ont permis d’organiser l’action coordonnée du Gouvernement en direction des campagnes. Cette action répond concrètement aux préoccupations quotidiennes de nos compatriotes en matière d’accès aux services et au numérique, de développement économique ou de mise en réseau de territoires complémentaires.
Par ailleurs, la plupart des contrats de plan État-région ont été signés au cours de l’année. Ils illustrent l’investissement de l’État, à moyen et long terme, aux côtés des collectivités locales pour l’emploi, la croissance et l’innovation. Ils constituent, à eux seuls, 60 % des crédits du programme 112 pour 2016.
Au total, les crédits de ce programme s’élèvent à 192 millions d’euros. Ils sont stables en capacité d’engagement mais affichent une diminution de 4 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2015.
La prime d’aménagement du territoire en direction des entreprises voit ses crédits stabilisés à hauteur de 25 millions d’euros.
Je mentionnerai aussi le FNADT – fonds national d’aménagement et de développement du territoire – dont les crédits représentent 12 % du programme.
Mais notre politique en matière d’aménagement du territoire et des ruralités dépasse le cadre de cette seule mission. Elle mobilise au total 5,5 milliards d’euros, sans compter les aides fiscales.
Je pourrais aussi citer le fonds de soutien à l’investissement local, doté d’un milliard d’euros.
Ce sont 300 millions d’euros qui seront ainsi consacrés à des projets de revitalisation globaux destinés aux centres-bourgs et aux villes de moins de 50 000 habitants. La DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, est, pour sa part, réévaluée de 200 millions d’euros.
Quant au FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, le projet de loi de finances prévoit qu’y seront éligibles les dépenses d’entretien des bâtiments publics des collectivités et de la voirie.
Débordant du cadre de ce texte, je dirai un mot de la réforme des ZRR – zones de revitalisation rurale. Cette réforme est indispensable et nous la mènerons dans un esprit de simplification, de justice et de concertation.
Les grandes orientations de la politique de la ville sont retracées dans le programme 147 dont les crédits augmentent de 4 % en 2016, hors poursuite de la baisse mécanique des exonérations en zone franche urbaine. Cette progression traduit notre volonté de donner corps à la promesse d’égalité républicaine dans tous les territoires.
Concrètement, sur les 438 millions d’euros du budget consacrés à la politique de la ville, 350 millions seront destinés aux actions des associations dans les quartiers prioritaires.
Le premier axe de notre politique de la ville est le renforcement de la présence des adultes et du lien social.
Le deuxième s’incarne dans le renforcement du programme de réussite éducative qui s’adresse aux jeunes en risque de rupture scolaire, sociale ou familiale.
Le troisième concerne le droit à une seconde chance avec notamment les « contrats starters » dont près de 11 000 ont déjà été signés.
Enfin, le quatrième est le développement économique des quartiers prioritaires.
En complément des outils existants, le Gouvernement a mis en place l’agence de développement des territoires France Entrepreneur, sur laquelle Patrick Kanner reviendra lorsque nous examinerons un amendement du Gouvernement.
La dernière priorité, que nous avons en commun, concerne la rénovation urbaine. L’ANRU – Agence nationale pour la rénovation urbaine – et ses partenaires engageront 6,4 milliards d’euros, avec l’objectif de générer 20 milliards d’euros d’investissement.
Vous l’aurez compris, notre politique en faveur de l’aménagement des territoires est par essence partenariale, transversale et interministérielle. Il s’agit de porter un nouveau regard et de répondre concrètement aux attentes de nos concitoyens et aux enjeux spécifiques qui les concernent.
Par cette action résolue, pragmatique, au plus près du terrain, nous voulons remettre la République dans les territoires, dans tous nos territoires.
Nous allons maintenant entendre les porte-parole des groupes.
La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Politique des territoires » ont une résonance particulière en ces temps de crise et de malaises persistants, dans nos territoires ruraux comme dans les quartiers dits « sensibles » de nos villes.
Au premier regard, en dépit d’une légère baisse de ses crédits, la mission participe, et c’est justice, à l’effort de redressement de nos comptes publics. Mais au-delà de cette baisse des crédits, des moyens supplémentaires, qui ne figurent pas ici, sont mobilisés en faveur de la politique des territoires.
Cette mission a un fort caractère interministériel, la politique des territoires étant par nature transversale ; elle consiste en effet à soutenir à la fois le commerce, l’artisanat, l’agriculture, l’économie de proximité, l’habitat, les services publics ou encore l’accès aux soins.
Au sujet de la politique de la ville, l’année 2015 est marquée par la négociation des contrats de ville : la quasi-totalité sont désormais signés – c’est d’ailleurs le cas à Château-Thierry, monsieur le ministre.
L’exonération accordée aux bailleurs sociaux sous forme d’abattement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements situés en quartier prioritaire suscite des interrogations. Elle n’a en effet de sens qu’en contrepartie d’actions contribuant réellement à améliorer la qualité de service et la vie quotidienne des locataires.
Hier soir, au cours de l’examen de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », nous avons voté un amendement du groupe RRDP, défendu par mon collègue Joël Giraud, qui prévoit une compensation de l’État pour les communes ayant à subir les conséquences de l’exonération. Le Gouvernement s’est donc montré ouvert sur cette question centrale, à l’heure où les communes s’apprêtent à subir une forte baisse de leur dotation globale de fonctionnement.
Sans compensation, l’affaiblissement des villes-centres qui accueillent des logements sociaux serait en effet inévitable, et les quartiers visés en sortiraient nécessairement perdants – le président de l’ANRU est là pour en témoigner.
En matière de politique en faveur des territoires ruraux, l’année 2015 est riche en annonces. Diverses mesures, issues des travaux des assises de la ruralité, sont prévues, suivies par les deux comités interministériels aux ruralités.
Globalement, cette mission n’est pas la plus mal lotie et je voudrais, au nom des députés du groupe RRDP, saluer le choix du Gouvernement de tenir compte de la montée des angoisses dans nos territoires.
Nos ruralités, dans leur diversité, incarnent l’image de la France. Nous devons les aider à relever les défis qu’elles rencontrent à un moment où elles sont bousculées par des évolutions brutales.
Les craintes légitimes qui s’expriment doivent être écoutées. Après des années de négligence, je veux croire que le Gouvernement a entendu le message et qu’il est déterminé à y répondre pour garantir un développement harmonieux et juste de l’ensemble des territoires de France.
Je considère qu’il est aussi vain qu’absurde d’opposer les villes aux campagnes : dans chaque zone se trouvent des richesses, des opportunités et des initiatives qu’il convient encourager.
La stigmatisation, le dénigrement, le mépris, les clichés véhiculés sur nos campagnes comme sur nos banlieues relèvent de l’ignorance, de l’injustice et de l’ingratitude.
Si les espaces sont différents, les aspirations sont les mêmes pour leurs habitants qui effectuent bien souvent un chassé-croisé entre ces espaces.
Cadre de vie, services publics, emploi, culture : nous sommes tous des « rurbains » et nous bénéficions tous des services de la ville, comme nous profitons du bonheur qu’offrent les prairies et les montagnes.
Parmi les mesures visant à réduire les injustices, en dehors de cette mission, je tiens à saluer l’abondement du fonds d’investissement pour les collectivités, déjà doté d’un milliard d’euros. Ce sont 500 millions d’euros pour les zones rurales, dont 300 millions seront destinés à la revitalisation des centres-bourgs.
Ces crédits sont vitaux pour le maintien de l’animation et le développement des centres de nos petites villes, et ils sont sources d’externalités positives sur toutes leurs aires d’influence.
En termes de logement, l’élargissement du PTZ, le prêt à taux zéro, qui fait aujourd’hui le buzz médiatique – bravo ! – devrait permettre à 120 000 ménages d’en bénéficier en 2016. Ce n’est pas seulement un élu de la majorité qui se réjouit de l’extension de ces critères, ce sont tous les acteurs socio-professionnels, en particulier le président de la Fédération française du bâtiment.
Au total, ce sont plus de logements et plus d’emplois, grâce à une mobilisation de plus de 250 millions d’euros supplémentaires par an pendant cinq ans. Autant de bonnes nouvelles.
Je n’oublie pas le Fonds d’aide à la pierre ou encore l’éligibilité de communes en tension au dispositif d’investissement locatif. La préfète de région a signé aujourd’hui l’arrêté pour le zonage de Château-Thierry en B2, ce dont je vous remercie encore, madame la ministre.
En matière de santé, je ne répéterai pas ce qui a été dit : les mesures envisagées, comme l’ouverture de maisons de santé, visent à réduire les inégalités d’accès aux soins et à offrir des services de qualité.
Il en est de même s’agissant de l’accès aux services publics. Vous avez annoncé, madame la ministre, le déploiement de 1 000 maisons de service au public. J’espère que cette annonce, qui va dans le bon sens, se concrétisera le plus rapidement possible.
Gardons à l’esprit que les crédits d’intervention en faveur des territoires défavorisés, en ville comme dans nos territoires ruraux, constituent non des faveurs mais la correction d’une inégalité. Ils permettent d’assurer une continuité territoriale et de favoriser les leviers de coopération entre ces territoires pour répondre aux besoins et aux attentes de leurs habitants en luttant contre les concentrations de pauvreté, et les fractures économiques, sociales, numériques et territoriales.
Dans ces conditions, madame et monsieur les ministres, nous vous faisons confiance et nous voterons les crédits de la mission. Nous devons lutter de toutes nos forces contre la diffusion du sentiment de délaissement et d’abandon, afin de redonner confiance à tous.
Dans ces territoires, qualité de vie, tradition, innovation et solidarité peuvent se conjuguer avec harmonie. Le potentiel est immense. Il nous appartient de le valoriser au bénéfice de l’ensemble de nos concitoyens.
Mes chers collègues, je vous rappelle que l’intervention des porte-parole des groupes est limités à cinq minutes, temps de parole que je vous demande de respecter.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, madame et monsieur les ministres, mes chers collègues, dans le prolongement de mon intervention en commission élargie, au nom du groupe SRC, je veux d’abord insister sur l’effort de l’État en matière de soutien aux territoires ruraux, dans l’esprit qui a présidé aux deux comités interministériels consacrés à leur développement et à leur désenclavement.
Plan partenarial entre l’État et La Poste pour le développement des maisons de service au public – MSAP –, plan de déploiement du haut débit en vue de la résorption des zones blanches sont des objectifs qui répondent à des défis ambitieux.
Concernant les maisons de service au public, je réitère mon appel à la vigilance : il est important d’accompagner les opérateurs dans leur gestion des ressources humaines, afin de garantir l’effectivité et l’efficacité du dispositif.
Je constate avec satisfaction que le développement économique figure en bonne place dans les engagements du Gouvernement. Les territoires ruraux sont des espaces qui cumulent souvent les difficultés économiques, sociales et environnementales. L’attention doit être portée sur le soutien à la localisation d’activités économiques et industrielles. Je souhaite notamment que le Commissariat général à l’égalité des territoires – CGET – puisse jouer tout son rôle en la matière.
Toujours en ce qui concerne le développement solidaire et équilibré des territoires, je tiens à revenir sur la revitalisation des centres bourgs. Vous avez annoncé une enveloppe supplémentaire de 300 millions d’euros. Voilà qui va dans le bon sens, mais, madame la ministre, je vous demande une nouvelle fois une réponse que je n’ai pas obtenue lors de la commission élargie. Peut-être nous sommes nous mal compris.
En effet, pour ce qui est de l’appel à manifestation d’intérêt, le financement est issu de subventions de droit commun provenant du FNADT ou de la dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR –, crédits abondés et fléchés sur les projets des villes éligibles.
Ces financements croisés supposent l’instruction de nombreux dossiers dont les bases de travaux éligibles sont souvent différentes, ce qui pose des difficultés dans l’instruction et l’avancement des dossiers, même si l’on peut bénéficier d’une aide à l’ingénierie de projet à travers le FNADT.
Par ailleurs, les travaux de voirie sont exclus, alors que la plupart des projets concernent la requalification urbaine, qui contient une part souvent importante de travaux de voirie.
Cette situation est dommageable dans la mesure où les projets de requalification urbaine sont au service du commerce et de l’économie.
Ces projets laissent un reste à charge aux communes parfois trop important, ce qui ralentit le projet global.
Pensez-vous confier aux villes éligibles au dispositif centres-bourgs une enveloppe spécifique qui puisse donner plus de souplesse et de simplicité au financement de ces projets ?
Je reviendrai plus brièvement sur le programme « Politique de la ville », qui marque le déploiement des outils pour la mise en oeuvre de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, promulguée le 21 février 2014. Dans ce contexte, c’est une nouvelle approche des quartiers défavorisés qui est privilégiée.
L’année 2015 a été consacrée à l’élaboration et à la signature des contrats de ville 2015-2020, caractérisés par un portage intercommunal, pour faire jouer l’effort de solidarité entre territoires. Cette démarche intégrée allie la dimension sociale, urbaine et économique à partir d’une large mobilisation des acteurs institutionnels et de la société civile. Il s’agit en quelque sorte d’une coconstruction avec les habitants des quartiers prioritaires, ce qui était essentiel. Parce que les quartiers font partie intégrante de la République, chacun d’eux doit être reconnu à part entière.
À la suite du comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015, la thématique du lien social, citoyenneté et vie publique est confortée, notamment à travers le dispositif des adultes relais, puisque le montant du forfait d’aide accordé par an et par poste sera revalorisé de 5 %. Ce levier permettra de soutenir les associations et les collectivités, ainsi que leurs actions de médiation sociale et de promotion des valeurs de la République dans les quartiers.
En ce qui concerne les actions en faveur de l’emploi et du développement économique, le soutien du programme « Politique de la ville » à l’établissement public d’insertion de la défense – EPIDe – est renforcé. Sa capacité d’accueil augmentera de 570 places, ce qui permettra d’accueillir environ 1 000 jeunes supplémentaires chaque année.
Je salue également la compensation par l’État, qui sera, je l’espère, confirmée, de l’exonération partielle de la taxe foncière pour les bailleurs publics, qui a été votée hier en commission.
Je remercie d’ailleurs Jacques Krabal et le groupe RRDP d’avoir fait inscrire ce point à l’ordre du jour.
Pour conclure, le groupe SRC votera les crédits de la mission. Dans la période économique et sociale que nous traversons, il n’est pas un territoire à abandonner, car il n’y a pas un territoire sur lequel on ne puisse s’appuyer pour rebondir et construire l’avenir. L’ambition de ce budget en témoigne.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame et monsieur les ministres, nous allons donc parler d’aménagement du territoire, mais de quel aménagement du territoire ? Pas de celui d’Olivier Guichard, des métropoles d’équilibre ou du plan quinquennal.
Pas de celui d’une France conquérante qui distribuait les autoroutes et les lignes de TGV, quoique vous continuiez à en promettre à certains.
Pas de celui d’un gouvernement visionnaire, redistributeur d’une croissance disparue depuis bien longtemps et qui peine tant à revenir.
Aujourd’hui, nous parlons pudiquement d’une politique des territoires qui lisse la pénurie au lieu de répartir les richesses. Cette politique nationale est l’addition de politiques sectorielles qui ont pour seule ambition de garantir la paix sociale pour certains, de limiter la grogne montante pour d’autres.
Certes, vous avez poursuivi la politique des pôles de compétitivité et des pôles d’excellence rurale, lancée par la majorité précédente, mais, dans les faits, on peine à voir concrètement la traduction du concept d’égalité des territoires.
Depuis quelques années, on observe surtout la multiplication de procédures technocratiques autoritaires et uniformes. Comme pour cacher son impuissance à lutter contre la désertification rurale, le Gouvernement s’emploie à imposer aux élus locaux des usines à gaz, car l’aménagement du territoire repose aujourd’hui sur les collectivités locales que vous maltraitez.
Or il n’y a pas d’aménagement du territoire sans des collectivités locales fortes, organisées et stables.
Vous maltraitez les collectivités locales par des mesures uniformes et autoritaires.
Je ne reviendrai pas sur les rythmes scolaires.
La fixation d’un nouveau seuil de population pour les intercommunalités déstabilise des collectivités qui venaient à peine de digérer la réforme de 2010. Ce nouveau seuil constitue un principe inapplicable, qui entraînera des dérogations incompréhensibles.
Les nouveaux cantons ont été définis sans concertation. Les pays se transforment en pôles d’équilibre territoriaux et ruraux : encore des études, encore des diagnostics, sans qu’on sache vraiment pourquoi.
L’élaboration des schémas de cohérence territoriale – SCoT – et des contrats de ville est d’une complexité inouïe. Vous exigez des territoires ruraux un niveau d’expertise que seules les grandes collectivités peuvent se payer, en recourant à des agences d’urbanisme et à de grands cabinets.
Trouvez-vous normal qu’un plan local d’urbanisme intercommunal pour une communauté de communes coûte plusieurs centaines de milliers d’euros ?
Trouvez-vous normal qu’il faille trois ou quatre ans pour élaborer un SCoT rural ? Laissez les collectivités locales aménager leur territoire. Elles ne vous ont pas attendu pour construire des maisons de santé et financer des pylônes de téléphonie mobile.
Si l’État veut nous aider, qu’il simplifie les procédures au lieu de les modifier et de les complexifier chaque année. Qu’il cesse de nous obliger à faire et à refaire des diagnostics, à changer les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager – ZPPAUP – en aires de valorisation de l’architecture et du patrimoine –AVAP –, les pays en pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, ou de nous imposer des plans climat énergie sur des territoires qui ont moins de vingt habitants par kilomètre carré.
Quant aux régions, ce ne sont pas elles, mais les entreprises qui vont créer des emplois et développer l’économie.
Vous multipliez le nombre de schémas régionaux aux intitulés pompeux : le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation s’ajoute au schéma régional d’aménagement et de développement du territoire et au schéma de développement touristique.
Ces schémas tantôt prescriptifs tantôt indicatifs sont élaborés selon une procédure complexe et, à peine adoptés, deviennent caducs.
Les entreprises se fichent de ces schémas. Elles ne demandent pas de subventions.
Elles souhaitent de la liberté, et voudraient surtout payer moins de charges. Ce sont ces entreprises qui feront la réussite des régions, et non l’inverse.
Enfin, il faut arrêter de nous amputer nos ressources de 28 milliards d’euros, alors que, pour la seule année 2016, l’État dépensera 14 milliards d’euros en plus.
L’égalité des territoires doit consister non à nous imposer à tous les mêmes normes et les mêmes contraintes, mais à nous donner la liberté d’atteindre à notre rythme et comme nous le souhaitons des objectifs réalistes et adaptés à notre territoire.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de son premier discours de politique générale, en 2014, le Premier ministre Manuel Valls avait présenté les grands axes de sa réforme territoriale : des régions renforcées dans leurs responsabilités, une mise en extinction progressive des conseils généraux, devenus conseils départementaux, et des intercommunalités dynamiques reflétant la réalité des bassins de vie.
L’espoir était alors immense de voir enfin traduit en acte, dans la loi, le projet d’une France des territoires : une France pour les territoires, une France des territoires, une France par les territoires !
Lors de ce premier discours, je m’étais donc abstenu, à titre personnel, parce que je partageais ce point de vue.
C’est dire, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, si la désillusion est aujourd’hui cruelle. Car là où nous attendions de la clarté, de la cohérence, nous avons eu de la complexification, de la confusion, mais – surtout – aucune vision cohérente de ce que sera la nouvelle architecture territoriale de la France.
Nous avons assisté à l’accumulation de lois diverses et variées, voire – comble de l’ironie – contradictoires : tout d’abord, une loi de modernisation de l’action publique qui se cantonne à l’affirmation du pouvoir des métropoles, sans concertation avec les territoires périphériques, ensuite une nouvelle et absurde carte des régions, dessinée en catimini sur un coin de table de l’Élysée un beau jour de juin, une illusoire répartition des compétences qui ne clarifie aucun rôle, et enfin une loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – NOTRe – décousue et pour beaucoup, il faut le dire, illisible ! Or à travers la politique des territoires, c’est bien sa vision de l’architecture territoriale dans le périmètre national que le Gouvernement doit présenter à ses concitoyens et aux élus des territoires.
Le groupe UDI regrette que le budget dédié à la politique des territoires accuse en l’état une baisse de 3,8 % par rapport à 2015. Il se prononcera donc contre ce budget.
Celui-ci, qui atteint péniblement 709 millions d’euros pour 2016, sera bien trop timoré pour relever efficacement les défis immenses de cette mission : soutenir l’aménagement équilibré du territoire ; lutter contre les disparités, contre la paupérisation des territoires périphériques, quartiers sensibles mais aussi, on l’oublie parfois, territoires ruraux ; enfin, accompagner les mutations économiques et le développement des territoires.
Je me félicite néanmoins, comme en commission élargie, de quelques avancées que nous reconnaissons : la mise en place du deuxième plan de renouvellement urbain, qui profitera à 216 quartiers sensibles répartis dans toute la France, et la reconduction du dispositif « Argent de poche » financé à travers le programme « Ville, Vie, Vacances » grâce à votre engagement, monsieur le ministre.
Je regrette cependant que le Gouvernement ne donne pas les instructions claires qui permettraient à l’État de nous dire comment il compte s’organiser dans les territoires, y compris à l’échelle des arrondissements.
Nous assistons depuis trop longtemps, quels que soient les gouvernements en place, à un retrait des services de l’État dans les territoires. Cela se traduit par la perte des sous-préfectures, des gendarmeries, des commissariats de police, des trésoreries.
Quels que soient les gouvernements, je l’ai dit, la méthode est la même. Il faut maintenant construire avec les élus des territoires !
Il y a pour moi deux priorités essentielles en ce qui concerne la politique des territoires. La téléphonie mobile d’abord, puisque subsiste en 2015 un grave problème d’accès à la téléphonie mobile sur notre territoire. L’accès au très haut débit pour tous ensuite : le très haut débit, qui devrait permettre de corriger les disparités entre les territoires, est en train de les aggraver. Il y a urgence à agir !
En ce qui concerne l’organisation locale, le Gouvernement doit donner des instructions claires afin de promouvoir une vraie simplification : les périmètres des intercommunalités, des SCoT, des syndicats d’ordures ménagères, des syndicats de gestion de l’eau ou des syndicats de production d’eau potable doivent être cohérents, afin de rendre les politiques publiques plus efficaces à l’échelle locale et d’en améliorer la lisibilité, tout cela au service des populations.
Voilà le message que je souhaitais faire passer au nom du groupe UDI. Il y aurait beaucoup à dire sur un budget des territoires, mais les cinq minutes qui me sont imparties étant largement écoulées, je conclurai là mon propos.
La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la Présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires », qui intègre depuis l’an dernier la politique de la ville, représente pour 2016 un budget total de 674 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 718 millions d’euros en crédits de paiement.
Cette année est marquée par la mise en oeuvre des contrats de plan État-région de nouvelle génération, la signature des nouveaux contrats de ville et les mesures décidées dans le cadre des comités interministériels sur la ruralité.
La nouvelle génération des contrats de plan État-région 2015-2020 constitue un enjeu majeur pour l’investissement public. Les CPER ont en effet vocation à favoriser la relance de l’investissement dans les territoires au service de l’emploi.
Avec des crédits en baisse et des dotations aux collectivités locales en chute libre, nous doutons de la capacité du budget qui nous est présenté à impulser des politiques partenariales ambitieuses et à donner un nouvel élan à la politique des territoires.
Comme le soulignait en commission élargie l’un de nos collègues du groupe Les Républicains, Alain Chrétien,…
…l’État, bien avant cette législature, a décidé de se retirer de l’aménagement du territoire faute de moyens, laissant aux collectivités le soin d’aménager leur propre territoire.
Asphyxiées par la baisse des dotations, celles-ci ne peuvent plus faire face.
Dans un tel contexte, on voit mal comment les contrats de plan pourront exercer un effet de levier pour élever le niveau d’équipement des territoires, soutenir l’emploi et préparer l’avenir.
La réforme territoriale – que ces contrats de plan accompagnent – n’apporte pas non plus de réponse quant à l’autonomie financière des régions, pas plus qu’elle ne traite de la question d’une réforme fiscale juste.
La métropolisation des territoires et, au-delà, des politiques publiques, contribue au contraire à créer des déséquilibres, avec d’un côté des territoires soumis à la concurrence internationale, avec les métropoles qui capteront les ressources de territoires jusque-là stables, et de l’autre des zones rurales et périurbaines laissées à l’abandon. C’est la réalité territoriale qui se dessine.
Ce qui est vrai du territoire dans son ensemble l’est encore en matière de politique de la ville. Nous avons en effet appris en la matière à nous défier des effets d’annonce, mais pour nombre des 1 300 quartiers prioritaires de la politique de la ville, la baisse des dotations est là aussi une dure réalité, malgré les avancées obtenues pour augmenter la solidarité nationale, avec la dotation de solidarité urbaine et la solidarité intercommunale via le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC.
Nous avons une fois encore un problème de cohérence entre les ambitions affichées et les moyens effectivement mis en oeuvre.
Concernant les territoires ruraux, nous nous heurtons au même paradoxe, pour ne pas dire à la même hypocrisie. D’un côté, des annonces tonitruantes visant la santé et l’éducation en milieu rural, la résorption de la fracture numérique, le soutien à l’investissement public local à hauteur d’1 milliard d’euros pour soutenir les projets portés par les communes et les intercommunalités. De l’autre, sous couvert d’intercommunalité, des communes rurales dévitalisées par la loi NOTRe et privées de moyens par la baisse des dotations. Il faut sortir de cette logique d’austérité et de gestion de la pénurie, sans laquelle nous ne pourrons ni endiguer la fracture territoriale, ni garantir plus longtemps la cohésion républicaine qu’assurent et garantissent les mécanismes de solidarité nationale.
Les moyens manquent cruellement aujourd’hui pour valoriser la cohésion territoriale, implanter ou développer des équipements ou des services, organiser et favoriser l’accueil de populations nouvelles dans les territoires ruraux, soutenir et encourager les projets de développement local et les rendre vertueux au sens du développement durable.
Compte tenu de l’austérité qui gouverne les choix opérés et paralyse l’ambition gouvernementale, nous ne voterons pas le présent budget.
Nous en arrivons aux questions. Je rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
Pour le groupe socialiste, républicain et citoyen, la parole est à M. Alain Calmette.
Il y a un an, ici même, lors du débat budgétaire sur cette mission « Politique des territoires », l’opposition UMP fustigeait l’inaction du Gouvernement, caricaturait les Assises de la ruralité et disait que le Gouvernement se payait de mots, sans actes crédibles et réalistes sur le terrain.
Un an après, monsieur Chrétien, il y a eu deux comités interministériels aux ruralités et une soixantaine de mesures pragmatiques touchant à tous les domaines de la vie rurale, qu’il s’agisse du numérique, des services publics, des bourgs-centres, de la santé, de l’éducation, du logement…
Cette politique de mesures pratiques et pragmatiques tranche singulièrement avec celle du quinquennat précédent, à savoir une véritable casse des services publics – je pense notamment aux écoles, avec les fermetures de classes et d’écoles à coup de mesures de révision générale des politiques publiques aveugles, appliquées indifféremment quels que soient les territoires.
Cette politique ne confirmera sa crédibilité que lorsque s’appliqueront sur le terrain cette soixantaine de mesures. Huit mois après le premier comité interministériel aux ruralités et quelques jours après le deuxième, pouvez-vous, madame la ministre, nous dire où en est l’application de ces mesures et quel est le calendrier pour celles qui ne seraient pas encore appliquées ?
Vous avez raison de souligner qu’il existe une différence de méthode et de rappeler les préoccupations que portent ce gouvernement et cette majorité et l’ambition qu’ils ont pour nos campagnes, contrairement à ce qui s’est passé avant 2012.
C’est un peu simple ! Les pôles d’excellence rurale, ce n’est pas nous ?
Vous l’avez rappelé, deux comités interministériels se sont tenus, faisant suite à un vrai travail de partenariat avec les élus et les acteurs des territoires ruraux, pour mettre en oeuvre plusieurs mesures concrètes touchant à la vie quotidienne des habitants de ces territoires. Nombre d’entre elles sont aujourd’hui entrées en application. Permettez-moi de citer la principale d’entre elles : la signature des contrats de plan État-région.
À travers ce travail de partenariat entre l’État, les régions et les autres collectivités locales seront mis en oeuvre un grand nombre d’investissements publics et des projets d’avenir pour aménager tous nos territoires et y soutenir l’économie, que ce soit dans le cadre de la politique de la ville, en territoire périurbain ou en territoire rural. La quasi-totalité de ces contrats ont été signés. Vous avez évoqué le déploiement des maisons de services au public…
…et des maisons de santé, dont le financement est soutenu par l’État, contrairement à ce que disait M. Chrétien tout à l’heure.
C’est aussi vrai du numérique – les départements doivent déposer un dossier d’ici la fin de l’année, dans le cadre du plan France Très Haut Débit ; c’est vrai de l’action que nous avons menée pour résorber les zones blanches ; et je pourrais citer bien d’autres mesures, mais cela me sera difficile dans le temps imparti.
Grâce au soutien des différents acteurs et aux partenariats que nous créons, nous arrivons à faire en sorte que nos territoires ruraux ne soient pas oubliés de la République. Nous pourrons ainsi avancer avec eux.
Nous en venons à la question du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Les crédits de la mission « Politique des territoires » sont en baisse de 52 millions d’euros par rapport au projet de loi de finances pour 2015, et ce pour la deuxième année consécutive. Cette baisse va renforcer l’inquiétude grandissante des territoires ruraux et l’inégalité entre eux.
Vous affichez une volonté de redynamiser ces territoires ruraux, mais la réalité est tout autre : ce budget va accroître la fracture territoriale.
Avec la promulgation de la loi NOTRe, le Gouvernement a prouvé son désintérêt à l’égard des territoires ruraux. Ils sont les grands oubliés des politiques d’aménagement du territoire.
Les services publics, les transports, les politiques de développement économique, culturelles et sociales sont tous organisés autour des métropoles régionales.
Ce budget ne permet ni de redynamiser, ni d’assurer un développement équilibré des territoires ruraux.
Vous affichez la volonté de desservir 100 % de la population en services de télécommunications fixes et mobiles et de faire du numérique une opportunité pour les territoires les plus fragiles.
L’accès au numérique est une priorité pour les habitants des territoires ruraux et pour les élus locaux. Ils doivent bénéficier des mêmes facilités que les populations des zones urbaines.
Mais il y a là un double défi : le décrochage numérique de l’hyper ruralité et la démocratisation des connexions aux réseaux de nouvelle génération.
Ces politiques publiques devront au préalable répondre à une interrogation sur la technologie à employer : jusqu’à quel niveau de couverture du territoire en fibre optique devons-nous aller ?
Monsieur le ministre, lors de la réunion de la commission élargie du 3 novembre, vous avez précisé que le recours à des solutions complémentaires à la fibre optique devait être privilégié afin de garantir la couverture du territoire. Pouvez-vous nous préciser à quelle technique vous pensez particulièrement ?
Dans le cadre du plan numérique, comment comptez-vous accompagner les territoires ruraux ? Enfin, quelles aides financières seront octroyées aux départements et aux régions concernés ?
Madame la députée, je suis étonnée tant par le ton de votre question que par la teneur de vos propos liminaires.
Certes, mais permettez-moi de vous rappeler votre bilan.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Vous nous parlez de l’abandon des territoires ruraux, mais c’est tout de même vous qui avez commencé à les sacrifier. Les fermetures de classes dans ces territoires, c’était vous !
La disparition de certains commissariats ou de certaines gendarmeries en zone rurale, c’était vous !
Il y en a dans certaines petites villes. Vous nous opposez sans cesse l’argument selon lequel nous nous serions désengagés des territoires ruraux, alors que c’est précisément ce que vous avez fait…
…et que nous réparons ce que vous avez cassé, ce que vous avez sacrifié.
Mêmes mouvements.
Nous créons des maisons de services au public pour rendre l’accueil plus efficace, pour offrir des services à la population vivant dans ces territoires.
De la même façon, nous incitons de jeunes médecins à s’installer dans les territoires ruraux.
S’agissant du numérique, je vous ai déjà en partie communiqué les éléments que vous me demandiez dans ma réponse à Alain Calmette. Vous ne pouvez pas dire, madame la députée, que ce gouvernement ne prête pas attention aux territoires ruraux : les deux comités interministériels qui ont été consacrés à ce sujet l’attestent.
Je vous rappelle les décisions qui ont été prises par le Premier ministre et le Gouvernement conformément aux orientations du Président de la République et qui répondent à l’ensemble des sujets de préoccupation exprimés par les citoyens habitant ces territoires. Certaines d’entre elles sont déjà mises en oeuvre. Aussi, au lieu de chercher la polémique, je vous invite à observer leur effet.
La parole est à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.
Je souhaiterais répondre à Mme Dalloz au sujet des techniques alternatives. Dans notre pays, la fibre est souhaitable pour toutes et pour tous, mais il est évidemment impossible d’alimenter en fibre une maison très isolée en milieu rural. C’est donc la voie satellitaire qui sera privilégiée en l’espèce.
Dans le Nord-Pas-de-Calais, nous avons lancé un plan de raccordement de 700 000 prises informatiques à la fibre, qui est financé à hauteur de 180 millions d’euros par le plan France très haut débit. En ma qualité de président du Syndicat mixte du très haut débit du Nord-Pas-de-Calais, je puis vous dire que les élus locaux de toutes sensibilités sont très heureux de cette prise en compte de leurs préoccupations au plan local. Si la fracture numérique est un risque majeur pour notre pays…
…il existe aujourd’hui une réponse technique et financière de la part de ce gouvernement, relayée par les élus locaux. Je pense que, sur ce point-là, nous pouvons nous retrouver sans aucune difficulté.
La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Afin de garantir l’égalité d’accès aux services pour tous, le Gouvernement s’est fixé l’objectif d’implanter 1 000 maisons de services au public d’ici à la fin 2016, contre 363 existantes aujourd’hui. Il s’est également assigné un objectif de diversification du contenu et de l’offre des MSAP, qui se traduirait par un accroissement du nombre d’opérateurs partenaires.
Vous avez souligné, madame la ministre, que l’implantation des maisons de services au public se ferait de manière souple : les préfets jouiront de la latitude nécessaire pour définir, avec les élus et les opérateurs, la localisation la plus pertinente en fonction des besoins locaux, des schémas d’accessibilité et des stratégies poursuivies. Les opérateurs financeront en 2016 les maisons de services au public à hauteur de 7,3 millions d’euros, soit autant que l’État, via le FNADT et l’abattement fiscal supplémentaire consenti à La Poste. Les collectivités apporteront quant à elles 14,5 millions d’euros, par des financements directs aux maisons classiques ou, pour les maisons abritées par La Poste, par le biais du fonds postal national de péréquation territoriale. Ce projet se veut une tentative de réparation de la casse des services publics opérée par la droite sous les deux précédents quinquennats.
Pourtant, l’accroissement du nombre d’opérateurs partenaires n’est pas une bonne nouvelle : c’est le paravent d’un recul des services publics de proximité, qui va de pair avec la fermeture de postes, de centres des impôts, de petites gares. Ne croyez-vous pas qu’il est aujourd’hui nécessaire de bâtir une stratégie de reconquête du service public en milieu rural, en lieu et place de cette retraite en rase campagne ?
Monsieur le député, vous m’interrogez sur la présence des services publics dans les territoires ruraux. C’est un sujet auquel j’attache une importance toute particulière car il garantit l’équité entre nos concitoyens, assure leur qualité de vie et participe à l’attractivité des territoires. C’est pourquoi nous avons prêté une attention particulière à ces sujets à l’occasion des différents comités interministériels. En témoignent les schémas d’accessibilité des services au public, élaborés conjointement entre les services de l’État et les présidents de conseils départementaux pour définir et élaborer une stratégie territoriale. Par ailleurs, un partenariat ambitieux a été conclu avec La Poste, ce qui nous permet d’accélérer le déploiement de ces maisons de services au public pour atteindre l’objectif de l’ouverture de 1 000 maisons d’ici la fin de l’année 2016.
Je sais que certains élus se sont inquiétés des lieux d’implantation proposés par La Poste ; cela ne préjuge évidemment en rien des choix définitifs qui seront faits après concertation entre les préfets et les collectivités territoriales. Il s’agit en effet de tenir compte des stratégies développées pour définir ces lieux d’ouverture.
Vous m’avez par ailleurs interrogée sur le financement des MSAP. Nous avons travaillé avec l’ensemble des acteurs pour le sécuriser. Les opérateurs se sont engagés à prendre en charge 25 % du coût, soit environ 21,5 millions d’euros, pour la période 2015-2017. Par ailleurs, aucun financement propre ne sera demandé aux collectivités, grâce à une réorientation d’une partie du fonds postal de péréquation territoriale.
Vous le voyez, monsieur le député, ce dispositif permet d’améliorer l’accès de nos concitoyens aux services publics dans les territoires ruraux. En faisant participer des opérateurs, il leur épargne la nécessité d’effectuer de longs déplacements pour quelques minutes d’entretien ou pour accomplir une simple formalité, en particulier grâce aux services numériques déployés dans les maisons de services au public. Nous travaillons sur ce dossier en lien étroit avec les collectivités territoriales mais aussi avec les autres opérateurs. C’est donc bien un travail partenarial qui, là encore, nous fait avancer.
J’appelle les crédits de la mission « Politique des territoires », inscrits à l’état B.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 448 .
C’est à La Courneuve que le Président de la République a lancé, le 20 octobre dernier, l’Agence France Entrepreneur, dont l’objectif est de favoriser l’équilibre territorial en matière de développement économique. Cette agence, dont la création a pu susciter des interrogations, s’assignera pour priorités de favoriser la création d’entreprises plus pérennes et créatrices d’emploi et d’aider au développement des très petites entreprises, au plan local, ce qui concourt également à l’objectif de la création d’emplois. J’en profite pour indiquer, car le fait me semble peu connu, que, si la création d’entreprises dans les territoires urbains prioritaires est deux fois supérieure à la moyenne nationale, la sinistralité de ces entreprises est également plus forte ; il faut donc les accompagner. La troisième mission de cette agence est d’innover au service des territoires fragiles. L’agence se consacrera prioritairement aux territoires faisant l’objet de la politique de la ville, compte tenu des inégalités dont souffrent ceux-ci.
Du point de vue financier, la constitution de cette agence reposera sur une mutualisation des moyens d’intervention ministériels en faveur de l’entrepreneuriat et sur les moyens humains existants, notamment au sein de l’Agence pour la création d’entreprises. Elle appuiera son action sur une coordination étroite avec la Caisse des dépôts et des consignations et les régions.
Très concrètement, la traduction budgétaire du lancement de l’Agence France Entrepreneur est l’abondement du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie » par des crédits budgétaires d’intervention aujourd’hui répartis sur plusieurs missions du budget général. L’objet de cet amendement est ainsi de diminuer les crédits de la mission « Politique des territoires » à hauteur de la contribution actuelle du programme 147 « Politique de la ville » et du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » aux actions qui seront désormais conduites par l’Agence. Cette diminution s’inscrit en parallèle de l’augmentation, à due concurrence, des crédits ouverts sur le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie ».
Je vous précise, mesdames, messieurs les députés, que cet amendement, qui permet d’ouvrir des crédits au profit du programme 134, constitue le pendant de celui qui a été adopté jeudi, ici même, lors de l’examen du budget de la mission « Économie ». Vous l’aurez compris, il s’agit d’alimenter cette agence au moyen de crédits existants par redéploiement entre les différentes missions.
La parole est à M. Dominique Baert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
La commission des finances a émis un avis favorable sur cet amendement.
Une agence de plus, une complexité en plus ! Les régions disposent déjà de la compétence en matière de développement économique et ont créé des agences régionales à cet effet ; il y a également les chambres de commerce et Bpifrance. Il y aura désormais cette nouvelle agence. Qui dit nouvelle agence, dit nouveau président, nouveau conseil d’administration, nouveaux moyens de fonctionnement. Par ailleurs, expliquez-moi comment une agence centralisée, qui aura sans doute son siège à Paris…
…pourra comprendre les problèmes rencontrés par nos TPE en territoire rural ? Une fois de plus, une vision uniformisée, technocratique a prévalu pour donner naissance à un zinzin de plus. On sait comment ça marche : le ministre demande à l’un de ses collaborateurs de lui trouver un truc « pour montrer que ». Il s’agit bien, en l’espèce, d’un truc pour montrer que le Gouvernement s’intéresse aux TPE en milieu rural. Cette agence, je le répète, va se superposer à d’autres institutions. Elle va sans nul doute faire « pschit » dans les semaines qui viennent, car plus personne n’y comprend rien. Je ne suis pas sûr que nos artisans, nos professionnels sur le terrain se tournent tout de suite vers cette nouvelle entité. « Agence France Entrepreneur » : c’est un nom simple, direct, mais ce n’est pas un gage d’efficacité.
Vous l’avez compris, madame la ministre, nous ne voterons pas cet amendement car nous ne croyons pas à l’intérêt d’ajouter une structure supplémentaire. Ayez recours à ce qui existe déjà, à ce qu’ont fait les régions ou aux agences départementales. Il existe déjà pléthore de moyens pour aider les TPE et les artisans dans le monde rural. Ce n’est pas la peine d’en rajouter, si ce n’est pour faire de l’affichage.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
L’amendement no 448 est adopté.
Les crédits de la mission « Politique des territoires », modifiés, sont adoptés.
La parole est à M. Mathieu Hanotin, pour soutenir l’amendement no 672 .
L’objet de cet amendement est de demander au Gouvernement un rapport sur l’utilisation des crédits du programme 147 « Politique de la ville ». En effet, nous pouvons constater que les crédits d’intervention de l’action 1 « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville », servant notamment à financer des projets menés dans le cadre des contrats de ville, augmentent de près de 15 millions d’euros, ce dont il faut se féliciter. Cette augmentation permettra principalement aux associations qui oeuvrent dans les quartiers faisant l’objet de la politique de la ville de bénéficier de soutiens supplémentaires.
La politique de la ville doit avoir pour effet de corriger les inégalités existant entre territoires riches et territoires défavorisés. Cependant, au sein même des quartiers qui bénéficient de cette politique, on constatait, il y a quelques années, des disparités majeures de financement. En 2012, la Cour des comptes signalait que les quartiers « politique de la ville » de Seine-Saint-Denis étaient financés, en moyenne, à hauteur de 31 euros par habitant, contre une moyenne nationale de 43 euros par habitant. Dans d’autres départements, le phénomène inverse était constaté : dans les Yvelines, par exemple – pour citer un département de taille comparable en Île-de-France – on atteignait un financement de 71 euros par habitant au sein des quartiers « politique de la ville ».
La réforme de la politique de la ville a permis de réduire le nombre de quartiers prioritaires et, partant, de mieux cibler les financements et d’éviter le saupoudrage. En Seine-Saint-Denis, un tiers de la population vit désormais dans un quartier « politique de la ville » ; 13 % de la population de l’ensemble des quartiers prioritaires vit en Seine-Saint-Denis. Je crains pourtant que cette disparité de financement ne perdure à l’avenir.
C’est la raison pour laquelle je vous demande, monsieur le ministre, de nous rendre compte, dans un rapport, des critères définissant la répartition des crédits de la politique de la ville entre les différents quartiers prioritaires, et de préciser si vous prévoyez d’organiser un rattrapage au sein des territoires dans lesquels la pauvreté se concentre. Ce document permettrait au Parlement de s’assurer, année après année, qu’un tel rattrapage a bien lieu.
Cher collègue, malgré la sympathie que j’ai pour vous, votre plaidoyer bute sur trois observations négatives de ma part.
La première pourrait être d’ordre purement environnemental : alors que nous nous apprêtons à ouvrir la COP 21, il n’est peut-être pas très judicieux d’encourager la consommation de papier.
La seconde observation répond à un souci de simplification : alors que nos administrations doivent déjà produire un nombre important de rapports, est-il nécessaire d’en demander un de plus ?
La troisième observation serait peut-être plus évidente : j’ai le souvenir que la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine prévoit la publication d’un rapport sur son application. Il n’est donc pas nécessaire d’élaborer un rapport spécifique, même si les préoccupations que vous évoquez mériteraient de figurer à l’intérieur de ce dernier rapport. Telles étaient les observations que je souhaitais faire sur la forme.
Concernant le fond, M. le ministre vous apportera tous les éléments de réponse pour vous persuader de ne pas maintenir votre demande. J’espère qu’il saura vous rassurer.
Avant de donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement, je souhaite indiquer à M. Chrétien, qui n’a pas pu rester en commission élargie jusqu’au bout, que Mme Pinel et moi-même nous sommes efforcés de répondre à ses différentes interpellations et qu’il en trouvera sans aucune difficulté la trace dans le compte rendu.
Un des objectifs de la réforme de la politique de la ville que le Gouvernement a engagée était de mieux concentrer les crédits d’intervention sur les populations les plus en difficulté ; vous l’avez rappelé, monsieur Hanotin. Au terme de la réforme, les nouveaux quartiers prioritaires accueillent un peu moins de 4,8 millions d’habitants en métropole, contre 7,8 millions précédemment. Cela signifie que nous avons concentré nos efforts sur la population la plus en difficulté, en évitant les effets de saupoudrage.
La méthode retenue pour fixer les dotations au sein de chaque département était de s’appuyer sur deux critères principaux pour chaque établissement public de coopération intercommunale et, par agrégation, pour chaque département. Le premier, pondéré à 80 %, est la population des quartiers prioritaires ; le second, la richesse relative des communes concernées et des EPCI auxquels elles appartiennent avec une répartition harmonieuse.
Les écarts entre la dotation de 2014 et cette dotation cible tiennent principalement à différentes raisons : les évolutions de la population, l’effet de richesse relative des communes et EPCI concernés, le montant des dotations antérieures, qui traduisent notamment le poids des projets de réussite éducative.
Comment corriger les effets parfois pervers du constat actuel ? Il a été décidé en 2015 de lisser les évolutions de manière à permettre aux décideurs locaux d’en amortir les conséquences pour les acteurs de la politique de la ville concernés. Ce lissage est prévu sur trois ans, monsieur le député. Pour être très concret, c’est la prise en compte du potentiel financier dans le calcul des dotations qui conduira en 2017 à une dotation par habitant en Seine-Saint-Denis supérieure à celle des Yvelines, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, je vous le concède. Nous allons donc corriger ce qui est potentiellement une anomalie sur le plan social. Il s’agit d’une mesure d’équité territoriale dont il faut reconnaître la portée. Tel est l’esprit de la nouvelle politique de la ville votée par le Parlement en février 2014.
J’en viens à votre demande de rapport, monsieur le député. Il me semble que le travail d’analyse sur la répartition des crédits de la politique de la ville pourrait être conduit dans le cadre du rapport sur l’application de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, qui est prévu par le texte. Il pourrait également être mené dans le cadre du rapport d’application prévu par l’article 145-7 du règlement de l’Assemblée nationale, selon lequel, dans un délai de six mois après l’entrée en vigueur d’une loi, le rapporteur et un député de l’opposition doivent présenter un rapport sur la mise en application de cette loi.
Je partage l’avis de M. le rapporteur : trop de rapports pourrait tuer le rapport. Si donc votre demande peut paraître légitime, ma réponse est de nature à vous rassurer, et je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse de l’Assemblée.
Monsieur le ministre, je ne suis pas très friand des rapports, et moins encore des agences, qui me paraissent être source de complexification. J’aimerais toutefois apporter mon soutien à notre collègue Hanotin.
En effet, on ne comprend pas toujours très bien l’action du Gouvernement en matière de politique de la ville, monsieur le ministre. J’illustrerai mon propos par deux exemples. Je parlerai non pas des dizaines de milliers d’euros de l’ANRU, mais de sujets plus concrets. Nous préparons tous le budget de nos communes, actuellement, dans ce Nord que vous aimez autant que moi et que le rapporteur, je suppose.
Nous avons constaté les effets de deux instructions transmises au préfet par votre ministère. Tout d’abord, nous avons inauguré un collège hier dans ma charmante ville de Tourcoing. Vous avez d’ailleurs contribué à injecter beaucoup d’argent dans ce projet lorsque vous étiez président du conseil général, puisque la reconstruction de ce collège a coûté 25 millions d’euros. Or, dans ma commune, 600 jeunes quittent le collège après la troisième sans qualification supplémentaire.
Il importe d’investir de l’argent dans les murs, mais plus encore dans les cerveaux, c’est-à-dire dans la formation des maîtres et l’action des communes. À Tourcoing, dans les quartiers de la politique de la ville, les clubs « coup de pouce langage » et le dispositif « Diapason » permettent aux enfants d’apprendre à mieux parler à l’issue du temps scolaire, après quinze heures quarante-cinq. Il se trouve que le Gouvernement, votre ministère, notamment, a supprimé à la rentrée 60 000 euros de crédits sur ce poste, c’est-à-dire la moitié du budget. Avec la prise en charge des rythmes scolaires à hauteur de 2 millions d’euros, qui n’est compensée que pour moitié, nous arrivons à une idée assez claire de la politique de la ville de votre ministère.
Ensuite, nous avons également des postes d’adultes-relais ; vous connaissez bien le sujet, en temps qu’ancien président du conseil général. Je suis surpris de constater que le seul organisme qui n’a pas versé de subventions à l’association d’insertion de la commune lorsque celle-ci rencontrait des difficultés budgétaires est le ministère dont vous avez la charge. Il en est résulté la suppression de sept postes salariés, dont deux adultes-relais dans le quartier de la Bourgogne. Et je suis très étonné, monsieur le ministre, après avoir entendu vos déclarations d’amour et vos propos à l’adresse de M. Hanotin sur les critères de répartition, de comprendre qu’il n’y aura désormais plus de postes d’adultes-relais soutenus par votre ministère et par l’État dans le domaine du sport. Cinq adultes-relais sont concernés dans ma commune.
Monsieur le ministre, à défaut de mener une politique de la ville à l’écoute des territoires et des quartiers, je propose qu’on adopte au moins la demande de rapport de M. Hanotin, afin de suivre les effets de la réforme l’année prochaine.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
J’ai entendu les explications du ministre sur le fond, et je me satisfais de l’évolution en cours. Je souhaite simplement que l’on pose un regard lucide sur la situation : il ne faut pas que les évolutions prennent trop de temps comme dans le passé, et il faut se méfier des effets de lissage qui ne font que ralentir les choses.
Il me semble que c’est mon collègue François Pupponi qui est en charge du rapport d’application que vous avez évoqué, monsieur le ministre ; je lui fais entièrement confiance pour mettre cet élément en avant dans son travail.
On pourrait peut-être envisager, en complément de ce rapport, de transmettre une communication annuelle à la commission des affaires économiques sur les critères, les évolutions et la répartition quartier par quartier des crédits de la politique de la ville. Nous pourrions ainsi agir en toute transparence, gagner en crédibilité et montrer que, pour le présent comme pour l’avenir, nous ne retomberons pas dans les errements du passé.
L’amendement no 672 est retiré.
Monsieur Darmanin, vous qui aimez le Nord autant que moi,…
…vous n’étiez pas encore député lorsque, entre 2008 et 2012, un gouvernement que vous avez soutenu d’une autre manière qu’en siégeant sur ces bancs avait supprimé 100 millions d’euros de crédits du secteur associatif de la politique de la ville.
Nous avons rétabli 50 millions d’euros en crédits de gestion l’année dernière et nous rétablissons cette année 130 millions d’euros dans le cadre de la maquette budgétaire pour 2016, un budget que, manifestement, vous ne voterez pas, afin de rattraper les dégâts qui ont été causés en la matière durant ces cinq années-là.
Les choix faits par le gouvernement de l’époque visaient à conforter la vidéosurveillance. Pour honorable qu’il puisse être, ce choix a privé de très nombreuses associations des moyens qui étaient les leurs.
Je suis tout à fait prêt à examiner le cas particulier de Tourcoing, sur lequel vous m’interpellez, monsieur le député.
Cependant, quand nous créons, dans le cadre du budget pour 2016,…
…400 postes d’éducateurs sportifs pour le secteur associatif de proximité dans les quartiers de la ville, je suis intimement convaincu que Tourcoing en bénéficiera aussi.
Les moyens budgétaires de la politique de la ville sont aujourd’hui confortés, cette politique est plus juste parce que plus ciblée en direction des quartiers prioritaires, et je suis intimement convaincu qu’elle sera plus efficace. J’espère pouvoir compter sur votre mobilisation en tant qu’élu local, député et maire de Tourcoing pour les populations les plus en difficulté. Vous reconnaîtrez que les périmètres retenus dans le cadre de la nouvelle politique de la ville ne pénalisent pas votre ville.
J’ajouterai enfin, monsieur Hanotin, que je suis prêt à venir plancher autant que de besoin sur invitation de la commission pour faire le point régulièrement sur la mise en oeuvre de la politique de la ville dans ce pays.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Nous avons terminé l’examen de la mission « Politique des territoires ».
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’écologie, au développement et à la mobilité durables (no 3110, annexes XIV à XIX ; no 3112, tome V, no 3113, tome V, no 3116, tomes II à VIII).
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, le budget que je vous présente aujourd’hui accompagne tout d’abord la mise en oeuvre de la loi de transition énergétique.
Ainsi, pour la rénovation énergétique, le crédit d’impôt transition énergétique, simplifié et renforcé en 2015, sera prolongé en 2016. La nouvelle obligation précarité des certificats d’économies d’énergie entrera en vigueur début 2016 et permettra de soutenir la rénovation chez les ménages modestes, en lien avec l’Agence nationale de l’amélioration de l’habitat – ANAH –, les collectivités et les associations.
L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ADEME – contribuera aux efforts d’économies via un prélèvement de 90 millions d’euros sur son fonds de roulement, mais le niveau atteint par ce dernier permettra de maintenir sa capacité d’engagement inchangée, soit 590 millions d’euros. Conjugués aux 250 millions d’euros de subventions annuelles du fonds de transition énergétique, les moyens de l’ADEME vont permettre d’amplifier les dynamiques territoriales.
Le fonds a d’ores et déjà permis de créer 215 territoires à énergie positive partout en France, avec une aide financière de 500 000 euros par territoire, pour financer des investissements immédiats dans des actions concrètes : rénovation de l’éclairage public, acquisition de véhicules électriques par les collectivités, rénovation énergétique de bâtiments publics, actions de sensibilisation du public. Près de 106 millions d’euros sont affectés à ces territoires en 2016. Plus de vingt villes respirables seront soutenues, et de nouvelles collectivités seront prochainement désignées lauréates du deuxième appel à projets « territoires zéro gaspillage zéro déchet ». Le soutien aux mobilités propres, dont la mobilité électrique, sera poursuivi avec le maintien du bonus pour les véhicules électriques et l’extension de la prime à la conversion aux diesels de plus de dix ans.
La mise en oeuvre de la loi transparaît également dans le volet fiscal des lois de finances. Le projet de loi de finances prévoit l’amorce de la convergence des fiscalités du diesel et de l’essence. Vous serez appelés à voter, dans le cadre de la loi de finances rectificative, une réforme ambitieuse de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE. Cette réforme est essentielle car elle concerne, faut-il le rappeler, 6,3 milliards d’euros d’effort public en 2015, dont 4 milliards en faveur des énergies renouvelables électriques. Cet effort passera à 7 milliards d’euros en 2016 et potentiellement à 7,5 milliards en 2017.
Ensuite, en matière de transports, le budget 2016 confirmera la priorité donnée à la sécurité et à l’amélioration de la qualité des infrastructures et des services de transports. Le budget du programme « Infrastructures et services de transports » est ainsi préservé, puisqu’il baisse de moins de 0,5 %.
Si le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France – AFITF – ne sera arrêté qu’au mois de décembre par son conseil d’administration, il disposera d’un niveau de dépenses opérationnelles de près de 1,9 milliard d’euros, équivalant au montant de 2015. La pérennisation de la mesure de hausse de l’accise gazole poids lourds de 4 centimes adoptée en 2015 et retenue par le Gouvernement à l’issue de discussions menées avec la profession au cours de l’année écoulée contribue à ce niveau de recettes de l’AFITF.
En deuxième lieu, le Gouvernement poursuivra l’objectif de report modal grâce à une action en faveur du fret ferroviaire, du fret fluvial, du transport combiné, des autoroutes ferroviaires et de la mer, mais aussi grâce à l’avancée de grands projets – tels que la ligne Lyon-Turin et le Canal Seine-Nord Europe – inscrits dans le réseau transeuropéen de transports et bénéficiant à ce titre d’importantes subventions européennes. Le budget consacré à la sécurité des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture sera maintenu à un niveau comparable à celui de l’année 2015.
Troisièmement, l’année 2016 sera celle de l’adoption du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Le vote de ce texte permettra de créer effectivement l’Agence française pour la biodiversité dont la préfiguration se poursuit de façon satisfaisante. Les moyens consacrés à ces actions, légèrement augmentés, s’élèvent à 276 millions d’euros. L’accent sera mis en particulier sur les milieux littoraux et marins grâce à la création de nouveaux parcs naturels marins, la mise en oeuvre de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte et la désignation de sites « Natura 2000 » en haute mer mais aussi la poursuite de la mise en oeuvre de la directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin ».
Quant à l’eau, les nouveaux schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux pour la période 2016-2021 seront adoptés d’ici la fin de l’année, ce qui permettra de poursuivre l’amélioration de la qualité des eaux et la restauration des zones humides et de s’adapter aux évolutions liées au changement climatique. Le prélèvement de 175 millions d’euros sur les agences de l’eau dans le cadre du dixième programme préservera un niveau d’intervention ambitieux équivalent à celui prévu par le neuvième programme.
En vue de renforcer la qualité du cadre de vie de nos concitoyens, ce budget renforce enfin l’action en faveur des paysages dans le cadre du plan national relatif à la reconquête des paysages.
Les inondations meurtrières qui ont eu lieu dans le sud de la France rappellent à quel point la prévention des risques revêt une importance majeure dans le contexte du dérèglement climatique. Les budgets de la prévention des risques naturels sont préservés, tant celui du programme « Prévention des risques » destiné entre autres à financer la prévision des crues que le fonds Barnier. Ainsi, la subvention de 200 millions d’euros attribuée à Météo France tient compte des gains découlant de la réforme de son organisation territoriale engagée depuis plusieurs années et de l’évolution des technologies et des méthodes. En matière de risques technologiques, le Gouvernement poursuit l’élaboration de plans de prévention des risques technologiques autour des sites Seveso seuil haut, dont 80 % sont déjà approuvés.
Enfin, en matière de sûreté nucléaire, le Gouvernement continue à augmenter les effectifs de l’Autorité de sûreté nucléaire qui sont renforcés de dix personnes par an, conformément à la programmation triennale. Ses moyens et ceux de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire sont par ailleurs augmentés.
Quant à l’IGN, l’Institut national de l’information géographique et forestière, les crédits qui lui sont octroyés sont préservés.
Mesdames et messieurs les députés, dans moins d’un mois, la Conférence de Paris sera ouverte. Grâce à la loi de transition énergétique et aux crédits que le Gouvernement vous propose de voter pour ce ministère en 2016, la France se donne les moyens de s’y montrer exemplaire !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Nous en venons aux porte-parole des groupes.
La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Le ministère auquel vous êtes rattaché, monsieur le secrétaire d’État, paie un lourd tribut à la politique d’austérité et au plan triennal d’économies de 50 milliards d’euros. Je dois avouer qu’il n’est pas aisé de trouver une cohérence entre les déclarations selon lesquelles l’écologie et le développement durable sont une priorité et les moyens alloués à cet objectif.
Nous sommes à quelques semaines de l’ouverture de la COP 21 à Paris. Le Président de la République se démène pour tenter d’obtenir un accord entre les 196 pays participants afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de limiter le réchauffement climatique. Ainsi, François Hollande a déclaré à l’ONU le 28 septembre dernier que la France doit montrer l’exemple et le Parlement a récemment adopté la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Voilà pour les déclarations. Mais les actes ? Depuis 2012, la mission budgétaire « Écologie, développement et mobilité durable » voit ses crédits fondre. En 2013, un record a été atteint : le budget a été amputé de 740 millions d’euros, ce qui a provoqué le départ de la ministre qui voyait bien que son action s’en trouverait paralysée. En 2014, une nouvelle coupe de 500 millions d’euros a eu lieu et la programmation d’une baisse de 400 millions d’euros entre 2015 et 2017 a été annoncée.
De fait, en 2016, les crédits de paiement diminueront de 105 millions d’euros. Le budget passe de 6,59 milliards d’euros à 6,49 milliards d’euros. L’an dernier, 515 postes ont été supprimés et il est prévu d’en supprimer 617 en 2016. J’ai pris note de l’explication selon laquelle les moyens consacrés à l’écologie ne se mesurent pas à l’aune du budget du ministère car ils seraient transversaux et complétés de plusieurs programmes. L’argument me semble toutefois un peu laborieux. Il ne concourt pas à la transparence de l’action réellement conduite ni à l’exemplarité de la France que le Président de la République appelle de ses voeux.
Rappelons les objectifs fixés par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % à l’horizon de 2030 et de 75 % d’ici 2050, division par deux de la consommation énergétique d’ici 2050, augmentation de la part des énergies renouvelables à 32 % en 2030 et rénovation de 500 000 logements par an. Nous voyons bien que les budgets qui se suivent et se ressemblent ne sont pas à la hauteur de ces ambitions ! Nous ne voterons donc pas le budget.
N’en soyez pas surpris, cher collègue ! Vous auriez fait pareil sous la présidence Sarkozy mais nous n’avons pas changé, nous !
Je conclurai par une interrogation. La fiscalité écologique est la grande absente du projet de loi de finances pour 2016. Un volet important est censé lui être consacré dans le projet de loi de finances rectificative qui sera examiné avant la fin de l’année. J’aimerais obtenir des précisions sur ce point, monsieur le secrétaire d’État, car il est beaucoup question d’une redéfinition des critères d’application de la taxe générale sur les activités polluantes.
La parole est à Mme Catherine Beaubatie, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, chers collègues, nous abordons cet après-midi l’examen en première lecture de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » du projet de loi de finances pour 2016. Cette mission regroupe tous les programmes mobilisés en faveur de la transition écologique pour un montant total de 7,17 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Elle comporte des enjeux importants pour la vie quotidienne de nos concitoyens, la relance de l’économie et la lutte contre le changement climatique. À quelques semaines de l’ouverture de la COP 21, ici à Paris, nous devons être exemplaires.
Le Gouvernement propose là un budget cohérent, responsable et tenable. Le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie est lui aussi engagé dans la baisse des dépenses publiques et le pacte de responsabilité. Nous savons tous, chers collègues, que l’efficacité des politiques publiques ne se mesure pas uniquement aux montants des crédits engagés. Jeudi dernier, en commission élargie, nos collègues de droite nous ont reproché ces efforts budgétaires.
Paradoxalement, depuis trois ans, lorsque nous abordons l’équilibre général des finances publiques, les mêmes proposent une cure d’austérité de 80 à 130 milliards d’euros…
Vous faites même semblant, chers collègues de l’opposition, de ne pas avoir compris que les politiques de transition écologique et de transport appellent une nouvelle ingénierie financière. Citons par exemple la création du fonds de transition énergétique, les prêts de la Banque publique d’investissement, le renforcement du crédit d’impôt pour la transition énergétique ou encore la reconduction de l’aide à l’acquisition de véhicules propres. Bref, la politique écologique que nous proposons ne correspond pas à un empilement de normes. Elle est incitative, innovante et dotée de nouveaux moyens, comme le prouve l’évaluation de l’effort écologique global de la France par Mme la rapporteure générale du budget à 75,8 milliards d’euros en 2015, soit une augmentation de plus de 4 milliards en un an.
En 2016, nous poursuivrons encore cette progression afin de financer nos réformes. L’année 2016 sera aussi celle de la création de l’Agence française pour la biodiversité dont la préfiguration est sur le point d’aboutir. Le budget du programme 113 dédié aux paysages, à l’eau et à la biodiversité est même en légère augmentation. Nous continuons également la mise en application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte par l’accélération de la rénovation des bâtiments, le renforcement de la sûreté nucléaire et le lancement des appels à projet « Territoire à énergie positive pour la croissance verte » et « Territoires zéro déchet zéro gaspillage ». Surtout, nous renforçons le soutien aux énergies renouvelables par la création du complément de rémunération et la réforme à venir de la contribution au service public de l’électricité.
En matière de politique des transports, nous maintenons les crédits à hauteur de 3,2 milliards d’euros. Les priorités sont claires : excellence environnementale, rénovation et sécurisation des infrastructures existantes, lancement des grands projets tels que le canal Seine-Nord Europe, la section transfrontalière de la ligne Lyon-Turin et les nouvelles lignes à grande vitesse, amorçage, enfin, des contrats de plan État-région. Cette mission doit également répondre aux attentes et aux besoins de nos concitoyens en matière de mobilité. Nos prédécesseurs leur ont beaucoup promis lors du Grenelle de l’Environnement mais aucun financement de projet n’a réellement été envisagé.
Le groupe que je représente se félicite que le Gouvernement abonde le budget de l’AFITF en 2016. Nous devons néanmoins trouver pour cet indispensable établissement public des ressources plus abondantes et pérennes, comme vous l’avez déclaré en commission élargie, monsieur le secrétaire d’État. Parmi les pistes de réflexion que nous pourrions envisager, citons une affectation plus importante de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, le report de l’excédent du bonus-malus à l’achat de véhicules propres et, oserai-je le dire, la taxation des poids lourds, étrangers en particulier.
Nous nous félicitons également que le Gouvernement se propose de créer des postes supplémentaires à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières. L’année 2016 sera aussi celle des océans et des affaires maritimes grâce à l’examen de la proposition de loi pour une économie bleue, l’agrandissement des aires marines protégées et le renforcement du soutien à l’éolien en mer et au pavillon français. La pêche et l’aquaculture française, engagées dans une réforme ambitieuse depuis 2013, devront aussi devenir plus durables afin de préserver les ressources halieutiques.
Ainsi, par ce budget, le Gouvernement est au rendez-vous de ses engagements en matière d’environnement et de transport. La France peut être fière de son rôle de leader dans la Conférence mondiale sur le climat. Le groupe socialiste, républicain et citoyen votera donc en faveur des crédits de cette mission budgétaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, nous voici donc réunis afin d’examiner en séance publique les crédits budgétaires de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », ô combien importante pour le financement de la transition écologique chère à Ségolène Royal et au Président de la République ! J’ignore si nous parviendrons en décembre à limiter le réchauffement climatique à deux degrés mais enrayer la diminution du budget de l’écologie à moins de 2 % semble de moins en moins faisable ! En effet, à la veille de la COP 21, je ne peux que m’étonner de la diminution de 65 millions d’euros des crédits de cette mission. Depuis le début de ce quinquennat, le budget de l’écologie a diminué de 4,5 % en 2013, de 6,5 % en 2014 et de presque 2 % en 2015. Voilà qui ne fait pas de la France un pays leader en matière d’écologie, contrairement à ce qu’a déclaré l’oratrice qui m’a précédé, ou en tout cas n’émet pas exactement le bon signal !
Citons parmi les diminutions inexplicables le cas des agences de l’eau qui subiront l’année prochaine un prélèvement de 175 millions d’euros après avoir déjà subi en 2015 une diminution du même montant de leur fonds de roulement. Quel très mauvais exemple en matière de bonne gestion !
La suppression de la taxe nationale sur les véhicules de transport de marchandises entraîne pour l’AFITF un déficit de 800 millions d’euros.
Cette perte est compensée, selon le Gouvernement, par l’augmentation de 2 centimes par litre de la taxe sur le gazole alors que le produit de cette taxe est censé aider les familles à convertir leur véhicule polluant en véhicule propre. En fin de compte, cela pèsera directement sur les ménages et les entreprises !
Citons également la baisse significative des crédits de l’action 11 intitulée « Infrastructures fluviales, portuaires et aéroportuaires » et le cas de l’établissement « Voies navigables de France » qui, en dépit de son nouveau statut, a vu le financement de l’État passer de 258 millions d’euros à 251 millions et dont les dépenses d’investissement chutent en 2015.
Mais c’est le financement de la transition énergétique qui suscite le plus d’inquiétudes. On peut en effet s’interroger sur la baisse des crédits alloués à l’ADEME et à l’action 5, en contradiction totale avec les objectifs de la COP 21. Il n’y a aucune cohérence entre les objectifs de la transition énergétique et les moyens consentis pour leur mise en oeuvre – mais peut-être venez-vous d’adopter une stratégie de décroissance ?
S’agissant du plan de rénovation thermique du parc immobilier, la loi de transition énergétique fixait un objectif très ambitieux de 500 000 logements par an, d’ici 2017. Or, pour atteindre cet objectif, le renforcement du crédit d’impôt, à hauteur de 30 % du montant des travaux voté en loi de finances 2015, est loin d’être suffisant, et le dispositif du tiers financement prévu demeure extrêmement vague. En effet, si l’on regarde de près la présentation des crédits par titre dans les dépenses d’intervention du programme 174, les « transferts aux ménages » sont en baisse. Dès lors, comment le Gouvernement compte-t-il financer ces travaux d’amélioration énergétique ?
On retrouve toujours cette même incohérence lorsque l’on demande aux collectivités territoriales d’être exemplaires dans les travaux, alors que, dans le même temps, la majorité réduit les dotations et augmente le nombre des collectivités avec la création des métropoles, ce qui entraînera de facto une baisse importante des capacités d’investissement de ces dernières. Là encore, où est la logique ?
Enfin, le Gouvernement a annoncé récemment – en totale contradiction avec l’objectif affiché de réduire les émissions de gaz à effet de serre – l’augmentation de la taxation du diesel et la baisse de celle de l’essence. Il est tout à fait paradoxal que le Gouvernement prenne des mesures pénalisant notre industrie, alors que rien n’indique que nos constructeurs se sont livrés aux mêmes turpitudes qu’une célèbre marque allemande ! Au nom de quoi faudrait-il punir les constructeurs français pour une faute commise par le voisin ? Peut-être au nom de l’irresponsable tropisme germain, qui a présidé à la loi sur la transition énergétique ? Cette loi va à l’encontre de nos intérêts, qu’il s’agisse du nucléaire ou de la réduction des émissions de CO2. En effet, le modèle allemand produit du CO2 et l’Allemagne ne doit la baisse constatée l’an passé qu’à la clémence de l’hiver.
La France n’a pas de stratégie propre – dans tous les sens du terme ! Elle ne fait que copier l’Allemagne, dans ses aspects les moins cohérents. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains ne votera pas ce budget, trop peu ambitieux au regard de ce qui a été annoncé. La COP 21, c’est très bien, mais il faudrait arrêter la « COM 21 » !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, nous examinons le budget de l’écologie et des transports. Le budget de l’écologie est, de toute évidence, en diminution, après des baisses successives ces dernières années. Mais lorsqu’on le fait remarquer à Ségolène Royal, comme je me le suis permis la semaine dernière, la ministre répond que l’on peut diminuer les budgets tout en étant beaucoup plus efficace. Chiche !
L’efficacité d’une politique environnementale se mesure à l’aune du réchauffement climatique, par les efforts consentis pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Dans ce domaine, le premier poste, le plus évident et le plus créateur d’emplois, est celui de la rénovation de logements. Pourtant – je l’avais dit l’année dernière et je le répète cette année –, on n’a jamais rénové aussi peu de logements. Monsieur le secrétaire d’État, cette majorité est celle qui aura rénové le moins de logements depuis que notre pays s’est engagé dans de grandes stratégies environnementales !
On peut, hélas, faire le même constat s’agissant des énergies renouvelables – ne serait-ce qu’en interrogeant le syndicat des énergies renouvelables : la production d’énergie éolienne et photovoltaïque n’augmente pas et rien n’est fait pour développer la chaleur renouvelable.
Ce budget témoigne d’un désengagement important dans le domaine des grandes actions environnementales. J’en veux pour preuve les crédits de l’ADEME, qui ne pourra consacrer que 200 millions à la chaleur renouvelable, alors qu’il faudrait 400 millions pour obtenir des résultats tangibles. Le directeur explique que ces 200 millions ne sont pas même consommés. Mais il faut modifier les critères, sans quoi les interventions n’avancent pas !
S’agissant de l’eau – un secteur moins lié au réchauffement climatique, mais qui intéresse la biodiversité –, les budgets chutent aussi, avec une baisse de 10 % des crédits de paiement consacrés à la prévention des risques, naturels notamment. Les financements dont les collectivités ont besoin pour se préparer aux aléas climatiques manquent cruellement dans le budget. Alors oui, le budget est réduit, de façon sensible ; et je crains que des efforts plus importants, qui pourraient compenser cette baisse par un coup de baguette magique, ne soient pas au rendez-vous.
Monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, je voudrais vous remercier pour votre présence, la qualité de votre engagement et vos interventions, toujours intéressantes et courtoises, même si nous ne sommes pas forcément d’accord sur les moyens à mettre en oeuvre pour une politique ambitieuse en matière de transport.
Nous ne fixerons pas exagérément notre attention sur la question de l’AFITF, mais le plafonnement des dépenses d’intervention à 1,9 milliard conduit à ne rien engager de nouveau. Certes, on se consolera en se disant qu’il n’y a pas de projets en réserve. Mais comment financer, avec un budget aussi contraint, les engagements auprès des collectivités locales et les promesses électorales – il y en a autant que de déplacements du Président de la République et du Premier ministre en province ? « Mystère et boule de gomme », comme je disais quand j’étais jeune !
C’est d’autant plus dommage que des projets importants devront être financés ces prochaines années et que la baisse du prix des carburants était l’occasion de régler complètement nos politiques en matière de transports et de financement des infrastructures nouvelles.
Monsieur le secrétaire d’État, il manque à votre budget 200 millions d’euros pour rénover les routes. Cela fait des années que cela dure, et il faudra un jour un portefeuille bien plus garni pour remédier aux dégradations. Il manque aussi 30 millions d’euros pour les canaux. Enfin, je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi le ministère du budget n’autorise pas la SNCF à s’engager davantage dans la rénovation du réseau ferroviaire, dont on voit bien qu’il se dégrade, les lignes secondaires de transport de marchandises n’étant plus entretenues. Pourtant, et malgré un mauvais bilan financier de la SNCF, il faudra payer la facture. Pour toutes ces raisons, le groupe UDI ne votera pas ce budget.
La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, avec 8 programmes, 48 actions, un bleu de 456 pages et 15 rapporteurs, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » concernent de nombreuses missions : développement durable, optimisation des réseaux et services des transports, préservation des paysages, qualité de l’eau, biodiversité, politique maritime et enfin, prévention des risques. Ces missions sont capitales, comme le rappelle le bilan dramatique des récentes inondations dans le sud. À vingt jours de la COP21, à Paris, l’importance de l’ensemble des politiques sectorielles concernées est indéniable.
Pourtant, si je me réjouis que les enjeux de la transition écologique et énergétique figurent parmi les priorités de l’action gouvernementale – je tiens à souligner les effets positifs des territoires à énergie positive pour la croissance verte – TEP-CV – dans nos territoires, particulièrement dans celui des portes de la Champagne –, je m’inquiète de la baisse des crédits alloués à la majorité des programmes concernés.
Pour le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, la baisse est de 1 %, ce qui reste raisonnable, même si cette baisse est calculée hors Direction générale de l’aviation civile. La stabilité des ressources affectées aux agences de l’eau – 2,3 milliards – est une nouvelle rassurante. L’ADEME échappe en partie aux baisses et garde ses 590 millions d’euros de capacités d’engagement. Mais compte tenu de la montée en charge de ses missions, il s’agit d’un maintien de crédits en trompe l’oeil.
Si cohérentes soient-elles avec l’objectif de redressement des comptes publics, ces évolutions conduisent à s’interroger, sur le moyen terme, sur la suffisance des moyens nécessaires à la conduite efficace des priorités ciblées.
À cet égard, j’insisterai sur les programmes 181 et 170, que je rapporte au nom de la commission du développement durable pour la troisième année. Je vous le dis, chers collègues : si les agences de notations devaient évaluer la prévention des risques, la France recueillerait un triple A ou un A + ! Oui, l’expertise française dans le domaine de la gestion et de la prévention des risques est un modèle, quand la modernité dans laquelle nous vivons, qui donne le sentiment de pouvoir nous protéger de tout, nous expose en réalité bien plus aux risques naturels et à leurs conséquences.
Le programme 181 s’établit à 286,5 millions d’euros, avec une baisse de 4,77 %, même si certaines actions telle que l’action 8, relative au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, augmentent de 1,25 %, compte tenu du retour sur expérience de Fukushima. Le programme 170 connaît une baisse de près de 1,96 % pour s’établir à 203 millions. Je me dois tout de même de souligner les difficultés potentielles auxquelles les opérateurs auditionnés, tels l’Institut national de l’environnement industriel et des risques – INERIS – et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – IRSN –, devraient faire face si les moyens continuaient de baisser.
Le cadre budgétaire ainsi posé, je souhaiterais évoquer succinctement trois sujets essentiels, conscient de la montée d’un sentiment anxiogène de fragilité et d’incertitudes devant des phénomènes météorologiques croissants en nombre et en intensité.
Dans le cadre de la commission élargie, j’ai interrogé Mme la ministre sur la catastrophe survenue dans les Alpes-Maritimes, lui demandant quel bilan avait été tiré, quelles étaient les améliorations préconisées, et quels moyens étaient engagés pour améliorer la sensibilisation du public et l’investissement dans la recherche. J’ai également salué l’effort réalisé par Météo France. Je lui ai demandé comment elle comptait concilier ouverture des données publiques et allégement des coûts de transmission.
Enfin, j’évoquerai le nouveau plan national santé environnement, dont la mise en oeuvre est l’une des priorités nationales. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous dire quelles sont les actions prioritaires en 2016 et quel sera le calendrier de leur mise en oeuvre ?
Au-delà de ces chiffres, la prévention et la gestion des risques sont un devoir de l’État. Mais ce n’est pas un devoir par obligation, c’est un engagement humaniste. Il y a un non-sens qui part du principe que tout peut être évité. Même si le risque zéro n’existe pas, tout le monde essaye de repousser l’idée du risque et notre préoccupation est de chercher des moyens pour éviter l’événement.
On ne peut empêcher une catastrophe de se produire, mais on peut l’empêcher de devenir un désastre. Le risque ne doit plus être perçu comme une contrainte extérieure incontrôlable, mais comme une composante de ce qu’il est possible de faire.
Comme l’écrivait Alexandre Dumas – né à Villers-Cotterêts – dans Le Comte de Monte-Cristo, « Avant d’avoir peur, on voit juste ; pendant qu’on a peur, on voit double, et après qu’on a eu peur, on voit trouble. ». S’il en va ainsi concernant la prévention et la gestion des risques, il en est de même pour les risques politiques dans l’Aisne, et à Villers-Cotterêts. Pour combattre ces risques, nous devons travailler ensemble et c’est ce que vous proposez, monsieur le secrétaire d’État. Au regard de ces observations, le groupe RRDP votera ce budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le contexte de la fin de l’année 2015 et du début de l’année 2016 est particulier. La France s’est voulue particulièrement ambitieuse dans le domaine de l’écologie et nous devons nous en féliciter. La loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte a pour objectif audacieux de faire baisser à l’horizon 2030 les émissions de gaz à effet de serre de 40 %, de porter les énergies renouvelables à 32 % ou de réduire la consommation d’électricité de moitié. Pour prétendre avoir les moyens de nos ambitions, il serait cohérent que le budget alloué à la mission ne soit pas constamment en baisse d’une année sur l’autre et que la part du PIB allouée à l’écologie conserve une certaine stabilité.
Le budget 2016 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » a globalement baissé. Cette baisse, qui représente 8,6 % en autorisations d’engagement et 6 % en crédits de paiement par rapport au budget 2014, ne peut être qualifiée de « coup de hache » dans le budget de l’écologie, mais ne représente assurément pas un signal positif, surtout dans le contexte que j’ai énoncé. Cela étant, la hausse des dépenses fiscales de 28 % entre 2015 et 2016, suite notamment à l’augmentation des dépenses fiscales du crédit d’impôt transition énergétique, est un motif de satisfaction, puisqu’elle approche le demi-milliard d’euros.
Le groupe écologiste et moi-même sommes préoccupés par la baisse de 8,2 % des crédits du programme relatif à la prévention des risques, alors que les normes communautaires et internationales qu’il convient de mettre en oeuvre se multiplient, ce qui paraît contradictoire.
S’agissant du programme 174, le constat des écologistes est partagé. Alors que le prix du carbone est un signal économique fort, la cohérence entre les divers dispositifs fiscaux relatifs à la politique énergétique pose question. Si le rapprochement entre le prix du gazole et de l’essence ainsi que la mise en place d’une contribution carbone vont dans le bon sens, les exonérations de TICPE accordées aux entreprises à consommation intensive en énergie, en période de prix bas de l’énergie, sont un problème, tout comme l’aide à l’utilisation du charbon pour des entreprises qui recourent à la biomasse.
La répartition des crédits du programme 174 nous conduit à plusieurs réflexions. Tout d’abord, 94 % des crédits alloués dans ce programme sont consacrés aux droits sociaux des anciens mineurs. Les organismes qui gèrent ces droits, CANSSM et ANGDM, doivent être rapprochés, voire fusionnés, pour que subsiste un régime minier spécial, dans un but de proximité et de solidarité. Aussi serait-il souhaitable, dans le cadre du programme 174, de créer un fonds de financement pour l’économie circulaire. Si la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte renforce et rassemble les financements dans le cadre du fonds de financement pour la transition énergétique, tous ces fonds demeurent trop disparates et insuffisamment fléchés.
Le financement de la transition vers l’économie circulaire s’appuie ainsi sur une multiplicité de leviers financiers : le fonds chaleur, l’enveloppe spéciale « transition énergétique », les certificats d’économie d’énergie, le fonds déchet etc. Cette diversité des solutions de financement est source de complexité pour les porteurs de projets et peut être un facteur de découragement qui ne nous aide pas à aller de l’avant.
S’agissant du programme « Infrastructures et services de transport », dont le budget 2016 est quasiment équivalent à celui de 2015, avec une légère baisse en crédits de paiement de 0,5 %, il est impératif de poursuivre les efforts pour développer les transports propres et collectifs ainsi que la multimodalité. Réduire les incitations au diesel, notamment pour les flottes d’entreprise, est une demande récurrente des écologistes.
Bien que nous nous réjouissions du rééquilibrage déjà voté en première partie, nos attentes restent fortes sur ce sujet.
Concernant l’AFITF, nous regrettons que son budget reste orienté vers le financement des grands projets d’infrastructures, et que le développement des transports collectifs en site propre ne soit pas une priorité dans le cadre du PLF 2016.
Enfin, nous nous réjouissons particulièrement de l’effort de l’État en termes de dépense fiscale qui augmente de 28 % cette année par rapport à l’année dernière. Soulignons tout particulièrement les efforts réalisés en faveur de la transition énergétique. Le montant des dépenses fiscales a doublé en la matière, ce qui se traduit par 500 millions d’euros supplémentaires d’engagement budgétaire en termes d’aides fiscales.
Le doublement du CITE s’accompagne de surcroît du début de l’abondement du fonds spécial pour la transition énergétique, doté de 1,5 milliard d’euros sur trois ans. Au final, les moyens alloués à la transition énergétique sortent renforcés.
L’effort consenti sur la dépense fiscale est particulièrement louable, mais le fait que des moyens soient par ailleurs écornés amène le groupe écologiste à se partager entre une vision positive de soutien au budget et une vision plus critique, qui se traduira par une abstention.
Nous en venons aux questions.
Nous commençons par les questions du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Michel Lesage.
En tant que rapporteur pour avis de la commission du développement durable sur les programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité » et 159 « Information géographique et cartographique », je me réjouis que les crédits attribués à ces deux programmes soient, pour l’essentiel, préservés dans ce projet de budget. Dans le contexte difficile que nous connaissons, cette stabilité des crédits prouve à elle seule que le Gouvernement a fait des politiques dans le domaine des paysages, de l’eau et de la biodiversité, un domaine d’action prioritaire.
Ma première question concerne la création de l’Agence française pour la biodiversité, déjà votée en première lecture ici, à l’Assemblée nationale. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, préciser le calendrier d’examen du texte en question et celui de sa mise en oeuvre ?
Par ailleurs, beaucoup d’actions sont déjà conduites au niveau local et il me semble indispensable, pour construire les déclinaisons territoriales de l’Agence française pour la biodiversité, de s’appuyer sur les structures existantes. Monsieur le secrétaire d’État, comment envisagez-vous la mise en place des agences régionales pour la biodiversité et comment décliner l’Agence française pour la biodiversité dans les territoires sans détruire les réseaux déjà en place ?
Ma seconde question porte sur la COP21. La conférence sur le climat est importante. Elle doit aboutir à l’adoption d’un premier accord universel et contraignant, mais le domaine de l’eau reste trop peu traité. Or, l’eau est la première concernée par le réchauffement climatique et beaucoup d’indicateurs sont au rouge – baisse de la pluviométrie, intensification des catastrophes naturelles. L’eau menacée peut à son tour devenir menaçante.
De surcroît, les pressions exercées sur la ressource en eau sont déjà sources de tensions entre certains pays. Comment, monsieur le secrétaire d’État, intégrer davantage un objectif « Eau »ambitieux dans la COP21 ? Comment insérer l’eau dans les priorités des financements pour le climat ?
S’agissant du calendrier parlementaire, le projet de loi sera examiné au début de l’année 2016. Concernant la création de l’Agence française pour la biodiversité, liée à l’adoption de ce texte par le Parlement, la préfiguration de la future agence est dorénavant dans une phase opérationnelle, après la promulgation de la loi. Les textes réglementaires nécessaires à cette création seront élaborés parallèlement à l’examen du projet de loi.
L’Agence française pour la biodiversité a vocation à travailler avec les acteurs des territoires. Plusieurs régions ont déjà créé des structures régionales pour la biodiversité avec des noms, des périmètres d’intervention, des statuts qui diffèrent. Les départements sont aussi partenaires de ces initiatives. La future agence s’insérera dans ce paysage en collaborant avec les structures existantes afin de renforcer notre capacité collective à agir pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Elle pourra aussi, en collaboration avec les collectivités, donner l’impulsion et aider à la création de structures régionales quand elles n’existent pas encore.
Concernant les objectifs de l’eau dans la COP21, Ségolène Royal a adressé un message politique extrêmement fort lors de la semaine mondiale de l’eau à Stockholm, message qui a été repris en marge de l’assemblée générale des Nations unies en septembre, pour souligner la priorité accordée à l’eau par la COP21.
La France et le Pérou organisent un moment consacré au thème « Eau et adaptation au changement climatique » lors de la journée sur le thème de la résilience, le 2 décembre. Ce sera la première fois que, lors d’une COP, l’on donne autant de visibilité aux politiques de l’eau et d’adaptation au changement climatique. Les engagements se concrétiseront dans quatre domaines : la gestion intégrée des ressources en eau, la mobilisation des collectivités sur les risques eau et climat, la mobilisation du secteur privé au travers d’une coalition d’entreprises, l’engagement de la société civile pour apporter des solutions.
Ségolène Royal surveille et fait tout pour favoriser le développement de cette politique de l’eau afin que, justement, votre question relative à l’objectif ambitieux pour la COP21 reçoive une réponse positive.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur la réforme, envisagée par le Gouvernement, de la contribution au service public de l’électricité – CSPE.
Cette contribution, payée par chacun sur sa facture d’électricité, vise à compenser les charges résultant des obligations de service public supportées par les fournisseurs d’électricité, notamment en ce qui concerne le soutien aux énergies renouvelables, les surcoûts de production en zones non interconnectées ou encore la prise en charge des tarifs sociaux de l’électricité.
La CSPE fait l’objet de plusieurs critiques relatives à sa fragilité juridique, à son insuffisance – alors que les charges qu’elle est censée couvrir augmentent – et enfin à son assiette qui mériterait d’être étendue aux énergies fossiles.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous confirmer une prochaine réforme de la SCPE afin d’accroître son efficacité et renforcer le contrôle du Parlement sur cette politique publique essentielle ?
L’assiette de la taxe sera-t-elle bien étendue à court ou moyen terme aux énergies fossiles, ce qui permettrait de rééquilibrer légitimement la fiscalité applicable aux différentes sources d’énergie et remédierait à la contradiction qui veut que ce soit l’énergie la moins productrice de CO2 qui soit aujourd’hui la plus taxée en France ?
Je souhaite enfin vous alerter sur un dernier point. Si la réforme permet de simplifier le régime des exonérations dont bénéficient certaines industries, il conviendra de veiller à ce qu’elle préserve les conditions d’une réelle compétitivité internationale des industries hyper-électro-intensives, auxquelles nous sommes attachés.
Le Gouvernement proposera une réforme de la CSPE dans le cadre du collectif budgétaire de fin d’année. Cette réforme a un triple objectif : garantir la conformité du financement des missions de service public de l’électricité avec le droit européen, renforcer le contrôle du Parlement et amorcer un rééquilibrage de la fiscalité entre les énergies.
Les charges de service public de l’électricité, qui font actuellement l’objet d’un traitement extra-budgétaire, seront budgétisées. La fiscalité sur l’électricité sera refondue. La CSPE deviendra une assise à part entière en fusionnant avec la taxe intérieure de consommation sur l’électricité.
L’assiette de financement des charges de service public sera très progressivement élargie aux énergies carbonées dans le cadre de l’augmentation progressive des prix du carbone, prévue par la loi relative à la transition énergétique, ce qui permettra de contenir la progression de la facture d’électricité.
L’objectif est de ne plus faire supporter au seul consommateur d’électricité – énergie, rappelons-le, largement décarbonée en France – le coût des charges du service public. Les régimes d’exonération applicables aux entreprises électro-intensives seront adaptés en conséquence, dans le respect de la directive 200396CE, afin de limiter l’impact sur les consommateurs.
Nous en venons aux questions du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier.
Alors que l’écologie a toujours été présentée comme l’un des chantiers majeurs du quinquennat et que notre pays s’apprête à accueillir la COP 21, il est très surprenant de voir les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » baisser de 65 millions d’euros dans le projet de loi de finances. Il y a un décalage absolu entre les paroles et les actes de ce gouvernement.
Contrairement à une idée reçue, le budget général de l’État continue de progresser cette année à hauteur de 8,5 milliards d’euros. Celui du ministère de l’écologie, lui, régresse. Dès lors, on est en droit de se poser des questions sur la capacité financière du Gouvernement à mettre en oeuvre les mesures qu’il a annoncées aux Français.
Passons sur celles du projet de loi relatif à la biodiversité, toujours bloqué au Sénat, pour en arriver à la mise en oeuvre de la loi relative à la transition énergétique. Vous le savez, ce texte fixe des objectifs lourds et forcément onéreux : le développement des énergies renouvelables, la rénovation thermique de 500 000 logements par an à partir de 2017, la mise en place d’un « chèque énergie » pour aider les familles modestes à payer leurs factures d’énergie, ainsi que le développement des véhicules propres – pas seulement électriques, d’ailleurs, puisque l’hydrogène présente à long terme un important potentiel de développement. Comment atteindre ces différents objectifs avec des moyens en baisse ?
En matière de rénovation thermique des logements, la majoration de 30 % du crédit d’impôt sera bien insuffisante pour inciter un nombre significatif de ménages à se lancer dans des travaux de réhabilitation. Dans ce domaine, on ne peut pas non plus compter sur l’investissement massif de collectivités locales qui sont, vous le savez bien, asphyxiées par la baisse des dotations de l’État.
En ce qui concerne le développement des véhicules propres, il va falloir financer la prime de remplacement d’un vieux véhicule par un véhicule propre, la pose de 7 millions de bornes de recharge, ou encore le renouvellement des flottes de véhicules de l’État. Comme le faire avec des crédits en baisse ?
Monsieur le secrétaire d’État, ma question est simple : comment peut-on sérieusement honorer les engagements nombreux du Gouvernement pour l’écologie et le développement durable avec un budget qui connaît une telle baisse ?
Les moyens budgétaires alloués aux programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sont en diminution, certes, mais les moyens d’action mobilisés en faveur de la transition énergétique sont plus larges que les crédits des programmes budgétaires. À ces crédits s’ajoutent en effet des mesures fiscales en faveur de la transition énergétique, au premier rang desquelles le crédit d’impôt pour la transition énergétique, prolongé jusqu’à la fin de 2016 pour les particuliers et les entreprises, ainsi que les moyens du fonds de transition énergétique pour la croissance verte – 250 millions annuels pendant trois ans –, mobilisés notamment en faveur des territoires à énergie positive.
Au total, comme Mme Royal vous l’a annoncé au cours de la commission élargie de jeudi dernier, les moyens financiers du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie sont en augmentation de plus de 3 % par rapport à l’année dernière. Je vous le dis, le financement de la transition énergétique est assuré et fait plus que compenser la baisse des moyens budgétaires.
Concernant la rénovation énergétique des logements, je rappelle que le projet de loi de finances prévoit le maintien des taux du crédit d’impôt pour la transition énergétique, qui ont été augmentés fin 2014, ainsi que la réalisation par l’Agence nationale de l’habitat – ANAH – d’un même nombre de logements dans le cadre de la rénovation thermique. En outre, le dispositif de l’éco-PTZ est reconduit pour trois ans et pourra être mobilisé en complément des aides de l’ANAH.
Concernant le développement des véhicules propres, le bonus automobile de 6 300 euros pour l’acquisition ou la location pendant plus de deux ans d’un véhicule électrique sera reconduit en 2016. Le soutien aux véhicules hybrides est poursuivi mais réduit, car la maturité du marché est plus avancée que pour les véhicules électriques. La prime de conversion de 3 700 euros destinée à l’acquisition d’un véhicule électrique est maintenue en 2016 et étendue aux véhicules diesel immatriculés pour la première fois avant le 1erjanvier 2006, au lieu du 1er janvier 2001 actuellement. La prime de 500 euros en faveur des ménages modestes sera doublée, pour atteindre 1 000 euros à compter du 1erjanvier 2016.
Monsieur le secrétaire d’État, votre gouvernement, poussé par les problèmes qu’il rencontre au sein de sa majorité, mène une politique hostile au diesel. Or le diesel concerne non seulement le transport routier et le domaine agricole, mais aussi une très grande partie de nos concitoyens puisqu’il équipe 62 % de notre parc de voitures particulières.
Depuis plus de quinze ans, 70 % des voitures produites en France sont des diesels, et l’on sait que les moteurs diesel de dernière génération, ceux qui répondent à la norme Euro 6, ne polluent pas plus que les moteurs à essence. On le doit à l’excellence des constructeurs automobiles français et à la politique d’innovation et de recherche et développement menée par Peugeot-Citroën et Renault.
L’alourdissement de la fiscalité du diesel que vous mettez en oeuvre aura un impact direct sur les habitants des territoires ruraux. En effet, alors que l’on n’a pas besoin d’un diesel quand on doit parcourir quelques kilomètres en ville, où l’on bénéficie de transports en commun comme bus, métro ou RER,…
…la situation est tout autre en milieu rural. Pour se rendre à son travail, la voiture est la seule option possible et les distances sont souvent longues – c’est le cas dans mon département de la Mayenne. Les formules de covoiturage, même si elles sont en plein essor grâce au soutien des collectivités locales et au développement du numérique et de la consommation collaborative, restent plus adaptées au milieu urbain qu’aux territoires ruraux.
En outre, la situation économique rend le changement de voiture difficile. C’est un investissement lourd pour beaucoup de foyers où, souvent, deux voitures sont nécessaires.
Votre politique fiscale inspire donc une inquiétude légitime aux habitants des territoires ruraux, qui la jugent bien en décalage par rapport à ce qu’ils vivent au quotidien. La mobilité durable, c’est un beau slogan partagé par tous, mais pensez à la mobilité abordable pour l’ensemble de nos concitoyens, à l’heure où ceux-ci voient leurs salaires stagner et leurs impôts augmenter !
Ne caricaturez pas la politique du Gouvernement, monsieur le député. On ne saurait la qualifier d’« anti-diesel ».
Si le diesel a des avantages, il a aussi des inconvénients, parmi lesquels, même dans les modèles les plus récents, les forts niveaux de pollution aux particules et aux oxydes d’azote. De plus, les avantages dont bénéficient aussi bien les entreprises que les particuliers – taxations plus faibles, niveaux de déductibilité plus élevés – ont conduit à une « diésélisation » excessive de notre parc, y compris dans des cas où le véhicule diesel n’est pas forcément adapté aux besoins de l’usager.
Dans ce contexte, nous souhaitons rapprocher progressivement le niveau de taxation du diesel et celui de l’essence. Mais il ne s’agit pas d’une politique de bannissement du diesel.
Par ailleurs, le Gouvernement est sensible aux difficultés de ceux qui possèdent de vieux véhicules diesel très polluants et qui, notamment dans les zones rurales, ne peuvent se passer de voiture pour se déplacer et pour aller au travail. Il a ainsi créé en 2015 une prime de conversion des véhicules diesel de plus de quinze ans, prime qu’il élargira en 2016 aux véhicules de dix ans et plus et dont il renforcera les montants. Cette prime s’applique à l’achat de véhicules électriques et hybrides, ou même de véhicules thermiques à essence récents, qui peuvent, avec l’évolution des technologies, avoir des consommations très basses. En renforçant, au 1erjanvier, le montant des primes pour l’achat de véhicules à essence performants, nous faciliterons le remplacement de ces vieux véhicules diesel, y compris dans les cas où le véhicule électrique ne serait pas adapté.
Mais le Gouvernement favorise aussi le déploiement des bornes de recharge des véhicules électriques en soutenant à la fois les réseaux nationaux et les initiatives des collectivités locales. L’ADEME leur apporte des subventions via le programme d’investissements d’avenir, qui a consacré une première enveloppe de 50 millions d’euros à cette priorité. De nombreuses collectivités rurales, dont des conseils départementaux, ont d’ailleurs présenté des projets à ce titre. On mariera donc prise en compte des préoccupations sociales et territoriales et amélioration de la qualité de l’air.
Je vous poserai deux questions, monsieur le secrétaire d’État, l’une sur le financement des plans climat air énergie territoriaux – PCAET – et sur les schémas régionaux climat air énergie – SRCAE –, la seconde sur les filières de responsabilité élargie du producteur, ou filières REP.
Les plans climat air énergie territoriaux, définis dans les lois Grenelle, ont pour objectif de fixer un cadre d’actions à mener par les collectivités ou leurs groupements en vue de la réduction des émissions de gaz à effet de serre résultant des activités présentes sur leurs territoires. Je pense en particulier aux actions de rénovation thermique.
Dans ces conditions, ne serait-il pas judicieux de donner aux collectivités concernées la possibilité d’affecter au financement du SRCAE et du PCAET une part des recettes de la fiscalité sur les énergies carbonées consommées sur leur territoire, telles la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel et la taxe intérieure de consommation sur le carbone ?
La seconde question concerne le recyclage ou l’élimination de certains déchets dans les filières de responsabilité élargie du producteur. Le développement de ces filières a permis la mise en place, en application du principe pollueur-payeur, de multiples éco-organismes. La filière REP, en tant que source de financement privée d’un service public, celui de la gestion des déchets, modifie significativement cette gestion.
Si les filières REP sont des dispositifs relativement efficaces, elles présentent aussi de très nombreux dysfonctionnements. En outre, on voit apparaître une concurrence alimentée notamment par des éco-organismes venus de l’étranger. Dans ces conditions, ne serait-il pas judicieux de proposer la création d’une autorité indépendante de régulation permettant de garder le contrôle sur les éco-organismes, dont la transparence ainsi préservée éviterait d’éventuels abus de position dominante ? Le fonctionnement de cette agence pourrait être financé par un prélèvement de 1 % sur les recettes des éco-contributions des dispositifs REP.
Je commencerai par votre seconde question, monsieur le député. La création d’une nouvelle structure de type agence indépendante semble être une réponse disproportionnée aux questions qui se posent actuellement. Elle impliquerait que l’État et les entreprises qui financent les filières de responsabilité élargie du producteur déploient des moyens importants. Sur le fond, elle risquerait également d’aboutir à une concentration dommageable des pouvoirs et à une mise sous tutelle des éco-organismes agréés, ce qui serait contraire au principe de responsabilisation des producteurs et priverait l’État de son rôle de contrôle et d’arbitrage vis-à-vis de ces filières.
Du reste, le Gouvernement mène plusieurs actions pour renforcer l’encadrement et le contrôle des filières REP. Dans le cadre d’une campagne de détection et de contrôle des non-contributeurs, le ministère a délivré une trentaine d’amendes et permis de réintégrer 3 millions d’euros d’éco-contribution par an dans le système des filières REP. Un contrôle de la Cour des comptes sur l’ensemble des éco-organismes des filières est en cours. Le 1er janvier prochain sera installée une commission transversale d’agrément des filières REP regroupant l’ensemble des parties prenantes.
J’en viens à votre première question. Vous estimez nécessaire de renforcer les moyens des intercommunalités pour mettre en oeuvre les actions des plans climat air énergie territoriaux, notamment en matière de rénovation thermique. Vous évoquez la possibilité de créer, à titre expérimental, une taxe climat énergie sur les énergies consommées sur le territoire concerné.
Comme vous, le Gouvernement attache de l’importance aux actions des PCAET. Je rappelle qu’il consacre d’importants moyens à la rénovation énergétique : crédit d’impôt pour la transition énergétique renforcé dans la loi de finances pour 2015 et reconduit en 2016, éco-PTZ, budget de l’Agence nationale de l’habitat… Je rappelle aussi que le dispositif des certificats d’économie d’énergie, renforcé par la loi relative à la transition énergétique, contribue à dégager des moyens pour cette action.
Faut-il, pour autant, créer de nouvelles taxes ou envisager une hausse des taxes locales pour financer ces priorités, et ce dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques ? Une taxation des consommations d’énergie au niveau intercommunal serait compliquée à mettre en place, vous le comprenez bien. Les dispositifs seraient forcément nombreux et hétérogènes, et leur coût de gestion serait potentiellement important. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable tant à la création d’une nouvelle taxe climat énergie au niveau local qu’à la possibilité d’augmenter les taux de la taxe sur le foncier non bâti ou de la cotisation foncière des entreprises.
Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais signaler la contradiction qu’il y a entre l’affichage de la politique annoncée par le Gouvernement et la réalité.
Les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sont en baisse de 65 millions dans le projet de budget pour 2016 avec des crédits de 6 526 millions d’euros contre 6 591 millions d’euros en 2015. Cette diminution de crédits intervient alors même que la « loi prioritaire du quinquennat » sur la transition énergétique vient d’être votée. N’est-ce pas le reflet d’un manque d’ambition, ce budget soulignant l’absence de vision et surtout de cohérence de votre majorité dans le domaine de l’écologie ? D’un côté, on a les grandes annonces et, de l’autre, la réalité avec ce budget en baisse. Comment atteindre l’objectif affiché de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050 sans y affecter des moyens financiers suffisants ?
En parallèle, la conférence « Paris Climat 2015 » dont les crédits, certes, sont non dans votre budget mais dans la mission « Action extérieure de l’État », va tout de même coûter 186,7 millions d’euros. Cette conférence est importante et nous en souhaitons tous le succès, mais la priorité n’est-elle pas donnée à la communication et à ce qui se voit alors que le travail de fond est négligé ?
Honnêtement, monsieur Mariani, il me paraît disproportionné de faire un lien entre l’enjeu de la conférence et les 186 millions que vous stigmatisez. Nous allons connaître un moment rare où la France sera le lieu de rendez-vous de tous les pays du monde. Cela ne concerne pas un continent, il est question de l’avenir de l’humanité. Nous pourrions ne pas prendre ce genre d’initiative, mais vous connaissez suffisamment les relations internationales pour savoir qu’un tel investissement sera très productif pour l’influence de la France.
Sur le budget, je ne partage pas votre appréciation non plus. Les moyens budgétaires sont en diminution pour les inscriptions, mais les moyens d’action mobilisés en faveur de la transition sont plus larges que les moyens budgétaires. Qu’il faille de l’excellence dans la gestion des fonds, c’est sûr, mais, vous connaissez bien ces questions, ce n’est pas parce que l’on opère des prélèvements sur des fonds de roulement que cela obère les capacités d’action du ministère. Les moyens sont maintenus, la ministre l’a bien expliqué en commission, et la France sera au rendez-vous de la COP21 non seulement pour la financer, et je pense qu’elle fait bien, mais aussi pour être exemplaire.
Nous passons à une question du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. Bertrand Pancher.
J’aimerais vous interroger sur deux points, monsieur le secrétaire d’État.
S’agissant, d’abord, du financement de SNCF Réseau, il est consacré 2,5 milliards par an à l’entretien du réseau ferroviaire. Il faudrait, selon tous les observateurs, disposer d’un milliard supplémentaire. Pourriez-vous nous confirmer ce chiffre ?
Ensuite, la « règle d’or » a été votée en 2014. C’est une très belle initiative prise lors de la discussion de la réforme ferroviaire par des parlementaires de la majorité, que j’avais évidemment soutenue, visant à freiner la dérive de l’endettement de SNCF Réseau en contraignant, via un ratio, les demandeurs – État, collectivités – à financer le développement de nouvelles lignes qu’ils souhaiteraient.
Les modalités d’application de cette règle d’or, notamment le mode de calcul des éléments du ratio, doivent être définies par décret. Il y a un certain temps que nous attendons ce décret. Ma question est simple : quand sera-t-il publié ? Qu’il ne le soit pas encore est incompréhensible pour tous les gens qui l’attendent avec beaucoup d’intérêt. Quel devrait être son contenu ? En fonction des éléments qui figureront au numérateur et au dénominateur du ratio, le résultat pourrait en effet considérablement varier.
Il est urgent que l’on dispose de réponses claires en la matière vu l’endettement croissant de la branche ferroviaire, autour de 40 milliards d’euros, les nouveaux contrats de plan État-région allant bien sûr générer des projets de développement ferroviaire, sur lesquels les cofinanceurs devront se positionner, en particulier les collectivités locales, qui ont plus que jamais besoin de visibilité sur les règles de financement de ces projets.
Par ailleurs, j’appelle votre attention sur les opérateurs qui se voient confier de nouvelles responsabilités mais à qui l’on ne donne pas les moyens correspondants.
J’évoquerai tout particulièrement le cas de l’ARAF, dont les compétences ont été sans cesse étendues, notamment par la loi Macron, et qui est devenue l’ARAFER, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières. Il serait opportun, comme le propose un amendement UDI, d’augmenter son plafond d’autorisation d’emplois, ce qui n’est pas le cas dans ce budget. Comptez-vous y remédier ?
Comme vous l’avez dit, monsieur Pancher, les modalités d’application de la règle d’or dépendront pour beaucoup des paramètres qui seront dans le décret. Les modalités d’application font toujours l’objet d’une consultation interservices. Il faut effectivement préciser les modalités du calcul du ratio prévu par la loi et son périmètre d’application. Ce qui est important, c’est la date. Le décret sera publié avant la fin de l’année 2015.
S’agissant des moyens de SNCF Réseau pour la mise à niveau du réseau, nous en avons débattu en commission. L’objectif à atteindre, je le partage globalement, je l’ai dit. Il y a naturellement des contraintes budgétaires, mais il va bien falloir avancer dans cette direction parce que l’état du réseau est une question essentielle. Il faut faire des travaux d’investissement, restructurer le réseau. Plus on attend, plus on risque d’être en difficulté car, s’il n’y a pas de restructuration, il faut faire de la maintenance, et la maintenance coûte de plus en plus cher quand le réseau est en mauvais état.
Restera évidemment à trouver les ressources budgétaires nécessaires et, là, on retombe sur l’objectif de la loi ferroviaire, qui est clair : essayer d’avoir un horizon, avec des gains de productivité. La loi ferroviaire est mise en oeuvre conformément au calendrier arrêté, et l’objectif sera atteint.
Concernant l’ARAFER, je suis un peu surpris par la réaction de son président, notamment dans la presse. Très honnêtement, il me semblait que nous avions répondu à son attente mais, dans ces cas-là on se trompe toujours. Le Gouvernement a pris en compte la situation d’aujourd’hui et, dans le projet de budget qui vous est présenté, le plafond d’emplois passe à soixante-huit. Avant, il était de soixante-trois et il n’y avait en réalité que cinquante équivalents temps plein en activité. Le président de l’ARAFER explique qu’on ne pouvait pas recruter parce que personne ne voulait venir travailler au Mans. Il faut retrouver un peu de sérénité. Le Gouvernement propose soixante-huit équivalents temps plein alors que, pour le président de cette autorité indépendante, il en faudrait au moins soixante-dix. Je ne suis pas sûr que ce soit du niveau du débat parlementaire. Vous et moi pourrons peut-être le rassurer, vous pour l’opposition, le Gouvernement au nom de la majorité : notre volonté commune est bien que l’ARAFER dispose de l’ensemble des moyens nécessaires que lui a donnés le législateur.
Nous passons aux questions du groupe écologiste.
La parole est à Mme Eva Sas.
Monsieur le secrétaire d’État, je me permettrai de vous poser deux questions.
La première concerne les nuisances aériennes. En ce moment, le collectif d’associations Agir pour la réduction des nuisances aériennes en Île-de-France manifeste devant votre ministère. Il manifeste car la politique de réduction de lutte contre les nuisances aériennes sonores et atmosphériques connaît un net recul depuis 2012.
Aucune mesure n’est prise pour limiter ces nuisances alors même que le trafic aérien est en constante augmentation et que son impact négatif sur la santé et la qualité de vie de plusieurs millions de Franciliens survolés a été clairement démontré par les études épidémiologiques.
Pour en venir aux aspects budgétaires qui nous occupent aujourd’hui, le dispositif d’aide aux riverains a été affecté par le plafonnement de la taxe sur les nuisances sonores aériennes et des milliers de dossiers de travaux d’insonorisation sont désormais en souffrance. L’aide aux riverains est maintenant planifiée selon des critères de priorité, ce qui est contraire aux dispositions de la loi Royal relative à la lutte contre le bruit de 1992.
Pouvez-vous donc nous indiquer quelles mesures vous comptez prendre pour que les travaux d’insonorisation des riverains, qui ne constituent déjà qu’un palliatif face à l’augmentation du trafic aérien et de ses nuisances, puissent être financés dans les meilleurs délais ?
Ma seconde question concerne plus généralement la politique des transports. Celle-ci semble en effet la grande oubliée de la politique de lutte contre le réchauffement climatique. L’élan du Grenelle, qui avait conduit à favoriser les transports collectifs, urbains ou ferroviaires, pour permettre un report modal et offrir des alternatives au véhicule individuel et au transport aérien, semble s’être éteint.
Pour preuve, le budget de l’AFITF, qui finance ou cofinance les projets ferroviaires et les transports urbains des collectivités, stagne en 2016 à 1,855 milliard d’euros, ce qui est notoirement insuffisant, comme le rappelait d’ailleurs Bertrand Pancher dans son introduction.
Ma question sera donc la suivante : ne pensez-vous pas qu’il est temps de mettre en place une véritable politique de report modal en France pour lutter contre le réchauffement climatique et de lui accorder les moyens nécessaires, que le Premier ministre avait chiffrés en 2013 à 2,5 milliards d’euros ?
La TNSA – taxe sur les nuisances sonores aériennes – est payée par les compagnies aériennes pour financer l’aide à l’insonorisation des riverains des principaux aérodromes. Cette taxe met en oeuvre le principe pollueur-payeur, auquel vous êtes attachée. Elle est d’autant plus élevée que l’aéronef est plus bruyant ou qu’il décolle à des heures plus gênantes.
C’est un élément clé des politiques publiques de lutte contre les nuisances sonores aériennes. Les riverains et les élus locaux y sont particulièrement attachés. Elle concerne actuellement onze aéroports et son produit est estimé, pour 2015, à 46,3 millions d’euros, dont 23 millions pour l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, et 14 millions pour Orly.
Après une période d’amélioration continue du dispositif, il convient aujourd’hui de stabiliser la trajectoire des dépenses. Nous avons en effet assisté, au cours des dernières années, à une augmentation de leur montant, de 56,4 millions en 2011 à 66 millions en 2014, que je vous laisse comparer aux recettes de la taxe.
Le plafonnement législatif des recettes de la taxe à 48 millions d’euros a conduit à définir une méthode de programmation annuelle de l’aide à l’insonorisation fondée sur trois critères : exposition au bruit, opérations groupées – ce qui me paraît être une meilleure réponse – et ancienneté de la demande. Ces critères nous paraissent pertinents. Le Gouvernement, ainsi, garantit la pérennité du dispositif d’aide à l’insonorisation et sa ressource essentielle qu’est la TNSA.
S’agissant de l’AFITF, vous évoquez le budget pour 2015 et les perspectives. Je vais être très clair. Le budget de l’AFITF est d’environ 1,9 milliard d’euros. Si les engagements de l’État permettent de financer les dépenses pour 2016, pour les années suivantes, l’AFITF aura besoin de recettes supplémentaires, ne serait-ce que pour répondre aux engagements pris par le Gouvernement.
Actuellement, il existe un système de taxe, celui de la responsabilité élargie du producteur – REP –, pour tous les déchets susceptibles d’être recyclés et bénéficiant d’une filière de recyclage. À l’inverse, les déchets qui ne sont pas recyclables et qui ne bénéficient donc pas de filières ne contribuent pas. C’est une anomalie qu’il est temps de corriger pour faire contribuer tous les déchets, en particulier ceux qui, moins vertueux, sont incinérés ou mis en décharge, par le biais d’une taxe générale sur les activités polluantes – TGAP – en amont. Le montant serait à fixer, mais il faut au moins en retenir le principe.
Il n’y aurait aucun coût supplémentaire : il s’agirait d’un transfert du contribuable, qui paie actuellement ses déchets, vers le consommateur, puisque l’industriel en répercuterait le coût. Ce transfert aura une vertu pédagogique et écologique, car le citoyen consommateur aura la possibilité d’arbitrer grâce à ses choix.
D’une manière générale, le citoyen consommateur préfère un impôt amont – c’est le débat existant entre l’impôt sur le revenu et la TVA – plutôt qu’une taxe à la fin de la chaîne économique. Il n’y aurait donc pas de prélèvement supplémentaire, mais une meilleure acceptabilité, un intérêt économique, social et environnemental, soit uniquement des avantages.
Les dispositifs dits de responsabilité élargie du producteur qui consistent à faire participer des fabricants de produits à la gestion des déchets qui en sont issus se sont fortement développés au cours des années passées. Après les emballages ménagers en 1992, puis les pneumatiques usagés, les véhicules hors d’usage, les déchets d’équipements électriques et électroniques au début de l’année 2000, de nouveaux flux ont été couverts plus récemment, comme les déchets d’imprimés, les déchets textiles, les déchets dangereux issus des ménages, les déchets d’ameublement et, à compter du 1er janvier 2017, les matériaux de construction.
La mise en place de ces dispositifs vise en priorité des flux représentant des quantités importantes de déchets pour lesquels il était nécessaire de favoriser le recyclage ou qui posaient des difficultés pour être traités sans impact sur l’environnement. Le bilan est positif, car ces filières ont permis de développer des activités liées à l’économie circulaire et elles ont contribué à moderniser la gestion des déchets en France. Certaines doivent être encore consolidées.
Cependant, ce modèle d’organisation se traduit aussi par des organisations lourdes et il n’a pas vocation à être généralisé à l’ensemble des flux des déchets. Nous venons d’ailleurs d’établir un bilan entre l’intérêt environnemental et le degré de complexité parfois très élevé induit par les organisations à mettre en place.
Monsieur le secrétaire d’État, vous connaissez l’amour tout particulier que notre groupe écologiste porte à l’énergie nucléaire.
Sourires.
Pour autant, quel que soit notre avis sur le nucléaire, nous pensons que notre pays possède un atour certain : son organisation du contrôle de la sûreté nucléaire. L’Autorité de sûreté nucléaire – ASN –, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – IRSN – et les commissions locales d’information – CLI – permettent de valider l’expertise citoyenne et ce dispositif, qui est l’un des plus performants au monde, a le mérite de nous offrir une information relativement transparente et une capacité de réaction.
Cela étant, nous sommes inquiets. Tant qu’à vivre dans un monde où le nucléaire est présent, autant que ce nucléaire soit sûr et que l’on ait toute l’information et la transparence nécessaires sans faire des économies de bouts de chandelle sur le contrôle de la sûreté nucléaire. Or, il y a un an, nous avons adopté un amendement au PLF, avec l’avis favorable du Gouvernement, prévoyant qu’avant le 31 octobre 2015 un rapport serait rendu pour définir les modalités de financement de l’ASN et de l’IRSN, de sorte que ces deux organismes essentiels puissent avoir les personnels dont ils ont besoin pour assurer leur mission.
À voir l’état de l’industrie nucléaire en France, on se rend bien compte qu’ils ne manquent pas de travail, entre les projets à surveiller, les nouveaux projets, les anciennes installations et les installations d’un exploitant qui est lui-même dans une situation qui peut être particulièrement difficile.
En ce qui concerne les CLI, ce n’est pas un an, mais neuf ans de retard que nous avons. La loi de 2006 avait prévu que les CLI pourraient être financées, pour une toute petite somme, grâce à une taxe sur les installations nucléaires de base. Cela fait des années que ces CLI demandent à bénéficier d’un petit financement pour faire correctement leur travail. Monsieur le secrétaire d’État, quand sera-t-il possible d’avoir un budget à la hauteur des ambitions que le pays possède en matière de garantie de la sûreté nucléaire ?
Les investissements massifs que constituent les améliorations de la sûreté exigées, et qui devront être réalisées dans un délai relativement court, de moins de dix ans pour l’essentiel, représentent un défi majeur pour l’industrie nucléaire. Le Gouvernement est très attentif à ce que chacune des prescriptions de l’Autorité de sûreté nucléaire soit respectée dans les délais impartis. C’est pourquoi les effectifs de la sûreté nucléaire seront renforcés en France dans les trois prochaines années, ce qui témoigne d’un engagement concret et immédiat pour la sûreté. En outre, au plan international, la France agit activement en matière de sûreté nucléaire pour promouvoir l’élévation des standards de sûreté.
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte permet de renforcer la sûreté nucléaire en dotant l’Autorité de sûreté nucléaire de pouvoirs de contrôle et de sanction supplémentaires, incluant un dispositif de sanctions pécuniaires et d’astreintes qui s’appuiera sur une commission des sanctions pour obtenir des exploitants la mise en oeuvre dans les meilleurs délais des travaux de sûreté qu’elle exploite. Elle permet également d’améliorer l’information et la transparence, en particulier pour les riverains des installations nucléaires. Les citoyens qui vivent à proximité des installations nucléaires seront régulièrement informés sur la nature des risques et les mesures de prévention de sécurité.
Enfin, s’agissant du financement de la sûreté nucléaire et de la possibilité d’y affecter une taxe, le rapport demandé par le Parlement l’année dernière est en cours de transmission. Il vous sera remis dans les tout prochains jours. Sans vouloir dévoiler ce que vous découvrirez, il conclut que le principe d’affecter le produit d’une taxe à l’ASN pose des difficultés importantes, sans apporter de réelle plus-value à l’exercice de ses missions.
J’appelle les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », inscrits à l’état B.
Sur ces crédits, je suis saisie de plusieurs amendements.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 1071 .
Il s’agit d’augmenter les autorisations d’engagement et les crédits de paiement du programme 205 afin de financer une subvention exceptionnelle de 1,4 million d’euros à la société nationale de sauvetage en mer – SNSM – pour l’aider à renouveler ses moyens, conformément à l’engagement pris par le Premier ministre dans le cadre du comité interministériel de la mer du 22 octobre 2015.
Beaucoup de parlementaires se sont fait l’écho auprès de mon ministère de l’augmentation des besoins de la SNSM qui réalise près de 50 % des opérations de sauvetage. En 2015, de manière exceptionnelle, l’État a accompagné la SNSM dans le renouvellement et l’entretien de sa flotte, par une subvention de 1,5 million d’euros. À ma demande, le conseil général de l’environnement et du développement durable et l’inspection générale des affaires maritimes ont rendu le 7 juillet un rapport concluant à la permanence à moyen terme d’un besoin de soutien public. Les besoins de l’association, en termes de formation des bénévoles, sont confirmés.
C’est dans ce contexte que l’augmentation du soutien financier de l’État est sollicitée et que le Gouvernement a souhaité, par cet amendement, apporter une réponse précise et pérenne. Un prochain amendement à un article non rattaché viendra le renforcer. J’ai confirmé l’annonce du Premier ministre faite lors des assises de la mer. Le Premier ministre, Ségolène Royal et moi-même nous sommes donc engagés pour trouver cette solution qui répond aux attentes de la SNSM.
La parole est à M. Jean-Claude Buisine, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
La commission n’a pas examiné cet amendement. Il s’agit de préserver le modèle de la SNSM et de lui permettre d’assurer le renouvellement de ses moyens et la formation de ses 7 000 bénévoles qui mènent une action remarquable de sauvegarde de la vie humaine en mer sur l’ensemble de nos littoraux. À titre personnel, j’émets un avis favorable.
L’amendement no 1071 est adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Buisine, pour soutenir l’amendement no 947 .
Cet amendement vise à renforcer les moyens budgétaires que la France accorde à la sécurité maritime et, plus particulièrement, au maintien en condition opérationnelle de la signalisation maritime. À l’occasion d’un référé sur la sécurité des navires, la Cour des comptes a rappelé en 2013 qu’à la différence de la sécurité routière qui fait partie du quotidien des Français dans leurs déplacements, la sécurité maritime ne retient l’attention du public et du politique qu’à l’occasion de sinistres ou d’accidents en mer occasionnant d’importantes pertes en vies humaines ou de graves atteintes à l’environnement.
Le réseau des phares et balises jalonnant notre littoral constitue autant d’aides indispensables à la navigation maritime, et ce malgré tous les progrès accomplis grâce au développement de l’électronique embarquée à bord des navires. La France compte environ 130 phares, dont la plupart sont d’ailleurs d’une très grande qualité architecturale. Ceux qui sont ouverts au public accueillent plus de 600 000 visiteurs par an.
Cependant, les services des phares et balises, tout comme les nombreuses associations de préservation de notre patrimoine nous alertent sur la baisse des investissements de l’État dans ce domaine. Si rien n’est entrepris de façon concertée et coordonnée dès aujourd’hui, ces joyaux architecturaux et outils d’assistance à la navigation nécessiteront de très coûteux travaux de remise en état dans les prochaines années. Ces édifices de notre histoire, les balises toujours en activité pour signaler la terre aux navigateurs et les phares, restent plus que jamais un patrimoine du littoral à préserver.
Bien que la commission n’ait pas examiné cet amendement, j’émets un avis favorable à titre personnel.
L’action 15 du programme 203 sera réduite de 6,3 % entre 2015 et 2016, après avoir subi une baisse de 6,6 % entre 2014 et 2015. Près de 11 000 agents travaillent pour le programme 203 et cette action finance, outre les études, les dépenses des systèmes d’information et la formation des personnels. Le Gouvernement n’est pas favorable à la baisse des crédits du programme 203, qui concerne les infrastructures et les services de transport, au profit d’un programme relatif à la sécurité des affaires maritimes et des pêches. Ce n’est pas une bonne idée. En effet, chacun ici mesure bien l’importance des infrastructures, donc du moindre euro du programme 203. Ce transfert de crédits serait particulièrement malvenu.
Par conséquent, je prends plutôt cet amendement comme un amendement d’appel. Nos interventions sont priorisées en fonction de l’intérêt de chaque installation pour l’usager. Vous savez qu’un plan triennal de signalisation maritime est en cours d’élaboration dans chaque façade pour programmer les interventions.
J’ajoute que nous sommes dans une période qui nécessite une réflexion partagée sur le sujet, et vous avez vous-même spontanément évoqué la fonction utilitaire. Et s’il y a aussi, parfois, une fonction patrimoniale, nous y travaillons avec le Conservatoire du littoral et les élus concernés, mais ce n’est pas exactement la même démarche. Le Gouvernement partage votre appréciation sur l’intérêt de renforcer l’action que vous souhaitez valoriser, mais s’il s’agit de le faire au détriment du programme 203, je ne peux vous suivre sur ce terrain. Je pense d’ailleurs que beaucoup d’élus ne vous suivraient pas non plus si l’amendement était voté puisque c’est l’ensemble des infrastructures de transport qui s’en trouveraient pénalisées.
Je souhaite donc vivement que vous retiriez cet amendement, sachant par ailleurs que le Gouvernement fait sien votre message, sinon sa matérialisation. À défaut de retrait, l’avis serait défavorable.
J’aurais préféré, monsieur le secrétaire d’État, que vous me proposiez un sous-amendement. Ces phares et balises ont besoin d’être restaurés et le Conservatoire du littoral ne s’en préoccupe guère parce que cela ne fait pas partie de ses missions premières. Je rappelle qu’ils servent toujours à la sécurité en mer et il me paraît important de les conserver en état de fonctionnement, sachant que les systèmes électroniques ou numériques qui existent aujourd’hui peuvent avoir des défaillances.
Le Gouvernement n’a pas fait de proposition de sous-amendement.
L’amendement no 947 est retiré.
La parole est à M. Marc Goua, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement no 808 .
Cet amendement a été voté à l’unanimité en commission des finances. Il vise à rétablir les crédits budgétaires du CITEPA – le Centre interprofessionnel technique d’étude de la pollution atmosphérique – à un niveau identique à celui de la loi de finances initiale pour 2015. Je rappelle que le CITEPA est un acteur majeur de la lutte contre le changement climatique car il réalise, pour le compte du ministère de l’écologie, des inventaires nationaux des émissions de gaz à effet de serre et des polluants, inventaires requis d’ailleurs dans le cadre des accords internationaux sur le climat et sur la qualité de l’air.
Le CITEPA est financé par le programme à hauteur de 1,34 million d’euros en 2016, soit une baisse de 9 %des crédits, après une diminution de 17 % en 2015 par rapport à 2014. L’importance des restrictions budgétaires ne permettra plus au Centre de réaliser l’intégralité de ses missions alors que l’on accueille la COP 21, d’autant que le Centre doit faire face à une augmentation prévisible d’activité dans les prochaines années. Une telle situation est de nature à diminuer notre crédibilité quant à l’engagement de la France dans la lutte contre le changement climatique.
C’est pourquoi l’amendement propose de rétablir la dotation du CITEPA en augmentant ses crédits de 140 000 euros, prélevés sur un petit magot qui n’est pas utilisé. Cela n’influerait vraiment pas sur les finances de notre pays.
Monsieur le rapporteur spécial, votre commission propose d’augmenter de 140 000 euros les dotations pour le CITEPA en prélevant 140 000 euros sur le programme « Prévention des risques ». Le CITEPA est en effet un organisme important pour l’action conduite par le ministère au travers de la réalisation des inventaires d’émissions de gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques. Le ministère a toujours veillé à lui allouer les moyens nécessaires aux travaux demandés par l’État. Son budget est aujourd’hui d’un million cinq cent mille euros.
Je ne suis pas sûr que transférer à cet organisme 140 000 euros supplémentaires constitue un enjeu historique, mais si la dotation prévue dans le projet de loi de finances s’avérait insuffisante, elle serait ajustée en cours d’année par redéploiement au sein du programme 174. Je vous demande donc, au bénéfice de cet engagement – dont je mesure les limites sur le plan financier, à l’image de celles de votre exigence, et je vous assure que j’aimerais bien pouvoir répondre plus souvent de cette manière – que les moyens seront au rendez-vous, de le retirer.
Bien évidemment, après cette précision apportée par M. le secrétaire d’État, je retire cet amendement.
L’amendement no 808 est retiré.
Les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », modifiés, sont adoptés.
Le fonds de solidarité pour le logement, le FSL, accorde des aides financières aux personnes qui rencontrent des difficultés pour assurer leurs dépenses de logement – factures, loyer, etc. Le montant global des aides versées aux familles pour impayés d’énergie, à travers le FSL, s’élève à plus de 100 millions d’euros par an. Cette somme est de plus en plus difficilement financée par les collectivités et par la caisse d’allocations familiale. Les fournisseurs d’énergie participent également à cet effort financier, à hauteur de 30 millions d’euros par an, mais l’intégralité leur est remboursée au titre de la contribution au service public de l’électricité – CSPE. EDF et les entreprises locales de distribution d’électricité n’ont donc pas spécialement intérêt à mettre en oeuvre des actions préventives de maîtrise de la consommation d’énergie.
L’amendement propose donc que ne soient compensées les sommes versées par les fournisseurs d’électricité dans les dispositifs institués en faveur des personnes en situation de précarité énergétique que si et seulement si sont effectuées des opérations de maîtrise de l’énergie. Il s’agit d’un signal fort pour aller plus loin que les aides d’urgence, qui ne règlent en rien les problèmes récurrents de surconsommation et de précarité énergétiques.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement no 1003 .
Même argument : le but est de favoriser la maîtrise de la consommation d’énergie pour les ménages en difficulté qui éprouvent de réels problèmes pour payer leur facture d’électricité. Comme cette facture est réglée par un fonds de solidarité, on observe que les fournisseurs d’énergie n’ont pas forcément intérêt à ce que le problème soit réglé. Même s’il y a généralement des contreparties en milieu urbain, ce n’est pas toujours le cas en milieu très rural, où la solidarité est assurée notamment par les centres communaux d’action sociale. Il faudrait tout de même responsabiliser les fournisseurs d’énergie en prenant en compte l’affectation d’une part des coûts dans des opérations de maîtrise de l’énergie. Je pense que cela irait dans le bon sens.
Ces deux amendements, que l’on peut qualifier de marronniers, proposent de compenser aux distributeurs d’électricité par le biais de la CSPE les charges liées à leur participation à la lutte contre la précarité énergétique à condition que celles-ci concernent au moins 25 % du total. Je note qu’il existe d’autres instruments pour favoriser la mise en oeuvre par les fournisseurs d’électricité d’opérations de maîtrise de l’énergie, tels que les certificats d’économies d’énergie-précarité énergétique, mis en place par la loi de transition énergétique et destinés aux ménages les plus modestes.
Je vous rappelle également que M. le secrétaire d’État a indiqué qu’une réforme d’ampleur de la CSPE devrait intervenir dans le projet de loi de finances rectificative.
Pour ces deux raisons, l’avis est défavorable.
Même argumentation, même avis.
Je soutiens ces amendements parce qu’ils vont dans le bon sens. Pour répondre à notre collègue Marc Goua, je lui indique que j’étais ce matin au Conseil supérieur de l’énergie qui examinait les décrets et arrêtés concernant les CEE-précarité énergétique, et je peux lui dire que les fournisseurs d’énergie sont évidemment vent debout dès qu’il s’agit d’améliorer le système. Ils tiennent un discours très favorable aux économies d’énergie, affirmant qu’ils sont pour lutter contre la précarité énergétique… Pour les grands mots, tout le monde est présent, mais dès qu’il s’agit de mettre en place des dispositifs, ils renâclent. D’ores et déjà, alors que le dispositif CEE-précarité énergétique devait représenter pour les fournisseurs au moins 250 térawattheures CUMAC – autrement dit « cumulés et actualisés » –, le seuil a été abaissé à 150 térawattheures CUMAC. Je ne vois donc pas de raison objective de ne pas voter de tels amendements qui visent à rendre le système vertueux, comme on l’a fait dans la loi de transition énergétique pour les énergo-intensifs où l’on a conditionné les aides à l’élaboration de plans en matière d’efficacité énergétique. L’idée est ici la même : les aides ne peuvent pas être des incitations à ne pas développer l’efficacité énergétique. Au contraire, il faut pouvoir lier les deux.
La parole est à M. Michel Heinrich, pour soutenir l’amendement no 525 .
Le principe de la responsabilité élargie des producteurs est fondé sur deux postulats : l’internalisation des coûts environnementaux dans le prix des produits afin d’inciter les producteurs à l’éco-conception, et la prise en charge des coûts de gestion des déchets par lesdits producteurs. Mais ce transfert de responsabilité du contribuable vers le consommateur n’est pas toujours efficient aujourd’hui, tant s’en faut. Seule la filière des emballages possède un objectif de prise en charge de 80 % des coûts. Face à la multiplication de ces filières, des objectifs de prise en charge doivent être introduits pour permettre une véritable efficacité de ces dispositifs. Tel est l’objet de cet amendement.
Je vais suppléer M. Mariton – sans le remplacer puisqu’il est irremplaçable.
Le présent amendement a pour but de compléter la définition du contenu des cahiers des charges des éco-organismes afin d’y inclure un objectif quantifié opposable de couverture des coûts de collecte, de tri et de traitement. L’objectif est bien évidemment louable. Il aboutirait toutefois, dans les faits, à alourdir les charges des producteurs, importateurs et distributeurs qui ont transféré l’accomplissement de leurs obligations aux éco-organismes en matière de prévention et de gestion des déchets. Il me semble également que votre amendement, cher collègue, ne relève pas véritablement d’une loi de finances. L’avis est donc défavorable.
Aux arguments qui viennent d’être donnés par le rapporteur spécial, il faut ajouter quelques précisions sur la situation actuelle : aujourd’hui, chaque filière a une responsabilité élargie et ses spécificités. Cet amendement remettrait en cause ses spécificités alors qu’elles sont aujourd’hui prises en compte dans le cahier des charges propre à chaque filière. Il n’est donc pas envisageable de répondre à votre demande, au fond en faveur d’une uniformisation de la couverture de prise en charge des coûts. Ce ne serait pas la démarche la plus opérationnelle.
Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, j’attire votre attention sur le fait qu’un certain nombre d’éco-organismes ne remplissent pas leurs missions. Ainsi, Écofolio n’est qu’à 15 % de ses objectifs. Dans la filière meubles, seulement une déchetterie sur quatre est dotée d’une benne-meubles, et je pourrais citer bien d’autres exemples. L’objectif est tout de même de faire progresser le dispositif. Vous dites, monsieur le rapporteur spécial, que ce genre d’amendement n’a pas à figurer dans une loi de finances, alors que ce serait l’occasion de l’inscrire dans la loi. En tous les cas, il faut mettre en place des objectifs : à quoi servent autant d’éco-organismes s’ils ne remplissent pas correctement leurs fonctions ? Il y a vraiment un manque d’efficacité et d’efficience dans ce domaine.
L’amendement no 525 n’est pas adopté.
La parole est à M. Michel Heinrich, pour soutenir l’amendement no 526 .
Aujourd’hui, près de la moitié des papiers collectés par le service public de gestion des déchets ne contribue pas à la filière. Ces coûts sont donc, là encore, assumés par les contribuables.
Cette incohérence, qui touche un gisement soumis à un dispositif de responsabilité élargie des producteurs, a été dénoncée à de multiples reprises. Le rapport d’information sur la gestion des déchets dans le cadre des filières à responsabilité élargie des producteurs, déposé à l’Assemblée nationale en septembre 2013, propose cet élargissement.
De même, le Conseil national des déchets, a proposé à l’unanimité d’élargir l’éco-contribution sur les papiers, notamment les papiers d’hygiène, qui y échappent entièrement à l’heure actuelle.
Cette mesure de cohérence permettrait d’envisager un périmètre quasi-complet pour la filière papier.
Cet amendement vise à étendre le champ des redevables de l’éco-contribution à l’ensemble des donneurs d’ordre qui émettent ou font émettre des imprimés papier, en y incluant les déchets ayant pour origine les livres, les publications de presse et les papiers hygiéniques.
Je rappelle que la commission n’a pas examiné cet amendement. Pour ma part, j’émets un avis défavorable, compte tenu du renchérissement prévisible des coûts qu’entraînerait cette mesure et des conséquences dommageables pour des secteurs extrêmement fragiles, tels que le livre et les publications de presse.
Avis défavorable, comme le rapporteur spécial.
Oui. Il est hallucinant que voir que, d’année en année, on ne progresse absolument pas dans ces domaines. Il n’y a aucune volonté de progresser, ce que je regrette. Cela serait au contraire très efficace pour l’économie du pays. Je ne comprends pas pourquoi on ne veut pas bouger sur ces sujets : cela paraît assez étonnant.
L’amendement no 526 n’est pas adopté.
La parole est à M. Michel Heinrich, pour soutenir l’amendement no 527 .
La filière à responsabilité élargie des producteurs relative aux textiles ne concerne aujourd’hui que les produits textiles d’habillement, les chaussures et le linge de maison. Dans un souci de simplification et de cohérence, il est important qu’elle prenne en charge tous les produits dont la nature et les caractéristiques sont identiques.
Cet amendement vise à étendre le champ de l’éco-contribution et du traitement des déchets issus du textile à l’ensemble des personnes qui en font commerce à titre professionnel. Je rappelle qu’il n’a pas été examiné par la commission.
Comme précédemment, en raison d’une part du renchérissement des coûts de production dans un secteur qui n’est pas extrêmement facile, d’autre part de l’absence d’étude d’impact préalable, j’émettrai, pour ce qui me concerne, un avis défavorable.
Cet amendement présente un intérêt s’agissant de la maroquinerie. En effet, la filière invite déjà les particuliers à déposer leurs articles de maroquinerie dans les bornes de collecte. Ces produits étant très souvent collectés, il est donc normal que les producteurs participent à leur valorisation, par réutilisation ou recyclage. Le Gouvernement doit cependant continuer à travailler avec les acteurs de la filière, afin de finaliser cette démarche.
Quant à l’extension de la filière aux produits textiles autres que ceux de l’habillement, elle est déjà prise en compte dans le deuxième alinéa de l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement, introduit par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Une démarche commune peut donc être possible sur cette question. C’est pourquoi je vous suggère, monsieur Heinrich, de retirer cet amendement, afin de la poursuivre ensemble. Parce que nous partageons un même objectif, nous serons amenés à en débattre à nouveau.
L’amendement no 527 est retiré.
La filière à responsabilité élargie relative aux déchets diffus spécifiques ne concerne aujourd’hui que les produits dont les détenteurs finaux sont les ménages. Or un certain nombre de professionnels utilisent les mêmes catégories de produits et les mêmes voies d’élimination pour leurs déchets que les ménages dont, en premier lieu et très majoritairement, les déchetteries publiques, en l’absence de déchetteries professionnelles suffisantes sur le territoire.
Cette distinction entre ménager et non ménager pour un même produit entraîne non seulement des difficultés de prise en charge dans les déchetteries, mais aussi une prise en charge des coûts de gestion de ces déchets par les collectivités locales. Dans un souci de simplification et de cohérence, il importe que tous les produits de même nature et présentant des caractéristiques semblables soient gérés par la filière.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement no 997 .
Les produits chimiques, qui représentent 50 000 tonnes de déchets par an, sont trop souvent éliminés avec les ordures ménagères. C’est la raison pour laquelle nous insistons pour développer cette filière à responsabilité élargie. Ménages et professionnels produisent souvent les mêmes déchets. Un regroupement au sein d’une catégorie unique, dans une filière à responsabilité élargie, permettrait donc de s’engager dans un recyclage bien plus large et ouvert aux milieux professionnels.
Cet amendement participe donc du développement des filières de recyclage dans notre pays.
Ces deux amendements sont intéressants parce qu’ils posent un véritable problème. La commission n’a cependant pas pu les examiner.
Une étude préalable portant sur les coûts et les modalités de ce regroupement serait nécessaire. Je m’en remets pour l’heure à la sagesse de l’Assemblée et attends la position de M. le secrétaire d’État sur ces amendements.
Je partage l’intérêt du rapporteur pour ces amendements mais nous ne disposons probablement pas des éléments pour trancher cette question, qui est entièrement légitime et qui a été débattue, notamment au sein du Conseil national des déchets.
Le Conseil a rendu un avis défavorable à l’extension que vous proposez, monsieur Heinrich et monsieur Pancher, non pour des raisons de fond, mais pour des raisons qui rejoignent l’observation du rapporteur spécial. Il a en effet estimé que nous n’avons pas suffisamment de recul par rapport à une filière très jeune. En outre, il faut développer les déchetteries professionnelles afin de disposer de solutions plus structurantes.
Le Gouvernement aurait souhaité suivre l’avis du Conseil national des déchets, qu’il partage, mais, comme précédemment, il estime à ce stade utile, pour que le débat ne se focalise pas dans un affrontement, que les auteurs de ces amendements les retirent afin de partager davantage sur cette question et de construire un chemin commun.
Cet amendement fait suite à la question que j’ai posée tout à l’heure. Il vise à proroger le délai de remise du rapport que le Gouvernement devait rendre au Parlement pour l’éclairer avant l’examen du projet de loi de finances. Initialement prévue au 1eroctobre 2015, cette remise serait fixée au 1erfévrier 2016, afin de permettre un échange ultérieur avec M. le secrétaire d’État. Celui-ci a en effet répondu de manière très floue s’agissant de l’augmentation des effectifs de l’Autorité de sûreté nucléaire. De combien augmenteront-ils ? Serons-nous réellement à la hauteur des missions confiées à cette institution ?
Dans le calendrier de travail de l’ASN figurent en effet les nombreuses visites décennales en cours ; les arrêts de tranche, de plus en plus complexes – pour lesquels l’Inspecteur général d’EDF lui-même évoque des problèmes d’organisation au sein de l’entreprise – ; la préparation des normes qui pourraient être exigées dans le cas, certes hypothétique mais possible, où des réacteurs nucléaires seraient prolongés au-delà de quarante ans ; les évaluations complémentaires de sûreté post-Fukushima, dont la mise en oeuvre suppose investissements et vérifications ; le suivi actif du grand carénage d’EDF, un programme de 110 milliards d’euros ; la surveillance de la cuve de l’EPR de Flamanville – et toutes les mesures à venir dès que celle-ci sera fonctionnelle ; l’établissement du référentiel de réversibilité du centre industriel de stockage géologique, Cigéo ; le démantèlement des installations, qui doit être programmé, notamment pour la centrale de Fessenheim ; le suivi d’Areva, qui licencie en ce moment, et celui de la sûreté d’installations parmi les plus dangereuses au monde, comme à La Hague ; la réflexion sur l’EPR nouveau modèle, qui a été annoncé.
Ce n’est donc pas par hasard si le président de l’ASN, Pierre-Franck Chevet, a alerté le Gouvernement sur le fait que l’institution ne sera pas capable de suivre un tel plan de charge sur le nucléaire. Après avoir évalué les besoins de son organisation, il a demandé 200 postes, une demande qu’il renouvelle depuis plusieurs années.
Pour reprendre sa formule, que je trouve particulièrement intéressante : « Tant que les nouvelles installations ne sont pas en activité, elles ne posent pas de problèmes de sûreté ». En cela, l’EPR de Flamanville est une installation particulièrement sûre tant qu’il ne démarre pas... Que l’ASN ne dispose pas des effectifs nécessaires pour valider l’EPR de Flamanville pourrait constituer un moindre mal. Malgré tout, je préfère donner des moyens à l’ASN. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement.
J’exprime dans mon rapport les mêmes inquiétudes que M. Baupin. Cependant, M. le secrétaire d’État s’est engagé à présenter dans les jours qui viennent un rapport sur l’ensemble de ces sujets. Tout en partageant les préoccupations de M. Baupin, j’émets donc un avis défavorable à son amendement,
J’ai déjà donné à M. Baupin des indications, qui me paraissaient de nature à l’inciter à retirer spontanément cet amendement. Je vais dont être encore plus précis : le rapport dont vous suggérez de proroger le délai de remise vous sera remis la semaine prochaine.
Compte tenu de cet engagement ainsi que des propositions et commentaires faits sur ce rapport, il apparaît raisonnable, monsieur Baupin, de retirer votre amendement.
Vous avez indiqué, monsieur le secrétaire d’État, dans les conclusions de ce rapport, que vous n’aviez pas trouvé de solution. Cela est plutôt inquiétant car l’objectif des acteurs qui vous sollicitent sur cette question n’est évidemment pas de faire rédiger des rapports, mais plutôt de trouver une réponse.
Je vais donc retirer cet amendement mais, si la réponse suggérée n’est pas la bonne, il faudrait en trouver une autre. En tout état de cause, l’incapacité de l’ASN à répondre à la charge de travail qui lui est dévolue posera des problèmes. Comme vous le mentionniez, monsieur le secrétaire d’État, en comparant le coût de la conférence climatique et celui des dégâts occasionnés par le dérèglement climatique, chacun peut se rendre compte de l’écart existant entre le coût des effectifs demandés par l’ASN et celui d’un accident nucléaire. Dans les deux cas, on a raison lorsque l’on prend en compte l’intérêt général plutôt que quand l’on fait des économies de bout de chandelle.
L’amendement no 817 est retiré.
Il s’agit là encore d’un amendement lié au financement de la sûreté nucléaire, puisqu’il traite des CLI, les commissions locales d’information nucléaire.
J’ai assisté la semaine dernière à la vingt-septième conférence des CLI organisée par l’Association nationale des comités et commissions locales d’information – ANCCLI. Ces associations, dont beaucoup comprennent des élus locaux, s’investissent pour comprendre ce qu’est la sûreté nucléaire, interroger l’Autorité de sûreté nucléaire, EDF, Areva ou le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, et faire en sorte que nos concitoyens soient informés. Leur travail est remarquable.
Il leur manque toutefois des effectifs. Lorsque nous avions, avec François Brottes, procédé à des auditions dans le cadre de la commission d’enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, nous étions convenu – ce qui montre que la question est transpartisane, ou du moins indépendante de l’opinion que l’on a sur le nucléaire – que faire des économies de bouts de chandelles sur les CLI était dommageable, car cela ne permettait pas à cette expertise citoyenne de se faire. Cela d’autant plus que la loi relative à la transition énergétique a renforcé le rôle des CLI, en leur attribuant des compétences supplémentaires en matière de visite et de suivi des modifications des plans particuliers d’intervention. Or, ceux-ci vont nécessairement être modifiés, puisque les nouvelles normes européennes prévoient que le périmètre des plans d’intervention en cas d’accident nucléaire devra être d’au moins vingt kilomètres, contre dix auparavant. Les CLI vont donc être sollicitées, et il serait pertinent de leur donner les moyens d’agir.
Cet amendement vise en conséquence à demander, non pas de l’argent, mais un rapport, afin de savoir si l’on a la capacité ou non de mettre en place un dispositif de financement des CLI. Franchement, monsieur le secrétaire d’État, cela permettrait d’envoyer à ces associations un signal positif en leur montrant notre volonté de prendre leur travail en considération !
La commission s’en remet à la sagesse du Gouvernement. Le secrétaire d’État a d’ailleurs déjà répondu en grande partie à l’interpellation de M. Baupin – mais je le laisse s’exprimer sur cette demande de rapport.
On comprend bien votre démarche, monsieur Baupin, qui n’est d’ailleurs pas sans lien avec la discussion précédente : vous souhaitez obtenir un rapport avant le 1erjuillet 2016 sur l’évolution du financement des commissions locales d’information nucléaire et sur leur regroupement national, l’Association nationale des comités et commissions locales d’information. Si l’on souhaite éclairer le débat et les décisions à venir, il n’y a pas de raison de fond de s’y opposer. Aussi le Gouvernement s’en remet-il à la sagesse de l’Assemblée.
L’amendement no 818 est adopté.
J’appelle les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », inscrits à l’état C.
Les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » sont adoptés.
J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », inscrits à l’état D.
Sur ces crédits, je suis saisi d’un amendement no 495 du Gouvernement.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour le soutenir.
Cet amendement, important, propose d’attribuer une enveloppe supplémentaire de 30 millions d’euros au programme 792, « Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants ».
En 2016, le bonus automobile sera recentré sur les véhicules électriques, dont l’acquisition ou la location pour deux ans ou plus donnera droit, comme en 2015, à un bonus de 6 300 euros, limité à 27 % du coût de l’acquisition.
Il a été décidé de ne pas rendre plus sévère le barème du malus, dont les recettes permettent le paiement des bonus.
Les aides aux véhicules hybrides, dont la maturité sur le marché est plus avancée que celle des véhicules électriques, verront leur montant diminuer au 1er janvier 2016. L’aide aux véhicules hybrides émettant de 61 à 110 grammes de CO2 passera de 2 000 euros au maximum à 750 euros. L’aide aux véhicules émettant de 21 à 60 grammes de CO2, correspondant à des véhicules hybrides rechargeables, passera de 4 000 euros au maximum à 1 000 euros.
La prime à la conversion fera l’objet de modifications dès le 1erjanvier 2016. La mise au rebut d’un véhicule diesel immatriculé pour la première fois avant le 1erjanvier 2006 – et non plus avant le 1erjanvier 2001 – ouvrira droit à l’aide. La prime à la conversion de 3 700 euros destinée à l’acquisition de véhicules électriques s’ajoutant au bonus de 6 300 euros pour une aide totale de 10 000 euros sera maintenue en 2016.
Tel est l’objet de cet amendement d’inscription de crédits supplémentaires.
La parole est à M. Alain Rodet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
Lors de la commission élargie, j’évoquais le montant du programme 792 en indiquant que, compte tenu des chiffres mentionnés dans le projet de loi de finances, il pourrait être insuffisant. L’amendement du Gouvernement répond aux préoccupations que j’avais exprimées.
Pour ce qui concerne l’accent mis sur les véhicules électriques, je ne peux qu’y être favorable, étant entendu que nous risquons d’être confrontés à un problème, non pas de normes, mais d’étalonnage, car en la matière, un certain nombre de vérifications semblent s’imposer. Je pense à un véhicule d’une marque américaine dont je ne citerai pas le nom et dont le prix est très élevé, puisqu’il avoisine les 100 000 euros ; théoriquement, il dispose d’une forte autonomie, de 300 kilomètres, mais certains chauffeurs de taxis parisiens qui l’utilisent remettent en cause sa certification. Je ne dis pas que c’est le même problème que pour Volksw…,
Sourires.
Je voterai cet amendement qui va bien évidemment dans le bon sens, puisqu’il incite à retirer les véhicules diesel et à développer des véhicules moins polluants. Cela étant, je vais abonder dans le sens du rapporteur ; cet après-midi, nous avons, dans le cadre de la mission d’information sur l’offre automobile française, procédé à une audition, et l’on y a évoqué l’inquiétude que pourrait susciter une focalisation sur le seul véhicule électrique. Eu égard aux difficultés que rencontre actuellement le développement d’une filière purement électrique, il serait pertinent de s’interroger sur la possibilité de proposer des dispositifs du même type pour les véhicules au gaz !
On a dû beaucoup batailler pour essayer de rendre la loi relative à la transition énergétique un peu moins « électro-électrique » pour ce qui concerne la mobilité. Je regrette que le bonusmalus reste focalisé sur cette énergie alors qu’il n’y a pas de raison particulière de la privilégier par rapport aux autres énergies alternatives – que la directive européenne demande d’ailleurs de promouvoir. Voilà le message que je voulais adresser au Gouvernement – même si je voterai l’amendement.
L’amendement no 495 est adopté.
Les crédits du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », modifiés, sont adoptés.
J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », inscrits à l’état D.
Les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » sont adoptés.
J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », inscrits à l’état D.
Les crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » sont adoptés.
Nous avons terminé l’examen de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, jeudi 12 novembre 2015, à neuf heures trente :
Suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2016 : articles non rattachés.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures quarante.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly