La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation du Conseil national de la Confédération suisse, conduite par son président, M. Stéphane Rossini.
Mmes et MM. les députés, ainsi que les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.
La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé.
Madame la ministre, pour une fois, et c’est assez rare pour qu’on le souligne, vous avez réussi à faire l’unanimité autour de vous : l’unanimité contre le projet de loi santé que nous examinons actuellement. Vous avez réussi à susciter le mécontentement de tous les professionnels de santé
« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC
mais aussi d’une part importante de personnes dont on parle peu et qui sont pourtant des acteurs essentiels de notre système de soins, je veux parler des donneurs de sang.
Par touches successives, vous mettez à mal, au détour de textes législatifs, notre système de don du sang fondé sur le bénévolat, la gratuité et l’autosuffisance. Aux termes d’un article de la loi Macron, le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies cessera d’être propriété de l’État pour s’ouvrir aux capitaux privés. Un autre article, du projet de loi santé, prévoit, quant à lui, la suppression des procédures d’autorisation d’importation et d’exportation de certains produits de santé, au profit d’une procédure de déclaration. Ainsi, de manière non assumée, madame la ministre, vous mettez des coups de canif dans le modèle français de don du sang.
Depuis 1949, le don de sang est non rémunéré. C’est un choix de société fondé sur la solidarité citoyenne.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La transfusion sanguine relève d’un service public. Son fonctionnement doit être un et indivisible. Ce modèle de collecte est la garantie pour les donneurs et les receveurs que, d’un bout à l’autre de la chaîne transfusionnelle, les processus répondent aux mêmes normes, aux mêmes conditions, aux mêmes exigences.
Le Premier ministre a déclaré hier – ce qui sonne comme un désaveu – vouloir un nouveau débat après le vote en première lecture de votre projet de loi santé. Aussi, madame la ministre, j’espère que cet article néfaste sera revu. Nous devons offrir aux malades qui reçoivent des produits sanguins, la meilleure sécurité. Le don de sang bénévole en est le meilleur garant !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député Barbier, vous rappelez les caractéristiques du don du sang dans notre pays, auxquelles nous sommes tous collectivement attachés. La France, vous avez raison de le souligner, peut s’enorgueillir d’avoir un système de don du sang absolument remarquable qui repose sur l’autosuffisance, d’abord, sur une garantie de sécurité pour les receveurs, ensuite – parce que nous ne devons pas oublier les receveurs –, et puis sur l’engagement éthique des donneurs, et les associations y sont extrêmement attachées. Le don n’est pas rémunéré, en France, il est évidemment volontaire et bénévole. Ce modèle est maintenu, il est réaffirmé.
Monsieur le député, vous le savez, des décisions de justice ont été rendues, au niveau européen, au niveau national, qui nous obligent à sécuriser les conditions dans lesquelles l’administration de plasma SD, solvant-détergent, est réalisée en France. Ce plasma est désormais un médicament, c’est le fait d’une décision de justice, et donc nous devons sécuriser la qualité des produits qui seront mis sur le marché comme solvants-détergents. C’est la raison pour laquelle j’ai indiqué – et cela a été inscrit dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale – que tous les produits qui seraient mis sur le marché en France devraient répondre à une charte éthique du don, qui sera imposée par l’Agence du médicament, avant que l’autorisation de mise sur le marché ne soit délivrée. C’est une sécurité qui est apportée.
En ce qui concerne, par ailleurs, le laboratoire du fractionnement, le LFB, l’article de la loi dite Macron prévoit la possibilité d’ouvrir le capital, mais celui-ci restera majoritairement privé.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Il n’est pas question, monsieur le député, de privatiser le sang, c’est un modèle auquel la France… Le capital restera majoritairement public, pardon, public !
La parole est à M. Yves Blein, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a assuré il y a quelques jours que « la clé de la reprise, c’est l’investissement ». C’est en effet ce moteur qu’il faut désormais remettre en marche, car l’économie française se redresse.
C’est désormais un fait : les marges des entreprises s’améliorent enfin ; elles sont de 31 % au premier trimestre de l’année 2015, contre 29 % il y a quelques mois. C’est désormais un fait : la compétitivité-coût de la France par rapport à l’Allemagne est rééquilibrée. C’est désormais un fait : le ratio des exportations françaises sur celles de la zone euro se redresse. Les chiffres de l’INSEE annoncent la reprise de la croissance en 2015. Elle est évaluée à 0,7 %, au premier semestre, tandis que l’augmentation de la consommation des ménages est attendue à 1,5 % sur l’année. À l’évidence, l’économie française redémarre : les premiers résultats sont là.
L’effort et la ténacité payent, monsieur le Premier ministre, alors même que le fardeau de la dette – 600 milliards d’euros sous le seul quinquennat de Nicolas Sarkozy, 120 milliards d’euros par an – a alourdi la France de semelles de plomb dans la compétition internationale.
Effort et ténacité, avec le CICE, le redressement des comptes, les baisses massives de charges ; effort, ténacité et justice, avec les baisses d’impôts pour 9 millions de ménages, avec la mise en place du tiers payant, avec les moyens massifs accordés à l’éducation des enfants et à la sécurité des Français. Toutes ces mesures constituent une politique économique efficace, équilibrée et juste, à l’opposé de l’austérité préconisée par la droite comme seul remède à la crise.
Vous avez annoncé ce matin, monsieur le Premier ministre, une série de mesures visant à favoriser l’investissement des entreprises comme des collectivités. Pouvez-vous nous en livrer le détail et nous dire quels résultats vous en espérez ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, vous avez pratiquement tout dit dans votre question.
Rires et exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Je ne reviendrai pas sur toutes les annonces que j’ai faites ce matin. Nous donnerons, bien sûr, tous les détails à l’Assemblée nationale : d’autres ministres auront l’occasion d’y revenir en répondant à des questions.
Vous avez, me semble-t-il, la bonne analyse de la conjoncture économique : la croissance est de retour, grâce à la baisse conjointe du prix du pétrole, des taux d’intérêt – c’est important pour les entreprises comme pour les ménages –, et de l’euro, ce qui compte, bien entendu, pour nos exportations. Le Gouvernement français souhaitait, depuis plusieurs mois, une telle baisse de l’euro : je l’avais dit ici même, à l’Assemblée nationale, en avril 2014.
Il faut ajouter à cela les effets du pacte de responsabilité et de solidarité, qui est mis en oeuvre de manière plus effective depuis le 1er janvier, et du CICE, mis en oeuvre par Jean-Marc Ayrault.
Manuel Valls salue l’action de Jean-Marc Ayrault : c’est vraiment l’heure du rassemblement !
Tous ces éléments améliorent la conjoncture, mais nous voyons bien que ce n’est pas suffisant, qu’il faut aller plus loin, notamment pour ce qui concerne l’investissement. Car au fond, le seul message des Français, le vrai message qu’ils nous adressent, c’est qu’ils veulent des résultats, de l’efficacité dans la lutte contre le chômage. Or pour faire baisser le chômage, il faut une croissance plus forte, et des entreprises plus compétitives. C’est pourquoi j’ai annoncé ce matin, après le conseil des ministres, présidé par le chef de l’État, plusieurs mesures pour soutenir et accélérer l’investissement privé et public.
Pour ce qui concerne l’investissement privé, s’il n’y avait qu’une mesure à retenir, ce serait cet avantage fiscal exceptionnel : les investissements industriels réalisés au cours des douze prochains mois permettront aux entreprises de réduire leurs impôts sur les bénéfices. Une entreprise qui procède, cette année, à un investissement industriel, pourra, à titre exceptionnel, déduire 140 % de ce montant de son impôt sur les sociétés. Pour dire les choses plus clairement, monsieur le député, cela représente une économie d’impôts de plus de 13 % du montant de l’investissement au taux normal de l’impôt sur les sociétés.
Comme je l’ai précisé ce matin, avec Michel Sapin, cette mesure sera applicable immédiatement, à partir du 15 avril, et concerne tous les secteurs. C’est un effort de 2,5 milliards d’euros…
…en faveur de l’investissement industriel et de la création d’emplois ; tout ce travail vise d’abord, évidemment, à aider les PME, les PMI, les start-ups, parce que c’est là qu’il y a le plus d’emplois potentiels, et le plus de freins à l’embauche.
D’autres mesures concernant l’épargne des Français et le logement doivent concourir à améliorer à la fois l’investissement et le pouvoir d’achat, comme le crédit d’impôt pour la transition énergétique. Par ailleurs, avec Sylvia Pinel, nous débloquons environ 70 millions pour l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat. Des mesures pour l’investissement public ont déjà été annoncées, d’autres viendront le 15 mai.
Nous répondons au message des Français par l’action, par la réforme, par l’investissement. Quand les choses vont dans le bon sens, il faut les accompagner : c’est toute la tâche du Gouvernement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, pourriez-vous nous expliquer enfin votre politique de Gribouille en matière de transports ?
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Il y a moins d’un an, votre ministre chargée de l’écologie annonçait, à la surprise générale, que l’écotaxe ne servait à rien et qu’elle serait abandonnée, privant ainsi l’Agence de financement des infrastructures de transports de France d’une indispensable ressource. Quelque temps plus tard, cette même ministre tapait à bras raccourcis sur les sociétés d’autoroutes en demandant qu’elles soient gratuites, puis qu’on les taxe afin de procurer à l’État des ressources nouvelles. Vous l’avez écoutée : plus d’écotaxe, taxation supplémentaire des concessionnaires, blocage des péages.
Vous avez annoncé ce matin que les péages n’augmenteraient pas cette année : ce sera donc le cas l’année prochaine. Vous savez bien que cette augmentation sera très nettement supérieure à ce qui était prévu, car il faudra rattraper ce qui exigible par contrat avec les sociétés d’autoroutes, et compenser l’augmentation de la fiscalité.
Vous venez également d’annoncer un plan de relance fondé – je vous le donne en mille ! – sur l’augmentation des durées des concessions de ces mêmes sociétés, que votre gouvernement voue pourtant aux gémonies.
En matière de financement permanent de nos infrastructures, mystère : vous ne nous avez rien dit sur ce point. Comptez-vous pérenniser et augmenter les taxes sur les carburants ? Trouver des ressources nouvelles ? Régionaliser l’écotaxe ? Quoi qu’il en soit, une chose est certaine, monsieur le Premier ministre : le secteur des travaux publics n’a jamais été aussi sinistré depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et c’est votre responsabilité.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDI et UMP.
Les automobilistes, quant à eux, sont totalement médusés. Alors, monsieur le Premier ministre, quand en finirez-vous avec cette politique de Gribouille en matière de transports ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Monsieur le député, je pense que ces sujets peuvent être traités avec calme et considération.
Il s’agit en effet de faire prévaloir l’intérêt général sur les intérêts particuliers. Pour cela, le Premier ministre a annoncé et détaillé ce matin un plan national d’investissement pour nos infrastructures de transports. Il convient que les sociétés autoroutières apportent leur contribution. Elles vivent du péage des automobilistes, et des concessions que l’État leur a confiées dans d’excellentes conditions il y a quelques années, du temps où vous étiez au pouvoir. Nous appelons donc chacun à prendre ses responsabilités.
Dans ce cadre, les compagnies autoroutières vont engager un plan de relance de 3,2 milliards d’euros, qui fournira du travail aux entreprises de travaux publics, et créera des emplois dans ce secteur.
Le Gouvernement a pesé pour que les autorités de Bruxelles donnent leur accord à ce plan de relance, contre un allongement des concessions de deux à trois ans. Les sociétés autoroutières, qui bénéficient de ce système, sont appelées à contribuer de deux manières. D’une part, elles protégeront les consommateurs – c’est-à-dire les automobilistes – en renonçant à la hausse des tarifs pour l’année 2015, sans rattrapage l’année prochaine, contrairement à ce que vous venez de dire.
D’autre part, elles contribueront à l’investissement dans les transports routiers, en apportant dès maintenant 500 millions d’euros. Cette somme bénéficiera aussi aux entreprises de travaux publics : 300 millions d’euros seront confiés à l’AFITF sur trois ans, et 200 millions d’euros seront placés sur un compte de financement, géré par la Caisse des dépôts et consignations, pour les projets routiers innovants et les projets de transports innovants. Vous voyez, monsieur le député, que l’on peut concilier l’inconciliable, pour peu que l’on mette chacun face à ses responsabilités, au service de l’intérêt général.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Madame la ministre de l’écologie, fin novembre 2013, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques remettait un rapport sur les techniques alternatives à la fracturation hydraulique pour l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels.
Ce rapport indique que « des techniques alternatives à la fracturation hydraulique existent » et présente la « stimulation au propane » comme une « technique alternative opérationnelle et prometteuse ». C’est la société ecorpStim, auditionnée par les rapporteurs, qui vantait les mérites de cette technique ; elle se disait d’ailleurs pionnière en la matière. Mais plus loin, le rapport rappelle aussi que « le fluoropropane n’est pas sans danger pour le climat. Il représente aujourd’hui 0,5 pour mille des émissions totales de gaz à effet de serre ».
Les écologistes, par la voix de Denis Baupin dans cette assemblée, avaient voté contre l’adoption de ce rapport, tant il lui manquait une contre-expertise critique en la matière face aux entreprises et aux lobbies.
Nous l’affirmons, il n’existe pas de technique propre, sans émission de gaz à effet de serre, d’utilisation des gaz de schiste.
Mais la société ecorpStim, dont le siège mondial est au Texas et qui envisage d’ouvrir des bureaux à Paris, s’est empressée hier matin de publier sur son site le rapport Montebourg de 2014 – ressorti brusquement du placard –, qu’elle avait elle-même largement alimenté en valorisant sa technique d’extraction du gaz de schiste à base de propane.
La semaine prochaine, l’ADEME l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, avait prévu de présenter son étude pour une production d’électricité 100 % renouvelable. Cette étude a mystérieusement disparu de la circulation et sa présentation est retardée. Madame la ministre, une précédente ministre de l’écologie a dit : « C’est sur l’écologie que se concentre l’affrontement avec le monde de la finance ». Comment comptez-vous faire face aux pressions des lobbies ?
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
En effet, il y a eu un rapport récent, qui n’a d’ailleurs pas été caché, sur la question des gaz de schiste. Il a clairement confirmé ce que certains contestaient encore jusqu’à présent, en rappelant que « la fracturation hydraulique est condamnable au plan environnemental ». Ensuite, une alternative soi-disant propre a été proposée, qui ne peut en aucun cas être une solution, et ce pour deux raisons : d’abord, cette technique est également très dangereuse, puisqu’elle conduit aussi à la fracturation de la roche mère et qu’elle utilise un gaz, l’heptafluoropropane, qui est une molécule dont le potentiel de réchauffement est 3 000 fois supérieur à celui du gaz carbonique. Ensuite, il s’agit bien aussi d’une énergie fossile. Il existe donc des risques de pollution de sous-sols et de nappes phréatiques mais également des menaces d’explosion en surface. Cette technique, qui n’est pas mature et ne permet pas un retour sur investissement, est totalement inacceptable sur le territoire français.
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Par ailleurs, encourager ce type de recherches déstabiliserait le mix énergétique, que l’Assemblée nationale a adopté récemment. Aujourd’hui, nous devons exclusivement encourager l’investissement dans le domaine de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables. Par conséquent, il ne serait pas souhaitable de détourner nos efforts au profit de recherches qui ne correspondent pas au nouveau mix énergétique, qui doit impérativement encourager le développement d’énergies permettant de lutter contre le gaz à effet de serre. C’est la raison pour laquelle aucune autorisation de ce type ne sera donnée sur le territoire français.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, vous avez annoncé lors du Conseil des ministres de ce matin un certain nombre de mesures de soutien à l’investissement. Ce sont des annonces à saluer car, s’il n’est pas question aujourd’hui de remettre en cause le choix fait en 2012 de soutenir la compétitivité des entreprises, nous entrons dans une période qui, nous le savons tous, requiert des mesures en faveur de la croissance, de l’emploi et du pouvoir d’achat. Les mesures annoncées ce matin ont donc comme objectif de soutenir l’investissement privé mais aussi l’investissement public par le lancement de grands chantiers, par la mise en oeuvre des contrats de plan mais aussi par le soutien à l’investissement des collectivités locales, qui ont toutes des projets prêts à être engagés mais qui les ont parfois suspendus faute de moyens.
C’est sur ce point en particulier que porte ma question. L’investissement public des collectivités est l’un des leviers les plus rapides et efficaces pour la croissance et l’emploi dans tous nos territoires, dans les métropoles comme dans les petites villes et jusqu’au coeur des territoires ruraux. Il est d’autant plus important de le soutenir que nous savons qu’en 2014 il a baissé de 15 % pour les communes et leurs intercommunalités du fait du renouvellement des équipes municipales mais aussi en raison des contraintes budgétaires qui pèsent sur ces collectivités, en particulier dans le cadre de la réduction des dotations.
Ce matin, vous nous avez indiqué vouloir mieux aider les élus qui investissent en permettant notamment un versement plus rapide du Fonds de compensation de la TVA. C’est une mesure qui était attendue par les élus locaux et il faut rappeler qu’elle vient s’ajouter, entre autres, à l’augmentation de 200 millions d’euros de la dotation d’équipement des territoires ruraux – la DETR – et à l’aide aux maires bâtisseurs que vous aviez annoncées lors du congrès des maires de France en novembre dernier.
Cependant, si ces mesures vont dans le bon sens, vous savez aussi que les collectivités et leurs élus ont des propositions et des attentes fortes tant en matière d’investissements que pour leurs dotations de fonctionnement. Je pense évidemment aux discussions en cours entre vos services et les associations d’élus, qui doivent s’achever à la mi-mai. C’est donc en insistant sur l’importance et l’urgence de ce soutien à l’investissement public que je vous interroge, pour que vous puissiez préciser devant nous à la fois les mesures annoncées ce matin et les autres perspectives en matière de soutien à l’investissement des collectivités locales.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, vous l’avez dit, agir pour la croissance et l’emploi passe par le soutien à l’investissement des entreprises et des ménages – je l’ai dit à l’instant à M. Blein. Mais, la spécificité de notre économie nous oblige également à soutenir l’investissement public. Mme Royal a évoqué il y a un instant le plan routier et les moyens pour l’Agence de financement des infrastructures de transport – l’AFIT –, car il est important que les travaux de proximité sur les routes nationales puissent être réalisés. Cela passe bien sûr également par ce que nous engageons dans le cadre des contrats de plan. Plusieurs régions ont déjà signé ces contrats ou des protocoles ; près de 25 milliards d’euros seront ainsi engagés pour l’investissement. Je n’oublierai pas les chantiers de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine – l’ANRU : la Caisse des dépôts et consignations a déjà permis le déblocage d’un milliard d’euros sur les cinq milliards annoncés par Patrick Kanner et Myriam El Khomri. En résumé, l’investissement public est pour nous une priorité.
Vous avez eu raison de le rappeler, monsieur le député, j’ai annoncé, à l’occasion du congrès des maires, l’augmentation de 30 % de la dotation que nous versons aux territoires ruraux, pour soutenir le financement de leurs équipements à hauteur de 800 millions d’euros par an – cela a été parfois oublié. Avec Sylvia Pinel, nous avons également annoncé la création d’une aide aux maires bâtisseurs pour encourager la construction de logements.
Il y a une baisse de l’investissement du bloc communal et intercommunal, c’est une réalité.
Elle est liée au changement de majorité, aux échéances électorales de l’année, mais il faut également reconnaître qu’elle est préoccupante. Si nous ne voulons pas dévier de notre trajectoire budgétaire, il faut trouver les bonnes solutions avec les élus désireux de travailler avec le Gouvernement au nom de l’intérêt général. C’est pour cela que j’ai créé le 5 mars dernier avec le bureau de l’Association des maires de France et son président, François Baroin, un groupe de travail ayant vocation à discuter et à proposer des mesures en faveur de l’investissement local. Ce groupe de travail devra rendre dès la mi-mai des propositions concrètes, que nous pourrons mettre en oeuvre le plus rapidement possible.
En attendant ces mesures, qui peuvent concerner un fonds spécifique de l’investissement ou le dossier du fonds de compensation pour la TVA – le FCTVA –, donner la priorité à l’investissement public passe aussi par le soutien dès à présent à la trésorerie des collectivités pour que des investissements voient le jour dès cette année. C’est pourquoi, je l’ai annoncé ce matin, des prêts à taux zéro seront proposés par la Caisse des dépôts et consignations afin que les collectivités bénéficient d’une avance sur les sommes qu’elles reçoivent de l’État au titre du FCTVA.
Monsieur le député, nous sommes évidemment aux côtés des collectivités territoriales, qui jouent un rôle important dans l’investissement public. Nous devons être attentifs au bloc communal et intercommunal mais également à la place que ces collectivités occupent dans le secteur du bâtiment, des travaux publics et des entreprises de proximité. Je suis convaincu qu’avec les mesures déjà annoncées, les annonces de ce matin et celles que nous pourrions prendre à la mi-mai, nous favoriserons l’investissement public, qui est, vous l’avez compris, l’une des deux jambes sur lesquelles nous voulons avancer, et ce sans déroger aux principes que nous avons annoncés, en nous engageant auprès des collectivités qui favorisent l’investissement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, les allocations familiales ne seront bientôt plus universelles mais conditionnées à un niveau de revenu. Et l’on sait déjà que plus de 500 000 familles seront touchées et verront leurs prestations divisées par deux ou par quatre.
Hier, lors du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales, les partenaires sociaux ont voté contre les décrets d’application de la modulation des allocations familiales, car ils sont conscients des risques que cette mesure fait peser sur notre société.
La modulation des allocations familiales, c’est une rupture grave dans notre politique familiale menée depuis 1945. L’universalité, la solidarité, l’égalité sont des principes que vous n’hésitez pas à bafouer, au mépris des familles.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La modulation revient à considérer qu’il y a plusieurs catégories d’enfants. Mais nous, à l’UMP, sur ces bancs, nous pensons au contraire que tous les enfants naissent égaux : ce sont tous les enfants de la République.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.
La modulation des allocations familiales revient à pénaliser particulièrement les familles nombreuses, alors que notre taux de natalité est dynamique et envié. Ces familles constituent une force pour notre pays. Choisir la modulation revient à prendre le risque de détériorer encore plus l’emploi à domicile, d’encourager le travail dissimulé et, plus grave, d’accentuer la charge pesant sur les familles déjà malmenées par le matraquage fiscal.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le Premier ministre, si votre seul but est de faire des économies, pourquoi ne pas mieux lutter contre les fraudes ? Ce serait une réforme juste et vertueuse. Vous qui êtes tant attaché au dialogue social, et face à l’opposition des partenaires sociaux, allez-vous revoir cette mesure dangereuse pour la cohésion de notre société ? Sous prétexte de « justice sociale », puisque vous avez rappelé ce mot ce matin, irez-vous plus loin encore contre les familles, contre les enfants et, par conséquent, contre la France ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député Bernard Perrut, nous sommes attachés aux familles.
Nous croyons à la force des familles dans notre pays et à la justice sociale dans la politique familiale.
Monsieur le député, la politique familiale de la France reste universelle puisque toutes les familles qui bénéficient d’allocations continueront demain d’en toucher. Mais je vous le dis, la politique familiale doit s’adapter et évoluer. Elle doit s’adapter parce que les familles attendent non seulement des allocations, mais aussi des places en crèche, des places d’accueil pour leurs enfants.
Cette politique doit s’adapter parce que nous devons faire en sorte que les familles modestes et les familles des classes moyennes reçoivent davantage qu’elles ne reçoivent aujourd’hui.
C’est pour cette raison que nous avons fait le choix d’une mesure de justice. C’est une mesure de justice puisqu’il est juste qu’une famille qui gagne plus de 6 000 euros net par mois voie ses allocations familiales baisser pour que d’autres familles puissent recevoir davantage.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, je veux le dire : 90 % des familles ne verront pas leurs allocations familiales bouger.
Cela veut dire que les classes moyennes ne sont pas concernées, et les classes populaires encore moins : 10 % des familles sont concernées, au-delà de 6 000 euros net par mois. Dans le même temps, monsieur le député, nous augmentons de 25 % l’allocation de soutien familial pour les femmes seules avec enfant et de 50 % l’allocation de complément familial pour les familles nombreuses modestes. Nous créons une garantie pour les impayés de pension alimentaire. Oui, monsieur le député, nous aimons les familles et nous faisons le choix de la justice.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jean-Jacques Cottel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question concerne la création du compte personnel d’activité et s’adresse au ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Monsieur le ministre, c’est en marge d’une visite de terrain aux ouvriers des Forges de Trie-Château, dans l’Aisne, le 3 avril dernier, que le Président de la République a annoncé, en plus d’une série de mesures encourageant l’investissement des entreprises, la création du compte personnel d’activité.
C’est une véritable innovation sociale, au service de tous les salariés. Ce dispositif unique pourrait regrouper tous les droits acquis par chaque salarié, et notamment le compte épargne-temps, le compte individuel de formation, le compte pénibilité ainsi que des points retraite.
Il permettrait donc à tous les salariés, à tout moment, de savoir où ils en sont de leurs droits et de les gérer eux-mêmes, de façon pratique et simplifiée. Ce nouvel outil offre une portabilité des droits de chaque salarié : il conserve ses droits en cas de perte ou de changement d’emploi. Cela constitue une protection améliorant la sécurité de son propre parcours professionnel tout au long de la vie.
Ce dispositif est aussi un moyen de lutter contre le chômage de longue durée. Il permettrait aux salariés de s’insérer, le plus rapidement possible, dans un processus de requalification, garantie d’un retour plus rapide à l’emploi. Nous savons fort bien que les périodes de chômage sont, dans la vie de tout salarié, un chamboulement. Cette période chômée est subie et très mal vécue.
Aussi, elle devrait être une période offrant aux salariés toutes les opportunités et toutes les alternatives, en termes de formation, pour la réinsertion dans la vie active. Monsieur le ministre, mes trois questions sont les suivantes : comment ce dispositif sera-t-il mis en place ? Quand ? Comment va-t-il, pour être efficace, se coordonner avec le volet formation professionnelle ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Monsieur le député Jean-Jacques Cottel, vous avez parfaitement résumé la situation. La création du compte personnel d’activité, annoncée par le Président de la République et voulue par le Gouvernement que dirige Manuel Valls, correspond à une longue et ancienne demande de la gauche en vue de sécuriser les parcours professionnels.
Cela fait maintenant plus de douze ans que le premier compte personnel a été créé, avec le compte épargne-temps. Ont suivi d’autres comptes personnels, fruits des derniers accords interprofessionnels, que ce soit le compte personnel de formation, le compte personnel de pénibilité ou encore les droits rechargeables de l’assurance chômage.
Vous le voyez, ces quatre avancées, qui sont des avancées de sécurisation des parcours professionnels des salariés, correspondent à des avancées qui ont toujours été réalisées quand la gauche était au pouvoir.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Cela correspond à notre volonté, rappelée tout à l’heure, qui est de permettre le développement des entreprises mais en même temps d’assurer une meilleure sécurisation des salariés dans leur entreprise. Le Premier ministre l’a annoncé, ce compte personnel d’activité entrera progressivement en vigueur au 1er janvier.
Il s’agit de globaliser les droits, éventuellement de les rendre fongibles, pour permettre à des salariés qui auraient des parcours difficiles ou un peu chaotiques, de conserver leurs droits tout au long de ces parcours, et en même temps d’avoir des périodes de formation qui leur permettent de mieux se réinsérer. Oui, il s’agit bien d’un compte personnel d’activité qui permettra à chacun d’avoir la maîtrise de son propre parcours professionnel. C’est une grande avancée de la gauche. Je proposerai de commencer à la traduire dans la loi que j’aurai l’honneur de vous présenter prochainement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Cette question s’adresse à vous, monsieur le Premier ministre.
Votre gouvernement a mis l’imagination au pouvoir. Le problème, c’est qu’elle se déploie surtout dans le domaine fiscal. Après vous en être pris au travail des Français, vous vous en prenez maintenant à leurs loisirs, aux loisirs des familles, en particulier aux loisirs nautiques.
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.
J’en veux pour preuve cette nouvelle taxe, la redevance sur le mouillage, que vous voulez instaurer. Pour jeter l’ancre le long de nos côtes pour y passer simplement une journée, un petit bateau devra désormais payer une redevance, de 2 euros du mètre : pour un bateau de six mètres, il en coûtera 12 euros. Vous imaginez que c’est très désagréable pour nos compatriotes.
Cela suscite des inquiétudes très diverses, tout au long du littoral breton en particulier. Ce qui est en jeu, ce sont les industries du nautisme et, derrière, l’emploi. En Bretagne, par exemple, il y a 200 000 bateaux immatriculés. Dans les ports bretons, on parle déjà d’écotaxe de la mer.
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Mme Lebranchu nous explique que seule la Corse sera concernée mais, quand on examine le texte de la loi NOTRe qui a été voté en première lecture, on voit que, dans l’article 18 A, le mot « Corse » n’est pas inscrit : c’est l’ensemble du littoral français qui est concerné.
Autre loisir auquel vous voulez vous en prendre, les courses hors stades, ces marathons ou semi-marathons qui animent nos villes et nos villages. Là aussi, vous voulez créer une taxe, nous venons de l’apprendre par les responsables du monde sportif.
Ce que j’attends de vous, monsieur le Premier ministre, c’est que vous nous disiez une bonne fois pour toutes que le temps du tout impôt est terminé et que, désormais, qu’ils travaillent ou qu’ils prennent un peu de temps pour leurs loisirs, nos compatriotes ne seront plus harcelés par votre fiscalité.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. – Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Vous parlez d’imagination, monsieur le député. Moi, je vais parler de fantasme et je vous remercie très sincèrement des deux questions que vous posez qui me permettent d’informer très précisément la représentation nationale et, au-delà, l’ensemble des Français.
S’agissant d’une prétendue taxe sur les courses hors stade, le président de la Fédération française d’athlétisme, soucieux d’assurer la sécurité de ce type de courses, a imaginé faire participer les coureurs au financement de sa fédération.
Le Gouvernement n’y est absolument pas favorable, n’y est pour rien et, si la Fédération française d’athlétisme souhaite prendre ce type de décisions, elle l’assumera, le président vient d’ailleurs de le démentir ce mercredi.
Sur la taxe de mouillage, il faut également préciser les choses. Il nous a été demandé la possibilité d’instaurer, à l’initiative de certaines collectivités et à leur seul profit,…
…une redevance pour services rendus, qui se limite aux seules parties autorisées dans les aires marines protégées, et quatre mois dans l’année. Encore une fois, la collectivité pourrait instaurer cette redevance si elle le souhaite et à son seul profit.
Ce texte est en navette entre le Sénat et l’Assemblée nationale, vous aurez l’occasion d’y revenir. Le Gouvernement ne souhaite pas instaurer une telle taxe à son profit, ce sera au profit des seules collectivités locales, dans un espace et pour une durée très limités.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Philippe Doucet, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, la résolution 2170 adoptée à l’unanimité du Conseil de sécurité des Nations unies a ouvert la voie à une mobilisation de la communauté internationale contre Daech. Dans le cadre de l’opération Chammal, nos armées sont ainsi engagées pour faire reculer Daech. Nous tenons une fois de plus à apporter notre soutien à nos forces engagées sur ce terrain périlleux.
Dans cette lutte contre le terrorisme, nous pouvons compter sur la mobilisation héroïque des combattants kurdes. Au mois de septembre, en se rendant à Erbil, le Président de la République avait reconnu cet engagement exceptionnel des forces de résistance contre Daech. La semaine dernière, en recevant plusieurs commandants kurdes qui recherchaient un soutien logistique, militaire et politique, le Président de la République a une fois de plus marqué l’attachement de la France à ce combat essentiel.
En France, l’Institut kurde de Paris, par son implication culturelle et éducative, contribue à défendre les valeurs et les combats incarnés par les combattants kurdes. Nous soutenons son action et souhaitons que l’accompagnement des pouvoirs publics soit à la hauteur du caractère exceptionnel du moment. Aujourd’hui en difficulté à cause de l’immensité des défis qu’il doit relever, l’Institut kurde de Paris et ses militants méritent d’être soutenus.
Nous le savons, le concours des combattants kurdes sera décisif, notamment pour reprendre Mossoul aux mains des djihadistes. Comment s’organise notre soutien à ces combattants qui défendent la liberté et la justice ?
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
Depuis le début de l’offensive de Daech en Irak en août 2014, monsieur le député, la France s’est tenue aux côtés de l’Irak et du Kurdistan irakien, vous l’avez rappelé.
Le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius s’est rendu à Erbil dès le mois d’août et y est retourné avec le Président de la République en septembre. La semaine dernière, le Président de la République a, en effet, reçu une délégation du gouvernement régional du Kurdistan d’Irak et a rappelé notre plein soutien à l’action menée sur le terrain par les peshmerga dans leur lutte contre Daech.
Nous aidons activement le Kurdistan irakien dans trois domaines. Sur le plan militaire, la France a été le premier État étranger à fournir des équipements et nous continuons de le faire. Sur le plan humanitaire, nous apportons une aide aux populations civiles, en particulier pour permettre aux minorités persécutées, notamment les chrétiens d’Irak mais aussi les yézidis, de retourner dans leurs villes et leurs villages. Sur le plan politique, enfin, nous soutenons la politique de rassemblement et de réconciliation menée par le Premier ministre d’Irak, Al-Habadi.
La France apporte également un soutien aux Kurdes de France. Cela passe par une contribution au budget de l’Institut kurde de Paris, qui est la plus ancienne institution kurde d’Europe, créée en 1983 et reconnue fondation d’utilité publique en 1993, que nous soutenons depuis plusieurs années. Laurent Fabius a pris la décision d’augmenter la subvention du Quai d’Orsay cette année pour la porter à 55 000 euros. Cela s’ajoute aux trente bourses que nous accordons à des étudiants kurdes choisis par l’Institut kurde lui-même, pour un montant de plus de 400 000 euros par an.
Vous le voyez, le Gouvernement est aux côtés des Kurdes dans leur combat pour leur liberté en Irak, comme vous l’êtes sur les bancs de cette assemblée, et je veux d’ailleurs saluer ici votre engagement résolu au service de cette cause.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, élu d’un département rural à fort potentiel agricole, la Mayenne, je voudrais vous relayer les inquiétudes et le ras-le-bol des agriculteurs. Dans un contexte de crise qui touche toutes les filières, ils doivent faire face à de nombreuses complications : retards de paiement pour les éleveurs de viande bovine qui ont dû attendre les aides à la vache allaitante ; retards des décrets ; retards dans la mise en place du TelePAC, qui aurait dû être disponible le 1er mars et qui ne le sera que le 27 avril, ce qui provoque des inquiétudes quant au délai de retour des déclarations pour les aides.
Les agriculteurs se plaignent aussi de la bureaucratie qu’on leur impose. Or, la PAC 2015 va apporter son lot de règles nouvelles et de complexité.
Le nouvel outil d’enregistrement va fonctionner sur des bases différentes, alourdissant les tâches déclaratives. Les comités de suivi mis en place vont avoir du travail.
Ceux que l’on a encouragés à se regrouper en GAEC sont inquiets de voir les critères évoluer au fil des jours.
Ceux qui s’installent sont également déçus, et ce pour plusieurs raisons : l’instruction des dossiers d’installation qui ne peut encore se faire ; les prêts bonifiés limités à la durée du plan d’entreprise ; le niveau de seuil de production retenu par exploitation.
Monsieur le ministre, il vous faut entendre ces inquiétudes ! N’avez-vous pas entendu le message des urnes, notamment dans les zones rurales ? Les agriculteurs ne croient plus aux promesses. Ils veulent que leur rôle soit reconnu et ils veulent pouvoir vivre dignement de leur beau métier. Depuis votre arrivée au pouvoir, votre politique n’apporte que confusion et complications, et les territoires ruraux ont la très nette impression d’être négligés et oubliés par votre gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.
Monsieur le député de la Mayenne, moi qui suis de la Sarthe, je connais nos départements. Vous avez évoqué des retards de paiement, mais les avances des aides sont versées aux agriculteurs en septembre et leur totalité en décembre. Nous ne sommes pas dans le même tempo. Une nouvelle politique agricole commune va être mise en place. Vous avez également évoqué un retard dans l’application des déclarations de la PAC.
Je vais vous rappeler, de manière très claire, que ce retard est lié aux apurements que nous a fait payer la Commission sur des versements qui ont été mal faits lorsque vous étiez aux responsabilités.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Vous pouvez toujours me dire beaucoup de choses et nous faire beaucoup de reproches, mais moi je sais pourquoi nous avons pris du retard…
…et pourquoi nous sommes obligés de refaire un système cartographique pour être plus précis sur le versement des aides.
Monsieur le député, chaque modification de la politique agricole commune nécessite beaucoup de travail avant de pouvoir être appliquée. Ne venez pas y ajouter des délais qui sont complètement indépendants des grands sujets que vous évoquez. J’ai rencontré l’ensemble des chambres d’agriculture, hier, au ministère. Le système de TelePAC sera mis en place avec l’appui du ministère de l’agriculture, en coordination et en cohérence avec les chambres d’agriculture, les centres de gestion et l’administration. Ensemble, nous rendrons ainsi les déclarations plus simples et plus faciles. Parce que l’objectif, monsieur le député, c’est que, en ayant fait les déclarations à la date que vous avez indiquée, les agriculteurs touchent leurs aides à la fin de l’année.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Les paysans mériteraient d’être indemnisés pour écouter des choses pareilles !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, pour moi, le débat en cours sur la santé poursuit un double objectif : d’un côté, contenir les dépenses et de l’autre, assurer au mieux la prise en charge des patients. En outre-mer, et plus particulièrement en Martinique, le problème se pose avec d’autant plus d’acuité qu’il faut tenir compte à la fois de l’éloignement et du déficit que continue d’accumuler l’hôpital public. À 7 000 kilomètres de Paris, la Martinique possède deux cliniques privées de taille humaine ayant réalisé des investissements utiles au développement de compétences et de spécialités qui, pour certaines, n’entrent pas en concurrence avec l’hôpital public. Elles pourraient, le cas échéant, compléter l’organisation sanitaire, afin d’éviter des évacuations dispendieuses tout en préservant une bonne et égale qualité des soins.
Un conventionnement entre l’hôpital public, ces cliniques et l’assurance maladie réglerait bien des difficultés, non seulement financières mais aussi familiales. Cela n’affecterait en rien la possibilité de recourir à la voie aérienne à défaut d’une alternative.
Par ailleurs, l’instauration d’une obligation de service public outre-mer sur les conditions d’évacuation sanitaire et l’acheminement aérien des médicaments a été vivement préconisée par la Cour des comptes elle-même. Si ces recommandations étaient mises en oeuvre, elles seraient plus onéreuses encore que celle que je viens de proposer. Madame la ministre, au regard du contexte que vous connaissez bien, cette mesure ne mérite-t-elle pas d’être prise en considération pour étude ?
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Monsieur le député Marie-Jeanne, vous avez raison de souligner les spécificités des territoires ultramarins en matière de santé notamment. Je suis très attentive, en particulier, à la situation de la Martinique, qui est confrontée à des défis qui lui sont propres. Je partage votre analyse, à savoir que nous devons faire en sorte d’éviter, lorsque c’est possible, les évacuations sanitaires. Il ne s’agit pas de les refuser par principe, mais nous savons qu’elles sont coûteuses et parfois difficiles à supporter, sur le plan humain, car lorsque l’on est malade, l’on n’aime pas être séparé de ses proches.
Pour ces raisons, il me paraît nécessaire, en Martinique comme ailleurs, de renforcer la bonne coopération entre l’ensemble des acteurs de santé du territoire, entre l’hôpital public et les cliniques privées, mais aussi avec les médecins libéraux, parce que c’est ainsi la meilleure manière de s’assurer que la population continuera de trouver une réponse appropriée à ses besoins. Monsieur le député, la réintroduction du service public hospitalier dans la loi que je porte actuellement à l’Assemblée impose à l’hôpital public de jouer ce rôle de coordination dans les territoires vis-à-vis des autres établissements. C’est là un élément important.
Je veux rappeler la confiance que les pouvoirs publics ont dans les structures martiniquaises, puisqu’ils investissent 93 millions d’euros dans la reconstruction du CHU qui sera en service en 2016. Cela représente un engagement fort pour ce beau territoire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Pierre Lellouche, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Cette question s’adressait à M. Fabius, que je voulais interroger sur son embarras visible depuis la fin de la semaine dernière, après la signature de l’accord essentiellement négocié entre les Américains et les Iraniens sur le nucléaire. Il a montré encore son embarras hier aux questions au Gouvernement. Il était au courant que j’allais lui poser moi aussi une question à ce sujet, et je veux voir dans son absence une preuve supplémentaire de cet embarras.
Protestations sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le Premier ministre, puisque vous conduisez la politique de la nation, aux termes de l’article 20 de la Constitution, je ne doute pas que vous voudrez bien me répondre.
La France, au départ, avait une position très faible sur ce dossier : oui au nucléaire civil, non à la bombe, donc pas d’enrichissement. Or l’Iran, aujourd’hui, conserve 6 000 centrifugeuses, deux usines d’enrichissement et un réacteur plutomigène qui devait être supprimé. S’y ajoutent une série de questions : quid des dix tonnes d’uranium en possession de l’Iran et qui devaient quitter son territoire ? Quid de la transparence sur les activités militaires ? Quid de la levée des sanctions et de leur reprise éventuelle par le Conseil de sécurité, compte tenu du veto des Chinois et des Russes ? Tous points sur lesquels nous n’avons aucune précision, y compris s’agissant de la transparence sur le plan militaire. Voilà la raison pour laquelle nous vous demandons beaucoup de fermeté et d’exigence d’ici la conclusion éventuelle d’un accord en juin.
D’ores et déjà, la Turquie, l’Arabie Saoudite et, bien sûr, Israël montrent les plus grandes inquiétudes, et tout le monde demande désormais le droit d’enrichir de l’uranium. C’est donc un sujet extrêmement grave pour l’avenir de notre pays. C’est pourquoi je regrette l’absence de M. Fabius, qui participait théoriquement aux négociations.
Je voudrais connaître, monsieur le Premier ministre, la position du Gouvernement dans les mois qui vont précéder la signature d’un accord final.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
Monsieur Lellouche, le ministre des affaires étrangères a déjà eu l’occasion hier de répondre devant la représentation nationale à une question sur les négociations avec l’Iran.
L’accord de la semaine dernière comporte des avancées positives incontestables. Mais c’est une étape et beaucoup de travail reste à accomplir d’ici au 30 juin. Notre ligne n’a jamais varié. Il n’y a aucun embarras, mais la plus grande clarté : oui au nucléaire civil, non à l’arme atomique en Iran ; oui à un accord, mais s’il est robuste et vérifiable. Les négociations de Lausanne ont permis de franchir une étape, avec un accord de principe sur plusieurs points techniques absolument décisifs. Ainsi, il y a en Iran aujourd’hui près de 9 000 centrifugeuses en fonctionnement, et il en restera 5 060 ;…
…l’Iran dispose de huit tonnes d’uranium et il n’y en aura plus que 300 kilos, qu’il ne pourra plus enrichir qu’à hauteur de 3,65 % au lieu de 20 % auparavant.
Mais nous avons encore beaucoup de travail devant nous. Plusieurs points restent à préciser : certains aspects du programme d’enrichissement dans les quinze prochaines années, parce que nous voulons pouvoir contrôler sur toute cette période, notamment l’utilisation de l’uranium enrichi ; le calendrier de la levée des sanctions ; le mécanisme de rétablissement desdites sanctions en cas de non-respect ; l’accès de l’Agence internationale de l’énergie atomique aux personnes et aux sites impliqués dans des activités ayant une possible dimension militaire.
La France a joué dans ces négociations et continuera de jouer un rôle majeur, et cela devrait nous rassembler, il ne devrait y avoir aucune polémique entre nous sur ce point. Nous sommes à la fois constructifs et vigilants, et c’est toujours avec la même détermination que nous travaillerons d’ici à la fin du mois de juin. Notre seul objectif, monsieur Lellouche, c’est un accord global au service de la sécurité, de la paix et de la lutte contre la prolifération nucléaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.
La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
En ce vingt et unième jour de grève à Radio France, je ne vais pas vous cacher, madame la ministre de la culture et de la communication, l’inquiétude de la représentation nationale parce que nous sommes très attachés, comme nos concitoyens, au service public de la radio, à son esprit, à sa qualité, au modèle culturel qu’il représente. Or depuis trois semaines, nous ressentons comme un vide en allumant notre poste de radio, comme d’ailleurs un grand nombre d’auditeurs qui nous le disent quotidiennement. Nous sommes inquiets parce que nous constatons que cette grève, exceptionnelle par sa durée, révèle pour le moins un déficit du dialogue social au sein de l’entreprise publique et traduit le réel désarroi des personnels dont j’ai pu directement prendre la mesure. Depuis plusieurs mois, nous sommes à ce titre en attente, pour Radio France, de la conclusion d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens avec l’État actionnaire.
Ce document essentiel doit être basé sur une vision claire du devenir de l’entreprise publique. C’est la raison pour laquelle vous avez préalablement demandé, il y a quinze jours, à Mathieu Gallet un projet stratégique, qu’il vous a communiqué et auquel vous avez souhaité réagir dès la fin de la semaine dernière. Ce projet, présenté ce matin devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation de notre Assemblée, devait en ce moment même être discuté au sein d’un comité central d’entreprise extraordinaire. Or nous savons d’ores et déjà que ce sera une nouvelle occasion manquée pour renouer les fils d’un dialogue pourtant plus que jamais indispensable.
Dès lors, madame la ministre, comment contribuer à sortir enfin par le haut d’une situation de blocage intenable et préparer ainsi l’avenir de Radio France ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes écologiste et RRDP.
Monsieur Bloche, vous avez raison : ce conflit a maintenant trop duré et l’audition que vous avez conduite ce matin en commission a bien montré l’inquiétude, partagée sur tous les bancs, quant au blocage du dialogue social. J’avais dit dans cet hémicycle, la semaine dernière, que je prendrai mes responsabilités.
Je l’ai fait en demandant au président de Radio France de me présenter un projet pour son entreprise, et j’y ai répondu très rapidement, dans la journée qui a suivi, afin de lui permettre de renouer le dialogue. Se tenait à quatorze heures un comité central d’entreprise extraordinaire, vous l’avez dit, et j’escomptais que cela constituerait l’occasion pour la direction de rétablir durablement le dialogue avec les salariés afin que le contrat d’objectifs et de moyens puisse être signé dans de brefs délais. D’après les informations dont je dispose à cette heure, cela n’a pas été possible. La situation reste donc bloquée.
Par conséquent, je prendrai mes responsabilités, comme je l’ai dit la semaine dernière.
Cela veut dire très concrètement que je recevrai très rapidement les parties prenantes et que je ferai connaître les décisions que je prendrai pour renouer le dialogue social.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Dans quel état d’esprit vais-je procéder ? Vous avez rappelé que nous sommes tous attachés à la singularité du service public, même si cela semble offusquer quelque peu la droite, qui ne comprend pas que l’on en parle ainsi alors que les preneurs de son, dont la qualité est reconnue unanimement dans l’audiovisuel et dans le milieu musical, tout comme l’existence de deux formations au sein de Radio France qui participent à la création et à la diffusion de la musique, constituent bien une singularité du service public audiovisuel et en font une pépite qu’il nous faut absolument préserver. C’est dans ce sens que je travaillerai, monsieur le député. Vous pouvez compter sur moi.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.
La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux.
Depuis de nombreuses années, la fin de la trêve hivernale fait ressurgir le drame des expulsions locatives. Le problème du manque de places en centres d’accueil et d’hébergement n’est pas réglé. À cela s’ajoute l’augmentation des squats, aussi bien dans les villes – même de petite taille – qu’en milieu rural. À Château-Thierry, nous le constatons au cours des maraudes régulières.
Ces problèmes aigus doivent être traités avec humanité, mais aussi avec responsabilité. Outre ces questions difficiles pour les maires, se développent les occupations illicites du domicile d’autrui, que ce soit en résidence principale ou en résidence secondaire. C’est ce que j’ai découvert dans ma commune.
Les exemples se multiplient de personnes qui, au retour de vacances, d’une absence prolongée ou à la suite d’une mise en vente, trouvent leur maison occupée. De ce fait, le nécessaire droit au logement est confronté au droit de propriété.
Comme vous le savez, au-delà de quarante-huit heures d’occupation, la police est juridiquement incompétente, ce qui n’est pas sans poser problème. La loi du 5 mars 2007 impose plusieurs procédures administratives, ce qui entraîne des délais importants avant que son bien soit restitué au propriétaire. Celui-ci se trouve ainsi victime d’une violation de domicile, souvent accompagnée de dégradations et du vol de biens personnels – sans parler du préjudice psychologique.
Cette situation inacceptable risque de s’amplifier. Aujourd’hui, le droit pénal paraît inadapté à la répression de cette infraction.
S’il est nécessaire de travailler aux solutions de relogement, ce qui n’est pas facile, que faire légalement pour préserver la propriété privée ? Pouvez-vous nous dire, madame la garde des sceaux, quelles sont les armes juridiques disponibles et comment vous comptez lutter contre ce phénomène, qui interpelle nos concitoyens ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.
Monsieur le député, vous soulevez le problème très particulier des cas de violation de domicile et de maintien dans le domicile. Il s’agit de faits dont la réalité est incontestable ; ils ont d’ailleurs donné lieu l’an dernier à 543 condamnations et, conformément aux dispositions du code pénal, la justice a pu faire droit aux propriétaires des logements.
Notre arsenal pénal prévoit en effet que, dans les quarante-huit heures suivant l’introduction indue dans le lieu de résidence, les services de police peuvent intervenir, ouvrir une enquête de flagrance et procéder à des interpellations. Mais il est vrai qu’au-delà de quarante-huit heures, l’enquête de flagrance n’est plus possible ; la seule procédure possible est l’enquête préliminaire.
Toutefois, je vous rappelle que l’article 38 de la loi dite « DALO » instaurant le droit au logement opposable permet au propriétaire ou au locataire de saisir le préfet. Celui-ci peut alors mettre en demeure les occupants de quitter les lieux dans les vingt-quatre heures ; passé ce délai, il peut faire intervenir la force publique.
Il s’agit de la préservation du droit de propriété, tel qu’il est prévu et consacré dans la Constitution.
Il reste que le respect de ce droit de propriété ne peut, comme vous l’avez souligné, nous faire ignorer la difficulté de l’environnement et la précarité du droit au logement. On l’a vu : inscrire ce droit dans la loi ne suffit pas. Le dernier rapport sur l’état du mal-logement en France fait ainsi état de 3,5 millions de personnes mal logées et de 150 000 personnes sans aucun domicile.
Vous êtes plusieurs maires à veiller à procéder à un relogement. Néanmoins, nous devons faire en sorte que des réponses en termes de politique publique rendent cette loi efficace. C’est précisément ce à quoi la ministre du logement s’attelle de façon très résolue.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Dominique Nachury, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
La disposition de l’ordonnance du 19 décembre 2014, qui organise les modalités de désignation des membres de la commission permanente du Conseil de la métropole de Lyon, autres que le Président et les vice-présidents, vient d’être confirmée. Le Gouvernement a souhaité que la commission permanente soit élue au scrutin uninominal majoritaire, reléguant ainsi la parité au rang des beaux principes.
Or la métropole de Lyon n’est plus un établissement public de coopération intercommunale. Elle est une collectivité territoriale. Ses compétences sont aussi celles d’un conseil départemental.
Vous avez voulu, monsieur le Premier ministre, que les conseils départementaux soient paritaires, comme leurs commissions permanentes, comme leurs exécutifs. La parité serait-elle un principe que relativisent les situations particulières ?
Je n’évoque pas les limites et les difficultés de la mise en oeuvre de la parité politique : je les connais. Et ne faites pas aux femmes l’affront d’une pirouette partisane.
Monsieur le Premier ministre, les conseillères métropolitaines de Lyon, dont personne ne peut contester les compétences, les femmes élues dans toutes les collectivités, dont personne ne peut contester l’engagement, ne veulent plus entendre que la parité est une gêne pour conduire l’action publique.
Toutes les femmes seront sensibles à une réponse du chef du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Madame la députée, nous avons déjà eu ce débat en séance, longuement, lors de l’examen du projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République. La métropole de Lyon disposera d’une commission permanente ; le projet de loi ratifiant l’ordonnance a été adopté ici même il y a quelques jours. Or, dans les commissions permanentes des métropoles – que ce soit celle du Grand Paris, qui, un jour, sera enfin votée ici, celle de Lyon ou celle d’Aix-Marseille-Provence –, l’ensemble des élus locaux ont demandé que les communes soient représentées par leur maire ou par leur représentant. Comme il n’est pas possible de savoir à l’avance qui sera maire de telle ou telle commune, nous ne pouvions pas agir sur la composition des commissions permanentes de manière… mathématique, oserais-je dire. Du coup, la seule solution qui s’offrait à nous était d’imposer que l’exécutif soit paritaire. C’est ce que nous avons fait.
Il reste qu’avec votre raisonnement, vous êtes en contradiction avec une grande partie des élus locaux. Car ce que l’Association des maires de France nous demande, et elle nous le demande avec insistance, c’est que, même si elles ont un statut particulier de métropole, les collectivités territoriales de Lyon, Aix-Marseille-Provence et Paris respectent le statut des maires des communes qui les composent – n’est-ce pas, monsieur Pélissard ?
On ne peut pas dire à la fois blanc et noir ! Ou bien la métropole est une collectivité élue au suffrage universel direct, et dans ce cas il y a forcément la parité, ou bien elle répond à la formule que nous avons adoptée à la demande des maires de France, et la parité n’est possible qu’au sein de l’exécutif.
La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. David Habib.
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 775 à l’article 12.
Il ne doit y avoir aucune ambiguïté quant au libre choix par le patient de son médecin et des autres professionnels de santé auxquels il entend se confier. C’est pourquoi nous souhaitons introduire ici cette notion qui est non seulement cohérente avec l’amendement no 1505 du Gouvernement à l’article 30 mais également conforme aux missions du médecin de premier recours, en particulier du médecin traitant, telles qu’elles sont définies par la loi.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
La commission a rejeté ces amendements. Il faut en effet distinguer la nécessaire coordination des professionnels de santé entre eux et le libre choix du patient. Il revient au médecin généraliste d’assurer cette coordination en vue d’apporter les meilleures réponses possibles au patient et de favoriser une prise en charge sans rupture. Le rôle des médecins libéraux est reconnu à travers deux dispositifs : l’équipe de soins primaires et les communautés professionnelles territoriales de santé.
Je rappelle que cet article 12 a été largement réécrit suite à la concertation engagée par Mme la ministre et qu’il repose sur le principe du libre choix inscrit dans l’article L. 1110-8 du code de la santé publique, qui énonce que « Le droit du malade au libre choix de son praticien et de son établissement de santé est un principe fondamental de la législation sanitaire ». Il ne nous semble donc pas nécessaire de le rappeler.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, pour donner l’avis du Gouvernement.
Même avis, pour les mêmes raisons.
De toute façon, il est identique au précédent. Je vais donc procéder au vote.
Madame Pinville, vous souhaitez que je vous accorde une suspension de séance ?
Oui, monsieur le président, je désire une suspension de quelques minutes pour réunir notre groupe.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, nous étions en train de procéder au vote des amendements !
Monsieur Accoyer, madame Pinville avait demandé une suspension de séance !
Il est incroyable que ce soit le président qui demande à un député s’il souhaite une suspension de séance !
La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq.
Monsieur le président, je me fonde sur l’article 58 alinéa 1du règlement.
Nous sommes surpris par la manière dont vous venez de procéder : vous avez en effet accordé une suspension de séance alors même que le vote des amendements était engagé.
Un président de séance se doit d’être impartial…
…or, c’est après avoir observé l’hémicycle et constaté que les membres de la majorité étaient minoritaires…
…que vous avez pris la décision de suspendre la séance. Une telle façon de faire est pour le moins inhabituelle. Il est tout à fait normal de répondre favorablement aux demandes de suspension, mais les conditions dans lesquelles celle-ci vient d’être accordée n’honorent pas notre assemblée. Encore une fois, la séance doit être organisée de façon impartiale, et c’est pourquoi nous aurions dû nous prononcer sur les amendements avant de suspendre nos travaux. Si vous visionnez la séance, vous verrez, monsieur le président, que les choses se sont passées dans l’ordre que j’ai indiqué.
Je n’évoquerai pas ce qui vient de se passer, mais je voudrais revenir sur le fond des amendements.
Madame la ministre, à la suite de la pression exercée par les médecins, vous avez fait adopter en commission des amendements tendant à réécrire la partie du texte relatif au fameux « service territorial de santé ». Dès lors, une question simple se pose, une question de fond : les patients auront-ils, demain, la liberté de choisir leur médecin, qu’il soit généraliste ou spécialiste ?
Monsieur le député, je vais vous le dire clairement et simplement : la réponse est oui ! Comme je vous l’ai déjà indiqué près d’une dizaine de fois, les professionnels de santé auront la liberté d’installation et le choix de leurs conditions d’exercice. Quant aux patients, ils auront la liberté de choisir leur professionnel de santé. Tout cela est inscrit à l’article 38 du projet de loi, en complément de ce qui existe déjà dans le code.
Je n’avais pas l’intention de prendre la parole sur cet article, monsieur le député, mais votre question m’incite à vous apporter un certain nombre de précisions.
L’article 12, ainsi que le suivant, l’article 12 bis, sont sans doute parmi les plus importants de ce texte. L’article 12 a été réécrit largement à la suite d’une concertation menée auprès des professionnels de santé. On ne peut pas, d’un côté, affirmer que la concertation n’a pas été suffisante, et de l’autre regretter qu’elle ait abouti à une nouvelle rédaction.
Hier soir, M. Door a admis que cet article semblait recueillir l’adhésion d’une très large majorité : je me réjouis de l’honnêteté dont il a fait preuve. De quoi s’agit-il, mesdames et messieurs les députés ? Cet article, qui, contrairement à certains de ceux que nous avons déjà examinés ou que nous examinerons prochainement, n’a que peu de retentissement médiatique, est pourtant celui qui définit le cadre dans lequel les professionnels de santé exerceront dans les années à venir.
Il existe aujourd’hui un consensus sur le fait que notre système de santé est trop centré sur l’hôpital. Pendant les décennies qui ont suivi l’adoption des grandes ordonnances de 1958 qui ont réformé l’hospitalisation, la santé et la médecine, cette particularité était une force. Mais comme on s’en aperçoit aujourd’hui, l’hôpital, qui a avant tout pour mission de soigner des malades souffrant ponctuellement de maladies aiguës, est mal adapté à la prise en charge dans la durée de patients vieillissants ou souffrant de maladies chroniques. Nous avons donc besoin de réorienter notre système de santé en prenant le virage ambulatoire, c’est-à-dire en donnant la priorité aux professionnels de proximité.
Tel est le sens de la modernisation de notre système de santé. Pour lutter contre les inégalités en matière de santé et d’accès aux soins, nous avons besoin à la fois de renforcer la prévention, ce que nous faisons dans le titre Ier, et de garantir, dans les territoires, un accès de proximité aux professionnels de santé.
L’article 12 traduisait cette volonté de faire évoluer les pratiques et l’organisation des soins. Mais les professionnels de santé y ont vu un risque d’étatisation du système. Même si tel n’était pas l’objectif du projet de loi, j’ai entendu leur inquiétude et fait en sorte que la concertation aboutisse à une nouvelle rédaction largement acceptée. Je me réjouis de la convergence à laquelle nous sommes parvenus.
Concrètement, de quoi s’agit-il ?
Tout d’abord, de la reconnaissance du rôle essentiel du médecin généraliste. À cet égard, l’article reprend une série de propositions contenues dans le rapport du professeur Druais sur la place de la médecine générale.
Cet article a été structuré à partir d’un chapitre intitulé « Promouvoir les soins primaires et favoriser la structuration des parcours de santé ». Ayant identifié la nécessité d’une coordination entre les professionnels de santé, nous avons prévu la mise en place, autour du médecin généraliste, d’équipes de soins primaires, constituées – j’insiste sur ce point – à l’initiative des professionnels. Les agences régionales de santé contractualiseront avec elles, et, au cas où les professionnels ne s’organiseraient pas spontanément, elles interviendront afin de favoriser l’émergence de telles équipes.
Enfin, les équipes de soins primaires s’inscriront au sein de communautés professionnelles territoriales de santé avec les professionnels de second recours, les acteurs sociaux et médico-sociaux, la protection maternelle et infantile – PMI –, etc.
Nous allons ainsi créer un cadre attractif pour les professionnels libéraux et lutter contre la désertification médicale en inscrivant dans la loi, à l’article 12 bis, le pacte de « territoire de santé ». Tous ces instruments, qui reposeront sur les équipes de soins primaires, permettront d’améliorer le maillage territorial de santé.
Je sais que certains souhaitent que l’on précise le rôle de la médecine libérale spécialisée. Pour ma part, je ne vois pas d’obstacle à la valorisation de la contribution de ces médecins de second recours ni à la formulation de leurs missions par le travail parlementaire.
Il s’agit en somme, mesdames et messieurs, d’un article structurant qui engage notre pays dans la voie du virage ambulatoire, c’est-à-dire d’une médecine s’appuyant sur les médecins de proximité, les équipes de soins primaires et la coopération entre les professionnels de santé. Cette partie du texte mérite que l’on s’y attarde un peu car elle fixera le cap de notre système de santé pour les années à venir. J’émets à nouveau un avis défavorable aux amendements présentés, car les principes dont leurs auteurs souhaitent l’inscription dans le projet de loi y sont déjà réaffirmés, comme j’ai d’ailleurs eu l’occasion de le dire à de nombreuses reprises aux professionnels, jeunes et moins jeunes.
Nous avons été très surpris par la façon dont la séance a débuté, monsieur le président.
Comme l’a dit Mme la ministre, il s’agit d’un article très important pour l’avenir de la médecine. Hier soir, j’ai en effet reconnu qu’après tous les atermoiements et les obstacles auxquels nous avons été confrontés pendant des semaines et des semaines, nous parvenions probablement à suivre un bon cap. Néanmoins, le groupe UMP a déposé deux amendements nos 509 et 1538 que vous n’avez pas appelés car vous avez commencé la séance trop vite, monsieur le président. Or nous souhaitons les défendre. L’amendement de Mme Orliac que vous avez appelé puis envisagé de mettre aux voix avant de suspendre la séance est certes identique, mais il est présenté par un autre groupe. Je tiens à dire que nous défendons les amendements nos 509 et 1538 , identiques à celui présenté par Mme Orliac.
L’amendement no 1538 a été défendu par M. Tardy qui se trouvait dans l’hémicycle tout à l’heure, cher collègue. Je reconnais sans fard avoir commis une erreur, car je n’ai pas vu Mme la députée Pinville demander une suspension de séance avant la mise aux voix. Dès que je l’ai vue, j’ai interrompu le processus. Dans un débat de fond, il arrive à chacun de commettre des erreurs de forme, ce que j’assume pleinement. Nous aurons tous l’occasion de nous compter à l’issue des débats. Je tâche, chers collègues de l’UMP, de laisser les uns et les autres s’exprimer sans me limiter à un seul intervenant pour et un autre contre, comme cela devrait être le cas. C’est soucieux du débat et de la libre expression que je vous ai donné à chacun la parole, d’abord à vous, monsieur Door, et après vous à M. Accoyer.
La parole est donc à M. Bernard Accoyer.
La nouvelle rédaction de l’article 12 est issue d’un amendement gouvernemental déposé au dernier moment et adopté en commission. Il comporte un certain nombre de dispositions qui représentent une évolution positive par rapport à la version précédente. Mais ne conviendrait-il pas, dans ce cas, de réécrire l’article 1er du présent projet de loi ?
En effet, ses alinéas 26 et 27 n’ont pas été modifiés, eux, et comportent tous les ingrédients d’une étatisation. Si vous abandonnez tout projet d’étatisation, madame la ministre, il faut réécrire l’alinéa 26 de l’article 1er évoquant « les objectifs définis par l’État et déclinés par les agences régionales de santé visant à garantir la continuité, la coordination et la qualité des soins offerts aux assurés ainsi qu’une répartition territoriale homogène de l’offre de services, de prévention et de soins ». Une telle rédaction met évidemment à mal la liberté d’installation et celle de l’alinéa 27 également. Ne conviendrait-il donc pas de réécrire en partie l’article 1er, si véritablement il ne s’agit pas d’un double langage ?
Je serai bref, car Lionel Tardy a en effet défendu l’amendement no 1538 . Vos déclarations, madame la ministre, vont plutôt dans le bon sens et rassurent les médecins, mais si Mme Orliac et l’UMP se rejoignent sur ce point, c’est aussi parce que l’inquiétude des médecins n’est pas complètement éteinte. Le texte comporte des dispositions très étranges, comme recommander aux gens de boire de l’eau car c’est bon pour la santé. Vous pourriez donc adresser aux médecins un petit message d’amour et une preuve forte de votre engagement en acceptant l’amendement suggéré par eux !
Honnêtement, nous avons adopté des amendements bien moins utiles. On ne peut pas dire que nous soyons très bavards. En l’occurrence, évoquer le respect du principe de libre choix du médecin constituerait aux yeux des professionnels une avancée et un message sympathique. On ne voit pas vraiment pourquoi vous vous arc-boutez et refusez un amendement finalement très consensuel !
Arrivée rapidement, je n’ai pas vraiment pu défendre mon amendement. J’insiste donc à nouveau. Je suis quelque peu rassurée par les paroles de Mme la ministre. Nous avons en effet demandé que l’article 1er mentionne le libre choix des professionnels de santé. Je note qu’il le sera plus tard, à l’article 38, dont j’attends donc l’examen.
Je vous remercie des propos que vous avez tenus, madame la ministre, car les articles 12 et 12 bis sont en effet deux articles structurants du projet de loi. Les médecins conserveront donc leur pleine liberté d’installation, il me semble important d’insister sur ce point, et les patients de leur côté conserveront la pleine liberté de choix de leur médecin. J’aimerais néanmoins obtenir une précision à mes yeux essentielle : cette liberté s’applique-t-elle à l’ensemble des professionnels de santé, en particulier aux infirmiers libéraux qui parfois instaurent une très grande confiance avec les malades ? Il me semble essentiel qu’ils soient également concernés par ces deux articles.
Il propose de substituer au mot « constitué » le mot « coordonné » qui est bien plus fort. Aucune ambiguïté ne doit subsister au sujet du libre choix par le patient de son médecin et des autres professionnels de santé auquel il entend se confier. La notion de coordination est cohérente avec l’amendement AS 1505 à l’article 30 présenté par le Gouvernement en commission des affaires sociales et conforme aux missions du médecin de premier recours, en particulier du médecin traitant, telles qu’elles sont définies par la loi.
La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement no 2423 .
La commission a repoussé cette proposition. D’après sa définition, le verbe constituer signifie « créer un tout, un ensemble, le composer en en rassemblant les divers éléments ». Tel est bien notre état d’esprit. C’est d’ailleurs le terme retenu dans un amendement relatif à la constitution des équipes de proximité dont vous êtes le premier signataire, monsieur Tian.
Avis défavorable.
Comme vous l’avez remarqué, madame la ministre, nous reconnaissons les points positifs et les avancées. Vous avez néanmoins évoqué, d’après ce que j’ai cru comprendre, un maillon manquant dans la chaîne, celui des médecins spécialistes. Il faudra donc élaborer, dans le même esprit, un nouveau dispositif de libre choix des médecins dont vous n’avez pas précisé les modalités.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 225 .
L’amendement no 225 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il faut redonner de l’espérance aux étudiants en médecine afin qu’ils se dirigent surtout vers la médecine générale. Récemment, sous la pression des professionnels qui ont manifesté en nombre le 15 mars dernier, vous avez dû, madame la ministre, proposer une réécriture globale de cette partie du projet de loi par le biais de plusieurs amendements adoptés en commission. Il était en effet indispensable de supprimer la notion de service territorial de santé au public qui induisait trop l’institution d’une organisation quasi administrative sous la coupe des agences régionales de santé.
La nouvelle rédaction, comme vous l’avez dit tout à l’heure en détaillant le dispositif prévu par l’article 12 bis, confirme le rôle des médecins libéraux de premier recours, grâce à la constitution d’équipes de soins primaires et à la création de communautés professionnelles territoriales de santé – laissées pour l’essentiel à l’initiative des professionnels au lieu d’être sous la coupe des agences régionales de santé.
Un troisième dispositif pourrait être envisagé sous forme d’équipes de soin de proximité constituées d’une ou plusieurs équipes de soins primaires et de professionnels de santé de premier et second recours. L’équipe de soins de spécialistes de second recours interviendrait à la demande du médecin traitant tout en respectant bien entendu le principe d’accès direct à certaines spécialités comme la gynécologie et l’ophtalmologie. Tel est le sens de cet amendement.
La parole est à M. Gérard Bapt, pour soutenir l’amendement no 420 rectifié .
Il vise à mettre en exergue la notion de communauté professionnelle territoriale de santé sans oublier les praticiens de second recours. Je soutiens cet amendement car Mme la ministre a dit tout à l’heure qu’il s’agit d’un point ayant toute son attention et qu’on continuera à y travailler.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 736 .
Cet amendement, comme l’a bien expliqué Jean-Pierre Door, vise à apporter une précision à la nouvelle rédaction de l’article 12 introduite par le Gouvernement afin d’effacer les traces les plus visibles de son intention d’étatisation, ce qui explique la suppression de la dénomination « service territorial de santé ». Mais comme la rédaction initiale de l’article 1er et le tiers-payant généralisé prévu un peu plus loin dans le texte demeurent, la volonté d’étatisation est toujours là.
Il est donc indispensable de préciser qu’outre les médecins de premier recours, il y a aussi les médecins de second recours. Nous entendons rester vigilants sur la liberté d’installation des uns et des autres, et surtout dénoncer votre volonté d’étatisation du système de soins.
La parole est à M. Fernand Siré, pour soutenir l’amendement identique no 981 .
Dans mon département, il y a déjà trois groupes de professionnels de santé libéraux, qui se sont eux-mêmes associés avec les cliniques, les hôpitaux et les différentes structures, maisons de retraite et services de soins à domicile. Des gens qui se sont organisés eux-mêmes refuseront toujours de se voir imposer un système auquel ils sont pourtant préparés : si vous aviez dialogué avec les professionnels de santé et les médecins, vous ne seriez pas obligés de voter des textes pour les contraindre alors même qu’ils sont tout disposés à agir, pour peu que l’on soit avec eux et non contre eux.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement identique no 415 .
Le dispositif que vous avez imaginé doit à tout le moins être complété, madame la ministre. J’évoque dans cet amendement la question de la médecine libérale de proximité et des spécialistes. En effet, ces derniers ont été oubliés. Pour qu’ils soient pris en compte dans la réforme, un troisième dispositif doit être envisagé autour d’équipes de soins de proximité constituées autour d’une ou plusieurs équipes de soins primaires et de professionnels de santé assurant des soins de premier et deuxième recours.
La parole est à M. Élie Aboud, pour soutenir l’amendement identique no 1075 .
Dans cette phase d’incompréhensions et de tensions avec les médecins, en particulier sur le tiers payant, les articles 12 et 12 bis sont – vous me permettrez cette métaphore – un cachet d’aspirine destiné à soulager la douleur. Je ne parlerai pas du motilium, puisqu’il semblerait qu’il puisse être à l’origine de morts subites.
Nous sommes aujourd’hui satisfaits. Il reste néanmoins une réponse à apporter, et dans le détail, sur les groupements et communautés de deuxième recours.
La commission a repoussé ces amendements pour deux raisons principales. Tout d’abord, elle a considéré que le dispositif issu de l’amendement déposé par le Gouvernement en commission avait été négocié avec les professionnels de santé. Ensuite, les médecins spécialistes n’ont pas été oubliés : ils ont vocation à être partie intégrante des communautés professionnelles territoriales de santé, à l’instar d’autres professionnels de santé. J’invite donc les auteurs de ces amendements à les retirer, faute de quoi l’avis sera défavorable.
Je donne également un avis défavorable à ces amendements, mais je souhaite préciser la portée de ce que j’ai indiqué tout à l’heure et la démarche qui est la mienne. Notre système de santé, tel qu’il se réorganise dans ce texte, se constitue autour du médecin généraliste et des équipes de soins primaires. Ces équipes de soins primaires travaillent avec des spécialistes et des professionnels sociaux et médico-sociaux – la PMI par exemple – dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé. Les professionnels de santé libéraux de deuxième recours – spécialistes – sont donc identifiés dans le texte. Il n’y a pas de chaînon manquant, monsieur Aboud. Je n’ai pas voulu dire que l’architecture devait être reprise. En revanche, je comprends parfaitement qu’il y ait besoin de mieux préciser ce qu’est un médecin spécialiste libéral et quel est son rôle dans cette organisation. Tout cela figure dans le code de la santé, mais cette définition a sans doute vieilli.
C’est à ce travail d’écriture que je vous propose d’oeuvrer ensemble d’ici l’examen du texte au Sénat. Il ne s’agit pas de refaire une architecture – nous n’avons pas besoin d’un millefeuille sanitaire, d’un empilement de structures. Nous avons les équipes de soins primaires, les communautés professionnelles territoriales de santé. Reste à définir précisément, dans ces structures-là, le rôle et la spécificité de chacun. Je comprends que les spécialistes souhaitent voir leur rôle et leur spécificité mieux précisés. Mais ce n’est pas ce que font ces amendements, qui proposent une autre architecture – d’où mon avis défavorable.
La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou, pour soutenir l’amendement no 2184 .
Permettez-moi de saluer à mon tour la belle négociation que vous avez su conduire avec les professionnels de santé, madame la ministre.
Parmi les missions qui seront confiées aux équipes de soins primaires figurent non seulement l’amélioration de l’état de santé des patients dans un territoire, mais aussi la prévention. C’est ce mot que je souhaitais insérer à la seconde phrase de l’alinéa 4 de l’article 12, après le mot « acteurs ».
Cet amendement nous semble pertinent. Il apporte une précision bienvenue. En outre, il est cohérent avec le rôle du médecin généraliste de premier recours, qui assure une mission de prévention auprès de ses patients, comme le prévoient les textes. Avis favorable.
L’amendement no 2184 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 12, amendé, est adopté.
Article 12
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement no 226 .
L’amendement no 226 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement répond à l’ardente nécessité de définir des équipes de soins de proximité afin que la place de la médecine libérale spécialisée soit sauvegardée, même si les incohérences, les incompatibilités ou les contradictions entre l’article 1er et la nouvelle rédaction de l’article 12, ainsi que le tiers payant généralisé, empêchent de changer l’esprit même du texte.
La parole est à M. Élie Aboud, pour soutenir l’amendement identique no 984 .
Il s’agit de créer un troisième dispositif autour d’équipes de soins de proximité constituées autour d’une ou plusieurs équipes de soins primaires et de professionnels de santé assurant des soins de premier et de deuxième recours. Cette disposition est indispensable pour donner toute sa place à la médecine libérale de proximité et y inclure les spécialistes.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement identique no 247 .
Cet amendement est identique à celui que j’ai défendu à l’article 12. Pouvez-vous nous préciser les raisons qui vous conduisent à ne pas inclure les médecins spécialistes dans le dispositif que vous proposez, madame la ministre ? Vous avez évoqué des négociations, des discussions avec les uns et les autres. Je souhaite que vous apportiez une réponse précise à la représentation nationale. Les médecins spécialistes incarnent eux aussi la médecine libérale de proximité !
La commission a repoussé ces amendements, pour les raisons que j’ai déjà évoquées. Une négociation a en effet eu lieu sur l’article 12, qui a été réécrit. C’est une première raison pour rejeter ces amendements, encore que rien n’interdise au Parlement d’enrichir le texte de l’article. Quoi qu’il en soit, la commission a considéré que la rédaction qui nous est proposée était issue d’une négociation. Par ailleurs, les médecins spécialistes n’ont pas été oubliés : ils font partie intégrante du dispositif des communautés professionnelles territoriales de santé. Aussi vous inviterai-je à repousser ces amendements.
Même avis. Je précise que ce n’est pas une négociation qui a été conduite avec les professionnels, mais une concertation.
Je veux le redire, monsieur Lefebvre : les médecins libéraux spécialistes – de second recours – sont inscrits dans le projet de loi, dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé. Ils sont explicitement mentionnés. On ne peut donc pas dire qu’ils ne figurent pas dans le texte. J’ai indiqué que j’étais disposée à ce que leurs spécificités soient précisées, mais point n’est besoin d’une autre architecture comme vous le proposez.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 961 .
Il s’agit d’un amendement de clarification. Le terme « le cas échéant » pouvait laisser supposer que des acteurs pourraient ne pas être associés aux communautés professionnelles territoriales de santé. Nous souhaitons rassurer sur ce point.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1687 .
Cet amendement vise à préciser que les services de la PMI et les services de santé scolaire participent aux communautés professionnelles territoriales de santé. Nous savons tous quel concours ils apportent à la lutte contre les inégalités.
Beaucoup de nos collègues ont été sensibles à la nécessité de tenir compte de la PMI, et je puis vous assurer que c’est le cas de votre rapporteure. Néanmoins, le terme « professionnels de santé » est suffisamment large pour couvrir les personnels de la PMI et les services de l’éducation nationale. Les services de la PMI ont d’ailleurs vocation à intégrer le conseil territorial de santé, qui participe à l’élaboration du diagnostic territorial, comme nous le verrons à l’article 38. Aussi vous inviterai-je à retirer cet amendement.
Je comprends votre préoccupation, monsieur Potier, mais elle est satisfaite par le texte : les professionnels de la PMI sont des professionnels de premier recours. J’ajoute que si l’on commence à énumérer certains professionnels, on s’interrogera immanquablement sur ceux qui ne figurent pas sur la liste. Au bénéfice de ces explications, je vous invite à mon tour à retirer l’amendement.
L’amendement no 1687 est retiré.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 2074 .
Toujours dans le cadre de la constitution des communautés professionnelles territoriales de santé, cet amendement propose d’ajouter aux acteurs du soin et des acteurs sociaux et médico-sociaux la présence des acteurs locaux de la prévention et de la promotion de la santé, de manière à ce que la loi soit la plus complète possible à l’égard des territoires. Sont visées notamment les associations qui mettent en oeuvre des actions de prévention et les ateliers santé ville, qui engagent des démarches de santé participative, en particulier dans les quartiers les plus populaires. Il me semblait important que la dimension de la prévention et de la promotion de la santé puisse, en tant que telle, être mentionnée dans les dispositions relatives à la constitution des communautés professionnelles.
Pour les raisons que j’ai évoquées tout à l’heure, la commission a repoussé cet amendement. Le champ de l’article 12 bis est suffisamment large pour inclure les acteurs de la prévention et de la promotion de la santé. Comme l’a dit Mme la ministre, le risque d’un inventaire est toujours d’oublier quelque chose. Aussi, la rédaction actuelle permet-elle d’inclure les professionnels comme les acteurs de la prévention et de la promotion de la santé.
Par ailleurs, je rappelle que l’examen de l’article 38 nous permettra de constater, tout à l’heure, que ces acteurs joueront un rôle dans le cadre des conseils territoriaux de santé.
Je vous invite donc, madame la députée, à retirer votre amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Même avis. C’est exactement la même démarche, avec d’autres types de professionnels qui, par définition, font partie – du moins s’ils le souhaitent – de ces communautés professionnelles territoriales de santé. On ne peut se livrer à une énumération exhaustive des professionnels appelés à y participer. Aussi, madame la députée, je vous demande, au bénéfice de ces explications, de retirer votre amendement.
L’amendement no 2074 est retiré.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 464 .
Madame la ministre, on a bien compris que vous ne vouliez pas toucher à l’architecture d’ensemble. Vous dites que, dans le cadre de la procédure législative, le rôle des spécialistes sera reconnu par la suite, soit au Sénat, soit lors de la réunion de la commission mixte paritaire. C’est du moins ce que j’ai compris. Peut-on dès lors demander à nos collègues sénateurs d’apporter cette précision, ou est-ce vous qui allez réécrire tout cela avant la CMP ?
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1520 .
Cet amendement a pour objet de compléter le diagnostic par une évaluation des besoins de santé de la population.
La commission a repoussé ces amendements, tout simplement parce qu’ils sont satisfaits. L’alinéa 48 de l’article 38, qui a été adopté par la commission, précise bien que le « diagnostic territorial partagé a pour objet de caractériser les besoins sanitaires, sociaux et médico-sociaux de la population en s’appuyant sur des données d’observation. » Je vous invite donc à retirer ces amendements.
Pour les mêmes raisons, je demande également le retrait de ces amendements ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable. Le Gouvernement va travailler de son côté, mais, monsieur le député, il ne m’appartient pas d’empêcher le travail parlementaire. Les sénateurs s’engageront dans la voie qui leur paraît la plus adaptée et le Gouvernement, de son côté, poursuit le travail qui lui revient.
Serez-vous d’accord avec la proposition du Sénat, telle est la question !
Monsieur le député, je ne donne jamais mon accord avant d’avoir vu : il faut voir pour croire et se prononcer.
J’ai pris des engagements mais je ne signe pas de chèque en blanc.
Il s’agit, par cet amendement, de vous proposer d’ajouter, à l’alinéa 11, après la deuxième occurrence du mot « santé », les mots : « et les représentants des centres de santé ». En effet, les centres de santé ont une expérience en matière d’accès aux soins et d’organisation des parcours. Cet amendement prévoit de les associer à la concertation organisée par les ARS.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 1402 .
Je me félicite de cette proposition de notre rapporteure, que je défends également. Elle a pour objet d’associer les centres de santé à tous les niveaux de constitution des communautés professionnelles territoriales de santé. Ces centres abritent en effet des équipes de soins primaires qui ont une très grande expérience et qui constituent souvent le seul recours aux soins dans certains territoires et pour certaines populations.
Il est donc important qu’ils soient intégrés aux communautés professionnelles territoriales de santé, comme le prévoit l’alinéa 8 de cet article. Mais, dans le cas où il reviendrait à l’ARS de définir elle-même la constitution d’une communauté professionnelle territoriale de santé – objet de l’alinéa 11 – il n’est pas prévu que les représentants des centres de santé soient consultés au même titre que les unions régionales des professionnels de santé.
Cet amendement vise donc à ouvrir la consultation aux représentants des centres de santé, et donc à corriger ce que je crois pouvoir qualifier d’oubli.
Avis favorable. Les centres de santé sont évidemment des acteurs de territoire importants. Le dispositif en question vise à prévoir une concertation dans le cas où n’émergent pas de façon spontanée des coopérations entre les professionnels de santé, autrement dit lorsque ne se mettent pas en place des communautés professionnelles territoriales de santé. Dans ce cas, l’agence régionale de santé, constatant qu’il n’y a pas de coopération ancrée dans un territoire donné, assume la tâche des unions régionales des professionnels de santé – les URPS, représentants des professionnels libéraux – pour contribuer à faire émerger ces coopérations. Je trouve légitime, madame la rapporteure, madame Fraysse, que vous souhaitiez que, dans le cadre de ce dialogue, la place des centres de santé soit identifiée.
Madame la ministre, j’observe que vous émettez un avis favorable, alors que vous savez très bien que tous les centres de santé, qui sont une émanation de la politique conduite par le ministre communiste Jack Ralite, au début des années quatre-vingt,…
Vous savez très bien qu’en ajoutant toujours de nouvelles couches, sans réformer ce qui ne marche pas, vous coulez l’assurance maladie. Je trouve donc que votre avis est assez irresponsable. Vous l’assumerez devant la profession médicale, dont vous savez très bien ce qu’elle pense des centres de santé. Alors qu’il faudrait promouvoir les maisons médicales pluridisciplinaires en leur affectant des moyens,…
…vous tournez le dos à ce modèle. Et en voulant arroser vos amis politiques, vous coulez l’assurance maladie.
Applaudissements sur plusieurs bancs de l’UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2364 .
Avec ce texte de loi, la médecine libérale pourra travailler collectivement et constituer une communauté professionnelle territoriale, avec des équipes de soins primaires, centrée autour du médecin généraliste. Il faudra peut-être nous préciser, madame la ministre, de quelle manière les spécialistes de premier recours y seront associés.
Cet amendement a pour objet de prévoir la consultation des instances ordinales concernées lorsque l’ARS constatera l’absence d’initiative des professionnels pour constituer une communauté professionnelle territoriale.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
On a déjà eu ce débat, mais je veux bien réexpliquer les raisons de cet avis.
Les unions régionales des professionnels de santé, réunies dans une fédération nationale, participent à l’élaboration de l’offre de santé et regroupent l’ensemble des professionnels de santé. Or la mise en place des communautés professionnelles, on l’a dit et réaffirmé, relève de l’initiative des professionnels eux-mêmes. Il nous semble donc plus logique de les associer, en cas de carence, via les URPS, plutôt que par l’intermédiaire des instances ordinales. C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable, que je vous confirme.
Même avis.
L’amendement de notre collègue Orliac est excellent et devrait être soutenu, car les professions médicales et paramédicales sont soumises à une déontologie et doivent garder leur indépendance vis-à-vis de l’administration, qu’elle soit d’État ou décentralisée. Il est important que cette déontologie soit respectée et défendue. Par conséquent, je pense que la majorité de nos collègues va voter cet excellent amendement, qui mériterait d’être adopté.
L’amendement no 2364 n’est pas adopté.
Madame la ministre, vous le savez, il faut donner confiance aux jeunes étudiants qui, sortant de faculté, se demanderont où ils exerceront. Une inquiétude était perceptible du fait d’une certaine étatisation, dès l’instant où l’on avait parlé de conférer du pouvoir aux ARS. Il est vrai que vous êtes revenue sur cette idée. Vous l’avez d’ailleurs réaffirmé, mais il est préférable de le voir écrit. Vous avez dit vous-même : il faut voir pour croire. Il est donc indispensable de réaffirmer de manière ferme le respect de la liberté d’installation.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 219 .
Je ne saurais mieux m’exprimer que M. Door, aussi cet amendement est-il défendu.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 248 .
Sourires.
Le Gouvernement va certainement se montrer ouvert à cet amendement et réaffirmer la liberté d’installation, à moins que telle ne soit pas sa volonté.
Ce serait une disposition utile de nature à rassurer les médecins et l’ensemble de nos compatriotes. S’il y a bien, en effet, un principe de notre médecine dont les Français attendent le respect, c’est celui de la liberté d’installation et de la médecine libérale. Comme l’un ne va pas sans l’autre, il serait utile, madame la ministre, que vous acceptiez ces amendements.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 385 .
Madame la ministre, nous avons besoin de clarté. Nous avons déjà eu cet échange devant la commission des affaires sociales. Chacun le sait ici, la question de la liberté d’installation est extrêmement sensible. Jean-Pierre Door, comme Frédéric Lefebvre, viennent de l’évoquer à nouveau. En commission, vous vous étiez montrée ouverte à l’idée qu’à l’article 38 – je parle de mémoire – cette liberté d’installation soit réaffirmée. Nous pensons qu’elle doit l’être aussi ici. Au moment où vous souhaitez structurer ces communautés territoriales, vous affirmez à la fois, au début de l’article, que vous vous basez sur le volontariat, puis vous ajoutez, à la fin de l’article, qu’à défaut de volontariat sera créée la communauté.
Cela se fera en réalité de manière hiérarchisée, autoritaire, par décision de l’ARS. Pour notre part, nous souhaitons que soit inscrit expressis verbis, de manière la plus claire, la plus transparente, la plus nette possible, que ces communautés doivent toujours être fondées sur le volontariat, et donc sur le respect de la liberté d’installation. Pour le dire autrement, madame la ministre, nous pensons que l’on ne peut pas faire boire un âne qui n’a pas soif. On ne peut contraindre des professionnels à s’installer dans un endroit s’ils ne le souhaitent pas, on ne peut pas leur imposer de travailler ensemble, on doit respecter leur liberté.
Madame la ministre, en France, le patient et le médecin sont encore libres : le patient a la liberté de choisir son professionnel de santé, et le médecin dispose de la liberté d’installation. Or, je vous le répète, vous vous inspirez du premier ministre de Sa Majesté, Harold Wilson qui, dans les années soixante, a détruit la médecine anglaise en la sectorisant, c’est-à-dire en ôtant au patient sa liberté de choix d’un praticien, qu’il soit chirurgien ou médecin.
Il germe en France dans les esprits de responsables politiques non seulement de droite mais aussi de gauche, malheureusement,…
…l’idée selon laquelle le problème de la démographie médicale pourrait être résolu en imposant aux jeunes médecins un lieu d’installation. On a tenté d’appliquer cette solution voilà quelques années, en particulier dans le sud de la France ; l’expérience s’est terminée par des effusions de sang et des meurtres pour les lits de clinique.
En effet, obliger les médecins à s’installer dans des zones, disons-le, moins peuplées et parfois moins rentables pour ces derniers va faire monter le prix des cabinets situés dans les territoires ensoleillés, proches de la mer et des populations consommatrices de soins.
Par conséquent, les jeunes gens qui commenceront dans la vie sans capital n’auront pas de réelle liberté d’installation. Vous créez donc les conditions de la destruction de la médecine libérale à terme.
Avant tout par respect pour les patients, dont l’intérêt est de bénéficier d’une médecine de qualité et de jouir de la liberté de choix du praticien qui les recevra, et afin de respecter la liberté des étudiants des professions médicales et paramédicales qui nous écoutent, nous vous demandons simplement, madame la ministre, de faire en sorte que la liberté d’installation, principe fondamental et noble de la médecine française, soit défendue. À défaut, vous vous dirigerez vers un système de soins à deux vitesses, avec des médecins étrangers salariés des présidents de conseil général qui ne s’installeront que provisoirement avant de rejoindre des pays plus « porteurs », et une disparition à terme de la médecine française.
C’est pourquoi nous vous prions d’accepter nos amendements, madame la ministre.
La commission a repoussé ces amendements.
Nous avons eu ce débat en commission. Ainsi que je l’ai rappelé voilà quelques instants, la liberté de choix est très clairement inscrite dans les textes est n’est nullement remise en cause par le projet de loi.
Concernant la liberté d’installation, ceux d’entre vous qui siègent à la commission des affaires sociales savent que l’alinéa 13 de l’article 38, dans la rédaction issue du débat en commission, précise que le schéma régional de santé indique, dans le respect de la liberté d’installation, les besoins en implantations pour l’exercice des soins de premier et de second recours.
Permettez-moi simplement de faire une remarque qui ne relève pas directement de mon rôle de rapporteure, monsieur le président. Comme certains d’entre vous le savent, le Premier ministre a confié à Mme Annie Genevard et à moi-même une mission sur la loi montagne. À ma grande surprise, parmi les députés que nous avons entendus en particulier sur les déserts médicaux dans les zones de montagne, ceux qui ont proposé de forcer des médecins à s’installer en montagne sont issus des rangs de l’opposition.
J’ai d’ailleurs répondu de la manière la plus claire que je ne ferais pas cette proposition.
Bien que je sois personnellement très favorable à l’incitation, je ne ferai pas cette proposition parce qu’elle ne me semble pas relever de la culture de notre pays et n’est pas cohérente avec les textes en vigueur.
Défavorable.
Si tout le monde ne siège pas à la commission des affaires sociales, madame la rapporteure,…
…chacun dans cet hémicycle a le droit de travailler sur ce texte. Je dirai même que toute personne concernée par ce projet de loi relatif à la santé peut le faire, et a le droit de savoir.
Mme la ministre affirmait qu’elle ne pouvait pas signer un chèque en blanc et ne voulait croire que ce qui était écrit. Pour ma part, je suis dans la confusion la plus totale,…
… et je pense qu’il en va de même pour tous ceux qui nous écoutent. Il est question à l’article 1er d’une répartition territoriale homogène, ce qui est un peu troublant. C’est donc qu’il y a probablement un loup. L’article 12, quant à lui, dit tout autre chose, en laissant croire que l’article 38 introduira des éléments encore différents. En d’autres termes, les articles 1er, 12 et 38 abordent le même sujet avec des termes différents.
Pensez-vous que l’avenir des futurs médecins qui devront s’installer est stable et que ces derniers peuvent croire des parlementaires travaillant sur un projet de loi présentant de telles incohérences, ou du moins de telles divergences sur un même sujet ?
Je rends grâce, entre la pâque catholique et avant la pâque orthodoxe, puisque j’ai entendu parler de Moscou tout à l’heure, à Mme la rapporteure, mais le fait d’insérer les mots que nous proposons dans ces amendements identiques ne porterait aucun préjudice au texte.
Malheureusement, et vous l’avez dit, l’idéologie dominante porte des députés de tous les rangs de cet hémicycle à croire qu’en obligeant les jeunes médecins à s’installer dans les zones les moins dotées ils résoudront le problème. Une telle mesure tendrait au contraire à décourager les vocations, à dévaloriser les professions médicales et l’acte médical. Finalement, c’est le patient qui fera les frais de cette politique autoritaire.
Par conséquent, madame la ministre, madame la rapporteure, si vous êtes de bonne foi, vous n’avez aucune raison de ne pas accepter ces amendements.
Ils ne déstructurent pas votre texte et n’en altèrent pas la cohérence.
Je ne voudrais pas prolonger inutilement les débats, mais la question de la liberté d’installation est fondamentale, en particulier, Mme la rapporteure l’a évoqué, dans les zones de montagne, où la désertification médicale pose des problèmes à la population permanente. Dans les stations, notamment, la présence des médecins est indispensable et permet à l’assurance maladie et aux assurances en général de réaliser des économies considérables.
Mme la ministre entend appliquer en montagne le même dispositif qu’ailleurs, avec une prise en charge générale et des honoraires fixes qui viendront d’ailleurs peser sur les dépenses de l’assurance maladie. Dans ces zones, il faudrait au contraire permettre des suppléments d’honoraires, qui seraient tout à fait acceptés et acceptables. Ils sont d’ailleurs généralement couverts par les assurances complémentaires pour la médecine très particulière des stations, dont la crise actuelle ne sera pas résolue par les propositions que vous présentez comme des avancées mais qui n’en sont pas.
Madame la ministre, je ne comprends pas pourquoi vous n’êtes pas favorable à ces amendements, qui sont parfaitement cohérents avec votre texte, voire l’améliorent.
Aux termes de l’article 38, qui a bien été lu, madame la rapporteure, y compris par les députés qui ne sont pas membres de la commission des affaires sociales, le schéma régional de santé indique, dans le respect de la liberté d’installation, les besoins en implantations. Nous souhaitons pour notre part que la liberté d’installation soit également respectée pour les communautés professionnelles territoriales de santé prévues à l’article 12 bis.
Ce n’est pas du tout incompatible avec l’article 38 ; c’est au contraire pleinement cohérent, et même nécessaire, pour bien marquer que vous n’agissez pas de manière autoritaire et bureaucratique au sein de ces communautés mais que vous essayez de construire des coordinations avec les professionnels en respectant leur liberté d’installation. Vous devriez donc donner un avis favorable à ces amendements, ou à tout le moins vous en remettre à la sagesse de l’Assemblée.
Je ne voudrais pas que l’on se méprenne sur mon propos. J’ai simplement souligné que l’article 38 avait été modifié en commission des affaires sociales, et je vous donne acte du fait que vous n’en faites pas partie, madame Greff. Le rapport peut toutefois être consulté par tous. L’article 38 ne présente aucune incohérence, et les propos tenus par Mme la ministre en commission sur l’amendement du Gouvernement étaient très clairs : celui-ci « vise à définir l’organisation du système de santé dans les territoires en mettant en adéquation la structure des soins et celle de la démocratie sanitaire. Cet amendement consacre le principe du respect de la liberté d’installation des professionnels de santé, définit les schémas régionaux de santé, détermine les zones dans lesquelles des offres particulières doivent intervenir en raison du manque de professionnels ou d’une situation spécifique. »
L’article 12 bis est souple : il s’agit de laisser les professionnels avancer des propositions sur leur organisation.
Ce qui nous inquiète ce sont les termes : « À défaut d’initiative des professionnels » !
Il n’est donc pas nécessaire de réaffirmer le principe de la liberté d’installation, qui a davantage sa place à l’article 38 et qui, d’ailleurs, y figure.
Permettez-moi de conclure, monsieur Accoyer, en vous présentant mes arguments ; que nos opinions divergent ne doit pas nous empêcher de nous écouter les uns les autres. L’article 12 bis a vocation à laisser les professionnels s’organiser.
Ce n’est pas ce que laisse entendre l’alinéa 11, qui commence par les mots : « À défaut d’initiative des professionnels » !
Il est donc beaucoup plus logique d’évoquer la liberté d’installation des professionnels à l’article 38.
Monsieur le président Accoyer, concernant le soutien à l’installation et à l’activité des médecins de montagne, le travail réalisé, qui a été entériné par la loi de financement de la Sécurité sociale de 2015, est le résultat d’une concertation avec les professionnels et les élus concernés. Les propositions qui ont été faites par le ministère concordent en tout point avec la demande des professionnels.
Pourquoi la ministre ne prend-elle pas la parole, monsieur le président ?
La ministre s’est déjà exprimée, monsieur Larrivé, et je vous ai redonné la parole longuement, faisant fi du règlement. Je vous saurais gré de respecter ma façon de présider, car je suis soucieux de donner aux uns et aux autres la possibilité de s’exprimer.
Je suis saisi d’un amendement rédactionnel, no 227, de Mme Bernadette Laclais, rapporteure.
L’amendement no 227 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 231 de Mme Bernadette Laclais, rapporteure, est également rédactionnel.
L’amendement no 231 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2363 .
Il s’agit de préciser l’association à l’agence régionale de santé des organisations représentatives de professionnels de santé et des ordres professionnels concernés pour la conclusion des contrats territoriaux. C’est en effet leur rôle de vérifier que l’éthique est garantie, que l’indépendance du patient, en particulier le principe de libre choix sont respectés, et que l’indépendance du médecin est respectée sans subordination possible.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous avons eu ce débat en commission, et il n’a pas semblé opportun de prévoir dans le texte de loi l’association des ordres professionnels de santé, car ce sont d’abord les professionnels concernés qui doivent participer à l’élaboration de ces schémas.
Même avis.
Cet amendement est excellent, et nous allons le voter.
Permettez-moi d’en résumer le fond, madame la ministre : il s’agit de la liberté d’installation des médecins et du libre choix des patients, ainsi que du choix des médecins généralistes d’orienter vers un spécialiste des services hospitaliers publics ou privés.
Il y a dans ce projet de loi trois articles qui expriment chacun une volonté à géométrie variable. On a même l’impression que vous avez été forcée d’accepter certaines dispositions. Cette notion fondamentale de la médecine dans notre pays aurait mérité que tous ces sujets fassent l’objet d’un unique article.
L’amendement no 2363 n’est pas adopté.
Il faut recompter, monsieur le président !
L’amendement no 16 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2362 .
Cet amendement vise prévoit l’obligation de proposer un contrat de santé à tous les acteurs de santé présents sur le territoire concerné.
Murmures sur les bancs du groupe UMP.
L’amendement est satisfait par la rédaction de l’article et par la démarche qui le sous-tend. Il s’agit bien d’associer l’ensemble des acteurs concernés par l’amélioration des parcours de santé, que ce soit sur une thématique particulière ou sur un sujet global.
Défavorable.
Puisqu’il est indiqué, à l’alinéa 11 de l’article : « À défaut d’initiative des professionnels », il faut bien que quelqu’un puisse juger ces initiatives. À l’évidence, c’est l’agence régionale de santé qui les acceptera ou ne les acceptera pas, puis qui, « à défaut », prendra elle-même des initiatives. Il faut analyser la section 4 introduite par l’article 12 bis en fonction de cet alinéa. Si une initiative ne plaît pas à l’agence, elle la refusera. L’article est donc fort différent de celui que vous avez présenté !
L’amendement no 2362 n’est pas adopté.
Il est proposé d’insérer après l’article 13 l’alinéa suivant : « Le contrat territorial de santé est publié sur le site de l’agence régionale de santé afin de permettre aux établissements de santé publics et privés, aux structures médico-sociales, aux professions libérales de la santé et aux représentants d’associations d’usagers agréées de prendre connaissance des actions et des moyens financiers du projet. »
Dans un but de transparence, nous demandons que le contrat territorial de santé soit publié. Cela peut être utile à tout le monde.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1554 .
Elle a repoussé les amendements. Néanmoins, je suis sensible à ce souci de transparence. Bien que tous les documents administratifs des agences régionales de santé et tous les contrats qu’elles signent fassent l’objet, en application de la loi de 1978, d’une publication dans le recueil des actes administratifs, rien ne s’oppose, je crois, à ce que le projet de loi comporte cette indication. À titre personnel, donc, j’émettrai un avis de sagesse, voire un avis positif.
Une telle disposition est-elle du ressort de la loi ? Objectivement, non. Est-elle déjà satisfaite ? Objectivement, oui, et les agences régionales de santé sont de toute façon soumises à une obligation de publication. La transparence est-elle utile ? Dix fois oui !
Bien que ces amendements ne s’imposent pas d’un point de vue juridique, je comprends votre volonté de transparence. Les agences de santé n’ont et n’auront rien à cacher. C’est pourquoi je donnerai un avis favorable.
Vous voyez, il suffisait d’attendre !
Sourires.
Je suis saisi de trois amendements rédactionnels nos 228, 229 et 230, de Mme Bernadette Laclais, rapporteure. Ces amendements peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
L’article 12 bis, amendé, est adopté.
Article 12
La parole est à M. Jean Lassalle, premier inscrit sur l’article 12 ter.
Fait rarissime, monsieur le président, nous sommes trois Béarnais à officier en même temps dans l’hémicycle : Mme Lemorton en tant que présidente de la commission, vous-même en tant que président et moi en tant que député.
Sourires.
Il apparaît dans cette très intéressante discussion que nous sommes en train de payer trente ou quarante ans d’oubli de certains de nos territoires.
À force de considérer que la République n’est plus un tout – les dernières lois de M. Valls sont malheureusement venues le confirmer –, à force de laisser entendre qu’il y a plusieurs France, tout le monde s’accoutume à cette idée. Il n’est pas étonnant que nous rencontrions aujourd’hui de telles difficultés, tant on a donné le sentiment que la France était devenue urbaine et suburbaine et qu’il n’y avait pas d’avenir en dehors de ces territoires. Nous avons maintenant le plus grand mal à trouver des médecins et des personnels médicaux. Or ces professions entretiennent une relation très particulière avec les citoyens.
Je ne prétends pas détenir la solution mais je veux le souligner une fois encore : nous payons aujourd’hui les erreurs commises depuis trente ou quarante ans.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, dont je sais qu’elle a aussi des attaches dans les Pyrénées-Atlantiques.
Même s’il ne contient pas de mesures spectaculaires, cet article est important.
À cet égard, je veux rendre hommage au rapport remis à Mme la ministre en janvier 2014, qui ouvrait la voie à ces mesures. Il s’agit de donner l’élan à un vrai changement culturel et à une réelle modification des pratiques, conduisant les professionnels à travailler, non plus individuellement, mais en coopération, de manière à lutter contre les déserts médicaux et, surtout, à faire évoluer notre pratique médicale. Plus de 370 contrats de praticien territorial de médecine générale ont été déjà signés et plus de 800 pôles ou centres de santé seront ouverts d’ici à la fin de 2015. Cela mérite d’être salué.
L’article 12 ter instaure un « pacte national de lutte contre les déserts médicaux » auquel il assigne trois priorités : changer la formation et faciliter l’installation des jeunes médecins, transformer les conditions d’exercice, investir dans les territoires isolés. Le problème est que nous souscrivons à ces objectifs depuis de longues années, quel que soit notre banc dans l’hémicycle, que certaines mesures ont déjà été mises en oeuvre, par exemple l’obligation de stage pour les étudiants de troisième cycle, les facilités financières et fiscales à l’installation des jeunes médecins, ou encore la construction de maisons pluridisciplinaires ou pluriprofessionnelles de santé.
Dès lors, quels changements concrets ce pacte apportera-t-il, madame la ministre ? On a choisi d’inciter et non de contraindre à l’installation, même si cela est parfois difficile à faire admettre aux maires, surtout dans les zones rurales. Ceux-ci n’hésitent plus à recourir à des médecins généralistes étrangers. Pour leur part, les jeunes internes et les professionnels de santé que nous avons auditionnés ont maintes fois rappelé leur attachement à la liberté d’installation.
Parmi les dispositifs d’incitation, vous avez créé les contrats d’engagement de service public, qui prévoient une allocation pour conforter l’exercice des jeunes médecins. Votre objectif était de conclure jusqu’à 1 500 contrats d’ici à 2017. Pourriez-vous dresser un premier bilan et nous indiquer si vous tiendrez vos objectifs ?
Largement.
L’intitulé « pacte national de lutte contre les déserts médicaux » est très encourageant. Non seulement j’y souscris volontiers, mais je pense que ç’aurait dû être une marque beaucoup plus forte de ce texte. Car on retrouve assez peu de dispositions dans l’article. Vous semblez laisser ces actions aux mains des agences régionales de santé. Où sont, par exemple, les actions d’information à mener dans les facultés ? Les étudiants nous disent pourtant qu’ils sont insuffisamment informés. Nous aurions souhaité que l’article prévoie dans les facultés un guichet unique recensant toutes les aides possibles des collectivités, des agences, etc.
Bref, cet article de quelques lignes seulement me laisse sur ma faim. Il devrait être beaucoup plus ambitieux.
Je rejoins l’avis de M. Door. « Pacte national de lutte contre les déserts médicaux » est un intitulé qui va dans le bon sens. Je pense du reste que la question de la désertification est d’une importance telle et concerne de si nombreux territoires qu’elle mériterait de faire l’objet d’un projet ou d’une proposition de loi à part entière.
Alors qu’un des objectifs de ce pacte est de promouvoir la formation des professionnels de santé, il est indiqué à l’alinéa 9 que « ce pacte est arrêté par le ministre chargé de la santé ». Il me semblerait important d’y associer un autre ministère, celui de l’enseignement supérieur, qui est justement chargé de la formation des professionnels de santé. Quelle que soit la couleur politique du gouvernement, on peut regretter le manque de transversalité entre les deux ministères.
Par ailleurs, l’article ne mentionne pas les collectivités locales, alors que celles-ci – notamment les régions – ont mis en place de nombreux dispositifs. Ainsi la région Champagne-Ardenne, qui incite les jeunes ou futurs médecins à s’établir dans des départements mal pourvus, comme les Ardennes ou la Haute-Marne.
Pour lutter contre la désertification, il convient d’associer le ministère de la santé, le ministère de l’enseignement supérieur et l’ensemble des collectivités locales – régions, départements, voire villes et métropoles.
J’ai souhaité prendre la parole sur cet article car il traite des déserts médicaux, de la répartition inégale de l’offre de soins et de la pratique de la médecine. Pour être l’élu d’un territoire peu dense, je peux affirmer que les zones de montagne ne sont pas les seules confrontées à ce problème.
Je souhaite, madame la ministre, que des mesures fortes soient prises. J’entends les arguments, sur les différents bancs, en faveur de la liberté d’installation, mais je veux tirer la sonnette d’alarme. Lors de la formation, l’exercice de la médecine dans les territoires peu denses doit être encouragé et le numerus clausus doit être adapté à la réalité des besoins régionaux.
Nos concitoyens, quel que soit l’endroit où ils résident, sont confrontés à la difficulté d’accéder aux soins. Ce texte doit faire de la répartition équitable de l’offre de soins une priorité, aussi bien dans les zones urbaines que rurales.
S’il est bien un sujet qui doit nous réunir, que nous soyons de droite, de gauche ou du centre, c’est la lutte contre la désertification médicale de nos territoires ruraux. Nous sommes tous confrontés aux mêmes questions, très pressantes, des Français.
Nous ne partons pas de rien : le gouvernement précédent a créé les maisons de santé pluriprofessionnelles et le gouvernement actuel poursuit, dans une certaine mesure, l’effort. Mais il faut accélérer et entrer dans le concret.
L’article 12 ter esquisse un pacte national, il faut lui donner un contenu. Nous proposons donc des amendements opérationnels et concrets. L’un d’entre eux vise à mettre en place un mécanisme de « zone franche ». Il s’agit de définir des territoires prioritaires pour l’installation de professionnels de santé, lesquels bénéficieront d’une forte diminution de l’impôt sur les bénéfices pendant une dizaine d’années. Il faudra évidemment gager cette mesure : nous proposons, et cela fera sans doute l’objet d’un désaccord, la suppression de l’aide médicale d’État. Une telle disposition permettrait de concilier la liberté d’installation et la nécessité d’encourager des professionnels à s’installer dans ces territoires. Le moment est venu de décider !
Depuis des années, nous cherchons à résoudre ce problème. L’idée d’un « pacte de lutte contre les déserts médicaux » est satisfaisante, mais il aurait fallu prévoir un plan d’aménagement du territoire global.
En effet, pour le jeune médecin qui souhaite s’installer, les facilités financières ou fiscales qui peuvent lui être offertes – je suis très favorable à l’idée de zone franche – ne suffisent pas ; il se demandera si le village où se situe le cabinet a une école, une vie sociale. À cet égard, je regrette qu’il n’existe pas un ministère de l’aménagement du territoire. Les difficultés sont majeures : nous voyons des territoires s’étioler, s’effondrer ; la désespérance s’installe. Et ce qui marque le plus, c’est l’absence de médecins.
Je crains que le plan que l’on nous propose ne soit trop coercitif. Comment attirer un médecin ? Les dégrèvements fiscaux seront-ils suffisants ? Qu’est-ce qui peut lui garantir qu’il vivra correctement avec sa femme ?
J’allais le dire. Effectivement, les étudiants en médecine sont souvent des femmes.
La parole est à M. Richard Ferrand, rapporteur de la commission des affaires sociales.
À quelques minutes d’intervalle, on a entendu chanter les louanges de la liberté d’installation absolue pour l’ensemble des praticiens, puis déplorer le fait qu’ils ne soient pas répartis de manière homogène sur le territoire.
Une quantité de mesures incitatives ont déjà été prises. Les exonérations d’impôts existent déjà pour les médecins installés dans les zones franches !
Et pour les médecins exerçant dans les zones de revitalisation rurale également ! Chaque année, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le PLFSS, nous votons des mesures supplémentaires – l’année dernière, le versement d’une aide en cas de congé maternité ou paternité –, pour rendre la mariée toujours plus belle, pour que les médecins condescendent à s’installer là où l’on a besoin d’eux. Ils ne le font pas.
La Cour des comptes a rappelé à plusieurs reprises que le conventionnement pouvait être un levier : dans les endroits où il y a suffisamment de médecins, on pourrait diminuer le nombre de praticiens éligibles au conventionnement et à l’inverse, augmenter leur nombre dans les zones en déficit, qu’elles soient rurales ou périurbaines.
Nous constatons que la liberté d’installation est sacralisée. C’est ainsi. Certes, les nombreuses mesures incitatives ont produit des effets, mais ils s’avèrent insuffisants ou agissent comme un cautère sur une jambe de bois.
Sauf à vouloir mentir aux Français, on ne pourra pas continuer à prôner très longtemps la liberté totale d’installation tout en disant qu’il faut aménager le territoire. Cela fait bientôt quarante ans qu’on raconte cette histoire, sur tous les bancs ; il faudra bien cesser un jour !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Le pacte national de lutte contre les déserts médicaux va dans le bon sens. Beaucoup de mesures ont été évoquées. Mais celles qui sont de nature coercitive ne peuvent être à l’ordre du jour. Comment inciter de jeunes médecins à s’installer là où il n’y a plus de services publics, plus d’école, plus de gendarmerie ?
Les jeunes médecins ne sont pas opposés à l’idée de s’installer dans les territoires ruraux. Ce qu’il faut, c’est revaloriser la médecine générale. Un syndicat de médecins majoritaire mène aujourd’hui un combat dans ce sens, qu’il faut entendre, et dont nous devrons reparler dans le cadre du PLFSS. Il faut aussi faire connaître aux jeunes praticiens les territoires ruraux. Certains conseils départementaux ont été innovants et ont su vanter les mérites de ces territoires. Il est important de pouvoir faire des stages dans des maisons de santé pluridisciplinaires, au sein d’équipes de santé, auprès de médecins généralistes. Il faut, pour cela, conforter la formation de maître de stage pour les médecins généralistes et encourager l’enseignement de la médecine générale.
Beaucoup de mesures positives ont été prises. De nombreuses autres peuvent être envisagées. Les jeunes, aujourd’hui, ne sont pas opposés à l’idée de s’installer dans les territoires ruraux, mais ils ne les connaissent pas et peuvent manifester une certaine inquiétude, car ils n’en sont pas issus et ont fait leurs études dans une ville, au sein d’un centre hospitalier universitaire. Il faut savoir les rassurer.
Dans notre pays, il y a toujours eu deux attitudes antinomiques. La première consiste à aménager le territoire et faire en sorte qu’il y ait des médecins et de petits hôpitaux partout. La deuxième procède de la sécurité sanitaire et consiste à verrouiller, à mutualiser, et à regrouper. Ce débat dépasse largement les clivages politiques.
Lorsque M. Larrivé a parlé de zones franches, il ne parlait pas de zones franches urbaines, mais d’un mécanisme qui s’y apparenterait en zone rurale.
Entre une démarche à 100 % incitative et une démarche à 100 % coercitive, il existe un juste milieu. Il s’agit d’un problème national, et c’est la responsabilité des députés de la nation que de montrer le chemin !
Nous sommes sauvés : nous allons avoir un pacte national de lutte contre les déserts médicaux ! Depuis plus de trente ans, tous les gouvernements ont tapé à côté : les mesures incitatives existent déjà et on voit bien que ça n’est pas le motif essentiel d’une installation.
Je reprendrai les mêmes arguments que mon collègue et confrère Bernard Debré. Il fut un temps où le pays avait un ministère du plan, où il concevait à long terme l’aménagement du territoire. La question majeure que se pose le jeune médecin désireux de s’installer, c’est ce que fera son conjoint ou sa conjointe si le cabinet est situé à 60 km de la capitale locale. Par conséquent, quoique l’on fasse, quoique l’on dise, les mesures auront toutes des résultats décevants et superficiels.
Pourquoi les médecins s’installent-ils après l’âge de 40 ans ? Pourquoi beaucoup d’entre eux préfèrent-ils faire un maximum de remplacements et de gardes plutôt que d’avoir une patientèle continue ? Pourquoi l’acte médical est-il dévalorisé au point que les généralistes sont amenés à faire de la surprescription ? Pourquoi faut-il voir un patient tous les mois pour refaire sa prescription d’antihypertenseurs ou d’antidiabétiques alors qu’il est équilibré ? Voilà les vraies questions !
On crée une psychose dans la population en expliquant aux gens qu’ils mourront de leur infarctus s’ils habitent à plus de 60 km du centre hospitalier universitaire ou spécialisé – en oubliant d’ailleurs que ce ne sont pas forcément les généralistes qui assureront les gardes. Et puis on passe à côté de la difficulté d’accès aux spécialistes – ophtalmologues, gynécologues ou même sage-femme.
La question demeure la même : il faut aménager le territoire et revaloriser suffisamment l’acte médical. Sinon, tout ce que nous ferons sera de la poudre aux yeux !
M. Dhuicq explique dans l’exposé sommaire de son amendement que l’article 12 ter est trop vague. L’argumentation elle-même est assez vague ! Pour ne pas faire l’objet de la même critique, j’émettrai un avis doublement défavorable en disant que l’on ne peut pas à la fois regretter l’absence de dispositif de lutte contre la désertification médicale et ne pas saluer la démarche du Gouvernement, qui propose d’intégrer dans la loi le pacte territoire santé.
Celui-ci été encore enrichi dans le cadre du PLFSS. Nous avons pu constater qu’il correspondait aux attentes des professionnels de santé, qu’il s’agisse de femmes ou de professionnels exerçant dans les territoires de montagne, comme je l’ai rappelé tout à l’heure.
Avis défavorable.
L’amendement no 599 n’est pas adopté.
Cet amendement vise à remplacer les termes, qui figurent aujourd’hui dans la loi, de « pacte national de lutte contre les déserts médicaux » par ceux de « pacte territoire-santé », employés depuis fin 2012, au moment où j’ai lancé un ensemble de mesures pour lutter contre la désertification médicale. L’expression s’étant progressivement imposée dans le langage commun des professionnels, des agences, des élus, il me semble plus cohérent de l’inscrire dans la loi.
Je profite de la présentation de cet amendement pour répondre aux observations que viennent de formuler plusieurs députés.
C’est vrai, nous ne sommes plus à une contradiction près, comme le soulignait M. Richard Ferrand, d’autant plus que je viens d’entendre de la bouche d’un député qu’il fallait relancer la planification, ce même député qui, il y a quelques instants, me reprochait d’avoir voulu étatiser la médecine !
Franchement, si ce n’est pas l’État qui planifie, je ne sais pas qui le fait ! Et si ce n’est pas lui, je commence à m’inquiéter car l’État, malgré tout, est porteur d’une vision d’intérêt général. À quelques voix discordantes près, vous êtes très nombreux à évoquer la sécurité plutôt que la proximité, mais j’entends régulièrement, en particulier à chaque débat budgétaire, que si j’étais vraiment engagée dans des réformes, je n’aurais pas peur de fermer des services hospitaliers, de diminuer les plateaux hospitaliers, de rationaliser la carte hospitalière – pour reprendre des termes chers à certains bancs qui pourtant préconisent la coercition pour résoudre la question de l’installation des médecins –, la rationalisation de la carte hospitalière étant un mot charmant pour ne pas dire fermeture d’hôpitaux de proximité.
Mesdames et messieurs les députés, il faut savoir, à un moment, sortir de ces contradictions et assumer ses choix. Il faut savoir s’engager dans un chemin avec volontarisme et agir pour que les résultats soient au rendez-vous.
Nous avons un enjeu à relever en France et, même si le chemin qui reste à parcourir est long, nous nous y sommes attelés avec détermination depuis deux ans : la lutte contre la désertification médicale de certains territoires. Faut-il y répondre, comme je l’entends parfois, par l’augmentation du numerus clausus ? Je ne le crois pas. Des aménagements peuvent cependant intervenir à la marge. Il n’y a pas un chiffre sacré, bien évidemment.
Surtout, nous devons examiner dans quelles spécialités les professionnels manquent mais admettons même que nous doublions le numerus clausus, tous les praticiens formés s’installeront dans les centres-villes et nous n’aurons pas réglé le problème. Je suis élue d’un territoire où se trouve le centre hospitalier régional universitaire, à Tours. À 40, 50 ou 70 kilomètres, dans le même département, nous pouvions trouver des territoires où manquaient des professionnels de santé mais nous avons considérablement remonté la pente depuis quelques années. Au sein d’un même département, et donc à l’échelle nationale, il y a une concentration de professionnels. Mme Delaunay a raison de préconiser un changement de culture, de perception culturelle. Nous devons rendre attractifs des territoires qui aujourd’hui ne le sont pas ou ne le sont plus spontanément.
Rendre un territoire attractif, c’est faire le choix, que j’assume, de l’incitation et non de la coercition. J’ai choisi de respecter la liberté d’installation plutôt que de contraindre mais parallèlement j’ai pris des mesures pour rendre cette installation extrêmement attractive, en sachant que l’attractivité ne se réduit pas à des mesures financières. Les professionnels doivent trouver des conditions d’exercice intéressantes. Le pacte « territoire-santé », qui monte en puissance, apporte des réponses qui pourront être complétées. C’est pourquoi j’ai souhaité qu’il figure dans la loi.
M. Door juge le dispositif bon mais insuffisant, appelant de ses voeux le guichet unique. Mais il existe ! Donnons-lui plus de visibilité ! J’ai annoncé il y a deux ans que chaque agence régionale de santé compterait un référent installation à destination des jeunes médecins. La situation est mieux mise en évidence dans certains territoires que dans d’autres. Dans peu de temps, le site du ministère des affaires sociales et de la santé sera complètement refondu et entrera en service. Je ferai en sorte que ces référents installation apparaissent de manière très identifiée, très simple, sur le site national du ministère.
Madame Le Callennec, vous regrettez le manque de stages mais en 2011, 42 % des étudiants en deuxième cycle faisaient des stages. Ils sont plus de 70 % en 2015. Ce n’est pas encore 100 %, l’objectif que j’ai fixé, mais le taux augmente tout de même considérablement, année après année.
De même, vous m’avez demandé de vous donner les chiffres des contrats d’engagement de service public. J’en avais annoncé 1 500 d’ici 2017. En fait, il y en aura bien davantage. Il y en avait 350 en 2012, près de 600 en 2013 – 591 pour être exacte –, 881 en 2014 et nous aurons dépassé les 1 200 fin 2015. C’est une vraie réussite, nous serons très au-delà en 2017, sachant que nous avons ouvert le dispositif aux étudiants en odontologie car nous avons aussi besoin de dentistes et que nous devons pouvoir leur proposer des bourses.
Autre mesure qui donne des résultats, les maisons de santé. Il y en avait 170 en 2012.
Non, il y en avait 170 établies en 2012. Il y en a 600 aujourd’hui et il y en aura 800 à la fin de l’année. Le rythme est exponentiel et il est renforcé par la généralisation de la rémunération d’équipe qui permet de rémunérer la coopération en équipes des professionnels de santé et qui bénéficiera à 1 000 équipes d’ici 2017.
Je pourrais évoquer les praticiens territoriaux de médecine générale ou de médecine ambulatoire, les expérimentations de télémédecine qui se multiplient et le passage de 150 à 600, en trois ans, du nombre de médecins correspondants du SAMU, ce qui permet d’accéder aux soins d’urgence en moins de trente minutes, suivant l’engagement du Président de la République.
Je n’énumérerai pas l’ensemble des mesures car l’exercice est fastidieux quoique nécessaire. J’ai beau affirmer en effet que nous luttons contre les déserts médicaux, rien ne vaut une énumération de toutes les mesures que nous mettons en oeuvre pour le prouver. À un moment, il faut afficher les résultats. Certaines mesures sont plus efficaces, ce qui nous permet de réfléchir aux moyens d’améliorer les autres. L’objectif est le maillage avec les équipes de soin primaires. Nous installons les équipes de soin primaire autour du médecin généraliste, au sein des communautés professionnelles, afin de mailler l’ensemble du territoire. Nous y travaillons et toutes les idées sont bonnes à prendre, je vous le dis très sincèrement. Nous élaborons de nouveaux outils pour donner une nouvelle impulsion à ce pacte qui donnera des résultats, j’en suis convaincue, dans les zones urbaines difficiles mais aussi rurales, dans un périmètre de 50 ou 70 kilomètres autour d’une grande ville. Pour les territoires ruraux profonds, les défis sont plus lourds à relever et nous devons réfléchir à des réponses appropriées.
Pardonnez-moi, monsieur le président, pour cette longue intervention mais je sais qu’il n’y a pas un élu qui ne se préoccupe de la question de la désertification médicale ou de l’implantation des professionnels de santé dans son territoire. Nous agissons, nous multiplions les instruments mais ne me reprochez pas à la fois, mesdames et messieurs les députés, de vouloir remettre en cause la liberté d’installation et de ne pas planifier, contraindre et étatiser l’installation des jeunes professionnels dans les territoires ruraux. Un peu de cohérence !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Madame la ministre, parler de Colbert ou du plan dans le sens gaulliste du terme, ce n’est pas en appeler au Gosplan. Le plan, c’est quand un État travaille dans l’intérêt de la nation, aménage les voies de communication, la politique énergétique et met en place les structures qui permettent ensuite, librement, à la vie économique de se déployer. Le plan, ce n’est pas décider, comme vous êtes en train de le faire, de l’endroit où les jeunes médecins vont s’installer. Le plan, ce n’est pas Harold Wilson dans les années 1960 au sein du parti travailliste. C’est tout le contraire.
Vous auriez tout intérêt à revoir l’histoire de France, madame la ministre. Il y a d’ailleurs beaucoup de lacunes dans ce Gouvernement à cet égard.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Madame la ministre, vous êtes en train de socialiser la médecine française, de la détruire et vous pousserez comme d’habitude les plus brillants à partir pour l’étranger.
Je tiens à remercier Mme la ministre de nous avoir rappelé l’ensemble des dispositifs instaurés pour lutter contre la désertification médicale, des mesures qui sont d’ailleurs la continuité d’autres prises par l’ancienne majorité.
Je voudrais juste poser une question sur un très bon dispositif, celui du guichet unique, qui est le référent installation au sein des ARS.
Ne serait-il pas préférable, pour se rapprocher des jeunes médecins, que ces référents installation soient situés au sein des facultés de médecine. Prenons ainsi, dans le cadre de la réforme territoriale et des grandes régions, le cas de l’étudiant en médecine de Reims : devra-t-il se rendre à Strasbourg pour avoir un contact avec le référent installation de la grande région Nord-Est et qui ne sera pas forcément au mieux à même de connaître les différents secteurs des différents départements de feue la région Champagne-Ardenne, laquelle manque de médecins ? Ne serait-il pas nécessaire de créer des antennes de ces référents installation ?
L’amendement no 1969 est adopté.
Vu le manque de confiance des professionnels dans votre texte, dont témoignent les manifestations, nous proposons, par cet amendement, d’insérer après l’alinéa 3 l’alinéa suivant : « La liberté d’installation du médecin ainsi que la liberté du choix du médecin par le patient sont des principes fondamentaux du système de santé français qui ne sauraient être remis en cause ».
Les médecins sont soumis aujourd’hui à la politique hachée et incohérente des différents gouvernements qui se sont succédé – pas seulement celui-ci. D’excellents médecins sont sacrifiés par le jeu du numerus clausus alors qu’ils auraient pu s’installer par vocation. Nous devons redonner confiance à ces jeunes qui font dix ans d’études et passent un concours très difficile. Dix ans, ce n’est pas rien, c’est un sacrifice pour les familles modestes. Ce ne sont pas les seuls bobos qui deviennent médecins !
Avis défavorable car votre demande est déjà satisfaite. L’alinéa 13 de l’article 38 est très clair : « Indique dans le respect de la liberté d’installation, les besoins en implantation pour l’exercice des soins de premier et de second recours ». Il deviendra de fait l’article L. 1434-3 du code de la santé publique.
Quant au libre choix du patient, soyez assuré que tous les députés de cet hémicycle sont sensibles à votre proposition et très attachés à cette liberté, que vous retrouvez à l’article L. 1110-8 du code de la santé publique : « Le droit du malade au libre choix de son praticien et de son établissement de santé est un principe fondamental de la législation sanitaire ».
Je suis persuadée que les professionnels comme nos concitoyens peuvent comprendre que cette disposition figure déjà dans les textes et que personne ne songe à la remettre en cause.
L’amendement no 14 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 2075 .
Nous en revenons aux centres de santé dont cet amendement vise à affirmer la place dans le pacte territoire santé, car ils jouent bien entendu un rôle majeur dans la lutte contre les déserts médicaux.
Toutefois, à la relecture, madame la rapporteure, je me demande si l’amendement est idéalement placé dans la rédaction du texte.
J’en profite néanmoins pour répondre aux propos qu’a tenus M. Accoyer sur les centres de santé : je tiens, contrairement à ce qu’il en a dit, à rendre un hommage appuyé au personnel médical et administratif qui exerce dans ces centres, car leur rôle en matière de prévention et d’accès aux soins est essentiel pour des territoires et des publics qui, sans eux, n’auraient parfois aucun accès aux soins. Je ne voulais pas laisser dire ce qui s’est dit tout à l’heure : si l’on peut sans doute débattre du modèle économique de ces centres, que plusieurs éléments à venir du texte permettent justement de renforcer, je tiens quoi qu’il en soit à saluer leur rôle majeur en matière d’accès aux soins.
Avis favorable : la commission a jugé cet amendement pertinent dans un contexte que vous avez d’ailleurs évoqué tout à l’heure à l’occasion d’un autre amendement visant déjà à préciser la place des centres de santé.
L’amendement no 2075 , repoussé par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 755 .
La commission a émis un avis défavorable à ces amendements pour les raisons que j’ai exposées tout à l’heure. Je tiens à confirmer que les médecins spécialistes ne sont pas oubliés et qu’ils ont bien entendu vocation à faire pleinement partie des communautés professionnelles territoriales de santé.
Cet amendement vise la situation des personnes âgées à domicile et en établissement, qui rencontrent des difficultés pour accéder à des soins bucco-dentaires. En effet, la situation d’exclusion de ces soins que connaissent les résidents des EHPAD et les personnes âgées en perte d’autonomie vivant à leur domicile est bien connue de tous. Elle n’est pourtant pas encore résolue, si ce n’est par le transport médicalisé vers les dentistes libéraux – qui s’organisent, certes, mais cette organisation entraîne des difficultés et un coût important pour la collectivité et est à l’origine d’un fort renoncement aux soins.
Certaines structures associatives ont mis au point une organisation et un matériel permettant de réaliser les soins bucco-dentaires au sein même des EHPAD ou, tout simplement, à domicile. Actuellement, les dentistes partenaires de ces initiatives sont des libéraux qui consacrent une partie de leur temps à cette activité hors les murs.
Toutefois, cette organisation qui fait ses preuves en Île-de-France n’est pas reproductible en province : c’est bien regrettable, car la démographie des chirurgiens-dentistes y est défavorable. Dès lors que l’on quitte le coeur des grandes villes, les praticiens libéraux sont surchargés, madame la ministre, et n’ont pas la possibilité de distraire du temps de leur cabinet pour soigner à domicile ou en institution. Voilà pourquoi mes collègues et moi-même vous proposons cet amendement.
À ce stade, la commission a émis un avis défavorable, non pas sur le fond ni sur la pertinence de votre proposition, madame la députée, mais parce qu’elle ne relève pas des dispositions générales du pacte territoires santé. Mieux vaudrait modifier l’article L. 6323-1 du code de la santé publique, ou examiner si cette proposition pourrait être examinée dans le cadre de l’ordonnance prévue à l’article 51.
Même avis. L’article 51 habilite le Gouvernement à prendre une ordonnance concernant les centres de santé. Or, nous avons besoin de temps pour mener la concertation avec les acteurs concernés. La proposition que vous faites, madame la députée, pourrait donc être examinée dans le cadre de cette ordonnance. C’est pourquoi je vous propose de retirer cet amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
L’amendement no 42 n’est pas adopté.
Il faut lutter beaucoup plus activement contre la désertification médicale, surtout – j’y reviens une fois de plus car le problème est grave – dans les territoires ruraux. Il est inacceptable que les Français qui y résident soient délaissés, voire privés d’un accès aux soins.
J’estime que la création de maisons de santé dans les territoires ruraux, lorsqu’elle s’appuie sur une équipe médicale active, est une première réponse qu’il faut continuer à encourager, mais elle n’est pas suffisante.
Vous évoquiez tout à l’heure des installations « attractives », madame la ministre. Le présent amendement vise précisément à définir des territoires prioritaires pour l’installation de médecins dans lesquels les médecins généralistes, les médecins spécialistes et les autres professionnels de santé bénéficieront d’une exonération de l’impôt sur les bénéfices pendant les quinze années suivant leur installation.
Cette exonération fiscale devra s’accompagner dans la loi de financement de la Sécurité sociale d’une exonération des cotisations sociales des médecins et des professionnels de santé. Je souhaite en effet que l’on parle davantage des professionnels de santé – je le dis car nous avons très peu entendu parler des infirmières et des infirmiers depuis le début de ce débat.
Or, les professionnels de santé que sont les infirmiers et les infirmières doivent eux aussi s’installer dans les territoires ruraux prioritaires pour leur installation et celle des médecins. Il faut donc absolument accorder la priorité à l’accès aux soins des habitants de ces territoires quelque peu délaissés.
Vous l’avez compris, madame la députée : aucun des députés qui siègent dans cet hémicycle ne saurait être insensible à la question de l’accès aux soins de nos concitoyens dans tous les territoires. De ce point de vue, vous voyez ici des députés convaincus, et un Gouvernement qui l’est tout autant – Mme la ministre nous a en effet rappelé l’ensemble des mesures, encore renforcées dans les projets de loi de financement de la Sécurité sociale, qui favorisent l’installation de médecins dans ces territoires.
Je rappelle l’existence du dispositif de praticien territorial de médecine générale, qui a précisément été créé pour favoriser l’installation de médecins libéraux spécialistes en médecine générale dans les zones qui se caractérisent par une offre médicale insuffisante. Les lieux d’exercice des praticiens territoriaux de médecine générale sont déterminés dans les schémas régionaux d’organisation des soins, conformément à l’article R. 1435-9-10 du code de la santé publique. Enfin, il est prévu une garantie de rémunération mensuelle ainsi qu’un congé de maternité et un congé de maladie garantis.
Toutes ces avancées allant dans le sens que vous souhaitez, j’émets un avis défavorable à votre amendement, de même – vous n’en serez pas surprise – qu’au gage que vous proposez pour financer votre mesure.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Comme je l’ai fait dans la discussion générale – mais certains d’entre vous étaient peut-être absents –, je vous rappelle que les médecins profitent d’ores et déjà d’une exonération fiscale. L’article 151 ter du code général des impôts prévoit en effet que, dans les zones définies à l’article L. 1434-7 du code de la santé publique, l’ensemble des rémunérations perçues au titre de la permanence des soins ambulatoires sont intégralement exonérées de l’impôt sur le revenu à hauteur de soixante jours de permanence par an.
Ce n’est donc pas négligeable : pour certains médecins, le montant annuel échappant à l’impôt peut tout de même atteindre 20 000 euros, et ce dans des zones où ils sont indispensables à la permanence des soins ambulatoires.
Ce rappel n’enlève rien à votre proposition, mais il me semblait nécessaire.
Avis défavorable. Je tiens néanmoins à revenir sur ce qui a été dit : il va de soi que nous avons besoin dans les territoires non pas seulement de médecins mais aussi de professionnels de santé – pharmaciens, biologistes ou encore professionnels paramédicaux. La loi sur la biologie médicale avait notamment pour objectif de garantir la présence de laboratoires de proximité. Les pharmacies, quant à elles, se caractérisent par un maillage territorial très dense.
D’autre part, madame la députée, vous n’avez pas oublié que s’agissant de leur installation, les infirmières ont accepté une convention avec l’assurance maladie qui prévoit le conventionnement sélectif – autrement dit, leur installation n’est plus totalement libre.
Je voulais simplement rappeler ce point – en me gardant de tout jugement, mais je constate que vous revendiquez la notion de liberté à tout bout de champ avant de citer le cas des infirmières…
Puisque cet amendement pose la question de la fiscalité, il me semble que le sujet doit être étudié avec les représentants socio-professionnels et l’Ordre des médecins : ce débat, même s’il ne donne pas lieu à une disposition législative, est utile, madame la ministre.
L’un de nos collègues a cité l’exemple des zones franches : certains médecins font aujourd’hui appel à d’autres spécialistes pour consulter pendant une demi-journée, voire une journée : ce n’est pas possible, car l’Ordre considère qu’il s’agit alors d’un cabinet secondaire. C’est un fait !
La loi ne fera pas tout mais, pour connaître ce dossier, je vous assure, madame la ministre, qu’il serait utile que l’exécutif ait une discussion apaisée avec l’Ordre et les représentants socioprofessionnels.
Je ferai deux remarques. Tout d’abord, un dispositif technique nous est proposé ; pourquoi pas ? Tous les dispositifs de cet ordre peuvent être examinés. Pourtant, ce texte n’étant pas de nature financière, le II de l’amendement disqualifie cette proposition.
Au-delà du simple aspect technique, le II et, surtout, l’exposé des motifs de l’amendement disqualifient votre proposition sur le plan moral. Que proposez-vous en effet ? Vous proposez que ce dispositif nouveau soit financé en tant que de besoin par la création d’une nouvelle taxe – une suggestion qui, venant de vos rangs, est intéressante – et surtout par la suppression de l’aide médicale d’État.
Vous prétendez dans votre exposé des motifs que l’aide médicale d’État « consiste, contre tout bon sens, à encourager l’immigration illégale en offrant des soins gratuits aux clandestins qui sont entrés ou se maintiennent illégalement en France ».
Vous ajoutez ceci : « Une vraie priorité doit être donnée à l’accès aux soins des Français dans nos territoires ruraux ».
« Honteux ! » sur les bancs du groupe SRC.
Il eut été plus opportun que vous proposiez de défendre cet amendement et son exposé des motifs à votre collègue qui siège à votre gauche, et donc à l’extrême-droite : Mme Maréchal-Le Pen !
L’amendement no 1198 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour soutenir l’amendement no 1257 .
Cet amendement vise à ce que le pacte national de lutte contre les déserts médicaux porte une attention particulière aux quartiers relevant de la politique de la ville. Comme chacun sait, ces quartiers se heurtent au risque de désertification. Je rappelle que les ZUS comptent 2,4 fois moins de médecins spécialistes que leurs agglomérations et qu’une ZUS sur huit ne compte aucun établissement de santé de proximité. Il est donc primordial d’assurer un accès aux soins dans les quartiers et de combattre les inégalités sanitaires.
Merci, chère collègue, pour votre proposition d’amendement, qui a reçu un avis favorable de la commission. Quand on parle de territoires isolés, de territoires qui peuvent être en difficulté du fait de déserts médicaux, on parle souvent des territoires ruraux, parfois des territoires de montagne,…
Ce n’est pas moi qui vous dirais le contraire, monsieur le président ! Vous pouvez me faire confiance pour faire des propositions avec ma collègue Annie Genevard.
Volontiers, cher collègue !
On parle trop peu, cependant, des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Je crois donc que votre amendement est particulièrement opportun et pertinent car ces quartiers connaissent aussi une sous-représentation et parfois un vieillissement des médecins spécialisés, qui ont du mal à être remplacés.
Favorable, monsieur le président.
Je crois que l’auteure de cet amendement a tout à fait raison. Le nombre de médecins rapporté à la population est souvent inférieur de moitié, dans les quartiers en question, à ce qu’il est dans l’agglomération à laquelle appartiennent ces quartiers. Le nombre de médecins spécialistes rapporté à la population y est même inférieur de 74 % à ce qu’il est dans l’agglomération.
Si l’éloignement peut, dans l’esprit de tout un chacun, s’entendre comme un éloignement géographique, l’isolement de ces quartiers tient à leur histoire et aux difficultés socioculturelles qu’ils rencontrent. À ce propos, la liste des 1 300 quartiers prioritaires de la politique de la ville a été publiée il y a cinq jours au Journal officiel : 1 300 quartiers, par rapport à 2 600 auparavant ! Je le demande aux auteurs de cet amendement : est-ce que les 1 300 autres quartiers, qui resteront demain sur le carreau de la politique de la ville, pourront bénéficier du pacte une fois cet amendement voté ?
L’amendement no 1257 est adopté.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 2365 .
Madame la ministre, si nos territoires ruraux et nos zones urbaines sensibles souffrent de désertification médicale, que dire, alors, de nos territoires ultramarins ? Je prendrai l’exemple de mon territoire, Saint-Pierre-et-Miquelon : nous avons rencontré et nous rencontrons toujours des difficultés, notamment pour trouver des médecins qui souhaitent venir s’installer. De plus, nous sommes confrontés à un fort turnover des praticiens en exercice. Madame la ministre, avec mon collègue Serge Letchimy, nous avons, la semaine dernière, insisté sur la prise en compte de l’environnement régional, nous avons notamment insisté sur la coopération régionale. Je vous avais d’ailleurs interpellée, madame la ministre, il y a quelques semaines, avec Mme la ministre des outre-mer, et je vous avais interrogées sur la possibilité de laisser intervenir à Saint-Pierre-et-Miquelon, donc sur le territoire français, des médecins du Canada voisin, pour des missions ponctuelles. Cela illustre bien les spécificités, la complexité et la diversité des réponses à apporter dans nos outre-mer.
Cet amendement no 2365 vise donc à ce que des dispositions particulières soient prévues pour les départements et collectivités d’outre-mer.
Favorable.
Lors de cette audition, monsieur le député, je vous ai indiqué qu’une stratégie nationale de santé propre à l’outre-mer doit être adoptée pour prendre en compte les spécificités des divers territoires d’outre-mer, parce qu’il n’y a pas d’un côté l’hexagone et de l’autre l’ensemble des territoires d’outre-mer, qui seraient logés à la même enseigne. Il y a des enjeux de désertification médicale, il y a des enjeux d’hospitalisation, il y a des enjeux d’évacuation sanitaire, il y a aussi des enjeux de santé publique et de prévention. En ce qui concerne l’installation des professionnels, des dispositifs spécifiques, qui permettent de les attirer dans ces territoires souvent éloignés des régions où ils vivaient jusqu’alors, pourraient être utiles.
L’amendement no 2365 est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 1400 .
Je voudrais tout d’abord m’associer à l’indignation exprimée par mon collègue Gérard Bapt à la suite des arguments discriminants, inhumains, à la fois irrecevables et extrêmement préoccupants que Mme Greff a avancés.
L’amendement no 1400 , que je présente maintenant, vise à permettre que les représentants des centres de santé siègent au sein du comité de suivi du pacte national de lutte contre les déserts médicaux. Nous pensons qu’ils y ont toute leur place, d’abord parce que les centres de santé sont des lieux de soins de proximité, qui permettent une prise en charge globale et coordonnée des patients, mais aussi, je veux le souligner, parce que leur mode de fonctionnement collectif répond largement à l’aspiration des jeunes médecins. Ils en attirent donc de nombreux, qui envisagent l’exercice de leur profession non pas dans un cadre individuel mais plutôt dans un cadre collectif, plus riche et de nature à permettre une meilleure organisation de leur vie professionnelle et de leur vie privée.
Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement.
La commission, madame la députée, a émis un avis défavorable, mais il ne s’agit pas là d’un jugement sur l’opportunité de votre proposition. Simplement, à ce stade, nous ne connaissons pas avec précision la composition de la liste des acteurs qui siégeront au comité national chargé de la mise en oeuvre du pacte territoire santé. Peut-être Mme la ministre souhaitera-t-elle compléter cette réponse mais, à ce stade, la commission, sans juger de l’opportunité de votre proposition, ne l’a pas retenue.
Je vous demanderai, madame la députée, de retirer votre amendement. Sinon, je serais obligée d’émettre un avis défavorable, non pas sur le principe, mais tout simplement parce que la composition de ce comité de suivi, qui témoigne d’ailleurs de la volonté d’institutionnaliser la lutte contre les déserts médicaux et de disposer d’éléments de suivi qui seront partagés par des acteurs extrêmement différents, la composition de ce comité sera définie par décret au terme d’une concertation. Les centres de santé ont évidemment vocation à y participer, mais personne d’autre, aucune autre structure, aucun professionnel n’est évoqué, à ce stade, dans le texte de l’article. Il serait donc étrange d’y introduire les représentants des seuls centres de santé alors que d’autres professionnels y siégeront évidemment : les professionnels libéraux, dans leur diversité. Il faut donc renvoyer au décret, et je vous demande de retirer votre amendement.
J’accepte de retirer mon amendement au bénéfice de ces explications. J’espère, je souhaite que les acteurs des centres de santé pourront siéger dans ces structures avec d’autres.
L’amendement no 1400 est retiré.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 2367 .
Il s’agit de préciser que les ordres professionnels doivent être représentés. C’est important, et ils ont tout à fait leur place – c’est conforme à leur rôle – dans le comité national qui est chargé d’assurer le suivi de la mise en oeuvre du pacte de lutte contre les déserts médicaux.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles opposées à l’amendement no 1400 .
Défavorable, monsieur le président.
Il est bien dommage, madame la rapporteure, que la commission soit défavorable à cet amendement, qui va dans le sens de l’exemple que je donnais et qui est de nature à permettre cette discussion que l’on doit avoir avec l’ordre et avec les organisations professionnelles sur la question de l’installation.
L’amendement no 2367 n’est pas adopté.
L’article 12 ter, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 12 ter.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement no 143 .
Nous savons tous, madame la ministre, que la répartition des médecins n’est pas homogène sur nos territoires, et que la situation y est parfois critique. Dans un pays qui a choisi de bâtir une grande partie de sa politique de santé et de solidarité autour du maintien à domicile, la raréfaction des médecins libéraux en milieu rural se pose donc comme un problème majeur auquel il convient d’apporter une réponse.
L’incitation, principalement exploitée jusqu’ici, ayant eu des effets contrastés et pas suffisamment satisfaisants, il paraît aujourd’hui opportun d’explorer une voie plus contraignante. Tel est l’objet du présent amendement, par lequel nous entendons réformer le numerus clausus en le régionalisant et en l’assortissant d’une obligation d’installation et d’exercice dans des zones médicalement sous-dotées.
La commission est défavorable à cet amendement, mais la rapporteure se permet de souligner une certaine contradiction. Depuis le début de cette séance, il nous est demandé de réaffirmer, pratiquement à tous les articles, la liberté d’installation. Nous avons entendu les explications de Mme la ministre et, pour ma part, je vous ai dit que cela figurait à l’article 38 du texte. Et voici que vous souhaitez insérer, après l’article 12 ter, des dispositions qui auraient pour objet de régionaliser le numerus clausus et d’obliger à l’installation et à l’exercice dans les zones sous-denses. Pour ma part, je confirme ce que je vous ai dit : ce n’est pas le choix qui a été fait et il me semble qu’il y a là une incohérence. C’est la raison pour laquelle je vous invite au retrait de cet amendement.
Même avis.
L’amendement no 143 est retiré.
L’offre liée à la permanence des soins de premier recours est assurée en premier lieu par les professionnels de santé habilités. Il faut, à cet égard, saluer le rôle absolument essentiel joué par des médecins généralistes et spécialistes de la ville et par les professionnels libéraux paramédicaux, de même que par les établissements de santé, médico-sociaux et sociaux. Ce ne sont cependant pas les seuls professionnels qui oeuvrent à la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé. Je pense notamment aux permanences d’accès aux soins de santé ainsi qu’aux services de protection maternelle et infantile, qui concourent indéniablement à l’offre de soins de premiers recours et qui doivent, par conséquent, voir leur rôle reconnu. Une telle reconnaissance permettrait une meilleure coordination territoriale des professionnels, qui seraient associés aux équipes de soins primaires et aux communautés professionnelles territoriales de santé qui organisent la structuration des parcours de santé, notamment pour les personnes se trouvant dans la plus grande précarité.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l’amendement no 2235 .
L’offre liée à la permanence des soins de premier recours est assurée en premier lieu par les professionnels de santé habilités. Les médecins généralistes et les centres de santé ont à ce titre un rôle particulier mais, bien sûr, d’autres professionnels contribuent à la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé.
Je m’arrêterai comme Mme Carrey-Conte et bien d’autres sur les centres de santé. Je ne peux pas accepter les propos qui ont été tenus à leur endroit. Je rappelle que le tiers payant existe depuis très longtemps et, si on sous-entend que ce serait de mauvais gestionnaires, ce n’est pas le cas du tout : ils acceptent tous les patients. Les patients ne font pas l’avance de leurs frais de santé, ce qui est le but du tiers payant – mais, ça, on y reviendra –, et je crois qu’il faut saluer ces centres de santé.
D’ailleurs, dans la discussion générale, j’ai pris l’exemple d’un assuré social qui disait que, ne pouvant accéder dans l’agglomération de Lille à l’offre de soins à laquelle il pouvait prétendre, eh bien, il se faisait suivre dans un centre de santé !
L’amendement no 2235 est donc défendu, monsieur le président.
La commission demande le retrait de ces amendements, mais il ne s’agit pas, pour la rapporteure, d’être insensible à la problématique qui est posée : vos demandes, monsieur Benoit, madame la présidente, sont aujourd’hui satisfaites par le droit actuellement en vigueur. L’article L. 1411-11 du code de la santé publique dispose que les professionnels de santé concourent à l’offre de soins de premier recours. Derrière cette appellation, on trouve tous les métiers relatifs aux soins, professions médicales et paramédicales, y compris, d’ailleurs, les infirmiers, et les professionnels de santé qui, quelle que soit la structure dans laquelle ils exercent, font du premier recours.
Voilà la raison pour laquelle je vous invite au retrait. Je me permets simplement de souligner à ce stade que vous trouverez, un petit peu plus loin, à l’article 26 du projet de loi, le dispositif de la permanence d’accès aux soins de santé, dans le cadre du projet régional de santé. C’est donc bien une problématique qui a été prise en compte. Les services de la protection maternelle et infantile ont, quant à eux, vocation à participer à la concertation portant sur le diagnostic partagé – vous trouverez cela au titre IV, à l’article 38.
Même avis. Monsieur le député, madame la présidente de la commission, je vous demande de retirer ces amendements, pour les mêmes raisons que j’ai données, tout à l’heure, à certains de vos collègues qui évoquaient les services de protection maternelle et infantile. Certes, ces services ont vocation à être associés aux professionnels de santé de premier recours, mais la loi définit les soins de premier recours en termes de missions, pas de structures. Elle n’énumère pas les structures qui sont susceptibles de faire partie de ces équipes de soins primaires ; ces structures sont englobées dans la notion d’équipe de soins primaires, ou dans celle de soins de premier recours.
Je vous demande donc de retirer ces amendements, à défaut, je serai obligée, comme pour les amendements précédents, de donner un avis défavorable.
Mme la présidente de la commission, retirez-vous l’amendement no 2235 ?
Non, je ne retire pas cet amendement, car je veux insister sur les permanences d’accès aux soins de santé, les PASS. J’ai le droit, monsieur le président, de ne pas retirer un amendement que j’ai signé, tout de même !
Je comprends mieux les arguments de Mme la ministre concernant les centres de protection maternelle et infantile : je les comprends même complètement. C’est différent pour les PASS. Dans le cadre de la mission d’information sur l’organisation de la permanence des soins, nous les avons auditionnés – M. Jean-Pierre Door peut en témoigner. Nous avons constaté qu’ils s’adressent à des publics très précaires ; ce sont des lieux de passage pour repartir vers les soins de premier recours de droit commun, si l’on peut dire. Je ne retirerai donc pas cet amendement, à cause des PASS.
Oh, mais ce n’est pas très correct vis-à-vis de Mme la ministre, tout cela !
Sourires sur les bancs du groupe UMP.
J’ai été très sensible aux arguments de Mme la rapporteure et de Mme la ministre, mais je suis encore plus sensible à ceux de Mme la présidente de la commission ! Par souci de coordination, et pour que ce texte soit le plus affiné possible, je maintiens donc cet amendement.
La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.
La séance est reprise.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Elle va devoir retirer son amendement ! Que cela doit lui être pénible !
Certains de mes collègues auront beau jeu de rire du fait que je retire cet amendement…
Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Pour leur expliquer la raison de ce retrait, je vais leur lire l’alinéa 11 de l’article 26 de ce projet de loi. Cet alinéa débute ainsi : « Dans le cadre de la mise en oeuvre du projet régional de santé, les établissements de santé mettent en place des permanences d’accès aux soins de santé, qui comprennent notamment des permanences d’orthogénie ». Il précise, un peu plus loin, que ces permanences doivent accompagner les patients « dans les démarches nécessaires à la mise en oeuvre de leurs droits ». Cela correspond à l’un des arguments que j’ai avancés tout à l’heure pour défendre l’amendement no 2235 , identique à l’amendement no 1798 présenté par M. Benoit.
Compte tenu de la rédaction de l’article 26, je retire cet amendement, madame la ministre, mais vous me connaissez : je suis opiniâtre, et je veillerai à ce que les PASS soient soutenus.
L’amendement no 2235 est retiré.
Je confirme, monsieur le président, que je maintiens l’amendement no 1798 .
Nous partageons le désarroi de Mme Lemorton ! Ce texte est censé être le fruit d’une large concertation, qui a duré des centaines d’heures, avec les professionnels concernés ; il est censé faire l’objet d’une unanimité parfaite, et être attendu avec impatience par le monde médical. Il semble, malheureusement, que cette concertation ne soit pas allée jusqu’à Mme Lemorton !
N’en faites pas trop ! Se lever pour dire cela, ça n’en vaut pas la peine !
Le fait que Mme la rapporteure et Mme la ministre soient en désaccord avec elle doit être assez pénible à Mme Lemorton : nous tenons à lui apporter tout notre soutien psychologique !
Sourires.
L’amendement no 1798 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement no 1818 .
La prise en charge de la douleur implique non seulement le soulagement de l’impression immédiate de la douleur, mais également son diagnostic, sa prévention et sa prise en charge sur le long terme. Pour cela, cet amendement propose que les médecins traitants puissent mettre en oeuvre un véritable parcours de soins pour les patients douloureux chroniques, en identifiant les acteurs impliqués dans leur prise en charge.
Madame la députée, je crois que beaucoup de nos collègues sont sensibles aux amendements que vous avez déposés pour insérer la prise en charge de la douleur dans les missions du médecin généraliste de premier recours. Je vous en remercie.
La commission a accepté cet amendement. Je crois que les médecins généralistes ont un rôle central à jouer, en premier recours, dans la prise en charge de la douleur. Il me paraît donc très pertinent de le préciser dans la loi.
Je tiens à rassurer M. Aboud : si nous donnons un avis favorable à l’amendement de Mme Massonneau, ce n’est pas parce que, comptant sur son esprit de contradiction, nous voulons qu’il se dédise et s’oppose désormais à cet amendement !
Sourires.
Comme l’a indiqué Mme la rapporteure, c’est pour des raisons de fond que nous sommes favorables à cet amendement de Mme Massonneau. Il est vrai que préciser cela, dans la loi, peut paraître superfétatoire, dans la mesure où les médecins de premier recours doivent déjà prendre en charge la douleur, mais nous savons, madame la députée, quel combat vous menez : je crois donc qu’il serait bon d’inscrire dans la loi cet objectif, qui est plus que symbolique. L’avis du Gouvernement est donc favorable.
Puisque nous sommes dans le registre de l’humour, je suis ravi que ma collègue du groupe écologiste veuille lutter contre les douleurs : évoquer les soins palliatifs, cela fait un peu oublier l’euthanasie, et c’est bien plus intelligent !
Nous sommes évidemment pour un accompagnement de la douleur et pour le développement des soins palliatifs – vous le savez très bien, monsieur Aboud. Cela ne m’empêche pas de continuer mon combat pour une aide active à mourir.
L’amendement no 1818 est adopté.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 633 .
Je suis désolée d’émettre un avis défavorable, car cet amendement a été repoussé par la commission. Je rappelle que le texte organise globalement la coordination des soins sur le territoire. Les sages-femmes ont bien sûr vocation à participer aux équipes de soins primaires et aux communautés professionnelles territoriales de santé. Mais nous n’avons pas choisi d’établir une liste à la Prévert, pour des raisons d’abord juridiques et parce qu’il existe un risque d’oubli.
L’amendement no 633 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Il s’agit de revenir sur un oubli regrettable de la loi HPST du 21 juillet 2009 qui, en définissant le premier recours, a omis les infirmiers alors que le médecin généraliste, le centre de santé et d’autres acteurs sont légalement reconnus comme des acteurs des soins de premier recours.
Avis défavorable car votre amendement est satisfait par le droit en vigueur. En effet, l’article L. 1411-11 du code de la santé publique dispose que les professionnels de santé concourent à l’offre de soin de premier recours. Or la notion de professionnels de santé recouvre tous les métiers relatifs aux soins : les professions médicales, bien sûr, mais aussi les professions paramédicales, dont les infirmiers. Ces professions sont réglementées par le code de la santé. Je rappelle également, comme je l’ai fait pour d’autres professionnels, que les infirmiers ont toute légitimité pour intégrer les équipes de soins primaires et les communautés professionnelles territoriales de santé.
L’amendement no 78 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Pour toute personne en perte d’autonomie, l’infirmière de famille en exercice libéral peut être reconnue comme infirmière référente et exerce en coordination d’appui avec le médecin traitant. Cet amendement a pour objet d’inscrire dans la loi la mission d’infirmière référente que de très nombreuses infirmières libérales remplissent déjà en coordination d’appui avec le médecin traitant : s’assurer de la coordination des soins des personnes en perte d’autonomie, surveiller leur état de santé, évaluer leur douleur et solliciter le médecin traitant dès que nécessaire. L’infirmière référente est un concept défendu depuis longtemps par la fédération nationale des infirmières, qui regroupe quand même quatre-vingts syndicats départementaux et environ 70 000 professionnels. Cette demande de reconnaissance figure dans leur livre blanc « Horizon 2030 ».
Étant donné la montée en puissance du nombre de personnes dépendantes et la volonté sociétale de vivre le plus longtemps possible chez soi, le déplacement des soins de la sphère hospitalière vers le domicile va se poursuivre et s’amplifier. Il ne faut pas se voiler la face : nous devons chercher des solutions pour maîtriser les coûts tout en permettant un accès garanti et sécurisé à des soins de qualité. Mes chers collègues, les infirmières sont une partie de la solution. En votant cet amendement, nous répondrons aux nécessités économiques et aux attentes des patients, qui préfèrent éviter l’hospitalisation dès lors qu’une prise en charge sécurisée par les infirmières peut être proposée à domicile. Nous répondrons également aux objectifs du programme « santé 21 » de l’Organisation mondiale de santé, qui prévoit que le choix d’une infirmière de famille soit possible pour tout Français à l’horizon 2030.
J’entends déjà Mme la ministre nous demander pourquoi nous ne l’avons pas fait avant. Je répondrai tout simplement que personne n’est parfait. Mais en inscrivant dans la loi le concept d’infirmière référente, nous pouvons ensemble aujourd’hui appliquer une idée pragmatique, qui sert notre système de soin et permet d’aider le médecin traitant.
Avis défavorable, madame la députée. La commission a repoussé cet amendement. Je l’ai dit tout à l’heure, les infirmiers ont toute légitimité pour intégrer les équipes de soins primaires et les communautés professionnelles territoriales de santé.
Nous avons choisi de confier au médecin traitant la mission de coordonner les soins.
Avis défavorable.
Pardonnez-moi d’insister sur ce point, madame la rapporteure. Vous dites que les infirmières ont toute légitimité pour coordonner les soins, mais elles sont des professionnels de santé et sont déjà des acteurs du système ! Le concept d’infirmière référente, ou infirmière de famille, existe non pas dans le droit en vigueur mais dans la pratique, puisque les infirmières remplissent déjà ce rôle de coordination avec le médecin traitant. Inscrire ce concept dans la loi est l’unique l’objet de mon amendement.
Ce faisant, je vous facilite la tâche, y compris sur le plan budgétaire, car de moins en moins de personnes pourront être hospitalisées et les besoins de suivi à domicile s’accroîtront. Une vraie coordination avec le médecin traitant sera nécessaire, d’autant qu’ils sont de moins en moins nombreux. Celui-ci doit donc pouvoir demander à l’infirmière d’être la référente : leurs activités sont complémentaires. De plus, nous répondons aux objectifs de l’OMS. Je ne comprends pas pourquoi vous dites que l’avis de la commission ne peut être que défavorable. En outre, cet amendement ne coûtera rien à l’État, il lui fera même faire des économies ; vous ne pouvez même pas invoquer l’article 40 de la Constitution !
L’amendement no 1734 n’est pas adopté.
Madame la ministre, vous avez fait tellement de concertations que vous êtes obligée de déposer en séance un amendement de six pages et demie, qui réécrit intégralement l’article 13.
La France s’honore d’avoir un double système de suivi des patients. Le système de secteur permet notamment aux équipes d’avoir accès à l’histoire du patient, ce qui lui assure une permanence historique dont les pathologies le privent le plus souvent. Néanmoins, notre système français comprend deux modes d’hospitalisation sous contrainte. Votre article supprime le rôle du préfet en la matière. Madame la ministre, quand vous êtes confronté à un paranoïaque, qui peut parfois être dangereux – certains confrères l’ont payé de leur vie –, il est utile de faire référence à une autorité supérieure représentant l’État. En effet, si les élus connaissent physiquement le préfet, ce n’est pas le cas des patients hospitalisés sous contrainte.
Ce double système français, unique en Europe, a l’avantage de pouvoir graduer la mesure d’hospitalisation sous contrainte : faire intervenir la famille lorsque cela est possible et permettre de concourir à la fois à une politique de santé et de prévention de troubles, en particulier lorsqu’il y a des dangers plus importants, dans le cadre de l’hospitalisation d’office. Mais il n’est pas raisonnable de supprimer le rôle du préfet.
De même, il n’est pas raisonnable de ne proposer qu’un seul article, qui concerne 1 % de la population générale pouvant être atteinte d’un syndrome schizophrénique – je ne parle pas des risques de dépression au cours de la vie –, alors que la démographie médicale en matière de psychiatrie est dans un état catastrophique, sans parler de la psychiatrie infanto-juvénile, qui agonise. Madame la ministre, il n’est pas sérieux de traiter le domaine de la psychiatrie dans un seul article, réécrit totalement par un amendement que vous avez déposé en séance et que nous n’avons pas eu le temps d’examiner correctement.
En déposant après la commission, en séance publique, un amendement visant à réécrire entièrement l’article 13, nous sommes privés de la possibilité d’amender un article essentiel, puisqu’il traite de la psychiatrie. Il faut noter que cette nouvelle rédaction intègre des avancées répondant à certaines de nos préoccupations. Il réintroduit par exemple la notion de secteur dans le code de la santé publique. De même, la prise en charge sans consentement y est désormais intégrée, ce qui satisfait l’un des amendements que nous avions déposés. Les conseils locaux de santé mentale, qui font la preuve de leur efficacité dans nos villes, sont mentionnés comme des acteurs à part entière dans l’organisation de la santé mentale et de la psychiatrie, ce qui est une bonne chose.
Toutefois, cet article aurait mérité d’être amélioré, notamment sur les modalités de définition des périmètres des secteurs. Il s’agit en effet de prendre en compte les réalités concrètes, sociologiques et démographiques des territoires pour les délimiter car un territoire de 200 000 habitants, par exemple, n’a pas grand-chose à voir avec la conception d’un secteur en psychiatrie. C’était l’objet d’un autre de nos amendements.
Enfin, je note que le diagnostic territorial partagé et le projet territorial de santé mentale sont arrêtés par l’agence régionale de santé, certes, après avis des conseils locaux de santé mentale et du conseil territorial de santé, mais ces acteurs ne sont pas consultés sur l’élaboration des contrats territoriaux, qui sont in fine la feuille de route imposée aux professionnels de santé. De plus, le texte précise que le diagnostic et le projet territorial peuvent à tout moment être révisés ou complétés sans préciser par qui. Je suppose que c’est une fois de plus par l’ARS seule. De toute évidence, cet article aurait mérité d’être amélioré en matière de démocratie sanitaire et sociale. Nous regrettons de ne pouvoir le faire.
Le coût des maladies mentales en France est évalué à 110 milliards d’euros par an, soit 5,7 % du PIB, sans parler du coût le plus terrible, le coût humain. D’après la fondation Fondamental, réseau de coopération scientifique en santé mentale, le diagnostic est sans appel : recours trop tardif à l’offre de soins, inégalités dans l’accès aux soins, inadéquation des pratiques avec les recommandations internationales, cloisonnement de l’organisation des soins, prise en charge insuffisante des tentatives de suicide – 11 500 décès chaque année –, sous-dotation persistante de la recherche. Autant dire que le chantier est immense et qu’il y a urgence.
Or, dans cette loi, un seul petit article, l’article 13, traite de la santé mentale. Il prévoit que la politique de santé mentale soit mise en oeuvre par l’ensemble des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux. C’est peut-être le début du commencement du décloisonnement. Le directeur général de l’ARS affectera à chaque établissement de santé en psychiatrie une zone d’intervention. Il serait utile qu’il affecte également des moyens humains et financiers.
L’article prévoit également que l’ARS veillera à la qualité et à la coordination des actions de soutien et d’accompagnement des familles menées par les établissements et les associations. Nous nous demandons comment vous allez vous y prendre car le moins que l’on puisse dire, c’est que le dialogue est difficile, voire inexistant. En résumé, nous doutons que ce seul article 13 suffise à soigner la santé mentale dans notre pays, qui en a pourtant bien besoin.
Madame la ministre, j’ai deux sujets à vous soumettre, qui se traduiront chacun par un amendement. Le premier porte sur les rapports de la santé mentale et des soins psychiatriques, qui ne recouvrent pas des réalités exactement identiques. La première a un champ beaucoup plus large que les seconds : l’Organisation mondiale de la santé signale, d’ailleurs, que la santé mentale ne peut être réduite à l’absence de troubles psychiatriques.
Soit on considère qu’il suffit de parler de santé mentale, et je précise que ce n’est pas le cas de l’article, pour parler de psychiatrie, soit on considère qu’il existe une spécificité des maladies psychiatriques, comme les psychoses et les dépressions graves notamment, et dans ce cas la référence systématique à la psychiatrie est absolument nécessaire et doit être précisément explicitée.
À l’inverse, les névroses ou les petits troubles neurovégétatifs divers comme l’anxiété ressortent véritablement de la santé mentale.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Ces cas sont bien plus nombreux que les cas relevant de la psychiatrie.
Cela a autant de sens que ce que vous avez dit. J’ai autant de compétences que vous pour parler de ce sujet.
Le deuxième sujet que je veux évoquer est celui de la variabilité et de l’instabilité des troubles psychiques ou psychiatriques, qui exigent, peut-être plus que dans le cas des maladies physiques, une continuité et une adaptabilité des soins. La notion de parcours y est essentielle. L’objectif est bien de prévoir une organisation qui mette les patients à l’abri de toute rupture. Dans ce domaine plus que dans celui des troubles physiques, la rupture est souvent catastrophique, pour les personnes concernées comme pour leur famille.
Ce sujet n’est pas nouveau. Beaucoup de nos collègues sont intervenus en insistant sur les insuffisances du dispositif actuel : je crois que nous en sommes tous à peu près conscients. Élu d’une région non pas sinistrée, mais qui malheureusement connaît une démographie médicale fortement insuffisante dans ce domaine, je suis principalement préoccupé aujourd’hui de constater qu’il y a beaucoup de patients. Cela, chacun peut le constater, en particulier parmi les plus jeunes.
Or on sait que, souvent, une certaine forme de délinquance est liée à des problèmes psychiatriques : deux jeunes sur trois incarcérés aujourd’hui en souffrent. Pourtant, si on avait pu les traiter en amont, ils n’auraient pas connu les difficultés qu’ils rencontrent en étant provisoirement mis à l’écart de la société.
Or les praticiens libéraux ont déserté le terrain..
…car ils exercent, aujourd’hui, plutôt en ville, là où où il existe un public plus facile, où on rencontre moins de toxicomanes, et où plus de personnes ne souffrent que de quelques états d’âme.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Il leur est beaucoup plus facile d’avoir des patients relativement accessibles, car les plus difficiles sont pris en charge par le secteur public. J’irai même plus loin : dans les quartiers dont parlait tout à l’heure l’un de nos collègues, situées en Zones urbaines sensibles, en ZUS, on fait appel, faute de pouvoir trouver des psychiatres, à des psychologues. Cette situation s’explique tout simplement parce que, dans le cadre des réseaux d’éducation prioritaire et de la politique de la ville, l’État a – et c’est heureux – fait des efforts. Il y a consenti des dotations pour embaucher des psychologues qui viennent remplacer les psychiatres.
Ce sujet est donc central, mais il n’est pas nouveau : depuis des années, on laisse la psychiatrie se casser la figure car elle ne constitue pas une priorité. Je crois qu’il est heureux que nous abordions dans cette loi, avec cet article 13, ce sujet qui me paraît absolument fondamental et essentiel pour la bonne qualité de vie dans nos quartiers.
Je sais bien que nous traitons de santé mentale, et j’aurai l’occasion d’y revenir un petit peu plus tard. En fait, l’une des interventions de Mme la ministre m’a donné l’idée des propos que je vais tenir, que d’aucuns pourrait trouver un peu décalés.
Sourires.
Mme la ministre nous invitait tout à l’heure à essayer de dépasser un peu nos différences et à revenir au fond des choses. Je crois que, d’une manière générale, c’est précisément ce qui est en train de se passer. Mais, voyez-vous, nous traitons d’un sujet qui a un impact considérable sur l’ensemble de notre pays et de nos compatriotes, et qui montre bien notre incapacité à sortir de la situation dans laquelle nous sommes.
Les trois derniers présidents de la République qui sont arrivés au pouvoir, MM. Chirac, Sarkozy et Hollande, ont tous trois promis de revoir notre position à l’égard du pacte de stabilité et de croissance, qui comprenait le fameux critère des 3 %, et du projet européens. Aucun n’a tenu parole, et le dédouanement le plus spectaculaire a été le fait – il faut en convenir en toute simplicité – de M. Hollande, parce qu’il y avait ajouté le discours du Bourget sur la finance.
Mais comment voulez-vous, monsieur le président – je m’adresse à vous car vous incarnez l’Assemblée – que notre pays puisse trouver une solution à un problème qui demande précisément un effort qui ne pourra jamais être équilibré par les recettes qu’il générera ? Je veux parler de la santé, de notre santé à tous. Nous avons gagné vingt ans d’espérance de vie et c’est une bonne chose. Mais notre industrie est à terre et notre agriculture moribonde. Nous n’avons pas les moyens de faire entrer dans notre pays l’argent qu’il faudrait : nous sommes totalement bloqués par le pacte de stabilité européen.
Madame la ministre, vous nous invitiez à réfléchir sur quelques uns des problèmes qui pourraient nous bloquer tous et j’ai voulu en évoquer un au hasard.
Madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame le rapporteur, je veux d’abord répondre en deux mots à M. Dhuicq s’agissant du préfet. Son rôle n’est pas atténué par le projet de loi, pas plus que par l’amendement no 2217 .
Même s’il fait l’objet d’une modification de détail, son rôle habituel, qui comprend notamment la possibilité de décider de l’admission en soins psychiatriques, est maintenu tel qu’il avait été confirmé par les lois du 5 juillet 2011 et du 27 septembre 2013.
Sur le texte lui-même, je me félicite que l’amendement no 2217 ait été déposé, puisqu’il fait la synthèse de tout ce qui a pu être discuté depuis le dépôt l’an dernier du projet de loi. Du coup, nous allons statuer sur un texte qui, me semble-t-il, est important. Il l’est d’abord car dans un projet de loi d’importance dans le domaine de la santé comme celui dont nous débattons depuis le début de la semaine, il me semblait important que nous discutions de santé mentale.
Vous avez souligné tout à l’heure l’importance de la prévalence des maladies mentales. On sait que 25 % de la population connaîtra dans sa vie une maladie mentale, et, pour prendre un autre exemple, que le taux de prévalence de la schizophrénie est, à lui seul, de 1 %. Il ne s’agit donc pas d’une maladie rare.
Ensuite, on peut se dire qu’un seul article est consacré à ces questions. Mais il est d’importance, et, en matière de politique publique, la loi n’est pas tout. Nous sommes en effet là pour permettre, pour orienter, pour interdire également, c’est-à-dire pour fermer certaines portes, mais pas pour définir la totalité d’une politique à travers la loi. La politique n’est pas que la loi. Encore faut-il que cette politique soit définie.
Qu’y a-t-il dans cette loi qui me paraît important ? D’abord, sur la question particulière de la santé mentale et de la psychiatrie, la démocratie sanitaire joue désormais un rôle important, à travers notamment les conseils locaux de santé mentale ou les sections spécialisées des conseils locaux de santé. Un lien particulier avec les élus qui portent, en matière de santé mentale, des positions favorables à l’abandon de toute stigmatisation et à l’accès aux dispositifs de droit commun, la favorise également.
La place des usagers me paraît également importante, mais nous aurons l’occasion de l’évoquer dans la suite de nos débats. Nous aurons également l’occasion de développer d’autres aspects qui sont également présents dans le texte. Monsieur Dhuicq, vous avez relevé l’importance des secteurs qui est affirmée par ce texte alors que, dans la loi HPST, avaient été supprimées les deux tiers des occurrences du mot secteur.
Au-delà de mon patronyme et du fait que la Fondation du Bon Sauveur d’Alby, qui mène un travail tout à fait remarquable en matière de santé mentale, se trouve au coeur de ma circonscription, je voudrais revenir sur un point concernant la démographie médicale que je n’ai pu développer tout à l’heure concernant l’article 12.
Madame la ministre, ce que vous nous avez proposé au travers de ce texte sera un échec : un échec cuisant, comme l’ont été toutes les politiques menées par vos prédécesseurs depuis une quinzaine d’années. Tant que l’on ne s’attaquera pas au coeur du problème, c’est-à-dire à l’installation des médecins notamment en milieu rural ou dans les zones sensibles, nous n’obtiendrons en la matière pas de résultats probants.
J’avais déposé un amendement à ce sujet. Je regrette, madame la présidente de la commission, qu’au travers d’une utilisation erronée et contestable de l’article 40, celui-ci n’ait même pas pu être examiné en séance. Il s’agit de quelque chose d’important : en deux mots, cet amendement consistait à calquer le mode d’installation des médecins sur celui des pharmaciens. Car on peut dire ce que l’on veut, mais où que l’on soit sur le territoire national, on se trouve partout – en milieu rural, dans les villes moyennes, en zone péri-urbaine, en centre-ville comme dans les quartiers difficiles – à proximité d’une pharmacie. Un jour, il faudra qu’au sein de l’Assemblée nous posions cette question, afin de revenir à des propositions constructives et efficaces et de remédier enfin à ce qui va devenir demain un véritable fléau : je veux parler des difficultés d’installation des médecins, notamment en milieu rural.
Dans ma circonscription, dans le secteur des monts de Lacaune, quasiment tous les médecins ont soixante ans révolus.
Et d’ici quelques années, nous subirons des déserts médicaux, avec tout ce que cela comporte. À un moment ou à un autre, il faudra que nous prenions conscience de la nécessité de sortir des stratégies que nous avons adoptées, et qui se sont toujours révélées des échecs, pour aller vers un dispositif certainement plus directif, mais qui permettra, en tout état de cause, de résoudre un problème majeur de santé publique.
Madame la ministre, déposer un amendement de sept pages qui prétend recomposer la politique en matière de psychiatrie dans notre pays pose plusieurs problèmes. Le premier tient simplement au respect du Parlement et du travail des parlementaires, mais il ne me semble pas le plus sérieux.
Plus sérieux est le peu de cas que vous faites des malades psychiatriques et de leurs familles. Près de 3 % la population souffre d’une psychose et 1 % de schizophrénie. Je crois que la gravité de ces maladies, leurs conséquences pour les malades, leur environnement comme leurs familles, méritaient au moins de votre part un travail plus sérieux et une concertation plus approfondie. La situation de la psychiatrie en France est grave : elle se trouve dans un état critique. Plusieurs domaines mériteraient d’être totalement revisités.
Dans le temps extrêmement restreint qui m’est imparti, je voudrais attirer votre attention sur la démographie des médecins-psychiatres et sur les insuffisances en matière d’établissements spécialisés, en particulier en matière de pédopsychiatrie. Cette dernière se trouve dans un état misérable dans notre pays. Parfois, en matière d’autisme notamment, certaines écoles ne sont pas encore au fait de l’actualité scientifique et se cantonnent aux vieilles lunes qui ont fait souffrir tant de familles et créé tant de malheur dans l’entourage des enfants autistes.
Madame la ministre, nous vous demandons de vous ressaisir sur ce sujet : vous ne pouvez pas continuer de cette manière sur une question aussi grave. Cet article ne peut pas passer à côté des questions de formation qui est tout à fait insuffisante dans bien des domaines. Mais j’y reviendrai au travers de certains amendements.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Je voudrais répondre, plus sur la forme que sur le fond, à M. Folliot, qui m’a reproché le fait que son amendement ait été déclaré irrecevable au titre de l’article 40. Monsieur Folliot, je vous rappelle que ce n’est pas moi qui ait ce pouvoir, mais le président de la commission des finances, c’est-à-dire M. Carrez, qui en a ainsi décidé.
Cet amendement me permet de présenter le cadre dans lequel nous inscrivons dans la loi les parcours de santé mentale et l’organisation du travail entre les différents acteurs du secteur, et de répondre à certaines interpellations.
Il est vrai que cet amendement a été déposé il y a une dizaine de jours afin de tirer les conséquences à la fois du travail qui a été réalisé sur l’article 12, puisqu’à partir du moment où nous redéfinissions le cadre de cet article nous devions en tirer les conséquences pour la santé mentale.
Il s’agissait aussi, M. Robiliard l’a souligné, de prendre en considération et de rassembler un certain nombre d’amendements qui avaient été présentés.
Cet article, au fond, s’inscrit dans le prolongement de la réflexion que j’ai lancée à l’occasion de la visite que j’ai effectuée en septembre 2014 au centre hospitalier Sainte-Anne. J’ai souhaité mettre au coeur de la réflexion la nécessité pour l’ensemble des acteurs de la santé mentale de travailler en partenariat pour mieux prendre en charge cette maladie, préciser la place des professionnels dans les futurs groupements hospitaliers de territoire ainsi que le rôle, la mission de la psychiatrie de secteur.
Un grand nombre d’acteurs ont contribué à cette réflexion. J’ai notamment confié M. Michel Laforcade la mission de proposer des perspectives. Il a effectué un travail extrêmement approfondi, puisé à de nombreuses sources, échangé avec l’ensemble des acteurs, les familles, les professionnels bien sûr, et je salue tout particulièrement les contributions des présidents des commissions médicales d’établissements psychiatriques, en particulier le président de leur conférence, M. Muller. Je tiens aussi à saluer le travail qui est mené de façon constante dans votre assemblée depuis près de trois ans par M. Robiliard, qui a également contribué à alimenter cette réflexion.
Je ne reviens pas, ce serait trop long, vous l’avez fait déjà à plusieurs reprises, sur la situation que nous trouvons dans notre pays. Il y a des données statistiques préoccupantes. Lorsque l’on dit que 25 % de la population sera confrontée à des troubles psychiques sous forme de souffrance psychique, de troubles mentaux sévères ou graves, c’est un problème considérable. Lorsque l’on rappelle que la France fait partie des pays les moins bien « classés » au niveau européen pour le taux de suicide, c’est un sujet de préoccupation, en particulier pour les adolescents.
Ces dispositions tendent donc à corriger des inégalités sociales, des inégalités territoriales, qui s’accroissent, et à permettre aux patients de s’adapter, d’être pris en charge lorsqu’ils alternent des phases aiguës et des phases de stabilisation.
De ce point de vue, j’ai eu l’occasion de le souligner à plusieurs reprises, la santé mentale a été un élément précurseur dans la démarche que je voulais engager, avec des parcours de santé et la coordination des acteurs. Au moment où cela s’installe dans l’ensemble du système de santé, la psychiatrie doit jouer son rôle d’éclaireur en quelque sorte et, en tout cas, trouver sa place dans le dispositif.
Deux orientations doivent donc désormais guider notre action, d’une part développer la prévention et l’accès à un diagnostic précoce, d’autre part, rendre accessibles de façon coordonnée l’ensemble des techniques et des modalités de prise en charge, en tenant compte évidemment des progrès les plus récents des connaissances en matière de traitements médicamenteux, de psychothérapie, d’intervention psychosociale.
L’amendement qui est présenté porte sur trois orientations.
Première orientation, donner un cadre pertinent au déploiement de la politique de santé mentale.
C’est le sens de la création du projet territorial de santé mentale, qui devra associer l’ensemble des acteurs d’un territoire pour définir un cadre adapté au travail collectif et coordonné. Cela devra bien sûr se faire dans le respect des missions de chacun, mais avec sans cesse l’objectif de renforcer la prévention, d’améliorer le soin et de garantir l’insertion.
Ces coopérations mobiliseront les médecins traitants, bien sûr, les psychiatres, l’ensemble des professionnels des secteurs sociaux et médico-sociaux, les élus locaux, mais aussi l’éducation nationale et la protection judiciaire de la jeunesse, qui sont des acteurs incontournables pour la prise en charge des enfants et des adolescents.
Deuxième orientation, conserver les acquis de la politique de secteur, que ce soit pour les adultes ou pour les enfants et adolescents.
Il y a des acquis essentiels que je souhaite rappeler : l’accès garanti en proximité à des soins psychiatriques au tarif opposable, délivrés par des équipes pluri-professionnelles qui assurent la continuité des prises en charge, notamment par des soins ambulatoires, y compris au domicile des personnes quand c’est nécessaire. Ce sont des acquis que le secteur doit préserver, tout en renforçant la logique du parcours.
Certains craignent que la constitution des groupements hospitaliers de territoire ne vienne mettre à mal ces logiques. Ce ne sera pas le cas et je redis ici avec force que le principe de l’appartenance d’un établissement ayant une activité de psychiatrie à plusieurs groupements hospitaliers de territoire au titre du projet médical est acquis. Cela se fera à travers les communautés psychiatriques de territoire, qui organiseront la coordination des acteurs hospitaliers de la psychiatrie.
La troisième orientation, c’est le renforcement de la démocratie sanitaire par les conseils territoriaux de santé et les conseils locaux de santé mentale.
Nous devons saluer leur action, encourager le plus grand nombre de collectivités locales à créer de tels lieux de concertation…
…parce que c’est grâce à l’implication des communes notamment que les personnes handicapées psychiques peuvent accéder à des logements de droit commun dans le cadre d’un accompagnement sanitaire et médico-social.
De nombreux sous-amendements et amendements ont été déposés, ce qui prouve que le texte a été examiné.
Oui, il s’agit d’un article majeur,…
…qui permet d’inscrire la santé mentale dans le cadre de la réorganisation de notre système de santé.
Mesdames, messieurs de l’opposition, je suis plutôt fière de défendre cet amendement et ce texte…
…car, au fond, je marque ma différence par rapport à la politique que vous avez menée.
Il y a ceux pour lesquels la psychiatrie et les enjeux de sécurité sont toujours intimement liés. Au fond, les classes dangereuses sont sans doute des classes souffrantes.
Ce qui est dangereux, c’est de ne pas réfléchir suffisamment et d’improviser dans un domaine aussi important !
La psychiatrie n’est pas un enjeu de sécurité, c’est un enjeu de santé, et c’est ce qui est ici réaffirmé, dans le respect de nos objectifs pour la santé mentale.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
En tout cas, vous pouvez être tranquille, vous allez marquer l’Histoire !
Nous passons à l’examen des différents sous-amendements.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir le sous-amendement no 2471 .
Ce sous-amendement tend à supprimer l’alinéa 4 de l’amendement mais il ne peut pas être compris indépendamment du sous-amendement no 2475 , qui tend à compléter l’alinéa 53 pour préciser que l’on entend par secteurs des territoires de proximité qui sont appelés secteurs de psychiatrie.
L’idée, c’est qu’il ne fallait pas faire disparaître le secteur derrière la notion d’activités de psychiatrie de secteur. Le secteur, c’est quelque chose qui est enraciné, qui est articulé sur un territoire déterminé. C’est un territoire de proximité. On tient compte de ses particularités géographiques, de ses particularités sociologiques, et il fallait l’affirmer comme un territoire.
Cela dit, soyons clairs, le secteur, c’est un outil, ce n’est pas un carcan, il faut aussi penser à l’intersectoriel et au non sectorisé.
Vous aurez ainsi défendu le sous-amendement no 2475 , monsieur Robiliard.
Vous avez maintenant la parole pour soutenir le sous-amendement no 2478 .
C’est la question des soins sans consentement. Nous n’allons pas revenir sur le détail de la loi qui a été modifiée par la loi du 27 septembre 2013 à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 20 mai 2012. Le Gouvernement réécrit l’article L. 3213-9 du code de la santé publique. La différence, c’est que l’information n’est plus donnée au parquet, qui est avisé actuellement de façon systématique quand intervient une hospitalisation sous contrainte.
Moi, je ne souhaite pas que l’on supprime le parquet. Il s’agit bien en effet, c’est le Conseil constitutionnel qui nous le dit, d’une atteinte aux libertés, même si c’est nécessaire. Or le parquet, c’est l’institution judiciaire, et l’institution judiciaire, selon l’article 66 de la Constitution, est la gardienne des libertés individuelles.
On pourra me répondre que l’information est donnée à la commission départementale des soins psychiatriques, mais le parquet a une permanence, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce qui n’est pas le cas de la CDSP.
Je reconnais que c’est surtout une question de principe car, dans la réalité, semble-t-il, les avis sont classés sans être lus, en tout cas dans un grand nombre de parquets, mais, d’un point de vue politique, il me paraît très important pour les libertés que le parquet, c’est-à-dire l’institution judiciaire, continue d’être informé.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir le sous-amendement no 2432 .
Il s’agit de tenir compte de l’action menée par les différents intervenants, notamment associatifs, dans la politique de santé mentale.
Vous avez la parole, madame Laclais, pour soutenir le sous-amendement no 2454 rectifié .
Il s’agit de rétablir une disposition adoptée en commission prévoyant que le conseil territorial de santé mentionné à l’article L. 1434-9 comprend une commission spécialisée en santé mentale.
L’amendement qui nous a été présenté par le Gouvernement a repris les éléments dont nous avions discuté en commission à l’exception des dispositions que je m’autorise à proposer en sous-amendement.
Sur le fondement de l’article 58.
Les sous-amendements portent sur des questions très différentes les unes des autres. Il est vrai que le premier que j’ai présenté ne peut pas se comprendre indépendamment d’un autre intervenant cinquante alinéas plus loin mais c’est le seul. Je crains que, si nous les examinons tous ensemble, notre débat manque de clarté et il me paraît préférable, monsieur le président, de les appeler un par un.
Il avait semblé préférable pour la clarté des débats qu’il y ait une présentation de l’ensemble, mais je suis tout à fait d’accord pour qu’ils soient examinés un par un.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.
Au titre de l’article 58, alinéa 3, monsieur le président.
Ces conditions de travail sont indignes, sur une question aussi grave, dans une procédure d’urgence, avec un amendement de six pages et demie, d’une complexité dont même votre majorité s’inquiète et s’émeut à juste titre.
Nous ne pouvons pas continuer à travailler dans de telles conditions. Je vous demande, madame la ministre, de renoncer à l’urgence, de revenir à une procédure normale,
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP
de déclarer qu’aucune CMP ne sera convoquée avant la navette.
Pour être fier de refonder le système de soins français, on ne le fait pas dans l’urgence, surtout sur des questions aussi dramatiques que la psychiatrie en France.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Nous allons donc revenir aux sous-amendements déjà défendus pour les mettre un par un aux voix.
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement no 2471 ?
Le sous-amendement no 2471 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis bien embêtée, et M. Robiliard le sait. Je donne un avis défavorable. C’est un amendement qui, évidemment, a été examiné très attentivement par la chancellerie.
Vous dites que, d’une certaine manière, la décision en cause porte atteinte à la liberté. C’est exact. C’est la raison pour laquelle le juge des libertés est informé systématiquement – et, dans la plupart des cas, il peut l’être vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Or, aujourd’hui, les récépissés arrivent dans les parquets et s’entassent sur un bureau, sans être traités. Il y a donc un côté fictif.
On peut certes considérer que, quand bien même cela est fictif, un envoi au parquet apporte une garantie de texte ; mais, très concrètement, la commission départementale et le juge des libertés sont saisis.
C’est concret. Le juge des libertés est le garant des libertés. Cette procédure apporte de la sécurité, au regard des libertés individuelles et publiques, et du réalisme, au regard des pratiques actuelles. C’est pourquoi je donne au sous-amendement un avis défavorable, en espérant que vous comprenez ma logique.
Cet amendement est en fait un article totalement réécrit dans l’urgence, avec douze sous-amendements qui interviennent sur des sujets très différents les uns des autres. Malgré votre mirifique concertation, madame la ministre, il nous sera donc impossible de connaître, à la fin de notre discussion, quel sera le texte définitif.
Selon l’exposé des motifs, l’amendement prévoit de supprimer le rôle des préfets.
C’est pourtant écrit noir sur blanc dans l’exposé des motifs. J’appelle également votre attention sur l’article 13 quater, qui est totalement délirant et qui a sans doute été proposé par des gens qui n’ont jamais vu un patient de leur vie et qui ne sont jamais entrés dans une chambre d’isolement. Madame la ministre, quand un patient n’a plus de contenant interne, il faut bien un contenant externe. Quand un patient arrive aux urgences et qu’il a pris des produits que nous ne connaissons pas et que nous ne pouvons pas le soigner avec des médicaments, il faut bien avoir recours de temps en temps à la contention. Vos articles sont totalement incohérents. Comment voulez-vous que je m’y repère avec un amendement, qui est un article, et douze sous-amendements complètement différents ? C’est un scandale, qui relève du mépris du peuple et du mépris du Parlement !
Il faut discuter le texte dans l’ordre, sans quoi nous ne nous y retrouvons pas. Par conséquent, si vous le voulez bien, je m’expliquerai tout à l’heure au sujet de l’article 13 quater, dont je suis le responsable, et non pas Mme la ministre.
Vous n’allez pas continuer, au motif que l’amendement fait six pages et demie, à refuser de discuter de la teneur de l’article,…
…alors que nous sommes très proches, monsieur Accoyer, de ce qui s’était discuté dans le cadre de l’article 13. La modification considérable apportée à l’article 12 en commission a imposé de rédiger à nouveau l’article 13, en intégrant ce dont nous avions nous-mêmes discuté. Il n’est pas vrai qu’il s’agit d’une matière nouvelle. N’allez donc pas nous expliquer que, parce qu’il s’agit d’un amendement, vous ne pouvez pas en discuter. Si j’ai été en mesure de déposer des sous-amendements, vous étiez également en mesure de le faire.
Enfin, madame la ministre, s’agissant de la question des libertés, le juge des libertés et de la détention, n’est pas systématiquement saisi.
Il est saisi dès lors que l’on dépasse le huitième jour. En effet, il existe un délai de huit jours pour le saisir, et il doit statuer dans un délai de douze jours.
Absolument ! C’est incroyable qu’une ministre puisse commettre une faute aussi grave et aussi dangereuse !
Toutes les personnes qui font l’objet d’une hospitalisation sans consentement ne restent pas nécessairement hospitalisées plus de huit jours. Il y a donc, heureusement, une quantité de personnes qui passent un bref séjour sous la forme de l’hospitalisation sous contrainte et qui ne font pas l’objet d’une saisine du juge des libertés et de la détention. Ces personnes-là ne sont pas oubliées pour autant, puisque, je le répète, la commission départementale des soins psychiatriques est, elle, systématiquement avisée.
Si j’attache une telle attention à ce sujet, c’est parce que, en matière de liberté, nous devons faire attention à ce que nous a dit le Conseil constitutionnel, lequel a fait de l’institution judiciaire un gardien, en s’appuyant sur l’article 66 de la Constitution. Ce serait paradoxal de réduire l’information de l’institution judiciaire, alors que, avec la loi du 5 juillet 2011, vous l’avez placée, comme l’obligeait le Conseil constitutionnel dans sa décision du 26 novembre 2010, au centre du dispositif de contrôle. Telle est la logique.
Je trouve que le débat s’engage bien mal sur un sujet dont nous avons tous dit qu’il était ultrasensible. Nous avons regretté qu’il n’y ait qu’un article dans cette loi santé qui traite de la santé mentale. De surcroît, cet article a été totalement réécrit, comme vous l’avez dit vous-même, madame la ministre. Ce n’est vraiment pas sérieux. On nous dit que, pour répondre à la grogne des médecins, une conférence nationale avec les médecins sera organisée après la loi. En ce cas, à quoi servons-nous ?
Nous sommes en train de rédiger et de voter une loi. Ce que nous sommes en train de décider est attendu. Nous commençons à entrer dans le détail et dans le concret de ce qui est inscrit dans cet article, alors que nous n’avons même pas discuté du cadre. Lorsque je lis que « la politique de santé mentale, à laquelle l’ensemble des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux, notamment les établissements autorisés en psychiatrie, contribue, est mise en oeuvre par des actions de prévention, de diagnostic, de soins, de réadaptation et de réinsertion sociale », je me demande qui va piloter la santé mentale dans notre pays demain. Est-ce que ce seront les ARS ? Les établissements de santé ? Le préfet ? Le conseil départemental ? Nous ne savons même pas qui va piloter cette politique !
Certes, nous pouvons aligner de bonnes intentions, mais une fois de plus – et ce n’est pas la première fois dans une loi – nous ne savons pas qui va piloter la politique et, partant, qui en sera responsable. La mise en oeuvre concrète sur le terrain posera mille et une difficultés, si bien que, dans un an, nous aboutirons au même constat, à savoir que la santé mentale est toujours le parent pauvre de la santé dans notre pays.
Dans l’article 12, nous avons créé des communautés professionnelles territoriales de santé. Ici, il est question d’un projet territorial de santé mentale. J’espère que le projet territorial de santé mentale sera inclus dans le projet territorial de santé tout court ! Alors que nous avons dit qu’il fallait décloisonner, n’allons pas créer un projet territorial de santé mentale complètement à part. Si nous créons des communautés qui rassemblent tous les acteurs et si nous avons des projets qui reposent sur les besoins d’un territoire, j’espère que la santé mentale y sera associée. Je pense qu’il faut tout réécrire et tout revoir. La méthode qui nous est proposée ce soir n’est pas acceptable.
Je craignais exactement le débordement qui est en train de se produire, en reprenant un à un chaque sous-amendement et en laissant chacun reprendre la parole. Les débats risquent d’être très longs et de ne pas se concentrer sur le fond.
Maintenant que chacun a pu s’exprimer sur le sous-amendement no 2478 , je vais le mettre aux voix.
Le sous-amendement no 2478 est adopté.
Le sous-amendement no 2432 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement no 2454 rectifié , qui a déjà été présenté ?
J’ai également donné les explications tout à l’heure. Pour répondre à Mme Le Callennec, sachez que ce sous-amendement vise à proposer que le conseil territorial de santé comprenne une commission spécialisée en santé mentale.
Favorable.
Madame la ministre, je vous le dis calmement, nous avions débattu de l’article 13 en commission des affaires sociales il y a une semaine. Nous avions obtenu des explications de la part de M. Robiliard qui est parfaitement au fait de ces sujets, pour avoir notamment rédigé un rapport sur la mission de santé mentale validé au sein de la commission. Mais aujourd’hui, brutalement, depuis trois quarts d’heure, un nouveau texte remplace le précédent !
Nous n’avons pas pu le voir, et je n’ai pas compris le moindre terme, ni le moindre alinéa. Je vois que M. Robiliard demande la suppression de certains alinéas. Tout le monde est aujourd’hui, à cette heure, dans la pagaille la plus complète sur un sujet majeur.
Madame la ministre, par sagesse, je pense qu’il faut retirer tout cet amendement et tout l’article 13. Cela devrait faire partie non de cette loi santé, qui sera examinée à la va-vite jusqu’à la fin de la semaine, avant le vote solennel mardi prochain, mais d’une loi de santé mentale.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Nous aurions alors le temps d’en parler, quand nous sommes ce soir dans la pagaille la plus complète. Cela n’est pas satisfaisant du tout.
Le sous-amendement no 2454 rectifié est adopté.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir le sous-amendement no 2485 .
J’entends aussi à mon tour, madame la ministre, vous demander si vous êtes consciente de ce que nous sommes en train de faire sous votre insistante autorité. Vous rendez-vous compte que nous n’avons jamais assisté à un démantèlement du code de la santé qui se fasse par amendement au dernier moment, sans même que votre majorité puisse connaître le contenu des articles ? Comment, dans ces conditions, voulez-vous qu’un parlementaire de l’opposition ou de la majorité puisse travailler sérieusement sur un texte aussi compliqué, avec des enjeux de sécurité pour les malades, la famille des malades et la société tout entière ? Cela n’est pas sérieux ! Votre conscience doit se réveiller en cet instant ! Réservez cet article et proposez un autre texte de santé mentale. Je retire mon sous-amendement, parce que nous ne pouvons pas travailler dans des conditions aussi indignes et scandaleuses.
Le sous-amendement no 2485 est retiré.
Vous gardez la parole, monsieur Accoyer, à moins que vous souhaitiez également retirer le sous-amendement no 2487 ...
Il va sans dire que je ne renonce pas à mon temps de parole et que je le défends ! Je ne peux pas laisser à l’abandon les malades qui sont dans une souffrance réelle, ni leurs familles dont vous n’imaginez pas la détresse, madame la ministre. Les associations de défense des familles et des amis des malades mentaux se battent tous les jours pour essayer de faire progresser la situation dans laquelle se trouvent les malades eux-mêmes et une partie de la société. Madame la ministre, je vous le demande avec insistance : revenez à la raison ! Réservez l’article et engagez plus tard un travail de concertation pour élaborer une vraie loi de santé mentale. Je retire mon sous-amendement.
Le sous-amendement no 2487 est retiré.
La parole est à Mme Bernadette Laclais pour soutenir le sous-amendement no 2455 .
Je ne voudrais pas qu’il y ait une méprise sur l’esprit dont témoigne le rapport que j’ai remis et qui fait état des discussions de la commission et des commentaires d’articles. En tant que rapporteure, je tiens à préciser que cet esprit est repris par l’amendement du Gouvernement et qu’il n’y a pas de changement. La discussion que nous avons eue est reflétée dans l’amendement.
Par ailleurs, même si, dans l’opposition, vous nous faites part de votre exaspération, je tiens à saluer le travail accompli par les services de la séance qui ont permis de diffuser l’amendement du Gouvernement en priorité lundi, il y a une semaine. D’ailleurs, vous avez déposé des sous-amendements, ce qui veut bien dire que vous avez eu connaissance de ce document.
Monsieur le président Accoyer, je dis les choses telles qu’elles sont ! Je souligne avec insistance – et vous me permettrez de le faire – que l’amendement déposé par le Gouvernement reflète les débats que nous avons eus et les amendements adoptés par notre commission.
Favorable. Vous me permettrez, monsieur le président, de dire que, s’il y a peut-être une certaine exaspération, il y a assurément de la posture et du théâtre !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Lorsqu’un amendement fait l’objet de sous-amendements de la part de parlementaires, je ne vois pas comment ces parlementaires peuvent dire qu’ils n’en ont pas eu connaissance…
Par ailleurs, c’est me prêter beaucoup que d’imaginer que j’ai refondé du sol au plafond la politique de santé mentale à l’occasion de ce texte. Celui-ci reprend les principes présentés en commission lors de l’examen du projet de loi initial, les orientations qui y ont été débattues avec les députés de la majorité comme de l’opposition, ainsi qu’un certain nombre d’amendements pour les intégrer dans le texte de façon plus satisfaisante et, enfin, il reprend les suggestions des professionnels, des familles concernées et d’autres acteurs du système de santé mentale. Plutôt que de faire un travail éparpillé, il a été souhaité proposer une vision d’ensemble. Peut-être une telle démarche est-elle considérée dommageable par certains, mais je pense qu’il est toujours souhaitable d’avoir une vision d’ensemble, y compris lorsque l’on ne bouleverse pas l’ordre des choses. J’aime le débat parlementaire, le débat politique, mais les postures et le théâtre sur un sujet dont vous êtes tous à dire qu’il est essentiel, je trouve que c’est un peu trop.
J’éprouve une grande peine aujourd’hui, et je vais y venir.
Mais tout d’abord, madame la ministre, il n’est pas sérieux de transformer un texte de trois pages sorti de la commission pour aboutir à un amendement qui fait six pages et demie. Les trois pages et demie supplémentaires montrent bien l’impréparation totale de votre projet de loi. La santé mentale restera malheureusement encore le parent pauvre de la santé publique dans ce pays. Alors que, je le redis, 1 % de la population générale est atteint d’un trouble schizophrénique, un tiers ayant besoin de vivre en institution de manière permanente, un autre tiers n’ayant même jamais besoin de voir le psychiatre. Sur le plan statistique, il y a donc certainement quatre ou cinq députés susceptibles d’avoir ce type de trouble.
Murmures sur les bancs du groupe SRC.
Sourires.
Deuxièmement, je voudrais qu’on fasse attention aux mots. La majorité des patients sont des gens pacifiques qui ne posent aucun problème de trouble à l’ordre public. Néanmoins, cela peut arriver et, dans ces cas-là, il est nécessaire de prendre des mesures destinées à contenir le comportement physique quand le contenant interne échappe à lui-même. Or plusieurs de vos articles vont largement compliquer le travail des services de secteur. Une partie de mon travail consistait d’abord à travailler avec l’équipe, à défendre les infirmières avec qui je travaillais, à défendre l’institution. Sachez-le, madame la ministre : quand vous avez à peine plus de vingt ans et que vous entrez dans une chambre d’isolement où un patient d’un mètre quatre-vingt-quinze atteint d’une encéphalopathie hépatique a réussi à se lever malgré son lit métallique, comment le traiter sans liens de contention ? On est obligé soit de les lui mettre, soit de le placer dans le coma. Et puis il y a en plus le syndrome de la Stasi : il va falloir faire des cahiers dans lesquels les noms des médecins qui auront prescrit et ceux des infirmiers qui auront appliqué la prescription seront marqués… Mais dans quel monde vivez-vous, madame la ministre ? Mes chers confrères, sortez de la région parisienne, allez voir les services de secteur en province, voyez la vie de l’ensemble des praticiens de ce pays. C’est un mépris total, madame la ministre, que ce texte, une abomination !
Je ne serai pas dans la posture, madame la ministre, mais dans des questions concrètes, que je me pose si jamais cette loi était mise en oeuvre. Voici ce que je lis dans votre amendement : « Un projet territorial de santé mentale, dont l’objet est l’amélioration continue de l’accès des personnes concernées à des parcours de santé et de vie de qualité, sécurisés et sans rupture, est élaboré et mis en oeuvre à l’initiative des professionnels et établissements travaillant dans le champ de la santé mentale à un niveau territorial suffisant pour permettre l’association de l’ensemble des acteurs mentionnés […] et l’accès à des modalités et techniques de prise en charge diversifiées. ». Pouvez me donner la définition du niveau territorial suffisant ? S’agit-il de l’agglomération, du pays, du département ou de la région ? Je crois avoir un début de réponse puisque voici la phrase suivante : « En l’absence d’initiative des professionnels, le directeur général de l’agence régionale de santé prend les dispositions nécessaires pour que l’ensemble du territoire de la région bénéficie d’un projet territorial de santé mentale. » On comprend que le projet territorial de santé correspond à la région, mais pouvez-vous nous préciser le fond de votre pensée ? Car le projet n’est pas du tout le même selon le niveau auquel il s’applique. En général, plus on se rapproche du territoire local, plus on est efficace. Je disais hier que la France est plutôt sur-administrée et sous-organisée. Dès lors, si on débat de textes de loi sans aborder le sujet de l’organisation, on passe à côté.
Madame la ministre, le minimum de la correction serait que vous quittiez des yeux votre ipad et que vous écoutiez ce que disent les députés
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Voilà juste ce que j’avais à dire sur le déroulement de nos travaux, monsieur le président.
Le sous-amendement no 2455 est adopté.
Le sous-amendement no 2475 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir le sous-amendement no 2494 .
Ce sous-amendement vise à rétablir un dispositif qui existe actuellement, régi par l’article 3221-2 du code de la santé publique, car il est supprimé dans le nouveau texte qui nous est proposé. Il s’agit des associations dites « de secteur » ou « thérapeutiques », qui ont prouvé toute leur utilité et sont un outil original de soins. Il en existe actuellement plus de 200. Les premières ont été mises en place il y a assez longtemps, en vertu d’une circulaire de 1958. Dans l’intérêt du patient et dans le cadre d’une démarche thérapeutique, l’établissement pourrait ainsi signer une convention avec une des ces associations.
Madame Guittet, je vous suggère de retirer votre sous-amendement parce que sa rédaction prête à confusion, notamment la première phrase : « Afin de mettre en oeuvre une démarche thérapeutique au sein d’une activité de soins […] ». Je précise que c’est un avis que j’émets à titre personnel, à l’instar de celui sur les autres sous-amendements, que la commission n’a pas examinés.
Même avis.
Je voulais revenir sur le sous-amendement no 2475 de M. Robiliard qui vise à calibrer le périmètre des secteurs psychiatriques car je tiens à dire qu’il va dans le bon sens. Je le soutiens, mais il correspond à l’amendement no 1392 que j’ai déposé et qui risque de fait de tomber. Le mien est plus précis puisqu’il prévoit la prise en compte des réalités concrètes des territoires, sociologiques et démographiques. Je l’ai dit dans mon intervention liminaire : des secteurs d’un périmètre trop grand ou qui ne tient pas compte des spécificités territoriales risquent de perdre beaucoup de leur qualité et de leur intérêt.
Oui, je le maintiens parce que je ne vois pas en quoi une démarche thérapeutique n’est pas une notion claire.
Le sous-amendement no 2494 n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir le sous-amendement no 2476 .
Il a une autre formulation que celui que Mme Guittet vient de soutenir, mais il tend à la même pérennisation des clubs thérapeutiques. Il y a une inquiétude à ce sujet, mais je crois qu’on n’a pas forcément besoin d’une base légale pour les fonder et les conventionner avec un établissement public de santé mentale ou avec un hôpital général dans lequel se trouve un service psychiatrique. Mais c’était tout de même jusqu’à présent prévu dans le code de la santé publique, même si je sais que certains éléments du dispositif dérangeaient, pouvant laisser penser à de la gestion de fait ou à d’autres comportements illicites. Mon sous-amendement, tel que rédigé, permettrait de clarifier les choses tout en donnant une base légale solide à la pratique importante des clubs thérapeutiques. Il y en a plus de 200, dont un grand nombre est membres de la Fédération Croix Marine.
…mais l’ambiguïté ne portait pas sur le membre de phrase qu’elle a repris, mais sur les mots suivants : « au sein d’une activité de soins ».
Quant au sous-amendement de M. Robiliard, j’émettrai un avis favorable, même si j’ai tout de même un doute sur la rédaction de la deuxième phrase : « La convention précise notamment les modalités de mise à disposition par l’établissement […] », car cela ne me semble pas relever du domaine législatif.
Madame Guittet, j’aurais dû indiquer que votre sous-amendement poursuivait le même objectif que celui de M. Robiliard et vous demander de le retirer au profit du sien dont la rédaction me paraît mieux adaptée. Il est vrai que ce qui est proposé pourrait ne pas figurer dans la loi. Ces structures thérapeutiques ne sont pas remises en cause. Je sais qu’il y a des inquiétudes à ce sujet chez certains, mais ces structures sont couvertes par d’autres textes. Je donne un avis favorable au sous-amendement de M. Robiliard.
Le sous-amendement no 2476 est adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir le sous-amendement no 2472 .
Ce sous-amendement propose que l’hospitalisation sans consentement ait vocation à intervenir dans le cadre des secteurs. Mais ce ne serait évidemment pas une obligation puisqu’on tiendrait compte des places disponibles dans les établissements hospitaliers. Il s’agit de couper le moins souvent possible un malade de ses liens familiaux et sociaux.
Favorable.
je pense en effet que cette précision est tout à fait utile parce que l’hospitalisation sans consentement doit intervenir à proximité du lieu de résidence du patient si on veut permettre une bonne prise en charge. C’est aussi l’objectif de mon amendement no 1389 , mais il risque de connaître un sort délicat puisqu’il doit être examiné après le vote de l’amendement du Gouvernement…
Le sous-amendement no 2472 est adopté.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 2433 .
Il est demandé au Gouvernement de remettre un rapport sur la mise en oeuvre de la politique de santé mentale dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi.
Avis favorable malgré mon peu d’enthousiasme pour les rapports.
Le sous-amendement no 2433 est adopté.
L’amendement no 2217 , sous-amendé, est adopté et l’article 13 est ainsi rédigé.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à la santé.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures quinze.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly