COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Jeudi 17 septembre 2015
La séance est ouverte à quinze heures cinq.
(Présidence de M. Michel Ménard, vice-président de la Commission)
La Commission poursuit l'examen du projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (n° 2954) (M. Patrick Bloche, rapporteur).
Article 23 : Diverses dispositions modifiant le titre Ier du livre VI du code du patrimoine
La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements AC172 de M. François de Mazières, et AC343 du Gouvernement.
Des membres d'associations nationales du patrimoine, associations dont nous connaissons tous l'expertise et l'utilité, doivent siéger au sein de la commission nationale des cités et monuments historiques.
L'amendement présenté par le Gouvernement devrait donner satisfaction à M. François de Mazières.
Même s'il arrive que les associations posent des questions qui peuvent être dérangeantes, elles jouent un rôle irremplaçable et fondamental dans la politique de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine monumental. Elles nous mettent parfois face à nos contradictions ou, plutôt, elles nous rappellent la complexité qu'il y a à mener de front différentes politiques publiques, toutes légitimes, mais qui ne sont pas toujours simples à articuler entre elles. Vous, comme élus, moi, comme ministre, nous en savons quelque chose car beaucoup d'entre nous ont été interpellés d'une manière ou d'une autre par une association de défense du patrimoine, mais, au final, il faut rappeler et retenir le travail incroyable du tissu associatif pour nous aider à préserver et mettre en valeur notre patrimoine.
Le Gouvernement souhaite reconnaître pleinement ce rôle en inscrivant dans la loi la participation de ces associations aux commissions du secteur du patrimoine, tant pour ce qui concerne la nouvelle commission nationale des cités et monuments historiques que pour ce qui concerne les nouvelles commissions régionales du patrimoine et de l'architecture. Je vous demande donc de bien vouloir adopter l'amendement AC343, qui marquera plus nettement encore notre volonté de poursuivre le travail fructueux déjà mené avec les défenseurs du patrimoine.
Nous avons affaire à deux excellents amendements qui vont dans le même sens. Celui du Gouvernement a l'avantage de faire référence aux fondations, chères au coeur de M. François de Mazières. Je pense que ce dernier ne verra aucune objection à retirer son amendement afin que nous puissions tous nous retrouver pour voter celui défendu par Mme la ministre.
L'amendement du Gouvernement est plus ciblé donc, en quelque sorte, plus restrictif que le mien que je retire néanmoins.
L'amendement AC172 est retiré.
La Commission adopte l'amendement AC343.
Elle examine ensuite l'amendement AC175 de M. François de Mazières.
Lors des auditions, les associations de défense du patrimoine nous ont fait part de leur souhait que la présidence de la Commission nationale des cités et monuments historiques soit confiée à un parlementaire.
Cette demande a bien été exprimée par les associations, et j'ai, pour ma part, suggéré, dans mon rapport, que la section de la Commission nationale dédiée aux cités historiques soit présidée par un parlementaire. Les décisions en la matière relevant du pouvoir réglementaire, je laisse toutefois le soin à Mme la ministre de nous donner des précisions sur le fonctionnement de cette nouvelle commission et sur sa présidence.
L'État joue parfois un rôle dans l'équilibre des politiques patrimoniales. À cet égard, il peut donc être utile que le ministre ou la ministre en charge de la culture préside cette nouvelle commission nationale des cités et monuments historiques, (CNCMH), comme cela a été le cas, pendant de nombreuses années, de la vénérable Commission nationale des monuments historiques.
La CNCMH comportera six sections. Je n'ai aucune difficulté à envisager que certaines soient présidées par des parlementaires, notamment la section compétente pour les cités historiques qu'évoquait M. le rapporteur. Ces questions relevant en tout état de cause du règlement, je demande à M. de Mazières de bien vouloir retirer son amendement.
Madame la ministre, vous indiquez que plusieurs sections de la nouvelle commission pourraient être présidées par un parlementaire. Permettez-moi de souhaiter que, quel que soit le camp politique du ministre de la culture, ces parlementaires puissent être issus de l'opposition aussi bien que de la majorité, et qu'ils soient, de préférence, membres de notre commission des affaires culturelles. Malgré nos divergences, certains sujets fédérateurs, comme la défense du patrimoine, ont, comme on dit au parti socialiste, un caractère « transcourant ».
Tout cela relève effectivement du règlement. Mme la ministre a raison de préciser qu'il revient bien au ministre d'assurer la présidence de la nouvelle commission car l'État doit assumer son autorité en la matière.
Par ailleurs, je souhaite que l'on évite de dresser des listes à la Prévert : la parité, c'est-à-dire la juste représentation démocratique de l'humanité composée d'autant d'hommes que de femmes, ne doit pas être confondue avec une répartition fondée sur des critères comme l'appartenance à une chambre ou une autre, ou la couleur politique.
J'entends les préoccupations que vous venez tous d'exprimer et je les aurai en mémoire au moment de l'élaboration des actes réglementaires. Je veillerai également à ne pas oublier les élus locaux qui ont vocation, eux aussi, à être représentés dans les sections de la Commission nationale des cités et monuments historiques.
L'amendement est retiré.
La Commission en vient à l'amendement AC386 du rapporteur.
Cet amendement de coordination a pour objet de rendre la commission régionale du patrimoine et de l'architecture compétente en matière d'objets mobiliers classés mis en péril.
Avis favorable : la précision est utile et pertinente.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AC387 du même auteur.
Cet amendement vise à renforcer le dispositif des zones tampons autour des biens que nous souhaitons protéger. Alors que ce dispositif est rendu facultatif par l'actuelle rédaction du projet de loi, il semble, au contraire, utile de rendre la délimitation d'une telle zone obligatoire dès lors qu'elle est jugée nécessaire à la protection du bien inscrit au patrimoine mondial. Ma démarche s'inspire notamment de la rédaction du point 103 des Orientations devant guider la mise en oeuvre de la convention du patrimoine mondial de l'UNESCO de 1972 : « Si nécessaire pour la bonne conservation du bien, une zone tampon appropriée doit être prévue. »
Je comprends l'objectif poursuivi par cet amendement qui répond à la volonté de promouvoir le dispositif des zones tampons autour des biens inscrits au patrimoine mondial. De fait, l'UNESCO souhaite qu'une proposition de zone tampon accompagne toutes les nouvelles candidatures à l'inscription. La France s'est engagée auprès de cette dernière à mettre en oeuvre des zones tampons autour des onze biens inscrits, sur un total de quarante et un, qui n'en possèdent pas.
Monsieur le rapporteur, votre amendement conditionnerait la mise en oeuvre de zones tampons et il la limiterait à certains biens alors que la rédaction du Gouvernement me semble favoriser les objectifs que je viens de rappeler. Je vous demande en conséquence de bien vouloir retirer votre amendement.
Voilà qui me rend bien triste ! La rédaction défendue par notre rapporteur me paraît en effet excellente. Elle répond à l'inquiétude principale que suscite cette réforme du côté de tous les amoureux du patrimoine. Aujourd'hui, le système de zone tampon des cinq cents mètres fonctionne, même si l'on peut imaginer que, dans certains cas, il puisse être adapté. Demain, le projet de loi pourrait permettre que cette zone se limite par exemple au seul bâtiment concerné : cela suscite des inquiétudes terribles.
Je partage l'opinion de mon collègue. S'il me semble que l'on peut éviter l'impératif lié aux cinq cents mètres, qui est parfois un peu ridicule car l'application de la notion de « covisibilité » suffit, l'amendement du rapporteur me paraît fort sympathique.
En milieu rural, je vous assure que le maintien des zones tampons a tout son intérêt. Je discute beaucoup avec les maires des communes rurales qui n'attendent qu'une chose : que toutes les protections des secteurs situés à proximité des bâtiments comme les vieilles tours du XIIe siècle tombent pour pouvoir construire aux alentours avec du PVC. Vous n'imaginez pas à quel point il faut se battre et combien de fois j'ai entendu dire : « On en a marre de ce patrimoine ! » La protection de l'État doit être maintenue.
Monsieur le rapporteur, dès lors que nous avons des objectifs communs, je vous propose de travailler ensemble à une nouvelle rédaction d'ici à la séance publique.
Je suis heureux que nos échanges témoignent d'une volonté unanime de conforter juridiquement les zones tampons.
Madame la ministre, mon esprit naturellement constructif m'amène à retirer cet amendement afin que nous y travaillions et qu'une nouvelle version soit déposée pour la séance publique.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte l'article 23 modifié.
Article 24 : Diverses dispositions modifiant les titres II et III du livre VI du code du patrimoine
La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC190 et AC191, tous deux de M. François de Mazières.
Les dispositions de l'article 24 relatives aux abords d'un monument historique modifient profondément le code du patrimoine. En effet, le projet de loi substitue au périmètre automatique de cinq cents mètres un « périmètre délimité des abords ».
L'exposé des motifs du projet de loi précise que ce périmètre sera défini « à l'issue d'une étude historique, urbaine et paysagère, après enquête publique et accord de l'autorité compétente en matière de plan local d'urbanisme ». Dès lors, l'accord de l'architecte des bâtiments de France (ABF) visera les travaux portant sur les immeubles, bâtis ou non bâtis, situés dans les seuls espaces ayant été clairement reconnus et délimités pour leur intérêt patrimonial. Une telle logique risque d'amener à baisser la garde quant à la protection des abords des monuments historiques.
Il s'agit d'un grand risque avec un tel périmètre « à la carte » qui pourrait même être limité à l'emprise du bâtiment. Afin de préserver un minimum de champ d'intervention de l'ABF, il n'apparaît pas judicieux que le législateur incite explicitement à réduire les abords dans une telle proportion. C'est pourquoi l'amendement AC190 vise à supprimer, à l'alinéa 12 de l'article 24, la mention d'un périmètre de protection « limité à l'emprise du monument historique », afin de préserver l'intérêt du régime juridique des abords.
Imaginons, dans l'une des communes rurales qu'évoquait Mme Sophie Dessus, un conflit ouvert entre les propriétaires d'un château et un maire : comment ce dernier réagira-t-il si un fermier veut construire un hangar ou qu'une usine souhaite s'installer à proximité du monument, et qu'aucune règle n'encadre sa décision ? En l'état, le texte place le patrimoine de notre pays dans une situation qui pourrait être extrêmement dangereuse.
L'amendement AC191 est un amendement de repli. Si le précédent n'est pas voté, il vise à préciser que la limitation à l'emprise du monument de la protection au titre des abords ne peut intervenir que « dans des cas exceptionnels fixés par décret ». Il faut limiter le moins possible les interventions des ABF qui protègent beaucoup les élus.
L'amendement AC190 de M. de Mazières est intéressant car la rédaction de l'alinéa 12 de l'article peut nous interpeller. Cette rédaction est sans doute un peu alambiquée, mais elle n'en demeure pas moins utile dans un certain nombre de cas, notamment lorsqu'il n'est pas nécessaire de protéger l'environnement direct du bien. Je considère en conséquence qu'il est préférable de conserver la dernière phrase de l'alinéa que l'amendement vise à supprimer.
Il me semble de plus que le texte se suffit à lui-même et que l'amendement AC191 ne lui apporte rien. Il ouvre seulement une possibilité à l'autorité administrative d'une « limitation à l'emprise du monument historique ». Cette dernière en fera certainement un usage raisonnable. Cette rédaction permet surtout de bien garder à l'esprit que nous passons d'une règle d'application automatique à une logique de cas par cas.
Pour l'ensemble de ces raisons, je ne peux donner un avis favorable à ces amendements.
Le projet de loi ne prévoit en rien de porter atteinte à la politique de contrôle des travaux effectués aux abords des monuments historiques. Il vise, au contraire, à mieux ajuster les contraintes qu'elle comporte pour les citoyens aux enjeux réels de préservation de l'environnement des monuments historiques.
Les principes qui ont présidé à la détermination des nouveaux abords présentés dans ce projet de loi sont la rationalisation et la volonté de rendre la législation plus intelligible : le périmètre est ainsi adapté à chaque monument. La limitation des abords au strict contour du monument historique pourra par exemple être pertinente pour des bâtiments industriels pour lesquels c'est le bâtiment lui-même qui justifie une protection et non pas son environnement. Notre législation doit aussi s'adapter à ce type de patrimoine. Je précise que l'ABF restera compétent pour décider de limiter la protection des abords à l'emprise du bâtiment et que la protection des cinq cents mètres restera la norme applicable par défaut comme cela est indiqué à l'alinéa 16 de l'article.
Concernant votre amendement AC191, monsieur de Mazières, il paraît impossible d'établir une liste exhaustive des cas où cette limitation des abords pourra être envisagée. Cela reviendrait, en cas d'omission, à imposer à des riverains des contraintes lourdes en termes de procédures d'urbanisme.
J'ajoute que, en cas de doute, le préfet pourra toujours consulter la commission régionale du patrimoine et de l'architecture, pour s'assurer que la limitation du périmètre des abords à l'emprise, qui reste, je le répète, proposée par l'ABF, correspond bien au contexte spécifique du monument.
Toutes ces précisions apportées, j'espère que vous pourrez retirer vos amendements.
Je suis très heureux d'entendre notre collègue François de Mazières reconnaître l'importance du travail des ABF qui sont si souvent décriés par de trop nombreux élus.
L'ABF est effectivement très décrié, mais il est encore craint parce que son avis compte. C'est une bonne chose car, sans cela, certains élus feraient n'importe quoi. Ne pourrait-on pas compléter la dernière phrase de l'alinéa 12, en précisant que le périmètre de protection du monument historique ne peut être limité à l'emprise que « sur proposition de l'architecte des bâtiments de France » ?
Nous sommes d'accord sur l'objectif même si nous avons des divergences sur les modalités de l'action à entreprendre pour l'atteindre. Nous devons en tout état de cause soutenir les ABF et veiller à ce que la loi comprenne toutes les mesures nécessaires pour renforcer leurs pouvoirs, que ce soit à l'égard d'un certain nombre d'élus qui considèrent que les règles constituent des contraintes inutiles – pour ma part, en tant que maire de Maisons-Alfort, j'ai élargi autant qu'il était possible les nombreuses zones protégées que compte ma commune car je considère que le rôle de l'ABF est essentiel – ou à l'égard d'autres services de l'État. Je pourrais en la matière vous citer des exemples qui concernent l'École nationale vétérinaire qui se trouve dans ma ville depuis le règne de Louis XV – c'est la seule grande école française qui soit encore située sur son site d'origine.
Nous ne serons en tout cas jamais assez « maximalistes » pour nous assurer de la protection des abords des monuments et pour conforter les ABF confrontés aux élus, aux divers projets d'urbanisme et parfois même à l'État. Ils sont quelquefois les véritables « empêcheurs de bétonner en rond » ; il faut les soutenir.
Nos collègues ont rendu, à juste titre, un hommage vibrant aux architectes des bâtiments de France. Les députés qui souhaitaient réduire les pouvoirs des ABF ne sont d'ailleurs pas venus soutenir leurs amendements. Pour nous rassurer tous, je rappelle que l'alinéa 17 de l'article 24 est ainsi rédigé : « Les abords sont délimités et créés par décision de l'autorité administrative, sur proposition de l'architecte des Bâtiments de France, après enquête publique et accord de l'autorité compétente en matière de plan local d'urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale. » Les ABF sont donc déjà dans la boucle, de même que la collectivité locale concernée.
Je les maintiens car j'estime que la limitation de la protection des abords à l'emprise du monument historique n'a pas de sens. Face à un monument historique, il faut toujours un peu de recul, même s'il appartient au patrimoine industriel du XIXe ou du XXe siècle. Pour pouvoir le regarder, il faut au moins se placer à cinquante ou cent mètres. Tous les architectes vous diront que la protection d'un monument intègre la « covisibilité ». La limitation permise par l'alinéa 12 constitue à mes yeux une aberration au regard de ce qu'est un monument historique.
J'ai aussi envie de protéger l'ABF qui est soumis à d'énormes « pressions à construire ». Nous ne sommes pas dans la fiction si nous imaginons le cas d'un préfet qui ferait subir à son ABF de très dures pressions. Pourquoi cette dernière phrase de l'alinéa 12 ? Elle n'apporte rien et elle fragilise les ABF, ce qui inquiète profondément tous les défenseurs du patrimoine.
Je n'ai pas dit que tout le patrimoine industriel serait concerné par la limitation en question. Certains lieux peuvent l'être : la restriction à l'emprise de la protection de l'ancienne manufacture d'allumettes d'Aubervilliers, réhabilitée pour devenir le nouveau siège de l'Institut national du patrimoine, suffit pour que ce bâtiment puisse être admiré. La disposition que nous proposons permet, lorsque l'application de certaines règles ne se justifie pas, de ne pas imposer de réglementation superfétatoire.
Je suis heureuse de constater que l'ensemble des orateurs ont rendu hommage au travail effectué par les ABF dans l'intérêt général pour la protection du patrimoine. Étant leur ministre de tutelle, je sais qu'ils font un travail parfois difficile en étant confrontés à des pressions politiques dans des situations complexes.
La Commission rejette successivement les amendements AC190 et AC191.
La Commission adopte l'amendement de précision AC388 du rapporteur.
Elle examine ensuite l'amendement AC389 du rapporteur.
Cet amendement a pour objet de permettre au propriétaire ou à l'affectataire domanial du monument historique générant un périmètre de protection au titre des abords de donner son avis sur la délimitation de ce périmètre.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements AC193 de M. François de Mazières et AC390 du rapporteur.
Lorsque le périmètre des abords est fixé à l'occasion de l'élaboration, de la révision ou de la modification d'un plan local d'urbanisme (PLU), la proposition de l'ABF donne nécessairement lieu à enquête publique.
Lorsque la notoriété du monument historique l'exige, l'amendement prévoit que l'enquête publique est ouverte et organisée par le représentant de l'État dans le département, et non par le président de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public. L'enquête publique prendra ainsi en compte un territoire plus vaste que celui de la commune ou de l'intercommunalité. Nous savons que certains élus ne manifestent aucun intérêt pour le patrimoine. Dans le cas d'un monument exceptionnel, l'enquête publique pourra être ouverte par le représentant de l'État en lieu et place de ces élus peu sensibles à cette question.
Mon amendement poursuit le même objectif, donner la possibilité au représentant de l'État dans le département d'organiser une enquête publique lorsque la délimitation des abords intéresse le territoire de plusieurs communes.
Je suis embarrassée. S'agissant de l'amendement AC390, dans la plupart des cas, il me semble que la préoccupation du rapporteur est déjà satisfaite : le préfet organise l'enquête publique lorsque plusieurs communes sont visées et que l'enjeu patrimonial le nécessite. Je vous propose de retirer vos amendements afin d'y retravailler avant la séance.
Mon amendement relève d'une logique différente puisqu'il fait référence à la notoriété du monument historique.
Il me semble périlleux d'établir une distinction autre que celle entre l'inscription et le classement des monuments. En outre, la notoriété d'un monument paraît difficile à évaluer. Enfin, cette notion laisse place à l'interprétation, ce qui ne manquera pas de nourrir de nombreux contentieux. Je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, j'émets un avis défavorable.
Si la ministre considère que mon amendement est satisfait par le droit existant, je le retire. Nous allons examiner ensemble ce point de manière plus approfondie.
L'amendement AC390 est retiré.
La Commission rejette l'amendement AC193.
La Commission examine l'amendement AC192 de M. François de Mazières.
L'amendement prévoit que le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête consulte le propriétaire ou l'affectataire domanial du monument historique concerné par le périmètre délimité des abords.
Cette consultation est prévue par l'amendement que nous venons d'adopter. Votre demande est donc satisfaite.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement AC391 du rapporteur.
Cet amendement a pour objet de rétablir l'avis de la Commission nationale des cités et monuments historiques en cas de classement d'office d'un objet mobilier appartenant à un propriétaire privé. En effet, il n'y a aucune raison de supprimer cet avis dès lors qu'il est maintenu dans le cas du classement d'office d'un objet mobilier appartenant à une collectivité territoriale ou à l'un de ses établissements publics.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission examine, en présentation commune, les amendements AC322, AC325, AC323 et AC326 de Mme Sophie Dessus.
Ces amendements portent sur la protection ou la restauration des objets mobiliers, qu'ils soient classés ou inscrits, y compris les éléments de décor.
Afin de protéger ces biens dont les propriétaires ignorent souvent la valeur, les amendements soulignent la nécessité de porter un regard institutionnel sur leur restauration et de s'assurer des qualifications des professionnels – conservateurs-restaurateurs ou agréés par l'État – qui interviennent, comme c'est le cas pour le patrimoine immobilier.
L'amendement AC322 permet à l'administration de solliciter, préalablement à la demande d'autorisation nécessaire pour la modification, la réparation ou restauration d'un objet classé, l'avis technique d'un professionnel qualifié.
L'amendement AC325 vise à confier les opérations de modification, de réparation ou de restauration des objets classés à des spécialistes reconnus et à définir le niveau de compétences requis pour prendre en charge ces opérations. On a vu trop souvent des objets maltraités.
L'amendement AC323 propose de transposer aux objets mobiliers inscrits au titre des monuments historique le régime des objets classés.
L'amendement AC326 requiert un agrément ou une reconnaissance des qualifications par l'État des professionnels exécutant des opérations de modification, de réparation ou de restauration des objets inscrits. Il s'agit d'éviter que soit confiée à un artisan local qui n'a pas les compétences nécessaires une restauration qui pourrait s'avérer catastrophique.
Sur l'amendement AC322, les effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure à un monument classé – autrement dit, les décors que vous visez – sont d'ores et déjà protégés par le projet de loi, en l'occurrence par le 2° de l'article 24.
Quant à la nécessité de demander un rapport à un professionnel de la conservation-restauration, elle me paraît relever du domaine réglementaire. En outre, le droit existant n'empêche nullement l'administration de solliciter un avis en cas de besoin.
Je vous suggère donc de retirer cet amendement.
L'amendement AC325, me semble-t-il, est satisfait par le texte même de l'article L. 622-7 : un décret en Conseil d'État précise déjà à quels professionnels il doit obligatoirement être fait appel pour ce type de travaux.
L'amendement AC323 portant sur les effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure à un immeuble inscrit, mon avis est identique à celui exprimé sur votre premier amendement.
Enfin, l'amendement AC326 a une portée un peu différente des précédents. Seuls les travaux sur les orgues inscrites doivent aujourd'hui être réalisés par des professionnels définis par décret en Conseil d'État. Votre amendement a pour effet de rendre obligatoire, pour tous les objets inscrits, l'exécution de travaux par les spécialistes que vous visez. Il me semble que vous allez bien au-delà du droit existant.
Je profite de ces amendements pour saluer le travail remarquable des conservateurs et des restaurateurs du patrimoine. Leur savoir-faire contribue au rayonnement de la France dans le monde. J'ai pu m'en rendre compte en discutant avec mes homologues étrangers.
Sur le fond, je souscris à l'argumentation pertinente du rapporteur sur l'ensemble des amendements.
Ces amendements me semblent dangereux. Je n'ai rien contre les conservateurs-restaurateurs qui réalisent un travail remarquable, la plupart du temps. Mais, vous le savez, parfois, ils font aussi des horreurs. Le diplôme n'empêche pas les catastrophes artistiques ; il n'est pas une garantie de perfection.
De très nombreuses petites entreprises, artisanales pour la plupart – parfois avec la qualification de meilleur ouvrier de France – effectuent un travail de restauration d'oeuvres d'art remarquable qui n'a rien à envier à celui des conservateurs-restaurateurs. J'en conviens, il existe des brebis galeuses partout.
Il n'est pas souhaitable de réserver la restauration à une catégorie professionnelle. En effet, la rédaction des amendements, en particulier la référence à la conservation-restauration, laisse supposer un monopole au bénéfice des conservateurs-restaurateurs, au détriment des entrepreneurs et des artisans d'art dont l'expérience et l'expertise sont reconnues. Je ne souhaite pas voir ces entreprises privées de travail. En ces temps de difficultés économiques, chacun se replie sur son métier et tente de conserver ses rares marchés.
Je ne pense pas que ces amendements apportent la bonne réponse à la question de la conservation du patrimoine. Je suis donc défavorable à ces amendements en l'état.
Il n'est pas question d'instituer un monopole en faveur des conservateurs-restaurateurs. Les amendements font référence à des spécialistes reconnus par l'État. Je retire ces amendements au bénéfice des réponses rassurantes du rapporteur.
Les amendements sont retirés.
La Commission adopte l'amendement de coordination AC392 du rapporteur puis l'amendement rédactionnel AC393 du même auteur.
La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements AC11 de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet et AC150 de M. François de Mazières.
Mon amendement vise à supprimer le classement au titre des cités historiques. Nous sommes inquiets, comme les associations, de cette réforme d'une loi qui a pourtant fait ses preuves et qui est emblématique de la protection du patrimoine.
Vous transférez aux collectivités territoriales la charge de la protection du patrimoine en intégrant un volet patrimonial dans le plan local d'urbanisme (PLU). Vous prenez là un risque inutile. Il serait préférable de conserver le dispositif robuste que nous connaissons depuis des années. Le PLU, en particulier s'il est intercommunal, ne semble pas être l'outil le plus pertinent. Le niveau intercommunal n'est pas propice à la défense du patrimoine, les maires sont beaucoup plus sensibles à ce sujet.
Nous souhaitons nous en tenir aux différents outils actuels – plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV), zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) et aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP). Vous allez me rétorquer que les PSMV sont peu nombreux – une centaine – et très lourds, c'est vrai. Mais ils permettent d'établir une hiérarchie : les PSMV apportent une protection très forte ; avec les ZPPAUP, cette protection est moindre – les ABF la considèrent comme une protection de second rang. Avec votre réforme, tout est mélangé. Il me paraît dangereux de tout placer au même niveau.
Cette réforme est plus dangereuse qu'utile.
Nous comprenons l'objectif que vous poursuivez ; le label « cités historiques » est séduisant de même que la lisibilité et la clarté qu'apporte la fusion des dispositifs existants. Mais nous sommes inquiets des risques de cette réforme. Vous transférez la protection du patrimoine aux collectivités territoriales. Or, certaines d'entre elles sont attachées au patrimoine, d'autres sont plus soucieuses de l'urbanisation.
En tant que maire d'une commune d'Île-de-France très proche de Paris, j'ai dû souvent résister à la pression foncière qui est énorme et me battre contre les promoteurs et la volonté d'urbaniser à tous crins. Ma sensibilité n'est pas celle de tous les élus. De nombreux élus sont en effet focalisés sur le logement et ne pensent qu'à construire et bétonner. Le danger est là.
Je me suis ainsi battu pendant dix ans pour empêcher l'urbanisation d'une zone de 2,5 hectares, proche du RER et à sept minutes de la gare de Lyon. J'ai eu finalement gain de cause et j'ai réussi à transformer cette zone en parc public pour les habitants. Je vous parle donc en connaissance de cause, fort de mon expérience de maire. Le risque est grand de voir la protection du patrimoine s'appliquer de manière inégale selon la sensibilité des élus et les moyens dévolus aux services de l'État, en particulier aux ABF.
Par ailleurs, le PLU n'est pas le document le plus pertinent pour assurer la protection du patrimoine. Nous avançons déjà en tâtonnant avec les PLU intercommunaux. En outre, ce choix me paraît poser problème au regard de la hiérarchie des normes.
Cette position est partagée – en témoigne le nombre de signataires – et très réfléchie. Nos amendements ne sont pas motivés par le désir égoïste de supprimer une disposition emblématique de votre projet de loi mais par les risques que votre projet fait courir à la protection du patrimoine dans notre pays.
Avis défavorable à ces deux amendements. J'ai procédé à de longues auditions sur ce sujet, en compagnie d'ailleurs de M. de Mazières : elles m'ont permis de constater qu'il n'y a pas de demande formelle de maintien de l'existant. Les ZPPAUP sont, vous le savez, de toute façon condamnées à disparaître rapidement.
Pour qui aime le patrimoine, la situation actuelle n'est pas satisfaisante. Quand, en 1962, Malraux lance les secteurs sauvegardés, l'objectif est d'en avoir 400 ; cinquante-trois ans après, il n'y en a qu'une centaine ! Nombre de plans de sauvegarde sont en outre inexistants ou obsolètes.
Afin de mieux protéger le patrimoine, il faut simplifier, clarifier, apporter plus de cohérence. La création par le Gouvernement de ce dispositif des « cités historiques » me paraît donc opportune. Je souhaite toutefois que nous puissions adopter des amendements qui offriront des garanties supplémentaires : certains s'inquiètent de la faible sensibilité à la question du patrimoine d'élus aménageurs.
C'est vrai. Il me paraît en tout cas important que la protection du patrimoine soit assurée sur tous les territoires, notamment grâce à un contrôle des services de l'État. C'est ce fil rouge de l'égalité républicaine qui doit une nouvelle fois nous guider dans l'examen des amendements à cet article.
Je reviens rapidement sur la genèse de cet article. La « cité historique » sera un outil majeur pour mettre en lumière, aux yeux de tous nos concitoyens, les villes, les villages ou même les quartiers ou espaces ruraux les plus remarquables de notre territoire. Mieux mettre en valeur ce patrimoine remarquable, mieux l'identifier, c'est aussi mieux le protéger.
Tout le monde sait ce qu'est un « monument historique ». Tel n'est pas le cas pour un secteur sauvegardé, une ZPPAUP ou une AVAP. La « cité historique » apportera la même clarté que le « monument historique ». Elle apportera également une clarification, en rassemblant dans une seule catégorie les 800 ZPPAUP, AVAP et secteurs sauvegardés existants.
Elle constituera un outil de projet pour les territoires : toutes les cités historiques disposeront d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur ou d'un PLU patrimonial – nous poserons un peu plus loin la question de l'appellation précise de ce dernier. En attendant, les règlements existants continueront de s'appliquer.
Enfin, l'amendement cite les outils existants, et notamment les ZPPAUP. Mais celles-ci ont été condamnées par la loi de 2010 portant engagement national pour l'environnement, qui a institué une date couperet pour leur transformation en AVAP. Sans ce projet de loi, ce sont plus de 600 ZPPAUP qui disparaîtraient l'an prochain, ce qui constituerait l'une des pires régressions en matière de protection du patrimoine et de l'environnement. Ces périmètres ne seraient plus protégés par aucun document.
J'entends vos préoccupations à propos de l'intercommunalité. Confier plus de missions à l'intercommunalité est une tendance forte du droit de l'urbanisme, et le Gouvernement souhaite aller dans cette direction. Cela n'est en rien incompatible avec la protection du patrimoine : je vous propose que nous y revenions plus tard.
Les cités historiques permettront la mise en valeur de nos territoires et renforceront l'attractivité et la richesse de la France. J'ai dit, de façon quelque peu provocatrice, que l'on pouvait protéger le patrimoine sans être conservateur : c'est une conviction que nous partageons tous ici, je le sais. Il est tout à fait possible de concilier efficacité et protection.
Je demande donc le retrait des amendements ; à défaut, j'y serai défavorable.
À Stains, les cités-jardins ont été rénovées de façon magnifique ; à La Courneuve, les entreprises du début du XXe siècle sont souvent devenues des médiathèques, des centres administratifs… Les friches industrielles ont été rénovées de façon remarquable. Aménagement et protection du patrimoine peuvent très bien se concilier.
Monsieur le rapporteur, vous me rassurez, car j'ai été sensible à l'argument des pressions qui peuvent s'exercer sur les élus. Il est important que les services de l'État apportent leur garantie. J'attends donc avec impatience vos propositions.
Je ne suis pas député-maire comme mon collègue Michel Herbillon, et d'autres de nos collègues ; mais je vois tous les jours les pressions qui s'exercent sur les élus locaux – quel que soit leur bord politique – pour ne pas demander le classement de bâtiments privés situés à l'intérieur d'un périmètre classé. Ces élus doivent pouvoir se défendre en renvoyant au jugement neutre et indépendant de l'État. L'architecte des bâtiments de France doit également être très indépendant. Je suis donc très sensible aux arguments développés par Michel Herbillon. Soyons très prudents : simplifions, mais ne faisons pas reposer ces décisions sur les épaules des élus locaux.
Je comprends parfaitement les inquiétudes qui s'expriment ici ; les « cités historiques » ne doivent pas servir à éloigner les services de l'État. Il y a des élus qui veulent résister aux pressions, et qui ont besoin d'être armés pour cela ; dans de petites communes, le rapport de force est parfois tel que l'État doit être très attentif. Il me paraît donc indispensable de remettre les services de l'État sur le devant de la scène.
Les associations dont vous parlez savent, monsieur le rapporteur, que le Gouvernement veut faire voter cette réforme, et elles ont donc choisi de ne pas contester ce point ; mais elles souhaitent en réalité le maintien des dispositifs actuels.
S'il n'y a qu'une centaine de secteurs sauvegardés contre les quelque 400 espérés par André Malraux, c'est parce que les ZPPAUP ont pris le relais ! Aujourd'hui, il y a une gradation – demandée par les architectes des bâtiments de France – entre différents niveaux de protection. Le vrai problème vient de la loi de 2010 : il aurait été bien préférable de prolonger les ZZPAUP, qui donnent satisfaction à tous. On aurait ainsi évité une fragilisation du secteur, redoutée par tous les acteurs.
Nous reviendrons plus tard sur la notion même de « cité historique », qui me paraît très contestable.
Nous sommes tous d'accord, je crois, sur les objectifs ; nous différons sur les modalités. La question de l'intercommunalité renforce nos inquiétudes. Je suis maire d'une commune qui fera partie d'une intercommunalité qui regroupe 515 000 habitants et plus de dix communes. Or toutes n'ont pas la même sensibilité. Vous ne serez pas étonnés d'apprendre mon attachement à la protection du patrimoine : j'ai fait protéger et inscrire à l'inventaire supplémentaire des logements sociaux datant des années 1930, par exemple. Cela a parfois suscité de l'étonnement, voire de l'incompréhension… À l'échelon intercommunal, tout sera encore plus difficile : comment pourra-t-on mettre tant de communes d'accord ?
La Commission rejette successivement les amendements AC11 et AC150.
Elle se saisit alors de l'amendement AC189 de M. François de Mazières.
Cet amendement vise à substituer aux mots « cités historiques » ceux de « patrimoines remarquables », qui s'adaptent mieux à toutes les formes de patrimoines : les sites naturels sont essentiels et doivent être protégés au même titre que le patrimoine urbain.
C'est un point sur lequel je n'ai pas fini de m'interroger, et je ne suis pas certain que ce débat aboutira avant la deuxième lecture. Pour le moment, avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement de précision AC394 du rapporteur.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AC358 de M. François de Mazières et AC395 du rapporteur.
Cet amendement permet d'inscrire les paysages comme pouvant être protégés au titre de la sauvegarde du patrimoine.
Mon amendement est presque similaire, à ceci près qu'il inscrit les paysages après les « espaces ruraux », et non avant. Compte tenu du poids de la ruralité dans notre assemblée, je vous invite à vous rallier à cette solution.
S'il est vrai que le périmètre d'une cité historique classée doit pouvoir inclure des espaces ruraux et donc des paysages, qui peuvent constituer l'écrin d'un village, d'une ville ou d'un quartier remarquables, j'éprouve de grandes difficultés, à ce stade, à approuver ces propositions. Avis défavorable.
Je suis très satisfait de la proposition du rapporteur, et je retire bien volontiers mon amendement. En revanche, je suis très surpris de l'avis de Mme la ministre.
J'ai exprimé la position du Gouvernement.
L'amendement AC358 est retiré.
La Commission adopte l'amendement AC395.
Elle se saisit ensuite de l'amendement AC176 de M. François de Mazières.
De nombreux territoires associent actuellement PSMV, ZPPAUP ou AVAP à des conventions de « ville et pays d'art et d'histoire », ou de « petites cités de caractère ». La combinaison des outils de médiation et des outils d'urbanisme patrimonial produit une dynamique locale et une appropriation citoyenne de la valeur des patrimoines qu'il convient de renforcer et de généraliser.
J'ai cru un instant qu'il s'agissait d'un amendement de Mme Attard…
Avis défavorable. Sur le fond, bien sûr, l'appropriation citoyenne du patrimoine est une excellente chose : nous qui avons été, qui sommes ou qui serons élus locaux savons bien que ces outils permettent de faire vivre le patrimoine. Toutefois, un tel amendement me semble battre en brèche l'autonomie des collectivités territoriales : l'usage de ces outils doit demeurer le fruit de l'initiative locale. Créer une telle obligation risquerait surtout de créer de la déception.
Même avis : l'intention est bonne, mais il faut préserver l'autonomie des collectivités territoriales.
L'amendement AC176 est retiré.
La Commission adopte alors l'amendement de précision AC396 du rapporteur.
Puis elle se saisit de l'amendement AC397 du rapporteur.
Spécifier, comme le fait cet amendement, qu'il existe un « plan d'urbanisme patrimonial » pourrait soulever, j'en ai bien conscience, quelques problèmes de droit de l'urbanisme. Cette appellation est usuelle, mais peut-être n'est-il pas opportun de l'inscrire dans la loi. Vous avez compris ce que je souhaite, mais le principe de réalité s'impose et je crains d'avoir deviné l'avis de Mme la ministre.
Je partage bien sûr l'idée qu'il faut veiller à la protection et à la mise en valeur du patrimoine dans les cités historiques ; mais je crois moi aussi qu'il n'est pas souhaitable d'isoler le PLU de la cité historique du reste du PLU, risquant par là même d'affaiblir la cohérence d'ensemble du document. Je sais que le rapporteur a énormément réfléchi à toutes ces questions, et qu'il a déposé un amendement AC510 légèrement différent. Ce dernier proposera une solution judicieuse, à laquelle je serai tout à fait favorable.
L'amendement AC397 est retiré.
La Commission se saisit alors de l'amendement AC510 du rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de repli : sans sortir du droit commun et donc sans perturber nos excellents collègues de la commission des affaires économiques qui ont beaucoup travaillé, ces trois dernières années, sur l'urbanisme et le logement, il fait néanmoins d'un PLU comportant des dispositions patrimoniales visées à l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme un PLU pas tout à fait comme les autres.
On oublie donc l'appellation « PLU patrimonial » ; un PLU reste un PLU. Mais, pour garantir la qualité de la protection patrimoniale, je propose qu'un PLU comportant des dispositions patrimoniales soit approuvé après avis de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA).
Comme je l'ai annoncé, avis favorable à cet excellent amendement. La CRPA est une instance collégiale composée d'élus, de représentants de l'État et de personnalités qualifiées. Son avis – consultatif, mais obligatoire – permettra de s'assurer de la qualité des PLU qui concernent les cités historiques. Je précise que cet avis portera bien sur la partie du document qui couvre la cité historique.
Nous avons là, je crois, la démonstration que cette réforme est inopportune : en renonçant à parler de PLU patrimonial, vous affaiblissez en réalité la protection du patrimoine. L'amendement AC510 est effectivement judicieux. Toutefois, j'appelle votre attention sur les retards considérables qui seront engendrés par ces complexités procédurales.
Aujourd'hui, les communes sont de plus en plus souvent contraintes de signer des PLU intercommunaux, plutôt que de simples PLU ; or si une seule commune comporte une cité historique, ces PLUI seront infiniment plus longs, et plus compliqués, à mettre au point. Ne pourrions-nous pas prévoir que s'il existe une cité historique, le PLUI n'est pas obligatoire ?
Monsieur de Mazières, il était tout à fait possible de mettre en place en même temps une ZPPAUP et un PLU – je l'ai fait, annexant la première au second. Les deux documents avaient la même logique, mais chacun avait sa force propre. Ce sera sans doute la même chose pour un PLU et une cité historique.
Nous avons là l'illustration que le PLU n'est pas adapté à la protection du patrimoine. D'autre part, vous accroissez la longueur et la complexité du processus d'élaboration d'un PLU, déjà grandes. Et avec le PLUI tout cela sera pire encore.
Nous utilisons tous les termes de « plan local d'urbanisme patrimonial », même ils n'ont jamais figuré explicitement dans la loi. Avec cet amendement, nous restons dans le droit commun, mais un PLU comportant des dispositions patrimoniales ne pourra être formellement approuvé qu'après l'avis de la CRPA.
Le problème de l'intercommunalité est complexe : nous l'aborderons ultérieurement.
La Commission adopte l'amendement AC510.
Puis elle se saisit de l'amendement AC342 du Gouvernement.
Les cités historiques disposeront soit d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV), soit d'un PLU comportant des dispositions patrimoniales. Le projet de loi précise déjà que les premiers feront l'objet d'une aide technique et financière de l'État. Il me semble important de préciser que les seconds – nouvel outil à la disposition des collectivités territoriales soucieuses de la mise en valeur de leur patrimoine – bénéficieront également de cette aide technique et financière. Cela va de soi, mais cela va encore mieux en l'écrivant dans cette loi qui marquera une nouvelle étape importante de l'excellence patrimoniale dont notre pays peut s'enorgueillir.
Cet amendement recueillera, je n'en doute pas, un vaste consensus.
Avis très favorable ; je vous remercie, madame la ministre, d'avoir pris l'initiative de déposer cet amendement. Cette question a été au coeur de nos auditions ; en particulier, les associations d'élus locaux que nous avons reçues se sentaient quelque peu démunies face à ce transfert total de maîtrise d'ouvrage. Vous les rassurez, et vous nous rassurez : pour des documents aussi importants, l'assistance technique et financière de l'État sera en effet tout à fait indispensable, et constituera en outre une garantie solide pour la sauvegarde de notre patrimoine.
L'amendement est excellent, mais permettez au maire que je suis de puiser dans son expérience personnelle pour rappeler qu'aujourd'hui, toute réforme d'un plan de sauvegarde coûte extrêmement cher aux communes. À cela, l'État répond qu'il ne dispose pas du moindre euro pour les aider. Autrement dit, madame la ministre, allez-vous ajouter une ligne budgétaire supplémentaire à cet effet ?
L'État consacre déjà 6 millions d'euros à l'aide technique et financière à la constitution des documents liés aux ZPPAUP et aux PSLV, entre autres. Cette ligne budgétaire augmentera de l'ordre de 9 % dans le budget de l'an prochain.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC146 de M. François de Mazières.
Votre réponse sur l'amendement précédent ne m'a aucunement rassuré ! La modification de son PSMV coûtera 700 000 euros à la ville de Versailles – raison pour laquelle elle n'est toujours pas effectuée. Une augmentation de 9 % ne saurait donc suffire, à moins que vous ne la consacriez intégralement à la seule ville de Versailles !
J'en viens à l'amendement AC146, qui vise à ajouter les mots « et fiscaux » après le mot « droit » à l'alinéa 76, car il est primordial de préserver l'effet de levier fiscal attaché aux ZPPAUP et aux AVAP.
Je comprends parfaitement ce souhait de préserver les avantages fiscaux liés aux défuntes ZPPAUP et aux AVAP, mais il faudrait pour ce faire modifier l'article 199 tervicies du code général des impôts. Il convient en effet de distinguer entre les mesures transitoires au règlement d'urbanisme de ces zones et les mesures fiscales qui sont nécessaires. En outre, je suppose que le Gouvernement s'apprête à satisfaire votre amendement sur le fond.
Il est tout à fait souhaitable de maintenir le bénéfice de la fiscalité Malraux dans les cités historiques, ce que prévoient les alinéas 92 et 93 de l'article 24. S'agissant des coordinations nécessaires avec le code général des impôts, il est prévu qu'elles soient réalisées en loi de finances. Je vous propose donc de retirer cet amendement, puisqu'il est satisfait.
Je maintiens l'amendement : cela donnera à Mme la ministre l'occasion de réitérer ces précisions en séance publique.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle se saisit de l'amendement AC399 du rapporteur.
Le présent amendement a pour objet d'imposer un délai à la substitution aux règlements des AVAP et des ZPPAUP d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur ou d'un plan local d'urbanisme patrimonial. Un délai de dix ans devrait suffire à permettre aux collectivités concernées de produire les nouveaux documents d'urbanisme. J'ai pris cette initiative car, en ce domaine, il faut manifester notre volontarisme : un délai de dix ans « laisse du temps au temps », comme disait un ancien président de la République. Il nous revient de déclencher ce mouvement – et, du même coup, le changement.
Ce délai de substitution de dix ans prolonge-t-il de dix ans les ZPPAUP dont le terme était proche ?
Les règlements des ZPPAUP demeurent et s'appliqueront aux cités historiques qui prendront le relais. Plus précisément, l'alinéa 76 prévoit que le règlement de l'AVAP ou de la ZPPAUP applicable à la date mentionnée au I de l'article 40 du présent projet « continue de produire ses effets de droit dans le périmètre de la cité historique jusqu'à ce que s'y substitue un plan de sauvegarde et de mise en valeur ou un plan local d'urbanisme comprenant les dispositions mentionnées au deuxième alinéa du I », l'idée étant que cela se produise dans les dix prochaines années.
La Commission adopte l'amendement.
Elle passe à l'amendement AC38 de Mme Annie Genevard.
Dans les cas – trop fréquents – d'annulation contentieuse d'un PLU, les dispositions du précédent document d'urbanisme s'appliquent conformément à l'article L.121-8 du code de l'urbanisme. Or, les AVAP et les ZPPAUP ne font pas partie de la liste des documents tenant lieu de documents d'urbanisme, contrairement au PSMV. Il faut donc prévoir la possibilité de maintenir les règles de protection du patrimoine dans les futures cités historiques régies par des PLU dits patrimoniaux, qui sont juridiquement plus fragiles.
Ce problème est réel, mais il est déjà résolu par l'article L.121-8 du code de l'urbanisme qui prévoit précisément dans le cas de figure que vous évoquez que le PLU précédent s'applique à nouveau, y compris avec ses annexes que sont le règlement de l'AVAP ou celui de la ZPPAUP.
L'amendement AC38 est retiré.
La Commission adopte l'amendement de précision AC400 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement AC185 de M. François de Mazières.
Le développement de l'éolien engendre un impact concret, immédiat et durable sur l'environnement, notamment sur le patrimoine naturel et historique. Afin d'éviter certains de ces incontestables dommages, le présent amendement prévoit que chaque commission régionale du patrimoine et de l'architecture fixe un périmètre de protection adapté définissant les zones dans lesquelles des éoliennes peuvent être implantées.
Que l'on n'évoquât point la question des éoliennes au cours du débat m'eût étonné… Votre amendement est satisfait sur le fond, car les documents d'urbanisme pourront fixer dans le périmètre de la cité historique des règles qui empêchent l'implantation d'éoliennes. D'autre part, je ne comprends guère pourquoi vous confiez à une commission pourtant consultative la tâche décisionnaire de fixer ce périmètre de protection. Enfin, la rédaction de votre amendement mérite d'être éclaircie car, paradoxalement, elle revient à ce que la commission régionale définisse une zone dans laquelle les éoliennes peuvent être implantées, alors que l'objectif de protection supposerait au contraire de définir des zones d'exclusion. En dépit de la légitimité de votre préoccupation, je vous propose donc de retirer cet amendement.
L'amendement AC185 est retiré.
La Commission passe à l'amendement AC152 de M. François de Mazières.
Cet amendement vise à requérir l'intervention d'un architecte ayant acquis une expertise dans le patrimoine pour toute intervention sur le patrimoine bâti. L'architecture patrimoniale – je parle d'expérience, ayant présidé la Cité de l'architecture et du patrimoine – est une spécialisation, que proposent d'ailleurs les écoles d'architecture, celle de Chaillot par exemple. Il est donc utile de prévoir l'intervention d'un architecte sensible à ces questions.
Devant un amendement visant à élargir le recours aux architectes, je ne peux que sauter sur ma chaise tel un cabri… Je défendrai d'ailleurs plus tard des amendements ayant le même objet. Pour l'heure, je comprends votre souhait mais, dans le cas des cités historiques qui nous occupe, tous les travaux sont déjà soumis à l'ABF, à qui nous venons de tresser des lauriers. Imposer une expertise supplémentaire aux projets d'envergure modérée me semblerait contre-productif eu égard à notre volonté commune de créer un désir d'architecture, et non une contrainte d'architecture. Mieux vaut donc en ce domaine privilégier la voie de l'incitation.
Même avis. Je me réjouis que la qualité des enseignements dispensés dans nos écoles d'architecture soit ainsi reconnue par l'ensemble des orateurs.
Je regrette la position de M. le rapporteur compte tenu des travaux très constructifs que nous avons accomplis dans le cadre de la mission d'information sur la création architecturale, qu'il présidait. L'un de nos objectifs consistait à inciter davantage les particuliers à recourir à des architectes, et nous avions notamment envisagé la création d'un permis simplifié et de prêts bonifiés. Or, cette proposition n'a pas été reprise dans le présent texte ; je le déplore. Pourquoi dès lors refuser cet amendement ? En effet, encourager le recours à l'architecte aiderait cette profession sinistrée, renforcerait la qualité architecturale des projets de construction et le respect du patrimoine, et aiderait aussi les maires.
Sur la notion de seuil, nous défendrons avec conviction les propositions qui nous ont rassemblés lors de la mission sur la création architecturale. Au-delà de ce seuil, le recours à l'architecte est obligatoire. En l'occurrence, nous examinons les projets au sein des cités historiques qui se situent en deçà de ce seuil. Pourquoi donc imposer deux architectes, alors que nous voulons précisément susciter le désir d'architecture ? Cela me semblerait excessif et préjudiciable à la démarche pédagogique que nous défendons tous. Enfin, pour élargir le recours à l'architecte, nous proposerons ultérieurement la création d'un permis de construire sinon simplifié, du moins accéléré pour les projets situés en deçà dudit seuil.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 24 modifié.
Après l'article 24
La Commission examine l'amendement AC153 de M. François de Mazières.
Cet amendement a une portée concrète et immédiate. En effet, la loi de finances rectificative pour 2014 a supprimé l'avantage fiscal relatif aux monuments historiques pour les immeubles inscrits mis en copropriété. Cette situation pénalise lourdement les communes qui mènent des politiques de reconquête de leur coeur historique par des restaurations de qualité et des reconversions de friches militaires ou industrielles inscrites à l'inventaire supplémentaire. Cette suppression revient à laisser à la seule charge des collectivités la reconversion de ces sites alors même que l'insuffisance des financements de droit commun pour produire du logement public social en acquisition-amélioration ne leur permet pas de mener à bien une telle politique.
Je vis cette situation dans ma ville. L'avantage fiscal en question était particulièrement incitatif pour la requalification du patrimoine historique, qui constitue un besoin pressant. Je regrette qu'il ait été supprimé pour les immeubles inscrits et réservé aux seuls immeubles classés, beaucoup moins nombreux.
Vous souhaitez élargir le champ des bénéficiaires potentiels de l'article 156 du code général des impôts, qui permet la déduction des charges afférentes à un monument historique ou à un immeuble ayant reçu le label de la Fondation du patrimoine, lequel offre une garantie. Il est vrai que ce champ a été réduit par la dernière loi de finances qui a modifié l'article 156 bis du même code. Je suis donc favorable à votre amendement qui, sans modifier l'économie générale du dispositif actuel, l'étend à un certain nombre d'immeubles qui doivent pouvoir en bénéficier. Il me semble en effet utile de revenir sur cette suppression qui n'aurait jamais dû avoir lieu.
Vous savez à quel point je suis favorable à la transformation d'usage ainsi qu'à la valorisation des monuments historiques et, plus largement, des bâtiments d'intérêt patrimonial. De ce point de vue, je mène plusieurs initiatives concernant le patrimoine du ministère de la culture mais aussi, avec la Fondation du patrimoine, le patrimoine privé. J'y vois un moyen très efficace de contribuer à l'entretien, à la restauration et à la transmission aux générations futures de ces bâtiments. L'enjeu, en effet, est bien souvent de leur attribuer une nouvelle destination sans laquelle leur conservation pourrait être mise en péril.
De fait, 68 % des demandes d'agrément au titre de l'article 156 bis V concernent des immeubles inscrits : nous poursuivons donc le même objectif que vous. Cela étant, le présent projet de loi ne me semble absolument pas constituer le véhicule législatif adapté pour aborder cette question, comme l'a d'ailleurs jugé le Conseil constitutionnel dans une récente décision. Je vous propose donc de retirer l'amendement pour revenir à ce sujet en loi de finances.
J'entends les sages arguments de M. le rapporteur et les vôtres, madame la ministre, mais je tiens en maintenant l'amendement à vous offrir l'occasion de confirmer publiquement qu'il convient de rétablir la situation antérieure à la loi de finances rectificative de 2014.
La Commission rejette l'amendement.
Elle se saisit de l'amendement AC155 de M. François de Mazières.
L'article 544 du code civil dispose que « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Or, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, « le propriétaire d'une chose ne dispose pas d'un droit exclusif sur l'image de celle-ci ; il peut toutefois s'opposer à l'utilisation de cette image par un tiers lorsqu'elle lui cause un trouble anormal ».
Paradoxalement, le droit d'auteur protège les créations architecturales récentes, mais pas le patrimoine ancien. Il incombe donc au propriétaire d'un monument historique de lourdes charges d'entretien de son bien immeuble alors qu'il ne peut en contrôler l'image. C'est ainsi que les bénéfices de la vente d'une carte postale ne servent pas à en financer l'entretien mais enrichissent l'auteur de la photographie.
Cet amendement vise à ce que le code de la propriété intellectuelle impose à toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle à but lucratif – je fais cette précision à l'intention de Mme Attard – d'un monument historique de faire l'objet d'un accord préalable de son propriétaire. Cette juste proposition répond à la préoccupation des personnes qui se battent pour faire vivre nos monuments historiques – de moins en moins nombreuses, hélas, car nombreux sont les monuments mis en vente.
Il me semblait bien que vous n'aviez pas emprunté cet amendement à Mme Attard… En l'espèce, je partage votre point de vue : il n'est pas normal que l'on puisse utiliser l'image d'un monument historique à des fins commerciales sans en avertir le propriétaire. Je ne saurais néanmoins donner un avis favorable à cet amendement qui prévoit un dispositif trop large et risque d'engendrer de nombreuses lourdeurs administratives, pour un bénéfice modeste. Je pense au cas des tournages de films : il sera bien difficile, dans une ville qui m'est chère, de tourner des images sans avoir à recueillir l'accord préalable de nombreux propriétaires.
Même avis. J'ajoute qu'une telle mesure ne saurait s'appuyer sur le droit d'auteur, lequel a pour objet de protéger la création intellectuelle. D'autre part, le régime de la domanialité publique permet d'ores et déjà de contrôler certains usages de l'image des biens publics.
Malgré ces explications intéressantes, je maintiens l'amendement car ce débat me semble utile.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC154 de M. François de Mazières.
Ce projet de loi ne prévoit pas explicitement qu'une commune puisse conserver dans son PLU intercommunal la compétence d'urbanisme patrimonial en cas de blocage de la part de l'intercommunalité. De nombreuses collectivités s'inquiètent de cette situation, comme on l'a rappelé à maintes reprises. Le présent amendement vise donc à ce qu'un plan de secteur soit établi de plein droit sur le périmètre de la cité historique, les orientations et règlements étant soumis à l'accord de la commune concernée. Nous souhaitons en effet protéger les communes qui abriteraient un monument historique essentiel et qui ne seraient pas soutenues par leur intercommunalité.
Vous proposez que la commune qui est le siège de la cité historique accède de plein droit à un plan de secteur ; cette possibilité, qui existe actuellement dans le cadre de l'intercommunalité, n'est en effet pas accordée de plein droit. Or, il me semble dommageable de retirer à l'intercommunalité compétente en matière d'urbanisme la capacité d'élaborer le PLU patrimonial, car le rayonnement de la cité historique dépasse bien souvent la seule commune siège et couvre toute l'intercommunalité.
Toutefois, il faut prévoir une solution en cas de blocage, lorsque l'intercommunalité se désintéresse de la question. Ayant beaucoup travaillé sur ce sujet extrêmement compliqué, compte tenu des dispositions que le Parlement a, l'an dernier, adoptées en ce domaine, je proposerai à l'article 36 un amendement qui va dans le même sens que le vôtre et qui s'inspire directement de la disposition actuelle concernant les plans de secteur. Je vous invite donc à me faire confiance en retirant cet amendement.
L'amendement AC154 est retiré.
La Commission se saisit alors de l'amendement AC178 de M. François de Mazières.
Plusieurs associations ont manifesté le souhait de disposer d'un inventaire plus détaillé, en particulier du petit patrimoine. C'est pourquoi cet amendement vise à insérer un article prévoyant notamment que le règlement du plan local d'urbanisme en cité historique s'appuie sur un inventaire préalable du patrimoine de ladite cité. En effet, il est indispensable de maintenir un inventaire des richesses patrimoniales qui existent en cité historique. La France est en retard dans ce domaine : elle possède 40 000 éléments de patrimoine inscrits ou classés, tandis que l'Allemagne en a plus d'un million. Il faut donc renforcer la notion d'inventaire.
Je suis d'autant plus sensible à cette préoccupation que j'ai encore à l'oreille des revendications concernant l'inventaire préalable du petit patrimoine – le patrimoine dit vernaculaire. Vous proposez de donner davantage de force au PLU patrimonial mais, compte tenu des arguments présentés par Mme la ministre, du fait que la consultation de la CRPA est désormais obligatoire et, de surcroît, de l'adoption d'un amendement du Gouvernement concernant l'aide technique et financière de l'État à l'élaboration du PSMV et du PLU patrimonial, nous avons déjà fait oeuvre utile. Enfin, l'alinéa 6 de l'article 36 prévoit que « lorsque le plan local d'urbanisme couvre le périmètre d'une cité historique, le diagnostic mentionné au deuxième alinéa s'appuie sur un inventaire du patrimoine de la cité historique ». En ce domaine, il me semble donc que nous avons le fromage et le dessert, si j'ose dire…
L'amendement AC178 est retiré.
Article 25 : Modification du titre IV du livre VI du code du patrimoine
La Commission adopte l'amendement de précision AC401 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement AC402 du rapporteur.
Cet amendement de cohérence vise à ce que les infractions aux règles relatives au déplacement d'objets mobiliers protégés soient toutes réprimées au plan administratif, selon la ligne de partage établie par le texte.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement AC403 du rapporteur.
L'amendement précise le champ de l'infraction définie à l'article L. 641-4 du code du patrimoine en indiquant que le manquement grave à une obligation professionnelle et la négligence grave peuvent engager la responsabilité pénale de la personne chargée de la conservation ou de la surveillance du bien.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement l'amendement AC404 du rapporteur visant à rectifier une erreur matérielle, puis son amendement de cohérence AC405.
Elle adopte ensuite l'article 25 modifié.
Après l'article 25
La Commission examine de l'amendement AC188 de M. François de Mazières.
L'installation de bâches publicitaires sur les échafaudages de chantiers de restauration de monuments historiques produit un revenu directement affecté à ces travaux. Le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, en cours de discussion, prévoit malheureusement de supprimer cette possibilité au motif que les bâches peuvent porter atteinte au paysage urbain. Pour contourner ce que je pense être une erreur, car l'entretien du patrimoine suppose des ressources, je propose de compléter l'article L. 621-29-8 du code du patrimoine par la mention : « en veillant à la préservation du paysage urbain ».
La disposition du code du patrimoine que vous visez est utile au financement de la rénovation de nombreux monuments historiques. L'insertion de la bâche publicitaire dans son environnement étant évidemment l'un des critères d'octroi de la dérogation, votre amendement est satisfait en pratique. J'en suggère donc le retrait.
De fait, les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) donnent déjà un avis sur la qualité visuelle de ces bâches, si bien que l'amendement ne me paraît pas nécessaire. Vous l'avez dit, l'Assemblée nationale a voté l'abrogation de cet article du code du patrimoine contre l'avis du Gouvernement, mais de nombreux parlementaires de tous bords ont dit souhaiter son rétablissement. Je vous propose donc d'attendre la fin de la discussion par le Parlement du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et, dans l'intervalle, de retirer l'amendement.
Je tente par cet amendement d'aider le Gouvernement à revenir sur une disposition imbécile, en la court-circuitant. Je le maintiens.
En l'état du droit, votre amendement est satisfait. Ne considérons pas que le débat sur le projet de loi relatif à la reconquête de la biodiversité aura une issue obligatoirement négative : le Sénat ayant rétabli la disposition regrettablement abrogée par notre Assemblée en première lecture, nous ne désespérons pas d'obtenir gain de cause !
La précaution supplémentaire proposée n'est pas inutile, certaines bâches publicitaires ainsi affichées ayant été l'occasion de bien des excès.
Le vote définitif de la loi relative à la biodiversité interviendra avant que le débat sur le texte qui nous occupe soit achevé. Cela vous permettra de reprendre l'amendement le cas échéant.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Article 26 : Labellisation des immeubles présentant un intérêt architectural
La Commission examine l'amendement AC173 de M. François de Mazières.
Le patrimoine de moins de cent ans doit être protégé, mais sa restauration pose des problèmes techniques aigus qui la rendent très coûteuse. Aussi proposons-nous de prévoir une étude préalable à la labellisation, pour mesurer la faisabilité et le coût de la sauvegarde des bâtiments concernés.
La labellisation n'emportant aucune contrainte technique ou financière ni pour l'administration ni pour le propriétaire du bien, j'invite au retrait de l'amendement.
Si on labellise de trop nombreux bâtiments, le ministère, victime de cet engorgement, ne pourra pas suivre. Or, la tendance actuelle est, après n'avoir rien classé, à vouloir tout classer. Une politique de labellisation structurée du patrimoine du XXe siècle suppose que l'on sache quel sera son coût, et que l'on ne labellise que les bâtiments d'exception.
Le label est conçu pour signaler au public les oeuvres les plus caractéristiques de la création récente et, leur singularité étant reconnue, pour leur donner une chance d'être transmises aux générations futures. L'appréciation de l'état des édifices visés fait partie des constats scientifiques qui doivent nécessairement être menés, mais ce ne peut être un critère de labellisation, puisque le label n'entraîne pas une protection emportant des servitudes d'utilité publique. Avis, pour ces raisons, défavorable à un amendement que je pense né d'une confusion entre labellisation et classement ou inscription à l'inventaire.
L'amendement vise à signifier que, même sous la forte pression des élus, on ne peut tout labelliser, et que le label doit continuer de distinguer des bâtiments d'un intérêt architectural ou technique singulier qu'il faudra sauvegarder.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC120 de Mme Marie-George Buffet.
L'amendement précise que le label peut concerner des bâtiments isolés ou des ensembles de bâtiments, comme des aménagements d'espaces publics et des ouvrages d'art.
L'amendement me paraît partiellement satisfait, les immeubles pouvant recevoir ce label à titre autonome ou en tant qu'ensemble architectural ; en outre, le terme « aménagement » est suffisamment large pour viser également les aménagements d'espaces urbains. Mais il est vrai que nous pourrions introduire explicitement les ouvrages d'art dans le texte lors son examen en séance publique. Nous travaillerons ensemble à une rédaction qui vous agréera ; dans l'intervalle, je vous propose de retirer l'amendement.
L'amendement AC120 est retiré.
La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements AC121 de Mme Marie-George Buffet et AC195 de M. François de Mazières.
En introduisant dans la loi un label spécifique au patrimoine d'intérêt architectural récent, le nouvel article L. 650‑1 du code du patrimoine poursuit l'intégration dans le droit français de la recommandation du Conseil de l'Europe relative à la protection du patrimoine architectural du XXe siècle. Il s'agit d'éviter que des édifices majeurs présentant un intérêt architectural incontestable disparaissent sans qu'une concertation en amont puisse être menée, en permettant au ministère de la culture d'être informé par les propriétaires des travaux qu'ils envisagent de réaliser et qui sont susceptibles de modifier les édifices labellisés. Néanmoins, dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a relevé que l'absence de sanction en cas de méconnaissance peut priver la disposition de son effectivité.
Aussi l'amendement AC195 prévoit-il que cette information constitue une formalité substantielle du permis de construire et qu'elle peut donner lieu à des recommandations. Le certificat d'information préalable et les recommandations éventuelles devront donc figurer au dossier de demande de permis ; en cas d'absence de ces documents, c'est l'autorité qui délivre le permis qui devra saisir la DRAC plutôt que de renvoyer le dossier au pétitionnaire et de l'obliger à reprendre la procédure à zéro.
L'amendement AC121 est en partie satisfait, car l'autorité administrative sera informée des perspectives de démolition d'un bien labellisé. Vous souhaitez par ailleurs, madame Buffet, que soit mieux prise en compte la propriété intellectuelle des constructions labellisées et que leur auteur ou ses ayant droits soient consultés lorsqu'un projet de démolition est envisagé. Je crains que cet amendement ne complique un dispositif intentionnellement très souple ; j'en demande donc le retrait.
Le label, monsieur de Mazières, ne constitue pas un nouveau dispositif de protection. Il vise à instaurer un dialogue avec le propriétaire pour permettre à l'administration de réagir le cas échéant en recourant aux instruments qui existent. Je ne souhaite pas retenir l'amendement AC195 qui alourdit le dispositif sans nécessité.
Même avis sur les deux amendements. L'article L. 650-1 tend déjà à assurer l'information des services de l'État avant la réalisation de travaux susceptibles de modifier un immeuble labellisé. L'objectif visé par l'amendement AC121 est donc satisfait, mais l'information prévue dans le projet me paraît préférable à une consultation qui introduirait une lourdeur supplémentaire. L'amendement AC195 est également satisfait, la jurisprudence sur ce point considérant que les propriétaires ne peuvent exercer leur droit que dans la limite du respect du droit moral de l'auteur ou de ses ayants droit.
L'amendement AC121 est retiré.
Pour avoir souvent entendu des architectes s'inquiéter des perspectives de destruction de leurs oeuvres, je maintiens que la disposition que je propose est utile.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement AC195.
Elle examine ensuite, en discussion commune, l'amendement AC181 de M. François de Mazières et l'amendement AC349 du Gouvernement, qui fait l'objet du sous-amendement AC501 du rapporteur.
Le plaisir du promeneur des villes est enrichi par la lecture, sur nombre d'immeubles anciens, du nom des architectes qui les ont bâtis et de la date de leur construction. Cette signature visible crée une responsabilité supplémentaire pour les architectes et valorise leur travail. Mais cette habitude s'est perdue. Je propose par l'amendement AC181 de rendre ces inscriptions obligatoires pour toute construction nouvelle. Cela est fait sur tous les bâtiments publics dans la ville dont je suis maire et les architectes y sont très sensibles.
J'approuve cette disposition. Afin de valoriser le rôle et la responsabilité de l'architecte et de favoriser une meilleure connaissance de l'architecture par le grand public, le Gouvernement propose, par l'amendement AC349, de rendre obligatoire la mention du nom de l'architecte sur tout bâtiment qu'il aura construit ; la mesure tend également à faciliter l'exercice du droit moral de l'architecte et de ses ayant-droits. Cette possibilité existe actuellement, mais sans obligation législative ni réglementaire, à l'initiative du maître d'ouvrage ou à la demande de l'architecte avec l'accord du maître d'ouvrage. Pour éviter toute ambiguïté, il est précisé que lorsque plusieurs architectes interviennent sur une même opération, sera inscrit le nom de l'« auteur du projet architectural », au sens de l'article 3 de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture, confirmé par le code de la propriété intellectuelle.
Pour tenir compte de ce que certains bâtiments n'ont aucune façade sur rue, il est proposé d'écrire que « le nom de l'architecte auteur du projet architectural d'un bâtiment est apposé sur une de ses façades ». Cette rédaction permet de mieux satisfaire l'objectif commun de M. de Mazières et du Gouvernement.
Par souci de synthèse, mon sous-amendement AC501 vise à codifier cette disposition dans un nouvel article L. 650-2, en mentionnant également l'inscription de la date d'achèvement de l'ouvrage sur l'une de ses façades extérieures.
Avis favorable au sous-amendement.
Je suis favorable à l'amendement du Gouvernement tel que sous-amendé. Je retire donc l'amendement AC181.
L'amendement AC181 est retiré.
La Commission adopte successivement le sous-amendement AC501 et l'amendement AC349 ainsi sous-amendé.
Puis elle adopte l'article 26 modifié.
Après l'article 26
La Commission est saisie de l'amendement AC407 du rapporteur.
L'amendement traduit la proposition n° 24 du rapport de notre mission d'information sur la création architecturale, déposé le 2 juillet 2014. Il vise à modifier le fonctionnement du « 1 % artistique » sur deux points. Il s'agit d'une part de sélectionner le plus tôt possible l'artiste qui sera à l'origine de l'oeuvre insérée, pour qu'elle soit intégrée très en amont dans le projet architectural, d'autre part de favoriser la diversité des arts auxquels on recourt par ce dispositif.
Cette excellente disposition est probablement de niveau réglementaire, mais mon avis est très favorable.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC406 du rapporteur.
Comme d'autres qui suivront, l'amendement tend à reconnaître le rôle joué par les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE). Celui-ci précise le dernier alinéa de l'article L. 232-2 du code de l'énergie, relatif aux plateformes territoriales de la rénovation énergétique. Lorsqu'elles sont gérées par les CAUE, le conseil en efficacité énergétique est optimisé par l'approche globale du projet. Lorsqu'un autre organisme gère la plateforme et délivre les conseils en rénovation énergétique, il doit recommander au maître d'ouvrage de demander également conseil au CAUE, afin qu'il puisse compléter le conseil en efficacité énergétique par une approche architecturale. Tel est l'objet de l'amendement.
Cette possibilité existe déjà sans que la loi doive le préciser. Je m'en remets donc à la sagesse de votre commission.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle se penche sur l'amendement AC415 du rapporteur.
L'amendement reprend la proposition n° 29 du rapport de la mission d'information sur la création architecturale. Pour permettre à celle-ci de se déployer, il s'agit de délimiter, dans le règlement du plan local d'urbanisme, des secteurs à l'intérieur desquels les règles d'urbanisme en matière de caractéristiques architecturales sont volontairement minimales. Dans ces secteurs, la délivrance des permis de construire serait subordonnée à la constatation de la qualité architecturale du projet.
Vous avez déposé un peu plus loin, monsieur le rapporteur, un autre amendement qui vise le même objectif en définissant mieux les moyens d'y parvenir. Je suggère donc le retrait de celui-ci.
L'amendement AC415 est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement AC503 du rapporteur.
L'amendement, qui reprend une autre des propositions de la mission, a pour objet de raccourcir les délais d'instruction des demandes de permis de construire présentées par les particuliers ou les exploitants agricoles qui usent des services d'un architecte alors que la loi ne les y oblige pas. Il s'agit d'encourager le recours à des architectes pour enrayer le mal français qui veut que, malheureusement, deux tiers des constructions neuves dans notre pays se fassent sans eux. D'autres incitations en ce sens, d'ordre réglementaire celles-là, sont possibles, par le biais des documents annexés à la demande de permis de construire. Sur ce plan, je laisserai le soin à Mme la ministre de contribuer, dans le cadre de la stratégie nationale pour l'architecture en cours d'élaboration, à apaiser notre souci commun.
Je suis heureuse que l'occasion nous soit donnée de traduire dans la loi des mesures travaillées collectivement et qui, dans le cadre de la stratégie nationale pour l'architecture, sont destinées à encourager le recours aux architectes, dont on sait l'apport à l'esthétique et à l'urbanisme pour les constructions individuelles. Recourir à un architecte, c'est se prémunir contre de nombreux risques et c'est la source d'économies importantes.
C'est pourquoi nous avons travaillé, avec le ministère chargé du logement et l'Ordre des architectes, à la mise au point d'une mesure proche de celle que vous préconisez : l'expérimentation volontaire, par des collectivités territoriales intéressées, d'un permis de construire simplifié et au délai de délivrance abrégé pour les particuliers qui s'adressent à un architecte en dessous des seuils de recours obligatoire, dans des secteurs à instruction simple, hors législation connexe. Nous pourrons ainsi analyser l'impact exact d'une telle mesure. Je vous demande donc de bien vouloir retirer l'amendement.
Si je vous suis bien, madame la ministre, vous proposez une expérimentation pour mesurer l'impact du permis simplifié avant de lui conférer une valeur législative ?
Tout à fait. Il s'agit de l'expérimentation d'un permis simplifié et au délai d'obtention raccourci pour les constructions faisant appel à un architecte en dessous du seuil.
C'est un sujet important, dont nous avons longuement débattu au sein de la mission d'information, et j'aurais préféré que l'amendement du rapporteur soit adopté. Combien de temps cette expérimentation, avant la généralisation que nous souhaitons, durera-t-elle ?
Deux ans me paraissent une durée raisonnable.
Nous reverrons le sujet en séance. Le lancement rapide de l'expérimentation, avant la fin de l'examen de ce projet de loi, est souhaitable. Par ailleurs, un délai de deux ans semble en effet raisonnable. Je vous remercie, madame la ministre, pour cette annonce ; une telle expérimentation posera les bases d'un permis de construire simplifié pour tous les particuliers faisant appel à un architecte en dessous du seuil de recours obligatoire. Je m'inscris dans la démarche très volontaire que vous engagez et retire cet amendement.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement AC502 du Gouvernement.
Conformément à l'esprit des préconisations du rapport relatif à la création architecturale, ainsi que des réflexions des groupes de travail dans le cadre de la stratégie nationale pour l'architecture, cet amendement a pour objet de favoriser le recours à l'architecte pour la réalisation des projets d'aménagement dans le cas des lotissements, en complétant l'article 3 de la loi du 3 janvier 1977.
Conformément aux articles L. 421‑2 et R. 421‑19 du code de l'urbanisme, les lotissements sont soumis à l'obtention d'un permis d'aménager lorsque ceux-ci prévoient la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs internes au lotissement. La demande de permis d'aménager doit comporter un projet architectural, paysager et environnemental, comme le prévoit l'article R. 442-5 du code de l'urbanisme. Les lotissements constituant une part importante de la consommation des sols et des projets d'urbanisation dans l'aménagement du territoire français, il est très important d'y favoriser la qualité architecturale. Le recours à un architecte pour la réalisation du projet architectural d'un lotissement contribuera à cet objectif. Une telle proposition ne freinera nullement les projets d'aménagement, aucune démarche supplémentaire n'étant imposée. Le champ d'application sera précisé par décret.
Je ne peux que me réjouir, car nous avons longuement évoqué, au sein de la mission d'information sur la création architecturale, la problématique des lotissements et de leur piètre qualité architecturale bien souvent. Avez-vous une idée du seuil à partir duquel s'appliquera l'obligation de recours à l'architecte pour un lotissement ?
Je souhaitais poser la même question que le rapporteur. Nous nous félicitons également de cette initiative.
Nous aurons à préciser le seuil au cours de la discussion parlementaire.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC413 du rapporteur.
Je vous lis, chers collègues, l'important article additionnel proposé à votre vote : « Le premier alinéa de l'article 4 de la loi n° 77‑2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture est complété par une phrase ainsi rédigée : “Pour les constructions édifiées ou modifiées par les personnes physiques, la surface maximale de plancher déterminée par décret en Conseil d'État ne peut être supérieure à cent cinquante mètres carrés.” »
Nous reprenons ainsi une proposition du rapport de la mission d'information sur la création architecturale : mesure d'incitation au recours à l'architecte, puisque le seuil obligatoire pour le recours à un architecte est abaissé, mais aussi mesure de simplification, le mode de calcul du seuil étant devenu extrêmement complexe à la suite de plusieurs modifications. À titre d'exemple, l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme se lit comme suit : « Une construction à usage autre qu'agricole dont à la fois la surface de plancher et l'emprise au sol, au sens de l'article R. 420-1, de la partie de la construction constitutive de surface de plancher n'excèdent pas cent soixante-dix mètres carrés. » Faisons simple.
Il s'agit en effet d'un article très important et très attendu, et qui, contrairement à d'autres adoptés depuis hier, restera. Nous y souscrivons totalement.
Ce qui a été dit juste auparavant est également important : la France est défigurée par les lotissements. C'est pourquoi il faudra fixer un seuil assez bas, sinon il se trouvera toujours des gens pour construire des séries de maisons en ruban.
Je suis très heureux de cette proposition. Nous avons conduit un très intéressant travail sur l'architecture dans le cadre de la mission d'information, et je sais que la ministre a engagé une réflexion stratégique en la matière. C'est par le biais de cette problématique que se dessine le paysage de la France de demain. L'une de vos priorités, madame la ministre, est l'éducation artistique ; or je crois beaucoup à l'éducation au beau, à la pédagogie de l'esthétique. Cela peut se mettre en place très simplement, j'en ai fait l'expérience dans le cadre des activités périscolaires de ma commune. Les gens, toutes générations confondues, y sont très attachés. Cela pourrait être l'un des objectifs de l'éducation artistique à l'école.
Je suis également très satisfait par cette mesure. Le code de l'urbanisme dispose qu'il est possible d'agrandir de 20 mètres carrés un bâtiment en présentant seulement une petite déclaration de travaux. L'amendement règle la question.
Je me réjouis beaucoup de cet amendement. Dès ma prise de fonction, j'ai lancé la réflexion sur l'architecture, qui restait, probablement en raison de ses nombreux aspects interministériels, un angle mort de l'action du ministère de la culture. J'ai souhaité appréhender le sujet à la fois sous l'aspect de la régulation de la profession et sous celui de la place du beau dans notre quotidien.
Cette série d'amendements conclut heureusement les travaux de la stratégie nationale. C'est un premier jalon, il y en aura d'autres. La stratégie nationale comportait un volet de sensibilisation du grand public et des élus à la qualité architecturale. Je souhaite comme vous, monsieur Herbillon, que les jeunes y soient, dans leur parcours culturel à l'école et en dehors, eux aussi sensibilisés. C'est notamment pourquoi j'ai souhaité que les journées du patrimoine de ce week-end portent sur la production architecturale contemporaine. J'ai par ailleurs expressément demandé que le mot « architecture » figure dans le titre de cette loi.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AC488 du rapporteur.
Vous connaissez l'attachement des architectes au concours d'architecture, qui participe à la qualité architecturale, à l'insertion harmonieuse des constructions dans leur milieu, et à l'innovation. Par le présent amendement, je souhaite répondre à deux préoccupations.
Tout d'abord, nous inscrivons le concours dans la loi fondatrice du 3 janvier 1977, après l'article 5. Nous lui apportons ainsi une garantie législative. Ensuite, pour appliquer la proposition n° 15 du rapport de la mission d'information, nous écrivons que le concours « comporte une phase de dialogue entre le maître d'ouvrage et les candidats permettant de vérifier l'adéquation des projets présentés aux besoins du maître d'ouvrage ». Il faut fixer le principe du dialogue avant la conclusion du concours, afin de permettre aux candidats d'expliciter leurs projets mais aussi au maître d'ouvrage de les faire évoluer s'ils ne correspondent pas tout à fait à ses besoins. Enfin, le troisième alinéa indique que les maîtres d'ouvrage recourent au concours « dans les conditions fixées par la loi ou le règlement ».
Je partage ces objectifs et rappelle que le Gouvernement a d'ailleurs maintenu le recours obligatoire au concours pour les usages publics dont le montant est supérieur au seuil européen. Je suis favorable à l'affirmation dans la loi du 3 janvier 1977 du rôle primordial du concours, ainsi qu'à la possibilité d'aménager une phase de dialogue, dans une procédure où l'anonymat doit néanmoins rester la règle, afin d'éviter les ententes. En revanche, le troisième alinéa est déjà satisfait par l'ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics. Je proposerai donc de le supprimer.
Nous approuvons totalement l'amendement dans ses deux parties. La nécessité du dialogue doit être réaffirmée car, si certains se détournent aujourd'hui du concours, c'est en raison de l'absence de dialogue. Des problèmes de conformité avec la législation européenne ont été évoqués. Qu'en est-il ?
Je me réjouis de cet amendement, que nous soutenons ardemment. Il est temps de sortir de cette situation extrêmement pénalisante, et ubuesque, où, du fait d'un anonymat maintenu jusqu'au terme du processus, aucun dialogue n'est possible entre le maître d'ouvrage et l'architecte, au sujet de constructions appelées à durer des dizaines et des dizaines d'années.
À quel moment de la procédure l'anonymat sera-t-il levé ? Si c'est avant la pré-décision, autant dire qu'il n'y a plus d'anonymat. Or, s'il a été instauré dans le concours, ce n'est pas sans raison.
L'amendement ne se heurte pas à la législation européenne : nous avons eu l'occasion de le vérifier au cours des six mois de travail de la mission d'information. L'Allemagne, par exemple, a un concours d'architecture sans anonymat. Notre idée est très simple, c'est qu'à un moment de la procédure – qu'il ne nous appartient pas de déterminer ici – un dialogue puisse s'instaurer entre les candidats et le maître d'ouvrage. Très souvent, le lauréat ne découvre qu'à l'issue du concours les résultats de la concertation préalable conduite par le maire, à qui il revient de faire coïncider le projet architectural et les demandes portées au cours de la concertation. Soit l'architecte accepte de prendre en considération le résultat de la concertation et modifie son projet en conséquence, soit il refuse d'apporter le moindre changement à son oeuvre. Le maire se trouve entre le marteau et l'enclume.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements AC327, AC330, AC329 et AC328 de Mme Sophie Dessus, ainsi que l'amendement AC410 du rapporteur, en discussion commune avec ce dernier.
Les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) jouent un rôle essentiel dans les territoires ruraux, où ils assurent soutien, conseil et pédagogie auprès des communes, des départements et des particuliers.
L'amendement AC327 vise à maintenir les missions des CAUE sur les périmètres métropolitains en création. Dans la métropole de Lyon, par exemple, le périmètre d'intervention du CAUE du Rhône – structure départementale, comme tous les CAUE – a été modifié mécaniquement, et il a fallu une ordonnance pour qu'il retrouve son ancien territoire d'intervention.
L'amendement AC330 tend à rendre obligatoire l'adhésion des CAUE à leur fédération nationale, dans un souci de cohérence et d'efficacité.
L'amendement AC329 vise à faciliter la formation par les CAUE des élus et de leurs collaborateurs travaillant sur l'urbanisme.
Enfin, l'amendement AC328 prévoit que les CAUE conseillent les particuliers qui désirent construire ou bien sont candidats à la rénovation, à l'aménagement de parcelles ou à la réhabilitation du paysage.
Je vous remercie, chère collègue, pour votre contribution active au renforcement du rôle et des missions des CAUE, auxquels nous sommes tous attachés et dont il faudrait d'ailleurs augmenter le nombre, car il n'y en a pas encore partout.
Je suis favorable à l'amendement AC327 sur le fond mais il présente un problème de rédaction, ce pourquoi j'invite son auteure à le retirer pour qu'il soit rédigé de nouveau d'ici à la séance.
L'adhésion à la Fédération nationale des CAUE, en revanche, ne relève pas du législateur, pas plus que, par exemple, l'adhésion au Parti socialiste… (Sourires.)
L'agrément de plein droit des CAUE pour la formation des élus est une préoccupation que je partage, d'autant plus que la mission d'information en avait fait l'une de ses propositions ; j'y suis donc favorable.
Enfin, mon amendement AC410 poursuit le même objectif que l'amendement AC328, dont je trouve la rédaction un peu plus précise.
Je suis du même avis que le rapporteur sur les amendements de Mme Dessus, et favorable à l'amendement AC410.
Les amendements AC327, AC330 et AC328 sont retirés.
La Commission adopte successivement les amendements AC329 et AC410.
Elle en vient à l'amendement AC414 du rapporteur.
Il s'agit de prendre nos responsabilités de législateur afin de lutter contre un certain nombre de dérives que le Conseil national et les conseils régionaux de l'ordre des architectes nous ont signalées, à savoir les faux et les signatures de complaisance apposées sur les projets architecturaux joints aux demandes de permis de construire.
Le présent amendement permettrait aux services instructeurs des demandes d'autorisation d'urbanisme de saisir le conseil régional de l'ordre des architectes pour qu'il vérifie si l'architecte qui a signé le projet architectural est bien inscrit au tableau de l'ordre et s'il a bien participé à l'élaboration du projet. Le conseil régional de l'ordre, qui est le mieux informé des pratiques sur son territoire, serait ainsi en mesure de saisir l'instance disciplinaire afin de faire sanctionner les éventuelles signatures de complaisance.
Je partage votre préoccupation, monsieur le rapporteur. Cependant, les conseils régionaux de l'ordre des architectes sont déjà engagés dans une démarche de lutte contre les signatures de complaisance, qui constituent, je le rappelle, un manquement à une obligation déontologique prévue par le code des devoirs professionnels des architectes et sont, à ce titre, susceptibles de sanctions devant les instances disciplinaires. La vérification de la bonne inscription d'un architecte au tableau de l'ordre est d'ailleurs possible sans délai, ce tableau étant obligatoirement et intégralement mis à jour en ligne par les conseils régionaux de l'ordre. Selon moi, ces actions constituent, à ce stade, une réponse adaptée, même s'il est sans doute nécessaire de les évaluer. D'autre part, les modalités prévues par cet amendement me semblent d'application délicate, car elles imposeraient une obligation probablement difficile à satisfaire pour les services de l'État. Je vous propose de retirer cet amendement au bénéfice d'une expertise au cours de l'examen du texte.
Je vous ai écoutée avec attention, madame la ministre. La mobilisation des conseils régionaux de l'ordre est manifeste. Mais, au regard de mon expérience de maire, puis de conseiller de Paris délégué à l'urbanisme dans le 11e arrondissement, fonctions aux titres desquelles j'examine chaque semaine plusieurs demandes de permis de construire avec la direction de l'urbanisme de la ville de Paris, il me paraîtrait utile d'inscrire les dispositions que je propose dans la loi. Elles ne sont ni excessives ni lourdes : il s'agirait simplement de pouvoir faire une vérification lorsque l'on soupçonne qu'un projet architectural a bénéficié d'une signature de complaisance. Ce serait une garantie pour les élus locaux et pour les services qui travaillent auprès d'eux. Lorsque l'on refuse un permis de construire parce que l'on estime être en présence d'une signature de complaisance, on prend un gros risque en matière de contentieux. Comme vous le savez, il faut justifier les refus de permis de construire avec beaucoup de rigueur.
J'appuie totalement la proposition du rapporteur, au regard de ma propre expérience de maire. Par ailleurs, madame la ministre, je ne vois pas en quoi cet amendement imposerait une charge supplémentaire pour l'État.
Il vise les services chargés de l'instruction des demandes d'autorisation.
Compte tenu des explications données par le rapporteur, je m'en remets à la sagesse de la Commission, sans exclure d'apporter en séance un certain nombre de précisions rédactionnelles.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine les amendements AC417 et AC408 du rapporteur.
Ces deux amendements tirent les conséquences de la réorganisation territoriale et de la mise en place des treize nouvelles régions pour le Conseil national et les conseils régionaux de l'ordre des architectes.
L'amendement AC417 crée les conditions pour que la composition des conseils régionaux de l'ordre reflète la diversité de leur territoire.
L'amendement AC408 vise à reporter d'un an la fin du mandat des membres du Conseil national et des conseils régionaux de l'ordre, afin d'éviter que les élections ordinales n'aient lieu en même temps que la réorganisation des régions et de permettre à l'ordre de procéder au mieux à sa propre réorganisation interne. S'agissant d'un ordre professionnel, il est nécessaire de passer par la loi.
Avis favorable à ces deux amendements.
La Commission adopte successivement les amendements AC417 et AC408.
Puis elle est saisie de l'amendement AC331 de Mme Sophie Dessus.
Cet amendement vise à donner une existence législative à l'organisation de l'activité des CAUE à l'échelon régional. Cela répondrait à une préoccupation majeure des CAUE, qui vont sans doute devoir passer du niveau départemental au niveau régional. Cela permettrait d'ailleurs aux départements qui ne disposent pas de leur propre CAUE de bénéficier de l'expérience desdits CAUE.
Le problème est un peu le même que pour l'amendement AC330. Cette fois-ci, vous prônez une logique d'adhésion obligatoire non pas à une fédération nationale, mais à une union régionale. Selon moi, il n'appartient pas au législateur d'intervenir dans ces questions. Il revient aux CAUE, dont nous respectons l'autonomie, de s'organiser comme ils le souhaitent tant au niveau régional qu'au niveau national.
L'amendement est retiré.
La Commission en vient à l'amendement AC416 du rapporteur.
Cet amendement est beau ! (Sourires.) Le plus simple, me semble-t-il, est que je vous le lise intégralement : « À titre expérimental et pour une durée de sept ans à compter de la publication de la présente loi, l'État et les collectivités territoriales peuvent, pour la réalisation d'équipements publics, déroger à certaines règles en vigueur en matière de construction dès lors que leur sont substitués des résultats à atteindre similaires aux objectifs sous-jacents auxdites règles. Un décret en Conseil d'État fixe les règles qui peuvent faire l'objet de cette expérimentation ainsi que les résultats à atteindre qui s'y substituent. Il détermine également les conditions dans lesquelles l'atteinte de ces résultats est contrôlée tout au long de l'élaboration du projet de construction et de sa réalisation. Dans un délai de trois mois avant le terme de l'expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'évaluation. »
Cet amendement vise à traduire la proposition n° 28 du rapport de la mission d'information sur la création architecturale. Éclairés par l'expérience de pays voisins, nous avons voulu impulser une nouvelle approche, à mon sens plus intelligente, en matière d'élaboration et de mise en oeuvre des normes. Il s'agit, à travers cette expérimentation, de sortir de la logique prescriptive, et de substituer progressivement une logique de résultats à la logique de moyens aujourd'hui à l'oeuvre. Force est de constater que les normes actuelles, tout à fait légitimes quant à leurs objectifs, sont sclérosantes pour la création architecturale et conduisent à une standardisation préoccupante du cadre bâti. Avec cette expérimentation, qui durera sept ans, nous donnons du temps au temps, mais nous donnons aussi un signal et nous lançons le mouvement.
Vous avez raison de dire que cet amendement est beau, monsieur le rapporteur, et j'y suis très favorable ! Il résulte d'un travail réalisé en commun au profit de l'architecture, dont je me félicite. Je précise qu'un décret en Conseil d'État encadrera cette démarche. Avec ces dispositions, le projet de loi promouvra véritablement la création et l'innovation par l'architecture. Il permettra de développer les apports de l'architecture aux projets et aux politiques publiques. De plus, l'expérimentation, qui permet de passer d'une culture de la règle à une culture d'objectifs, me tient très à coeur. Votre amendement va tout à fait dans ce sens.
Sept ans, c'est l'âge de raison. Je suis persuadée que ce dispositif fera des émules au bout de sept ans.
La Commission adopte l'amendement.
Article 27 : Dispositions relatives à l'outre-mer
La Commission examine les amendements AC418 et AC419 du rapporteur.
Il s'agit de deux amendements de coordination. L'amendement AC419 concerne l'application de l'article 20 du projet de loi à Mayotte.
Avis favorable à ces deux amendements.
La Commission adopte successivement les amendements AC418 et AC419.
Puis elle adopte l'article 27 modifié.
TITRE III Habilitations à légiférer par ordonnance
Chapitre Ier Dispositions portant habilitation à compléter et modifier le code du cinéma et de l'image animée
Article 28 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier et compléter le code du cinéma et de l'image animée
La Commission adopte l'article 28 sans modification.
Article 29 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier le code de la propriété intellectuelle
La Commission adopte l'article 29 sans modification.
Chapitre II Dispositions portant habilitation à compléter et modifier le code du patrimoine
Article 30 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier et compléter le code du patrimoine
La Commission est saisie de l'amendement AC356 du Gouvernement.
Il s'agit d'un amendement de coordination facilitant l'insertion dans le code du patrimoine des mesures de lutte contre le trafic illicite des biens culturels que la Commission a adoptées précédemment.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AC186 de M. François de Mazières.
L'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) et le département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (DRASSM) du ministère de la culture sont amenés à intervenir dans les mêmes opérations. Cet amendement vise à clarifier les missions respectives de ces deux structures et la répartition des rôles entre elles.
Votre préoccupation, que nous partageons totalement, est satisfaite par l'amendement AC209 que nous avons adopté à l'article 20.
L'amendement est retiré.
La Commission en vient à l'amendement AC157 de M. François de Mazières.
L'alinéa 22 de l'article 30 habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance afin de préciser et d'harmoniser les critères et les procédures de classement et d'inscription au titre des monuments historiques des immeubles et des objets mobiliers. Un tel champ d'habilitation nous inquiète : pourquoi renvoyer des dispositions aussi essentielles à des ordonnances ? Au-delà des améliorations techniques, cette formulation très générale ne dissimule-t-elle pas l'intention de fondre entièrement le régime des inscrits dans celui des classés, ou l'inverse ? Certains ont exprimé des doutes à ce sujet.
Je vous invite à retirer votre amendement. Le législateur n'aime pas particulièrement les ordonnances, mais elles sont parfois justifiées, notamment lorsqu'elles évitent au Parlement de revenir sur des textes qui ont mal vécu le poids des années pour leur apporter des modifications de pure forme. L'étude d'impact apporte un certain nombre de précisions sur le point que vous soulevez. Je suis sûr que Mme la ministre saura vous rassurer pleinement.
L'ordonnance à laquelle il est fait référence précisera bien que toute protection sera désormais déterminée par un intérêt « public ». Le degré de cet intérêt, qui sera apprécié par les commissions consultatives compétentes, déterminera le classement ou l'inscription. Pour chacun des types de protection, l'ensemble des catégories d'intérêt envisageables seront prises en compte : l'histoire, l'art, l'archéologie, l'architecture, l'ethnologie – qui permet la protection des biens supports de pratiques relevant du patrimoine immatériel –, la science et la technique.
Cette actualisation des critères et des procédures de protection ne changera rien aux régimes respectifs des biens protégés. Elle permettra de rassembler, dans un cadre plus clair et plus intelligible, les apports successifs des XXe et XXIe siècles à la construction de la notion de monument historique. Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, je donnerai un avis défavorable.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement AC158 de M. François de Mazières.
L'alinéa 23 de l'article 30 habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance afin de substituer au régime actuel de l'instance de classement un régime d'instance de protection pour les immeubles et les objets mobiliers. Là encore, le champ d'habilitation nous paraît trop large. Les modifications envisagées ne relèvent pas du domaine technique, puisqu'il s'agit non pas d'améliorer les procédures ou les modalités de l'instance de classement, mais de substituer à celle-ci une « instance de protection » dont nous ignorons absolument tout.
L'instance de classement est une procédure d'usage rare mais très importante au regard de la protection du patrimoine : elle est généralement utilisée pour éviter la disparition rapide d'un édifice remarquable qui n'a pas été protégé dans le passé. C'est une arme de dissuasion dans les mains du ministre de la culture. Son caractère discrétionnaire et sa mise en application immédiate sont essentiels pour faire face à de véritables urgences patrimoniales. Nous proposons donc la suppression de l'habilitation prévue.
Sur ce sujet aussi, l'étude d'impact me semble apporter les réponses que vous demandez, monsieur de Mazières.
La procédure d'instance de classement, dont vous avez rappelé toute l'importance, a été créée à une époque où l'inscription était non pas une véritable protection, mais un simple signalement d'intérêt. Pour que la pérennité du bien menacé de destruction soit assurée, il fallait que l'instance débouche sur un classement définitif. Aujourd'hui, la plupart des mesures d'instance de classement débouchent précisément sur des mesures d'inscription.
Cependant, l'appellation même de l'instance de classement, ainsi que son positionnement à l'intérieur de la section du code du patrimoine consacrée au classement, entretiennent un malentendu, qui a été à l'origine de plusieurs recours contentieux. Une interprétation restrictive voudrait en effet que tout bien placé sous instance de classement réponde a priori aux critères justifiant le classement définitif. Or cette interprétation est extrêmement dangereuse car, si elle avait été appliquée, nombre d'immeubles aujourd'hui sauvés après une instance, et désormais inscrits au titre des monuments historiques, auraient disparu au prétexte qu'ils ne justifiaient pas le classement.
En réalité, le remplacement du terme « instance de classement » par le terme « instance de protection » vise à garantir qu'un immeuble pourra être conservé jusqu'à ce que les commissions consultatives déterminent si son intérêt justifie un classement ou une inscription. Il s'agit non pas de faire disparaître une procédure, mais de clarifier une dénomination.
J'espère vous avoir rassuré et vous invite à retirer votre amendement. À défaut, je donnerai un avis défavorable.
Je retire l'amendement. Les précisions que vous avez apportées sont importantes, madame la ministre, et rassureront les intéressés. Il était bon que vous puissiez ainsi clarifier les choses, grâce aux amendements que nous avons présentés.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement AC341 du Gouvernement.
Il s'agit à nouveau d'un amendement de coordination facilitant l'insertion dans le code du patrimoine des mesures de lutte contre le trafic illicite des biens culturels.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 30 modifié.
Chapitre III Disposition portant habilitation à modifier et compléter le code de la propriété intellectuelle et le code du patrimoine s'agissant du droit des collectivités ultramarines
Article 31 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnances pour compléter et modifier le code de la propriété intellectuelle et le code du patrimoine pour l'outre-mer
La Commission est saisie de l'amendement AC420 du rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de précision, qui vise à ce que les modifications apportées par ordonnance au livre VII du code du patrimoine concernent aussi la Nouvelle-Calédonie, territoire qui m'est cher.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 31 modifié.
TITRE IV Dispositions diverses, transitoires et finales
Chapitre Ier Dispositions diverses
Article 32 : Dégradations d'éléments du patrimoine archéologique ou d'édifices de culte
La Commission adopte l'article 32 sans modification.
Après l'article 32
La Commission examine l'amendement AC340 du Gouvernement.
Il s'agit encore d'un amendement de coordination relatif aux dispositions de lutte contre le trafic illicite des biens culturels.
Avis d'autant plus favorable qu'il vise à améliorer le partage d'informations entre les douanes et les services du ministère de la culture.
La Commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AC422 du rapporteur.
Actuellement, seules les associations de défense du patrimoine archéologique peuvent bénéficier des dispositions de l'article 2-21 du code de procédure pénale. Le présent amendement vise à étendre cette possibilité à toutes les associations de défense du patrimoine, y compris à celles dont la vocation est de protéger les meubles et objets d'arts présentant un intérêt historique, sociologique ou artistique. Je défends cet amendement aussi au nom de M. Michel Piron, qui avait déposé avec M. Rudy Salles un amendement identique, numéroté AC135.
C'est une excellente mesure. Avis favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Article 33 : Coordination avec le code de l'environnement
La Commission est saisie de l'amendement AC134 de M. Patrick Hetzel.
La France compte quelque 60 000 moulins. Il y en a peu sur le territoire de ma commune – si ce n'est celui du Hameau de la Reine, qui ne fonctionne pas vraiment –, mais plusieurs de mes collègues ont appelé mon attention sur la destruction de certains d'entre eux, et j'ai à coeur de soutenir cet amendement. J'insiste à nouveau sur l'importance du patrimoine vernaculaire. Les moulins sont aujourd'hui menacés par des obligations environnementales parfois disproportionnées. La restauration de la continuité écologique, en particulier, dont le principe n'est pas contesté pour les installations hydrauliques ayant un réel impact sur l'état des cours d'eau, aboutit souvent à la destruction des seuils de moulins.
Comme vous, j'ai été sensibilisé à la nécessité de protéger les moulins, qui ont en effet une importance patrimoniale notable. J'ai d'ailleurs été impressionné par ce chiffre de 60 000. Cependant, le champ de votre amendement me semble excessivement large : vous proposez d'exempter l'ensemble des usines hydrauliques de France des dispositions de l'article L. 214-17 du code de l'environnement relatif au classement des cours d'eau dans le but d'assurer la continuité écologique. Je souhaiterais que l'on trouve un moyen de protéger les moulins, mais avec un dispositif mieux calibré.
Je partage l'avis du rapporteur : la rédaction proposée poserait une difficulté d'application, la notion d'usine hydraulique étant bien trop large. Cela étant, j'ai bien conscience du problème que vous soulevez, qui n'est pas anecdotique : il arrive en effet que certaines prescriptions disproportionnées ou inadaptées entraînent la destruction de moulins anciens, voire protégés. Néanmoins, ce problème peut être traité au moyen d'une circulaire conjointe du ministère de l'écologie et du ministère de la culture, afin d'éviter une application non raisonnée de l'article L. 214-17 du code de l'environnement. Je serai très attentive à cette question et veillerai à ce que le dossier progresse rapidement. Compte tenu de ces explications, je vous invite à retirer votre amendement.
Nous partageons tous le même objectif : protéger ces moulins, qui font partie de notre patrimoine. La proposition du rapporteur, qui consiste à revoir la rédaction de l'amendement d'ici à la séance publique afin de mieux en préciser le champ, me paraît bienvenue.
Je suis, moi aussi, très attaché aux moulins. Je vous invite d'ailleurs à aller voir le moulin de la Chaussée, situé sur la Marne, dans l'une des communes de ma circonscription, Saint-Maurice, juste en face de Maisons-Alfort. C'est probablement l'un des moulins les plus vus de France, par plus de 200 000 automobilistes chaque jour. Avec le maire, nous y avons installé un centre de formation d'apprentis, ce qui a permis de le sauver.
L'amendement est retiré.
La Commission examine les amendements AC423 et AC424 du rapporteur.
Avis favorable à ces deux amendements.
La Commission adopte successivement les amendements AC423 et AC424.
Puis elle adopte l'article 33 modifié.
Article 34 : Coordination avec le code forestier
La Commission adopte l'article 34 sans modification.
Article 35 : Coordination avec le code général des collectivités territoriales
La Commission adopte l'article 35 sans modification.
Article 36 : Modifications du code de l'urbanisme
La Commission adopte l'amendement de coordination AC425 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement AC151 de M. François de Mazières.
La loi du 13 août 2004 a confié aux régions la conduite et la coordination de l'inventaire général du patrimoine culturel. En une décennie, la mobilisation des collectivités territoriales a permis de faire avancer la recherche scientifique et la connaissance du patrimoine des territoires. Afin de prendre en compte cette expertise lors de l'élaboration des documents d'urbanisme, il conviendrait d'inscrire dans le code de l'urbanisme que les plans locaux d'urbanisme (PLU) visent l'inventaire général du patrimoine culturel. De la sorte, la protection du patrimoine sera mieux assurée dans le cadre des futurs projets d'aménagement.
Je ne comprends pas bien le sens de votre amendement ; l'inventaire existe en dehors du PLU, il n'est pas besoin que celui-ci le vise pour lui donner une existence. Cette précision me paraît dès lors inutile. En revanche, le PLU d'une cité historique doit effectivement s'appuyer sur un inventaire de son patrimoine, ce que prévoit d'ailleurs le 3° de l'article 36. Défavorable.
Même avis : l'amendement est satisfait.
Au-delà du cas des cités historiques, nous souhaitions inciter les communes à se montrer attentives à l'inventaire au moment de la réforme du PLU.
L'amendement est retiré.
La Commission passe à l'amendement AC39 de Mme Annie Genevard.
La question du niveau territorial le plus pertinent pour protéger le patrimoine a déjà été évoquée. Nous pensons, pour notre part, que c'est à l'échelon communal qu'il faut garantir la capacité d'élaborer des règles spécifiques de protection et de valorisation du patrimoine, la tâche pouvant s'avérer beaucoup plus difficile, y compris au sens politique, au niveau intercommunal. Ainsi, en Île-de-France, la métropole du Grand Paris rassemble des territoires comptant plus de 500 000 ou 700 000 habitants, et un nombre important de communes. Les sensibilités pouvant varier fortement d'une commune à l'autre, c'est la protection du patrimoine qui risque d'en pâtir.
Avis défavorable. Si l'intercommunalité souhaite prendre l'initiative de la protection patrimoniale, il faut la laisser faire. Il me paraît préférable que le PLU patrimonial soit, autant que possible, élaboré conjointement. Je vous suggère de retirer votre amendement, sachant que mon propre amendement AC398, à l'alinéa 25, aborde le problème de l'intercommunalité.
La Commission rejette l'amendement.
Elle aborde l'amendement AC294 de M. Jacques Cresta.
Afin de renforcer la légitimité des dispositifs de protection d'une cité historique, il est opportun de préciser la nécessité d'une consultation de la nouvelle commission régionale du patrimoine et de l'architecture lors de l'élaboration du PLU.
Comme je l'ai déjà dit, je suis favorable à ce que la nouvelle commission régionale du patrimoine et de l'architecture intervienne dans l'élaboration du PLU et du plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV). Pourquoi ne pas lui permettre d'intervenir aussi lors de l'inventaire qui est joint au PLU ? Je m'en remets à la sagesse de la Commission.
La Commission adopte l'amendement.
Elle se penche sur l'amendement AC295 de M. Jacques Cresta.
Nous proposons de renforcer les dispositions prévues pour la protection des cités historiques en introduisant dans le texte une nuance d'obligation.
Avis défavorable. Je ne crois pas que tous les règlements de tous les PLU de toutes les communes de France doivent obligatoirement mentionner ces règles. Celles-ci devront bien figurer dans le PLU patrimonial, tel que le prévoit l'article 24, mais, dans les autres cas, leur détermination restera facultative.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement AC426 du rapporteur.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement AC427 du rapporteur.
Cet amendement a pour objet d'assouplir le dispositif proposé en ne retenant que deux critères, au lieu de trois, pour accorder la dérogation aux règles relatives au gabarit et à la surface constructible, prévue par le 6° de l'article 36. Pour en bénéficier, le projet devra présenter un intérêt public soit du point de vue de la qualité et de la création architecturales, soit du point de vue de la qualité et de l'innovation architecturales. Cette disposition, qui reprend l'une des préconisations de la mission d'information sur la création architecturale, permettra de libérer celle-ci dans notre pays.
Une belle disposition ! Avis très favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AC428 du rapporteur.
Il s'agit d'appliquer également aux règles relatives à l'aspect extérieur des constructions la dérogation prévue au 6° de l'article 36.
Les dérogations doivent s'appliquer à des éléments quantifiables, comme le gabarit ou la hauteur ; or l'aspect extérieur des constructions auxquelles vous souhaitez en étendre le régime peut difficilement être quantifié. Il serait alors difficile d'objectiver la dérogation que vous proposez d'autoriser. Je vous suggère donc de retirer votre amendement.
J'aimerais que nous revenions à cette question lors du débat en séance. L'aspect extérieur des constructions constitue un vrai sujet et la dérogation prévue à l'article 36 doit pouvoir s'y appliquer afin d'apporter davantage de créativité dans les façades des immeubles collectifs de notre pays !
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement AC429 du rapporteur.
La dérogation supplémentaire prévue au 6° de l'article 36 – pour l'instant fixée à 5 % du volume initial autorisé – représente un facteur très dynamisant de la création architecturale dans notre pays. Afin de rendre le dispositif plus attractif, je propose de la porter à 10 %.
Ce projet de loi vise à promouvoir une architecture de qualité auprès de l'ensemble des acteurs de la construction ; je ne peux donc qu'être sensible à l'esprit de votre amendement. Je m'interroge néanmoins sur l'ampleur de la dérogation que vous proposez : une majoration de 10 % des droits à construire représenterait une hauteur de deux mètres environ pour un immeuble de cinq étages. Avant de porter le ratio à 10 %, il me semblerait préférable de procéder, au terme de quelques années, à l'évaluation de la dérogation de 5 %. Si vous ne retiriez pas votre amendement, j'émettrais donc un avis défavorable.
Je ne saurais me montrer trop exigeant dans le cadre de ce débat en commission, avant la première lecture du projet de loi ; je retire donc mon amendement, mais j'espère que, lorsque nous voterons définitivement ce texte, nous arriverons bien à 10 %...
L'amendement est retiré.
La Commission étudie l'amendement AC431 du rapporteur.
Cet amendement a une histoire : je l'avais défendu lors de l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. J'attendais d'intervenir en hémicycle quand un amendement précédent a entièrement réécrit l'article, faisant tomber le mien. Je n'ai donc pas pu le défendre. Cet amendement vise à adapter intelligemment la dérogation prévue au titre de l'isolation par l'extérieur en tenant compte des caractéristiques architecturales des immeubles protégés au titre du code du patrimoine.
Je comprends votre frustration. Pourtant, la représentation nationale vient de voter la loi relative à la transition énergétique, instaurant cette dérogation. Alors que la loi vient juste d'être promulguée, le Gouvernement est défavorable à cet amendement et il me revient d'être cohérente avec cette position.
J'appuie très énergiquement l'amendement proposé par notre rapporteur. L'isolation par l'extérieur des bâtiments historiques représente une aberration. On fera pourrir les immeubles de l'intérieur ! Madame la ministre, nous voterons tous contre votre décision et approuverons notre rapporteur. Je ne comprends pas votre position !
C'est la position du Gouvernement.
Vous ne pouvez pas, en tant que ministre de la culture, soutenir une position qui peut, dans certains cas, aboutir à la destruction des bâtiments historiques ! Cet amendement est essentiel et doit absolument être maintenu !
Je comprends la position de Mme la ministre, mais j'adhère à la proposition du rapporteur, que je soutiens.
Je maintiens l'amendement. Visiblement, ce qui pose problème n'est pas le champ de la disposition, mais uniquement la référence au vote récent du Parlement. Or nous sommes la représentation nationale, et ce que fait une loi, une autre loi peut le défaire, le compléter ou le corriger. N'ayant pas pu défendre cet amendement – qui relève du pur bon sens – lors du débat sur la transition énergétique, je considère que nous servons l'intérêt général en remédiant à cette situation aujourd'hui.
La Commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AC432 du rapporteur.
Il s'agit une fois de plus d'assouplir le dispositif proposé en ne retenant que deux critères, au lieu de trois, pour accorder la dérogation prévue par le 7° de l'article 36. Ainsi, pour bénéficier de la dérogation aux règles relatives au gabarit et au volume constructible, le projet devrait présenter un intérêt public soit du point de vue de la qualité et de la création architecturales, soit du point de vue de la qualité et de l'innovation architecturales.
La commission adopte l'amendement.
L'amendement AC433 du rapporteur est retiré.
La commission examine l'amendement AC434 du rapporteur.
J'ai bien entendu l'argumentation de la ministre et nous en restons donc également, pour le 7° de l'article 36, à une dérogation limitée à 5 %. Je retire donc mon amendement.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement AC348 du Gouvernement.
Le présent amendement vise à compléter l'article 36 en incluant dans le dispositif de dérogation aux règles de gabarit les dispositions de l'article L. 127-2 du code de l'urbanisme, créé par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. La dérogation proposée par le projet de loi portait sur l'article L. 127-1 relatif aux programmes de logements comportant des logements locatifs sociaux. Il convient donc d'étendre cette dérogation à celle prévue par l'article L. 127-2 nouveau relatif aux programmes de logements intermédiaires au sens de l'article L. 302-16 du code de la construction et de l'habitation. La majoration prévue est limitée à la hauteur ou à la surface, notions qui se prêtent facilement à une quantification. La mesure qui vous est proposée est très simple et facilement contrôlable.
Avis évidemment très favorable, puisqu'il s'agit de déroger aux règles d'emprise au sol et de hauteur, au bénéfice de la qualité et de la création architecturale.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC435 du rapporteur.
Cet amendement s'inscrit dans la logique des précédents du même type et concerne cette fois le 8° de l'article 36, en ne retenant que deux critères au lieu de trois pour accorder la dérogation.
La commission adopte l'amendement.
Les amendements AC436 et AC437 du rapporteur sont successivement retirés.
Puis la commission étudie l'amendement AC398 du rapporteur.
Le présent amendement, rédigé avec un soin tout particulier, vise à adapter le dispositif de cités historiques aux cas où la compétence en matière d'urbanisme est exercée par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Dans un tel cas de figure, il est nécessaire de prévoir que la ou les communes sièges de la cité historique puissent demander l'élaboration d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) sur leur territoire. Une délibération est alors nécessairement engagée sur ce point au sein de l'organe délibérant de l'EPCI. Il s'agit de ne pas casser la dynamique voulue par le législateur devant aboutir à la définition dans toutes les intercommunalités de plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUI).
J'émets un avis favorable. Je comprends tout à fait la volonté du rapporteur et de nombre d'entre vous de faire en sorte que la protection et la mise en valeur de l'architecture et du patrimoine au sein d'une cité historique soient bien prises en compte par l'intercommunalité lorsqu'elle exerce la compétence en matière d'urbanisme. Cette demande est légitime sur le plan patrimonial et ne remet pas du tout en cause les compétences de l'intercommunalité en matière de documents d'urbanisme.
J'ai tout de même des doutes sur le mécanisme proposé, sur la réelle protection qu'il apportera aux cités historiques. Il est précisé qu'une délibération est engagée au sein de l'organe délibérant de l'EPCI – à la majorité qualifiée ? Certains peuvent s'opposer, pour je ne sais quelle raison, à un PSMV. La compatibilité entre le PLUI d'une part et la nécessaire spécificité du plan d'urbanisme devant protéger le patrimoine de la cité historique de l'autre ne me paraît pas évidente.
Je suis également très préoccupé. Imaginez qu'une commune, au sein d'une intercommunalité, ne parvienne pas à convaincre les autres municipalités qu'il faut protéger tel monument historique. Le dialogue préalable que vous proposez au sein de l'EPCI ne répond absolument pas à notre inquiétude. Nous ne nous trouvons pas du tout ici dans la logique que vous suggériez tout à l'heure consistant à donner la main à la commune. Vous cherchez une solution, certes, mais celle-ci n'est pas adéquate.
C'est en tout cas la proposition qui vous est faite et qui va dans votre sens, même si vous estimez qu'elle ne va pas assez loin. Si vous ne votez pas cet amendement, vous serez encore plus loin de l'objectif que vous poursuivez. On dit souvent que « nous avons les élus que nous méritons » ; aussi est-ce la qualité des élus qui fera celle du projet.
Je préside une intercommunalité. Imaginons qu'une des communes veuille protéger un monument historique et que je sois un ennemi farouche du patrimoine, que j'organise donc le débat prévu et que j'arrive à convaincre tous les autres maires de l'absurdité du projet en question...
Le dispositif proposé permet tout de même d'ouvrir un débat au sein de l'EPCI. On ne peut ensuite préjuger de l'hostilité des communes ou des intercommunalités à la protection du patrimoine. Il est important, pour les communes concernées, de pouvoir saisir leur intercommunalité afin qu'ait lieu ce débat.
Certes, mais l'objectif n'est pas seulement d'ouvrir le débat, il est aussi d'obtenir la protection du patrimoine. Nous préconisons donc de privilégier l'échelon communal. Le cas de figure évoqué à l'instant par M. de Mazières peut en effet tout à fait arriver. Nous ne pouvons pas, pour reprendre l'expression célèbre d'Oreste dans l'acte I, scène 1 d'Andromaque de Racine, nous « [livrer] en aveugle au destin qui [nous] entraîne ».
Ce qui est proposé à la commission est de voter ou non cet amendement. Si vous avez d'autres propositions, vous aurez la faculté de déposer des amendements en séance.
Je ne voudrais pas qu'on réduise la portée de cette disposition. Nous essayons de combiner, en effet, la non-remise en cause des compétences des EPCI en matière d'urbanisme et la possibilité pour une commune membre d'un EPCI de bénéficier d'un plan de sauvegarde si elle le souhaite. Le débat prévu au sein de l'organe délibérant de l'EPCI doit confirmer l'opportunité de ce PSMV. Dans la pratique, je souhaite vous en convaincre, je vois mal l'organe délibérant d'un EPCI refuser un PSMV à l'une de ses communes : imaginez les articles que la décision de ne pas protéger le patrimoine de cette petite municipalité susciterait dans la presse locale.
Certains souhaitaient un dispositif plus ambitieux – et moi aussi, peut-être, d'ailleurs – ; reste que je vous propose de vous satisfaire de celui-ci, ce qui ne revient pas à se satisfaire de peu.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements de coordination AC439 et AC440 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 36 modifié.
Article 37 : Cession par l'État de mobiliers de scénographie
La commission adopte l'article 37 sans modification.
Après l'article 37
La Commission examine l'amendement AC344 du Gouvernement.
Cet amendement vise, d'une part, à placer l'Institut français, qui a été créé par la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État et qui a pour mission principale de concourir à la politique extérieure de la France, sous la tutelle conjointe du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture et, d'autre part, à confier la présidence conjointe du Conseil d'orientation stratégique, qui a été créé par la même loi et qui concourt à l'élaboration des stratégies de rayonnement de la culture et de la langue françaises à l'étranger, aux ministres des affaires étrangères et de la culture.
La Commission adopte l'amendement.
Chapitre II Dispositions transitoires
Article 38 : Dispositions transitoires
La Commission adopte l'article 38 sans modification.
Article 39 : Disposition transitoire relative aux fonds régionaux d'art contemporain
La Commission adopte l'amendement rédactionnel AC504 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 39 modifié.
Article 40 : Entrée en vigueur différée de certaines dispositions relatives au patrimoine et dispositions transitoires
La Commission adopte l'amendement de précision AC441 du rapporteur.
Puis elle est saisie de l'amendement AC442 du rapporteur.
Il s'agit de préciser de façon explicite que le « plan de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé » devient le « plan de sauvegarde et de mise en valeur de la cité historique », dès lors que celle-ci se substitue au secteur sauvegardé.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 40 modifié.
Article 41 : Dispositions transitoires relatives aux instances consultatives du patrimoine
La Commission adopte l'amendement AC443 du rapporteur visant à corriger une erreur matérielle.
Puis elle adopte l'article 41 modifié.
Article 42 : Dispositions transitoires relatives aux plans de sauvegarde et de mise en valeur et aux projets d'aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine
La Commission adopte successivement les amendements AC444 et AC445 de précision du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 42 modifié.
Chapitre III Dispositions relatives à l'Outre-Mer
Article 43 : Application des dispositions des articles 1er à 7, 11 à 13, 20, 32 et 34 du projet de loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises
La Commission adopte l'article 43 sans modification.
Article 44 : Adaptation des dispositions des articles 18 et 39 du projet de loi à Mayotte, en Guyane, en Martinique, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon
La Commission adopte l'article 44 sans modification.
Article 45 : Adaptation de certaines dispositions du projet de loi à Mayotte
La Commission adopte successivement l'amendement de précision AC446 du rapporteur, puis son amendement AC447 visant à corriger une erreur matérielle.
Elle adopte l'article 45 modifié.
Article 46 : Adaptation de certaines dispositions du projet de loi à Saint-Martin et Saint-Barthélemy
La Commission adopte l'article 46 sans modification.
Puis elle adopte l'ensemble du projet de loi modifié.
Je tiens à remercier l'ensemble des membres de votre Commission pour cette discussion très intéressante et extrêmement constructive. Je salue en particulier l'excellent travail de son excellent rapporteur et président. Je me réjouis que nous nous retrouvions bientôt dans l'hémicycle pour poursuivre ce débat qui m'a passionnée.
Je vous remercie chaleureusement pour votre présence, madame la ministre, qui nous a permis de travailler très efficacement. Je salue également les députés de la majorité et de l'opposition, qui se sont beaucoup investis dans ces questions ces dernières années et qui ont fait la preuve de leur compétence et, parfois, de leur force de conviction – je pense aux membres de l'opposition qui ont eu le plaisir de voir plusieurs de leurs amendements adoptés. Je conclurai en félicitant notre excellent président, Michel Ménard, qui, durant ces deux jours, a présidé notre belle commission avec un talent incontestable.
Je veux à mon tour remercier l'ensemble des participants au débat pour la courtoisie de leurs échanges. Chacun a su faire un effort pour ne pas être trop bavard, même si nous avons consacré dix-huit heures à l'examen de ce projet de loi.
La séance est levée à dix-neuf heures dix.