La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
L’ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2017 (nos 4271, 4314).
Je vous informe qu’à la demande du Gouvernement, l’Assemblée examinera par priorité l’article 14, relatif à la dotation globale de fonctionnement et aux compensations d’exonérations d’impôts directs locaux, immédiatement après l’article 1er.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.
Monsieur le président, monsieur le ministre – cher Michel Sapin –, madame la rapporteure générale, mesdames et messieurs les députés, l’examen des textes financiers touche à son terme. Au cours des deux derniers mois, nous avons eu l’occasion de débattre du contenu de chacun de ces textes, à tout le moins au sein de cette assemblée – car cela n’a pas été le cas au Sénat –, et la discussion a été tout à fait constructive.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale – PLFSS – a été définitivement adopté et vous vous apprêtez aujourd’hui à examiner en nouvelle lecture le projet de loi de finances pour 2017. À cette occasion, permettez-moi de rappeler quelles sont les lignes de force de l’action gouvernementale, dont la grande cohérence mérite d’être soulignée en ces temps où la versatilité de certains…
…contribue à décrédibiliser la parole politique, au grand dam de nos concitoyens.
Tout d’abord, je voudrais dissiper une dernière fois les accusations d’insincérité que certains n’ont cessé de proférer à l’égard du projet de loi de finances pour 2017 – accusations faciles et sans fondement, formulées à l’emporte-pièce pour ne pas avoir à reconnaître que, oui, quand un gouvernement en a la volonté, il peut redresser les comptes publics,…
…tout en préservant notre modèle social. Nous prévoyons que le déficit public sera l’an prochain inférieur à 3 % : ce sera la première fois depuis 2007 et cet objectif a été confirmé par la Commission européenne.
Mesdames et messieurs les députés, le texte que vous examinez aujourd’hui est l’exacte traduction de cette volonté politique qui, depuis 2012, nous anime de concert, membres du Gouvernement et élus de la majorité.
Je l’ai souligné : au sein de cette assemblée, le débat a été constructif. Des modifications ont été apportées au projet initial. Je crois important de rappeler que chaque mesure nouvelle a été gagée et que nos objectifs de solde budgétaire ont été maintenus. C’est une preuve de plus de notre sérieux budgétaire : on mesure d’autant mieux l’inconsistance des reproches d’insincérité qui nous sont adressés.
On ne peut donc que déplorer que le Sénat ait refusé d’examiner ce texte – sans doute la cohérence de notre politique budgétaire jetait-elle le trouble parmi celles et ceux qui privilégient les effets d’annonce par rapport aux résultats.
Car les résultats sont là et nous pouvons mesurer le chemin parcouru depuis 2012. Faut-il rappeler la situation alarmante dans laquelle se trouvaient nos comptes publics au début de ce quinquennat ? Voici quelques chiffres éloquents, que je ne me lasse pas de rappeler : ils nous éclairent sur tout ce qui sépare une politique de gauche d’une politique droite, quoi qu’en disent certains.
En 2017, notre déficit public repassera, pour la première fois depuis dix ans, sous la barre des 3 %, alors qu’il s’élevait à 6,8 % du PIB en 2010.
En 2017, le déficit de la Sécurité sociale, avec ses quatre branches, sera proche de zéro et les comptes du régime général seront proches de l’équilibre, alors qu’ils présentaient un déficit record – êtes-vous bien assis ? – de près de 24 milliards d’euros en 2010.
Ce projet de loi de finances poursuit et achève les grandes évolutions budgétaires et fiscales entamées en 2012. C’est la poursuite de l’allégement de la fiscalité sur la production et l’emploi, avec une hausse d’un point du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – et une trajectoire progressive de baisse de l’impôt sur les sociétés. Ce sont de nouvelles réductions d’impôts pour les classes moyennes, avec une nouvelle baisse d’un milliard d’euros de l’impôt sur le revenu, qui a été complétée par un allégement de CSG en faveur des retraités modestes. Cette mesure d’allégement d’impôts sera visible et perçue dès janvier prochain pour celles et ceux qui sont mensualisés. C’est, bien sûr, la réforme importante du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Ce sont des moyens supplémentaires en faveur de l’éducation, de la recherche et de la sécurité. C’est aussi la poursuite d’une politique responsable, jusqu’à la fin du quinquennat, afin d’assurer une baisse continue du déficit public, avec des mesures de trésorerie sur les grandes entreprises pour garantir le retour du déficit sous le seuil de 3 % en 2017.
Nous souhaitons que le débat en nouvelle lecture se poursuive sur ces bases. C’est pourquoi le Gouvernement veillera à ce que soit strictement maintenu l’objectif de solde qu’il a assigné à ce PLF, tout en respectant les engagements pris lors de l’examen du PLFSS sur les relations financières entre l’État et la Sécurité sociale.
Le Gouvernement veillera également à ce que soit garantie la sécurité juridique de ce texte, notamment d’un point de vue constitutionnel, et il s’assurera parallèlement que chaque disposition contenue dans ce PLF puisse véritablement être mise en oeuvre.
Nous assumons la politique menée sous ce quinquennat et nous en sommes fiers. En effet, alors que certains voudraient saper les fondements de notre modèle social, nous avons travaillé à en renforcer les étais. Nous pouvons être fiers, parce que nous avons mené une politique juste, qui a rendu l’impôt plus progressif et accru les effets redistributifs de notre système. Je crois aussi que nous pouvons être fiers parce que nous avons su garantir à nos jeunes une éducation de qualité, parce que nous avons réaffirmé que tous nos concitoyens avaient leur place sur le marché de l’emploi et parce que nous avons pérennisé la protection sociale à laquelle tous les Français sont attachés et à laquelle ils ont droit.
C’est bien cela, une politique de gauche : une politique qui redonne foi en l’avenir, tandis que d’autres préfèrent pousser des cris d’orfraie pour mieux confisquer l’intérêt général au profit de quelques-uns – on dirait parfois qu’ils ne pensent qu’à ça ! Mais soyez rassurés : à gauche, nous ne laisserons personne dilapider les efforts des Français…
…et nous continuerons à nous battre pour que vive la République sociale.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à Mme la rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous abordons ce soir la dernière phase du budget pour 2017, c’est-à-dire la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2017. Du fait de l’échec de la CMP, le texte que nous examinons ce soir n’est pas celui du Sénat, mais le nôtre, celui que nous avons adopté ici même en première lecture.
Dans sa version initiale, le projet de loi de finances comportait soixante-cinq articles. Notre Assemblée a adopté en première lecture trois cent quarante-cinq amendements, qui ont eu pour effet d’ajouter quatre-vingt-seize articles et d’en supprimer un – l’article 52 relatif à la dématérialisation de la propagande électorale. Le texte adopté en première lecture par l’Assemblée nationale et que nous examinons ce soir comprend par conséquent cent soixante articles.
S’il fallait trouver un qualificatif pour ce budget, je le décrirais comme un budget de continuité autour des trois objectifs que nous nous sommes fixés : la réduction du déficit public, qu’a rappelée le ministre, un financement renforcé de nos priorités et un pouvoir d’achat qui passe par une fiscalité de l’impôt sur le revenu mieux dosée.
Sous ce quinquennat, le déficit public aura été réduit de 40 milliards d’euros, quand il avait progressé de 60 milliards d’euros sous le quinquennat précédent. Cela résulte pour l’essentiel d’une maîtrise inédite – et je pèse mes mots – de la dépense publique. Alors que cette dernière a augmenté chaque année de plus de 35 milliards d’euros entre 2002 et 2012, la progression aura été réduite de plus de moitié depuis 2012. Surtout, l’évolution des dépenses publiques est désormais en ligne avec la progression de notre richesse nationale, alors que, sous le quinquennat précédent, elle augmentait plus vite que celle-ci.
Y parvenir n’est pas le fruit du hasard : cela nécessite une volonté de chaque instant, partagée au sein de notre majorité, pour faire en sorte que la France n’ait plus au-dessus de la tête une épée de Damoclès qui condamnerait son avenir. Enrayer la progression de la dépense publique n’est jamais chose facile, mais c’est un acte responsable, qui a été accompli sous ce quinquennat comme il ne l’avait jamais été sous la Ve République, n’en déplaise aux commentateurs chagrins.
Grâce à l’action engagée, le déficit public devrait, en 2017, repasser sous la barre des 3 % de PIB – sauf, bien sûr, si une nouvelle majorité défaisait ce que nous avons fait. Si elle s’en abstient, la France sortira de la procédure de déficit excessif dont elle fait l’objet depuis 2009 et clôturera ainsi définitivement le quinquennat précédent, qui a endommagé de manière durable les marges de manoeuvre de notre pays, même en tenant compte de la crise économique et financière.
J’ajoute que ce résultat a été accompli sans facilité, c’est-à-dire sans actionner les marges de manoeuvre pourtant permises par le Pacte de stabilité et de croissance du Traité de Maastricht. Ce dernier comporte en effet une clause de flexibilité, qui prévoit que le déficit peut être considéré comme « exceptionnel » s’il résulte d’une « circonstance inhabituelle indépendante de la volonté de l’État membre concerné et ayant des effets sensibles sur la situation financière de ses administrations publiques. » Plusieurs pays ont adressé à la Commission européenne une demande d’application de cette clause de flexibilité. À notre connaissance, la France ne l’a pas fait, alors que cela lui aurait sans doute permis un allégement ou pour le moins une facilité de 1 à 1,5 milliard d’euros pour son déficit public.
J’en viens aux recettes. Le volet fiscal de ce projet de loi finances se situe dans la continuité des précédents. Il soutient les entreprises, ainsi que les ménages aux revenus modestes et moyens. Il comporte une nouvelle réduction d’impôt sur le revenu de 20 % pour les foyers à revenus modestes et moyens, pour un montant d’un milliard d’euros. Quand on fait le bilan de ce que nous avons voté depuis 2012, on constate qu’un célibataire disposant de 23 000 euros de revenus annuels ou moins, paiera en 2017 moins d’impôt sur le revenu qu’en 2012. Il en ira de même pour un foyer fiscal composé de deux adultes et deux enfants disposant de 53 000 euros de revenus annuels, ou moins. Ces chiffres éclaireront, notamment de ce côté-ci de l’hémicycle, la réalité des baisses d’impôts sur le revenu engagées, qui concernent aussi, au vu de ces chiffres, les classes moyennes.
Le pouvoir d’achat passe aussi par l’universalisation du crédit d’impôt en faveur des services à la personne : 1,3 million de foyers, dont une grande majorité de retraités, vont ainsi pouvoir en bénéficier, avec un gain annuel moyen estimé à 840 euros.
Notre assemblée a également décidé en première lecture d’exonérer d’impôt sur le revenu certaines indemnités et primes versées aux militaires – auxquels je veux ici rendre hommage – dans le cadre de l’opération Sentinelle. En nouvelle lecture, la commission des finances a souhaité élargir cette exonération aux opérations Cuirasse, Égide et SECPRO.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, lors de la réunion qu’a tenue hier la commission des finances, nous avons souhaité réaliser deux ou trois nouvelles avancées.
Nous avons d’abord fait une nouvelle proposition pour la fiscalité des actions gratuites, en maintenant l’avantage fiscal pour la seule prise de risque. L’amendement que nous avons adopté conserve un régime avantageux pour les versements inférieurs à 300 000 euros – nous y reviendrons et formulerons peut-être encore une autre proposition dans cet hémicycle.
La deuxième avancée concerne le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Notre commission a adopté deux amendements tendant, d’une part, à permettre la déductibilité des travaux à 100 % au titre des revenus fonciers, d’autre part, à exclure des revenus exceptionnels les indemnités compensatrices de préavis et de congés payés.
Du côté des entreprises, le projet de loi de finances met en oeuvre la dernière étape du pacte de responsabilité et de solidarité, avec l’augmentation d’un point du CICE et la baisse progressive de l’impôt sur les sociétés d’ici 2020. Surtout, notre assemblée a souhaité accentuer cette baisse pour les PME, qui bénéficieront toutes du taux réduit de 15 % à l’horizon 2019.
Toujours en lien avec les entreprises, notre commission a souhaité que les chambres de commerce et d’industrie ne soient plus prélevées, comme cela était envisagé, et a supprimé la baisse de 60 millions d’euros du plafond des taxes affectées aux chambres consulaires. Monsieur le ministre, je pense, je crois, j’espère que, sur l’ensemble de ces sujets, nous pourrons trouver un consensus.
Pour finir, je souhaite dire un mot des collectivités locales. Notre majorité souhaite que les collectivités comptant sur leur territoire les personnes aux revenus les moins élevés n’aient pas à subir une forme de double peine, à savoir percevoir moins de rentrées fiscales du fait des exonérations et devoir financer de manière indirecte ces exonérations via les fameuses variables compensatrices. Il apparaît important que les exonérations décidées par l’État soient compensées par l’État et non par les collectivités locales elles-mêmes. L’enjeu est de taille, cette année plus que jamais. Je souhaite que, sur cette question également, nous puissions trouver un point d’atterrissage, voire un consensus que j’appelle de mes voeux.
Au-delà de ces questions restant en débat, je vous invite à adopter, à l’issue de cette nouvelle lecture, le texte qui résultera de nos travaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, chers collègues, nous nous apprêtons à examiner en nouvelle lecture l’ensemble du projet de loi de finances pour 2017.
Comme je l’ai indiqué lors de la première lecture, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste constate toujours, et avec satisfaction, la fidélité du Gouvernement à ses engagements envers les ménages, les entreprises et les collectivités, ainsi que l’a détaillé à l’instant notre rapporteure générale.
Sur le plan macroéconomique, les hypothèses sont fidèles à celles du consensus des économistes. Un trop grand optimisme dans les prévisions aurait, selon certains, présidé à l’élaboration de ce projet de budget. Nous continuons, quant à nous, de penser que l’optimisme est une saine hygiène de l’action, nommée volontarisme, et qu’il n’est pas contradictoire avec le réalisme.
La première partie de ce budget est également fidèle à notre programme de stabilité ainsi qu’à nos engagements en matière de maîtrise des dépenses publiques, tout en maintenant les efforts pour les priorités que sont l’éducation, la sécurité et la justice. Elle est fidèle aussi aux engagements en faveur d’une baisse des impôts pour les classes moyennes, engagée depuis juillet 2014. Elle est fidèle enfin aux engagements d’alléger les efforts importants consentis par les collectivités territoriales depuis deux ans.
La première partie du projet de loi de finances est tournée vers la reprise, avec l’aménagement des taux de l’impôt sur les sociétés, tout en affirmant nos préoccupations écologiques avec, par exemple, la prorogation du crédit d’impôt pour la transition énergétique et l’ouverture du cumul avec l’éco-prêt à taux zéro.
À l’issue du travail en séance publique et avec l’approbation du Gouvernement, le texte s’était notablement amélioré en première lecture. L’une des avancées majeures concernait la taxe sur les transactions financières. J’observe que nos collègues de l’opposition, avec certains de nos collègues de la majorité, ont décidé de tout supprimer en commission : l’augmentation du taux comme l’élargissement de l’assiette étaient de bonnes mesures et j’espère que nous reviendrons sur ce sujet à plus de réalisme.
Nous avons voté en commission des amendements substantiels, dont certains émanant de notre groupe, concernant par exemple le plafond de la taxe affectée aux chambres de commerce et d’industrie. Nous plaidons en effet pour le statu quo l’année prochaine étant donné les efforts déjà consentis par nos chambres, et particulièrement les plus fragiles d’entre elles, menacées par ce nouveau prélèvement.
Nous avons aussi adopté, concernant l’instauration du prélèvement à la source, un amendement portant sur les dépenses de réparation, d’entretien et d’amélioration pour le secteur du bâtiment, afin de ne pas modifier les dispositions touchant les bailleurs privés l’année prochaine. Nous soutiendrons également la sanctuarisation du plafond à 190 millions d’euros l’année prochaine pour l’ACPR, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
Je souhaite revenir plus particulièrement sur un point qui me tient à coeur, pour lequel j’ai oeuvré ces dernières années sans toujours obtenir les réponses précises que je souhaitais. Cet amendement concernant la fraction bourg-centre de la DSR – dotation de solidarité rurale – propose que, pour sa première fraction, la population prise en compte pour la répartition soit celle de la population DGF plafonnée lorsque la commune compte une population totale permanente ne lui permettant pas de se constituer en bourg-centre permanent.
La référence à la population DGF sans prise en compte de la population totale est en effet une véritable aberration. En zone touristique, des communes à faible population – quelquefois avec moins de 100 habitants –, sans équipement permanent, voire sans le moindre commerce ouvert à l’année, ont une population DGF supérieure à celle des communes bourgs-centres, ce qui leur apporte une manne substantielle au détriment des bourgs-centres véritables. Ce système est de plus un frein tant à l’intercommunalisation des services qu’à la fusion des communes. Je vous propose donc d’introduire un plafonnement progressif de la population DGF dans ce cadre.
Ce dispositif est de plus conforme aux recommandations de la Cour des comptes qui, dans son rapport d’octobre 2016 sur les concours financiers de l’État, demande de réinterroger la notion de population DGF devant l’accentuation que provoque le système actuel du phénomène de redoublement des inégalités importantes de richesse fiscale. Cet amendement a d’ailleurs reçu l’approbation de l’Association nationale des élus des territoires touristiques, que préside notre collègue Les Républicains Marc Francina.
Puisque nous en arrivons pratiquement au terme de l’ensemble de la discussion budgétaire, je souhaite remercier les ministres ainsi que leurs équipes, qui m’ont supporté,…
Et ce n’est pas fini !
…et ont supporté certains de mes amendements, avec courage et détermination.
Je remercie la rapporteure générale de notre budget pour la qualité de son travail,…
…mais également pour la constance de ses engagements et même pour son soutien à certains dispositifs, parfois contre l’avis du Gouvernement.
Je remercie également tous les collègues de la commission des finances pour le travail approfondi réalisé pendant toutes ces années. Je ferai également un clin d’oeil à la collaboratrice du groupe RRDP, Agnès Caradot, qui, malgré une grossesse puis un congé maternité, continue à suivre l’ensemble de nos travaux depuis l’ordinateur placé sur le couffin.
Il ne faut pas le dire : ce n’est pas légal !
Sourires.
Je vous propose, comme cadeau de Noël, de vous faire grâce des cinq minutes qui me restent pour accélérer la discussion.
Merci pour votre concision, monsieur Giraud.
La parole est à M. Michel Piron.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, chers collègues, ce projet de loi de finances, le dernier du quinquennat, donne l’occasion de faire le bilan de la politique menée depuis cinq ans en matière de finances publiques et de répondre à quatre questions.
Le poids des prélèvements obligatoires a-t-il été réduit ?
Les dépenses publiques ont-elles été tenues ?
Les objectifs de réduction des déficits publics ont-ils été atteints ?
Première réponse : les prélèvements obligatoires n’ont pas baissé et ont, au contraire, augmenté de manière continue sur la durée du quinquennat, de près de 104 milliards, passant de 913 milliards en 2012 à 1 018 milliards en 2017. D’après les informations fournies par Mme la rapporteure générale, les prélèvements obligatoires sur les ménages ont connu une hausse continue et très forte, de 1,5 point, passant de 24,2 % du PIB en 2012 à 25,7 % en 2017, alors que le taux de prélèvements obligatoires sur les entreprises, après avoir quelque peu augmenté de 2012 à 2013, en passant de 19,6 à 20 %, se réduit – lentement, il est vrai –, pour atteindre 18,8 % du PIB en 2017, soit une baisse de 0,8 point en cinq ans.
Deuxième réponse : les dépenses publiques ont augmenté fortement. Elles sont passées, en tenant compte des crédits d’impôt, de 1 186 milliards en 2012 à 1 280 milliards en 2017, soit une augmentation de 94 milliards. En outre, les objectifs que vous affichez tiennent compte de certaines économies que vous ne précisez pas ou qui sont, à nos yeux, totalement irréalistes.
Rappelons que, pour l’année 2015, la Cour des comptes a jugé que l’effort d’économies réalisé s’est élevé à 12 milliards d’euros. Si cet effort est réel, il reste sensiblement inférieur à celui affiché dans le programme de stabilité, à hauteur de 18,1 milliards.
Pour 2016, la Cour des comptes souligne que les risques pesant sur la réalisation de la trajectoire de dépenses et de solde sont très importants, alors même que cette trajectoire ne suffirait pas à restaurer la situation des finances publiques à l’horizon de 2020. Il nous paraît donc inimaginable, alors que le Gouvernement n’a jamais tenu ses objectifs d’économies depuis 2015, qu’il puisse soudainement et comme miraculeusement y parvenir en 2017.
Troisième réponse : les objectifs de réduction des déficits publics n’ont pas été tenus. L’engagement no 9 du candidat François Hollande promettait : « Le déficit sera ramené à 3 % en 2013 et l’équilibre sera atteint en 2017 ». L’objectif de 3 %, loin d’avoir été atteint en 2013, ne le sera toujours pas en 2017. Le Haut conseil des finances publiques estime improbables les prévisions pour 2017 et considère même incertain le retour en 2017 du déficit nominal sous le seuil de 3 % du PIB.
En effet, en tenant compte des surestimations de recettes, des économies qui ne seront pas réalisées, des anticipations en 2017 de recettes 2018, et des arriérés budgétaires laissés par le Gouvernement à la prochaine majorité,…
Oh ! Ce n’est pas vrai ! Pas vous, M. Piron !
…nous arrivons à un total de l’ordre de 18 milliards, soit un écart de 0,8 % de PIB, ce qui signifie que le déficit pour 2017 se situerait entre 3,1 et 3,5 % du PIB.
Il y a un candidat qui prévoit 4,7 % : « courage, Fillon » !
Quatrième réponse : le poids de la dette publique continue à s’aggraver. Rappelons que François Hollande avait promis de ramener la dette de 88,7 % du PIB en 2012 à 80,2 % en 2017.
C’est de Courson qui a écrit ce discours !
Or, sur cette période, elle a augmenté de 6,4 points, au lieu de baisser de 8,5 points.
Charles-Amédée, sors de ce corps !
L’écart entre les promesses du candidat Hollande et la réalité s’élève donc – excusez du peu ! – à 330 milliards ! En outre, cette somme est sous-évaluée, grâce aux primes d’émission chères à Charles de Courson, mécanisme qui vous permet de faire croire que la dette n’augmente plus en reportant son poids sur les exercices futurs.
Mais non !
Le montant cumulé des primes d’émission de 2012 à 2015 a atteint 45,3 milliards, en augmentation sensible puisqu’elles étaient de près de 23 milliards l’année dernière. En 2016 et 2017, elles continueront de dépasser les 20 milliards. Sur la durée de la législature, les primes d’émission atteindront donc un montant cumulé d’environ 95 milliards d’euros. Cela représente un peu plus de quatre points de PIB. Autrement dit, la dette publique atteint 100 % et non pas 96 %, comme indiqué !
Je tiens également à rappeler que le groupe UDI s’est opposé au prélèvement à la source en raison des perspectives qu’il laissait craindre. L’engagement no 14 du candidat Hollande promettait en effet que la contribution de chacun serait « rendue plus équitable par une grande réforme permettant la fusion à terme de l’impôt sur le revenu et de la CSG dans le cadre d’un prélèvement simplifié sur le revenu ».
Cet engagement a été renouvelé par le Président de la République lors de sa conférence de presse du 7 septembre 2015, au cours de laquelle il a déclaré : « Le prélèvement à la source permettra d’avoir des évolutions de notre système fiscal par une intégration entre ce que l’on appelle la CSG et l’impôt sur le revenu, puisque ce sera la même base avec des modes de prélèvement qui peuvent être comparables ».
En outre, dans le cadre du projet de loi de finances, le Gouvernement ne s’est pas opposé à un amendement de nos collègues Jean-Marc Ayrault et Pierre-Alain Muet, qui visait à mettre en place une première étape de la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG. Cet amendement a ainsi été adopté, avant d’être censuré par le Conseil constitutionnel.
Nous craignons donc que l’article 38 visant à mettre en place le prélèvement à la source à partir du 1er janvier 2018 ne soit en réalité que la première étape d’une fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG, fusion à laquelle nous sommes opposés puisqu’elle serait à l’origine de transferts massifs qui écraseraient de manière probablement insupportable les classes moyennes sous l’impôt.
Enfin, je dirai un mot de l’article 50 septies, voté en première lecture. C’est un sujet qui me tient à coeur. Ce nouvel article supprime les mécanismes d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties accordée aux logements locatifs sociaux en cas d’opération de démolition-reconstruction réalisée dans le cadre d’une opération de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine – ANRU – lorsque la commune compte au moins 50 % de logements sociaux. Cette mesure, si elle peut paraître a priori compréhensible, est en fait paradoxale puisqu’elle cible les opérations ANRU, c’est-à-dire les cas où les besoins de réaménagement et de restructuration du parc de logement social sont les plus criants. La suppression des exonérations qui permettent de produire des logements à bas niveau de loyers fait peser une menace directe sur la reconstruction des logements sociaux concernés et sur la réussite de nombreuses opérations de renouvellement urbain. L’Union sociale pour l’habitat – USH – n’est pas la seule à le souligner.
Les défenseurs de cet article justifient cette suppression par le fait que, si à l’origine ces exonérations étaient entièrement compensées par l’État aux collectivités territoriales qui perçoivent la taxe foncière sur les propriétés bâties, ils ont vu leurs conditions de compensation par l’État se dégrader au fil du temps. Cela est vrai, mais les locataires du secteur du logement social doivent-ils se retrouver ainsi les victimes et les otages d’une relation conflictuelle entre l’État et certaines collectivités locales ? Évidemment non. C’est pourquoi nous espérons que cette mesure sera supprimée en nouvelle lecture.
Mes chers collègues, il est à présent évident, si ce ne l’était déjà, que le Gouvernement a échoué. Loin d’améliorer la situation de notre pays, François Hollande n’a fait que chercher à dissimuler l’ampleur de cet échec en multipliant les artifices budgétaires et en léguant à la prochaine majorité des arriérés dont l’ordre de grandeur est de dix milliards d’euros.
Qui, sauf obligation de solidarité gouvernementale, pourrait se satisfaire de tels chiffres et d’un tel bilan ? Heureusement libre de son jugement, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants, vous l’aurez compris, votera donc contre ce budget.
Monsieur le président, monsieur le ministre de l’économie et des finances, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous engageons la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2017 sur la base du texte que nous avons adopté en première lecture le 22 novembre dernier. Le groupe socialiste, écologiste et républicain le regrette vivement.
Non pas que ce soit plus compliqué pour nous de repartir de ce qui a été voté par notre majorité et que nous confirmerons probablement pour l’essentiel parce que c’est un bon texte avec de belles mesures – j’y reviendrai. Mais la clarté du débat démocratique aurait mérité que la majorité sénatoriale de droite assume ses choix, choix qui sont ceux du candidat de la primaire de la droite, sur l’austérité budgétaire, l’injustice sociale et fiscale et sur la dérive annoncée des finances publiques s’il advenait qu’il gagne l’élection présidentielle.
Oui, nous aurions aimé avoir un débat clair, projet contre projet, priorités politiques contre priorités politiques. Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, vos collègues sénateurs nous en ont privés sous de faux prétextes en votant une motion de rejet avant tout débat au motif que ce budget serait insincère.
Vous n’avez en effet de cesse, de façon irresponsable par rapport au présent mais surtout par rapport à vos éventuelles ou hypothétiques responsabilités futures, que de chercher des prétextes pour remettre en cause la trajectoire de redressement des comptes publics.
Hier soir, lors de son audition par la commission des finances et la commission des affaires européennes, le commissaire européen Pierre Moscovici a été très clair sur ce point et vous a mis en face de vos responsabilités. Oui, le déficit public sera en 2016 conforme à notre objectif de 3,3 %. Oui il sera en 2017 inférieur à 3 %, à 2,7 % pour nous et 2,9 % pour la Commission européenne, qui ne prend pas en compte certaines mesures à venir. Pierre Moscovici a même ajouté qu’en 2018 le déficit, hors mesures nouvelles, ne serait que de 3,1 %, très loin des 4,7 % assénés par François Fillon ou même des 3,7 % revendiqués par l’actuel président de la commission des finances.
Les prétextes avancés par la droite à l’Assemblée nationale comme au Sénat pour ne pas débattre ont donc fait long feu. Il ne reste de tout cela que le refus de la droite de débattre, il ne reste de tout cela que sa volonté de continuer à avancer masquée, il ne reste de tout cela que son souhait d’obscurcir le débat et d’éviter de traduire concrètement ce que signifierait l’application des mesures proposées par le candidat de droite à l’élection présidentielle. Il est vrai que l’expérience que vous venez de vivre sur l’assurance-maladie ne doit pas vous prédisposer à clarifier et à assumer les conséquences concrètes de vos propositions. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a du flou, et quand il y a du flou, comme disait l’autre, c’est qu’il y a un loup.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Le texte que nous avons adopté en première lecture, je l’ai déjà dit, est un bon texte et nous veillerons au cours de cette nouvelle lecture à en maintenir les grands équilibres, et d’abord, bien évidemment, en respectant l’objectif de déficit de l’État pour 2017, un déficit en réduction d’autant plus significative que l’État, je le rappelle aux amnésiques, supporte la totalité des allégements de charges liés à la mise en oeuvre du pacte de responsabilité, qui sont strictement compensés aux régimes de protection sociale.
Absolument !
De même, le budget de l’État finance la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés et l’augmentation du taux du CICE de 6 à 7 %. Il finance aussi la baisse de l’impôt sur le revenu qui bénéficiera à cinq millions de ménages qui verront en 2017, et ce dès le mois de janvier si j’ai bien compris, leur impôt baisser de 20 %.
Absolument ! Et de façon automatique !
Il transforme la réduction d’impôt pour services à la personne en crédit d’impôt, une mesure qui va notamment bénéficier à des centaines de milliers de retraités modestes.
L’une des grandes mesures de ce texte, c’est bien évidemment le prélèvement à la source. Il sera mis en oeuvre en janvier 2018. Nous avons en première lecture amélioré ce dispositif et nous allons encore le faire au cours de cette nouvelle lecture : je pense notamment à la gestion du crédit d’impôt pour les services d’aide à la personne ; je pense aussi aux contrats courts pour lesquels le taux « neutre » sera ajusté.
J’ajoute qu’avec ce texte nous finançons également nos priorités politiques dans le même temps que nous baissons les prélèvements obligatoires et réduisons le déficit public. Nous engageons en effet sept milliards d’euros de crédits supplémentaires en faveur de l’éducation, de l’emploi et pour la sécurité des Français.
Nous allons au cours de cette nouvelle lecture revenir sur quelques sujets emblématiques qui nous ont occupés en première lecture. Je parlerai de deux d’entre eux.
Il y a bien évidemment l’aide au développement pour laquelle nous souhaitons en 2017, conformément aux engagements du Président de la République, faire un effort significatif en dotant l’Agence française de développement de ressources supplémentaires qui seront financées par une augmentation du taux de la taxe sur les transactions financières – TTF – que nous avons adoptée en première lecture.
A ce sujet, le groupe socialiste, écologiste et républicain considère que la TTF doit être mise en oeuvre dans le cadre d’un accord international et c’est parce que les discussions se poursuivent, parce qu’en tout état de cause la taxation des transactions intra-day ne peut être opérationnelle en janvier 2017 et parce que ces dispositions comporteraient un risque juridique que nous souhaitons, messieurs les ministres, que son application soit reportée d’un an, c’est-à-dire à janvier 2018.
Il y a également les sujets qui conjuguent nos objectifs de justice sociale et fiscale et l’exigence d’attractivité de la France. Je pense à la mesure relative aux impatriés que nous avons votée en première lecture. Je pense aussi au dispositif de distribution d’actions gratuites pour lequel le groupe socialiste soutiendra l’amendement proposé par notre collègue Romain Colas et adopté en commission des finances, modifié le cas échéant, qui maintient le dispositif voté par notre assemblée en 2015 tout en le plafonnant et évite toute rétroactivité tout en privilégiant les petites et moyennes entreprises – PME – et les entreprises de taille intermédiaire – ETI.
Enfin nous procéderons à quelques ajustements du dispositif de dotations aux collectivités locales, de même que nous ferons en sorte que le soutien que nous avons apporté au logement social au cours de cette législature soit maintenu, en dialogue étroit avec les collectivités locales concernées.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Messieurs les ministres, madame la rapporteure générale, chers collègues, je ne reviendrai pas sur les arguments déjà évoqués au cours des débats précédents. Ils concernent, bien que cela soit contesté par vous, monsieur le secrétaire d’État, l’imprudence des estimations de recettes, les sous-budgétisations de dépenses et la surévaluation de certaines économies, dont certaines sont d’ailleurs jugées irréalistes par le Haut conseil des finances publiques. Celui-ci a confirmé son analyse lors de l’examen du collectif budgétaire pour 2016. Je m’étonne d’ailleurs, alors que nous examinons à nouveau ce texte, qu’il reste près de 547 amendements. Si ce texte était parfait, je pense qu’il y en aurait moins !
Après un quinquennat dépourvu de modération fiscale, particulièrement pour les ménages et les familles, sans oublier l’imposition des Français de l’étranger, l’incidence budgétaire des baisses d’impôt promises pour les entreprises est reportée. Toutefois, ces mêmes entreprises sont mises à contribution pour boucler l’année 2017 par de nombreux acomptes qui sont de purs artifices comptables. L’attractivité de la France, notamment de la place de Paris, est mise à mal par la nouvelle taxe sur les transactions financières journalières. J’espère, messieurs les ministres, que vous accepterez l’amendement, adopté par la commission des finances, visant à sa suppression.
Du côté des dépenses, le présent projet de loi de finances fait s’envoler la masse salariale de l’État, avec une hausse de 4 % des crédits de personnel, qui annihile tous les efforts réalisés jusqu’à présent, notamment par la précédente majorité. Les collectivités territoriales, qui voient leurs dotations se réduire toujours davantage, supporteront quant à elles 700 millions d’euros de dépenses supplémentaires dans la fonction publique 1’année prochaine.
Monsieur le ministre, vous avez affirmé que la droite ne proposait rien. Pourtant les parlementaires ont déposé un nombre non négligeable d’amendements, vous le savez.
En matière fiscale, par exemple, les parlementaires Les Républicains ont déposé au cours des derniers exercices des amendements visant à relever le plafond du quotient familial, réduire l’imposition des classes moyennes, aider nos agriculteurs ou encore nos entreprises, avec la prolongation du suramortissement « Macron ». Les sénateurs avaient également réduit, à hauteur de 1,6 milliard d’euros, la baisse de la DGF des collectivités locales. Le Gouvernement a rejeté toutes ces initiatives dont le coût s’élevait à cinq milliards d’euros.
Encore avions-nous, contrairement à ce que propose le Gouvernement dans ce projet de budget, parfaitement gagé ces baisses d’impôts par une réduction correspondante de la dépense. Les amendements visaient à augmenter la durée du temps de travail dans la fonction publique, à rétablir des jours de carence, à réduire le nombre de contrats aidés dans le secteur non marchand, de manière à ce que les économies atteignent cinq milliards d’euros.
Je m’oppose, monsieur le ministre, au prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu via les employeurs. D’ailleurs ce prélèvement sera remis en cause par la prochaine majorité.
Il est vrai que je viens d’entendre M. le secrétaire d’État annoncer que vous prendriez toutes les dispositions pour que toutes les mesures de ce projet de loi soient mises en oeuvre.
Cela n’empêchera pas les députés Les Républicains de proposer des améliorations techniques lors de l’examen du texte.
Enfin, et c’est peut-être là l’essentiel, le budget pour 2017 que vous nous présentez est un budget de campagne. Vous l’avez conçu ainsi et vous ne pouvez donc vous étonner qu’il ne reçoive pas notre approbation.
Alors que, l’année dernière, selon vos propres termes, vous n’en aviez « pas les moyens », vous proposez dans ce budget des mesures en recettes dont le coût augmentera de douze milliards d’euros à l’horizon 2021 et des hausses de dépenses d’un montant équivalent, soit une impasse budgétaire de près de vingt-cinq milliards d’euros pour la prochaine majorité ! En d’autres termes, vous proposez les baisses d’impôts et vous chargez votre successeur de trouver leur financement.
Quoi qu’il en soit, le prochain Président de la République devra soumettre au Parlement un projet de loi de finances rectificative car ce budget est intenable, d’autant plus que l’INSEE vient d’abaisser sa prévision de croissance à 1,2 %.
Cela ne m’empêchera pas de remercier, alors que nous arrivons à la fin du débat budgétaire, Mme la rapporteure générale, M. le président de la commission, nos collègues ainsi que les administrateurs de la commission pour leur travail.
Vous oubliez Christian Eckert, qui a tant fait pour vous être agréable…
Sourires.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, en cette nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2017, je voudrais commencer par un regret : celui de n’avoir pas pu décortiquer le projet de budget de la droite sénatoriale, à quelques mois de la confrontation démocratique qui s’annonce. Tout le monde aurait eu avantage à apprendre comment le soutien à la croissance se serait décliné sous la forme de la suppression de centaines de milliers de postes de fonctionnaires, d’une baisse encore plus forte du soutien aux collectivités locales, puisque M. Fillon parle de vingt-deux milliards d’euros en moins sur cinq ans, de la quasi-extinction de la participation des entreprises et des rentiers à l’effort collectif. Il eût été salutaire que cette transparence soit au rendez-vous.
D’ailleurs faut-il rappeler qu’en décembre 2011 le Sénat, rassemblant alors une majorité de gauche dans toute sa diversité, des communistes aux radicaux en passant par les écologistes et bien sûr les socialistes, avait, sous la houlette de Mme Bricq, alors rapporteure générale, voté un projet de loi de finances qui devait préfigurer la politique budgétaire et fiscale du quinquennat.
Ce texte a été largement oublié et je comprends, bien que je trouve cela triste pour notre démocratie et la vérité que nous devons à nos concitoyens, que la droite sénatoriale n’ait pas voulu être prise dans le même flagrant délit de contradiction : flagrant délit de contradiction dans la politique budgétaire annoncée à la fin de 2011 pour servir de base au quinquennat car il n’était alors nullement question, monsieur le ministre, d’un transfert massif de fiscalité des entreprises vers les ménages ou encore d’une baisse des dotations aux collectivités locales.
Quoi qu’en dise le secrétaire d’État, les Français ne semblent pas partager les satisfecit qui ont été distribués ; mais l’avenir nous le dira.
Ce projet de loi de finances pour 2017, et vous le dites avec beaucoup de sincérité monsieur le secrétaire d’État, s’inscrit dans la continuité des budgets précédents et, malheureusement, contrevient à nombre d’engagements de 2012.
Il intègre certes une nouveauté qui, je le rappelle, avait subi une petite avarie en première lecture, nouveauté qui réside dans le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Bien sûr, chacun comprend l’intérêt d’une concomitance entre revenu et prélèvement sur le revenu, mais il faut rappeler qu’avec la généralisation de la mensualisation, le prélèvement à la source n’aura pas d’effet sur le rendement qui dépasse déjà les 99 %. Les multiples dérogations risquent même de complexifier le système alors que les Français sont trompés quand on laisse croire qu’ils n’auront plus de déclaration à effectuer.
Enfin, l’introduction d’un tiers collecteur entre l’administration fiscale et le contribuable est, à notre sens, une faute, car cela revient à fournir des informations confidentielles sur le salarié, la composition de sa famille, la réalité de son patrimoine : une part de vie que l’employeur n’a pas à connaître.
Au total, s’il y a des réticences, c’est aussi parce que le prélèvement à la source cache un non-dit : la fusion de l’impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée…
…qui, si la droite arrivait au pouvoir, pourrait être le cheval de Troie d’une flat tax qui mettrait fin à la progressivité de l’impôt.
Le grand sujet sur lequel la législature aura pleinement contredit l’engagement de la gauche, diverse mais unie en 2011, c’est le basculement de milliards d’euros de prélèvements des entreprises vers les ménages. Le rapport de Valérie Rabault comme les études de l’Observatoire français des conjonctures économiques sont éclairants : la législature aura consacré la politique de l’offre, en accroissant les prélèvements sur les ménages, notamment par la TVA, l’impôt le plus injuste, de 30 milliards d’euros alors que les prélèvements sur les entreprises auront diminué de 20 milliards d’euros, sous les effets conjugués du CICE et des baisses ou des exonérations totales de cotisations sociales pour les bas salaires.
Personne ne nie qu’il y ait besoin de soutenir certains secteurs, notamment industriels, mais ne cachons pas que le CICE aura été un véritable gâchis, puisque, en matière d’emploi comme de croissance, les résultats sont faméliques. Un million d’inscrits en plus à Pôle emploi en novembre 2016 par rapport à juillet 2012… C’est la persistance dans l’erreur qui nous inquiète, puisqu’on fait passer de 6 à 7 % le taux du CICE dans le projet de loi de finances pour 2017, ce qui coûtera plus de 3 milliards d’euros, laissant accroire que le seul élément de compétitivité serait, comme cela est improprement énoncé, « le coût du travail ».
Cette croyance dans la course au moins-disant est d’une stupidité sans pareille : le rapport du Forum économique mondial sur la compétitivité identifie douze raisons qui poussent les entreprises à investir dans un pays. Parmi les plus importantes on ne trouve pas le coût du travail : ce sont les qualités des infrastructures, la présence d’une main d’oeuvre qualifiée et en bonne santé, ainsi que la stabilité sociale.
Or, pour donner cet environnement favorable à l’emploi et à l’égalité des territoires, l’accent mis sur la diminution des prélèvements des entreprises sans conditionnalité, sans sectorisation, est non seulement injuste mais inefficace.
Nous ne pouvons que regretter que ce poison utilisé par les libéraux ait gagné les rangs de la social-démocratie, partout sur le globe. En trente ans, les bénéfices nets des entreprises ont explosé, quand leur contribution à l’effort national n’a pas progressé. Une étude du cabinet McKinsey, cabinet de consultants auprès des entreprises dans le monde entier, relève qu’en dollars constants, les bénéfices nets déclarés par les plus grandes entreprises ont plus que triplé, passant de 2 000 milliards de dollars en 1980 valeur 2013, à 7 200 milliards de dollars en 2013.
Dans le même temps, nous avons assisté à une réduction de la fiscalité des entreprises dans le monde. Aussi le taux moyen d’imposition des entreprises au niveau mondial est-il passé en dix ans de 27,5 % à 23,6 %. Dans les pays du G20, le taux d’imposition moyen est passé de 40 % en 1990 à moins de 30 % aujourd’hui. Et, selon l’OCDE, les recettes que collectent les pays de l’OCDE via l’impôt sur les sociétés sont passées de 3,6 points de PIB en 2007 à 2,8 points aujourd’hui.
Je rappelle que dans notre pays, après le CICE, sans compter la baisse du taux de 33 à 28 % dont le principe est inscrit dans ce projet, l’impôt sur les sociétés ne représente plus que 1,4 point de PIB en 2017 et 1,25 point à l’horizon 2018. Autant dire que sans un élargissement de l’assiette, cet impôt est voué à la disparition.
L’ONG Oxfam note par ailleurs que le plan BEPS – pour Base erosion and profit shifting, soit base d’imposition et le transfert de bénéfices – qui a été conclu récemment a eu pour conséquence de niveler par le bas l’imposition des sociétés. D’ailleurs, les faits donnent raison à Oxfam : le Royaume-Uni, la Hongrie, la Belgique, le Luxembourg et malheureusement la France viennent d’annoncer une baisse de l’impôt sur les sociétés.
A contrario, les dividendes versés s’envolent. Pour les entreprises du CAC 40, ce sont entre 40 et 50 milliards d’euros de dividendes versés chaque année, représentant près de 80 % de profits réalisés. Quel gâchis de richesses créées !
Ces dizaines de milliards, accaparés par une caste sans scrupule, se retrouvent bien souvent dans la grande lessiveuse des paradis fiscaux. Même si des avancées pour combattre l’évasion et la fraude fiscales, trop timides à notre sens, peuvent être saluées, il reste de véritables scandales. Selon Oxfam, parmi les dix pires paradis fiscaux, cinq sont européens dont quatre sont membres de l’Union européenne : les Pays-Bas valeureux troisième derrière les Bermudes et les îles Caïmans, la Suisse au pied du podium…
L’Irlande sixième, le Luxembourg septième et Chypre dixième complètent ce joli tir groupé de l’Union européenne.
Quel beau cinéma que celui de la Commission européenne et du Conseil des ministres européens nous expliquant les efforts contre la fraude et l’évasion fiscales ! Comme l’est tout autant la volonté affichée d’une taxe sur les transactions financières, annoncée par l’Union européenne depuis plus de dix ans et toujours différée.
J’espère que notre assemblée confortera le vote de la taxe sur les transactions financières intervenu en première lecture, comme nous y invite d’ailleurs un courrier du Président de la République à l’ONG Oxfam que j’aurai l’occasion de lire dans cet hémicycle.
La réalité, c’est que le Gouvernement de la France a malheureusement abdiqué devant la doxa libérale de la Commission européenne et de ceux qui la gèrent ou l’ont gérée dans une consanguinité malsaine regroupant Goldman Sachs, la BCE et les institutions financières publiques et privées.
Pour conclure, je voudrais appeler votre attention sur deux points symptomatiques. D’abord, je vous demande, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, quelle sera l’intervention de la France pour la Grèce. L’Eurogroupe vient de proposer de revenir sur le petit allègement de dette promis à la Grèce – même pas de 1 pour 1 000, d’ailleurs – car le Premier ministre Alexis Tsipras a annoncé une hausse des petits retraites et a refusé d’augmenter la TVA. Quelle est la position de la France au sein de l’Eurogroupe, devant ce flagrant délit de mise en cause de la souveraineté d’un État ?
Ensuite, je voudrais insister sur les fractures sociale et territoriale qui ont grandi durant ce quinquennat. L’INSEE vient de publier un rapport où l’on voit que le taux de pauvreté est reparti à la hausse en 2014 et en 2015, avec plus de 14 % de nos concitoyens sous le seuil de pauvreté, se concentrant d’ailleurs dans les territoires les plus fragiles.
La France périphérique existe, monsieur le ministre, et vous le savez. Je la rencontre tous les jours.
Mais dans la région Centre…
Les décisions prises pour accroître le pouvoir des métropoles, assécher les finances des collectivités locales par la diminution de la dotation globale de fonctionnement ou la non-compensation d’exonérations de taxe d’habitation ou de taxe sur le foncier bâti vont avoir des conséquences dramatiques. Il faut trouver des solutions pour éviter la double peine, comme l’a si bien dit notre rapporteure générale, que je remercie.
Déjà, les communes et intercommunalités ont baissé leurs investissements de 25 % en deux ans, mettant en péril le maintien du patrimoine public. Pourtant, il existe de grands enjeux sur lesquels nos concitoyens nous attendent, je pense notamment à la transition écologique.
À n’avoir eu comme horizon que les fameux 3 % de déficit public, le Gouvernement s’est enferré dans une législature des occasions manquées et des renoncements, alors qu’il eût fallu chercher des recettes nouvelles, celles qui échappent à l’effort collectif.
À se mettre dans les pas des libéraux, à coups de déréglementation du travail, de précarisation, c’est le camp du conservatisme, de la haine et de la division qui sort malheureusement renforcé de ces cinq années.
Ce projet de loi de finances pour 2017 s’inscrit dans cette veine, celle qui divise le camp du progrès, avec tous les risques sociaux et démocratiques que cela comporte. Vous comprendrez donc que les députés du Front de Gauche ne puissent vous suivre dans cette voie.
Les députés du Front de gauche, peut-être, mais pas vous !
Nous examinons ce soir en deuxième lecture le projet de loi de finances pour 2017, dernier budget d’un quinquennat qui s’est malheureusement bien éloigné des engagements que nous avions pris devant les Français en 2012.
Tout au long de cette législature, vous aurez poursuivi une seule et même politique, la réduction des déficits et l’allègement de la fiscalité des entreprises : plus de 12 milliards avec en contrepartie l’augmentation de la fiscalité sur les ménages et la contrainte exercée sur les dépenses publiques.
Cette politique n’est pas celle pour laquelle les Français avaient voté en 2012, celle des 60 engagements.
Cette politique n’a pas démontré son efficacité économique : au contraire, la pression exercée sur les ménages et les collectivités a étouffé en partie la relance de l’activité.
Faut-il rappeler ici que les rapports d’évaluation sur le CICE s’enchaînent et pointent tous l’échec de ce dispositif ?
Cette politique, surtout, n’est pas la seule possible. Vous l’avez pourtant présentée ainsi, ouvrant la voie à toutes les surenchères à la droite de cet hémicycle, pour aller plus loin encore dans la réduction de la fiscalité des entreprises et dans les coupes dans les dépenses publiques.
Alors, oui, vous aurez rétabli les comptes publics : c’est un fait et ceux qui diront le contraire seront de mauvaise foi.
Mais le rôle d’un Gouvernement est-il uniquement de présenter des comptes proches de l’équilibre ?
Sourires.
N’est-il pas aussi de permettre à chacun de vivre de son travail, dans des conditions décentes et dans un environnement sain, d’accéder aux soins, à la culture, aux transports, aux services de proximité sans difficulté ?
Or, derrière les chiffres désincarnés des 11,5 milliards de baisse de dotations aux collectivités locales pendant la législature, ou d’un Objectif national des dépenses d’assurance-maladie pour 2017 à 2,1, il y a des réalités très concrètes, souvent difficiles à vivre pour nos concitoyens. Il y a une baisse de 17 % de l’investissement public local, il y a des crèches, des MJC, des hôpitaux, des postes qui ferment dans nos territoires. Il y a ce qui fait notre capacité à vivre bien ensemble, à nous sentir protégés contre les accidents de la vie.
Vous me direz peut-être, monsieur le ministre, que notre modèle social est préservé. Je vous dirai que certes, d’autres auraient pu, ou pourront demain, l’affaiblir plus encore. Mais je vous dirai aussi que nous n’avons pas été élus juste pour faire moins de dégâts que nos adversaires politiques.
C’est toute la vie associative et culturelle qui est fragilisée. Ce sont les services publics de proximité qui ferment les uns après les autres, ce qui nourrit le sentiment de déclassement et d’abandon.
Pourtant, ces échelons de proximité sont bien souvent les derniers remparts de notre vie collective, ceux qui permettent de donner corps à cette fraternité qui fait partie de notre devise.
Je le disais, vous avez présenté ces orientations budgétaires comme la seule voie raisonnable, mais je veux le redire ici ce soir : une autre politique est possible.
Nous vous la proposons à nouveau dans ce budget au travers de nos amendements. Elle se fonde d’abord sur la relance écologique.
La relance écologique, je le dis chaque fois que je le peux, permettrait de créer 330 000 emplois à l’horizon 2030 et 825 000 à l’horizon 2050.
La relance écologique, ce n’est pas une formule. C’est augmenter les budgets pour l’isolation des logements, donc celui de l’Agence nationale de l’habitat – l’ANHA. C’est relancer les projets de transports collectifs et donc augmenter le budget de l’AFIT, l’Agence de financement des infrastructures de transport qui se trouve, selon le Gouvernement lui-même, dans une impasse budgétaire, faute de 800 millions d’euros. C’est permettre a minima l’expérimentation de la taxe poids lourd régionale pour décourager le trafic routier de marchandises, et favoriser le fret et le transport fluvial.
Cette politique se fonde aussi sur des aides aux entreprises ciblées sur les TPE et les PME. Grâce à un amendement de la rapporteure générale, les PME verront leur impôt sur les sociétés abaissé à 15 %. Il faut le saluer.
Mais nous avions également proposé de moduler le crédit d’impôt compétitivité-emploi, afin qu’il soit plus important pour les TPE-PME et très réduit pour les grandes entreprises. Cela n’a pas été retenu.
Cette politique alternative, enfin, suppose de lutter contre la spéculation financière. Certes, grâce à la mobilisation des députés, nous avions en première lecture augmenté le taux et élargi l’assiette de la taxe sur les transactions financières, mais nous attendons, monsieur le ministre, que vous nous rassuriez après le vote intervenu en commission des finances qui remet en question ces avancées.
Je veux pour finir redire ici la conviction qui est la mienne : il n’y a pas qu’une seule politique possible. Il n’y a pas de fatalité au renoncement. Demain peut être meilleur qu’aujourd’hui et cela ne dépend que de nous.
J’appelle maintenant, conformément à l’article 114, alinéa 3, du règlement, le projet dans le texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.
J’appelle l’Assemblée à statuer d’abord sur les amendements dont je suis saisi.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 567 .
Il s’agit de coordonner cet article liminaire avec celui du projet de loi de finances rectificative de 2016. La révision de la croissance en 2016 a conduit à revoir à la baisse le déficit structurel et à la hausse le déficit conjoncturel.
En effet, le déficit nominal en 2016 étant inchangé, toute révision à la baisse de la croissance conduit mécaniquement à revoir à la baisse le déficit structurel. L’article liminaire du projet de loi de finances rectificative a pris en compte cette révision pour 2016. Le présent amendement en tire les conséquences pour 2017.
Sur cette question du partage du déficit entre sa composante structurelle et sa composante nominale, l’amendement que vous nous proposez conduit à diminuer la partie structurelle et à augmenter la partie conjoncturelle, ce qui rejoint les recommandations de la commission. Avis favorable.
L’amendement no 567 est adopté.
L’article liminaire, amendé, est adopté.
L’article 1erest adopté.
appelé par priorité
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 515 .
Il s’agit de diminuer de 32 millions la DGF des départements pour abonder à due concurrence les crédits du programme « Sécurité civile » afin d’assurer le financement d’un fonds destiné à appuyer les équipements structurants des services d’incendie et de secours, les SIS, ainsi que de financer la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance et la création d’une réserve nationale de sécurité civile.
En fait, ces 32 millions étaient destinés aux SIS et retourneront à des actions qui y sont afférentes mais sans transiter par les fonds départementaux.
Ces amendements visent à diminuer la DGF, donc à minorer les dotations aux départements.
L’amendement no 515 renvoie à notre discussion de la proposition de loi sur les sapeurs-pompiers volontaires. Aucune cotisation ne sera plus versée désormais pour la prestation de compensation, laquelle relèvera de l’investissement. Sa part passe par la DGF aux départements. Avis favorable, mais il faut être vigilant sur ce point.
J’ajoute que, lors de la discussion de cette PPL, la question du financement du compte personnel d’activité avait été évoquée mais aucune réponse n’avait été apportée. Comment, monsieur le secrétaire d’État, ce problème est-il pris en compte le financement du compte personnel d’activité pour l’engagement des sapeurs-pompiers dans l’amendement no 515 que vous nous proposez, ce dernier étant une conséquence de cette PPL ?
L’amendement no 414 visant à augmenter la DGF, l’avis est défavorable.
Je l’entends comme un amendement d’appel puisqu’il propose de diviser par deux la contribution au redressement des finances publiques. Imaginez-vous le déséquilibre induit sur le solde ? L’avis du Gouvernement est défavorable.
S’agissant de la question posée par Mme la rapporteure générale, le fonds destiné à mettre en oeuvre ce que vous avez évoqué a été créé dans la PPL Bacquet. À l’issue du parcours législatif de cette dernière, tout cela sera raccord avec l’amendement du Gouvernement.
Je souhaite poser une petite question concernant l’amendement no 515 qui diminue donc la DGF des départements en en fléchant une partie – 32 millions – directement vers les SIS.
Je ne sais pas exactement comment cela se passe aujourd’hui mais il me semble que la DGF, comme son nom l’indique, est globale. Même si une partie provient de la départementalisation des SDIS – ce qui est normal – je ne suis pas sûr que cette réfaction de 32 millions empêche les départements d’avoir les mêmes dépenses pour les SDIS, ce qui risque de les mettre un peu en difficulté sur ce plan.
Comment les départements réagiront-ils vis-à-vis de cette réfaction de 32 millions, sachant – si j’ai bien compris – que 25 millions sont dédiés aux équipements structurants ? Département par département, à quoi cela correspond-il ? Nous sommes tout de même aujourd’hui un petit peu dans le flou.
Je remercie M. Sansu, qui a posé une question légitime.
L’amendement du Gouvernement résulte d’une longue concertation avec l’Association des maires de France mais aussi et surtout l’Assemblée des départements de France. Le Gouvernement prenant à sa charge une partie du financement de la prestation de fidélité et de reconnaissance, les départements font parallèlement l’économie de cette dépense. L’Assemblée des départements de France, je peux le dire ici, a donné un avis tout à fait conforme s’agissant de cette somme de 32 millions.
L’amendement no 414 n’est pas adopté.
L’amendement no 515 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 643 .
Cet amendement vise à répondre à une interrogation que le Gouvernement a entendue quant au volume des variables d’ajustement.
Vous vous en souvenez, nous avons déjà allégé l’effort des départements de 200 millions en première lecture. Il n’en reste pas moins qu’un effort demeure – personne ne le conteste ici – pour les régions et le bloc communal. Il était je crois, de mémoire, de 160 millions pour les régions…
Pardon ! 176 millions.
Le Gouvernement vous propose donc de diminuer de 100 millions cette contribution.
Concernant le bloc communal, le Gouvernement vous propose une diminution de 20 millions, ce qui représente un total pour les variables d’ajustement de 120 millions. Tel est l’objet de cet amendement.
Le Gouvernement souhaite avoir l’avis de la rapporteure générale…
…et des parlementaires.
Si vous le permettez, monsieur le président, je souhaiterais reprendre deux ou trois éléments par rapport aux données dont nous disposions en première lecture du PLF, y compris dans la seconde partie.
La baisse de la DGF contribue au redressement des finances publiques et de nouvelles variables d’ajustement sont intégrées qui, de fait, sont financées par l’ensemble des collectivités locales.
L’amendement du Gouvernement réduit de 120 millions le financement par l’ensemble des collectivités locales des exonérations de ces fameuses variables d’ajustement. Lorsque l’on observe le bilan global entre DGF et inclusion de ces dernières après les amendements no 515 et 643 – si ce dernier est adopté – nous arrivons aux résultats suivants : pour les régions, on passerait de moins 171 millions à moins 71 millions, pour les départements, de moins 412 millions à moins 212 millions et pour le bloc communal – on note une augmentation entre le dépôt du PLF et notre discussion – de moins 94 millions à moins 149 millions.
Comme toujours, mes chers collègues, je vous donne l’ensemble des chiffres – je puis vous remettre le tableau – afin d’éclairer votre vote.
Je souhaite souligner que le Gouvernement a entendu un certain nombre de nos demandes depuis la première lecture, notamment la volonté de diminuer l’impact du financement de ces exonérations par les collectivités locales. Le Gouvernement en prend quant à lui 120 millions sur le budget de l’État, ce qui répond en partie à notre demande. Dès lors, nous donnons un avis favorable.
Je souhaite moi aussi souligner l’effort qui est réalisé aujourd’hui après celui qui a été fait en première lecture pour les départements – la ponction avait été quasiment réduite de moitié. Ce nouvel amendement gouvernemental réduit de plus de la moitié la ponction concernant les régions et adoucit très légèrement la ponction concernant le bloc communal.
Je souhaite surtout dire que, une fois encore, ces solutions sont insatisfaisantes faute d’avoir voulu remettre à plat le système depuis des années. Les collectivités sont imbriquées les unes dans les autres et ce système des dotations est aujourd’hui à bout de souffle. Nous devrons très prochainement le revoir.
Quoi qu’il en soit, je me rallie à l’avis de la rapporteure générale et je voterai cet amendement.
Comme la rapporteure générale et notre collègue Christine Pires Beaune, je salue les avancées que propose cet amendement du Gouvernement.
Simplement, monsieur le secrétaire d’État, il me semble que le compte n’y est pas tout à fait. Une suspension de cinq minutes serait nécessaire, monsieur le président, pour régler ce problème.
Elle est bien sûr de droit, monsieur Lefebvre, mais je vous propose d’entendre d’abord M. Sansu, qui avait demandé la parole. Si le secrétaire d’État souhaite répondre, il pourra le faire, puis nous suspendrons la séance.
La parole est à M. Nicolas Sansu.
Je souhaite que vous éclairiez ma lanterne, monsieur le secrétaire d’État. Mme Pires Beaune évoque une atténuation pour le bloc communal mais j’ai cru quant à moi comprendre que son effort avait été accentué entre les deux lectures du PLF…
C’est la première chose.
Deuxièmement, le système est devenu tellement compliqué – nous allons encore le voir avec la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe d’habitation – qu’il importerait de tout remettre à plat. Il faudrait notamment arrêter de multiplier les compensations horizontales, car on est en train de grever considérablement la dotation globale de fonctionnement avec les variables d’ajustement.
Je voudrais enfin souligner que, avec la loi NOTRe, certaines collectivités ont gagné un peu de marge. Depuis que les départements ont abandonné la compétence économique au profit des régions, celles-ci gagnent des subsides et touchent une part de la TVA, ce qui n’est pas le cas du bloc communal. J’appelle votre attention sur cette question : aujourd’hui, même s’il est très hétérogène, le bloc communal rencontre de grandes difficultés, notamment pour soutenir l’investissement public – et ce n’est pas une bonne nouvelle.
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante.
La séance est reprise.
La parole est à M. le secrétaire d’État, qui va, si j’ai bien compris, nous présenter un nouvel amendement, no 648 .
Le Gouvernement s’est concerté et a examiné les équilibres globaux. Je vous rappelle que l’amendement no 643 remettait 120 millions d’euros supplémentaires sur les variables d’ajustement : 100 millions d’euros pour les régions et 20 millions d’euros pour le bloc communal. Je me propose de retirer cet amendement et de lui substituer l’amendement no 648 , qui propose le même dispositif, mais en ajoutant 40 millions d’euros au profit du bloc communal.
C’est mieux que si c’était pire.
L’amendement no 643 est retiré.
Reprenons nos petits comptages. Le Gouvernement, avec l’amendement no 648 , réinjecte 160 millions d’euros au profit des collectivités locales, contre 120 millions d’euros avec l’amendement no 643 . Ces 160 millions d’euros bénéficient, pour 60 millions d’euros, au bloc communal, et pour 100 millions d’euros, aux régions.
Cela permet de réduire de 160 millions l’impact des compensations – puisqu’une partie des compensations continue à être financée par les collectivités locales.
Il se trouve que le conseil régional de Bretagne siégeait aujourd’hui. Je peux vous dire que tous mes collègues ont unanimement exprimé leur inquiétude à l’idée que l’on puisse organiser un tel hold-up sur les finances régionales.
Je m’exprime au nom de l’ensemble de cette assemblée, qui essaie, en dépit des difficultés multiples, de faire quelque chose dans l’intérêt de cette région – car c’est son rôle. Je rappelle que les régions étaient une priorité de la politique nationale il n’y a pas si longtemps !
Nous avons également été alertés par d’autres régions : Mme Carole Delga s’est exprimée au nom de l’Occitanie, M. Xavier Bertrand au nom des Hauts-de-France : c’est donc un cri d’alerte transpartisan qui nous est parvenu. Croyez-moi, cette inquiétude monte dans l’ensemble des régions de France. Lorsque le texte initial du Gouvernement a été déposé, un tableau nous a été communiqué, qui indiquait les pertes pour chaque région. La région Auvergne-Rhône-Alpes enregistrait par exemple une perte de 9 millions d’euros, la région Nouvelle-Aquitaine, une perte de 16 millions, et la région Bretagne une perte d’un peu plus de 6 millions d’euros.
Les conditions du débat sont un peu surprenantes, puisqu’un amendement gouvernemental du Gouvernement nous a été distribué il y a quelques secondes seulement. Ce que j’aimerais savoir, c’est la perte qu’enregistrera chacune des régions. C’est une demande qui me semble assez légitime. Nous n’allons tout de même pas voter abstraitement !
Monsieur Le Fur, je tiens seulement à faire remarquer que cela ne fait pas « quelques secondes » que nous débattons de ces amendements.
Nous venons tout juste de recevoir le dernier amendement du Gouvernement !
L’article 14, amendé, est adopté.
Monsieur le président, je souhaite faire un rappel au règlement, au titre de l’article 58 alinéa 2. L’amendement no 282 tendait seulement à ajouter un alinéa : je ne comprends pas pourquoi il est tombé à la suite de l’adoption de l’amendement du Gouvernement !
C’est parce que l’alinéa supplémentaire s’insérait entre des alinéas qui ont été modifiés par l’amendement du Gouvernement.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, mais j’aimerais faire un point pour répondre à la question que M. Marc Le Fur a posée tout à l’heure, car je crois que notre assemblée a le droit d’être éclairée.
La région Île-de-France perdrait 8,7 millions d’euros ; la Corse, 1,4 million d’euros ; la Réunion, 680 000 euros ; la Guadeloupe, 329 000 euros ; la région Auvergne Rhône-Alpes, 9,3 millions d’euros ; la Martinique, 307 000 euros ; la Guyane, 136 000 euros ; les Pays de Loire, 3,8 millions d’euros ; le Grand Est, 7,2 millions d’euros ; la région Centre, 3,3 millions d’euros ; la région Bretagne, 3,6 millions d’euros ; la Bourgogne, 3,8 millions ; la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, 6 millions d’euros ; la Nouvelle Aquitaine, 7,2 millions d’euros, les Hauts-de-France, 8,5 millions d’euros ; l’Occitanie, 7,3 millions d’euros, et la Normandie, 4,5 millions d’euros.
Avis défavorable.
Je vous remercie, madame la rapporteure générale, d’avoir éclairé ce débat. Les conséquences de votre propos sont très claires : la ponction sur les régions est peut-être réduite, mais cette ponction existe. Pour la région Bretagne, elle devait initialement s’élever à 6,1 millions d’euros, mais elle sera en réalité de 3,6 millions – je vous remercie de cette information.
Que les choses soient bien claires : pour la région Bretagne, entre 2014 et 2017, la baisse cumulée des dotations de l’État équivaut à 158 millions d’euros.
Par conséquent, à la suite de vos décisions, il faut ajouter à cette perte de 158 millions d’euros une réduction supplémentaire de 3,6 millions. Je rappelle que les régions étaient supposées être prioritaires. Je constate que les régions, qui sont les porteuses de l’investissement et de l’avenir, sont négligées par le Gouvernement, qui leur retire ces sommes tout à fait considérables. Je tenais à le dire solennellement dans cet hémicycle.
Il faut quand même se dire les choses franchement : on nous a quelque peu abusés sur le sujet de la DGF, qui devait être reformée et qui ne l’a pas été, qui devait être réduite et qui baisse de façon moins importante cette année. Mais, on nous annonce une moindre baisse de la DGF, tout en diminuant les variables d’ajustement : le résultat est le même !
Non !
Comme les variables d’ajustement diminuent et qu’il n’y a plus de compensations des dégrèvements ou des exonérations, les communes perdent.
Vous ne pouvez pas dire qu’il n’y a plus de compensation !
Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes dans le déni sur ce sujet ! Cela fait trois ans que je demande un débat dans cet hémicycle, trois ans que le Gouvernement refuse. Acceptez le débat ! Parlons des chiffres ! Nous vous présenterons les comptes des communes. J’ai demandé une commission et un rendez-vous avec vos services : à chaque fois, je me suis heurté à un refus. On peut quand même exprimer des doutes, monsieur le secrétaire d’État ! Vous pouvez toujours nous dire que nous nous trompons, mais les communes disposent des chiffres, qu’elles peuvent vous transmettre. Quand pourrons-nous en discuter ? C’est tout ce que nous demandons, et depuis trois ans, je le répète !
Monsieur Pupponi, vous ne pouvez pas dire que le Gouvernement n’a pas respecté l’engagement du Président de la République de diminuer d’un milliard le montant total de la baisse des dotations pour le bloc communal.
Vous l’avez laissé entendre !
J’ai certainement mal compris.
Concernant les exonérations, sujet régulièrement évoqué par M. Sansu, elles sont compensées intégralement, sous réserve de l’application des taux historiques de 1991. L’année dernière, elles étaient compensées intégralement, puisqu’il s’agissait de dégrèvements. Je vous invite donc à comparer vos chiffres, non pas seulement avec ceux des années 2015, 2016 et 2017, mais également avec ceux de l’année 2014 : il y a eu, en effet, un pic de recettes en 2015, car les exonérations de taxe d’habitation et de taxe foncière sur les propriétés bâties ont pris la forme d’un dégrèvement pour les contribuables les plus modestes.
Les autres sujets ont déjà largement été débattus, et ce n’est pas votre serviteur qui a refusé la réforme de la DGF.
La baisse de la DGF est une réalité. On vient de nous annoncer combien chaque région perdait.
D’accord, ne parlons pas des sujets qui fâchent ! Est-il possible de savoir ce que chaque département et chaque commune perdraient ?
Je peux vous transmettre les chiffres qui concernent Sarcelles, si vous voulez !
Nous pouvons parler de toutes les communes ! Il nous faut les chiffres, en toute transparence.
L’amendement no 342 n’est pas adopté.
J’ai relu l’amendement no 648 du Gouvernement, qui porte sur les alinéas 40, 44 et 47. L’amendement no 282 , que je proposais, visait à insérer un alinéa après l’alinéa 46. Il me semble qu’il aurait dû être mis en discussion. Je demande une suspension de séance pour en discuter avec le service de la séance.
La séance, suspendue à vingt-trois heures cinq, est reprise à vingt-trois heures sept.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 509 .
C’est un amendement de coordination, qui vise à encadrer les modalités de calcul de la réduction d’impôts en faveur des classes moyennes pour les contribuables qui transfèrent leur domicile fiscal hors de France et qui sont dans le champ de l’exit tax.
L’amendement no 509 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 510 .
Aux termes de cet amendement, les contribuables pourront profiter de la baisse d’impôt d’un milliard d’euros dès le mois de janvier s’ils sont mensualisés, et dès le premier acompte, c’est-à-dire dès le mois de février, s’ils ne le sont pas. Cette réduction de 20 % s’applique aux contribuables dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 18 500 euros pour les célibataires, 37 000 euros pour les couples. Pour les familles, ces limites sont majorées de 3 700 euros par demi-part supplémentaire.
L’amendement no 510 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 2, amendé, est adopté.
Article 2
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement no 483 .
L’amendement no 483 est adopté.
L’article 2 bis, amendé, est adopté.
Les articles 2 ter et 3 sont successivement adoptés.
Notre commission considère que les militaires assurent la même mission de défense et de sécurité, qu’ils participent à une opération extérieure, une OPEX, au sein d’un régiment ou à l’opération Sentinelle. Or, la prime de ceux-ci est fiscalisée et celle de ceux-là ne l’est pas, ce qui constitue une forme de discrimination. Notre commission avait donc adopté, en première lecture, la défiscalisation des primes perçues par les militaires participant à l’opération Sentinelle. La présidente de la commission de la défense a proposé d’étendre ce dispositif à trois autres opérations, les missions Cuirasse, Égide et SECPRO, pour un coût budgétaire limité, puisque cela représenterait entre 3 et 4 millions d’euros.
Votre serviteur n’a pas changé d’avis. J’avais émis quelques réserves sur l’exonération des primes, parce que je pense que mieux vaut payer plus et fiscaliser que de multiplier les exonérations. La disposition a quand même été adoptée en première lecture. Je me doutais bien que le dispositif serait étendu et que, de proche en proche, nous aurions à décider de son périmètre. Nous y sommes. Pour la présente loi de finances, nous en resterons là, mais nous aurons probablement à en débattre à l’avenir : les sapeurs-pompiers et les douaniers, par exemple, pourront-ils être concernés ? Compte tenu du contexte, le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.
J’avais déposé cet amendement en première lecture, considérant que nous devons cela aux soldats qui effectuent l’opération Sentinelle. De fait, ils prennent des risques pour notre défense et notre sécurité. En plus, cette opération leur cause un certain préjudice financier, car ces soldats interviennent essentiellement dans le cadre d’OPEX, et les primes perçues dans ce cadre ne sont pas imposables. Quand ils ont des missions analogues sur notre territoire national, en métropole ou dans les outre-mer, les primes perçues sont imposables. Cela leur est extrêmement préjudiciable, parce qu’ils sont généralement célibataires, perçoivent un traitement indiciaire relativement modeste et des primes relativement importantes. Lorsqu’ils perçoivent ces primes, beaucoup d’entre eux deviennent imposables. Ils vivent cette opération Sentinelle comme une mauvaise opération sur le plan fiscal.
Il me semble que cette disposition est raisonnable : nous limitons l’avantage fiscal dans le temps, puisqu’il est lié à l’opération Sentinelle, qui a une durée limitée. Pourquoi ne pas l’étendre à la marge, comme le propose Mme Adam ? Je ne suis pas contre, à condition que ce ne soit pas un moyen de l’étendre à l’excès et, surtout, de le remettre en cause. En tout état de cause, je crois que ce dispositif est à la fois responsable, limité dans le temps, et permet d’adresser un bon signal aux jeunes soldats qui assurent notre sécurité dans les lieux publics et dans les gares. C’est une façon très concrète de leur rendre hommage.
Je tiens à rappeler que j’avais déjà déposé, avec plusieurs de mes collègues, un amendement pour étendre cette mesure à trois autres missions, qui sont du même ordre que Sentinelle, puisqu’elles s’exercent elles aussi sur le territoire national de manière exceptionnelle : elles ne sont pas destinées à durer. Ces missions, qui sont évidemment liées à la lutte contre le terrorisme, permettent de renforcer la sécurité et d’accentuer la surveillance de sites particulièrement sensibles sur le territoire national.
Les conséquences pour les militaires du rang de leur participation à ces missions sont identiques à celles de leur participation à l’opération Sentinelle en termes d’éloignement – telle est la raison de cet amendement. Les CRS et les gendarmes mobiles bénéficient déjà d’une disposition semblable : lorsqu’ils sont éloignés plus de trente-six heures de leur domicile, leurs indemnités de sujétion sont exonérées au plan fiscal. Il est donc normal de prévoir la même disposition pour les hommes du rang qui sont dans la même situation, d’autant que, je tiens à le rappeler, ils sont éloignés quelque 200 jours par an de leur domicile pour participer à des opérations intérieures ou extérieures.
Il s’agit donc d’une simple mesure de justice à leur égard. Je rappelle également que cette mesure concerne des hommes du rang qui ne sont pas imposables. Ils n’ont pas encore touché leurs indemnités de sujétion pour l’année 2016 : la perception de celles-ci en 2017 aura des conséquences considérables sur leur taux d’imposition. Telle est la raison pour laquelle je demande que la mesure soit étendue à ces trois autres missions.
L’article 3 bis, amendé, est adopté.
Indépendamment des questions techniques soulevées par le juge constitutionnel, il convient de se pencher sur la cause, à savoir l’impôt sur la fortune, l’ISF. Qu’on me permette simplement de rappeler qu’il s’agit d’un impôt original en Europe et même dans le monde. Malheureusement, cette originalité, dont la France est capable, est inefficace, voire contre-productive. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de suppression.
Je n’évoquerai pas la question générale de l’ISF, mais le fait que nous devons veiller à respecter les décisions du Conseil constitutionnel. Nous en avons eu l’illustration contraire avec la loi Sapin 2 , dont le Conseil constitutionnel a été conduit à annuler deux articles importants. Je mets en garde le Gouvernement sur le fait que l’article 4 revient sur deux décisions très claires du Conseil constitutionnel.
Le Conseil constitutionnel a tour d’abord jugé fin 2012 et en 2013 que, dans le calcul du plafonnement de l’ISF, il n’y a pas lieu d’inclure au dénominateur les revenus qui ne sont pas distribués. Je ne comprends pas l’entêtement du Gouvernement sur ce point. Le Conseil s’est également penché sur la définition de l’excès d’optimisation fiscale : il a jugé que le motif doit être « exclusivement » fiscal, et non, comme le prévoit de nouveau le Gouvernement, avoir « pour objet principal » d’éluder tout ou partie de l’ISF. En ouvrant hier la séance de la commission des finances, j’ai rappelé à mes collègues que nous ne pouvons pas, dans le cadre de notre travail de législateur, nier les décisions du Conseil constitutionnel. Ce n’est pas de bonne législation. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé cet amendement de suppression, estimant que le Gouvernement, à l’article 4, revient sur des décisions du Conseil.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques de suppression ?
Même avis.
Monsieur le président de la commission, le Gouvernement ne revient pas sur une décision du Conseil constitutionnel. Vous connaissez bien ces questions et je crois les avoir, moi aussi, pratiquées quelques années.
Cet article a été écrit en collaboration avec le Conseil d’État, dont le Gouvernement a voulu avoir l’avis clair et précis – je ne vous le lirai pas car nous manquons de temps. Je maintiens que l’article 4 ne méconnaît pas la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Pour une fois, nous assumons le fait de changer d’adverbe : « principalement » remplacera « exclusivement ».
L’article 4 est adopté.
Article 4
Il ne s’agit pas d’un véritable amendement de suppression : il l’est dans sa rédaction, il ne l’est pas dans son esprit.
Cet article, qui a été adopté dans le cadre de la première partie du projet de loi de finances pour 2017, vise à réformer le régime fiscal des attributions gratuites d’actions – AGA – afin de concentrer l’avantage fiscal sur les véritables prises de risque.
Cet amendement de suppression, présenté par la commission des finances, vise à supprimer toute rétroactivité, même petite. Il convient pour cette raison de déplacer le dispositif relatif aux attributions gratuites d’actions en seconde partie du projet de loi de finances, afin que seules les AGA distribuées à compter du 1er janvier 2017 soient concernées. Un autre amendement sera déposé à cette fin après l’article 38. Il ne s’agit donc que d’une suppression formelle.
C’est un amendement identique, même si les motifs en sont différents. Nous sommes attachés à la stabilité fiscale. Un dispositif en faveur des attributions d’actions gratuites a été instauré dans le cadre de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron : il est donc tout récent puisqu’il date d’août 2015. Or le Gouvernement vise déjà à remettre en cause le régime fiscal et social des actions gratuites sans qu’un bilan ait été dressé,…
…ce qui pénalisera les entreprises les plus dynamiques qui aspirent à partager leur réussite avec leurs collaborateurs. Ce revirement est une nouvelle preuve de l’inconstance de la politique fiscale de la majorité socialiste. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons la suppression de l’article.
Le Gouvernement comprend les intentions de la commission des finances, qui souhaite déplacer le dispositif visé par l’amendement de la première à la seconde partie du projet de loi de finances pour éviter toute rétroactivité. Le Gouvernement sera attentif, voire bienveillant envers un amendement à la seconde partie du projet de loi de finances qui va en ce sens et que la commission a déposé. Il émettra même un avis favorable si nous réussissons à fixer les bons seuils. Le Gouvernement est donc favorable à l’amendement visant à supprimer, dans l’esprit de Mme la rapporteure générale, l’article 4 bis.
Article 4
Le Gouvernement considère que le taux de l’avantage fiscal dont bénéficient les contribuables qui souscrivent des SOFICA – sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel – ne doit pas être majoré. Il existe très peu de crédits d’impôts qui dépassent le plafonnement de 12 000 euros. D’autres dispositions dans un domaine similaire ont été adoptées par le Parlement en première lecture. C’est pourquoi le Gouvernement souhaite la suppression de cet article.
Je tiens à vous apprendre, mes chers collègues, qu’après avoir déposé cet amendement de suppression de la majoration de l’avantage fiscal lié aux SOFICA, j’ai reçu depuis ce matin des dizaines d’appels téléphoniques, en raison d’un lobbying aussi intense qu’inacceptable, dénonçant le fait que mon amendement viserait purement et simplement à supprimer les SOFICA. Je n’accepte pas que certains se livrent à une telle désinformation, alors même que nous sommes là pour défendre le contribuable.
Je tiens à rappeler que les 7 000 foyers fiscaux, qui sont concernés par l’avantage fiscal lié aux SOFICA, bénéficient d’une réduction d’impôt de 30 % sur leurs investissements dans des sociétés de financements, ce qui représente 5 400 euros par investissement. En effet, au lieu d’être plafonnée à 10 000 euros, comme c’est le cas pour les emplois familiaux et toutes les dépenses fiscales, cette réduction d’impôt bénéficie d’un régime spécial, puisqu’elle est plafonnée à 18 000 euros.
Il faut savoir également que ce taux de 30 % peut être porté aujourd’hui à 36 %, sous certaines conditions, ce qui conduit à une réduction d’impôt de 6 480 euros. Or certains de nos collègues ont proposé, à l’article 4 ter, de porter le taux à 48 %, pour une réduction d’impôt de 8 640 euros ! Connaissez-vous beaucoup de contribuables qui bénéficient d’une réduction d’impôt de 8 640 euros ?
Mon amendement ne vise pas à supprimer les SOFICA qui ont prouvé leur utilité depuis plusieurs décennies. J’estime simplement que le contribuable national n’a pas à prendre à sa charge 50 % de ces investissements.
Je tiens enfin à préciser que le revenu fiscal moyen des 7 000 foyers fiscaux qui ont investi dans des SOFICA est supérieur à 100 000 euros.
C’est le rôle du président de la commission des finances, de la rapporteure générale et des membres de la commission des finances de protéger les intérêts des contribuables. C’est une question de justice et d’équité fiscales.
Je n’accepte pas le lobbying dont j’ai été la victime toute la journée.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Sourires.
La commission a émis un avis défavorable sur votre amendement, monsieur le président de la commission : vous le savez, puisque vous étiez présent.
Il est en effet toujours difficile, lorsqu’on analyse des dépenses fiscales ou budgétaires, d’évaluer leur éventuel effet levier ou leur utilité économique. Je rappelle que le taux de l’avantage fiscal lié aux SOFICA était de 48 % il y a encore quatre ans, avant de tomber à 36 % : l’amendement adopté par la commission des finances en première lecture visait à le porter de nouveau à 48 %.
Vous avez évoqué la dépense fiscale : je tiens, moi, à poser la question de l’espérance de gain avec un taux de 36 %. Or les statistiques montrent qu’elle est nulle. Nous sommes tous très attentifs à la question de l’utilité de l’argent public, qu’il s’agisse de vous, monsieur le président de la commission, des membres de celle-ci ou des parlementaires ici présents.
Les rendements des SOFICA au cours des dix dernières années sont très dispersés, puisqu’ils s’échelonnent d’une perte en capital de 70 % – je parle bien d’une perte en capital, nous nous situons donc bien au-delà de l’aspect fiscal – à un gain de 15 %. Les investisseurs gagnant beaucoup d’argent sont très peu nombreux. Avec un taux de réduction d’impôt de 36 %, personne ne pourrait espérer un gain.
Par ailleurs, la dépense fiscale relative aux SOFICA s’élève à 21 millions d’euros. Il faut rapporter ce montant au total des dépenses fiscales en faveur du cinéma prévues dans le PLF pour 2017, qui est de 303 millions d’euros, comme le montre le tableau présenté à la page 44 du rapport. Ainsi, l’avantage fiscal associé aux SOFICA représente moins de 10 % de l’ensemble des dépenses fiscales dans ce secteur.
En effet, monsieur Caresche. Si nous portons le taux de la réduction d’impôt à 48 %, la dépense fiscale passera de 21 à 26 ou 27 millions d’euros : elle représentera toujours moins de 10 % de l’ensemble des dépenses fiscales associées au cinéma. C’est pourquoi je donne un avis défavorable à l’amendement du président de la commission des finances.
Je serai bref car Mme la rapporteure générale, que je remercie chaleureusement, a rappelé la réalité du dispositif des SOFICA. Mon intervention tiendra en deux points.
Monsieur le président de la commission des finances, vous avez parlé d’un lobbying infernal.
Je préside la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Le lobbying téléphonique dont je peux faire l’objet de la part d’un certain nombre de groupes d’intérêts se rapportant aux compétences de ma commission dépasse sans doute largement les assauts téléphoniques que vous avez subis. Je laisse cette question de côté, car je ne voudrais pas qu’elle interfère sur le vote de notre assemblée.
Sur le fond, Valérie Rabault a dit l’essentiel. Le dispositif des SOFICA a été créé il y a trente ans par Jack Lang. Il s’agit d’un investissement à risque.
Si le film marche, l’investissement rapporte, mais s’il ne marche pas, l’investisseur perd de l’argent.
Notre assemblée a voté l’article 4 ter en première lecture. Certes, les amendements nos 496 et 527 , que je regrette et que je trouve un peu inutiles, ne visent pas à supprimer le dispositif des SOFICA – je vous rejoins sur ce point, monsieur le président de la commission. Cependant, la suppression l’article 4 ter obérerait l’attractivité du dispositif, qui serait inévitablement et très rapidement amené à dépérir. En d’autres termes, supprimer l’article 4 ter reviendrait à signer l’arrêt de mort des SOFICA, dont je n’ai pas besoin de rappeler l’utilité, notamment pour les films d’animation et de fiction. Je vous ai décrit les différentes contreparties en première lecture ; je ne vais pas vous lasser une seconde fois !
Pour ma part, je m’interroge… Le PLF pour 2017 prévoit un prélèvement sur les ressources du Centre national du cinéma et de l’image animée, le CNC. Dans le même temps, on propose d’accroître les dépenses fiscales dans ce secteur. Il y a là quelque chose d’un peu incongru ! Il est normal que l’ensemble de la collectivité nationale soutienne le cinéma – c’est même une très belle action –, mais engager des dépenses fiscales au bénéfice de 7 000 contribuables assez aisés, fussent-ils des amoureux du cinéma, me pose un problème. Cette question renvoie à la distinction entre dépenses fiscales et interventions directes pour soutenir un secteur.
Une fois n’est pas coutume, monsieur le secrétaire d’État, je partage la position du Gouvernement. Faut-il soutenir le cinéma ? Oui. Est-ce par la dépense fiscale qu’on le fait le mieux ? Je ne le pense pas. J’ai le même avis sur tout un tas d’autres dispositifs. Il a toujours été dit ici que la création de niches fiscales n’était pas forcément la meilleure manière de soutenir un secteur. Pour ma part, je considère que ces amendements de suppression sont bienvenus, mais ils le seraient encore plus s’ils s’accompagnaient d’une diminution du prélèvement sur les ressources du CNC.
Il n’y a pas de prélèvement sur ressources ! Les taxes affectées au CNC ne sont pas plafonnées !
Je vais maintenant mettre aux voix ces deux amendements de suppression.
Monsieur le président, je vous avais demandé la parole ! Vous ne l’avez donnée qu’à des députés de gauche… Laissez-moi m’exprimer !
Mes chers collègues, ne supprimez pas l’article 4 ter ! Il a été introduit en première lecture par un amendement de Bruno Le Roux !
Ce n’est pas possible !
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement no 518 .
Favorable.
L’amendement no 518 est adopté.
L’article 4 ter, amendé, est adopté.
Article 4
L’article 4 quater est adopté.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 344 tendant à supprimer l’article 5.
Je souhaite revenir sur un sujet sur lequel je voulais m’exprimer. Vous ne m’avez pas laissé la parole, monsieur le président : je le regrette, mais je vais me rattraper.
Sourires.
Je partage totalement les propos tenus il y a quelques instants par le président de la commission des finances.
…dont nous devons entendre l’exaspération.
Monsieur le président Bloche, à force de trop tirer sur la corde, c’est le principe même des SOFICA que vous risquez de mettre en cause. C’est vous-même qui risquez de susciter cette difficulté. Une dépense fiscale totale de 303 millions d’euros pour la filière du cinéma, cela me semble beaucoup. D’autres filières ne bénéficient pas du quart de la moitié de tout cela !
Pardonnez-moi, madame la rapporteure générale, mais l’ultime argument que vous nous opposez consiste à dire que les investissements dans les SOFICA sont risqués. Mais il y a beaucoup d’investissements à risque ! Les investissements dans les start-up, par exemple…
Je pensais que cette question avait été tranchée et que le Gouvernement avait été battu sur la question des SOFICA ! De quoi parlez-vous, monsieur Le Fur ?
Je parle du cinéma, monsieur le secrétaire d’État, car on ne m’a pas laissé m’exprimer.
Monsieur Le Fur, vous êtes censé défendre l’amendement no 344 qui tend à supprimer l’aménagement du régime d’imposition des indemnités de fonction perçues par les élus locaux.
Je l’ai défendu, monsieur le président, mais en tout état de cause, de nombreux investissements à risque ne bénéficient pas de la même sollicitude de la part de notre assemblée.
L’amendement no 344 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 5 est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement no 443 tendant à supprimer l’article 6.
La baisse du taux nominal de l’impôt sur les bénéfices des sociétés constitue, surtout pour le patronat, un totem appuyé sur des comparaisons internationales trop rapides. Certes, le taux nominal français est élevé, mais le taux effectif est beaucoup plus bas. De surcroît, la base de l’impôt sur les sociétés est érodée par les pratiques d’optimisation fiscale. La simple baisse du taux nominal de cet impôt ne me semble pas correspondre à un réel enjeu en matière de compétitivité économique et de reconstitution des marges des entreprises, auquel répond par ailleurs le CICE. C’est la raison pour laquelle je propose de supprimer l’article 6.
Défavorable.
Je soutiens l’amendement de notre collègue Jean-Luc Laurent. Je l’avais déjà dit en première lecture : un impôt ne se caractérise pas seulement par un taux, mais aussi par une base.
Je suis tout à fait favorable à ce que l’on rediscute de l’impôt sur les sociétés. Il y aurait beaucoup de choses à dire ! Nous en avons déjà débattu : nous nous sommes même demandé s’il était possible de distinguer les bénéfices réinvestis et les bénéfices distribués.
L’impôt sur les sociétés rapporte trois fois moins que la TVA.
Il faut le dire et le rappeler à ceux qui prétendent que les entreprises rendent gorge ! Le problème, c’est que son assiette est trop étroite et son taux facial très élevé.
Sourires.
Or des discussions vont s’engager au niveau européen, et il faudra bien trouver progressivement des éléments de convergence. Cette convergence va se faire sur la base, car les taux resteront de la libre appréciation des États. C’est pourquoi cela me gêne que l’on commence à modifier les taux sans travailler sur la base. Comment pourrons-nous convaincre nos collègues européens de fixer des vrais taux et de déterminer une vraie base d’impôt sur les sociétés en Europe si nous avons nous-mêmes l’une des bases les plus mitées et les plus fragiles ?
Aussi, je ne suis pas d’accord avec l’article 6. J’entends bien l’argument selon lequel la baisse du taux serait un élément de communication en direction des entreprises, mais comme l’a dit notre collègue Jean-Luc Laurent, avec les 40 milliards d’euros du pacte de compétitivité, on peut dire que les frais de communication ont été considérablement engagés lors de ce quinquennat !
Je soutiens moi aussi l’amendement de notre collègue Jean-Luc Laurent. Ma position est constante.
Dans les pays de l’OCDE, l’impôt sur les sociétés représente 2,8 points de PIB. En France, il représente 1,4 point de PIB ; avec la montée du CICE à 7 %, il représentera même bientôt 1,25 point de PIB. Voilà la réalité !
Je vais contredire mon collègue Pascal Cherki : l’impôt sur les sociétés ne rapporte pas trois fois moins que la TVA, mais presque six fois moins, car son rendement s’élèvera bientôt à 25 milliards d’euros, c’est-à-dire presque rien, contre 150 milliards pour la TVA.
Nous parlons du taux de l’impôt sur les sociétés, mais la vraie question porte sur l’assiette, qui est complètement mitée. Une baisse du taux aurait pu s’entendre si nous avions fait un effort sur l’assiette.
Aujourd’hui, l’impôt sur les sociétés est non seulement quasiment inutile, injuste et inefficace, mais il est également régressif : plus l’entreprise est grosse, moins elle paie. C’est quand même un comble !
L’amendement no 443 n’est pas adopté.
L’amendement no 410 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Cet amendement concerne l’impôt sur les sociétés, qui enregistre une baisse tendancielle dans l’ensemble des pays de l’Union européenne – nos concurrents – où le taux moyen s’élève aujourd’hui à 23 %. Or, en France, le taux normal est de 33,3 % : c’est l’un des plus élevés des pays développés. Nos entreprises en souffrent. De fait, elles sont moins attractives et défavorisées par rapport à leurs concurrentes. Le Gouvernement a pris conscience de cette situation, puisqu’il a proposé d’appliquer un taux moins élevé à un certain nombre d’entreprises, notamment aux PME.
Nous regrettons que cette mesure crée un élément de complexité supplémentaire, un effet de seuil de plus. En termes d’attractivité par rapport aux pays étrangers, elle ne change pas grand-chose, puisque le taux normal reste de 33,3 %. Nous aurions souhaité instaurer, peut-être progressivement, un taux de 28 % généralisé.
Défavorable. J’invite M. Le Fur à faire des additions. Quand on considère l’ensemble des prélèvements auxquels sont soumises les entreprises françaises, en tenant compte du CICE et du pacte de responsabilité, nous sommes dans la moyenne européenne. Il faut tout comparer, pas uniquement le taux nominal d’imposition !
Même avis.
Du point de vue de l’investisseur étranger, le taux facial, le taux normal d’IS n’est pas très attirant, vous en conviendrez, monsieur le secrétaire d’État.
Quant au CICE, madame la rapporteure générale, il faudra l’expliquer aux investisseurs étrangers, ce qui ne sera pas une mince affaire d’autant qu’il faudra trouver des traducteurs. Cela sera très compliqué.
Même nos entreprises ont du mal à le comprendre. Et certaines ne comprennent pas pourquoi elles ne bénéficient pas du CICE – c’est le cas en particulier du secteur coopératif.
Puisque vous vous livrez à des comparaisons au sein de l’OCDE, je vous indique qu’aux États-Unis, le taux facial de l’impôt sur les sociétés s’élève à 38,92 %.
L’amendement no 341 n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 609 .
Le présent amendement propose une mesure de coordination, en matière de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, rendue nécessaire par l’adoption en première lecture du relèvement à 50 millions d’euros, à compter de 2019, du seuil de chiffre d’affaires conditionnant le bénéfice du taux réduit d’impôt sur les sociétés.
L’amendement no 609 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
L’article 7 relève les fractions applicables au régime du « cinquième acompte » payé par les grandes entreprises pour un rendement de l’ordre de 500 millions d’euros. Ainsi, le paiement d’une grande partie de l’impôt sur les sociétés des grandes entreprises est avancé d’un exercice.
Il s’agit d’une mesure de pure trésorerie ponctuelle en faveur de l’État. Cela donne une très mauvaise image de notre pays aux entreprises qui voudraient s’y installer. Aussi, nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement identique no 411 .
Je vais défendre cet amendement par courtoisie pour M. le secrétaire d’État et même par délicatesse à son égard car lors de ma déclaration liminaire, j’ai senti son scepticisme lorsque j’ai évoqué certains artifices budgétaires. Je voudrais donc lui en donner un exemple de manière à ce que nous soyons sûrs de bien nous comprendre.
Pour l’année 2017, le Gouvernement a décidé de plusieurs mesures visant à anticiper la perception de certaines recettes de 2018, pour un montant total de 1,3 milliard d’euros – une broutille n’est-ce pas ?…
Le Haut conseil des finances publiques souligne que ces mesures de trésorerie, qui certes permettront d’améliorer, au moins en façade, l’état des finances publiques en 2017, pèseront sur les entreprises cette année et grèveront également les recettes de l’État en 2018 par rapport à l’exercice précédent.
L’article 7 propose, dans cette veine, d’augmenter l’acompte d’impôt sur les sociétés acquitté par les plus grandes entreprises pour un rendement budgétaire de 520 millions d’euros, excusez du peu.
Voilà l’illustration de mon propos liminaire. Je n’aurais pas voulu que M. le secrétaire d’État ait pu croire que j’ai tout inventé.
Avis défavorable. Les entreprises concernées par cet article sont aussi celles qui ont bénéficié de la suppression de la contribution exceptionnelle à l’IS.
Les entreprises ont encore dix minutes pour payer le « cinquième acompte » d’impôt sur les sociétés, l’échéance étant fixée au 15 décembre.
Sourires.
Monsieur Piron, si vous comparez 2016 à 2018, vous aurez la même situation ; 2018 fera baisser les recettes d’IS en trésorerie par rapport à 2017, dites-vous. Peut-être, mais par rapport à 2016, il y aura un pic de trésorerie en 2017 et ce sera le cas également en 2018.
Pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas le prélèvement à la source. Pour les entreprises, cela n’est pas un problème car les impôts sont rattachés à l’exercice qui donne lieu au paiement de cet impôt. Tout ce qu’elles paient comme impôt sur les sociétés est rattaché au même exercice. Qu’elles le paient avant la fin de l’année ou après la fin de l’année, c’est pareil pour elles. Le « cinquième acompte » a d’ailleurs été inventé par M. Fillon, si je ne m’abuse. En tout cas, il a été créé en 2005.
Ce n’est pas une question de dose : la disposition ne concerne que les grandes entreprises et pour elles, la trésorerie ne pose pas de problème – c’est plutôt l’excès de trésorerie qui en est un. Je vais vous faire une confidence : lorsque nous avons discuté avec les banques des modalités de versement du prélèvement sur les revenus, ces dernières ont répondu que cela n’était pas un problème pour elles. Elles ne demanderaient pas mieux de payer plus tôt, car la trésorerie est négative aujourd’hui ; elle produit un taux d’intérêt négatif.
Pour les autres grandes entreprises, c’est pareil. En revanche, il n’en est pas de même des petites – nous en sommes d’accord –, pour lesquelles la trésorerie est souvent un souci. Je parle des quelques centaines de très grandes entreprises que compte notre pays. Franchement, cette disposition n’est pas un problème pour elles.
Compte tenu de la situation que nous avons trouvée en 2012…
…et de nos difficultés actuelles, nous prenons, c’est vrai, toutes les mesures susceptibles de nous faire atteindre nos objectifs. Nous n’allons pas prétendre le contraire ! Mais nous aurions tort en ne le faisant pas.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
L’article 7 est adopté.
Les articles 7 bis, 7 ter et 7 quater sont successivement adoptés.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 570 rectifié et 451 deuxième rectification.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement no 570 rectifié .
Je laisse à M. Pupponi le soin de le présenter : son amendement est identique.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement no 451 , deuxième rectification.
Il s’agit de préciser les conditions d’exonération d’impôt sur les sociétés des produits issus de la cession de certificats d’économies d’énergie afin de limiter l’avantage à ce seul cas.
Il s’agit d’une précision et d’une clarification utiles. Favorable !
Les amendements identiques nos 570 rectifié et 451 deuxième rectification sont adoptés.
L’article 7 quinquies, amendé, est adopté.
Article 7
L’article 7 sexies est adopté.
Article 7
Les entreprises qui cèdent une partie de leurs actifs pour la construction de logements sociaux bénéficient d’un taux réduit d’IS de 19 %. Les quatre amendements visent à préciser quelles sont les sociétés et les actifs concernés. Ainsi, les amendements nos 452 et 453 étendent respectivement l’application de la mesure aux locaux à usage artisanal et à ceux à usage de stockage, de transformation et d’activités.
Ces propositions ayant déjà été refusées, je suppose qu’elles feront à nouveau l’objet d’un avis défavorable.
L’avis est défavorable, c’est vrai, mais pas nécessairement pour les raisons indiquées. Contrairement à ce que M. Pupponi laisse entendre, en effet, il ne s’agit pas d’amendements de précision.
Vous êtes, monsieur Pupponi, à l’origine de l’article 7 septies, puisque celui-ci résulte de l’adoption, en commission puis en séance publique, d’un amendement que vous aviez déposé. Or, en première lecture, il avait été indiqué explicitement que les locaux artisanaux ne devaient pas être inclus dans la proposition. Et voilà que vous les mentionnez dans votre amendement no 452 ! De même, dans l’amendement no 453 , vous précisez la nature des locaux industriels tout en intégrant dans la définition les locaux artisanaux – autre façon de les faire rentrer par la fenêtre. L’amendement no 454 allonge d’un an le délai pendant lequel la transformation du local peut être opérée ; et l’amendement no 455 , il vise à élargir le champ des acquéreurs concernés. La commission est défavorable aux quatre.
Le Gouvernement sera plus clément que la rapporteure générale.
S’agissant de l’amendement no 452 qui étend la mesure aux locaux à usage artisanal, le Gouvernement émet un avis de sagesse. Et vous aurez compris, d’après la tonalité de ma voix, qu’il est plutôt bienveillant. Pour ce qui concerne l’amendement no 453 , le Gouvernement y est défavorable, puisque vous étendez la mesure à des locaux à usage de stockage. Le Gouvernement n’est pas favorable non plus à l’amendement no 455 car vous étendez le taux réduit de plus-value de cession lorsque la cession est réalisée au profit d’une société visée à l’article 8 du code général des impôts. En revanche, le Gouvernement émet un avis de sagesse sur l’amendement no 454 qui allonge d’un an le délai donné à l’acquéreur pour achever la transformation des locaux concernés en logements.
L’amendement no 452 est loin d’être anodin, Mme la rapporteure générale vient de le rappeler. Le dispositif dont il est question a été créé dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2011 ; il s’applique aux cessions réalisées entre 2012 et le 31 décembre 2017, en cas d’engagement à transformer en logements des locaux à usage de commerce ou de bureaux.
Avec cet amendement, vous prenez un risque, monsieur Pupponi, dans la mesure où les centres-villes manquent déjà d’artisans et de services de proximité et souffrent d’une trop faible mixité des fonctions. S’agissant des artisans, je ne comprends d’ailleurs pas votre revirement par rapport à la première lecture.
Je vous mets en garde, mes chers collègues : un tel amendement aura des conséquences très lourdes en matière de renchérissement du prix du foncier et sur la présence de commerces et d’artisans de proximité dans les centres-villes.
L’amendement no 452 n’est pas adopté.
L’amendement no 454 est adopté.
L’article 7 septies, amendé, est adopté.
L’article 7 octies est adopté.
Mes chers collègues, je voudrais vous faire part de mon inquiétude s’agissant de l’envolée de la dépense fiscale en faveur du cinéma : alors qu’elle s’élève au total à 164 millions d’euros en 2016, il est prévu qu’elle atteigne à 303 millions d’euros en 2017, soit une augmentation de presque 150 millions d’euros. C’est le coût des crédits d’impôt qui explique cette évolution : celui du crédit d’impôt national « cinéma » passe de 70 millions à 120 millions d’euros, celui du crédit d’impôt national « audiovisuel », de 64 millions à 110 millions d’euros, et celui du crédit d’impôt cinéma « international » de 9 millions à 52 millions d’euros.
Si l’on veut être un peu raisonnable compte tenu de l’état de nos finances publiques, il n’est soutenable de constater de telles augmentations sans procéder à des évaluations. Or l’article 7 nonies que je veux supprimer tend à proroger jusqu’en 2019 le dispositif du crédit d’impôt cinéma « international » sans prévoir la moindre évaluation.
La commission des finances a du reste déposé le même amendement. Il est en effet indispensable de procéder à une évaluation avant de reconduire cette dépense fiscale pour plusieurs années. Lorsque l’on prend en compte les recettes affectées au CNC – 670 millions d’euros –, on arrive à un total de presque 1,1 milliard d’euros exclusivement dédié au cinéma. Je pose la question : pouvons-nous engager de telles sommes sans aucune évaluation ? Il faudrait pour le moins procéder à un examen micro-économique, oeuvre par oeuvre, afin d’apprécier la réalité des emplois créés et de la valeur ajoutée produite.
Je sais qu’il y a une concurrence effrénée, notamment avec la Belgique, et, je le dis à notre excellent collègue Patrick Bloche, je ne conteste pas que cette mesure a des résultats positifs. Mais je souhaite le convaincre d’une chose : quand une dépense fiscale double, augmentant de 150 millions d’euros en une seule année, notre devoir est d’en évaluer l’efficacité. Or nous ne disposons pas aujourd’hui d’une telle évaluation. La commission des finances a donc été complètement dans son rôle en votant la suppression de cet article.
Défavorable.
Nous avons déjà eu ce débat en première lecture, et notre Assemblée avait tranché en adoptant favorablement, vous vous en souvenez toutes et tous, un amendement auquel Bruno Le Roux, alors président du groupe socialiste, était particulièrement attaché. C’est donc plus comme légataire de son oeuvre parlementaire
Sourires
qu’en ma qualité président de la commission des affaires culturelles que j’interviens à cet instant.
Monsieur le président Carrez, je voudrais vous opposer un double argument. Tout d’abord, quand vous évoquez l’année 2019, je me souviens très bien qu’en première lecture le Gouvernement, en la personne de Christian Eckert, avait demandé – pour des raisons d’ailleurs parfaitement justifiées – la rectification de l’amendement de Bruno Le Roux, qui prévoyait à l’origine une prorogation du dispositif jusqu’en 2022. Deuxièmement, monsieur le président de la commission des finances, je connais votre honnêteté intellectuelle : vous ne pouvez donc contester que pour un euro de crédit d’impôt, il y a en moyenne dix euros au moins de rentrées fiscales et sociales supplémentaires…
En moyenne dites-vous !
…parce que ce dispositif crée de l’emploi dans toute la chaîne de la filière technique du cinéma.
Mais, monsieur Le Fur, j’espère que l’on vient tourner dans votre belle circonscription.
Car le crédit d’impôt cinéma « international » vise justement à la relocalisation des tournages, qu’il s’agisse des films étrangers – qui n’étaient plus tournés en France – ou de la production française – attirée par l’étranger parce que nos plafonds et nos taux n’étaient plus compétitifs. Au moins, des plafonds, nous en avons toujours, alors que des pays comme la Grande-Bretagne ont déplafonné complètement. Quoi qu’il en soit, je souhaite vivement que l’on maintienne dans le projet de loi de finances cette disposition dont l’ex-député et actuel glorieux ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, est à l’initiative.
Sourires.
Concernant le CICE, nous avons eu de nombreux débats dans l’hémicycle afin de savoir si on ne pourrait pas se montrer plus agiles en fléchant la dépense fiscale sur tel ou tel secteur.
Or voilà justement l’exemple d’un tel fléchage. Le film d’animation, en particulier, tire particulièrement profit de la disposition dont nous parlons : il cartonne ! Dans ce domaine, l’industrie de notre pays figure parmi les quatre meilleures au monde. Monsieur Carrez, vous avez raison de dire que nous ne disposons pas d’évaluations fines du dispositif, mais nous connaissons l’ampleur de son effet de levier – je n’irai pas jusqu’à parler de dix euros gagné pour un dépensé, mais le rapport est au moins de six pour un.
Par ailleurs, si la dépense fiscale augmente, c’est justement parce que les rentrées fiscales venant de ce secteur d’activité explosent, parce que les incitations, ça marche !
Qu’allons-nous faire de tout cet argent ?
De fait, les industriels étrangers viennent chez nous, notamment dans le secteur de l’animation, où les entreprises françaises, je le répète, sont considérées parmi les meilleures au monde.
N’en faites pas trop !
Les Américains viennent chez nous, dans nos territoires, dans mon département mais aussi dans le vôtre, monsieur Carrez. Par conséquent, s’il y a une mesure issue de la première lecture à maintenir, c’est bien celle-ci.
Je voudrais seulement ajouter, puisque vous avez évoqué, monsieur Bloche, notre ancien collègue Bruno Le Roux, que je partage avec lui une caractéristique : ma circonscription comprend des studios de tournage importants,…
…en particulier ceux de l’ancienne Société française de production. C’est pourquoi, connaissant très bien ce secteur, je plaide pour que nous procédions à des évaluations rigoureuses.
L’article 7 nonies est adopté.
Cet article a pour objet d’instaurer un acompte sur la majoration de la taxe sur les surfaces commerciales, dite « TASCOM ». Il s’agit à nouveau d’une pure mesure de trésorerie qui revient à exiger des entreprises concernées qu’elles payent une partie d’un impôt dont le fait générateur n’est pas encore intervenu. Voilà pourquoi nous demandons la suppression de l’article 8.
L’article 8 est adopté.
Les dispositions de l’article 9 s’inscrivent dans la même logique que la modification du régime des acomptes de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises et l’institution d’un acompte pour le paiement de la majoration de la TASCOM. Il convient donc pour les mêmes raisons de supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir le sous-amendement no 656 .
Le Gouvernement soutient l’objectif de simplification poursuivi par les auteurs de l’amendement mais, eu égard à la rédaction qu’ils proposent, un aménagement complémentaire est nécessaire afin de supprimer un alinéa, devenu alors superflu, qui prévoit que le montant du versement est égal à la somme du produit de chaque assiette par le taux qui lui est applicable – ce qui est en général de toute façon le cas en matière d’impôt.
Sous réserve de l’acceptation de son sous-amendement, le Gouvernement émet donc un avis favorable. À l’issue du vote de cet article, le Gouvernement souhaiterait une suspension de quelques minutes, monsieur le président.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et sur le sous-amendement ?
Examiné au titre de l’article 86, la commission avait initialement émis un avis défavorable à l’amendement, ne souhaitant pas complexifier les choses. Mais le sous-amendement du Gouvernement le précise en supprimant un alinéa effectivement superflu. L’avis est donc favorable à l’amendement ainsi sous-amendé.
Il s’agit là d’une contribution positive du Gouvernement et j’admets tout à fait la modification proposée.
Le sous-amendement no 656 est adopté.
L’amendement no 387 , sous-amendé, est adopté.
L’article 9, amendé, est adopté.
La séance, suspendue le vendredi 16 décembre à zéro heure dix, est reprise à zéro heure vingt.
Les équipements de raccordement aux réseaux de chaleur appartenant aux collectivités territoriales, facturés sous la forme de frais de raccordement par les opérateurs, ne sont pas éligibles au crédit d’impôt pour la transition énergétique – CITE –, alors qu’ils devraient l’être. L’objet de cet amendement est de les rendre éligibles.
Avis défavorable. L’adoption d’un tel amendement aurait pour effet de changer la logique du CITE. En outre, son coût serait vraisemblablement très supérieur aux 6 millions d’euros évoqués dans l’exposé sommaire.
Même avis.
L’amendement no 620 n’est pas adopté.
L’amendement no 348 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Avis défavorable. Cet amendement vise à faire passer de 30 % à 50 % le taux du CITE, ce qui signifie que l’État rembourserait 500 euros à chaque fois qu’un contribuable engagerait 1 000 euros de dépenses. La commission a estimé que l’impact financier de cette évolution serait trop important.
Défavorable.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 521 .
Cet amendement vise à rétablir la suppression de la condition de ressources pour bénéficier du cumul de l’éco-prêt à taux zéro – éco-PTZ – et du CITE. Il permettra à certains contribuables de s’engager dans la transition énergétique, conformément à l’esprit de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
L’amendement no 521 est adopté.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement no 572 .
Cet amendement précise le contenu du rapport demandé au Gouvernement sur le CITE et le crédit d’impôt pour le développement durable – CIDD.
Avis favorable.
L’amendement no 572 est adopté.
L’article 10, amendé, est adopté.
L’article 11 est adopté.
Article 11
Je l’ai dit en première lecture : l’élargissement de l’assiette et la hausse du taux de la taxe sur les transactions financières – TTF – n’interviennent certainement pas au meilleur moment. Si la place de Paris souhaite attirer certains opérateurs financiers après le Brexit, elle n’y parviendra pas en affichant de telles dispositions.
J’ajoute qu’il n’existe pas de lien direct entre le contenu de cet article et l’augmentation du montant de l’aide publique au développement – APD –, que l’Assemblée a approuvée à l’unanimité en première lecture. Il est possible d’honorer cette augmentation de 270 millions d’euros, pris sur les recettes de la TTF, sans relever le taux de celle-ci ni élargir son assiette. Nous débattrons à nouveau de cette question lorsque nous examinerons l’article 17.
Telles sont les raisons pour lesquelles je suis totalement opposé à toute augmentation ou extension de la taxe sur les transactions financières.
Les positions sur ce sujet, amplement débattu en première lecture, ont déjà été défendues.
Relever le taux de la TTF permet d’augmenter le volume budgétaire consacré à l’aide publique au développement, afin que la France se rapproche le plus rapidement possible des engagements internationaux qu’elle a contractés auprès des Nations unies dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement. Pour que la France puisse porter l’aide publique au développement à 0,7 % de son revenu national brut, nous avons trouvé, ensemble, un moyen : augmenter le taux de la TTF de 0,2 à 0,3 %.
L’article 11 bis vise également à élargir l’assiette de la TTF : en première lecture, nous avions adopté, à mon initiative, un amendement visant à y inclure les transactions « intra-day ». Je souhaiterais à présent connaître l’avis du Gouvernement non sur le principe de cette extension, mais sur sa faisabilité juridique. Sommes-nous prêts à appliquer cette mesure dès le 1er janvier 2017 ? N’ignorant pas la jurisprudence constitutionnelle, je sais que, dans le cas contraire, nous courrions le risque de voir la disposition retoquée par le Conseil constitutionnel.
Je dissocie donc le débat sur le relèvement de la taxe de la question de savoir à quel moment appliquer l’extension de son assiette. Sur ce point, j’attends les explications du Gouvernement, avant de me prononcer définitivement.
J’ai soutenu l’amendement visant à étendre la taxe sur les transactions financières aux opérations intrajournalières et à en augmenter le taux.
Il ne faut pas nécessairement faire un lien entre la TTF et l’aide publique au développement – vous avez raison sur ce point, monsieur Mancel. La TTF est une façon comme une autre de financer l’aide. Chacun sait pourtant que, dès sa création, une partie de la TTF a été allouée à l’aide publique au développement.
Par ailleurs, on ne peut pas s’appuyer sur le Brexit pour considérer la TTF comme une ineptie puisque le Royaume-Uni applique une taxe sur les transactions financières, dont le taux s’élève à 0,5 %.
Notre vote, en première lecture, permettait d’adresser un signe contre la spéculation financière qui fait tant de mal à notre économie.
Je conclurai en citant le Président de la République, qui écrivait à la directrice générale d’Oxfam, le 2 décembre, à propos de l’aide publique au développement : « J’ai annoncé que notre engagement augmenterait de 370 millions d’euros en dons à l’horizon 2020 »…
C’est le Parlement qui vote le budget, non le Président de la République !
…« L’Assemblée nationale a voté la hausse de 100 millions de crédits, alloués à la mission « Aide publique au développement » dans le projet de loi de finances pour 2017. La taxe sur les transactions financières, qui permet notamment le financement de la lutte contre le réchauffement climatique, a par ailleurs été étendue aux transactions intrajournalières, et son taux porté de 0,2 à 0,3 %. La moitié de cette augmentation sera affectée à l’aide au développement. Ainsi, l’augmentation de l’APD sera, dès l’année 2017, au niveau de l’engagement que j’ai pris à New York en septembre 2015. »
Je ne vois pas comment nous pourrions remettre en cause la parole du Président de la République…
C’est avec une certaine émotion que j’interviens dans ce débat. En 2001, il y a près de seize ans, nous avions voté dans cet hémicycle le principe même de la taxe sur les transactions financières, appelée à l’époque « taxe Tobin ». C’était déjà, à l’Assemblée nationale, une volonté politique que défendait la gauche.
À présent, si les positions des uns et des autres sont connues, un nouvel argument, assez hallucinant, est apparu : il faudrait qu’au nom du Brexit, nous abandonnions toute régulation financière. Il faudrait qu’au nom du Brexit, nous allions dans un sens encore plus libéral, vers l’absence de contrôle, pour permettre aux investisseurs de venir s’installer en France.
Au-delà de l’excellente argumentation développée par Pascal Cherki et Nicolas Sansu, ce dernier ayant rappelé qu’il existait dans le Royaume-Uni une taxe équivalente au taux de 0,5 %, ces arguments ne me paraissent pas fondés, ni s’inscrire dans la même logique que la nôtre.
Et puis, cela aussi a été rappelé, il s’agit d’un engagement du Président de la République. Cet engagement, que je soutiens, vise à faire en sorte que nous luttions avec efficacité contre le réchauffement climatique et que nous augmentions le montant de l’aide au développement. Il me semble que cela devrait être une des priorités de cette majorité. Nous devrions donc aller dans ce sens, en rejetant les amendements de suppression, qui sont soutenus par la droite, et en ne touchant pas à ce que nous avions adopté en première lecture.
Nous avions adopté en première lecture l’augmentation de 0,2 % à 0,3 % du taux de la taxe sur les transactions financières, ainsi que l’élargissement de son assiette aux opérations intra-day. C’était un objectif commun et, il faut le dire, l’aboutissement d’une longue bataille que nous avions mené depuis le début de la législature. Nous étions donc satisfaits.
Cette disposition visait, je l’assume, un double objectif : réguler la spéculation financière et financer l’aide publique au développement. Je ne vois pourquoi on dissocierait les deux : cette taxe a toujours été présentée comme un mode de financement innovant de l’aide publique au développement.
Je ne vois donc pas pourquoi on devrait renoncer à ce double objectif, qui est salutaire. On touche en quelque sorte un double dividende ; c’est une opération doublement bénéfique.
La seule question qu’il convient de se poser aujourd’hui est celle de la faisabilité d’une application de la mesure au 1er janvier 2017. J’ai déposé un amendement tendant à reporter de six mois la mise en oeuvre du dispositif au cas où cela paraîtrait trop difficile. Je voudrais connaître la position du Gouvernement sur le sujet ; 2018, cela me paraît lointain : la mesure pourrait être remise en cause d’ici là.
Je voudrais rappeler la position constante du groupe socialiste, écologiste et républicain sur le sujet de la taxe sur les transactions financières. J’ai déjà eu l’occasion de le faire au début de la discussion générale, mais je souhaiterais la confirmer à cet instant.
Le groupe s’est toujours prononcé en faveur de cette taxe et d’un accord international qui lui donnerait sa pleine et entière efficacité. Il faut que les discussions en ce sens aillent jusqu’à leur terme ; j’ai interrogé tout à l’heure le secrétaire d’État sur ce point, et j’attends sa réponse. Nous, nous considérons que l’augmentation de la taxe que nous avons votée, et qui nous permettra de tenir nos engagements relatifs à l’aide au développement, doit être maintenue, mais qu’en revanche, pour des raisons tant juridiques et constitutionnelles que pratiques, l’extension de la taxe aux transactions intra-day ne pourra pas être mise en oeuvre au 1er janvier 2017. C’est pourquoi nous soutiendrons l’amendement no 147 de M. Caresche visant à la reporter – quitte à ce qu’en deuxième partie nous précisions dans quelles conditions cela pourrait se faire – en 2018, après l’aboutissement des discussions internationales sur ce point.
Je voudrais rappeler qu’en première lecture, j’avais présenté, en tant que député du mouvement républicain et citoyen, qui est un sous-groupe du groupe socialiste, écologiste et républicain, des amendements visant à augmenter le taux de la taxe sur les transactions financières et à étendre celle-ci aux transactions intra-day. Nous connaissons l’argument consistant à dire que nous ne pouvons pas avancer au plan national tant qu’il n’y a pas au plan européen d’avancée, notamment un accord de coopération renforcée qui permettrait de solidifier les choses. Nous attendons cela depuis longtemps : les ministres du budget se succèdent, on en parle depuis 2012, mais l’accord de coopération renforcée n’est pas encore opératoire. Je pense donc que, concernant la taxe sur les transactions financières, il importe de solidifier les choses,..
…sans attendre, telle soeur Anne, des lendemains qui ne chanteront pas nécessairement.
Trois choses.
Premièrement, comme l’a dit notre collègue Jean-François Mancel, nous sommes dans une période singulière, celle du « Brexit », qui nous donne la possibilité d’accueillir un certain nombre d’investisseurs, banquiers, boursiers, venant de Londres et susceptibles de s’installer dans la place de Paris. Ce serait un plus pour notre pays. Ce n’est peut-être pas le moment de donner ce type de signal !
Deuxièmement, on peut taxer les transactions financières de cette nature, mais à condition que cela se fasse au moins à l’échelle européenne et, dans la mesure du possible, à l’échelle internationale. En décidant cette taxation de manière singulière, nous allons porter préjudice à notre économie : comme on a affaire à des gens extrêmement mobiles, ils iront effectuer leurs transactions financières ailleurs.
Troisièmement – je m’adresse là à ceux qui sont sensibles à la question de l’aide publique au développement –, nous risquons paradoxalement de réduire la recette fiscale.
L’impôt tue l’impôt : vous risquez de le démontrer à cette occasion. Si une taxe extrêmement faible est concevable au niveau national, si elle augmente, cela entraînera immanquablement le départ des transactions de ce type !
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains s’opposera à cette mesure.
Un certain nombre d’arguments ont déjà été échangés. Pour ma part, ce que je voudrais, c’est revenir à la situation actuelle en France.
Il existe déjà en France une taxe sur les transactions financières. Peu de pays sont dans le même cas. Certes, il existe ce que l’on appelle la « Stamp Duty » au Royaume-Uni, mais il n’y a rien de pareil par exemple aux États-Unis. Or un certain nombre d’associations, pour lesquelles j’éprouve le plus grand respect, mais qui sont d’origine américaine, nous donnent à longueur de journée des leçons sur le sujet. Moi, j’aimerais bien que le même combat soit mené aux États-Unis ! Si, de surcroît, on regarde qui finance certaines de ces associations, c’est instructif : on voit que le système financier est assez présent. Il faut donc faire attention, car, dans ce type d’affaires, il peut y avoir beaucoup de manipulations.
Il existe en France une taxe sur les transactions financières, et c’est de cela dont il faut parler, car l’augmentation du taux portera sur une taxe qui existe déjà. Or celle-ci, monsieur Cherki, a un grand défaut : son assiette est extrêmement restreinte. Elle concerne les actions de 150 sociétés françaises, pas plus – même si ce sont les plus grosses. On peut augmenter le taux indéfiniment, si la taxe n’est pas réformée à un moment ou à un autre, cela n’aura aucun sens. C’est pourquoi nous devons être attentifs à l’avancée de la réflexion à l’échelon européen : non seulement parce qu’il conviendrait d’attendre, mais parce que c’est sur cette base que nous pourrons créer un dispositif bien plus satisfaisant.
Hier, la commission des finances a procédé à l’audition de Pierre Moscovici – nous n’étions que quatre ou cinq députés à y assister. C’était intéressant, car c’est lui qui pilote le dossier à l’échelon européen. Il nous a dit que les choses avançaient, et il nous a donné un certain nombre d’informations ; par exemple, l’une des questions qui se pose est de savoir s’il faut instaurer une taxe « de rendement » ou une taxe de type Tobin, visant à modifier les comportements. J’aimerais que ces sujets soient abordés ici, afin que nous puissions mener une réflexion un peu sérieuse. Néanmoins, j’ai entendu ce qu’a dit Dominique Lefebvre : c’est entendu pour les 0,3 %.
S’agissant des transactions intra-day, je suis personnellement défavorable à ce qu’on les intègre dans l’assiette de la taxe dans un an ou deux. Ce serait adresser un signal extrêmement négatif, sans qu’il y ait de compensation ; de surcroît, nous n’engrangerons pas les recettes que nous aurions pu attendre. Je ne vois donc pas l’intérêt d’une telle mesure – j’y reviendrai en présentant mon amendement.
Si l’on s’orientait vers une sorte de compromis associant augmentation de la taxe et suppression des transactions intra-day, à titre personnel, j’y serais favorable.
Je voudrais revenir sur ce qui a été dit sur certains bancs, à savoir que ceux qui ne sont pas favorables au dispositif se saisiraient de l’argument du « Brexit » pour défendre leur position. Il n’en est pas moins certain que le « Brexit » a modifié la donne.
Cela, je crois que personne ne peut le contester. S’il est vrai qu’il existe une taxe au Royaume-Uni, il n’en demeure pas moins qu’aujourd’hui la place de Paris est en concurrence avec d’autres places. La France doit délivrer un message d’attractivité, c’est le moment ; il s’agit, non pas de dérouler le tapis rouge, mais de ne pas envoyer un mauvais signal.
Deuxième point : le lien avec l’aide publique au développement – on a même parlé d’un double objectif. Cette affectation, on peut y être favorable, voire la louer. Cependant, on ne peut pas soutenir l’augmentation d’une mauvaise taxe au motif que son affectation serait bonne.
Troisième point, déjà abordé par plusieurs orateurs : les problèmes techniques suscités par une application de la mesure au 1er janvier 2017. Il y a là une vraie difficulté. À quelques jours de la date d’entrée en vigueur du dispositif, dès lors que l’on reconnaît qu’il y a des difficultés, il ne serait pas inutile de différer ou de suspendre celui-ci.
Pour ma part, je suis totalement d’accord avec l’argumentation que vient de développer Christophe Caresche, et qu’a reprise Véronique Louwagie, sauf sur deux points.
Le premier porte sur votre acceptation, monsieur Caresche, d’une hausse de 0,2 % à 0,3 % de la taxe sur les transactions financières en contrepartie de la suppression de son élargissement aux transactions intra-day. Ce dernier point est pour moi une évidence ; mais je voudrais aussi appeler votre attention sur l’augmentation du taux de 0,2 % à 0,3 %, qui à la fois sera très pénalisant pour la France dans le contexte du « Brexit » et qui, du point financier, compte tenu de l’étroitesse de l’assiette, provoquera sans nul doute une attrition de la recette.
L’autre point de désaccord est le plus important. C’est une question d’interprétation. Hier matin, la commission des finances a adopté un amendement de suppression de l’article ; à dix-sept heures, elle a procédé à l’audition de Pierre Moscovici. Moi, ce que j’en ai compris – mais je me trompe peut-être –, c’est que la discussion européenne avait régressé.
Les ministres ne se sont même pas rencontrés, nous a dit Pierre Moscovici. À ce stade, je n’irai pas jusqu’à dire que cet accord, que l’on nous promet depuis maintenant deux ans,…
…est mort-né, mais je pense que nous devrons attendre un certain nombre d’années avant d’aboutir.
Je mets donc chacun d’entre nous en garde : cette taxe fait partie du paysage, j’en conviens, elle fonctionne, et son taux est passé de 0,1 % à 0,2 % ; mais l’augmenter à 0,3 % alors qu’aucun autre pays ne l’instaurera, dans le contexte du « Brexit », c’est vraiment nous donner inutilement un handicap supplémentaire.
C’est pourquoi j’estime que l’audition de Pierre Moscovici à dix-sept heures hier a légitimé l’amendement de suppression de l’article que nous avions voté le matin même en commission des finances.
Nous avons été nombreux à signer cet amendement dont je viens d’exposer les motifs, confortés, quelques heures après son adoption, par l’audition de Pierre Moscovici. La suppression de l’élargissement aux opérations intra-day relève de l’évidence, et de toute façon une telle mesure ne fonctionne pas.
S’agissant du relèvement du taux de 0,2 à 0,3 %, je me tourne vers M. le secrétaire d’État. Tout à l’heure, Marc Le Fur a dit que, parfois, trop d’impôt tue l’impôt. Il faut donc être attentif sur ce point. Ce soir, d’ailleurs, nous en avons vu de toutes les couleurs, si vous me passez l’expression : la dépense fiscale, disait notre ami Razzy Hammadi, doit générer, comme par merveille, beaucoup de recettes supplémentaires.
Je serais curieux de voir la recette générée avec un passage de 0,2 à 0,3 %. Je prends le pari qu’elle diminuerait.
C’est pourquoi la commission a adopté cet amendement de suppression, exprimant par là une position que je crois très solide.
La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l’amendement no 145 .
Après avoir écouté attentivement l’ensemble des orateurs, je veux rappeler un certain nombre de choses pour éclairer l’Assemblée.
En premier lieu, les crédits de l’aide publique au développement – qu’on la rattache ou non à ce dont nous débattons : chacun fera son analyse – ont été augmentés, dans le PLF, de 130 millions d’euros par rapport à l’an dernier, somme à laquelle nous avons collectivement décidé d’ajouter 270 millions ; mais, pour être tout à fait honnête, une diminution de 36 millions a été décidée, si bien que l’augmentation s’établit au total à 364 millions par rapport à 2016.
C’est un pas rarement accompli, me semble-t-il.
D’autre part, le Gouvernement retirera son amendement à l’article 17, s’agissant de la réorientation de ces crédits vers le Fonds social de développement, le FSD, lui-même géré par l’AFD, l’Agence française du développement – puisque c’est là un sujet de préoccupation.
Le Gouvernement, par ma voix ou celle de Michel Sapin, le rappellera le moment venu.
Compte tenu des demandes que nous avons eues sur le présent article – relatif aux crédits budgétaires – et sur l’article 17, la question de l’aide publique au développement sera ou non connectée à la taxe sur les transactions financières : chacun, je le répète, y trouvera le sens qu’il voudra.
Pour ce qui concerne les comparaisons avec les pays étrangers, j’ai beaucoup entendu parler de la taxe britannique, la « stamp duty », dont le taux, c’est vrai, est de 0,5 %.
Effectivement, et pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les banques sont exonérées de cette taxe : seuls les fonds de pension et les hedge funds y sont assujettis.
Autrement dit l’assiette n’est pas la même. La comparaison n’est donc pas aussi évidente que cela : même si le taux est supérieur à la TTF française, l’assiette est beaucoup plus étroite. Bref, méfions-nous de ces comparaisons.
D’autre part – et cela fait le lien avec mon troisième point –, il existe, en Grande-Bretagne, une application et des infrastructures d’informations sur la place financière qui permettent de traiter les opérations intra-day. Or la jurisprudence relative à l’article 34 de notre Constitution nous rappelle régulièrement – j’y reviendrai – que le législateur ne peut mettre à la charge des contribuables des « formalités impossibles ». En d’autres termes, on ne peut contraindre un contribuable à faire quelque chose qu’il n’est pas en mesure de faire.
Or les contacts pris avec les professionnels du secteur – j’y reviendrai, là aussi – révèlent qu’il est rigoureusement impossible de mettre en oeuvre des dispositifs permettant de recouvrer la taxe, car cela nécessiterait de modifier les systèmes informatiques de traitement des négociations des intermédiaires financiers, ainsi qu’un grand nombre de conventions passées entre ces derniers et les clients. Il serait donc prudent, je crois, de ne pas offrir de prise à une censure constitutionnelle au titre de l’article 34 et de la jurisprudence relative aux « formalités impossibles ».
Je me permets aussi de rappeler que les récentes décisions du Conseil constitutionnel nous ont tous appris que, à vouloir aller trop vite et trop loin, on risque de tout perdre : l’arrêt relatif au reporting pays par pays public nous a montré que la chose était impossible. Il ne me revient d’ailleurs pas de commenter ici les décisions du Conseil constitutionnel, lequel a même fait « sauter », passez-moi l’expression, une partie des mesures contenues dans la loi bancaire, à travers la jurisprudence dite « Nouvelle-Calédonie ». Nous avons regardé tout cela de près. Je mets donc en garde celles et ceux qui défendent légitimement une disposition dont je partage les motifs, et qui s’exposerait à un risque élevé – même si je ne puis en juger – au regard des décisions du Conseil constitutionnel.
Pour autant, le relèvement du taux pénaliserait-il la compétitivité de la place financière de Paris ? Certains pourraient le penser. Comme vous l’imaginez bien, le Gouvernement, lorsqu’il travaille sur de telles dispositions – avec le Parlement, d’ailleurs –, prend des contacts avec le secteur concerné. En l’occurrence, je ne vais pas vous dire que ses acteurs applaudissent au relèvement proposé, mais ils ne jugent pas non plus qu’une évolution de cette ampleur et de cette nature serait rédhibitoire pour la compétitivité de la place – chacun a peut-être eu l’occasion d’en parler avec eux.
Enfin, pour remédier à tous ces inconvénients, le Gouvernement vous propose le schéma suivant. Il émet un avis défavorable aux amendements identiques de suppression – relatifs, pour faire court, au relèvement du taux et à l’élargissement à l’intra-day –, mais il soutiendra l’amendement de Christophe Caresche qui porte le dossard – non M. Caresche, mais son amendement
Sourires
– no 147, lequel tend à supprimer l’intra-day tout en maintenant l’augmentation du taux.
Le Gouvernement sera plus qu’attentif – et bienveillant, je le répète – à un amendement dont nous pourrons débattre en seconde partie du PLF : Mme Sas propose de différer l’application de l’élargissement à l’intra-day de six mois, d’autres parlent du 1er janvier 2018 ; en tout cas, nous pourrions faire en sorte d’éviter la fragilité constitutionnelle que je rappelais ; moyennant quoi le Gouvernement est prêt à accepter des amendements – ou à en déposer – qui enverraient le signal souhaité.
En tout état de cause, monsieur le président Carrez, c’est la Commission qui doit formuler des propositions, non les ministres en charge des finances. Si les ministres ne se sont pas vus, M. Moscovici, que vous avez auditionné cet après-midi, s’est récemment engagé sur une directive, ou en tout cas une proposition. Je ne sais si le projet avance ou régresse ; il est vrai que les choses traînent, au regard d’engagements pris il y a quelque temps. Le Gouvernement est donc prêt à envoyer le signal demandé, mais sous certaines conditions de faisabilité ; faute de quoi nous risquerions de tout perdre.
Voilà ce que je voulais dire au nom du Gouvernement, et en parfaite concertation, bien entendu, avec Michel Sapin, qui connaît ces sujets mieux que moi, notamment dans le cadre de ses relations internationales. L’avis sera donc favorable à l’amendement no 147 et il est défavorable aux présents amendements de suppression. Des progrès importants ont été réalisés sur l’APD, qui seront confirmés demain avec l’examen de l’article 17.
Nous recevrons enfin avec bienveillance, dans la seconde partie du PLF, des amendements techniquement réalistes.
J’ai reçu beaucoup de demandes de parole sur ces amendements. Je vous rappelle que, en principe, seuls deux orateurs peuvent intervenir, et qu’il est déjà une heure moins cinq. Or il serait souhaitable d’achever l’examen des amendements à l’article 11 bis, si vous en êtes d’accord.
Je remercie M. le secrétaire d’État, car nous avançons. Les opinions étaient partagées en première lecture, y compris dans notre groupe – et elles se sont à nouveaux exprimées avec des nuances –, lorsque la représentation nationale avait adopté le relèvement du taux à 0,3 % et l’élargissement de l’assiette aux opérations intra-day. Ce vote avait entraîné beaucoup de satisfactions, et aussi un certain nombre de mécontentements dans la sphère financière, dont vous avez été, chers collègues du groupe Les Républicains, les représentants les plus talentueux dans notre hémicycle. Notre vote avait néanmoins trouvé des échos favorables dans la société civile, notamment chez ceux qui, depuis des années, militent en faveur d’une taxe sur les transactions financières réellement consistante.
Le Gouvernement apporte deux nouveaux arguments. Le premier, repris par Dominique Lefebvre, est celui de la négociation européenne, qu’il serait heureux de voir aboutir. Nous sommes bien évidemment partisans d’une taxe à l’échelle européenne : il ne s’agit nullement de faire cavalier seul ; mais si cette idée n’aboutit pas, il faudra bien que la France prenne l’initiative – d’où le débat que nous avons eu en première lecture.
Je termine, monsieur le président – mais le débat est d’importance.
Le Gouvernement avance un argument constitutionnel sérieux. Si j’ai bien compris, M. le secrétaire d’État nous propose d’examiner, en seconde partie, une disposition sur l’intra-day, moyennant un délai suffisant pour permettre aux acteurs de la mettre en oeuvre – plutôt un an, apparemment, soit le 1er janvier 2018. Cela me convient.
Je remercie également M. le secrétaire d’État pour la capacité d’ouverture et de dialogue que nous lui connaissons bien.
Je plaide néanmoins pour un report de six mois, car j’ai entendu, dans la partie droite de cet hémicycle, une opposition franche et claire à la taxe sur les transactions financières, au motif qu’elle pénaliserait la compétitivité.
Si l’on poussait le raisonnement jusqu’au bout, on pourrait d’ailleurs refuser toute taxation de quelque activité économique que ce soit. Je comprends donc l’argument de la compétitivité, mais il me semble un peu trop systématiquement invoqué.
Si un changement de majorité doit intervenir dans notre hémicycle, je préfère nettement voir la taxe – avec un taux à 0,3 % et un élargissement aux opérations intra-day – mise en oeuvre au 1er juin 2017 : cela sécuriserait le dispositif et lui permettrait, de façon intelligente, de survivre aux différentes législatures. Il me semble donc important de prévoir une mise en oeuvre rapide, même si je reconnais les problèmes de faisabilité que pose une application à cette échéance. Nous devons veiller à ce que l’on ne puisse pas revenir sur cette avancée importante qu’est la taxe sur les transactions financières.
Les orateurs qui ont demandé la parole pourront intervenir sur les amendements suivants.
Il a été défendu : il s’agit de la suppression de l’extension de l’assiette de la TTF aux opérations intra-day. Nous aurons toutefois à nouveau ce débat en deuxième partie.
J’avais indiqué qu’il était favorable à ces deux amendements identiques.
Le groupe socialiste, écologiste et républicain votera en faveur de ces amendements. Je voudrais ici louer le Gouvernement : le dialogue constructif que nous avons noué avec lui depuis quelques années sur l’aide publique au développement a permis des avancées, tant sur l’augmentation de l’enveloppe qui lui est consacrée – les crédits de l’aide au développement vont être portés à un niveau qu’ils n’ont jamais connu depuis plus de cinq ans – que sur le fléchage des fonds concernés vers l’AFD.
De plus, le soutien que le Gouvernement nous a promis en deuxième partie s’agissant de l’extension de la TTF aux opérations intra-day est une façon de rappeler l’objectif qui est le sien : rendre une telle taxe applicable dans l’ensemble des pays participant aujourd’hui au groupe de travail sur ce sujet.
Cette façon de procéder, empreinte de réalisme et traduisant l’affirmation d’une volonté, correspond tout à fait à ce que nous avons appelé de nos voeux depuis le début de cette discussion. Je voulais en féliciter le Gouvernement et M. le secrétaire d’État, qui, sur ce sujet, ont tous deux fait preuve d’une intention tout à fait soutenue, régulière et constructive.
Avant de passer la parole à M. Nicolas Sansu, je vous précise, mes chers collègues, que l’adoption de cette série d’amendements identiques ferait tomber l’amendement no 316 de Mme Eva Sas. Vous avez la parole, monsieur Sansu.
Monsieur le président, je constate qu’il vous est difficile de tourner la tête vers la gauche.
Sourires.
Ne croyez pas cela, monsieur Sansu : j’ai beaucoup plus donné la parole de votre côté de l’hémicycle.
Sourires.
Je ne voterai pas pour ces amendements et je tiens à en expliquer les raisons. Depuis 2012, cela fait exactement six fois que je dépose des amendements portant sur l’élargissement de la taxe sur les transactions financières aux opérations intra-journalières. Six fois !
La solution proposée par le Gouvernement, et qui pourrait être satisfaisante, revient à régler la question au 1er janvier 2018. Or elle aurait pu l’être bien avant !
Pour ma part, je trouve qu’il émane de cet hémicycle un petit relent d’hypocrisie : si nous avions vraiment voulu régler cette question, nous l’aurions fait dès le début de la législature et la disposition serait déjà en application.
Je le dis parce que, depuis plusieurs années, on nous amuse, on nous balade en nous expliquant qu’un accord européen va intervenir sur la question, alors que celui-ci ne vient pas. Le président Gilles Carrez nous le disait d’ailleurs à l’instant : la discussion européenne, sur ce sujet, a régressé !
Sincèrement, il ne faudrait pas non plus nous prendre pour ce que nous ne sommes pas : choisir la date du 1er janvier 2018, c’est spéculer sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017.
La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l’amendement no 149 .
L’amendement no 149 est retiré.
L’article 11 bis, amendé, est adopté.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Suite de la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2017.
La séance est levée.
La séance est levée, le vendredi 16 décembre 2016, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly