Séance en hémicycle du 14 octobre 2015 à 15h00

La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

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Je suis heureuse de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation du groupe d’amitié Pérou-France du Congrès de la République du Pérou, conduite par son président, M. Roberto Angulo Álvarez.

Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.

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Je suis également heureuse de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation du groupe d’amitié Togo-France de l’Assemblée nationale de la République togolaise, conduite par sa présidente, Mme Demba Tignokpa.

Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.

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L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement sur des sujets européens.

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La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Monsieur le ministre des affaires étrangères, jamais la situation internationale au Proche et au Moyen-Orient n’a été aussi dangereuse. Tous les germes d’un conflit sont en place, et un tel conflit peut se traduire par une guerre dont personne ne saura maîtriser les développements ni les conséquences.

Plusieurs armées cohabitent sur le front syrien : la Russie, la France et les États-Unis y ont en effet déployé leurs aviations de combat qui procèdent à des attaques, cible après cible et sans coordination.

La situation en Palestine est de plus en plus inquiétante, et les Palestiniens – auxquels Israël fait violence en leur retirant leurs territoires et en mitant ceux-ci par des colonies – envisagent, par désespoir, de se lancer dans une troisième Intifada, celle des poignards.

Il appartient à la France et à l’Europe de prendre toutes les mesures utiles pour permettre une rencontre et une discussion, comme cela fut jadis fait à Oslo.

Mais le plus inquiétant est sans doute la situation en Turquie, car les décisions prises par le gouvernement turc à l’encontre des kurdes, qu’il n’hésite pas à bombarder, laissent croire que des actions de génocide sont actuellement entreprises.

Près de cent personnes viennent de trouver la mort dans un double attentat, au détriment de la population kurde. Rien ne serait pire que de laisser croire que le gouvernement turc, qui envisage d’entrer dans l’Europe, est plus ou moins responsable de cet attentat meurtrier.

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Il est donc indispensable qu’une enquête internationale permette d’établir la vérité. L’Europe est-elle prête, à la demande de la France, à solliciter une telle enquête ? Par ailleurs, la France compte-t-elle saisir l’Organisation des Nations unies en ce sens ?

Rien ne serait pire que de ne rien faire, au moment où le secrétaire général de l’ONU estime que la France, pas plus que l’Europe, n’ont de rôle à jouer dans cette région.

Alors, monsieur le ministre, le Gouvernement de la France veut-il s’appuyer sur l’Europe pour trouver le chemin de la sécurité et de la paix ?

Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, sur certains bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international

Monsieur le député, il est vrai que la situation internationale au Proche et au Moyen-Orient a rarement été aussi grave. S’il ne s’agit pas d’un conflit mondial, c’est un conflit mondialisé : à la liste de pays que vous avez déjà dressée, on pourrait ajouter le Liban, l’Irak et la Libye.

Quelques mots sur chacun des problèmes que vous avez soulevés. S’agissant de la Turquie, il faut bien sûr que la lumière soit faite. Le Conseil européen qui se réunit demain va d’ailleurs se pencher sur la question turque. Je veux simplement dire ici combien nous sommes solidaires de l’ensemble du peuple turc.

En ce qui concerne la situation dans les territoires palestiniens ainsi qu’à Jérusalem, elles est extrêmement tendue. À plusieurs reprises, vous m’avez entendu répondre que ne rien faire, ou faire comme si les choses allaient de soi, reviendrait à aggraver les risques d’embrasement : nous le voyons aujourd’hui.

La France demande donc qu’il y ait une action – et pas seulement des deux pays, la Palestine et Israël, lesquels doivent bien sûr travailler ensemble – et un encadrement internationaux qui les pousse vraiment à négocier et à faire la paix.

Enfin, l’une des sources maîtresses de ces difficultés est la Syrie. Je veux redire ici que nous acceptons tous les soutiens, à condition que les luttes et les efforts soient dirigés contre Daech, que les bombardements visant les populations civiles cessent, et que l’on comprenne que M. Bachar el-Assad n’est pas la solution au conflit car il en est l’un des grands responsables.

Quels que soient les conflits auxquels vous avez fait allusion, la position de la France, nation indépendante, est dictée par une seule exigence : la recherche de la sécurité et de la paix.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur certains bancs du groupe écologiste.

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La parole est à M. François Asensi, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le Premier ministre, puisque André Chassaigne n’a pas obtenu de réponse hier, je vous repose la question : le Gouvernement va-t-il, oui ou non, demander à Air France, compagnie européenne, de lever les poursuites contre les salariés d’Air France ?

« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.

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Il est vrai qu’en les traitant de voyous, vous les avez déjà condamnés. Pire qu’un verdict, ces mots sont une condamnation sociale.

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On assistera donc le 2 décembre à un procès contre le monde du travail.

Mais que fait l’État actionnaire chez Air France, sinon l’affaiblir par ses décisions ?

Depuis la privatisation d’ADP, que nous avons combattue sur ces bancs, les redevances payées par Air France ont bondi de 30 %. Le grand gagnant de cette forme de racket est l’État, qui empoche chaque année 60 millions de dividendes en tant qu’actionnaire majoritaire d’ADP.

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L’État préfère ainsi jouer la financiarisation plutôt qu’insuffler une véritable dynamique industrielle et commerciale à Air France, qui concourt à hauteur de 1,4 % au PIB et demeure le premier employeur privé d’Île-de-France.

Autre mauvais coup, il affaiblit le hub d’Air France à Charles-de-Gaulle en accordant des créneaux aux compagnies du Golfe, dont la concurrence est déloyale, et en validant la suppression de lignes long courrier.

Enfin, scandale des scandales, Air France a empoché 109 millions d’euros au titre du crédit d’impôt compétitivité-emploi. Au lieu de créer de l’emploi, ces 109 millions d’argent public iront financer les 2 900 licenciements.

Alors, monsieur le Premier ministre, allez-vous suspendre dès aujourd’hui le CICE d’Air France, voire demander son remboursement ? L’État, actionnaire d’Air France, va-t-il enfin refuser ce plan de licenciement ?

Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Moi, monsieur le député, je souhaite parler positivement de notre compagnie nationale, Air France, qui, nous avons déjà eu l’occasion de le rappeler ici même, fait face à la concurrence, dans un monde ouvert, globalisé. La concurrence est particulièrement rude dans ce secteur, avec, d’un côté, le low cost et, de l’autre, de grandes compagnies qui se sont réformées ou bénéficient d’un certain nombre d’avantages, comme les compagnies du Golfe.

Air France n’a donc pas d’autre choix que de se transformer, se moderniser, s’adapter à cette concurrence. Elle doit le faire dans le dialogue social, c’est ce que nous ne cessons de dire depuis le début, ce qui implique que chacun prenne ses responsabilités, à commencer par les pilotes, pour que ne pèse pas sur l’ensemble des autres salariés le poids des choix qui devront être faits.

Parce qu’il n’y a pas eu d’accord il y a quelques semaines, la direction a proposé ce qu’on appelle un plan B, qui envisage la suppression – ce ne sont pas des licenciements – de 2 900 postes. Nous pensons que ce plan peut être évité si le dialogue social s’approfondit, ce qui est le cas depuis quelques jours, je m’en réjouis, et si l’on peut avancer avec l’ensemble des professions d’Air France – pilotes, personnels navigants, personnels au sol – parce que le dialogue social est la meilleure solution pour permettre demain à la compagnie d’affronter les grands défis du monde.

Moi, je ne parle pas de scandale, je n’emploie pas les mots qui sont les vôtres,…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

… parce que la responsabilité de l’État, actionnaire à hauteur de 17 %, et nous prenons pleinement nos responsabilités, notamment au sein du conseil d’administration, est non pas d’entraver la compagnie mais d’aider, pas seulement la direction mais l’ensemble des personnels, à avancer.

Je comprends bien sûr l’inquiétude des salariés face aux annonces qui sont faites mais, encore une fois, j’ai rencontré les responsables syndicaux des trois instances représentatives, CFDT, CFE-CGC et CGT, et chacun demande qu’il y ait une vraie discussion.

Enfin, comme je l’ai souligné il y a un instant en répondant au malaise, à la colère des policiers avec la garde des sceaux et le ministre de l’intérieur, je ne peux pas affirmer ici la nécessité de l’indépendance de la justice et vous répondre – vous êtes souvent le premier, monsieur le député, à applaudir Christiane Taubira quand elle dit qu’il faut respecter l’indépendance de la justice –, que je vais agir sur la justice pour empêcher je ne sais quelle action.

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On vous parle de licenciements, vous répondez sur la justice !

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Ce n’est pas possible, ce n’est pas la conception que je me fais de la justice.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, de nombreux bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.

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Il ne fallait pas les traiter de voyous, et même de terroristes !

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Monsieur le député, quand on s’en prend à des salariés, quand on les humilie, quand on les frappe devant d’autres salariés, quand on s’en prend à des vigiles, modestes, qui touchent un petit salaire,…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

…l’un de ces vigiles étant resté pendant une demi-heure dans le coma, je ne crois pas que ce soit, y compris pour vous, la conception du syndicalisme et du dialogue social.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, de nombreux bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Le dialogue social, c’est le respect, la discussion, ce sont les règles du droit, c’est le respect des hommes et des femmes, c’est le respect, bien sûr, des salariés et de leurs représentants. C’est ainsi que l’on avance.

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Le respect des salariés, c’est aussi de ne pas les licencier !

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Mettre de l’huile sur le feu,…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

…croire que c’est par la confrontation que l’on permettra à la compagnie aérienne nationale ou à n’importe quelle autre entreprise d’avancer, ce n’est pas la bonne méthode.

Ceux qui s’en sont pris à des cadres de cette entreprise dans les conditions que vous savez doivent, et c’est normal dans une société de responsabilité, répondre de leurs actes. C’est aujourd’hui à la justice de faire son travail. Le Gouvernement respecte l’indépendance et le travail de la justice,…

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Et il fallait aller les arrêter à six heures du matin ?

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

…comme il en appelle encore une fois au dialogue social. C’est ainsi que l’on fera en sorte que la société française soit plus apaisée.

Plus que jamais, le débat est entre réforme, progrès social, dans le dialogue, d’un côté, et, de l’autre, conservatisme ou rupture. Le Gouvernement a choisi sa voie…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

… la voie du Gouvernement, c’est le progrès et c’est la réforme.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.

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La parole est à M. Pierre Lequiller, pour le groupe Les Républicains.

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Monsieur le Premier ministre, François Hollande manque singulièrement de vision et d’initiative concrète en matière européenne,

Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen

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notamment sur les deux sujets qui seront traités au Conseil européen de demain. Ses appels à plus d’Europe ne suffisent pas, il faut des actes.

Face au problème capital des migrants, qui risque de durer des années, il faut refonder Schengen. Il faut pour cela adopter rapidement une politique d’asile commune. Il faut qu’il y ait partout en Europe le même statut de réfugié et la même politique de reconduite dans leur pays d’origine des migrants économiques en situation irrégulière. Il faut mener rapidement une politique solidaire de contrôle des frontières extérieures de l’Europe, avec des garde-frontières européens, en renforçant le rôle et les moyens de Frontex.

Pour ce qui concerne la zone euro, François Hollande a fait des effets d’annonce sans jamais défendre ses propositions devant le Conseil européen. Jean-Claude Juncker a lui-même fustigé le mutisme français sur ce sujet lors de ces sommets. Nous, Les Républicains, appelons à une refondation de la zone euro, avec un président stable, et à la création d’un véritable Fonds monétaire européen à partir du Mécanisme européen de stabilité.

Autre sujet, le référendum britannique, dont il faudra bien parler un jour puisqu’il est fondamental. Pour nous, il faut évidemment aider David Cameron à gagner le référendum pour que la Grande-Bretagne reste dans l’Union européenne.

Les crises européennes, et nous en traversons plusieurs d’une gravité exceptionnelle, ne peuvent plus recevoir de réponses tardives et au cas par cas. Elles nécessitent des réformes ambitieuses.

Alors demain, sur ces sujets, quelles propositions concrètes François Hollande va-t-il enfin mettre sur la table ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

Debut de section - Permalien
Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

Ces sujets, monsieur le député, seront à l’ordre du jour du Conseil européen qui se réunit demain à Bruxelles.

La France demandera que soient d’abord mises en oeuvre les décisions qui ont été prises pour répondre à la crise des réfugiés, à la fois lors d’un Conseil extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement qui s’est tenu au mois de septembre et lors des conseils des ministres de l’intérieur, auxquels Bernard Cazeneuve a présenté une feuille de route en commun avec l’Allemagne pour que la réponse apportée soit conforme à nos principes, c’est-à-dire ceux du droit d’asile, mais aussi mette en avant la crédibilité de la réponse européenne en matière de contrôle des frontières extérieures communes de l’Europe.

Comme l’a souligné le ministre de l’intérieur, la soutenabilité du système d’asile européen, qui passe par la mise en place des centres d’enregistrement, les fameux hot spots, suppose en effet qu’il y ait un contrôle effectif et que l’on distingue entre ce qui relève de la protection internationale et ce qui relève de la lutte contre l’immigration irrégulière.

À cet égard, la France a aussi renforcé sa contribution à l’opération en Méditerranée, EUNAVFOR Med, désormais baptisée Sophia, qui a l’appui du Conseil de sécurité des Nations unies, pour lutter contre les trafics, les réseaux de passeurs en mer Méditerranée, qui ont provoqué plus de 3 000 morts depuis le début de cette année.

La réponse à cette crise des réfugiés passe par la solidarité, par une répartition des flux – nous nous sommes engagés collectivement à accueillir 160 000 réfugiés dans les hot spots –, mais aussi par une coopération très ferme avec les pays d’origine et de transit pour les aider à lutter contre les passeurs mais également faire en sorte qu’ils acceptent, dans le cadre d’accords de réadmission, que retournent vers leur pays d’origine ceux qui sont en situation irrégulière.

Nous négocierons également, à l’initiative de la France, de l’Allemagne et du Président Juncker, un plan d’action avec la Turquie.

Telle est l’action de la France. Elle est concrète et elle sera efficace.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. Philip Cordery, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le Premier ministre, l’Europe est confrontée à des défis sans précédent : répondre humainement à la question migratoire ; investir pour relancer nos économies ; lutter contre le dumping fiscal et salarial ; renforcer et démocratiser la zone euro ; réussir la transition écologique et numérique ; lutter contre le terrorisme.

François Hollande et Angela Merkel l’ont dit à l’unisson la semaine dernière, dans une séance historique au Parlement européen : c’est par la solidarité et la responsabilité que ces défis peuvent être surmontés. C’est avec une Europe réorientée, plus forte et plus démocratique que nous retrouverons la souveraineté. Belle image de la relation franco-allemande, vingt-six ans après les discours de François Mitterrand et d’Helmut Kohl dans la même enceinte.

N’en déplaise à Mme Le Pen, discuter avec l’Allemagne et négocier avec ses dirigeants ne constituent pas un asservissement. Il s’agit d’un partenariat essentiel. C’est le choix du Président de la République et de cette majorité. L’heure n’est pas au suivisme, mais au dialogue constructif entre les deux capitales, et ce au service de l’ensemble de l’Union européenne et de ses habitants, comme nous l’avons vu lors de la crise grecque ou plus récemment avec les réfugiés. Le couple franco-allemand est redevenu force de propositions dans cette Europe en pleine mutation et il a retrouvé son rôle de moteur dans la construction européenne.

Monsieur le Premier ministre, l’Europe est aujourd’hui à un tournant de son histoire. Elle doit choisir entre le souverainisme, synonyme de déclinisme et d’affaiblissement de la France, et la souveraineté qui, en étant partagée, sera retrouvée ; choisir entre le renoncement et le renforcement ; choisir entre la voie du passé et celle de l’avenir.

La France, par l’intermédiaire du Président de la République et de votre gouvernement, a choisi d’aller de l’avant. Dès lors, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire comment se construira la coopération franco-allemande à l’avenir et quelle forme elle prendra ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

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Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

Monsieur Cordery, la relation entre la France et l’Allemagne est unique, comme vous l’avez rappelé. Quand nos deux pays sont unis, ils parlent ensemble d’une voix forte, influente non seulement en Europe mais partout dans le monde.

Debut de section - Permalien
Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

Ces dernières années et ces derniers mois, face aux très nombreuses épreuves que nous avons traversées, c’est bien la relation franco-allemande qui aura permis de trouver une voie de sortie par le haut pour l’Union européenne.

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C’est l’Allemagne surtout, pas la France !

Debut de section - Permalien
Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

S’agissant de la crise des réfugiés, victimes des convulsions au Moyen-Orient et des drames de l’Afrique, c’est ensemble que nous avons proposé une action pour que la France prenne part à la coordination.

S’agissant de la Grèce, alors que nous avons permis d’éviter le pire scénario, celui d’une sortie de la zone euro, c’est la France, sur l’initiative du Président de la République,…

Debut de section - Permalien
Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

…qui a proposé, avec l’Allemagne et la Chancelière, une solution permettant au pays de rester dans la zone euro.

Il en va de même face au terrorisme qui a frappé notre pays.

Même chose face à la violation brutale du droit international en Ukraine, dont l’issue n’a pu être engagée que dans le cadre du « format Normandie », c’est-à-dire, là encore, sur l’initiative du Président de la République qui a réuni, avec la Chancelière, le président Poutine et le président Porochenko, pour permettre un cessez-le-feu et la mise en oeuvre d’une série de réformes qui vont dans le sens de l’apaisement.

Même chose, enfin, en ce qui concerne la Syrie, contre le régime criminel d’Assad et contre les terroristes de Daech.

Nous sommes pleinement engagés ensemble pour faire avancer l’Union européenne et son intégration, parce que le débat n’est pas entre moins ou plus d’Europe, mais entre l’affirmation ou la fin de l’Europe. C’est pour cette raison que nos pays ont porté ensemble une contribution sur l’avenir de l’Union économique et monétaire le 22 mai dernier, proposant des pistes d’approfondissement à traité constant, une liste commune de projets pour la mise en oeuvre du plan Juncker, qui est désormais au centre de l’agenda de la relance européenne, et une coordination étroite pour lutter contre le dérèglement climatique. Ce retour du couple franco-allemand, c’est bien celui que nous avons vu au Parlement européen.

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Merci, monsieur le secrétaire d’État, votre temps de parole est écoulé.

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La parole est à M. Gérald Darmanin, pour le groupe Les Républicains.

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Monsieur le Premier ministre, l’Europe tente de se mobiliser depuis des mois contre l’afflux massif de migrants. Si l’on peut regretter amèrement que la France, avec François Hollande, ait suivi aveuglément la position de Mme Merkel,…

Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen

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…on ne peut qu’assumer les conséquences d’une telle politique.

Aujourd’hui, nous avons ainsi appris avec stupéfaction dans La Voix du Nord que, devant le grand nombre de migrants présents dans les trains, la SNCF permettait à ses agents de ne pas les contrôler, voire de les laisser voyager pour zéro euro, de préférence en seconde classe.

Mêmes mouvements.

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Non seulement la SNCF ne dément pas, mais elle semble même accepter cette décision ahurissante.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Monsieur le Premier ministre, comment accepter que des Français ou des étrangers en situation régulière paient normalement le train, alors que des migrants ou des clandestins puissent prendre le train sans payer leur ticket ? Comment accepter que le Gouvernement, qui contrôle l’entreprise publique qu’est la SNCF, ne soit pas informé ou, pire, cautionne une telle politique ? Cela revient ni plus ni moins à adresser ce message : « Prenez le train pour Calais, c’est gratuit ! »

Monsieur le Premier ministre, étiez-vous informé de cette politique de la SNCF ? L’avez-vous cautionnée ? Allez-vous aujourd’hui demander au président de la SNCF de revenir sur cette instruction ahurissante ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains. – Huées sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Monsieur Darmanin, le ministre de l’intérieur aurait également pu vous répondre, mais je vous ferai une réponse plus large.

Le ministère de l’intérieur a mis en place et renforcé un dispositif dans tous les trains et toutes les gares afin de lutter contre les flux migratoires utilisant la voie ferroviaire.

Chaque jour, dans un contexte migratoire très difficile, plus de 200 interpellations ont lieu dans les trains et les gares, majoritairement dans le Sud et dans la région Nord-Pas-de-Calais, grâce à l’action de la brigade spécialisée de la police de l’air et des frontières.

Aucune instruction n’a été donnée à la SNCF pour relâcher ce contrôle, bien au contraire : tout voyageur doit être muni d’un titre de transport et tout le monde est soumis à la même procédure de contrôle à bord des trains, migrants inclus. L’information que vous relayez n’a donc pas de sens. Il ne faut pas croire, monsieur Darmanin, tout ce qui se dit dans la presse.

Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Deuxièmement, vous avez prononcé au début de votre intervention une phrase assez étrange à propos du supposé suivisme du gouvernement français à l’égard de l’Allemagne. Mettons les choses au clair. Comme le rappelait Harlem Désir, l’Europe, qu’il s’agisse de l’euro ou du dossier des migrants, doit avancer grâce à l’engagement du couple franco-allemand.

Ce sont les mêmes dans vos rangs, y compris vous, monsieur Darmanin, qui nous donnent des leçons économiques sur ce que fait l’Allemagne, en nous expliquant qu’il faudrait suivre ce pays, et qui nous accusent maintenant, sur les questions migratoires – en se trompant, qui plus est –, de je ne sais quel suivisme à l’égard de Mme Merkel.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur certains du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Que je sache, monsieur Darmanin, Mme Merkel est comme vous membre du PPE. Mettez-vous d’accord avant d’accuser le Gouvernement !

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Sur la question des migrants et la crise des réfugiés, la force de la France a été sa cohérence et sa constance depuis un an, grâce notamment au travail mené par le ministre de l’intérieur.

Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Sur ce sujet, vous remarquez que, même si nous comprenons ce qui se passe en Allemagne, nous avons adopté d’autres choix, une autre politique et un autre message. Nous l’avons déjà dit très clairement, et je vous l’ai dit moi-même dans cet hémicycle : nous pensons que l’Europe – et donc la France – ne peut pas accueillir tous les réfugiés qui fuient la guerre en Syrie, pour des raisons évidentes.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

C’est pour cela que nous avons un plan européen, suivi par l’ensemble des pays, à l’exception de deux ou trois : mise en place des centres d’accueil, renforcement des frontières avec des gardes-frontières, aide aux pays les plus concernés, comme la Jordanie, la Turquie et le Liban, ainsi que la Grèce et l’Italie.

Certes, monsieur Darmanin, vous courez derrière l’extrême droite, derrière le Front national et Mme Le Pen,

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

mais il n’est pas possible d’accuser celle-ci – à juste titre – de ne pas avoir été à la hauteur, et le mot est faible, d’avoir interpellé, de la manière que vous savez, le Président de la République, tout en embrassant, à l’Assemblée nationale ou sur le terrain, par exemple dans le Nord-Pas-de-Calais, les mêmes thèmes que ceux de l’extrême droite, qui consistent à mettre en permanence au coeur du débat politique le réfugié et l’immigré, en les confondant.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Le débat des régionales – car il s’agit bien de cela dans votre question –…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

…révèle plus que jamais une certaine conception de la République, des valeurs et de la manière de faire de la politique !

Applaudissements sur les mêmes bancs. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.

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La parole est à M. Paul Molac, pour le groupe écologiste.

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Madame la garde des sceaux, un projet de loi de ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires a été déposé au Sénat. Mais la droite et le centre ont l’intention de torpiller le débat par l’adoption d’une motion tendant à opposer la question préalable, alors que l’Assemblée nationale avait adopté, à une très large majorité, une proposition de loi similaire en janvier 2014. Cela veut dire qu’il n’y aura pas de débat sur le sujet au Sénat, que toute discussion est confisquée par cette droite jacobine qui montre son vrai visage sur la question des langues et cultures régionales !

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Il est inconcevable de ne pas vouloir faire vivre le débat sur un sujet qui tient énormément à coeur dans les territoires où ces langues sont pratiquées, mais également à tous les Français !

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.

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Depuis 1999, année de la signature de la Charte par le gouvernement de Lionel Jospin, trop d’obstacles nous ont été opposés, que cela soit par la droite, le Conseil d’État ou le Conseil constitutionnel. La Constitution sert à tous ceux-là de rempart pour imposer une vision unitariste du pays, non seulement au niveau politique mais également au niveau culturel et linguistique, véhiculée par des peurs infondées et par leur mépris pour les langues et cultures populaires, bien loin de la réalité des territoires.

La France ne doit pas rester en retard par rapport aux autres pays d’Europe. Elle se fait régulièrement montrer du doigt, et ce alors que tout nouvel État adhérent à l’Union européenne a l’obligation de ratifier la Charte.

Ratifier cette charte, c’est faire évoluer les mentalités et assurer la compatibilité de notre république et de son droit avec les grands principes du XXIe siècle,

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains

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c’est aussi s’opposer aux blocages administratifs et libérer les énergies dans les régions, et c’est le premier pas vers une loi-cadre sur les langues régionales.

Madame la ministre, face à ce blocage, que comptez-vous faire…

Debut de section - Permalien
Jean-Luc Laurent et plusieurs députés du groupe Les Républicains

Rien !

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… pour continuer à encourager le processus de ratification de la Charte et la politique de promotion des langues régionales ?

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste, plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et quelques bancs du groupe radical, républicain, démocrate.

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La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le député, le débat sur le projet de loi constitutionnelle visant à ratifier la Charte européenne des langues régionales aura lieu au Sénat le 27 octobre prochain. Cette charte a été adoptée à Strasbourg en 1992, et signée par la France en 1999. Notre pays a assorti sa signature d’une déclaration interprétative que le projet de loi constitutionnelle vise à intégrer, elle aussi, dans la Constitution.

La France se trouve en effet dans une situation à la fois inhabituelle par sa durée mais également inconfortable pour son prestige puisqu’elle a apposé sa signature à une convention internationale sans l’avoir encore honorée plus de quinze ans après, alors que vingt-cinq États européens ont ratifié cette charte, et pas des moindres puisque l’Allemagne et le Royaume-Uni en font partie.

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Et la Charte européenne sur l’autonomie locale, est-elle appliquée ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Ce projet de loi constitutionnelle sera débattu au Sénat le 27 octobre prochain, si celui-ci en décide car il est vrai que la majorité sénatoriale a opposé la question préalable. On pourrait dès lors considérer que cette majorité refuse le débat. Mais ce serait tout bonnement inconcevable, d’autant que, vous l’avez rappelé, le débat avait été extrêmement fructueux à l’Assemblée nationale et l’adoption de la proposition de loi de Jean-Jacques Urvoas massive. On a bien vu alors que les députés n’obéissaient pas à un clivage partisan, mais considéraient l’apport culturel, linguistique et artistique des territoires au patrimoine national.

Le Gouvernement pense donc qu’il y a des chances que le débat se poursuive. En tout cas, nous avons de la peine à croire que la Haute Assemblée se livre à un exercice de leurre ou à une manoeuvre dilatoire. Nous ferons des efforts pour la convaincre.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur divers bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. Jean-Claude Guibal, pour le groupe Les Républicains.

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Monsieur le ministre de l’intérieur, venus de Syrie, mais aussi d’Irak, d’Afghanistan, d’Érythrée, d’Éthiopie et du Sud-Soudan, des migrants abordent par centaines de milliers aux rivages méditerranéens de l’Europe. Ils étaient 282 000 en 2014, sont déjà plus de 700 000 cette année, et pourraient être plus de 1,5 million. L’Europe a tardé à prendre la mesure de ce mouvement migratoire puissant et sans doute durable. Elle l’a de surcroît amplifié par des déclarations souvent contradictoires. Nous aurions tort de nous en étonner : l’Europe ne s’est jamais vraiment préoccupée de protéger ses frontières ni de se doter d’une politique migratoire. Elle a préféré se penser comme un grand marché doté d’une monnaie unique.

Aujourd’hui, à défaut d’avoir anticipé les conséquences des conflits qui bouleversent le Moyen-Orient, elle envisage enfin de renforcer la lutte contre les migrants économiques par des mesures que nous réclamons depuis fort longtemps : je citerai, par exemple, et le Premier ministre l’a évoqué, l’augmentation significative du taux de reconduite – il n’est que d’un sur cinq en France –, le renforcement du contrôle des frontières extérieures, la création d’un corps de garde-frontières, la possibilité d’utiliser si nécessaire les centres d’accueil comme centres de rétention ou bien encore le renforcement de la coopération avec les pays d’origine ou de transit.

Monsieur le ministre, la France soutiendra-t-elle ces mesures à l’occasion du Conseil européen qui débute demain et proposera-t-elle aussi de repenser les accords de Schengen pour qu’ils permettent d’assurer une protection efficace de nos frontières ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Monsieur le député, je vous remercie pour votre question extrêmement précise qui renvoie à un ensemble de préoccupations qui sont celles du Gouvernement.

Tout d’abord, je veux rappeler la chronologie des faits et quelles ont été les actions que nous avons engagées au cours des derniers mois. Le 30 août 2014, c’est-à-dire plus d’un an avant que ne s’enclenche la crise migratoire à laquelle nous sommes confrontés, je m’étais rendu, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, dans les principales capitales européennes pour formuler les propositions françaises. Il s’agissait de mettre fin à l’opération Mare Nostrum, opération de sauvetage en mer décidée unilatéralement par les Italiens, qui avait eu pour principale vertu de sauver davantage de vies mais avec, au final, plus de morts. Il s’agissait aussi de contrôler les frontières extérieures de l’Union européenne, d’organiser avec les pays de provenance des conventions de retour pour lutter contre l’immigration économique irrégulière, de lutter contre les filières de passeurs et de mettre en place les fondements d’une politique européenne de l’asile. Ces propositions ont depuis été mutualisées avec l’Allemagne. Elles sont devenues les propositions de l’Union européenne.

Il faut maintenant tirer un premier bilan. S’agissant de la lutte contre l’immigration irrégulière, vous évoquez la nécessité d’augmenter les reconduites à la frontière, et c’est tout à fait ce que nous faisons : le nombre de reconduites forcées, qui était de 12 000 en 2010, sera de 17 000 à la fin de l’année 2015 parce que nous pensons qu’il n’y a aucune chance de pouvoir accueillir convenablement les réfugiés si nous ne luttons pas contre l’immigration économique irrégulière. Nous nous battons pour que Frontex monte en puissance et pour la mise en place des hot spots. Nous insistons pour que Mme Mogherini, qui a un mandat de l’Union européenne à ce titre, négocie des conventions de retour. Et nous travaillons avec l’Allemagne à une politique européenne de l’asile.

Voilà la politique de la France. Nous la mènerons sans trêve ni pause.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Crise migratoire

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La parole est à M. William Dumas, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre de l’intérieur, le chaos a fait fuir des centaines de milliers de personnes vers l’Europe. Le rôle de l’Union européenne est de répartir les migrants entre les pays et de faire en sorte que chaque personne qui relève du droit d’asile soit accueillie. Il nous faut être à la hauteur de notre devoir.

Demain, le Conseil européen se réunira pour organiser la répartition des centres européens d’accueil des migrants, qui permettront de traiter les demandes au cas par cas. Le Premier ministre a rappelé lundi que nous devons aussi soutenir des pays comme la Jordanie, la Turquie ou le Liban, qui accueillent des millions de réfugiés.

Chers collègues, chacun comprend que l’enjeu de cet accueil est aussi sécuritaire. L’État islamique représente un enjeu direct pour tout le Moyen-Orient. C’est pourquoi le Président de la République a engagé des frappes aériennes. Nous devons combattre ce mal par tous les moyens.

La mise en place d’une politique commune en matière d’asile est défendue par la France. La réponse que nous devons apporter est européenne : elle ne doit pas se faire à l’échelle d’un seul pays. La réponse à la crise doit être coordonnée. Elle est militaire, humanitaire, économique et sociale. Nous devons tout faire pour que l’accueil s’effectue dans les meilleures conditions. Le traitement des dossiers d’asile doit être rapide, afin que personne ne s’installe dans la pauvreté et la détresse.

Le Président de la République a annoncé une conférence internationale sur les migrants. Elle peut apporter une réponse globale aux défis.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quels sont les enjeux du Conseil européen de demain concernant les migrants ?

Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Monsieur le député, voici quelques éléments sur la manière dont nous nous organisons pour répondre à votre préoccupation d’un accueil dans des conditions dignes de ceux qui relèvent du statut de réfugié, en Europe et en France.

Notre système d’asile était à bout de souffle. Embolisé, il manquait de moyens. Notre législation n’était pas conforme aux directives européennes et la France se trouvait très loin derrière les principaux pays de l’Union européenne s’agissant des délais dans lesquels elle traitait les dossiers des demandeurs d’asile.

Qu’avons-nous fait ? Durant ce quinquennat, nous avons rehaussé de façon considérable les moyens d’accueil des demandeurs d’asile en créant près de 18 500 places dans les centres d’accueil de demandeurs d’asile – CADA –, afin de réserver aux demandeurs d’asile un accueil qui soit à la hauteur de la réputation de notre pays.

Nous avons en outre créé 250 équivalents temps plein au sein de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, pour ramener le délai de traitement des dossiers de demandeurs d’asile de 24 à 9 mois. Avec la ministre du logement, nous avons mis en place un plan de plus de 11 000 places en hébergement d’urgence et dans le logement de droit commun dans les zones non tendues, pour permettre à ceux qui ont déjà le statut de réfugié d’accéder à un logement. Les collectivités locales se sont également mobilisées pour faire face à cette crise, offrant près de 5 000 logements dans le cadre du processus de relocalisation pour accueillir les réfugiés en France dans les meilleures conditions.

L’enjeu du Conseil européen est simple. Il s’agit de mettre en oeuvre les décisions prises le 22 septembre lors du dernier Conseil justice et affaires intérieures : contrôler les frontières, mettre en place une politique européenne de l’asile, lutter contre les filières de l’immigration irrégulière, signer des conventions de retour avec les pays de provenance. Voilà la ligne, voilà le but. Nous nous tiendrons à cet agenda.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le Premier ministre, le projet de Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, s’il aboutit, pourrait avoir des conséquences économiques considérables et peser fortement sur les échanges commerciaux dans le monde. Bien négocié, cet accord pourrait constituer un des moteurs de la croissance en Europe.

Pourtant, la poursuite des négociations dans la plus grande opacité et le silence des États-Unis sur les aspects les plus controversés de cet accord n’ont fait qu’accroître, à juste titre, les inquiétudes de l’opinion publique. Ce week-end, des centaines de milliers de personnes manifestaient d’ailleurs leur désapprobation dans les rues de Berlin.

En l’état actuel des négociations, nous ne percevons aucune évolution sur la question de l’accès des entreprises européennes aux marchés publics américains.

Nous n’avons pas obtenu davantage de garanties sur la protection sanitaire et environnementale, pas plus que sur la protection des données personnelles ou sur la nécessaire préservation de notre système d’appellations d’origine.

Enfin, nous devons clairement relayer auprès de la Commission européenne notre opposition aux tribunaux d’arbitrage privés, totalement contraires à notre vision de la souveraineté des États.

Monsieur le Premier ministre, ces lignes rouges ne doivent pas être franchies. Ce sont nos intérêts stratégiques et les principes fondamentaux du projet européen qui sont en jeu. L’Union européenne a la capacité de faire entendre sa voix. Elle doit saisir cette opportunité pour peser avec force au sein des négociations.

Aussi, ma question sera double. L’Union européenne, donc la France, est-elle prête à s’opposer avec la plus grande fermeté à toute clause qui franchirait ces lignes rouges ? Si ces lignes sont franchies, entendez-vous exiger l’arrêt pur et simple des négociations ?

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe Les Républicains.

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La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

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Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

Monsieur le député, à la veille du onzième cycle de négociations entre l’Union européenne et les États-Unis, qui va s’ouvrir le 19 octobre aux États-Unis, la France entend être extrêmement vigilante et ferme sur trois points.

Tout d’abord, s’agissant des lignes rouges que vous avez évoquées, la France considère comme non négociables certains éléments comme le respect des choix démocratiques en matière de régulation, l’exclusion de certains secteurs tels que l’audiovisuel, la protection des données personnelles et la défense des services publics.

Ensuite, concernant la méthode, le manque de transparence persistant et les restrictions à l’accès aux documents posent un problème démocratique. C’est pourquoi la France, vous le savez, a demandé la transparence sur le mandat de négociation. Nous l’avons obtenu. Mais cela ne suffit pas : nous souhaitons la transparence complète.

Enfin, en ce qui concerne les intérêts offensifs, un engagement accru des États-Unis dans ces négociations est absolument nécessaire. Vous avez évoqué l’ouverture des marchés publics américains. Il faut préciser que cette ouverture doit s’effectuer y compris au niveau subfédéral. C’est essentiel pour les entreprises européennes. Quant à la protection des indications géographiques, elle est essentielle pour notre agriculture, de même que la levée des barrières non tarifaires, notamment en matière sanitaire et phytosanitaire. Enfin, nous veillerons, de la manière la plus ferme possible, à préserver nos normes et nos standards sociaux et environnementaux.

En ce qui concerne l’arbitrage entre investisseurs et États, la France, qui a pris dès le début une position claire, a beaucoup oeuvré aux côtés de l’Allemagne pour réformer ce mécanisme. Nous sommes contre un système d’arbitrage privé. De ce point de vue, la proposition faite par la Commission européenne, à la suite de l’initiative franco-allemande, va dans la bonne direction.

Notre intérêt est d’avoir un accord ambitieux, équilibré, qui soit économiquement utile à nos entreprises, à nos agriculteurs et qui contribue à promouvoir la croissance et l’emploi.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à Mme Nicole Ameline, pour le groupe Les Républicains.

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Ma question s’adresse au ministre des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, le dialogue interlibyen a débouché, le 9 octobre dernier, sur un accord politique, qui marque l’aboutissement du processus engagé sous l’égide des Nations unies et soutenu par la communauté internationale, dont la France. Il s’agit d’une étape positive.

Si nous savons que ce progrès est fragile, il n’en est pas moins réel. Il nous force à agir, car la Libye est un élément déterminant pour notre sécurité. Chacun mesure en effet les conséquences de la progression croissante de Daech, de l’absence de contrôle des frontières, de la montée de l’insécurité et du chaos économique qui menace aujourd’hui non seulement la Libye, mais aussi l’ensemble des pays riverains, et l’Europe elle-même. Chacun mesure également l’impact que pourrait avoir le maintien d’une situation telle que celle que l’on connaît aujourd’hui sur les pays riverains, qui risqueraient d’être à leur tour victimes d’une déstabilisation aggravée.

Une réaction européenne s’impose, à plusieurs titres. Nous devons avoir une vision immédiate, mais aussi à plus long terme, des mesures à prendre en Libye, en matière de gouvernance, de soutien au processus institutionnel et politique, de redressement économique et de sécurisation ; en effet, la question des réfugiés s’analyse et se réglera d’abord et avant tout sur place, sur le terrain.

Monsieur le ministre, la France pourrait-elle prendre le leadership, ou tout au moins la présidence d’un pilotage politique afin de chercher des solutions pour cette partie du monde ? Quant à l’Europe, jusqu’alors plutôt invisible sur ce dossier, pourrait-elle envisager de redéployer ses moyens en matière de politique de voisinage et d’intervenir afin qu’une solution politique puisse être rapidement trouvée et soutenue ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international

Madame la députée, je me retrouve parfaitement dans la question que vous avez posée et dans les solutions que vous envisagez. Pour toutes les raisons que vous avez exposées, la stabilisation de la Libye est une priorité ; elle est indispensable tant pour les Libyens que pour l’ensemble de la région et pour la lutte contre le terrorisme.

M. Bernard Leon a fait des efforts qu’il convient de saluer. Il affirme que la solution qu’il a proposée permettra un accord interlibyen – nous espérons que ce sera le cas. Il a proposé qu’un gouvernement d’unité nationale soit formé, avec à sa tête M. Fayez el-Sarraj. Nous soutenons clairement cette proposition, même si, jusqu’à présent, le Congrès général national, à Tripoli, et la Chambre des représentants, à Tobrouk, ne se sont pas explicitement prononcés sur le sujet. Bien évidemment, il s’agit pour nous d’une priorité.

Une fois l’accord signé – c’est dans ce cadre-là que je me situerai –, les partenaires régionaux et internationaux devront le soutenir ; parmi eux, l’Europe et la France. Je serai clair : nous serons aux côtés du futur gouvernement d’unité nationale pour l’aider à faire face aux défis auxquels il sera confronté, qui seront de nature à la fois politique, sécuritaire et économique. Je m’en suis entretenu avec mes collègues européens, et je les pousse à orienter nos efforts dans le sens que vous avez indiqué : il y va de notre responsabilité collective, au service de la sécurité et de la paix. La France sera bien entendu présente sur ce dossier, en songeant à ce qui s’est passé dans les années 2010 et 2011 et en essayant d’éviter certaines erreurs qui ont pu être commises à cette époque. Il est clair que notre intérêt est que la Libye trouve la stabilité et l’unité.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. Michel Piron, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, le 10 septembre dernier, le Président de la République a réaffirmé sa volonté de parvenir à un accord sur la taxe sur les transactions financières dans la perspective de la COP 21. Cette taxe, indispensable pour mobiliser les financements nécessaires à la transition énergétique des pays du Sud, est essentielle pour contenir le réchauffement climatique. Notre groupe, qui en soutient le principe, constate qu’elle peine à voir le jour et souhaiterait vous questionner sur quatre points.

Le premier porte sur l’efficacité et le rendement de cette taxe, puisqu’elle ne concernerait que onze pays européens, alors que l’engagement de toute la communauté internationale est nécessaire pour relever le défi environnemental.

Deuxième interrogation : comment s’assurer que ces pays n’affecteront pas cette taxe à leur budget, mais bien à la lutte contre le réchauffement climatique ?

Troisième interrogation : les contours de cette taxe demeurent imprécis. Si l’idée d’un taux faible et d’une assiette large fait consensus, des désaccords subsistent quant aux produits financiers à taxer.

Notre dernière interrogation concerne le calendrier, puisque M. Moscovici a récemment déclaré que la taxe ne serait pas mise en place au 1er janvier 2016, contrairement à ce qui avait été prévu.

Monsieur le Premier ministre, quelle est la position du Gouvernement sur ces quatre questions ? Comment la France entend-elle oeuvrer pour parvenir un accord satisfaisant avant la COP 21 ?

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe écologiste. et sur plusieurs bancs du groupe socialistes, républicain et citoyen.

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La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Merci infiniment, monsieur Piron, pour cette question sur la taxe sur les transactions financières. Je sais votre combat et celui de votre groupe en faveur de cette taxe, et je pense qu’il s’agit d’un sujet qui pourrait nous rassembler très largement sur tous les bancs.

La France a sur le sujet une position très claire, qui a été exprimée par le Président de la République et que je défends lors des rencontres européennes qui y sont consacrées.

Nous voulons une taxe qui concerne le plus de pays possible, mais nous ne pouvons pas l’imposer, en particulier au niveau européen. Nous travaillons aujourd’hui à onze pays, dans le cadre de ce qu’on appelle une « coopération renforcée », qui rassemble des pays aussi importants que l’Allemagne, la France, l’Espagne et l’Italie, afin de leur permettre de mettre en oeuvre cette taxation.

Nous voulons une taxe qui porte sur le plus grand nombre de produits financiers possible. Aujourd’hui, le plus souvent, seules les transactions sur les actions seraient concernées. Or nous ne voulons pas d’une simple taxe sur les dérivés d’actions, mais d’une taxe sur l’ensemble des produits concernés.

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À quand une taxe sur les lacets de chaussure ?

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Telle est la position défendue par la France, et qui est en voie d’être adoptée par les onze pays évoqués.

Nous voulons aussi que la taxe soit mise en place le plus rapidement possible. On a perdu beaucoup de temps dans les débats sur le sujet. J’espérais – puis-je avouer que je l’espère encore ? – qu’elle serait instaurée au 1er janvier 2016 ; en tout état de cause, il convient qu’elle soit en place au 1er janvier 2017 au plus tard. C’est sur cette date que semblent converger les onze pays concernés.

Enfin, nous souhaitons – le Président de la République l’a dit clairement – que la plus grande part du produit de cette taxe aille à la lutte contre le réchauffement climatique, afin d’apporter un appui aux pays les plus en difficulté. Telle est la position que nous défendrons, de manière à ce que tous les pays concernés puissent aller dans la même direction.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à Mme Annie Genevard, pour le groupe Les Républicains.

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Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture.

Notre agriculture souffre : elle l’a exprimé avec force ces derniers mois. Les filières d’élevage sont particulièrement touchées : volatilité des cours, renchérissement des aliments, aggravation des difficultés à l’exportation à cause de l’embargo suisse – pardon, russe –, prix de vente insuffisamment rémunérateur, difficultés dans le partage de la valeur ajoutée – bref, les difficultés ne manquent pas, mais puisqu’un malheur n’arrive jamais seul, voici la fièvre catarrhale ovine !

Cette maladie étant réputée contagieuse pour les ruminants, de larges zones de surveillance ont été instaurées. Depuis quelques jours, le Doubs – terre d’élevage s’il en est, avec une race qui s’exporte très bien, la Montbéliarde – est touché.

L’inquiétude est grande, monsieur le ministre : si l’on ne prend pas des mesures massives de vaccination, c’est toute la filière d’exportation vers les pays européens et extra-européens, exigeants en matière de vaccination, qui s’en trouvera compromise. La baisse des exportations a des incidences importantes sur les revenus des producteurs. Dans ce cadre, il est indispensable que les discussions avec les pays importateurs tels que la Turquie, l’Algérie et la Russie s’accélèrent, afin de trouver rapidement des solutions pragmatiques.

J’ajoute que les comices, dont c’est la période, sont bien souvent annulés à la dernière minute du fait de cette maladie. L’impossibilité d’exposer les bêtes est vécue douloureusement par les éleveurs.

Monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre rapidement pour éradiquer cette épidémie et soutenir nos agriculteurs ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.

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La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Madame la députée, vous avez évoqué un certain nombre de sujets. Vous avez décrit la situation de manière honnête et précise, en évoquant à la fois la question de l’élevage, notamment bovin, et celle des prix du marché. Vous avez ensuite abordé la question de la fièvre catarrhale ovine, ou FCO. À ce sujet, nous avons bien compris que vous parliez de l’embargo russe, et non pas d’un embargo suisse !

Cette maladie a été détectée il y a un mois et demi ou deux mois. À partir de là, deux stratégies ont été définies avec les organisations professionnelles et les services de l’administration de mon ministère. Je les ai fait adopter.

La première stratégie consiste à assurer, autant que faire se peut, la fluidité des exportations des bovins qui pouvaient déjà partir. Deux hypothèses se présentent dès lors. Première hypothèse : faire passer un test aux bovins concernés, non pour savoir s’ils sont porteurs de la maladie, mais pour savoir s’ils sont sains, auquel cas ils peuvent être exportés. Nous avons négocié cela avec un certain nombre de pays, en particulier l’Espagne, qui a accepté cette procédure.

Deuxième hypothèse : procéder à la vaccination des bovins. Pour ce type de FCO – le sérotype viral no 8, pour être plus précis –, 3 millions de doses de vaccin étaient disponibles sur l’ensemble du continent européen, voire nord-américain. Nous avons acheté ces 3 millions de doses, et à l’heure actuelle plus de 500 000 animaux ont été vaccinés – sachant qu’il faut deux vaccins, réalisés à trois semaines d’intervalle, pour immuniser un animal. Nous allons poursuivre cette campagne de vaccination pour assurer les exportations vers l’Italie et vers la Turquie, comme le souhaitent les éleveurs.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. Michel Ménard, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre des affaires étrangères, vendredi 9 octobre, l’académie Nobel a attribué le prix Nobel de la paix au quartette menant le dialogue national en Tunisie.

Au-delà des organisations concernées, c’est tout un peuple qui est salué et encouragé. Près de cinq ans après le déclenchement de la révolution de Jasmin, cet élan extraordinaire qui a porté tout un peuple aspirant à la liberté et à la démocratie, ce prix est une récompense bienvenue. Sur tous les bancs de cette assemblée, nous devons nous en féliciter.

Chers collègues, bien plus qu’un aboutissement, ce prix Nobel est un encouragement, un soutien à tout un peuple. Cependant, la nouvelle donne tunisienne est encore fragile, à cause du terrorisme qui a endeuillé ce pays et l’a plongé dans une crise économique préoccupante – chacun a encore en mémoire les attentats de cette année au Bardo et à Sousse. Elle est fragile aussi parce que des forces veulent tourner la page de la démocratie.

Monsieur le ministre, la communauté internationale, l’Europe et la France doivent mesurer le caractère exceptionnel du moment et renforcer leur soutien à cette jeune démocratie. La France prend sa part, comme l’a montré la visite du président Béji Caïd Essebsi en avril dernier à Paris. En matière de développement économique, de tourisme, ou encore de défense, la France soutient la Tunisie dans cette phase de transition. Il faut aller plus loin, notamment pour accompagner la société civile dans ses projets.

Monsieur le ministre, ma question est simple : comment la France mobilise-t-elle ses partenaires européens pour renforcer l’indispensable soutien à la démocratie et au peuple tunisiens ?

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur certains bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international

Monsieur le député, le prix Nobel de la paix a effectivement été attribué aux quatre organisations qui ont conduit le dialogue national en Tunisie. Je suis sûr que chacun, ici, s’accordera à dire que ce prix Nobel est parfaitement mérité. C’est une façon pour nous tous de dire « bravo » au peuple tunisien.

Applaudissements sur tous les bancs.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international

Vous avez utilisé les termes qu’il faut : c’est une façon de dire à un pays qui souffre et qui a encore récemment été touché par le terrorisme : « C’est la bonne voie. Vous avez résisté à une série d’excès, vous avez su mener votre chemin. » Le prix Nobel de la paix récompense tout cela.

La France continuera à soutenir la Tunisie démocratique. Nous allons poursuivre le renforcement de notre coopération avec la Tunisie, non seulement sur le plan politique – ce qui est une évidence –, mais aussi sur le plan économique, ainsi qu’en matière sécuritaire – Jean-Yves Le Drian était encore, il y a quelques jours, là-bas. Je rappelle – pour répondre à votre question – que c’est à la demande de la France que la réunion des ministres des affaires étrangères de l’Union européenne qui a eu lieu à la fin du mois de juillet dernier a décidé d’augmenter l’assistance économique et sécuritaire de l’Europe à la Tunisie.

La Tunisie est aujourd’hui dans une phase d’espérance : le prix Nobel de la paix vient le rappeler. Cet espoir doit vivre, avec le soutien de l’Europe en général et de la France en particulier. Je recevrai personnellement, demain soir au Quai d’Orsay, les quatre lauréats du prix Nobel de la paix.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur certains bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour le groupe Les Républicains.

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Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Le 6 octobre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a invalidé le contrat passé entre la Commission européenne et les États-Unis, communément appelé « Safe Harbor ».

De quoi s’agissait-il ? Cet accord, passé en 2000, permettait aux entreprises américaines telles que Google, Facebook, Microsoft, Cisco et bien d’autres, de recevoir, d’utiliser et d’exploiter, sans garde-fou, les données personnelles de nos concitoyens européens.

À l’époque, la Commission européenne avait jugé, un peu naïvement sans doute, et surtout sans concertation avec les États membres,…

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…que les États-Unis présentaient les garanties suffisantes pour la protection de la vie privée. Les révélations d’Edward Snowden sur l’utilisation de nos données par les États-Unis et la NSA nous ont apporté les preuves éclatantes du contraire. Les États membres auraient dû être beaucoup plus vigilants à l’époque de ces négociations.

J’ai l’impression que nous sommes en train de reproduire les mêmes erreurs dans la négociation du Traité de libre-échange transatlantique, dit « TAFTA ». Le contenu de ce traité concerne tous nos concitoyens, et pourtant nous n’en sommes pas informés. Il concerne des enjeux économiques, mais aussi la protection de la vie privée des Français.

À chaque séance de questions au Gouvernement sur des sujets européens, nous soulevons l’opacité des discussions entre la Commission européenne et les États-Unis dans le cadre de la négociation du TAFTA. À chaque fois vous nous répétez que vous demandez la transparence dans les négociations ; et à chaque fois, nous avons l’impression d’un aveu d’impuissance.

Alors, quand aurons-nous enfin gain de cause, quand pourrons-nous donner notre avis sur le contenu des points négociés ?

La France a indiqué quelles étaient ses lignes rouges dans cette négociation ; mais elle ne peut rien seule, et elle est bien affaiblie dans la négociation au niveau européen. Où en êtes-vous pour convaincre nos partenaires européens de la nécessité d’imposer ces lignes rouges ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe écologiste.

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La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du numérique.

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Axelle Lemaire, secrétaire d’état chargée du numérique

La protection des données personnelles de nos concitoyens, madame la députée, est un droit fondamental auquel ce Gouvernement est particulièrement attaché ; un chapitre du projet de loi pour une République numérique y est d’ailleurs consacré.

Ce Gouvernement est l’un de ceux qui, en Europe, sont le plus impliqués dans les négociations sur le règlement européen relatif aux données personnelles, texte très attendu. Et cela fait des années que nous demandions la renégociation de l’accord Safe Harbor qui, passé entre les États-Unis et l’Europe, permettait de déroger à l’interdiction de transférer des données personnelles des citoyens européens à l’extérieur : je parle à l’imparfait car, vous l’avez rappelé, la Cour de justice de l’Union européenne a invalidé cet instrument, considérant que les programmes américains de surveillance de masse sont incompatibles avec la vision européenne de la garantie des libertés dans le monde numérique.

Ce jugement est très important, tant au plan juridique qu’au plan économique, et son impact est potentiellement considérable. Il faut maintenant que l’Europe – l’Europe politique, non l’Europe technocratique – parle d’une voix forte pour affirmer ses valeurs et définir des outils alternatifs avec les États-Unis. Mais il est exclu que ce sujet soit négocié dans le cadre du partenariat transatlantique, le TTIP, qui n’est pas transparent : c’est là une ligne rouge.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d’état chargée du numérique

Dans les chapitres relatifs au commerce électronique et aux télécommunications, nous demandons la protection des consommateurs, la neutralité de l’internet, une concurrence saine et loyale face aux géants américains et la liberté laissée aux États de fixer des règles de localisation des données de leurs concitoyens sur leur territoire. La France n’accepterait pas que la liberté et la vie privée soient bradées sur l’autel du commerce international.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à Mme Chantal Guittet, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Ma question s’adresse à M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. J’y associe tous les députés du Finistère, tous fortement engagés dans le soutien à notre agriculture.

Vous n’êtes pas sans savoir, monsieur le ministre, que la filière porcine subit une crise sans précédent, encore aggravée par l’embargo russe décrété en 2014 pour des raisons en partie sanitaires mais également diplomatiques, dans le contexte de la crise ukrainienne.

Vous avez évalué à 44 millions d’euros les pertes directement liées à cet embargo pour la filière porcine française et à environ 150 000 tonnes la quantité de viande de porc bloquée sur les marchés européens. Exporter à nouveau en Russie est un enjeu capital pour nos éleveurs, notamment dans le département du Finistère. Sans de nouveaux débouchés à l’export, nous risquons de voir disparaître tout un pan de notre agriculture.

Depuis le début, monsieur le ministre, vous ne ménagez pas vos efforts pour trouver une solution à cette crise. Vous avez rencontré récemment votre homologue russe à Moscou. Pouvez-vous nous dire si des avancées significatives ont été obtenues en vue de lever l’embargo ?

La Commission européenne a décidé d’un plan de soutien de 500 millions d’euros en faveur des agriculteurs, somme très en deçà de ce que ces derniers espéraient. Les États membres ayant toute latitude dans l’usage de cette aide directe, pouvez-vous nous préciser le montant attribué à la France, et nous indiquer comment il sera réparti concrètement entre les différentes filières ?

Enfin, les éleveurs bretons, qui contribuent grandement à la richesse et à la vitalité de notre région, souhaitent depuis longtemps être entendus s’agissant de la traçabilité intégrale sur les viandes et notamment sur les plats cuisinés. Croyez-vous que cette revendication, que nous soutenons fortement, aboutira dans un avenir proche ?

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

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Stéphane le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Je vous remercie, madame la députée, d’avoir salué les engagements que j’avais pris et les mesures destinées à plusieurs filières, à commencer par la filière porcine.

Il y a peu, un accord avait été conclu, qui permettait d’engager un travail sur un soutien au prix ; cet accord a été remis en cause par un certain nombre de groupements de producteurs, qui estimaient ce prix trop élevé.

Dans ce contexte, le poids de l’embargo russe pèse sur un certain nombre de produits du marché de la viande porcine. Ce poids a été évalué, en termes de coût, à 44 millions d’euros de pertes, et à environ 100 000 tonnes restées sans débouchés nouveaux.

Je me suis rendu en Russie pour essayer d’engager une discussion, non sur l’embargo consécutif aux sanctions et lié aux enjeux diplomatiques que vous savez, mais sur l’embargo sanitaire, lequel avait précédé le premier et avait été décidé par les Russes en février 2014 suite aux déclarations de peste porcine africaine dans les pays baltes et en Pologne.

Au-delà des autres rencontres que j’ai pu avoir avec des responsables russes, j’ai donc essayé de renouer le dialogue avec les autorités russes sur cet embargo sanitaire, en coordination avec la Commission européenne. Celle-ci, au moment de mon déplacement en Russie, a en effet adressé une lettre aux autorités russes pour reprendre la négociation sur cette question, en se fondant sur le principe de la régionalisation. Les Russes, aujourd’hui, considèrent que la peste porcine africaine demeure une menace, et qu’il est donc difficile de rouvrir les exportations de produits porcins depuis l’ensemble de l’Europe ; en revanche, ces exportations pourraient reprendre pour les régions non touchées par la peste porcine.

Sur l’enveloppe de 500 millions d’euros, madame la députée, l’Europe versera 63 millions à la France. Cette somme sera destinée à toutes les exploitations qui connaissent des difficultés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et quelques bancs du groupe écologiste .

La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Catherine Vautrin.

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L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2016 (nos 3096, 3110).

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Nous abordons l’examen des articles du projet de loi.

Je vous informe qu’à la demande du Gouvernement, l’article 2 de la première partie est réservé.

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La parole est à Mme Karine Berger, inscrite sur l’article liminaire.

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Dans la tradition des lois de finances, l’article liminaire est modifié tous les ans. Il établit les prévisions d’évolution du déficit public, en distinguant déficit conjoncturel et déficit structurel.

Cette notion de déficit structurel est très débattue par les économistes et les statisticiens, mais aussi, désormais, dans les rangs de la représentation nationale. C’est un concept qu’il convient de parfaitement maîtriser puisque c’est en se fondant sur le déficit structurel de la France que nos partenaires européens et notamment la Commission, sont appelés à évaluer notre stratégie de finances publiques.

Nous avons une bonne nouvelle concernant ce déficit structurel : il se réduit de manière régulière, conformément à la volonté du Gouvernement de mener une politique budgétaire qui le fasse disparaître à terme. C’est, du reste, la marque d’une bonne politique en dehors des périodes de crise conjoncturelle.

Cela dit, le déficit structurel est mesuré en fonction d’une hypothèse très importante, celle de la croissance potentielle. C’est sur cet aspect plus économique des hypothèses de notre projet de loi de finances que je voudrais insister.

Par rapport aux précédentes lois de finances, en effet, ce texte modifie l’évaluation de la croissance potentielle de la France, l’établissant à environ 1,5 %. Il y a quelques mois, ce chiffre me paraissait très vraisemblable, d’autant que, l’année dernière, j’avais défendu un amendement qui évaluait justement cette croissance à 1,5 %. Mais le rapport économique, social et financier pour 2016 fait état d’un output gap, un écart de croissance, qui resterait négatif pendant plus de douze ans.

En d’autres termes, l’hypothèse de croissance potentielle rend impossible, dans les projections, un retour à l’équilibre conjoncturel, c’est-à-dire à une situation de développement économique normal.

Je souhaiterais donc comprendre la manière dont on évalue la croissance potentielle de la France. Ce chiffre de 1,5 % est-il lié à une évolution de la productivité de notre pays, ou traduit-il la volonté de s’en tenir à un calcul technique pour affirmer que l’on est forcément aux alentours de 1,5 % parce que notre potentiel de production, notre productivité, n’a pas diminué ?

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Pour la cinquième ou sixième fois, et pour aller dans le sens de ce que vient d’évoquer à nouveau Mme Berger, j’interroge le Gouvernement sur l’écart croissant entre le déficit effectif et le déficit structurel.

Je rappelle que la notion de déficit structurel figure dans les traités européens, lesquels ont été signés avant le déclenchement de la grande crise de 2008. L’hypothèse implicite était que nous avions un trend de croissance autour duquel se produisaient des fluctuations sur des périodes d’environ six ans – trois années à la hausse, trois années à la baisse. C’est sur cette base que l’on a fait reposer le calcul du déficit structurel, afin de retirer du déficit effectif sa composante conjoncturelle.

Or, comme l’a rappelé Mme Berger – et je serai encore plus précis –, l’écart entre le déficit structurel et le déficit effectif ne fait que s’accroître. Les prévisions gouvernementales font état de 2,1 points en 2016, ou 2,2 points selon la manière dont on établit le calcul. On en était à 2,1 points en 2015. Le chiffre n’a cessé d’augmenter depuis 2011.

On peut interpréter cette évolution de deux façons.

Première interprétation : le concept de déficit structurel est mort, il n’est plus adapté, auquel cas la sagesse serait de demander la révision des traités sur ce point.

Deuxième interprétation : si l’écart s’accroît constamment, c’est, comme Mme Berger l’a très justement souligné, parce que le Gouvernement retient des hypothèses de croissance potentielle toujours plus importantes : 1 % en 2015, 1,5 % en 2016, 1,75 % en 2017 et 2 % en 2018. Vous n’avez qu’à continuer ainsi, monsieur le secrétaire d’État ! Comme le dit fort élégamment Karine Berger, nous en arriverons bientôt à un déficit structurel nul sans que le déficit effectif se réduise le moins du monde ! « Il doit y avoir un truc », aurait dit ma grand-mère, et ce truc est simple : c’est la surestimation de la croissance potentielle. Pas un économiste ne retient vos taux. Dans son dernier livre, M. Artus parle de 0,8 %, peut-être 1 % en étant très optimiste. La question de fond est bien celle-là !

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Sur ce sujet, il me semble que les positions se rapprochent…

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La question de la ligne de partage entre déficit structurel et déficit conjoncturel est étroitement liée à celle de la croissance, l’idée étant que le déficit conjoncturel se dissipera une fois la croissance revenue. Or les faits semblent confirmer ce que disent plusieurs économistes : nous entrons, malheureusement, dans un cycle de croissance « molle », de croissance faible. Sans doute assisterons-nous à un rebond cette année et l’année prochaine, mais à moyen et long terme, il faut plutôt s’attendre à ce que la croissance tourne autour de 1 %.

Dès lors, le contenu même de la notion de déficit structurel doit être revu. Sans aller jusqu’à suggérer, comme M. de Courson, de gommer cette notion, je pense qu’il faut la revoir. Le curseur doit bouger. C’est à cette tâche que nous devons nous atteler.

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Nous pourrions discuter des indicateurs pendant des heures ! Pour autant, la combinaison de certains d’entre eux devrait nous alerter. La France perd des parts de marché depuis plusieurs années, que ce soit dans la zone euro ou au niveau international. Cette tendance, combinée aux perspectives de ralentissement de la croissance mondiale – donc de rétrécissement du marché mondial – que l’on vient d’évoquer, produit un double effet en termes de croissance, et même un triple effet si l’on tient compte du poids embarqué de notre dépense publique, qui vient encore alourdir notre capacité à accompagner, le cas échéant, un mouvement de croissance mondiale.

On peut toujours discuter du déficit, mais les éléments objectifs de création de croissance en France – entre la perte récurrente de parts de marché, le poids de la dépense publique et le ralentissement de la croissance mondiale, signalé à deux reprises par le Fonds monétaire international – ne laissent augurer d’aucune perspective de croissance fiable pour les années à venir.

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Les prévisions tiennent compte d’hypothèses qui résultent elles-mêmes des données macroéconomiques. Le Haut conseil des finances publiques a identifié quatre fragilités dans le scénario retenu pour 2016. Permettez-moi d’insister sur la première, monsieur le secrétaire d’État.

Vous avez retenu une hypothèse de reprise de l’investissement des entreprises à hauteur de 3,7 %, dont 4,9 % hors construction. Or on sait aujourd’hui qu’un facteur aura un impact important sur l’investissement, les travaux publics et la construction, je veux parler de la baisse des dotations de l’État aux collectivités territoriales. Celles-ci seront amenées à diminuer considérablement leurs investissements, notamment ceux qui ont des retombées sur nos entreprises. Les hypothèses que vous avez retenues prennent-elles en compte cette diminution des investissements des collectivités locales ?

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Je suis saisie de trois amendements, nos 253 , 479 et 127 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 253 .

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Cet amendement est la traduction de ce que nous avons dit dans la discussion sur l’article : au fond, il n’y a plus qu’un indicateur pertinent, à savoir le déficit effectif. Si nous étions vraiment dans des cycles économiques, nous devrions avoir un écart positif en basse conjoncture, pendant trois ans environ, et un écart négatif en haute conjoncture. Or l’écart reste négatif et va croissant, ce qui montre bien que la notion de déficit structurel n’a plus aucune pertinence. L’hypothèse implicite des traités européens était que l’on restait – pour ceux qui aiment l’histoire économique – dans les cycles de Juglar et de Kondratieff. Depuis la crise de 2008, c’est bien fini !

L’objet de cet amendement est de tirer les conséquences de la non-pertinence du concept même de déficit structurel.

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La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement no 479 .

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Il s’agit d’un amendement récurrent mais, pédagogie de la répétition oblige, je ne désespère pas de faire évoluer un jour la position du Gouvernement !

Son objet est simple : il est proposé d’exclure du calcul du déficit la contribution que la France verse à l’Union européenne au titre du prélèvement sur recettes pour financer le budget de l’Union. La mesure est bien modeste au regard des engagements, pris lors de la campagne électorale de 2012, de renégocier ou de ne pas ratifier, carrément, le TSCG. Puisque, finalement, nous l’avons ratifié sans le renégocier, ne pourrions-nous pas nous dire que qui ne peut pas le plus peut peut-être le moins ?

Il y aurait une utilité à cela. Aujourd’hui, le budget de l’Union est fragile. Alors qu’il faudrait le renforcer, il ne représente qu’environ 1 % du PIB. Le mouvement est double ; d’un côté, on demande aux États, dans le cadre du TSCG que nous avons ratifié, de se comporter progressivement comme les États fédérés d’un État fédéral, en menant à terme leurs budgets à l’équilibre – telle est la philosophie de la fameuse « règle d’or » – ; mais, de l’autre, on n’a pas ce budget fédéral qui, aux États-Unis, avoisine les 20 %.

L’Europe est donc impuissante budgétairement à un moment où de plus en plus de défis pèsent sur ses épaules. Le dernier en date, celui de l’accueil des migrants, du financement de cet accueil et du financement du développement dans les pays du Sud, le démontre amplement.

Comment faire ? Soit on se lamente, soit on essaie de trouver des solutions. À très court terme, et en attendant que le débat soit peut-être remis sur le tapis à la faveur de la prochaine campagne présidentielle, nous pourrions sortir du calcul du déficit le montant du prélèvement sur recettes versé à l’Union européenne, puisqu’il ne s’agit que d’une norme comptable commune. Nous pourrions ainsi démontrer aux autorités de Bruxelles que nous tenons notre trajectoire de déficit, conformément au traité que nous avons fini par ratifier, mais que nous le faisons sur une base plus saine. Le déficit ne sera pas supérieur à 3 %, comme annoncé, mais un peu moins important, de sorte que nous pourrons également dégager des crédits supplémentaires dans notre budget pour abonder celui de l’Europe ou pour satisfaire les besoins sociaux immenses de notre pays et réduire les inégalités.

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La parole est à M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement no 127 .

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J’ai hésité à déposer cet amendement car je reste un « structuro-sceptique » : malgré le talent et l’enthousiasme de Mme Berger, je n’arrive pas à la suivre sur les notions de croissance potentielle, d’output gap, de solde structurel et de solde conjoncturel. Je félicite à nouveau le Gouvernement, car il s’attache cette année davantage que la précédente au déficit effectif ; il a raison, car c’est celui-ci qui conditionne le niveau d’emprunt, donc les difficultés à venir.

J’ai déposé malgré tout cet amendement pour dénoncer le caractère artificiel, voire arbitraire, de ces notions. En effet, dans le cadre du projet de loi de finances, le Gouvernement augmente la croissance potentielle. Ce faisant, il diminue le solde structurel et augmente l’effort structurel. Notre effort structurel devait atteindre 0,4 point de PIB, ce qui n’était pas conforme aux dispositions du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance – TSCG –, qui requièrent un ajustement structurel de 0,5 point de PIB tant que l’objectif d’équilibre structurel n’est pas atteint à moyen terme. Comme par hasard, ô miracle, grâce à cette modification – je n’ose pas dire manipulation –, nous atteignons ce fameux objectif de 0,5 point de PIB. Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes !

Cet amendement est l’occasion de demander au Gouvernement ce qui l’a conduit à augmenter de 0,1 point la croissance structurelle et, ce faisant, à donner raison à Karine Berger, qui avait tant contesté la prévision faite il y a un an ?

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La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

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D’abord, monsieur le président de la commission, ni le Gouvernement, ni la commission ne remet en cause la notion de déficit nominal. Vous avez raison, il s’agit d’euros sonnants et trébuchants qui déterminent le niveau de la dette, donc les besoins d’emprunts auprès des marchés financiers pour l’année suivante. Mais les notions de solde structurel et de solde conjoncturel permettent de calibrer nos politiques économiques selon que le déficit provient davantage de l’insuffisance de nos efforts sur le plan économique ou des effets déstabilisants de la crise économique et financière sur notre économie. Il ne s’agit de rien d’autre.

Certes, établir une frontière entre les deux notions est difficile. Elle dépend d’un indicateur, celui de la croissance potentielle, utilisé par la Commission européenne. Plus le niveau de croissance potentielle est élevé, moins le déficit structurel est élevé et, partant, plus l’effort structurel est élevé. L’impact d’une modification de la croissance potentielle sur le niveau de déficit structurel est indiqué page 45 du tome I du rapport. À la suite d’une remarque du président du Haut Conseil des finances publiques, nous avons également tenu compte, dans le calcul du déficit structurel, des recettes liées aux cessions de bandes de fréquence.

J’émets un avis défavorable à l’amendement de M. de Courson, qui veut nier les cycles économiques – nous en avons longuement discuté en commission –, et à l’amendement du président de notre commission. Certes, le Haut Conseil des finances publiques a émis une objection sur l’augmentation de la croissance potentielle, mais je rappelle que notre commission l’a votée à ce niveau l’an dernier, de même que notre assemblée en première lecture.

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Quant à l’amendement de M. Cherki, il avait déjà été examiné l’an dernier lors du débat sur la contribution de la France au budget de l’Union européenne. Nous aurions intérêt à en discuter à l’occasion des rencontres entre les parlements nationaux et le Parlement européen sur le six pack et le two pack. Dans l’éventualité de la construction d’un budget « fédéral », nous pourrions convenir d’exclure du calcul du déficit la contribution des différents États au titre du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne. Économiquement, cela a un sens. Sur le fond, j’ai plutôt envie d’être favorable à cet amendement mais dans l’état actuel des discussions, il a peu de chance d’aboutir. Aussi, je demande le retrait de l’amendement. À défaut, avis défavorable.

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La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Les amendements à l’article liminaire sont l’occasion d’aborder beaucoup de sujets. Les positions sont d’ailleurs assez différentes. Que cet article liminaire donne lieu à un débat sur les prévisions macroéconomiques du Gouvernement, cela ne m’étonne guère. Celles-ci sont prudentes : je rappelle que le FMI a publié il y a quelques jours une prévision de croissance de 1,5 %, soit exactement la même que le Gouvernement. Certes, on peut toujours dire qu’elle est trop ou insuffisamment ambitieuse, mais je confirme, droit dans mes bottes, qu’elle nous paraît refléter le consensus actuel sur les prévisions.

Monsieur Cherki, vous proposez de ne pas prendre en compte le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne. Mme la rapporteure générale l’a dit, ce débat est légitime, mais les règles régissant l’Union européenne et les normes comptables ne nous le permettent pas. Si nous adoptions votre amendement, notre budget serait qualifié d’insincère et ne pourrait qu’être annulé ou censuré, y compris dans notre pays. Le Gouvernement y est bien sûr défavorable.

Mme Berger évoque l’accroissement de la divergence entre la croissance potentielle et la croissance constatée ou prévue. Là encore, le choix par le Gouvernement d’une prévision de croissance prudente conduit au maintien d’un écart de production important. Si la croissance est plus forte que prévue, il est possible que celui-ci se réduise plus vite que prévu. Mais, pour l’heure, nous en restons à notre prévision.

Madame Louwagie, vous profitez de ce débat pour soulever à nouveau le problème des dotations aux collectivités territoriales. Vous connaissant, je sais que ce sera le leitmotiv de toutes vos interventions et nous aurons l’occasion d’en reparler. Nous observons aujourd’hui quelques signes plutôt encourageants concernant l’investissement privé, l’investissement des entreprises, ainsi que l’investissement dans la construction immobilière, même si les plus grandes incertitudes subsistent en matière de travaux publics – nous y reviendrons mais, là encore, les prévisions ont été détaillées.

Monsieur Carrez, vous soulevez la sempiternelle question de l’analyse des déficits structurels et nominaux. Nous nous plaçons dans le cadre d’une loi organique votée en 2012. Certes, on peut la contester mais elle a été votée et, connaissant ses principes, nous ne pouvons que présenter l’article liminaire sous cette forme. Le Gouvernement est donc défavorable à l’ensemble de ces amendements.

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Je partage la position du Gouvernement sur l’amendement de M. Cherki. Dans la vie, il faut tenir compte des recettes et des dépenses ! De plus, conformément à nos engagements internationaux, l’Union européenne fait bien partie, jusqu’à preuve du contraire, des administrations publiques au sens large. Nous voterons donc contre l’amendement de M. Cherki.

Quant à l’amendement sympathique du président de notre commission des finances, il ne soulève qu’une partie du voile : pour la première fois, la diminution du déficit structurel de 0,5 point de PIB équivaut à la diminution du déficit effectif, puisque ce dernier passe de 3,8 % à 3,3 % du PIB. Mais, monsieur le secrétaire d’État, les questions que j’ai posées hier soir lors de la discussion générale n’ont toujours pas trouvé de réponses. D’où vient la diminution de 0,5 point du déficit effectif ? Le déficit de l’État est en baisse de 0,1 point et celui des collectivités territoriales est stable. La diminution de 0,4 point provient donc de la Sécurité sociale.

Les organismes de Sécurité sociale verraient leur déficit passer de 0,3 % du PIB à un excédent de 0,1 % du PIB, soit une variation d’un peu plus de 8,8 milliards – presque 9 milliards. C’est impossible, puisque le solde des régimes de base, y compris celui du Fonds de solidarité vieillesse – FSV –, baisse d’1,1 milliard. De plus, vous affirmez que les comptes de l’Association générale des institutions de retraite des cadres – AGIRC – et de l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés – ARRCO – seront excédentaires d’1 milliard. Je ne sais d’où viennent ces prévisions mentionnées dans le rapport économique, social et financier. L’UNEDIC serait en excédent de 0,8 milliard, alors que cet organisme accumule les déficits. Et pour couronner le tout, il nous manque encore près de 4 milliards pour trouver le compte !

Pourriez-vous nous expliquer comment le déficit des administrations de Sécurité sociale – les ASSO, selon le terme utilisé en comptabilité nationale – peut passer d’un déficit de 0,3 % de PIB à un excédent de 0,1 % de PIB, c’est-à-dire de plus de 2 milliards d’euros ? Ce n’est pas expliqué dans le rapport économique, social et financier. Il manque au moins 4 à 5 milliards. Sauf si vous nous donniez des explications extrêmement précises, nous voterons contre l’article liminaire, car les prévisions concernant les administrations de Sécurité sociale semblent insincères.

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Je sais que nous n’en sommes qu’à l’article liminaire, mais je tiens à rappeler que la durée des interventions est de deux minutes.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

S’agissant des questions posées par M. de Courson hier soir et réitérées ce matin, le Gouvernement n’affirme pas que les comptes de l’AGIRC et de l’ARRCO seront en excédent d’1 milliard, ni que l’UNEDIC serait en excédent de 800 millions, mais tout simplement que leur solde s’améliorerait d’1 milliard pour ce qui concerne les régimes de retraites complémentaires et de 800 millions pour l’UNEDIC.

De plus, on ne peut pas se limiter au solde des branches de la Sécurité sociale et du FSV ; il faut prendre en compte l’ensemble de la sphère sociale. C’est ce que je viens de faire en rappelant les évolutions prévues par le Gouvernement concernant les régimes de l’AGIRC et de l’ARRCO et l’UNEDIC. Mais il faudrait aussi tenir compte du solde de la Caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES.

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Je découvre l’existence d’une sorte de péché laïque qui fait trembler la France sur ses bases : le risque d’être pris en défaut d’insincérité par nos interlocuteurs de Bruxelles. Face à ce risque, il conviendrait de renoncer temporairement à mener un combat politique juste consistant à retirer du calcul du déficit la contribution de la France au titre du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne pour éventuellement augmenter le budget de l’Union européenne tout en adoptant une méthode de calcul du déficit plus sincère par rapport à la réalité macroéconomique – et non par rapport au dialogue administratif et technocratique avec Bruxelles.

J’étais enclin à maintenir mon amendement mais les propos de Mme la rapporteure générale me conduisent à le retirer car elle a annoncé y être favorable. C’est une avancée importante : il y a dans l’assemblée des esprits encore libres, qui ne renoncent pas à mener ce combat politique. Elle a indiqué qu’un dialogue devait être engagé avec les autres Parlements nationaux et le Parlement européen pour faire progresser cette idée, qu’elle trouve juste. Je m’en réjouis et j’espère que le soutien de Mme la rapporteure générale convaincra d’autres collègues parlementaires encore réticents à franchir ce pas pour mener ce combat juste.

L’amendement no 479 est retiré.

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Nous avons ce débat à propos de la contribution au budget de l’Europe, mais nous l’aurons également lorsque nous aborderons la contribution de la France au MES, le mécanisme européen de stabilité, ou encore les dépenses militaires engagées par la France sur les théâtres d’opérations extérieures. Je préférerais pour ma part que nous ayons un débat frontal concernant les 3 %, au lieu de tenter d’effacer ou de réduire artificiellement les déficits.

La contribution au budget de l’Europe est-elle une dépense, oui ou non ? Oui, et nous empruntons pour cela ; en ce qui concerne le budget de la défense, nos partenaires européens apporteront-ils leur contribution pour atténuer nos dépenses ? Non ! Il s’agit donc bien d’une dépense et nous avons emprunté en conséquence ; le MES a-t-il ou non vocation à revenir dans l’escarcelle du budget français ? Rien ne le prouve aujourd’hui. Ces dépenses existent donc bel et bien et ne peuvent être ni atténuées ni rattrapées. Nous ne pouvons donc pas réduire le déficit sur ces bases. J’aimerais que nous ayons un débat tranché et direct sur les 3 % car biaiser comme vous le faites n’est pas la bonne approche.

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Je soutiens l’amendement, très judicieux et empreint de bon sens, du président de la commission des finances. En effet, si le Gouvernement veut être lisible et cohérent, il faut, ainsi que l’a rappelé le Haut conseil des finances publiques, comme d’ailleurs Didier Migaud, que le budget soit en cohérence avec la loi de programmation des finances publiques qui a été votée.

Par ailleurs, je retiens dans le commentaire intéressant de Mme la rapporteure générale sur les objectifs de déficit nominal et structurel que les hypothèses retenues pour la construction de la trajectoire qui nous est proposée dans ce projet de loi de finances prennent en compte une élasticité des recettes légèrement à la hausse. Cette prise de risque correspond au 0,1 point que vous demande de revoir le président de la commission des finances.

Il y a donc bien une cohérence et cette démarche n’est pas en contradiction avec le rapport de Mme la rapporteure générale ni avec les propos du président de la commission des finances.

L’amendement no 253 n’est pas adopté.

L’amendement no 127 n’est pas adopté.

L’article liminaire est adopté.

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J’appelle maintenant les articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2016.

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La parole est à M. Yannick Favennec, premier orateur inscrit sur l’article 1er.

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D’une manière générale, ce projet de budget ne contribuera pas au redressement de notre pays : en effet, il prévoit une nouvelle hausse d’impôt pour nos concitoyens, il asphyxie les collectivités locales et ne respecte pas les engagements du Gouvernement envers les entreprises.

Le projet de loi de finances pour 2016 continue de faire peser l’essentiel de l’effort sur les classes moyennes, qui voient s’envoler une nouvelle fois la promesse d’une pause fiscale.

En imposant une baisse sans précédent des dotations aux collectivités locales, vous ne donnez pas d’autre choix aux élus, monsieur le secrétaire d’État, que celui d’augmenter les impôts locaux, avec pour conséquences inéluctables une baisse du pouvoir d’achat des Françaises et des Français, et un frein aux investissements de nos collectivités, ce qui a de graves conséquences sur l’emploi local.

Enfin, ce sont les entreprises qui feront les frais de l’absence de cap du Gouvernement et de ses promesses démagogiques, dont aucune n’est financée. Les entreprises ont besoin de stabilité et de pérennité, s’agissant des mesures prises dans le cadre des lois de finances.

En parallèle, les économies promises ne sont toujours pas au rendez-vous car vous ne mettez pas en place les réformes structurelles nécessaires. Au contraire, vous continuez de ne proposer que des mesures de court terme qui fragilisent l’ensemble des acteurs de notre économie, empêchant le retour de la croissance et par conséquent l’inversion de la courbe du chômage.

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Ce qui est intéressant, mes chers collègues, s’agissant de cet article, ce n’est pas ce qu’il contient, c’est son exposé des motifs. J’ai d’ailleurs déposé un amendement, que nous examinerons tout à l’heure, qui nous permettra de poser le problème de l’évolution des dépenses fiscales.

Pourquoi existe-t-il toujours une telle différence entre les discours tenus par les différents courants politiques et ce qu’ils font dès qu’ils sont au pouvoir ? Pourquoi cette fatalité ?

Je vous rappelle, s’agissant de cette majorité, que le programme du Parti socialiste avait pour ambition d’annuler 50 milliards d’euros de niches fiscales – les jugeant sans efficacité économique et injustes socialement. Je rappelle qu’à l’époque, le montant des niches fiscales atteignait 70 à 72 milliards d’euros.

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Quant au candidat François Hollande, toujours plus modéré que son parti, il était revenu sur ce chiffre en promettant de réduire les niches fiscales jusqu’à 29 milliards d’euros.

Où en sommes-nous ? Les niches fiscales, qui représentaient 70,9 milliards d’euros en 2012, atteignent 84,4 millions en 2015 et 83,4 milliards en 2016.

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Pourquoi, mes chers collègues, ne sommes-nous pas capables, malgré les promesses de l’actuelle majorité – mais j’aurais pu faire le même commentaire lorsque l’actuelle opposition était au pouvoir – de réduire les niches fiscales ?

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Parce que dans chaque niche, il y a un chien !

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Par manque d’autorité ? Parce que, en effet, dans chaque niche, comme disait un président de la commission des finances, il y a des chiens, et des chiens qui aboient ? Pourquoi une telle faiblesse démocratique ? C’est l’un des vrais problèmes. La dépense fiscale est une dépense : si nous étions raisonnables, nous devrions mettre dans le périmètre, pour mesurer l’évolution des dépenses publiques, l’évolution des dépenses budgétaires. Il est très facile d’instaurer des crédits d’impôt comme le CICE pour faire croire que la dépense budgétaire baisse, alors qu’en fait elle augmente, mais, en termes de solde budgétaire, vous ne pouvez pas tromper votre monde…

Il serait intéressant de savoir quelle est la position du Gouvernement sur la réduction des niches fiscales.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

J’aurais aimé répondre à M. Favennec, mais je crois qu’il est déjà parti – pourtant, il était à peine arrivé.

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C’est un intermittent de l’Assemblée nationale !

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je voulais lui demander où il a trouvé des hausses d’impôt dans le projet de loi de finances dont nous discutons aujourd’hui. Il vient, il fait une grande tirade sur les hausses d’impôt contenues dans le budget, et il repart avant qu’on lui demande où il les a trouvées ! Il aurait pu, s’il était resté, constater que ce projet de budget prévoit 2 milliards de baisses d’impôt !

Quant à la parole du Gouvernement à propos des entreprises, il aurait peut-être pu se souvenir que, depuis le 1er janvier de cette année, elles bénéficient d’un allégement de cotisations sociales à hauteur de 4,5 milliards d’euros, dont personne ne parle ! On parle du décalage de trois mois de la mesure qui entrera en vigueur l’année prochaine, mais tout le monde oublie que les entreprises bénéficient d’un allégement des charges pour les salaires inférieurs à 1,6 fois le SMIC et d’une baisse de 1,8 point des cotisations sociales. Vous transmettrez cela à M. Favennec, à moins qu’il ne revienne, dans les prochaines heures ou les prochains jours.

Monsieur de Courson, je vous remercie car vous me rendez service. Quand je vois la somme d’amendements émanant de l’opposition et qui proposent de nouvelles dépenses fiscales…Je vous rappellerai à chaque amendement, monsieur de Courson, ce que vous venez de dire. Par exemple, à l’amendement no 18 , vous nous proposez une dépense fiscale de 1,4 milliard !

Rires sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Monsieur de Courson, je vous remercie. Vous savez que cela vient du CICE, qui peut d’ores et déjà être utilisé, dès les acomptes de l’impôt sur les sociétés, et vous le savez parfaitement. Je n’ai pris que cet exemple, monsieur de Courson, mais je sais qu’il en existe d’autres.

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Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 171 et 254 rectifié .

La parole est à M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement no 171 .

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Monsieur le secrétaire d’État, j’ai essayé de ne proposer aucun amendement entraînant une dépense fiscale – un seul, en réalité, et portant sur une très petite dépense. C’est un exercice très difficile et par conséquent nous devons, les uns et les autres, essayer d’être plus rigoureux.

Je prendrai deux exemples.

Jusqu’en 2004-2005, nous financions le prêt à taux zéro, et auparavant les prêts consentis aux primo-accédants à la propriété, par une subvention qui, chaque année, coûtait environ 700 millions d’euros. À partir du moment où elle était consommée, fin octobre, nous attendions l’année suivante pour accorder des prêts. Et puis, un ministre de l’époque a eu la bonne idée de transformer cette subvention en crédit d’impôt sur l’impôt sur les sociétés des banques. Résultat : en fin d’année, jusqu’au 31 décembre, il est possible d’obtenir un prêt à taux zéro, mais surtout nous sommes passés de 700 millions à 1,1 milliard d’euros !

Monsieur le secrétaire d’État, les dépenses fiscales reflètent l’impuissance du contrôle budgétaire et la mort des efforts en matière de solde budgétaire.

Mon deuxième exemple est le CITE, le crédit d’impôt pour la transition énergétique, et avant lui les dispositions de l’article 200 quater du code général des impôts. En 2007, le même dispositif de crédit d’impôt pour le logement coûtait 900 millions d’euros, mais il était tellement intéressant, eu égard à l’environnement et aux économies d’énergie, qu’il fallait l’élargir. Nous avons, deux à trois fois par an, convoqué le ministre de l’environnement de l’époque – celui là même qui avait émis l’idée de basculer la subvention budgétaire du logement en crédit d’impôt – pour attirer son attention et lui demander s’il savait où nous allions, mais rien n’y a fait. En 2009, si ma mémoire est bonne, nous en étions à 2,6 milliards d’euros.

Sachant que le CITE coûtera 1,4 milliard en 2016 – et à mon avis ce chiffre va encore déraper –, je vous fais part de mon inquiétude.

Enfin, en commission des finances, nous avons étudié plusieurs dizaines de ces amendements, émanant de tous les groupes, monsieur le secrétaire d’État, dont nous avons, madame la rapporteure générale et moi-même, essayé de démontrer l’inefficacité.

Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen

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S’il vous plaît, j’aimerais que nous dépassions le cadre des désaccords entre majorité et opposition. L’autre problème vient de ce que les députés appartenant à l’opposition, dans la première partie du budget, ne peuvent présenter que des amendements entraînant des baisses d’impôt, gagés par l’augmentation des droits sur le tabac.

Cet amendement est le reflet d’une prise de conscience. J’en ai exclu le CICE, ce qui est plus logique, mais vous devez vous montrer très vigilant quant à la dépense fiscale, et cet amendement vise à vous y aider.

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La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 254 rectifié .

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J’attends toujours votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Les amendements que j’ai cosignés – et que d’ailleurs je retirerai, je vous le dis d’emblée – ont pour but de vous rappeler toutes les erreurs que vous avez commises en matière d’heures supplémentaires, de prestations familiales, etc. Le but n’est pas du tout que ces amendements soient votés – car jusqu’à preuve du contraire, j’ai toujours été quelqu’un de responsable.

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Et alors ? Nous n’avons pas que cela à faire !

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C’est pour vous rappeler vos erreurs… Il faut toujours faire de la pédagogie et la répétition est l’âme de la pédagogie.

J’en viens à l’amendement que le groupe UDI a déposé. Vous ne voulez pas répondre à la question sur le fond, qui d’ailleurs ne s’adresse pas uniquement à vous mais aussi à vos prédécesseurs et à vos successeurs. Pourquoi cette fatalité de la hausse continue des dépenses fiscales ?

Vous auriez suivi la thèse du groupe UDI sur le CICE, à laquelle d’ailleurs le Président de la République vient de se rallier, vous auriez prévu des baisses de charges et non pas des crédits d’impôt, qui polluent et font croire qu’on dépense moins que ce que l’on dépense en réalité…

Ce qui m’intéresserait, monsieur le secrétaire d’État, et je vous le dis sans aucun esprit polémique, c’est de savoir quelle est la position du Gouvernement sur ces dépenses fiscales. Quelle est votre stratégie ? Est-ce que vous baissez les bras parce que vous avez une majorité qui en veut toujours plus et que, de temps en temps, vous devez lui céder, comme l’ont fait une grande partie de vos prédécesseurs, ou avez-vous une politique ? Ce n’est pas plus compliqué que cela.

Avec Gilles Carrez, nous avons déposé le même amendement pour vous aider, contrairement à ce que vous pouvez croire. Vous auriez un plafond de dépenses fiscales, vous pourriez dire à vos amis : « D’accord, mais supprimez-moi à due concurrence d’autres dépenses fiscales ».

L’amendement no 254 rectifié est retiré.

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Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 171  ?

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Avis défavorable.

D’une part, l’article 19 de la loi de programmation des finances publiques précise que les dépenses fiscales sont limitées à 81,8 milliards d’euros en 2016, or elles apparaissent dans ce projet de budget à hauteur de 83,4 milliards. La différence de 1,6 milliard vient du CICE, qui fait l’objet d’une augmentation de 1,8 milliard d’euros. C’est cette évolution du CICE qui explique que ce plafond indicatif dans la loi de finances pluriannuelle n’est pas respecté.

Mais puisque nous parlons des dépenses fiscales, je rappelle que la loi de finances de 2006 en recensait 400, et celle de 2011, 500. Cette augmentation d’une centaine de dépenses fiscales en cinq ans n’est pas le fait de la gauche.

D’autre part, pour réfléchir au bilan global du budget, j’ai pointé avec les administrateurs, dont je salue le travail, l’ensemble des amendements gagés sur le tabac, qu’ont déposés tous les groupes.

Certains amendements tendent à réduire la fiscalité, donc à diminuer les rentrées dans les caisses de l’État, les autres à augmenter les dépenses fiscales, ce qui se traduit toujours par un manque à gagner pour l’État.

La palme revient au groupe Les Républicains, dont les amendements se chiffrent à 22,7 milliards d’euros.

Sourires

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Vient ensuite le groupe SRC, avec un montant de 15 milliards. Le groupe UDI arrive en troisième position – eh oui, monsieur de Courson – avec une dépense évaluée à 10 milliards.

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En termes de moyenne par député, votre groupe arrive en tête, monsieur de Courson !

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Le total des amendements du groupe écologiste représente 4,7 milliards. Le groupe GDR est le plus économe, avec 2 milliards d’euros. Il faut dire qu’il propose de nombreux amendements prévoyant des rentrées fiscales, qui n’ont donc pas besoin d’être gagés.

Chacun sachant poser une règle de trois, je vous laisse le soin de faire le calcul. Je vous indiquerai peut-être à la fin de la séance à quel niveau serait le prix du paquet de cigarettes si tous ces amendements étaient votés.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Avis défavorable. J’ajoute, parce que je ne veux pas donner le sentiment que le Gouvernement n’aurait pas de cap ni de stratégie en matière de crédits d’impôt, que nous entendons maîtriser ceux-ci.

Nous l’avons montré en fixant leur plafond dans la loi de programmation des finances publiques. Sur un dépassement de 2,6 milliards, 2,5 milliards s’expliquent par l’excellente appropriation du CICE par les entreprises. Restent 100 millions. C’est trop, certes, mais vous admettrez que cette somme représente l’épaisseur du trait.

L’amendement no 171 n’est pas adopté.

L’article 1er est adopté.

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Nous en venons à l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 2. Je rappelle que l’article 2 est réservé.

La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement no 745 rectifié .

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J’avais déjà déposé cet amendement l’an dernier, au nom de la délégation aux droits des femmes. Je le présente de nouveau avec l’appui de plusieurs collègues.

Nous proposons d’autoriser les conjoints à établir une déclaration fiscale séparée.

Tout le monde ne le sait pas, mais, en France, un couple marié ou pacsé est tenu de déclarer ses impôts en commun, au nom de ce qu’on appelle le quotient conjugal.

Tous les revenus du couple sont additionnés et divisés par deux. Puis, compte tenu de la tranche à laquelle ils appartiennent, on applique un barème pour calculer le montant de l’impôt.

Nous souhaitons que chacun puisse choisir de déclarer ses revenus soit selon le système du quotient conjugal soit de manière séparée.

La mesure favoriserait l’égalité entre hommes et femmes. En général, ceux-là gagnant plus que celles-ci, le régime actuel défavorise les femmes qui souhaiteraient retravailler ou passer d’un temps partiel à un temps plein. En effet, les couples hésitent devant un changement de situation qui les ferait passer à la tranche d’imposition supérieure, et décident que la femme ne retravaillera pas ou ne travaillera pas davantage.

Ensuite, je considère que ce n’est pas à l’administration fiscale de décider que des conjoints doivent déclarer leurs revenus ensemble ou séparément.

En troisième lieu, il faut prendre en compte le fait que les couples ont changé. Les conjoints peuvent être mariés, pacsés ou non. Il existe des familles recomposées. Les divorces sont plus nombreux. L’individualisation de l’impôt permettrait à chacun d’être un citoyen devant l’administration fiscale.

Enfin, si nous voulons passer au système du prélèvement à la source, la mesure permettra de le faire plus facilement et plus simplement.

Cela dit, je le répète, le principal argument en faveur de l’amendement est qu’il favorise l’égalité entre hommes et femmes, en ce qu’il favorise le travail des femmes.

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La commission a émis un avis favorable, bien qu’elle n’ignore pas le coût budgétaire de la mesure.

Outre tous les arguments développés par Mme Coutelle, je rappelle que la conjugalisation, que seuls quatre pays européens ont adoptée, prend en compte le revenu moyen du couple, non celui de chaque conjoint.

Ce système est favorable à 60 % des ménages. Il est neutre pour 20 % d’entre eux, et défavorable aux 20 % restant. Pour ces couples, le remplacement de l’imposition conjugalisée par la double imposition séparée se traduirait en moyenne – le chiffre figure dans un des rapports – par un gain de 370 euros.

L’amendement propose en outre que les deux noms figurent sur l’avis d’imposition, au lieu de la mention « M. ou Mme », qui a cours actuellement.

En commission, j’ai signalé plusieurs fois qu’il fallait observer le coût de la mesure. Dès lors qu’il s’agit d’instituer un droit d’option, chaque couple décidant s’il veut bénéficier ou non de la conjugalisation, il faut supposer que les acteurs économiques choisiraient l’option qui leur est la plus favorable, ce qui se traduirait par une perte de 500 à 800 millions pour les finances de l’État.

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C’est un des amendements auxquels j’ai fait allusion et qui pourraient faire augmenter le prix de la cigarette.

Quoi qu’il en soit, notre société évolue, et la fiscalité reflète toujours ses évolutions. Je m’en tiens donc à l’avis favorable de la commission.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Avis défavorable. Le Gouvernement chiffre le coût de l’amendement à 1 milliard d’euros, car il faut prendre en compte, outre la diminution du montant de l’impôt pour les contribuables, la multiplication possible des crédits d’impôt. Le nombre de foyers fiscaux bénéficiant de crédits d’impôt pourrait doubler.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Comment, non ? Je suis désolé, madame Coutelle. Si un foyer fiscal a droit à un crédit d’impôt de 100, deux foyers fiscaux auront droit à deux fois 100. On doublera le montant du plafond, même si celui-ci n’est pas toujours atteint. Je persiste et je signe : le Gouvernement évalue le coût de la mesure à 1 milliard.

J’ajoute que l’amendement présente, pour utiliser un euphémisme, le risque d’une certaine fragilité constitutionnelle. Personne – sauf M. de Courson – ne peut préjuger de la solidité constitutionnelle d’un amendement, mais on peut estimer que celui-ci contrevient au principe de l’égalité des contribuables devant l’impôt.

Je relève d’ailleurs qu’en présentant son amendement, Mme Coutelle a commis une confusion. Le fait que le calcul de l’impôt s’effectue par tranche n’empêche pas qu’il progresse de manière continue, sans qu’on constate de ressaut. Gagner plus ne fait jamais payer brutalement plus d’impôt.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Seule la part du revenu qui dépend de la nouvelle tranche sera plus taxée. Pardon d’insister, madame la députée. Mon but n’est pas de personnaliser le débat, mais de nombreux Français commettent cette confusion.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Le principe des tranches d’imposition est généralement très mal compris par les Français. Beaucoup d’entre eux s’imaginent que, quand ils vont passer d’une tranche à l’autre, l’ensemble de leur revenu sera brutalement taxé au nouveau barème atteint, par exemple que le montant total de leur revenu sera imposé à 30 % au lieu de 14 %. C’est faux. Pour utiliser un terme mathématique, la progression qui s’applique est continue.

Pour ces raisons et quelques autres, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

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À mon sens, une modification aussi profonde du calcul de l’impôt sur le revenu ne doit pas être introduite par amendement. Il faut une étude d’impact sérieuse, dont nous ne disposons pas.

La rapporteure générale avance le chiffre de 500 à 800 millions, et le secrétaire d’État celui d’1 milliard. Le Haut conseil de la famille évalue le coût du quotient conjugal à 5,5 milliards. Il faut prendre en compte tous les éléments du problème.

Mme Coutelle considère que ce n’est pas à l’administration fiscale de choisir le régime qui s’applique aux conjoints. Je rappelle cependant que, pour l’ISF, les personnes qui vivent en concubinage doivent établir une déclaration commune. Il serait absurde qu’il y ait deux poids, deux mesures, et que les personnes mariées puissent effectuer des déclarations séparées pour l’imposition sur le revenu, alors que, pour un autre impôt, les couples vivant en concubinage sont tenus d’établir une déclaration unique.

Notre collègue considère par ailleurs que l’amendement faciliterait le passage vers le prélèvement à la source, auquel nous sommes opposés.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains pense qu’il faut absolument maintenir ce système de conjugalisation. Il est contre cet amendement.

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Le groupe UDI est fondamentalement hostile à l’amendement.

Il faut aller au bout de votre démarche, madame Coutelle. Vous soutenez le droit d’option à l’allemande. En Allemagne, en effet, les couples optent pour la déclaration commune ou séparée, sachant qu’en Grande-Bretagne, la déclaration est séparée et qu’en France, elle est unique seulement pour les couples mariés et pacsés.

Reste à savoir, ma chère collègue, comment vous partagez les parts. Avez-vous regardé ce que représente l’optimisation fiscale ? Les dépenses fiscales sur l’impôt sur le revenu se montent à une trentaine de milliards, puisque cet impôt rapporterait un peu plus de 100 milliards s’il n’y avait pas de dépenses fiscales. Or une bonne partie n’est ni conjugalisée ni familialisée. Il existe tous les cas de figure.

À quel résultat parvient-on ? Si j’étais cruel, je dirais que c’est un amendement pour les riches, qui vont faire de l’optimisation fiscale. J’ajoute qu’il faut aller jusqu’au bout de votre démarche : si vous êtes favorable à cette approche, il faut alors la décliner pour toutes les prestations familiales – mais aussi non familiales, d’ailleurs – sous condition de ressources. Comment peut-on se livrer à la même démarche à l’égard des prestations sous condition de ressource, pour lesquelles on tient compte de l’ensemble des revenus du ménage – ce qui me paraît d’ailleurs logique ? On va avoir un impôt sur le revenu permettant des déclarations séparées sans tenir compte de la somme des revenus découlant des prestations en nature ?

Enfin, avez-vous réfléchi au problème de la CSG, qui concerne également les revenus du patrimoine ? Que va-t-il se passer ? Si votre épouse…

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…ne travaille pas, vous allez établir une déclaration séparée et, grâce à cela, elle va se trouver en dessous des seuils de perception. Il existe de nombreux effets à prendre en compte. Quand le secrétaire d’État dit que cela entraînera une perte d’1 milliard, il ne parlait que des effets directs, mais il ne vous a pas dit combien ce type de montages nous feraient perdre concernant la CSG. On serait en effet conduit à maintenir la CSG en l’état, avec un impôt sur le revenu pour lequel une partie des familles optimiseront en établissant une déclaration séparée. On ne peut donc qu’être fondamentalement hostile à cela.

De surcroît, derrière cette idée, il y la remise en cause d’une politique familiale qui a fait l’objet d’un consensus pendant plus de cinquante ans dans toutes les familles politiques et qui a assuré sa stabilité et son succès.

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Je voudrais remercier Catherine Coutelle de poser ce débat car, comme pour toutes les réformes fiscales de fond – celle-ci est d’ailleurs relativement marginale, car elle ne fait qu’ouvrir une option –, elle donne l’occasion de voir tout ce qu’il faudrait modifier dans notre système d’imposition hypercompliqué pour parvenir enfin à des choses simples. Pour décrire la situation à gros traits, l’impôt sur le revenu, dans la plupart des pays, est individualisé : on y tient compte du couple et des enfants par d’autres mécanismes. Un certain nombre de pays, dont nous faisons partie – c’est vrai aussi de l’Allemagne et des États-Unis – se caractérisent par une imposition conjugalisée. Ces pays-là offrent l’option de l’individualisation de l’impôt. Je pense que le fait de se poser cette question a un sens. En effet, ce n’est pas principalement une question d’optimisation fiscale : au sein d’un couple, on peut souhaiter faire l’objet d’une imposition individuelle. Il n’y a pas de raison de l’empêcher. En revanche, ce qu’il faut faire, c’est corriger tous les dispositifs qui compliquent les choses à partir du moment où on se pose cette question. Il s’agit donc d’un vrai débat.

Mme Coutelle a raison de parler du prélèvement à la source. S’il est mal conçu, il peut conduire à des résultats bizarres, à savoir l’application d’un taux d’imposition trop élevé à l’un des deux conjoints. Mais, si on le fait bien, cela peut corriger en partie une des inégalités engendrées par l’imposition conjointe. Quand on a mis en place l’imposition conjointe, il ne s’agissait pas de favoriser des couples au sein desquels coexistaient des revenus très différents, bien que cela soit le cas dans les faits ; en effet, si chaque membre du couple a le même revenu, il n’y a aucune différence entre l’imposition individuelle et l’imposition conjointe.

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Quand on met en oeuvre le prélèvement à la source, on est obligé de se poser la question de savoir sur quoi va porter le prélèvement affectant chaque conjoint. La proposition que nous faisons avec Jean-Marc Ayrault – c’est un débat que l’on aura à propos du prélèvement à la source –, c’est de partir du revenu de chacun, de voir le taux qui serait dû si chaque membre du couple était célibataire. Je prends l’exemple d’un couple ayant deux enfants, dont les membres, célibataires, seraient imposés, pour l’un, au taux de 4 % et, pour l’autre, au taux de 12 %, ce qui représente une imposition relativement élevée. Grâce à l’imposition conjointe, leur impôt deviendrait deux fois plus faible. Dans le cadre d’un prélèvement à la source bien fait, on pourrait réduire chacun des taux d’imposition – le taux de 4 % passerait à 2 % et le taux de 12 % passerait à 6 %, ce qui permettrait de respecter l’équilibre des rémunérations de chacun des conjoints. On répondrait donc en partie à l’inégalité soulevée, mais en tenant compte de la conjugalisation. De fait, je pense que de nombreuses améliorations de notre impôt sont possibles, pour peu que l’on ait le courage de se poser la question.

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Je voudrais à mon tour soutenir cet amendement et rejoindre mon collègue Muet pour dire que le sujet n’est pas l’optimisation fiscale mais la justice fiscale. Or, la justice fiscale veut dire deux choses.

Premièrement – on y travaillera lors de l’examen de l’article 2 et lorsqu’on évoquera la question de la CSG progressive –, chacun doit payer en fonction de ses capacités productives.

Deuxièmement, le statut matrimonial ne doit pas avoir d’impact ou, dans l’optique de la politique familiale que devraient défendre nos collègues de la droite, devrait avoir un impact positif. De fait, un couple marié peut connaître une situation moins favorable que celle dans laquelle il se trouverait si ses membres n’étaient pas mariés : il s’agit donc de rétablir de la justice fiscale. Comme vous l’avez évoqué, monsieur le secrétaire d’État, on est arrivé à cette situation non pas par application des règles générales de l’impôt sur le revenu mais par applications des règles liées aux niches fiscales ; en effet, celles-ci ne sont pas doublées pour un couple marié ou pacsé.

Il est donc très important que, dès aujourd’hui, on puisse avancer sur les premiers aspects de cette question avant d’aborder le reste, si j’ai bien compris, lors de l’examen de la deuxième partie. C’est un sujet fondamental car, ce dont on parle – en tout cas, pour nous, à gauche –, c’est de réhabiliter le lien entre les Français et l’impôt, c’est-à-dire la capacité d’agir collectivement.

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Je voudrais rebondir sur les propos de M. de Courson, qui ne sont pas tout à fait exacts. En effet, vous estimez qu’au fond, cette mesure reviendrait à accorder uniquement un droit d’option à des couples disposant de revenus élevés. Cela est faux, j’y insiste, monsieur de Courson. J’ai reçu des personnes à ce sujet à ma permanence et, depuis, j’ai regardé les chiffres. Je prendrai le cas de personnes ne disposant pas de revenus très élevés, qui se marient, alors qu’elles bénéficiaient jusque-là, séparément, de la décote. La décote ayant été conjugalisée, ils perdent effectivement un peu de cet avantage, mais moins qu’auparavant. Cette mesure aurait donc un effet, monsieur de Courson ; ce que vous avez dit est inexact.

Cela étant, cet amendement, que notre commission n’a pas étudié dans le détail, a un coût budgétaire très important. Je souhaiterais que le Gouvernement prenne un engagement en la matière. On parle en effet de 800 millions d’euros, soit d’une somme qui aurait un impact important sur notre budget. Il faut donc que l’on puisse regarder les choses dans le détail. Compte tenu de l’évolution de notre société, cette question mérite d’être posée et analysée. Je me tiens à un principe depuis le début de l’examen du projet de loi de finances : s’agissant des impôts, il faut voter uniquement sur la base de cas et de simulations très précis, pour éviter toute mauvaise surprise.

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La commission a certes accepté cet amendement sur le principe, mais le voter en l’absence de simulations me paraît dangereux. Je répète qu’il a été accepté sur le principe, mais s’agissant de sa mise en oeuvre, j’émets plutôt un avis défavorable pour que l’on ait le temps de disposer de simulations précises afin de défendre l’idée de donner une option aux couples entre l’imposition séparée et l’imposition commune.

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Comme mes collègues, je remercie Catherine Coutelle d’avoir déposé cet amendement, car il pose un vrai débat, sur lequel il nous faut évidemment avancer. Je le dis pour la suite de notre discussion : un amendement d’une telle importance aurait dû pouvoir être débattu de manière beaucoup plus approfondie en commission des finances et n’aurait pas dû être examiné uniquement lors de la réunion prévue par l’article 88 du règlement, car nous savons dans quelles conditions les amendements y sont examinés.

En réalité, je ne pense pas que ce soit un amendement anodin dans le cadre de la réforme de l’impôt sur le revenu qui, nous en sommes d’accord, est absolument nécessaire. Nous en débattrons d’ailleurs dans la deuxième partie du projet de loi, sur des perspectives d’avenir. J’ai bien entendu ce que disait Pierre-Alain Muet, à savoir qu’il ne s’agit que d’un droit d’option, mais je ne crois pas que cet argument lève le caractère fondamental de cette réforme. À titre personnel, je pense qu’il faudra la mener à bien, mais je ne suis pas persuadé qu’il faille la rendre facultative. En effet, si, en tout état de cause, cet amendement a un coût, c’est parce que les choix individuels seront – je l’espère et je le suppose – marqués par la rationalité : l’imposition séparée sera choisie par celles et ceux qui y gagneront. On dispose d’un certain nombre d’éléments d’information sur ce point, mais on ne les a pas tous, et je ne crois pas que l’on en maîtrise les conséquences.

Enfin, comme l’a rappelé hier le Président de la République, sur cette question extrêmement sensible de l’impôt, nous devons aujourd’hui être cohérents et pratiquer des baisses d’impôts dont nous connaissons bien les bénéficiaires. Si nous avions, monsieur le secrétaire d’État – j’en ai parlé dans mon intervention d’hier –, quelques marges de manoeuvre, nous aurions plutôt intérêt, à l’égard de publics extrêmement ciblés, à dépenser 300 ou 400 millions d’euros, plutôt que de déséquilibrer le budget d’1 milliard de manière hasardeuse. Comme nous y ont invités le secrétaire d’État et la rapporteure générale, il faut poursuivre le débat ; on l’aura en deuxième partie sur une réforme plus importante. À ce stade, j’invite mes collègues à ne pas voter cet amendement.

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Je me vois contrainte d’intervenir car j’entends énormément de choses surprenantes. Je voudrais simplement rappeler à Mme Coutelle que nul n’est obligé de contracter un PACS. On peut très bien conserver des déclarations séparées si on ne se pacse pas. C’est le premier aspect de la question.

M. de Courson évoquait le manque à gagner auquel on devrait s’attendre en matière d’impôt sur le revenu, et les conséquences prévisibles sur la CSG et sur les revenus de distribution. Je voudrais dire à Mme Coutelle que, s’agissant des personnes qui choisissent de se pacser, en dehors de l’aspect fiscal, un peu marginal, doit être prise en compte la question de la pension de réversion. De fait, on sait bien que le PACS ou le mariage va conférer des droits en matière de réversion, car il s’agit de l’officialisation d’un couple. On ne peut donc pas, d’un côté, souhaiter une fiscalité allégée et arrangeante, accommodante, grâce à des variables d’ajustement et, parallèlement, se dire que la pension de réversion commence à être comptabilisée dès ce moment-là. Je crois qu’il y a là un non-sens et une injustice.

Il faut vous rappeler les principes de l’impôt en France. Vous pouvez aujourd’hui changer les paramètres. Vous aviez rêvé d’une grande réforme fiscale : on n’en est pas là. Vous dissimulez quelque peu votre volonté de mettre en place, à l’avenir, un prélèvement à la source, mais quelles sont les réalités ? On connaît effectivement, comme vous semblez le découvrir, la conjugalisation de l’impôt, la familialisation de l’impôt et la progressivité de l’impôt. Tels sont les grands principes de l’impôt sur le revenu. On peut faire abstraction de l’un ou l’autre de ces principes et instituer des variables d’ajustement, ou bien on peut s’accommoder de cette réalité. Il existe là une forme d’injustice.

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Madame la rapporteure, je maintiens mes propos…

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…car quels sont ceux qui bénéficieront le plus de cette réforme ? Ceux qui sont le plus à même de faire de l’optimisation fiscale, et ce ne sont pas là les revenus modestes.

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Je rappelle que, de toute façon, 53 % des foyers ne paient pas l’impôt sur le revenu. L’optimisation sera donc d’autant plus forte que les revenus seront élevés.

Deuxièmement, madame la rapporteure générale, vous n’échapperez pas, si vous votez en faveur de cette réforme, à la création du droit d’option pour l’ISF.

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L’effet sera alors massif. De fait, vous n’allez pas maintenir une déclaration commune pour l’ISF et le droit d’option s’agissant de l’impôt sur le revenu.

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Puis on discutera des prestations sous condition de ressources. Je me tue à le dire : il faut arrêter de bricoler impôt par impôt, il faut avoir une conception d’ensemble, sous peine d’être en complète contradiction. En matière d’ISF, les concubins doivent faire une déclaration commune. Je vais vous faire rire, mes chers collègues : savez-vous combien font cette déclaration ? Pas plus de quelques-uns ! Il y a là une fraude massive mais, cette fois, dans l’autre sens. Il faut donc regarder tout cela avant de se lancer dans une telle réforme.

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Afin de bénéficier de tous les avantages, la bonne stratégie serait donc de rester séparés très longtemps et de se marier le plus tard possible…

Sourires.

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On peut aussi se marier pour des raisons autres que fiscales !

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Plus sérieusement, la logique, le bon sens, l’équité voudraient qu’on aligne le régime des couples mariés sur celui des couples non mariés. Aucun des arguments de Charles de Courson ne permet de justifier que les couples non mariés bénéficient de toutes les possibilités d’optimisation fiscale dont il a essayé de montrer les mécanismes.

Il reste que la mesure proposée a un coût : 1 milliard d’euros, une somme qu’il est difficile de dégager, alors qu’on a déjà peiné à trouver 3 milliards d’euros dans la loi de finances pour 2015 afin d’aider les plus modestes et 2 milliards cette année pour aider les classes un peu supérieures. Je reprends ainsi à mon compte les arguments que notre collègue Dominique Lefebvre a développés voilà quelques instants.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

J’aimerais faire deux ou trois remarques à l’issue de ce débat. La première, qui me semble la plus importante, c’est que le Gouvernement souhaite maintenir avec ce projet de loi de finances une certaine forme de stabilité fiscale. J’y insiste, car ce type de décision n’est pas complètement anodin. Les effets financiers ont été mentionnés, mais je souhaite revenir sur la justice sociale, et répondrai à cette occasion à M. Germain. Cet amendement prévoit un droit d’option, c’est-à-dire la possibilité pour ceux qui sauront s’informer de profiter d’un système leur permettant d’optimiser leur impôt. Il est évident que ceux qui bénéficieront du dispositif seront ceux qui l’étudieront parce qu’ils peuvent en attendre un certain rendement, si je puis me permettre d’utiliser ce terme, c’est-à-dire les couples les plus aisés.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

L’argument de la justice fiscale ne tient donc pas.

Enfin, je reviens à la fragilité juridique. Il y a une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel. Je pense notamment à une décision de 2000 qui affirme expressément le principe d’un impôt progressif tenant compte de la situation du foyer et de l’ensemble de ses revenus. Je ne vois donc pas comment cet article pourrait passer le cap du Conseil constitutionnel.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est tout à fait opposé à cet amendement.

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Chers collègues, j’avoue que, si j’ai demandé cette réforme, c’était moins par souci d’optimisation fiscale,…

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…car ce n’est pas ce qui guide mes principes. Il s’agit pour moi d’une question d’égalité entre les hommes et les femmes.

Selon l’étude menée par la délégation aux droits des femmes de notre assemblée, qui n’a peut-être de ce fait aucune valeur, 21 % des couples mariés gagneraient à être imposés séparément. Il s’agit de couples dont les revenus sont assez élevés pour être soumis à l’impôt mais assez faibles pour être éligibles à la PPE ou à la décote ; ce ne sont donc pas du tout les couples ultra-aisés que vous évoquez, lesquels n’ont au contraire pas intérêt à faire la déclaration séparée.

Il s’agit d’une réforme importante ; nous l’avions déjà proposée l’année dernière, nous en avons déjà discuté. Monsieur le secrétaire d’État, j’entends bien vos remarques, mais nous avons interrogé Bercy, qui n’a pas été en capacité de répondre à nos questions. Je me permets de vous le dire, et cela figure dans le rapport de la délégation : nous n’avons pas obtenu les simulations que nous avions demandées. On peut nous reprocher de ne pas les avoir faites, mais nous ne les avons pas eues quand nous les avons demandées.

Je voudrais que nous avancions sur ce sujet, monsieur le secrétaire d’État. J’accepte, à grand regret, notamment vis-à-vis de tous les collègues qui l’ont signé et que je remercie de leur soutien, de retirer une nouvelle fois cet amendement. J’aimerais cependant de votre part un engagement très ferme quant à la réalisation de vraies simulations pour l’année prochaine sur le coût réel d’une telle réforme. Alors que nous évaluions celui-ci à 500 millions d’euros, il était pour vous de 1 milliard, et certains avancent que la suppression complète du quotient conjugal rapporterait 5,5 milliards d’euros à l’État, tandis qu’une autre étude chiffre cette mesure à 24 milliards d’euros. Avec des fourchettes d’une telle amplitude, comment savoir qui croire ?

Je souhaite donc que nous disposions d’une vraie simulation, de tous les éléments, et que nous puissions connaître les obstacles susceptibles de s’opposer à la suppression du quotient conjugal. Une telle réforme me paraît majeure pour l’égalité, pour la lisibilité de l’impôt, pour que les citoyens puissent comprendre notre action et que les femmes puissent faire ce qu’elles souhaitent de leur vie.

L’amendement no 745 rectifié est retiré.

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La parole est à M. Laurent Grandguillaume, pour soutenir l’amendement no 518 .

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le ministre des finances et des comptes publics, le présent amendement vise à revenir sur la question des parachutes dorés, qui a été soulevée lors de la polémique impliquant M. Combes. Celui-ci devait en effet bénéficier au départ de 14 millions d’euros déclinés en différents avantages ; ce montant a été réduit à 8 millions d’euros à la suite de l’intervention du Haut comité du gouvernement d’entreprise. Cela a néanmoins fait l’objet d’une polémique dans les médias ; on peut s’indigner, mais il est tout de même mieux d’agir.

Au travers de différentes lois, notamment la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie, et la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite TEPA, des éléments de rémunération ont été soumis au régime des conventions réglementées, à l’exception des indemnités de retraite et des clauses de non-concurrence. Nous avons débattu des retraites chapeaux lors de la discussion de la loi Macron et intégré des amendements visant à réguler les retraites chapeaux comme les golden hellos, mais la question reste posée pour les parachutes dorés, puisque ceux qui les touchent bénéficient par ailleurs d’avantages fiscaux.

Cet amendement vise tout simplement à défendre non pas l’esprit de la rente mais le travail, l’effort et le mérite, ce qui peut rassembler largement les députés qui participent à ce débat. J’espère que nous serons nombreux à le voter afin que ces avantages soient soumis non pas seulement à la performance des entreprises mais aussi à la participation à l’effort de redressement de notre pays dans la justice.

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Cet amendement avait été retiré en commission, puisque nous vous avions invité à revoir la cible que vous proposiez, cher collègue.

Sur le fond, la commission était plutôt favorable à la proposition de M. Grandguillaume, monsieur le secrétaire d’État. Vous proposez de ramener la part non imposable de 128 000 euros à 114 120 euros. Afin que cela soit clair pour nos collègues, je précise que cela ne concerne pas les parachutes dorés les plus gros, qui continuent d’exister ; pour ces derniers, la question n’est pas seulement de nature fiscale. L’avis est donc favorable.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Le Gouvernement a examiné votre amendement avec bienveillance, monsieur le député. Il estime qu’il y a lieu d’avancer sur cette question, qui peut parfois choquer, légitimement. La manière de restreindre ce que peuvent percevoir certains mandataires lorsqu’ils partent de façon volontaire est bien posée. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de l’Assemblée. Cependant, ainsi que vient de le faire remarquer la rapporteure générale, il faudra retravailler le sujet pour que les gros volumes de parachutes dorés soient également concernés. Cet amendement va néanmoins dans le bon sens et le Gouvernement a entendu les demandes du groupe majoritaire.

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J’aimerais faire deux rappels, qui pourront être utiles pour la suite de nos débats.

Je me félicite de l’attitude du Gouvernement depuis la loi Macron, au cours de laquelle un gouvernement, une majorité ont décidé de commencer à s’attaquer aux parachutes dorés et aux golden hellos, ou primes de bienvenue. Notre collègue Grandguillaume et moi-même avons continué de travailler ensemble sur la question, et cet amendement vient montrer la complexité à laquelle nous devons faire face : chaque fois que l’on s’attaque à l’un des effets d’aubaine de cette fiscalité par notre travail quasiment d’investigation, en général, quinze jours, trois semaines, un mois, deux mois, trois mois plus tard, on tombe à nouveau sur un trou dans la raquette.

Pour ma part, je suis évidemment heureux de soutenir cet amendement et je me réjouis des avis de la rapporteure et du Gouvernement. Toutefois, si on continue de trouver des trous dans la raquette, il va falloir, à un moment donné, mettre véritablement à plat le dispositif pour que la lutte contre les excès que nous menons par notre travail législatif soit vraiment efficace.

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Mes chers collègues, l’origine de toute cette affaire, c’est qu’on considère que les parachutes dorés sont des dommages-intérêts. Dès lors, ils ne sont pas considérés comme des revenus. C’est la raison pour laquelle ils ont été totalement exonérés d’impôt pendant des années, ce qui a permis à de très nombreuses entreprises de faire de l’optimisation : au lieu de verser des retraites supplémentaires, elles utilisent ce moyen pour bénéficier d’une exonération non seulement fiscale mais aussi sociale.

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Ce dernier aspect n’est en effet pas abordé dans l’amendement. À mes yeux, il s’agit d’un détournement du concept de dommages et intérêts. Ces parachutes dorés ne sont pas des dommages et intérêts. Ce sont des accords conclus, parfois même secrètement, au moment où la personne est recrutée ; celle-ci détermine le montant auquel elle aura droit au moment de son départ. C’est tout de même une conception assez étrange du risque de la part de mandataires sociaux.

Il aurait peut-être été plus judicieux de proposer par amendement de ne plus considérer que les parachutes dorés sont des dommages-intérêts, tant en droit fiscal qu’en droit social.

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Le groupe UDI est prêt à voter cet amendement, qui réduit la part non imposable, mais je pense qu’il faudrait aller plus loin et examiner le fond de l’affaire, c’est-à-dire la véritable nature des dommages-intérêts, car dès lors que ce dispositif est considéré comme tel, on se heurte au problème du droit social et du droit fiscal.

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Je souhaite répondre brièvement à l’intervention de M. de Courson. Par le passé, les parachutes dorés ont pu être considérés comme des dommages et intérêts ; cela a été le cas dans certains conflits juridiques ou certains procès qui visaient ces retraites chapeaux. Cependant, ce qu’on appelle retraites chapeaux dans le débat médiatique, et qui concerne des millions d’euros, ce sont aussi les milliers de retraites supplémentaires dans le pays qui, en capital, sont incluses sous le même régime. C’est pour cela que la rapporteure générale a raison de retenir le ciblage qui est le nôtre. D’ailleurs, lorsqu’on a commencé à travailler sur le sujet, notre première idée était bien entendu de supprimer le dispositif, mais aujourd’hui ce sont des milliers et des milliers de Français qui en disposent. L’objectif est plutôt de s’attaquer aux effets, à ce qui dépasse une certaine limite acceptable au regard de la morale partagée par tous.

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Il est évident qu’il faut continuer ce travail, comme l’a très bien dit notre collègue Charles de Courson, pour défendre le travail, l’effort et le mérite, ainsi que la transparence vis-à-vis des salariés et des actionnaires. On peut en effet s’interroger sur le fonctionnement de sociétés anonymes dans lesquelles on crée des rentes ad vitam æternam qui vont à l’encontre même de l’esprit d’entreprendre.

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Dans ce débat, il faut établir une distinction entre, d’une part, les parachutes dorés, dont les montants peuvent être déterminés par le conseil d’administration de l’entreprise, et, d’autre part, la partie qui est exonérée d’impôt sur le revenu. Une personne qui quitte son entreprise aujourd’hui avec un parachute doré d’un montant de 228 000 euros ne paiera pas d’impôt sur le revenu. L’amendement de Laurent Grandguillaume vise à diviser par deux ce montant : l’exonération ne vaudra plus que jusqu’à 114 000 euros, tout le reste sera bien entendu fiscalisé au titre de l’impôt sur le revenu. C’est pour cela que je disais tout à l’heure qu’il s’agissait davantage de parachutes plaqués or que de parachutes dorés.

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La parole est à M. le président de la commission des finances.

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Je souhaite poser une question aux représentants du Gouvernement ici présents. Le Premier ministre actuel ou le précédent a pris, me semble-t-il, l’engagement de ne pas utiliser la petite rétroactivité. Il l’a pris clairement pour les entreprises et a abordé le sujet pour les ménages sous l’angle des recettes exceptionnelles, pas des revenus récurrents. Or il s’agit là d’une décision exceptionnelle. Je m’interroge donc : êtes-vous bien en accord avec le Premier ministre à propos de la très désagréable notion de petite rétroactivité, monsieur le ministre des finances ? Ce type de mesure trouverait davantage sa place dans la seconde partie du projet de loi. En tout état de cause, la petite rétroactivité est détestable.

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La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

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Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Je réponds à la question posée par M. le président de la commission des finances que l’engagement de non-rétroactivité a été pris vis-à-vis des entreprises. On comprend pourquoi : la stabilité et la lisibilité sont pour elles nécessaires. J’ai d’ailleurs signé une charte sur ce sujet. Tel est l’engagement qui a été pris clairement.

L’amendement no 518 est adopté.

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Je suis saisie de trois amendements, nos 18 , 274 et 275 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 18 et 274 sont identiques.

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 18 .

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Il s’agit d’un excellent amendement déposé à l’initiative de Marc Le Fur et de Laurent Wauquiez. Ce projet de loi de finances est un aveu des erreurs passées et des errements de la pression fiscale que vous avez mise en oeuvre depuis votre arrivée au pouvoir, chers collègues socialistes. En réalité, vous avez commis dans le projet de loi de finances que nous avons adopté en décembre 2013 une faute lourde de conséquences pour 3,8 millions de foyers fiscaux : la fiscalisation de la majoration de 10 % des pensions de parents d’au moins trois enfants.

Nous avons entendu tout à l’heure un grand discours de défense de la place de la femme. Une femme retraitée ayant eu au moins trois enfants mériterait au moins que l’on s’engage à abroger une disposition qui non seulement a mis à mal sa situation fiscale mais a aussi amputé largement son pouvoir d’achat. La disposition que nous proposons est en fait la réparation d’une erreur antérieure en ayant toujours à l’esprit que l’impôt français est familialisé.

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La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 274 .

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J’ai déposé cet amendement au nom du groupe UDI afin de rappeler les fautes que vous avez commises, monsieur le secrétaire d’État ! Je rappelle que 3,8 millions de foyers fiscaux sont concernés pour 300 euros en moyenne. C’est donc une affaire à 1,1 milliard d’euros. Le groupe UDI rappelle que l’exonération de la majoration perçue à partir de trois enfants allait de 10 % à 35 % selon les régimes. De nombreuses veuves modestes qui en bénéficiaient sont devenues imposables et subissent toutes les conséquences de l’imposition, en particulier la taxe d’habitation et la redevance audiovisuelle. Et on s’étonne que nos concitoyens se rebellent ! J’ajoute que les femmes ayant eu trois, quatre ou cinq enfants ont renoncé à des droits propres importants car elles se sont très souvent arrêtées de travailler pendant quatre, cinq ou dix ans pour les élever.

Cette mesure était donc juste et assurait l’égalité entre les femmes qui n’ont pas eu d’enfants et celles qui en ont eu deux, trois, quatre ou plus dans l’intérêt d’une société équilibrée ! L’abroger était donc une mesure antisociale ! Comme je vous l’ai dit tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, vous n’aurez pas le plaisir de faire voter contre mon amendement car je l’aurai retiré. Il ne vise qu’à vous rappeler une nouvelle fois vos erreurs et sera suivi de quelques autres car vos erreurs sont nombreuses. Nous avons sélectionné les plus grosses !

L’amendement no 274 est retiré.

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L’avis de la commission est défavorable. Je vous rappelle, monsieur de Courson, que l’exonération de la majoration de 10 % bénéficiait aussi aux hommes. Or une retraite d’homme est en général plus élevée qu’une retraite de femme. Vous voyez bien que votre argument ne tient pas, cher collègue. En revanche, on trouve à la page 22 du rapport des simulations incluant la fiscalisation de la majoration de 10 % dans le revenu fiscal de référence et montrant l’évolution de l’impôt sur le revenu payé depuis 2012. Comme vous le savez, monsieur de Courson, j’ai déjà demandé un bilan global incluant la fiscalité locale, c’est-à-dire la taxe d’habitation et la taxe foncière. Je réitère ma demande auprès des deux représentants du Gouvernement ici présents. J’ai conscience que fusionner deux bases est un peu complexe mais comme le même numéro fiscal figure sur l’avis d’imposition de la taxe d’habitation et sur celui de l’impôt sur le revenu, je réitère néanmoins ma demande.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

J’ai en effet mentionné l’amendement de M. de Courson proposant une nouvelle dépense fiscale de 1,4 milliard d’euros. Vous en défendiez pourtant un autre tout à l’heure visant à limiter les dépenses fiscales, monsieur de Courson ! Si vous pointez des erreurs, je pointe, quant à moi, des contradictions, qui, elles, sont objectives ! Le Gouvernement est évidemment défavorable à l’amendement.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je profite néanmoins de son examen pour revenir sur un point que vous évoquez : l’inclusion dans le revenu fiscal de référence de revenus qui ne l’étaient pas auparavant. Vous avez abordé le sujet de la fiscalité locale, sur lequel nous reviendrons, et des conséquences des modifications sur le revenu fiscal de référence, qui est la base des exonérations. En effet, ce n’est pas l’impôt, comme vous l’avez dit.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

C’est très important. Il existe même des gens qui ne sont pas imposables mais qui ne bénéficient pas pour autant des réductions d’impôt compte tenu de leur revenu fiscal de référence. Tout le monde a en tête qu’elles bénéficient aux ménages non imposables, mais elles ne bénéficient qu’à ceux dont le revenu fiscal de référence est inférieur à un certain seuil. Nous aurons l’occasion en début de soirée d’examiner un certain nombre d’amendements tendant à la résolution de ce problème sensible sur lequel nous reviendrons à la reprise de nos travaux lors de l’examen de l’article 2. Quoi qu’il en soit, une dépense fiscale de 1,4 milliard d’euros, c’est de la folie, monsieur de Courson, compte tenu de ce que vous avez dit tout à l’heure au sujet de la nécessaire maîtrise des dépenses fiscales !

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En matière de contradictions, il y a match, monsieur le secrétaire d’État ! J’ai cru comprendre que ce projet de loi de finances présente un budget de correction des erreurs passées. Vous-même avez fait votre mea culpa à propos de l’impôt sur le revenu et avez décidé, après le matraquage fiscal, de procéder à des baisses d’impôt. J’ai donc pensé que l’amendement de notre collègue Le Fur visant à supprimer la fiscalisation de la majoration de 10 % des pensions de parents de trois enfants et plus va dans le bon sens.

Comme vous le savez, madame la rapporteure générale, on compte chez nous plus de veuves que de veufs. En outre, les deux poches de pauvreté dans notre pays sont les familles monoparentales et les personnes âgées isolées. Pour une personne âgée isolée, entrer dans l’impôt a forcément des conséquences et même, comme l’a dit notre collègue de Courson, des conséquences en chaîne, notamment en matière de taxe d’habitation. Il s’agit certes d’une niche fiscale mais si on veut discuter des niches, discutons-en jusqu’au bout afin d’élaborer une vraie stratégie de lutte contre les niches. La meilleure stratégie, à laquelle vous ne voulez toujours pas vous résoudre, monsieur le secrétaire d’État, c’est le principe d’universalité de l’impôt sur le revenu.

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La parole est à M. Charles de Courson.

J’ai évoqué la situation des veuves car les pensions de réversion hors majoration liée aux enfants sont réversibles à 52 % ou 54 % selon les régimes mais les majorations liées aux enfants sont réversibles à 100 %. Cela, la plupart des gens ne le savent pas. C’est pourquoi la part des majorations liées aux enfants est d’autant plus considérable dans les revenus des veuves qu’elles ont eu beaucoup d’enfants et ont renoncé à des droits propres. Ce qui a été fait est donc fondamentalement inéquitable.

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J’ai retiré mon amendement car je ne suis pas un irresponsable mais nous rappellerons au Gouvernement, à temps et à contretemps, jusqu’à la fin de la législature, les graves erreurs et injustices sociales que certains de ses choix l’ont amené à commettre.

L’amendement no 18 n’est pas adopté.

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La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 275 .

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Vous auriez au moins pu, lorsque vous avez fait voter cette mesure, exonérer les petites majorations pour enfants, celles inférieures à 1 000 euros, monsieur le secrétaire d’État. Vous auriez montré que vous avez un peu de sens social mais hélas vous n’en avez pas ! Je retire cet amendement.

L’amendement no 275 est retiré.

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La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 19 .

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Comme l’a dit Mme la rapporteure générale en commission, cet amendement ne concerne que très peu de bénéficiaires, je l’admets. Pour autant, en territoire rural, on rencontre des personnes concernées par le dispositif visé. L’article 81 du code général des impôts prévoyait l’exonération d’impôt sur le revenu du salaire différé d’un jeune héritant d’une exploitation agricole où il a travaillé. Ce dispositif a été supprimé par le projet de loi de finances rectificative pour 2014. Comme vous l’avez très bien dit, madame la rapporteure générale, cela concerne peu de bénéficiaires. Si cet amendement concerne si peu de bénéficiaires, c’est donc qu’il n’est pas très coûteux pour les finances publiques ! Je vous prie de bien vouloir revenir sur votre décision et considérer que ce dispositif est nécessaire dans le cas de transmission d’exploitation agricole en milieu rural.

L’amendement no 19 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.

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Je suis saisie de six amendements, nos 77 , 406 , 1 , 20 , 271 et 272 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 77 et 406 sont identiques.

Les amendements nos 20 et 271 sont identiques.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 77 .

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Cet amendement de bon sens vise à rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires. Nous le présenterons jusqu’au terme du mandat car vous porterez cette mesure comme une croix pendant tout le quinquennat, chers collègues socialistes !

Un sondage réalisé en mars 2015 montre que la proposition de rétablissement de la défiscalisation des heures supplémentaires recueille 71 % d’opinions favorables. Nous présentons donc cet amendement dont nous savons qu’il n’a malheureusement aucune chance d’être adopté à moins que le bon sens ne revienne dans cette assemblée, notamment dans le camp de la majorité. Il s’agit simplement de comprendre pourquoi vous avez remis en cause un dispositif qui fonctionnait et qui surtout était efficace.

Il s’agit d’une erreur à la fois économique, sociale et sociétale. Il s’agit d’une erreur économique car le pouvoir d’achat supplémentaire laissé aux salariés permettait de mettre du beurre dans les épinards. Cet argent était tout de suite réinjecté dans l’économie par la consommation. Il s’agit ensuite d’une erreur sociale car elle touche le coeur de la classe moyenne salariée, celles et ceux qui se lèvent tôt le matin et ne supportent plus de travailler autant pour gagner moins.

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Ça va ! Évitez certaines formules s’il vous plaît !

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Il s’agit enfin d’une erreur sur la conception du travail en tant que tel. Vous avez une conception malthusienne du travail, c’est votre choix, ce n’est pas le nôtre. Nous considérons en effet que le partage du temps de travail n’est pas une solution et que les heures supplémentaires ne sont pas destructrices d’emplois, contrairement à ce que vous vous pensez.

Un chef d’entreprise embauche en fonction de ses carnets de commandes ou de sa capacité d’investissement, pas en fonction du temps de travail de ses salariés !

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C’est une erreur que de le croire et nous contestons cette conception malthusienne du travail. Nous vous offrons cette année encore la possibilité de vous rattraper et de vous réconcilier avec une partie de la classe ouvrière et de la classe moyenne, classes auxquelles vous avez décidément tourné le dos depuis votre arrivée au pouvoir.

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La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 406 .

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Cette disposition a permis de maintenir l’emploi dans les entreprises en apportant de la souplesse car, comme l’a très bien dit Damien Abad, un carnet de commandes n’est pas quelque chose de linéaire. Allez voir ce qui se passe dans nos entreprises ; il leur faut s’adapter !

La loi TEPA – en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat – a permis d’atténuer les effets du ralentissement économique dans les premiers mois de la crise de 2008, en contribuant à apporter du pouvoir d’achat aux salariés en 2009.

De façon très dogmatique – c’était un combat idéologique –, vous avez balayé cette disposition essentielle d’un revers de main, et c’est dommage.

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Alors que vous leur parliez de justice sociale, les 9 millions de Français bénéficiaires ont trouvé la suppression de cette mesure injuste et ils n’ont pas oublié. Ils en tiraient un gain moyen annuel de 500 euros – une réalité concrète pour leur pouvoir d’achat, que vous avez mis à mal.

Vous essayez de récupérer aujourd’hui ce choix en décidant un rattrapage fiscal. Mais cela ne compensera pas la perte qu’ont subie ces salariés, qui voulaient faire des heures supplémentaires pour améliorer leurs revenus, et que vous avez malmenés.

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La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 1 .

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Chaque année, je pose à nouveau la question des heures supplémentaires ; j’ai cru, d’ailleurs, que la majorité allait revenir sur ce que je considère comme sa faute originelle – ou du moins l’une de ses fautes originelles.

Pas une journée ne se passe sans que le serveur d’un restaurant ou l’ouvrier d’une usine nous explique que, du fait de la suppression de l’exonération des charges sur les heures supplémentaires, il a perdu en pouvoir d’achat et, de surcroît, n’a pu partir en vacances.

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J’en vois beaucoup. Interrogez le secrétaire d’État chargé du tourisme, et vous verrez ce qu’il vous en dira !

Un certain nombre de nos compatriotes doivent aujourd’hui se « débrouiller », par exemple en revendant sur le site leboncoin.fr ce qu’ils ont glané dans les brocantes durant le week-end. Cela leur permet de compenser la perte de revenus sèche qu’a entraînée cette disposition et de survivre.

C’est cette réalité que certains d’entre vous ne veulent pas voir en face. Je me souviens que Thierry Mandon, aujourd’hui au Gouvernement, considérait qu’il fallait revenir, même partiellement, sur cette décision.

Ce n’est pas un petit débat. Nous l’avons chaque année, et chaque année, nous constatons les effets dramatiques de cette suppression sur plusieurs millions de nos compatriotes, directement touchés par cette faute originelle.

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Nous en arrivons aux amendements identiques nos 20 et 271 .

La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 20 .

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On s’en souvient, 9 millions de Français étaient concernés par ce dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires. Mes collègues ont largement évoqué la situation des salariés ; je voudrais quant à moi parler des entreprises. Aujourd’hui, un grand nombre d’entre elles voient leurs offres d’emploi non satisfaites.

La semaine dernière, lors d’un forum organisé par Pôle emploi dans un bassin d’activité à cheval sur l’Orne, l’Eure-et-Loir et la Sarthe, elles étaient nombreuses à faire état de leurs difficultés à recruter – je pense à ces 70 postes en métallurgie non pourvus. Ces entreprises nous expliquaient que, faute d’effectifs suffisants, elles ne pouvaient se développer et répondre à certains marchés.

Leur donner la possibilité, grâce à des dispositifs intéressants, de recourir à des heures supplémentaires serait une incitation à la croissance. Il y a là une manne ! Les entreprises n’attendent que cela pour pouvoir répondre aux marchés qui s’offrent à elles. Il est très dommageable qu’elles ne puissent le faire aujourd’hui.

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La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement identique no 271 . Celui-ci peut faire l’objet d’une présentation groupée avec l’amendement no 272 .

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Pourquoi le groupe UDI a-t-il déposé ces deux amendements, monsieur le secrétaire d’État ? Pour vous rappeler vos erreurs, vos mesures antisociales !

Initialement, l’idée de l’ancienne majorité était d’encourager le travail dans les entreprises qui ne parvenaient pas à recruter, en incitant leurs salariés à effectuer des heures supplémentaires. Cet objectif n’a pas – ou peu – été atteint car, moins d’un an plus tard, la crise économique survenait.

Il ne faut pas oublier que cette mesure avait un autre but, celui de distribuer du pouvoir d’achat à des personnes modestes. Car, comme les statistiques l’ont montré, ce sont massivement des gens modestes qui effectuent des heures supplémentaires. Les quelques détournements de la mesure par des cadres supérieurs rémunérés à la journée représentent une proportion epsilon ! Cette exonération – fiscale et sociale – concernait 8,3 millions de salariés. J’entends beaucoup de ces gens modestes, qui font des heures supplémentaires, trouver l’incitation beaucoup plus faible qu’à l’époque.

Cette mesure est fondamentalement antisociale. Ne vous étonnez pas que le premier parti politique, dans ces couches sociales les plus modestes – entre 1 et 1,5 SMIC – soit désormais le Front national : 36 % des ouvriers de l’industrie votent pour lui. On aurait voulu les exaspérer un peu plus que l’on ne s’y serait pas pris autrement.

Dans votre propre majorité d’ailleurs – beaucoup de députés socialistes nous l’ont dit –, nombreux sont ceux qui pensent que vous avez commis là une bourde monumentale.

Il faut le répéter, à temps et à contretemps. Les travaux menés notamment par Frédéric Lefebvre montrent que, sur les 100 euros supplémentaires gagnés par un salarié modeste, il peut ne rester que 23 euros une fois tous les prélèvements effectués, ce qui représente un taux supérieur à celui appliqué aux plus hauts revenus de notre pays. Cela ne va pas. Et avec cette mesure, vous avez aggravé le mal !

Pour les raisons exposées tout à l’heure, je retire ces deux amendements.

Les amendements nos 271 et 272 sont retirés.

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Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

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Avis défavorable. Les mesures que vous proposez représentent une dépense fiscale de 1,4 milliard d’euros.

Monsieur de Courson, ne vous ai-je pas entendu tout à l’heure fustiger les dépenses fiscales ?

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Vous ne m’avez pas écouté, madame la rapporteure générale !

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J’entends bien les arguments, certes pertinents, que les uns et les autres ont avancés. Mais ma question est concrète : où comptez-vous trouver cette somme ?

Il faut savoir par ailleurs que la distribution de cette mesure était telle que la moitié allait aux 20 % des ménages les plus aisés. Il s’agit là d’une donnée factuelle. Vous pouvez ne pas être d’accord ; vous pouvez avancer les cas de travailleurs dont les revenus sont plus modestes – je l’entends parfaitement. Mais il n’empêche que le gros de la dépense fiscale, telle qu’elle existait, bénéficiait aux 20 % des ménages les plus favorisés.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Monsieur Abad, vous dites que cette dépense fiscale de 1,68 milliard – je retiendrai votre estimation de 1,5 milliard – est une bonne chose car cette somme sera réinjectée dans l’économie par la consommation, et participera ainsi à la croissance. J’espère que votre réflexion sera la même lorsque nous proposerons, dans le cadre du plan pauvreté, de majorer le RSA de 2 %, car cette hausse bénéficiera sans aucun doute à la consommation.

Par ailleurs, je ne suis pas sûr que les bénéficiaires de cette disposition aient été dans leur ensemble « ceux qui se lèvent tôt » et des travailleurs pauvres. Je ne citerai pas de profession – j’aurais pu être concerné dans une vie antérieure –, mais il faut bien constater que cette mesure a entraîné beaucoup d’effets d’aubaine.

Je rappelle simplement que les heures supplémentaires ne sont pas interdites et que leur régime a été considérablement assoupli. Elles donnent toujours lieu à des majorations de salaire, ce qui constitue un encouragement important.

Je vais tenir le compteur tout au long de la discussion. L’amendement no 18 coûtait 1,4 milliard ; celui-ci peut être estimé à 1,5 milliard. Au bout de quelques heures seulement de discussion, je note que les dépenses fiscales supplémentaires que vous proposez atteignent déjà 2,9 milliards. Quant à la question subsidiaire que vous a posée la rapporteure générale : « Où les prenez-vous ? », nous ne manquerons pas de vous la soumettre à nouveau. Avis défavorable.

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Vous l’aurez compris, nous vous donnons une occasion en or de reconnaître votre erreur de début de mandat. Sans doute avez-vous, vous aussi, rencontré des électeurs qui vous ont demandé pourquoi vous leur aviez supprimé leurs heures supplémentaires défiscalisées, pourquoi ils ne pouvaient plus toucher les 150 euros mensuels supplémentaires qu’ils mettaient de côté, et pourquoi ils ont été obligés de payer des impôts dessus l’année suivante ?

Reconnaissez-le, vous avez rencontré des gens qui vous ont reproché ce péché originel ! Ce péché, vous l’avez commis uniquement par anti-sarkozysme, car sur le fond, vous étiez d’accord.

Monsieur le secrétaire d’État, cette mesure représente effectivement 1,5 milliard, mais c’est moins que la réduction d’impôts de 2 milliards qui fait l’objet de l’article 2.

Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Nous vous proposons un autre marché : vous remplacez cette baisse d’impôts – totalement démagogique à quelques mois de l’élection régionale – par l’exonération des heures supplémentaires. Cela coûtera moins cher et vous permettra de vous repentir face aux électeurs qui vous en veulent depuis le début de ce quinquennat.

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« Péché originel », « repentir »… Bientôt la confession !

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Les bas salaires seront contents de retrouver du pouvoir d’achat et vous aurez ainsi l’occasion de reconnaître votre erreur – une parmi tant d’autres !

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Nous avons eu ce débat maintes fois, mais le sujet le justifie. Si j’ai réagi vivement – et je vous prie de m’en excuser, madame la présidente – c’est que je ne supporte pas certaines expressions, comme « ceux qui se lèvent tôt ». C’est le fils d’un ouvrier chez Michelin, qui a fait les trois-huit toute sa vie et s’est souvent levé très tôt, qui vous le dit : je connais beaucoup de gens qui cherchent du travail et aimeraient devoir se lever tôt !

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Il n’y a pas, d’un côté, les courageux qui se lèvent tôt, et de l’autre, les fainéants qui restent au lit le matin !

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Il faut en finir avec ces expressions qui ont un côté péjoratif insupportable !

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Vous n’avez pas le monopole des mots ni celui de la morale !

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Cessez donc d’opposer les uns et les autres !

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Je reconnais qu’il appartient à l’opposition de dénoncer la baisse du pouvoir d’achat, lorsque l’occasion se présente. Vous usez de ce rôle assez largement, quand vous n’en abusez pas car, quoiqu’il arrive, vous ne restaurerez pas cette mesure.

Plutôt que de le dire clairement, vous entretenez à plaisir l’ambiguïté. M. le secrétaire d’État a bien fait de rappeler que les heures supplémentaires subsistent et qu’elles sont bonifiées.

Vous parlez de 500 euros en moyenne par salarié. Cela équivaut à peu près à l’aide que permettront de leur apporter les baisses d’impôt votées en 2014 et cette année, à ceci près que ces mesures, à la différence de la défiscalisation des heures supplémentaires, concernent tous les salariés. J’y insiste : tous les salariés – ceux qui se lèvent tôt, ceux qui travaillent, ceux qui peinent, et pas seulement ceux qui ont la possibilité de travailler davantage.

Vous aviez en effet complètement oublié ceux qui travaillent dans une entreprise n’autorisant pas les heures supplémentaires, et ceux à qui est imposé un temps partiel. Eh bien nous, nous ne les oublions pas : les 300 à 700 euros de gains tirés de la fiscalité profiteront à tout le monde, ce qui est bien plus juste et permettra de relancer l’activité.

Romain Colas le disait en commission : vous annoncez un relèvement du seuil des 35 heures à 39 heures, mais leur avez-vous seulement dit, à tous ces gens, que ces quatre heures supplémentaires ne seraient plus bonifiées ?

Vous usez, vous abusez et vous cachez une partie de la vérité. Les mesures que nous prenons me semblent bien plus justes et efficaces.

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Monsieur Chrétien, un propos polémique en guise d’introduction : si être anti-sarkozyste c’est être anti-démagogue et anti-irresponsable, nous l’étions hier, nous le sommes aujourd’hui, nous le serons demain, surtout après avoir lu la dernière interview dans les Échos de Nicolas Sarkozy !

Cela étant, monsieur le secrétaire d’État, il y a peut-être une bonne nouvelle pour cet amendement qui coûte 1,5 milliard. En effet, si l’opposition est cohérente avec le raisonnement qu’elle tient, nous devrions pouvoir voter à l’unanimité, à vingt et une heures trente, l’article 2, qui prévoit de baisser l’impôt pour les premières tranches.

Or, j’ai cru comprendre que vous vous opposeriez à cette mesure qui est pourtant plus intelligente que celle que vous proposez. Votre mesure relative aux heures supplémentaires était anti-économique, injuste et, de surcroît, non plafonnée. Comme toutes les mesures de déductibilité, elle profitait d’abord à ceux qui ont un taux marginal d’imposition élevé, et elle était en cela profondément anti-redistributive.

Dans le même temps, les mesures que vous avez prises, comme le gel pendant deux ans du barème de l’impôt sur le revenu ou la remise en cause de la demi-part des veuves, ont conduit des gens qui n’étaient pas imposables à le devenir. C’est cela, les petits salariés dont vous parlez. La réduction d’impôts que nous avons décidée en 2013, la diminution d’impôt sur les premières tranches en 2014 et celle que nous allons voter cette année, permettent de faire ressortir de l’impôt sur le revenu des personnes que vous aviez imposées alors qu’elles ne l’étaient pas ou d’abaisser l’impôt sur le revenu de ceux dont la situation s’était dégradée à revenu égal. Nous apportons cette correction pour ceux qui en ont le plus besoin, pas forcément ceux dont les revenus sont plus importants et qui doivent payer l’impôt qui est dû.

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Quel que soit le mythe que vous essayez de créer ici, démonstration a été faite par Mme la rapporteure générale, par M. le secrétaire d’État et par mes collègues à l’instant, que le dogmatisme est de votre côté.

Ce qui soutient le pouvoir d’achat des classes modestes et moyennes, c’est la baisse d’impôt – celle que nous avons votée l’an dernier, et celle que nous nous apprêtons à voter ce soir. Après M. Alauzet, je veux à mon tour dénoncer la formidable hypocrisie qui est la vôtre. De la cacophonie qui règne à droite dans le cadre de la préparation de votre primaire émerge une seule mesure qui fasse l’unanimité : la mise à bas des 35 heures. Quand allez-vous déclencher ces heures supplémentaires que vous voudriez défiscaliser ? Vous vous réfugiez dans une formidable hypocrisie. Dites aux Français que vous voulez défiscaliser ces heures supplémentaires qui, de fait, si vous arrivez au pouvoir, disparaîtront !

Par ailleurs, monsieur Abad, puisque vous entendez gouverner sur la seule base des sondages, pensez-vous que 71 % des Français approuvent l’aggravation de 600 milliards de notre dette publique au cours de la précédente législature ? Cet avantage fiscal, vous l’avez financé exclusivement avec de la dette, que les Français continueront à payer pendant bien des années !

Notre baisse d’impôt s’inscrira au contraire dans une trajectoire financière maîtrisée, avec des déficits tenus. C’est aussi cela notre différence !

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Je voudrais évoquer moi aussi une excellente interview donnée récemment par Nicolas Sarkozy. J’ai cru comprendre, au travers de vos interventions, chers collègues de l’opposition, que vous étiez nostalgiques d’une période où vous étiez dans la majorité. Vous donnez en tout cas, par vos amendements, l’impression de vouloir y revenir. Si vous nous accusez d’avoir commis un péché originel, vous n’en serez pas les rédempteurs.

Relisons Nicolas Sarkozy, qui est très clair, comme souvent : les 36 heures seront désormais payées 36, les 37 heures seront payées 37 et ainsi de suite. Il ne sera plus question de défiscaliser, ni même de majorer, comme elles le sont aujourd’hui, les heures travaillées au-delà de 35 heures. La durée légale ne sera plus que facultative et les entreprises ne s’y soumettront donc plus.

L’interview ne s’arrête pas là. À la question du devenir des exonérations de cotisations sociales liées aux 35 heures, il répond : « Je veux inverser le raisonnement. Pour encourager les entreprises à remonter la durée du travail, je propose de les inciter financièrement. Les heures au-delà de 35 heures leur coûteraient moins. Les allégements de cotisations sociales patronales seraient accrus jusqu’à 39 heures ». En clair, on n’allège plus les charges pour travailler moins, on les allège pour travailler plus. Bref, soit vous êtes hypocrites, soit vous n’avez pas lu Nicolas Sarkozy.

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Quoi qu’il en soit, ce que vous proposez aux Français n’a rien à voir avec les amendements que vous déposez. Il faut choisir : soit vous changez de leader, soit vous changez d’amendements, mais vous devez être cohérents. Ne venez pas nous expliquer ici ce que vous ne ferez pas demain.

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Je me souviens assez bien du mois de juillet 2012, quand M. Cahuzac, alors ministre délégué chargé du budget, a supprimé ces dispositions.

Notre objectif était double : améliorer le revenu des travailleurs sans pénaliser la compétitivité des entreprises. En effet, outre la défiscalisation, les heures supplémentaires étaient partiellement exonérées de charges, ce qui permettait à l’entreprise de fonctionner avec une certaine souplesse sans augmenter excessivement ses charges, d’adapter en permanence ses capacités de production et les besoins de sa clientèle. Cet avantage est anéanti par la suppression de l’exonération des charges.

Par ailleurs, la TVA sociale s’accompagnait d’une baisse des charges patronales pour améliorer la compétitivité des entreprises. Vous avez mis à bas tout cela en juillet 2012 pour revenir furtivement en arrière en remboursant aux gens ce qu’ils avaient payé, par l’intermédiaire du CICE, alors qu’il était si simple de ne pas les faire payer. Nous vous proposons simplement, par ces amendements, d’agir un peu moins furtivement – mais vous n’y semblez guère disposés.

Quant aux 600 milliards d’euros, combien pour la Grande-Bretagne durant la même période ? 750 milliards d’euros. L’Allemagne ? 500 milliards. Les États-Unis ? 8 000 milliards. La France a fait face à la crise comme tous les autres pays, mais sans récession, à leur différence.

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Je remarque que le président des Républicains occupe encore beaucoup les esprits de la gauche, comme si elle n’avait pas encore compris qu’elle avait la majorité et était en mesure d’engager la France sur le chemin des réformes. Dont acte. Vous êtes toujours autant dans l’anti-sarkozysme, qui n’est pas une forme de gouvernement, vu vos résultats.

Vous nous accusez par ailleurs de nous contredire mais quand, sur un même projet de loi de finances, on est capable de déposer un amendement qui vise à fusionner l’impôt sur le revenu et la CSG, un autre pour affirmer le principe de l’universalité de l’impôt sur le revenu et un troisième pour faire sortir 500 000 personnes de ce même impôt, on n’a pas de leçon à nous donner !

Pire : vous pouvez défendre le CICE alors que certains de vos collègues veulent le supprimer ! Si vous voulez que l’on discute des incohérences, nous pourrions y passer la nuit et bien plus encore !

Pourquoi les heures supplémentaires ont-elles été défiscalisées ? Il ne serait pas inutile d’en rappeler l’origine – en l’occurrence les 35 heures, qui ont dégradé la compétitivité des entreprises, ce qui nous a obligés, pour inverser la tendance, à défiscaliser les heures supplémentaires. Pourquoi la France a-t-elle décroché par rapport à l’Allemagne ? Parce qu’au moment où notre pays faisait le choix des 35 heures, le gouvernement de M. Schröder, pourtant pas de notre famille politique, faisait celui, courageux, d’engager des réformes structurelles. Nous voyons aujourd’hui le résultat !

Enfin, la vraie différence entre la baisse des impôts et la suppression du consentement à l’impôt pour certains, comme vous le proposez, et les mesures que nous portons, tient à la valeur du travail. Peut-être n’est-elle pas une valeur cardinale à vos yeux, mais elle a du sens pour nous. Oui, nous assumons de défendre ceux qui se lèvent tôt le matin. Il est temps de remettre la valeur travail au coeur de notre société !

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Combien coûtent les 35 heures à l’État français depuis 2002 ? Pas moins de 20 milliards d’euros par an – à comparer au 1,5 milliard que nous vous proposons. Vous coûtez à l’économie française 20 milliards par an, au bénéfice des plus grandes entreprises françaises. En effet, ce ne sont ni les TPE ni les PME, mais les grands groupes français qui sont les premiers bénéficiaires des exonérations de charges relatives aux 35 heures.

Nous vous mettons en face de vos contradictions. D’un côté, nous avons une majorité crispée qui ne veut pas rouvrir le débat et de l’autre, une opposition qui a le courage d’affirmer que ce sera là un débat important de la présidentielle. Les Français nous attendent sur ce sujet !

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Je l’ai dit dernièrement à M. Germain : aux yeux des entreprises, le débat sur les 35 heures appartient désormais au XXe siècle. Les 35 heures représentent le déclencheur des heures supplémentaires. Je suis favorable à la baisse des charges qui pèsent sur le travail. Je regrette donc la mesure que vous avez prise, car elle pénalise bon nombre de salariés très modestes.

Plutôt que de nous renvoyer à la figure des arguments d’un autre temps, nous serions mieux inspirés d’évoquer ce qui préoccupe les entrepreneurs, qu’ils soient petits ou grands : la portabilité des droits dans le salariat, la façon dont réagissent ceux qui ont perdu le bénéfice des exonérations et doivent prendre des emplois complémentaires. Voilà des sujets qui préoccupent les entreprises. Nous avons trop pris l’habitude, dans cet hémicycle comme dans le débat public, de divertir l’opinion – au sens étymologique du terme, c’est-à-dire de la détourner de l’essentiel.

Les amendements identiques nos 77 et 406 ne sont pas adoptés.

Les amendements nos 1 et 20 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

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Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 21 et 276 .

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 21 .

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Je ne vais pas, pour ma part, faire d’archéologie politique. Aujourd’hui, mes chers collègues, je voudrais vous rappeler notre position, qui, s’agissant du projet de loi de finances pour 2016 que vous avez construit, est claire. Que vous mettiez en avant nos propositions ou les propos du président de notre mouvement, cela vous concerne, mais, de grâce, étudions les articles de ce projet de loi de finances.

Aujourd’hui, vous aurez bien compris que notre volonté est de remettre de la justice, tant fiscale que sociale, dans ce texte, cette justice que vous avez balayée d’un revers de la main, totalement occultée depuis que vous êtes à la manoeuvre dans notre pays.

Cet amendement no 21 , déposé par mon collègue Marc Le Fur, vise simplement à revenir sur la suppression de l’exonération fiscale de la participation de l’employeur aux contrats collectifs de complémentaire santé. Là, ce sont non pas 1 ou 2 millions de foyers fiscaux qui sont concernés, mais bien, comme le disait M. Alauzet tout à l’heure, tous les salariés, qu’ils effectuent ou non des heures supplémentaires.

Vous vouliez de l’équité – laquelle diffère de l’égalité. Eh bien, nous vous l’offrons, car 13 millions de salariés sont concernés. En adoptant cet amendement, vous feriez oeuvre de justice et vous montreriez que vous avez entendu la colère des Français.

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La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 276 .

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Il s’agit là de réparer la troisième erreur que vous avez commise, la troisième mesure anti-sociale qui concerne 13,2 millions de nos concitoyens, c’est-à-dire tous les salariés, car les trois quarts d’entre eux à peu près bénéficiaient d’une complémentaire négociée dans le cadre d’un accord d’entreprise ou de branche.

En faisant cela, vous être allés à l’inverse de ce qu’il faut faire, c’est-à-dire encourager le dialogue social et le développement de la couverture complémentaire par voie conventionnelle. Mais, ce faisant, vous avez commis une autre erreur supplémentaire, à savoir creuser encore un peu plus l’écart entre le revenu imposable et le revenu réellement touché par nos concitoyens.

Parce que nous n’avons jamais eu le courage de réformer le système de la CSG pour la rendre entièrement déductible,…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Vous y êtes donc favorable ?

Sourires.

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…quitte à en augmenter le taux, de façon à ce que le produit soit nul – nous avons plusieurs fois déposé des amendements allant dans ce sens, mais ils n’ont jamais été adoptés –, nous continuons à creuser l’écart entre le revenu imposable et le revenu effectivement touché. Or comment voulez-vous que les salariés comprennent qu’on les impose sur un revenu qu’ils n’ont jamais touché ?

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe Les Républicains

Très bien !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Et les avantages en nature ?

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L’intérêt de tout le monde – et de la représentation nationale – n’était donc pas de rendre certains non-imposables, ou plus exactement de majorer le revenu du montant des cotisations patronales de couverture complémentaire, mais de caler le revenu imposable sur le revenu effectivement touché.

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Sinon, à force, cela devient incompréhensible. Pour toutes ces raisons, c’était une énorme erreur de sanctionner les trois quarts des salariés imposables qui bénéficiaient de cette couverture complémentaire.

Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, nous revenons à la charge. Le coût de cette mesure est, de nouveau, d’à peu près 1 milliard d’euros. Et, de nouveau, je retirerai cet amendement, mais seulement après avoir entendu vos explications.

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Défavorable. J’invite nos collègues à se reporter aux simulations que nous avons faites et qui figurent à la page 21 : elles montrent l’impact de la fiscalisation de cet avantage en nature lié à la complémentaire obligatoire. Nous avons fait ces simulations pour un couple marié avec deux enfants dont les deux parents seraient concernés par cette mesure. S’y ajoutent les différentes réformes – dont, je l’espère, l’article 2, que vous voterez tout à l’heure – relatives à la baisse de l’impôt sur le revenu. Or on constate que, jusqu’à 47 000 euros de revenus, ce foyer continue à payer moins d’impôt sur le revenu qu’en 2012.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Monsieur de Courson, ce que vous nous dites sur le fait que l’on paie des impôts sur de l’argent qu’on ne touche pas est sympathique, mais que pensez-vous des avantages en nature ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

C’est pareil : on bénéficie d’un avantage, et c’est bien de l’argent qu’on ne touche pas. En bénéficiant d’une complémentaire santé, c’est exactement pareil : c’est un avantage, même si l’on ne touche pas d’argent.

Ma deuxième réflexion porte sur la notion d’égalité. Qu’en est-il des fonctionnaires, des retraités et des étudiants, qui ne touchent aucune aide ? Les salariés que vous évoquez appartiennent exclusivement aux secteur privé, et encore une partie d’entre eux seulement.

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Et la retraite des fonctionnaires par rapport à celle des salariés du privé ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Il y a là une inégalité devant l’impôt qui est flagrante.

Avec cette mesure – la troisième dans l’après-midi –, que je comptabilise dans ma liste, vous en êtes pour l’instant, monsieur de Courson, à un total de 3,8 milliards. Je vous l’ai comptée à 900 millions d’euros – vous aviez annoncé 1 milliard et je l’avais évaluée à 930 millions.

Sourires.

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M. le secrétaire d’État a dit l’essentiel. Je ne peux cependant m’empêcher de dire à mon collègue Charles-Amédée de Courson que j’attendais plus de rigueur dans le raisonnement de la part de l’ancien magistrat à la Cour des comptes qu’il est, tout comme moi.

En effet, si je l’écoute et si je suis son raisonnement, nous n’aurions jamais dû faire la CSG – et a fortiori la CSG déductible. Je rappelle, à l’attention de tous ceux qui plaident pour la déductibilité, que celle-ci est toujours une mesure anti-redistributive, car elle ne profite qu’à ceux qui sont assujettis à l’impôt sur le revenu. En outre, elle fonctionne au taux marginal d’imposition : plus celui-ci est élevé, plus l’avantage fiscal est important. On a en effet un taux marginal d’imposition d’autant plus élevé quand on a de très hauts revenus.

In fine, on ne peut pas dire aux gens qu’on a les choses pour rien. Je croyais pourtant qu’à droite on parlait de responsabilité ! Nous avons pris la mesure visée parce qu’il s’agissait bien, en réalité, d’un avantage, pouvant se comparer à n’importe quel autre avantage en nature.

Nous avons fait le choix de la généralisation parce que nous souhaitons protéger – notamment les plus faibles. Si on avait opté pour la généralisation en maintenant cet avantage fiscal, cela aurait eu un coût budgétaire important et, là encore, au bénéfice des plus aisés.

En responsabilité, nous avons considéré, d’une part, que notre priorité était de généraliser ces couvertures complémentaires et, d’autre part, que cet avantage fiscal n’avait pas lieu d’être. Comme l’ont rappelé M. le secrétaire d’État et Mme la rapporteure générale, les mesures que nous prenons en matière d’impôt sur le revenu, sur le bas du barème – que vous contestez en expliquant qu’elles vont diminuer le nombre de personnes imposables – permettent à ceux qui ont des revenus bas ou moyens de ne pas payer, finalement, davantage d’impôt au terme du processus.

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Mon cher collègue, je ne peux pas vous laisser dire de telles choses. Vous ne pourrez jamais expliquez – et c’est l’une des raisons de l’incompréhension envers l’impôt sur le revenu – les raisons de l’écart croissant entre le revenu sur la base duquel cet impôt est calculé et le revenu effectivement touché. En effet, si l’on suit le même raisonnement, pourquoi ne fiscalisez-vous pas aussi les cotisations sociales patronales sur les retraites complémentaires, au motif que ces régimes sont très différents et que tout le monde n’a pas le même taux – tant s’en faut : il vaut mieux être dans la chimie ou le pétrole que dans le textile ? Ce raisonnement est tout simplement infernal.

Deuxième remarque : comme je vous l’ai dit, il faut réajuster le taux de la CSG à la hausse, afin d’éviter des pertes de recettes fiscales. Même chose concernant l’impôt sur le revenu. C’est donc une réforme de l’ensemble qui est nécessaire pour qu’enfin l’impôt sur le revenu soit compréhensible.

Écoutez un peu ce que dit le peuple – il ne comprend plus rien.

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Or tout le monde est d’accord sur l’idée que l’impôt doit être compréhensible. Eh bien, continuons comme cela : lorsqu’il y aura un écart de 10 % à 15 % entre le montant effectivement touché par nos concitoyens et celui sur la base duquel ils sont taxés, l’ensemble deviendra encore plus incompréhensible.

Qui plus est, vous espérez faire le prélèvement en amont. Alors, vraiment plus personne n’y comprendra rien. Belle façon de responsabiliser nos concitoyens !

L’amendement no 276 est retiré.

L’amendement no 21 n’est pas adopté.

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La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 8 .

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Monsieur le ministre, il s’agit d’un amendement d’appel qui a déjà été évoqué lors de la discussion de la loi dite « Macron ». Le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique s’était alors engagé à ce que nous puissions nous mettre au travail sur cette question. Il m’avait d’ailleurs, dans cet hémicycle, annoncé qu’un travail avait d’ores et déjà débuté au sein du Gouvernement.

Il s’agit de trouver un dispositif qui puisse être efficient pour les travailleurs étrangers résidant en France. L’idée est d’essayer de remplacer progressivement une partie de l’aide au développement par une aide directe à travers un produit d’épargne que pourraient utiliser les étrangers résidant en France, à partir du moment où ils créent de l’emploi dans leur pays d’origine.

Vous le savez, l’Agence française de développement – AFD – finance des projets de codéveloppement, à hauteur, l’année dernière, de 8 milliards d’euros environ. Elle a pu multiplier ces projets en Afrique, en Asie et dans beaucoup de pays. Mais on voit bien que toute une partie de l’aide au développement est, malheureusement, et nous le savons tous, détournée de son objectif.

Je voulais simplement savoir où en est le Gouvernement. Avez-vous engagé des discussions avec le ministère de l’économie ? Je souhaiterais, comme le Gouvernement s’y était engagé, que nous puissions être associés à ce travail.

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Non, je vais le retirer : c’était vraiment un amendement d’appel.

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De ce fait, je donne directement la parole à M. le secrétaire d’État, pour qu’il vous réponde.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Certes, une réflexion a été engagée sur la structuration et sur le montant de l’aide publique au développement – nous serons amenés à en reparler – , mais aucun dispositif fiscal n’est envisagé pour ce type de versement.

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Dont acte. Mais au nom de qui M. Macron s’est-il donc exprimé ?

L’amendement no 8 est retiré.

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La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l’amendement no 129 .

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Il s’agit d’un modeste amendement de simplification. Lorsque des époux font – dans des cas très limités, comme l’instance de séparation, la séparation de fait ou l’abandon de domicile conjugal, et que pour autant le contexte n’est pas conflictuel, qu’ils sont d’accord entre eux, et que l’un d’entre eux verse une contribution aux charges du mariage – l’objet d’une imposition séparée, cette même contribution ne peut être déduite du revenu imposable de celui qui la verse que lorsque sa fixation résulte d’une décision de justice.

D’une part, il s’agit d’une procédure lourde, alors même que les tribunaux sont déjà encombrés. D’autre part, cela prend du temps. L’amendement vise donc à remplacer la décision de justice par un simple acte notarié, autrement dit à déjudiciariser la procédure.

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La commission a rejeté cet amendement, au motif qu’il revient effectivement aux décisions de justice, comme vous l’avez rappelé, monsieur le président Carrez, de fixer le partage des charges existantes. Avec cet amendement, il s’agirait désormais, plus ou moins, d’un accord chez le notaire, ce qui ne garantit pas vraiment l’impartialité nécessaire quant à la répartition des charges entre les deux époux. C’est pour cette raison que la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Il est identique à celui de la rapporteure générale, mais je le formulerai un peu différemment : un accord, même formalisé devant un notaire, et même contresigné par un avocat, ne permettrait pas de garantir une juste appréciation des facultés et des besoins de chaque époux. C’est justement ce que le juge peut faire, mais pas le notaire. Cela ouvrirait en outre la voie à beaucoup d’arrangements.

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Contrairement à ce qu’a indiqué M. le président de la commission des finances, il ne s’agit pas du tout d’un amendement anodin et de simplification. Je suis très étonnée par cet amendement et j’y suis très opposée car il pourrait, s’il était voté, créer un précédent.

Si j’ai bien compris, M. le président de la commission des finances souhaite rendre déductible du revenu le versement spontané et de bonne foi d’une contribution aux charges du mariage versée par l’un ou l’autre des époux sans que la saisine du juge ne soit obligatoire.

Cet amendement prévoit qu’une convention passée par acte notarié peut se substituer à une décision de justice.

Les notaires rédigent habituellement des actes authentiques et s’occupent plutôt du droit des biens. Le droit des personnes n’est pas forcément de leur compétence naturelle, et M. le président de la commission des finances voudrait qu’ils puissent remplacer le juge.

Je rappelle qu’aux termes de l’article 214 du code civil, les époux peuvent saisir, soit seuls soit conjointement, le juge aux affaires familiales pour faire valider une convention fixant le montant d’une contribution aux charges du mariage, qui est soumise évidemment au contrôle d’un juge judiciaire, donc d’un magistrat professionnel. La procédure est gratuite, et en général très rapide, l’avocat n’est pas obligatoire et les personnes qui n’ont pas de ressources ou ont de faibles ressources peuvent bénéficier de l’aide juridictionnelle.

En matière de contribution aux charges du mariage, le contrôle juridictionnel est indispensable. C’est un contrôle protecteur. Je rappelle que, dans 90 % des cas, ce sont les époux qui versent des contributions à leurs épouses et, en l’espèce, le notaire n’est pas gratuit. Je me pose la question de savoir qui le paierait.

Ce serait donc un précédent totalement inacceptable et très dangereux pour la protection des droits des personnes.

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J’attendrai l’éclairage du Gouvernement pour me prononcer définitivement, mais je vais plutôt appuyer l’argumentation du président de la commission.

Nous sommes à l’heure du divorce par consentement mutuel et il arrive que d’ex-époux se mettent d’accord, y compris sur les sommes que l’un peut verser à l’autre s’il pense devoir compenser la perte de revenus liée à la séparation.

Nous avons tous rencontré des gens qui se sont mis d’accord. L’un des ex-époux a attribué à l’autre une pension et l’a déclarée comme telle aux impôts. Il a ensuite fait l’objet d’un redressement parce que ce versement n’a pas été reconnu par l’administration fiscale. On se retrouve donc dans des situations totalement folles, l’ex-époux qui a accepté de verser de l’argent ne peut pas le récupérer parce que son ex-conjoint n’a pas forcément les moyens de le lui rendre, et il se retrouve pénalisé, avec, en plus, des pénalités de retard. Une telle situation est proprement ubuesque. À une époque où l’on ne se sépare peut-être pas comme on se marie mais où, en tout cas, les choses peuvent se passer de manière dédramatisée, je ne voudrais pas qu’on passe par pertes et profits la réflexion à laquelle nous renvoie l’amendement du président Carrez.

Et que se passe-t-il quand ce sont non des ex-époux mais d’ex-concubins, non pacsés, non mariés qui se mettent d’accord sur une pension alimentaire à verser pour des enfants dont ils partagent la charge ? Dans quelle situation se trouvent-ils vis-à-vis du fisc ?

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Il faut peut-être étudier la mesure dans le détail mais si, quand tout le monde est d’accord, on pouvait éviter la judiciarisation du processus, ne serait-ce que pour désengorger les tribunaux de notre pays, ce qui est nécessaire, ce serait une bonne chose.

Il faut préserver les droits de tout un chacun et des femmes en particulier, mais on peut donner un droit à ester en justice sans l’imposer, surtout quand tout le monde est d’accord pour que les choses se passent bien.

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J’ai voté pour cet amendement en commission. L’argument purement juridique de Mme Capdevielle serait excellent si la justice était ultrarapide

« Eh oui ! » sur divers bancs

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mais, soyons concrets, soyons empiriques, ce n’est hélas pas le cas, et cela dépend aussi de l’attitude des deux ex-conjoints. Ils peuvent s’entendre ou se battre comme des chiffonniers – vous avez tous les cas de figure.

J’avais suggéré un sous-amendement au président de la commission des finances pour préciser que, lorsque l’on attend une décision de justice, la pension versée par l’époux qui a trouvé un arrangement avec sa femme est déductible, parce que, tel qu’est rédigée la loi, ce n’est pas le cas aujourd’hui, et c’est le problème auquel il essaie de répondre.

Peut-être faut-il encore peaufiner cette disposition mais, sur le fond, je pense qu’il a raison.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Cet amendement présente un certain nombre de risques et il n’est pas suffisamment protecteur. Ce type d’accords conventionnels ou passés devant notaire pourront donner lieu à une déduction fiscale et il faudrait donc tout de même essayer de limiter les possibilités d’abus.

J’entends bien que ce serait une situation intermédiaire, dans l’attente d’un jugement tardif, mais ce n’est pas écrit dans l’amendement. Il n’y a de limite ni dans le temps ni même dans les montants.

Je suis prêt, parce que je ne pense pas que cela ait un impact financier majeur, à ce qu’on retravaille cet amendement mais, dans cette version où il n’y a ni limite temporelle ni appréciation de la capacité contributive ni aucune espèce de validation – ce que, encore une fois, seul le juge peut faire –, il me semble dangereux de l’adopter. Il vaudrait donc mieux qu’il soit retiré pour l’instant, quitte à le présenter à un autre endroit, lors de nos longues discussions des semaines à venir.

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La parole est à M. le président de la commission des finances.

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Je vais le retirer pour voir comment on pourrait éventuellement le compléter, et je pense que tout le monde serait d’accord sur le fait de le limiter au cas où l’on attend une décision de justice qui viendrait trop tardivement.

Je ne peux pas vous dire si l’on réglera ainsi le problème, car il y a aussi des cas où il serait intéressant de se substituer purement et simplement à une décision de justice, mais cela rencontre les objections que vous soulevez, monsieur le secrétaire d’État.

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Dans la perspective de ce travail complémentaire, j’aimerais bien, monsieur le secrétaire d’État, que vous vous penchiez sur la question de savoir comment on peut accepter l’idée que les concubins non mariés qui se mettent d’accord sur les pensions post-séparation ont la possibilité de les déduire fiscalement de leurs revenus alors que des couples qui ont été mariés, qui se séparent et se mettent d’accord de la même façon n’en ont pas le droit. Je n’arrive juste pas à comprendre pourquoi il y a une telle inégalité entre ces deux formes de conjugalité.

L’amendement no 129 est retiré.

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La parole est à M. François Pupponi, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement no 428 .

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Cet amendement avait été adopté dans la loi Macron à la fois à l’Assemblée et au Sénat et avait été ensuite censuré par le Conseil constitutionnel car il constituait un cavalier législatif. Nous le représentons donc.

Aujourd’hui, lorsque l’on a un immeuble en pleine propriété classé ou inscrit à l’inventaire des monuments historiques, on bénéficie d’une réduction d’impôt, mais pas, depuis la loi de finances rectificative de l’année dernière, lorsque l’on est en copropriété.

C’est un problème de plus en plus préoccupant, et j’en parlerai tout à l’heure à propos de la loi Malraux. Dans un certain nombre de coeurs de ville anciens, il y a des monuments historiques fortement dégradés, un grand nombre d’habitats insalubres et, sans dispositif fiscal favorisant la rénovation des bâtiments historiques, la dégradation continue.

Je vous propose donc de voter cet amendement qui avait été adopté il n’y a pas si longtemps afin que, dès lors que l’on a un monument historique inscrit à l’inventaire ou classé, que l’on soit en copropriété ou en pleine propriété, on bénéficie de la même réduction d’impôt.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Il remet en route un dispositif plutôt inflationniste, qui ne semble pas pertinent et, qui plus est, avec un champ plus large. Cela me semble donc extrêmement dangereux. On a réformé ce type de dispositif pour le concentrer sur les seuls monuments historiques. Avec une telle mesure, on ouvrirait dangereusement la porte. On avait d’ailleurs conditionné le fonctionnement du dispositif à la réalisation de logements. Ce n’est plus le cas.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

En tout cas, le champ me paraît beaucoup trop large et le Gouvernement est totalement défavorable à cet amendement.

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La parole est à M. François Pupponi, rapporteur pour avis.

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Je vous confirme, monsieur le secrétaire d’État, que c’est bien pour du logement.

Par contre, je comprends le risque d’une telle ouverture, en particulier pour le label « fondation du patrimoine ». S’il faut limiter le champ de cet amendement, pourquoi pas ? Nous pourrions le sous-amender – nous en avions parlé en commission, mais je ne sais pas si l’un de mes collègues est prêt à le faire. Sinon, nous le redéposerons lors de la prochaine lecture.

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Je pense que l’une des raisons pour lesquelles la copropriété avait été écartée, c’est parce qu’elle permettait à des gens d’être copropriétaires de manière un peu virtuelle, uniquement pour avoir droit à la baisse d’impôt. Toute personne qui a eu un jour la curiosité d’aller regarder sur internet quelles étaient les niches fiscales les plus recommandées est immanquablement tombée à l’époque sur la liste des copropriétés ouvertes à la baisse fiscale.

Le point de vue du ministère des finances est très logique : mieux vaut aider ceux qui font de la restauration pour les monuments historiques et non pour l’aide fiscale.

L’amendement no 428 n’est pas adopté.

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Je suis saisie de trois amendements, nos 776 , 22 et 190 , pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement no 776 fait l’objet d’un sous-amendement, no 812 .

Les amendements nos 22 et 190 sont identiques.

La parole est à M. Laurent Baumel, pour soutenir l’amendement no 776 .

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Monsieur le secrétaire d’État, c’est véritablement sans joie et sans enthousiasme que je présente cet amendement visant à revenir sur la suppression de la demi-part des veuves car je mesure ce que doit être votre fatigue à entendre répéter, de séance en séance, de session budgétaire en session budgétaire, les mêmes arguments. Elle n’a d’égale sans doute que la nôtre à entendre les mêmes réponses.

Si je reviens sur ce sujet aujourd’hui, si, comme d’autres l’ont fait, d’autres groupes ou du groupe socialiste, dans d’autres sessions, je porte à mon tour le flambeau de la demi-part des veuves, c’est tout simplement parce que, vendredi dernier, dans ma permanence, j’ai été confronté à une dame, veuve, extrêmement modeste et extrêmement désemparée de devoir, pour les raisons qui ont été indiquées tout à l’heure, brusquement payer plusieurs milliers d’euros de taxes locales.

Devant le désarroi de cette dame, devant son sentiment profond d’injustice, que je ne pouvais que partager, je me suis dit que la seule chose que je pouvais faire, en tant que parlementaire, c’était d’utiliser le droit que la Constitution me donne de déposer des amendements pour que, au moins, cette question soit de nouveau évoquée dans l’enceinte où se décident les lois qui apportent des avantages ou font subir des contraintes fortes aux particuliers.

Si je le fais aussi, monsieur le secrétaire d’État, c’est que je sais – et le précédent du gel du barème nous l’a montré – qu’il arrive au Gouvernement de corriger des erreurs, lorsque vous reviennent aux oreilles les ravages qu’elles ont provoqués dans l’opinion et contre lesquels vos propres amis vous avaient vainement mis en garde pendant plusieurs années.

Je pense que c’est le cas aujourd’hui, pour cette question de la demi-part des veuves. Je forme le souhait que vous aurez à coeur, à l’heure où toute la communication de votre gouvernement se concentre sur l’effort fait en direction des foyers modestes, de réparer cette injustice, qui a été, je le précise, décidée sous la présidence de Nicolas Sarkozy et que notre majorité n’a malheureusement pas réparée en temps et en heure.

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La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir le sous-amendement no 812 .

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Il nous arrive parfois – plus que de raison et trop souvent à mon goût – de nous faire interpeller voire réprimander par les citoyens pour les erreurs que nous avons commises. Il est encore plus désagréable de se faire interpeller pour des erreurs commises par d’autres et que nous aurions la possibilité de corriger : je veux parler de la suppression de la demi-part des veuves. Cette agression fiscale à l’encontre des veuves a été décidée par le gouvernement de François Fillon, avec l’accord complet de Nicolas Sarkozy. Elle s’est faite progressivement et, pris par la mise en oeuvre d’une partie de notre programme en arrivant aux responsabilités, nous n’avons pas estimé à leur juste valeur les ravages qu’elle allait causer.

Comme Laurent Baumel, nous sommes beaucoup à rencontrer dans nos permanences des hommes et des femmes de bonne foi qui ont consacré toute une vie au labeur, qui ont des économies, une retraite, et qui se retrouvent aujourd’hui soumis à une pression fiscale exorbitante au regard de ce qu’ils payaient avant. Ces seniors, dont nous louons tant le rôle et l’utilité sociale dans les différentes manifestations, les inaugurations ou quand ils sont décorés, contribuent grandement à éviter que les jeunes générations, leurs enfants ou leurs petits-enfants, ne sombrent encore plus dans la dépendance et les difficultés, dans une société où le chômage de masse n’a pas reculé.

C’est pourquoi il serait bien que, en cette fin de législature, nous corrigions une injustice commise par nos prédécesseurs et que nous montrions l’utilité concrète d’un changement de majorité pour cette partie de la population.

Pour ne pas risquer d’être accusés de créer une nouvelle niche fiscale, en accord avec Laurent Baumel et sur l’initiative d’Hervé Féron, j’ai cosigné ce sous-amendement, qui vise à plafonner l’avantage aux personnes âgées dont les revenus mensuels n’excèdent pas 3 000 euros.

Nous ne visons pas les riches, puisque – parole d’évangile pour beaucoup d’entre nous ici – le Président de la République avait estimé qu’une personne était riche à partir du moment où elle gagnait 4 000 euros mensuels. Si vous aviez des préventions, mes chers collègues, sachez que vous serez parfaitement hollandais en votant ce sous-amendement !

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La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 22 .

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Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que celui de Laurent Baumel. Effectivement, la majorité précédente avait remis en cause, dans le projet de loi de finances pour 2009, l’avantage fiscal de la demi-part accordée aux veuves et aux veufs. En 2011, nous avons retardé de deux ans la mise en oeuvre du dispositif pour laisser aux personnes qui ne pouvaient pas apporter la preuve qu’elles avaient élevé seules un enfant pendant cinq ans la possibilité de la fournir. C’est donc sur les revenus de 2014 que l’effet de cette mesure a été plein et massif pour toutes ces personnes.

Or nous constatons dans nos permanences que les personnes les plus touchées sont souvent des femmes vivant seules avec de très faibles revenus. J’ai rencontré différentes associations de veuves, et les exemples qu’elles donnent sont édifiants. Il faut se pencher de nouveau sur cette question et la revoir, éventuellement avec un plafonnement, car ce dispositif apparaît à beaucoup comme une injustice.

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La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement no 190 .

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…et l’orphelin, éventuellement.

Je vois que l’opposition reconnaît ses erreurs. Dans ma circonscription, des retraités de l’agriculture, qui touchent environ 800 euros par mois, se trouvent en difficulté à cause de cette suppression, sur laquelle j’ai proposé que l’on revienne.

J’entends bien les différentes remarques, tout comme la proposition de mes collègues de réserver cet avantage aux personnes les plus en difficulté, mais il me semble qu’il serait bon de faire un effort particulier pour tous ceux qui sont largement en dessous de la retraite moyenne et parfois largement en dessous du seuil de pauvreté.

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Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

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Je vais examiner la question posée en trois points. Premièrement, la demi-part continue d’exister pour les Français qui ont élevé un enfant seuls pendant au moins cinq ans. S’ils sont encore seuls aujourd’hui, ils bénéficient de cette demi-part. Je ne voudrais pas accréditer l’idée dans l’hémicycle que cette demi-part n’existerait plus du tout.

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La demi-part n’a été supprimée que dans le cas où vous aviez élevé un enfant en couple, que votre conjoint était décédé et que vous bénéficiiez de l’avantage, même si les enfants n’avaient pas été élevés seuls. Il n’était pas envisageable de la supprimer dans le premier cas.

Deuxièmement, monsieur Baumel, vous évoquez le lien entre le revenu fiscal de référence et toutes les conséquences désastreuses qu’il a sur la fiscalité locale,…

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…la taxe d’habitation et la taxe foncière, mais aussi sur certaines mutuelles, comme chez EDF, qui conditionne l’ajout de votre conjoint à votre contrat, sous des conditions de revenu fiscal de référence. Dès lors qu’il est majoré, sans que le revenu n’ait changé, certains seuils sont dépassés, de sorte que les contribuables doivent payer de la taxe foncière ou de la taxe d’habitation.

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Nous aborderons l’examen de l’article 2 tout à l’heure, dans la soirée, et j’espère qu’il sera alors possible, monsieur le secrétaire d’État, d’envisager une amélioration.

Notre collègue Mme Pires Beaune a déposé un amendement pour opérer une dissociation, de façon à ce que de nombreux Français ne se mettent pas à payer la taxe locale et la taxe foncière, à cause de leur revenu fiscal de référence, alors que leurs revenus sont limités.

Troisièmement, votre amendement représente un coût de 1 milliard d’euros, soit 40 centimes de plus sur un paquet de cigarettes, dont le prix moyen passerait de 6,50 euros à 6,90 euros. Nous verrons à quel prix sera le paquet quand nous arriverons à la fin de cette discussion budgétaire…

Plus sérieusement, la question principale des Français que vous recevez dans vos permanences concerne essentiellement les taxes locales. C’est à mon sens ce problème que nous devons retenir et nous y reviendrons notamment à l’occasion de l’amendement de Mme Pires Beaune.

La commission a émis un avis défavorable sur ces différents amendements.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

C’est un sujet difficile, reconnaissons-le. Je vais vous dire la réalité de ma pensée – comme je le fais toujours, bien entendu.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Un avantage fiscal, puisque c’en est un, correspond généralement à une charge. Est-ce vraiment le cas ici ? Je n’en suis pas tout à fait certain. C’est un avantage fiscal qui a existé avant de disparaître, à la suite d’une décision de nos prédécesseurs, qui en avaient fait une bombe à retardement en différant son application, dont nous avons vu les effets dans le temps.

Certains ont pris la décision et d’autres ont subi son impact politique, lequel a été lourd, d’autant qu’il s’agit souvent de populations modestes, ce qui leur ajoute une difficulté financière en plus de leurs difficultés personnelles liées à la solitude, à la pauvreté ou au deuil. Ne limitons pas pour autant la situation aux veuves ou aux veufs, car il y a aussi d’autres cas.

L’impact financier d’un éventuel rétablissement de cet avantage, à un moment où nous n’avions pas le sou – nous n’en avons pas beaucoup plus aujourd’hui, d’ailleurs –, nous a conduits à ne pas revenir sur cette décision, qui ne concerne pas les personnes ayant élevé un enfant seules pendant au moins cinq ans. Mais le Gouvernement est sensible à la situation qui a été évoquée – je veux parler de l’impact du calcul sur le revenu fiscal de référence sur les réductions ou les exonérations d’impôts locaux.

Si je ne pouvais pas le dire il y a une heure ou deux, je peux désormais vous faire savoir que le Gouvernement sera favorable à l’amendement proposé par Christine Pires Beaune à l’article 2, qui vise à relever le seuil du revenu fiscal de référence ouvrant les droits à réduction ou à exonération d’impôts locaux.

« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Ceux-ci prennent en effet une place assez importante aujourd’hui, pour différentes raisons, dans les charges fiscales de nos concitoyens.

Ce n’est pas que nous n’ayons rien fait jusque là. Le revenu fiscal de référence a déjà été relevé, il y a deux ans, par votre rapporteur général de l’époque

Sourires

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

et revalorisé de façon plus importante que l’inflation, de même qu’un certain nombre d’autres mesures avaient été prises, comme le dégel du barème de l’impôt. Je ne vous propose pas exactement un troc entre un amendement qui induit un coût de 150 à 200 millions d’euros et celui-ci qui coûte, en quelque sorte, entre 800 et 900 millions d’euros.

Nous ferons toutefois un premier pas, en relevant le revenu fiscal de référence, qui ouvre droit aux réductions d’impôt. Encore faut-il toujours faire preuve de pédagogie, parce qu’une confusion existe. Les gens pensent que, quand ils ne sont pas imposables, leurs impôts locaux sont automatiquement réduits voire qu’ils en sont exonérés, alors que cela dépend de leur revenu fiscal de référence. Vous connaissez tous ici ce dispositif, lequel me semble d’ailleurs plus juste, puisque les crédits d’impôt permettaient parfois à des gens de passer sous le seuil, alors même que leurs revenus étaient plus importants que d’autres.

À ce stade, le Gouvernement est donc défavorable à cette série d’amendements. Il vous proposera de faire un pas, certes d’une ampleur moindre que celui que vous demandez, mais qui nous semble plus juste. Les personnes âgées ou à faible revenu méritent effectivement que nous portions un regard particulier sur les exonérations fiscales qui procèdent de ce plafond.

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Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour ces explications et ces perspectives intéressantes. Je vais tout de même maintenir mon amendement. En effet, j’ai cette habitude, car je ne suis pas un amateur des amendements d’appel. Je considère que, lorsqu’un amendement vient dans l’hémicycle, il doit être soumis au vote. Deuxièmement, je ne suis pas en mesure de voir les avantages et les inconvénients comparés des deux solutions qui sont proposées ici.

Et puis troisièmement, je ne suis pas sensible à l’argument du coût de cette mesure car je considère, avec d’autres collègues, qu’il existe des sources de financement possibles dans les rééquilibrages des dépenses fiscales entre celles qui sont consacrées aux entreprises et celles consacrées aux ménages.

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Dans de tels dispositifs, des erreurs, ayant des origines multiples, peuvent être commises – celle-ci en est une. Notre groupe la regrette bien évidemment. Quand on rencontre les intéressés, on se fait nous aussi tancer sur ces sujets.

Je rappellerai tout de même que la précédente majorité avait fait le choix de relever le minimum vieillesse, appelée depuis l’allocation de solidarité pour les personnes âgées, l’ASPA. Celle-ci avait été relevée de 25 % entre 2008 et 2012. Je souhaite remettre dans le contexte de l’époque l’évolution du dispositif dont nous débattons. Il est vrai qu’il y a eu contradiction entre la suppression de la demi-part et la revalorisation du minimum vieillesse. Cette dernière était censée s’adresser à peu près aux mêmes cibles, c’est-à-dire aux femmes seules qui n’avaient pas beaucoup cotisé et âgées de plus de soixante ans, et n’oublions pas, je le répète, que le contexte était différent d’aujourd’hui et qu’il fallait tenir de cette revalorisation considérable. Les deux mesures sont alors entrées en conflit.

Aujourd’hui, nous sommes d’accord avec Laurent Baumel. Mea culpa de la part de l’ex-majorité.

« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Il faut revenir sur cette suppression et nous voterons son amendement.

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Où sont les mesures d’économie ? Démagogie, quand tu nous tiens !

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J’indique d’abord que le groupe socialiste soutiendra l’amendement de notre collègue Christine Pires Beaune qui a déjà été évoqué et dont nous débattrons tout à l’heure.

Il est vrai que nous avons identifié un certain nombre de problèmes qui se concentrent principalement, comme l’a dit la rapporteure générale, sur le mécanisme du revenu fiscal de référence, le RFR. En effet, des personnes demeurées non imposables peuvent se retrouver assujetties aux impôts locaux, notamment à la taxe foncière. Cela leur pose d’autant plus de difficultés que ces impôts sont totalement décorrélés du revenu. Cet inconvénient avait été identifié de longue date puisque j’avais déposé avec Christian Eckert, il y a deux ans, un amendement différant d’un an l’assujettissement à l’imposition. De plus, nous avions revalorisé au moins à une reprise le RFR pour que celles et ceux qui sont les plus proches des seuils d’imposition – il s’agit de revenus très bas, autour de 13 000 euros annuels – ne soient pas touchés.

Le type d’avantage fiscal dont nous débattons en ce moment bénéficie bien évidemment pour l’essentiel à des personnes imposables et sans plafonnement de ressources, ce qui pose question. Je rejoins sur ce point mon collègue Pascal Cherki. Mais je ne suis pas certain qu’il y ait 5 % des retraités qui touchent plus de 3 000 euros par mois. Par conséquent, sa proposition ne plafonnerait pas grand-chose.

Il est vrai que les recettes fiscales de telles mesures proviendraient principalement des retraités les plus aisés, qui, eux, pourraient avoir la capacité de faire cet effort pour des raisons que M. le secrétaire d’État a parfaitement expliqué. C’est un problème auquel nous revenons de manière systématique. Par conséquent, quand nous réfléchissons à des réformes fiscales, il faut essayer de concevoir un système qui permette de ne pas aboutir à ce que plus on se situe dans les déciles élevés de revenus, plus on a des taux marginaux élevés et plus on est bénéficiaire de ces avantages fiscaux, alors qu’entrant dans l’impôt pour avoir dépassé le seuil de l’échelle des revenus, on en prend plein pot. C’était un des éléments du rapport que j’avais rendu après la tenue du groupe de travail sur la fiscalité des ménages, constatant qu’il y a des effets de seuil extrêmement pervers en bas de barème.

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L’amendement que je présenterai aura un lien non pas avec l’impôt sur le revenu lui-même mais avec les impôts locaux – et pas seulement, parce qu’il y a aussi la redevance télé, voire le livret d’épargne populaire. C’est d’ailleurs ce qui nous avait amenés, il y a deux ans, à rehausser le revenu fiscal de référence.

Mme la rapporteure générale a rappelé que la demi-part dont nous débattons concerne aussi d’autres personnes isolées. Pour ma part, je voudrais qu’on se pose de nouveau, quand ce sera possible, la question suivante : une personne qui a certes élevé seule son enfant ou ses enfants pendant cinq ans – c’est mon cas –, mais qui n’a plus d’enfant à charge aujourd’hui, doit-elle conserver une demi-part ? Je me pose vraiment la question.

Je sais qu’on doit cette mesure à notre collègue Charles de Courson, mais je pense que le sujet méritera débat car il y aurait des économies à faire là-dessus. Par contre, pendant les cinq ans que j’ai évoqués, n’y aurait-il pas une politique familiale spécifique à mettre en oeuvre, compte tenu des difficultés que peuvent éprouver certaines familles monoparentales ?

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Mes chers collègues, vous êtes plusieurs à demander la parole.

Chacun d’entre vous aura donc droit à une minute.

La parole est à M. François Pupponi, rapporteur pour avis.

Sourires.

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En bref, je suis favorable à l’amendement et à ce que propose le Gouvernement car cela va dans le bon sens, mais il faut tout de même expertiser cette mesure pour savoir qui va payer cette dépense fiscale et à hauteur de combien.

Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Second point : compte tenu de ce qu’a dit notre collègue Christine Pires Baune sur les avantages acquis, ne peut-on pas trouver une solution pour que ceux-ci soient maintenus pour les personnes qui en bénéficient aujourd’hui, mais supprimées pour les suivantes ? On légiférerait donc sur le flux, mais pas sur le stock.

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Vous avez parlé moins d’une minute, mon cher collègue.

Sourires.

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Si on abroge la suppression de la demi-part, cela reviendrait à relever, sauf erreur de ma part, le revenu fiscal de référence de 33 %. L’amendement de Christine Pires Beaune, que nous devrons évidemment voter, vise, quant à lui, à le revaloriser de 2 %. Je pense que là se trouve l’explication de l’écart entre les 150 millions et le milliard.

Monsieur le secrétaire d’État, serait-il possible de savoir, quand nous en viendrons à l’amendement, le nombre de personnes concernées, et s’il ne serait pas envisageable d’aller un peu au-delà de 2 % ?

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Je me range à l’analyse de Mme la rapporteure générale. Il est certain que pour les personnes veuves, l’impact principal n’est pas tant l’impôt sur le revenu que les impôts locaux, qui pèsent très souvent bien plus lourds, ou même la redevance audiovisuelle. Je signale qu’en relevant le seuil du RFR, on va faire passer du bon côté un certain nombre de personnes seules, mais que les autres resteront du mauvais côté. Alors que le Gouvernement va faire au cours des débats tout ce qu’il faut pour que les impôts locaux augmentent vu ce qu’il va faire à la DGF, cela va encore accentuer l’inégalité qu’il essaye de compenser.

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Je n’ai pas la prétention d’épuiser le sujet avec mon amendement, bien loin de là et, après avoir entendu les propositions de M. le secrétaire d’État, je suis prêt à le retirer. Toutefois, j’aimerais savoir, comme Mme Berger, combien de gens vont être concernés et dans quelle tranche. Ma préoccupation, ce sont les veuves qui ont les revenus les plus bas et qui se retrouvent à devoir payer la taxe d’habitation, la redevance télé et d’autres impôts encore.

L’amendement no 190 est retiré.

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La parole est à M. Charles de Courson, soumis au même régime horaire que les orateurs précédents.

Sourires.

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Il semble que tout le monde ignore ce qui se passait auparavant. On avait en réalité étendu la demi-part des veuves de guerre aux veuves et aux veufs civils. Par conséquent, si vous aviez le malheur de perdre votre conjoint avec encore des enfants à charge, vous bénéficiiez d’une demi-part et vous la conserviez jusqu’à votre mort.

On voit bien qu’il y avait un énorme problème, qu’a soulevé d’ailleurs Mme Pires Baune : si, au contraire, vous éleviez vos enfants et que vous aviez le bonheur de rester en couple, vous n’aviez droit à rien du tout, et pas plus si vous perdiez votre conjoint alors que vos enfants n’étaient plus à votre charge. Les veuves et les veufs étaient donc traités de façon différente selon leur situation sur ce point. Heureusement, le Conseil constitutionnel n’avait jamais été saisi de cette question.

Dans le système actuel, le seul problème qui demeure…

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Votre temps de parole est écoulé, monsieur de Courson.

La parole est à M. Éric Alauzet.

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La différence entre les 200 millions et les 800 millions est sans doute due aussi au fait que l’amendement de notre collègue permettrait d’agir sur les dépenses liées – taxe d’habitation, redevance télé, etc. –, mais restera de toute façon la question du surcoût d’impôts. Par conséquent, j’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous indiquiez précisément quelle était la part liée à l’impôt sur le revenu sur les 800 millions.

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Soit on pense qu’il est juste de rétablir cette demi-part des veuves – ce qui est mon cas, surtout, pour reprendre l’argumentation de Laurent Baumel, au vu des choix économiques faits vis-à-vis des entreprises par rapport aux ménages –, et il faut alors s’en donner les moyens, soit on ne le fait pas du tout. La solution mi-chèvre mi-chou qui consiste à faire payer le rétablissement de cette demi-part par les collectivités locales par l’intermédiaire des exonérations de taxes d’habitation et de taxes foncières me paraît mauvaise parce que cela va encore gréver leurs recettes, sachant que ce sera encore plus compliqué cette année avec les mesures sur la DGF. Tout le monde doit assumer la solidarité, mais ce n’est pas aux collectivités de le faire à la place de l’État.

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J’ai souvenir, monsieur le secrétaire d’État, que nous avions discuté des simulations sur l’évolution de la demi-part des veuves, qui est montée en puissance en quelques années, et nous n’avions jamais les mêmes chiffres sur le coût du dispositif et sur ce qu’il rapportait. La demi-part des personnes veuves a eu un effet catastrophique pour celles qui entraient dans l’impôt.

Il aurait fallu trouver un mécanisme qui les en empêche en cas de suppression de la demi-part,…

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…parce que je rappelle que le fait d’être imposable à l’IR entraîne des effets en cascade : on paye les impôts locaux et on ne bénéficie plus des services gratuits réservés aux personnes non imposables. Cette année, on reçoit dans nos permanences des personnes veuves non imposables qui viennent nous voir parce qu’elles paient un impôt local qui peut atteindre 1 000 euros à 1 500 euros. Il y a longtemps qu’on traîne ce sujet, plus précisément depuis 2012. C’est un grave problème fiscal que celui des bas revenus pour les personnes veuves.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Deux éléments de réponse. Premièrement, pour répondre précisément à la question d’Éric Alauzet, je rappelle qu’il s’agit du coût fiscal – de mémoire, 865 millions.

Deuxièmement, s’agissant de la question, soulevée à deux reprises, de savoir qui va payer, l’essentiel de la prise en charge incombera à l’État, avec une prise en compte des taux historiques pour l’une des deux exonérations.

Mais après tout, mesdames, messieurs les députés, si on demande à l’État de venir en aide aux plus modestes, pourquoi les collectivités locales ne le pourraient-elles pas aussi, de surcroît pour une part assez faible ?

Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

C’est mon point de vue. Vous avez le droit de ne pas être d’accord. De toute façon, vous n’êtes jamais d’accord sur rien.

Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Les collectivités locales sont les vaches à lait de la République !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Il y a quand même un vrai problème, qui est d’ailleurs le même lorsque l’on parle de la participation de tous à l’effort de réduction de la dépense. Mais c’est un autre sujet.

Voilà, madame la présidente, la réponse que je voulais apporter avant de demander une suspension de séance.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à dix-neuf heures quarante.

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La séance est reprise.

Sur l’amendement no 776 , je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Pascal Cherki.

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Tout en saluant l’avancée du Gouvernement et le travail de Mme Pires Beaune, je persiste à penser que la proposition de Laurent Baumel, sous-amendée par M. Féron et moi-même, a le mérite d’une plus grande visibilité politique. Pour éviter certaines injustices, nous avons fixé un plafond de 3 000 euros de revenus. Il me paraît juste de pouvoir englober dans cette disposition les veuves de la classe moyenne. Je note l’effort qui sera fait pour les veuves des classes populaires. N’oublions pas non plus les personnes âgées et les veuves de la classe moyenne !

Je maintiens donc mon sous-amendement.

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Un scrutin public mérite une explication de vote : le groupe socialiste se prononcera contre le sous-amendement de M. Féron et l’amendement de M. Baumel, en remerciant nos collègues d’avoir rappelé son sens, que nous avons bien compris. Un tel rappel a au moins permis de rafraîchir la mémoire de l’opposition et d’obtenir enfin un aveu de la paternité de cette mesure et de la manière dont elle avait été décidée.

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Ce vote s’explique par l’engagement que nous avons reçu du Gouvernement qu’il accepterait l’amendement déposé par Mme Pires Beaune – texte qui pourra probablement être enrichi et amélioré ce soir.

Cet amendement vise des publics plus larges et répond au problème politique que nous rencontrons de personnes hier non imposables et ne payant pas les impôts locaux, qui doivent aujourd’hui, tout en restant non imposables, acquitter les impôts locaux du fait du jeu très complexe du revenu fiscal de référence. Une part importante de ces personnes, parmi les plus modestes, tireront profit de la mesure de revalorisation, que nous avions déjà prise il y a deux ans. Dans le contexte actuel, nous avons intérêt à concentrer les efforts financiers supplémentaires que nous allons faire sur ces catégories, qui sont proches du seuil d’imposition.

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M. Lefebvre manque un peu de mémoire sur ce sujet. Comme Charles-Amédée de Courson l’a très bien rappelé, cette demi-part supplémentaire était à l’origine au profit des veuves de guerre. Elle a été ultérieurement étendue aux veuves civiles. C’est à ce titre, je le rappelle, que le gouvernement précédent avait été dans l’obligation de revenir sur cette disposition, puisqu’elle était anticonstitutionnelle.

Lorsque j’entends M. Lefebvre dire que les 150 ou 200 millions d’euros de l’amendement de Mme Pires Beaune permettraient de toucher un public plus large que la mesure de M. Baumel, qui coûtera près d’1 milliard d’euros, je comprends mieux que nous ayons des divergences d’appréciation et d’analyse des chiffres.

Dans l’amendement qui sera proposé tout à l’heure, messieurs et mesdames les députés de la majorité, la vraie question est de savoir si vous n’allez pas, encore une fois, mettre à contribution les collectivités territoriales dans le cadre du relèvement du revenu fiscal de référence.

Aussi, le groupe Les Républicains votera pour l’amendement de M. Baumel.

Le sous-amendement no 812 n’est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants: 49 Nombre de suffrages exprimés: 46 Majorité absolue: 24 Pour l’adoption: 19 contre: 27 (L’amendement no 176 n’est pas adopté.)

L’amendement no 22 n’est pas adopté.

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La parole est à M. Dominique Baert, pour soutenir l’amendement no 216 .

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Cet amendement a été adopté par la commission des finances, et je remercie Mme la rapporteure générale de me laisser le présenter.

Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à cet amendement, de même d’ailleurs que beaucoup dans cet hémicycle. Souvenez-vous : quand vous étiez sur nos bancs, j’avais proposé de ramener de 75 à 70 ans l’âge à partir duquel est accordé aux anciens combattants le bénéfice de la demi-part supplémentaire au titre de l’impôt sur le revenu. Aussi ne ferai-je aujourd’hui que trois remarques.

Je veux en premier lieu souligner le sens de la mesure qui anime les signataires de cet amendement : celui-ci tient en effet compte de nos capacités budgétaires, en portant de 75 à 74 ans seulement l’âge d’accès à la demi-part supplémentaire.

En deuxième lieu, je rappelle que j’avais promu cette idée dès le début du quinquennat. Le Gouvernement m’avait alors répondu qu’il fallait plutôt présenter des mesures de ce genre à l’occasion des derniers budgets du quinquennat.

Rires et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Eh bien, nous y sommes, monsieur le secrétaire d’État !

Enfin, plus sérieusement, j’ai la conviction que cet amendement est un geste utile à destination des anciens combattants.

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Car enfin, qui ne voit que si, pour bénéficier de cette demi-part supplémentaire, il faut avoir 75 ans, celui qui avait 20 ans dans les Aurès en 1961 n’y a pas encore droit, et que, dans le même temps, nombre de ceux qui auraient pu en bénéficier sont malheureusement déjà disparus. Quand on voit l’évolution dégressive du nombre de combattants, chacun comprendra que le coût en 2016 de cette mesure ne sera que de l’épaisseur d’un trait !

Le présent amendement a été adopté par des collègues de tous les bancs membres de la commission des finances. Merci, monsieur le ministre, de vous en remettre à la sagesse de l’Assemblée, voire de nous donner votre accord pour qu’il soit adopté.

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La commission a adopté cet amendement, tout simplement au titre de la reconnaissance de la nation envers les anciens combattants : c’est la raison de fond qui nous a incités à voter en sa faveur.

En outre, cet amendement, contrairement à d’autres qui avaient été proposés à l’examen de la commission, porte sur les flux entrants, et non sur le stock de population. En termes d’impact budgétaire, le coût n’est pas le même : nous l’estimons à entre 20 et 30 millions d’euros, ce qui devrait être acceptable, surtout au regard de la reconnaissance que nous devons aux anciens combattants.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement ne souhaite pas aller dans ce sens,…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…et cela pour plusieurs raisons.

D’abord, la demi-part supplémentaire accordée aux anciens combattants constitue une importante et coûteuse exception au principe du quotient familial, qui doit conserver un caractère exceptionnel. Aujourd’hui, cette disposition a un coût de l’ordre de 500 millions d’euros.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Eh bien moi, j’y crois, monsieur Baert !

Rires.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Ce sont en tout cas les chiffres que m’indiquent mes services.

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Mais il s’agit de la dépense fiscale totale ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Oui, c’est bien ce que j’ai dit.

La dépense supplémentaire qu’entraînerait l’adoption de votre amendement serait, toujours selon mes services, de l’ordre de 44 millions d’euros.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Cela serait donc coûteux.

Surtout, le Gouvernement entend proposer, aux articles 50 et 51, deux autres dispositions – qui, certes, ne concernent pas nécessairement les mêmes personnes.

D’une part, nous souhaitons étendre le bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord, militaires d’active et appelés du contingent, agents de la fonction publique et assimilés. L’article 50 accroît le nombre de personnes concernées, et cela quel que soit l’âge auquel elles ont liquidé leur pension.

D’autre part, à l’article 51, nous créons une allocation au profit des conjoints et ex-conjoints survivants non remariés d’anciens membres des formations supplétives ne pouvant plus demander le bénéfice de l’allocation de reconnaissance. Mais nous reparlerons ultérieurement de ces dispositions.

Quelqu’un soulignait dernièrement que l’allongement de la durée de la vie était une réalité, même si elle ne concernait pas tout le monde. Si l’on adoptait cet amendement, on irait à rebours de cette réalité. Si je vous le dis, c’est que c’est une remarque que l’on peut se faire, même si elle paraît un peu sordide… Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

L’amendement no 216 est adopté.

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Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement lève-t-il le gage ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Le Gouvernement avisera en fonction du nombre d’amendements adoptés ultérieurement.

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Au moins aura-t-il la certitude que je ne présenterai plus l’amendement l’année prochaine !

Rires.

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La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 108 .

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J’annonce d’ores et déjà que, vu les informations relatives au coût de cette mesure qui m’ont été transmises, je retirerai l’amendement. Je vais néanmoins le présenter.

Lui aussi concerne les veuves d’anciens combattants. Aujourd’hui, si vous êtes veuve d’un ancien combattant décédé à plus de 75 ans, vous avez droit à une demi-part supplémentaire, mais si, par double malheur, votre conjoint décède à 74 ans, vous n’y avez pas droit.

Comme je l’ai annoncé, je retire l’amendement.

L’amendement no 108 est retiré.

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La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 89 .

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Cet amendement vise à permettre aux associations de consommateurs de bénéficier d’une déductibilité des cotisations, ce qui est déjà le cas pour les associations d’origine syndicale.

Le mouvement des associations de consommateurs reste faible en France. Si la loi Hamon a créé les actions de groupe, force est de constater que le bilan de ces dernières est extrêmement faible, voire quasi nul.

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Parce que 500 000 Français, c’est quasi nul ?

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Quasi nul, je le répète, cher Razzy Hammadi. D’ailleurs, votre action de groupe simplifiée n’a jamais été utilisée, je crois.

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C’est faux ! Vous racontez n’importe quoi !

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Mais j’imagine que ce sera pour bientôt…

C’est la preuve que, si l’on fait une loi, il faut aller jusqu’au bout de sa logique, et permettre aux associations de consommateurs de fonctionner en tant que telles pour que les actions de groupe soient véritablement utiles.

C’est pourquoi le présent amendement tend à permettre à ces associations de bénéficier d’une déductibilité des cotisations.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Même avis.

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Je voudrais rectifier deux erreurs de M. Abad – en espérant qu’il ne s’agit pas de deux mensonges… Mais chacun pourra vérifier.

Il y a aujourd’hui 500 000 Français qui sont engagés dans des actions de groupe.

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Mais savez-vous combien d’actions de groupe ont été engagées depuis que la loi a été adoptée ?

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Je ne suis pas là pour répondre à vos questions, monsieur Abad, j’essaie de corriger vos erreurs !

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Seulement trois actions ont été engagées, monsieur Hammadi !

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Ce sont donc, disais-je, 500 000 Français qui sont engagés dans des actions de groupe – c’est le premier point.

Quant à l’action de groupe simplifiée, elle a d’ores et déjà été utilisée une demi-douzaine de fois, notamment pour des actions dans lesquelles plus de mille personnes étaient engagées.

Voilà les chiffres officiels, issus des évaluations qui ont été réalisées et qui sont reconnus par les associations de consommateurs. Si l’on s’en tient à votre argumentation fausse, on ne voit pas quel intérêt il y aurait à adopter cet amendement.

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Nous ne parlons pas de la même chose, monsieur Hammadi. Moi, je parle du nombre d’actions de groupe engagées, vous, du nombre de personnes concernées par les actions de groupe. Or le nombre d’actions de groupe engagées est extrêmement faible.

L’action de groupe devrait être un moyen d’améliorer les relations commerciales, d’améliorer les relations entre chacun des acteurs. Force est de constater qu’aujourd’hui, le compte n’y est pas. Les actions de groupe, telles que vous les avez proposées, ne fonctionnent pas dans la réalité économique actuelle.

L’amendement no 89 n’est pas adopté.

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Nous en venons à une série d’amendements, nos 497 , 158 , 496 et 529 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 158 , 496 et 529 sont identiques.

La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 497 .

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Mes chers collègues, nous essayons d’orienter l’épargne vers les PME ; nous avons donc mis en place des dispositifs d’incitation à l’investissement, par l’intermédiaire du dispositif ISF PME ou du dispositif IR PME – l’un étant exclusif de l’autre.

Le présent amendement vise à étendre l’éligibilité à ces dispositifs aux groupements fonciers agricoles – GFA – mutuels et aux groupements fonciers agricoles d’investissement. Il existe en effet un gros problème de portage du foncier si l’on veut permettre l’installation des jeunes générations, de plus en plus d’installations se faisant en dehors du cadre familial. Il serait par conséquent nécessaire d’étendre l’éligibilité aux dispositifs susnommés, dans les mêmes conditions et avec les mêmes plafonds, aux parts de GFA.

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Nous passons aux amendements identiques.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement no 158 .

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Cet excellent amendement présenté par Mme Vautrin et nombre de nos collègues tend à instituer une réduction d’impôt comparable à celle existant déjà pour les investissements dans les PME.

Comme l’a dit le collègue de Courson, les GFA mutuels et d’investissement constituent des structures très intéressantes pour les professionnels. Une réduction d’impôt comparable à celle existant pour les investissements dans les PME permettrait de pallier leur faible attractivité, liée à une rentabilité trop modeste, et de les dynamiser. Tel est l’objet de cet amendement.

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La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 496 .

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La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement no 529 .

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Cet amendement a le même objet que celui de Charles-Amédée de Courson. Il s’agit de mettre en place une réduction d’impôt comparable à celle existant pour la souscription au capital de certaines PME, ce qui permettrait de redynamiser les GFA et d’espérer mener à bien les projets de portage indispensables à la sauvegarde des exploitations familiales.

Vu le prix actuel du foncier, les jeunes ne peuvent en acquérir, à moins de s’endetter sans avoir la possibilité de rembourser. Il existait précédemment un système de démembrement visant à amortir une partie du foncier, mais il a été supprimé ; c’est regrettable.

Alors, monsieur le secrétaire d’État, tournez-vous vers notre jeunesse pour qu’elle puisse continuer à gérer des PME et de petites exploitations !

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Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ?

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La commission a émis un avis défavorable sur tous les amendements.

Les GFA bénéficient déjà d’une exonération d’ISF – comme les PME, me direz-vous – et d’une exonération des droits de mutation lors des transmissions – comme les PME, me direz-vous encore. Sauf que l’on sait qu’un certain nombre de GFA ont été constitués dans un but patrimonial, c’est-à-dire pour assurer le portage du foncier.

Favoriser les nouveaux entrants via l’exonération fiscale que vous proposez pourrait, dans certains cas, avoir une réelle utilité économique, mais, dans d’autres, reviendrait à faciliter la constitution d’un patrimoine.

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Vous faites une comparaison entre les GFA et les PME, mais je ne crois pas que leurs objets soient exactement les mêmes, certains GFA étant utilisés à des fins purement patrimoniales. C’est pour cette raison que la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Le Gouvernement est défavorable à ces amendements, car les groupements fonciers agricoles mutuels et d’investissement bénéficient déjà de nombreux avantages. La déduction Madelin concerne les mandats agricoles, mais elle s’appuie sur les sociétés exerçant une activité agricole. Les groupements fonciers agricoles disposent pour leur part d’avantages spécifiques : en matière d’ISF, d’une exonération de 75 % de la valeur des parts, puis de 50 % au-delà de 101 897 euros ; en matière de droits de mutation, d’une exonération de 75 % de la valeur des parts. Tout cela n’est pas rien, et vous conviendrez que l’effort de la collectivité envers les GFA est déjà appréciable : il ne serait pas opportun de soutenir davantage ce type de placements.

Qui plus est, c’est une nouvelle niche fiscale que vous nous proposez de créer, alors même que vous avez dénoncé tout à l’heure avec vigueur la multiplication des niches fiscales.

J’ajoute, s’il fallait vous convaincre davantage, que ce dispositif ne me paraît pas conforme aux règles européennes encadrant les aides d’État. J’invite donc l’Assemblée nationale à rejeter ces amendements.

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Je pense, monsieur le secrétaire d’État, que vous faites fausse route. Pour examiner cet amendement, il ne faut pas avoir une considération régionale. Actuellement, l’agriculture évolue très vite. La tendance générale, qui se vérifie un peu partout, est à l’augmentation de la taille des exploitations. Le capital d’exploitation est de plus en plus important : les fermes faisaient autrefois 30 ou 40 hectares ; aujourd’hui elles comptent 200, 300, 400 hectares ou plus.

Cela signifie que le schéma traditionnel, selon lequel les enfants qui succèdent à leurs parents rachètent les parts de leurs frères et soeurs, ne peut plus fonctionner. En effet, il y a tellement de capital à acheter que celui qui a décidé de s’installer comme jeune agriculteur ne peut pas y arriver. Le GFA est donc un outil qui permettrait de contourner cette difficulté et de se projeter vers l’avenir, en permettant à des investisseurs non directement professionnels de porter le capital de l’entreprise.

En tournant le dos à cette possibilité, c’est un peu comme si vous obligiez les patrons de PME, à chaque génération, à racheter 100 % des actions de l’entreprise : c’est quasiment impossible. Ce n’est donc pas une niche fiscale que nous vous proposons, mais plutôt un projet d’avenir pour l’agriculture.

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Je vous trouve fermé, monsieur le ministre, car il ne s’agit pas de créer une niche fiscale, mais d’étendre une niche existante.

Imaginons une entreprise agricole qui détient du foncier, du matériel : puisque c’est une entreprise, les personnes qui souhaitent souscrire à son capital peuvent bénéficier de la réduction d’impôt « Madelin ». Imaginons à présent que le foncier soit placé dans un GFA, dispositif plus lourd, et que ce GFA loue ce foncier, par un bail à long terme, à l’entreprise agricole : dans ce cas, les souscriptions ne sont pas éligibles à la réduction « Madelin ». Pourtant, la différence pratique entre ces deux cas est nulle. Il s’agit donc plutôt d’aménager des dispositifs qui existent déjà, notamment la réduction d’impôt « Madelin », que vous avez rappelée.

Étant donné qu’il est très difficile d’attirer des capitaux dans les GFA, ceux-ci ne prolifèrent pas : on peut le constater partout en France. Entre nous, je pense donc que le risque de dérapage impliqué par ces amendements serait limité à 10 ou 15 millions d’euros. Cela m’étonnerait que le coût aille au-delà. Or vous avez distribué tout à l’heure quelques petites gâteries, monsieur le secrétaire d’État – vous avez même donné votre accord à un amendement que nous examinerons ce soir, et dont le coût est de 150 millions d’euros.

Monsieur le secrétaire d’État, vos services vous ont-ils transmis une évaluation du coût du dispositif décrit par ces amendements ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Non, mais j’y suis défavorable. Ce n’est pas parce qu’un amendement ne coûte pas cher qu’il est forcément pertinent !

L’amendement no 497 n’est pas adopté.

Les amendements identiques nos 158 , 496 et 529 ne sont pas adoptés.

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La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2016.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures trois.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly