La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 423 à l’article 1er.
suite
Il s’agit d’un amendement important qui concerne l’agriculture de montagne. Il vise à préciser la spécificité de cette agriculture au sein de la grande famille du monde agricole, en prévoyant que la loi puisse autoriser des soutiens spécifiques dans certains cas particuliers, qu’il s’agisse des effluents d’élevage, des bâtiments des zones de montagne ou du fait que les animaux sont enfermés pendant six mois l’hiver – on pourrait multiplier les exemples. Je rappelle que, dans ces territoires, l’activité agricole est extrêmement importante, à la fois parce qu’elle maintient de l’activité économique et parce que nous avons souvent affaire à des pluriactifs : l’activité touristique des stations de ski, en été comme en hiver, se fait sur un terrain de jeu qui est en fait le terrain de travail du monde agricole.
Dans les zones de montagne, l’usure du matériel agricole est beaucoup plus importante qu’en plaine, et les constructions doivent être étudiées pour pouvoir supporter les conditions hivernales et permettre plus de stockage fourrager. L’adaptation des outils de production à ces contraintes de milieu engendre des coûts supplémentaires élevés qui freinent la reprise des exploitations agricoles. En outre, l’adaptation des bâtiments aux normes est plus contraignante en zone de montagne. La prise en compte des surcoûts liés à cette localisation est donc essentielle, notamment pour les bâtiments d’élevage, coeur de la pérennité de l’exploitation dans ces territoires.
La parole est à Mme Annie Genevard, rapporteure de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission sur ces deux amendements.
Ces amendements sont rédigés en des termes qui sont quasiment les mêmes que de l’alinéa 2 de l’article 15 A. Nous considérons donc qu’ils sont satisfaits, mes chers collègues, et vous suggérons de les retirer. À défaut, l’avis serait défavorable.
La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, pour donner l’avis du Gouvernement.
Même position.
Ces amendements sont très importants pour soutenir la spécificité de notre agriculture de montagne, qui souffre beaucoup. Il faut en particulier des aides pour la création de retenues collinaires. C’est en effet une solution de bon sens : retenir l’eau quand il y en a, pour l’utiliser quand il n’y en n’a pas… Ces amendements contribueront à soutenir spécifiquement cette agriculture qui en a bien besoin.
L’amendement no 27 est retiré.
À la lumière des explications de Mme la rapporteure, je retire mon amendement.
L’amendement no 83 est retiré.
C’est Damien Abad qui est l’auteur de cet amendement, qui est similaire au précédent. Il vise à prendre en compte le fait qu’en zone de montagne, l’usure du matériel agricole est plus importante qu’en plaine et les constructions doivent être étudiées pour être capables de supporter les conditions hivernales.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.
Ma réponse sera la même que celle d’Annie Genevard pour l’amendement précédent. Je vous lis l’article 15 A : « Ces mesures comprennent, d’une part, une aide directe au revenu bénéficiant à tout exploitant agricole en montagne et proportionnée au handicap objectif et permanent qu’il subit et, d’autre part, l’accompagnement apporté aux constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole et aux outils de production et de transformation. » Je crois donc vraiment, monsieur le député, que nous avions devancé en commission votre attente et celle de M. Abad.
Même position.
L’amendement no 25 est retiré.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement no 292 .
C’est un amendement que j’ai déposé conjointement avec Mme Genevard. En commission, nous avions inséré un nouvel alinéa dont nous convenions tous qu’il n’était pas forcément bien placé à l’article 1er, mais qu’il fallait néanmoins acter pour trouver une formule qui corresponde mieux aux attentes exprimées. Plus généralement, il fallait se situer dans l’esprit de cet article 1er. C’est pourquoi nous proposons de rédiger ainsi l’alinéa 11 : « 3o bis De favoriser une politique d’usage partagé de la ressource en eau ; » Nous aurons par ailleurs l’occasion de revenir sur cette question lors de la déclinaison des objectifs dans différents articles.
Favorable.
Je comprends l’esprit de l’amendement, mais je voudrais une précision car au cours de cette grande discussion, nous avions introduit la notion de stockage de l’eau. Cette notion disparaîtrait-elle avec cet amendement ?
En commission, nous avions énuméré un certain nombre d’éléments devant figurer à l’article 1er. Cependant, il s’agit d’un article d’ordre général. Nous proposons donc d’en revenir à une formulation moins détaillée sachant qu’après l’article 23, nous examinerons des amendements permettant de décliner cet article général, y compris le stockage, au titre de la déclinaison de la gestion partagée de la ressource en eau.
Une question complémentaire, mesdames les rapporteures : les amendements auxquels il vient d’être fait référence ont-ils reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement ?
Pour être précise, il s’agira d’un amendement de vos rapporteures avec vraisemblablement, sans vouloir anticiper, un sous-amendement proposé par un de nos collègues. La formulation finale retiendrait alors la notion de promotion d’une politique active de stockage de l’eau.
L’amendement no 292 est adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 218 .
L’article 1er énumère en particulier les finalités de l’action de l’État. Quand on en prend connaissance, on y trouve les industries, le tourisme, l’eau, la préservation du patrimoine naturel, le patrimoine culturel, la transition numérique et j’en passe… mais n’apparaît pas la forêt ! D’où cet amendement pour « encourager et accompagner la gestion durable des forêts et le développement de l’industrie de transformation des bois ».
Nous considérons que l’amendement est satisfait par l’alinéa 7 de l’article 1er, qui précise que l’État encourage les industries liées à la montagne, ce qui comprend les industries de transformation du bois, par son alinéa 12, qui prévoit qu’il veille à la préservation du patrimoine naturel, y compris donc les forêts, et enfin par l’article 8, qui prévoit que la problématique de la gestion durable des forêts et du développement de l’industrie de transformation des bois est prise en compte par les schémas interrégionaux de massif. L’avis est par conséquent défavorable.
Cet amendement est en effet pour partie satisfait, mais il s’agit d’un des secteurs particulièrement importants dans les zones de montagne. Je me joindrai à la position de la commission si vous vous y ralliez, monsieur le député. Dans le cas contraire, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée.
Je ne suis absolument pas convaincu par l’argumentation de Mme la rapporteure. J’ai des difficultés à comprendre qu’on puisse décliner plusieurs axes importants de la politique de la montagne sans mentionner ne serait-ce qu’une fois le mot « forêt ». Je comprends bien que, pour différentes raisons, il faille montrer patte rose pour qu’un amendement reçoive un avis favorable, mais quand il s’agit de façon tellement évidente d’un oubli, je trouve regrettable qu’on me balade ainsi, avec une argumentation qui ne repose sur rien.
Je pense qu’André Chassaigne a raison, et les communes forestières et associations concernées se sont d’ailleurs émues de la place tout de même réduite de la forêt dans l’ensemble du texte. Il s’agit de préciser que la gestion durable des forêts et le développement de l’industrie de transformation des bois est un élément important : cela va mieux en le disant, parce que nous ne sommes tout de même pas le pays qui a le plus développé ce type de filières.
Nous avons fait un bout de chemin depuis le texte initial, en faisant apparaître l’industrie et le fait frontalier, en repositionnant l’enjeu hydraulique et celui de l’eau en général… Cet amendement redonnerait toute son importance à la forêt et aux industries qui en découlent. Il faut rappeler que la forêt couvre entre 30 % et 50 % de la surface totale de certains de nos départements de montagne !
Sans nous entraîner trop loin, il établirait dès le début de la loi le rôle important de la forêt en zone de montagne. Par conséquent, nous le soutiendrons.
Pour répondre à Joël Giraud, je rappelle que la loi de 1985 faisait une place considérable à la forêt et que toute cette loi ne disparaîtra pas avec le présent texte. La place de la forêt demeurera donc extrêmement importante dans notre législation. Cela étant, si cela peut rassurer M. Chassaigne et convenir à M. Giraud et à M. Saddier, nous nous inscrivons dans la droite ligne de l’avis de sagesse de M. le ministre et acceptons cet amendement.
En ce cas, je transforme la sagesse en avis favorable.
L’amendement no 218 est adopté.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement no 295 .
Comme pour notre précédent amendement, le no 292, il s’agit de bien rester dans une logique où l’article 1er définit des objectifs généraux. Dès lors, nous vous proposons de supprimer la fin de l’alinéa 12 et d’en rester à la notion de politique d’usage partagé de la ressource en eau. Mais nous avions déjà quelque peu anticipé en commission, puisque nous avions intégré un alinéa 5 à l’article 8, ainsi rédigé : « Le schéma interrégional d’aménagement et de développement de massif prend en compte les orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques mentionnées à l’article L. 371-2 du code de l’environnement et les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux mentionnés à l’article L. 212-1 du même code. »
Avis favorable.
Cet amendement no 292 qui a été adopté en commission, dont j’étais à l’initiative, visait à décliner les schémas d’aménagement et de gestion de l’eau – SAGE – de montagne dans les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux – SDAGE.
Sur la forme, madame la rapporteure, il est possible que son contenu puisse être mieux placé à l’article 8 qu’à l’article 1. Sur le fond, cependant, je suis en profond désaccord avec votre analyse. Aujourd’hui, les zones de montagne dépendent des SDAGE, peu nombreux en France et dont le plus important représente toute la couronne alpine. Il est très difficile d’y décliner la spécificité que rencontre Joël Giraud dans son bassin et la mienne, celle des têtes de bassin glaciaires !
Pour respecter au mieux l’accord entre élus, usagers de l’eau et administration qui préside aux SAGE, il est impératif de rester au plus près des bassins de vie de montagne et donc de décliner les SAGE dans les SDAGE. Or la fin de l’alinéa 12 que vous souhaitez supprimer ici, madame la rapporteure, ne se retrouve pas tout à fait dans l’alinéa 8.
Il y a deux difficultés : d’une part, il est très difficile d’obtenir un périmètre du SAGE qui soit adapté aux zones de montagne ; d’autre part, à l’échelle d’un SDAGE, il est plus que difficile pour les élus, et ce même lorsque tous les acteurs du territoire sont d’accord, de faire prendre en compte la spécificité des têtes de bassin, du transit alluvionnaire ou des problématiques d’étiage, sans même parler des crues torrentielles ! Aussi, et c’est la raison pour laquelle j’avais déposé cet amendement, est-il absolument impératif de réaffirmer la nécessité de disposer de SAGE de montagne.
Cet amendement me gêne un peu, madame la rapporteure, et notamment car vous faites référence aux schémas interrégionaux de massif comme à un palliatif. Mais ils ne sont pas un palliatif à des prescriptions des SDAGE ! Dans ces schémas, et dans leur déclinaison, la convention interrégionale de massif, nous rencontrons déjà les pires difficultés pour mobiliser les crédits des agences de l’eau. Si j’entends votre raisonnement sur le précédent amendement, madame la rapporteure, je le comprends bien moins sur celui-ci.
Je soutiens les deux précédents orateurs. Ces schémas d’aménagement et de gestion de l’eau sont très difficiles à mettre en place – il a été dit qu’ils étaient très peu nombreux. Ils sont néanmoins absolument fondamentaux pour mener une politique d’un usage partagé de la ressource en eau, ce qui est promu juste à l’alinéa précédent dans le texte. Je ne suis donc pas favorable à cet amendement.
Il faut avoir conscience que tous les cours d’eau n’ont pas la même dynamique. Supprimer l’alinéa 12 revient à ne pas reconnaître le caractère torrentiel de certains cours d’eau en montagne. Pour avoir vécu les inondations de 2013, pour avoir vu ce qui se passe lorsqu’on ne peut pas adapter la réglementation pour scarifier un atterrissement ou sortir les embâcles, je peux vous dire que les dégâts sont considérables et qu’ils se réparent à coups de millions d’euros. Cette adaptation du texte pour tenir compte des spécificités des zones de montagne est donc indispensable.
Les positions de la rapporteure et de M. Saddier peuvent se rapprocher. Nous devrions arriver à un amendement permettant de tenir compte des deux, car l’une et l’autre apportent des éléments constructifs, qui semblent aller dans le bon sens.
Nous avons voulu rester fidèles à ce qui s’était dit en commission. Nous avions en effet accepté cet amendement très détaillé, à la condition d’en reprendre le contenu en séance pour le décliner dans les articles 1er et 8. Nous pensions qu’il devait figurer davantage de choses dans l’article 8, mais si vous préférez l’article 1er, mes chers collègues, les rapporteures ne se battront pas contre ! Il me semble cependant qu’en commission nous étions tous d’accord pour dire que l’article 1er présentait la logique générale du projet de loi et que les déclinaisons devaient se trouver à l’article 8, comme le montrent d’ailleurs les amendements que vous avez vous-même déposés monsieur Saddier.
Tout cela me semble un peu embrouillé. Sans doute par la faute de M. Saddier…
Sourires.
Je rappelle que l’Assemblée a à se prononcer sur l’amendement no 295 , déposé par les deux rapporteures. Nous verrons bien les amendements qui viendront par la suite.
L’amendement no 295 est adopté.
Monsieur Wauquiez, je ne peux compter que les mains levées. Il ne me revient pas d’interpréter les volontés qui ne se sont pas exprimées…
La parole est à M. Pierre Morel-A-L’Huissier, pour soutenir l’amendement no 346 .
Il s’agit de supprimer l’alinéa 14, selon lequel l’action de l’État a pour finalité « d’assurer une meilleure maîtrise de la gestion et de l’utilisation de l’espace montagnard par les populations et les collectivités de montagne ». C’est vague… Je souhaiterais obtenir des précisions de la part des rapporteures et du ministre.
Avis défavorable. Cela a été dit, la maîtrise de la gestion du foncier dans l’espace montagnard est une question importante, qu’il s’agisse de la terre agricole ou de l’aménagement général de l’espace montagnard. Dans les années soixante-dix, nous avons été peu précautionneux dans l’utilisation de l’espace montagnard. Mais comme cela a été dit aussi, l’article 1er pose des principes généraux, et les déclinaisons viennent ensuite. Certaines existent d’ores et déjà, dans certaines démarches réglementaires par exemple, comme pour la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, ou dans d’autres textes régissant l’occupation de l’espace.
Même avis. Les objectifs de la loi montagne de 1985, réaffirmés cette année, sont bien de favoriser l’auto-développement des zones de montagne, pour un développement durable.
L’amendement no 346 est retiré.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 199 .
Il vise à préciser la nature des « services » dont il est question : il ne s’agit pas uniquement des services publics, mais aussi de nombreux services de proximité nécessaires au quotidien – professions libérales, artisanat, commerce… – qui ne relèvent pas d’une gestion publique. Il me semblait pertinent de préciser ces deux approches des services.
Monsieur Chassaigne, vous vous demandiez tout à l’heure si seuls les amendements roses ou bleus pouvaient être adoptés… Je vous rassure en donnant un avis favorable à cet amendement.
Favorable.
L’amendement no 199 est adopté.
Cet amendement vise, à l’alinéa 15, à substituer aux mots « assurer la pérennité » les mots « en assurer une qualité pérenne ». Nous vous suggérons cette formulation qui semble refléter le débat tenu en commission sur la pérennité des services publics en montagne.
Nous en venons aux amendements identiques.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 105 .
L’esprit est le même : il s’agit de maintenir le service. Parfois, la qualité du service diminue sans cesse, jusqu’à devenir tellement mauvaise qu’on nous explique qu’il faut le supprimer. Il faut arrêter cette spirale en affirmant qu’il est nécessaire de maintenir le service public en montagne, mais en préservant une certaine qualité.
Le texte précise que l’action de l’État en zone de montagne a pour objectif de réévaluer le niveau des services en montagne et d’en assurer la pérennité, l’accessibilité, la proximité, en tenant notamment compte des spécificités démographiques, géographiques et saisonnières des territoires de montagne en matière d’offre éducative et d’offre de soins. Cet amendement vise à ajouter la notion de « qualité » des services en montagne.
Il vise lui aussi à insérer le terme « qualité » dans le texte. C’est une dimension qui nous semble importante à prendre en compte dans l’évaluation des services publics en zone de montagne, tant pour l’éducation que pour la santé.
La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour soutenir l’amendement no 260 .
Prenez une trésorerie, et limitez toujours plus les horaires d’ouverture : elle sera pérenne, mais sans qualité. Prenez un hôpital, videz ses services petit à petit : il est pérenne, mais manque de qualité. Nous voulons qualité et pérennité.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l’amendement no 298 .
Il faut évidemment maintenir les services, mais ils ne seront utilisés que s’ils sont de qualité.
Notre amendement, qui est en discussion commune, reprend l’idée des autres : la notion de pérennité est couplée avec celle de qualité. Pérenniser un service qui ne serait pas de qualité n’a pas de sens. C’est donc une qualité pérenne que nous souhaitons, ou une pérennité de qualité, comme vous voulez… (Sourires.)
Étant élu d’un département de montagne, mais d’une circonscription de la plaine, je n’entends pas toutes ces subtilités…
Sourires.
Pourriez-vous, madame la rapporteure, nous donner l’avis de la commission sur les amendements identiques déposés par tous les groupes ?
Nous considérons que l’amendement de la commission satisfait l’ensemble des autres. En conséquence, nous suggérons à nos collègues de les retirer. À défaut, avis défavorable.
Avis favorable à tous les amendements.
Mon groupe est sans doute le seul à ne pas être signataire, mais nous en avions déposé un comparable. Quoi qu’il en soit, j’appelle votre attention sur le fait que l’amendement des rapporteures n’est pas équivalent aux identiques. Assurer la pérennité et la qualité, ce n’est pas la même chose qu’assurer une qualité pérenne !
La plupart du temps, si l’on ferme une maternité, c’est à cause d’un problème de qualité, car la sécurité des usagers n’y est plus assurée. Introduire la notion de « qualité pérenne » ouvrirait la voie, sans le dire, à la fermeture de services qui ne répondent pas aux exigences de qualité.
Je vais donner la parole à M. Wauquiez, mais ensuite, comme tout le monde s’est largement exprimé, nous passerons au vote.
Avec le terme « qualité pérenne », vous offrez en réalité un argument supplémentaire pour fermer des services publics !
Je suis exactement sur la même ligne qu’André Chassaigne : il faut cumuler « pérennité » et « qualité ».
Nous pouvons comprendre l’impératif de pérennité, qui est partagé sur tous les bancs : nous sommes pour la plupart des élus de montagne, qui nous battons pour maintenir la pérennité des services publics. Mais nous avons tous aussi en tête des exemples de services qui ont été, dans un premier temps, pérennisés mais dont la qualité ne satisfait pas les populations : il s’agit souvent des prémices d’une disparition. C’est pourquoi nous avons couplé l’idée de pérennité avec celle de qualité.
Se battre pour pérenniser un service qui est réduit à rien, c’est d’une certaine manière mentir aux populations en leur laissant croire que ce service va pouvoir se maintenir.
Ces précisions ayant été apportées, je vais maintenant mettre aux voix la série d’amendements. Je rappelle que l’amendement no 536 de la commission n’est pas identique aux autres.
L’amendement no 536 n’est pas adopté.
La question scolaire était l’un des objets les plus attendus de ce texte. Nous avons donc souhaité la faire figurer dès l’article socle, l’article 1er. Ainsi, l’alinéa 15 prévoit que l’action de l’État a pour finalité de réévaluer le niveau des services en montagne et d’assurer la pérennité, la qualité, l’accessibilité et la proximité, « notamment en matière d’offre éducative ». Nous proposons par cet amendement de substituer à la notion d’offre éducative celle d’organisation scolaire, qui est plus précise et qui répond à nos préoccupations en matière d’offre scolaire.
Je précise qu’à l’article 8 ter, nous présenterons un amendement très important relatif à la mise en oeuvre de la carte scolaire.
L’école est un service public essentiel en montagne et stratégique pour le développement local et l’aménagement du territoire. Elle détermine le choix d’une famille de s’établir dans une commune. Disposer d’une école vivante, c’est l’assurance d’attirer une population jeune contribuant à l’économie locale.
L’école rurale est donc un rempart contre la désertification des territoires et le sentiment d’abandon. En conséquence, le soutien à l’école en zone de montagne doit figurer parmi les grandes priorités du projet de loi. Tel est l’objet de l’amendement.
La séance, suspendue à vingt-deux heures cinq, est reprise à vingt-deux heures dix.
J’estime que la proposition des rapporteures, qui fait référence à l’organisation scolaire, est excellente, dans la mesure où elle renvoie à l’allocation de moyens. Or c’est ce qui compte le plus en montagne.
L’offre éducative et l’organisation scolaire sont à mon avis deux choses très différentes. L’offre éducative contient l’organisation scolaire, mais elle est bien plus que cela. Elle peut recouvrir un spectacle pour enfants, ou pas seulement pour enfants : on peut s’éduquer à tout âge… Elle intègre donc en grande partie la culture. Le développement de la culture en montagne, cela paraît assez judicieux !
Comme nous avons affaire à des rapporteures qui pèsent bien le sens des mots, on perçoit que derrière cette évolution sémantique, il y a un contenu complètement différent.
Mais si ! L’organisation scolaire et l’offre éducative, ce n’est pas la même chose ! Dans l’offre éducative, il y a aussi la couverture scolaire d’un territoire, c’est-à-dire une dimension quantitative, ou la répartition géographique, mais surtout tout ce qui concerne l’alternance et l’apprentissage, notamment la présence de centres de formation – bref, l’ensemble des enseignements, qu’ils soient généraux, professionnels ou technologiques. Tout cela n’apparaît pas dans le terme « organisation scolaire », que je trouve très réducteur.
Madame Bonneton, parler d’organisation scolaire répond, je le crois, à une préoccupation réelle. Si nous adoptons cet amendement, ce qui relevait jusqu’alors d’une circulaire sera inscrit dans la loi. Cela touche à l’organisation de la carte scolaire, et c’est bien ce qui était attendu.
Si l’on y inclut les questions culturelles, qui sont légitimes en soi, on perdra de vue l’objectif principal, qui est l’organisation de la carte scolaire.
Monsieur Chassaigne, vous évoquez la question de l’alternance et de l’apprentissage, mais nous présenterons ultérieurement un amendement tendant à intégrer la formation et l’apprentissage aux missions éducatives.
Ce n’est absolument pas la même chose, madame la rapporteure ! L’article 1er traite des finalités de l’action de l’État. Or vous ramenez l’offre éducative à l’organisation scolaire, qui n’est qu’un de ses aspects.
Nous n’allons pas y passer des heures, mais le sens des deux termes est complètement différent. On réduit l’offre éducative à l’organisation scolaire, alors que ce n’est pas du tout ça !
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 201 .
Avis favorable à cet amendement qui tend à prendre en compte le temps de parcours des élèves et des patients.
L’amendement no 201 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 200 .
L’amendement no 200 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Il s’agit du droit à l’expérimentation en montagne. C’est un point extrêmement important, qui faisait déjà partie des grands principes de l’acte I de la loi montagne en 1985. Il était inscrit, sous une autre forme, à l’article 8.
Quand on fait le bilan de son application, il faut bien reconnaître que ce droit à l’expérimentation s’est souvent résumé à de grandes déclarations de principe, à des voeux pieux et à des amendements repoussés ou retirés dans cet hémicycle.
L’objet du présent amendement est de réaffirmer, à l’occasion de l’acte II de la loi montagne, l’absolue nécessité d’expérimenter et d’adapter un certain nombre de dispositions en zone de montagne, ce qui est plus nécessaire que jamais compte tenu de la vitesse à laquelle notre société évolue. Il s’agit de le réaffirmer très fortement, dès l’article 1er de ce projet de loi, de manière à ce que celles et ceux qui voteront l’acte III de la loi montagne reconnaissent que la République a enfin fait de la montagne, avec cet acte II, une véritable terre d’expérimentation et d’adaptation.
La notion de droit à l’expérimentation était effectivement très importante dans la loi de 1985, et nous avons souhaité la réaffirmer. Elle figure à l’article 3, qui reprend l’article 8 de la loi de 1985. C’est un article socle, un article déterminant. Le fait que cette notion figure à l’article 3 et non à l’article 1er n’enlève rien à l’importance que nous lui accordons.
Cette notion figurant en toutes lettres dans l’article 3, il me semble que votre préoccupation est satisfaite. Je vous proposerai donc de retirer votre amendement. À défaut, je serai contrainte d’émettre un avis défavorable.
La position du Gouvernement est la même. Le projet de loi reconnaît les spécificités de la montagne, puisque son article 3 prévoit l’adaptation des politiques publiques, éventuellement après des expérimentations. Mais il ne serait pas juridiquement approprié de parler de droit à l’expérimentation pour les collectivités, comme le fait votre amendement. En effet, l’expérimentation par les collectivités est une notion juridique prévue par les articles LO 1113-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, articles organiques auxquels la loi simple ne peut déroger. Enfin, monsieur le député, le droit à la différence est une notion trop imprécise pour avoir sa place dans la loi.
Monsieur Saddier, êtes-vous convaincu et retirez-vous votre amendement ?
Sourires.
Je vais retirer cet amendement, mais j’espère que ceux qui voteront l’acte III – je regarderai sans doute les débats dans mon canapé – se souviendront de ce que je m’apprête à dire. Je vous fais confiance, monsieur le ministre, mesdames les rapporteures, mais quand je vois les précautions avec lesquelles nous inscrivons l’expérimentation dans cet article 3 – « éventuellement », « après expérimentation », « adaptées », « selon les cas » – je crains que cet article ne fasse que réitérer le voeu pieux formulé au moment de l’acte I.
L’amendement no 7 est retiré.
Monsieur le député, nous avons déjà eu un débat sur cette question, y compris les rapporteures. L’expression « après expérimentation » est placée entre virgules, ce qui signifie, me semble-t-il, que nous sommes bien dans la logique que nous avons toujours défendue, à savoir que l’expérimentation peut être utile, mais qu’elle n’est pas nécessaire et que l’on peut aussi adapter certaines dispositions sans recourir à l’expérimentation. Ces virgules ont toute leur importance et cette rédaction va dans le sens que vous souhaitez comme nous, puisqu’elle ne subordonne pas systématiquement l’adaptation à une expérimentation.
La parole est à M. Pierre Morel-A-L’Huissier, pour soutenir l’amendement no 347 .
Il tend à compléter l’article par l’alinéa suivant : « 10° De faciliter la mise en oeuvre de politiques interrégionales et interdépartementales solidaires dans les territoires de montagne ».
Les territoires de montagne se situent très souvent à cheval entre plusieurs départements, voire plusieurs régions. Ce découpage territorial différent des frontières géographiques naturelles peut être problématique lorsque la solidarité interrégionale et interdépartementale est insuffisamment développée.
C’est par exemple le cas, que nous connaissons avec Laurent Wauquiez, lorsqu’une navette qui traverse deux départements voisins n’est subventionnée que par l’un d’eux, alors que l’autre profite également de ce service public.
Heureusement que la région Auvergne-Rhône-Alpes est là pour nous aider ! Cela vaut également pour la démographie médicale, avec les agences régionales de santé, et pour les centres de secours.
Afin de remédier à ces situations qui créent des inégalités entre les collectivités territoriales, il est nécessaire que l’État s’engage à faciliter la mise en oeuvre de politiques interrégionales et interdépartementales solidaires dans les territoires de montagne.
Votre préoccupation, que nous comprenons parfaitement, me semble être satisfaite par plusieurs articles. L’alinéa 4 de l’article 1er, tout d’abord, prévoit que les politiques mises en oeuvre par les différentes collectivités doivent être articulées de manière cohérente au sein d’une politique nationale. L’alinéa 5 du même article prévoit en outre que l’État facilite l’exercice de nouvelles responsabilités par les collectivités territoriales. L’article 7 précise, quant à lui, le contenu et le mode d’élaboration de la convention interrégionale de massif, qui est un contrat entre l’État et les régions. Nous avons ajouté que son élaboration fait l’objet d’une consultation avec les autres collectivités territoriales. L’article 8, enfin, précise le contenu et le mode d’élaboration des schémas interrégionaux d’aménagement et de développement de massif.
Vous le voyez, nous avons pris de nombreuses précautions pour garantir cette articulation entre les régions et l’État. Si l’Assemblée tient absolument à adopter cet amendement, je n’y suis pas hostile, mais je crois qu’il serait redondant.
Les articles 7 et 8 du projet de loi sont justement consacrés aux conventions et programmes interrégionaux de massif, dont l’État est signataire et dont il facilitera naturellement la mise en oeuvre. Avis défavorable.
Je voudrais, très rapidement, expliquer la préoccupation de Pierre Morel-A-L’Huissier. Les frontières régionales sont parfois un obstacle aux politiques de mise en cohérence de nos massifs. Ce à quoi il faisait allusion, c’est à toutes les politiques de désenclavement de la Lozère, qui sont une préoccupation importante pour lui.
L’amendement no 347 n’est pas adopté.
L’objectif de cet amendement est d’augmenter le nombre de nuitées touristiques et de créer des emplois locaux. Pour cela, il s’agit d’augmenter la notoriété du massif, de replacer les visiteurs au coeur de la démarche et de cibler des marchés internationaux prioritaires.
La parole est à M. Charles-Ange Ginesy, pour soutenir l’amendement no 33 .
La convention interrégionale de massif – CIM – est un outil contractuel et pluriannuel, pour la période 2007-2013, négocié à l’échelle du massif entre l’État, les régions et parfois les départements concernés. L’Europe peut également contribuer à ces programmes de massif à travers un programme opérationnel de massif ou un programme opérationnel régional d’une des régions du massif.
La convention interrégionale de massif comprend un ensemble de grandes mesures et un engagement financier chiffré, mais ce dispositif manque aujourd’hui clairement de moyens pour être plus efficace. C’est pourquoi il est proposé de renforcer les moyens consacrés aux conventions interrégionales de massif.
S’agissant de l’amendement no 32 , nous partageons la conviction que les contrats de destination sont des outils adaptés pour mettre en valeur une filière touristique à l’échelle d’un territoire, lequel peut être très limité ou, au contraire, regrouper plusieurs régions, en associant dans une même démarche l’État, Atout France, qui assure le pilotage, les collectivités ou leurs satellites et les acteurs privés. Toutefois, nous considérons que votre préoccupation est satisfaite, puisque l’alinéa 9 de l’article 1er affirme d’ores et déjà que l’action de l’État a pour finalité de développer un tourisme orienté sur la mise en valeur des richesses patrimoniales des territoires de montagne.
S’agissant de l’amendement no 33 , relatif au renforcement des moyens consacrés aux conventions interrégionales de massif, la demande est légitime, mais elle relève du projet de loi de finances et non du présent texte.
Sur ces deux amendements l’avis de la commission est donc défavorable.
L’amendement no 32 est satisfait par la rédaction actuelle de l’alinéa 9 de l’article 1er, qui précise les finalités de l’action de l’État liée au tourisme. Le Gouvernement y est donc défavorable. L’amendement no 33 , quant à lui, est satisfait par la rédaction actuelle des articles 7 et 8, relatifs aux conventions et programmes interrégionaux de massif. Le Gouvernement y est donc également défavorable.
Pour gérer une convention interrégionale de massif, étant président de la commission permanente de comité de massif, je peux vous dire qu’il est fréquent que l’on n’écluse pas 100 % des crédits de la convention de massif. Le titre II, qui s’intéresse à la gouvernance des comités de massif, sera de nature à améliorer la gestion de ces crédits et permettra de mieux les utiliser : c’est une priorité aujourd’hui pour la mise en oeuvre des CIM.
Je le retire, compte tenu des améliorations qui ont été apportées à l’alinéa 15.
Malgré les aménagements apportés à l’alinéa 15, il nous paraît important que, dans la liste de principes énoncée à l’article 1er, figure explicitement la question de la couverture médicale, car sans un maillage sanitaire de proximité et de qualité, il n’est pas possible d’imaginer un développement pour les territoires de montagne.
Je vous remercie, monsieur Chassaigne, d’avoir retiré votre amendement, et je pense que vous avez raison.
L’alinéa 15 de l’article 1er satisfait votre demande : il dispose en effet que l’action de l’État a pour finalité « de réévaluer le niveau des services en montagne et d’assurer la pérennité, l’accessibilité et la proximité, en tenant compte, notamment en matière d’offre éducative et d’offre de soins, des spécificités géographiques, démographiques et saisonnières des territoires de montagne ». Cet alinéa a été complété par votre amendement no 201 , monsieur Chassaigne, qui a été adopté avec notre avis favorable et qui prend en compte les temps de parcours.
Sur proposition de vos rapporteures, la commission a adopté un article 8 quinquies qui prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la juste compensation des surcoûts associés à la pratique des actes médicaux et paramédicaux en zone de montagne. Il vise à prendre en compte les surcoûts supportés par les professions libérales de santé en montagne, liés notamment au temps de transport.
Nous vous proposerons enfin, après l’article 8 quinquies, un amendement no 400 qui permettra de compléter le schéma régional de santé en y ajoutant un volet consacré aux besoins de santé spécifiques des populations de montagne, qu’elles y demeurent toute l’année ou qu’elles n’y viennent que durant la saison touristique.
Il me semble qu’avec toutes les dispositions introduites en commission, complétées par l’amendement no 201 de M. Chassaigne et par l’amendement à venir des rapporteures, nous avons là un volet « Santé » considérablement renforcé.
Même avis pour les mêmes raisons.
Monsieur Wauquiez, j’ai cru comprendre que vous vouliez reprendre l’amendement no 202 . En revanche, le règlement est formel : il ne peut y avoir de discussion sur un amendement repris.
Je m’exprimerai alors sur l’amendement no 30 , monsieur le président, cela ne change rien.
La question de l’offre médicale est un point important du texte, et je pense que le travail parlementaire peut l’enrichir. Je remercie M. le ministre de sa compréhension sur ces sujets. D’abord, les dispositifs médicaux de l’agence régionale de santé – ARS – doivent être renforcés pour les zones de montagne, où la construction et le fonctionnement des maisons de santé coûtent plus cher. Surtout, créer des dispositifs médicaux dans ces zones permet d’économiser tous les frais de transport, qui peuvent très vite exploser. Qualité de soin et maillage territorial, lequel permet de faire des économies, peuvent donc aller de pair.
L’amendement de M. Chassaigne et l’amendement no 30 défendu par notre groupe permettent de clarifier cette question, sur laquelle nous reviendrons dans la suite de la discussion. C’est donc un débat utile.
J’ajoute que ces amendements renvoient à la question de la répartition géographique des professionnels de santé définie par l’ARS et la Caisse primaire d’assurance maladie.
Le nombre de cartes de professionnels est un problème énorme pour les territoires de montagnes, qui se retrouvent souvent regroupés avec des villes ou des zones urbaines plus denses. Ils disposent donc d’équipements, notamment de maisons de santé, mais manquent de professionnels, faute non pas de candidats mais de nombre de cartes d’exercice. Ce texte doit nous aider, au moment où les zonages vont être refaits.
L’amendement no 202 n’est pas adopté.
L’amendement no 30 n’est pas adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
La parole est à M. Pierre Morel-A-L’Huissier, pour soutenir l’amendement no 352 portant article additionnel après l’article 1er.
Cet amendement reprend une proposition de loi que j’avais déposée, qui avait été débattue et rejetée. Il vise à appliquer au milieu rural, en l’espèce aux zones de montagnes, un principe d’adaptabilité, de proportionnalité et de subsidiarité.
La multiplication et la superposition des normes juridiques font peser sur les citoyens, les entreprises et les collectivités des contraintes de plus en plus lourdes. Fondées sur le principe d’égalité, elles tendent à uniformiser les comportements sans tenir compte des réalités locales, en prenant souvent pour repères les conditions de vie des citadins et pour cible les paramètres d’un cadre de vie idéal.
Les habitants et les collectivités locales des zones montagneuses croulent donc sous le poids de contraintes démesurées par rapport à leurs besoins, à leurs conditions de vie et à leurs capacités financières. Paradoxalement, dans les territoires montagnards d’aujourd’hui, le principe d’égalité devant la loi tend peu à peu à devenir un facteur d’inégalité, voire même d’iniquité.
Afin d’éviter la paralysie croissante du milieu montagnard et l’asphyxie de son économie, il est urgent que la norme s’humanise et permette l’amélioration des conditions d’existence sans pousser inexorablement vers une standardisation des dispositifs et des comportements, en décalage complet avec les aspirations et le cadre de vie des personnes qui y vivent.
Il est en particulier indispensable que, lorsque les mesures réglementaires prises pour l’application d’une loi imposent la mobilisation de moyens techniquement impossibles à engager, insupportables financièrement ou manifestement disproportionnés par rapport aux objectifs poursuivis par la loi, d’autres moyens puissent leur être substitués, répondant aux mêmes objectifs mais mieux proportionnés.
Aussi, il est temps d’inscrire clairement dans notre cadre juridique la possibilité de recourir à un principe de proportionnalité, lorsque la norme est impossible à appliquer, insupportable financièrement ou manifestement disproportionnée par rapport aux objectifs poursuivis par la loi.
Ce sujet est bien connu puisque, vous l’avez rappelé, il a fait l’objet d’une proposition de loi importante, qui visait à créer un principe de proportionnalité lorsque la norme est insupportable financièrement ou manifestement disproportionnée.
L’objet de cet amendement est parfaitement légitime. Du reste, l’article 8 de la loi de 1985 prévoyait déjà que les dispositions de portée générale soient adaptées, en tant que de besoin, à la spécificité de la montagne. Mais nous savons bien que cet article, aussi important et consensuel soit-il, n’a jamais été appliqué. C’est la raison pour laquelle nous avons rédigé l’article 3 du présent texte, qui traite le sujet de façon plus opérationnelle, puisqu’il ouvre une possibilité d’expérimentation et prévoit la déclinaison des dispositions de portée générale dans les politiques publiques et leurs décisions d’application. Nous allons donc plus loin que l’affirmation d’un principe général.
L’amendement no 352 pose, quant à lui, un certain nombre de problèmes. D’abord, il concerne toutes les communes et pas seulement les communes de montagne. Ensuite, il se heurte à un risque d’inconstitutionnalité, puisqu’il prévoit des mesures de substitution et non d’adaptation. C’est la raison pour laquelle, en dépit du bien-fondé du sujet, nous devons émettre un avis défavorable.
Même avis. Cet amendement vise à créer un principe de proportionnalité dans l’application des normes sur le territoire. Or, selon le Conseil constitutionnel, le pouvoir réglementaire dont dispose une collectivité territoriale ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de mettre en cause le pouvoir réglementaire d’exécution des lois que l’article 21 de la Constitution attribue au Premier ministre. L’amendement est donc inconstitutionnel, dans la mesure où il permet aux collectivités de prendre des mesures se substituant aux règlements d’application des lois.
Monsieur le ministre, madame la rapporteure, ces arguments m’ont déjà été opposés. Mais mon amendement a été rédigé en lien avec la doyenne de la Sorbonne, qui est spécialisée dans ces questions, et après consultation du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État. Le seul problème soulevé avait été la définition des critères de la ruralité. Or, en l’occurrence, mon amendement ne concerne que les zones de montagne, dont la définition est beaucoup plus précise.
Il me semble donc que rien ne s’y oppose. Arrêtez d’invoquer toujours des risques d’inconstitutionnalité ! Il y a un vrai problème d’adaptabilité de la norme et de subsidiarité. Il serait peut-être temps de prendre une décision.
Je soutiens cet amendement, qui est très précis, clair et net. Il faut adapter, tout en respectant le cadre de la légalité, la norme aux spécificités de la montagne. Un seul exemple, que tout le monde connaît : il est impossible de mettre aux normes de la même façon un hôtel de 800 ou 1 000 chambres à Paris et un hôtel de 9 chambres en milieu rural, en Auvergne, situé dans la zone de protection d’un monument historique, derrière un rocher !
Il faut vraiment adapter la norme, sans quoi les hôtels-restaurants situés en milieu rural et dans les zones de montagne fermeront.
Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, le titre Ier prévoit une mesure extrêmement importante qui rend possible la saisine du Conseil national d’évaluation des normes par le président de la commission permanente du Conseil national de la montagne.
Si les présidents successifs de cette commission font bien leur travail, cet outil sera très intéressant. Je crois très franchement qu’il s’agit d’une réponse novatrice, qui permettra d’adapter les normes dans des cas qui peuvent sembler parfois grotesques – j’en ai donné quelques exemples tout à l’heure.
On ne pourra en finir avec ce texte sans désamorcer la bombe que sont les agendas d’accessibilité programmée qui, dans les territoires de montagne, sont parfaitement inapplicables. Nous venons tous de demander un report de cette mesure à 2018, 2019 ou 2020. Si nous ne prévoyons pas dans ce texte une sortie de crise, nous ne serons pas plus avancés à ces dates qu’aujourd’hui.
Monsieur Giraud, je suis membre du Conseil national d’évaluation des normes : il n’a pas les compétences pour répondre au problème soulevé par mon amendement. Je propose la création d’un principe juridique nouveau, de nature constitutionnelle, pour répondre à toutes les problématiques d’adaptabilité et de proportionnalité. Les territoires ne s’en sortent plus.
L’amendement no 352 n’est pas adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, premier orateur inscrit sur l’article.
Je me suis inscrit sur cet article car il est extrêmement important, s’agissant notamment du fait frontalier, et n’a pas fait l’objet de beaucoup d’amendements. Je prendrai l’exemple des dispositions relatives aux accords et conventions internationaux ou transfrontaliers, qui constituent véritablement une mise à jour de la loi de 1985, car ce sujet n’existait pas à l’époque.
Je suis élu d’un territoire où 100 000 personnes franchissent tous les jours la frontière d’un pays ami et voisin, qui fait très peu d’efforts dans le domaine de la formation hospitalière.
Je peux vous assurer qu’il faut toute la force et la puissance du président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, des parlementaires du secteur, comme Virginie Duby-Muller et – modestement – moi-même, d’un établissement hospitalier important et du département pour bâtir ensemble l’une des premières écoles transfrontalières de formation des infirmières.
Cet article traduit vraiment ce que nous vivons depuis plusieurs années : dès que l’on sort des sentiers battus, dès que l’on discute avec des interlocuteurs qui ne sont pas habituels dans notre République, c’est le parcours du combattant. C’est déjà compliqué de négocier chez nous, avec les différents ministères et échelons territoriaux ; c’est difficile de trouver des accords avec les pays de l’Union européenne ; alors imaginez l’ampleur de la tâche lorsqu’il s’agit d’un pays avec lequel nous sommes liés par une convention bilatérale, comme la Confédération helvétique ! C’est un parcours du combattant.
Même si tous les acteurs du territoire sont d’accord – et Annie Genevard connaît parfaitement ces situations transfrontalières – il n’est pas simple d’aboutir. Pour ce qui concerne l’école transfrontalière de formation des personnels hospitaliers située dans la commune d’Annemasse, nous allons y arriver avec le président Wauquiez, mais l’article 2 va sacraliser dans la loi ce que nous essayons de faire au quotidien.
Je suis admiratif du travail réalisé par les rapporteures, en collaboration avec Mme Battistel et toute la grande famille de l’Association nationale des élus de montagne – ANEM. Je le suis d’autant plus que j’ai fait peu de chose. Voire rien du tout.
Sourires.
En effet, j’étais pris par d’autres projets.
Nous avons la chance d’avoir le ministre qu’il faut au moment qu’il faut. Être là quand il faut, c’est le propre des grands champions ! C’est la raison pour laquelle il faut se réjouir des travaux accomplis.
Cela dit, s’agissant des frontières, je tiens à insister sur la perte d’influence politique de nos territoires de montagne et, plus largement, des campagnes, en raison des changements intervenus au cours des deux derniers quinquennats. Les territoires non urbains ont perdu énormément d’influence. Surtout, chose jamais vue depuis que la France est France, le nombre de représentants dépend uniquement, comme seul critère, du nombre d’habitants. Mais les milliers et les milliers d’hectares que délimitent les frontières, monsieur le ministre, ce n’est pas rien ! Quand on pense aux quantités de drogue et d’armes qui circulent, aux douaniers qui ont disparu et aux gendarmes qu’on incite à partir bien qu’ils veuillent rester, et leur famille aussi, on ne peut que s’inquiéter.
L’article 2 est adopté.
Je ne peux pas renoncer à m’exprimer, ce serait trop grave.
Cette perte d’influence politique que j’ai évoquée à l’instant est préoccupante car c’est la première fois dans la longue histoire de la France qu’elle se produit. Ceux qui nous suivront, quels qu’ils soient, devront se pencher sur cette question. Nous sommes le seul pays au monde à s’être organisé pour pouvoir à la fois représenter les hommes et les territoires. Qu’allons-nous faire de ces vastes territoires ? Les derniers montagnards qui y vivent – les quelques-uns qui tiennent le coup mieux que les autres – luttent de toutes leurs forces pour empêcher les arbres qui sont devant la porte de pénétrer, sitôt que la porte sera entrebâillée, dans la cuisine !
Et il en est de même des futaies, des ronces – et aussi des sangliers, qui sont partout, sans parler des loups, des lynx et des ours qui nous obligent à tant mentir. Nous sommes dans un mensonge permanent ! Nous sommes obligés ici, à Paris – M. le ministre me comprend bien – en raison de l’existence de lobbies considérables à l’échelle européenne, voire mondiale, de nous insurger, avant d’aller remonter le moral de ceux dont les troupeaux sont dévastés.
Oui, nous sommes en situation de mensonge permanent. Cela ne peut pas être le rôle des députés de l’Assemblée nationale, qui sont les représentants de la nation. Il faudra une solution à ce problème. Trop de textes européens sont transcrits en droit français sans le moindre débat, par ordonnance présidentielle. Il faut faire la lumière sur cette question car nous ne pouvons plus continuer ainsi.
Nous en venons aux amendements.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 159 .
L’agriculture et l’environnement sont deux acteurs où la nécessité d’adapter les politiques publiques correspond à un enjeu central. Il importe de les évoquer de manière explicite car le secteur agricole est soumis à des contraintes climatiques, environnementales et matérielles supérieures à celles présentes en plaine.
Cet amendement supprime la référence aux dispositions de portée générale et aux décisions d’application relative. Il est donc restrictif par rapport au texte, ce qui est sans doute préjudiciable à l’objectif que vous poursuivez. Il est très important de faire référence aux dispositions de portée générale, qui étaient inscrites à l’article 8 de la loi de 1985, ainsi qu’aux décisions d’application – c’est sans doute ce qui manquait au texte de 1985. C’est pourquoi je vous demande de retirer cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Même position. Cet amendement restreint le champ d’application du texte adopté en commission avec l’aval du Gouvernement. Retrait ou avis défavorable.
L’amendement no 159 est retiré.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement no 303 .
Cet amendement devrait satisfaire notamment M. Chassaigne, puisqu’il vise à mentionner l’apprentissage et la formation professionnelle après l’éducation.
Les spécificités des zones de montagne incitent à ce qu’on puisse les prendre en compte et expérimenter certaines solutions dans le domaine de la formation et de l’apprentissage. Avis favorable.
L’amendement no 303 est adopté.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 386 .
Le Conseil économique, social et environnemental – CESE – a fait des remarques très intéressantes sur le texte que nous examinons.
Cet amendement répond à une de ces observations, selon laquelle « le développement durable de la montagne est un enjeu important ». Il importe, poursuit le CESE, « d’inscrire les solutions de re-développement économique dans la priorité de développement durable et d’adaptation au changement climatique. »
C’est pourquoi l’amendement vise à donner une priorité au développement durable et à l’adaptation au changement climatique.
Nous avons déjà eu ce débat en commission. Il nous semble que l’article 3 tel qu’il est rédigé intègre votre objectif, puisqu’il évoque les politiques publiques relatives à l’environnement et à la protection de la montagne. Avis défavorable.
Même commentaire et même avis.
L’amendement no 386 n’est pas adopté.
La parole est à M. Charles-Ange Ginesy, pour soutenir l’amendement no 35 .
Cet amendement vise, à l’alinéa 2, à évoquer le développement touristique, secteur où la nécessité d’adapter les politiques publiques correspond à un enjeu central.
En matière économique, le tourisme est un pan essentiel du territoire montagnard, vous le savez particulièrement. Le présent texte, du reste, fait une large part aux questions touristiques. Avis favorable à cet amendement intéressant.
Avis favorable.
Certes, je voterai cet amendement, mais je trouve l’évolution de la rédaction de cet article particulièrement préoccupante. Il prévoit en effet qu’il est possible d’adapter les politiques publiques, en citant quelques-uns des domaines visés. Mais comme cette liste de domaines commence par « notamment », mieux vaudrait que leur nombre soit restreint. Or la liste commence à s’allonger : de treize à l’issue des travaux de la commission, le nombre des domaines pointés particulièrement est passé à dix-huit et je parie qu’à la deuxième lecture, il aura atteint vingt-quatre ou vingt-cinq !
J’avais par exemple déposé un amendement sur l’adaptation en zone de montagne des services au public, qui a été refusé en commission. Mais en séance publique, on ne cesse de rajouter des domaines. Il faut éviter de constituer des listes à la Prévert après le mot « notamment ».
« Oh ! » et sourires.
L’amendement no 35 est adopté.
Cet amendement vise à préciser la fin de l’alinéa 2. Bien que Mme la rapporteure ait insisté sur l’importance des virgules, nous n’en trouvons pas la rédaction suffisamment explicite pour permettre une prise en compte positive des spécificités de la montagne dans l’adaptation des dispositifs nationaux.
Monsieur le député, vous ne serez pas surpris que nous émettions un avis défavorable.
Comme je l’ai déjà expliqué, la rédaction de l’article 3 issue des travaux de la commission me paraît suffisamment claire, notamment sur la question de l’expérimentation. La rédaction choisie permet en effet d’expérimenter comme de ne pas expérimenter, puisqu’elle précise que les politiques publiques sont, entre virgules, « éventuellement après expérimentation, adaptées, selon les cas, à la spécificité de la montagne ». Il faut lire le texte en prenant en compte toutes les subtilités de la ponctuation : il laisse, je le répète, la liberté d’expérimenter ou de ne pas expérimenter – mais dans tous les cas, il sera possible d’adapter. Votre amendement n’a donc pas lieu d’être.
Quant à sa seconde partie, relative aux dispositifs financiers, je ne suis pas certaine qu’elle soit réaliste. Elle ne correspond pas à l’esprit de l’article 3.
Je partage d’autant plus l’avis de la rapporteure que le dispositif proposé est non seulement très contraignant, mais inapplicable de par son caractère systématique imposé, qui produirait une rupture d’égalité entre les territoires et les citoyens qui y habitent.
Je n’ai pas particulièrement évoqué la question de l’expérimentation. L’amendement porte sur l’adaptation des dispositifs aux territoires de montagne. Or la rédaction actuelle du texte témoigne de tant de précaution qu’à l’arrivée rien ne sera adapté aux particularités des territoires de montagne. Lorsqu’on lit « éventuellement », « adaptées », « selon les cas », « à la spécificité de la montagne », on comprend que la brèche qui s’est entrouverte se referme aussitôt et que personne n’adaptera ces dispositifs. En résumé, l’article 3 ne sert à rien.
L’amendement no 221 n’est pas adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 3.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 58 rectifié .
Cet amendement prévoit un abattement en fonction du niveau du rapport entre la population touristique et la population DGF pour les communes supports de stations de montagne.
Je suis désolée, monsieur le président, mais cet amendement ne figure pas dans notre liasse, ce qui nous pose quelques difficultés.
Cela s’explique sans doute par le fait qu’il a été rectifié. En tout cas, avis défavorable.
Cet amendement propose de minorer le prélèvement éventuellement dû par les communes de montagne au titre du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales – FPIC – en fonction de leur population touristique.
Tout d’abord, il m’apparaît difficile de prendre une mesure spécifique à une catégorie de communes sans en considérer les effets sur l’ensemble des communes concernées par le dispositif. Par nature, votre proposition consistant à alléger le prélèvement dû au titre du FPIC pour les stations de montagne entraînera un report de charges sur d’autres communes,…
…sans que nous n’ayons procédé à aucune mesure ou simulation.
De surcroît, vous contestez les modalités d’appréciation de la population prise en compte dans le calcul du prélèvement dû au titre du FPIC, considérant que la population touristique est insuffisamment prise en compte. En réalité, la « population DGF » tient déjà compte de la population non permanente. Le FPIC repose sur une évaluation de la richesse et des charges à travers le potentiel financier agrégé et le revenu de l’ensemble intercommunal. Dans ce cadre, l’emploi de la population DGF constitue déjà une mesure favorable aux communes touristiques.
Votre amendement va encore plus loin, puisqu’il propose d’utiliser la population touristique non pour majorer la population, mais pour en tirer un coefficient d’allègement du prélèvement, ce qui ne me semble vraiment pas équitable.
Par ailleurs, il crée une rupture d’égalité entre communes touristiques, selon qu’elles sont ou non classées stations de montagne. Une telle rupture d’égalité ne nous semble pas justifiée.
Enfin, je vous rappelle que l’objectif du FPIC est de redistribuer au profit des territoires défavorisés des ressources prélevées sur les territoires les plus favorisés. C’est cela, la péréquation ! Quand elle est verticale, de l’État vers les collectivités, tout le monde apprécie, mais quand elle est horizontale, entre collectivités, ceux qui reçoivent ne disent rien mais ceux qui contribuent ne sont pas très satisfaits ! Or les stations de montagne ne sont évidemment pas une catégorie homogène en matière de richesse ou de pauvreté. À ce propos, je tiens à souligner que les communes de montagne classées en zone de revitalisation rurale sont bénéficiaires nettes du FPIC.
Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable à l’amendement no 58 rectifié .
Monsieur le ministre, les propos que nous tenons dépasseront le cadre de notre discussion et seront rapportés à d’autres collègues parlementaires. Je tiens donc à préciser que l’amendement no 58 rectifié est, en quelque sorte, un amendement d’appel portant sur un problème identifié et reconnu par tous, y compris par le Premier ministre à Chamonix.
Aucun parlementaire de montagne, quel que soit le banc sur lequel il siège dans cet hémicycle, n’a jamais remis en cause le principe du FPIC. En revanche, dans la famille des élus de la montagne, tout le monde reconnaît qu’il y a eu un dérapage quant au poids des prélèvements au titre du FPIC sur les stations de ski. Nous en avons discuté calmement au Conseil national de la montagne, et le Premier ministre lui-même a reconnu que, s’il y avait un problème, il fallait l’identifier et l’analyser. Il me semble que le Parlement a demandé au Gouvernement un rapport sur cette question mais, à ma connaissance, rien n’a été rendu public.
Encore une fois, nous ne remettons pas en cause le principe du FPIC, mais l’intensité des prélèvements, calculés selon des modalités générales, n’est pas compatible avec la spécificité des stations de ski. Aujourd’hui, monsieur le ministre, la ponction effectuée sur les stations de ski ne relève plus de la solidarité : elle ne correspond plus du tout à l’esprit initial du FPIC. Nous redemandons que ce sujet fasse l’objet d’une discussion de fond.
Nous entendons tout à fait votre argument, monsieur le ministre, mais il faut aussi entendre la chose suivante : quand certains départements voient l’ensemble de leurs communes ponctionnées au titre du FPIC, c’est que le FPIC ne fonctionne plus. Or c’est le cas, notamment, en Savoie et en Haute-Savoie : toutes les communes de ces deux départements ne sont pas riches, mais la quasi-totalité d’entre elles font l’objet de prélèvements pour le FPIC. De même, sur le territoire frontalier où est élue Annie Genevard, les communes ne sont pas riches mais la ponction commence à devenir insupportable, sans qu’elle n’ait d’ailleurs aucun rapport avec la richesse réelle des communes.
Nous ne contestons pas la pertinence du FPIC, mais c’est un outil qui frappe maintenant les territoires de montagne de façon très dure et assez aveugle. Il est vraiment temps de procéder à une mise à plat du dispositif et à une objectivisation de la situation.
Je le répète : la péréquation est demandée depuis toujours. Nous l’avons mise en place. Comme je le disais il y a un instant, les communes qui reçoivent une dotation sont satisfaites et ne se font pas entendre : c’est celles qui contribuent qu’on entend un peu plus ! C’est toujours la même chose.
Néanmoins, je suis conscient du problème que vous posez, puisque j’ai décidé cette année de geler le FPIC : en 2017, ce fonds n’augmentera pas mais restera à son niveau de 2016, à hauteur de 1 milliard d’euros. Car je suis d’accord avec vous : j’ai décidé ce gel pour stabiliser la situation, étudier le fonctionnement du FPIC et déterminer s’il y a des choses à faire évoluer. C’est la demande que j’ai adressée à mes services, nous allons nous y employer cette année.
Il s’agit d’une disposition budgétaire qui n’a pas à être débattue dans le cadre du présent projet de loi, mais si vous me le permettez, monsieur le ministre, je souhaite ajouter un élément pour éclairer notre débat. Le FPIC est fondé sur deux critères : la richesse nominale et le potentiel financier. Certaines communes ne sont pas très riches, n’ont pas un potentiel financier très important, mais comptent des habitants dont les revenus sont supérieurs à la moyenne : c’est le cas des territoires frontaliers. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles nous avons insisté pour que ce texte mentionne bien les « enjeux transfrontaliers », afin que cette situation particulière puisse être prise en compte.
Au sein du Comité des finances locales, instance dans laquelle je siège avec un certain nombre de députés ici présents, nous avons assez unanimement demandé que soient conduites des études sur la soutenabilité du FPIC, car il s’agit d’un vrai sujet. Ce n’est pas le lieu ici de débattre du FPIC, mais l’amendement no 58 rectifié permet d’apporter une contribution à cette discussion.
Je voudrais juste donner à M. le ministre un contre-exemple : certaines communes bénéficiant de dotations au titre du FPIC peuvent se faire entendre, pour exprimer leur satisfaction !
Cela dit, le FPIC est, en lui-même, un vrai sujet. Nous l’avions dit lorsque nous étions dans l’opposition et que l’opposition actuelle créait le FPIC. La manière dont ce dispositif a été conçu n’était pas la bonne.
Nous étions nombreux ici à saluer la bonne volonté dont le législateur faisait preuve en instaurant un mécanisme de péréquation, mais les modalités de calcul entraînent aujourd’hui des anomalies presque insupportables pour certaines communes. Je salue donc la décision du Gouvernement, rappelée par M. le ministre, de geler le FPIC cette année.
Certes, mais nous n’avons fait qu’appliquer la loi, en la limitant. Cette année, nous arrêtons la progression de ce fonds, alors qu’il aurait dû atteindre 1,3 milliard d’euros !
Après avoir plafonné le FPIC, nous le gelons afin de procéder à quelques analyses. Il faut donc saluer la décision du Gouvernement et étudier les impacts de la nouvelle carte intercommunale. Cela dit, la commune qui bénéficie du FPIC et que je représente est bien malheureuse de ce gel, même si j’approuve cette bonne décision.
C’est un sujet que je connais bien, non seulement en tant que membre du Gouvernement, mais aussi en tant que président d’une communauté de communes qui contribue largement au FPIC. Je sais donc ce que c’est que de subir, année après année, des augmentations de prélèvements considérables et, d’une certaine manière, assez imprévues, puisque nous ne les découvrons en réalité que quand elles nous sont signifiées.
Je voulais surtout vous informer que le rapport de la direction générale des collectivités locales sur le FPIC sera remis au Parlement dans les jours qui viennent.
« Très bien ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Un rapport sur le FPIC a été publié l’an dernier – effectivement, il doit être actualisé. L’année dernière, donc, ce rapport indiquait que ce mécanisme était celui qui assurait la meilleure péréquation. Il y a peu de chances que cela change.
Si la grande majorité des membres du Comité des finances locales s’est prononcée en faveur d’un gel du FPIC, c’est notamment à cause des nouveaux schémas. Pour ma part, en tout cas, ce sont ces nouveaux schémas, et non une autre raison, qui m’ont incitée à réclamer le gel. Il faut juste rappeler que le FPIC représente actuellement moins de 2 % des recettes réelles de fonctionnement des collectivités concernées : il reste donc raisonnable.
L’amendement no 58 rectifié n’est pas adopté.
Cet amendement porte sur les zones de revitalisation rurale – ZRR. Alain Calmette et moi avons fait du bon travail et vous avez repris, monsieur le ministre, les conclusions de notre rapport d’information sur le nouveau zonage des ZRR, validé dans le projet de loi de finances rectificative pour 2015. Basé sur une entrée intercommunale et sur deux critères tenant à la densité de population et à la richesse par habitant, ce nouveau dispositif permettra de recentrer les ZRR sur les territoires véritablement ruraux. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, d’avoir tenu compte de nos conclusions. Le présent amendement prévoit simplement des mesures transitoires afin d’éviter que les communes ne répondant malheureusement plus aux critères du dispositif n’en sortent trop brutalement.
M. François de Rugy remplace M. David Habib au fauteuil de la présidence.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l’amendement no 139 .
J’irai dans le même sens que M. Vigier. Les communes classées en ZRR ont bénéficié d’un ensemble d’avantages importants qui ont permis de maintenir ou de favoriser l’activité économique, notamment dans les zones de montagnes où cette dernière est fragilisée, notamment à cause des longues distances à parcourir. Ce dispositif constitue donc un véritable instrument d’aménagement du territoire, qui concourt au rétablissement des équilibres dans les zones frappées de handicaps naturels. Cependant, chaque réforme entraîne des sorties de communes du dispositif. Le présent amendement vise à mettre en place une sortie en sifflet, sur trois ans.
La réforme du zonage des ZRR, qui entrera en vigueur le 1er juillet 2017, aura un impact important pour les entreprises comme pour les organismes d’intérêt général – OIG. Les critères d’éligibilité au dispositif ne seront plus examinés à l’échelle de la commune, mais de l’intercommunalité. De ce fait, un grand nombre de communes seront déclassées, notamment sur certains territoires de montagne. Il me semble que nous avions prévu une sortie en sifflet dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2015 – j’en suis certaine pour les OIG, un peu moins pour les entreprises… Le présent amendement prévoit donc une sortie du dispositif en sifflet en matière d’exonérations de cotisations sociales, pour les organismes d’intérêt général comme pour les entreprises implantées sur le territoire des communes concernées.
La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour soutenir l’amendement no 271 .
Le Gouvernement a profondément intérêt à faire adopter ce dispositif, car la loi NOTRe a suscité beaucoup de tensions dans nos territoires. Or le fait que le premier impact de la création des nouvelles intercommunalités, parfois au forceps, aboutisse à sortir des communes des ZRR est un signal catastrophique : non seulement les petites communes rurales sont un peu diluées avec des secteurs urbains au sein de grosses intercommunalités, mais en plus elles sont susceptibles de perdre les aides liées aux ZRR. Ce problème a rarement été identifié par les commissions départementales de la coopération intercommunale, malgré des effets pouvant être catastrophiques sur des structures comme des maisons de retraite ou des entreprises.
Il s’agit donc d’un vrai sujet, à mon avis très symbolique. Il convient de montrer aux communes de montagne que la création des grosses intercommunalités n’avait pas pour but de leur nuire. Si le premier effet de ces transformations est la perte des aides liées aux ZRR, en plus d’une dilution dans des ensembles où la montagne et la ruralité n’ont plus leur voix, alors nous perdrons sur toute la ligne.
Votre légitime préoccupation est satisfaite aujourd’hui. Le dispositif ZRR continue de s’appliquer.
Dans ces conditions, il faut avoir une explication de texte dans la mesure où l’on nous dit que tel est le cas. Le dispositif ZRR et l’ensemble des mesures fiscales qui s’y rapportent seraient maintenus, y compris pour les communes qui sortent du dispositif, et ce jusqu’en 2020. M. le ministre va trancher la question.
Nous avions émis un avis défavorable à ces amendements pensant que cette demande était satisfaite.
Le dispositif a été créé dans l’objectif de compenser les difficultés particulières que rencontrent certains espaces ruraux en matière d’attractivité démographique et économique. L’article 45 de la loi de finances rectificative pour 2015 a mis en place la réforme qui va s’appliquer à partir du 1er juillet 2017, soit le 1er juillet prochain.
La réforme conduit globalement au maintien du nombre de communes bénéficiant du dispositif, je l’ai dit l’autre jour devant le Comité des finances locales. Nous ne disposons pas encore du détail car nous sommes en train de discuter les derniers périmètres intercommunaux, mais nous avons une vision macro qui me permet de dire ici que, globalement, il y a pas mal d’entrants, pas mal de sortants, mais que le nombre au final restera le même, je vous l’ai dit, monsieur le député Jean-Pierre Vigier.
Pour ce qui est des entreprises et organismes d’intérêt général situés dans une commune qui ne sera plus classée en ZRR et qui bénéficient au 30 juin 2017 d’une exonération fiscale ou sociale, il n’y aura aucune modification de leur situation individuelle. Ils continueront de bénéficier de leurs exonérations pour la durée initialement prévue. Le Gouvernement a prévu un dispositif transitoire qui produira ses effets sur une longue durée, par exemple jusqu’à huit ans en ce qui concerne l’exonération de l’impôt sur les sociétés, soit bien au-delà de la période transitoire de trois ans que vous demandez.
Je considère donc que ces amendements sont satisfaits. Au-delà, il ne me paraît pas souhaitable de différer une réforme votée en décembre 2015 et qui s’inspire directement d’un rapport parlementaire ayant associé les députés de la majorité et de l’opposition. Je vous suggère de retirer ces amendements.
Les communes classées en ZRR bénéficiaient d’une bonification de leur DGF. La perdront-elles quand elles sortiront du classement en ZRR ?
Pour avoir travaillé avec Jean-Pierre Vigier sur ce rapport, il me semble que dans la loi de finances rectificative en question, la prorogation des mesures au bénéfice des entreprises avait été prévue. S’agissant des OIG, comme les maisons de retraite etc., le problème ne se pose pas, puisque l’exonération sociale concerne les salariés de ces structures qui ont été employés avant 2017. Quel que soit le futur statut d’une commune, qu’elle soit classée en ZRR ou non, les éventuels OIG y étant situés ne sont pas affectés par la réforme du zonage.
Monsieur Vigier, pour les communes dont vous parlez, une garantie de sortie est prévue.
Ces amendements, qui font l’objet d’un avis défavorable de la commission et du Gouvernement sont-ils maintenus ?
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.
L’amendement no 139 est retiré.
Une garantie de sortie, c’est vague. Il faudrait une réponse plus précise. Nous souhaitons savoir ce qu’est exactement cette garantie de sortie pour les communes concernées.
L’amendement no 152 du groupe RRDP sera en effet retiré. Mais je voudrais apporter une précision. Les mesures nécessaires concernant les entreprises, les OIG et, plus largement, les communes concernées ont été prévues dans la loi de finances rectificative. Et j’ai eu le plaisir, lorsque je siégeais au banc du Gouvernement, de porter un certain nombre de ces dispositifs. Ces amendements sont donc satisfaits et c’est la raison pour laquelle nous retirons le nôtre.
L’amendement no 152 est retiré.
Je voudrais faire un rappel au règlement. Monsieur le ministre, nous ne pouvons que louer votre rectitude et votre honnêteté. Étant un élu local, vous appréciez comme nous que l’on apporte des réponses précises aux élus locaux. Lorsque vous évoquez une garantie de sortie, nous sommes tout disposés à vous entendre, mais nous voulons savoir en quoi cela consiste. Si nous obtenons des clarifications, nous sommes prêts à retirer notre amendement.
Je précise que notre question ne porte que sur les communes. Les communes classées en ZRR bénéficient aujourd’hui d’une bonification de DGF. Notre question est simple : que se passera-t-il pour ces communes ? Je note que M. le ministre se tourne vers ses conseillers pour que nous obtenions une réponse claire. Si tel est le cas, nous retirerons l’amendement. Sinon, il y a un problème et nous serions fondés à demander une suspension de séance, le temps de clarifier les choses. En tout état de cause, il s’agit d’un point important.
Il s’agissait donc plutôt d’une question que d’un rappel au règlement, monsieur Wauquiez.
La parole est à M. le ministre.
La garantie de sortie signifie que les montants de DGF seront dégressifs pour les avantages qui étaient liés au classement en ZRR. Elles ne perdront pas tout, cela ne se fera que progressivement.
Je repose la question à M. Vigier de savoir si l’amendement no 106 est maintenu.
Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 6 rectifié , 137 , 151 et 261 .
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 6 rectifié .
La réforme de la dotation globale de fonctionnement est un serpent de mer. Nous en entendons parler depuis des années, et cette réforme qui était sur le point d’aboutir a été repoussée. Les simulations pour les zones de montagne n’étaient d’ailleurs guère encourageantes.
Le présent amendement vise à inscrire dans le présent acte II de la loi montagne, qui a vocation à être un acte stable sur le plan législatif et traversera probablement d’autres lois, notamment la réforme de la DGF – laquelle finira bien par arriver un jour –, les surcoûts spécifiques de fonctionnement supportés par les collectivités de montagne. Je ne les énumérerai pas tous mais il est évident que les routes coûtent beaucoup plus cher en montagne qu’en plaine, sans parler de la viabilité hivernale, ni des 30 % de surcoûts sur les bâtiments compte tenu de la topographie des terrains, de la résistance des sols. Bref, cet amendement est tout à fait justifié vise à prendre date pour le jour où la réforme de la DGF finira par aboutir dans ce pays.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l’amendement no 137 .
Il est défendu avec les mêmes arguments que ceux exposés par M. Saddier.
Cet amendement identique vise à compenser les charges d’entretien qui sont assumées par les communes de montagne. Les dispositifs et les normes qui s’appliquent à elles entraînent de nombreuses charges, exigences ou restrictions en matière d’aménagement et de développement. Il nous semble important d’en tenir compte dans le calcul de la DGF.
La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour soutenir l’amendement no 261 .
Nous avons accepté que cette loi ne comporte aucuns moyens supplémentaires. C’est un réel effort de notre part car normalement, dans une approche d’aménagement du territoire, il aurait fallu des moyens supplémentaires. Il est donc très important pour nous d’acter dans ce texte le fait que dans la future conception de la DGF, les surcoûts de la montagne seront bien pris en compte. L’évolution en ce domaine durant ces dernières années, toutes majorités confondues d’ailleurs, a consisté à éroder la part de la montagne et de l’aménagement du territoire dans l’architecture de la DGF, souvent sous l’impulsion d’élus urbains, très urbains même, très influents ici.
Pour nous, il est très important que le mode de calcul de la DGF prenne en compte les surcoûts de la montagne. Et je lance là un appel à l’ensemble des élus montagnards. Cela ne représente aucun coût pour le Gouvernement. Il s’agit juste de poser une pierre, ce qui sera utile pour tous, quelles que soient les majorités à venir. Je le répète, cet amendement est important pour nous dans le cadre de ce débat. Il faut que dans le calcul de la DGF, les surcoûts supportés par les zones de montagne sont pris en compte. C’est un moment important pour les élus de la montagne.
Lorsque cette question a été évoquée en commission, la conclusion de notre débat a été de renvoyer la discussion à une réflexion globale… Je sens votre exaspération, monsieur Wauquiez. Permettez-moi de vous relater ce qui s’est dit en commission, ce qui est aussi le rôle d’un rapporteur.
Notre débat en commission, disais-je, a consisté à renvoyer la discussion à la réforme de la DGF qui, je l’espère, pourra aboutir. Comme vous le savez, certaines spécificités de la montagne sont déjà prises en compte dans le calcul de la DGF. Dans notre rapport, nous avons avec Annie Genevard insisté sur le fait – au-delà de ce qui existe déjà et qui ne représente pas des sommes très importantes par rapport à d’autres enveloppes, qu’il s’agisse de la prise en compte du linéaire de voirie, des parcs naturels dans la dotation forfaitaire ou de la majoration de la dotation de solidarité rurale – qu’il nous semblait important de prendre en compte les aménités de la montagne. Nous ne sommes donc pas du tout en désaccord sur le fond de ces amendements qui posent un principe large.
Je rappelle la position de la commission tout en soulignant que nous ne sommes pas opposées, Annie Genevard et moi, au fait que des principes généraux de calcul de la DGF soient inscrits dans ce texte même si leurs modalités de déclinaison figureront nécessairement dans le texte relatif à cette dernière. L’avis n’est donc pas défavorable à ces amendements, mais j’en souligne les limites dans la mesure où ce qui est pris ici l’est sur le reste de l’enveloppe puisque celle-ci n’augmente pas…
…et que cela requiert une discussion globale. Il faut donc en rester à quelque chose de très général et ne pas escompter que cet amendement soit automatiquement suivi dans le cadre de la révision de la DGF. Il faut accepter qu’il soit débattu avec les collègues des autres territoires concernés.
C’est un avis défavorable. Mais à titre personnel, les rapporteures ont formulé dans leur rapport le souhait que les aménités de la montagne soient prises en compte.
Je comprends bien la demande, laquelle est justifiée. S’il est un dossier brûlant que j’ai trouvé en arrivant dans ce ministère, c’est bien la réforme de la DGF. Dès ma prise de fonction, j’ai consulté l’ensemble des associations d’élus. Toutes sans exception m’ont dit que la DGF était inéquitable, illisible, injuste, incompréhensible et qu’il fallait la réformer.
Après les avoir toutes reçues et entendu chacune exposer sa vision de la réforme, j’ai constaté qu’en dehors des principes énoncés, toutes ces visions étaient différentes. J’ai donc demandé à rencontrer ensemble les associations d’élus. Elles sont venues en délégation et, au nom de l’ensemble de ces associations, le président de l’Association des maires de France m’a remis un communiqué commun demandant le report de la réforme de la DGF, au motif que les élus considéraient que la période n’était pas la bonne, que le temps n’était pas venu et qu’il restait du travail à faire pour réformer la DGF.
Les commissions transpartisanes qui se sont constituées à l’Assemblée nationale et au Sénat sur le sujet – et qui ont du reste fini par fusionner – ont fait le même commentaire. Là encore, le principe de la nécessité de la réforme a été affirmé, mais lorsqu’il s’agit d’entrer dans le détail, chacun voit midi à sa porte et aucun accord fondamental ne se dégage sur cette réforme.
À la suite des déclarations faites par le Président de la République au Congrès des maires, j’ai donc mis en application ce qu’il avait annoncé : la réforme de la DGF sera reportée d’un an supplémentaire et intégrée au futur projet de loi de finances des collectivités qui, à partir de 2018, prendra place dans les débats parlementaires aux côtés du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale – c’était là aussi une demande unanime des associations d’élus.
Comment pouvez-vous penser que le Gouvernement puisse engager cette réforme à l’occasion d’un texte sur la montagne, alors que nous avons renoncé à la réforme globale ?
Si, puisque vous demandez que la DGF soit modifiée.
Si vous me permettez d’aller jusqu’à ma péroraison, je vous en serais reconnaissant.
Je répète que la demande exprimée par ces amendements me semble justifiée et qu’elle devrait être prise en compte lorsqu’interviendra une réforme globale de la DGF, mais que, quelle que soit la qualité de vos arguments, nous ne pouvons commencer à modifier cette dernière « par appartements ». Le Gouvernement ne peut donc pas donner un avis favorable à ces amendements.
Monsieur le ministre, chères collègues rapporteures, l’amendement ne modifie pas la DGF. Grâce au véhicule législatif qu’est cet acte II de la loi montagne, il pourrait avoir une durée de vie de l’ordre de quinze à vingt ou vingt-cinq ans – c’est en effet le délai au terme duquel on peut raisonnablement penser que sera adoptée une prochaine loi montagne. Entre-temps interviendra probablement une réforme de la DGF et nous voulons que la prochaine majorité qui réformera la DGF, qu’elle soit de droite ou de gauche, puisse lire dans l’acte II de la loi montagne ce que cet amendement tend à y inscrire : il faut que la future réforme de la DGF prenne en compte le fait que les collectivités de montagne ont des préoccupations spécifiques par rapport à celles des collectivités de plaine. Ces amendements ne réforment donc pas la DGF,…
…ils ne coûtent rien et n’engagent à rien, mais posent simplement des principes législatifs très importants qui devront être pris en compte lorsque la réforme de la DGF sera enfin menée à bien par une future majorité. Il me semblerait donc raisonnable de les adopter.
M. David Habib remplace M. François de Rugy au fauteuil de la présidence.
Monsieur le ministre, nous n’avons vraiment pas l’intention de vous embarrasser. Si cet amendement comportait des critères techniques de modification du calcul de la DGF, j’entendrais votre argument. Mais il ne s’agit pas ici d’opérer une réforme de la DGF, laquelle interviendra plus tard, mais de poser un principe de péréquation : le surcoût induit par la pente doit être intégré dans le calcul de la DGF. Ni plus, ni moins. Ce principe n’est pas lié à la réforme de demain ou d’après-demain, mais il s’agit d’un principe fondamental que nous voulons inscrire dans la loi : la montagne doit être prise en compte dans les dispositifs de dotation aux collectivités. Cela n’est, je le répète, nullement lié à votre réforme de la DGF et nous ne cherchons aucunement à vous embarrasser. Nous voulons simplement inscrire dans une loi sur la montagne que les dotations destinées aux communes doivent prendre en compte le fait qu’il est plus cher de construire dans la pente.
Deuxième élément, à l’intention de mes collègues élus de la montagne : nous vivons un moment où il nous faut nous montrer solidaires. L’esprit de l’Association nationale des élus de la montagne – ANEM – consiste précisément à être capables de nous émanciper des critères de nos partis respectifs – c’est ce que je fais de notre côté, et je l’assume. Il s’agit là d’un point de défense qui s’impose pour la suite de nos débats sur la DGF. Voulez-vous donc attendre que nous soyons engagés dans la réforme de la DGF et que les membres éminents de la commission des finances – qui sont tous des urbains – nous tombent dessus ? Croyez-vous qu’alors, ils nous tendront gentiment la main en nous disant : « Mes pauvres ! Nous allons vous donner un peu plus de DGF » ? Si nous, les montagnards, ne profitons pas de cette rare fenêtre de tir que nous donne le fait que nous sommes majoritaires dans l’hémicycle et pouvons peser fortement, malgré toutes les évolutions démographiques, pour faire passer des points en notre faveur, quand le ferons-nous ? Comptez-vous donc sur la sollicitude des urbains envers nous ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Nous avons entendu les explications de Mmes les rapporteures et de M. le ministre et comprenons que ces quatre amendements identiques puissent poser problème dans le cadre de la future réforme. Ils ne visent pourtant en rien à imposer quoi que ce soit et avaient pour seul objet de poser le principe de la reconnaissance des sujétions liées à la montagne. C’est à regret que nous retirerions le nôtre.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Nous avons tous la même préoccupation. Je demande une suspension de séance, afin que nous puissions réécrire cet amendement. La DGF fait en effet aujourd’hui l’objet d’un débat. Nous comprenons la position du Gouvernement et il n’est aucunement question d’inscrire dans la loi des dispositions explosives. Trouvons une autre formulation.
La séance, suspendue à vingt-trois heures trente-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante-cinq.
La séance est reprise.
Nous devons avancer. Mmes les rapporteurs ont déposé un sous-amendement no 544 aux amendements identiques nos 6 rectifié , 137 , 151 et 261 . Celui-ci vient d’être distribué. Chacun s’étant déjà largement exprimé, je donne la parole à Mme Laclais pour le présenter puis nous passerons au vote.
Ce sous-amendement tend à rédiger comme suit le début de l’amendement : « Dans son principe, la dotation globale de fonctionnement devra intégrer les surcoûts » spécifiques induits par des conditions climatiques et géophysiques particulières en montagne et les services, notamment écologiques et environnementaux, qu’elle produit au profit de la collectivité nationale. Seul le début des amendements identiques précédemment discutés change donc. Je remercie M. le ministre et le service de la séance pour cette rédaction qui, je pense, nous permet d’espérer un vote unanime.
Nous soutenons la réécriture de ces amendements et nous remercions le Gouvernement ainsi que les rapporteures pour l’efficacité dont ils ont fait preuve.
Je tenais simplement à dire que cette rectification, cette nouvelle rédaction, nous convient et que nous la voterons.
Le sous-amendement no 544 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Les amendements identiques nos 6 rectifié , 137 , 151 et 261 , sous-amendés, sont adoptés à l’unanimité.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 3 bis.
La parole est à M. Camille de Rocca Serra.
Je me réjouis que nos travaux en commission et, maintenant, la loi aient permis de reconnaître le concept d’« île-montagne » pour la Corse. Quelque chose commence ainsi, mais le concept ne suffit pas. Si tout cela devait se terminer par une compilation de mesures spécifiques à la montagne, ce serait insuffisant.
Nous devons donc travailler afin que les contraintes spécifiques reconnues comme telles, les cumuls de contraintes auxquelles est confronté cet archipel de montagne dans la mer, comme je l’ai toujours désigné, qu’est la Corse, le cloisonnement, la difficulté de créer une économie, la faible densité démographique – et conséquemment un marché intérieur très faible – aboutissent à une différenciation des mesures. Plus les zones de montagne sont reculées et enclavées, plus des mesures spécifiques s’imposent non seulement en matière d’aménagement du territoire mais dans toutes les politiques publiques. L’ensemble de ces contraintes appellent des réponses.
Vous le savez, monsieur le ministre, j’aurais souhaité qu’une loi spécifique à la Corse soit présentée plutôt que deux ordonnances liées à la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, la loi NOTRe. Un tel cadre aurait permis de mettre en place l’ensemble des mesures fiscales, financières ou d’adaptation congruentes avec ce concept d’île-montagne afin de lui donner tout son sens. J’espère que nous y parviendrons ensemble, je le souhaite, mais je m’interroge. Travaillerons-nous sur ce point dans le cadre d’un projet de loi de finances ou d’un projet de loi spécifique ? N’attendons pas des années pour décliner les mesures qui s’imposent afin d’être au rendez-vous de ce concept.
Si vous le permettez, monsieur le président, l’un de mes amendements ayant été jugé irrecevable, je souhaite aussi interroger M. le ministre sur la dotation de continuité territoriale, mesure adaptée à la notion d’île-montagne.
Nous sommes de nombreux parlementaires, dont M. Giacobbi ici présent, à demander la fongibilité de cette dernière en incluant les réseaux routiers, ce qui pourrait être mis en oeuvre très rapidement.
Mes propos ne seront pas fondamentalement différents, bien évidemment, de ceux de mon collègue et ami M. de Rocca Serra.
Notre débat, jusqu’à présent, a été très consensuel – à l’excès même – mais nous en arrivons à un point où la Corse devient elle-même consensuelle et c’est assez rare pour être souligné. La Corse est une montagne dans la mer, cela a été dit. Pour le voyageur maritime ou aérien qui y arrive, c’est une évidence visuelle, pour le géographe, c’est une évidence morphologique, et c’est aussi une évidence que renforce l’histoire du mouvement tectonique. La Corse est une montagne dans la mer !
Au-delà de l’évidence et de sa reconnaissance symbolique – qui est importante –, il y a le droit. Nous sommes en effet en train de légiférer – bien que l’on ait pu en douter il y a quelques minutes ou quelques instants ! – donc, d’établir des normes, et derrière le droit, il y a l’intérêt général qui s’attache à cette définition juridique. Le symbole est donc utile, le droit en découle mais nous devons éclairer l’intérêt qui pourrait s’y attacher. Nous ne sommes plus à l’âge où l’on croit que l’on crée ce qui est nommé – c’est Proust qui l’assure et il était après tout licencié en droit !
À ce titre, on nous suggère donc de citer l’article 174 du traité de Lisbonne, article général définissant les politiques régionales. Je vous fais grâce de sa lecture mais je signale qu’il prévoit une compensation des handicaps pour les régions insulaires, transfrontalières et de montagne.
Faut-il préciser les choses, comme l’a fait la commission en répondant aux divers amendements, notamment à celui, synthétique, de notre excellent collègue M. Pupponi, ou doit-on supprimer cette référence juridique ?
Je vous donne mon sentiment : en droit strict, il est vrai que cela n’est pas tout à fait utile et que la hiérarchie des normes est bousculée – d’ailleurs, cela va de soi. À l’inverse, une telle précision n’est pas dommageable. Comme on dit, cela ne mange pas de pain, et les choses qui vont sans dire vont encore mieux en les disant.
C’est pourquoi je souhaite que le texte de la commission, s’agissant de la Corse, demeure inchangé.
Je tiens à m’exprimer sur ce sujet car, pour nous, il en va de la solidarité montagnarde. La Corse est un massif de montagnes qui a été accueilli plus qu’à bras ouverts au sein de l’ANEM, où elle joue un rôle très important, les élus corses étant souvent très impliqués.
Il faut tenir compte de la particularité des contraintes corses. Dans certaines communes, c’est à la fois la loi littoral et la loi montagne qui s’appliquent au même moment ! La très grande spécificité d’un massif montagneux qui est en même temps une île duplique les contraintes – comme les interventions précises de Camille de Rocca Serra et de Paul Giacobbi l’ont très bien montré – puisqu’il en va à la fois de la continuité territoriale et des débouchés sur un territoire enclavé.
Je suis très heureux que ce texte soit l’occasion d’une telle avancée. Je remercie M. le ministre, qui l’a acceptée, qui a ouvert la voie, mais également Frédérique Massat et Marie-Noëlle Battistel – c’est un sujet que nous avons constamment évoqué lors de nos déplacements en Corse. Il s’agit d’une véritable marque de considération de la part des élus de la montagne à l’égard de la montagne corse.
Je m’associe aux propos remarquables du président de l’ANEM et des deux députés corses. Il s’agit d’un moment important pour cette île que nous aimons tant et qui est ainsi reconnue. Certes, tout n’est pas réglé mais cette avancée tombe bien. Alors que nous discutons cette loi montagne, nous sommes bien inspirés d’avoir choisi une telle orientation.
Comme il me reste un peu de temps, je tiens à saluer les trois rapporteures mais… l’égalité des chances entre députés est un leurre ! Voyez, monsieur le président, à quelle vitesse elles ont progressé ! Je les ai connues toutes jeunes…
Sourires
…elles ne savaient pas grand-chose – ce qui est toujours mon cas – mais elles ont progressé
Sourires
Sourires
… et il faudrait qu’elles apprennent à dire « oui » plus souvent !
Monsieur le ministre, je trouve remarquable votre façon de « ministrer »
Sourires.
Je suis heureux de l’accès médiatique que vous m’offrez dans La Dépêche du Midi : là, au moins, cela passe alors que dans les grands médias parisiens, même si vous ne le savez pas, monsieur le président, j’ai quelques problèmes. Il est vrai que je souffre beaucoup pour les journalistes qui y travaillent parce que ces médias sont détenus à 70 % par des fortunes étrangères – ou françaises et étrangères. Ce n’est pas facile, pour une grande démocratie comme la France, d’avoir à se les taper.
Voilà, j’ai terminé – pour l’instant.
J’inviterai les journalistes de La République des Pyrénées à lire le compte rendu de nos débats !
Sourires
Nous en venons aux amendements à l’article 3 bis.
Je suis saisi de deux amendements, nos 314 et 315 rectifié , qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour les soutenir.
Vos rapporteures se réjouissent de l’accord auquel nous sommes parvenus en commission sur cet article 3 bis après le travail réalisé par les députés.
L’amendement de simplification no 314 ne vise donc pas à rouvrir un débat mais nous avons néanmoins pensé que la rédaction de l’article était peut-être un peu lourde. Il s’agit de supprimer la référence à l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. J’ai entendu ce qui a été dit. La laisser n’est pas un problème, l’ôter non plus.
Si tel est le cas, vos rapporteures seront heureuses qu’il en soit ainsi.
S’agissant de l’amendement no 315 rectifié , je me permets simplement d’insister sur le fait que les énumérations risquent toujours d’être incomplètes. Il nous semble donc plus léger et plus pertinent de ne pas en commencer une. Je suggère donc de garder cet amendement. Si tout le monde en est d’accord, vos rapporteures en seront très heureuses.
Comme beaucoup, j’aime la Corse et j’aime les Corses. Par les temps qui courent, il se trouve que je suis souvent amené à me rendre en Corse pour rencontrer les élus afin de travailler à la création de la collectivité territoriale unique en fusionnant les deux départements et la collectivité territoriale de Corse.
C’est dans le cadre de ces déplacements que je me suis engagé à accepter le statut d’île-montagne. Cette démarche est arrivée trop tardivement pour que je puisse l’intégrer dans le texte avant de le transmettre au Conseil d’État mais je m’étais engagé devant l’ensemble des élus, à la préfecture d’Ajaccio, à ce que le Gouvernement donne un avis favorable à un amendement déposé en ce sens. Ce fut le cas en commission des affaires économiques, avec avis favorable des deux rapporteures.
Il est légitime de reconnaître à la Corse le statut d’île-montagne. Il conviendra de le définir précisément, de même que toutes ses conséquences. Nous y travaillons, y compris en lien avec Bercy, naturellement.
Concernant la possibilité d’étendre la dotation de continuité territoriale à un certain nombre d’autres politiques, j’ai aussi donné mon accord et ce sera chose faite par la loi de finances rectificative comme je m’y étais engagé. Je tiens toujours mes engagements. Je sais qu’en Corse on n’a qu’une parole. Je n’ai aussi qu’une parole. Je l’avais dit et le Gouvernement le fait.
Concernant ces amendements, je me rallie volontiers à la position de la rapporteure puisque nous sommes dans le consensus : nous arrivons même à trouver un consensus sur la Corse, ce qui, vous me l’accorderez, est plutôt nouveau.
Quant à la loi spécifique souhaitée par M. de Rocca Serra – et Paul Giacobbi le sait très bien car nous en avons souvent parlé – elle n’est pas d’actualité. Peut-être qu’il faudra par la suite une loi mais chaque chose en son temps ! Vous savez très bien que l’engagement qui a été pris par le Premier ministre auprès de l’ensemble des élus corses portait sur les ordonnances. Ces ordonnances sont aujourd’hui une réalité puisque je les ai transmises au Conseil d’État après l’avis de la collectivité territoriale de Corse. Je les présenterai dans quinze jours, je crois, au Conseil des ministres. Puis nous passerons à la procédure de ratification.
Je voudrais saluer la parole du ministre : il a fait des propositions très précises lors de ses déplacements dans l’île et ses engagements ont été respectés. Je crois que cela est à saluer et qu’il faut l’en remercier et à travers lui tout le Gouvernement.
Je partage ce qui a été dit quant au caractère historique de ce que nous vivons aujourd’hui puisqu’il s’agit d’une revendication ancienne, mais aussi quant au fait que, comme la rapporteure l’a dit, la référence à l’Europe doit rester dans le texte. Ce n’était pas obligatoire, quoiqu’on nous a dit en commission qu’un des problèmes de la Corse est qu’elle n’est pas un massif interrégional. Or, l’Europe ne finance que des projets qui concernent des massifs interrégionaux. Si c’est exact, il faudra vérifier si du fait de la nouvelle configuration des régions issue de la réforme ce texte ne concernera pas d’autres massifs qui étaient auparavant interrégionaux et ne le sont plus aujourd’hui. Le fait de laisser le renvoi aux textes européens dans la loi permettra sûrement d’apporter des solutions plus pratiques à cette problématique bien particulière.
L’amendement no 314 est retiré.
L’amendement no 315 rectifié est adopté.
L’article 3 bis, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement n° 334 rectifié , portant article additionnel après l’article 3 bis.
Cet amendement vise à prendre en compte les Hauts de La Réunion, les massifs de Guadeloupe et de la Martinique dont le caractère insulaire et fortement montagnard les met eux aussi en situation de cumul de contraintes. Son texte est le suivant : « Les spécificités des zones de montagne dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, soumises à un cumul de contraintes, sont prises en compte dans l’adaptation des dispositions de portée générale, des politiques publiques et de leurs décisions d’application. » Cette rédaction satisfait un souhait exprimé en commission et auquel nous avions à coeur de donner une suite favorable.
Sagesse.
L’amendement no 334 rectifié est adopté.
S’agissant de la gouvernance des territoires de montagne – je n’aime pas ce terme de gouvernance, je préfère « l’expression du pouvoir » – je pense que nous aurons des soucis, notamment dans le massif des Pyrénées qui, malgré la réduction du nombre de régions, est toujours partagé entre deux régions très importantes. Or il est très difficile au travers des contrats de plan – qui ne sont plus de véritables contrats de plan d’ailleurs mais qui restent des accords entre l’État et les Régions – d’arriver à harmoniser une véritable politique de massif chez nous et c’est très dommageable.
Je vois depuis une vingtaine d’années la politique du massif pyrénéen régresser. Heureusement que le Gouvernement a maintenu le Commissariat à l’aménagement des Pyrénées, qui est d’ailleurs très dynamique et très performant, mais je crois qu’il y a mieux à faire.
De la même manière, je voudrais réitérer mon inquiétude face à des communautés de communes extrêmement étendues sur des territoires aussi sensibles. Si tout le monde savait organiser ces communautés de communes comme vous avez su le faire chez vous, monsieur le président, il n’y aurait aucun souci à se faire. Mais des communautés s’étendant sur des dizaines, parfois une centaine, de kilomètres alors que parallèlement le pouvoir des maires a été considérablement restreint, vous savez que c’est un problème auquel les habitants de nos territoires sont très sensibles. Ils ont vu partir tout le monde. Ils ont vu partir le percepteur ; ils ont vu partir le collège ; ils ont vu partir le curé – ça, on n’y pouvait rien – ; ils ont vu partir le médecin, et maintenant il voit partir l’infirmière et bientôt le maire. À qui se confier lorsqu’on vit quelque chose de grave ou qu’on commence à ressentir une très forte inquiétude ?
Ces deux réflexions, l’une plutôt globale et l’autre très locale, traduisent, me semble-t-il, le sentiment de nos concitoyens.
L’article 4 est adopté.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 34 , portant article additionnel après l’article 4.
Dans le cadre de la nouvelle architecture territoriale avec la mise en place de regroupements régionaux, intercommunaux ou métropolitains et la refonte de la clause de compétence dévolue aux collectivités territoriales, il est nécessaire d’avoir un représentant des zones de montagne dans tous les centres de décision dont l’aire géographique est située en partie en montagne pour éviter une carence d’élus de la montagne qui représenteraient l’intérêt de ces territoires.
Votre objectif sera partiellement satisfait par l’article 4 bis. C’est un débat que nous avions eu à l’occasion de l’examen du projet de loi NOTRe que de savoir comment la montagne pouvait être mieux représentée dans les exécutifs ou les conseils régionaux.
Par cet amendement, monsieur le député, vous proposez que l’État autorise la désignation d’un représentant des territoires de montagne à chaque échelon territorial et au moins à l’échelon intercommunal.
Cet amendement pose un problème de constitutionnalité : eu égard au principe intangible de la libre administration des collectivités territoriales l’État ne peut pas décider que les collectivités adopteront une représentation dédiée à la montagne. C’est pour ce motif que nos propositions en la matière avaient été retoquées lors de l’examen du projet de loi NOTRe – nous avions proposé par amendement que chaque conseil régional désigne en son sein un vice-président chargé de la montagne. Cela n’était pas conforme au principe de libre administration des collectivités.
C’est la raison pour laquelle nous proposons une autre formulation, qui est celle-là constitutionnelle et qui donne la possibilité aux conseils régionaux de désigner, soit un vice-président soit un conseiller régional délégué à la montagne.
Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.
Même commentaire et même avis.
Je pense que Mme la rapporteure a parfaitement raison sur ce plan-là et je ne sais pas si nous pourrions dans un dernier sursaut – pas ce soir parce que cela ne touche pas que la montagne : cela touche l’ensemble du territoire français mais peut-être avant la fin du quinquennat – retoucher un petit peu la loi NOTRe, qui n’est pas la mienne – j’aimerais qu’elle puisse le devenir avant la fin du quinquennat – et rétablir les conseillers départementaux qui pouvaient être les élus de vastes territoires peu peuplés. Ainsi le problème légitimement souligné par Mme la rapporteure ne se poserait plus puisque suffisamment de représentants de la montagne siégeraient alors et que du coup la montagne se sentirait de nouveau politiquement représentée.
Voilà la modeste proposition que je me permets de faire, de tout mon coeur néanmoins.
L’amendement no 34 n’est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 4 bis.
La parole est à M. Martial Saddier.
On a eu ce débat en commission et Mme Genevard vient d’expliquer le contenu de l’article 4 bis. Le principe, qu’il est toujours bon de réaffirmer notamment depuis la création des grandes régions et les nouvelles compétences issues de la loi NOTRe, est que la montagne doit être représentée.
Je veux simplement dire que les grandes régions françaises dont une partie significative de leur territoire se trouve en zone de montagne n’ont pas attendu cet acte II de la loi montagne pour ce faire. Permettez-moi de prendre deux régions en exemple et que les autres ne m’en veuillent pas : la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ainsi que la grande région Auvergne-Rhône-Alpes ont dans leur exécutif un vice-président ou un conseiller délégué à la montagne.
Il faut donc prendre acte que cela figurera dans la loi mais aussi que les responsables des régions concernées n’ont pas attendu la loi pour assurer la représentation de la montagne.
Je crois que ce projet de loi est l’occasion d’aborder beaucoup de sujets que nous ne pouvons pas aborder lors de l’examen d’autres textes où, minoritaires, nous avons le sentiment d’être quelque peu écrasés. Je me souviens qu’un jour, alors que j’évoquais devant des collègues des problèmes de la montagne, ils m’ont dit : « On a du travail. Continue tout seul. » Aujourd’hui en revanche les montagnards sont en famille, si je puis dire. Les montagnards représentent beaucoup et vous l’êtes vous aussi, de coeur et d’esprit puisque chaque jour vous voyez des montagnes en face de vous quand vous vous levez.
Je pense donc qu’il faudra revenir sur les textes que nous avons adoptés au cours des deux derniers mandats présidentiels, en particulier du dernier, parce que je ne vois pas comment on va redonner vie à ces territoires si on ne leur donne pas la possibilité de le faire politiquement.
Comme le disait un vieux philosophe, partout où la voix politique disparaît, la mort démocratique, sociale et économique surgit rapidement. C’est très exactement ce qui est en train de se passer dans un très grand nombre de territoires de montagne, des centaines de milliers d’hectares. Qui entretiendra ces territoires immenses ? Qui s’avancera pour faire en sorte qu’il n’y ait pas ces véritables raz-de-marée à chaque fois qu’un orage s’abat sur nous, avec des embâcles qui se forment un peu partout, ou ces gigantesques feux de forêt ? Et la prévention des avalanches ? En votant cette loi irresponsable il y a quelques mois, nous n’avons pas vu tout ce qui allait s’ensuivre et nous n’avons surtout pas vu que nous allions créer dans les montagnes les conditions que connaît malheureusement la banlieue aujourd’hui.
Hormis ceux d’entre nous qui ont participé à tous les travaux de la commission et à ces débats dans l’hémicycle, personne ne pourra comprendre cet article 4 bis, qui n’ajoute rien à la prérogative des conseils régionaux qui peuvent d’ores et déjà désigner un vice-président ou un conseiller chargé des questions de montagne !
Je reviens au problème soulevé par l’amendement défendu tout à l’heure par mon collègue Cinieri et qui a été rejeté. Sinon pour se faire plaisir, comment peut-on dire dans un texte de loi qu’un conseil régional, qui en a tout pouvoir, peut, s’il le veut, désigner un élu pour s’occuper des problèmes de montagne ?
Mon collègue Viala a raison, cet article nouveau est superfétatoire. Il faut laisser aux comités de massif la liberté de s’organiser, selon les spécificités qui sont les leurs.
La parole est à M. Philippe Folliot, pour soutenir l’amendement identique no 168 .
Je lis cet article 4 bis : « Les conseils régionaux peuvent prévoir un poste de vice-président ou de conseiller chargé des questions relatives à la montagne. »
Si je propose un amendement de suppression, c’est parce qu’on se fait plaisir avec un tel article qui participe de l’inflation législative, pour ne pas dire de la logorrhée législative, mais qui n’apporte absolument rien. Je pourrais proposer un article 4 ter prévoyant la même chose dans les conseils départementaux et un article 4 quater relatif aux communautés de communes et communautés d’agglomération…
Nous n’examinons pas une disposition efficace et la sagesse commanderait de simplifier le texte en supprimant cet article.
L’amendement no 61 est retiré.
Mes collègues socialistes s’amusent de ce débat, puisque c’est à mon initiative qu’a été introduite la disposition qu’il est proposé de supprimer. Lorsque j’étais conseillère régionale, moi qui habite un territoire de montagne, je regrettais que la montagne ne soit pas davantage identifiée dans les politiques régionales. En effet, mon cher collègue et ami Martial Saddier, toutes les régions ne sont pas aussi vertueuses que celles de Provence-Alpes-Côte-d’Azur ou de Rhône-Alpes. Il y a des conseils régionaux dans lesquels la montagne n’apparaît aucunement.
C’est à partir de ce constat que je déplore que j’ai essayé, dans la loi NOTRe, de proposer qu’on indique une vice-présidence dévolue à la montagne, afin de « redonner de la visibilité politique » à la montagne, pour reprendre les mots de Jean Lassalle.
Comme cette disposition de la loi NOTRe a été jugée inconstitutionnelle, je l’ai proposée à mes collègues sous la forme d’une faculté : de là vient cette formulation indiquant que les conseils régionaux « peuvent », puisqu’on ne peut pas le leur imposer. En inscrivant cette possibilité dans la loi, on appelle l’attention des conseils régionaux qui n’ont pas encore fait la démarche de certains autres. C’est tout : c’est une disposition d’alerte, signalant que les conseils régionaux peuvent prendre davantage en considération la montagne.
Je donne donc un avis défavorable à la suppression de cette disposition et je demande le retrait de l’amendement.
Avis défavorable, par solidarité avec Mme la rapporteure.
Sourires.
L’amendement no 168 n’est pas adopté.
L’article 4 bis est adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, premier orateur inscrit sur l’article.
Pour avoir présidé la commission permanente du Conseil national de la montagne – CNM – avant mon collègue et ami Joël Giraud et en succédant à Michel Bouvard, je voudrais saluer les progrès réalisés sous deux législatures successives concernant le fonctionnement de ce conseil.
Celui-ci a été créé en 1985 par la loi montagne. Il était censé être le Parlement de la montagne. En vérité, pendant de longues années, il fallait attendre la moitié de la législature pour qu’il se mette en place ; à une année de la fin de la législature, il y avait une réunion avec le Premier ministre et, quand le Conseil avait fini par être mis en place, la législature était terminée… Je caricature à peine.
Depuis trois législatures, d’importants efforts ont été faits, se traduisant par la mise en place du Conseil dans les six mois qui suivent le renouvellement du Parlement et par deux réunions plénières. On inscrit dans la loi que le Premier ministre réunira le Conseil chaque année, mais très sincèrement, s’il y a très vite une réunion constitutive et une réunion dans les trois ans qui donne une feuille de route, comme celle de Chamonix, ce n’est pas si mal.
Nous avons, sous la législature précédente puis sous celle-ci, donné des délégations importantes à la commission permanente. Quand on fait confiance à des structures comme celles-ci, ça paie : en effet, le Conseil a pris ses responsabilités, entre la législature précédente et celle-ci, pour donner des avis éclairés sur des projets de décrets et de circulaires, ou pour participer à la co-construction de textes. Cela a été le cas, avec Annie Genevard et Bernadette Laclais, sur cet acte II de la loi montagne.
Le Conseil, aujourd’hui, est équilibré, dans sa composition comme dans son fonctionnement. Je tenais à le dire, avec ma modeste expérience de président de la commission permanente, et à saluer le travail effectué par Joël Giraud et les équipes en place. S’agissant du CNM, je soutiens le texte tel qu’il est rédigé actuellement.
Sans remettre nullement en question les mérites des présidents qui se sont succédé à la tête du Conseil national de la montagne – et je rejoins sur ce point l’un d’eux, M. Saddier, qui vient de s’exprimer –, très sincèrement, je retire quant à moi de cette expérience qu’il n’a pas servi à grand-chose.
Il avait suscité beaucoup d’enthousiasme à sa création. Je ne le critique pas parce que je n’en ai jamais fait partie : j’aurais pu en faire partie si on m’avait invité, cela a dû être un oubli. Toujours est-il que ce conseil pourrait faire le lien avec le Gouvernement sur des sujets éminemment sensibles qu’on ne peut pas aborder ailleurs.
J’évoquais tout à l’heure ce galimatias que constitue maintenant l’ensemble des textes européens, mondiaux et français à propos de la protection de la nature sur notre territoire. Il n’y a pratiquement plus rien d’envisageable sans – c’est le cas de le dire – une montagne de difficultés. Ce Conseil aurait peut-être pu essayer de remédier à ce problème. Je n’ai pas souvenir d’initiatives en ce sens.
J’ai eu l’occasion, à trois reprises ce soir, d’évoquer le véritable désastre que constitue la cohabitation imposée, comme un viol, de fauves et des pauvres hommes et femmes de la montagne qui sont en train de disparaître. Ces fauves, on les réintroduit, comme les ours dans les Pyrénées ; mais pour former de nouveaux bergers, il faudra des siècles car le savoir-faire nécessaire est immense. Faisons attention à ce que nous faisons et donnons au Conseil national de la montagne les moyens de jouer son véritable rôle.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 338 .
Il fait écho à un amendement similaire de la rapporteure pour avis examiné en commission du développement durable et il vise à ajouter les associations de protection de l’environnement agréées à la composition du Conseil national de la montagne.
Cet amendement va dans le sens de l’avis du Conseil économique, social et environnemental qui préconise un renforcement de la représentation associative au sein du CNM.
Les associations de protection de l’environnement y sont en effet sous-représentées : sur les cinquante-neuf membres du CNM, on n’en compte qu’une seule, agréée, France Nature Environnement. C’est loin d’être suffisant compte tenu des enjeux du changement climatique, de la protection de la nature, de la biodiversité et du développement durable.
La composition et le fonctionnement du CNM sont fixés par décret, mais l’alinéa 6 du présent article détaille néanmoins sa composition. Rien n’empêche d’ajouter, par voie législative, des membres dont la représentation nous paraît importante. Cela a déjà été le cas dans le cadre de la loi relative à la biodiversité, pour la composition de l’Agence française pour la biodiversité.
Avis défavorable pour plusieurs raisons. D’abord, comme l’a rappelé un ancien président de la commission permanente du Conseil national de la montagne, Martial Saddier, la composition actuelle est équilibrée. Nous sommes défavorables à toute précision législative sur la composition du CNM, qui relève du pouvoir réglementaire. Par ailleurs, le milieu associatif est bien représenté au sein de ce Conseil, puisqu’il fournit environ 10 % de ses membres. S’agissant de la protection de l’environnement, ses représentants ne sont pas absents non plus, puisqu’on y trouve France Nature Environnement ainsi que le Conseil national de la protection de la nature. On peut y ajouter la Fédération nationale de la pêche en France et de la protection du milieu aquatique. Par conséquent, il semble que cette problématique soit convenablement servie par la composition du CNM.
Même avis défavorable, car la composition du CNM est fixée par décret et non par la loi.
Nous comprenons la demande de notre collègue : il s’agit de veiller à la juste représentation du milieu associatif. C’est pourquoi, au sein de notre groupe, il y aura des votes différents.
Je voudrais répondre à Mme la rapporteure, en soulignant la contradiction survenue à quelques minutes d’intervalle. Il y a quelques instants, vous nous avez expliqué, madame la rapporteure, qu’il fallait absolument inscrire dans la loi que les conseils régionaux, qui normalement s’administrent librement, peuvent avoir un vice-président ou un conseiller délégué chargé de la montagne. Comme si une région comprenant un massif montagneux ne se préoccupait pas de la montagne si ce n’est pas indiqué dans la loi ! Autant imaginer qu’il faudrait dire à la région Bretagne qu’il lui faut un vice-président chargé de la mer, au cas où elle l’oublierait…
Or, sur un problème d’une autre importance et d’une autre portée concrète, à savoir la représentation d’associations agréées – je dis bien agréées – de protection de l’environnement, vous invoquez le pouvoir réglementaire et nous dites qu’il y en a déjà quelques-unes… Donc, s’il y en a quelques-unes, c’est par la volonté d’un Gouvernement quand il a pris le décret, mais ce n’est pas stable, cela peut changer.
Je ne comprends pas du tout votre raisonnement. Dans un cas, on fait de l’affichage, ce qui ne sert à rien ; j’ai quant à moi voté l’amendement no 168 de notre collègue Folliot, parce que j’en ai assez des articles de loi qui ne servent à rien, qui sont du verbiage. Mais dès qu’il s’agit de traiter un problème concret, là silence ! Quel est le problème avec les associations de protection de l’environnement ? À quel titre serait-il anormal de préciser dans la loi que le Gouvernement, quel qu’il soit, lorsqu’il rédigera le décret fixant la composition du décret, sera obligé d’y inclure ces associations qui sont agréées, connues et respectées ? De même, il peut y avoir des organisations représentatives, comme celles dont nous avons parlé à propos du pastoralisme ou comme celles des agriculteurs. Quel est le problème avec les associations de protection de l’environnement ?
Je n’ai absolument rien contre le fait que les associations de défense de l’environnement fassent partie du Conseil national de la montagne. Toutefois, s’agissant d’associations agréées, cela pose le problème de l’agrément, tout comme le caractère local ou montagnard de ces associations. Rien n’est plus pénible, dans certaines instances, que des personnes issues du milieu urbain expliquant aux gens de la montagne qu’il faut faire ceci ou cela,…
…sous telle ou telle condition, dans tel ou tel cadre, alors qu’elles ne vivent pas dans nos territoires de montagne et n’en connaissent pas les réalités – ou seulement de manière théorique, et non pratique, contrairement à ceux qui les vivent parce qu’ils y habitent. Je suis donc tout à fait favorable, sur le principe, à votre amendement mais je ne peux me retrouver dans sa rédaction.
Tout d’abord, madame la rapporteure nous dit que la composition est équilibrée : ce point de vue est extrêmement subjectif ! De même, la composition relèverait du seul domaine réglementaire : or l’alinéa 6 précise déjà pas mal la composition. Celle-ci relève peut-être « aussi » du domaine réglementaire, mais elle n’en relève pas « seulement ». Je vous ai d’ailleurs indiqué que la composition de l’Agence française pour la biodiversité a été largement fixée par la loi pour la reconquête de la biodiversité.
Si le présent amendement était adopté, seules les associations agréées pourraient siéger au Conseil national de la montagne. Cela signifie que l’on a déjà reconnu certaines compétences à ces associations, qui ont déjà fait la preuve de leur sérieux pour pouvoir être agréées. Je souhaite vous rassurer, monsieur Folliot : ne vous inquiétez pas, elles n’auront pas la majorité ! Il y a au total cinquante-neuf membres.
Enfin, la montagne concerne tous les citoyens : elle ne concerne pas que les personnes qui habitent, qui « connaissent » bien la montagne. Je ne vois pas pourquoi des associations de protection de l’environnement ne connaîtraient pas bien la montagne, elles aussi.
L’amendement no 338 n’est pas adopté.
Vous conservez la parole, madame Bonneton, pour soutenir l’amendement no 387 .
Le présent amendement concerne à nouveau la composition du Conseil national de la montagne, instance très importante. Compte tenu de l’importance de l’agriculture de montagne, il serait parfaitement normal que les agriculteurs soient représentés, et même que cela soit inscrit dans la loi.
Selon l’article 2 de la loi no 99-574 du 9 juillet 1999 d’orientation agricole, « l’ensemble des organisations syndicales d’exploitants agricoles […] ont vocation à être représentées au sein des commissions ainsi que dans les comités professionnels ou organismes de toute nature investis d’une mission de service public, ou assurant la gestion de fonds publics ou assimilés, où siègent des représentants des exploitants agricoles. […] »
Le présent amendement propose donc que des syndicats représentatifs du monde agricole, dans le respect de la loi que je viens de citer, siègent au Conseil national de la montagne.
Outre les raisons exposées lors de l’examen du précédent amendement, sur lesquelles je ne reviendrai pas, nous considérons que la composition actuelle du Conseil national de la montagne, où sont représentés pas moins de cinq organismes ayant trait à l’activité agricole, permet de traiter largement les questions agricoles. Par conséquent, estimant que cette demande est satisfaite, nous donnons un avis défavorable à votre amendement, madame la députée.
Même explication et même position que sur l’amendement précédent.
Pour pratiquer ces institutions, qu’il s’agisse du Conseil national de la montagne ou des comités de massif, je peux affirmer que les gens qui se mobilisent dans ces structures sont les porte-parole les plus efficaces de leur cause.
En revanche, si l’on commence à sectoriser en demandant que telle ou telle catégorie soit représentée, la situation devient ubuesque. Ainsi, dans le comité de massif des Alpes, je ne sais plus comment faire nommer une des associations les plus efficaces en termes de réseau d’éducation dans le massif alpin parce qu’elle n’a pas d’agrément, alors que c’est elle qui travaille le plus sur la problématique « jeunes et montagne ». Il en va de même au sein du Conseil national de la montagne où je suis d’ailleurs le premier à reconnaître que le représentant de France Nature Environnement était particulièrement actif et sérieux.
Il faut toutefois se méfier de vouloir sectoriser toujours plus, en exigeant que telle ou telle catégorie soit représentée, car l’on risque de passer à côté de personnes qui constituent des ressources importantes pour la montagne. En effet, sans forcément représenter une catégorie particulière, elles travaillent à l’avenir de ces montagnes.
L’amendement no 387 n’est pas adopté.
L’article 5 est adopté.
La perspective de voir les comités de massif s’étendre encore ne m’enthousiasme guère. Leurs territoires, dont il faut s’occuper, sont déjà considérables ; aussi leur agrandissement soulève-t-il des questions.
J’ai constaté, au cours des douze ou quinze dernières années, une baisse de l’activité de ces instances pléthoriques : le temps que M. le préfet dise bonjour et fasse le tour de table, que M. le président de la commission permanente, qui est un élu, dise à son tour bonjour, que l’on évoque un sujet qui ne pose de problème à personne, la séance est finie ! Nous avons fait 300 kilomètres, et autant pour revenir, soit 600 kilomètres pour rien !
Ce texte est d’inspiration beaucoup trop technocratique : il manque de réflexion, de participation humaine, ainsi que mes collègues le disaient à l’instant. Peu importe, du reste, car nous sommes attachés aux territoires. Le problème est que ces structures ne sont pas adaptées. Il faudrait pouvoir s’y passionner beaucoup plus, comme nous avons pu le faire au début de l’existence des comités de massif. Ainsi, pour ceux qui étaient transfrontaliers, un travail beaucoup plus important a été réalisé avec le pays d’à côté : les transalpins avaient des relations beaucoup plus étroites – à moins que M. Giraud ne me contredise – avec l’Italie, comme nous avec l’Espagne.
Aujourd’hui, cependant, ces instances ne discutent de rien. Alors que les parcs nationaux constituent un énorme problème, très discuté, par exemple chez nous, jamais de débat n’est organisé sur ce sujet. Natura 2000 est une horreur absolue pour nos territoires de montagne, or personne n’en dit jamais un mot.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je crois que vous avez compris le sens de ma pensée.
Il peut même m’arriver, quand je suis dans les Pyrénées-Atlantiques, de vous précéder dans l’expression !
Le présent amendement vise à aligner la composition des comités de massif sur celle du Conseil national de la montagne, ce qui paraît logique.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement no 316 .
Nous proposons que soient intégrés dans la gouvernance deux députés et deux sénateurs. Cela apporte une précision à l’amendement de M. Saddier.
Pour ma part, je propose que les parlementaires élus du massif soient membres du comité de massif. Je demande à Mme la rapporteure de bien vouloir nous préciser comment les deux députés et les deux sénateurs seraient choisis. N’ayant pas fait l’analyse, j’imagine que, dans certains massifs, il y a plus de deux députés et de deux sénateurs, et moins dans d’autres.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ?
Monsieur Viala, les deux députés et les deux sénateurs seront désignés par le bureau de chaque assemblée.
J’émets un avis favorable sur l’amendement de la rapporteure. Lors du débat en commission, j’ai indiqué que j’étais tout à fait d’accord pour que les parlementaires soient représentés dans les comités de massif. Cela étant, certains massifs couvrent des territoires extrêmement étendus. Ils disposent ainsi d’un nombre de parlementaires trop important pour qu’ils puissent tous siéger dans les comités de massif. J’ai donc demandé aux rapporteures de réfléchir à une représentation : deux sénateurs et deux députés désignés par les bureaux des assemblées, cela me semble juste et équitable. Je donne donc un avis favorable à l’amendement no 316 et demande le retrait des deux autres.
Je vais retirer mon amendement. Je précise simplement, pour le compte rendu de la séance et pour celles et ceux qui nous regardent, que nous ne prenons pas la défense de la représentation des parlementaires. Si ce sujet a été abordé en commission, c’est qu’avec le cumul des mandats, la représentation des parlementaires était assurée dans les instances – en effet, neuf fois sur dix, parmi les maires, les conseillers départementaux et les conseillers régionaux, il y avait des parlementaires. Mais avec l’interdiction du cumul des mandats aujourd’hui, il faut revoir la composition de ces instances : la présence des parlementaires, à chaque fois qu’elle sera souhaitée, devra être indiquée dans la loi ou dans le décret car le non-cumul des mandats aboutira peu à peu à une disparition de la représentation des parlementaires. Si cela ne pose pas de problème, ce n’est pas grave, mais si l’on estime que la présence des parlementaires est importante – et je pense que c’est le cas pour les comités de massif ou pour le CNM –, il faudra le préciser : tel était l’objet de ce débat en commission.
L’amendement no 15 est retiré.
Je souscris aux propos de mon collègue Saddier : la suppression du cumul des mandats aura pour conséquence le fait que les parlementaires ne seront plus représentés. J’avais mis en avant, dans mon amendement, que je retire également, la nécessité pour les parlementaires de s’assigner la fonction de contrôler l’application de cette loi. Nous souhaitons en effet qu’un certain nombre de dispositifs nationaux soient déclinés au plan local dans le respect des principes fondateurs de la loi. Il me semble que les parlementaires sont particulièrement fondés à aller dans les instances vérifier la mise en oeuvre de ces dispositions. Je retire mon amendement.
L’amendement no 222 est retiré.
L’amendement no 316 est adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 214 .
Avis défavorable. Un mot pour expliquer pourquoi nous ne sommes pas favorables à l’amendement de M. Chassaigne : les comités de massif ne gèrent pas des fonds publics ou assimilés, mais sont informés des moyens alloués par un rapport annuel établi par le préfet coordonnateur de massif. Celui-ci rend compte au comité de massif des décisions d’attribution des crédits inscrits dans les conventions interrégionales.
Par ailleurs, ces comités ne sont pas investis d’une mission de service public : il s’agit simplement d’instances de concertation consultative, raison pour laquelle l’article 2 de la loi d’orientation agricole auquel vous faites référence ne s’applique pas. Il leur faut en effet plus de souplesse que ce qu’impose cet article 2.
Le texte proposé ne précise pas la composition du CNM, qui est renvoyée à un décret. Nous serons bien sûr très attentifs à la juste représentation de la profession agricole dans sa diversité au sein du CNM. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; si tel n’était pas le cas, l’avis serait défavorable.
L’amendement no 214 est retiré.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 388 .
L’organisation des comités de massif par commissions spécialisées est très probablement indispensable. Toutefois, cette organisation ne doit pas conduire à un cloisonnement des décisions par secteur ; aussi le présent amendement rappelle-t-il que le développement durable des activités doit se faire en cohérence avec celles-ci, autrement dit de manière transversale.
Le caractère durable des politiques de la montagne est affirmé tout au long du texte.
Sur le point que vous soulevez, madame la députée, j’ajouterai une brève exégèse sur l’existence de commissions spécialisées. Nous avons pointé quelques sujets fondamentaux, et la mobilité en est un. Le fait de préciser que la commission spécialisée dans la mobilité prend en compte « le caractère transversal du développement durable », n’est pas utile, dès lors que nous parlons de transports collectifs. Avis défavorable.
L’amendement no 388 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
Vous étiez inscrit sur l’article, monsieur Saddier. Souhaitez-vous toujours vous exprimer ?
Je me réjouis de voir précisée, par le moyen d’une convention, les modalités de la coopération entre l’État et les régions. Je veux cependant revenir sur le problème que j’évoquais tout à l’heure, ne serait-ce que pour les Pyrénées, concernées à travers deux régions qui, marquées par leur configuration nord-sud, sont bordées au sud par ce massif pyrénéen. Une harmonisation me paraît essentielle.
Nous devons aussi, me semble-t-il, repartir de la base : toutes les modifications intervenues au niveau de l’organisation territoriale font que l’on ne sait plus très bien qui travaille avec qui. C’est dommage.
D’une manière plus générale, la construction envisagée me semble un peu technocratique ; j’espère donc, monsieur le ministre, que nos débats feront évoluer le texte de ce point de vue. Les hommes doivent se parler : où qu’ils soient et d’où qu’ils viennent, ils ont tous une certaine vision du territoire. Or le territoire court aujourd’hui un grand danger, le danger de voir disparaître ces hommes.
Nous en venons aux amendements à l’article.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement no 319 .
L’amendement no 319 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Charles-Ange Ginesy, pour soutenir l’amendement no 36 .
Cet amendement tend à ce que soit mise en place une plus étroite concertation avec le ministère de l’agriculture, en lien avec le Commissariat général à l’égalité des territoires et les conventions interrégionales de massif, lorsque le sujet concerne l’agriculture.
Défavorable. L’agriculture est toujours abordée dans les conventions interrégionales de massif et les contrats signés entre l’État et les régions. La création de « plans spécifiques à l’agriculture de montagne » ne nous semble donc pas pertinente au regard de ce que permet déjà la loi.
Même avis, avec la même argumentation.
Même si la rédaction de l’amendement ne convient peut-être pas, je veux appeler votre attention sur le fait que les dotations agricoles ont été très différentes selon les conventions de massif : certains massifs en ont reçu beaucoup, d’autres un peu moins. Pour vous donner une idée, la consommation des crédits, au titre d’une convention dont le terme est fixé à 2020, atteint 80 % dans le massif alpin.
La question relève peut-être moins d’un amendement que de la dotation budgétaire et de l’équité entre les massifs, mais je veux insister sur ces crédits dédiés à l’agriculture au sein des conventions : outre les différences constatées d’un massif à l’autre, ils sont parfois vite éclusés…
L’amendement no 36 n’est pas adopté.
L’article 7, amendé, est adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, premier orateur inscrit sur l’article.
Cet article est important. En commission j’avais fait adopter, à l’unanimité, un amendement touchant au nécessaire développement des schémas d’aménagement et de gestion de l’eau, les SAGE, en zone de montagne. Je suis en effet convaincu que le SAGE est le bon outil pour le dialogue sur l’usage de l’eau, qu’il s’agisse de la pratique du kayak, de la fabrication de neige de culture, de la protection et du stockage de l’eau ou de l’agriculture. De fait, le dispositif a fait ses preuves.
Mme Laclais, tout à l’heure, a fait adopter de bonne foi un amendement tout en m’expliquant que l’article 8 répondrait à mes préoccupations ; or, avec la même bonne foi, je me vois obligé de constater – sauf si la fatigue et la nuit brouillent ma lecture – que ce même article ne satisfait en rien l’amendement adopté à mon initiative en commission. Il est pourtant fondamental, je le dis sincèrement, d’encourager les acteurs d’un bassin de vie en montagne à se retrouver dans le cadre d’un SAGE.
Je souhaite donc que l’article 8 – puisque vous me l’aviez en quelque sorte promis, madame Laclais – contienne cet encouragement à mettre en oeuvre des SAGE dans les zones de montagne.
Je me réjouis, une fois encore, de l’existence du Commissariat à l’aménagement des Pyrénées : les commissaires assurent une représentation régalienne de l’État sur le territoire, alors même que la représentation territoriale, elle, ne donne pas encore toute sa mesure. Je souhaite donc que nous continuions à bénéficier de leur présence pendant longtemps encore, car ils sont l’émanation de l’État dans des territoires très vastes, souvent divisés par des frontières régionales.
Je rejoins tout à fait mon collègue et ami Saddier sur les SAGE : la concertation entre les acteurs doit être plus étroite, c’est là un enjeu considérable. Nous avons des centaines, voire des milliers de kilomètres de petits réseaux d’eau potable, dont les responsables ne peuvent donc continuer à s’ignorer, comme c’est trop souvent le cas.
S’agissant de l’eau, justement, ces comités devraient préfigurer de nouvelles politiques. Depuis une quarantaine d’années le niveau de nos cours d’eau, on peut l’observer dans n’importe quelle vallée, est monté de deux ou trois mètres. Il atteint désormais la chaussée, si bien qu’au premier orage, celle-ci se retrouve inondée : heureusement, peu de véhicules circulent à ces moments-là, sans quoi les morts se compteraient peut-être par dizaines – mais ce sera le cas un jour. Ces cours d’eau encombrés, sur lesquels il n’est plus possible de toucher une branche d’arbre, et que l’on ne peut débarrasser des îlots – voire des forêts – qui s’y sont formés, constituent des dangers pour les plaines qui se trouvent dévastées à chaque débordement du cours d’eau.
Nous en venons aux amendements à l’article.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 217 .
L’amendement no 217 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 136 .
Cet amendement concerne le sujet que je viens d’évoquer : il convient en effet de veiller à ce que les SAGE soient adaptés aux spécificités des zones de montagne.
L’avis est favorable sur l’amendement no 136 , dont l’esprit va dans le sens de ce que nous souhaitons.
L’amendement no 543 , quant à lui, complète le dispositif en précisant que « les schémas d’aménagement et de gestion des eaux mentionnés à l’article L. 212-3 du même code peuvent être adaptés aux spécificités des zones de montagne ».
Ces dispositions, me semble-t-il, répondent aux préoccupations exprimées par M. Saddier à l’article 1er : conformément à ce que nous avions proposé, nous suggérons de les insérer dans l’article 8.
Favorable.
L’article 8, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 8.
La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 64 .
Cet amendement porte sur un sujet abordé à l’article 1er : la mise en oeuvre, dans les territoires de montagne, de mesures spécifiques à l’éducation. Les particularités de ces territoires seraient ainsi reconnues, notamment pour l’allocation de moyens destinés aux écoles et à leur fonctionnement.
L’école est en effet l’un des sujets les plus attendus dans le cadre de ce projet de loi. Cependant l’avis est défavorable, car l’amendement est satisfait par l’article 8 ter et notre amendement no 344 deuxième rectification, relatif à la carte scolaire.
De fait, notre amendement va au-delà de la simple adaptation des moyens du service public de l’éducation ou de l’encadrement des élèves en zone de montagne : il prévoit une adaptation de l’organisation scolaire dans son ensemble. Celle-ci comprend les dispositifs pédagogiques, l’allocation des moyens, les formations, les équipes et la capacité de remplacement. Il ne semble donc pas nécessaire de renvoyer au pouvoir réglementaire la définition des modalités d’identification des écoles qui justifieraient des besoins spécifiques.
Aussi suggérons-nous le retrait de votre amendement ; faute de quoi l’avis serait défavorable.
L’amendement no 64 est retiré.
Je me suis efforcé, monsieur le ministre, d’être innovant entre l’examen en commission et l’examen en séance, s’agissant de la commission départementale de la coopération intercommunale, la CDCI, dont on a longuement débattu en commission. Deux séries de CDCI ont vu le jour : l’une, sous l’ancienne majorité, l’autre, sous l’actuelle. Et chacun reconnaît que les variations ont été sensibles, c’est peu de le dire, sur le territoire national. Comme un clin d’oeil à la République, les départements victimes de la première série sont rarement ceux qui l’ont été de la seconde.
On peut identifier trois catégories de préfets. Les premiers ont respecté la dérogation relative à la montagne pour des communautés de communes peuplées de 5 000 à 15 000 habitants, sans leur imposer de mariages forcés. Les deuxièmes se sont littéralement assis, passez-moi l’expression, sur cette dérogation : au moins les choses étaient-elles claires. Les troisièmes, enfin, ont été plus malins, tantôt s’asseyant sur la dérogation et tantôt l’accordant. Concrètement, ils l’ont accordée lorsque la majorité des deux tiers à la CDCI n’était pas acquise, et l’ont refusée lorsque cette dernière pouvait, à la majorité des deux tiers, faire échec à leur projet en l’amendant. Certains préfets ont clairement repéré les départements où ils pouvaient obtenir la majorité, et ceux où ils ne le pouvaient pas.
Mon amendement propose tout simplement que « quand la commission départementale de la coopération intercommunale se prononce sur le projet de périmètre d’un établissement public de coopération intercommunale comportant une ou plusieurs communes de montagne, son avis doit être recueilli à la majorité simple. » D’une majorité qualifiée des deux tiers, on passerait à une majorité simple.
Il est en effet très facile de noyer les communes de montagne dans une CDCI. Lorsqu’on renvoie à sa décision une petite communauté de communes de montagne, souvent la majorité simple est acquise alors qu’il est impossible de réunir celle des deux tiers. Dans le cadre de mes fonctions de vice-président de l’Association des maires de France, j’ai rencontré cette situation dans quasiment tous les départements de montagne. Tel est donc l’objet de cet amendement.
Je vais essayer de répondre à M. Saddier, même si je doute que ma réponse le satisfasse. Pourquoi sommes-nous défavorables à cet amendement ? Le droit existant prévoit que le projet de schéma est transmis pour avis à la CDCI, laquelle dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer, les propositions de modifications étant adoptées à la majorité des deux tiers : c’est ce point que vous souhaitez, monsieur Saddier, voir modifier.
On a du mal à voir pour quelle raison on accorderait une telle dérogation uniquement aux CDCI en zone de montagne. On peut en effet imaginer que d’autres territoires ruraux, craignant d’être noyés dans des ensembles où les collectivités urbaines prédominent, nourrissent à l’égard du droit existant le même grief. Ils pourraient, à ce titre, solliciter la même dérogation.
L’adoption de votre amendement, monsieur Saddier, reviendrait à ouvrir un large débat qu’il faudrait reprendre – peut-être d’ailleurs a-t-il déjà été ouvert été lors de l’examen de la loi NOTRe – mais alors en concertation avec l’ensemble des associations d’élus, pas seulement de la montagne, et notamment l’Association des maires de France.
Sur ces sujets de fusion ou rapprochement d’intercommunalités, il nous semble nécessaire de rechercher le consensus. Or celui-ci s’exprime notamment par un vote large : c’est pour cette raison que le législateur a fixé la règle d’une majorité des deux tiers. En effet, une majorité simple ne traduit pas autant l’esprit de consensus.
Enfin, comme vous le savez, il existe d’ores et déjà une dérogation – qui a été défendue, notamment par l’ANEM – pour les EPCI de montagne. En effet, le seuil a été fixé à 5 000 habitants – contre 15 000 dans le cas général. Dès lors, il ne nous semble pas opportun de créer une dérogation supplémentaire dans un dispositif déjà dérogatoire.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à l’amendement no 97 .
Il est bien entendu défavorable. Je vais reprendre les arguments que j’ai donnés tout à l’heure s’agissant de la DGF. Tout d’abord, nous n’allons pas réformer la loi NOTRe au travers de la présente loi montagne.
Tout d’abord, le dispositif proposé serait uniquement réservé aux communes de montagne et introduirait donc une rupture d’égalité entre les communes : il serait, par là même, inconstitutionnel. En outre, comme on le dit chez moi pour le rugby – et peut-être chez vous pour le football –, on ne change pas les règles du jeu en cours de partie. Or nous nous situons en fin de procédure puisqu’à la fin du mois de novembre, les conseils municipaux auront fini de se prononcer et les schémas seront arrêtés par les préfets en vue d’une application à partir du mois de janvier 2017.
Il faut que vous sachiez, monsieur Saddier, que 85 % des cas sont déjà réglés. Parce que d’une part, il n’est pas possible de modifier la loi NOTRe au détour de la loi montagne et que la modification proposée introduirait une rupture d’égalité entre communes, ce qui serait inconstitutionnel, et d’autre part parce que les procédures se déroulent globalement de manière correcte, même si je sais que des problèmes subsistent dans quelques départements, je ne peux que donner un avis défavorable à cet amendement.
Très brève, mais il s’agit d’un sujet important, monsieur le président, sur lequel d’ailleurs nous devrons revenir calmement au cours de la prochaine législature. J’ai déposé cet amendement car je crois que ma position est largement partagée : j’ai d’ailleurs entendu l’un de nos collègues – qui ne siège pas sur les bancs de l’opposition ! – dire, lorsque vous avez indiqué, monsieur le ministre, que nous n’allions pas modifier la loi NOTRe : « C’est bien dommage ! »
Tout comme il est bien dommage que les préfets successifs n’aient pas, dans un même département, appliqué de manière égale et équitable la dérogation prévue par la loi montagne. La dérogation que je propose ne serait pas inconstitutionnelle : la loi NOTRe en comporte déjà une pour la montagne.
Avouez, mes chers collègues, qu’au sein d’une CDCI, il est assez désagréable de voir trois ou quatre EPCI bénéficier de la dérogation montagne alors qu’il faut expliquer à d’autres répondant aux mêmes critères qu’ils ne peuvent y prétendre.
Je n’ai pas fini de revenir sur ce sujet : je ne lâcherai pas le morceau !
Sourires.
En une seconde, je rappelerai que la règle de la majorité des deux tiers en CDCI n’est pas issue de la NOTRe. Cela figure dans les textes depuis la création des CDCI.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
L’amendement no 97 n’est pas adopté.
L’amendement no 37 n’est pas défendu.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
- Questions au Gouvernement ;
- Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique ;
- Suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
La séance est levée.
La séance est levée, le mardi 11 octobre 2016, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly