La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (nos 3442, 3564 rectifié).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement no 482 , à l’article 9.
En droit actuel, les dommages causés aux exploitations agricoles par des espèces animales protégées ne font pas l’objet d’indemnisation, contrairement aux dégâts causés par le gibier ; or, ces espèces peuvent parfois, par leur nombre, causer des dommages très importants aux cultures et aux élevages.
En outre, la carence des services de l’État à prendre, dans un délai raisonnable, les mesures réglementaires dérogatoires qu’imposerait à cet égard la préservation des biens tant professionnels que privés, alors que ni les dispositions législatives et réglementaires nationales, ni les textes européens n’y font obstacle, peut aussi constituer une faute de nature à engager la responsabilité de l’État au regard des dommages anormaux qui peuvent en résulter.
M. Taugourdeau, qui avait déposé un amendement identique, m’a prié de vous dire – c’est un message adressé en particulier à Mme Abeille – qu’il est important de corriger l’impact négatif de la biodiversité sur l’économie.
Je voudrais également dire à l’Assemblée que nous représentons, au sein du groupe Les Républicains, comme beaucoup d’entre vous, je l’espère, tous les agriculteurs, les chasseurs et les forestiers de France.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement no 170 .
Cet amendement part du constat que les dégâts causés dans les exploitations agricoles par des espèces animales protégées ne font pas aujourd’hui l’objet d’une indemnisation, ce qui est tout à fait préjudiciable à nos agriculteurs. En conséquence, le présent amendement vise à conférer à l’Agence française pour la biodiversité, l’AFB, la mission d’évaluer les dommages agricoles et forestiers causés par les espèces protégées et de mettre en place des dispositifs destinés à limiter ces dommages sur les activités agricoles et forestières.
La parole est à M. Michel Heinrich, pour soutenir l’amendement no 192 .
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 402 .
Je veux rappeler que, grâce à leur organisation et à leur travail, les chasseurs exercent une forme de régulation et contribuent à l’indemnisation lorsque des problèmes affectent les cultures. Mais, en présence d’animaux protégés, il n’existe pas de possibilité de régulation ni d’indemnisation. Par exemple, dans le département du Jura, un certain nombre d’agriculteurs sont victimes chaque année, dans les troupeaux ovins, des attaques du lynx. Or, ils n’ont pas nécessairement la possibilité d’être indemnisés.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour donner l’avis de la commission sur cette série d’amendements identiques.
La commission a évidemment été défavorable à ces amendements. À l’heure actuelle, c’est l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, qui remplit la tâche que vous souhaitez confier à l’Agence française pour la biodiversité ; il le fait de manière plutôt satisfaisante, fort de sa compétence sur ces sujets. Étant donné que l’Agence française pour la biodiversité s’est déjà vu attribuer des missions nombreuses et variées et, comme l’a souligné l’opposition cet après-midi, qu’elle ne disposera sans doute pas d’un budget extensible, il est important que l’ONCFS puisse continuer à exercer cette mission, comme il en a l’habitude. Cet organisme n’étant pas rattaché à l’AFB, il détient des compétences propres, qu’il est important de lui laisser.
Madame la secrétaire d’État chargée de la biodiversité, l’avis du Gouvernement est-il le même ?
Oui, madame la présidente, même avis. Les dégâts occasionnés par les grands gibiers sont indemnisés par l’État, sur la base d’évaluations et de barèmes examinés par l’ONCFS. Je rappelle que cet office a, parmi ses missions, celle de s’occuper du gibier, mais aussi des espèces protégées.
Madame la rapporteure, madame la secrétaire d’État, je pense que nous ne nous sommes pas compris, mais les débats sont là pour nous éclairer, n’est-ce pas, monsieur le président de la commission, qui me regardez à cet instant de votre oeil perçant
Sourires
? Il me semble que, quel que soit le sujet, lorsque les équilibres sont rompus, la société ne peut plus fonctionner. Au sein du groupe Les Républicains, nous avons prôné, par nos amendements, la recherche d’un équilibre dans le respect de la biodiversité, là où le Gouvernement et la rapporteure ont parfois voulu – vous y êtes parfois arrivés mais heureusement, grâce à nous, pas toujours – placer la biodiversité au-dessus de l’ensemble des piliers sociaux et économiques de notre société. Si la loi correspond à une photographie de la société à un moment donné, elle a aussi vocation, a priori, à durer. Or, en l’espèce, vous êtes en train d’accroître, potentiellement, les dégâts causés par des espèces qui tendent à être surprotégées aux activités environnementales et économiques que sont l’agriculture et la sylviculture. Cet amendement vise à provoquer une rupture en la matière. Il existe en effet un vide juridique, car ces dégâts, à l’heure actuelle, ne sont ni reconnus ni évalués. Ce n’est pas le travail de l’ONCFS d’évaluer ni d’indemniser les dégâts causés par une espèce protégée.
Par cet amendement, qui est un amendement d’appel, déposé par nombre de parlementaires, nous demandons au Gouvernement et à la majorité actuelle comment, après l’adoption de la loi pour la reconquête de la biodiversité, ils entendent répondre à d’éventuels dégâts causés par des espèces protégées, qui n’existent pas aujourd’hui mais seraient accentués à l’avenir ? Comment ces dégâts seront-ils anticipés et évalués ? Comment leur indemnisation sera-t-elle financée ? Ce sont là, me semble-t-il, des questions de fond, qui préoccupent le monde agricole et sur lesquelles nous souhaitons avoir un peu plus de précisions.
J’avais moi-même déposé un amendement allant dans ce sens, mais qui visait à confier à l’Agence française pour la biodiversité des compétences en matière d’évaluation mais aussi d’indemnisation. Bien qu’il ait été gagé, il a été apparemment déclaré irrecevable par le président de la commission des finances. Peu importe. Je partage totalement l’esprit de cet amendement. Imaginez une région – je pense, par exemple, à ma circonscription du pays de Saint-Malo – dans laquelle se produisent, à certaines périodes de l’année, des migrations d’oies bernaches, espèce naturelle protégée que l’on ne peut chasser. Or, ces oiseaux détruisent des champs entiers de maïs quand ils passent dans notre région. Quelle solution s’offre aux agriculteurs confrontés à cette situation ? Aucune. J’avais écrit à votre prédécesseur à ce sujet ; je n’ai malheureusement pas reçu de réponse. Je vous assure que ces situations provoquent dans certains cas des catastrophes, parfois des faillites. Il faut absolument que nous trouvions, à travers ce texte, le moyen de les corriger.
Cet amendement vise à ce que les ressources perçues pour la gestion de l’eau soient affectées effectivement à l’eau, en vertu du principe « l’eau paie l’eau ».
En effet, le projet de loi prévoit que l’Agence française pour la biodiversité intégrera l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA, qui s’occupe, avec les agences de l’eau, de la gestion durable et équilibrée de la ressource en eau. Le budget de celui-ci sera donc, du fait de la fusion, confondu avec ceux des autres entités absorbées, ce qui ne permettra plus de réaliser un fléchage des ressources de l’eau vers l’eau.
Or, la France connaît de nombreux contentieux avec l’Union européenne concernant la qualité de l’eau. Les agences de l’eau doivent pouvoir s’appuyer sur l’AFB, comme elles le faisaient sur l’ONEMA, afin de poursuivre leur travail d’amélioration de la qualité des eaux.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 302 .
C’est un amendement extrêmement important. Je ne reviens pas sur le hold-up de 2015 – il n’y a pas d’autre terme : 175 millions d’euros ont été prélevés sur les agences de l’eau pour mettre en place l’Agence française pour la biodiversité ; or, celle-ci n’a pas vu le jour. Si ce n’est pas un hold-up, je ne sais pas comment qualifier ce procédé. Par ailleurs, il semblerait – nous avons eu le débat en commission – que vous ne soyez plus favorable à ce que l’eau finance l’eau. Cela, mes chers collègues, aurait des conséquences très importantes. Peut-être, madame la secrétaire d’État, avez-vous décidé qu’il fallait augmenter le prix de l’eau payé par nos concitoyens ? Tel n’est pas le point de vue des députés du groupe Les Républicains. Nous ne souhaitons pas que l’argent de l’eau finance autre chose que l’eau. Dans le cas contraire, soit il faudra augmenter les redevances, ce qui se traduire par une augmentation du prix de l’eau payé par nos concitoyens, qui n’en peuvent plus de payer des impôts supplémentaires. Soit, à l’évidence, se trouveront remis en question les programmes d’investissement et d’accompagnement des agences. Vous irez l’expliquer à certains territoires – je pense aux territoires ruraux, de montagne ou du littoral – caractérisés par une faible densité de population.
Soit vous nous expliquez très clairement ce qu’il en est et vous éclaircissez l’horizon sur les questions que je viens de soulever, soit vous donnez un avis défavorable à ces amendements, ce qui signifiera que vous êtes favorable à l’augmentation du prix de l’eau et que vous souhaitez mettre un terme à l’accompagnement d’un certain nombre de collectivités territoriales. Cela impliquera l’abandon d’un certain nombre de territoires ; je pense, notamment, aux territoires ruraux et aux territoires à faible densité, comme sur certains littoraux et en zone de montagne.
La commission a été défavorable à ces amendements. J’avais cru comprendre qu’il ne fallait pas trop étendre les missions des agences de l’eau. L’adoption de ces amendements les placerait dans une situation difficile.
Cet amendement vise à ce que l’attribution des aides financières à des projets par l’Agence française pour la biodiversité soit réservée à des projets en faveur des ressources en eau et s’effectuent par le biais des agences de l’eau. Il est pourtant indispensable que l’Agence puisse financer des projets dans le domaine de la biodiversité pour répondre aux objectifs et aux missions que le projet de loi lui attribue. En ce qui concerne la gestion de l’eau, la création de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, sorte de tête de réseau des agences de l’eau, visait précisément à financer directement des projets d’intérêt commun pour tous les bassins, dans des domaines tels que la recherche, le développement et l’innovation.
Par ailleurs, en élargissant, par l’article 15 bis, les missions des agences de l’eau à la biodiversité et au milieu marin, on souhaite que leur contribution au budget de l’Agence française pour la biodiversité puisse être utilisée pour l’ensemble des missions de cette agence, pour une meilleure cohérence des politiques de l’eau, de la mer et de la biodiversité.
En conséquence, je suis défavorable à cet amendement.
Je veux vous apporter deux précisions. Premièrement, les agences de l’eau investissent déjà aujourd’hui, à hauteur de 200 millions d’euros par an, dans des projets relatifs à la biodiversité, notamment dans le milieu aquatique. Deuxièmement, monsieur le député, vous avez mentionné à plusieurs reprises les 175 millions d’euros qui seraient versés…
…à l’Agence française pour la biodiversité. Je m’inscris en faux contre cet argument : ces 175 millions d’euros, qui existent bel et bien, constituent un prélèvement annuel destiné à participer au rétablissement des comptes publics.
C’est une participation qui est demandée aux agences de l’eau, comme à beaucoup d’autres organismes d’État, qui va directement au budget de l’État et non à l’Agence française pour la biodiversité. Cela méritait d’être dit.
Madame la secrétaire d’État, il ne s’agit pas d’interdire à l’Agence française pour la biodiversité de mener des opérations dans le domaine de l’eau. Elle disposera en effet de l’ingénierie suffisante et nécessaire pour apporter son concours sur un certain nombre de dossiers importants en matière de milieux humides et aquatiques. Le problème n’est pas là : lorsque l’AFB aura mené à bien ces dossiers en matière d’études et d’ingénierie, il faudra les laisser financer par les agences de l’eau, car ce sont elles en effet qui perçoivent les recettes liées à l’eau.
Pour que le principe selon lequel « l’eau paye l’eau » continue d’être respecté, il convient que chaque structure soit en mesure d’assurer les financements qu’elle a à mettre en place.
Je voudrais soutenir l’esprit de ces deux amendements identiques, mais non leur lettre. En effet, la rapporteure et la secrétaire d’État ont raison : tels que rédigés, vos amendements, messieurs Cinieri et Saddier, reviennent à rendre impossible tout financement par l’AFB de projets en matière de biodiversité. Or tel n’est pas le sens de vos propos, que je partage.
En effet, il est nécessaire de rappeler que « l’eau va à l’eau », et qu’en conséquence les redevances payées par les consommateurs d’eau doivent servir à financer les politiques de reconquête, tant en qualité qu’en quantité, de la ressource en eau, et non à financer autre chose.
Il peut s’agir d’actions visant à protéger les zones humides – plutôt que de les détruire ! De ce point de vue, nous aurons tout à l’heure d’autres débats sur les agences de l’eau et sur leur gouvernance. Je voulais juste souligner que le texte de ces amendements ne correspond pas à ce qu’en ont expliqué leurs auteurs.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 580 .
L’amendement no 580 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 306 .
S’agissant du fonctionnement de cette éventuelle agence à venir, et au-delà de nos débats, il nous faut tirer quelques enseignements tant du passé que de l’expérience que nous avons toutes et tous vécue dans les collectivités territoriales. Nous y avons tous connu cette situation dans laquelle une même association environnementale agréée, donc reconnue par les pouvoirs publics, ayant accompagné une collectivité territoriale en amont d’un projet, se retrouve juge, a posteriori, dudit projet. C’est exactement ce que vous nous proposez, en l’état actuel des choses, s’agissant de l’Agence.
Je ne suis d’ailleurs pas le seul à le dire. Les préfigurateurs m’ont précédé en évoquant dans leur premier rapport les difficultés de positionnement d’une agence d’appui et de mobilisation qui chercherait des partenariats territoriaux – c’est-à-dire qui solliciterait des collectivités territoriales, des usagers et des entrepreneurs – tout en étant une autorité de contrôle et de régulation administrative.
Ce n’est pas possible. Ce n’est juste pas possible ! On ne peut pas être juge et partie, c’est-à-dire participer en amont à l’élaboration d’une action de laquelle on puisse être ensuite amené à juger. Tel est l’objet de cet amendement qui vise à supprimer les alinéas 40 et 41 : il coule de source.
Nous avons déjà eu très largement ce débat en première lecture, et il a été décidé de ne pas accepter la suppression du pouvoir de police administrative et judiciaire de l’AFB, afin de maintenir sa capacité à exercer ses missions dans ce domaine.
Il ne gêne personne aujourd’hui que l’ONCFS et l’ONEMA exercent une mission de police. Le fait de maintenir cette mission de police au sein de l’AFB ne nous apparaît donc pas inconcevable.
La majorité des personnels qui vont intégrer l’AFB exercent déjà cette mission de police : on ne va pas la leur retirer. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement no 306 , repoussé par la commission, n’est pas adopté.
Cet amendement a pour objet de satisfaire aux objectifs des deux chantiers que sont le présent projet de loi et la réforme de la police de l’environnement.
En effet, pour des raisons à la fois d’efficacité de l’action publique et d’économie de moyens, le Gouvernement s’efforce de regrouper les opérateurs intervenant dans le même champ des politiques publiques. Il a parallèlement engagé une réflexion sur la restructuration de la police de l’environnement afin de la rendre plus cohérente et plus efficace.
Afin d’atteindre ces objectifs, il est proposé de regrouper au sein de l’ONCFS l’ensemble des missions et des moyens dédiés aux polices judiciaires de l’eau et de la nature, remarque étant faite que cet établissement est aujourd’hui à l’origine de plus de la moitié des procédures judiciaires en la matière.
La parole est à M. Pierre Morel-A-L’Huissier, pour soutenir l’amendement no 125 .
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 426 .
La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement no 685 .
Encore une fois, il s’agit d’efficacité et de rationalisation. L’ONCFS n’a pas été intégré à l’AFB.
Et l’Office conserve, notamment, ses moyens en matière de police de la chasse : son efficacité en ce domaine est aujourd’hui reconnue et avérée. Or l’ONEMA, lui, n’a pas aujourd’hui les moyens de ses ambitions et, sur le terrain, collabore souvent avec l’ONCFS.
Cet amendement demande que la police de la chasse et de la pêche soit dévolue à l’ONCFS qui a toutes les compétences et toutes les qualités requises pour exercer cette mission. Une telle réforme irait dans le sens d’une plus grande efficacité et d’une rationalisation.
J’irai dans le sens des propos que vient de tenir mon collègue Philippe Plisson : pourquoi, une nouvelle fois, défaire ce qui marche ? Que la police administrative soit dévolue à l’AFB, soit, mais il faut, dans le même temps, que les compétences de l’ONCFS soient conservées et confirmées.
En effet, l’Office accomplit correctement sa mission et ses agents sont rompus à son exercice, qui n’est pas simple. Sur le terrain, le contrôle de certains contrevenants ne s’improvise pas : en effet, si la majorité des chasseurs est en règle, contrôler des braconniers, ce dont on ne parle pas suffisamment, requiert des compétences à la fois extrêmement solides et pointues.
En effet, lors de ce type de contrôle, ces agents mettent, et je pèse mes mots, leur vie en danger car ils ont face à eux des bandes organisées armées – je ne les nommerai pas, elles sont connues – qui saccagent, dans certains massifs, des populations entières d’animaux. Certains agents sont confrontés à des gens armés, au péril de leur vie : ce n’est pas de la rigolade ! Les agents de l’ONCFS sont rompus à ce type d’exercice et parfaitement compétents pour mener ces contrôles à bien. Il n’est pas question de redistribuer ces missions extrêmement pointues. Gardons ce qui marche. Un point, c’est tout.
Cet amendement vise à rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture en substituant à l’alinéa 40, aux mots : « et à l’environnement », les mots : « , aux milieux aquatiques, à la pratique de la pêche et à la biodiversité ».
Je voudrais d’abord rassurer certains de nos collègues : il n’est pas question de priver l’ONCFS de ses missions de police administrative et judiciaire.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je voudrais que tout le monde comprenne bien que l’ONCFS conservera ces missions.
Ensuite, vous souhaitez restreindre les missions de police de l’eau et de l’environnement confiées à l’AFB.
En effet, vous souhaitez, après le mot : « administrative », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 40 : « de l’eau, des milieux aquatiques, de la pêche et de la biodiversité. » Cela revient à supprimer les mots : « et de police judiciaire relatives à l’eau et à l’environnement […] », rédaction qui étend beaucoup plus largement ces missions de police.
Enfin, comme cela a été dit, vous souhaitez que toutes les missions de police soient regroupées au sein de l’ONCFS. En premier lieu, j’espère que des missions communes et mutualisées seront exercées, dans ces domaines, conjointement par l’AFB et par l’ONCFS.
Dans les territoires et départements d’outre-mer, il existe déjà une telle collaboration entre l’ONCFS et l’ONEMA : cela montre que deux opérateurs disposant chacun d’un pouvoir de police peuvent travailler ensemble et sont capables, ensemble, de faire respecter la loi.
Il n’y a donc pas lieu de penser que les missions de police exercées par l’ONCFS seraient supprimées : c’est faux. Il serait donc bon que vous ne vous laissiez pas embarquer à défendre des choses qui ne sont pas vraies. L’avis de la commission est donc défavorable sur cette série d’amendements en discussion commune.
J’aimerais tout de même que l’on comprenne que si les agents de l’ONCFS font un travail extraordinaire, celui des agents des établissements qui vont intégrer l’AFB mérite également le respect. Je parle de ceux de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques et de l’Agence des aires marines protégées, qui exercent déjà aujourd’hui des missions de police administrative et judiciaire, avec une très grande compétence, comme cela a d’ailleurs été relevé dans un rapport interministériel d’évaluation de la police de l’environnement remis en février 2015.
Vous voulez donc, aujourd’hui, retirer à ces agents leurs compétences de police judiciaire, alors qu’ils n’ont plus à faire la preuve de leurs compétences, qu’ils connaissent le terrain et qu’ils travaillent d’ailleurs de façon complémentaire avec les agents de l’ONCFS. J’aimerais que l’assemblée réfléchisse à ce qu’elle est en train de faire.
Il serait en outre absolument contre-productif de dissocier les polices administrative et judiciaire en les confiant à des établissements distincts, comme le propose cette série d’amendements. En effet, ces missions sont complémentaires, et l’efficacité commande qu’elles soient attribuées aux mêmes agents compétents techniquement. Par conséquent, si nous voulons que le système que nous sommes en train de mettre en place – avec l’AFB d’un côté, l’ONCFS de l’autre – et qu’un certain nombre d’entre vous ont appelé de leurs voeux, fonctionne bien, il faut que les agents puissent travailler ensemble dans le respect mutuel. C’est d’ailleurs ce qui se passe en ce moment.
Et je voudrais que cela dure. En ce qui me concerne, je trouve cette série d’amendements inopportune car elle donne une très mauvaise image des agents qui vont composer l’AFB.
Le Gouvernement y est donc défavorable.
Madame la secrétaire d’État, nous sommes en train de payer – vous n’y êtes pas pour grand-chose puisque vous venez seulement de prendre vos fonctions ministérielles – l’absence de réponses concrètes et précises à certaines questions que nous posons depuis deux ans.
Si, je le dis très amicalement. Nous ne sommes pas au théâtre des questions au Gouvernement : nous sommes là pour faire du travail de fond sur un dossier précis. Les questions que nous posons depuis deux ans n’ont obtenu aucune réponse.
Ensuite, madame la secrétaire d’État, des députés siégeant sur tous les bancs de cet hémicycle ont déposé ces amendements identiques.
Je le sais et je trouve ça dingue !
Je veux donc bien, ensuite, que vous regardiez les bancs de l’opposition et que vous nous fassiez un certain nombre de reproches, mais des parlementaires de toutes sensibilités ont déposé les mêmes amendements.
Enfin, nous entendons ce que vous nous avez dit, mais pourquoi ne pas tenir le même raisonnement à l’égard des agents de l’ONCFS ?
David Douillet le dira dans quelques instants, et mieux que moi : vous ne pouvez pas comparer quelqu’un qui est chargé de contrôler un permis de pêche ou qui vérifie si une truite mesure vingt centimètres et non trois, et quelqu’un qui va se mettre en planque pendant deux ans pour surveiller si un individu tire ou non au fusil à lunettes à deux cents mètres !
Aujourd’hui vous nous proposez d’obliger les agents de l’ONCFS à mutualiser, pour reprendre le mot de la rapporteure, l’action de contrôle.
C’est ce que vous avez dit, madame Gaillard.
Si nous avions eu des réponses plus précises en commission, il y aurait peut-être moins d’amendements déposés, venant de tous les bancs, sur les problématiques de la chasse. Très sincèrement, nous ne sommes pas convaincus du bien-fondé de vos propositions, même si nous ne mettons pas en cause votre honnêteté intellectuelle, madame la secrétaire d’État.
Nous respectons bien sûr tous les futurs personnels de l’AFB, madame la secrétaire d’État : vos propos sont caricaturaux et ridicules.
Très concrètement, comme mon collègue Martial Saddier vient de vous le dire, la police de l’eau, ce n’est pas la même chose que la police de la chasse, essayez de le comprendre ! D’un côté vous avez des cannes à pêche, de l’autre des fusils ou des carabines : point barre. Il faut être sérieux, à un moment donné, il y a des gens qui risquent leur vie, excusez-moi !
J’ajoute que le partage peut être bénéfique comme il peut être catastrophique, comme on le voit quotidiennement dans nos services de police, qui ne parviennent pas à se coordonner, quand ils ne s’opposent pas par esprit de compétition pour savoir qui a les meilleurs résultats, au détriment de l’efficacité.
Pourquoi prendre un tel risque sur des sujets aussi graves ? Réfléchissez bien à ce que vous faites car il y va de votre responsabilité.
Les agents de l’ONEMA chargés de la police de l’eau risquent aussi quelquefois leur vie en raison de comportements extrêmement violents. Vous ne pouvez pas les dévaloriser ainsi.
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je n’ai pas parlé de partage, mais de mutualisation. C’est ce qui se fait dans des territoires et départements d’outre-mer, où il y a une véritable coordination, qui peut être mutualisée, pour exercer une police globale de l’environnement et cela fonctionne.
Finalement, seul M. Plisson a dit clairement qu’il voulait que les missions de police, y compris celles assurées par les établissements publics qui seront intégrés dans l’AFB, reviennent à l’ONCFS. Ce n’est pas notre vision de l’AFB et c’est pourquoi nous sommes opposés à ces amendements.
Les braconniers de civelles se font protéger par des tireurs ! On peut toujours faire des comparaisons mais on est en train de créer dans cet hémicycle des problèmes qui n’existent pas sur le terrain. Sur le terrain, les agents de l’ONCFS et ceux de l’ONEMA travaillent très bien ensemble à assurer la police de l’environnement de manière concertée, souvent sous l’égide des préfets, et cela ne pose aucun problème. La situation est satisfaisante pour tout le monde.
Aujourd’hui pourtant vous voulez changer ce qui fonctionne bien. Ce n’est pas l’avis du Gouvernement, qui pense qu’il faut continuer comme ça. Si on veut que l’AFB travaille bien avec l’ONCFS, il faut rester sur ces bonnes bases.
L’expérience vient avec l’âge, monsieur Douillet : le vrai danger sur le terrain, c’est d’essayer de faire coopérer des agents dont les prérogatives en matière de police judiciaire ne sont pas identiques. Je peux vous dire que si la police et la gendarmerie, par exemple, parviennent à coopérer c’est parce qu’il y a des officiers de police judiciaire avec les mêmes prérogatives dans ces deux corps de fonctionnaires, civils et militaires.
C’est exactement la même chose : si les différents agents chargés de la police forestière, de la police des milieux aquatiques et de la chasse, qu’ils appartiennent à l’AFB ou à l’ONCFS, n’ont pas les mêmes prérogatives, je peux vous garantir que les malfrats joueront de ces différences.
Que chacun soit doté des compétences les plus éminentes et les exerce au mieux sous l’autorité de l’État.
Aujourd’hui la police n’est pas assurée parce que l’ONEMA a très peu d’agents sur le terrain – je peux en témoigner s’agissant de l’estuaire de la Gironde. C’est pourquoi il faut réfléchir à une mutualisation avec l’ONCFS, avec des agents qui ne seront pas en concurrence, mais complémentaires, et qui assureront une police qui sera à la fois celle de la chasse et de la pêche. Cette mutualisation permettra à la fois d’être efficace et plus économe.
Cette démarche, madame la secrétaire d’État, a été ouverte par la ministre de l’environnement au Sénat, puisqu’elle a recommandé la création d’un groupe de travail chargé d’y réfléchir. C’est une démarche de réflexion et non d’exclusion.
Il y a là une piste de réflexion pour aller dans le sens d’une plus grande efficacité. Aujourd’hui la police de la pêche n’est pas assurée faute d’un nombre d’agents suffisant. Ce n’est pas un problème de compétences, mais de moyens. Alors que l’État n’a pas de moyens, il ne veut pas mutualiser : je ne comprends pas cette logique.
Il est procédé au scrutin.
L’amendement no 892 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements, nos 636 rectifié et 37 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour soutenir l’amendement no 636 rectifié .
Avant de passer aux alinéas qui définissent le conseil d’administration de l’AFB, je voudrais par cet amendement préciser les missions de l’Agence en matière d’amélioration de la mise en oeuvre des mesures compensatoires. Celles-ci ont vocation à être mises en oeuvre de manière renforcée par des outils figurant aux articles 33 A et 33, que nous examinerons plus tard.
La commission a repoussé ces amendements parce qu’ils étendent trop largement ces missions. Nous devons veiller à ce que les opérateurs privés ne se déchargent pas de leurs responsabilités sur l’AFB.
Par ailleurs le 8° de l’article prévoit un rôle général de suivi des mesures de compensation. L’avis est donc défavorable.
Nous considérons que ces amendements sont déjà satisfaits. Avis défavorable.
Les amendements nos 636 rectifié et 37 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement no 797 .
Cet amendement est logique puisqu’il vise à garantir de manière très explicite que les fondations reconnues d’utilité publique pourront siéger au conseil d’administration de l’AFB. Cette rédaction doit permettre de rassurer les acteurs concernés, qui sont très motivés.
La composition du conseil d’administration de l’Agence a fait l’objet de très longs débats car tout le monde veut en faire partie. Il ne doit cependant pas être pléthorique. Le Sénat a trouvé une solution qui me paraît équilibrée. Je ne souhaite donc pas que nous rouvrions ce débat et passions encore des heures à ne pas trouver de solution. S’en tenant à la rédaction du Sénat, la commission a émis un avis défavorable.
Cet avis vaut pour tous les amendements qui proposeront de modifier la composition du conseil d’administration de l’AFB.
Après de nombreuses discussions, un équilibre a été trouvé qui paraît convenir à tout le monde. Je voudrais qu’on s’en tienne à cet équilibre et qu’on ne touche plus à la composition du conseil d’administration de l’AFB, ce qui reviendrait à rouvrir la boîte à discussions.
C’est d’autant plus vrai pour votre amendement, madame Abeille, que rien ne s’oppose à ce que les fondations soient représentées. Il est ainsi prévu que les représentants d’associations agréées de protection de l’environnement ou d’éducation à l’environnement siègent au conseil d’administration. C’est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement.
Mon amendement vise en fait les fondations reconnues d’utilité publique. Si vous m’assurez que ces fondations seront considérées comme des associations de protection de l’environnement, je veux bien le retirer. Si cet amendement a été déposé, c’est bien parce qu’une association, ce n’est pas la même chose qu’une fondation.
Je vous confirme que c’est bien dans cet esprit que nous avons écrit le projet de loi. C’est d’ailleurs déjà le cas pour d’autres conseils d’administration. Nous considérons bien que le terme global d’association recouvre aussi les fondations.
L’amendement no 797 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements, nos 350 et 972 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement no 350 .
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 972 rectifié de la commission.
Les Terres australes et antarctiques françaises – TAAF – sont extrêmement importantes pour la biodiversité sous-marine. Or, elles avaient été oubliées dans cet article. Nous proposons de réparer cet oubli à l’alinéa 55.
C’est un avis défavorable. La précision paraît superflue dans la mesure où les représentants des TAAF sont inclus dans les parties concernées par la biodiversité ultramarine. En outre, les TAAF ne comptent pas de populations permanentes : elles ne sont habitées que par des scientifiques et des militaires qui se relaient pour assurer une présence continue. C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements.
Il serait judicieux d’inclure dans l’AFB le représentant de l’État dans les TAAF. Même si elles ne sont pas habitées, celles-ci comptent une biodiversité qui doit être protégée et préservée. Des chercheurs y travaillent et y recueillent des informations extrêmement précieuses. C’est pourquoi la commission a souhaité réparer cet oubli.
Si j’ai bien compris, madame la rapporteure, vous préférez l’amendement no 972 rectifié à l’amendement no 350 .
Je me range à l’avis de Mme la rapporteure, dont l’amendement est plus précis que le nôtre. Nous retirons donc notre amendement pour soutenir celui de la commission.
L’amendement no 350 est retiré.
L’avis du Gouvernement reste-t-il le même sur le seul amendement restant donc en discussion ?
L’amendement no 972 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 583 .
L’amendement no 583 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Le moins que l’on puisse dire, mes chers collègues, est que la future Agence française pour la biodiversité et ceux qui la serviront devront arbitrer entre de nombreux intérêts, de nombreuses préoccupations.
Aussi me semble-t-il nécessaire que le directeur général de cet organisme tire la plus grande légitimité de son arrêté de nomination, tant auprès des collectivités locales que des administrations, eu égard à toutes les préoccupations qu’il pourra rencontrer. C’est pourquoi je vous propose qu’il soit nommé de la manière la plus large, par un arrêté conjoint des ministres chargés – bien entendu – de l’environnement et de la biodiversité, madame la secrétaire d’État, mais aussi, dans un ordre que j’ai souhaité hiérarchique en fonction de l’intérêt des domaines cités, des ministres chargés des outre-mer – territoires dont on sait l’importance qu’ils ont pour la biodiversité –, de la mer – la surface des mers et des océans dépassant de loin celle des terres –, de l’agriculture et de la forêt – ou bien de la forêt et de l’agriculture. Mon coeur penche pour la forêt d’abord, mais j’avoue qu’il y a là un peu de sentiment.
Je partage en grande partie l’opinion de M. Caullet. J’ai étudié deux hypothèses à travers ces amendements. La première serait que la personne nommée à la direction générale de l’AFB le soit par le ministre de l’environnement avec avis conforme du ministre de l’agriculture – c’est l’objet de l’amendement no 225 . Ce texte ayant beaucoup d’incidences pour le monde agricole, il me paraît raisonnable d’imaginer que le ministre chargé de l’agriculture soit partie prenante, d’autant que le ministère de l’environnement a un périmètre important, qui va jusqu’aux transports. Il me paraît important que la future agence puisse s’appuyer aussi sur les compétences du ministère de l’agriculture.
L’amendement no 224 , quant à lui, vise à prévoir aussi l’avis conforme du ministre de la santé, un grand nombre de molécules qu’on retrouve dans la pharmacopée étant issues de la biodiversité.
Si on pouvait aboutir à une nomination par le ministre de l’environnement avec un avis conforme des ministres de l’agriculture, des outre-mer et de la santé, ce serait une solution élégante.
J’ai entendu les arguments de mes collègues, mais vous le savez, car c’est un des problèmes qui se pose à nous : ce projet de loi concerne tout le monde, et absolument tous les ministères. Je trouve étonnant que des collègues n’aient pas voulu associer aussi à cette nomination le ministère de la consommation, celui du tourisme, du commerce, de l’industrie, de l’enseignement supérieur, du budget…
Soit la nomination relève du Premier ministre, soit elle appartient au ministère de l’environnement. C’est pourquoi nous n’avons pas accepté ces amendements. Sinon, on pourrait aller extrêmement loin…
Même avis. Le danger dans les listes, c’est qu’on en oublie ! Restons-en au ministère de l’environnement.
Chacun sait dans cet hémicycle à quel point l’honnêteté intellectuelle de M. Caullet est au-dessus de tout soupçon. Il pourra donc confirmer que j’ai défendu en commission un sous-amendement allant dans le sens de son amendement.
Le texte initial, examiné en commission, prévoyait la signature du ministre chargé de l’environnement, mais le ministère chargé de la forêt était cité et le débat nous a conduits à dire qu’on ne sait jamais ce qui peut arriver dans l’organisation de la République demain. Eh oui, je me rappelle précisément de tout ce qui est dit en commission…
Moi aussi !
Nous allons donc pouvoir échanger !
Il a été souligné que la République pouvait parfaitement créer un seul ministère de l’environnement et de la forêt, ce qui serait d’ailleurs une forme de reconnaissance du rôle important de l’agriculture en matière de biodiversité.
Ce sous-amendement déposé en commission m’a été refusé. Par honnêteté intellectuelle, même si la mienne n’est pas à la hauteur de celle de M. Caullet quoique j’y travaille tous les jours,
Sourires
Il faut relativiser ce débat, mes chers collègues, puisqu’il semble que le nom du directeur de cette future agence soit déjà connu. Je voudrais demander à Mme la secrétaire d’État si elle confirme le nom qui circule.
Il n’est pas utile, puisqu’il est déjà satisfait par le futur article L. 131-12. La commission l’a donc repoussé.
L’amendement no 510 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 9, amendé, est adopté.
Je pourrais m’en tenir à l’argumentation – maintenant célèbre dans cet hémicycle – de notre collègue Tardy, qui est l’un des députés qui travaillent le plus, argumentation consistant à s’opposer systématiquement, y compris en commission, aux demandes de rapports en tous genres.
C’est une partie de l’argument. Au-delà, le rapport prévu dans cet article a une signification, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés de la majorité.
Est-ce que vous souhaitez mettre en place l’Agence française pour la biodiversité après un débat arbitré par la représentation nationale, dans ses équilibres actuels, en acceptant que peut-être, et probablement même, elle n’ait pas le périmètre que vous souhaitiez lui donner au départ ?
Ou est-ce que, mécontents de la loi votée, vous lancez déjà le débat sur l’OPA de l’AFB sur un certain nombre de domaines qui auraient échappé à son périmètre ? Pour être très clair, le secteur de la chasse est l’objet sous-jacent de ce rapport qui vous servirait de cheval de Troie. C’est pourquoi nous nous opposons fermement à cette demande de rapport. Tel est l’objet de cet amendement no 113 de mon collègue Tardy.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement no 207 .
Il vise à supprimer l’article 11 bis, comme l’avait fait le Sénat. La remise d’un rapport au Parlement sur l’élargissement du périmètre de l’AFB serait l’opportunité de fusionner dans celle-ci d’autres établissements publics.
Il paraît inutile et contre-productif de remettre en question le fonctionnement de l’ONCFS, qui fait du bon travail et qui, je vous le rappelle, est financé à 70 % par les chasseurs. Cela risquerait de disparaître en cas d’absorption par l’AFB.
On dirait à vous entendre que vous connaissez déjà la conclusion du rapport.
Je trouve cela un peu fort de café : quand on commande un rapport, on ne sait pas a priori ce qui va en résulter.
Il y a toujours des risques, monsieur Douillet, vous le savez comme moi.
Peut-être qu’au vu du fonctionnement de la future agence, de certaines coopérations ou mutualisations si elles ont lieu, le rapport conclura que tout fonctionne très bien. Nous souhaitons que cet article soit maintenu. Avis défavorable donc à ces deux amendements de suppression.
Il a été acté que l’ONCFS ne serait pas dans l’AFB. Il ne paraît pas inutile qu’au bout de deux ans, on procède à un point d’étape pour voir ce qui va et ce qui ne va pas et pour se demander si on élargit ou non le périmètre de l’agence. Car, oui, la question de l’ONCFS se pose, mais celle d’autres établissements aussi.
Faut-il s’empêcher de réfléchir ? Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est fort de café, mais nous ne demandons qu’un point d’étape au bout de deux ans. Cela ne veut absolument pas dire remettre en cause ce qui a été décidé par la loi : il s’agit simplement de regarder comment le système fonctionne et voir s’il y a des conséquences à en tirer. Ni plus, ni moins. C’est pourquoi je suis défavorable à ces amendements.
Vous vous êtes complètement plantés sur la méthode.
Madame la secrétaire d’État, vous arrivez et reprenez le dossier, ce que vous faites d’ailleurs habilement, avec toute votre énergie que nous saluons.
Dès le départ, puisqu’il s’agissait d’une promesse du Président Hollande, vous vous êtes dit : « Nous allons créer une grande agence de la biodiversité. » Et vous avez voulu tout regrouper. Au lieu de discuter avec l’ensemble des structures chargées de la biodiversité, parmi lesquelles aussi l’Office national des forêts, vous avez commencé en imposant un modèle reposant sur le regroupement de toutes les agences. Évidemment, les chasseurs sont intervenus avec force pour défendre leur organisation. Ce regroupement ne se fera plus. La méthode était mauvaise et vous vous êtes mis à dos le monde de la chasse. Ce que nous avions mis du temps à construire avec le Grenelle de l’environnement, parce qu’il est compliqué de faire en sorte que tout le monde discute, explose à la fin de votre mandat. Pour habiller la mariée, vous prévoyez un rapport dans deux ans. Cela ne changera rien. La méthode aurait dû consister à faire en sorte que l’ensemble des organisations discutent ensemble.
Bien entendu, il y a un vrai problème de partage de l’expertise. Il y a autant d’avis que d’expertises. Mais on ne procède pas comme ça. Ce rapport ne servira absolument à rien.
Madame la rapporteure, vous dites qu’il ne se passera peut-être rien au bout de deux ans concernant l’ONCFS, mais je vous répondrai qu’il peut se passer quelque chose.
Ce que tous les chasseurs de France craignent, c’est d’être intégrés à l’AFB. Eh oui ! On sait comment sera composée l’AFB.
Je veux être très clair. Vous avez rappelé la somme que l’État verse à l’ONCFS : 37 millions d’euros. Les chasseurs, eux, versent plus de 90 millions. Comment allez-vous faire ? Comment l’État pourra-t-il payer en plus 90 millions ? Il ne faut ni rêver ni se raconter des histoires : les chasseurs ne paieront plus ! Voilà la vérité ! Que croyez-vous donc ? Il faut réfléchir à tout cela ! Les chasseurs ne paieront plus un euro s’ils sont maltraités par un organisme qui va à l’encontre de ce qu’ils font eux chaque jour sur le terrain pour protéger la biodiversité. Voilà tout ! Telle est notre crainte, et c’est pourquoi nous sommes favorables à la suppression de cet article, in fine dangereux pour la protection de la biodiversité puisque les chasseurs la protègent quotidiennement.
Je partage le point de vue de la rapporteure et de Mme la secrétaire d’État.
Certains rapports, en effet, ne s’imposent pas. En l’occurrence, la création de l’AFB visait à regrouper tout le monde afin de donner à cette agence les meilleures chances de départ. D’emblée, les chasseurs ont refusé d’y participer. Le Parlement n’a donc pas vraiment débattu de cette question si ce n’est – Bertrand Pancher l’a dit à plusieurs reprises – pour souligner que l’Agence travaillerait finalement davantage sur le milieu aquatique que terrestre.
Je compte parmi ceux qui ont regretté qu’un tel organisme, finalement, ne réponde pas aux besoins.
Le débat parlementaire que nous menons en ce moment montre de plus en plus clairement que des intérêts particuliers existent, l’intérêt général n’étant pas du tout la préoccupation de certains membres de cette Assemblée – ce que je regrette.
On parle d’argent, on assure que tels ou tels sont de meilleurs défenseurs de la biodiversité que d’autres, etc. Ce sont là autant de mauvais débats.
Pour le coup, cette demande-là de rapport me semble extrêmement utile. Dans un délai certes relativement long, il nous permettra de nous faire une idée peut-être plus précise des conditions qui nous permettraient à terme – je dis bien, à terme – de savoir si, oui ou non, l’AFB peut être élargie à d’autres organismes.
Il me semble vraiment raisonnable de voter cet article et donc en faveur de ce rapport.
Un mot pour expliquer le vote du groupe Les Républicains. Mme la rapporteure vient de dire que l’on ne connaît pas le résultat de ce rapport. Évidemment, mais il suffit de regarder précisément le texte : il ne s’agit pas de rédiger un rapport pour vérifier au bout de deux ans si tout se passe bien ! Il s’agit de savoir s’il existe ou non une opportunité pour fusionner, c’est-à-dire pour inviter d’autres organismes à intégrer l’Agence – ou leur demander de le faire.
Telle qu’elle est posée aujourd’hui, la question induit quasiment la réponse : le cabinet ne nous dira pas si oui ou non l’AFB fonctionne bien mais s’il est ou non utile de fusionner ! Vous savez bien que, selon celui qui commandera le rapport et formulera un certain nombre d’orientations, nous risquons d’être confrontés à des propositions de fusions non souhaitées, notamment par l’ONCFS.
Si, dans un, deux ou trois ans, l’ONCFS et l’AFB décident de fusionner, ils pourront fort bien le faire sans que la loi ne le prévoie et sans qu’un rapport ait été commandé !
Nous pouvons donc voter en faveur de ces amendements afin que chacun, à l’avenir, puisse décider ce que bon lui semblera.
À quoi cela sert-il de rédiger un rapport pour savoir si une fusion est nécessaire ? Certainement l’ONCFS et l’AFB se rapprocheront-ils et peut-être même fusionneront-ils. Peut-être est-ce le sens de l’histoire ! Les intercommunalités et les métropoles témoignent aussi de cette tendance au regroupement. Si cela doit se faire, cela se fera.
Alors que cette idée a été refusée, pourquoi veut-on rédiger un rapport…
… pour prévoir ce qu’il adviendra alors que si les choses doivent se faire, elles se feront ? Il n’est nullement besoin de rédiger un énième rapport encombrant nos armoires !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Je souhaite très rapidement dire deux choses en tant que président de l’un des organismes d’État qui a été un partenaire, qui souhaite le demeurer et dont le rôle évoluera peut-être dans la protection de la biodiversité.
Tout d’abord, le délai de deux ans nous préserve d’un vote qui serait motivé par des intentions personnelles pour bon nombre d’entre nous
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ensuite, je me permettrais une petite métaphore désuète et familière : finalement, un bon conseil de famille permet de distinguer le soupirant sincère du coureur de dot.
À force de vouloir jouer les symboles et contre eux, on finit par se prendre les pieds dans le tapis. Vous le savez tous, mes chers collègues, un rapport contiendra ce que son rapporteur voudra y mettre et ceux qui seront encore dans cet hémicycle…
… en jugeront comme ils l’entendront, le gouvernement en place prenant alors les décisions qu’il voudra.
Honnêtement, nous devons consacrer notre énergie sur d’autres points de ce débat.
Il est procédé au scrutin.
Article 11
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 114 , tendant à supprimer l’article 11 ter.
Il convient en effet de supprimer un article qui tend encore, décidément, à demander un rapport !
Cet amendement déposé à nouveau par mon collègue Tardy vise donc l’article concernant l’élargissement du périmètre de l’AFB à l’établissement public du Marais poitevin.
Je vous salue !
Que se cache-t-il donc derrière la demande de ce rapport ? La loi n’est pas encore votée et nous avons le sentiment qu’un rapport est déjà pré-commandé pour contourner le Parlement !
Je suis persuadé que Mme la secrétaire d’État, qui m’a écouté attentivement, me répondra précisément.
Avis d’autant plus défavorable à l’adoption de cet amendement que l’amendement no 16 de Mme Batho concernant cet établissement public va être discuté après celui-ci.
Sagesse, mais compte tenu de l’adoption des amendements précédents, cela n’a plus de sens. Je vous demande une suspension de séance, madame la présidente.
Après la fin de la discussion de l’autre amendement à cet article, non ?
La parole est à M. Martial Saddier.
Sans vouloir me mêler de questions concernant la présidence, à qui je m’adresse avec le plus profond respect, nous sommes favorables à cette suspension de séance si elle nous permet d’y voir un peu plus clair à ce moment précis de nos débats, car je vous avoue que ce n’est guère le cas.
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l’amendement no 16 , puisque cela contribuera précisément à éclaircir la discussion.
Je propose à nos collègues de retirer leur amendement de suppression au bénéfice de mon amendement no 16 , lequel vise justement à résoudre la question posée par l’établissement public du Marais poitevin.
Il est proposé de faire un acte utile en faveur de la magnifique deuxième zone humide de France qu’est le Marais poitevin. Il existe un débat récurrent sur l’avenir du petit établissement public créé par la loi Grenelle 2 afin que l’État assume ses compétences dans ce territoire en matière de gestion de l’eau et de biodiversité – gouvernance Natura 2000, opérateurs des mesures agro-environnementales, etc.
La question du devenir de l’établissement public du Marais poitevin a été évoquée lors des débats au Sénat. Depuis la discussion en commission, où nous avions déjà échangé à ce propos, nous avons consulté les acteurs du territoire qui m’ont confirmé leur souhait d’un rattachement à l’AFB dès le départ, tout en gardant leur personnalité juridique et leur autonomie financière, en bénéficiant des fonctions supports, en conservant l’actuelle gouvernance. Ils sont unanimes pour rejeter l’idée d’un rapport renvoyant l’examen de cette question dans deux ans. Cet amendement tend donc à rattacher d’emblée l’établissement public du Marais poitevin à l’AFB.
Le sujet étant posé, je vous propose de suspendre la séance pour cinq minutes afin que les uns et les autres puissent discuter, comme le souhaite Mme la secrétaire d’État. Je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir respecter la durée de la suspension.
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures cinquante.
Je me demande pourquoi Mme Delphine Batho veut créer une exception pour l’établissement public du Marais poitevin, en le rattachement directement à l’AFB. Pourquoi ne pas laisser son conseil d’administration décider de son éventuel rattachement, comme c’est le cas pour les autres agences d’État ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour vous répondre et pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Il semble en effet que ce soit le souhait des membres de l’établissement public du Marais poitevin que de le voir rattaché à l’Agence française pour la biodiversité. Il est certain qu’il y aurait toute sa place et qu’il lui apporterait toute sa richesse.
Néanmoins, l’article 8 de la loi donne déjà la possibilité au conseil d’administration de décider de ce rattachement. D’un point de vue démocratique, et parce qu’il importe que les décisions soient prises au plus près du terrain, il me semble donc préférable de laisser le conseil d’administration faire lui-même la démarche de rejoindre volontairement l’AFB, plutôt que de l’imposer par la loi.
Pour cette raison, je suis plutôt favorable au retrait de cet amendement, même si je souhaite, comme vous, que cela puisse aboutir.
Je dirai d’abord un mot sur le sens de mon amendement. Si les sénateurs ont demandé la remise d’un rapport pour décider, dans un délai de deux ans, de ce possible rattachement, c’est bien que la question se pose. L’existence autonome de cet établissement public avait été pointée et décriée par la Cour des comptes – même si celle-ci méconnaissait certaines réalités du Marais poitevin.
Vous avez parlé de la démocratie, madame la secrétaire d’État, mais c’est ici qu’elle s’exerce, à l’Assemblée nationale. Votre remarque me paraît donc un peu étonnante. La représentation nationale a pleine compétence pour élaborer la loi de façon démocratique et pour décider de rattacher d’emblée l’établissement public du Marais poitevin à l’Agence française pour la biodiversité, sans renvoyer cette décision à une procédure plus complexe et plus aléatoire.
Il me semble que l’objectif, tout à fait louable, de cet amendement, est déjà satisfait en droit – et cela a été dit par Mme la secrétaire d’État –, puisque l’article 8 permettra au conseil d’administration de tous les établissements publics, et donc à celui-ci, de décider librement et en toute autonomie de ce rattachement.
Par ailleurs, nous parlons ici d’une agence nationale, l’Agence française pour la biodiversité. Il est bon de lui conserver son caractère national et de laisser les démarches de territoire s’effectuer librement. Enfin, nous savons que le conseil d’administration de cet établissement se réunira très prochainement, dès vendredi. Laissons-le voter en faveur de ce rattachement, si tel est son souhait.
La parole est à Mme Delphine Batho, pour une ultime intervention – car nous n’allons pas passer la soirée sur le Marais poitevin, malgré tout le respect que j’ai pour ce territoire.
Sourires.
Je voulais seulement préciser à nos collègues qu’il s’agit là d’un sujet qui concerne l’État, et non d’un sujet d’intérêt local. L’établissement public du Marais poitevin figure en effet à l’article L. 213-12-1 du code de l’environnement ; il a été créé par la loi Grenelle et relève de la compétence de l’État. Il ne s’agit donc pas d’un sujet d’intérêt local.
J’ai été bien inspiré de préciser dans quel état d’esprit Lionel Tardy, Virginie Duby-Muller et moi-même avions déposé l’amendement no 114 . Il s’agissait, premièrement, de supprimer un énième rapport, puisqu’on nous propose des rapports à toutes les sauces, dans tous les projets de loi. Je voulais, deuxièmement, comprendre ce qui justifiait le rapport demandé par le Sénat. Je suis le député d’un territoire de montagne, je suis un fervent partisan de la décentralisation, et je peste souvent contre les décisions qui sont prises à la place des territoires que je représente.
J’ai mieux compris l’esprit de ce rapport. Comme je ne veux pas me mêler d’arbitrages locaux, qui seraient en outre internes à la majorité, je retire mon amendement.
L’amendement no 114 est retiré.
Avant de mettre aux voix l’amendement no 16 , je vais demander à Mme la rapporteure de donner l’avis de la commission, ce que j’ai omis de faire.
Puisque vous ne m’aviez pas demandé mon avis, madame la présidente, je ne l’ai pas donné spontanément, puisque je crois que je n’en ai pas le droit.
La commission, pour les raisons qui ont déjà été exposées, n’était pas favorable à cet amendement. À titre personnel, parce que je suis, comme Mme Delphine Batho, une élue de ce territoire – il faut que vous révisiez votre géographie parlementaire, monsieur Saddier ! – je ne vois pas d’inconvénient à ce que cet amendement soit adopté.
C’est une demande forte de l’établissement public du Marais poitevin. Celui-ci ne compte que huit agents : contrairement à ce que j’ai entendu, il ne s’agit donc pas d’un grand établissement. Les personnels ont besoin d’être rassurés. Puisque l’adoption de cet amendement peut nous permettre d’avancer et de ne pas perdre trois heures sur ce sujet, je répète que, à titre personnel, j’y suis favorable.
L’amendement no 16 est adopté et l’article 11 ter est ainsi rédigé.
Les articles 14 et 15 sont successivement adoptés.
Nous discutons l’article 18 par priorité afin de permettre à nos collègues ultramarins présents de défendre leurs amendements. Nous reprendrons ensuite le cours normal de la discussion des articles.
La parole est à Mme Chantal Berthelot, inscrite sur l’article.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je suis solidaire de mon collègue Ary Chalus mais je serai présente demain toute la journée pour débattre de ce projet de loi.
L’article 18 n’aurait peut-être pas dû figurer dans ce texte relatif à la reconquête de la biodiversité. Mes propos sont un peu provocateurs, mais l’esprit du protocole de Nagoya est sorti de son contexte au sein de cet article qui vise à transposer en droit national un accord international. C’est pourquoi il aurait fallu le transposer à part.
Il est important de rappeler l’histoire du protocole de Nagoya pour en comprendre à la fois la lettre et l’esprit et savoir comment le transposer dans l’article 18. La convention sur la diversité biologique, adoptée lors du sommet de Rio de Janeiro, a déterminé trois objectifs. Le premier est la conservation de la biodiversité. La France, en 1992 – François Mitterrand est Président de la République et Ségolène Royal ministre de l’environnement –, prend alors l’engagement de créer un parc national en Guyane. Le deuxième objectif de la convention est l’utilisation durable de la biodiversité et le troisième l’accès aux ressources génétiques dans le respect des savoirs traditionnels.
Or, je suis désolée, mais l’esprit de Nagoya n’est pas en nous, mes chers collègues, il ne nous habite pas, si bien que nous ne pouvons pas le décrire comme il faut. Je rappelle que le protocole de Nagoya vise à définir des conditions d’accès aux ressources qui non seulement les protègent mais également respectent le consentement du pays fournisseur et des habitants. Même si nous nous y efforçons, nous n’avons pas encore réussi à trouver la solution que je souhaiterais pour la population autochtone de Guyane.
Le titre IV, qui est relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation, est une avancée majeure, qui permettra de lutter contre la biopiraterie et de valoriser les connaissances traditionnelles des communautés d’habitants. Avec ce texte, la France choisit de réglementer l’accès à ses ressources génétiques comme d’autres pays riches en biodiversité l’ont déjà fait : le Brésil, le Costa Rica, l’Afrique du Sud, l’Australie ou, en Europe, l’Espagne. Il s’agit non pas des ressources biologiques mais précisément des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles qui y sont associées. Ce dispositif n’est pas totalement nouveau : trois dispositifs proches sont déjà en vigueur dans le parc amazonien de Guyane, en Polynésie française et en Province Sud de Nouvelle-Calédonie. Le titre IV s’en inspire et vise à les harmoniser à l’échelle nationale dans le respect des compétences des collectivités ultramarines.
La France a beaucoup contribué à l’adoption de la convention sur la diversité biologique et du protocole de Nagoya, instruments internationaux mettant en avant la notion onusienne de « communauté autochtone et locale ». Il est toutefois de mon devoir de souligner le risque juridique important lié à l’inscription au titre IV de cette notion de « communauté autochtone et locale ». Cette notion est certes déjà présente en droit français, en particulier dans la loi du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer, mais le Conseil constitutionnel ne s’est jamais prononcé sur l’article en question de cette loi. Or notre Constitution accorde les mêmes droits à tous les citoyens à titre individuel et à l’ensemble du peuple français à titre collectif. En vertu du principe d’indivisibilité du peuple français, notre Constitution interdit d’accorder des droits collectifs à des catégories de population sur le fondement de l’autochtonie. Il n’est pas possible en droit interne de faire référence à la notion d’autochtonie qui est par essence liée à un critère ethnique.
C’est pourquoi, d’une part, les communautés d’habitants sont définies par leurs modes de vie et le fait qu’elles détiennent des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques et, d’autre part, les procédures prévues à l’article 18 sont similaires à celles utilisées par ailleurs en matière de participation du public. Certes l’accord de Nouméa de 1998 porte la reconnaissance du peuple kanak en Nouvelle-Calédonie, mais cette reconnaissance ne revient pas à conférer de droits collectifs spécifiques au peuple kanak sur un fondement communautaire. Elle n’est donc pas contraire au droit constitutionnel. En revanche, une mention des communautés autochtones et locales pour la mise en oeuvre de cette législation d’accès aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques risquerait, elle, d’être considérée comme anticonstitutionnelle.
Dans l’hypothèse de l’examen par le Conseil constitutionnel qui pourrait avoir lieu par saisine sur le projet de loi relatif à la reconquête de la biodiversité, de la nature ou des paysages, ou par une question prioritaire de constitutionnalité en cas de contentieux sur la mise en oeuvre du dispositif d’accès et partage des avantages – APA –, toutes les dispositions en faveur des communautés d’habitants pourraient être censurées, ce qui aboutirait à un dispositif sans les communautés d’habitants, ce qui serait évidemment absurde. Ainsi, au vu du risque important d’aboutir à un dispositif dénaturé, voire à l’absence de dispositif, le Gouvernement entend être responsable et préserver l’esprit et la lettre du protocole de Nagoya. Même si la terminologie exacte de « communauté autochtone et locale » ne peut pas être maintenue, la définition des « communautés d’habitants » proposée est conforme au j) de l’article 8 de la convention sur la diversité biologique.
Le Gouvernement reste très attaché à permettre une meilleure reconnaissance des communautés d’habitants ultramarines, comme les populations amérindiennes et bushinengués de Guyane, de leur culture et de leurs connaissances traditionnelles. En cela je salue chaudement l’excellent travail des parlementaires ultramarins, notamment de celui de Mme Berthelot, dont les amendements ont permis de faire entendre les attentes des communautés amérindiennes et bushinengués et de renforcer les dispositions en leur faveur par rapport à celles initialement prévues.
Je note en particulier l’introduction de l’obligation d’information et de restitution des informations et connaissances acquises à partir des ressources génétiques prélevées sur le territoire où sont présentes des communautés d’habitants, ainsi que la possibilité pour le Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinengués d’organiser la consultation des communautés d’habitants en Guyane. Il nous appartient maintenant de faire vivre ce conseil en procédant à son changement de statut afin qu’il puisse jouer le rôle de personne morale de droit public.
Tels sont les principes qui président aux réponses que j’apporterai à certains de vos amendements et qui justifient les amendements du Gouvernement que je vous proposerai d’adopter. Je souhaite que les débats soient constructifs pour que le titre IV atteigne un point d’équilibre et permette à la France de ratifier le protocole de Nagoya avant la prochaine réunion de la Conférence des parties à la convention sur la diversité biologique qui se tiendra au Mexique au mois de décembre 2016. Nous serons ainsi en mesure de peser davantage sur les décisions qui seront prises dans ce cadre.
Je tiens à vous remercier, madame la présidente, et à remercier mes collègues, d’avoir bien voulu accepter que l’article 18 soit appelé par priorité. Nous avons longuement travaillé sur ce projet de loi avec des universitaires et des médecins qui travaillent sur la biodiversité.
La définition de l’utilisation des connaissances traditionnelles dans le présent texte est particulièrement large, dans la mesure où les modalités d’études et de valorisation ne sont pas précisées. L’amendement no 536 vise donc à préciser la rédaction pour mentionner explicitement les pratiques locales, issues du patrimoine matériel et immatériel, incarnant des modes de vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique.
La commission a préféré maintenir la rédaction du texte, pensant que sa portée est plus large. À être trop disert, on réduit la portée des choses. Souhaitant que les termes du protocole de Nagoya soient véritablement respectés, nous avons émis un avis défavorable.
Même avis.
Je maintiens mon amendement, en raison du travail réalisé par les ultramarins. Heureusement, du reste, que nous nous sommes battus, parce que, bien qu’ayant chez nous plus de 80 % de la biodiversité et 97 % des espaces marins, nous avons failli, au départ, être exclus. J’ai dû poser deux questions sur le sujet au Gouvernement. Nous avons reçu des réponses satisfaisantes. J’espère que, pour une fois, s’agissant de leurs amendements, les ultramarins ne seront pas les danseuses de la République.
L’amendement no 536 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 898 .
Si je partage les réticences exprimées à l’instant par Mme la secrétaire sur l’expression « communautés autochtones », comme en première lecture, je souhaite substituer à l’expression « communautés d’habitants », employée à l’alinéa 14, celle d’« habitants d’une même communauté de vie ». En effet, le concept de « communautés d’habitants » renvoie, qu’on le veuille ou non, inévitablement au concept anglo-saxon de communautés de vie, qui relie dans tout un ensemble les enfants, les vieillards et les adultes, et laisse entendre que les personnes nées dans un même territoire ont par nature et par fonction un lien charnel avec ce territoire, lien qui leur donnerait, au bout du compte, collectivement des droits sur celui-ci.
Ce que je peux comprendre en termes anthropologiques, intellectuels, moraux, voire libertaires, j’ai du mal à le concevoir dans un texte de loi. En effet, nous sommes en France et en France l’individu n’est pas attaché à sa communauté. Il a une vérité personnelle et intrinsèque. Appartenir à une communauté est un choix personnel qui n’est pas lié à la naissance.
Je maintiendrai mon amendement, madame la présidente.
Je n’en doute pas, madame la députée.
Quel est l’avis de la commission ?
Nous voici replongés dans la première lecture du texte, où nous avons connu des débats très longs sur la terminologie qu’il convenait d’employer. Or, comme les mots « habitants d’une même communauté de vie » ne forment pas une meilleure expression que « communautés d’habitants » – elle est même pire –, la commission a rejeté l’amendement.
Même avis.
L’amendement no 898 n’est pas adopté.
La biodiversité ayant une assise territoriale, cet amendement vise à permettre aux régions et collectivités territoriales concernées de bénéficier du partage des avantages, aux côtés de l’utilisateur et, selon le cas, de l’État ou des communautés d’habitants.
La commission a émis un avis défavorable et veut souligner de nouveau aujourd’hui que les ressources génétiques font partie du patrimoine de l’État. Elles appartiennent à l’État et non pas aux collectivités territoriales. Donc l’État en est l’unique propriétaire. Le partage des avantages devra donc se faire entre les utilisateurs et l’État.
Le protocole de Nagoya impose que le partage des avantages découlant de l’utilisation des connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques soit fait exclusivement avec les communautés détentrices de ces connaissances et non avec les collectivités territoriales ou les régions. Avis défavorable donc à l’amendement.
L’amendement no 542 n’est pas adopté.
La référence à la « communauté d’habitants » tend à évincer le principe fondamental selon lequel les droits des autochtones résultent de leur lien à leur terre. Or, depuis l’accord de Nouméa de 1998, le peuple kanak est reconnu en Nouvelle-Calédonie, ce qui s’accompagne d’un statut civil coutumier régissant les rapports de nature civile entre les Kanaks, mais aussi les terres coutumières. Par ailleurs, dans des arrêts récents, les juridictions ont reconnu aux structures coutumières traditionnelles, la personnalité juridique.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 956 .
Je serai brève, car j’ai déjà expliqué dans mon propos liminaire pourquoi le Gouvernement avait déposé cet amendement. Je comprends les préoccupations des députés qui souhaitent insérer les communautés autochtones dans la loi, mais ce texte sur la biodiversité n’est certainement pas le lieu pour ce débat. Par ailleurs, le maintien du terme « autochtone » risquerait de mettre en péril tous les avantages extrêmement importants que nous avons mis en place pour les communautés d’habitants. Je ne veux pas prendre ce risque : c’est pourquoi le Gouvernement a déposé cet amendement visant à supprimer les mots « et communauté autochtone et locale ».
Quel est votre avis sur l’amendement no 575 , madame la secrétaire d’État ?
Défavorable.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?
Nous avons très longuement débattu de cela en première lecture. En maintenant les mots « et communauté autochtone et locale », nous risquons de rendre l’article 18 anticonstitutionnel. Il y a dix-huit mois – c’est loin, certes – nous avons choisi, d’un commun accord, d’employer l’expression « communauté d’habitants », qui existe déjà dans le droit positif. C’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement no 575 et favorable à l’amendement no 956 .
Madame la rapporteure, permettez-moi de faire un petit point d’ordre. Dans le cadre du travail parlementaire, chaque député a le droit de déposer des amendements selon ses convictions, même s’ils ont déjà été débattus et rebattus en première ou en deuxième lecture et même si, en démocratie, on se soumet à l’arrivée à la règle du vote majoritaire. J’ai assisté aux débats en première lecture et, depuis le début de cette deuxième lecture, il me semble qu’un très grand nombre d’amendements ont été redéposés. Chacun affirme ses convictions, et il semblerait que certains sujets dépassent les clivages politiques habituels.
Très sincèrement, madame la rapporteure, je n’approuve pas la manière dont vous m’avez répondu. Je suis une élue de Guyane et même si le droit n’entend pas, techniquement, la notion d’autochtonie, il y a dans mon département 10 000 personnes qui sont des autochtones de Guyane. C’est votre histoire, c’est notre histoire à tous. Le droit est une chose, le respect dû aux humains et la reconnaissance de leur identité en sont une autre. Je voudrais que cela soit bien entendu.
Madame la secrétaire d’État, je vous ai bien entendue. Évidemment, des raisons juridiques vous empêchent d’accepter l’amendement no 575 de M. Chalus, mais sachez que la République doit aussi, à un moment donné, reconnaître son histoire, qui est notre histoire à tous. Je l’ai déjà dit : c’est mon histoire de tous les jours, mais c’est aussi la nôtre, dans cette République.
La nation française est diverse. Elle est composée de plusieurs pays. Dans mon pays, la Guyane, qui est une composante de la nation française, il y a des populations autochtones amérindiennes.
Ce sont les premiers habitants de cette terre – voilà ce que signifie la notion d’autochtonie.
Dès lors, je dois, pour la cohésion de mon territoire, défendre les gens qui me demandent de les représenter ici. Je dois porter leur revendication de reconnaissance, par la République, de ce qu’ils sont et de ce qu’ils font.
J’ai dit tout à l’heure quels étaient la lettre et l’esprit du protocole de Nagoya. Il existe des populations traditionnelles, autochtones, qui entretiennent depuis des millénaires une biodiversité qui nous appartient collectivement, à nous tous. En 1992, à Rio, la France a décidé de créer un parc national, le plus grand d’Europe, avec une biodiversité exceptionnelle. Vous ne pouvez pas me dire que l’on va s’occuper de la biodiversité et non des hommes et des femmes qui vivent tous les jours dans ces milieux naturels, et qui ont besoin d’être reconnus dans ce rôle, d’être reconnus culturellement pour ce qu’ils sont !
Tel est le sens de l’amendement no 575 .
Madame la secrétaire d’État, j’entends ce que vous me dites : la loi, c’est la loi. Mais permettez que nous ayons ce débat ici, mes chers collègues. J’y reviendrai encore demain, et encore après-demain. Oui, la Guyane compte 10 000 Amérindiens, qui sont des autochtones de la nation française. Ne vous cachez pas derrière les mots, mes chers collègues ! Parce que, pour aller encore plus loin, pourquoi la Guyane accueille-t-elle ce centre spatial européen que nous découvrons tous ? Pourquoi la Guyane dispose-t-elle de cette réserve d’or dont des multinationales veulent s’emparer ? Pourquoi la Guyane offre-t-elle cette surface maritime à la France ? Pourquoi Total et Shell veulent-ils faire des prospections d’hydrocarbures chez moi ? Pourquoi ? Parce que si nous avons des ressources biologiques, nous avons aussi des hommes et des femmes, et il faut les respecter.
J’entends vos propos, madame la secrétaire d’État, et je vous en remercie. Je remercie également mes collègues qui, dans la soirée du lundi 7 mars, dans un sursaut de « guyanité » et de « francité » comme je les aime,…
…ont adopté mon amendement CD 388 en commission. Certainement pas pour embêter qui que ce soit, madame la rapporteure, je tiens à vous le dire publiquement, mais pour affirmer que nous sommes français, que nous sommes fiers de cette diversité, fiers de ces territoires qui composent notre pays. J’entends vos explications, madame la secrétaire d’État, mais nous devons continuer à travailler pour que nos frères et soeurs amérindiens de Guyane, qui sont français, partagent notre fierté d’être français !
Applaudissements sur de nombreux bancs.
Madame Berthelot, point d’ordre pour point d’ordre : je vous ai laissé la parole pendant cinq minutes.
Oui, c’était important, mais nous ne pourrons pas faire comme cela à chaque fois. La parole est à Mme Danielle Auroi.
Il est difficile d’intervenir après Mme Berthelot ! Mais je voudrais dire deux choses.
Au nom de la commission des affaires européennes, je suis le dossier du protocole de Nagoya. Celui-ci a été signé par l’Union européenne et par un certain nombre de pays, dont la France, mais nous ne l’avons pas encore ratifié. Il faut le dire : la France n’est pas du tout exemplaire en la matière.
Par ailleurs, dire qu’une disposition n’est pas constitutionnelle alors que l’on n’a pas vérifié que le Conseil constitutionnel n’était pas d’accord, c’est un peu facile. Quand le président de la région Corse, par exemple, parle de « peuple corse », aucun membre du Gouvernement, me semble-t-il, ne le reprend !
Mais il ne s’agit pas d’introduire la notion de peuple corse dans la loi !
Il y aurait donc un peuple corse, mais il n’y aurait pas de peuples autochtones ? La chose est un peu difficile à comprendre.
Ce qu’il me semble surtout, s’agissant des « communautés d’habitants », c’est que simplement la France est encore assez empreinte d’une culture néocoloniale pour ne pas être capable d’accepter la réalité telle qu’elle est : il y a des peuples autochtones, qui ont des connaissances spécifiques, lesquelles ont été pillées pendant un certain nombre d’années, et qui doivent être mieux reconnus grâce au protocole de Nagoya. Il me semble que ce serait les respecter et respecter réellement la lettre et l’esprit du protocole de Nagoya que de reconnaître que l’expression « peuples autochtones » est bien celle qui convient.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe écologiste et du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame Berthelot, je vous remercie pour vos propos : tout en faisant preuve d’une grande responsabilité, vous nous donnez à voir tout l’amour que vous portez à votre territoire et à sa population. Vous m’avez dit que j’aurais l’occasion de venir vous voir, de découvrir les magnificences de la Guyane et toutes ses richesses biologiques et humaines. J’ai très envie de les découvrir et je viendrai avec grand plaisir, pour les mettre en valeur et pour montrer ce que l’on peut faire pour protéger la biodiversité, même dans des situations difficiles et avec des prédateurs très dangereux – par forcément des animaux.
Vous êtes fous, ou quoi ? Vous foutez en l’air toutes les avancées prévues pour les outre-mer !
Définir les connaissances traditionnelles associées à une ressource génétique par le fait qu’elles soient détenues « de manière ancienne et continue » n’est pas satisfaisant. En effet, c’est moins le caractère ancien de ces connaissances que l’origine de leur émergence et leurs modes de transmission qui les définissent. Le terme « traditionnel » permet de renvoyer aux modes de constitution – par l’accumulation dans le temps – et aux modes de transmission des savoirs – intergénérationnels.
L’amendement no 577 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 930 .
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a ajouté la définition d’une « espèce sauvage ». Or cette définition risque de poser un problème en créant un vide juridique, car l’article 18 définit déjà les « espèces domestiquées ou cultivées », ainsi que les « espèces sauvages apparentées ». Il en résulte que les espèces sauvages sont les espèces n’appartenant pas aux deux autres catégories. C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer la définition d’une espèce sauvage.
Au vu de cet argumentaire, la commission a accepté l’amendement du Gouvernement.
L’amendement no 930 est adopté.
L’article 18 traite notamment de l’utilisation des « connaissances traditionnelles associées à une ressource génétique ». Dans certaines situations, il n’est pas possible d’attribuer ces connaissances à une communauté d’habitants bien définie. C’est notamment le cas pour les communautés qui ont disparu aujourd’hui.
L’alinéa 42 exclut justement du dispositif « les connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques ne pouvant être attribuées à une ou plusieurs communautés d’habitants ». Or il est préférable de soumettre ces connaissances au régime des APA : l’échange avec les communautés d’habitants est remplacé par un dialogue et une négociation entre l’autorité compétente et le demandeur. Faute de communauté identifiée, les avantages reviendraient donc à l’État, ce qui est particulièrement profitable. L’État serait en mesure de redistribuer les avantages entre ces mêmes communautés d’habitants. C’est pourquoi notre amendement vise à supprimer l’alinéa 42, qui pourrait créer une exclusion au régime des APA.
L’article L. 412-4 du code de l’environnement définit le champ d’application du nouveau dispositif national d’APA. Il comporte une liste des éléments exclus de ce champ. Parmi ces éléments figurent « les connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques ne pouvant être attribuées à une ou plusieurs communautés d’habitants ». Les auteurs de ces deux amendements veulent supprimer cette exclusion : ils souhaitent que ces connaissances traditionnelles fassent l’objet d’une procédure d’APA. Or, dans cette procédure, il n’est pas seulement question d’accès aux connaissances, mais aussi de partage des connaissances. Avec qui allons-nous partager les avantages issus de connaissances attribuables à aucune communauté identifiée ? C’est pourquoi la commission a donné un avis défavorable à ces amendements.
Le présent texte met fin à des revendications pourtant légitimes sur les connaissances qui ont été partagées par les communautés et versées dans le domaine public sans juste compensation. Il valide ainsi le rapport de force et les abus qui ont permis aux chercheurs d’utiliser ces connaissances, de longue date et de façon répétée, en dehors des communautés. L’amendement no 599 propose de modifier le projet de loi sur ce point.
L’amendement no 599 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La rédaction actuelle du projet de loi revient à valider les situations du passé où des connaissances auraient été diffusées et utilisées sans l’accord des communautés. Cela revient à valider les rapports de force et les abus qui ont permis aux utilisateurs d’utiliser de longue date et de façon répétée ces connaissances en dehors des communautés.
Ces connaissances traditionnelles ne doivent pas être exclues du régime de l’APA jusqu’à ce que l’affaire ait fait l’objet d’un jugement définitif.
Enfin, le parallèle implicite qui est fait ici avec le droit des brevets – propriétés qui seraient tombées dans le domaine public – est une erreur de logique car le droit des brevets vise à protéger l’inventeur alors que l’APA vise à permettre un accès et une utilisation tout en protégeant les communautés. Ce parallèle conduit à valider les spoliations du passé.
La commission a émis un avis défavorable. L’amendement de M. Chalus vise à inclure dans le régime d’APA les connaissances qui font l’objet d’un recours ou d’une contestation quant à l’appropriation abusive ou le non-partage des bénéfices. Cette proposition a déjà fait l’objet d’un amendement en première lecture et a été repoussée.
L’amendement vise à prendre en compte le cas où l’utilisation de longue date et de façon répétée dont se prévalent des entreprises ou des organismes pour ne pas appliquer le dispositif APA serait contestée. Cette contestation se traduit le plus souvent par des recours contre les brevets sollicités ou obtenus par cette entreprise ou cet organisme. Or le respect des dispositions d’accès et de partage n’est pas une condition de recevabilité des brevets. Ces dernières sont posées par le droit européen, il s’agit de la directive 9844 CE du 6 juillet 1998. Cette disposition insérée dans le texte serait donc complètement inopérante.
En outre, le caractère cumulatif posé par l’alinéa 43 encadre suffisamment cette exclusion afin qu’il n’y ait pas de dérives.
Même avis.
L’amendement no 602 n’est pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 916 .
La sécurité de la nation impose de préserver les activités des laboratoires contribuant à la biodéfense du territoire national, en particulier dans le contexte de lutte contre le terrorisme. Le présent amendement vise à exclure ces activités du champ d’application du titre IV du projet de loi. Je précise que cette exclusion ne contrevient pas à nos engagements internationaux. En effet, la Convention sur la diversité biologique reconnaît que le pouvoir de déterminer l’accès aux ressources génétiques appartient aux gouvernements et est régi par les législations nationales.
En outre, le règlement (UE) no 5112014 relatif à la conformité au protocole de Nagoya au sein de l’Union européenne prévoit, au 5. de son article 2, qu’aucune disposition dudit règlement n’oblige un État membre à fournir des informations dont il juge la divulgation contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité. C’est la raison pour laquelle je vous propose d’adopter cet amendement.
L’amendement no 916 , accepté par la commission, est adopté.
Le présent amendement vise à supprimer les alinéas 52 à 57 de l’article 18. Cet article prévoit que toute nouvelle utilisation à but commercial de la même ressource génétique et par le même utilisateur fasse l’objet d’une nouvelle demande d’autorisation. Je m’explique : un fromager qui aura sélectionné au fil du temps un certain nombre de ferments sera obligé de demander une nouvelle autorisation le jour où il voudra faire un nouveau produit.
Cela pose un gros problème. Il n’est pas satisfaisant que cette obligation, déjà lourde pour nos entreprises, s’applique aux ressources génétiques qui sont en collection avant l’entrée en vigueur de la loi.
J’avais moi aussi déposé un amendement de suppression, que je ne trouve pas dans la liasse. Je le regrette. Mais j’ai également déposé, avec Jean-Yves Le Déaut, les trois présents amendements qui visent à aménager cette partie du texte. La rédaction actuelle est en effet inquiétante, non seulement eu égard à la manière dont seront appliqués le règlement du Parlement européen et les décisions du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du protocole de Nagoya, mais aussi pour nos entreprises.
Beaucoup de ressources sont déjà dans les collections. En imposant de demander une nouvelle autorisation à chaque nouvelle utilisation, nous allons considérablement limiter les possibilités des entreprises françaises travaillant sur des ressources qui sont déjà en collection, contrairement à ce qui se passe dans des pays voisins aux écosystèmes similaires – je pense à la Suisse ou à l’Italie pour les Alpes, à l’Espagne pour les Pyrénées, voire au Brésil pour la Guyane ainsi qu’à l’ensemble de la Caraïbe pour d’autres départements d’outre-mer.
Nous allons donc, que ce soit dans le privé que dans le public, scientifiquement explorer, éventuellement développer, mais pas produire, parce qu’il faudra à chaque fois demander des autorisations d’exploitation. Nous mettons par là en péril notre propre économie, alors que nous avons, depuis fort longtemps, des collections magnifiquement entretenues. Dans le domaine des semences, la France est le deuxième producteur au monde. Nous avons des choses exceptionnelles, reconnues dans le monde entier. Et cette filière représente 875 millions d’euros annuels d’excédent commercial, avec un chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros !
Allons-nous, par une sorte de pudeur que je peux certes comprendre, voire admirer, nous empêcher d’exploiter toutes ces connaissances et ces compétences, et les laisser exploiter par d’autres pays dont le climat, l’environnement, le climax, le sol, la biodiversité sont identiques aux nôtres ?
Pour vérification, madame Le Dain, vous venez bien de défendre l’ensemble de vos trois amendements ?
Oui, madame la présidente, mais ce ne sont que des amendements d’aménagement. Je continue à regretter que mon amendement de suppression ait disparu. Comme mon collègue Sermier, c’est la solution que j’aurais préférée.
Nous n’avons pas reçu d’autre amendement, madame la députée. Mais je remarque que votre amendement no 363 supprime tout de même les alinéas 55 à 57.
Je vous remercie, madame la présidente, et je remercie également les fonctionnaires de l’Assemblée de la finesse et de la qualité de leur lecture. Finalement, mon amendement est presque identique à celui de M. Sermier, à cela près qu’à l’alinéa 54, il propose d’insérer les mots : « à tout accès ultérieur à la date de promulgation de la même loi pour les fins mentionnées aux I et II de l’article L. 412-5. »
L’APA est un processus compliqué, mais il faut se garder de toute confusion sur les termes. La collection et l’accès sont deux étapes différentes. Cueillir une plante, ce n’est pas accéder à ses ressources génétiques. L’accès, c’est l’identification dans le matériau biologique d’un élément génétique intéressant pour la recherche. Ne pas faire cette différence peut donner lieu à des erreurs d’interprétation.
Les alinéas 54 à 57 de l’article 18 définissent les modalités d’entrée en vigueur du dispositif pour les collections constituées avant l’entrée en vigueur de la future loi. L’article 18 dispose que dans le domaine de la recherche à visée non commerciale, seuls les accès ayant lieu après l’adoption de la loi devront suivre la procédure nouvelle de l’APA. En revanche, dans le cas où un utilisateur a, grâce à une collection déjà existante, accédé à une ressource génétique ou à une connaissance avant l’adoption de la loi, seules les nouvelles utilisations de cette même ressource devront respecter l’APA.
C’est l’exemple que j’ai évoqué tout à l’heure : si on fait un fromage différent, il faut une nouvelle autorisation.
Tout cela semble logique. La commission a donc émis un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements.
Le protocole de Nagoya impose aux États parties de s’assurer d’un partage juste et équitable des avantages issus de l’utilisation des ressources génétiques. Rien dans le protocole de Nagoya ne précise que les ressources génétiques présentes dans des collections sont exclues de ces dispositions. Aussi, ce n’est pas parce qu’une entreprise dispose dans des locaux d’un certain nombre d’échantillons de plantes françaises que ces ressources génétiques sont pour autant la propriété de cette entreprise.
En effet, la biodiversité étant le patrimoine commun de la nation, l’entreprise devra, pour une utilisation commerciale, demander une autorisation, sorte de droit d’usage, à l’État français et procéder à un partage des avantages.
Vous craignez une rétroactivité, monsieur le député. Je tiens à vous rassurer. Le Muséum d’histoire naturelle avait émis la même crainte, et il a validé la nouvelle rédaction issue des travaux parlementaires. Les ressources génétiques lorsqu’elles sont en collection ou les connaissances traditionnelles associées peuvent avoir fait l’objet d’une utilisation avant la promulgation de la loi. La loi n’étant pas rétroactive, aucun partage des avantages ne sera demandé à l’utilisateur concernant ces utilisations passées. Mais à partir de la promulgation de la loi, en cas de nouvelle utilisation commerciale, un partage des avantages doit avoir lieu. Ces dispositions s’appliquent aux seules ressources génétiques prélevées en France et conservées en collections en France, quelle que soit la date de prélèvement dans le milieu naturel et de mise en collection.
Pour ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.
Je voudrais préciser que les dispositions de l’article 18 qui organisent les règles d’accès aux ressources génétiques concernent de nombreux acteurs, publics et privés, issus de secteurs divers : agriculture, alimentation, pharmacie, cosmétique, adjuvants, biomatériaux. Le génie génétique et les biotechnologies déploient des efforts pour le plus grand bénéfice du pays.
Si les professionnels ne remettent pas en cause, et ils ne l’ont jamais fait, la légitimité du dispositif présenté à l’article 18, tant s’en faut, ils nourrissent quelques inquiétudes quant à ses modalités d’application. Il s’agit notamment de la nécessité d’obtenir une autorisation sur la base d’une preuve de l’origine des ressources utilisées pour la nouvelle utilisation de ressources présentes en collection avant la date d’entrée en vigueur de la loi, vous venez de le dire.
Pour ma part, je m’inquiète de la manière dont on va utiliser dans les collections ce qui a été mis au point à l’époque de Louis XIV ! Or la recherche utilise souvent des ressources entrées en collection il y a bien des années, des dizaines d’années, voire des siècles, et dont il est difficile de déterminer l’origine ou les utilisations antérieures.
De ce fait, la définition d’une nouvelle utilisation soulève une difficulté majeure. Elle implique que l’utilisateur d’une ressource ait en sa possession des données dont la collecte fut longtemps aléatoire en l’absence d’un cadre juridique explicite. L’incertitude qui entoure la mise en application serait de nature à détourner les professionnels des collections françaises. Cherchant à se prémunir des risques encourus, ils se retourneront vers d’autres pays, pénalisant le dynamisme de notre recherche et l’attractivité de la France en matière économique.
Plusieurs amendements visant à résoudre ce problème ont été déposés, par moi comme par d’autres collègues. En première lecture, ils ont tous été repoussés, sur la demande de la commission et du Gouvernement. Puisque le projet de loi prévoit que cet article fasse l’objet d’un décret pris en Conseil d’État, il conviendra d’être attentif à ce qu’il permette une mise en oeuvre souple et réaliste pour les entreprises au regard de la problématique de cette nouvelle utilisation.
J’estime que la seule granulométrie pertinente pouvant être appliquée par les utilisateurs est celle reposant sur les secteurs d’activité, telle qu’elle est appliquée par la nomenclature du système harmonisé de l’organisation mondiale des douanes. Elle établit par exemple une distinction claire entre les produits pharmaceutiques et les préparations cosmétiques. Il serait intéressant d’étudier de près cette classification.
Madame la rapporteure, madame la secrétaire d’État, vos réponses sont très claires : vous avez confirmé qu’il y avait réellement un problème autour de la notion de brevetabilité du vivant. Selon la rédaction actuelle, un ferment sur lequel des recherches sont déjà menées et dont on a la connaissance génétique pour une utilisation dans des fromages devrait faire l’objet d’une nouvelle demande d’autorisation s’il devait être utilisé pour un autre produit. L’application de cette loi modifiera donc forcément les processus dans ce cadre.
Vous faites un mauvais procès aux utilisations différentes que l’on peut faire d’une connaissance que l’on a déjà. Il faut impérativement revoir ces alinéas 52 à 57 ou les sortir du dispositif, car vous allez pénaliser l’innovation dans le marché français. Votre dispositif est d’ailleurs purement franco-français.
Ce n’est pas un hasard si Mme Dalloz et moi-même avons pris la parole sur ce sujet : nous sommes élus de circonscriptions situées à cinquante kilomètres de la Suisse ! Nous voyons bien que, si nous imposons cette contrainte à nos petites entreprises agroalimentaires, elles se déplaceront de cinquante kilomètres pour aller créer de nouveaux produits en Suisse, avec l’emploi qui va avec.
Madame la présidente, je demande une suspension de séance.
La séance, suspendue à vingt-trois heures quarante-cinq, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.
La séance est reprise.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement no 668 .
L’amendement no 668 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 918 .
Le Sénat a adopté en première lecture un amendement imposant aux utilisateurs de ressources génétiques de restituer aux communautés d’habitants, via une personne morale de droit public, les résultats des recherches conduites sur cette ou ces ressources génétiques lorsqu’elles se trouvent sur le territoire d’une collectivité où sont présentes une ou plusieurs communautés d’habitants.
Conformément au protocole de Nagoya, qui prévoit des modalités de protection des informations confidentielles, le présent amendement vise à protéger la confidentialité des résultats d’une recherche relevant du secret industriel et commercial.
L’amendement no 918 est adopté.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement no 669 .
L’amendement no 669 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Cet amendement vise à ce que toutes les communautés d’habitants concernées par les dispositions relatives à l’accès aux ressources génétiques du présent projet de loi, c’est-à-dire les communautés d’habitants de Guyane, Mayotte et Wallis-et-Futuna, puissent être consultées lorsque ces accès impliquent un prélèvement in situ sur un territoire qu’elles ont contribué à préserver de longue date.
Le présent amendement propose une articulation juridique qui respecte la souveraineté de l’État français, qui reste la seule partie contractante avec le demandeur, et le statut de patrimoine commun de la nation des ressources génétiques, tout en reconnaissant les droits des communautés d’habitants par le recueil de leur consentement.
Une partie au moins de cet amendement fait doublon avec l’alinéa 69 de l’article 18 qui a été adopté par notre commission en deuxième lecture et qui prévoit que l’autorité administrative doit informer les communautés d’habitants lorsque l’accès aux ressources a lieu sur un territoire où ces communautés sont présentes. Par ailleurs, rendre applicable la même procédure à l’accès aux ressources génétiques et à l’accès aux connaissances traditionnelles n’est pas justifié. Je demande donc à l’auteur de cet amendement de le retirer.
Avis défavorable.
L’amendement no 603 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour soutenir l’amendement no 49 .
L’amendement no 49 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 606 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour soutenir l’amendement no 50 .
L’amendement no 50 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je constate que tous les amendements venant de l’outre-mer sont rejetés sans beaucoup d’explications...
Dans la mesure où le fait de calculer les contributions financières susceptibles d’être versées par les utilisateurs sur la base d’un pourcentage du chiffre d’affaires annuel mondial se révélerait particulièrement préjudiciable aux petites et moyennes entreprises, notamment locales, ce qui va à l’encontre de l’économie du projet de loi, je propose par cet amendement de prendre pour base de calcul le bénéfice net.
Dans la discussion commune, nous en venons aux trois amendements identiques.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 57 .
La disposition qui fixe un plafond maximum de 5 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé et des autres revenus perçus grâce aux produits et procédés obtenus à partir de la ou des ressources génétiques faisant l’objet de l’autorisation est disproportionné.
Nous proposons donc de remplacer les mots « chiffre d’affaires » par « bénéfice net ». En effet, se baser sur le chiffre d’affaires revient à ne pas tenir compte de tous les frais de recherche et développement et de production qui ont précédé la commercialisation des produits et qui s’imputent en grande partie sur le bénéfice généré par le produit.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement no 187 .
Aussi fou que cela puisse paraître, je souhaite rappeler qu’il faut faire la différence entre le chiffre d’affaires et le bénéfice net. Je suis navré d’en revenir à une distinction aussi basique à cette heure avancée de la nuit. Une entreprise peut très bien réaliser un énorme chiffre d’affaires et, dans le même temps, un bénéfice net très faible : cela se voit tous les jours. L’amendement vise donc simplement à éliminer cette surprenante confusion.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 748 .
Dans la discussion commune, la parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 56 .
Il propose de se baser sur le chiffre d’affaires effectivement réalisé en France, car l’application de cette disposition, qui n’a pas d’équivalent dans d’autres pays européens, aurait comme effet pervers de détourner les acteurs de la recherche des ressources présentes sur le territoire national, en particulier dans les outre-mer.
De surcroît, le calcul de ce pourcentage ne permet pas de prendre en compte les sommes importantes investies en recherche et développement.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 24 .
Nous sommes face à un cas flagrant de sur-transposition. Le règlement européen prévoit en effet que chaque État membre reste compétent pour déterminer sa législation sur l’accès aux ressources génétiques. Or, à ce jour, seuls deux pays de l’Union européenne sont en train de délibérer à ce sujet : l’Espagne et la France. Appliquer isolément un taux de 5 % au chiffre d’affaires mondial de nos entreprises n’aurait aucun sens. Nous proposons donc de substituer au terme « mondial » le terme « national ».
« Oh ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Il est beaucoup plus simple de se baser sur le chiffre d’affaires.
Pour ce qui est des amendements nos 56 et 24 , les entreprises dont les travaux de recherche aboutissent à des produits commercialisés voient leur chiffre d’affaires augmenter grâce à la vente de ces produits, notamment à l’étranger. Rien ne justifie de ne prendre en compte que le chiffre d’affaires réalisé à l’intérieur de nos frontières. Ces amendements doivent donc être repoussés.
Le protocole de Nagoya impose un partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées. Il ne précise pas si le terme « avantage » correspond au chiffre d’affaires ou au bénéfice net. Par souci de simplicité, et donc pour faciliter l’instruction des dossiers, le Gouvernement estime préférable d’asseoir le calcul sur le chiffre d’affaires du ou des produits développés à partir de la ressource génétique ou connaissance traditionnelle associée, car cet élément est facile à identifier dans les comptes de l’utilisateur. Il serait beaucoup plus délicat d’isoler du bénéfice net la part relevant d’un produit ou d’un procédé découlant de l’usage de ressources génétiques ou de connaissances traditionnelles associées.
Dans l’exposé sommaire de certains des amendements qui viennent d’être présentés, il est fait référence au cas du Brésil. La loi adoptée le 20 mai 2015 dans ce pays impose un partage des avantages égal à 1 % du chiffre d’affaires annuel – en portugais la « receita líquida anual » – sur le produit fini obtenu grâce à l’utilisation d’une ressource génétique brésilienne. À la différence du Brésil, la France impose non pas un pourcentage fixe, mais un plafond ; le pourcentage pourra donc être établi entre 0 et 5 % au cours de la négociation. Elle ne précise pas qu’il s’applique au chiffre d’affaires du produit fini : il pourra ainsi s’appliquer seulement à l’ingrédient cosmétique obtenu à partir d’une ressource génétique française et non au prix du shampooing vendu au consommateur final, par exemple, comme c’est le cas au Brésil. En ce sens, la loi française serait donc plus avantageuse pour les entreprises que la loi brésilienne. Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 608 , 57 , 187 et 748 .
Concernant les amendements nos 56 et 24 , il serait profondément injuste et contre-productif de ne mettre à contribution que les entreprises commercialisant leurs produits en France, car la commercialisation des produits à l’étranger est génératrice de bénéfices pour la société, par exemple pour le secteur de la distribution. L’avis est donc également défavorable : le Gouvernement souhaite s’en tenir au texte initial.
J’essaie d’y voir clair, entre ce qui est dans le texte et ce qu’on vient de nous répondre. Vous nous dites, madame la secrétaire d’État, que certains pays ont décidé de retenir un taux de 1 % du chiffre d’affaires et qu’en France, on n’a pas fixé de taux. Mais si vous reprenez le texte, il bien est spécifié, page 35, que ce pourcentage ne dépasse pas 5 % ! Il y a donc bien un pourcentage fixé.
C’est un plafond !
Et quand on fixe un plafond, on ne l’atteint jamais ? Arrêtons d’innover dans la fabrication de la loi ! Si vous fixez un plafond à 5 %, le prélèvement sera à 5 %.
Et Mme la rapporteure, quant à elle, nous dit qu’on ne connaît pas le bénéfice net… Mais de qui se moque-t-on ?
Si vous connaissez le chiffre d’affaires réalisé sur un produit, vous connaissez nécessairement le bénéfice net, puisque les entreprises sont tenues de déposer leurs comptes annuels au greffe du tribunal de commerce. L’administration fiscale dispose également de ces données. Arrêtez de dire que le chiffre d’affaires serait connu tandis que le bénéfice net ne le serait pas. On ne peut raisonnablement affirmer cela dans un hémicycle, même à une heure tardive, madame la rapporteure.
Ma collègue a parfaitement bien rappelé la situation pour ces données comptables. Je pars du principe qu’un chiffre d’affaires est un chiffre d’affaires et que le pourcentage de 5 %, même s’il constitue un plafond, est beaucoup trop élevé. Ayant été chef d’entreprise dans une vie antérieure, j’ai bien conscience que le bénéfice net tient compte des investissements à court terme, à moyen terme et à long terme, des emprunts, des remboursements et des taux d’intérêt. Il me paraît impossible de contraindre les entreprises à céder 5 % de leur chiffre d’affaires.
Je me demande quel est l’énarque qui a eu cette idée brillante dans les bureaux de Bercy.
L’amendement no 608 n’est pas adopté.
Vous fixez un plafond, mais il serait plus judicieux de fixer un taux ferme, que les entreprises puissent connaître. En effet, si votre plafond est à 5 %, on peut en déduire que le plancher est à 0 %. Comment l’entreprise pourra-t-elle anticiper le montant de ses charges entre ces deux extrêmes ?
En dépit des amendements précédents, la base de calcul reste le chiffre d’affaires. Or, aujourd’hui, le bénéfice net d’une entreprise agroalimentaire avoisine les 5 % – et encore, dans le meilleur des cas. Cela signifie que votre taux va s’appliquer à un chiffre d’affaires qui est vingt fois supérieur au bénéfice ! Imaginez ! Si vous en restez à un taux de 5 %, cela va tuer les entreprises qui travaillent dans l’agroalimentaire. Je propose donc par cet amendement de repli de ramener le taux de 5 % à 1 %.
C’est tout bonnement impossible. Le taux retenu doit permettre au chef d’entreprise de réaliser des investissements.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 188 .
Il faut quand même rester logique. Vous fixez un plafond de 5 %. Si vous fixez aussi un plancher, à 1 % ou 1,5 % par exemple, comment savoir ce qui s’appliquera réellement, entre les deux ? Ce sera arbitraire ! Mais si vous n’inscrivez dans la loi qu’un plafond, alors il sera systématiquement appliqué ; encore faut-il avoir le courage de l’admettre.
Si l’on fixe vraiment le taux à 5 % du chiffre d’affaires, on entame non seulement la marge, mais aussi l’enveloppe de recherche et développement… on compromet le résultat potentiel et l’activité de l’entreprise !
Bref, on affaiblit notre système, ce qui n’était certainement pas l’objectif de votre projet de loi. C’est regrettable. Il y a une incompréhension majeure, et la formulation de l’article 18 doit impérativement être revue. Il faut adopter ces amendements.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 733 .
Je propose de substituer, à l’alinéa 78, le taux de 1 % à celui de 5 %. En effet, établir à 5 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxe la contribution financière versée par les utilisateurs rend absolument inintéressante la seule recherche de molécules et autres principes actifs pour quelque usage que ce soit. Le territoire national, dont les DOM, ne présente pas à lui seul une spécificité suffisante, en raison des voisinages écologiques de fait qu’il entretient, et hormis de très rares cas d’écosystèmes fermés. Dès lors, d’éventuels utilisateurs-explorateurs iront chercher dans d’autres pays de quoi élaborer d’autres familles de produits.
Le taux de 1 % est conforme à l’usage couramment pratiqué dans le monde. Le taux de 5 % a été retenu par l’Australie, qui est une île, certes immense mais non moins une île, dont les spécificités biologiques sont considérables en raison de l’époque à laquelle elle s’est détachée du Gondwana. Par conséquent, l’Australie présente de vraies spécificités, qui sont uniques. Le taux de 5 % peut donc être appliqué, puisque ces ressources présentent un intérêt pour l’explorateur. Notre territoire national ne présente pas de telles spécificités géographiques et écologiques, et est directement en concurrence avec les pays avoisinants. Le taux de 1 % est conforme à l’usage commercial en vigueur dans l’industrie mondiale.
Madame Le Dain, vous nous expliquez que l’Australie peut appliquer un taux de 5 % en raison de spécificités et d’une richesse extraordinaire que nous n’avons pas. Mais je vous rappelle, chère collègue, que nous avons des territoires d’outre-mer, en particulier la Guyane, qui ont aussi des richesses extraordinaires. Je trouve donc cette comparaison particulièrement mauvaise. Pour le reste, il faut lire attentivement le protocole de Nagoya. Tout d’abord, le versement de contributions financières n’est qu’une des façons possibles de partager les avantages, pas la seule. En outre, le montant exact doit être négocié entre l’entreprise et l’État.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Cela ne se fait donc pas du tout de façon arbitraire. La négociation permettra de se mettre d’accord sur un pourcentage du chiffre d’affaires qui en tout état de cause ne pourra excéder 5 %. Bref, si l’on compare ce texte avec la situation des autres pays, on s’aperçoit que nous ne sommes pas si ridicules que cela. Avis défavorable.
Il est défavorable pour les mêmes raisons. Je rappelle aussi que nous parlons du chiffre d’affaires sur un produit et non du chiffre d’affaires global de l’entreprise.
J’invite à mon tour nos collègues à relire les deux paragraphes concernés. Il s’agit en effet du chiffre d’affaires réalisé sur un ou plusieurs produits et non sur tous les produits. D’autre part, le taux de 5 % porte sur l’ensemble de ce chiffre d’affaires, quel que soit le nombre de ressources génétiques. Indépendamment du nombre de ressources génétiques utilisées, la ponction ne pourra pas être supérieure à 5 %.
C’est donc bel et bien un plafond ! Plus le nombre de ressources génétiques utilisées est important, plus il y a de produits et plus le pourcentage augmente, c’est vrai, mais en l’occurrence, il est plafonné.
On voit bien ici la mécanique du raisonnement d’un fonctionnaire de Bercy se demandant comment contourner ces méchantes entreprises qui, au fil de leurs charges et de leurs investissements très bien décrits par notre collègue Cinieri, ne lui laissent plus rien à prendre au bout de l’alambic. C’est simple : s’il n’y a plus rien à prendre à la fin, il faut prendre au départ, sur le chiffre d’affaires, sur la masse initiale ! Comme ça, on évite toute entourloupe, les entreprises ne pourront pas inventer des charges intermédiaires…
Voilà l’esprit de cette mesure. Mais permettez-moi de vous dire, madame la rapporteure, ce que fera un chef d’entreprise confronté à ce que vous êtes en train d’écrire dans la loi. Son modèle économique sera dans l’incapacité, ou presque, de survivre.
Donc il ne survivra pas – ou alors ailleurs, dans un autre pays ! Voilà ce qui va se passer. À vouloir trop gagner, on ne gagne rien.
En fin de compte, nous cherchons à trouver la bonne référence pour calculer cette part. Le chiffre d’affaires, c’est le plus facile car on peut bien différencier le produit et le chiffre d’affaires de l’entreprise. En revanche, il est vraiment difficile d’identifier le bénéfice net d’un produit. Sauf que le bénéfice net, en réalité, est un pourcentage du chiffre d’affaires total, un prorata. On peut retenir un ratio entre les deux qui donne un pourcentage moyen, qu’on peut ramener au produit, et donc prélever une part de ce bénéfice moyen. Ce serait là selon moi une référence relativement juste.
Ce débat est quelque peu surréaliste. À l’instant, Mme la rapporteure disait que l’entreprise allait négocier avec l’État… Chaque chef d’entreprise se rendra-t-il à la direction des finances de son département afin de choisir un taux de 2 %, ou 1 %, en refusant 4 % ? Cela ne peut pas du tout fonctionner ainsi ! Quant à un taux de 5 % du chiffre d’affaires, il ne peut qu’entraîner la délocalisation de nombreuses entreprises. Imaginez une entreprise située à 50 kilomètres d’une frontière avec la Belgique ou l’Allemagne, dans le Grand Est ! Vraiment, c’est faire fausse route.
Il propose d’insérer à l’alinéa 79 les mots « lorsque l’activité ou ses implications participe au maintien, à la conservation, à la gestion, à la fourniture ou à la restauration des services écosystémiques ». La prise en compte par l’utilisateur de ces services doit constituer une alternative au versement d’une contribution financière, d’autant plus que la promotion des services écosystémiques figure au deuxième rang des missions imparties à l’Agence française pour la biodiversité par le projet de loi.
L’amendement no 610 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Cet amendement vise à ne pas pénaliser les entreprises françaises qui se livrent à des recherches en vue d’un développement commercial en utilisant des ressources génétiques couvertes par le nouveau dispositif d’accès et de partage des avantages. Ces ressources se trouvent aussi bien sur le territoire français que dans d’autres pays. Il convient donc de ne pas introduire de distorsion de concurrence entre la recherche en France et la recherche dans d’autres pays dépourvus de dispositifs similaires à l’APA, et notamment de contribution financière.
Il est défavorable, car cet amendement peut poser un problème juridique. Il est en effet à double sens. S’il s’agit d’appliquer le dispositif d’APA à des entreprises françaises sur le territoire d’un autre État, on conviendra que cet amendement est sans objet, la loi française ne pouvant être extraterritoriale. Le dispositif d’APA ne s’applique qu’aux ressources du territoire français. S’il s’agit d’une ressource que l’on peut trouver aussi bien au Brésil qu’en France, l’amendement rendrait toute contribution financière impossible sous prétexte que cette ressource est disponible ailleurs. Or il s’agit d’un choix fait par la France pour ratifier le protocole de Nagoya.
L’amendement no 61 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Le présent amendement propose d’effectuer la répartition des avantages financiers sur une base proportionnelle à la part de la biodiversité ultra-marine en créant les nouveaux outils conciliant écologie et économie et en favorisant les emplois de la croissance verte et bleue. En effet, 80 % de la biodiversité terrestre française et plus de 97 % des espaces marins français sont situés outre-mer. Ce projet de loi demeure néanmoins muet sur la répartition des avantages tirés de l’exploitation de la biodiversité ultramarine.
Si le titre IV du projet de loi met en avant l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages, l’amendement no 840 vise à garantir la redistribution des avantages financiers aux outre-mer. Pourtant soutenue par Mme la ministre, Ségolène Royal, cette mesure a été supprimée en commission par Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d’État, ce qui est d’autant plus choquant que les outre-mer concentrent la plus grande partie de la biodiversité française.
Lorsqu’il s’agit de violences à Marseille, on dépêche des centaines de policiers ! Lors de l’épidémie de Zika, il était si simple de déconseiller aux femmes enceintes de ne pas se rendre aux Antilles ! Cela a fait très mal à notre économie. Et lorsqu’un enseignant prétend avoir été agressé, on voit tout de suite les ministres se déplacer ! Mais l’outre-mer a beau représenter 80 % de la biodiversité française, je constate que la plupart des amendements acceptés au Sénat ont été rejetés en commission.
L’alinéa 81 dispose que l’Agence française pour la biodiversité tient compte de la part importante des outre-mer dans la biodiversité nationale lors de la redistribution des avantages financiers. Ajouter le mot « proportionnel » rend le texte imprécis. Sur quoi se baser pour calculer la proportionnalité ? La commission a préféré maintenir les propos et l’élocution du texte qui nous est revenu du Sénat.
Je demeure attachée à la prise en compte par l’Agence française pour la biodiversité de la part importante de la biodiversité des outre-mer lors du partage des avantages financiers, mais persiste à penser qu’il est impossible de mesurer la proportion exacte de biodiversité des outre-mer afin d’en tenir compte dans le partage des avantages. C’est pourquoi je suis défavorable à votre amendement, monsieur le député.
En vous entendant, mesdames, j’en viens à penser que Mme Ségolène Royal n’a rien à faire à la place qu’elle occupe…
L’amendement no 840 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour soutenir l’amendement no 51 .
L’amendement no 51 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 66 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement no 670 .
Je voudrais dire en préambule que je comprends tout à fait l’agacement dont vient de faire preuve Ary Chalus. On a beau dire et répéter en long, en large et en travers que la biodiversité est riche chez nous, dès qu’il s’agit de prendre des mesures permettant de porter un regard beaucoup plus précis sur la façon dont les choses sont organisées, on a immédiatement l’impression que cela fait peur à tout le monde.
L’amendement que je présente est un amendement de précision. En effet, l’expression « au vu du » procès-verbal est relativement vague et imprécise. Je propose de la remplacer par « conformément au consentement préalable et aux conditions consignés dans le » procès-verbal. Il s’agit de sécuriser le dispositif de consultation des communautés d’habitants.
Je profite de cette occasion pour rappeler les difficultés que nous rencontrons à faire passer des messages auprès de ces populations, depuis des siècles détentrices de savoirs et qui ont toujours le sentiment désagréable de s’en faire déposséder sans pouvoir en tirer les bénéfices qu’elles étaient en droit d’espérer.
Une illustration du problème a été donnée récemment en Guyane, où l’Institut de recherche pour le développement a été accusé de biopiraterie, ce qui a créé un mini-scandale. Tous les jours, ce genre d’événement se produit. Il serait intéressant, indépendamment du principe d’indivisibilité du peuple français, que la représentation nationale soit capable de regarder en face certaines réalités et adopte une démarche pragmatique. Cet amendement ne changera certes pas la face de la République, mais peut nous permettre de dire à ces populations que la France, pour une fois, est capable de les considérer et de répondre à leurs attentes.
Sur le fond, cet amendement ne pose pas de problème particulier puisque de toute façon la personne morale doit rechercher le consentement des communautés d’habitants. Mais avec une telle rédaction, elle serait strictement liée à l’avis des communautés, ce qui revient à accorder à celles-ci un droit de nature collective. Cela va à l’encontre du principe d’indivisibilité du peuple français, ce qui fait peser encore une fois un risque d’inconstitutionnalité. Avis défavorable.
Je serais tenté de reprendre les explications qui ont déjà été données par le passé, mais je ne le ferai pas. Je regrette, encore une fois, qu’à ce niveau-là, on n’ait pas été capable de comprendre le sens de nos interventions.
Mais on a compris !
Nous avons proposé de nombreux amendements. Nous y avons travaillé avec nos collaborateurs, des juristes, des spécialistes, des médecins. Mais je constate que vous seules avez raison, madame la secrétaire d’état, madame la rapporteure… Continuez ainsi ! Mais les choses changent, les gens bougent.
L’amendement no 670 n’est pas adopté.
La formulation introduite par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée nationale contraint l’autorité administrative compétente pour l’accès aux connaissances traditionnelles associées à se conformer strictement aux termes du procès-verbal établi par la personne morale de droit public suite à la consultation des communautés d’habitants.
Or l’autorité administrative compétente doit pouvoir rendre sa décision de manière autonome. Elle peut pour cela être éclairée par les conclusions du procès-verbal, comme cela se pratique en droit français, par exemple dans le cadre des procédures d’autorisation des projets ayant un impact sur l’environnement et qui sont soumis à enquête publique ou à débat public. Comme toute décision administrative, cette dernière est susceptible de recours.
Encore une fois, il y aurait un risque d’inconstitutionnalité à inscrire dans la loi, pour une catégorie de population et non pour l’ensemble du peuple français, le droit collectif consistant à accorder ou à refuser directement à un tiers l’accès à ses connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques.
Ainsi, la procédure prévue à l’article 18 respecte l’esprit du protocole de Nagoya et permettra de protéger efficacement les intérêts des communautés d’habitants, tout en assurant la conformité au principe d’indivisibilité du peuple français.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour soutenir l’amendement no 67 .
Nous essayons de faire tout ce que nous pouvons pour donner satisfaction à nos collègues d’outre-mer, mais lier les mains de l’autorité administrative fait courir un risque d’inconstitutionnalité. Si on oblige l’autorité administrative à décider « conformément au consentement » de la communauté d’habitants, cela signifie que c’est la communauté d’habitants qui prendra la décision de donner ou de refuser l’autorisation. Ce n’est pas pour embêter nos collègues d’outre-mer que nous rejetons cet amendement, mais pour éviter, comme déjà pour l’amendement qui a été adopté tout à l’heure, que l’article qui transpose le protocole de Nagoya ne soit censuré par le Conseil constitutionnel.
Amendement de cohérence. Afin que soit respecté le parallélisme de forme, il faut reprendre la terminologie précédemment retenue : « conformément aux résultats et conditions consignés dans le ». Si cette formule était correcte à l’alinéa 98, je ne comprendrais pas bien qu’elle devienne inconstitutionnelle à l’alinéa 102.
Pour que le consentement préalable et les conditions d’utilisation posées par les communautés d’habitants soient dûment respectés, le contrat doit être conforme au contenu du procès-verbal, et non pas simplement y faire référence. C’est ce que permet cette nouvelle terminologie.
Je crois, madame Auroi, que vous vous trompez d’alinéas. Avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 917 rectifié .
Les détenteurs de collection seront principalement concernés par le titre IV pour leur activité de mise en collection de ressources génétiques, qui devra donner lieu à la procédure de déclaration prévue pour les utilisations sans objectif direct de développement commercial. Cette étape est importante pour assurer une bonne traçabilité des ressources génétiques qui ont été prélevées sur le territoire national.
L’amendement proposé apporte deux précisions sur la procédure de déclaration annuelle simplifiée. Il prévoit le recours à un décret simple plutôt qu’à un décret en Conseil d’État, et englobe l’ensemble des détenteurs de collections scientifiques, et non les seules sociétés savantes.
L’amendement no 917 rectifié , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour soutenir l’amendement no 52 .
L’amendement no 52 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Danielle Auroi, pour soutenir l’amendement no 825 .
Cet amendement porte sur l’extraterritorialité. Lorsque j’avais défendu un amendement similaire en première lecture, vous aviez avancé, madame la rapporteure, qu’une telle disposition créerait une insécurité juridique. Permettez-moi de vous rappeler le droit en la matière. C’est bien le juge français qui est compétent, dès lors que l’on envisage la responsabilité d’une personne morale dont le siège est en France, conformément à l’article 2 du règlement de Bruxelles de 2001, règle maintenue dans le règlement du 12 décembre 2012.
Il n’existe pas de principe de territorialité. Le critère principal est le domicile ou le siège social du défendeur. Il faut alors considérer que l’appréciation de la responsabilité de la maison mère ou du donneur d’ordre, en raison d’un manquement au devoir de vigilance, s’apprécie en fonction de la loi au lieu des décisions. Il est donc bien possible de prévoir des règles visant justement les opérateurs économiques ayant leur siège en France lorsqu’ils agissent à l’étranger. C’est d’ailleurs ce que prévoit la proposition de loi sur le devoir de vigilance, qui sera examinée en deuxième lecture le 23 mars.
En première lecture, Mme Ségolène Royal avait affirmé que j’avais raison de tirer la sonnette d’alarme, estimant qu’à défaut, il faudrait mettre en place un dispositif de traçabilité. « Nous pourrions d’ores et déjà promouvoir les bonnes pratiques et établir un cahier des charges pour assurer la traçabilité des ressources génétiques. La France serait ainsi à l’avant-garde dans la définition des nouvelles méthodes de traçabilité, de transparence et d’application des règles de juste répartition des ressources ». Un tel guide de bonnes pratiques existe d’ailleurs dans le règlement européen.
Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, confirmer cette bonne volonté et prendre devant la représentation nationale l’engagement de mettre en place un tel dispositif ? Cela ferait de la France un pays précurseur dans ce domaine.
Même si l’on souscrit à l’objectif de lutte contre la biopiraterie, qui exige une grande coopération entre États, cet amendement ne semble pas répondre au droit international.
La France, partie au protocole et détenant un droit souverain sur les ressources génétiques de son territoire, a l’obligation de faire respecter le protocole à l’intérieur de ses frontières et a tout pouvoir pour cela. Mais la France ne peut faire respecter le protocole sur le territoire d’un autre État, qu’il soit partie ou non du protocole, même si les utilisateurs sont français. Seul l’État concerné peut réglementer ce qui se passe sur son territoire. Je demande le retrait de cet amendement.
Je partage votre préoccupation concernant l’exemplarité des entreprises françaises à l’international et reprends à mon compte les propos tenus par Ségolène Royal concernant les bonnes pratiques. Le protocole de Nagoya prévoit d’ailleurs une traçabilité. Mais, comme le disait la rapporteure, la France doit respecter le principe d’extraterritorialité, et donc la souveraineté des pays étrangers. Les bonnes pratiques ne seront pas assurées par cet amendement. Avis défavorable.
L’amendement no 825 n’est pas adopté.
L’article 18, amendé, est adopté.
Nous en revenons à l’article 15 bis. Plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme Valérie Lacroute.
Je regrette le rejet en commission de notre amendement visant à maintenir le principe « l’eau douce paie l’eau douce », que les agences de l’eau ont permis de sacraliser en fléchant bien l’argent de l’eau.
Cet article va étendre la redistribution de l’argent de l’eau au-delà du seul périmètre de l’eau douce, aux secteurs marin et ultramarin Ce sont ainsi 75 millions d’euros qui seront prélevés sur le budget des agences pour le fonctionnement de l’AFB. Nul besoin d’être grand mathématicien pour comprendre que ce choix diminuera mécaniquement la quote-part du financement de l’eau douce.
Plus généralement, cet article pose la question du financement de l’alimentation en eau potable et de l’assainissement. Nos communes rurales voient leurs circuits d’eau potable vieillir inexorablement et se demandent bien comment elles financeront leur rénovation ou leur remplacement. Avons-nous réellement les moyens de faire participer les agences de l’eau à d’autres actions ? Permettez-moi d’en douter !
J’espérais que ce texte permettrait de faire la lumière sur ce très grand chantier que constitue la biodiversité. Hélas, je m’aperçois qu’il n’en sort pas grand-chose et je vois la déception, bien compréhensible, de nos collègues ultramarins.
Ce sujet dépasse les chiffres, les normes, ce tissu inextricable de directives : c’est une affaire de relations entre les hommes. Une espèce, finalement, se trouve exclue, reléguée au troisième plan : c’est l’espèce humaine, et cela m’est totalement insupportable.
J’ignore quand nous ouvrirons les yeux et prendrons conscience que nous ne parvenons plus à nous développer, que nos populations ne se sentent plus utiles, sans plus aucun rôle à jouer sur leur territoire. Nous perdons jusqu’aux principes les plus basiques de la démocratie.
Cet amendement maintient le principe historique selon lequel l’eau douce paie l’eau douce, en application de la règle du pollueur-payeur. En effet, cet article inscrit le principe de l’extension du champ d’intervention des agences de l’eau au milieu marin et à la biodiversité terrestre ou marine. Dès lors, les aides financières octroyées par les agences de l’eau pourraient porter sur des actions et travaux relevant « du milieu marin et de la biodiversité terrestre ou marine », ce qui conduirait à réduire les aides financières dévolues à l’eau douce.
Rappelons également que le budget des agences de l’eau a été prélevé, au profit du budget de l’État, de 175 millions d’euros par an – de l’ordre de 10 % du budget des agences – pour 2015, 2016 et 2017, ce qui affectera significativement les capacités d’aide des agences de l’eau et pourrait compromettre la réalisation des objectifs de la directive-cadre sur l’eau.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 315 .
Avis défavorable puisque cet amendement vide de sa substance l’article 15 bis en revenant sur l’extension possible des contributions des agences de l’eau à la protection de la biodiversité terrestre et marine. Rappelons que les agences de l’eau s’y intéressent déjà, ne serait-ce qu’au travers des redevances pour pollutions diffuses, obstacle sur les cours d’eau, rejets en mer. Elles s’intéressent bien à la qualité de l’eau et il est important que ces nouvelles missions soient maintenues.
Cet amendement refuse d’élargir les missions des agences de l’eau à la biodiversité terrestre et au milieu marin, sachant qu’il leur est déjà possible d’intervenir en termes de biodiversité aquatique et de zone humide.
Une telle proposition n’autoriserait pas l’AFB à financer ses missions en faveur de la biodiversité ou du milieu marin à partir de la contribution financière des agences de l’eau, en raison du principe de spécialité de ces établissements publics. Or le Gouvernement considère que le financement de la biodiversité terrestre permet de renforcer la capacité de résilience des milieux, qui bénéficie aussi à la préservation des masses d’eau. De surcroît, le financement des milieux marins est nécessaire à l’atteinte des objectifs fixés par la directive-cadre Stratégie pour le milieu marin.
L’extension du périmètre d’intervention des agences à la biodiversité et au milieu marin ne remet pas en cause les principes fondateurs de la fiscalité des agences de l’eau : « pollueur-payeur » et « l’eau douce paie l’eau douce ». Dans la même logique, plusieurs des redevances perçues par les agences de l’eau sanctionnent des atteintes à la biodiversité comme une pollution diffuse des milieux aquatiques, en particulier aux pesticides. Elles justifient que les agences financent les actions de préservation de la biodiversité.
Enfin, l’élargissement des missions des agences de l’eau à la biodiversité terrestre et au milieu marin permet une complémentarité des interventions des établissements publics de l’État dans les domaines de l’eau et de la biodiversité. Elle se traduit par la mise en place d’organismes collaboratifs entre l’Agence française pour la biodiversité et les collectivités, qui devront tenir compte des missions de l’État, des collectivités, et en particulier des grandes régions chefs de file pour la biodiversité ainsi que des agences de l’eau.
Rappelons enfin que la pollution des milieux marins trouve à 80 % sa source dans le milieu continental, en particulier les fleuves. Je suis par conséquent défavorable à cet amendement.
Les agences de l’eau se sont vu confier par le Sénat la préservation de la biodiversité terrestre et de la biodiversité marine. Or, par le même projet de loi, la biodiversité terrestre devrait pouvoir être confiée aux futures agences régionales de la biodiversité. M. Heinrich complétera mes propos.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 21 .
Nous montons une agence pour la biodiversité sans pour autant lui accorder notre confiance puisque nous élargissons en parallèle le champ de compétence des agences de l’eau à des missions en milieu terrestre !
J’ai bien compris, Mesdames la secrétaire d’État et la rapporteure, que des pollutions diffuses de l’eau peuvent trouver leur origine sur terre mais au moins acceptez cet amendement qui tend à remplacer le terme « terrestre » par « aquatique », plus large en ce qu’il recouvre aussi des situations terrestres, des masses d’eau ou des zones humides, par exemple.
La parole est à M. Michel Heinrich, pour soutenir l’amendement no 193 .
Cet amendement permet de distinguer correctement entre le rôle des agences de l’eau et celui des futures agences régionales de la biodiversité.
Les agences de l’eau mettent en oeuvre les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux – SDAGE – afin de répondre aux objectifs de la directive-cadre sur l’eau. Elles peuvent donc remplir des missions concernant la préservation de la biodiversité, dès lors que ces dernières concernent le milieu aquatique.
Avis défavorable. Le Sénat s’est montré plutôt sage et progressiste en ajoutant le terme « terrestre ». Il est important de pouvoir étendre le champ des missions des agences de l’eau à la biodiversité, qui revêt une importance cruciale.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 969 de la commission.
Le projet de loi prévoit, dans son article 15 bis, d’étendre le champ des aides des agences de l’eau à la biodiversité, ainsi qu’au milieu marin. Or les recettes des agences de l’eau sont constituées de redevances perçues auprès des usagers de l’eau en application du principe de réparation des dommages causés aux ressources en eau et aux milieux aquatiques.
Il convient de compléter ce principe fondateur en l’élargissant aux nouvelles missions et en reconnaissant plus explicitement le principe de redevance pour la réparation des atteintes au milieu marin et à la biodiversité. En effet, certaines de ces redevances portent déjà sur les atteintes à la biodiversité et au milieu marin. Un rapport relatif à l’opportunité de compléter ce dispositif de redevances par d’autres redevances liées à la réparation des atteintes au milieu marin et à la biodiversité serait par ailleurs nécessaire. Les acteurs de la dégradation de ces milieux contribueront ainsi à leur réparation, exonérant l’usager de l’eau de le faire entièrement à leur place.
Cet amendement vise à élargir le champ des redevances des agences de l’eau aux atteintes portées au milieu marin et à la biodiversité, à inscrire ce principe dans le code de l’environnement et à demander la remise d’un rapport au Parlement d’ici le 1er janvier 2017 quant à l’opportunité de créer une ou plusieurs redevances en la matière.
Le Gouvernement a souhaité élargir les missions des agences de l’eau et le champ de leurs aides à la biodiversité et au milieu marin, dans la continuité de leur action en faveur de la biodiversité aquatique, qu’elles financeront. Or, le système des agences de l’eau est fondé sur les principes du « pollueur-payeur » et de « l’eau douce paie l’eau douce ». Plusieurs parlementaires ont rappelé l’importance de ne pas voir ces principes remis en cause par l’élargissement des missions de ces agences. C’est l’objet de cet amendement : reconnaître que les atteintes à l’eau, au milieu marin et à la biodiversité financeraient des actions en faveur de ces milieux.
L’ensemble serait cohérent mais il convient de s’assurer que la pression fiscale ne soit pas accrue par une telle extension du champ des redevances. Nous devrons avoir cette discussion dans le cadre de la loi de finances, et le rapport prévu par cet amendement pourrait éclairer la réflexion. Sagesse.
L’amendement no 969 est adopté.
L’article 15 bis, amendé, est adopté.
La politique est l’art de répéter, paraît-il. Nous passons un temps fou à codifier alors que nous ne savons même pas où nous voulons aller, ce que nous voulons faire.
Je croyais qu’il s’agissait de trouver un équilibre dans la biodiversité pour que l’homme puisse continuer à vivre en harmonie avec la nature, tout en y tenant un rôle majeur puisqu’il l’a aimée au point d’avoir choisi d’y vivre. Je réalise qu’au contraire, tout cela n’a plus de sens, tout se perd dans une cataracte de règlements, de normes auxquelles l’on ne comprend plus rien, d’agences qui succèdent aux agences. La biodiversité n’y gagnera pas, l’homme non plus.
La parole est à Mme Florence Delaunay, pour soutenir l’amendement no 457 .
L’article L. 414-10 du code de l’environnement dispose qu’une fédération nationale regroupe l’ensemble des conservatoires botaniques nationaux. Le projet de loi prévoit, en son article 16, alinéa 24, de supprimer cette disposition. Mon amendement vise à rétablir la reconnaissance législative de la Fédération des conservatoires botaniques nationaux.
Un partenariat renforcé avec l’AFB, à l’image de ce qui se met en place pour les autres têtes de réseaux – FCEN, RNF, FPNR – lui permettra de continuer à mettre en oeuvre ses missions. La fédération fonctionne parfaitement et rend, grâce à ses moyens et son portage politique, de grands services à ses membres. Ses services de conseil et de soutien sont indispensables aux conservatoires botaniques nationaux, par exemple pour passer des statuts de syndicat ou d’association à des établissements publics de coopération environnementale, comme le prévoit ce texte.
J’ai bien noté, madame la secrétaire d’État, que vous étiez favorable à l’existence de la fédération. Tel est l’objet de mon amendement.
Pour me conformer au souci de transparence du président Chanteguet, je peux vous indiquer que j’étais vice-présidente de cette fédération jusqu’en décembre dernier. Je veux, à ce titre, relayer l’inquiétude de tous les présidents de conservatoire à ce sujet. Je demande à l’ensemble de mes collègues de voter cet amendement.
Cet amendement tend à conserver la reconnaissance législative de la fédération des conservatoires botaniques nationaux alors que l’article 16 prévoit de la supprimer compte tenu de l’octroi à l’AFB, par l’article 9 du projet de loi, de la mission d’appui technique, d’animation et de coordination technique des conservatoires botaniques nationaux.
L’AFB doit permettre, par sa taille, et les rapprochements de compétences engendrées, d’améliorer les services actuellement réalisés par la fédération des conservatoires botaniques nationaux. Par conséquent, le maintien de cette reconnaissance par la loi ne semble pas s’imposer. Avis défavorable.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, la présidente demande une mise aux voix par assis et levé. L’amendement no 457 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour soutenir l’amendement no 588 .
L’amendement no 588 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 16, amendé, est adopté.
Article 16
L’article 16 bis est adopté.
Cet article, ainsi que l’article 17 ter, pose la question de la représentation des acteurs au sein des instances de bassin. Parce que ce modèle des agences de bassin fonctionne, parce que de fortes responsabilités leur sont dévolues dans l’élaboration de la politique de l’eau et dans la gestion d’une importante ressource financière pour l’environnement, il est aussi contesté.
Cette contestation émane d’usagers toujours peu enclins à contribuer, redevables de sommes dont la redistribution est pourtant effectuée dans le dialogue des parties prenantes. Certains considèrent aussi que la place de l’État dans le pilotage des agences est faible et que les ressources financières sont insuffisamment maîtrisées : ce sont les adeptes de la « rebudgétisation », dont je ne partage pas le point de vue. Le modèle est également contesté par des représentants d’usagers non professionnels, notamment des consommateurs, au motif qu’ils ne sont pas assez représentés et que l’usager domestique paie la majeure partie des redevances des agences de l’eau sans en recevoir en retour un bénéfice d’aide équivalent.
La Cour des comptes s’en est fait l’écho, jetant du même coup, je le dis comme je le pense, une forme de suspicion sur le bon fonctionnement des instances de bassin.
J’entends bien les positions que soutiendront mes collègues, d’autant que nous en avons déjà parlé en première lecture. La loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006 – je rappelle que j’étais porte-parole de mon groupe lorsqu’elle fut débattue ici même – a donné une véritable représentation aux usagers non professionnels. C’était encore insuffisant, mais le dispositif a été amélioré : c’est le sens de la réforme que l’actuel gouvernement a conduite par décret en 2014, à la suite d’une concertation menée au sein du Comité national de l’eau que je préside. Les usagers non professionnels ont désormais leur vice-président dans chaque comité de bassin et leur niveau de représentation est conforté.
Faut-il à nouveau changer cette représentation ? Je ne partage pas l’idée trop souvent exprimée selon laquelle les instances de bassin seraient des chambres d’enregistrement des lobbies privés, et les collèges des élus – parfois qualifiés, bien injustement, de « clairsemés » – n’assureraient pas la représentation des usagers non économiques. J’invite donc mes collègues parlementaires qui se font le relais de ce discours à constater que les instances de bassin fonctionnent, que les élus y sont bien présents, que, si les représentants des usagers économiques sont certes moins nombreux que ceux des usagers non professionnels, les interventions de chacun sont toujours écoutées avec attention et respect, et enfin que les décisions prises dans le consensus permettent d’atteindre l’objectif d’amélioration de l’état des eaux et des milieux.
L’article 17 est adopté.
Article 17
L’article 17 bis est adopté.
Mes chers collègues, à ceux qui s’émeuvent sur Twitter que la présidence impose une procédure de vote par assis et levé à une heure du matin, j’indique que je souhaitais juste être certaine du vote en m’assurant de l’expression sans ambiguïté du choix de chaque parlementaire.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
discussion, en procédure d’examen simplifié, de dix projets de loi autorisant l’approbation de conventions et accords internationaux ;
discussion du projet de loi habilitant le Gouvernement à légiférer pour simplifier et rationaliser l’organisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction et la distribution des emplois de cette participation ;
suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 17 mars 2016, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly