La commission poursuit l'examen du projet de loi pour la croissance et l'activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques).
Article 28 (suite)
La commission examine les amendements identiques SPE243 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE1423 de M. Denis Baupin.
Cet amendement, homologue de celui que j'ai présenté sur les alinéas 2 à 7, tend à supprimer les alinéas 8 à 12. Il traduit le même sentiment de frustration face au recours à une ordonnance qui affaiblit le rôle du Parlement. Mais, à la réflexion, la procédure par ordonnance n'est-elle pas plutôt une façon d'intégrer le Parlement dans le réglementaire ou de l'exclure du législatif ? Compte tenu des explications du ministre et de nos débats de ce matin, je serais désormais plus enclin à retenir l'option positive et à y voir une forme d'intégration du Parlement dans un domaine réglementaire dont il est d'habitude totalement exclu. C'est pourquoi je retire l'amendement.
L'amendement SPE243 est retiré.
Les alinéas 8 et 9 proposent de simplifier les règles applicables à l'évaluation environnementale des projets. C'est dire la largeur et le flou de l'habilitation demandée à notre assemblée. Qu'est-ce qui va être simplifié ? Les procédures d'enquête publique, les études d'impact, les règles du débat public lui-même ? Certains peuvent considérer que le Parlement est davantage associé ; pour ma part, je n'en suis pas convaincu. Du reste, l'alinéa 12 – « En assurant la conformité au droit de l'Union européenne et en transposant la directive 201192UE dans sa rédaction résultant de la directive 201452UE » – donne, au contraire, l'impression que la procédure qui nous est proposée ignore totalement l'importance du droit de l'environnement dans sa démarche même. Les alinéas 8 à 12 doivent donc être supprimés.
Monsieur Vitel, je vous remercie de vous montrer sensible à l'esprit qui règne dans nos débats depuis ce matin. Je veux ici vous conforter dans votre opinion tout en répondant aux préoccupations de M. Roumegas.
Ces dispositions visent à mieux coordonner les études d'impact environnementales existantes. En tant qu'élus locaux, vous savez d'expérience la complexité de l'articulation de ces études d'impact environnementales : les mêmes études ou des études redondantes sont parfois réalisées à chaque niveau et pour chaque document d'urbanisme. Quant aux directives visées dans l'alinéa que vous avez mentionné, elles concernent précisément les études d'impact environnementales.
L'objectif de ce texte est de permettre une meilleure coordination de ces études sans en diminuer le fond ou l'ambition. Comme nous l'avons vu avec l'articulation entre les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et les unités touristiques nouvelles (UTN), il s'agit de rendre le dispositif plus simple et plus efficace. C'est pourquoi je vous invite, vous aussi, à retirer votre amendement.
Je suis ravi que Philippe Vitel ait été convaincu par nos engagements et ceux du Gouvernement, que M. le ministre vient de réaffirmer avec force. Ce sont des alinéas de bon sens. Ainsi, le b du 2° vise à améliorer l'articulation entre les évaluations environnementales, notamment pour les programmes d'intérêt local (PIL) qui avaient d'ailleurs fait l'objet d'une ordonnance d'un gouvernement précédent et que nous avons pu soutenir.
Alors que certaines opérations d'ampleur nécessitent jusqu'à trois enquêtes environnementales successives, nous voulons faire en sorte qu'il n'y ait qu'une seule enquête globale. Tant pour les décideurs publics que pour nos concitoyens, il est important d'avoir une vision globale et non pas un « saucissonnage » du projet. Quant à l'alinéa 12, il propose très classiquement de transposer par ordonnance une directive européenne.
Je voudrais donc une nouvelle fois rassurer nos collègues du groupe écologiste sur notre volonté politique, même si le principe même de l'ordonnance présente un risque et que nous devons veiller à ce que la discussion se passe de la meilleure façon.
Le ministre et le rapporteur thématique ont répondu sur le b, c'est-à-dire sur l'articulation entre les évaluations environnementales sur laquelle, nous en convenons, il y a des améliorations à apporter. En revanche, le flou reste total sur le a, qui prévoit de simplifier les évaluations environnementales elles-mêmes, et sur le c. Dans quel sens voulez-vous modifier les attributions des autorités environnementales ? Vous n'avez apporté aucune réponse à cette question.
La commission rejette l'amendement SPE1423.
Puis elle examine l'amendement SPE544 des rapporteurs.
Cet amendement propose d'insérer les mots : « de construction et d'aménagement » après le mot : « programmes » afin de préciser qu'il s'agit d'interventions dans les champs de la construction et de l'aménagement.
La commission adopte l'amendement SPE544.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette successivement les amendements SPE1453, SPE1454 et SPE1455 de M. Denis Baupin.
Puis elle examine l'amendement SPE1342 de M. Denis Baupin.
Le Gouvernement serait-il prêt à apporter une réponse sur ce point particulier d'une question que nous avons déjà abordée à une autre occasion ?
Je vais vous répondre, comme ce matin, que votre amendement est satisfait par les procédures de participation du public qui seront mises en oeuvre, l'article 7 de la Charte de l'environnement et l'article L. 120-1 du code de l'environnement n'ayant pas changé dans l'intervalle.
L'amendement SPE1342 est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette l'amendement SPE1341 de M. Denis Baupin.
L'amendement SPE1340 de M. Denis Baupin est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette les amendements SPE1446 et SPE1445 de M. Denis Baupin.
Elle adopte l'amendement rédactionnel SPE545 des rapporteurs.
Puis elle en vient à l'amendement SPE1381 de Mme Michèle Bonneton.
Cet amendement propose de compléter l'alinéa 11 par les mots : « et de renforcer leur indépendance ».
Il me semble que cet objectif est rempli par la rédaction actuelle de l'alinéa 12. Le Gouvernement partage l'objectif d'accroître l'autonomie fonctionnelle et organisationnelle des autorités environnementales exerçant notamment à l'échelon local, conformément au principe dégagé par la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne. Pour autant, il n'entend pas créer une autorité indépendante.
L'indépendance est bien évidemment garantie par les textes, mais la nature indépendante de l'autorité ferait prendre un risque à la légitimité de la décision de l'exécutif comme du législatif.
L'indépendance doit s'entendre par rapport au maître d'ouvrage et à l'autorité décisionnaire, de façon à permettre la transparence nécessaire à tout débat public.
La commission rejette l'amendement SPE1381.
Elle adopte l'amendement rédactionnel SPE546 des rapporteurs.
Puis elle examine les amendements identiques SPE244 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE1424 de M. Denis Baupin, ainsi que l'amendement SPE1560 du Gouvernement.
L'amendement SPE244 est dans le même esprit que de deux précédents amendements. J'entends ce que disent nos collègues du groupe écologiste mais je crois, du fond du coeur, que la simplification est compatible avec le respect de l'environnement. C'est notre challenge et notre devoir. Que ce soit sous cette législature ou sous la précédente, nous avons tois montré notre attachement au développement durable et au respect de la nature et de l'environnement, au point de l'inscrire dans la Constitution. Je fais confiance au ministre pour qu'il aille au bout de ses intentions et de ce qu'il a écrit dans ce courrier. Je retire cet amendement.
En principe, vous avez raison, la simplification n'est pas forcément synonyme de baisse d'exigence en matière d'environnement. Cependant, nous ne sommes pas encore persuadés que l'objectif du Gouvernement soit uniquement la simplification, car de nombreux contentieux sont en cours. Je ne peux que souligner le flou des objectifs en termes de révision de la participation du public à toutes les procédures environnementales en général.
J'insiste aussi sur le caractère contradictoire de cet article avec les déclarations du Président de la République lors de la conférence environnementale : il nous a promis une écologie citoyenne et a engagé une réflexion censée aboutir à une réforme des règles de participation. Il s'agit précisément d'éviter les conflits par défaut de participation en amont. Nous ne comprenons pas : d'un côté, on s'engage dans une réflexion qui devrait aboutir en juin et, de l'autre, on demande une habilitation pour procéder par ordonnance à cette simplification dès maintenant. Cela ne nous semble pas très clair.
Je remercie une nouvelle fois M. Vitel de sa confiance et j'y vois le résultat concret des discussions que nous avons depuis ce matin. Monsieur Roumegas, je comprends que vous soyez gêné par la rédaction initialement proposée par le Gouvernement des alinéas visés par votre amendement de suppression.
Sensible à ce point, le Gouvernement a déposé l'amendement SPE1560, que je vais vous présenter sans attendre. La formulation initiale présentait effectivement quelques ambiguïtés. Ensuite, vous l'avez relevé, le Président de la République a pris des engagements lors de la conférence environnementale du 27 novembre. Le Gouvernement souhaite en tirer toutes les conclusions, en reprenant la philosophie et parfois même les termes du Président de la République. C'est pourquoi nous allons vous proposer de rédiger ainsi le 3° de l'article 28 : « Réformer les procédures destinées à assurer la participation du public à l'élaboration de certains projets d'aménagement et d'équipement, afin de les moderniser et de les simplifier, de mieux garantir leur conformité aux exigences constitutionnelles ainsi que leur adaptabilité aux différents projets, de faire en sorte que le processus d'élaboration des projets soit plus transparent et l'effectivité de la participation du public à cette élaboration mieux assurée. »
Le fait de « mieux garantir leur conformité aux exigences constitutionnelles » est une acception large, qui couvre en particulier la Charte de l'environnement, à laquelle nous avons fait plusieurs fois référence ce matin, et qui fixe bien le cadre dans lequel nous serions habilités à prendre ces ordonnances.
À travers cette demande d'habilitation, le Gouvernement souhaite rendre ces procédures à la fois plus démocratiques et plus efficaces. Avec cet amendement, nous répondons à votre demande de mettre en cohérence le texte avec les déclarations du Président de la République. Dans la mesure où votre amendement sera de facto satisfait par celui du Gouvernement, je vous invite à le retirer.
Je suis très favorable à cet amendement du Gouvernement. L'inquiétude exprimée par Jean-Louis Roumegas est parfaitement légitime, surtout dans le contexte actuel où la réforme du débat public, sous toutes ses formes, est nécessaire : l'enquête publique traditionnelle n'apporte par les résultats escomptés en matière de transparence et d'effectivité de la participation.
Le texte initial n'était pas en contradiction avec les propos du Président de la République, mais cet amendement précise très clairement l'objectif : renforcer le débat public sous toutes ces formes, y compris les plus modernes, afin d'associer les femmes et les hommes qui sont concernés par un sujet. Cela va dans le bon sens. Sur la base de cet amendement, nous pouvons accorder notre confiance au Gouvernement, même si nous veillerons à ce qu'il atteigne ses objectifs, que ce soit pendant le débat qui devra aboutir d'ici à juin ou lors de la mise en oeuvre par ordonnance de ses décisions.
Cet amendement gouvernemental est intéressant du point de vue des idées générales et manifeste beaucoup de bonnes intentions, mais il ne contient rien sur les moyens mis en oeuvre. Sera-t-il possible de faire appel à des experts indépendants ? La participation du public interviendra-t-elle à un moment précis ou tout au long de l'élaboration des projets ? On reste malheureusement dans le domaine des généralités.
Aller plus loin dans le détail serait une forme d'injonction au Gouvernement. Les réponses précises que vous attendez ne peuvent pas être dans l'habilitation mais dans l'ordonnance elle-même. Si tout est écrit dans l'habilitation, il ne peut plus y avoir de méthode de concertation pour élaborer ensuite le détail de l'ordonnance. Je rappelle que nous ne parlons pas aujourd'hui de l'ordonnance, mais du texte d'habilitation.
Ce matin, j'avais proposé une méthode qui pourrait de nouveau être utile ici, afin de lever les ambiguïtés et de rassurer nos collègues écologistes. Pour pouvoir avancer, il faut que nous nous fassions mutuellement confiance. Comme le rapporteur thématique l'a rappelé ce matin, nous aurons des moyens pour peser ; nous aurons aussi l'occasion de manifester notre désaccord au moment des discussions dans l'hémicycle sur la ratification de la loi d'habilitation. Il y a une méthodologie, ce ne sont pas des mots creux, et les engagements du ministre figurent dans les comptes rendus.
L'amendement SPE244 est retiré.
La commission rejette l'amendement SPE1424.
Puis elle adopte l'amendement SPE1560 du Gouvernement.
En conséquence, les amendements SPE929, SPE1382, SPE547, SPE1452, SPE1345, SPE1444, SPE1344, SPE1343 et SPE951 tombent.
La commission adopte l'amendement de forme SPE549 des rapporteurs.
Puis elle examine l'amendement SPE1451 rectifié de M. Denis Baupin.
Suivant l'avis défavorable du Gouvernement et du rapporteur thématique, la commission rejette l'amendement SPE1451 rectifié.
L'amendement SPE1348 rectifié de M. Denis Baupin est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette les amendements SPE1347 rectifié et SPE1346 rectifié de M. Denis Baupin.
Puis elle examine l'amendement SPE1442 de M. Denis Baupin.
Cet amendement propose de préciser la nécessité d'une information complète des participants au débat public en présentant non seulement le projet soumis au débat, mais également les alternatives existantes.
C'est un point souvent évoqué par les défenseurs de l'environnement mais aussi dans la jurisprudence et dans les enquêtes publiques. Les commissaires enquêteurs donnent souvent des avis défavorables quand les alternatives ne sont pas présentées de façon équivalente au projet. Cette mesure ferait gagner du temps.
En ce qui concerne la présentation des projets au public, il me semble que la demande est satisfaite : il n'existe aucun dispositif de participation qui ne prévoie que le projet ne soit transmis au public.
S'agissant des solutions alternatives, cet amendement sera satisfait par le b du 3° du I, et non par le c. Le c vise en effet le droit des enquêtes publiques qui interviennent en fin de processus décisionnel, à un stade où le public doit participer au sujet des modalités de mise en oeuvre. Les discussions sur les solutions alternatives à un projet donné doivent se tenir en amont des procédures, à un stade où toutes les options sont encore possibles – y compris l'« option zéro ».
De plus, certains projets comme les lignes de transport d'électricité ne disposent que d'alternatives limitées et, dans certains cas, la liberté d'entreprendre et la maîtrise foncière sont difficilement conciliables avec l'examen exhaustif de toutes les solutions alternatives.
L'examen des solutions alternatives doit être développé chaque fois qu'il est possible et pertinent. L'objectif est bien de le faire, mais au bon moment de la procédure. Il me semble que la rédaction du b du 3° du I couvre le point que vous cherchez à mettre en oeuvre. En tout cas, l'intention du Gouvernement est de prendre en compte les solutions alternatives à ce stade. Considérant que votre amendement est satisfait, je vous invite donc à le retirer.
Après relecture de l'alinéa en question, je trouve que ce n'est pas du tout explicite. À notre sens, les alternatives – quand elles existent – doivent être présentées au public au cours de la phase de concertation, mais aussi dans les dossiers d'enquête publique. Dans les cas auxquels je faisais allusion, les commissaires enquêteurs signalent leur absence du dossier d'enquête publique, c'est-à-dire quand le choix d'une solution a déjà été fait. Il faut qu'elles soient présentes à tous les niveaux, y compris au stade de l'enquête publique.
Si la démarche est bonne, saine et nécessaire à la qualité du débat public, la formalisation proposée va trop loin : elle exposerait à la multiplication de contentieux, occasionnerait des coûts et des délais supplémentaires. Il sera en effet toujours possible à un requérant, éventuellement de mauvaise foi, de prétendre que telle ou telle option n'a pas été suffisamment étudiée ou qu'elle a été indûment écartée. En retenant une définition aussi large, nous prendrions le risque qu'il y ait toujours une alternative à celles qui seraient présentées. Il faut faire en sorte que les alternatives – qui sont une base de travail avant les décisions – soient présentées le plus largement possible, mais votre formulation nous exposerait à un risque juridique. Sachant que le nombre de recours est très significatif, il faut garder l'esprit de votre proposition, ne pas la retenir sous cette forme et veiller à ce que le Gouvernement intègre bien votre objectif.
Une exigence d'exhaustivité – impossible à satisfaire – fragiliserait en effet la procédure. On ne saurait imposer le même degré de précision pour l'exposé des alternatives que pour le projet lui-même, mais cela n'enlève rien à la nécessité de les présenter au public en amont – et non lorsque le projet est déjà bouclé.
À titre d'exemple, le maître d'ouvrage responsable du dédoublement de l'autoroute au niveau de Montpellier avait été renvoyé à ses études parce qu'il n'avait pas présenté d'alternatives jugées sérieuses. Il est vrai que l'avis défavorable unanime de la commission d'enquête n'avait pas empêché le Gouvernement de l'époque de déclarer le projet d'utilité publique...
J'entends la remarque relative au caractère exhaustif des alternatives ; peut-on s'entendre, d'ici la séance, sur une formulation telle que « les projets et le cas échéant les alternatives existantes » ?
La commission rejette l'amendement SPE1442.
Elle est saisie de l'amendement SPE1443 de M. Denis Baupin.
Défavorable. Cet amendement est satisfait par le même article du code de l'environnement, qui prévoit le recours aux nouvelles technologies pour les consultations.
L'amendement SPE1443 est retiré.
La commission en vient à l'amendement SPE1383 de M. Jean-Louis Roumegas.
Cet amendement vise à mettre l'alinéa 16 de l'article 28 en conformité avec la convention d'Aarhus – peu connue, mais ratifiée par la France –, qui prévoit la participation du public à l'élaboration des plans et des programmes relatifs à l'environnement.
Défavorable. Le Gouvernement partage les objectifs de la convention d'Aarhus, mais le c du 3° du I ici visé l'autorise uniquement à améliorer par ordonnances le droit des enquêtes publiques. Les objectifs de l'amendement seront en revanche atteints aux termes du b du 3e du I, qui permettra de consulter le public sur l'opportunité d'un projet – et les solutions alternatives – à un stade où il est encore possible de le remettre en cause. Cette disposition fait suite aux propos du Président de la République lors de la conférence environnementale : « Un mauvais projet doit être arrêté rapidement, sans qu'il puisse durer inutilement et provoquer. »
Il s'agit d'un amendement d'appel sur un sujet important ; la réponse du Gouvernement montre qu'il a été entendu.
Nous proposons de préciser que la participation du public doit commencer au début de la procédure, le plus en amont possible. Or, sur ce point, le b du 3e du I – même modifié par l'amendement du Gouvernement – ne fournit aucune garantie. Pourtant plus on associe le public tôt, plus on gagne du temps ensuite.
Monsieur Roumegas, l'article 7 de la Charte de l'environnement, dont il a été question ce matin, ainsi que la loi de décembre 2012 qui en a découlé portent sur la transposition en droit interne de la convention d'Aarhus. Ces sujets sont donc bien pris en compte.
Dans notre démocratie, la participation du public commence au moment des élections municipales !
La commission rejette l'amendement SPE1383.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, elle rejette l'amendement SPE1441 de M. Denis Baupin.
La commission adopte l'amendement de clarification SPE553 des rapporteurs.
Elle est saisie de l'amendement SPE1167 de M. Francis Vercamer.
Cet amendement tend à simplifier les procédures lorsqu'un projet nécessite plusieurs enquêtes publiques, afin de regrouper celles-ci au lieu de les juxtaposer.
Votre amendement est satisfait.
L'amendement SPE1167 est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette successivement les amendements SPE1450, SPE1351, SPE1439 et SPE1350 de M. Denis Baupin.
L'amendement SPE1349 de M. Denis Baupin est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette l'amendement SPE1440 de M. Denis Baupin.
Puis elle examine l'amendement SPE1384 de M. Jean-Louis Roumegas.
Nous proposons, sans pour autant en généraliser le principe, de permettre une contre-expertise dans des dossiers complexes qui font face à des oppositions fortes et à des propositions alternatives. Dans le cas du barrage de Sivens, par exemple, cette possibilité aurait permis au projet d'évoluer en amont, évitant ainsi les crispations.
Les travaux sur la démocratie participative qui s'engagent aujourd'hui dans le cadre du Conseil national de la transition écologique (CNTE), conformément à la décision du Président de la République annoncée lors de la dernière conférence environnementale, devraient permettre de déterminer dans quelles conditions l'on peut et l'on doit faire appel à une contre-expertise, parfois effectivement très utile. Cette question a été longuement discutée dans le cadre du groupe de travail « Participation du public » issu du chantier de la modernisation du droit de l'environnement, mais à ce stade, le débat n'a pas permis de dégager un consensus. Au nom des principes mêmes de la démocratie participative, vous devriez donc retirer votre amendement ; le Gouvernement est sensible au problème que vous soulevez et en tiendra compte.
Le principe et l'intérêt de la contre-expertise sont admis par tous, seules les conditions et les modalités de sa mise en oeuvre font l'objet de désaccords. Or, l'amendement n'énonce justement qu'un principe : attention donc, monsieur le ministre, à ne pas passer de la philosophie au sophisme...
Défavorable. Rien n'empêche aujourd'hui une collectivité territoriale ou un établissement public de demander une tierce expertise ; il n'est donc pas nécessaire d'en faire une déclaration de principe. Si l'on adoptait cet amendement, se poserait la question de savoir comment l'instance compétente procédera au choix de la contre-expertise, ce problème juridique risquant de complexifier, d'allonger et de rendre plus chère une procédure actuellement simple.
La commission rejette l'amendement SPE1384.
Elle étudie l'amendement SPE1385 de Mme Michèle Bonneton.
Cet amendement vise à instaurer un système d'agrément des personnes chargées des évaluations environnementales. D'une part, ce sont les porteurs de projets qui choisissent et rémunèrent les bureaux d'études, ce qui rend l'indépendance des conclusions incertaine ; d'autre part, la qualité du travail est parfois insuffisante. Ces deux éléments sont sources de contentieux qui retardent l'élaboration des projets. Tout le monde gagnerait à ce que les personnes en charge des évaluations environnementales aient des formations sérieuses et de l'expérience.
Madame Bonneton, monsieur Roumegas, je crois avoir évité le sophisme ; j'ai surtout fait preuve de stoïcisme depuis ce matin !
La qualité des études d'impact environnementales et l'idée d'un éventuel agrément des bureaux d'étude constituent un vrai sujet de préoccupation qui a fait l'objet d'un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Les travaux conduits dans le cadre de la modernisation du droit de l'environnement l'ont également abordé. Dans le compte rendu de la séance du CNTE du 6 janvier 2014, le président du groupe de travail concerné estime qu'un agrément ne semble pas à ce stade opportun et qu'il serait plus approprié d'instaurer une charte permettant de garantir les compétences et l'objectivité des études environnementales. En outre – ce qui montre la cohérence de la démarche du Gouvernement – la modification apportée à la directive 201452UE relative aux études d'impact impose désormais aux maîtres d'ouvrage de s'assurer que « le rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement est préparé par des experts compétents ». En somme, il s'agit d'un sujet bien analysé, auquel les dernières modifications législatives et les transpositions en cours ont imprimé des avancées significatives. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
L'amendement soulève une bonne question, mais il faudrait préciser quelle instance délivrerait cet agrément, selon quelles modalités, sur quelle base et avec quel coût. S'il était retiré et réécrit, je serais prêt à le défendre en séance publique.
N'oublions pas la question de la déontologie et des conflits d'intérêts : les experts sur les sujets pointus étant rares, ils se retrouvent souvent à conseiller différents acteurs, y compris en cas de contentieux. Il faudrait donc élargir le champ de la réflexion pour interdire – à l'instar de ce qui se pratique chez les avocats – d'expertiser un projet si l'on est par ailleurs lié à l'une des parties. Cela donnerait de la crédibilité à l'expertise et de l'assurance aux porteurs de projets comme à ceux qui viendraient les contester.
Je remercie le ministre et le rapporteur thématique pour leur esprit d'ouverture. Nous proposerons un nouvel amendement en séance.
L'amendement SPE1385 est retiré.
La commission est saisie des amendements identiques SPE245 de M. Jean-Frédéric Poisson, SPE1251 de M. Joël Giraud et SPE1425 de M. Denis Baupin.
À vouloir toujours mieux faire, on complique les textes jusqu'à les rendre incompréhensibles, ce qui nous oblige ensuite à les simplifier. À l'avenir, efforçons-nous de les rédiger d'emblée de la manière la plus simple et la plus claire possible. L'opinion publique nous en saura gré. En attendant, je retire l'amendement SPE245.
Après avoir restreint les possibilités d'action des défenseurs de l'environnement, le Gouvernement, tout à sa volonté d'aller plus vite, souhaite désormais accélérer les procédures en cas de contentieux. La méthode de l'ordonnance ne nous paraît pas appropriée : les mesures envisagées – dont la capacité à permettre une meilleure préservation de l'environnement nous laisse sceptiques – méritent un débat parlementaire. D'où la suppression proposée de l'alinéa 17.
Défavorable. L'alinéa 17 vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances des dispositions de nature législative qui reprendront les recommandations formulées par le groupe de travail sur la modernisation du droit de l'environnement portant sur le contentieux administratif en matière environnementale. La lettre de mission adressée à sa présidente – Mme Delphine Hédary, conseillère d'État – lui demande de proposer des mesures qui, dans le respect de l'accès au juge et tout en assurant un haut niveau de protection de l'environnement, seront de nature à renforcer la lisibilité et la cohérence des règles, et à accélérer les procédures contentieuses. Il faut en particulier harmoniser les délais de recours, aujourd'hui extrêmement hétérogènes, et mieux articuler les différentes procédures entre elles. L'objectif du Gouvernement, constamment réitéré, est d'accélérer et de simplifier sans remettre en cause la priorité environnementale. Je prends devant vous l'engagement solennel de transcrire, dans les ordonnances, les propositions du groupe de travail de Mme Hédary. Dommage qu'après tant d'heures de débat, vous ne nous fassiez toujours pas confiance !
La confiance se construit, monsieur le ministre. Vous nous avez donné des assurances : traduisez-les dans les actes en les gravant dans la loi !
N'ayant pas été élu local, vous ignorez peut-être que les responsables sur le terrain sont encore trop nombreux à ne pas avoir compris que l'on pouvait à la fois protéger l'environnement, développer l'économie et créer de nouveaux emplois. Ils rendent les exigences environnementales responsables de beaucoup de maux, alors que le plus souvent, la protection de l'environnement représente la solution et non le problème.
L'amendement SPE245 est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette les amendements SPE1251 et SPE1425.
L'amendement SPE1449 rectifié de M. Denis Baupin est retiré.
La commission rejette successivement les amendements SPE1448 rectifié et SPE1437 de M. Denis Baupin.
Puis elle étudie l'amendement SPE1438 de M. Denis Baupin.
Votre texte, monsieur le ministre, se concentre sur les bénéficiaires des projets, qui pourraient être lésés par un abus du recours au droit de l'environnement. Nous proposons, pour notre part, d'y réintroduire les victimes des atteintes à l'environnement.
On ne peut pas s'opposer à l'idée de prendre en compte les victimes, mais leurs droits sont déjà couverts par d'autres dispositions : il serait donc superfétatoire de les mentionner ici. L'alinéa 17 cherche à combler le besoin de sécurité juridique en matière de contentieux, exprimé par les porteurs de projets, mais nous n'avons pas l'intention de revenir sur le droit des tiers et des victimes potentielles. L'objectif prioritaire de préservation de l'environnement – expressément mentionné par l'habilitation – permet de faire obstacle à toute mesure qui remettrait en cause le principe du plein accès au juge en matière environnementale. Consacré par le droit européen et international, ce principe à valeur constitutionnelle est conforté par les premières conclusions du groupe de travail présidé par Mme Hédary, notamment pour les associations environnementales. Votre amendement est donc satisfait.
Je comprends ces arguments de droit ; nous voulions simplement souligner que votre projet de loi se concentrait surtout sur les porteurs de projets.
L'amendement SPE1438 est retiré.
La commission est saisie de l'amendement SPE1386 de M. Jean-Louis Roumegas.
Si le ministre veut suspendre les recours et les actions des défenseurs de l'environnement, nous souhaitons pour notre part – conformément aux annonces du Président de la République – renforcer les possibilités de suspension des travaux en cas de doute sur leur légalité. Dans les cas simples, il faut aller vite ; mais parfois, il faut prendre le temps nécessaire, voire suspendre les projets de façon à ne pas atteindre un point de non-retour où les travaux seront effectués – d'autant qu'une disposition du projet de loi consacrera l'impossibilité de démolir les constructions illégales !
Ce n'est pas ce qui a été évoqué ce matin ! Ne laissons pas dire que ce texte entérine l'impossibilité de démolir ; c'est le positionnement du tribunal qui doit faire appliquer sa décision.
Merci, monsieur le président, d'avoir restauré l'exactitude de notre débat de ce matin.
L'habilitation permet déjà au Gouvernement de prendre des dispositions relatives à la suspension des décisions – sujet traité par ailleurs dans le cadre du groupe de travail sur la modernisation du droit de l'environnement, consacré au contentieux administratif en matière environnementale. Votre préoccupation est donc prise en compte, conformément aux engagements du Président de la République. Par ailleurs, le droit commun du référé suspension ne sera pas modifié ; les procédures ne pourront être revisitées, de manière encadrée, qu'en cas d'annulation ou de refus. Avis défavorable.
Défavorable. Bien évidemment, la procédure de référé devant le juge administratif permettra toujours la suspension ou des mesures conservatoires – solutions provisoires assurément nécessaires. À l'inverse, l'amendement proposé fait courir le risque de voir se multiplier les contentieux, notamment dans le domaine de la transition énergétique qui nous tient tous à coeur.
Contrairement à ce que vous proclamez, votre conception de la simplification est à sens unique : c'est toujours pour limiter les recours contre les projets, jamais pour préserver l'environnement. Suivant les propos du Président de la République lors de la conférence environnementale, nous souhaitons une simplification dans les deux sens. Certes, il faut parfois pouvoir aller vite et limiter les recours abusifs ; mais inversement, dans certains cas, il faut renforcer la protection de l'environnement. Ainsi, s'il ne faut pas l'utiliser en permanence, la suspension des travaux est-elle parfois nécessaire pour éviter les contentieux ultérieurs.
Pour avoir lancé, en une dizaine d'années, une quinzaine de zones d'aménagement concerté (ZAC) sur mon territoire, j'ai mesuré à quel point les considérations environnementales viennent, au sens physique du terme, alourdir les procédures. Les éléments relatifs à l'environnement représentent entre les deux tiers et les trois quarts des analyses à effectuer en vue de la déclaration d'utilité publique d'une opération. On s'intéresse à l'impact du projet sur la qualité de l'air, l'environnement sonore, et jusqu'à la biodiversité – qui impose désormais d'attendre quatre saisons pour confirmer l'innocuité d'une construction. Les réponses à toutes ces questions pertinentes occupent une bonne partie des 1 500 à 2 000 pages rédigées par nos services et tous les bureaux d'étude auxquels nous faisons appel pour lancer une opération de logement. En cas de contestation et de recours, les points soulevés par les associations de requérants ont pour la plupart été déjà analysés et la réponse scientifique a déjà été apportée – une réponse d'ailleurs souvent favorable au projet, ce qui peut déplaire aux requérants. Tous ces éléments finissent par être pesants ; dès lors que la procédure de référé et le recours au juge administratif sont garantis, le texte va dans le bon sens.
Chacun pourrait y aller de son histoire... J'ai souvenir du projet d'une aire de grand passage pour les gens du voyage où l'on a eu beau jeu d'invoquer l'environnement pour en empêcher la réalisation !
La commission rejette l'amendement SPE1386.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, elle rejette l'amendement SPE1447 de M. Denis Baupin.
Les amendements SPE1354, SPE1353 et SPE1352 de M. Denis Baupin sont retirés.
Personne n'a jamais pensé cela, monsieur Roumegas. La confrontation n'est pas l'obstruction.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels SPE556 et SPE560 des rapporteurs.
Elle est saisie de l'amendement SPE1575 rectifié des rapporteurs.
Il s'agit d'associer dans les meilleures conditions le CNTE à la réflexion du Gouvernement.
La commission adopte l'amendement SPE1575 rect.
La commission adopte l'article 28 modifié.
Article 29 : Sécurisation des projets de construction
La commission aborde l'amendement SPE1387 de Mme Michèle Bonneton.
L'article 29 remet en cause l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, modifié par une ordonnance de 2005. Aux termes des dispositions proposées, les bâtiments construits illégalement, dont le permis aura été annulé par la juridiction compétente, ne pourront plus faire l'objet de démolition sauf dans certaines zones protégées : les rives des plans d'eau, les espaces caractéristiques du patrimoine naturel et culturel, le coeur des parcs nationaux, les réserves naturelles, les sites désignés Natura 2000 et les zones figurant dans les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) ou naturels. Sur une très grande partie du territoire – y compris dans les parcs naturels régionaux et les aires d'adhésion des parcs naturels nationaux –, la démolition ne sera plus possible. Dans sa rédaction actuelle, l'article fait obstacle à une action en démolition d'une construction dont le permis est annulé en raison de sa localisation dans les espaces agricoles, naturels ou forestiers ou pour non-respect des distances d'éloignement des bâtiments agricoles ou forestiers.
Il s'agit d'un recul important par rapport aux travaux que nous avons menés sous cette législature pour lutter notamment contre l'artificialisation des sols. Nous y voyons surtout un gage donné aux constructeurs peu soucieux de l'environnement qui bénéficient de la complicité de personnes mal informées leur délivrant des permis de construire litigieux, ensuite annulés. L'article encourage ces bâtisseurs illégaux à aller vite en besogne puisqu'une fois la construction achevée, on ne pourra plus la faire démolir ; c'est une véritable incitation à ne pas respecter le droit.
Autre perversion de cet article : puisqu'on ne pourra plus faire démolir, les auteurs des recours demanderont probablement des indemnités, comme le prévoit l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme. Et ils ne manqueront pas de se retourner vers les élus locaux qui ont signé le permis, générant une insécurité pour ces derniers.
Autant de raisons pour lesquelles nous proposons la suppression de l'article 29.
Expliquée ainsi, cette disposition autorise tous les fantasmes... Mme Bonneton lit-elle le texte tel qu'il est ?
Madame Bonneton, contrairement à certains de vos collègues, vous m'aviez épargné jusqu'à présent les insinuations désagréables et un tantinet déplacées ; je me sens obligé de vous donner quelques éclaircissements.
Cet article n'est le fruit ni du hasard ni du mouvement spontané des ministères compétents, mais des propositions présentées le 30 octobre dernier par le Conseil de la simplification, coprésidé par M. Laurent Grandguillaume. Il fait suite au travail mené par M. Daniel Labetoulle, ancien président de la section du contentieux du Conseil d'État, qui s'est longuement concerté avec tous les partenaires du secteur : acteurs du logement, représentants d'élus, associations. Certes, je ne suis pas élu local, mais vous pourrez peut-être corroborer les conclusions de ce groupe de travail : en matière de logement, les risques de démolition constituent aujourd'hui une épée de Damoclès excessive. La mesure proposée vise à recentrer la démolition sur les cas où elle est indispensable, à savoir les constructions sans permis et les zones protégées, le référé suspension restant par ailleurs possible dans tous les cas.
Aujourd'hui, lorsqu'on détient un permis de construire, si la décision est jugée illégale, le risque d'action en démolition peut perdurer quatre à cinq années, gelant tous les projets. Nous proposons de restreindre, dans le droit commun, ce risque aux constructions sans permis et aux zones protégées, qui continueront d'être régies par la loi actuelle ; hors de ces cas, nous rendons la règle moins pénalisante. Mais cet article, madame Bonneton, ne remet pas en cause le référé suspension des travaux, ni la possibilité de démolition sur d'autres fondements tels que le trouble du voisinage ou le droit pénal. Il s'agit d'une simplification qui préserve les intérêts essentiels des tiers, sans l'effet paralysant de la règle actuelle.
Les élus locaux de notre groupe – certains d'entre nous le sont encore, au risque de se voir reprocher de cumuler les mandats – livrent une double expérience : l'effet paralysant des actions en démolition, mais également la rareté de ces dernières, due notamment à la longueur des délais. La proposition consiste à lier la réalité de la pratique du droit avec le cadre légal.
Plus attaché à la prévention qu'à la répression, je suis convaincu que c'est dans l'anticipation que nous trouverons des solutions, le référé suspension constituant la mesure la plus efficace pour éviter ce type de désordres. Préserver le principe de la démolition dans toutes les zones à enjeu – parcs nationaux, zones inondables, etc. – me semble indispensable. Partout ailleurs, la sanction pénale – y compris indemnitaire – n'est pas non plus écartée, mais la mesure proposée évitera l'effet paralysant d'une action en démolition qui ne diminue d'ailleurs pas pour autant le nombre d'infractions que les maires constatent dans leurs communes. Cela permettra de démarrer des projets purgés des recours sérieux, sans les laisser suspendus à des recours dilatoires ou de mauvaise foi.
Les zones inconstructibles, où se nichent souvent les abus, font-elles partie de la liste des espaces où l'on pourra continuer à démolir ?
Je suis également étonnée de ne trouver dans la liste ni les zones inconstructibles, ni les parcs naturels régionaux. Nous venons d'obtenir la validation du parc régional des Baronnies et il serait troublant que ce statut n'autorise aucun recours en cas de problème. Le rapporteur thématique a raison de souligner que la démolition reste rare en pratique ; mais c'est précisément l'existence du recours juridique qui assure le respect des règles. Si l'on enlève cette possibilité, qu'est-ce qui empêchera les mauvais esprits d'aller au bout de leur démarche ou d'ignorer les pénalités ? Cet article m'étonne. En quoi simplifie-t-il les règles ? Combien de cas concrets concerne-t-il – par exemple au cours de la dernière année ? Pourquoi certaines zones ne figurent-elles pas dans la liste ? Il est en tout cas indispensable d'y inclure les zones de montagne.
Je conçois l'effet pervers de la menace de démolition qui conduirait certains projets parfaitement légaux à être abandonnés – même s'il faut probablement vérifier l'importance du phénomène. La bonne solution consiste alors à simplifier et à accélérer les procédures, notamment celles d'instruction. Mais vous jetez le bébé avec l'eau du bain, remplaçant un effet pervers par un autre, plus pervers encore, puisqu'aux termes de cet article, une fois la menace de démolition levée, même des projets qui ne pouvaient pas passer l'épreuve de légalité sont encouragés à aller jusqu'au bout.
Voici l'avis du service juridique d'une fédération de défense de l'environnement, France Nature Environnement : « Cet article est un véritable scandale et doit absolument être supprimé. Le message adressé est catastrophique : “Pour construire en violant les règles d'urbanisme, privilégiez le passage en force, une fois la construction réalisée, plus personne ne pourra s'y opposer.” ; c'est tout le contraire de l'État de droit, c'est la politique du fait accompli, une stérilisation du droit d'accès à la justice, en totale contradiction avec le discours de François Hollande. ». Le remède que vous proposez est réellement pire que le mal qu'il est censé combattre.
Le dispositif proposé modifie l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, tel qu'issu de l'ordonnance du 8 décembre 2005, entrée en vigueur en 2007. Pour contraindre le propriétaire à la démolition – et le constructeur aux dommages et intérêts –, il faut d'abord obtenir l'annulation du permis de construire pour excès de pouvoir. À partir de là, on dispose d'un délai de deux ans pour engager l'action en démolition. Le dispositif proposé introduit une dualité de situations qui m'apparaît complexe et anachronique : la juridiction administrative pourra toujours annuler le permis de construire pour l'ensemble des constructions jugées irrégulières, sur tous les territoires, mais la procédure en démolition – qui doit être prononcée dans le délai de deux ans par une juridiction de l'ordre judiciaire – ne pourra concerner qu'une partie seulement de ce qui aura été déclaré illégal. Quelle sera la sanction de l'annulation du permis par une juridiction administrative dès lors que l'on supprime la possibilité de rétablissement en l'état ? Pour les constructions situées en dehors des zones protégées, nous ferons face à une impossibilité manifeste de donner une suite concrète et réelle à la décision administrative d'annulation pour excès de pouvoir, ce qui la rendra totalement inefficace.
Monsieur le président, plutôt que de fantasmes, il s'agit d'arguments ! Quant aux insinuations, ce n'est pas mon habitude, mais je présente mes excuses à ceux que j'ai pu offusquer. Certes, les démolitions sont rares, mais l'existence de cette possibilité est dissuasive et joue un rôle de prévention – principe cher aux écologistes. En encourageant la politique du fait accompli, cet article est très dommageable pour l'état d'esprit général de respect de l'État de droit, dont on ressent aujourd'hui plus que jamais le besoin.
Voici ce qui semble ressortir des explications apportées : pour les zones protégées – auxquelles il serait effectivement prudent d'ajouter les zones inconstructibles –, le nouveau dispositif ne changera rien. Pour les autres, si j'ai bien compris, le tribunal administratif, quand il décidera de l'illégalité du permis, pourra ou non l'assortir de mesures amenant à la démolition, mais le juge judiciaire ne pourra plus le faire pendant le délai de deux ans qui suit. Pourtant, le recours au référé reste possible... Compte tenu de la complexité du sujet, je demande une suspension de séance.
(Suspension des travaux)
Le rapporteur est en train de rédiger un nouvel amendement sur ce sujet. En attendant, continuons le débat sur les articles suivants.
Sage décision, surtout si elle permet aux parlementaires de limiter les dégâts initialement prévus !
Le Parlement ne limite pas les dégâts, monsieur Roumegas, il fait son travail de proposition. J'ai toujours trouvé cette expression un peu pénible : est-ce à dire qu'il ne devrait y avoir que des décrets, des circulaires et des ordonnances ?
Nous souhaiterions simplement que ce projet de loi n'existe pas et que nous travaillions normalement sur ces sujets...
Le vote sur l'amendement SPE1387 est réservé.
L'examen des amendements SPE577 et SPE471 ainsi que le vote sur l'article 29 sont réservés.
Après l'article 29
La commission étudie l'amendement SPE1492 de M. François Brottes.
Je voudrais à travers cet amendement poser une question au Gouvernement. En cas de désaccord sur un projet, lorsqu'on est allé au bout de l'enquête publique et que chacun campe sur ses positions, les initiateurs du projet rechignent à reprendre la procédure à zéro et ses opposants se livrent à des manoeuvres dilatoires. Or, un projet contesté devrait pouvoir être reconfiguré ou ajusté sans recommencer toute la procédure. Le ministère en charge m'a répondu que cette possibilité était déjà prévue et que l'on pouvait suspendre l'enquête publique pour amender le projet et la poursuivre ensuite. Cette disposition est-elle connue au point d'éviter les crispations inutiles ? Combien de fois a-t-elle été utilisée ?
Le processus de l'enquête publique admet en effet des ajustements, les commissaires pouvant intervenir à tout moment de son déroulement. Sans cette possibilité, l'enquête est dénaturée ; elle n'a de sens que si elle bénéficie d'un minimum de souplesse – permise par les textes et en général autorisée par les commissaires sous la responsabilité du juge du tribunal administratif. Le dispositif est globalement bon ; pourtant, lorsque le projet définitif est présenté à l'État, il arrive qu'un groupe ultra minoritaire refuse de reconnaître ce résultat et multiplie les recours, rendant nécessaire l'intervention du juge. Ce comportement représente une forme de déni de démocratie.
Tout est dans la formule « un minimum de souplesse ». Je voudrais comprendre combien de fois ce dispositif a permis à des projets d'être significativement modifiés. En effet, cela permet de dédramatiser la concertation dont l'intérêt n'est pas de dire si l'on est pour ou contre, mais de faire évoluer des projets.
Je vous ferai parvenir la réponse du ministère compétent avant le débat en séance publique.
L'amendement SPE1492 est retiré.
Article 30 : Harmonisation des règles de recours à un architecte pour les exploitations agricoles
La commission adopte l'article 30 sans modification.
Je viens de consulter la base Eloi et je constate que notre rapporteur général a déposé plus d'une vingtaine d'amendements – notamment sur les articles 80 et 101 – que l'on ne peut pas encore consulter. Est-ce bien raisonnable ? Pourquoi ce dépôt massif ?
Ce travail va dans le sens d'une coconstruction législative toujours plus poussée, d'où la nécessité d'amendements parfois conséquents. Je ne vois pas d'objection à ce qu'ils soient rendus publics.
Article 31 : Facilitation du déploiement de la fibre optique dans les immeubles soumis au régime de la copropriété
La commission adopte successivement une série d'amendements des rapporteurs : l'amendement de cohérence SPE81, l'amendement de précision SPE83 et l'amendement rédactionnel SPE77.
Puis elle adopte l'article 31 modifié.
Article 32 : Habilitation du Gouvernement à transposer deux directives européennes et à simplifier le droit applicable aux servitudes radioélectriques
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette les amendements de suppression SPE246 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE403 de M. Patrick Hetzel.
Puis elle adopte l'amendement de précision SPE80 des rapporteurs.
Enfin, elle adopte l'article 32 modifié.
Article 33 : Ratification d'une ordonnance relative à l'économie numérique et clarification rédactionnelle
La commission adopte l'article 33 sans modification.
Article 33 bis (nouveau) : Équipement en fibre optique des maisons individuelles et des lotissements neufs
La commission examine, en discussion commune, les amendements SPE850 de Mme Corinne Erhel ainsi que les amendements SPE406 et SPE405 de M. Patrick Hetzel.
Dans la continuité des dispositions existantes, cet amendement vise à encourager le déploiement du très haut débit, enjeu industriel et économique majeur et grand chantier d'aménagement du territoire. L'objectif est de rendre obligatoire l'équipement des constructions neuves – maisons individuelles et lotissements – en lignes de communications électroniques en fibre optique.
Je suis également favorable au déploiement de la fibre optique. Les analyses internationales montrent que la mise en place de ce type d'infrastructures peut contribuer à la compétitivité d'un pays. La France a la chance d'avoir dans ce domaine une industrie très performante ; raison de plus pour en conforter le développement. Tel est l'objet de mes amendements SPE406 et SPE405.
Monsieur Hetzel, vos deux amendements concernent l'un les maisons, l'autre les lotissements, alors que celui de Corinne Erhel embrasse les deux à la fois. Seriez-vous prêt à retirer vos amendements au profit du sien ?
Les amendements SPE406 et SPE405 sont retirés.
Favorable. Cet amendement s'inscrit dans le droit fil de l'ambition gouvernementale du plan « France très haut débit », qui se donne pour objectif de couvrir l'intégralité du territoire d'ici 2022 – ambition importante et enjeu fondamental pour beaucoup de nos concitoyens. Le code de la construction et de l'habitation n'impose actuellement d'effectuer le préraccordement en fibre optique qu'aux constructeurs d'immeubles collectifs neufs, alors que les maisons individuelles représentent environ 60 % des logements neufs construits durant les dix dernières années. D'ici à l'examen du texte en séance publique, nous travaillerons avec le ministère du logement sur la question du report du coût sur les propriétaires, qu'il faudra aborder dans le décret.
Cet excellent amendement a l'avantage d'embrasser large et d'étreindre fort, couvrant l'ensemble des situations. Avis très favorable.
Je salue les propos du ministre comme du rapporteur général : c'est un sujet stratégique, et nos concitoyens seront sensibles à cet intérêt.
J'approuve la volonté de raccorder à la fibre tout notre territoire dans des délais brefs. Pour autant, ces dispositions ne doivent pas empêcher la montée en débit sur le réseau de cuivre existant : elle est parfois nécessaire. Dans la partie rurale de l'Île-de-France, nous avons encore des communes où l'accès à l'internet ne dépasse pas 256 kilo-octets par seconde... Et lorsque nous demandons une montée en débit, on nous oppose l'arrivée prochaine de la fibre, et on prétend que l'utilisation du réseau de cuivre serait complexe, voire interdite.
Mais on ne peut plus expliquer qu'il suffit d'attendre quelques années pour passer d'un seul coup d'un débit de 256 kilo-octets à 100 mégaoctets. Nos concitoyens ne peuvent pas le comprendre, et c'est bien naturel. Or, la fibre optique s'impose à toutes les décisions publiques, et il devient très difficile d'imposer une simple montée en débit. En zone rurale, de plus, le raccordement d'un lotissement nouveau à la fibre optique peut n'être tout simplement pas possible, parce qu'il faudrait aller à dix, quinze ou vingt kilomètres.
Je comprends donc l'intention de l'amendement, et je l'approuve, mais il serait dommage qu'il soit inopérant et même gênant.
La loi pour la modernisation de l'économie prévoyait déjà une obligation que l'amendement ne fait qu'étendre. Il me semble de plus que l'on peut être raccordé au réseau cuivre, puis à la fibre.
Ce point est important. De manière constante, le Gouvernement ne choisit pas une option technologique plutôt qu'une autre. L'amendement, lui, privilégie explicitement la fibre optique, comme c'est souvent le cas en pratique ; mais vos préoccupations, monsieur Poisson, sont prises en considération par le Gouvernement et les principaux opérateurs. Êtes-vous opposé à la mention de la fibre optique dans l'amendement ?
Je n'exprime pas ici la position du groupe UMP, mais ma position personnelle, et je voterai cet amendement. Je me contente d'appeler votre attention sur les problèmes qui se posent aujourd'hui. J'ai parfaitement compris que la rédaction de l'amendement n'interdit nullement le raccordement au réseau cuivre, mais la domination conceptuelle, pour ne pas dire idéologique, de la fibre peut poser problème.
L'objectif de cet amendement est d'éviter d'avoir à refaire des travaux quand la fibre arrivera à proximité. Le surcoût est relativement faible, et le raccordement à la fibre peut représenter une plus-value lorsque la maison est revendue.
Mais le problème soulevé par Jean-Frédéric Poisson est réel, et nous devons y répondre. Le plan « France très haut débit », qui a l'ambition de couvrir l'ensemble du territoire d'ici à 2022, implique une mobilisation financière forte de l'État et des collectivités territoriales : monsieur le ministre, il faut continuer de prêter une grande attention à ce sujet. Corinne Erhel restera de toute façon très vigilante !
Si je mentionne la fibre optique dans l'amendement, c'est parce que c'est une technologie pérenne. Nous avons vraiment tout intérêt à investir en ce domaine et à prévoir ces travaux en amont des constructions : ils sont mineurs pour une construction neuve, mais autrement plus coûteux s'il faut les réaliser ultérieurement.
Prévoir le raccordement à la fibre optique n'interdit pas, à l'évidence, l'usage d'autres technologies. Mais, sur le plan industriel comme sur celui de l'aménagement du territoire, c'est une ambition essentielle.
Le rapporteur thématique a raison : il serait absurde de ne pas prévoir d'ores et déjà le raccordement à la fibre, même si elle n'est pas utilisable immédiatement. Même si l'on a une mauvaise platine, mieux vaut choisir des enceintes de bonne qualité : ainsi, le jour où l'on change sa platine, tout est parfait ! On a trop souvent oublié ce principe pendant des années dans ce pays, ce qui nous a fait rater quelques échéances...
La commission adopte l'amendement SPE850 à l'unanimité.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements SPE407 de M. Patrick Hetzel et SPE1796 de Mme Corinne Erhel.
Dans le même ordre d'idées, l'amendement SPE1796 prévoit un raccordement obligatoire à la fibre lors de gros travaux de réhabilitation. J'ai conscience que c'est une mesure plus complexe que la précédente.
Le Gouvernement, de nouveau, ne peut que partager votre souhait. Toutefois, l'article 8 de la directive européenne du 15 mai 2014 impose l'équipement en très haut débit lors de travaux de rénovation de grande ampleur. Cette directive sera transposée par ordonnance, vous le savez : certaines questions techniques se posent encore, mais votre demande sera pleinement satisfaite. Je demande donc le retrait de ces amendements, dans l'attente de la transposition de cette directive.
Les amendements SPE407 et SPE1796 sont retirés.
Article 33 ter (nouveau) : Définition de l'itinérance métropolitaine
La commission examine ensuite l'amendement SPE840 de M. le président François Brottes.
Cet amendement vise à définir précisément l'itinérance métropolitaine, c'est-à-dire sur l'ensemble du territoire, à l'inverse de l'itinérance locale, déjà définie par le code des postes et des communications électroniques.
Vous avez raison. La régulation des accords d'itinérance mobile, et plus généralement des solutions techniques qui permettent de partager des réseaux mobiles, peut être renforcée. Les débats sur les contrats qui lient entre elles certaines entreprises bien connues ont été nourris. L'objectif du Gouvernement est d'assurer un bon équilibre entre, d'une part, la concurrence par les infrastructures et les différentes solutions de mutualisation de réseaux mobiles – dont l'itinérance n'est qu'une forme – et, d'autre part, les critères d'investissement imposés à certains opérateurs.
Pour qu'elle soit bien régulée et bien pilotée par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), il est – vous avez raison – nécessaire de donner une définition de l'itinérance. Vous avez tout récemment donné votre accord pour la nomination du nouveau président de l'ARCEP : la lettre de mission qui va être écrite inclura ces questions.
Cet amendement correspond donc à nos préoccupations, comme à celles exprimées par l'Autorité de la concurrence dans son avis du 11 mars 2013. Nous devrons travailler, d'ici à la discussion en séance publique, à une rédaction plus précise ; l'enjeu est toutefois suffisamment important pour que j'émette aujourd'hui un avis favorable.
Il est effectivement temps de définir l'itinérance métropolitaine, comme c'est déjà le cas de l'itinérance ultramarine. Cet amendement va donc dans le bon sens. La rédaction proposée pourrait semble-t-il être précisée, voire complétée. Mais, dans mon manuel de député débutant Le petit Brottes pour les nuls, j'ai appris qu'il vaut mieux adopter une rédaction imparfaite en commission pour la préciser en séance publique, plutôt que de tout renvoyer en séance, au risque d'être victime de funestes oublis...
J'émets donc un avis favorable. Nous veillerons, en lien avec l'ARCEP, à proposer une réécriture.
La commission adopte l'amendement SPE840.
Article 33 quater (nouveau) : Modernisation des dispositions relatives aux objectifs de la régulation du secteur des communications électroniques
La commission examine ensuite l'amendement SPE702 de M. Jean-Yves Caullet, faisant l'objet d'un sous-amendement SPE1874 rectifié de Mme Laure de La Raudière.
Cet amendement très technique est issu des travaux de Corinne Erhel, à qui je laisse le soin de le présenter.
Vous m'offrez l'occasion de signaler au ministre que Corinne Erhel et Laure de La Raudière ont rendu deux rapports très solides sur l'économie numérique et l'impact de la régulation sur la filière télécom.
Cet amendement vise à réécrire l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, qui définit les objectifs de la régulation en matière de télécommunication.
Dans un texte qui a pour but de relancer la croissance et l'activité, le numérique et les télécommunications ont très évidemment leur place : ce sont des moteurs essentiels de la création d'activité et donc d'emplois, comme de l'aménagement du territoire.
En 2013, Laure de La Raudière et moi-même avons rendu un rapport qui abordait la question des objectifs de la régulation. Nous préconisions notamment de réécrire cet article L. 32-1, qui, au fur et à mesure des années, s'est allongé : il assigne maintenant vingt-et-un objectifs au ministre chargé des communications électroniques et à l'ARCEP, sans hiérarchie ni priorités. Certains objectifs sont plutôt économiques et industriels, d'autres plutôt techniques, la plupart étant issus de directives européennes.
Nous proposons donc de les hiérarchiser, de distinguer ce qui relève du droit communautaire et du droit national, mais aussi ce qui relève de la politique, notamment de l'aménagement du territoire, ou d'aspects plus techniques, et enfin de clarifier les responsabilités du régulateur et du Gouvernement.
Ce rapport, adopté par la commission des affaires économiques, remonte maintenant à deux ans. Nous avions reçu des engagements, mais nous attendons toujours cette réécriture dont la nécessité est largement reconnue. Ce projet de loi est une bonne occasion de la mener à bien, même si notre proposition est sans doute perfectible.
Le numérique et le développement de nos réseaux sont essentiels pour notre économie, et la régulation du secteur des télécoms doit à la fois conforter l'investissement, préserver et amplifier les créations d'emplois, développer l'innovation, et contribuer à l'aménagement du territoire.
La commission des affaires économiques avait exprimé unanimement son mécontentement sur la façon dont ce secteur avait été régulé au cours des dernières années, constatant notamment un retard de développement des infrastructures et des dégâts économiques réels chez les industriels, voire les opérateurs.
Le sous-amendement SPE1874 vise à déplacer au sein des objectifs prioritaires le respect du principe de neutralité et de secret des correspondances, ainsi que la protection des données à caractère personnel.
La clarification des objectifs de la régulation est évidemment une nécessité, que votre rapport a bien montrée. J'émets un avis favorable au sous-amendement et à l'amendement. Nous inscrirons ainsi ces principes dans le texte, même si nous devrons là encore retravailler la rédaction, afin de prendre notamment en considération quelques contraintes européennes et la compétence d'autres ministères, comme celui de la consommation.
Avis favorable au sous-amendement et à l'amendement. En les adoptant, nous soutiendrons les débuts du nouveau président de l'ARCEP, qui disposera ainsi d'une feuille de route claire, même si des précisions devront être apportées à la rédaction. Nous en restons ainsi à la « jurisprudence Brottes » – qui va, je le note en passant, à l'encontre de la doctrine défendue par le président de la commission des finances, dont nous occupons aujourd'hui la salle.
Je le rappelle souvent : il revient au Parlement – et non à des ordonnances – de fixer des objectifs aux autorités de régulation. Il n'est pas mauvais de le rappeler à ce stade.
J'approuve également le sous-amendement, qui consiste à intégrer aux objectifs politiques le principe de neutralité de l'internet – sujet sur lequel la commission des affaires économiques a beaucoup travaillé. Il s'agit de concilier protection du consommateur, investissement, emploi, innovation et aménagement du territoire.
La commission adopte le sous-amendement SPE11874 rect.
Elle adopte ensuite l'amendement SPE702 ainsi sous-amendé.
Article 33 quinquies (nouveau) : Mise en oeuvre de l'itinérance métropolitaine
La commission se saisit de l'amendement SPE834 de M. le président François Brottes.
Cet amendement vise à préciser les usages de l'itinérance. Il faut davantage de transparence, et l'itinérance ne doit pas porter préjudice au développement des infrastructures.
Avis favorable, sous les mêmes réserves que précédemment : il faudra procéder à une réécriture d'ici à la séance publique.
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE834.
Article 33 sexies (nouveau) : Rapport annuel de l'ARCEP sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles
Puis la commission examine l'amendement SPE817 de M. le président François Brottes.
Nous proposons que l'ARCEP rende chaque année un rapport sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles autorisés.
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE817.
Article 33 septies (nouveau) : Adaptation au secteur numérique des dispositions relatives à la transparence sur le marché publicitaire
La commission en vient à l'amendement SPE762 de M. le président François Brottes.
La loi du 29 janvier 1993, dite « loi Sapin », a fixé les règles de transparence applicables au secteur de la publicité. Cet amendement vise à l'étendre à la publicité sur internet – moyen de communication qui n'existait pas encore en 1993. De nouveaux acteurs et de nouveaux modèles économiques sont nés, mais les règles du jeu doivent valoir pour tous ; or, aujourd'hui, elles s'appliquent de façon très inégale. Ce modeste amendement précise donc que la régulation concerne tous les supports, quels qu'ils soient.
Le Gouvernement a engagé sur ce sujet une concertation, menée dans le cadre du Conseil national du numérique. Vous avez bien rappelé la situation : il existe aujourd'hui un défaut de régulation. Les premiers échanges ont montré l'existence d'un accord pour garantir un fonctionnement transparent du marché publicitaire en ligne comme hors ligne, mais les modalités de mise en oeuvre de ces règles seront forcément plus complexes que celles prévues par la « loi Sapin ». Il nous faut prendre en considération ce travail en cours, mais qui devrait aboutir rapidement, sur l'adaptation des obligations de transmission d'informations – de reporting en anglais.
Je vous propose donc, monsieur le président, de rectifier votre amendement en ajoutant les paragraphes suivants :
« 2° L'article 23 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les secteurs de la publicité digitale, les modalités d'application des obligations de compte rendu définies aux premier et troisième alinéas du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État. »
J'accepte votre proposition, tout en soulignant qu'il est urgent d'agir : des travaux sont en cours, je le sais bien, mais les dérapages sont très nombreux.
Je partage votre volonté d'aller vite, et c'est pourquoi je suis favorable à cet amendement, comme je l'ai déjà été à plusieurs amendements précédents, conformément à la désormais célèbre « jurisprudence Brottes ». Mais nous devrons aussi prendre en compte les conclusions de la concertation en cours. Vous mettrez ainsi la pression sur le Gouvernement...
Dans la jurisprudence à laquelle vous faites allusion, j'ai toujours considéré qu'il valait mieux s'accrocher à des textes inscrits à l'ordre du jour qu'à des textes qui n'y étaient pas encore. »
Je craignais de faire du « Brottes moins » en émettant un avis défavorable, car cet amendement pourrait avoir des conséquences défavorables pour des entreprises françaises spécialisées dans le ciblage de la publicité. Il ne faut pas les fragiliser ; certaines sont de belles réussites, puisque l'une d'entre elles a levé l'an dernier 250 millions de dollars auprès du NASDAQ. Mais compte tenu de la proposition du ministre, nous resterons attractifs dans ce domaine majeur. Avis favorable.
L'économie numérique vient en effet bousculer des secteurs déjà installés depuis très longtemps. Il faut donc veiller aux distorsions de concurrence – c'est vrai – mais cette situation pourrait aussi nous amener à poser la question de la pression fiscale et de la réglementation qui pèsent lourdement sur les secteurs économiques traditionnels.
Certains modèles économiques dans le secteur de l'internet ne reposent aujourd'hui que sur la publicité : la publicité, les contenus même, les services sont alors intimement liés, ce qui donne à l'utilisateur une sensation de gratuité, mais qui donne un rôle inconnu jusqu'ici à la publicité.
Il faut enfin tenir compte des distorsions de concurrence entre les entreprises installées en France – qui tomberont, si nous vous suivons, sous la coupe de la « loi Sapin » – et les autres. Or, pour celui qui est derrière son écran, la différence entre les premières et les secondes est tout sauf facile à établir. Aujourd'hui, tous les législateurs, notamment européens, cherchent donc plutôt à harmoniser les règles, afin de mettre en place un environnement juste, ce qui est votre objectif.
Des expertises approfondies sont donc tout à fait nécessaires. Je soutiens fortement l'initiative French Tech du Gouvernement, qui concerne de nombreuses entreprises, qui ne sont plus seulement des start-up, comme l'a rappelé notre rapporteur thématique. Il faut donc y regarder à deux fois avant de modifier le cadre réglementaire, et plus encore pour la publicité qui est, je le redis, au coeur des modèles économiques d'aujourd'hui.
Je remercie le ministre de sa proposition et le rapporteur thématique de sa compréhension. Né moi-même un peu avant l'ère numérique, je constate que l'on a organisé la régulation du secteur des télécommunications au sens large comme si nous étions seuls au monde, comme s'il n'y avait pas de convergence entre internet et télévision. Or, tout, désormais, est sur tous les supports ; mais certains doivent appliquer une règle du jeu ancienne, quand d'autres vivent avec des modèles économiques très performants mais sans ces règles. Il faut donc une harmonisation.
Le marché de la publicité n'est pas infini : le monde nouveau doit pouvoir prendre son envol, mais on ne doit pas tuer pour autant le monde ancien. Il est donc urgent d'agir et de remettre à plat notre réglementation. J'entends qu'une concertation est en cours, mais elle ne doit pas concerner que le secteur numérique : tout le monde doit être autour de la table pour mettre au point de nouvelles règles du jeu qui ne plombent pas le modèle ancien, sans entraver le développement du nouveau.
Monsieur Carré, il y a aujourd'hui une ambiguïté juridique sur l'applicabilité de la « loi Sapin » au secteur numérique, certains juristes considérant qu'elle doit d'ores déjà s'appliquer. La rectification que j'ai proposée clarifie la situation et sécurise l'environnement législatif en renvoyant les modalités d'application de la « loi Sapin » à un décret en Conseil d'État. Le secteur numérique présente des spécificités fortes, dont il faut tenir compte, afin de préserver sa compétitivité.
Nous voulons réussir à corriger deux déséquilibres potentiels : celui qui existe entre l'économie classique et l'économie numérique ; celui qui existe entre les entreprises françaises et les entreprises étrangères, comme vous l'avez souligné à juste titre. Nous voulons que nos grandes comme nos petites sociétés continuent de se développer. Le décret prendra en considération tous ces aspects. De plus, un travail de cadrage est mené au niveau européen. En attendant, nous sécurisons l'environnement législatif.
Notre débat éclaire les choses et montre qu'il y a du travail à faire, tout en soulignant l'urgence de clarifier la situation. Encore une fois, le marché de la publicité n'est pas infini. Il faut trouver les bons équilibres.
La commission adopte l'amendement SPE762 tel qu'il vient d'être rectifié.
Article 33 octies (nouveau) : Reconnaissance dans la loi des agences de développement de l'économie sociale et solidaire
La commission se saisit ensuite de l'amendement SPE1410 de Mme Michèle Bonneton.
Nous souhaitons aider à créer de l'activité et de la croissance durable – c'est-à-dire de la croissance sans doute pas au sens où l'entend le ministre, mais une croissance respectueuse des ressources, de l'environnement, de l'emploi et des gens. Non, la destruction de l'environnement et l'économie mondialisée dont M. Macron se fait le chantre ne sont pas la seule solution qui s'offre à nous. Il en existe une qui marche très bien, peut-être plus modeste, mais qui n'est plus marginale puisqu'elle représente parfois jusqu'à 8 % à 10 % des emplois dans nos territoires : l'économie sociale et solidaire, que M. Hamon a très bien encouragée par sa loi.
Pour aller plus loin, nous proposons d'inscrire que les régions peuvent avoir recours à des agences de développement ; ces outils ont prouvé leur efficacité là où ils existent, ce qui avait été reconnu lors de la discussion de la « loi Hamon ». Cette disposition avait été votée en première et deuxième lectures, mais elle a disparu lors de la commission mixte paritaire.
Ce Gouvernement a en effet reconnu fortement l'importance de l'économie sociale et solidaire. J'ajoute – pour essayer de vous convaincre, sans espérer y réussir, que je ne suis peut-être pas totalement mauvais ni entièrement mû par des intentions néfastes – que l'économie sociale et solidaire fait partie de mon portefeuille ministériel et que je lui accorde beaucoup de mon temps, votre collègue Blein pourrait en témoigner.
Sur le fond, la reconnaissance de ces agences peut être une bonne chose, mais l'argument qui a prévalu est qu'elles n'existent pas dans toutes les régions : cette disposition a, comme vous l'avez dit, disparu du texte issu de la commission mixte paritaire. Je m'en remets donc à la sagesse des parlementaires.
Le fond de l'amendement ne pose pas problème, mais je m'interroge sur la méthode. Ce point a fait l'objet tout récemment d'un consensus entre l'Assemblée nationale et le Sénat. J'ai peu d'expérience des usages parlementaires, mais le procédé ne me paraît pas opportun. Avis défavorable.
Nous avons d'autant moins de réserves sur le fond que je ne vois pas pourquoi les régions auraient besoin d'être autorisées à recourir à des agences de développement. S'il faut préciser dans la loi tout ce que l'on a le droit de faire, il va falloir ouvrir quelques séances supplémentaires, monsieur le président ! Écrit-on la loi pour se rassurer ? Cela étant, nous ne nous opposerons pas à l'adoption de cet amendement.
L'Assemblée nationale n'avait pas, en première puis en deuxième lecture, voté cette disposition pour des raisons frivoles : il s'agissait de sécuriser juridiquement ces agences, parfois contestées dans les territoires. Cet amendement n'est donc pas inutile, et je remercie M. le ministre de son avis de sagesse.
Je comprends l'argument du rapporteur, mais il serait dommage de laisser passer l'occasion d'exprimer sa sagesse... En adoptant l'amendement, nous enverrons un signal politique, quitte à revoir tout cela précisément d'ici à la séance publique.
Tout cela est très sympathique, mais vous donnez encore des moyens à de nouvelles structures. Comment seront-elles financées, qui recruteront-elles ? D'un côté, on cherche à clarifier le droit et à favoriser la croissance et tout le monde se plaint du manque de lisibilité de l'action publique du fait de la multiplication des intervenants ; de l'autre, on inscrit dans le marbre des structures qui existent déjà et dont l'intérêt est très relatif. C'est de la schizophrénie !
Ce qu'a dit le rapporteur thématique est juste. Il s'agit d'ouvrir aux régions la faculté de contracter avec des agences de développement, alors même que ce sont plutôt les chambres régionales de l'économie sociale et solidaire qui structurent ce secteur. Mais, après tout, pourquoi ne pas donner à celles qui le souhaitent cette possibilité supplémentaire ? Il ne me paraît donc pas nécessaire de s'opposer à l'adoption de cet amendement.
Un certain Pierre Mazeaud considérerait qu'une telle mesure n'a rien à faire dans un texte de loi, mais l'époque change, les signaux politiques comptent...
La commission adopte l'amendement SPE1410.
Article 33 nonies (nouveau) : Rapport au Parlement sur l'opportunité de lancer une initiative « accélérateur de croissance » en faveur des PME intervenant dans les secteurs de la croissance verte
La commission examine ensuite, en présentation commune, les amendements SPE542 et SPE543 de M. Arnaud Leroy.
Ces deux amendements portent sur les éco-PME, qui sont 10 000 sur notre territoire. Elles rencontrent aujourd'hui les mêmes difficultés que les autres petites entreprises, mais aussi d'autres qui sont spécifiques au secteur de l'économie verte : forte insécurité juridique, frilosité des investisseurs, encore renforcée par les mésaventures du secteur photovoltaïque, intense compétition des champions historiques.
Ces deux amendements tendent donc à demander des rapports sur la façon dont le Gouvernement pourrait apporter son soutien à ces éco-PME. Nous avons dans ces secteurs des PME qui grossissent, et qui sont à l'orée de devenir ces fameuses ETI dont nous rêvons tous. Il faut les soutenir. Il s'agirait d'écrire une courte feuille de route des initiatives à prendre pour doper ce secteur : je ne demande pas un énième rapport d'évaluation qui viendrait caler une table, une armoire, voire un billard pour les plus fortunés d'entre nous.
La facilité voudrait que l'on accepte toutes les demandes de rapport... Il ne faut néanmoins pas les multiplier, car nous y perdrions en crédibilité.
Les entreprises que vous évoquez sont concernées par plusieurs initiatives du Gouvernement, au premier rang desquels les trente-quatre plans industriels, dont dix ciblent ce secteur. Il n'est pas inutile, cependant, de faire avec le Parlement un point d'étape sur le développement des PME et ETI liées à la croissance verte, dans un délai raisonnable qui permettre d'examiner par la même occasion les premières conséquences des plans industriels et de la loi sur la transition énergétique.
Je propose le retrait de l'amendement SPE542 et j'émets un avis favorable à l'amendement SPE543.
Je vous remercie cet avis favorable et je retire donc l'amendement SPE542. Je n'ai pas déposé ces amendements pour me faire plaisir ; ils découlent des discussions que j'ai eues avec de nombreux acteurs du secteur des éco-PME. Nous avons déjà un comité stratégique de filières éco-industries ; parallèlement, de nombreuses structures ad hoc se sont constituées à l'initiative d'opérateurs privés. L'attente – je vous l'assure – est bien réelle. Cette question doit être traitée sérieusement, et séparément de celle des grands plans industriels : il faut identifier très finement les besoins de ces acteurs.
L'amendement SPE542 est retiré.
Serait-il possible de savoir combien de rapports doivent être rendus au Parlement ? Combien coûtent ces rapports ?
Certains disparaîtront d'ici au vote final de la loi...
La commission des affaires économiques dispose d'une liste de tous les rapports demandés depuis le début de la législature, que nous affichons sur les écrans de notre salle de réunion lorsqu'un membre du Gouvernement est entendu. Nous en attendons toujours un certain nombre...
Sur le fond, je me demande si nous ne devrions pas demander à la Banque publique d'investissement (BPI) de faire le point sur son action.
Une mission d'information commune sur la BPI vient de débuter ses travaux. Nous regarderons ce point.
Je précise de nouveau que mon amendement se borne à demander une feuille de route, un kit de solutions, et non un énième bilan. Les besoins sont réels.
C'est un sujet très intéressant : l'examen de l'effet d'entraînement des politiques environnementales sur l'économie d'un pays révèle de vraies surprises. Vous avez tous eu connaissance, il y a quelques mois, d'un rapport sur les incidences de la croissance verte pour l'économie américaine : il montrait bien l'absence de corrélation entre une politique environnementale plutôt tiède et la forte progression d'entreprises innovantes dans ce secteur. C'est sur l'effet d'entraînement d'un cadre normatif de plus en plus exigeant qu'il faut se pencher.
Si nous voulons pouvoir diminuer nos subventions, nous devons permettre la création d'entreprises innovantes de plus en plus efficaces. Le rapport demandé par Arnaud Leroy pourrait permettre de se demander si nos politiques, nationales et européennes, ont réellement un effet d'entraînement sur l'innovation des entreprises du secteur de l'environnement.
J'observe pour ma part que les résultats des investissements d'avenir doivent nous inviter à la prudence dans nos conclusions, en gardant en tête le contexte économique général dans lequel évoluent les entreprises.
Sur le fond, demander des rapports au Gouvernement, c'est bien ; mais l'Assemblée nationale dispose en la matière de pouvoirs aussi larges que peu utilisés. Libre à nous de nous saisir par de ces questions pertinentes. Je fais cette remarque dès que l'on demande un rapport...
La commission adopte l'amendement SPE543.
Elle se saisit ensuite de l'amendement SPE1018 de M. Jean-Yves Caullet.
Cet amendement, certes un peu technique, concerne la norme IPv6. C'est essentiellement un amendement d'appel. Une adresse IP (Internet protocol address) est attribuée à tout appareil connecté à un réseau informatique qui utilise ce protocole. On utilise aujourd'hui les adresses IPv4, c'est-à-dire la quatrième version de cette norme ; la norme IPv6, autrement dit sixième version, permet d'attribuer un nombre d'adresses beaucoup plus important. Or, la pénurie d'adresses IPv4 menace, en raison de l'explosion du nombre d'appareils connectés.
L'amendement propose donc de rendre obligatoire pour tous les appareils loués ou vendus sur notre territoire la capacité d'utiliser la norme IPv6. L'attente chez les acteurs du secteur est forte, et j'ai déjà interpellé par diverses voies le Gouvernement sur ce sujet à plusieurs reprises. Pour soutenir l'innovation et le développement de l'économie numérique, la France doit se saisir de cette question.
Je n'ignore pas que nous sommes plutôt ici dans le domaine du droit européen, et d'ailleurs aussi dans le domaine réglementaire. Mais il est important que le Gouvernement envoie un signal fort ou, à tout le moins, s'engage à travailler sur cette question. Une fois de plus, nous devons agir en amont, sans attendre la pénurie d'adresses IPv4 pour nous réveiller. Beaucoup de pays ont déjà pris leurs précautions ; des organisations internationales tirent la sonnette d'alarme. Une réflexion sur ce sujet, certes technique, est essentielle pour l'innovation.
Nous souscrivons à l'ambition de cet amendement : c'est tout à la fois une nécessité sur le plan technologique et industriel et un élément de compétitivité de notre économie. Néanmoins, comme vous l'indiquez, cela relève davantage du droit communautaire. Je m'engage à saisir formellement la Commission européenne de cette question dans les plus brefs délais, afin d'avancer dans le cadre de l'Agenda numérique pour l'Europe. Nous avons d'ailleurs déjà engagé ce débat, majeur pour nos industriels. Je vous transmettrai la réponse dès que je la recevrai.
Je propose donc le retrait de cet amendement.
L'amendement SPE1018 est retiré.
Article 29 (précédemment réservé) : Sécurisation des projets de construction
La commission en revient à l'article 29, précédemment réservé.
Elle rejette l'amendement SPE1387 de Mme Michèle Bonneton.
Elle se saisit de l'amendement SPE1958 des rapporteurs.
La discussion que nous avons eue tout à l'heure a éclairé plusieurs points et mis en lumière sinon les ambiguïtés, à tout le moins les angles morts possibles de ce texte.
Afin d'éviter toute fausse représentation, je souligne que l'article du code de l'urbanisme modifié par l'article 29 du projet de loi vise les situations dans lesquelles un permis de construire a été délivré : les situations où n'y a pas eu de permis de construire, ou bien de construction en zone non constructible, ne sont donc pas concernées.
Je reste toutefois mal à l'aise sur la question, soulevée par M. Le Bouillonnec, de l'articulation entre le juge administratif et le juge civil. Personne dans cette salle ou dans les services n'a pu m'apporter sur ce point une réponse intellectuellement satisfaisante.
Cette mesure a été suggérée par le groupe de travail présidé par M. Daniel Labetoulle. Mais je ne veux pas ici utiliser l'argument d'autorité et je ne suis pas aujourd'hui capable de reconstruire le cheminement intellectuel qui a mené à cette proposition. L'intention était de traiter certaines situations ubuesques dans lesquelles des projets durent infiniment longtemps, avec le risque d'une démolition qui n'est jamais ordonnée. Le ministère du logement donne de nombreux exemples de telles situations. De plus, les démolitions sont en réalité très rares : pour des raisons sociales, financières et autres, la décision du juge civil n'est en général pas appliquée. Notre régime juridique plonge donc de nombreux projets dans l'insécurité juridique, sans que les démolitions ordonnées soient finalement exécutées.
L'intention du groupe de travail présidé par M. Labetoulle, comme du Conseil de simplification, était donc saine. Toutefois, les points soulevés durant la discussion justifient que nous allions moins loin que ne le prévoyait le projet de loi présenté par le Gouvernement.
Les rapporteurs vont donc proposer un amendement auquel – je le dis d'ores et déjà – je suis favorable : c'est un amendement de repli, qui nous permettra d'interroger la ministre du logement, M. Labetoulle et votre collègue Grandguillaume, qui copréside le Conseil de la simplification. Nous saurons alors si les éléments qu'ils nous apporteront sont de nature à répondre à vos préoccupations légitimes ou s'ils font apparaître des dysfonctionnements juridiques.
Aux termes du a de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, « le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à démolir [une construction] du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative. L'action en démolition doit être engagée au plus tard dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative. » L'annulation, qui ouvre le délai pendant lequel on peut démolir un bâtiment, est connue de tous ceux qui ont intérêt à agir.
Mais si le risque de démolition disparaît, le sens de la responsabilité de chacun pourrait effectivement en être altéré. Sous l'autorité de nos collègues Jean-Yves Caullet et Jean-Yves Le Bouillonnec, je vous propose donc d'aménager cette obligation de deux façons.
Avec l'amendement SPE1958, le principe du risque de condamnation à la démolition perdurera partout : l'épée de Damoclès, dont le rôle est au moins pédagogique, restera donc suspendue. Mais la durée pendant laquelle il est possible de demander une démolition sera réduite à six mois. Les projets ne seront ainsi pas menacés par des recours dilatoires. Il faudra bien sûr une décision définitive de la justice administrative pour que la démolition ait lieu.
Parallèlement, dans les zones à intérêt particulier, dont la liste est dressée par l'amendement, le principe actuel des deux années sera maintenu afin de ne faire courir aucun risque.
Ces propositions me paraissent de nature à rassurer tous les membres de la commission spéciale.
Sous réserve d'expertise de la liste des zones protégées exclues du dispositif, nous sommes d'accord sur le principe. Il fallait couper court à un message qui pouvait passer pour un encouragement à l'illégalité et au passage en force.
Puisqu'il a rendu un avis favorable, je reconnais volontiers les qualités du ministre. Il pourrait d'ailleurs tirer une leçon générale de cet épisode et convenir que le recours aux ordonnances est une solution bien peu efficace : en quelques minutes, les commissaires socialistes réunis autour d'une table – et je les en remercie – ont fait un meilleur travail que certains bureaux ! Nous devrions étendre le procédé et écrire tous ensemble un projet de loi pour la croissance et l'activité durables...
N'est-ce d'ailleurs pas ce que nous sommes en train de faire – travailler, coproduire, améliorer – depuis quatre jours, nonobstant quelques moments plus facétieux ?
De mieux en mieux, dirais-je plutôt !
L'article L. 480-13 du code de l'urbanisme dispose actuellement que l'action en démolition doit être engagée au plus tard dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative. Nous ramenons ce délai à six mois, en ne le maintenant à deux ans que pour des zones spécifiques. Sans doute faudra-t-il retravailler un amendement qui durcit la situation alors que l'intention du Gouvernement était, je crois, de mieux l'encadrer.
Le dispositif maintient le pouvoir du juge, pour toute construction illégale ou faisant l'objet d'une annulation pour excès de pouvoir, de demander la démolition partout, toutes zones confondues. C'est l'exécution qui est encadrée dans un délai, et celui-ci passe de deux ans à six mois. Cette proposition devra être affinée dans les prochains jours et pourra faire l'objet d'adaptations lors du débat en séance publique, y compris en ce qui concerne la liste des zones protégées.
Aux termes de l'article L. 480-13 issu de l'ordonnance de 2005, « le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative. L'action en démolition doit être engagée au plus tard dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative. » Sauf erreur de ma part, l'action en démolition est celle qui est portée devant le tribunal de l'ordre judiciaire, puisqu'on la conditionne à une décision définitive du juge administratif pour excès de pouvoir.
Je partage cette analyse : il s'agit bien de l'action en démolition et non de l'action de démolition.
Cet amendement – nous en sommes tous d'accord – fera l'objet d'améliorations en séance publique. Nous devrons aussi mesurer l'incidence des modifications sur la zone des cinquante pas géométriques outre-mer, héritage historique auquel nous avons consacré un texte de loi à part entière.
La commission adopte l'amendement SPE1958.
En conséquence, l'article 29 est ainsi rédigé et les amendements SPE577 rectifié des rapporteurs et SPE471 de Mme Laure de La Raudière tombent.
Article 34 : Aménagement du dispositif d'attribution d'actions gratuites
L'amendement SPE1798 des rapporteurs est retiré.
La commission est saisie de l'amendement SPE805 de M. Patrick Hetzel.
L'amendement SPE805 propose que les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ou les grandes entreprises qui n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis trois ans puissent également bénéficier de l'exonération de la contribution patronale, dans la limite, pour chaque salarié, du plafond de la sécurité sociale, que le Gouvernement souhaite accorder aux PME qui n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création.
Si la volonté des pouvoirs publics est de développer l'actionnariat salarié, il n'y a pas de raison objective à réserver ce dispositif incitatif aux seules PME.
De plus, le critère de non-distribution de dividendes depuis trois ans proposé dans cet amendement est pertinent, car il permet de cibler les ETI et les grandes entreprises qui ont privilégié l'investissement et l'emploi pour préparer leur avenir et renforcer leur compétitivité, de préférence au versement de dividendes aux actionnaires. Aujourd'hui, les entreprises non financières distribuent 85 % de leurs bénéfices en dividendes.
Une série de mesures dans l'article 34 visent à améliorer le régime fiscal et social des salariés de toutes les entreprises, de manière à le remettre aux standards internationaux. Ainsi, les gains d'attribution et de cession sont imposés selon les modalités applicables aux plus-values mobilières, qui avaient elles-mêmes fait l'objet en 2013 d'une réforme prévoyant un abattement progressif en fonction de la durée de détention entre deux et huit ans ; la contribution salariale spécifique est supprimée ; les gains d'acquisition sont soumis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine ; pour les entreprises, le taux de contribution patronale passe de 30 à 20 %. Bref, le texte améliore substantiellement le droit commun applicable à l'actionnariat salarié, quelle que soit la taille de l'entreprise.
Au-delà de ces dispositions, le mécanisme est rendu plus incitatif pour les PME. Votre amendement vise à élargir cette incitation, ce que je peux comprendre, mais nos services évaluent son coût fiscal à environ 200 millions d'euros. Il risque également de créer un effet d'aubaine pour certaines entreprises par ailleurs éligibles au reste du dispositif. Je vous invite à le retirer, faute de quoi, pour des raisons de coût, j'émettrai un avis défavorable. Une partie des objectifs énoncés dans votre exposé sommaire est satisfaite par le reste du dispositif proposé.
Il est important de réaffirmer l'effort global en faveur de l'actionnariat salarié, mais il faut aussi souligner que le Gouvernement cible volontairement les PME, principales exclues d'un dispositif qui, par ailleurs, a connu une attrition générale du fait de l'évolution des prélèvements.
Soulignons aussi que le dispositif renforce l'attractivité des entreprises à l'embauche. Un cadre de bon niveau ne trouvera pas forcément une PME aussi attrayante qu'une grande entreprise. Grâce à cet article, il sera plus facile aux petites structures de recruter les cadres qui sont nécessaires à leur développement.
Si nous avions les 200 millions requis, je ne serais pas défavorable à un élargissement, mais je crains qu'en l'occurrence nous ne puissions maîtriser les conséquences financières de l'amendement. Le ciblage sur les PME améliore l'équilibre entre les différentes catégories de salariés. On sait que les petites entreprises souffrent d'une fragilité en matière d'actionnariat salarié et d'épargne salariale, mais aussi d'un problème d'attractivité. Il n'y a pas lieu d'être aussi généreux à l'égard des grandes entreprises. Avis défavorable.
Même si je n'ai pas déposé d'amendement de suppression, je souhaite revenir sur le contenu de l'article 34.
L'objectif, Christophe Castaner l'a indiqué, est que les PME, voire les TPE, mettent progressivement en place des mécanismes d'association de leurs salariés au capital. Ce schéma est assez rare aujourd'hui, bien qu'il soit souhaité par beaucoup de petites structures. Je trouve donc intéressante cette partie de l'article.
Mais le coût pour l'État ne se résumera pas à cela. L'article 34 prévoit non seulement une baisse de la part sociale patronale sur les actions gratuites mais aussi l'alignement de leur fiscalité sur le mécanisme d'imposition des plus-values mis en place après la polémique des « pigeons » à l'automne 2012. En outre, il supprime différents seuils qui visaient à encourager la distribution des actions gratuites aux personnes qui n'en détiennent pas beaucoup.
Bref, l'article 34 ne propose pas autre chose qu'une baisse de l'impôt et des prélèvements sociaux pour les plus gros détenteurs d'actions. J'avoue ne pas comprendre en quoi cela favorisera l'actionnariat des salariés ordinaires ! Ayant travaillé comme moi dans le privé, monsieur le ministre, vous avez eu l'occasion d'observer dans quelle proportion les actions gratuites sont distribuées entre cadres dirigeants et salariés. Si le coût de cet article est évalué à 200 millions d'euros, au moins 100 millions iront aux cadres dirigeants. Cela fait beaucoup d'argent. À titre personnel, je ne saurais approuver cette évolution.
L'avantage de l'article 34 est d'assouplir le régime juridique et les coûts fiscaux et sociaux de l'attribution gratuite d'actions (AGA) aux salariés. Cela pourrait être l'occasion de lancer un chantier plus vaste en matière d'actionnariat salarié. L'argumentation du rapporteur thématique est binaire : il a évoqué les PME, d'une part, les grandes entreprises, d'autre part. Ne pourrait-on au moins étendre le dispositif aux ETI, et quel en serait l'impact budgétaire ?
Beaucoup d'études montrent que la faiblesse structurelle de l'économie française, notamment par comparaison avec l'économie allemande, et l'insuffisance du nombre d'ETI. L'approche du Gouvernement serait-elle différente si la disposition n'était étendue qu'aux ETI ?
Vous avez précisément décrit l'architecture de l'article, madame Berger. Pour nos entreprises, en particulier les plus innovantes, le régime fiscal et social doit rester compétitif par rapport à nos principaux voisins et à la concurrence internationale. Tel est l'objet de cet article et du suivant : avec les actions de performance et les bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises, nous traitons un des problèmes qui affectent l'attractivité de nos sociétés et la compétitivité française. Il existe aujourd'hui un grand décalage entre le régime fiscal construit par les réformes de 2011 et 2012 et celui de nos principaux voisins européens.
La question n'est pas ici celle de l'épargne salariale, que nous traitons par ailleurs : permettre un traitement différencié pour les cadres les plus performants relève d'une philosophie de compétitivité que nous assumons dans ce texte. Le régime actuel n'est pas adapté en termes de durée d'acquisition comme en termes de cotisations sociales ou de prélèvements. Je suis sensible à l'argument de l'équité que vous soulevez, mais ce point est traité via l'impôt sur le revenu.
Cette réforme ne supprime que la contribution salariale spécifique de 10 %, mais elle soumet les gains d'acquisition aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Elle ramène par ailleurs le taux de contribution patronale de 30 à 20 % à la date d'acquisition, là aussi pour revenir à des standards.
Une des forces de notre économie est d'avoir des grands groupes. On ne peut à la fois dire que l'on a besoin du CAC 40, s'émouvoir à chaque fois qu'une société qui y est cotée est reprise ou décide de délocaliser, et mettre ces groupes dans une situation où ils peuvent de moins en moins attirer leurs grands cadres, compte tenu des effets conjoints de la taxation des actions de performance et – ce que nous assumons – de l'impôt sur le revenu et sur la fortune. C'est pourquoi nous améliorons ce régime tant pour les grandes entreprises que pour les ETI et les PME, qui sont aujourd'hui toutes pénalisées par rapport à nos voisins.
Je veux ensuite lever une ambiguïté sur les éléments de coût. Nous avons estimé le coût des mesures proposées à 75 millions d'euros en 2015, 191 millions en 2016 – 125 plus 66 – et 125 millions en 2017. C'est l'extension de l'avantage accordé aux PME à la totalité des entreprises qui coûterait 200 millions – je ne dispose pas du chiffrage d'une éventuelle extension aux seuls ETI. Nous essaierons de l'établir avant la séance publique. De toute façon, cela représenterait un coût budgétaire additionnel par rapport à l'enveloppe qui m'a été « allouée » pour cette réforme.
L'article 34 consiste à aligner le régime fiscal appliqué aux attributions gratuites d'actions, comme nous l'avons fait en 2013 pour les plus-values mobilières. On peut, bien entendu, décider d'une surfiscalisation, mais on se heurtera alors à un problème de financement et d'attractivité. Je pense que la question de la justice sociale est traitée par les réformes que nous avons menées en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
Nous avons observé à de nombreuses reprises que la surfiscalisation aboutissait finalement à de moindres rentrées d'argent.
La cotisation patronale est passée de 10 % en 2007 à 14 % en 2011 et 30 % en 2012. Les gros détenteurs, madame Berger, voient aussi leur imposition s'élever puisque nous avons intégré cette ressource dans le barème de l'impôt sur le revenu. Ainsi, le taux moyen de fiscalisation des AGA est en moyenne de 64,5 %. Du coup, la distribution d'AGA a fortement chuté, ce qui pose un réel problème d'attractivité pour nos entreprises. Ajoutons à cela qu'il est difficile, pour une entreprise, d'acquitter une fiscalité de 30 % sur des actions qui ne sont susceptibles de générer des revenus que deux ans après.
Il faut donc trouver le point d'équilibre entre une fiscalité juste et la préservation d'un dispositif dont nous pensons qu'il est pertinent. Permettre aux salariés d'être actionnaires de leur entreprise et de contribuer de façon citoyenne à son bon fonctionnement et au partage de ses ressources va plutôt dans le bon sens. Or, les observateurs que nous avons auditionnés – y compris les représentants des salariés – le reconnaissent : ce point d'équilibre est trouvé. La proposition du Gouvernement établit le niveau de fiscalisation juste qui permet d'atteindre un double objectif : encaisser une recette fiscale et activer un dispositif que les hauts niveaux de fiscalité ont éteint, chassant les salariés de l'actionnariat. Les AGA, j'y insiste, sont un dispositif sain.
Je voudrais revenir sur ce taux de 64,5 %. Nous avons déjà eu ce débat presque mot pour mot en novembre 2012 au sujet de la taxation des plus-values et autour de l'idée noble qu'un euro gagné via le capital doit être taxé de la même façon qu'un euro gagné par le travail. En l'espèce, si le taux atteint ce niveau, c'est que la personne est dans la tranche correspondante.
Je ne l'ignore pas : de fait, la personne bénéficie de revenus élevés. Que ces revenus élevés soient taxés au taux maximal me semble être dans la nature de l'impôt sur le revenu.
Par ailleurs, monsieur le ministre, il est bien précisé dans l'exposé des motifs que les gains de cession sont alignés sur la fiscalité des plus-values telle qu'issue de la « révolte des pigeons », à ceci près que le système en vigueur prévoit une durée de détention de six ans avant l'enclenchement des abattements. Sauf erreur de ma part, l'article 34 réduit à deux ans la durée de détention obligatoire des AGA, alors que la précédente réforme visait à inciter la détention du capital à long terme...
Je n'arrive pas à comprendre si cet article vise les start-up ou les grands groupes. S'il vise les premières, il faut absolument maintenir la limitation de détention de 10 % du capital. Comment se fait-il que, dans le même article, on abaisse la durée de détention obligatoire et on fasse sauter le seuil de 10 %, seuil qui permettait précisément de s'assurer que le mécanisme des AGA était appliqué aux salariés et pas aux seuls cadres dirigeants ? Sur les 191 millions de coût budgétaire prévu pour 2016, quelle sera la concentration sur les cadres dirigeants des grandes entreprises ? Je pense que cela représentera la plus grosse partie !
Enfin, on aura beau philosopher sur les prélèvements sociaux, il n'en reste pas moins que ceux-ci continuent de financer la sécurité sociale. Chaque fois qu'on abaisse un taux, on abaisse du même coup le financement.
Comparaison n'est pas raison, mais il n'est pas interdit d'examiner comment nos entreprises se situent dans la guerre mondiale économique.
Je suis heureux de retrouver dans la bouche de certains collègues de la majorité des arguments que nous avions soulevés en juillet 2012. Certes, plusieurs taux avaient déjà connu une hausse antérieure, mais les excès auxquels on a abouti ont fini par contrarier les espérances mêmes de recettes fiscales.
Sur la forme, monsieur le ministre, n'avait-il pas été convenu que toute modification du code général des impôts devait désormais passer par une loi de finances ?
Cela ne m'avait pas échappé, monsieur le président ! Mais le principe était sage. Une approche globale permettrait de mieux répondre à des questions telles que celles que pose Karine Berger, et il serait intéressant de recueillir l'avis de ceux de nos collègues qui ont beaucoup travaillé sur l'impôt sur le revenu et qui ne siègent pas tous dans cette commission spéciale.
S'agissant des ETI, le problème est bien celui de la concurrence en matière de recrutement de cadres commerciaux, d'ingénieurs, de dirigeants. Les ETI ont ceci de commun avec les PME que leurs zones de recrutement et leurs centres de décisions sont généralement hexagonaux. Les grands groupes, de leur côté s'adaptent à la concurrence internationale en s'implantant dans les pays où ils pensent avoir intérêt à le faire, et pas seulement pour des raisons fiscales : pour y trouver des compétences, des zones commerciales, etc. Dans ce contexte mondial, il est inutile de s'engager dans la course au moins-disant fiscal.
Je pense donc que nous devons poser la question de l'extension du dispositif aux ETI, en mesurant, évidemment, le coût que cela représenterait.
Le point de forme que vous soulevez, monsieur Carré, renvoie à une circulaire prise par le Premier ministre en 2012. En l'occurrence, le Premier ministre a décidé, en accord avec le ministre des finances et le secrétaire d'État au budget, d'y déroger afin que l'on puisse intégrer dès maintenant ces éléments fiscaux dans la limite d'une certaine enveloppe – ce qui me contraindra à être peu ouvert à des propositions d'extension.
Quant au régime des plus-values mobilières, madame Berger, il est issu d'une concertation menée pendant plusieurs mois par Mme Fleur Pellerin lors des Assises de l'entrepreneuriat, et non de la pression de tel ou tel lobby. Ce n'est nullement la « réforme pigeons », c'est une vraie réforme, longuement mûrie par les services de l'État avec les entrepreneurs – qui ne sont pas une race indigne ! – dans l'intérêt de l'économie française, défendue par le Gouvernement et votée par cette majorité.
Si nous ramenons à deux ans la limite de durée s'agissant des plus-values mobilières, c'est parce qu'il s'agit de cadres et d'employés, et non d'actionnaires. Ce qui a motivé cette réforme travaillée par les services de Bercy dans la concertation, c'est un élément de comparaison – que nous n'avons d'ailleurs pas à chercher jusqu'à Singapour !
Le système actuel fait qu'un salarié soumis au taux supérieur de l'impôt sur le revenu est taxé à 96 % sur les actions de performance et l'entreprise à 38,75 %, après détention de deux ans. Au Royaume-Uni, aucun dispositif n'est soumis à délai. En Allemagne, le taux appliqué à la plus-value de cession est de 26 %. Bref, il est évident que nous ne sommes plus compétitifs par rapport à l'écosystème qui nous entoure. Ces mesures ne visent qu'à nous remettre dans la norme, et je tiens à votre disposition tous les chiffres sur lesquels repose notre analyse.
Conformément à votre souhait, je demanderai aux services du ministère des éléments sur la ventilation du coût.
Plus généralement, je veux souligner que le Gouvernement a oeuvré pour l'équité fiscale en soutenant plusieurs réformes très fortes en matière d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et d'impôt de solidarité sur la fortune. Il a mis en place de puissants outils de redistribution. Si nous voulons combiner cet objectif de redistribution et l'objectif du présent dispositif, nous ne pouvons souscrire à des doublons fiscaux. Ce serait faire fi de l'environnement économique international dans lequel nous évoluons.
Dans le dispositif existant, les stock-options n'existent plus et les actions de performance sont en voie d'extinction. On peut décider d'augmenter encore les taux parce que cela paraît plus juste, mais je rappelle que les éléments indicatifs de coût budgétaire sont théoriques : ils partent de l'hypothèse d'une base inchangée. Si notre réforme a l'effet incitatif que nous recherchons, les entreprises utiliseront davantage le dispositif, ce qui créera un effet volume qui minorera d'autant le coût budgétaire.
Si l'on s'en tient à une vision statique de nos régimes fiscaux et sociaux, on trouvera toujours préférable d'augmenter les taux au maximum. Mais le raisonnement ne tient pas ! La logique que j'assume est une logique de compétitivité et d'alignement des taux par rapport au pays voisins. Elle s'appuie sur un travail technique et sur la concertation. Je m'engage à ce que les services vous transmettent les réponses supplémentaires qu'il est possible d'obtenir.
Une fiscalité est utile lorsqu'elle rapporte. Fiscaliser les stock-options à 100 % ne changerait pas grand-chose à la ressource fiscale !
Pour ce qui est des grandes entreprises, la proposition du Gouvernement consiste simplement à abaisser le taux de cotisation de 30 à 20 %. Sur une période de cinq ans, donc, ce taux aura doublé au lieu d'avoir triplé. On ne peut pas parler de cadeau aux grandes entreprises...
Un réel effort est en revanche consenti en faveur des PME, puisque le taux passe de 30 à 0 %. Nous retrouvons là les engagements du Président de la République, qui souhaitait une fiscalisation différenciée en fonction de la taille des entreprises.
Je précise aussi que le régime précédent imposait une durée d'incessibilité de deux ans et une durée de conservation de deux ans. Le texte ne prévoit plus qu'un délai de deux ans, sachant que les assemblées générales extraordinaires peuvent décider d'aller au-delà. Les AGA étant une incitation au maintien des cadres, en particulier dans les PME, je suis convaincu que la durée de détention sera souvent prolongée.
En outre, par un effet d'assiette, le nouveau dispositif devrait rapporter davantage que la taxation trop élevée qui prévaut actuellement.
Enfin, la différence entre le taux total de fiscalisation avancé par le ministre et le mien s'explique par le fait que j'avais retenu une tranche d'impôt sur le revenu inférieure à 45 %.
Il est un peu facile, lorsque l'on défend la réduction d'un taux, d'arguer que le même taux porté à 100 % ne rapporterait plus rien ! Jamais je n'ai parlé d'une augmentation des taux. Et permettez-moi de douter qu'une course au 0 % de taxation sociale et fiscale ne se traduise pas, en définitive, par quelques pertes ! La commission des finances sera en tout cas très heureuse d'apprendre que la France, dans le cadre de son programme de stabilité, doit d'ores et déjà renoncer à 191 millions d'euros en 2016 !
La commission rejette l'amendement SPE805.
Elle en vient à l'amendement SPE1800 des rapporteurs.
Il s'agit de prendre en compte les AGA après leur période d'incessibilité dans le pourcentage des actions détenues par les salariés. On résout ainsi la question de la proportion du capital que représentent les actions détenues par le personnel de la société et par le personnel des sociétés qui lui sont liées, dès lors que le salarié reste dans l'entreprise.
La proportion des actions souscrites par les salariés ou attribuées à ces derniers est communiquée à l'assemblée générale dans le cadre du rapport annuel. La mesure proposée n'est pas anodine dans la mesure où elle modifie les conditions de dépassement de seuil déclenchant l'obligation de désigner un administrateur représentant les salariés actionnaires dans les conseils d'administration ou les conseils de surveillance des sociétés cotées. Elle s'inscrit néanmoins dans la philosophie de l'action du Gouvernement pour remettre en cohérence l'ensemble des éléments fiscaux, sociaux et de représentation. Sous réserve de l'examen d'éventuels effets imprévus, avis favorable.
La commission adopte l'amendement SPE1800.
Elle examine ensuite l'amendement SPE806 de M. Patrick Hetzel.
L'assemblée générale extraordinaire ne prend pas stricto sensu de décision, mais elle autorise le conseil d'administration ou le directoire à procéder, au profit des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d'entre eux, à une attribution gratuite d'actions existantes ou émises dans les vingt-six mois qui suivent. La rédaction proposée par mon amendement SPE806 me semble mieux correspondre à la pratique réelle.
Je comprends votre volonté d'accélérer l'entrée en vigueur du dispositif. Votre amendement reviendrait néanmoins à rendre éligibles à la réforme des programmes qui ont déjà été décidés.
C'est pourtant logique. Nous mettons en place un nouveau régime incitatif ; si les programmes déjà passés ou en cours deviennent éligibles, nous créons un effet d'aubaine dont le coût budgétaire n'est pas insignifiant.
Je le confirme. Notre intention est que le projet de loi ne s'applique qu'aux nouveaux programmes autorisés en assemblée générale extraordinaire. Avis défavorable.
L'amendement risque de soulever un problème juridique et fiscal pour les bénéficiaires. Le texte précise que la décision relève de l'assemblée générale extraordinaire. Si cette décision ne relevait que du droit commun de l'entreprise, les AGA seraient considérées comme équivalentes à un salaire et soumises aux prélèvements classiques sur les salaires.
Quant à la question du moment auquel s'applique la réforme, elle sera traitée dans l'amendement suivant, qui devrait vous satisfaire. Avis défavorable.
Il faut en effet distinguer la question de l'entrée en vigueur et celle du régime fiscal et social applicable. Mais cet amendement a aussi pour objectif d'éviter la superposition de deux régimes, raison pour laquelle je le maintiens.
La commission rejette l'amendement SPE806.
Elle est saisie de l'amendement SPE1799 du rapporteur général et des rapporteurs thématiques.
Les assemblées générales extraordinaires qui statuent sur les AGA se réunissent en général au premier trimestre de l'année civile. Il est donc à craindre que cette loi ne devienne exécutoire qu'après la tenue de ces assemblées. Les décisions relèveraient alors de l'ancien régime fiscal, moins favorable. Cet amendement vise à appliquer le nouveau régime aux décisions prises à partir du 1er janvier 2015. Considérant que le dispositif est bon, j'invite le Gouvernement à faire preuve de volontarisme pour l'appliquer dès cette année. Ce n'est évidemment pas sans conséquences budgétaires, mais l'étude d'impact ne prend pas cette hypothèse en compte.
Quel est votre sentiment sur cette disposition peu commune de rétroactivité, monsieur le ministre ?
Tout en comprenant la position du rapporteur thématique, je préférerais que l'on s'en tienne à une application aux programmes décidés après la publication de la loi. En effet, le coût fiscal pour 2015 n'est pas totalement budgété. Avis défavorable tant que nous n'aurons pas expertisé la disposition. Discutons de la meilleure manière de sécuriser juridiquement les nouveaux programmes, mais évitons les effets d'aubaine !
Je m'en réfère à votre pratique, monsieur le président : ce qui est voté aujourd'hui pourra faire l'objet de discussions et d'évaluations, quitte à être retiré en séance publique. L'objectif est de mettre en place le plus vite possible un dispositif qui, j'en suis convaincu, montrera son efficacité.
La commission adopte l'amendement SPE1799.
Elle en vient à l'amendement SPE977 de M. Jean-Christophe Fromantin.
Mon amendement vise à étendre le bénéfice de l'article 34 aux stock-options dès lors que celles-ci sont assorties d'une incessibilité pendant deux ans.
Le régime des stock-options a l'avantage d'indexer le montant et la valeur de l'avantage sur une performance économique. Ce n'est pas le cas du mécanisme de l'article 34, qui fige la valeur de l'action gratuite. L'objectif est d'accroître l'attractivité des entreprises pour ses collaborateurs les plus performants, notamment dans les entreprises innovantes.
Les actions gratuites et les stock-options sont différentes par leur nature et par leur objet. Il me semble que votre objectif est pour partie satisfait par notre réforme puisque, dans l'un et l'autre cas, le régime d'imposition n'est plus compétitif.
Cela dit, les actions gratuites sont utilisées beaucoup plus largement au bénéfice de l'ensemble des salariés de l'entreprise et les délais réglementaires d'acquisition et de conservation sont des éléments de fidélisation qui n'existent pas dans le cas des stock-options. La philosophie de notre réforme nous fait donc pencher pour les actions de performance, nonobstant le coût budgétaire que représenterait votre amendement.
Considérant que votre amendement est largement satisfait, notamment en ce qui concerne les ETI, je vous invite à le retirer, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
Mon amendement – j'y insiste – prévoit une période d'incessibilité de deux ans qui met les stock-options au même niveau que les actions gratuites. Les stock-options étant indexées sur la performance, elles ont plus un grand pouvoir d'incitation que les actions gratuites. J'approuve l'évolution que vous prévoyez pour ces dernières, mais cela n'exclut pas pour autant une amélioration du régime des stock-options afin de disposer d'une palette d'incitations aussi large et attractive que possible par rapport à d'autres pays.
Avis défavorable. Le régime des stock-options est différent de celui des AGA. Il a connu des déviances telles que cette mesure ne me paraît pas opportune, sans compter les conséquences fiscales qu'elle emporterait.
La commission rejette l'amendement SPE977.
La commission adopte l'article 34 modifié.
Article 35 : Aménagement du dispositif des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises (BSPCE)
La commission est saisie de l'amendement SPE987 de M. Jean-Christophe Fromantin.
Cet amendement vise à faire évoluer la part des personnes physiques dans le capital des entreprises qui peuvent bénéficier des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises (BSPCE), en ramenant cette part de 75 % à 33 %. Dans ces entreprises en développement, des fonds d'investissement ou des acteurs industriels peuvent fréquemment dépasser le niveau de participation de 25 % prévu par l'article. En l'état, le texte risque de neutraliser l'efficacité du dispositif, d'autant que l'empêchement est applicable dès lors qu'un actionnaire dépasse cette proportion. Il s'agit, vous l'avez compris, d'élargir l'éligibilité aux BSPCE.
L'article 35 vise à rendre le régime des BSPCE suffisamment attractif pour les start-up et à corriger un défaut du système. En effet, lorsqu'une start-up crée une filiale, comme c'est fréquemment le cas lorsque l'entreprise développe deux activités, ou lorsqu'elle se rapproche d'une autre, elle ne peut distribuer ces bons de souscription à l'autre société. Bon nombre d'acteurs ont signalé cette faiblesse du dispositif.
Il est donc proposé que, lorsqu'une société crée une société fille et la détient jusqu'à 75 %, elle puisse continuer à émettre des bons au niveau de la fille de manière à intéresser les salariés à l'ensemble de l'activité. La mesure est particulièrement importante dans le domaine du numérique.
En abaissant le seuil à 33 %, le dispositif couvrirait des situations qui ne relèvent plus de la même logique : participations financières, acquisitions en tant qu'actionnaire minoritaire... C'est une tout autre philosophie – assurément pas celle du texte – qui pourrait conduire des start-up à prendre une participation minoritaire dans le seul but de distribuer des BSPCE. Avis défavorable.
Beaucoup de créations d'entreprises se font autour d'un projet autour duquel, à un moment donné, un partenaire industriel est fortement présent sans être appelé pour autant à contrôler l'entreprise. Il participe à son développement à des étapes où existe un besoin capitalistique fort. La répartition du capital au sein d'une entreprise innovante – un fonds ou un partenaire industriel qui apporte du capital au-delà de 25 % avant de se retirer deux ou trois ans après – est analogue à la relation fille-mère à l'intérieur d'une holding. Bien qu'elle procède de la même logique, cette configuration n'est pas éligible à un dispositif par ailleurs très intéressant et incitatif.
Cela dit, mon amendement vise plus une exception qu'un cas général et je veux bien le retirer.
L'amendement SPE987 est retiré.
La commission adopte l'article 35 sans modification.
Après l'article 35
La commission est saisie de l'amendement SPE918 rectifié de M. Arnaud Leroy.
Les jeunes sociétés utilisent fréquemment la forme très souple de la société par actions simplifiée, mais les dispositions statutaires n'assurent pas une protection suffisante pour qu'elles puissent dans tous les cas procéder à des offres de titres financiers au public. Une dérogation spécifique a été introduite pour les sociétés par actions simplifiées financées dans le cadre de financements participatifs – nous y reviendrons. Cet assouplissement a été néanmoins encadré par des exigences statutaires nécessaires à la protection des investisseurs et des épargnants. C'est ce qui me conduit à émettre un avis défavorable. Mais je comprends l'intention de l'amendement et vous suggère, monsieur Leroy, d'examiner comment ces sociétés pourraient opter pour des régimes juridiques qui leur permettraient d'être éligibles aux dispositifs prévus.
L'amendement SPE918 rect. est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement SPE96 de Mme Véronique Louwagie.
Un an après sa création, le PEA-PME – plan d'épargne en actions destiné au financement des PME et ETI – connaît un véritable succès populaire avec 80 000 ouvertures. Mais, paradoxalement, la collecte n'a pas dépassé 300 millions d'euros. La somme moyenne investie n'a été que de 4 000 euros par plan alors que le plafond est de 75 000 euros. Si seulement 5 000 PEA-PME étaient totalement remplis, le montant global de la collecte serait multiplié par deux, ce qui apporterait un réel soutien à nos entreprises, à la croissance et à l'activité.
Il est donc proposé par cet amendement d'exonérer d'impôt sur les plus-values pour une durée déterminée – qui pourrait s'étendre sur l'année 2015 – les cessions de titres ou de parts de fonds communs de placement ou de SICAV dès lors que le produit de ces cessions serait réinvesti dans un PEA-PME.
En plus d'augmenter la collecte, cette solution conférerait une nouvelle lisibilité au dispositif, sans aucun coût pour les finances publiques – puisque, hors de ce cadre, les plus-values n'auraient de toute façon pas été réalisées – et même avec une rentrée immédiate via la CSG et la CRDS.
Nous partageons tous l'objectif de financement des PME. Cependant, exonérer en totalité les plus-values de cession de tous types de titres avec pour seule condition le réemploi dans des PEA-PME provoquerait un appel d'air du fait du cumul de cet avantage avec celui qui est attaché auxdits plans. Par ailleurs, nous n'avons pas chiffré le coût fiscal de la mesure, mais il n'est certainement pas négligeable. Avis défavorable.
Si l'objectif est de garantir un succès immédiat au PEA-PME, la proposition est pertinente en ce qu'elle favoriserait un transfert par effet d'aubaine en 2015. On aurait là un choix fiscal et non un choix de financement de l'économie.
Le PEA-PME monte en puissance à un rythme peut-être insuffisant. Mais il a été instauré il y a moins d'un an et nous devons nous donner un peu de temps pour l'évaluer. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement SPE96.
La commission se saisit de l'amendement SPE763 de Mme Bernadette Laclais.
Il est fréquent, dans la vie des entreprises, d'être obligé de procéder à un apurement des pertes accumulées avant de procéder à une recapitalisation du fait de l'arrivée de nouveaux actionnaires ou d'une modification de la structure actionnariale.
Cette opération, communément appelée « coup d'accordéon », consiste en une augmentation de capital précédée d'une réduction de capital par imputation des pertes accumulées, à cette occasion les titres annulés disparaissent et de nouveaux titres sont créés. C'est cette dernière date de création qui est prise en compte pour calculer la durée de détention dans le calcul de l'imposition des plus-values, alors que de fait la durée de détention « réelle » est beaucoup plus ancienne.
L'amendement propose de considérer les opérations d'annulation de titres comme des opérations intercalaires pour le décompte de la durée de détention, car le mode de calcul actuel constitue un frein à l'assainissement et à l'apurement des pertes des entreprises pour de simples considérations fiscales.
Nous proposons donc la prise en compte de la date de souscription et d'acquisition des titres annulés.
Le constat que vous faites au sujet d'une insuffisance dans le système actuel est juste. Il y a cependant deux sujets sur lesquels je souhaite appeler votre attention.
Le premier est que le droit en vigueur applicable aux gains de cession des valeurs immobilières et droits sociaux des particuliers prévoit que l'abattement par durée de référence est toujours décompté depuis la date d'acquisition ou de souscription des titres par le contribuable – je vous renvoie à discussion précédente. Lorsque les titres cédés ont été souscrits dans le cadre d'une augmentation de capital, cet abattement est décompté depuis la date de souscription. Votre proposition conduit à déroger à ce principe en rendant plus complexe un régime récemment réformé alors même que vous souhaitez traiter une réelle aberration. Cela reviendrait à perturber un système qu'il faut stabiliser et qui, malgré tout, constitue une garantie juridique pour l'ensemble de nos contribuables.
Le second, est que, sur le plan juridique, on instaurerait une inégalité de fait selon que les titres cédés ont été souscrits lors d'une hausse de capital, précédée ou non d'une baisse de celui-ci motivée par des pertes. Dans l'hypothèse où les souscripteurs sont des actionnaires déjà présents dans la société des tiers, on déstabiliserait l'existant en créant une inégalité de traitement en fonction de la situation des actionnaires. Votre amendement soulève à cet égard des préoccupations d'ordre constitutionnel. Les cas que vous évoquez posent un problème réel à nombre d'entreprises ; la situation est connue mais nous ne l'avons pas traitée. Je vous propose de retirer votre amendement pour que nous puissions trouver avec vous une solution à même de rendre le système plus cohérent et de proposer une nouvelle réaction en séance.
L'argument de l'inégalité de traitement me gêne, car il est réversible : ceux qui sont déjà actionnaires sont traités de façon inégale... En revanche, j'entends parfaitement ce que vous dites au sujet du régime actuel et souscris à votre demande de retrait afin de revoir la rédaction avec vous.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, l'amendement SPE763 est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement SPE95 de Mme Véronique Louwagie.
Cet amendement propose de permettre aux ménages de déduire de leur impôt sur le revenu une partie des sommes versées sur leurs contrats d'assurance-vie. Il s'agit de modifier un article du code général des impôts par l'insertion de la mention des contrats d'assurance-vie visés à l'article L. 131-1- du code des assurances.
La réponse est toujours la même : nous nous heurtons à une contrainte de financement et un régime fiscal favorable existe déjà. La loi de finances rectificative pour 2013 a augmenté l'avantage comparatif de l'assurance-vie par rapport au droit commun, y compris par des produits permettant le financement de notre économie avec les contrats euro-croissance et vie-génération. Cela n'a pas entraîné de conséquences fiscales ou de coûts trop importants.
Il me semblerait injustifié de permettre la déductibilité des cotisations versées sur les contrats d'assurance-vie alors même que les capitaux et les rentes issus de ces contrats bénéficient déjà d'une fiscalité favorable. Dans un sens, votre proposition consiste à doubler cet avantage fiscal par un avantage social. Pour des raisons d'équité, on majorerait l'avantage fiscal existant à l'entrée et à la sortie du dispositif. La déductibilité des cotisations à l'entrée supposerait corrélativement de revoir le régime fiscal à la sortie si l'on souhaitait être neutre. Mieux vaut stabiliser le régime tel qu'il existe.
Votre proposition consiste à stimuler le dispositif et j'en comprends la philosophie, mais cela aurait un coût et induirait un avantage à l'entrée qu'on ne peut pas cumuler. Pour ces raisons, mon avis est défavorable.
Défavorable : cet amendement créerait un avantage fiscal inopportun ainsi qu'un effet d'aubaine peu compatible avec les objectifs que nous nous sommes fixés.
La commission rejette l'amendement SPE95.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements SPE787, SPE769 et SPE740 de Mme Bernadette Laclais.
La réduction d'impôt sur le revenu pour investissement dans les PME dans sa version actuelle présente un intérêt non incitatif pour les raisons suivantes : le périmètre des sociétés concernées, à savoir les petites entreprises de moins de cinq ans, limite fortement les possibilités d'investissement ; le taux de 1 % n'est pas incitatif au regard du niveau de risque important et de la faible liquidité des participations ; il est en concurrence avec d'autres possibilités de déduction classiques.
L'amendement SPE787 propose de revenir au taux historique de déduction de 25 % voire 30 % et de bénéficier d'un plafond identique à celui des sociétés de financement de l'industrie cinématographique et de l'audiovisuel (SOFICA). Les comparaisons montrent que d'autres pays sont allés beaucoup plus loin dans ce domaine avec succès.
L'amendement SPE769 concerne la limitation de la déduction d'impôt sur le revenu aux sociétés de moins de cinq ans, qui ne correspond pas aux besoins ; les investisseurs sont régulièrement appelés à effectuer des troisièmes, voire des quatrièmes tours dans des sociétés suivies et le délai de détention des participations tend à s'allonger de sept à neuf ans.
Le taux de sinistralité des jeunes pousses est tellement élevé qu'il est important que les investisseurs puissent répartir leur risque sur des sociétés de maturité différente.
Il est proposé d'aligner les sociétés cibles des régimes de réduction de l'impôt sur le revenu sur le modèle de l'impôt de solidarité sur la fortune.
L'amendement SPE740 part d'un constat : de nombreux particuliers souhaitent investir des montants, certes peu élevés, inférieurs à 10 000 euros, voire 5 000 euros mais qui, consolidés, peuvent représenter des sources de financement très significatives en phase de création ou d'amorçage. Or, la réalisation de tels investissements se heurte aujourd'hui à de grandes difficultés : les entrepreneurs redoutent d'être confrontés à un nombre élevé d'investisseurs ayant trop de divergences de vues.
Il est donc indispensable de rendre éligibles aux dispositifs de réduction d'impôt sur le revenu les sociétés en participation (SEP) pour disposer d'une structure de regroupement simple d'accès et de gestion, mais sécurisé, permettant l'investissement collectif dans un seul projet.
Ces trois amendements, vous l'avez bien compris, ont pour objet de supprimer des contraintes et d'alléger un certain nombre de dispositifs.
J'ai constaté, madame Laclais, que vous aviez d'ores et déjà le soutien du rapporteur thématique, cosignataire de vos amendements.
Je comprends votre volonté d'améliorer le dispositif ISF et l'imprimé fiscal unique existant ; toutes les situations que vous avez décrites sont avérées, je ne les contesterai pas sur le fond. Je vous épargnerai les longs argumentaires qui démontrent qu'on finance beaucoup les PME et que beaucoup a déjà été fait. Les moyens de rationalisation que vous proposez mériteraient d'être réalisés et je sais que vous avez défendu ces amendements dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances, mais ils ont un coût. C'est pour cette raison que le Gouvernement ne peut émettre un avis favorable à leur adoption.
En revanche, vos amendements suivants sont d'un autre ordre et participent mieux de l'esprit qui consiste à améliorer le financement de l'économie de façon pragmatique. J'aurai là plus de marge de manoeuvre puisqu'ils n'emportent pas de coût fiscal.
J'apprécie votre franchise car il est bon de se dire les choses aussi clairement ; je retire ces trois amendements. Cependant, en ce qui concerne les SEP, je vois mal quel coût peut être invoqué...
Les amendements SPE787, SPE769 et SPE740 sont retirés.
Article 35 bis (nouveau) : Réduction de dix ans à sept ans de la condition de non-remboursement des apports pour le bénéfice des dispositifs « ISF-PME » ou « Madelin »
La commission examine ensuite en discussion commune les amendements SPE750 et SPE753 de Mme Bernadette Laclais ainsi que les amendements SPE1914 et SPE1913 des rapporteurs.
L'amendement SPE750 veut revenir sur une disposition de la loi de finances pour 2011 qui, en interdisant le remboursement des apports avant la fin du dixième anniversaire desdits apports, a imposé de porter la durée de vie des sociétés d'investissement de business angels (SIBA) à dix ans avec obligation de maintien de l'intégralité de l'apport en capital sur cette période. Cette durée est un frein important à l'investissement.
Un horizon de dix ans n'a pas la même signification en fonction de l'âge des personnes concernées. Or, l'âge moyen des investisseurs au sein des SIBA est supérieur à soixante ans, ce qui pose problème, même si la durée de la vie tend à s'allonger.
La période d'investissement des SIBA s'écoule sur deux exercices ISF, soit environ deux ans.
L'obligation de conservation des titres des sociétés cibles pendant cinq ans ainsi que l'obligation de réemploi en cas de sortie avant cette échéance ramènent naturellement la durée de détention à sept ans. L'obligation de durée de vie de dix ans représente donc une double contrainte dont on voit mal la justification.
C'est pourquoi l'amendement SPE750 a pour objet de ramener la durée minimum des remboursements des apports à sept ans. Le principe même du réemploi a pour effet d'allonger la durée d'investissement. Il convient de noter que la redistribution des capitaux de la SIBA aux actionnaires ne peut intervenir que lorsque toutes les participations ont été cédées. Or, nous nous situons dans un marché où la liquidité est un énorme problème, ce qui tend déjà à allonger structurellement la durée de vie des fonds.
L'amendement SPE753 vise à taxer la plus-value dès sa réalisation et à n'exiger le réemploi que pour la partie investie à l'origine, afin de permettre à l'investisseur de cristalliser sa plus-value, si elle existe, nette de fiscalité. De fait, en cas de cession dans le délai de cinq ans, l'investisseur est tenu de réinvestir le montant total de la vente, déduction faite de la taxation de la plus-value, pour les SIBA comme pour les particuliers. Or, nous savons d'expérience qu'au moins 40 % des investissements réalisés sont des échecs avec un taux de sinistralité important. Le simple principe du réemploi conduit statistiquement à la perte de la quasi-intégralité des capitaux investis.
L'amendement SPE1914 est retiré.
En ce qui concerne l'amendement SPE1913, il devrait aussi porter le nom de Bernadette Laclais car il correspond à une réécriture de son amendement SPE750, qui fait par erreur mention de la sixième année et non de la septième ; je l'invite donc à retirer son amendement au bénéfice de mon amendement SPE1913, qui ramène effectivement la durée minimale des remboursements de dix ans à sept ans.
L'amendement SPE750 est retiré.
L'amendement SPE1913 reste dans la philosophie de Mme Laclais, qui souhaite ramener de dix à sept ans la durée minimale requise. Ce problème s'est vérifié plusieurs fois pour des SIBA qui investissent dans des sociétés et qui, pour remplir les critères de durée nécessaire au bénéfice des dispositifs ISF-PME et Madelin, sont parfois amenées à casser la valeur des sociétés qu'elles ont en portefeuille. La difficulté que présente la rédaction de cet amendement réside dans sa capacité à définir ces SIBA ; je demanderai donc la sagesse, tout en m'engageant à poursuivre les travaux jusqu'à la séance publique.
Nous allons travailler avec le Gouvernement à la définition précise des SIBA afin d'éviter toute difficulté d'interprétation, ce qui nous permet de maintenir l'amendement et de l'améliorer d'ici au vote.
L'amendement SPE753 vise à ramener de cinq à trois ans le délai de détention des titres requis pour bénéficier du dispositif ISF-PME, suivant la même logique que précédemment. Le Gouvernement partage le constat qui conduit à proposer cette mesure, car il est vrai que, pour certains investisseurs, deux années de plus sont nécessaires dans le cas particulier des start-up pour éviter les effets pervers.
Cependant, nous voulons être certains de maîtriser les effets pervers que cette mesure pourrait provoquer dans l'ensemble du paysage des investisseurs. Je vous suggère donc, madame Laclais, de retirer votre amendement, comme le rapporteur thématique l'a fait avec son amendement-miroir SPE1914, afin que nous puissions y travailler d'ici à la séance publique.
Je suis tout à fait d'accord pour y travailler avec le ministre ; et si l'on pouvait reparler des SEP en même temps, ce serait parfait.
L'amendement SPE753 est retiré.
L'amendement SPE1913 est adopté.
Membres présents ou excusés
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité
Réunion du vendredi 16 janvier 2015 à 15 heures
Présents. - Mme Karine Berger, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Christophe Castaner, M. Jean-Yves Caullet, M. Gérard Cherpion, Mme Corinne Erhel, M. Richard Ferrand, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Patrick Hetzel, Mme Bernadette Laclais, M. Jean-Luc Laurent, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Anne-Yvonne Le Dain, M. Dominique Lefebvre, M. Arnaud Leroy, M. Gilles Lurton, Mme Sandrine Mazetier, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Frédéric Poisson, M. Denys Robiliard, M. Jean-Louis Roumegas, M. Christophe Sirugue, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alain Tourret, M. Stéphane Travert, Mme Cécile Untermaier, Mme Clotilde Valter, M. Francis Vercamer, M. Philippe Vitel
Excusés. - M. Jean-Louis Bricout, M. Marc Dolez, M. Philippe Vigier