La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.
La parole est à M. Jacques Bompard.
Monsieur le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, madame la présidente de la commission spéciale, monsieur le rapporteur général de la commission spéciale, mesdames, monsieur les rapporteurs thématiques, ce projet de loi porte bien mal son nom. En effet, d’égalité il ne procurera pas, tant il est prisonnier de l’égalitarisme – votre attaque contre les écoles privées hors contrat le montre bien – ; de citoyenneté il ne sera pas question non plus puisque, au lieu de magnifier les vertus, vous encouragez la diffusion de l’idéologie partout où vous le pouvez. Ainsi, la création d’une réserve citoyenne pourrait être une excellente idée, mais à condition qu’elle soit réellement le fruit d’une pluralité d’acteurs, de penseurs et d’élus enracinés. Au lieu de quoi, c’est l’apothéose de la gauche idéologique : on le voit dès les artifices de cet article 1er.
Pourquoi permettre au seul Conseil d’État de discuter de la charte du service civique ? Pourquoi évoquer d’emblée des valeurs dont personne ne donne les mêmes définitions ?
Pourquoi se situer systématiquement dans l’idéologie alors que l’ordre et le bon sens sont si nécessaires aujourd’hui ?
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, le souhait du Président de la République de faire en sorte que les jeunes vivent mieux en 2017 qu’en 2012 est en train de se réaliser. Cette loi relative à l’égalité et la citoyenneté permettra aux jeunes de devenir des citoyens à part entière et d’être considérés comme tels. C’est un défi majeur auquel notre société est aujourd’hui confrontée, et ce pour plusieurs raisons – je pense, par exemple, à l’allongement de l’espérance de vie et à celle de la durée des études, à l’élévation du niveau moyen de qualification, ou encore au chômage, qui est encore trop élevé pour notre jeunesse, sans parler des conditions d’entrée dans l’âge adulte et d’accès à l’autonomie, largement modifiées depuis trente ans.
La réserve citoyenne, institution pérenne dont l’objet et la vocation sont de renforcer les valeurs républicaines de notre pays, comprend des dispositifs déjà existants : la réserve prévue par le code de la défense – qui devient « réserve citoyenne de défense et de sécurité » –, les réserves communales de sécurité civile, la réserve citoyenne de la police nationale – qui remplace le service volontaire citoyen de la police et de la gendarmerie nationales – et la réserve citoyenne de l’éducation nationale.
Cette dernière, créée après les attentats de janvier 2015, permet à des citoyens experts d’un sujet d’aller dans les classes apporter un autre regard aux élèves.
Dans la continuité de la grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République, la réserve citoyenne constitue une forme d’engagement individuel bénévole, destinée à être complémentaire des actions conduites par les associations partenaires de l’école. Les personnes sollicitées par les enseignants et les équipes éducatives sont principalement chargées d’illustrer, par des témoignages tirés de leur expérience professionnelle ou personnelle, les enseignements et les activités éducatives en matière d’éducation à la citoyenneté et à la laïcité, qu’il s’agisse d’éducation à l’égalité entre filles et garçons, de lutte contre toutes les formes de discrimination, de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, de rapprochement de l’école et du monde professionnel, d’éducation aux médias et à l’information. Cette nouvelle manière d’agir me paraît appropriée à la situation actuelle tout en prenant en compte les matières déjà enseignées à l’école.
L’éducation civique, par exemple, est une matière à part entière, un lieu privilégié pour mettre en évidence le message que portent les notions de civisme, de civilité et de laïcité, notions associées à celle de citoyenneté. Il nous faut continuer dans ce sens, pour notre jeunesse et son avenir.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que les interventions sur les articles ne peuvent dépasser deux minutes.
La parole est à M. Régis Juanico.
M. le ministre rappelait dans son intervention liminaire que l’un des objectifs du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté était de bâtir une culture de l’engagement citoyen. L’article 1er répond à cet objectif en créant une réserve civique qui donnera la possibilité à toute personne volontaire de servir les valeurs de la République, de « développer la fraternité, la cohésion nationale et la mixité sociale », selon les termes mêmes du projet de loi, en participant à titre occasionnel à la réalisation de projets d’intérêt général.
Je tiens à remercier Jean-Marc Sauvé et Claude Onesta pour leurs travaux précurseurs, synthétisés dans le rapport qu’ils ont remis au Président de la République. Il s’agit de deux experts : le premier est un grand juriste, vice-président du Conseil d’État, le second est aussi un expert à sa manière puisqu’il est à la tête de la sélection de l’équipe de France de handball, la plus titrée des équipes françaises de sport collectif. Ils ont fait un très bon travail, ce qui montre que nous avons parfois intérêt à diversifier les profils de ceux qui rédigent les rapports précurseurs.
J’avais indiqué en commission qu’il aurait été opportun d’ouvrir aux jeunes dès l’âge de 16 ans la réserve civique, et les rapporteurs m’avaient répondu qu’un amendement serait soutenu en ce sens en séance publique. Tel est l’objet de l’amendement no 833 des rapporteurs, qui permettra de mettre en cohérence les différentes avancées que nous réalisons pour les jeunes de 16 à 18 ans, dont je me réjouis – je pense notamment à la pré-majorité associative et aux droits de publication.
Je termine en soulignant le fait que la réserve civique va compléter et solidifier la notion de parcours citoyen tout au long de la vie. Il va falloir en effet donner une continuité et une cohérence aux différents dispositifs qui existent aujourd’hui afin de les articuler.
Il en est ainsi des quatre parcours éducatifs qui permettent, dès l’école élémentaire et au collège, de valoriser la participation des élèves à la vie sociale et à la vie associative des établissements, qu’ils soient délégués de classe ou qu’ils participent à une association sportive. Je pense aussi, bien évidemment, aux cours d’éducation morale et civique d’une durée 300 heures, au livret citoyen à 16 ans – qui récapitule les compétences et les engagements extrascolaires, notamment la participation au conseil municipal de jeunes ou au conseil municipal d’enfants, ou encore la formation aux premiers secours – et à la journée défense et citoyenneté, dont les modalités devront être repensées, au service civique, à l’article 14 qui prévoit la reconnaissance de l’engagement du jeune dans le cursus de l’enseignement supérieur et, enfin, au compte d’engagement citoyen dans le cadre du compte personnel d’activité et du volontariat associatif des plus de 25 ans.
Il faudra, monsieur le ministre, assurer à tout cela plus de cohérence en créant un livret numérique citoyen pour que l’ensemble de ces dispositifs fassent sens autour du parcours citoyen.
Cet article sur la réserve citoyenne, rebaptisée « réserve civique » dans le texte de la commission, nous permet d’entamer l’examen des articles du titre Ier : « Émancipation des jeunes, citoyenneté et participation ». Aux dix-neuf articles que comptait ce titre dans le texte initial se sont ajoutés 45 articles à l’issue des travaux de la commission spéciale, monsieur le ministre.
Ce titre fait évoluer la réserve citoyenne, crée un congé d’engagement ouvert aux associatifs bénévoles, reprécise les contours du service civique, reconnaît l’engagement étudiant, instaure une pré-majorité associative et évoque la journée défense et citoyenneté. Nous reviendrons sur tous ces sujets au cours de nos débats, y compris sur les articles 14 bis et 14 decies, dont je cherche toujours le lien avec ce projet de loi puisqu’ils traitent respectivement de l’instruction en famille et des établissements hors contrat, et que la ministre de l’éducation nationale n’est venue à aucun moment nous exposer ses arrière-pensées.
Mais j’en reviens à ce stade à l’article 1er, qui redéfinit la réserve civique, une réserve dont le groupe Les Républicains partage l’objectif puisqu’elle contribue à développer la fraternité, la cohésion nationale et la mixité sociale. La question reste celle de sa mise en oeuvre concrète et de sa promotion auprès de nos concitoyens. Nous serons donc extrêmement attentifs au contenu et à la rédaction de la charte de la réserve civique. À cet égard, je déplore qu’elle soit définie par décret en Conseil d’État, échappant donc au législateur que nous sommes.
Le présent projet de loi a été initié afin de réconcilier la jeunesse avec la République. Cependant, il s’agit surtout du texte de la réconciliation au sein de la majorité. Répondre au déficit de cohésion nationale était un objectif louable, mais les moyens ne sont clairement pas au rendez-vous. La quête d’indépendance des jeunes passe par l’emploi et je doute que les seules possibilités qui leur sont offertes dans ce texte, à savoir rejoindre des structures parapubliques, soient la réponse adaptée. Le désir d’entreprendre, de créer, d’innover doit irriguer la vie économique de notre pays, et il est malheureux que de telles initiatives ne soient nullement encouragées par le Gouvernement.
Dans le contexte de détournement de milliers de jeunes happés par la propagande djihadiste et de désaffection envers les valeurs de la République, vous nous proposez, monsieur le ministre, une évolution terminologique avec la « réserve citoyenne », qui va regrouper des réserves déjà existantes. Cette proposition est totalement insuffisante. Yves Fromion et moi-même proposons, nous, au nom du groupe Les Républicains, un véritable service civique de défense qui devrait permettre aux jeunes décrocheurs de trouver des repères solides au sein de la République. Alors qu’il y a presque 26 % de jeunes au chômage, on peut douter que des mesurettes telles que le droit à publication dès seize ans ou encore le suivi santé suffisent à endiguer le problème. On ne peut donc que constater l’inadéquation entre les ambitions initiales et la réalité du contenu du projet de loi. Il s’agit d’un texte politique, idéologique,…
…à quelques mois des élections présidentielles. Dommage. Ce n’est pas la belle image d’une République exemplaire.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 220 .
Il est bien dommage de commencer ce texte par une notion très mal définie, « les valeurs », plutôt simplement que par celle de service de la nation, notion concrète et chargée de sens pour tous. J’en veux pour preuve les débats ahurissants qui ont lieu il y a quelques mois : pour certains, les valeurs de la République, c’étaient la Sécurité sociale et le nucléaire, pour d’autres, leur intérêt local.
Je viens d’une terre, la belle ville d’Orange, où le tribunal révolutionnaire massacra des centaines de personnes au motif qu’elles ne respectaient pas les « valeurs de la République ». À Nantes, Carrier avait proposé de purger la nation de ceux qui n’adhéraient prétendument pas à ces valeurs.
Aujourd’hui, on en arrive à tout justifier au nom de valeurs que personne ne peut définir et qui font débat parmi les intellectuels et les historiens. Pensez-vous vraiment que votre gouvernement et les factions politiques possèdent un centième de la légitimité populaire pour définir des valeurs pour lesquelles le sang coula si atrocement pendant des années ?
La parole est à Mme Valérie Corre, rapporteure thématique de la commission spéciale, pour donner l’avis de la commission.
Monsieur le député, nous vivons actuellement dans une République, ne vous en déplaise. La rédaction retenue à l’article 1er – « les valeurs de la République » – me paraît donc tout à fait adaptée. Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, pour donner l’avis du Gouvernement.
Servir les valeurs de la République, c’est servir les valeurs de la France, de la nation, monsieur le député. Je sais bien que vous êtes encore une poignée à rêver d’un autre régime pour notre pays, mais les valeurs de la République constituent notre bien commun, ce qui fonde notre capacité à vivre et à faire ensemble. Que vous vous y opposiez ne me surprend guère. Mon avis est évidemment défavorable. C’est un avis de défense républicaine, justifié y compris à la vue de l’action qui est la vôtre en la qualité de maire d’Orange.
L’amendement no 220 n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1053 .
La solidarité est le sentiment de responsabilité et de dépendance réciproque qui existe au sein d’un groupe de personnes qui sont moralement obligées les unes par rapport aux autres.
Mon amendement vise à inscrire dans le texte la notion de solidarité, qui est la traduction juridique de la fraternité.
Vous me répondrez que la fraternité est plus exigeante. Pour autant, la solidarité humaine constitue un lien fraternel en même temps qu’une valeur sociale importante qui lie les destinées humaines. Dans une démarche humaniste, tous les hommes appartiennent à la même communauté d’intérêts.
Nous ne sommes pas ici pour faire des phrases, mais pour écrire le droit : mieux vaut donc employer le mot de « solidarité » que celui de « fraternité ».
Je suis comme vous attachée à la notion de solidarité, mais ne suis pas convaincue qu’elle ait une plus grande solidité juridique. Nous venons à l’instant de rappeler que la réserve civique a pour objectif de défendre les valeurs de la République : il me semble donc logique de maintenir la liberté, l’égalité et la fraternité. Avis défavorable.
Monsieur le député, nous avons eu sur ce point un débat intéressant en commission. Je comprends le sens de votre amendement, mais vous demanderai cependant de le retirer : la fraternité fait partie du triptyque républicain. Elle cimentera la réserve civique, laquelle vise à restaurer une confiance partagée entre les individus, au bénéfice de ce que nous pouvons appeler la cohésion nationale mais aussi de la mixité sociale. Il s’agit d’une démarche qui a un caractère fraternel, au sens littéral du terme. Dans la mesure où la fraternité fait partie de nos valeurs républicaines, je vous demande de retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement no 1053 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 218 .
Nous débattons des valeurs de la République, M. le ministre en parle beaucoup, mais il faudrait surtout qu’il les mette en pratique, parce qu’elles recouvrent normalement l’écoute et le respect des élus. Or vous avez un certain talent pour les mettre au ban.
S’agissant de mon amendement, la mixité sociale avait un lieu naturel d’expression : le service militaire. Elle s’imposait justement grâce à la nature singulière de l’armée, qui balaie les idéologies au profit du service du bien commun national, par-delà les origines de chacun.
Il était une formidable expression de ce qu’une nation peut donner et réussir.
Aujourd’hui que cet outil a été détruit, l’État veut créer une nouvelle forme d’implication de la jeunesse, ce qui pourrait être un bien si c’était fait dans un autre esprit. Mais ce que cette jeunesse rejette avec force, ce qu’elle ne supporte plus, c’est qu’on lui impose une idéologie d’État à tous les étages : une idéologie qui ne laisse pas à la société le soin de réaliser la mixité, mais qui veut l’imposer comme un objectif auquel chacun serait astreint de manière autoritaire.
La mixité ne s’impose jamais ; elle est le fruit d’une société fraternelle parce qu’elle est fondée sur le bien commun.
Dès l’alinéa 9, vous vous interdisez de voir progresser l’union chez les filles et les fils de la nation : quelle tristesse !
Monsieur le député, la réserve civique ne concerne pas seulement les jeunes mais s’adresse à toutes et à tous. Elle a bien vocation à favoriser la mixité sociale : c’est même le sens de sa mission.
Pour revenir sur certains de vos arguments, je trouve réjouissant que l’État réaffirme sa vocation à accompagner l’engagement : au lieu de simplement l’encourager à travers des associations, il doit en être le vecteur originel. Avis défavorable.
La parole est à M. Razzy Hammadi, rapporteur général de la commission spéciale.
Je prends la parole pour m’attarder quelque peu sur l’exposé sommaire de votre amendement. Je tiens à le lire parce que, quelquefois, les amendements défilent un peu vite et l’on relativise la force des mots et la violence des pensées.
Ce que vous voulez enlever, je le rappelle, ce sont les mots : « la mixité sociale ». Or vous écrivez : « Ajouter de l’idéologie juste après la défense de la cohésion nationale, c’est ajouter du poison là où l’on voudrait soigner un mal. »
C’est-à-dire que, pour vous, la notion de mixité sociale est un poison. Eh bien, je n’ai rien à ajouter pour vous définir.
Monsieur le député, le rapporteur général a évoqué votre exposé sommaire : pour vous, si j’ai bien compris – et je crains que ce soit le cas –, la mixité sociale serait une idéologie empoisonnante.
Je vous laisse cette manière de concevoir qui autorise les ghettos et le communautarisme : pour ma part, je garde la mixité sociale et je défends la cohésion nationale en maintenant le texte dans sa version actuelle. Avis défavorable.
L’amendement no 218 n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1052 .
Quand on définit le concept de citoyenneté, auquel fait écho la réserve civique, on évoque les droits et les devoirs du citoyen. Aussi, dans un simple souci de parallélisme, nous semble-t-il préférable de faire référence aux « droits » et « devoirs » des réservistes et des organismes d’accueil, plutôt qu’aux « engagements » et « obligations ».
Les droits et les devoirs s’appliquent à tous les citoyens, engagés ou non. Nous avons tous des droits et des devoirs.
En l’espèce, il s’agit de définir les modalités d’entrée dans la réserve civique : il me semble donc nécessaire et plus utile d’écrire « engagements » et « obligations ». Cette terminologie me paraît plus adaptée à ce qui est demandé aux réservistes. Avis défavorable.
Monsieur le député, l’engagement volontaire des personnes physiques constitue vraiment le moteur de la réserve civique, laquelle comporte un certain nombre d’obligations pour ceux qui vont y prendre part.
Il me paraît donc indispensable que les termes « engagements » et « obligations » soient inscrits dans la loi. Avis défavorable.
Je profite de ce débat portant sur l’alinéa 10 pour prendre la parole.
Je vous rejoins, monsieur le ministre, sur cette question des « engagements » et des « obligations ». En revanche, je regrette que notre collègue M. Laurent n’ait pu être présent pour défendre l’amendement qu’il avait déposé afin que les principes directeurs restent du domaine de la loi. Comme je l’ai dit en m’exprimant sur l’article, j’estime qu’ils doivent être définis dans la loi, tandis que les textes réglementaires fixent les modalités d’organisation.
Nous allons voter un article 1er qui redéfinit la réserve citoyenne, devenue « civique », et qui mentionne une charte. J’aurais aimé quant à moi que nous précisions les principes directeurs de cette dernière, ce qui nous aurait évité le genre de remarques faites tout à l’heure par M. Bompard.
L’amendement no 1052 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 1553 .
Quand on a une majorité aussi écrasante que la vôtre, on n’a pas besoin de déformer les propos de l’opposition. Contrairement à ce que vous avez dit, dans mon esprit, c’est l’idéologie qui est haïssable et non la mixité sociale.
Cet amendement vient en complément de celui que j’ai défendu précédemment. Vous voulez défendre les valeurs de la République : c’est bien, mais vous vous montrez incapables de présenter une charte montrant la manière dont vous-mêmes les définissez.
Vous voulez exclure de la discussion nationale ce qui devrait constituer le corps de votre service civique.
Qui va mener ce débat-là ? En réalité, vous ne rédigez pas un texte de loi, vous agitez des slogans pour tenter de réunir votre camp explosé par votre gestion.
Je vous cite un professeur de droit public qui a beaucoup plus de talent que moi, pauvre petit chirurgien-dentiste. Il s’agit de Frédéric Rouvillois qui nous dit ceci : « Selon l’article 89 alinéa 5 de notre Constitution, ’’la forme républicaine du Gouvernement ne peut faire l’objet d’une révision’’. Mais personne ne sait au juste en quoi consiste cette ’’forme républicaine’’ : est-ce l’absence de monarchie ? La souveraineté ? Le système de sécurité sociale mis en oeuvre après la guerre ? C’est un mot sans consistance, un trou noir qui paralyse la pensée et empêche tout débat profond sur les idées politiques. »
Voilà à quoi vous parvenez avec talent : la paralysie par excès d’idéologie. L’idéologie qui est haïssable. Vous paralysez l’État au moment où la crise nécessiterait de l’efficacité et du bon sens.
Permettez-moi de réagir au début de votre propos, monsieur le député, en vous demandant en quoi parler de mixité sociale serait faire de l’idéologie. Mais nous n’allons pas en débattre toute la soirée.
Les premiers articles définissent le contenu de la réserve et non les détails de l’accueil. Nous avons précisé en commission que le Haut Conseil à la vie associative – HCVA – donnerait son avis sur la charte. Nous n’avons pas besoin d’encombrer davantage les travaux parlementaires. Il me semble que nous sommes déjà suffisamment entrés dans le détail de l’organisation. Il appartient au décret de la préciser. Avis défavorable.
Monsieur Bompard, j’ai essayé de comprendre votre argumentation, en tout cas celle du juriste que vous avez cité. Le concept de République ne paraît pas très clair dans votre esprit, mais nous pourrons en débattre à d’autres moments.
En tout cas, la charte qui est définie par décret en Conseil d’État ne peut être soumise au Parlement : cela n’aurait pas de sens, vous le reconnaîtrez. Mais rien n’empêche le Parlement, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle de l’action publique, de formuler sur cette charte une appréciation. Il aura toujours cette possibilité en la matière et je m’en félicite.
Je propose donc de ne pas retenir votre amendement.
L’amendement no 1553 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Corre, rapporteure thématique, pour soutenir l’amendement no 435 .
Avis favorable.
Une question de calendrier, monsieur le ministre : puisqu’il est question de consulter le Haut Conseil à la vie associative pour l’élaboration de la charte, quand pensez-vous que la loi sera votée ? Quand pensez-vous que le Haut Conseil pourra être saisi et que cette charte sera rédigée ? Est-ce l’affaire de quelques mois, ou d’une année ?
Je vous pose la question parce que nous avons eu un autre débat, sur un autre texte, à propos des principes fondamentaux du code du travail. Il me paraît important de connaître les principes directeurs et de savoir sur quel calendrier ce sera possible.
Madame la députée, il y aura une lecture de ce texte au Sénat à la mi-septembre, selon toute vraisemblance. J’espère donc que la loi sera adoptée à l’automne. Je pense que nous pouvons prendre l’engagement que la charte soit disponible avant la fin de l’année 2016.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1051 .
Cet amendement vise à réécrire l’alinéa 12. Il me semble en effet que l’État ne peut se porter garant des finalités de la réserve civique telles qu’elles sont définies à l’alinéa 9, c’est-à-dire « développer la fraternité, la cohésion nationale et la mixité sociale ». Il s’agirait d’une forme de droit de créance sur ces concepts au demeurant tout à fait honorables. Considérer que l’État est garant de ces finalités nous paraît bien présomptueux et difficilement applicable juridiquement.
L’amendement dispose donc que l’État « veille au respect des règles de la réserve civique », ce qui ne change pas la nature du texte mais paraît plus réaliste.
Pour le coup, monsieur le député, il y a un désaccord entre nous. Il me semble, précisément, que l’État est garant du respect de la fraternité, de la cohésion sociale, de la mixité sociale et du respect de nos valeurs. De surcroît, au-delà de ce débat, la rédaction que vous proposez n’améliore pas vraiment le texte.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Monsieur le député, cet amendement est déjà satisfait puisque l’État est garant de la réserve conformément à l’alinéa 12 de l’article 1er, mais aussi à l’alinéa 2 de l’article 2, ou encore à l’alinéa 3 de l’article 3 ainsi qu’à l’alinéa 3 de l’article 4. Ces garde-fous me paraissent très largement suffisants. Avis défavorable.
L’amendement no 1051 n’est pas adopté.
Le Gouvernement vous propose de revenir sur un amendement adopté en commission qui nous paraît inopportun, voire comporter des difficultés majeures quant à la question de la réquisition des réservistes civiques.
Réquisitionner les réservistes civiques nous semble aller à l’encontre de la nature même de la réserve citoyenne – devenue « civique » par voie d’amendement. Qui plus est, le pouvoir de réquisition s’applique à tous les citoyens, je dis bien à tous les citoyens, quels qu’ils soient, et le préfet de la zone de défense, lorsque les circonstances l’exigent, peut solliciter des moyens publics ou privés en tant que de besoin.
Ainsi un individu, par ailleurs réserviste citoyen, pourra être réquisitionné – non en tant que réserviste, mais en raison de ses compétences et du lieu où il réside.
La réserve civique n’est donc pas une réserve d’urgence. Par exemple, lors des dernières inondations, la réserve civique aurait pu être mobilisée non pas pour aller sauver des personnes ou des biens – ce qui relève de la compétence d’autres services d’État ou municipaux – mais pour aider les victimes a posteriori lors du pic de crise à nettoyer leur habitation ou encore à remplir les dossiers d’assurance, compte tenu notamment des difficultés psychologiques que l’on peut connaître après avoir subi un tel drame personnel.
Créer un pouvoir spécifique de réquisition pour les réservistes civiques aurait des conséquences très lourdes en ce qui concerne tant le régime de responsabilité applicable dans une situation d’urgence que les obligations des employeurs.
La réserve civique doit conserver son caractère volontaire alors même que, par ailleurs, des outils sont mobilisables en temps de crise pour répondre aux besoins visés. Tel est le sens de cet amendement.
Compte tenu de ces explications très précises et juridiquement argumentées rappelant comment, dans le cadre de notre droit, chacune et chacun d’entre nous peut être réquisitionné, il est évident que je suis favorable à l’adoption de cet amendement visant à supprimer l’alinéa 13.
Nous sommes d’accord avec vous, monsieur le ministre : la réserve civique n’a absolument pas les mêmes missions que la réserve opérationnelle. La première, dans sa composante armée, a pour but d’animer la relation entre l’armée et la nation avec des bénévoles, la seconde, de renforcer des effectifs militaires et de gendarmerie. La première n’a donc pas vocation à être mobilisée en cas de crise. Sur ce point, nous vous rejoignons.
L’amendement no 1396 est adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
Après un article 1er que j’ai trouvé très idéologique, l’article 2 est absolument incompréhensible.
Vous présentez un service civique sans charte ou avec une charte dont personne ne comprendra d’où elle vient.
Dès à présent, vous établissez que l’État pourra accorder des conventions. Quelles seront-elles ? Viseront-elles à préserver une liberté communale en matière de service civique ? Viseront-elles à renforcer la transmission des cultures locales, par exemple des langues vernaculaires ? Comment imaginer ce cadre ? Permettra-t-il à de mauvais gestionnaires locaux de créer de fausses initiatives à des fins électorales ou autres ?
Nous savons qu’une telle initiative, si elle n’est pas parfaitement encadrée, s’ajoutera à des travers déjà insupportables pour nos compatriotes et accentuera les gabegies. C’est donc un risque que vous voulez courir, à moins que vous ne vouliez appliquer les recettes électorales que Terra Nova vous a confiées. Déjà, le gaspillage est la règle avec les strates du mille-feuilles administratif des collectivités. Au lieu de corriger cette aberration, vous risquez d’en créer de nouvelles.
Vous gardez la parole, monsieur Bompard, pour soutenir l’amendement no 215 .
Il importe d’éviter la création de monstres administratifs gérant un service public déjà très mal défini. Je vous propose donc de ne laisser les engagements à plus de deux parties que dans des cas extrêmement particuliers, qui pourraient être définis par le bon sens.
En l’état, nous savons parfaitement ce qui va advenir : les assemblées locales vont sauter sur l’occasion pour susciter de nouveaux débats complexes entre le monde associatif, les diverses strates des mille-feuilles administratifs et les oppositions politiques locales. Nous verrons une intercommunalité en guerre avec une commune chercher à faire pression sur un département rétif au conseil de la région comme, hélas, nous l’avons déjà vu localement.
Au milieu de ce vaudeville, préfets et préfets de région joueront des arbitrages complexes, laissant une image déplorable auprès de la jeunesse.
Évitons dès à présent le n’importe quoi ! Tel est l’objet de mon amendement.
Vous jugiez cet article incompréhensible, monsieur le député, mais l’amendement proposé le rendrait illisible. Avis défavorable.
Que veut le Gouvernement, monsieur Bompard ? Constituer des sections territoriales par commune ou pour deux communes ou plus, ce qui permettra au dispositif d’être opérationnel.
Si je vous ai bien compris, cet amendement vise quant à lui à limiter la constitution de réserves à un maximum de deux communes. Cela ne présente aucun intérêt et entraînera même des difficultés – que vous dénoncez par ailleurs. Quid également des petites communes rurales ? Ne pourraient-elles pas créer de sections communes à dix ou vingt, sur le modèle des intercommunalités ?
Dans ces conditions, le Gouvernement est évidemment défavorable à votre amendement.
L’amendement no 215 n’est pas adopté.
L’article 2 est adopté.
Je reviens sur la question de la charte du service civique, censée préciser les articles 1er à 3. En fait, nous discutons dans le vide de vos ambitions idéologiques.
Il est évident qu’après avoir assisté à la division de la société – avec le mariage pour tous et la réforme du collège – et après avoir constaté les dérives idéologiques des membres du Gouvernement, nous sommes en droit de nous poser des questions.
En proposant plus loin dans le texte de revenir sur cette liberté fondamentale qu’est l’éducation, vous prouverez encore une fois que l’on a bien raison de rester dubitatifs face à de telles initiatives.
Je vous demande de retrouver votre bon sens : vous nous demandez de voter un alinéa 2 disposant que l’inscription dans la réserve civique est subordonnée à l’adhésion du réserviste à la charte mentionnée à l’article 1er, sans que nous connaissions cette dernière. Parlera-t-elle de la théorie du genre, niera-t-elle les racines chrétiennes de notre pays, s’en prendra-t-elle aux libertés fondamentales ?
Eh bien oui : si l’on n’en dispose pas, on peut avoir des doutes. Ce serait donc tout de même mieux que nous l’ayons.
Il s’agit d’ouvrir la réserve civique à partir de 16 ans pour tous les jeunes, avec notamment en point de mire les jeunes en difficulté, afin de leur permettre de s’inscrire puis de s’investir dans une démarche citoyenne qui pourra être structurante pour leur avenir.
La parole est à M. Jean-Pierre Allossery, pour soutenir l’amendement no 264 .
Cet amendement est similaire à celui défendu par Mme Got puisqu’il s’agit, comme nous en étions convenus lors du débat en commission, d’ouvrir la réserve généraliste aux mineurs de plus de 16 ans, sous réserve de l’accord préalable des parents, et tout en sachant, bien entendu, que ce dispositif est ouvert à tous les jeunes, pas seulement à ceux qui connaissent des difficultés – au contraire, la réserve a vocation à accueillir tous les publics et à favoriser la mixité sociale.
Je suis heureux et satisfait de constater que M. le rapporteur général a déposé avant moi un amendement qui rejoint celui-ci, malheureusement rejeté en commission alors qu’il lui était tout à fait similaire.
Néanmoins, l’amendement que je propose sécurise un peu les parents. Je précise en effet que la responsabilité des parents d’un mineur de 16 ans engagé dans la réserve civique ne peut être engagée que sur le fondement de l’article 1384 du code civil si ce jeune a commis un fait de nature à engager sa propre responsabilité civile dans les conditions prévues par la présente loi.
De même, à la différence de l’amendement que j’avais déposé en commission, je précise que le jeune mineur de 16 ans est exclu de certaines missions, notamment de maintien de l’ordre, de défense et de sécurité. J’entends donc maintenir mon amendement.
Monsieur Dive, je préfère renvoyer à un décret le soin de fixer les conditions de participation des mineurs à la réserve. Je vous prie donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable, comme ce fut déjà le cas en commission.
Je prie également Mme Got et M. Allossery de bien vouloir retirer leur amendement au bénéfice du mien. Sinon, j’émettrai une fois encore un avis défavorable.
Le Gouvernement est favorable à l’adoption de l’amendement présenté par Valérie Corre et souhaite le retrait des autres amendements en discussion commune. À défaut, avis défavorable.
M. Dive a porté un jugement d’ailleurs amusé – si j’en crois son sourire –, mais je tiens à rappeler l’état d’esprit qui a présidé au travail en commission sous l’autorité de notre présidente Annick Lepetit.
Je ne peux laisser dire, monsieur Dive, qu’il y a eu une opposition de principe à votre amendement parce qu’il venait de vous. Je vous renvoie au rapport : la question de l’âge – 16 ans, en l’occurrence – est un enjeu en termes de responsabilité civile et il convient donc d’y travailler juridiquement.
Je vous fais un aveu : la description juridique de l’ensemble des conditions n’étant pas résolue, le renvoi au décret s’impose.
Votre amendement, en l’état, n’est pas exhaustif, même si je note que vous en avez amélioré la rédaction, en ajoutant un certain nombre de conditions. Néanmoins, vous ne proposez pas, à ce stade, ce que je crois pouvoir être, demain, le décret d’application de cette mesure.
Je voulais surtout rappeler, en toute franchise, l’état d’esprit qui a été le nôtre au cours des débats en commission. Du reste, certains de vos amendements ont été acceptés.
L’article 3 précise que la réserve civique est ouverte aux personnes majeures. C’est pourquoi nous avions proposé en commission spéciale, avec Pascale Got et plusieurs collègues, d’ouvrir la réserve civique aux jeunes de 16 à 18 ans.
Après discussion au sein de la commission spéciale, la rapporteure thématique a souhaité que nous retirions notre amendement, ce que nous avons fait, au profit d’un nouvel amendement, qui vient de nous être proposé. Ouvrir la réserve aux jeunes de 16 ans présente l’intérêt de donner une cohérence au parcours citoyen que nous proposons aux jeunes. Désormais, comme le Président de la République s’y est engagé, tous les jeunes de 16 ans se verront remettre un livret citoyen. Ils ont déjà la possibilité de faire un service civique et ils s’investissent également à travers le recensement, qui est une étape importante avant les journées défense et citoyenneté.
Un certain nombre de dispositifs citoyens sont déjà ouverts aux jeunes de 16 ans. Il est donc tout à fait logique, à condition qu’ils aient reçu l’accord préalable écrit de leurs représentants légaux, que la réserve civique le leur soit également, d’autant plus que nous allons, dans la suite de l’examen de ce projet de loi, voter d’autres dispositions importantes sur la pré-majorité associative à 16 ans et sur la question du droit de publication. Mes collègues et moi-même retirons donc l’amendement no 287 .
L’amendement no 287 est retiré.
Si j’ai bien compris, la réserve généraliste réunit la réserve citoyenne définie par le code de la défense, les réserves communales, la réserve citoyenne de la police nationale, la réserve nationale de l’éducation nationale et des réserves à vocation thématique qui pourront être créées par la loi.
Pour les jeunes âgés de 16 à 25 ans, il existe déjà un excellent dispositif, le service civique, dont vous souhaitez faire la promotion. J’aimerais que l’on m’explique concrètement la différence qu’il y aura demain entre la réserve généraliste ouverte aux mineurs de 16 à 18 ans et le service civique. En quoi leurs missions différeront-elles ? Le service civique existe depuis plusieurs années et ses missions sont claires, mais j’aimerais savoir quelles seront les missions des jeunes qui s’engageront dans la réserve citoyenne – s’agissant de l’accord écrit préalable des représentants légaux, je vous suis totalement.
Je le répète : si les missions du service civique sont claires, celles de la réserve civique me semblent l’être beaucoup moins, et j’aurais du mal à expliquer la différence entre ces deux dispositifs à des jeunes âgés de 16 à 18 ans qui me la demanderaient.
Cela étant, je partage l’idée qu’il faut favoriser l’engagement des jeunes au service de la nation.
J’aimerais, puisque j’en suis cosignataire, soutenir l’amendement de mon collègue Julien Dive, qui propose l’élargissement du dispositif aux jeunes de 16 ans.
J’aimerais également poser une question à M. le ministre sur le statut juridique d’un citoyen intervenant dans le cadre de la réserve civique : la notion de collaborateur occasionnel du service public s’applique-t-elle ? Par ailleurs, le fait qu’il soit mineur peut-il avoir une incidence ?
Madame Le Callennec, la différence est nette entre le service civique et la réserve civique. Un jeune en service civique est âgé de 16 à 25 ans – et il peut avoir jusqu’à 30 ans s’il porte un handicap – ; il effectue une mission de six à douze mois, qui est rémunérée. Il s’agit donc d’une mission à moyen ou long terme, au service d’une association ou au sein d’une collectivité territoriale. Cela n’a rien à voir avec la réserve civique, dans la mesure où un jeune inscrit dans celle-ci peut par exemple être appelé pour nettoyer une plage souillée par des hydrocarbures pendant deux ou trois jours.
Les missions du service et de la réserve civiques sont donc très différentes, mais notez qu’un jeune en service civique pourra très bien être inscrit en réserve civique, sur des missions différentes. Je rappelle que la réserve civique est bénévole, et que les contraintes d’âge ne sont pas les mêmes, puisque des personnes de 40, 50, 60 et même 80 ans pourraient être inscrites dans une réserve civique.
S’agissant de votre question, monsieur Morel-A-L’Huissier, le statut est bien celui de collaborateur occasionnel.
L’amendement no 264 est retiré.
Je voulais vous répondre d’un mot, monsieur le rapporteur général : mon sourire amusé répondait au vôtre, et c’est tant mieux si nous pouvons créer une bonne ambiance dans cet hémicycle, tout en travaillant sérieusement.
Cela étant dit, monsieur le rapporteur général, si vous avez une idée précise de ce que pourrait être la rédaction du décret, pourquoi ne l’avoir pas proposée par voie d’amendement ? Cela nous aurait fait gagner un temps considérable.
Comme je ne suis pas borné, je vais tout de même retirer mon amendement, au profit de celui du rapporteur général et de la rapporteure thématique.
L’amendement no 796 est retiré.
L’amendement no 833 est adopté.
Cet amendement vise à inscrire de fait dans la réserve civique les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles militaires. J’ai moi-même été élève en classe préparatoire au Prytanée national militaire de La Flèche, dans la Sarthe, qui préparait particulièrement au concours d’officier dans l’armée.
Du fait de la formation reçue dans ces établissements et des conditions médicales requises pour y entrer, il me paraît tout à fait imaginable que les étudiants inscrits dans ces classes préparatoires figurent de fait dans la réserve civique.
J’ai donc proposé que les élèves des lycées militaires qui satisfont aux conditions médicales nécessaires soient systématiquement intégrés au dispositif au cours de leur formation, sauf avis contraire des élèves concernés ou de leurs représentants légaux, lorsqu’ils ne sont pas majeurs. Ils sortiront automatiquement de cette réserve civique au terme de leurs classes préparatoires.
Monsieur le député, nous avons déjà eu un débat similaire au sujet du service civique, puisqu’un amendement visait à le rendre obligatoire pour les élèves des grandes écoles. J’utiliserai le même argumentaire pour repousser votre amendement.
L’engagement ne peut pas être imposé : chacun doit en prendre la décision seul, en son âme et conscience. Rendre ce type d’engagement obligatoire reviendrait à en faire autre chose. Peut-être la question se posera-t-elle un jour, mais en tout cas ce n’est pas ainsi que nous avons conçu la réserve civique. Avis défavorable.
Monsieur le député, je veux rappeler le caractère volontaire de l’engagement individuel dans la réserve civique : c’en est le principe même. Créer une automaticité ou une obligation d’appartenance à la réserve du fait que l’on suit un enseignement serait contraire à l’esprit dans lequel nous créons cette réserve. L’engagement peut naturellement être proposé aux élèves des classes préparatoires, mais le rendre obligatoire serait contraire à notre volonté de faire de cette réserve une nouvelle forme de mission de service public. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur le ministre, madame la rapporteure thématique, le terme « obligatoire » n’apparaît nulle part dans mon amendement. Il est même précisé que tout élève peut s’y opposer : « sauf avis motivé contraire de l’élève concerné », est-il écrit. Je propose certes une automaticité, mais l’élève qui ne souhaite pas figurer dans la réserve civique peut parfaitement le signaler, au moyen d’un simple avis – le sien ou celui de ses représentants légaux.
Je remercie Mme la rapporteure thématique pour sa courtoisie, car c’est moi qui ai déposé un amendement sur le service civique, dont l’esprit était comparable au vôtre, et qui a été repoussé. Je comprends donc la logique de votre amendement, monsieur Dive.
Néanmoins, l’obligation est bien présente dans votre amendement, puisque vous indiquez que l’élève « fait partie intégrante » de la réserve civique. Il y a bien là une contrainte.
Par ailleurs, dans la pratique, comment cela se passera-t-il ? On va dire aux gens que, sauf avis contraire, ils figureront dans la réserve – un peu comme la liste Pacitel pour les numéros de téléphone. Mais cela ne fera pas pour autant une véritable liste de réservistes : encore faut-il présenter des aptitudes et des compétences. Ce n’est pas parce que l’on étudie dans une classe préparatoire aux grandes écoles ou une école militaire que l’on maîtrise les préceptes de base du secourisme.
Enfin, rien n’empêchera les réservistes qui ne le sont devenus que parce qu’ils n’ont pas exprimé le souhait de ne pas l’être, de refuser toutes les missions qui leur seront proposées. On va créer un fichier de réservistes, évaluer leurs compétences, créer une surcharge administrative, et ces hommes pourront, au prétexte que l’engagement est volontaire, refuser de participer aux missions qui leur seront proposées. Il semble souhaitable et sage de rester fidèle à l’esprit du volontariat de bout en bout.
L’amendement no 803 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 1417 .
Il s’agit là d’un amendement de repli, car je défendrai, à l’occasion de l’examen d’un autre article, un amendement qui vise à aller encore plus loin. Mais je peux déjà en présenter l’esprit.
Étant donné que la réserve civique est ouverte aux étrangers dans les mêmes conditions que le service civique, nous proposons qu’il soit tenu compte de la participation à la réserve civique, qui témoigne d’une volonté d’intégration et de promotion des valeurs de la République, pour les étrangers qui l’auront souhaité au moment du renouvellement du titre de séjour, au cours du contrat d’accueil et d’intégration, ou lors du premier renouvellement consécutif à l’exécution de ce contrat.
Madame la députée, je ne suis pas forcément défavorable sur le fond à ce que vous proposez. Le seul problème est que le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile va changer au 1er juillet, y compris l’article que vous voulez modifier.
Il me semblerait donc préférable de revenir sur cette question lors de la prochaine lecture de ce texte. La commission a émis un avis défavorable.
Au-delà de la question de forme soulevée par Mme la rapporteure thématique, je vous donnerai aussi quelques éléments de réponse sur le fond.
Je comprends le sens de votre amendement, madame Carrey-Conte. Il est évident que l’adhésion à la réserve civique pourrait être un facteur à prendre en compte lors du renouvellement de la carte de séjour, éventuellement par le biais d’une analyse réglementaire. Toutefois, je vais vous demander de retirer votre amendement, parce qu’en complétant l’alinéa 3 de l’article L. 311-9 du CESEDA, vous complétez la liste de ce qui doit faire obstacle au premier renouvellement de la carte de séjour après la période du contrat d’accueil et d’intégration.
Je m’explique : l’absence d’adhésion aux valeurs fondamentales de la République et le manque d’assiduité aux formations linguistiques sont des causes de non-renouvellement. Votre ajout me paraît donc peu opérant et de nature à créer une confusion préjudiciable aux intérêts mêmes du demandeur. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
L’amendement no 1417 est retiré.
L’article 3, amendé, est adopté.
Nous pouvions vous laisser le privilège de l’hésitation quant aux objectifs réels de votre charte, mais là, tout s’éclaire : l’idée n’est pas de servir la mobilisation des petites patries ou l’accompagnement de la société civile dans son engagement pour le bien commun. Pour s’en convaincre, il n’est qu’à constater que vous excluez du dispositif les associations cultuelles ou politiques, les structures syndicales, les congrégations, les fondations d’entreprise ou les comités d’entreprise.
Je ne peux que vous féliciter de préserver nos jeunes des horreurs des factions politiques
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Il eût été dommage qu’une personne voulant s’engager pour le bien commun finisse à l’Union nationale des étudiants de France – UNEF – pour servir une idéologie.
Mais pourquoi exclure les congrégations ? Quels sont leurs torts ? Est-ce le fait de proposer l’éducation ouverte à tous, le soin aux pauvres ouvert à tous, la culture ouverte à tous ? Je crains que vous ne retombiez dans les vieux délires complotistes de la gauche qui rêvait d’interdire la Compagnie de Jésus.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Il est malheureux que vous en veniez à nous rappeler des heures bien sombres de la République.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 217 .
J’en reviens à cette charte des valeurs civiques, qui nous poursuit jusqu’à l’article 4. J’ai bien noté que vous ne souhaitiez pas répondre sur le fond. Je vous propose donc d’éviter un écueil inéluctable de votre texte en retenant l’interprétation du bien commun faite par la philosophie chrétienne depuis des années : « toute l’activité politique et économique de l’État est ordonnée à la réalisation durable du bien commun, c’est-à-dire de ces conditions extérieures nécessaires à l’ensemble des citoyens pour le développement de leurs qualités, de leurs fonctions, de leur vie matérielle, intellectuelle et religieuse ».
Cette interprétation vous évitera le laïcisme militant, l’attaque violente contre les congrégations, la remise en cause des patries charnelles et finalement l’intrusion de l’État partout, alors que personne ne veut plus de son idéologie nulle part.
Je ne suis pas tout à fait sûre d’avoir compris votre proposition, monsieur le député.
Mais il est sûr que votre amendement reviendrait à introduire la redondance suivante dans le projet de loi : « un projet d’intérêt général répondant au bien commun ». Avis défavorable.
L’amendement no 217 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 439 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 160 .
Les dominicains, ordre mendiant depuis les origines ; les franciscains, qui assurent un service à Jérusalem reconnu par tous ceux qui se rendent dans cette ville sainte ; les lazaristes aux actions médicales universellement reconnues ; les bénédictins et les cisterciens, qui accueillent tant de Français à des moments cruciaux de leur vie : voilà des congrégations constitutives de l’histoire de notre pays, qui ont façonné notre culture. Mais, visiblement, il fallait surtout que votre gouvernement finisse de provoquer l’identité française.
Il n’est pas acceptable de toujours attaquer de manière détournée une France qui a trop souvent le tort de ne vous donner ni son vote, ni son cerveau, ni son affection. Il faut accepter que nous ne soyons pas tous d’accord et que nous ne votions pas toujours de la même manière ; cela s’appelle la tolérance.
Je suis ravie d’apprendre, monsieur le député, que vous acceptez finalement la démocratie et le pluralisme ; c’est une bonne nouvelle. Plus sérieusement, le principe de laïcité m’empêche de répondre favorablement à votre proposition. Avis défavorable.
Monsieur le député, je ne répondrai pas à vos provocations répétées mais j’essaierai de développer un argumentaire juridique imparable. La réserve civique n’est pas une réserve de l’Église catholique, ni d’aucune autre église d’ailleurs. Je rappelle que les associations cultuelles prévues par la loi de 1905 ont aussi un régime différent de celles qui sont régies uniquement par la loi de 1901. Vous n’arriverez pas à ranimer le débat sur la séparation de l’église et de l’État. Votre proposition n’est pas du tout acceptable.
L’amendement no 160 n’est pas adopté.
L’article 4, amendé, est adopté.
L’article 5 autorise les organismes d’accueil à avoir parfois leur mot à dire sur la manière d’accueillir les jeunes. Il est par exemple tout à fait possible que l’intrusion d’une philosophie libérale-libertaire au sein de l’armée française ne provoque rien d’autre qu’une crise de l’acceptation. C’était d’ailleurs la force d’un État reconnu par la société que de pouvoir faire confiance à ses institutions. Aujourd’hui, dans la police, dans la justice, dans les armées, et même dans les écoles, l’imposition d’idéologies n’est plus acceptée par personne.
Ces institutions seront-elles concernées par votre charte ou leur préférera-t-on désormais votre Haut Conseil à la vie associative ? Le service civique chez les pompiers sera-t-il défini par des énarques en lien avec Matignon ? La politique d’accueil des réservistes de la police devra-t-elle obéir à des intellectuels qui la méprisent ? Le débat est ouvert, et il est important.
Je suis saisie d’un amendement no 1341 de Mme Chantal Guittet.
Ma chère collègue, pourriez-vous en profiter pour défendre également, par avance, les amendements nos 1342 à 1348 , qui ont le même objet ?
Volontiers, madame la présidente.
Ces amendements visent à généraliser une écriture plus inclusive et représentative, afin de garantir l’égalité dans le langage, ce qui est primordial dans la construction de la pensée, et dans l’évolution des mentalités.
Rendre visible les femmes dans la langue en usant du féminin pour nommer notre quotidien permet de redonner toute leur place à celles qui représentent plus de la moitié de la population. Le Conseil économique, social et environnemental suit aussi cette logique dans son rapport de 2015, qui préconise l’utilisation de cette écriture. Je demande à l’Assemblée de tenir compte de l’écriture épicène et d’utiliser une communication sans stéréotype de sexes.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 1418 .
Il porte sur la formation des réservistes qui participent à la réserve civique. Pour garantir le succès des missions accomplies, et quelles que soient les compétences des réservistes, il peut être très utile qu’une formation préalable soit organisée en amont de la mission, soit par l’organisme d’accueil soit par l’autorité de gestion. Il convient, non pas de rendre obligatoire les rencontres de formation et d’information, mais seulement de les rendre possibles en précisant les conditions de leur réalisation.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1050 .
Cet amendement vise à éviter une éventuelle contradiction entre la charte de la réserve civique et les règles de service de l’organisme d’accueil. En effet, l’alinéa 10 de l’article 1er prévoit que la charte, définie par décret en Conseil d’État, énonce les engagements et obligations des réservistes et des organismes d’accueil. Or, aux termes de l’article 5, les réservistes sont soumis aux règles de service de l’organisme d’accueil. Dans un souci de cohérence, cet amendement prévoit que les règles de service auxquelles doit se soumettre le réserviste respectent la charte mentionnée à l’article 1er.
Mes chers collègues, je suis allée un peu vite en besogne : les amendements de Mme Guittet avaient tous le même objet, mais ne faisaient pas l’objet d’une discussion commune, pas davantage que les deux suivants.
Reprenons le cours normal de la discussion : quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 1341 de Mme Guittet ?
Cet amendement, de même que les amendements nos 1342 à 1348 , vise à systématiser une communication sans stéréotype de genre en généralisant le recours à l’écriture épicène. Nous en avons débattu en commission et accepté le principe, même si, à titre personnel, je ne suis pas complètement convaincue de l’opportunité de cette proposition. Nous avons fait évoluer les libellés des titres et chapitres du projet de loi. Il me paraît compliqué de déroger dans l’ensemble du texte à la règle française selon laquelle – malheureusement – le masculin l’emporte et détermine les marques du pluriel. Pour rapprocher les positions, je rappelle que cette règle vient du bas latin – écoutez-moi, madame Genevard, je parle du latin !
Sourires.
C’est pour cela que je vous fais cette adresse personnelle, chère madame !
Sourires sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
C’est l’avantage des travaux en commission !
Plus sérieusement, la commission a émis un avis défavorable sur tous les amendements qui visent à généraliser cette entorse à la règle linguistique.
Si vous en êtes d’accord, je propose que cet argumentaire vaille pour tous les amendements similaires et que nous tenions une même position pendant ce débat. Avis défavorable.
Madame la députée, le Gouvernement est favorable au principe même de l’égalité entre les hommes et les femmes. C’est pour nous une exigence absolue, vous l’aurez bien compris. Néanmoins, comme l’a dit Mme la rapporteure, les titres ont déjà été modifiés en commission dans le sens que vous souhaitez, avec l’accord du Gouvernement. Nous avons convenu de ne pas alourdir le texte, qui doit être le plus clair et le plus opérationnel possible pour les citoyens. Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur la série d’amendements qui tendent à généraliser l’écriture épicène. Je remercie Mme la rapporteure de partager cette position.
Mesdames et messieurs les « député.e.s » (Sourires), nous sommes tous attachés à l’égalité, mais il faut raison garder. Le terme « épicène » signifie, étymologiquement, « possédé en commun ». Le même mot peut donc désigner à la fois l’homme et la femme. Au fond, ce qui vous heurte, c’est moins la règle elle-même que sa justification habituelle, selon laquelle le masculin l’emporterait. Si nous changions la justification de cette règle grammaticale, son caractère choquant disparaîtrait peut-être. Mais assortir dans tous les textes les mots de « .e.s », c’est tout simplement insupportable – je le dis comme je le pense !
Vous venez de le dire vous-même, madame la rapporteure thématique, c’est une entorse à la règle linguistique. Depuis quelques semaines, voire quelques mois, vous la généralisez dans tous les textes de loi. Cette pratique s’est diffusée, pour ainsi dire par contagion, dans les conseils départementaux, les conseils régionaux et les communes. Nous sommes en train de réécrire la langue française. Je m’excuse auprès de celles qui y sont très attachées, mais cela frise le ridicule.
Sur le terrain, quand vous dites que vous écrivez de façon épicène pour tenir compte de la représentativité des deux genres, les Français répondent que ce n’est pas cela qui rétablira pas l’égalité entre les hommes et les femmes. Il faut se battre sur d’autres sujets, par exemple ceux dont nous débattrons dans les jours qui viennent à propos du titre III. Mais, pour ce qui est de la féminisation systématique des noms communs, trop c’est trop ! Cela confine au ridicule.
Les langues évoluent, et il en a toujours été ainsi. C’est donc le fait de ne pas vouloir qu’une langue évolue qui est d’un ridicule achevé. On vous appelle « madame la députée », on ne vous appelle pas « monsieur le député ». Par ailleurs, je demande non pas que l’on écrive les terminaisons sous la forme « é.e.s » mais que l’on inscrive « la candidate ou le candidat » – par exemple.
Si vous trouvez qu’une telle formulation est trop lourde, monsieur le ministre, je vous propose de supprimer « le candidat » et de laisser « la candidate ».
Sourires.
Je suis favorable à l’amendement de Mme Guittet parce que ne pas nommer les choses, c’est les empêcher d’exister. Vouloir des terminaisons en « e » pour féminiser les mots, ce n’est pas être ridicule. Dans cet hémicycle, il n’y a pas si longtemps, un député a refusé de dire « madame la présidente », ce qui lui a valu des réprimandes appuyées. Que signifie une terminaison en « e » ou l’emploi de l’article « la » ? La Convention d’engagement pour une communication sans stéréotype de sexe du Haut conseil à l’égalité a été signée notamment par le Conseil économique, social et environnemental, par le ministère de la justice, par des régions, des universités et Universcience, à savoir des institutions prestigieuses.
La délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a d’ailleurs demandé au président de l’Assemblée nationale de bien vouloir également cosigner le Guide pratique pour une communication sans stéréotype de sexe. Peut-être aurons ce débat dans l’hémicycle. Je trouve dommage que nous ne nous saisissions pas de l’occasion de ce texte pour appliquer cette communication sans stéréotype de sexe alors que chacun sait combien il est important de nommer les femmes afin qu’elles ne restent pas, comme d’habitude, invisibles.
Ce n’est pas cela qui fera avancer l’égalité entre les hommes et les femmes !
Vous avez raison, madame Guittet, la langue évolue et il n’y a aucune raison pour qu’elle ne continue pas de le faire. Il est de même important de nommer les choses et je fais attention à ce qu’on m’appelle « madame la députée » et non pas « madame le député » : je suis très attentive, parce que je suis une femme, à ce qu’on s’adresse à moi au féminin, et ce, dans tous les territoires.
Le débat sur l’écriture épicène serait moins prégnant si tous et toutes appliquaient, par respect de la personne qu’ils ont ou qu’elles ont en face d’eux ou d’elles, le principe de nommer au féminin les personnes féminines. Il faudrait que tous et toutes nous fassions en sorte de nommer « rectrice » une rectrice ou « préfète » une préfète.
De là à recourir à l’écriture épicène dans la loi, il y a un pas que je ne franchirai pas parce que ce serait compliqué. De plus, le masculin est aussi le neutre – c’est la règle de la langue française. Enfin, si le texte de loi comprend chaque fois la forme masculine et la forme féminine, les articles seront rendus totalement illisibles et inaccessibles. Il est déjà suffisamment difficile pour nos concitoyens de s’approprier les textes législatifs : il serait déraisonnable de rallonger les phrases en pratiquant une féminisation systématique, d’autant que celle-ci aurait des conséquences en termes d’accord. Avis défavorable à tous ces amendements.
La commission spéciale, s’agissant d’un texte qui porte, jusque dans son titre, sur l’égalité et la citoyenneté, n’a pas balayé ce débat d’un revers de la main, comme cela a pu être fait, d’un côté de l’hémicycle, en recourant à des arguments qui reposent sur la complexité ou qui visent à rendre ridicule l’exigence de prise en compte du féminin.
L’espace public, ce sont non seulement la rue et l’hémicycle, mais également l’orthographe et la grammaire. Je ne veux pas que l’on pense ici que le débat en commission a été manichéen, à savoir pour ou contre l’écriture épicène. La commission a au contraire franchi une première étape qui n’avait encore jamais été tentée : elle a décidé de recourir à l’écriture épicène dans l’ensemble des titres. C’est ainsi que le chapitre 1er du titre 1er s’intitule : « Encourager l’engagement républicain de tous les citoyens et les citoyennes pour faire vivre la fraternité ».
Nous devons nous féliciter de cette position de consensus, qui prouve que le débat avance. Il n’est donc pas nécessaire de passer beaucoup de temps en séance publique sur le sujet.
L’amendement no 1341 n’est pas adopté.
L’amendement no 1342 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 1418 de Mme Fanélie Carrey-Conte a lui aussi été soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Cet amendement prévoit qu’une « première rencontre d’information peut être proposée par l’organisme d’accueil au réserviste citoyen avant le début de la mission. » Je suis favorable à cette demande, car une telle rencontre me paraît indispensable. Je pense toutefois que cette mesure de bon sens relève non pas de la loi mais de l’organisation même de la réserve citoyenne, avant la signature du contrat d’engagement.
C’est pourquoi, je vous demande de retirer l’amendement. Faute de quoi, j’émettrai un avis défavorable.
Cet amendement, je vous le concède, va dans le bon sens. Toutefois la mesure est clairement de nature réglementaire. C’est pourquoi je vous propose de demander au haut-commissaire Yannick Blanc son engagement d’intégrer cette proposition dans le décret qu’il me proposera prochainement sur le sujet.
Je vous demande donc de retirer l’amendement. Faute de quoi, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement no 1418 est retiré.
L’amendement no 1050 de M. Arnaud Richard a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
L’amendement no 1050 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement vise à nommer un tuteur pour les mineurs exerçant le service civique parce que leur jeunesse mérite un accompagnement particulier. Ce tuteur est préférable à un simple référent pour veiller au respect des règles générales.
La commission a émis un avis favorable sur cet amendement en vue d’assurer un meilleur suivi des réservistes.
Une fois n’est pas coutume, le Gouvernement a émis un avis défavorable, puisque le dispositif de la réserve civique tel qu’il est construit implique de fait que le réserviste fasse l’objet d’un encadrement par la structure d’accueil, afin d’éviter tout problème.
Le texte prévoit déjà que le réserviste sera suivi par un référent. Les mineurs ne faisant pas exception, il n’est pas nécessaire de le préciser explicitement à leur sujet.
Je crois, ma chère collègue, que vous avez évoqué le « service civique » : il y a bien un risque d’ambiguïté dans les termes et dans la promotion que nous ferons de ce dispositif sur le terrain. Avons-nous bien fait d’appeler cette réserve « réserve civique » ? La réserve citoyenne avait une définition depuis de longues années. Il en est de même du service civique. Je crains qu’on ne crée une confusion entre les termes.
Vous l’avez fort bien rappelé, monsieur le ministre : le service civique, qui vise les jeunes âgés de 16 à 25 ans, est rémunéré, tandis qu’il en va différemment de la réserve citoyenne, devenue réserve civique. Je crains que nous ne créions de la confusion en l’ouvrant aux mineurs de16 ans et plus.
Je n’ai pas rebondi, tout à l’heure, sur les propos de M. le ministre concernant la différence entre réserve civique et service civique, car il l’a bien expliquée : le caractère ponctuel des opérations de la réserve la différencie de fait du service civique. Nous aurons par ailleurs un débat sur ceux qui pourront accueillir les jeunes dans le cadre du service civique : la réserve ouvre un champ et un éventail d’âges beaucoup plus larges.
J’ai défendu l’amendement qui unifie les deux appellations avec le recours au même mot « civique » : l’idée est d’insister sur le caractère civique de l’engagement et la cohérence des deux dispositifs, ce que ne permettait pas la diversité des qualifications. Je suis certaine que vous vous en rendrez compte avec le temps, madame la députée. Il n’y a à mon sens aucune ambiguïté quant à la différence entre la réserve civique et le service civique.
Je tiens à rappeler que le service civique est libre de tout lien hiérarchique entre le jeune qui s’engage et la structure dans laquelle il opère. Son engagement est lié à une mission déterminée.
La réserve civique, au contraire, suppose naturellement l’existence d’un lien hiérarchique, dans la mesure où il n’est pas possible de laisser le réserviste, jeune ou moins jeune, accomplir n’importe comment sa mission de service public.
Le tutorat appartient donc de fait à la mise en oeuvre de la réserve civique : il n’est pas besoin de l’inscrire dans la loi. C’est pourquoi je préfère proposer un retrait de l’amendement, plus compréhensible qu’un avis défavorable.
J’ai effectivement parlé de « service civique » alors que je voulais évoquer la réserve civique. Compte tenu de la diversité des publics que celle-ci peut toucher, pour accompagner le réserviste mineur, un tuteur me semble préférable à un simple référent.
Ce que je sais du service civique dans l’éducation nationale me conduit à penser qu’il existe un rapport hiérarchique entre le jeune et le directeur de l’établissement scolaire, sous la responsabilité duquel il opère. L’absence ou l’existence d’un lien hiérarchique ne me semble donc pas déterminant pour distinguer le service civique de la réserve civique.
Les mots sont sources de confusion. Je partage la remarque de Mme Le Callennec sur ce point. Du reste, notre collègue vient d’en faire l’illustration à deux reprises.
Je suis favorable à l’idée de désigner un tuteur pour les réservistes âgés de 16 à 18 ans. J’y suis favorable également dans le cadre du service civique, puisque, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, il ne s’agit pas d’un emploi. L’idée de tutorat est excellente, qu’il s’agisse de la réserve ou du service civique.
L’amendement no 288 est adopté.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 1419 .
La réserve civique repose sur le principe du bénévolat, mais on sait que la participation à une mission peut occasionner pour le réserviste des frais, de déplacement ou de repas par exemple. Cet amendement vise à étendre aux réservistes, dans le cadre de leur mission, une disposition existant pour les bénévoles, l’abandon de frais.
Cet amendement prévoit que les frais engagés par le réserviste pourront faire l’objet d’une réduction d’impôt s’ils n’ont pas été remboursés par l’organisme d’accueil. Avis favorable.
Permettez-moi de vous apporter quelques éléments d’ordre juridique, partagés avec le ministère du budget. Cet amendement, qui prévoit l’ouverture de la réduction d’impôt pour frais engagés par les réservistes dans le cadre de leur mission d’intérêt général est satisfait par le droit actuel relatif au bénévolat. En effet, le bénévolat se caractérise par la participation à l’animation et au fonctionnement d’un organisme sans but lucratif, sans contrepartie ni rémunération. Il n’est pas nécessaire que le bénévole soit un membre actif de l’association. À partir du moment où le réserviste participe à l’animation et au fonctionnement de l’organisme, il peut être considéré comme un bénévole et bénéficier à ce titre de la réduction d’impôt. Il ne peut exister de différence de traitement entre un simple bénévole et un réserviste citoyen : les mêmes règles s’appliquent à ceux qui accompliraient leur mission auprès d’une personne publique, comme une collectivité territoriale par exemple. Compte tenu de ces éléments, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Monsieur le ministre, si je comprends bien, l’amendement est satisfait par la législation et les réservistes citoyens pourront utiliser le dispositif de l’abandon de frais pour leur participation aux frais occasionnés par leur mission. Cela figurera au compte rendu. Je retire donc cet amendement.
L’amendement no 1419 est retiré.
L’article 5, amendé, est adopté.
Idéologie, quand tu nous tiens ! Nous apprenons dans cet article qu’il ne serait plus obligatoire d’être français pour devenir volontaire auprès de la police. Je trouve aussi malheureux que la division entre la police et la gendarmerie, jusque dans la réserve, soit ainsi marquée.
Par ailleurs, faire intervenir des jeunes dans l’éducation nationale peut être une excellente idée, si les missions sont encadrées. L’école n’est qu’une délégation de la liberté des parents à choisir l’éducation de leurs enfants, et ceux-ci pourraient s’inquiéter que des jeunes avec peu de formation soient missionnés pour intervenir auprès de leurs enfants. En effet, le texte dispose : « Ils sont recrutés et interviennent dans les écoles et les établissements d’enseignement du second degré selon des modalités déterminées par le ministre chargé de l’éducation nationale ». C’est donc, en dehors du vote de la représentation nationale, un pouvoir et une autorité discutables qui géreront cette partie de la loi. Enfin, et je le répète, la volonté d’en rester aux valeurs et de ne jamais aborder les missions concrètes est particulièrement dangereuse.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 1349 .
Même avis.
L’amendement no 1349 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 159 .
Il fallait donc que cela advienne : la réserve civique dans la police n’imposerait pas un principe de nationalité. Après avoir bradé pendant des années les objectifs afférents à la détention de la nationalité, on ne peut que comprendre que vous en arriviez à ces extrémités regrettables.
De deux choses l’une : soit ce projet de loi entend ranimer les forces vives de la nation et faire retrouver à une partie de la société la fierté d’être français, soit vous évoquez des valeurs désincarnées, idéales, qui ne trouvent jamais de transcription concrète. Or, et vos analystes le savent parfaitement, c’est bien l’éloignement des Français de leurs institutions qui crée des drames. Après les terribles attentats islamistes qui ont frappé notre sol, le retour d’un lien d’affection entre la France et sa police est enfin advenu. Ne gâchez pas ces beaux élans avec l’idéologie internationaliste et cosmopolite. Laissez parler le bon sens, et imposez une condition de nationalité pour être volontaire auprès de la police.
Je ne sais pas si ce sont des analystes ou des psychanalystes qu’il vous faudrait ! Je vous rassure, la réserve civique, pour ce qui est de la police, est réservée aux nationaux. Les règles actuelles ne seront pas changées.
Mais pourquoi refuser aux étrangers l’adhésion à la réserve civique généraliste, où les missions seront, par exemple, de nettoyer une plage souillée par des hydrocarbures ou d’aider les victimes d’une inondation ? Nous parlons non pas de missions sensibles, régaliennes, mais d’intérêt général ; nous parlons de mettre la force physique des réservistes au service de ceux qui ont souffert.
Je ne vois pas pourquoi un expatrié allemand, tunisien ou américain, résidant légalement en France, ne pourrait pas, s’il le souhaite, participer à des missions qui servent les valeurs de la République. Au contraire, être réserviste, c’est aider notre pays en cas de difficultés. Nous pourrions être fiers que des étrangers s’engagent pour la nation, lorsqu’elle est dans l’adversité.
Je suis donc très défavorable à cet amendement, ainsi qu’à tous ceux que vous avez déposés. Lorsque je vous entends parler du risque d’internationalisation, je pense à de vieux débats que je croyais heureusement éteints.
Monsieur Bompard, vous posez la question de la légitimité de posséder la nationalité française pour quelqu’un qui sert dans la police. Pourtant, votre généalogie révèle que ce n’est qu’en 1830 que les Bompard ont rallié le drapeau français.
Cela fonde-t-il votre appartenance à la nation ? Celle-ci est, somme toute, assez récente. Ne peut-on pas se demander, à juste titre, s’il est légitime que vous soyez représentant de la nation ?
Je ne sais pas ce que signifie cette apostrophe, qui me paraît terriblement indécente. En d’autres temps, j’aurais demandé réparation, sur le pré !
Sourires.
Je suis choquée par les propos de M. Blein. S’il faut montrer ses quartiers de noblesse pour être pleinement légitime à siéger dans cette assemblée, je ne pourrai rester parmi vous : mes grands-parents étaient italiens !
L’amendement no 159 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 158 .
J’ai beaucoup parlé de votre charte introuvable. J’ai aussi essayé d’expliquer que, plutôt que de lancer à la cantonade les valeurs de la République, il fallait revenir au concret. Je veux citer à nouveau Frédéric Rouvillois, professeur de droit public : « En moment de crise, on a besoin de se rattacher à une idole, ou à un doudou. La République est un peu les deux pour les Français déboussolés. Autrefois, on parlait de France ou de Nation, mais aujourd’hui, par européisme et "antifrontisme", on n’ose plus employer ces mots. Pourtant, la république et la France ne se confondent pas. »
Je ne pense pas que nous ayons besoin de doudou mais, devant les énormes dangers qui nous guettent, il nous faut organiser pragmatiquement notre réponse.
L’amendement no 158 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement proposé par vos rapporteurs à l’article 3 a ouvert aux personnes âgées de 16 ans l’accès à la réserve citoyenne. Il paraît pertinent que les membres de la réserve citoyenne de l’éducation nationale, en considération des missions qui leur seront confiées dans les établissements, soient des adultes. Une différence d’âge suffisante avec le public auquel ils peuvent être confrontés, notamment dans le secondaire, est souhaitable.
Cela poursuit le débat sur l’ouverture de l’accès à la réserve aux mineurs de plus de 16 ans. Avis favorable.
Cela signifie-t-il que seule l’éducation nationale ne pourra accueillir de réservistes mineurs ? Qu’en est-il de la police et de la gendarmerie ?
Toutes les réserves existantes, effectivement, ne pourront pas accueillir de mineurs. Nous y incluons l’éducation nationale.
L’amendement no 1392 est adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
Article 6
Il faut raison garder quant aux possibilités de nos consulats, ces derniers étant largement sollicités. Je voudrais que les rapporteurs et le Gouvernement indiquent quels seront les moyens mis en place pour appliquer cet article. Les Français établis hors de France concourent largement au rayonnement de notre pays, lorsque des décisions absurdes ne viennent pas compromettre l’existence des consulats. Je rappelle que ce gouvernement est celui qui a coupé les subventions au lycée Charles-de-Gaulle à Damas. Aussi, permettez-moi de douter des décrets d’application qui seront pris s’agissant de cet article.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 1355 .
L’amendement no 1355 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l’amendement no 594 .
L’amendement no 594 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 6 bis est adopté.
Nous nous en remettons donc au saint Conseil d’État, comme pour les six articles précédents. J’ai entendu M. le ministre mettre en cause ma manière de présider le conseil municipal de la ville d’Orange, qui m’a largement élu, dès le premier tour. Je me suis ensuite vu donner une leçon de république, puis de nationalité. Tout cela est fascinant.
Il est juste de noter que ce gouvernement prétend remplacer les intellectuels, les penseurs et professeurs de droit public qui auraient le tort de ne pas appliquer à la lettre ce que pensent Rousseau et Condorcet. Comme quoi, la liberté d’expression et de pensée a bien reculé dans notre pays et le Gouvernement ne peut se plaindre d’avoir conduit à une telle désaffection de la part des Français.
L’amendement no 440 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 7, amendé, est adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 7.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement no 2 .
L’amendement no 2 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Laurent Kalinowski, pour soutenir l’amendement no 181 .
L’amendement no 181 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 8.
La parole est à M. Yannick Favennec.
La vitalité du monde associatif est un signe fort de la citoyenneté et la dimension civique et sociale des associations apparaît indispensable à la cohésion de notre pays. C’est une évidence : leur action est irremplaçable. C’est une richesse et une ressource humaine indispensables à l’animation et au renforcement du lien social dans nos territoires.
Cependant, si 16 millions de Français donnent généreusement de leur temps, dont plus de 12 millions au sein d’associations, le bénévolat connaît une forme de crise qui menace la pérennité même du monde associatif. Si nos concitoyens manifestent toujours la volonté de s’engager et d’être utiles concrètement, celle-ci s’accompagne pourtant d’une réticence à prendre des responsabilités dans le pilotage des associations, notamment en raison des exigences croissantes en termes de disponibilité et de responsabilité.
L’engagement bénévole se transforme en un investissement plus ponctuel et ciblé, notamment chez les jeunes et les actifs. Les associations reposent donc aujourd’hui principalement sur le bénévolat des seniors, je le vois régulièrement dans ma circonscription de la Mayenne. Ce sont majoritairement eux qui assument les fonctions dirigeantes et pour certains, depuis de nombreuses années.
En outre, la complexification de la gestion associative et l’accroissement constant des compétences nécessaires à l’administration d’une association tendent à décourager les responsables potentiels, freinant le renouvellement des équipes en place. Face à la difficulté du renouvellement des responsables associatifs, il paraît urgent et nécessaire de valoriser l’exercice des fonctions dirigeantes au sein des associations.
Si de nombreuses mesures ont été adoptées ces dernières années – je pense en particulier au congé individuel de formation, aux RTT utilisées pour une activité bénévole, au congé de représentation –, force est de constater qu’elles n’ont pas produit les résultats escomptés et qu’elles demeurent encore insuffisantes. Il est donc à craindre que l’article 8, qui permet aux salariés des entreprises privées et aux fonctionnaires de prendre chaque année des jours de congé pour pratiquer une activité bénévole, ne produise pas non plus l’effet escompté.
En revanche, depuis plusieurs années, l’idée d’une reconnaissance par le biais de l’attribution de trimestres de retraite supplémentaires est envisagée. Il y a quelques mois, la mission de réflexion sur l’engagement citoyen et l’appartenance républicaine, sous la houlette du président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, a dans son rapport recommandé de valoriser l’engagement associatif en accordant aux dirigeants d’association des droits à pension supplémentaires.
J’ai moi-même déposé et défendu en novembre dernier une proposition de loi visant à accorder des trimestres complémentaires aux responsables associatifs lors du calcul de leur retraite. Il s’agit d’une mesure de bon sens. D’autres incitations pourraient être mises en place. C’est une urgente nécessité. Car s’il n’y a pas de réelle crise du bénévolat en France, il y a en revanche une véritable pénurie de candidats à la prise de responsabilité associative ; nous devons y prendre garde.
Travailler au sein d’un cadre associatif bénévole implique un dévouement à son activité, sans considération d’un salaire ou d’une rémunération. L’article 8 du projet de loi vise à aider le titulaire d’une telle responsabilité, si vertueuse en soit l’origine, à se plier à une conformation du travail pourtant inadéquate à sa fonction.
Il est indiqué – bien naïvement – qu’un tel congé peut être imputé à tout fonctionnaire désigné pour participer bénévolement aux réunions de l’organe d’administration présupposé. Mais la présence d’un cadre administratif au coeur d’une structure bénévole, si elle est légitime, ne devrait pas influencer le cadre de travail auquel le bénévole se soumet.
Dans cette perspective, il convient de ne pas proposer aux officines bénévoles, libres de toute influence extérieure, un cadre de vie commun aux entreprises liées à des structures tant privées qu’étatiques. Il y va de la valeur même des initiatives civiles mises en oeuvre par ces agencements fondés sur le volontariat.
La création à l’article 8 d’un congé d’engagement bénévole pour les responsables associatifs est un droit de suite de la loi relative à l’économie sociale et solidaire que nous avons votée il y a deux ans, laquelle comprenait une quinzaine de mesures de renforcement de la vie associative, notamment des mesures de simplification comme la définition de la subvention publique, des mesures de sécurisation financières ou juridiques ou visant à reconnaître le bénévolat.
Parmi ces mesures figurait aussi l’engagement du Gouvernement à fournir au Parlement, dans les six mois, un rapport sur les différentes formes d’engagement bénévole. Nous n’avons pas eu de rapport, mais nous avons eu mieux sous la forme d’un article de loi qui concrétise cet engagement, ce qui est très important.
En France, nous avons une vie associative riche et dynamique que nous devons préserver et développer. On compte 16 millions de bénévoles et, depuis 2010, plus 30 % de bénévoles parmi les jeunes et 15 % de façon générale. Sur les 1,3 million d’associations actives, 86 % fonctionnent grâce à l’action des seuls bénévoles, en particulier ceux qui assument des responsabilités. On ne dénombre pas que des retraités parmi eux, mais 50 % des présidents d’association sont des retraités et seulement 21 % ont moins de 45 ans.
Le congé d’engagement bénévole va permettre de mieux concilier la vie professionnelle et l’engagement bénévole. L’étude d’impact surestime peut-être cette mesure en indiquant qu’elle peut concerner 2 millions de salariés. La commission spéciale a bien travaillé en étendant le champ de l’article aux salariés qui exercent des fonctions de direction, de représentation ou d’encadrement aux niveaux national et territorial, mais également aux salariés et fonctionnaires membres des conseils citoyens.
J’ajoute que la commission spéciale a adopté un amendement important tendant à rendre possible la rémunération du congé d’engagement, dans le cadre des conventions ou des accords d’entreprise.
L’article 8 est donc très important car il vise à consolider l’engagement de nos bénévoles en France.
L’article 8 a donné lieu à d’intenses débats en commission spéciale. J’avais déposé un amendement de suppression et j’en défendrai un autre dans quelques instants.
Je souhaite revenir sur ce qui, selon moi, pose problème dans les dispositions prévues par cet article. Par essence, le bénévolat est une activité gratuite pour laquelle l’individu donne de son temps, de son énergie, prend sur ce que l’on appelle aujourd’hui sa zone de confort pour aller vers les autres et se mettre au service d’une action collective.
Personnellement, j’estime qu’il est problématique de faire peser sur l’entreprise, par le biais du congé d’engagement, la décision individuelle qui consiste à s’engager dans une activité bénévole. J’ai énormément de respect, d’admiration et de reconnaissance pour l’ensemble de ceux qui s’engagent dans des activités bénévoles. Il n’est donc nullement question de stigmatiser le bénévolat.
Mais cet article pose un problème de fond, dans la mesure où il dénature de manière définitive et irréversible le bénévolat. À titre personnel, je considère que, si l’on doit valoriser l’activité des bénévoles – ce qui est bien l’intention du texte –, cela doit se faire d’une autre manière, notamment en mettant en avant les acquis résultant de la pratique d’une activité bénévole, a fortiori dans les situations de responsabilité. Il y a certainement des progrès à faire à cet égard, mais la reconnaissance de cette expérience ne peut passer par la création d’un congé.
Je n’y suis pas favorable à cette disposition qui consiste à donner six jours de congé pour l’exercice de responsabilités associatives, fractionnables à souhait et possiblement soumis à l’obligation de rémunération – s’il y accord de branche. Comme mon collègue Arnaud Viala, j’admire l’engagement associatif. Pour le maire que je suis, pouvoir se prévaloir d’un grand nombre d’associations – on compte, dans ma ville, une association pour quarante habitants, ce qui est tout à fait considérable – est une fierté. C’est également extrêmement rassurant : j’y vois un signe, un indicateur qui signifie que la ville va bien.
Sourires.
Notre pays va bien quand le monde associatif se porte bien. C’est un indicateur très sérieux.
Pour autant, je ne soutiens pas cette disposition parce que je crois moi aussi que l’engagement associatif, c’est la gratuité, un engagement qui n’est dicté que par le désir de faire pour et avec autrui, sans gain, sans salaire, sans contrepartie.
L’autre motif d’opposition à cette disposition tient aux difficultés que vous allez créer pour les employeurs, privés ou publics. En l’espèce, c’est le bénévole qui va donner le rythme de ses congés associatifs puisqu’il les demandera au moment où son association l’exige ou en a besoin.
Vous conviendrez tout de même que la fonction première de l’employeur n’est pas d’encourager, ni de récompenser ou de répondre à l’engagement et aux besoins du monde associatif. Compte tenu du contexte économique que l’on connaît pour les employeurs privés, de la baisse des dotations pour les employeurs publics, les entreprises ont d’autres difficultés à gérer.
Je ne peux pas m’empêcher de voir dans cette disposition, monsieur le ministre – je vous le dis comme je le pense – quelque chose qui s’apparente à de la démagogie.
Sourires.
L’article 8 part d’un constat que nous partageons tous, à savoir la nécessité de défendre le monde associatif, d’agir pour le renouvellement des instances dirigeantes. Comme tous les élus, je suis particulièrement attentif à la question du bénévolat et aux bénévoles que je soutiens dans ma circonscription de la Mayenne. Ils sont sources de cohésion au sein de nos territoires, particulièrement des territoires ruraux. Je déplore cependant que cette préoccupation se soit traduite par une mauvaise proposition de la part du Gouvernement.
L’article 8 crée un congé pour les dirigeants associatifs bénévoles. Moins qu’une création, il s’agit d’une généralisation car ce congé est ouvert aujourd’hui aux jeunes de moins de 25 ans. Je crains cependant que cette généralisation ne soit contreproductive.
Malgré la nécessité de soutenir le tissu associatif, la nouvelle disposition introduit de la complexité dans notre environnement juridique, alors que celui-ci n’en a vraiment pas besoin. Dans le cadre de la discussion de la loi travail, quelle est la cohérence entre ce congé et le compte personnel d’activité, qui comprend lui-même un compte engagement citoyen ?
L’empilement de ces structures se fait aux dépens de la vitalité de nos entreprises, lesquelles croulent déjà sous un certain nombre de charges. Au demeurant, les charges salariales découlant de cette mesure vont peser, une fois encore, sur nos TPE et PME.
Vous vous dites attachés à l’égalité réelle, mais on note une véritable rupture d’égalité car les dirigeants d’entreprise et les auto-entrepreneurs, eux, ne pourront pas profiter d’un tel dispositif. Je déplore donc cette disposition, véritable usine à gaz qui sera construite au détriment de nos entreprises. Nos bénévoles attendent autre chose des pouvoirs publics.
Le texte initial étend l’actuel congé de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse aux associatifs bénévoles siégeant au sein de l’organe de direction de l’administration de l’association, soit un congé de six jours non rémunéré et cumulable avec un congé syndical, dans la limite de douze jours.
En commission spéciale, plusieurs amendements sont venus étendre ce nouveau droit à congé : ouverture aux bénévoles exerçant des fonctions de direction, de représentation ou d’encadrement et aux membres de conseils citoyens ; extension aux fonctionnaires.
Le maintien de la rémunération peut être décidé par accord d’entreprise ou de branche. Cet article pose incontestablement des difficultés, comme vient de le rappeler Arnaud Viala. C’est pourquoi nous avons déposé une série d’amendements.
La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 116 , qui vise à supprimer l’article 8.
Monsieur le ministre, outre le point que je viens de soulever quant au fondement même de la disposition que vous introduisez avec cet article, je tiens à vous dire que cette disposition – si elle devait être adoptée – n’est pas aboutie et qu’elle pose certains problèmes, notamment par la rupture d’équité qu’elle provoque entre différentes catégories de salariés ainsi qu’entre ceux de nos concitoyens qui sont salariés et ceux qui ne le sont pas.
Pour ce qui est de sa mise en oeuvre, je souhaiterais que vous répondiez aux questions posées lors de l’examen du texte en commission et auxquelles nous n’avons jusqu’à présent pas eu de réponse.
Sur quoi l’employeur fondera-t-il son jugement quant à l’opportunité de la demande de congé d’engagement ? Comment mettre sur un pied d’égalité des bénévoles qui, par essence, n’auront pas la même activité associative ou la même charge, en termes par exemple de temps nécessaire ou de responsabilités au sein de la structure ? De quels outils un employeur disposera-t-il, aux termes de ce texte, pour décider à qui il octroiera ou refusera ce congé si, par exemple, quatre ou cinq de ses salariés appartenant à la même structure associative demandent la même semaine de congé, ce qui posera un problème d’organisation du travail ?
Un deuxième point sur lequel nous n’avons pas eu de réponse est celui de savoir comment seront traitées les personnes qui ne sont pas salariées et qui, de la sorte, rencontreront plus de difficultés que les autres pour mener leurs activités bénévoles ?
Il serait sage, à ce stade, de retirer cette disposition du texte que vous défendez, afin de réfléchir à d’autres manières de valoriser l’engagement associatif et bénévole.
Monsieur le député, nous avons déjà eu longuement cette discussion en commission. Comme je vous l’ai déjà dit, je comprends la logique selon laquelle le bénévolat devrait rester bénévole et non rémunéré, mais il s’agit ici de pragmatisme. M. Juanico a été clair à cet égard : il nous faut inciter les plus jeunes d’entre nous et les actifs des différents types de population à prendre des responsabilités. Il ne s’agit donc là que d’encourager aussi les salariés du privé – car l’article 8 concerne à la fois le public et le privé – à prendre jusqu’à six jours de congé.
Je vous rassure toutefois car, par essence, le militantisme et le bénévolat au sein des associations ne nécessiteront pas qu’on prenne six jours de congé d’affilée et c’est bien la raison pour laquelle il est prévu que ce congé pourra être fractionné. La plupart du temps, en effet, ce temps sera pris par journée, voire par demi-journée.
Pour ce qui est des conditions et des modalités pratiques pour l’employeur, je vous rappelle que ce congé renvoie aux dispositions relatives aux congés de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse, qui règlent déjà toutes ces modalités. Il n’y a donc pas de vide juridique.
Encore une fois, au contraire, loin de la démagogie, madame Genevard, l’essence même de cet article est de permettre à tous de s’engager et de trouver du temps tout en étant actifs, salariés ou fonctionnaires des différentes fonctions publiques. C’est précisément une façon pour l’ensemble de la société – pour l’État comme pour les entreprises – de reconnaître que, dans toutes les villes de notre pays, des bénévoles doivent être disponibles pour faire fonctionner notre démocratie au quotidien. Nous sommes ainsi tous très attachés à cet article, qui nous semble essentiel dans ce projet de loi. Avis défavorable, donc, à l’amendement.
Je profiterai de l’amendement de M. Viala, avec lequel nous avons beaucoup échangé en commission, pour rappeler deux ou trois éléments qui ont permis de trouver une position d’équilibre au sein de la commission et, surtout, pour rappeler un point essentiel : il s’agit ici non pas de démagogie mais d’idéologie. Idéologiquement, en effet, vous êtes cohérent, au-delà des arguments qui excusent parfois le fait d’assumer cette idéologie.
Sur la notion de congé, il y a toujours eu une différence entre la gauche et la droite. De tout temps, et je l’observe en cette année du quatre-vingtième anniversaire du Front populaire, vous vous êtes opposés à la prise d’espace dans le temps du travailleur, quels que soient d’ailleurs cet espace et sa justification.
Lorsque vous dites, monsieur Viala, que l’engagement associatif doit être bénévole au motif qu’il s’agit d’un engagement pour les autres et que, de ce fait, le congé engagement n’a pas à être rémunéré dans la branche ou dans l’entreprise, c’est le même argument que celui qui était utilisé voilà quarante ans pour expliquer que les congés de formation des syndicalistes ne devaient pas être rémunérés ou que les journées de mobilisation durant lesquelles les travailleurs d’une entreprise représentaient leur syndicat devaient être déduites des congés payés. On entendait la même chose voilà quatre-vingts ans dans la bouche de ceux qui disaient que le temps passé avec ses enfants et sa famille ne devait pas être rémunéré, car il s’agissait d’un don de soi.
Nous considérons pour notre part que, sans inscrire pour autant dans le texte que ce congé est rémunéré, il y faut une agilité,…
…une souplesse, un bon sens qui permettent que cela puisse être négocié au sein de la branche ou, le cas échéant dans l’entreprise.
On ne peut pas dire, durant la discussion, que ce texte affirme des principes et des valeurs sans acter leur concrétisation par des mesures fortes, puis le taxer de démagogie sous prétexte que, pour valoriser l’engagement, il permet à l’État, à cette majorité et au Gouvernement – quel qu’il soit – de soutenir, à l’aide la sphère publique, l’engagement des jeunes et des moins jeunes avec la réserve civique et d’appeler à une mobilisation de l’ensemble de la société, y compris des entreprises, dans le cadre d’un rapport social bien réfléchi.
Nous avons trouvé cet équilibre, qui est sain, mais qui n’était pas la mesure avec laquelle nous avons débuté le travail en commission. Ce n’était pas évident et nous avons réussi – je l’assume – à rassembler la gauche sur cette mesure. Il est donc normal que nous soyons en opposition sur ce sujet : assumons-le.
Assumez les désaccords, mais ne me dites pas qu’il s’agit de démagogie. Ne parlez pas non plus d’inégalités – soyons sérieux ! Vous demandez comment fera le salarié qui ne travaille pas pour demander un congé engagement. Il en va de même que pour les congés payés : si vous ne travaillez pas, vous n’en avez pas. Si vous n’êtes pas salarié d’une entreprise et syndiqué, vous n’avez pas non plus droit aux décharges syndicales ou à la rémunération des congés nécessaires pour vous former dans le domaine syndical. C’est un faux argument – je ne dis pas qu’il est malhonnête, mais il est au moins tiré par les cheveux. Nous assumons : faites-en autant.
Monsieur Viala, si je voulais caricaturer votre pensée, je dirais que c’est toujours trop pour les salariés et jamais assez pour les employeurs. Mais est-ce vraiment une caricature, au vu des programmes que je lis ici et là et qui seront bientôt rendus publics dans le cadre des élections primaires que votre parti organisera prochainement ?
Nous tenons au congé d’engagement et nous nous battrons pour cette mesure, qui s’inscrit dans le code du travail et dans les lois relatives aux dispositions statutaires de la fonction publique. Il s’agit d’un congé universel, qui s’appliquera sans discrimination à tous les salariés : il n’y a là aucune rupture d’égalité.
En outre, je vous le rappelle, ce congé est non rémunéré et limité à quelques jours fractionnables. Il préserve donc le caractère désintéressé du bénévolat et minimise la charge de l’employeur, même si, à travers un amendement, la commission a prévu qu’un accord d’entreprise ou de branche permettrait qu’il soit rémunéré dans le cadre de la négociation.
Je vous confirme, monsieur Viala, la négociation avec l’employeur, que vous évoquez. L’employeur peut différer le congé pour nécessité de service : c’est simplement l’application de l’article L. 3142-46 du code du travail, auquel sera dorénavant rattaché le congé d’engagement, lorsque la loi aura été adoptée.
Pour conclure, je ferai écho au rapporteur général : au moment où nous fêtons les quatre-vingts ans du Front populaire, il est bon que le camp du progrès offre un nouveau droit aux salariés de ce pays. Un salarié engagé est un salarié responsable, et l’employeur y trouve aussi son intérêt. Nous instaurons ainsi, avec la création du congé d’engagement, une logique gagnant-gagnant. Avis défavorable, donc.
Un amendement de suppression de cet article est étonnant, car le congé de formation est, sous cette forme, très attendu par les bénévoles.
Souvent, le congé de formation sert également à se former au service des activités associatives, et non pas seulement à dégager du temps pour ces activités elles-mêmes.
Dire qu’on ne peut pas être rémunéré pendant qu’on exerce un engagement bénévole relève d’une analyse quelque peu singulière. Ainsi, on ne pourrait pas exercer d’activité bénévole ou d’engagement lorsqu’on se trouve en congé payé, précisément parce qu’on est payé ? C’est là une conception très réductrice, car je ne vois pas de contradiction à ce qu’on exerce des activités bénévoles, dès lors qu’on a reçu l’accord de son employeur pour le faire pendant qu’on est payé – et cela d’autant moins que personne n’est aujourd’hui surpris qu’un employeur faisant un don à une oeuvre d’intérêt général bénéficie d’une déductibilité fiscale.
Lorsqu’on prête à une association le temps d’une personne qui veut y consacrer son engagement ou qu’on lui fait un don en argent, on se situe dans la même logique et le même registre. Je ne vois pas ce qu’il y a là de choquant.
Le congé d’engagement, tel qu’il est conçu dans l’article 8, est un progrès très attendu et il est très important de le défendre.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, ce sont vos masques qui viennent de tomber : Mme Genevard suspectait que cette mesure pouvait avoir un fondement démagogique et vous nous avez affirmé qu’il s’agissait d’un parti pris idéologique, nous annonçant du même coup que nous légiférons non plus sur l’engagement citoyen et la manière de le faciliter, mais sur le droit des salariés – ce que n’annonçait pas le texte. Les interventions des orateurs qui viennent de prendre la parole indiquent aussi que vous êtes en train d’introduire dans ce texte, masquée, la sixième semaine de congés payés.
Mais non !
Mais si ! Cette sixième semaine de congés payés, dont il n’est pas question de dire si nous y sommes favorables ou pas, car ce n’est pas la question qui nous est posée,…
…a cette particularité supplémentaire que vous l’affectez à une activité, tordant ainsi la règle qui s’applique aux congés payés, qui veut que le salarié pose son congé et en fasse ce qu’il veut, sans que son employeur ait besoin d’être informé de la manière dont il a l’intention de l’occuper.
En outre, dans l’hypothèse où cette sixième semaine de congé ou ce congé d’engagement ne seraient pas rémunérés, quelle serait la couverture sociale de l’employé ? Dès lors que celui-ci aura déclaré à son employeur qu’il prend un congé pour exercer une activité bénévole dans le cadre d’un congé d’engagement, par qui sera-t-il couvert sur le plan social et assurantiel pendant cette période ? Il aura en effet déclaré une activité et il ne s’agira donc pas réellement d’un congé dont il pourra disposer à sa guise.
Monsieur le rapporteur, je trouve très désagréable que vous riiez à gorge déployée. Je m’efforce d’argumenter après que vous m’avez renvoyé dans les cordes et je demande des réponses.
Monsieur le rapporteur général, vous avez convoqué l’histoire et l’épisode tutélaire du Front populaire : ce n’est pas de cela que nous vous parlons, mais des difficultés que posera cette disposition.
J’ajoute que l’adoption de la loi sur les 35 heures a objectivement donné du temps supplémentaire aux salariés. Aujourd’hui, il n’est pas rare qu’un salarié termine sa semaine de travail le vendredi midi : cela laisse donc deux jours et demi par semaine pour se consacrer à sa famille et à un engagement associatif.
Je pense que cela équilibre déjà largement la semaine et permet l’engagement associatif.
Peut-être êtes-vous employeur : pour un employeur, ce que je suis en tant que maire,…
…quand un collaborateur demandera à bénéficier de cette disposition, cela compliquera l’organisation du temps de travail. Entendez-vous cela, au moins ? Concevez-vous que lorsque l’on se prive d’un collaborateur pendant une semaine de congé supplémentaire par an, il faut réorganiser le travail avec les autres ?
Nous travaillons à flux tendus et nous n’avons plus de réserve budgétaire pour embaucher, comme on le faisait autrefois.
C’est tout aussi compliqué pour les entreprises, qui ont déjà dû faire face à la crise économique et à toutes les dispositions fiscales et normatives que vous avez créées, l’une des dernières étant le compte pénibilité – j’aimerais que l’on réfléchisse un jour à la pénibilité du métier de chef d’entreprise.
Il est très drôle de vous entendre parler des 35 heures, madame Genevard : tous les candidats à la primaire de votre parti souhaitent les supprimer, et au Sénat aussi vous vous battez pour revenir dessus.
Soyons sérieux ! Il est minuit et nous parlons d’une disposition extrêmement importante : arrêtez les arguties !
Assumez ce que vous êtes : vous refusez une avancée majeure, une avancée réclamée par des centaines de milliers de responsables bénévoles dans nos associations !
Je suis désolé mais c’est la réalité, madame Genevard. Il est bien dommage que l’opposition soit à ce point caricaturale sur une question aussi importante.
L’Assemblée s’honorerait en mettant en place une disposition fondamentale pour l’avenir du pays. Oui, c’est important, l’engagement militant ! Oui, c’est important, l’engagement bénévole dans les associations ! Vous dites que vous êtes maire : vous savez donc combien cela est important. Vous savez que les associations manquent de bénévoles encadrants.
Il faut les aider. Si l’on veut que les jeunes générations s’engagent et prennent des responsabilités dans les associations, il faut leur donner un coup de main.
Il est honorable pour les associations, pour toutes les composantes de notre société, y compris dans les entreprises, de donner un coup de main. De plus, cette proposition n’est quand même pas le bout du monde ; elle est même extrêmement raisonnable.
Ce dispositif est très attendu. J’ai participé, avec M. Reiss, à la commission d’enquête sur le devenir du monde associatif en France. Eh bien, toutes les associations réclamaient cette mesure.
Même M. Reiss a dit qu’il fallait réfléchir à cette question. Il est vraiment dommage que vous le preniez ainsi. Cela aurait mérité, pour notre pays, un autre traitement par notre assemblée. Pour ma part, je suis très content que la majorité adopte cette disposition.
Il ne faut pas se caricaturer : chacun, ici, reconnaît la richesse dont est porteur le bénévolat et cherche, d’une manière ou d’une autre, à le valoriser et à le promouvoir auprès de la jeunesse.
Concernant l’article 8, nous déplorons qu’aucune étude d’impact réelle et sérieuse n’ait été menée sur les implications pour les entreprises.
Selon cet article, « un congé est accordé chaque année, à sa demande, sans condition d’âge, à tout salarié désigné pour siéger à titre bénévole dans l’organe d’administration ou de direction d’une association ». Ce congé, valable également pour les fonctionnaires, comme nous le verrons tout à l’heure, est de six jours ouvrables par an.
L’alinéa portant sur la rémunération a été ajouté en commission ; il ne figurait pas dans la première version du texte, monsieur le ministre. Il dispose : « Pour mettre en oeuvre le droit à congé du salarié […], une convention ou un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche peut fixer les conditions de maintien de la rémunération du salarié pendant la durée de son congé. »
Comme le disait M. Blein tout à l’heure, dès lors que l’on peut partir en congé et que l’on est rémunéré, il s’agit bien de congés payés. Cela rejoint donc la remarque de mes deux collègues.
Je me pose donc la question suivante : le fait d’écrire « peut » ne créera-t-il pas un vide juridique ? Cela ne créera-t-il pas, comme vous le faites régulièrement dans les lois que vous votez ici, des relations compliquées dans l’entreprise, qui n’amélioreront pas le dialogue social ? Un salarié peut arguer de la loi pour dire : « Je peux, donc vous devez ! » Entre le « peut » et le « doit », il y aura des discussions sans fin dans l’entreprise.
Comme nous l’expliquions en commission spéciale, entre une entreprise accordant cinq semaines de congé et une autre qui en accorde huit, entre une entreprise « au taquet » en termes d’organisation du temps de travail et une autre où la souplesse est possible, la règle ne sera pas la même, la réponse du chef d’entreprise ne sera pas la même : voilà ce que nous essayons de vous expliquer.
Je souhaite préciser que, dans cet article, le congé d’engagement s’impose, tout en étant non rémunéré. L’alinéa auquel vous faites allusion parle de convention ou d’accord d’entreprise. Pour qu’il y ait une convention ou un accord d’entreprise, il faut un accord entre l’employeur et les organisations syndicales. Dans ce cadre, ce n’est pas imposé à l’employeur puisque c’est le résultat d’une convention ou d’un accord d’entreprise.
Certes, je me réjouis que l’on respecte la hiérarchie des normes dans l’alinéa 5, voté en commission sur proposition du rapporteur général : il faut le signaler !
Sourires.
Cela signifie qu’en l’absence d’accord d’entreprise ou de convention, un accord de branche s’imposera par nature à l’ensemble des entreprises – à moins que cela ne soit modifié.
Encore une fois, même l’accord de branche est signé entre les employeurs et les organisations syndicales : il n’est pas imposé ; il n’est pas inscrit dans la loi comme étant une obligation – ce que j’avais d’ailleurs proposé par le biais d’un amendement, mais vous n’êtes pas allés jusque-là.
Les époques évoluent, les contextes aussi : on peut aborder une situation de manière différente et adapter les dispositions.
M. Chassaigne a indiqué que son ambition était autre et même, de son point de vue, supérieure.
Le Gouvernement a fait une proposition ; un travail a ensuite été mené en commission et des syndicats ont été entendus, aboutissant à cette disposition que vous appelez la « sixième semaine de congés payés » – en fait, la sixième semaine de congé « pouvant être payée », dans le cadre d’une négociation et sur la base d’un accord.
Cela étant, vous ne la voterez pas car vous vous y opposez : nous allons donc encore convoquer l’histoire. Je fais de nouveau appel à la force de conviction des uns et des autres et à leur cohérence – cohérence que je vous reconnais : vous étiez contre les deux premières semaines de congés payés et, si vous avez approuvé la troisième semaine parce que de Gaulle l’avait proposée, vous avez combattu les quatrième et cinquième semaines. Il n’est donc pas étonnant que vous vous opposiez à ce congé d’engagement. Cela ne pose aucun problème, mais assumez-le !
La démagogie ou je ne sais quelle « argutie », pour reprendre les termes utilisés, ne peuvent tenir lieu d’argument. C’est votre conviction politique : je la reconnais et je respecte votre cohérence.
L’amendement no 116 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 1353 .
L’amendement no 1353 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Cet article étend le bénéfice du congé de formation aux dirigeants des associations. Il est proposé que le bénéfice de ce congé soit également étendu aux personnes bénévoles, n’ayant pas la qualité d’administrateur, particulièrement impliquées dans le fonctionnement des mutuelles, unions et fédérations. Cette modification est cohérente avec l’esprit de l’article qui vise à permettre une véritable culture de l’engagement des actifs.
Cet amendement précise par ailleurs que ne seront concernés que les bénévoles titulaires d’un mandat prévu soit par la loi – notamment les délégués siégeant aux assemblées générales –, soit par les statuts des organismes – délégués de territoires et membres des commissions départementales.
L’engagement militant au sein des organismes mutualistes relevant du code de la mutualité est un engagement citoyen fort qu’il convient d’encourager au même titre que l’engagement associatif.
Je serai bref car Pascal Demarthe vient de défendre un amendement similaire. Cet amendement vise à étendre le congé d’engagement bénévole aux personnes bénévoles n’ayant pas la qualité d’administrateur et particulièrement impliquées dans le fonctionnement des mutuelles, unions et fédérations.
Nous évoquions il y a quelques instants la loi relative à l’économie sociale et solidaire ; il s’agit ici d’une extension tout à fait justifiée.
J’en profite pour exprimer mon étonnement devant la position de nos collègues de l’opposition, qui souhaitent la suppression de l’article 8 et du congé d’engagement bénévole. Tous, en 2007, ont soutenu leur candidat, Nicolas Sarkozy : celui-ci, lors de sa campagne, s’était engagé auprès du monde associatif et du monde sportif à valoriser l’engagement bénévole associatif en accordant une bonification d’un trimestre de cotisations de retraite supplémentaire pour dix ans d’engagement – je vous rassure, il n’a jamais tenu cette promesse.
Et vous, vous avez rejeté ma proposition de loi, dont l’objectif était le même !
Je suis donc très étonné qu’ils s’opposent à une autre mesure de reconnaissance, pourtant beaucoup plus opérationnelle et qui sera votée par cette assemblée, permettant de concrétiser enfin cette revalorisation.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 1422 .
J’ajouterai un argument en soulignant que le rôle des militants mutualistes est vraiment très important pour développer des actions de prévention dans les territoires, des actions de sensibilisation et d’éducation dans notre système de santé, des actions pour faire vivre la démocratie sanitaire.
Pour toutes ces raisons, ce militantisme, qui fait pleinement partie du champ de l’économie sociale et solidaire, doit être reconnu au même titre que l’engagement associatif car il mène des missions essentielles pour l’amélioration de l’état de santé de nos concitoyens.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Étant favorable à l’extension de ce congé aux mandataires mutualistes bénévoles, je donnerai un avis favorable aux amendements identiques nos 381 , 600 et 1422 .
En revanche, monsieur Demarthe, je souhaite que vous retiriez votre amendement no 632 car son premier alinéa est un peu restrictif par rapport à la rédaction actuelle. Entre les « responsables associatifs » et les « dirigeants associatifs », je préfère la rédaction initiale. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Ces différents amendements ouvrent le congé aux bénévoles mutualistes. Si l’on peut comprendre cette intention, le Gouvernement l’estime prématurée.
À ce stade, en effet, les membres de mutuelles sont très impliqués dans le fonctionnement de celles-ci, sans pour autant disposer d’un statut d’administrateur ; ils ne sont d’ailleurs pas reconnus comme tels.
Un amendement du Gouvernement, non pas à ce projet de loi, mais au projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale. Il prévoit une habilitation à réformer le code de la mutualité pour créer le statut ; mais ce projet est en cours d’examen au Sénat.
En conséquence, pour des raisons strictement chronologiques, l’amendement présenté ici ne trouverait pas à s’appliquer, en l’absence d’ordonnance prévoyant le statut de mandataire mutualiste.
Si je comprends vos intentions, je ne peux que m’en remettre à la sagesse de l’Assemblée en rappelant ces éléments de procédure : peut-être vous amèneront-ils à suivre l’avis de Mme la rapporteure thématique.
Sans préjuger du vote, je me réjouis que M. le ministre juge nécessaire d’approfondir l’investigation. Aussi, je réitère la demande d’une véritable étude d’impact du dispositif. Sans qu’il y paraisse, les mesures introduites auront un coût considérable.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, après avoir convoqué l’histoire, vous nous avez reproché des postures, mais nos motivations ne sont pas du tout celles que vous imaginez.
En effet, nous posons des questions car nous cherchons à comprendre où vous souhaitez en venir.
En outre, quelles seront les conséquences de ces décisions sur le tissu bénévole et associatif, composé de personnes aux statuts professionnels très différents ? À l’heure actuelle, les réunions associatives rassemblent des dirigeants d’entreprise, des salariés, tous égaux devant leur volonté de prendre sur leur temps personnel pour pratiquer une activité.
Monsieur le rapporteur général, je ne suis pas certain que les députés de vos bancs se réjouiront demain des mesures que vous introduisez.
Il serait sage de suivre l’avis du ministre sur ces amendements. En effet, ceux-ci ouvrent la boîte de Pandore : pourquoi réserver ces dispositions aux administrateurs de mutuelles, de fédérations ou d’unions ? Pourquoi ne pas les élargir à toutes les associations ?
De plus, comment définir ce que sont des personnes particulièrement « impliquées dans le fonctionnement » d’une structure ? Cela reviendrait à ouvrir une possibilité beaucoup trop large.
Par ailleurs, l’exposé des motifs de l’amendement no 728 est rédigé d’une bien curieuse façon : « La Mutualité française souhaiterait que le bénéfice de ce congé soit également étendu aux personnes bénévoles, n’ayant pas la qualité d’administrateur ».
S’il suffit à la Mutualité française d’émettre un souhait pour obtenir satisfaction, allons tous nous y inscrire !
Monsieur Demarthe, retirez-vous votre amendement, comme Mme la rapporteure thématique vous y invite ?
Je le retire, car les autres amendements en discussion commune sont plus efficients.
L’amendement no 632 est retiré.
L’amendement no 662 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l’amendement no 196 .
L’amendement vise à fractionner le congé d’engagement en demi-journées. Il s’agit de rétablir l’esprit initial de l’article 8 – faciliter la participation des actifs aux organes de gouvernance des associations –, que les travaux de la commission spéciale ont quelque peu modifié, comme cela apparaît dans nos débats.
Avis défavorable. La commission spéciale ne peut défaire ce qu’elle a elle-même créé lors de ses travaux. Pour que le dispositif soit efficace, son champ d’application a été élargi aux responsables associatifs ainsi qu’aux membres des conseils citoyens.
Même avis.
L’amendement no 196 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 590 .
L’engagement actif des membres d’une association est essentiel pour garantir son bon fonctionnement. Réserver aux seuls membres de la direction la possibilité d’un congé d’engagement, tel que le fait l’article 8, nous apparaît trop limitatif. En effet, les associations ont un réel besoin de renouveler leurs cadres et d’anticiper l’investissement bénévole. C’est un gage d’efficacité et de pérennité de l’activité associative.
Aussi, nous souhaitons élargir le dispositif aux membres qui, sans être administrateurs, sont particulièrement actifs dans une association et qui pourraient apporter la preuve de la réalité de leur action – je le souligne à votre intention, monsieur Viala –, selon des critères définis par décret.
Par ailleurs, certains à la droite de cet hémicycle prévoient de repousser l’âge de la retraite, ce qui reviendrait à réduire le nombre de retraités dans les associations. Dès lors, il paraît d’autant plus nécessaire d’étendre la possibilité de prendre un congé d’engagement.
Avis défavorable. La commission spéciale a déjà ouvert largement le champ d’application de l’article 8, qui vise à faciliter l’accès aux responsabilités associatives pour les actifs, qui ne sont pas suffisamment présents dans nos associations. Aussi, la rédaction que la commission spéciale a retenue à l’issue de ses travaux semble suffisante.
Même avis. Le mieux étant l’ennemi du bien, rappelons que la demande visant à élargir l’accès au congé d’engagement n’émane pas du secteur associatif.
La commission spéciale a déjà réalisé certaines avancées lors de ses débats. Il faudrait objectiver les critères ouvrant droit au congé d’engagement. Multiplier les bénéficiaires ne serait pas dans l’esprit du texte, tel que nous l’avons défendu.
Certains bénévoles – membres de la Croix-Rouge, pompiers volontaires, sauveteurs en mer, par exemple –, tout en réalisant une mission de sécurité publique, ne participent pas au conseil d’administration de leur association. Or l’article, tel qu’il est actuellement rédigé, ne leur ouvre pas droit au congé d’engagement. Ils mériteraient d’en bénéficier.
L’amendement de Mme Bonneton, qui s’appuie sur une réelle connaissance de la vie associative dans nos territoires – villages, quartiers – me semble également très pertinent.
Dans de nombreuses associations, outre les membres actifs qui les animent localement et participent au conseil d’administration, on trouve d’autres personnes qui consacrent beaucoup de temps à ces activités. Ainsi, de nombreux bénévoles animent des clubs sportifs, en dehors de leur temps de travail, le mercredi après-midi notamment. Tout en n’étant pas membres du conseil d’administration, ils jouent un rôle extrêmement important. Il est dommage qu’ils se trouvent écartés de ce projet de loi.
Être membre d’un conseil d’administration n’est qu’une des conditions pour bénéficier d’un congé d’engagement. Les responsables de l’encadrement peuvent également y prétendre.
Mais une personne qui aurait adhéré récemment à une association, sans détenir de responsabilité ni encadrer personne, et sans participer au conseil d’administration, ne peut demander à son employeur, au bout de trois semaines, six jours de congé au titre du congé d’engagement.
La commission spéciale a largement ouvert le champ d’application de l’article. Elle vient encore de le faire, en séance, s’agissant notamment du monde mutualiste. Cependant, l’article ne prévoit pas comme condition sine qua non la participation à un conseil d’administration. L’ensemble des conditions figurent dans les cinq premiers alinéas de l’article 8.
L’amendement no 590 n’est pas adopté.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1047 .
Toujours pour privilégier le bien au mieux, cet amendement vise, en limitant les structures éligibles, à simplifier le dispositif du congé d’engagement, qui a pris des proportions considérables, même si le précédent amendement n’a pas été adopté.
Malgré mon attachement à la politique de la ville, que vous connaissez, chers collègues , j’estime que la participation aux conseils citoyens ne relève pas de la même dynamique que l’engagement bénévole dans une association.
Aussi, cet amendement prévoit que le congé d’engagement auquel les salariés ont droit ne couvre pas la participation des habitants au pilotage du contrat de ville ou au projet de renouvellement urbain.
Avis défavorable. Cet amendement vise à supprimer une disposition que la commission spéciale a adoptée.
Avis défavorable. Cet amendement limiterait l’accès au droit nouveau du congé d’engagement pour les conseils citoyens.
Or nous croyons beaucoup à ces conseils citoyens, comme un élément de rénovation de la vie démocratique, notamment dans les quartiers prioritaires de la ville. Je connais d’ailleurs votre attachement à ces structures, monsieur Richard.
Il importe de permettre aux habitants de participer effectivement aux décisions prises dans le cadre de la politique de la ville. Nous ne voudrions pas que ces conseils soient animés uniquement par des citoyens retraités – très respectables par ailleurs. Il est donc primordial que les actifs puissent participer dans de bonnes conditions aux différents comités de pilotage où se prennent les orientations de ces nouvelles instances.
Presque convaincu par l’argumentation du ministre, je souhaite retirer mon amendement.
Sourires.
L’amendement no 1047 est retiré.
La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement no 1048 .
L’article 8 prévoit que tout salarié dispose d’un congé pour siéger, à titre bénévole, dans un organe d’administration d’une association. Sans remettre en cause cette mesure, il conviendrait de prévoir un congé différent selon que le salarié est lié par un contrat à durée indéterminée ou déterminée. La rédaction actuelle de l’article témoigne d’une vision uniforme de la situation de nos concitoyens.
D’aucuns s’inquiètent d’une trop grande complexité pour les chefs d’entreprise et vous, vous proposez de différencier les salariés en contrat à durée déterminée et les salariés en contrat à durée indéterminée. Ce serait pour le coup complexifier les choses, d’autant plus que l’employeur peut refuser d’accorder le congé en cas de nécessité de service, dans des conditions fixées par décret.
Avis défavorable, donc.
Je serai moi aussi défavorable à votre amendement, monsieur Richard, car nous voulons que le congé d’engagement soit un droit opposable universel. Créer des disparités suivant le statut ou l’activité professionnelle risquerait de susciter des lourdeurs administratives, notamment pour les employeurs, ce qui pourrait freiner son utilisation.
L’amendement no 1048 n’est pas adopté.
Sur l’article 8, je suis saisie par le groupe socialiste, écologiste et républicain d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Philippe Bies, pour soutenir l’amendement no 661 .
L’amendement no 661 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Par cet amendement, nous proposons que le congé d’engagement instauré par le présent projet de loi puisse être cumulé avec le congé de formation économique ou syndicale prévu par l’article L. 3142-7 du code du travail. En l’état, le texte opère en effet une fusion entre les deux.
Je rappelle que le congé de formation économique ou syndicale permet à tout salarié de participer à des stages ou des sessions de formation économique et sociale ou de formation syndicale durant douze jours par an, afin de se préparer à l’exercice de fonctions syndicales. Or la rédaction actuelle du texte prévoit que le congé d’une durée de six jours exercé en raison d’activités bénévoles s’impute sur le congé pour raisons syndicales.
Tout en instaurant une confusion entre les activités bénévoles et les responsabilités syndicales, une telle rédaction limite de manière importante la portée du nouveau congé d’engagement, puisque les salariés qui souhaiteraient à la fois s’investir dans le bénévolat et se former pour accéder à des fonctions syndicales ne pourraient bénéficier que de six jours de congé de formation syndicale au lieu de douze. Je crois que nous devrions au contraire permettre aux salariés qui le souhaitent de bénéficier de ces deux congés sans qu’ils aient à donner la priorité à l’un des deux.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 1425 .
Cet amendement est identique au précédent.
Le congé d’engagement citoyen n’a pas vocation à remplacer le congé de formation économique ou syndicale. Ce sont deux types d’engagement essentiels, qui ne doivent pas être opposés ou incompatibles ; l’usage de l’un ne doit pas affaiblir l’usage de l’autre. C’est pourquoi le présent amendement propose que les deux congés puissent se cumuler pour atteindre un total de dix-huit jours : douze jours de congé syndical et six jours de congé citoyen.
Nous avons des conceptions différentes de l’objectif du congé d’engagement créé par l’article 8. Pour nous, il est d’encourager les actifs à prendre des responsabilités dans les associations en créant un nouveau droit. Or les personnes que vous visez sont déjà engagées dans un syndicat ou bénéficient du congé de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse et sont de ce fait particulièrement engagées.
En outre, pour être honnête, il ne s’agit pas forcément du public que nous souhaitons inciter à utiliser le congé d’engagement.
Enfin, le nombre de jours prévus pour ce congé – six – a fait débat. Or, par cet amendement, vous accorderiez dix-huit jours aux salariés, soit trois semaines et demie de congés supplémentaires : pour le coup, cela serait compliqué à gérer pour les entreprises.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Monsieur Chassaigne, madame Carrey-Conte, vous souhaitez supprimer de fait la limite de douze jours maximum fixée au cumul du congé d’engagement et du congé de formation économique, sociale ou syndicale. Il est déjà prévu par le projet de loi travail que les acteurs de la négociation collective d’entreprise ou de branche déterminent les conditions de mise en oeuvre du congé, notamment sa durée totale et les conditions de son cumul avec celui du congé de formation économique, sociale ou syndicale.
Il appartiendra donc aux partenaires sociaux de déterminer le nombre maximum de jours pouvant être cumulés au titre de ces congés. Ce n’est qu’en l’absence d’accord que les dispositions supplétives prévoient que le cumul ne peut excéder douze jours pour le congé jeunesse et de formation syndicale et, réciproquement, pour le congé des dirigeants inséré dans l’article dédié au congé jeunesse et soumis aux mêmes conditions supplétives.
Vos amendements sont donc en partie satisfaits par le projet de loi. Nous sommes défavorables à leur adoption.
Les travaux de la commission spéciale chargée de l’examen du projet de loi ont abouti à envisager la rémunération du nouveau congé d’engagement par la négociation d’entreprise ou par la négociation de branche. Or nous pensons que ce congé d’engagement ne doit pas engendrer de nouveaux coûts ou de nouvelles contraintes en matière d’agenda social pour les entreprises – elles en ont déjà assez comme ça du fait de certaines mesures prises antérieurement ! Ce nouvel alinéa risque de complexifier encore davantage le code du travail et d’empiler les dispositifs, contrairement à ce qui est dit dans l’étude d’impact. C’est pourquoi nous proposons de le supprimer.
La parole est à M. Yannick Favennec, pour soutenir l’amendement no 1049 .
L’activité bénévole est un engagement par définition personnel. C’est pourquoi nous estimons que les branches n’ont pas vocation à interférer dans cette pratique.
Par ailleurs, dans un projet de loi qui traite de l’égalité, on ne peut courir le risque d’introduire une discrimination entre les salariés : pour certains, le congé sera rémunéré, tandis que pour d’autres, il ne le sera pas. Alors même que l’article 8 soulève déjà plusieurs difficultés, il nous semble que le caractère non rémunéré du congé préserverait la dimension désintéressée du bénévolat.
La disposition visée a été adoptée en commission spéciale. Renvoyer la question de la rémunération à la négociation sociale me paraît marqué au coin du bon sens.
Nous souhaitons tous encourager l’engagement de nos concitoyens ; nous laissons, parce que nous y croyons, à la négociation sociale la possibilité de décider ou non de sa rémunération.
Je ne vois pas en quoi, premièrement, cela complexifierait les choses, deuxièmement, cela augmenterait les charges des entreprises.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Cela me semble au contraire un véritable sujet de discussion dans le cadre des négociations sociales – auxquelles, comme vous le savez, nous sommes particulièrement attachés.
Avis défavorable.
Entendre Mme la rapporteure thématique dire qu’elle ne voit pas en quoi une semaine de congé rémunérée supplémentaire alourdirait les charges des entreprises, j’en tombe de mon siège ! Je ne comprends pas comment on peut tenir de tels propos.
Je répète la question que j’ai déjà posée à quatre reprises en commission spéciale et à six reprises ce soir, sans jamais obtenir de réponse : dans le cas où le congé ne serait pas rémunéré et où les amendements identiques seraient adoptés, qui assurerait la couverture sociale et l’assurance des personnes en congé d’engagement ? Quelqu’un a-t-il étudié cela ?
Monsieur le député, il s’agit d’un congé : c’est donc la responsabilité civile personnelle qui jouera. Cela me semble plutôt simple.
Par ailleurs, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Si les entreprises ou les branches décidaient de rémunérer les salariés en congé, ce serait effectivement une charge nouvelle pour elles. Mais ce qui ne crée pas de charge nouvelle, c’est le fait de rendre la rémunération possible – à charge ensuite aux discussions dans le cadre des accords de branche ou des accords d’entreprise de décider collectivement de verser une rémunération afin de reconnaître et d’encourager l’engagement. Tout cela me semble plutôt logique.
Pour avoir moi aussi discuté avec un certain nombre de chefs d’entreprise, je sais que beaucoup incitent déjà leur personnel à s’engager et accordent des jours de congé à cette fin : cela fait partie des choses qui se font déjà dans les entreprises qui souhaitent bien fonctionner avec leurs salariés.
La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour soutenir l’amendement no 1535 .
L’amendement no 1535 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 1354 .
L’amendement no 1354 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 592 .
Il s’agit d’un amendement similaire à l’amendement no 590 , que j’ai présenté précédemment.
L’amendement no 592 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
C’est un amendement que j’avais déjà présenté en commission spéciale ; nous avions, Hervé Pellois et moi-même, décidé de le retirer pour pouvoir le rédiger de la façon dont il vous est présenté ce soir. En bref, il tend à étendre le congé de responsables associatifs bénévoles pour tous les actifs, quel que soit leur statut, et en particulier pour les salariés des chambres d’agriculture, qui sont régis par des dispositions collectives particulières.
Sa nouvelle rédaction devrait permettre l’adoption de cet amendement.
L’amendement no 745 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 32 Nombre de suffrages exprimés: 29 Majorité absolue: 15 Pour l’adoption: 21 contre: 8 (L’article 8, amendé, est adopté.)
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 8.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 491 .
Afin de simplifier le travail de l’administration nous proposons, avec cet amendement, de préciser que c’est le préfet du département dans lequel l’association a son siège qui est compétent pour délivrer les agréments aux associations de protection de l’environnement, et non telle ou telle autorité en fonction du périmètre géographique de l’agrément.
Je comprends l’objectif de simplification – que nous partageons –, mais il est nécessaire, pour assurer la cohérence, de conserver un regard d’ensemble, autrement dit de laisser au ministre la possibilité de délivrer l’agrément. Avis défavorable.
L’amendement no 491 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 490 .
L’amendement no 490 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement no 593 .
Cet amendement tend à créer un passeport bénévole selon des modalités définies par décret. Les personnes qui exercent une activité bénévole au sein d’une association devront bien entendu en apporter la preuve, selon des modalités elles aussi définies par décret.
France Bénévolat a déjà pris les devants avec la création de son « Passeport bénévole », lequel semble donner de bons résultats. Une expérimentation a donc déjà eu lieu. Ce passeport est soutenu par les ministères de l’éducation nationale, de la santé et de la jeunesse et des sports, ainsi que par l’AFPA, l’Association pour la formation professionnelle des adultes. Il est reconnu comme pièce justificative pour les dossiers de validation des acquis de l’expérience du ministère de l’éducation nationale et de l’AFPA. C’est pourquoi nous souhaitons généraliser sa mise en place et lui donner un caractère légal.
Il ne paraît pas souhaitable de donner une existence légale au passeport bénévole, dans la mesure où nous avons créé, dans le projet de loi travail, le compte d’engagement citoyen. Par cohérence, évitons les doublons : avis défavorable.
Défavorable également. Outre que l’exigence d’attestation à verser à l’employeur par le demandeur du congé relève non pas du niveau législatif mais du niveau réglementaire, les nombreux carnets associatifs retracent déjà a posteriori les engagements bénévoles.
Enfin, comme l’a rappelé Mme la rapporteure thématique, le compte d’engagement citoyen permettra de retracer les engagements bénévoles, et ce faisant de répondre, madame Bonneton, à votre légitime préoccupation. Il n’est donc pas nécessaire d’inscrire dans la loi l’obligation que vous suggérez.
Et si le projet de loi travail n’est pas voté ? Si le Gouvernement est censuré ?
Sourires.
L’amendement no 593 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jacques Bompard, premier inscrit sur l’article 8 bis.
L’intelligibilité de la loi est essentielle. Or la distinction entre appel à la générosité publique et appel public à la générosité est lourde de sens. Beaucoup de conseillers de députés attaquent mes propos, ce qui, je vous l’avoue, ne m’étonne pas, car le sens du bien commun n’est pas forcément compris ni appris dans les grandes écoles.
Pour en revenir au présent article, nous notons bien votre glissement. Auparavant, on en appelait à la générosité de la nation ; désormais, on en appelle aux pulsions individuelles. C’est d’ailleurs le sens de votre conception des associations, lesquelles, à vos yeux, doivent être des lieux de plaisir individuel, et non les lieux du magnifique engagement de la société civile au service du bien commun.
Je le dis et le répète, la société civile en a assez des intrusions de l’État et du développement de sa doxa : c’est en tout cas ce que j’essaie de vous faire entendre. Compte tenu des insultes que l’on entend, cela ne m’étonne pas – et ne devrait pas vous étonner non plus – que plus de la moitié du peuple se refuse à aller voter pour le système que vous incarnez, que vous l’acceptiez ou non.
L’article 8 bis, ajouté au texte initial par un amendement du Gouvernement, concerne un sujet de fond ; il aborde, à travers l’angle de la cohérence juridique et de la procédure d’appel public à la générosité, la double question du financement des associations et du développement du mécénat : ce point est analysé pages 251 et 252 du rapport.
Avant que nous n’examinions, notamment à partir de l’article 9, les dispositions relatives au service civique – en commençant par celui des sapeurs-pompiers –, je souhaite lever une ambiguïté introduite dans le code du service national sur le financement de l’engagement citoyen, encore trop souvent confondu avec le financement des associations qui, dans leur immense majorité, accueillent, pour accomplir leurs missions, de jeunes engagés du service civique.
Que tout soit fait pour assurer le financement des associations par l’intermédiaire de fonds privés ou du mécénat d’entreprise, nous en sommes tous d’accord ; mais englober le mécénat d’entreprise dans le financement – et, par conséquent, dans la gouvernance – de la forme non militaire du service national qu’est le service civique, ce n’est plus du tout la même chose.
Seule la puissance publique définit l’intérêt général qui préside aux missions de service public. C’est donc sans doute sans y prendre garde, et dans la précipitation d’un cavalier législatif, que notre assemblée a adopté, en juin 2015, un amendement portant article additionnel…
Cet amendement, disais-je, modifie le code du service national par une disposition qui permettrait un jour – puisque ce n’est pas le cas aujourd’hui – une privatisation du financement du service civique. C’est là un vrai débat ; aussi ai-je cosigné avec plusieurs collègues, dont la rapporteure générale du budget – puisqu’il s’agit du financement du service civique –, un amendement que je défendrai tout à l’heure.
L’article 8 bis, amendé, est adopté.
Article 8
Si je comprends bien, l’article 8 ter revient à donner une dérogation non due aux associations composées de jeunes gens. Vous entendez ainsi faire une nouvelle entorse à l’article 261 du code général des impôts, notamment afin de faciliter les modes de gestion de ces associations. J’y suis très défavorable, notamment au vu de l’histoire des intrusions de factions politiques dans ce genre d’organismes.
Je veux d’ailleurs préciser à Mme la ministre du logement, qui tente de m’accuser sur les réseaux sociaux d’appartenir au Front national, que ce type de comportement me conforte dans mon opinion sur les motifs du texte. La ristourne électoraliste que vous accordez à ceux qui sont les artisans de vos politiques n’est pas acceptable. Elle est de surcroît discutée après minuit, ce qui la rend encore moins glorieuse.
Nous en venons à l’amendement no 448 deuxième rectification.
La parole est à Mme Valérie Corre, pour le soutenir.
L’amendement no 448 deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 8 ter, amendé, est adopté.
Entendu, madame la présidente.
Ces amendements concernent les caractéristiques d’intérêt général que peuvent recouvrir les actions des associations. Actuellement, c’est la doctrine fiscale qui définit ces caractéristiques, puisque la reconnaissance d’un caractère d’intérêt général détermine la possibilité, pour les associations, de faire bénéficier leurs donateurs de rescrits fiscaux, partant de déductions d’impôt – impôt sur les sociétés pour les entreprises et impôt sur le revenu ou sur la fortune pour les particuliers.
Une lecture exclusivement fiscale de l’intérêt général peut toutefois poser problème. Aussi ces amendements font-ils suite aux conclusions d’un rapport commandé par M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports au Haut Conseil à la vie associative en ce domaine. Ils permettraient une reconnaissance de l’intérêt général par le préfet de département à toute association ayant formulé une demande en ce sens.
Le préfet de département est en effet à même de prendre en compte l’ensemble des avis formulés par les administrations concernées – puisque des associations peuvent oeuvrer au service de plusieurs types d’intérêt général, dans leurs différentes missions – et par des associations qui opèrent dans le même secteur. Ainsi, la reconnaissance de l’intérêt général ne relèverait plus seulement de critères fiscaux : elle incomberait à l’État dans toute sa dimension.
Favorable : ces deux amendements assureraient une plus grande sécurité juridique aux associations d’intérêt général et, surtout, ils simplifieraient les démarches administratives.
Ils font effectivement suite aux travaux du HCVA, et répondent à un besoin récurrent observé dans nos territoires. Nous sommes tous, j’imagine, régulièrement sollicités par les associations au sujet de l’iniquité de leur traitement par les services fiscaux. De ce point de vue, les amendements permettraient une clarification ; à titre personnel, je m’en réjouis.
Il s’agit là, monsieur Blein, d’un sujet important, dont je sais qu’il vous tient à coeur. Les associations jouent un rôle essentiel, qui n’est plus à démontrer, pour la cohésion de notre société. La notion d’intérêt général, qui fonde l’intervention d’un grand nombre d’entre elles, mérite assurément d’être précisée ; c’est d’ailleurs le sens du rapport que j’ai commandé au HCVA. Ce rapport, qui m’a été remis le 25 mai dernier, donc très récemment, reprend les évolutions de la notion d’« intérêt général », préconise des méthodes pour le reconnaître et en analyse les conséquences à travers trois propositions alternatives.
Les dispositions que vous défendez, monsieur le député, se fondent seulement sur le processus de reconnaissance, dont je conçois les difficultés. Néanmoins le problème me semble devoir être traité dans sa globalité, afin de trouver des solutions cohérentes et équilibrées. Nous nous y employons avec les parties concernées, notamment au sein de l’État, pour aboutir à un dispositif précis d’ici à l’automne. Vos amendements viennent donc un peu trop tôt ; aussi je vous invite à les retirer, faute de quoi l’avis serait défavorable.
Je vais les maintenir car ils permettent de faire un pas en avant s’agissant de mesures qui sont attendues. Rien n’empêche, dans un avenir même proche, de faire évoluer cette disposition. Le fait qu’elle soit adoptée aujourd’hui sera un symbole.
Cet amendement vise à créer un rendez-vous annuel en vue de structurer le dialogue civil territorial entre les représentants du mouvement associatif et les pouvoirs publics, afin qu’ils puissent se coordonner au sein de la conférence territoriale de l’action publique.
En effet, comme vous le savez, certaines collectivités territoriales prennent – en ce moment-même – pour prétexte la baisse des dotations de l’État pour réduire et raboter leurs subventions aux associations et à la vie associative.
Il arrive que ces réductions soient cumulatives entre la commune, le département et la région concernés. Les conséquences peuvent s’avérer extrêmement préjudiciables.
En outre, ces mouvements s’opèrent sans coordination ni concertation avec les autres partenaires publics et le monde associatif. Le présent amendement vise donc à instituer une concertation annuelle, à l’échelle régionale, afin de favoriser un dialogue territorial en faveur de la vie associative.
C’est une façon très concrète de traduire les engagements pris à travers la nouvelle charte des engagements réciproques du 14 février 2014, mais également de donner suite à la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, ainsi qu’à la circulaire du Premier ministre du 29 septembre 2015 relative aux nouvelles relations entre les pouvoirs publics et les associations.
Elle a émis un avis défavorable. Sur le principe, il paraît difficile, voire inutile, d’inscrire dans la loi une disposition si peu normative. Certes, nous sommes tous favorables au dialogue, mais l’inscrire dans la loi paraît compliqué.
En outre, il est difficile de distinguer dans la loi une association en particulier, même si le mouvement associatif est, effectivement, devenu un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics sur le sujet.
Monsieur Juanico, le dialogue que vous appelez de vos voeux existe déjà entre pouvoirs publics et acteurs associatifs. Il a été réaffirmé dans la nouvelle charte des engagements réciproques, signée le 14 février 2014 par le Premier ministre avec les représentants du monde associatif ainsi que – pour la première fois – des collectivités territoriales.
Il s’agit donc, dorénavant, de décliner ce dialogue et de le faire vivre : je m’y emploie. Recourir à la loi ne me semble donc pas nécessaire. Je rejoins donc l’avis de Mme la rapporteure thématique en émettant à mon tour un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement no 395 n’est pas adopté.
La parole est à M. Bernard Lesterlin, pour soutenir l’amendement no 1081 .
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, je suis amené à proposer par voie d’amendement, avec un certain nombre de mes collègues, de revenir sur une modification au code du service national qui a été adoptée il y a un an. L’article L. 120-2, qui est fondamental car il définit le service civique, a en effet été modifié, et le présent amendement vise à le rétablir dans sa rédaction antérieure.
En transférant la responsabilité du financement de ce qui constitue le socle du service civique, c’est-à-dire l’indemnité versée aux jeunes engagés et leur couverture sociale – bien entendu, des domaines annexes peuvent être financés par d’autres personnes publiques – de l’État vers un groupement d’intérêt public – un GIP –, en l’occurrence l’Agence du service civique, nous avons ouvert une brèche. En effet, ce transfert rend possible un financement privé du service national non militaire.
Cela me paraît inadmissible. Du reste, il s’agit là d’une question de fond, qui a fait l’objet, il y a six ans, d’un long débat qui a débouché sur une solution adoptée à l’unanimité, droite et gauche confondues.
Nous avons déjà débattu de cette question en commission. Comme je vous l’ai dit à cette occasion, il faut faire preuve de pragmatisme pour atteindre nos objectifs. Le mécénat existe partout, en particulier dans le secteur culturel. Je ne vois pourquoi il faudrait se priver de ressources, alors que le service civique est précisément en train de monter en charge. La commission a donc émis défavorable sur cet amendement.
Il est également défavorable. L’Agence du service civique est financée à titre principal par l’État : les budgets pour 2015 et pour 2016 ont vu le financement du service civique doubler et la négociation pour 2017, qui a été entamée au niveau des ministres concernés dans le cadre du prochain projet de loi de finances, devrait également déboucher sur une évolution sensible.
Le service civique doit mobiliser la société dans son ensemble, et en premier lieu l’État, comme je viens de le rappeler. Au regard de leurs responsabilités sociétales, nous ne sommes pas défavorables à ce que des financeurs privés viennent également abonder son budget, dans des conditions à déterminer.
À ce stade, le Gouvernement est donc défavorable, monsieur le député, à votre amendement.
Madame la rapporteure thématique, je ne peux pas vous laisser dire, en dépit de toute l’amitié qui nous lie, que ce débat a déjà eu lieu, et ce pour une raison simple : la formulation que j’avais choisie pour mon amendement était irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.
Cet amendement n’a donc pas pu être examiné.
C’est la raison pour laquelle, avec un certain nombre de mes collègues, dont certains sont présents ici, et grâce aux conseils de Mme la rapporteure générale du budget, consultée sur les moyens de contourner cet obstacle, j’ai déposé un nouvel amendement.
Je ne fais bien évidemment pas au Gouvernement le procès d’avoir l’intention de privatiser le service civique. Mais laisser ouverte dans la loi une telle brèche, dans une République où l’alternance démocratique existe, me paraît une position dangereuse.
Il faut, à ce moment du débat, faire attention. En effet, si nous n’avons pas eu ce débat en ces termes exacts, il n’en demeure pas mois que l’avons eu sur un plan général, notamment sur la question du financement. Nous l’avons également abordé lorsque nous avons parlé des fondations. Le débat sur le fond a donc bien eu lieu.
Notre attention a été appelée sur deux risques principaux, que la commission spéciale et le Gouvernement – c’est dire que le problème intéresse au-delà de la simple majorité – ont bien entendu et traduit dans le projet de loi, car un certain nombre d’amendements ont d’ores et déjà été adoptés et d’autres le seront.
Le premier risque réside dans la substitution entre le service civique et l’emploi. La série d’amendements intégrés au texte par la commission y répond, et d’autres viendront encore en séance publique.
Le second risque réside dans le financement et, à ce propos, il convient de faire particulièrement attention à ce que nous disons ici, car nos propos peuvent être interprétés de façon différente à l’extérieur de l’Assemblée. Une association qui peut bénéficier d’un agrément au titre du service civique, ou qui va faire appel à un jeune effectuant son service civique, doit-elle se voir interdire d’être financée par un opérateur privé ou d’en recevoir des dons ?
Par conséquent, ce n’est pas la nature du financement complémentaire qui pose problème – car il est bien complémentaire : lorsqu’on élargit le service civique, on le fait notamment au bénéfice de structures à 100 % publiques. Je le rappelle afin qu’à l’extérieur de cet hémicycle on ne croie pas – on on ne laisse pas entendre – autre chose.
Monsieur Lesterlin, je connais votre attachement au sens des mots comme à la vérité sur ce dossier du service civique : nous pouvons donc partager ce constat. Les garanties qui sont ici offertes me paraissent largement suffisantes.
Par ailleurs, nous disposons d’un verrou : celui de l’agrément. Le pilotage territorial, auquel vous-même avez beaucoup contribué en commission, ne doit pas non plus être oublié.
L’amendement no 1081 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement no 1421 .
Nous avons évoqué tout à l’heure la question de l’engagement associatif et mutualiste. Le présent amendement porte quant à lui sur l’engagement coopératif. Il vise à combler un manque : aucun texte de loi ne prévoit en effet un statut du coopérateur mandaté alors que, dans nombre de coopératives, de nombreux sociétaires apportent leurs concours personnels dans le cadre d’un mandat, en dehors de tout contrat de travail les liant à la coopérative.
Par analogie, le code des assurances définit un statut de mandataire mutualiste, qui permet justement de faciliter cet engagement. Cependant, les coopérateurs mandatés ne bénéficient pas d’un statut comparable.
Cette carence peut s’expliquer par le fait que, dans le cadre des sociétés coopératives et participatives – les SCOP –, les coopérateurs sont salariés de leur coopérative. Par ailleurs, dans le cadre des coopératives de consommation, les coopérateurs étaient consommateurs : leur engagement renvoyait de facto à celui que chacun peut mener, à titre bénévole, dans une association.
Or un nouveau champ de l’économie coopérative se développe aujourd’hui, notamment avec les sociétés coopératives d’intérêt collectif – les SCIC –, qui mêlent plusieurs parties prenantes et permettent l’implication de chacune d’elle dans la gouvernance. Je pourrais également citer les coopératives d’activité et d’emploi – les CAE –, ou les coopératives d’utilisation de matériel agricole, les CUMA : pour ces nouvelles formes de coopératives qui se développent beaucoup dans nos territoires, le fait de bénéficier d’un statut de coopérateur mandaté pourrait véritablement contribuer au développement de l’engagement de leurs collaborateurs comme de leurs structures.
Il est donc proposé que nous nous saisissions de l’occasion qui nous est donnée avec le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté pour créer ce statut dans la loi.
L’amendement no 1421 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement no 1068 .
Il semble pertinent qu’une nouvelle fondation issue d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 ou par les articles 21 à 79 du code civil local applicables aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ne perde pas son agrément : en effet la nature de son activité n’a, dans ce cas, pas changé.
Favorable. Pour éviter tout malentendu, je précise que cette proposition s’inscrit dans les suites de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. Elle permettra utilement aux structures concernées de conserver leur agrément en cas de changement de nature, et de façon sécurisée, grâce à un rescrit administratif préalable.
Je suis donc effectivement tout à fait favorable à cet amendement : il complétera utilement notre législation.
L’amendement no 1068 est adopté.
J’espère que nous pourrons discuter de cet article avec plus de sérénité. L’idéologie épargne assurément les pompiers, quoique ce ne soit pas toujours ce que nous entendons localement.
J’aimerais que vous nous précisiez l’implication des services départementaux d’incendie et de secours – les SDIS – dans la mise en place de cet article.
Nous pouvons tous nous réjouir que des jeunes gens s’engagent dans la lutte contre les catastrophes. Il faudrait aussi que des énarques parisiens en viennent à considérer les transmissions des départements. Or je n’ai pas vraiment l’impression que ce soit l’inspiration de ce texte. Aurons-nous la considération nécessaire à l’égard des relais locaux dans la mise en place de cette bonne partie du projet de loi ? Les présidents des conseils départementaux seront-ils associés à la réflexion ?
Je souhaitais dire à quel point je me réjouissais de voir, après six ans d’observation attentive, le service civique des jeunes chez les sapeurs-pompiers devenir véritablement opérationnel. J’en félicite le Gouvernement. Grâce à des contacts avec la Fédération nationale des sapeurs-pompiers et avec les SDIS, mais aussi grâce au travail réalisé, sur l’impulsion de notre collègue de l’opposition, M. Morel-A-L’Huissier, sur le statut des pompiers, largement inspiré du statut du service civique un an avant, nous avons créé une synergie pour donner une vraie définition au volontariat, qui n’est ni du bénévolat ni du salariat.
C’est très bien que des jeunes en service civique reçoivent une formation pour être de vrais pompiers opérationnels. La réalimentation de la ressource en volontaires, qui représentent plus de 90 % des effectifs de sapeurs-pompiers en France, est essentielle.
L’article 9 est adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Débat, en application de l’article 50-1 de la Constitution, sur les suites du référendum britannique et la préparation du Conseil européen ;
Suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté.
La séance est levée.
La séance est levée, le mardi 28 juin, à une heure.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly