La commission a poursuivi l'examen du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l'économie sociale et solidaire (n° 1536) sur le rapport de M. Yves Blein.
Avant de laisser le rapporteur et le Gouvernement répondre aux orateurs des groupes, je vous informe que les articles 10 et 10 bis seront réservés jusqu'avant l'article 40 A, ce qui permettra de regrouper sous le titre V la discussion des dispositions relatives aux associations. La réserve est de droit, car elle a été demandée par le rapporteur au fond.
D'autre part, le président de la commission des finances m'a fait savoir que les amendements CE105 de Mme Chantal Guittet, CE19 de la commission des affaires étrangères, CE120 de Mme Annick Le Loch, CE181 de Mme Chantal Guittet, CE217 de Mme Brigitte Allain, CE218 de Mme Michèle Bonneton, CE269 de M. Jean Grellier, CE 322 de Mme Ericka Bareigts, CE402 de Mme Audrey Linkenheld, CE414 de M. Joël Giraud, CE358 de M. Christophe Cavard et CE151 de Mme Laure de La Raudière ont été déclarés irrecevables au motif qu'ils contreviennent aux dispositions de l'article 40 de la Constitution. Les amendements CE241 de M. François-Michel Lambert, CE242 de Mme Michèle Bonneton, CE393 de Mme Audrey Linkenheld et CE348 de Mme Annick Le Loch sont également déclarés irrecevables à moins qu'ils ne soient gagés.
M. Abad regrette que notre définition du champ de l'économie sociale et solidaire (ESS) écarte bon nombre de sociétés commerciales, ce qui pose le problème du périmètre de ce secteur. En France, l'appartenance à un statut – celui de coopérative, d'association, de mutuelle ou de fondation – est le fondement qui réunit les entreprises du secteur, dont les membres – salariés, adhérents ou usagers – se consacrent à un objet et non à la rémunération de capitaux.
Si l'on retient pour critère l'objet de la société, pourquoi ne pas considérer que Scolarest ou Sogeres, qui, en tant qu'opérateurs de restauration scolaire, se consacrent à la bonne alimentation des enfants, Veolia, qui gère ce bien commun qu'est l'eau, ou Acadomia, qui se consacre au soutien scolaire, appartiennent à l'économie sociale et solidaire ? Il existe bien des sociétés dont la finalité peut être perçue comme un objet social mais dont les actionnaires ne poursuivent pas d'autre but que la rémunération des capitaux qu'ils ont apportés.
Dès lors, il est essentiel de considérer le statut des entreprises comme le socle de l'économie sociale, ainsi que l'a souhaité Benoît Hamon. Néanmoins, des entreprises dont la forme statutaire peut être capitalistique mais qui répondent aux critères définis aux deux premiers articles du projet peuvent se revendiquer de l'ESS dans la mesure où elles adoptent certains comportements qui lui sont propres.
Dans son propos, M. Grellier a visité chacune des familles de l'ESS. Je confirme qu'en ce qui concerne le modèle coopératif, le texte comporte des avancées, notamment sur la société coopérative et participative (SCOP) d'amorçage ou sur la coopérative d'activités. La révision coopérative permet de vérifier qu'une coopérative, tout en cherchant des perspectives de développement, reste fidèle ses valeurs. La même rigueur est de mise pour les modèles mutualiste et associatif.
Monsieur Chassaigne, le risque que le modèle de l'ESS soit dévoyé me semble très réduit, dans la mesure où l'article 1er pose un nombre important de limitations à la capacité d'utiliser et de faire prospérer les capitaux. De plus, l'article 2 définit les critères d'utilité sociale. Autant dire que nous mettons en place un tamis assez fin. Nous avons été attentifs, lors des auditions, à éviter tout dévoiement. On pourrait même imaginer, au contraire, que le modèle de l'ESS pollinise et s'étende au champ de l'économie capitaliste en y infusant comme par capillarité ses valeurs.
Je vous confirme, Madame Bonneton, l'importance du volet territorial, dont témoigne la réflexion sur les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE). Par nature, l'ESS a vocation à traduire les aspirations de proximité, ce qui l'inscrit de fait dans le développement des politiques territoriales.
Enfin, que M. Giraud se rassure : si le volet associatif du projet de loi est le moins abouti, les parlementaires sauront l'enrichir ! On ne peut pas dire, en revanche, que peu de dispositions concernent l'ensemble des acteurs. Il était important que l'ESS gagne en reconnaissance et en capacité d'expression. Quand la loi institue les chambres régionales et la représentation nationale de l'ESS, elle dote celle-ci d'une visibilité tout à fait propice à l'affirmation de ce secteur.
Monsieur Abad, si toutes les entreprises de services à la personne n'entrent pas dans la catégorie des entrepreneurs sociaux, c'est qu'elles ne poursuivent pas nécessairement un objectif d'utilité sociale. Considérez-vous que le jardinier d'une maison bourgeoise ou l'aide scolaire à domicile, qui fait travailler l'enfant d'une famille aisée, accomplissent une mission sociale ? En la matière, la naïveté n'est peut-être pas là où vous le pensez. Certains services à la personne, utiles certes, mais tournés vers le confort de certains privilégiés et attachés à un secteur commercial lucratif, ne font manifestement pas partie de l'ESS.
Le débat sur le droit d'information des salariés, que nous entendons créer, sera probablement passionné. Ce droit nous semble aller de soi car, dans notre pays, la non-transmission d'entreprises saines est une source croissante de perte d'emplois. En Île-de-France, une entreprise sur trois ne trouve pas à se transmettre, ce qui entraîne la disparition de 10 000 emplois par an. À l'échelon national, 40 000 entreprises qui auraient pu être sauvées par leurs salariés ne l'ont pas été, ce qu'on peut attribuer à un défaut d'information.
Le droit d'information bénéficiera moins aux « pépites » ou aux « jeunes pousses » innovantes, qui pourraient dégager des marges commerciales importantes, qu'aux entreprises à la rentabilité plus modeste, comme les entreprises familiales, dont le propriétaire reçoit peu d'offres de reprise. En cas de cession, ne négligeons pas le rôle que peuvent jouer les salariés, qu'il faut considérer non comme un élément de coût mais comme un potentiel. Ceux-ci doivent d'ailleurs se montrer proactifs dans la gestion de leur entreprise.
Le Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire existe déjà, mais le projet de loi, en reconnaissant cette existence, lui confère une légitimité et consacre son rôle. Quant à l'organisation, tous les deux ans, d'une conférence régionale de l'économie sociale et solidaire, elle répond à une demande pressante du secteur. C'est par souci de trouver un échelon adapté à l'ESS que nous avons choisi d'harmoniser, dans une instance nationale, le dialogue entre les acteurs, tout en préservant la nécessaire proximité.
Monsieur Grellier, je vous sais gré du travail que vous avez effectué, avec les autres parlementaires, sous la supervision des rapporteurs. Il n'est pas difficile d'hériter d'un texte comme celui-ci, qui a donné lieu, en amont, à un véritable dialogue entre l'exécutif et le législatif.
Monsieur Chassaigne, je note avec satisfaction que vous portez un regard favorable sur le texte, même si vous pointez le risque d'un dévoiement ou d'une dilution de l'ESS dans le reste de l'économie. Tel est bien le coeur du débat. L'article 1er dispose que certaines organisations économiques à but lucratif peuvent appartenir à l'ESS du fait de leur forme de gouvernance, ce qui est conforme à la tradition historique du secteur. Reste à savoir si les critères proposés sont trop souples ou trop restrictifs.
Pour nous, l'ESS est un secteur inclusif, qui peut intégrer les sociétés commerciales. Son potentiel au service de la croissance et de la création d'emplois est important – il représenterait 10 % du PIB – mais relativement sous-exploité. C'est pourquoi nous entendons concilier la notion d'entrepreneuriat avec la poursuite d'un objectif d'utilité sociale. Le rapporteur l'a rappelé : il s'agit non d'opposer deux modèles, l'un capitaliste et guidé par la recherche du profit, l'autre social et solidaire, mais d'installer entre eux une barrière juridique en espérant que le premier puisse s'intéresser au second, pourvu que celui-ci réussisse, ce qui suppose que nous lui en donnions les moyens.
Vous avez évoqué le risque d'une dilution des financements, mais nous n'entendons pas mettre en concurrence, au vu de leur statut, les différentes structures qui existent au sein de l'ESS. Dans mon propos introductif, j'ai indiqué que les financements de la BPI s'adapteraient à chaque membre de la famille ESS. BPI France a distingué les besoins de chaque structure, des associations aux sociétés commerciales. L'apport de garanties, les avances remboursables ou les financements en fonds propres dont les associations ont besoin se feront selon des modes spécifiques, très différents de ceux que pourraient solliciter des sociétés commerciales. Le risque de porosité et de dilution ne nous échappe pas, mais le projet de loi fait le pari que l'ESS peut attirer les formes d'économie traditionnelles.
Madame Bonneton, la territorialité est au coeur du projet de loi. La constitution de pôles territoriaux de coopération économique permettra au Gouvernement de labelliser les acteurs et de lancer de nouveaux appels à projets. Cela dit, nous n'oublions pas que certains groupements existaient déjà lors du lancement de l'appel à projets de juillet 2013. Un amendement du rapporteur tend à les prendre en compte.
M. Giraud regrette que le texte ne soit pas plus transversal, mais notre principal objectif était, tout en posant l'existence d'objectifs similaire, de reconnaître la spécificité de chaque membre de la famille ESS. Comment harmoniser la situation d'une coopérative, qui possède un capital, celle d'une mutuelle, qui en est dépourvue, et celle d'une fondation ou d'une association, qui ont leur propre organisation interne ? À trop chercher la transversalité, on ne peut qu'accroître le risque de dilution. Néanmoins, la loi reconnaît l'économie sociale et solidaire comme une famille unique, ce qui introduit une première forme d'harmonisation. Les modes d'accès au financement sont eux aussi harmonisés au sein des politiques territoriales, de même que la capacité de répondre à des marchés publics dans des conditions spécifiques. La transversalité, qui ne figurait pas parmi nos objectifs, n'est donc pas absente du projet de loi.
La Commission en vient à l'examen des articles.
TITRE Ier
DISPOSITIONS COMMUNES
Chapitre Ier
Principes et champ de l'économie sociale et solidaire
Article 1er : Définition de l'économie sociale et solidaire
La Commission examine l'amendement CE205 de Mme Michèle Bonneton.
L'amendement vise à compléter la définition de l'ESS comme « un mode d'entreprendre » par les mots « et de développement économique », afin de montrer toute l'amplitude du champ couvert par ce secteur.
Avis défavorable. L'ajout ne semble pas nécessaire du point de vue juridique. Au reste, je comprends l'intention des auteurs de l'amendement et j'ai souligné dans mon propos liminaire que l'ESS est un mode particulier de développement économique.
Même position. J'ajoute que l'expression « mode d'entreprendre » renvoie à la notion essentielle d'initiative qui, en l'espèce, a souvent le pas sur la recherche du développement économique.
L'amendement CE205 est retiré.
La Commission étudie l'amendement CE488 du rapporteur.
Je suggère le retrait, car l'amendement est loin d'être uniquement rédactionnel. L'article 1er définit l'ESS comme un mode d'entreprendre, non pas « présent » dans tous les domaines de l'activité humaine, mais « adapté » à tous les domaines de cette activité, ce qui n'est pas la même chose.
Si l'amendement est maintenu, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement CE488 est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE252 de M. Jean Grellier et CE491 du rapporteur.
L'amendement CE252 vise à scinder le premier alinéa en deux phrases, ce qui lui donnera plus de « punch ».
La rédaction de l'amendement CE491 me semble préférable. J'invite M. Grellier à retirer le CE252.
L'amendement CE252 est retiré.
Je vous suggère de retirer l'amendement CE491, monsieur le rapporteur. Les acteurs de l'ESS tiennent à l'idée d'une adhésion volontaire, qui marque l'engagement des entrepreneurs dans un mode d'entreprise différent, alternatif, dont ils partagent les valeurs.
Dans ce cas, je propose de remplacer dans mon amendement le verbe « appartiennent » par le verbe « adhèrent », la suite restant inchangée.
L'amendement CE491 est retiré.
La Commission aborde l'amendement CE492 du rapporteur.
Je suggère le retrait, précisément pour une raison rédactionnelle : tous les autres termes de l'énumération s'appuient sur des substantifs.
L'amendement CE492 est retiré.
La Commission examine l'amendement CE96 de Mme Chantal Guittet.
La recherche d'une utilité sociale est commune à tous les acteurs de l'ESS, dont elle est une caractéristique majeure. Je ne comprends pas pourquoi le texte la réserve aux sociétés commerciales, dans l'article 1er, ou aux entreprises, dans l'article 2.
Les critères rappelés à l'article 1er sont fondés sur des principes fondateurs, parmi lesquels figure, outre l'utilité sociale, le mode de gouvernance démocratique. Ces critères ont été dégagés historiquement par les acteurs statutaires. Faire de l'utilité sociale un principe transversal reviendrait à exclure du champ de l'ESS les coopératives de distribution ainsi que les coopératives bancaires, qui revendiquent depuis leur création de poursuivre une utilité sociale. En revanche, celle-ci est un critère discriminant pour les sociétés commerciales, qui seules seront tenues de le respecter.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons. Une entreprise d'économie sociale ne poursuit pas nécessairement une finalité sociale.
Je maintiens que la recherche d'une utilité sociale est une caractéristique majeure de l'ESS.
La Commission rejette l'amendement CE96.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE493 du rapporteur, CE256 de M. Jean Grellier, CE608 de la commission des lois et CE246 de Mme Michèle Bonneton.
L'amendement CE493 est un amendement de clarification rédactionnelle, qui ajoute la notion d'information des différentes parties prenantes au sein de l'entreprise, afin de donner plus de consistance à la notion de gouvernance démocratique.
L'amendement CE256 réécrit l'alinéa 3 de manière, ici encore, à avoir deux phrases au lieu d'une, très longue.
L'amendement CE608 a pour objet d'assurer une meilleure association des salariés aux décisions de l'entreprise, quelle que soit la taille de celle-ci. La gouvernance démocratique n'étant pas définie par la loi, il importe de préciser qu'ils sont parties prenantes à ces décisions.
L'amendement CE246 vise à préciser le contenu de ce que doit être une gouvernance démocratique, à savoir la mise en oeuvre du principe selon lequel chaque associé ou partie prenante dispose d'une voix.
L'amendement CE493 remplace un substantif par un infinitif, mais sans rendre l'alinéa plus lisible. Le Gouvernement souhaite donc son retrait.
Pour les mêmes raisons, il appelle au retrait – sinon au rejet – de l'amendement CE256, qui revient à rompre le lien logique opéré par l'alinéa 3 : la participation aux réalisations de l'entreprise est celle des associés et des parties prenantes. Cet argument vaut également contre l'amendement CE608.
Permettez-moi d'insister sur l'amendement CE246, qui n'est pas anodin. Il propose en effet de restreindre le principe démocratique de gouvernance à sa stricte acception « une personne, une voix ». Chez les acteurs statutaires, ce principe n'est formulé tel quel que pour les coopératives. Il ne peut s'appliquer en l'état aux sociétés commerciales, sauf à dénaturer leur structure – ce qui n'est pas le choix du Gouvernement. Dans ce type de sociétés, le pouvoir de décision est en effet lié à la détention du capital. Pour leur appliquer strictement le principe « une personne, une voix », il aurait fallu créer une nouvelle forme sociale d'entreprise au sein du code de commerce. Nous avons préféré instaurer un partage démocratique du pouvoir de décision entre les actionnaires et les autres parties prenantes que sont les salariés et les usagers, sans remettre en cause le principe du lien entre pouvoir de décision et détention de capital.
Je vous propose de retirer nos amendements – c'est en tout cas ce que je ferai en ce qui me concerne – pour travailler à une rédaction satisfaisante d'ici à la séance publique. A défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Contrairement à l'amendement de M. Grellier, celui de la commission des lois ne rompt pas le lien logique opéré par l'alinéa 3, madame la secrétaire d'État : il se contente d'ajouter les mots « et des salariés ». Le rapporteur nous propose de réécrire l'ensemble de l'alinéa d'ici à la séance publique pour tenir compte des préoccupations que nous venons d'exprimer. Permettez-moi tout de même d'insister : si les salariés sont bien intégrés aux parties prenantes, le Gouvernement devra nous le confirmer en séance publique.
Vous avez raison, cet amendement n'est pas rédactionnel. En revanche, il est satisfait : la notion de parties prenantes inclut en effet la catégorie des salariés. Si on la mentionnait expressément, il faudrait mentionner toutes les autres.
Je retire l'amendement CE256, mais à regret : je ne vois pas en quoi il change le sens de l'alinéa.
Les amendements CE493, CE256 et CE608 sont retirés.
J'entends les arguments du Gouvernement et du rapporteur. Mon amendement est peut-être un peu restrictif, mais il permet de clarifier ce que sont les entreprises de l'économie sociale et solidaire et d'approfondir la notion de gouvernance démocratique. Je le maintiens donc.
La Commission rejette l'amendement CE246.
L'amendement CE494 du rapporteur est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CE495 du rapporteur.
Il me semble qu'il est satisfait et que la modification proposée n'améliore pas vraiment la rédaction.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CE72 de la commission des affaires sociales.
Cet amendement vise à préciser les principes de gestion des entreprises de l'économie sociale et solidaire, notamment les règles qui encadrent la non-lucrativité – lesquelles seront applicables à toutes, y compris aux sociétés commerciales.
L'alinéa 5 dispose que « les bénéfices sont majoritairement consacrés à l'objectif de maintien ou de développement de l'activité de l'entreprise ». Nous proposons d'ajouter le mot « distribuables » après le mot « bénéfices » afin d'intégrer le report à nouveau, qui reste dans les comptes de l'entreprise d'une année sur l'autre. Il s'agit par exemple d'éviter qu'en cas d'exercice bénéficiaire, une entreprise de l'économie sociale et solidaire puisse distribuer à l'exercice suivant, en plus de la moitié des bénéfices de l'exercice, la totalité du report à nouveau de l'exercice bénéficiaire.
Cette précision est utile. Avis favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE381 de M. Joël Giraud.
L'alinéa 6 précise que « les réserves obligatoires constituées, impartageables, ne peuvent pas être distribuées. » Nous proposons de compléter cette disposition par les mots « en raison du caractère collectif de la propriété de l'entreprise » pour réaffirmer la différence de nature entre les différentes entreprises de l'économie sociale et solidaire.
En-dehors de l'indivision et de la propriété publique, la notion de propriété collective n'existe pas en droit français. L'appropriation collective des moyens de production est en outre très marquée idéologiquement,…
…pour ne pas dire historiquement datée. Elle n'appartient pas à la réalité politique de notre pays aujourd'hui. Enfin, cette précision n'a pas de caractère normatif. Je souhaite donc le retrait de cet amendement. A défaut, j'y donnerai un avis défavorable.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CE73 de la commission des affaires sociales.
Cet amendement vise à répondre à une préoccupation qui a été exprimée par de nombreux acteurs du secteur et qui a trait à l'absence d'interdiction d'incorporation des réserves au capital dans les critères de gestion imposés aux entreprises de l'économie sociale et solidaire. Sans cette interdiction, une telle incorporation pourrait en effet entraîner une plus-value en cas de vente des parts de la société, ce qui pourrait être une façon pour une société commerciale d'être lucrative.
Néanmoins, il apparaît délicat d'interdire purement et simplement l'incorporation des réserves au capital, dans la mesure où elle est autorisée – sous certaines conditions – pour les coopératives et pour les SCOP, notamment dans un objectif de renforcement des fonds propres. Notre amendement propose de se calquer sur ce dispositif pour encadrer strictement les conditions dans lesquelles les entreprises de l'économie sociale et solidaire peuvent incorporer au capital des sommes prélevées sur les réserves, sans pour autant en bannir le principe. Là encore, il s'agit d'encadrer précisément la gestion des entreprises de l'économie sociale et solidaire, pour que les sociétés commerciales qui s'en réclament se voient appliquer les mêmes principes que les SCOP et les coopératives, spécialement en matière de distribution des bénéfices.
Nous avons là un exemple de transversalité et d'harmonisation. Vous proposez de préciser les règles d'incorporation au capital des réserves constituées sur le modèle de la règle qui s'applique aux coopératives. Cette proposition est tout à fait bienvenue, puisqu'elle permet d'encadrer la distribution d'actions gratuites ou l'augmentation de la valeur nominale des parts sociales de l'entreprise tout en permettant à celle-ci de renforcer ses fonds propres. Le Gouvernement y est donc favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE496 du rapporteur.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE359 de Mme Jeanine Dubié et CE99 de Mme Chantal Guittet.
Je comprends qu'il faille conserver une unité à l'ensemble des acteurs de l'économie sociale et solidaire. La fusion du privé non lucratif et du privé de statut commercial n'en risque pas moins de créer une confusion. Notre amendement réécrit donc les alinéas 7 à 19 de l'article 1er, conformément d'ailleurs à ce que prévoit le II dans sa rédaction issue du Sénat, qui distingue bien les deux familles – celle des organismes sans but lucratif et celle des entreprises de l'ESS. Il s'agit de clarifier les rôles et positions des différentes composantes de l'économie sociale et solidaire.
L'amendement CE359 pose un problème de fond. Il s'agit d'introduire au sein de l'économie sociale et solidaire une distinction selon que l'entité concernée est statutaire ou est une société commerciale. Il y a là un risque de fragmentation du secteur de l'économie sociale et solidaire, et une limite apportée à l'inclusivité de la famille, qui ne serait plus que de façade. Néanmoins, je comprends la préoccupation qui sous-tend l'amendement. Il reflète en fait les réticences des organismes à but non lucratif comme les associations ou les mutuelles à être appelées « entreprises ». Il importe de rappeler qu'au sens de la jurisprudence communautaire, toute structure, quel que soit son statut, est une entreprise dès lors qu'elle a une activité économique. L'esprit de ce projet de loi est bien de faire entrer l'économie sociale et solidaire dans la catégorie de l'entrepreneuriat.
J'en viens à l'amendement CE99. Du fait de leur apport historique au développement du secteur, le Gouvernement a fait le choix de ne pas vérifier l'application concrète des critères énumérés à l'article 1er par les acteurs statutaires que sont les mutuelles, coopératives, associations et fondations. Il propose néanmoins à l'ensemble des acteurs de s'engager dans une démarche volontaire d'exemplarité sociale, afin que le secteur retrouve son rôle d'éclaireur du progrès social. Il déposera d'ailleurs un amendement en ce sens en séance publique.
La Commission rejette l'amendement CE359.
L'amendement CE99 est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CE257 de Mme Catherine Troallic.
De plus en plus de filières se développent dans ce qu'il est convenu de désigner sous le vocable d'économie circulaire, qui se fonde sur la transformation de déchets en matières premières. Cet amendement vise à insister sur cette notion de transformation.
L'économie se définit traditionnellement comme l'ensemble des activités de production de biens et de services. C'était le sens de la rédaction initiale du Gouvernement. Le Sénat a choisi d'y ajouter les activités de distribution, d'échange et de consommation. Ces précisions, comme celle que vous proposez, ne sont juridiquement pas nécessaires pour définir l'économie sociale et solidaire ; elles risquent même d'exclure certaines activités du secteur. La transformation s'analyse comme un mode particulier de production, au sens générique du terme. Je m'en remets cependant à la sagesse de la commission.
Avis favorable. La transformation fait aussi référence à l'économie circulaire et à la capacité qu'ont les entreprises de l'économie sociale et solidaire de se développer dans ce domaine.
Je profite de l'occasion pour demander à Mme la secrétaire d'État de nous éclairer sur ce que le Sénat entend par « activités de consommation de biens ».
C'est la rédaction qu'il a choisie pour désigner les coopératives de consommation.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission examine les amendements identiques CE367 de Mme Jeanine Dubié et CE389 de Mme Audrey Linkenheld.
Cet amendement vise à améliorer la rédaction de l'alinéa 7 en parlant, plutôt que d'activités « de services mises en oeuvre », « de mise en oeuvre de services réalisés ou dispensés ». Les hôpitaux privés non lucratifs participant au service public hospitalier ou les structures privées non lucratives pour personnes âgées ou handicapées ne peuvent en effet se reconnaître dans la formulation d'inspiration industrielle – « production, distribution, échange et consommation » – issue de la première lecture au Sénat.
Notre amendement CE389 est identique. Je vais le retirer, car il me semble que nous avons mal interprété le texte du Sénat, qui parle bien d'activités de services.
Je rejoins Mme Linkenheld. À trop préciser, on risque de finir par exclure. Les services sociaux et médico-sociaux ne constituent qu'une partie des organismes non lucratifs appartenant à l'économie sociale et solidaire. Il convient de conserver une définition suffisamment large du secteur, propre à s'adapter à la diversité de ses acteurs. Le Gouvernement considère que cet amendement est satisfait ; il souhaite donc son retrait.
Les amendements sont retirés.
Puis la Commission est saisie de l'amendement CE128 de M. Lionel Tardy.
L'article 2 crée une sorte de label « utilité sociale ». Si j'ai bien compris, celui-ci va servir à définir l'agrément « entreprise solidaire d'utilité sociale » prévu à l'article 7 et entre dans la définition des sociétés commerciales pour l'article 1er. Or on l'applique comme critère de définition de l'économie sociale et solidaire aux seules entreprises. Cette distinction selon le statut juridique n'a pas lieu d'être. Dans un souci d'équité, je propose donc d'imposer la condition dite d'utilité sociale aux autres structures – coopératives, mutuelles, fondations et associations loi de 1901. Les structures de l'économie sociale et solidaire n'auront d'ailleurs aucune difficulté à satisfaire à ce critère, qui répond à des objectifs de soutien aux personnes fragiles, de lien social ou de développement durable.
Nous en revenons au débat initial. Les critères énumérés à l'article 1er sont fondés sur des principes communs, qui ont été dégagés par les acteurs statutaires eux-mêmes. L'application de l'utilité sociale à tous les acteurs revient de facto à exclure les coopératives. Ni les acteurs historiques ni le Gouvernement ne considèrent l'utilité sociale comme un principe transversal de l'économie sociale et solidaire ; or nous souhaitons inclure la totalité des acteurs dans le champ du texte.
Ce sont la gouvernance et les principes statutaires qui définissent les entreprises de l'économie sociale et solidaire. Il importe ensuite de poser des critères pour celles qui ne correspondent pas à ces « canons ». C'est tout le sens des articles 1er et 2.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CE206 de Mme Michèle Bonneton.
Cet amendement rédactionnel tend à substituer le mot « organismes » à celui de « mutuelles » à l'alinéa 8. C'est en effet celui qu'emploie le code de la mutualité.
Le code de la mutualité utilise indifféremment le terme de mutuelles et celui d'organismes. Mais le secteur mutualiste tient à mettre en avant ses spécificités, qui sont résumées dans l'appellation de « mutuelles ». Il me semble donc opportun de maintenir ce terme.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CE98 de Mme Chantal Guittet.
Sont considérées comme appartenant à l'économie sociale et solidaire les entreprises qui appliquent les principes définis au I de l'article 1er et celles ayant un statut spécifique – fondations, associations, mutuelles, coopératives. Cet amendement précise que les fondations doivent se doter d'une gouvernance démocratique, les sociétés commerciales étant pour leur part contraintes de respecter ces principes.
Le Gouvernement a fait le choix d'intégrer de droit les acteurs statutaires au sein de l'économie sociale et solidaire, sans effectuer de tri parmi eux. D'autre part, les fondations sont reconnues à l'échelle communautaire comme appartenant à l'économie sociale, et vous savez que ce cadre s'impose à nous.
Convenons que les fondations ne se consacrent pas à la recherche de bénéfices et ne partagent pas leurs réserves. Il est vrai qu'on ne sait pas très bien qualifier la gouvernance démocratique d'une fondation ; mais a priori, ces organismes ont vocation à être intégrés de plein droit dans l'économie sociale et solidaire.
L'amendement est retiré.
L'amendement CE368 de Mme Jeanine Dubié est également retiré.
La Commission examine l'amendement CE497 du rapporteur.
Même avis que tout à l'heure pour l'amendement CE493.
L'amendement est retiré.
L'amendement CE498 du rapporteur est retiré.
Puis la Commission est saisie de l'amendement CE259 de Mme Catherine Troallic.
Cet amendement vise à sécuriser l'utilisation de la notion d'utilité sociale en la limitant au strict périmètre du projet de loi. Il s'agit d'insister sur la nécessité de poursuivre une utilité sociale réelle et non accessoire, et de se prémunir contre les abus de sociétés qui pourraient prétendre à la qualité d'entreprises de l'économie sociale et solidaire en se contentant de quelques actions de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
L'utilité sociale n'est pas réservée aux entreprises de l'économie sociale et solidaire. Quoi que l'on puisse en penser, l'objet premier des sociétés commerciales est de partager les profits réalisés. C'est d'ailleurs ce que dit l'article 1382 du code civil lorsqu'il définit l'entreprise. En revanche, la recherche à titre principal de l'utilité sociale est l'un des critères qui ouvrira droit à l'agrément solidaire rénové, dorénavant conçu comme une sous-catégorie, plus exigeante, de l'article 1er – ce qui répond à votre préoccupation. Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement. A défaut, son avis serait défavorable.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CE207 de M. François-Michel Lambert.
Cet amendement vise à intégrer l'utilité sociale et environnementale – et non pas seulement sociale – parmi les conditions que doivent remplir les sociétés commerciales pour faire partie de l'économie sociale et solidaire.
L'utilité sociale, telle qu'elle est définie à l'article 2, prend en compte une dimension environnementale. Il y a donc de l'environnement et du développement durable dans l'économie sociale et solidaire. Pour autant, il n'y pas nécessairement d'économie sociale dans le développement durable et l'environnement. Gardons-nous de laisser penser qu'une start up fabriquant des panneaux solaires, qui a une utilité environnementale, a automatiquement une utilité sociale. Ce ne sera le cas que si elle favorise le lien social, l'inclusion sociale, lutte contre les discriminations ou participe au soutien de publics fragiles. Nous aurons l'occasion d'en reparler à l'article 2.
Nous ne parlons pas d'utilité sociale « ou » environnementale, mais d'utilité sociale « et » environnementale. Nous n'enlevons donc rien au texte.
L'amendement est retiré.
L'amendement CE499 du rapporteur est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE97 de Mme Chantal Guittet, CE74 de la commission des affaires sociales, CE337 de M. Denis Baupin, CE184 de M. André Chassaigne, CE260 de M. Jean Grellier, CE500 du rapporteur et CE338 de M. Denis Baupin.
Le texte instaure pour les entreprises commerciales de l'économie sociale et solidaire des obligations souples d'utilisation du résultat, qui permettent l'appropriation par les propriétaires de l'entreprise d'une fraction équivalente, au maximum, à 50 % du résultat – puisqu'elles doivent affecter 50 % de ce résultat en report à nouveau et réserves, dont 20 % à une réserve impartageable. Or de nombreuses entreprises commerciales ne se réclamant pas de l'économie sociale et solidaire distribuent aujourd'hui moins de 40 % de leurs résultats à leurs actionnaires. Dans le respect des valeurs fondatrices de l'économie sociale et solidaire, je propose donc de prévoir des règles d'affectation du résultat plus contraignantes, en relevant les réserves non partageables à 50 % au moins des bénéfices de l'exercice et en affectant au report à nouveau au moins 30 % de ces bénéfices.
L'amendement CE74 concerne les règles de gestion appliquées aux sociétés commerciales. Il propose de préciser que la réserve statutaire a un caractère obligatoire. Nous proposons également de la renommer « fonds de développement », afin d'éviter toute confusion avec la réserve légale obligatoire de 5 %.
L'amendement CE337 vise à faciliter, dans le cadre de l'économie sociale et solidaire, le développement des structures dédiées aux énergies renouvelables, afin de favoriser la mobilisation de l'épargne populaire en faveur de ces dernières, comme cela se pratique en Allemagne et comme il serait opportun compte tenu de nos moyens budgétaires limités.
Notre régime juridique est néanmoins moins flexible, et donc moins attractif que celui de nos voisins. Or, en matière d'énergies renouvelables, c'est souvent l'investissement de départ qui est coûteux, les coûts de fonctionnement étant, par la suite, beaucoup plus bas. Il serait donc normal d'octroyer à ce secteur des facilités plus importantes. C'est ce que propose notre amendement, afin notamment de renforcer l'attractivité des investissements en faveur des énergies renouvelables.
L'amendement CE184 tend à renforcer le principe de lucrativité limitée défendu à travers ce texte. L'accueil qui lui sera réservé nous permettra de mesurer le degré de libéralisme de votre projet de loi.
L'amendement CE260 est de clarification rédactionnelle. Je le retire au profit de celui du rapporteur.
L'amendement CE260 est retiré.
L'amendement CE338 complète le CE337 : il vise également à renforcer l'attractivité des investissements dans les énergies renouvelables.
L'amendement CE97 tend à porter les taux de mise en réserve des bénéfices et de report à nouveau, respectivement, à 50 % et à 30 %. En l'état, la combinaison des alinéas 5 et 6, d'une part, et 13 et 14, d'autre part, revient à limiter la distribution des dividendes à 24 % au plus des bénéfices distribuables de l'entreprise : autrement dit, le texte oblige l'entreprise à réinvestir dans son activité les trois quarts de ses bénéfices. Cela nous paraît une exigence suffisante, si l'on souhaite comme le Gouvernement faire de l'économie sociale et solidaire un secteur de développement économique créateur d'emplois. Il faut pour cela attirer des investisseurs, et donc préserver de la souplesse dans le régime juridique. Avis défavorable.
En relevant trop les seuils, on risque d'aboutir à l'effet inverse de celui qui est recherché. L'investissement cessera d'être attractif, y compris pour les actionnaires salariés. Avis défavorable.
L'amendement proposé par la commission des affaires sociales est en revanche satisfaisant car il contribue à consolider l'entreprise. J'y suis donc favorable.
Cet amendement CE74 précise le caractère obligatoire de la réserve, rebaptisé « fonds de développement ». Il est clair dans l'esprit du Gouvernement que cette réserve a bien ce caractère obligatoire, mais votre proposition, madame Carrey-Conte, vient utilement clarifier ce point. Toutefois, nous souhaiterions conserver le mot « affecté », l'affectation étant le terme consacré en matière de comptabilité.
Il nous semble d'autre part que le principe de l'exclusion des pertes antérieures du calcul du taux de mise en réserve devrait être rapproché de la mention de ce taux, de manière à rendre plus lisibles les modalités de calcul.
L'amendement CE97 est retiré.
La Commission adopte l'amendement CE74 rectifié.
L'ESS se définit comme un mode d'entreprendre, et non comme une addition d'activités particulières dans des secteurs particuliers. Si les sociétés d'investissement auxquelles se réfère l'amendement CE337 sont mentionnées dans le texte, elles doivent en respecter l'ensemble des critères. Elles ne sont cependant pas obligées d'intégrer l'ESS et peuvent poursuivre leur activité sous le régime de droit commun, si les contraintes que cela impliquerait leur semblent trop lourdes. Le fait d'assouplir le taux de mise en réserve obligatoire pour les seules sociétés d'investissement participatif dans les énergies renouvelables ne nous semble donc pas opportun. Avis défavorable.
Une loi-cadre donne des indications générales et n'a pas vocation à entrer dans les spécificités sectorielles. Avis défavorable.
Cet amendement vise à favoriser les projets citoyens dans le domaine des énergies renouvelables, secteur dans lequel, contrairement aux autres, les investissements initiaux représentent deux tiers des investissements globaux contre seulement un tiers pour les investissements de fonctionnement. Il importe donc de favoriser la constitution d'un capital de départ. En Allemagne, les bénéfices distribués sont de l'ordre de 5 % du capital investi.
Nous sommes dans le chapitre Ier du projet de loi, qui définit les principes et le champ de l'économie sociale et solidaire. De telles mesures n'y ont pas forcément leur place.
Ce n'est pas nous qui avons choisi de traiter des prélèvements et des réserves à cet endroit. Nous déposons nos amendements là où le sujet l'exige !
Chez nos voisins, une dynamique citoyenne a permis l'investissement coopératif dans les énergies renouvelables sans recours aux fonds publics, et j'ai du mal à comprendre que, alors que nous souhaitons impulser une dynamique en faveur de la transition énergétique, nous fassions le choix de renvoyer le financement de ce secteur vers le privé. Nous avons au contraire intérêt à inciter les particuliers qui soutiennent cette démarche à y investir. Or, compte tenu de l'importance des investissements initiaux et du risque important, il est logique, si l'on veut attirer les capitaux, de desserrer les contraintes qui pèsent sur le secteur.
J'admets que ces dispositions n'ont pas leur place dans le chapitre Ier, mais, sur le fond, il serait bon qu'un projet de loi sur l'économie sociale et solidaire inclue des mesures en faveur du financement participatif des énergies renouvelables. Les insérer dans un article spécifique permettrait sans doute de satisfaire les auteurs de l'amendement.
Vos arguments sont légitimes, mais un projet de loi sur la transition énergétique est en cours de rédaction. Il constituerait selon moi un cadre mieux adapté à des mesures concernant les activités économiques dans le secteur des énergies renouvelables.
Quoi qu'il en soit, il n'est pas plus légitime de créer des incitations particulières pour les entreprises de ce secteur que pour celles qui oeuvrent dans le domaine médico-social : la création d'une maison de retraite qui offre des services médicaux très spécifiques requiert également des investissements initiaux très lourds, longs à amortir, qui justifieraient qu'on abaisse le taux de réserve obligatoire. Si je comprends vos objectifs, je ne suis donc pas convaincue de la nécessité de créer une catégorie d'entreprises spécifique.
Je partage l'opinion de Mme la secrétaire d'État sur ces approches sectorielles, sachant qu'une association de tourisme qui veut construire un village de vacances doit procéder à des investissements initiaux représentant 40 à 50 % du coût de revient en valeur amortie, et qu'elle a donc, elle aussi, besoin d'une fiscalité adaptée.
On ne peut, dans un article qui encadre de façon générale le régime de répartition des capitaux et de rémunération des titres des entreprises de l'économie sociale, entrer dans des détails sectoriels, à moins de passer en revue l'ensemble des secteurs concernés.
Je défendrai pour ma part une position médiane. Madame la secrétaire d'Etat, vous étiez députée il n'y a pas si longtemps et vous vous souviendrez sans doute que les parlementaires détestent qu'ont les renvoie à un texte en préparation, ne sachant jamais dans quels délais il verra le jour. Mieux vaut donc profiter des véhicules législatifs qui passent lorsqu'ils sont adaptés. Quant au risque d'oublier certains secteurs, monsieur le rapporteur, c'est un argument qui ne doit pas pénaliser ceux qui ont fait part de leurs préoccupations. Quoi qu'il en soit, il s'agit de questions qui ne relèvent pas de ce chapitre du projet de loi, mais doivent faire l'objet d'un article additionnel.
Oublions donc le projet de loi sur la transition énergétique. Cela étant, notre intention n'est nullement d'empêcher le développement des énergies renouvelables dans le cadre de l'économie sociale et solidaire. Nous souhaitons au contraire l'encourager, mais nous refusons la logique consistant à créer une exception plus favorable à ce secteur dont l'utilité environnementale est prouvée, mais pas nécessairement son utilité sociale.
Enfin, je ne suis pas persuadée que l'assouplissement du taux de réserve obligatoire soit l'outil le plus incitatif pour les sociétés d'investissement participatif que vise l'amendement. Des incitations fiscales, comme cela se pratique en Allemagne, seraient sans doute plus efficaces.
Je doute que Bercy soit favorable à un système d'incitations fiscales. D'autre part, si nous élaborons des outils utiles et efficaces, n'importe quel secteur devrait pouvoir s'en saisir.
La secrétaire d'État a évoqué dans son introduction le crowdfunding ou financement participatif, et il ne me paraît pas insensé de vouloir encourager ce mode de financement. Savoir s'il faut privilégier les projets à dominante environnementale ou sociale est un débat politique. Il existe déjà dans notre droit des dispositions en faveur de l'investissement participatif, mais peut-être ce projet de loi peut-il nous permettre de les compléter.
Nous devons en effet poursuivre notre réflexion sur cette question d'ici à l'examen du texte en séance publique. Quoi qu'il en soit, la détermination d'outils sectoriels n'a pas à figurer dans un article consacré à définir l'économie sociale et solidaire et son périmètre.
Si Mme la secrétaire d'État approuve l'idée d'un article additionnel reprenant nos amendements, nous acceptons de les retirer.
Les amendements CE337 et CE338 sont retirés.
L'amendement CE184 propose de hausser la part minimum dédiée au report bénéficiaire et aux réserves obligatoires de 50 % à 70 %. Nous y sommes défavorables, car les trois quarts des bénéfices seront déjà réinvestis dans l'entreprise, ce qui est suffisant si l'on veut maintenir l'attractivité des projets et ne pas freiner l'investissement.
Avis défavorable. Il ne faut pas que les salariés coopérateurs soient conduits à se désintéresser du résultat de leur entreprise.
L'amendement CE184 est retiré.
L'amendement CE500 me semble satisfait par le texte, mais je m'en remets à la sagesse de la commission.
La Commission adopte l'amendement CE500.
Puis elle examine, en présentation commune, les amendements CE75 de la commission des affaires sociales et CE339 de M. Denis Baupin.
L'amendement CE75 vise à compléter l'alinéa 15, qui interdit le rachat par la société d'actions ou de parts sociales. En effet, ce rachat n'est pas l'unique moyen de liquider le capital investi. Il est également possible d'amortir le capital ou de procéder à une réduction du capital non motivée par les pertes. L'amendement prévoit donc d'interdire également ces deux opérations, afin d'encadrer au mieux les règles de gestion auxquelles devront se soumettre les sociétés commerciales souhaitant se réclamer de l'économie sociale et solidaire.
L'amendement CE339 vise à favoriser les entreprises agréées solidaires en les excluant explicitement de la condition d'interdiction de rachat, afin de leur éviter de se retrouver en situation d'illiquidité.
Je suis favorable au complément apporté par l'amendement CE75, pour la raison donnée par Mme la rapporteure pour avis.
L'amendement CE339 propose d'exonérer les entreprises agréées « entreprises solidaires d'utilité sociale » (ESUS) des interdictions posées à l'alinéa 15, qui visent à empêcher l'enrichissement indu des associés et des investisseurs extérieurs. Rien ne justifie une telle disposition, ces règles étant protectrices.
Selon l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement CE75.
Selon l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l'amendement CE339.
Puis elle examine l'amendement CE382 de M. Joël Giraud.
Cet amendement vise à garantir le caractère permanent de l'application des valeurs et de l'éthique de l'ESS par les entreprises n'appartenant pas au périmètre historique de l'économie sociale et solidaire, en exigeant leur immatriculation auprès de l'autorité compétente, qui la leur accordera en liaison avec la chambre régionale de l'économie sociale et solidaire.
À un régime d'autorisation préalable, le Gouvernement préfère un régime déclaratif simple. Ce souhait découle de la volonté du Président de la République de simplifier la vie des entreprises, en réponse à une demande très forte de l'ensemble des acteurs économiques.
J'ajoute que l'expression « en lien avec » ne me paraît pas assez précise pour caractériser le rôle que joueraient les CRESS dans ce processus d'immatriculation préalable. Avis défavorable.
L'amendement CE382 est retiré.
La Commission examine l'amendement CE369 de Mme Jeanine Dubié.
Il est proposé de dénommer les sociétés commerciales visées au 2° de l'article « entreprises de l'économie sociale et solidaire » pour les distinguer des organismes de l'ESS, cela afin d'éviter des confusions entre le secteur privé non lucratif et le secteur privé de statut commercial.
Selon votre proposition, seules les sociétés commerciales seraient dénommées « entreprises de l'économie sociale et solidaire », alors que le but de l'article 1er est précisément de réunir l'ensemble des acteurs de la famille de l'économie sociale et solidaire sous une dénomination commune. En adopter de différentes en fonction du statut commercial pourrait laisser penser qu'il y a de bons et de mauvais membres au sein de la famille. Le Gouvernement s'est refusé à opérer une telle distinction, conformément d'ailleurs à l'histoire de l'économie sociale et solidaire mais aussi à la réglementation et à la jurisprudence communautaires en ce domaine.
Même avis. Créer une nouvelle catégorie ajouterait de la confusion. Pour prétendre à rejoindre le secteur de l'économie sociale et solidaire, les sociétés commerciales doivent déjà respecter une multitude de critères.
Je retire l'amendement. Mais dans le domaine de l'hébergement des personnes âgées par exemple, il y a tout de même une différence entre un EHPAD à caractère commercial et un EHPAD à caractère associatif.
L'amendement CE369 est retiré.
L'amendement CE370 de Mme Jeanine Dubié est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CE501 du rapporteur, faisant l'objet du sous-amendement CE665 de Mme Fanélie Carrey-Conte.
Cet amendement de simplification rédactionnelle modifie l'alinéa 16, ce qui conduit à supprimer les alinéas 18 et 19, devenus inutiles.
La commission des affaires sociales avait adopté un amendement CE76 visant à ce que la conformité des statuts des sociétés commerciales se réclamant de l'économie sociale et solidaire soit contrôlée lors de leur dépôt au greffe du tribunal de commerce, ainsi qu'à chaque éventuelle modification ultérieure. Situé à l'alinéa 18, il tombera si celui du rapporteur est adopté. C'est pourquoi je le reprends à titre personnel sous forme de sous-amendement.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement et au sous-amendement.
La Commission adopte successivement le sous-amendement et l'amendement ainsi sous-amendé.
En conséquence, l'amendement CE76 de la commission des affaires sociales tombe.
La Commission examine l'amendement CE100 de Mme Chantal Guittet.
Cet amendement vise à ce que les chambres régionales de l'économie sociale et solidaire (CRESS) rendent un avis avant l'immatriculation des sociétés commerciales se réclamant de l'économie sociale et solidaire. Ce contrôle a priori me paraît moins lourd qu'un contrôle a posteriori.
Le Gouvernement a souhaité instituer un régime de déclaration. Le régime d'autorisation que vous proposez irait à l'encontre de notre objectif de simplification. Le contrôle permanent de la conformité des statuts des entreprises de l'économie sociale et solidaire est inhérent aux principes mêmes de celle-ci. Votre proposition se traduirait par un parcours du combattant pour les sociétés commerciales souhaitant rejoindre le secteur de l'économie sociale et solidaire et pourrait nuire à l'attractivité de ce dernier. Le Gouvernement vous invite à retirer cet amendement. À défaut, il y sera défavorable.
Même position. Grâce à l'amendement que nous venons d'adopter, sous-amendé conformément au souhait de la commission des affaires sociales, les greffes seront déjà chargés de vérifier la conformité des statuts. Veillons à ne pas noyer les CRESS sous des tâches administratives de contrôle alors qu'on leur demande plutôt d'animer et de coordonner les stratégies de l'économie sociale et solidaire.
Il est alors contradictoire à l'article 4 de confier aux CRESS le pouvoir de vérifier la qualité des entreprises de l'économie sociale et solidaire.
Il s'agit là d'un contrôle a posteriori. C'est seulement dans le cas où elles constatent qu'une entreprise n'agit pas conformément aux critères de l'économie sociale et solidaire que les CRESS se saisissent.
L'amendement est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, l'amendement CE609 de la commission des lois et l'amendement CE262 de Mme Chantal Guittet.
Nous attachons une grande importance à cet amendement débattu ce matin en commission des lois. En effet, dans la rédaction actuelle du texte, une fois immatriculée au registre du commerce, une société commerciale de l'économie sociale et solidaire pourrait à vie faire état de sa qualité d'entreprise de ce secteur – sauf à ce que les dispositions prévues à l'article 4 trouvent à s'appliquer. Nous proposons qu'il soit vérifié tous les cinq ans, sur dossier, que ces sociétés respectent toujours les conditions leur permettant de faire état de cette qualité.
Notre amendement vise lui aussi à contrôler périodiquement que les sociétés commerciales respectent bien les conditions d'éligibilité au statut d'entreprise de l'économie sociale et solidaire.
Le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements. Au-delà même de la lourdeur du dispositif proposé, que toute modification des statuts s'accompagne obligatoirement d'un dépôt modificatif au greffe du tribunal de commerce constitue en soi une garantie suffisante. Enfin, la disposition risquerait de créer une distorsion de concurrence entre les sociétés commerciales et les associations du secteur.
Je propose que d'ici à l'examen du texte en séance publique, nous réfléchissions avec le Gouvernement au principe d'une charte de l'économie sociale et solidaire – dont l'article 2 bis, qui a été supprimé, posait le principe. Sans aller jusqu'à exiger une vérification périodique des statuts des entreprises, cela permettrait de s'assurer qu'elles respectent bien les valeurs et les bonnes pratiques qui fondent l'économie sociale et solidaire.
Si le rapporteur a saisi l'esprit de mon amendement, en revanche Mme la secrétaire d'État, que je remercie certes d'être présente parmi nous ce soir dans les circonstances que l'on sait, est un peu expéditive lorsqu'elle invoque une lourdeur supposée, alors que nous demandons simplement que les sociétés commerciales redéposent tous les cinq ans une déclaration au greffe du tribunal de commerce, afin qu'il soit possible de vérifier qu'elles remplissent toujours les critères de l'économie sociale et solidaire. Quoi de plus simple ? Cela étant, nous sommes d'accord pour retravailler ce point d'ici à l'examen en séance publique.
Si la procédure que vous proposez, monsieur Cavard, était aussi légère que vous le dites, les conditions n'auraient pas à en être définies par décret, comme le prévoit votre amendement. Si un décret est nécessaire, c'est que cela ne coule pas de source !
Le rapporteur invite à retravailler d'ici à la séance publique. Le Gouvernement est-il susceptible de changer de position ?
Je suis désolée, monsieur Cavard, si le terme de « lourdeur » vous a choqué. Ajouter une nouvelle obligation à celles qui existent déjà pour les sociétés commerciales, et d'ailleurs uniquement pour elles, pourrait être vécue par elles comme une contrainte administrative supplémentaire. Leurs organes dirigeants, comme aussi leurs commissaires aux comptes, ont l'obligation juridique de vérifier que l'exercice de leur activité est bien conforme à leurs statuts. En cas de non-conformité avérée, les CRESS pourront ester en justice, comme prévu à l'article 4. Cela est suffisant. Enfin, je le redis, ce serait introduire une distorsion de concurrence, notamment par rapport aux associations à but lucratif, susceptible d'être censurée par le juge constitutionnel.
Cela étant, je ne suis pas fermée à la discussion d'ici à la séance publique.
Les amendements CE609 et CE262 sont retirés.
La Commission examine l'amendement CE208 de Mme Michèle Bonneton.
Sans souhaiter, madame la secrétaire d'État, introduire de complexité, nous demandons par cet amendement que la parité entre les femmes et les hommes soit assurée dans les instances de gouvernance des entreprises du secteur de l'économie sociale et solidaire.
Celles-ci ne sont pas exonérées du régime de droit commun en matière de parité et d'égalité entre les femmes et les hommes. La loi récemment adoptée introduit certaines contraintes nouvelles, notamment en matière de gestion du personnel, qui s'appliqueront à elles comme à toutes les entreprises. Il n'y a donc pas lieu de prévoir des dispositions spécifiques. Au contraire, la force symbolique et politique du principe de parité pourrait en être amoindrie. En revanche, une déclaration de principes a été évoquée avec les acteurs du secteur, déclaration qui pourrait se transformer en un guide des bonnes pratiques ayant une force juridique plus contraignante. L'idée pourrait en être introduite par voie d'amendement en séance publique et l'exigence de parité pourrait figurer dans ce guide. Je vous invite à poursuivre la discussion sur ce point.
Ce guide de bonnes pratiques, qui s'attacherait aux aspects qualitatifs, pourrait en effet intégrer l'objectif de parité et d'égalité entre femmes et hommes tout en répondant à certaines des préoccupations de M. Cavard.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte l'article 1er modifié.
La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise à minuit quinze.
Après l'article 1er
La Commission est saisie de l'amendement CE399 de Mme Audrey Linkenheld.
Cet amendement vise à étendre aux entreprises et organismes de l'économie sociale et solidaire les exceptions au principe d'interdiction du prêt de main-d'oeuvre à but lucratif prévues à l'article L. 8241-1 du code du travail, et dont peuvent aujourd'hui bénéficier les organisations syndicales, les associations d'employeurs ou encore certaines associations sportives.
Rien, ni en droit ni en fait, ne saurait justifier que l'on puisse, dans le secteur de l'économie sociale et solidaire, déroger à des dispositions du code du travail visant à protéger les salariés, surtout au moment où nous négocions un guide de bonnes pratiques dans lequel l'exemplarité sociale sera mise en exergue.
Même avis. Je ne vois pas où est le problème que vous soulevez, madame Linkenheld. Le prêt de main-d'oeuvre n'est pas interdit s'il s'opère en toute transparence et s'effectue sans marge.
Il ne s'agit absolument pas d'assouplir le code du travail ni d'amoindrir la protection des salariés, mais plutôt de faciliter la vie des entreprises et organismes de l'économie sociale et solidaire. Sous certaines conditions, posées par l'article L.8241-1 du code du travail, comme la facturation des salaires, des cotisations sociales et des frais professionnels, les organisations syndicales, les associations d'employeurs et les associations sportives peuvent aujourd'hui recourir à du prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif. Mais la répercussion d'autres charges, pourtant réelles, comme les frais de gestion administrative, n'est pas prévue, ce qui interdit à certaines associations, notamment culturelles, ou à certaines structures coopératives ou mutualistes de recourir à un tel prêt de main-d'oeuvre, alors qu'elles aimeraient aussi pouvoir le faire – bien entendu avec le même encadrement que celui aujourd'hui prévu par le code du travail. L'objectif est de faciliter la mutualisation des moyens humains, certainement pas d'ouvrir la voie à une exploitation des salariés.
Je comprends mieux l'objectif recherché. Je vois cependant deux obstacles à l'adoption de cet amendement. D'une part, les entreprises de l'économie sociale et solidaire ont, comme toutes les entreprises, obligation de négocier avec les partenaires sociaux. Introduire par voie d'amendement une dérogation au code du travail contreviendrait à la méthode de la négociation sociale voulue par le Gouvernement. Ensuite, assouplir les conditions du prêt de main-d'oeuvre pour l'ensemble des entreprises de la grande famille de l'économie sociale et solidaire, y compris donc pour les sociétés commerciales à but lucratif, pourrait menacer la protection des salariés. Nous avons évoqué tout à l'heure le risque potentiel d'une trop grande porosité entre le secteur de l'économie sociale et solidaire et le secteur commercial. Une disposition comme celle que vous proposez accroîtrait ce risque.
Rien n'interdit, dans le secteur de l'économie sociale et solidaire non plus que dans les autres secteurs, le prêt facturé de main-d'oeuvre si l'ensemble des coûts – salaires, charges sociales et, madame Linkenheld, frais de traitement administratif – est facturé en toute transparence et qu'aucune marge n'est réalisée à l'occasion de ce prêt. Votre amendement ne se justifie donc pas.
Ce n'est pas mon avis. Je le retire toutefois pour l'heure, mais je le redéposerai en séance après peut-être en avoir exclu les sociétés commerciales même si, je le redis, il n'est pas question de revenir sur le principe d'interdiction du prêt de main-d'oeuvre à but lucratif.
L'amendement CE399 est retiré.
Article 2 : Définition des entreprises recherchant une utilité sociale
La Commission examine, en présentation commune, l'amendement CE102 de Mme Chantal Guittet, les amendements identiques CE209 de Mme Michèle Bonneton et CE371 de Mme Jeanine Dubié, l'amendement CE417 de M. François-Michel Lambert et l'amendement CE210 de Mme Michèle Bonneton.
Mon amendement apporte une précision à la rédaction de l'alinéa 1 qui pourrait laisser penser qu'il existe trois types d'entreprises de l'économie sociale et solidaire.
Les notions d'utilité sociale et d'utilité environnementale étant intimement liées, l'amendement CE417 vise à les associer dans le présent texte.
Quant à l'amendement CE210, il précise la rédaction de façon que la qualification d'entreprise de l'économie sociale et solidaire soit clairement réservée à celles qui respectent les critères définis à l'article 1er.
Madame Guittet, je ne partage pas votre lecture de l'article 2. Celui-ci ne crée pas de catégorie supplémentaire d'entreprises de l'économie sociale et solidaire, mais ne fait que définir l'utilité sociale. Aucune confusion n'est possible. Le Gouvernement est donc défavorable à votre amendement et vous invite à le retirer. À défaut, j'y serai défavorable.
L'amendement CE102 est retiré.
Sagesse en revanche sur les amendements CE209 et CE371. Les mots « recherchant » et « poursuivant » ne sont-ils pas synonymes dans le contexte ?
Pas du tout. Il y a un monde entre rechercher et poursuivre un objectif ! Poursuivre une utilité sociale établit cette dernière, ce qui n'est pas le cas de la rechercher simplement.
Je partage cet avis. Écrire « poursuivant » au lieu de « recherchant » donne un caractère à la fois plus impératif et plus offensif.
Vos arguments ont convaincu le Gouvernement qui est finalement favorable à ces amendements.
La Commission adopte les amendements identiques CE209 et CE371.
Le Gouvernement demande le retrait de l'amendement CE417 auquel il est défavorable.
Pour les associations, l'utilité sociale constitue un concept défini et distinctif ; il n'y a pas lieu de faire intervenir la dimension environnementale.
Elle est pourtant constitutive de l'utilité sociale. Il est vrai qu'il aurait été préférable que notre amendement comporte un « et » plutôt qu'un « ou », pour faire référence à « l'utilité sociale ou environnementale ».
Dans la conception de l'utilité sociale retenue par le projet de loi, le social n'exclut pas l'environnemental alors que l'environnemental exclut le social.
L'amendement CE417 est retiré.
Je suis défavorable à l'amendement CE210 car l'utilité sociale n'est pas réservée aux seules « entreprises de l'économie sociale et solidaire telle que définie à l'article 1er du projet de loi ». D'autres entreprises peuvent être utiles socialement sans respecter les critères énoncés dans cet article, notamment ceux relatifs à la gestion et, en particulier, à la gouvernance démocratique. Je demande à ses auteurs de retirer l'amendement.
À mon sens, il est nécessaire de préciser que les entreprises concernées par l'article 2 sont bien celles de l'économie sociale et solidaire, telles que définies à l'article 1er.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CE210.
Puis elle examine, en présentation commune, les amendements rédactionnels CE502 et CE503, tous deux du rapporteur.
Pour les motifs que j'ai déjà invoqués contre des amendements semblables à l'article 1er, je demande le retrait de ces amendements.
Les amendements sont retirés.
La Commission est saisie des amendements identiques CE77 de la commission des affaires sociales et CE211 de Mme Michèle Bonneton.
Cet amendement vise tout d'abord à mettre en avant, dans les missions susceptibles d'être assurées par les entreprises considérées comme poursuivant une utilité sociale, la lutte contre les inégalités. Il cite ensuite, parmi ces inégalités, les inégalités culturelles qui demeurent un puissant facteur de clivage au sein de la société française. Il prévoit enfin que les entreprises poursuivant une utilité sociale peuvent également avoir pour objet social l'éducation à la citoyenneté, et mentionne à cet égard l'éducation populaire absente du projet de loi.
Le Gouvernement est favorable à ces amendements.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte les amendements identiques.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CE610 de la commission des lois, CE504 du rapporteur, CE212 de Mme Michèle Bonneton, CE1 de la commission du développement durable, CE17 de la commission des affaires étrangères, et CE213 de Mme Michèle Bonneton.
L'amendement CE610 précise, d'une part, ce que nous entendons par « développement durable » en citant ses quatre piliers, économique, social, environnemental et participatif. Il met fin, d'autre part, à la hiérarchie induite par l'alinéa 4 introduit au Sénat. En effet, dans sa rédaction actuelle, les entreprises concourant au développement durable ne seraient considérées comme étant d'utilité sociale que « sous réserve que leur activité soit liée à l'un des objectifs mentionnés » aux alinéas 2 et 3. Nous proposons de supprimer cette réserve.
L'amendement rédactionnel CE504 du rapporteur est retiré.
L'amendement CE212 est retiré
L'année 2013 a été marquée par le débat national sur la transition énergétique. À cette occasion, de nombreuses propositions ont été émises qui seront l'objet de discussions ultérieures de notre assemblée dans le cadre du projet de loi de programmation de la transition énergétique. Il est toutefois possible de commencer à les traduire dans la loi dès maintenant.
Les entreprises de l'économie sociale et solidaire sont en effet un vecteur idéal de la transition énergétique. Au travers d'une gouvernance éthique et d'objectifs solidaires et sociaux, un certain nombre d'entre elles ont déjà fait le choix de se tourner vers les énergies d'avenir. L'amendement CE1 vise à inscrire explicitement l'objectif de concours à l'effort national de transition énergétique dans les facteurs permettant la reconnaissance de l'utilité sociale.
J'ai évoqué lors de la discussion générale la nécessité de prendre en compte la solidarité internationale dans la notion d'utilité sociale. Le quatrième alinéa de l'article 2 me paraît être le seul endroit où il soit possible d'introduire cette dimension particulière. D'où l'amendement CE17.
Parce que les approches du développement durable peuvent différer, il est bon de préciser la finalité des entreprises qui « concourent au développement durable » grâce à la notion plus aboutie de « préservation des biens communs ». C'est le sens de l'amendement CE213.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement CE610. S'il n'est pas opposé à la précision relative aux quatre piliers du développement durable, qui peut être utile, il considère que la notion d'« espaces en fragilité », qui n'est définie par aucun texte, rendrait la notion d'utilité sociale plus complexe en introduisant un critère peu opportun.
Nous souhaitons que l'utilité sociale reste définie dans le projet de loi par la destination d'activités s'adressant à des personnes en situation de fragilité, ou par des objectifs en faveur du lien social ou du renforcement de la cohésion territoriale. Afin de préserver la cohérence du texte, je demande le retrait de l'amendement.
Même avis. Le renvoi au deuxième et au troisième alinéa de l'article permet de retrouver de nombreuses dimensions du développement durable.
Sur la forme, monsieur Cavard, je me permets de vous suggérer de corriger votre amendement en supprimant sa deuxième phrase : « En conséquence, elles démontrent une utilité dans le soutien qu'elles apportent aux espaces en fragilité. » Une telle considération relève plus d'un exposé sommaire que de la loi.
La première phrase de l'amendement CE610 reste cependant essentielle. Il serait regrettable que l'intérêt environnemental, économique, social et participatif de l'ESS ne soit pas inscrit dans le projet de loi.
La notion de développement durable est bien mentionnée dans le quatrième alinéa tel qu'il est actuellement rédigé. Le Gouvernement ne s'opposera pas à l'introduction d'une précision concernant les quatre dimensions citées dans l'amendement CE610, mais il refuse que soit supprimé le respect des critères énumérés aux alinéas 2 et 3.
L'un des objectifs de l'amendement consistait à placer les alinéas 2, 3 et 4 au même niveau, ce que le Gouvernement refuse. Il s'agit d'affirmer que le développement durable a, de fait, une utilité sociale, qui n'est pas conditionnée par d'autres critères en termes de publics ou de territoire. Cette mention ne remet pas la cohérence du projet de loi en cause, et n'a rien à voir avec les entreprises solidaires d'utilité sociale.
Si nous ne faisions plus référence aux alinéas 2 et 3 dans l'alinéa 4, n'importe quelle entreprise qui concourrait au développement durable pourrait se réclamer de l'économie sociale. Les critères relatifs à l'utilité sociale, aux publics, au lien social, aux exclusions ou à la cohésion territoriale doivent être maintenus. Il ne faut pas séparer des caractéristiques qui sont complémentaires au regard de l'utilité sociale. Sans cela, les hôtels Ibis du groupe Accor qui militent en faveur du développement durable en proposant à leurs clients de décider si leur linge de toilette doit être remplacé tous les jours pourraient répondre aux critères de l'article 2 !
Tout dépend de la définition du développement durable. La référence aux dimensions économique, sociale, environnementale et participative empêchera les hôtels Ibis de satisfaire les critères de l'article 2.
Je note que « les personnes en situation de fragilité » de l'alinéa 2 ne sont pas mieux définies dans la loi que les « espaces en fragilité » de mon amendement.
Monsieur le rapporteur, notre intention n'est évidemment pas d'inclure les chaînes hôtelières dans le champ de l'article 2. Si le Gouvernement acceptait que je travaille avec vous afin de trouver un compromis pour supprimer la hiérarchie entre objectifs sociaux et solidaires, et objectif de développement durable, je serais prêt à retirer l'amendement.
L'objectif poursuivi par M. Cavard me semble remettre trop fondamentalement en cause la définition de l'utilité sociale retenue par le projet de loi pour que je me prononce positivement. Il a été choisi d'inclure potentiellement l'utilité environnementale dans le champ de l'utilité sociale sans que cela soit fait systématiquement. Le Gouvernement s'en tient à sa position.
Monsieur le rapporteur, l'exemple de l'hôtel que vous citez ne tient pas : selon le premier alinéa de l'article 2, l'objet social des entreprises concernées doit satisfaire à titre principal aux conditions énoncées aux alinéas 2, 3 et 4. Souhaitons-nous qu'une entreprise dont l'objet social à titre principal consiste à concourir au développement durable soit impérativement soumise par ailleurs aux critères des alinéas 2 et 3 pour être considérée comme poursuivant une utilité sociale ?
Pour ma part, je regrette que le mot « environnemental » ne soit pas inscrit dans la loi. La notion diffère de celle de développement durable qui, à mon sens, est devenue fourre-tout. En tout état de cause, il me paraît important que la préoccupation écologique figure en tant que telle dans le projet de loi. Si l'on s'en tient aux notions « d'environnement et d'écologie », il serait compréhensible d'imposer des critères sociaux tels que ceux qui figurent dans les alinéas 2 et 3. Si l'on utilise plutôt la notion de « développement durable » qui englobe déjà l'environnement et le social, la référence à d'autres critères me paraît inutile.
Je maintiens l'amendement dont j'accepte toutefois de supprimer la dernière phrase : « En conséquence, elles démontrent une utilité dans le soutien qu'elles apportent aux espaces en fragilité. »
La Commission rejette l'amendement CE610 ainsi rectifié.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement CE1.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Je suis également favorable à l'amendement CE17, relatif à la solidarité internationale. Il conviendra toutefois de s'assurer de la cohérence rédactionnelle de cette insertion et de celle de l'amendement précédemment adopté.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement
L'amendement CE213 est retiré.
La Commission adopte l'article 2 modifié.
Après l'article 2
La Commission examine l'amendement CE101 de Mme Chantal Guittet.
Le statut d'entreprise de l'ESS ouvrant droit à des contreparties financières, il paraît normal que les structures qui en bénéficient puissent faire l'objet d'un contrôle. Cet amendement étend à l'ensemble des familles de l'ESS le principe de la révision tous les cinq ans, tel qu'il est prévu pour les coopératives, afin de vérifier que les engagements pris sont toujours respectés.
Je crains que le Gouvernement ne considère que ce dispositif ne soit trop lourd ; il me semble toutefois juste que les mutuelles, les associations, les fondations et les sociétés commerciales soient soumises à cette obligation.
Vos craintes, madame Guittet, ne sont pas sans fondement : la volonté du Gouvernement de simplifier la vie des entreprises est bien réelle. De plus, chaque famille ayant ses spécificités, il semble difficile de créer une révision à la fois générale et adaptée. De nombreuses familles statutaires sont déjà soumises à des règles exigeantes de transparence et à des contrôles, notamment de la part des commissaires aux comptes et des organes dirigeants. Ces éléments appartiennent d'ailleurs souvent à l'ADN des acteurs de l'économie sociale et solidaire. Il me semble difficile d'accepter la création d'un régime de révision commun à toutes les entreprises de l'ESS.
Les associations qui constituent collectivement le premier employeur de l'ESS ne sont pas soumises à une procédure de révision. Même si nous adoptions l'amendement, 80 % à 90 % de l'économie sociale et solidaire continuerait donc de n'être assujettie à aucune forme de révision.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie des amendements identiques CE350 de Mme Audrey Linkenheld, et CE383 de M. Joël Giraud.
Il est proposé que le Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire, mentionné à l'article 3 du projet de loi, rédige une déclaration de principe des entreprises de l'économie sociale et solidaire, par exemple sous forme d'une charte, à laquelle les entreprises de l'ESS adhéreraient librement. Cette déclaration serait homologuée par le ministre chargé de l'économie sociale et solidaire, qui prendrait le relais du conseil supérieur si ce dernier faisait défaut pour rédiger ce document.
Ces amendements reprennent le dispositif introduit en commission au Sénat à l'article 2 bis, mais supprimé en séance publique, visant à mettre en place une déclaration de principe des entreprises de l'ESS. À défaut d'une procédure coercitive, l'adhésion volontaire des acteurs donnerait naissance à une sorte de gentleman's agreement et constituerait un engagement fort.
Le Gouvernement réfléchit actuellement avec les acteurs concernés à la meilleure manière de consacrer dans la loi un engagement en matière d'exemplarité sociale. On voit mal comment des acteurs prônant des principes d'exemplarité refuseraient de se les appliquer à eux-mêmes. Je partage la volonté des auteurs des amendements qui souhaitent que le secteur de l'ESS retrouve son rôle d'éclaireur du progrès social. Le guide des bonnes pratiques, qu'ils appellent de leurs voeux, pourrait inclure des principes relatifs au dialogue social, à la territorialisation des emplois, à l'égalité professionnelle ou au respect de la parité.
La discussion en cours sur ce sujet n'étant pas encore totalement achevée, je m'engage à déposer, avant l'examen du projet de loi en séance, un amendement instituant un guide des bonnes pratiques d'exemplarité sociale dont j'estime que, contrairement à la déclaration de principe envisagée, il devrait avoir une portée obligatoire. Il pourrait également donner aux salariés un droit d'information obligatoire à l'occasion de l'assemblée générale des actionnaires ou des sociétaires. Je vous demande en conséquence de bien vouloir patienter d'ici à la séance publique et de retirer vos amendements.
Je me félicite de l'engagement de Mme la secrétaire d'État, mais j'aurais aimé entendre M. le rapporteur, pour avoir l'assurance que la concertation se poursuivra avec les parlementaires comme avec les acteurs de l'ESS. Les débats en séance s'en trouveraient facilités. Quoi qu'il en soit, je retire mon amendement.
Le Gouvernement s'engage à associer les parlementaires à la concertation.
Il faut donner acte à Mme Linkenheld de son insistance sur cet aspect important. L'économie sociale et solidaire ne se résume pas à des questions statutaires : elle implique aussi des comportements, qui seraient plus à leur place dans le « droit mou » – charte ou guide par exemple.
Les amendements CE350 et CE383 sont retirés.
Article 2 bis (nouveau) : Déclaration de principe des entreprises de l'économie sociale et solidaire
La Commission examine les amendements identiques CE103 de Mme Chantal Guittet et CE214 de Mme Michèle Bonneton.
Je retire mon amendement, similaire à celui dont nous avons parlé, et auquel je m'associerai.
Les amendements CE103 et CE214 sont retirés.
La Commission adopte l'article 2 bis sans modification.
Chapitre II
Organisation et promotion de l'économie sociale et solidaire
Section 1
Le conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire
Article 3 : Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire
La Commission adopte l'amendement de précision rédactionnelle CE506 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement CE18 de la commission des affaires étrangères.
L'amendement tend à préciser que le Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire assure un dialogue avec les pouvoirs publics « nationaux et européens ». La commission européenne de ce conseil assume déjà cette mission, mais il me semble important de la graver dans la loi.
La précision me semble d'autant plus utile que l'Union se saisit de plus en plus des sujets d'économie sociale et solidaire. Le Conseil supérieur a vocation, en ce domaine, à porter la voix de la France au niveau européen.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CE507 du rapporteur.
En dépit de ce qu'indique son exposé sommaire, cet amendement ne me semble pas seulement rédactionnel : il aurait un impact sur la nature même du texte. Je vous invite donc à le revoir d'ici à l'examen en séance.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CE23 de la commission des affaires étrangères.
Cet amendement vise à insérer, après la première phrase de l'alinéa 2, les deux phrases suivantes : « Il veille à améliorer l'articulation entre les réglementations et les représentations de l'économie sociale et solidaire à l'échelon national et à l'échelon européen. Il publie tous les trois ans un rapport sur l'évolution de la prise en compte de l'économie sociale et solidaire dans le droit de l'Union européenne et ses politiques. »
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui poursuit des objectifs légitimes.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
L'amendement CE353 de Mme Audrey Linkenheld est retiré.
La Commission passe à l'amendement CE24 de la commission des affaires étrangères.
Il s'agit de compléter l'alinéa 2 par les mots : « , en particulier de tout projet de directive ou de règlement européens la concernant. »
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE508 du rapporteur.
Dans un souci de cohérence, cet amendement regroupe les dispositions de l'article 3 bis, relatives à la promotion de l'économie sociale auprès des jeunes, au sein de l'article 3, consacré au Conseil supérieur de l'ESS.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE509 du rapporteur.
Il s'agit de préciser que le conseil supérieur, organe de réflexion et de prospective, « contribue à la définition tous les trois ans d'une stratégie nationale de développement de l'économie sociale et solidaire ».
Le Gouvernement est attaché à l'idée d'une consultation régulière de ce conseil, qui doit veiller à la qualité du dialogue entre les acteurs et les pouvoirs publics, afin de définir et de mettre en oeuvre une stratégie nationale. Puisque c'est là l'objet même de l'article 3, on pourrait considérer que l'amendement est satisfait ; néanmoins, cette priorité mérite d'être soulignée. Avis favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CE510 du rapporteur.
L'amendement précise que les représentants des différentes entités de l'économie sociale et solidaire au sein du Conseil supérieur seront désignés par le ministère, sur proposition de ces mêmes entités.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE22 de la commission des affaires étrangères.
Je propose de compléter l'alinéa 9 par les mots : « y compris dans sa dimension internationale », ce qui permettrait d'associer au conseil, par exemple, l'Agence française de développement, opérateur de plus en plus important pour la promotion de l'ESS à l'échelle internationale.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement de précision rédactionnelle CE512 du rapporteur.
Elle passe ensuite à l'amendement CE21 de la commission des affaires étrangères.
Il s'agit d'associer des personnalités qualifiées au conseil en complétant l'alinéa 10 par les mots : « , dont certaines choisies au regard de leur expérience de la dimension européenne de l'économie sociale et solidaire. »
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE104 de Mme Chantal Guittet.
Cet amendement tend à préciser que « la désignation des personnes physiques siégeant » au CSESS fait l'objet d'une « concertation avec les organisations choisies par le gouvernement pour représenter l'économie sociale et solidaire ».
La consultation des acteurs sur ces nominations est déjà une réalité, et les mots : « sur proposition » me sembleraient juridiquement plus précis que : « en concertation ». De plus, cette concertation ne peut viser que les représentants issus du secteur, visés aux alinéas 5, 6 et 7 de l'article, et non ceux du Parlement, des autres organismes consultatifs et de l'État, pour lesquels la nomination doit rester discrétionnaire. Sous ces réserves, j'émets un avis favorable.
Cet amendement me semble satisfait par celui que nous avons adopté à l'article 1er sur le même thème.
À ce stade, un retrait me semble la solution la plus sage, quitte à réécrire l'amendement, s'il en est besoin, d'ici à l'examen en séance.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte l'article 3 modifié.
Article 3 bis (nouveau) : Stratégie du Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire
La Commission est saisie d'un amendement, CE515 du rapporteur, tendant à la suppression de l'article.
Les dispositions de cet article ayant été transférées au sein du précédent, il n'a plus d'utilité.
La Commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 3 bis est supprimé et les amendements CE263, CE264, CE31, CE168, CE390 et CE45 n'ont plus d'objet.
Article 3 ter (nouveau) (article 26-41 [nouveau] de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération) : Conseil supérieur de la coopération
La Commission examine un amendement, CE536 du rapporteur, tendant à la suppression de l'article.
Cet amendement vise à déplacer les dispositions relatives au Conseil supérieur de la coopération au titre III.
La Commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 3 ter est supprimé et l'amendement CE321 n'a plus d'objet.
Après l'article 3 ter
La Commission examine les amendements CE644 et CE645 du rapporteur.
Cet amendement porte sur une division et sur un intitulé, introduisant des dispositions qui figureront dans l'amendement suivant, le CE645.
Le projet de loi prévoit la création des chambres régionales de l'économie sociale et solidaire, les CRESS, mais pas de la chambre française de l'économie sociale et solidaire : aux termes de la rédaction actuelle, la coordination nationale n'est assurée que par le conseil national des CRESS, organe de coordination et non de représentation. L'amendement CE645, rédigé en concertation avec les acteurs et le Gouvernement, permettrait une représentation complète des acteurs, à l'échelon régional comme à l'échelon national.
Je salue cette initiative qui tend à rassembler les acteurs au sein d'une chambre nationale. En raison du remaniement, les consultations sur la création de cette chambre et sur le dépôt de ses statuts ne sont pas encore terminées ; cependant, le Gouvernement, attaché à la représentation de toutes les composantes de l'ESS au niveau national, juge opportun d'inscrire dès à présent le principe de cette création dans la loi, même si les missions de la chambre française doivent encore être expertisées. Sous réserve que le rapporteur soit d'accord sur la poursuite de la consultation relative à ces missions, dans l'optique de les préciser lors de l'examen en séance, j'émets un avis favorable à ses deux amendements.
La Commission adopte successivement les amendements CE644 et CE645.
Section 2
Les chambres régionales de l'économie sociale et solidaire
Article 4 (article L. 145-46-1 [nouveau] du code de commerce) : Missions des chambres régionales de l'économie sociale et solidaire
La Commission est saisie de l'amendement CE518 du rapporteur.
Le Gouvernement demande le retrait ou, à défaut, le rejet de cet amendement tendant à substituer aux mots : « regroupent ses entreprises » les mots : « représentent ses composantes ». Depuis plusieurs années, les CRESS contribuent au développement et à la promotion du secteur dans les régions ; reste que la richesse de l'économie sociale et solidaire réside dans la diversité de ses entreprises, dont les CRESS établissent et conservent la liste, les modalités de représentation étant précisées par l'alinéa 3 de l'article.
En région, ce sont plusieurs centaines de milliers d'entreprises qui oeuvrent dans le secteur de l'économie sociale et solidaire : il est matériellement impossible de les faires toutes siéger au sein des CRESS. Mon amendement, sur ce point, relaie le souhait des acteurs. Dans le domaine sportif, par exemple, les clubs pourraient être représentés par des instances telles que les ligues, les fédérations ou les comités. Dans les chambres des métiers et de l'artisanat, les entreprises ne sont-elles pas représentées par des instances professionnelles ?
Toutes les entreprises sont effectivement représentées au sein des chambres consulaires, même si cette représentation est assurée par certaines d'entre elles pour le compte des autres. En l'occurrence, toutes les entreprises de l'ESS doivent être concernées, à charge pour elles de définir, le cas échéant, les modalités de leur représentation.
L'adhésion aux CRESS est libre, et le Gouvernement reste favorable à ce qu'elle soit également directe. Votre commission a rejeté l'idée d'un contrôle du respect des critères définis à l'article 1er, mais il me semble important que nous trouvions un accord sur le principe d'une adhésion volontaire à ces chambres régionales.
Je maintiens mon amendement, car je sais d'expérience que le dispositif actuellement prévu restera inopérant. Comment envisager la représentation des entreprises, dans les secteurs concernés, autrement que par l'Union régionale interfédérale des organismes privés sanitaires et sociaux (URIOPSS), l'Union régionale des associations du tourisme social, les instances représentatives du monde sportif ou les comités régionaux des associations de jeunesse et d'éducation populaire (CRAJEP) ? Ce sont 10 % de la population française qui vivent dans la région Rhône-Alpes : faut-il donc imaginer que 80 000 des 800 000 associations siégeront au sein de la CRESS ? Mon amendement obéit à des considérations pratiques, qui d'ailleurs inspirent les réflexions en cours sur l'organisation des CRESS par regroupements thématiques ou professionnels ; pour qu'une telle organisation soit possible, il faut que la loi la permette.
Je comprends vos arguments, mais la loi, précisément, n'empêche pas les regroupements d'adhérer aux CRESS. En tout état de cause, l'établissement d'une liste recensant tous les acteurs me semble être une garantie pour la richesse et la diversité de l'économie sociale et solidaire.
Le parallèle avec les chambres consulaires ne me semble guère justifié, dans la mesure où le champ de l'ESS englobe également le mouvement associatif. Le terme d'« entreprises », à cet égard, reflète mal la réalité du terrain. Le réalisme me conduit donc à soutenir l'amendement.
Je partage le souci d'efficacité, mais le fonctionnement des CRESS connaît des fortunes variables, si bien que l'amendement risque de ranimer les querelles de chapelles. Peut-être, monsieur le rapporteur, faudrait-il préciser ce que recouvrent les regroupements, notamment afin de trouver un équilibre entre représentation et adhésion individuelle ; faute de quoi l'amendement risquerait d'être inapplicable ici ou là car, aujourd'hui, certains représentants ne font pas l'unanimité parmi les acteurs, qui aimeraient continuer d'adhérer librement.
Mon amendement CE216, qui vient un peu plus loin, irait dans le sens de la simplification, puisqu'il prévoit que les CRESS regroupent les entreprises « ou, le cas échéant, leurs organisations professionnelles de secteur ». Un certain nombre de ces organisations sont d'ores et déjà adhérentes aux CRESS ; or le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, ne prévoit pas ce cas de figure.
Les arguments de Mme Allain vont dans le sens du rapporteur. L'amendement CE518, me semble-t-il, n'empêche pas la libre adhésion des entreprises, alors que le projet de loi, me semble-t-il, prête à confusion sur ce point en disposant que les CRESS « regroupent [l]es entreprises ». L'amendement de Mme Allain présente l'avantage de faire référence à l'une et l'autre de ces deux options.
Comme on l'a rappelé, l'amendement du rapporteur traduit la demande des acteurs de consacrer dans la loi une pratique qui existe déjà.
Je mettrai l'amendement au vote demain matin, après que nous aurons entendu les réponses du Gouvernement et du rapporteur.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mardi 15 avril 2014 à 21 h 30
Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, Mme Ericka Bareigts, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. André Chassaigne, Mme Jeanine Dubié, M. Joël Giraud, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, Mme Annick Le Loch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, Mme Béatrice Santais, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Troallic
Excusés. - Mme Anne Grommerch, M. Philippe Armand Martin, M. Jean-Charles Taugourdeau
Assistaient également à la réunion. - M. Denis Baupin, Mme Fanélie Carrey-Conte, M. Christophe Cavard, Mme Chantal Guittet, M. Régis Juanico, M. Jean-René Marsac, M. Philippe Noguès