La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s’arrêtant à l’amendement no 437 portant article additionnel après l’article 12.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour un rappel au règlement.
Madame la présidente, monsieur le ministre délégué chargé du budget, monsieur le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, j’interviens sur le fondement de l’article 58, alinéa 2, de notre règlement.
Admettons, en préambule, que la discussion générale d’un projet de loi de finances n’est pas l’exercice le plus passionnant. Nous en conviendrons : il s’agit d’un exercice convenu. Mais au-delà de cette considération, j’ai découvert ce soir le blog de notre rapporteur général,…
…qui traite du déroulement de la séance hier soir dans l’hémicycle. J’ai été atterrée de découvrir un article intitulé « À l’Assemblée, la technique de Lourdes : "faire des apparitions…" ».
Cet article met directement en cause l’une de nos collègues, Mme Valérie Pécresse,…
…qui serait venue « faire une apparition ». C’est inadmissible et intolérable, sur la forme et sur le fond.
Sur la forme, avant de publier un texte, on le relit – j’ai trouvé quelques fautes d’orthographe…
En même temps, cela permet de réfléchir à ce que l’on va écrire. Sur la forme, ce machisme est aujourd’hui inacceptable. Quand l’un de nos collègues a récemment imité des cris de pigeon dans l’hémicycle, nous avons assisté à une levée de boucliers de toutes les femmes de la majorité. Aujourd’hui, je suis scandalisée que l’on puisse écrire de tels propos sur une collègue.
J’en viens au fond, monsieur le rapporteur général. Est-ce le fait que Mme Pécresse ait dit que le déficit dérapait de 10 milliards d’euros qui vous gênait ? Est-ce le fait qu’elle ait parlé du dérapage des dépenses de l’AME ? Mme Pécresse a également évoqué les dépenses en exécution, qui seraient supérieures de 2,5 milliards d’euros en 2013 par rapport à 2012 : est-ce cela qui vous a gêné et qui expliquerait votre réaction ? Quoi qu’il en soit, on ne saurait en aucun cas considérer comme acceptables de tels propos machistes concernant une collègue qui est intervenue dans le cadre de la discussion générale. Je souhaite vraiment que vous puissiez vous excuser, monsieur le rapporteur général !
La parole est à M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Je n’ai pas à répondre ici : chacun a le droit de s’exprimer à l’extérieur de cet hémicycle sur le déroulement de nos travaux et le comportement de chacune et chacun. Je n’ai aucune excuse à présenter : il n’y a absolument rien de machiste dans ce que j’ai pu écrire, relire, et que j’assume.
Nous en revenons à l’examen des articles. Je souhaite que chacun puisse s’exprimer et se respecter dans notre discussion.
Je suis saisie d’un amendement no 437 , portant article additionnel après l’article 12 et faisant l’objet d’un sous-amendement no 467 .
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement.
Cet amendement prévoit de maintenir le bénéfice du taux de TVA de 7 % pour les travaux dans les logements, autres que de rénovation énergétique, qui auraient fait l’objet d’un acompte de 30 % versé avant le 1er janvier 2014.
Nous avons l’habitude de prendre une telle disposition lorsque s’effectue un changement de taux de TVA, pour des chantiers pouvant se dérouler sur une certaine durée. Si la commande est passée et qu’un acompte d’au moins 30 % a été versé, nous proposons de maintenir le taux initial. Cette mesure fait partie des engagements pris par le Gouvernement envers la profession.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement et pour soutenir le sous-amendement no 467 .
L’amendement du rapporteur général aménage les modalités d’entrée en vigueur du taux de TVA pour les travaux de rénovation des logements, à l’instar des dispositions prises fin 2011 dans ce secteur lors du passage au taux de 7 %. Il propose ainsi de maintenir le taux de TVA de 7 % pour les travaux de rénovation planifiés au dernier semestre 2013 lorsqu’ils remplissent plusieurs conditions cumulatives, c’est-à-dire lorsqu’ils ont fait l’objet d’un devis accepté par les parties et d’un acompte d’au moins 30 % avant le 1er janvier 2014. Cet acompte de 30 % représente le montant habituellement demandé dans le secteur du bâtiment. Par ailleurs, il faudra que les travaux soient achevés avant le 1er mars 2014, l’achèvement se matérialisant par le paiement du solde à cette date : c’est l’objet du présent sous-amendement. Une telle disposition avait également été adoptée en 2011. Le coût de cette mesure est de 135 millions d’euros.
Oui, madame la présidente, je lève le gage.
Le sous-amendement no 467 , accepté par la commission, est adopté.
L’amendement no 437 , sous-amendé, modifié par la suppression du gage, est adopté.
J’avais déjà présenté cet amendement lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2014, mais je l’avais alors retiré, à la demande du ministre et suite à ses observations très pertinentes.
Cet amendement vise à étendre le taux réduit de TVA applicable aux entrées en salle de cinéma aux salles de cinéma non commerciales et aux festivals de cinéma. En effet, ce que nous avons voté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 et qui s’appliquera au 1er janvier prochain ne concerne que les salles de cinéma commerciales. D’ailleurs, dès que la disposition soumettant les salles de cinéma commerciales au taux réduit de TVA a été adoptée, la Fédération nationale des cinémas français a annoncé que le montant des entrées en salle des enfants de moins de 14 ans serait désormais de 4 euros. Nous voyons donc l’effet de la mesure que nous avons adoptée en termes de pouvoir d’achat !
J’ai entendu vos observations, monsieur le ministre : nous avons donc exclu les cinémathèques du champ de notre amendement, afin que les entrées pour les expositions ou les musées que contiennent ces cinémathèques restent soumises au taux de TVA habituel. De ce fait, je pense que nous nous situons maintenant dans un cadre respectant la réglementation communautaire.
Je veux apporter plusieurs éléments à notre réflexion sur cet amendement.
Sur la forme, tout d’abord, cet amendement aurait davantage sa place dans le projet de loi de finances pour 2014,…
…puisque c’est ce dernier qui contient la mesure de changement de taux de TVA, notamment pour les entrées de cinéma.
Sur le fond, s’il était besoin de légiférer, je suis prêt à vous suivre, monsieur Bloche, sur le prix des tickets d’entrée dans les ciné-clubs. En effet, il serait curieux qu’un taux de TVA réduit s’applique au cinéma commercial et qu’un taux de 10 % s’applique aux ciné-clubs, dont nous connaissons la valeur. Cela ne doit pas représenter une dépense fiscale considérable.
Par contre, votre amendement porte sur l’ensemble des cessions de droits, et non sur le prix du billet. Tel qu’il est rédigé, il présente donc quelques risques de dérapage.
Monsieur le ministre, en dépit de mes remarques sur la forme de cet amendement, la question du taux de TVA sur les billets d’entrée dans les ciné-clubs ne peut-elle pas être réglée par une instruction fiscale ? Les propos du ministre dans notre hémicycle ne pourraient-ils pas régler ce problème ? À défaut, pourrions-nous traiter cette question dans un amendement qui aurait davantage sa place dans le PLF pour 2014 ? Tel est, en tout cas, le point de vue de votre rapporteur général, qui n’est pas très favorable à cet amendement en l’état.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président de la commission des affaires culturelles, je souhaite appuyer notre rapporteur général. Nous avons eu cette discussion en première partie. Sur la forme, une telle disposition relève du projet de loi de finances initiale. Sur le fond, je m’en souviens très bien, nous étions tous d’accord pour étendre le taux réduit de TVA aux billets de cinéma de salles d’art et d’essai, dès lors que nous l’appliquions aux salles commerciales. Mais l’application d’un taux réduit sur des cessions de films me paraît relever d’une autre approche.
Il faudrait donc, monsieur le ministre, reprendre cette discussion dans le cadre de la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2014 : ce serait beaucoup plus conforme à ce que nous avions décidé il y a un mois.
Je partage l’avis du rapporteur général et du président de la commission des finances. Nous avons mis en place des taux réduits de TVA pour un très grand nombre d’activités artistiques ou culturelles, ou d’objets culturels qui méritent d’être promus, accompagnés ou diffusés. Je pense aux livres, aux places de cinéma.
Vous proposez d’aller au-delà. Mon approche sera plus restrictive encore que celles du rapporteur général et du président de la commission, même si je sais que cette approche sera de nature à vous décevoir.
Nous avons engagé un certain nombre de dépenses fiscales pour accompagner des secteurs qui font de la croissance, du développement, de l’emploi à des hauteurs où nous n’avons plus de marges pour prendre d’autres activités et d’autres secteurs sur le taux réduit. Pour des raisons strictement budgétaires qui tiennent à l’importance des dépenses fiscales que nous avons déjà engagées, il n’est pas possible de vous donner satisfaction.
En outre, comme l’ont dit le président de la commission et le rapporteur général, ces sujets ont davantage vocation à être traités dans le cadre du projet de loi de finances. Je vous propose donc que nous ayons ce débat à un autre moment de nos discussions budgétaires.
À partir du moment où nous allons nous donner un troisième rendez-vous, et prenant en compte les observations qui ont été formulées, notamment celles du rapporteur général, je vais à nouveau retirer cet amendement. Mais je vous donne rendez-vous très bientôt, naturellement.
L’amendement no 65 est retiré.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 332 .
Il s’agit de la question des droits d’entrée – nous en avons beaucoup parlé – pour la visite des parcs zoologiques et botaniques, des musées, monuments, grottes et sites ainsi que des expositions culturelles, dans la lignée de ce qui avait été envisagé notamment pour le cinéma.
…comme beaucoup de choses. Cela représente 12 millions d’euros pour les musées et monuments, 45 millions d’euros pour les parcs à thèmes. Je ne dispose pas du chiffrage pour les zoos, mais l’impact est loin d’être négligeable.
Je ne sais pas si l’argumentation est suffisante, mais c’en est une, qui s’impose à nous étant donné la situation budgétaire. Je vous invite, mes chers collègues, comme l’a fait notre commission, à rejeter cet amendement.
L’amendement no 332 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Il s’agit d’un amendement portant sur une question importante, connue aujourd’hui sous le nom d’équitaxe. Y avait-il un problème non définitivement résolu ? La réponse est oui. Le Gouvernement était-il obligé de le résoudre de la manière dont il l’a résolu ? La réponse est non. Non, parce que, monsieur le ministre, vous vous étiez engagé à ne pas modifier le taux de TVA avant le 1er janvier 2015 et vous avez accéléré la manoeuvre, nuitamment.
Non, parce que vous n’étiez pas obligé de prendre une mesure aussi large et absolue concernant l’équitation. Quand aujourd’hui, vous réagissez au soulèvement, assurément plus ample que vous ne l’aviez imaginé, en indiquant que vous êtes tout à fait disposé à aller regarder si d’aventure, un certain nombre d’aménagements seraient possibles, c’est donc qu’ils le seraient. En réalité, vous n’étiez pas obligé de choisir, de manière aussi absolue, massive et brutale, le passage du taux de TVA de 7 à 20 %.
Vous proposez des subventions, un fonds pour l’équitation. Vous savez très bien que ce n’est pas à la hauteur du problème et que cela ne résout pas le problème de la situation des centres équestres ni celui de la pratique de l’équitation dans notre pays. Ce sport est largement pratiqué, et il l’est par des Français de toutes conditions.
Ce que nous proposons dans notre amendement est modeste. Je ne dis pas que cela résout tout, mais c’est sans doute au moins une avancée, que vous pourriez accepter. J’ai compris que vous cherchiez une solution, alors saisissez celle-ci et faites en sorte que les prestations de services correspondant au droit d’utilisation des installations équestres utilisées à des fins d’activités physiques et sportives, elles, soient soumises au taux réduit.
Il y a là une solution. Je le redis, nous sommes conscients qu’il y avait un sujet dans l’air, mais vous n’étiez pas obligés de vous précipiter, ni de tout céder. Puisque vous avez, ces derniers jours, monsieur le ministre, indiqué que vous étiez prêt à regarder une solution,…
…c’est qu’il ne vous paraît pas impossible de chercher une autre voie que celle que vous avez imposée nuitamment l’autre jour dans le vote du projet de loi de finances.
Ce que nous vous proposons aujourd’hui pourrait être reçu par le Gouvernement et apporter une réponse partielle, mais utile à ce qui est aujourd’hui le problème à l’ordre du jour. Une réponse favorable de votre part, monsieur le ministre, vous honorerait et honorerait l’équitation et le sport dans notre pays.
Il y a déjà un certain temps, venait toujours dans le débat économique le lancinant problème de la balance des paiements. Eh bien, nous avons inventé un nouveau sujet lancinant qui est celui de la TVA sur les activités hippiques et équestres. Certes, la France a perdu devant la Cour européenne de justice.
Cela étant, il est vrai que l’arrêt n’est pas tout à fait aussi clair qu’il pourrait l’être, même pour des juristes avertis. Ce qui est certain, c’est qu’aujourd’hui, nous sommes face à un problème économique réel. Tout le monde sait quelles seraient les conséquences de ce passage brutal, comme il vient d’être rappelé, du taux de TVA de 7 à 20 % – jamais notre pays n’a connu une aussi forte augmentation. De très nombreux clubs équestres fermeraient, parce qu’ils sont sur la corde raide – ce n’est pas là que les gens s’enrichissent –, et au moins 100 000 chevaux risqueraient d’être envoyés à l’abattoir. Une autre conséquence serait la perte de 5 000 à 6 000 emplois. La commission devrait donc faire preuve d’un peu de réalisme.
Aujourd’hui, avec cet amendement cosigné notamment par Marc Le Fur, Patrice Martin-Lalande et bien d’autres, nous essayons de sortir de cette situation en préservant l’application du taux réduit de TVA aux prestations de services correspondant exclusivement au droit d’utilisation des installations équestres utilisées à des fins d’activités physiques et sportives. Certes, ce n’est pas simple. Cela demandera de la part des services fiscaux et des clubs une comptabilité analytique assez précise. Il n’en demeure pas moins que cela devrait permettre à un secteur qui est vital pour notre économie de subsister.
Cela ne change rien au fait que le Gouvernement doit reprendre les négociations avec la Commission et trouver un moratoire pour éviter une catastrophe annoncée.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 325 .
C’est une maladie totalement incurable chez nous, mon cher collègue. Il n’y a donc pas besoin de thérapie.
Monsieur le ministre, les responsables des centres équestres nous disent qu’il y a un certain nombre de marges de manoeuvre pour maintenir au taux intermédiaire les entraînements pourvu que les clients utilisent leurs propres chevaux. Il semblerait là que l’on puisse maintenir le taux intermédiaire. De même, pour les pensions des chevaux qui sont confiés aux centres équestres…
On pourrait en discuter.
Pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, quelles sont les marges de manoeuvre dont on peut disposer. Il y aura une renégociation en 2014 concernant les taux applicables au 1er janvier 2015. Pensez-vous que l’on pourrait avoir un système intermédiaire en 2014 et gagner en 2015 ? Il ne s’agit pas de sommes importantes, puisqu’elles sont de l’ordre de 20 ou 25 millions d’euros. Mais il est sûr que si l’on ne fait rien, cela va tuer une partie du secteur.
Et puis, ce que l’on ne dit pas assez, monsieur le ministre, c’est que l’application du taux de 20 % aurait une autre incidence, à savoir l’explosion du travail au noir, qui prospérerait.
Quelles sont les marges de manoeuvre ? Comment le petit fonds qui a été annoncé sera-t-il réparti ? Et qu’en est-il de la petite mesure qui va durer un an pour les conventions signées avant le 31 décembre 2013 qui garderaient le taux intermédiaire jusqu’à la fin de ladite prestation ?
Beaucoup de choses ont été dites. Le sujet n’est pas simplement la TVA. Une filière économique entière est en danger, une filière écodurable au demeurant. Dans ma ville, Saint-Maur-des-Fossés, j’ai un centre hippique municipal, 6 000 enfants y passent chaque année pour apprendre l’équitation et pour découvrir la forêt. Ce sont des éléments qu’il faut en prendre en compte.
En effet. C’est une filière énorme qui risque de tomber : 7 000 centres équestres, 18 000 emplois, 2,3 millions de Français qui pratiquent l’équitation. Bref, le sujet est très important. Y avait-il urgence à agir immédiatement ? Ne pouvait-on pas attendre l’extinction de l’intégralité des dispositifs juridiques ? Je crois qu’il y avait matière à trouver une autre voie. Notre amendement propose de ne pas aller dans la voie de l’augmentation du taux de TVA, que vous avez choisie.
L’affaire est en effet complexe et mérite que l’on reprenne la chronologie. La décision d’appliquer un taux réduit de TVA est ancienne. Dès 2006, à la suite de la directive TVA, la Commission a saisi la Cour de justice européenne et la France a été condamnée dans un arrêt…
Permettez-moi de le citer : « En appliquant des taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée aux opérations relatives aux équidés et, notamment, aux chevaux, lorsque ceux-ci ne sont normalement pas destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent […] », etc. Qu’avons-nous fait depuis ? En tout cas, il n’y a pas eu de décision nocturne, monsieur Mariton.
Il y a un an, dans l’article 63 de la loi de finances rectificative pour 2012, nous avons décidé que l’article qui réduit le taux de TVA serait abrogé pour les opérations « dont le fait générateur intervient à une date fixée par décret et au plus tard le 31 décembre 2014 ».
Je vais vous répondre, si vous me permettez de m’exprimer un peu longuement sur ce sujet délicat.
Pourquoi par décret ? Je me souviens parfaitement, et vous aussi puisque vous êtes assidus à nos travaux, que le ministre nous avait à l’époque avertis qu’une procédure de manquement avait déjà été prononcée.
Pour ne pas risquer d’amende pour manquement sur manquement, il nous demandait l’autorisation de procéder par décret en fixant une date butoir, et si la procédure intervenait plus tôt, il prendrait le décret pour ne pas encourir d’amende.
Pourquoi cela s’est passé ainsi ? Parce que le 25 octobre, la Commission a annoncé qu’elle se prononcerait sur la procédure de manquement sur manquement de façon imminente, le collège des commissaires européens pouvant décider d’une saisine de la Cour de justice le 20 novembre. C’est cela qui a conduit le Gouvernement à prendre un décret : il a considéré qu’il avait tenu aussi longtemps que possible et qu’aller au-delà ferait courir des risques à la France. Je vous invite, mes chers collègues, à relire les débats de l’année dernière dont je me souviens parfaitement.
Voilà où nous en sommes. Que peut-on faire ? Si nous adoptions ces amendements, nous nous mettrions en infraction de façon à peu près certaine,…
…du moins probable. Je sais, il y a le point 13 et le point 14. Nous avons tous examiné la question sous cet angle. J’ai reçu aussi les représentants de la filière, comme la plupart d’entre nous ici.
Y a-t-il une solution intermédiaire possible ? Nous nous sommes concertés et je laisserai le ministre vous exposer certains éléments de solutions car il y en a, je pense.
En l’état, je suis défavorable à ces amendements – dont les différences tiennent à l’utilisation ou non de l’adverbe « exclusivement » – car ils risquent de nous mettre en infraction avec le droit européen et de nous faire subir des pénalités. Je pense que l’on peut rechercher une autre solution.
Madame la présidente, je trouve dommage que sur une question comme celle-ci et compte tenu du résultat que nous voulons obtenir – l’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux activités équestres –, nous soyons autant dans l’imprécision et dans la politique. Je le dis franchement et je vais m’expliquer avec précision, textes en main.
Notre pays a décidé d’appliquer un taux réduit de TVA sur les centres et les activités équestres en 2004. Cette disposition n’était pas conforme au droit communautaire et entre 2004 et 2012, la Commission européenne a entrepris plusieurs démarches pour nous rappeler à notre devoir. En mars 2012, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un arrêt qui a donné lieu en novembre 2012 à une mise en demeure de la Commission, demandant à la France de se conformer rigoureusement à ce jugement.
Vous indiquez dans l’argumentation de vos amendements que l’arrêt de la CJUE n’incluait pas les activités équestres.
Je vais vous lire le texte de la lettre de mise en demeure : « La Commission ajoute qu’elle ne conteste pas dans la présente mise en demeure la possibilité pour la France d’appliquer un taux réduit de TVA à des opérations non visées par la procédure devant la Cour sur la base, le cas échéant, du point 14 de l’annexe IIII ». Un 5° précise : « Pour autant, bien entendu, qu’il s’agisse, dans cette dernière hypothèse, effectivement de droits d’utilisation d’installations sportives, notions qui n’englobent certainement pas les activités d’enseignement, d’animation et d’encadrement de l’équitation. »
Autrement dit, il est possible d’appliquer le taux réduit de TVA dans une hypothèse extrêmement précise, qui ne recouvre pas, loin s’en faut, la totalité du sujet dont nous traitons : la possibilité pour un cavalier ayant son propre cheval de se rendre dans un centre équestre et de l’utiliser en tant qu’équipement sportif.
Monsieur Mariton, je sais que vous êtes très savant sur ce sujet et sur d’autres mais ce n’est pas inutilement restrictif. D’une part, il y a le texte de la lettre de mise en demeure. D’autre part – et je tiens à le préciser à la représentation nationale –, le Gouvernement mène un combat pour le taux réduit de TVA à 5,5 %.
Pas du tout, et je vais vous dire pourquoi. Ce combat que mène le Gouvernement doit trouver son aboutissement au cours de l’année 2015. La directive TVA va, en effet, être ouverte à la négociation à la fin de l’année 2014 et dans l’agenda que nous avons établi figure le taux de TVA à 5,5 % pour les centres équestres : nous sommes déterminés à obtenir son application au terme de cette renégociation. À cette fin, nous avons pris un ensemble de contacts avec la Commission pour faire préciser par les commissaires et les directions compétentes quelles dispositions nous pouvions, selon eux, prendre de façon transitoire.
La direction TAXUD nous a indiqué très précisément, ces dernières heures, que la seule application possible du taux réduit de TVA aux centres équestres concernait leur utilisation en tant qu’infrastructure sportive par des cavaliers ayant leur propre monture.
Vous dites non, mais c’est la Commission qui nous a donné cette précision. Je vous fais une proposition, monsieur Mariton. Demain, j’aurai un contact avec le chef de cabinet de M. Barroso parce que j’ai l’intention d’inviter les représentants de la filière équestre à se rendre à Bruxelles avec des représentants de notre administration et de nos cabinets pour rencontrer les chefs de cabinet de M. Barroso et de M. Semeta de manière que les choses soient dites clairement.
Nous ne sommes pas dans la politique, nous ne sommes pas dans la volonté de nous faire bien voir en l’absence de toute rigueur juridique, nous sommes dans la transparence. Nous voulons obtenir le taux réduit de TVA à 5,5 % l’an prochain et nous pensons que la meilleure manière d’y parvenir est de créer les conditions d’une négociation avec la Commission qui aboutisse. À l’inverse, la meilleure manière de ne pas la faire aboutir et de bloquer toutes les négociations à venir, c’est de prendre aujourd’hui des initiatives qui conduiraient la Commission à prendre acte du fait que nous ne nous mettons pas en conformité avec les règles de l’Union.
Il y a deux hypothèses.
Première hypothèse : à l’occasion de la réunion qui aura lieu la semaine prochaine, il vous est donné raison par la Commission européenne. Auquel cas, je prends l’engagement devant la représentation nationale d’introduire dans le projet de loi de finances qui viendra en deuxième lecture un amendement gouvernemental qui tiendrait compte de l’accord qui nous serait éventuellement donné.
N’oubliez pas que tous les jours, nous travaillons sur ce sujet, contrairement à ce que vous semblez croire. Tous les jours, nous nous battons avec la volonté d’aboutir et comme nous voulons aboutir, nous nous interdisons de faire n’importe quoi. Par conséquent, je fais des propositions extrêmement concrètes à l’Assemblée nationale, qui me paraissent responsables.
Si la Commission vous donne raison, je prendrai, je le répète, mes responsabilités et présenterai devant l’Assemblée nationale un amendement qui entérinera ce qu’a dit la Commission et qui donnera satisfaction aux centres équestres.
Deuxième hypothèse : la Commission dit non, s’en tenant à la position qu’elle défend depuis des mois et dont nous faisons part avec la plus scrupuleuse honnêteté à nos interlocuteurs parce que nous leur devons cette transparence. Alors, les choses seront dites et nous prendrons, j’en suis convaincu, ensemble nos responsabilités.
J’aimerais ensuite préciser que si nous avons pris un décret visant à aligner le taux de TVA applicable aux centres équestres sur un taux conforme à la réglementation européenne, c’est parce que nous avons reçu une injonction de la Commission européenne il y a de cela trois semaines.
Monsieur Mariton, nous avons choisi la date selon des critères que je vais vous préciser. La Commission européenne nous a indiqué que le collège des commissaires avait prévu d’examiner, dans sa réunion du 22 novembre, la question de l’infraction de la France. Elle a précisé que si nous ne nous mettions pas en conformité avec la réglementation européenne avant cette réunion, des amendes pouvant représenter plusieurs dizaines de millions seraient infligées à la France.
Nous avons alors décidé, sur injonction de la Commission, de prendre un arrêté nous mettant en conformité avec le droit de l’Union.
Je veux d’ailleurs vous rappeler, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, que l’an dernier, 3,7 milliards d’euros ont été payés par les contribuables français au budget de l’Union au titre du contentieux européen que vous nous avez laissé : 3,7 milliards d’euros !
Notre gouvernement a une position très simple.
Premièrement, nous obtiendrons le taux réduit à 5,5 % dans le cadre de la renégociation de la directive TVA parce que nous avons une stratégie, à mon avis beaucoup plus efficace que celle que vous proposez, qui est susceptible de nous permettre d’obtenir satisfaction.
Deuxièmement, comme nous avons la volonté d’aboutir sur ce sujet-là, nous avons décidé de mener un combat après avoir été obligés de nous mettre en conformité à la suite d’une lettre de mise en demeure en novembre 2012 et de la condamnation dont nous avons fait l’objet en mars 2012.
Ce combat, nous avons décidé de le mener avec les acteurs de la filière équestre. La semaine prochaine, ceux-ci viendront avec nous à Bruxelles et s’entendront dire par la Commission quel est le droit.
Quand je pense qu’avec Laurent Fabius vous avez voté « non » au traité constitutionnel !
Si nous obtenons satisfaction auprès de la Commission, le Gouvernement déposera un amendement au projet de loi de finances pour 2014 qui permettra de faire les choses comme elles doivent l’être.
Nous, nous sommes dans la volonté d’aboutir, nous ne sommes pas dans la politique, nous ne sommes pas dans la manipulation, nous ne sommes pas dans le clientélisme.
Nous voulons que les centres équestres obtiennent satisfaction. Pour cette raison, nous mettons en oeuvre la stratégie la plus opportune.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le ministre, pardonnez-moi, mais je vois une petite contradiction dans votre discours. Le texte de la mise en demeure que vous venez de nous lire indique, me semble-t-il, expressément que le taux réduit peut être appliqué aux centres équestres utilisés à des fins d’activités physiques et sportives puisqu’à l’exception des centres équestres utilisés à ces fins, le taux de TVA doit passer à 20 %. Notre amendement peut donc être adopté aujourd’hui, car il est conforme à la lettre de la Commission et au point 14 de la directive TVA. Cela ne vous engage à rien.
En revanche, il y a un autre débat. Reste à négocier avec Bruxelles une question qui est, je le reconnais, très difficile – et je suis très satisfaite que vous meniez la négociation avec les acteurs de la filière équestre : que recouvre l’utilisation des installations équestres à des fins d’activités physiques et sportives ? Il faudra déterminer si l’utilisation à laquelle le taux réduit sera applicable implique d’avoir recours à un cheval appartenant au cavalier ou à un cheval prêté par un centre équestre. Cette interprétation sera nécessaire à la rédaction de vos instructions fiscales, et vous devez la négocier avec Bruxelles.
À cet égard, il ne faut pas oublier que la France a un système très particulier : la plupart des cavaliers, notamment dans les écoles, ne sont pas propriétaires de leur cheval alors que dans les pays voisins, c’est l’inverse. La pratique de l’équitation en France est sans doute un peu plus populaire qu’ailleurs, comme M. Martin-Lalande me le disait tout à l’heure. La majorité des pratiquants sont des enfants qui viennent s’entraîner dans des centres sans être propriétaires de leur cheval. Cela montre bien que l’équitation est un sport beaucoup plus démocratique dans notre pays que dans la plupart des pays européens.
La question de savoir si l’installation sportive renvoie au statut du cheval ou simplement à la structure mérite débat. Mais, voter cet amendement nous mettra en position de force pour négocier à Bruxelles. Son adoption marquera la volonté de la représentation nationale de faire entendre une voix qui est aussi liée à l’identité française du sport équestre.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Madame la députée, je comprends votre raisonnement mais permettez-moi de vous dire qu’il est faux. Je vais vous dire pourquoi. Contrairement à ce que vous avez indiqué, la Commission européenne est extrêmement précise dans sa lettre de mise en demeure de novembre 2012. Je la cite à nouveau : « Pour autant, bien entendu, qu’il s’agisse, dans cette dernière hypothèse, effectivement de droits d’utilisation d’installations sportives, notions qui n’englobent certainement pas les activités d’enseignement, d’animation et d’encadrement de l’équitation. »
Ce n’est pas ce que je dis, c’est ce qu’a précisé la Commission dans sa mise en demeure.
Ce qu’a dit la Commission dans sa mise en demeure a été constamment précisé dans le cadre de la négociation que nous menons. Vous nous dites, en effet, que nous avons capitulé. Nous n’avons capitulé sur rien du tout.
Je vous remercie de laisser M. le ministre s’exprimer, vous répondrez après !
Votre amendement nous enverra dans le mur.
Auriez-vous l’amabilité de me laisser aller au bout de ma démonstration ?
Seul M. le ministre a la parole ! Vous répondrez ensuite, mes chers collègues !
Si votre objectif est d’aboutir sur ce sujet, commençons par nous écouter pour comprendre nos arguments et pour avancer ensemble. La Commission a très précisément dit, dans l’alinéa que je viens de vous lire, que ne peuvent bénéficier du taux réduit de TVA que les seuls cavaliers se rendant dans les centres équestres avec leur propre cheval.
C’est exactement ce que dit la Commission !
Madame Pécresse et monsieur Mariton, je vous explique ce que nous faisons. Vous êtes soucieux d’aboutir, donc écoutez-moi lorsque je vous explique la façon dont procède le Gouvernement pour y parvenir. Si cela ne vous intéresse pas, je me rassois et cela ne me posera pas de problème.
Pour aboutir, nous avons très précisément demandé à la Commission, donc au commissaire Semeta et aux directions de la Commission européenne en charge de ce dossier quelle était leur interprétation de cet alinéa. Au cours des dernières semaines, elles nous ont constamment indiqué que ne pouvaient bénéficier du taux réduit de TVA que les activités que je viens d’indiquer. Ce sujet suscite une interrogation. Vous dites, comme le monde équestre, que telle n’est pas votre interprétation. Comme je souhaite que la plus grande transparence prévale en la matière, j’ai fait des propositions précises.
Les trois ministres concernés, à savoir Mme Fourneyron, M. Le Foll et moi-même, ont signé et adressé un courrier au commissaire Semeta, que je vous transmettrai par souci de transparence, courrier dans lequel ils ont précisé leurs demandes qui correspondent très exactement, madame la députée Pécresse, aux questions que vous avez posées. Par ailleurs, comme je pense qu’il est fondamental que le monde équestre comprenne que, premièrement, nous les soutenons, que, deuxièmement, nous voulons aboutir, et que, troisièmement, nous sommes rigoureux et transparents, j’ai proposé cette rencontre à la Commission, qui vient d’en accepter le principe.
Dès que la date aura été arrêtée, je proposerai aux centres équestres de se rendre sur place avec les représentants de notre administration et de nos cabinets pour accomplir ce travail. Envisageons ce problème avec pragmatisme : il y a deux hypothèses.
Première hypothèse, la Commission et ses directions compétentes considèrent qu’il est tout à fait possible de fixer un taux intermédiaire de TVA sur les activités équestres dans l’attente de la renégociation de la Commission qui permettra de disposer d’une nouvelle directive en 2015. Dans ce cas, mesdames, messieurs les députés, je prends l’engagement devant vous de présenter un amendement dans le projet de loi de finances pour 2014, qui entérinera le résultat de nos discussions et négociations en cours avec la Commission.
Seconde hypothèse, si nous ne pouvons pas obtenir cela de la Commission, et alors qu’elle nous aura dit le droit, nous ne prendrons pas de décision qui compliquerait la future négociation. Nous appliquerons, dans ce cas, le taux de TVA à tous les contrats en cours jusqu’à la fin de l’année 2014 et nous compenserons par le fonds que nous proposons de mettre en place l’effet de la diminution de la TVA pour les centres équestres. Nous profiterons de l’année 2014, parce que nous aurons fait preuve de pragmatisme et que nous aurons dialogué avec la Commission, pour obtenir d’elle que, dans le cadre de la nouvelle directive TVA, soit mis définitivement en place pour les centres équestres le taux réduit de TVA à 5,5 %. Quand j’entends parler d’« équitaxe », de décision du Gouvernement, je réponds que tout cela est faux ! Il existe une réglementation européenne. Nous menons un combat. Nous le menons de façon pragmatique, de façon honnête, de façon résolue, et sans mentir à nos interlocuteurs, parce que nous respectons leurs activités et le secteur qu’ils représentent.
Je peux vous dire ici qu’il serait plutôt de notre intérêt, si l’objectif est celui que vous indiquez, d’attendre que se terminent ces négociations que nous menons. Nous allons nous retrouver d’ici quinze jours pour discuter du projet de loi de finances pour 2014. Nous agirons alors ensemble en toute transparence. Si vous voulez nous donner de la force dans cette négociation…
…– parce que ce n’est pas vous qui négociez, monsieur Mariton, c’est bien nous qui négocions –, comprenez que cette démarche implique que nous nous exprimions ensemble et soutenez le Gouvernement dans sa démarche.
Monsieur le ministre, je voudrais vous lire votre réponse, parue au Journal officiel du 23 octobre 2012, à la question que je vous avais posée sur ce sujet : « Dans sa décision du 8 mars 2012, la Cour a jugé qu’en appliquant le taux réduit de TVA aux opérations relatives aux chevaux non destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions de la directive communautaire de 2006 en matière de TVA.
« Tirant les conséquences de cette décision, le taux réduit de la TVA sera supprimé à compter du 1er janvier 2013 pour les gains de course et la vente de chevaux, à l’exception de ceux destinés à la boucherie ou encore utilisés dans la production agricole (labour, débardage…). Toutefois, une disposition spécifique a été introduite dans le code général des impôts depuis le 1er janvier 2012, par transposition de la faculté ouverte par la directive communautaire de TVA de 2006, de façon à continuer d’appliquer le taux réduit de la TVA à des prestations correspondant au droit d’utilisation des animaux à des fins d’activités physiques et sportives.
« Il n’est pas envisagé… », c’est vous qui me l’écrivez, monsieur le ministre, « …de supprimer cette disposition qui permet d’appliquer le taux réduit notamment aux activités des centres équestres, la Cour de justice de l’Union européenne ne s’étant pas prononcée sur ce dispositif. » C’est ce que je ne cesse de vous dire depuis le début de la soirée ! La Cour ne s’est pas prononcée. Il ne peut donc pas y avoir de procédure de manquement sur manquement, et votre précipitation est injustifiée.
Dans votre réponse, monsieur le ministre, vous n’avez tout d’abord pas, à mon sens, prouvé la justification juridique de votre décision. S’agissant de l’arrêt de la Cour de justice, nous l’avons bien compris. Mais ce que vous mettez en avant, c’est plus une interprétation de la Commission.
Lorsque vous nous expliquez que voter cet amendement reviendrait à nous tirer une balle dans le pied ou, pour reprendre votre expression, à nous envoyer dans le mur, permettez-moi d’être en désaccord avec vous. Je m’adresse à quelqu’un qui, si je me souviens bien, a, par le passé, voté non à un certain traité.
Je vais vous le dire, cher collègue ! Nous discutons avec Bruxelles. Il me semble que si le Parlement français adoptait cet amendement, montrant ainsi sa volonté pugnace d’arracher à la Commission une interprétation permettant de sauver notre filière équestre et notre tradition équestre, cela vous aiderait dans la négociation. Le Parlement français manifesterait ainsi sa volonté souveraine d’obtenir gain de cause, en affirmant que s’il faut, bien évidemment, être respectueux du droit européen, on n’est pas pour autant obligé de se ranger à ce qui est une interprétation de la Commission.
Dans le débat que vous allez avoir, vous devrez aussi manifester une volonté et une politique. Il faut faire de la politique avec un grand P. Envoyons un message à Bruxelles. Montrons-leur que nous sommes décidés, et qu’en tout cas la représentation nationale est décidée à se battre. Sinon, c’est de la capitulation.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que nous faisons de la politique sur ce sujet. Or, pour moi, la politique, c’est la gestion de la cité. Nous sommes donc autorisés à demander que soient prises des dispositions permettant de gérer nos territoires.
Le sport hippique est la troisième fédération sportive en France. C’est dire l’importance d’un tel dispositif pour nos territoires. Comme l’a fort bien rappelé Valérie Pécresse, c’est une spécificité française. Ce sont également des emplois non délocalisables et des investissements sur nos territoires ruraux.
La semaine dernière, j’ai rencontré un jeune exploitant d’un centre équestre. Il avait un projet d’agrandissement de ses bâtiments, ce qui aurait donné du travail aux artisans locaux. Il diffère tout, il arrête ! Il emploie, aujourd’hui, trois salariés. Il en licenciera deux dès le début de l’année. Telle est la réalité. Vous devez l’entendre. Sur le fond, le rapporteur général nous a parlé d’une procédure de manquement et vous, monsieur le ministre, d’injonction. Mais reconnaissons que le décret prévoyait un changement de disposition au plus tard le 31 décembre 2014. Vous êtes, aujourd’hui, dans la précipitation.
C’est cela qui est dommage.
J’ai entendu M. le rapporteur général évoquer des « risques possibles »d’infractions. Qu’est-ce que cela signifie ? Vous allez mener le combat en 2014, monsieur le ministre, dans le cadre de la discussion de la directive TVA 2015. Il sera trop tard ! Si vous appliquez ce dispositif dès le 1er janvier 2014, des pans d’activités de ce secteur vont disparaître. Le retour à la TVA intermédiaire en 2015 ne changera rien, parce que le mal sera fait ! Il est essentiel de porter ce combat dès maintenant auprès de la Commission européenne. Arrêtons de supputer ou d’interpréter ses décisions.
L’intervention de M. le député Martin-Lalande est très emblématique de ce qui se passe s’agissant de ce dossier. M. Martin-Lalande a lu une lettre que j’aurais signée.
Cette lettre date d’octobre 2012. Or, à l’époque, je n’étais pas ministre du budget. Je n’ai donc pas pu signer cette lettre. De plus, et ce n’est pas un petit détail, elle a été signée avant la mise en demeure de la Commission, que je viens de lire, et qui date de novembre 2012 ! Dans ce dossier, tout est manipulation de ce type. Et moi, je ne veux pas qu’il soit traité ainsi ! Entretenir les centres équestres que l’on rencontre dans l’idée que des choses qui ne sont pas possibles le sont, cela peut effectivement permettre de se faire bien voir. Mais nous, nous ne sommes pas là pour faire de la politique clientéliste. Nous sommes là pour obtenir le taux réduit de TVA à 5,5 % pour les centres équestres. Et ce n’est pas avec des méthodes de ce type que nous y parviendrons !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Notre collègue a fait état d’une réponse à une question écrite du ministre du budget de l’époque et membre du même gouvernement.
Avant la mise en demeure !
J’ai bien entendu les termes employés par la Commission, termes que vous nous avez lus, monsieur le ministre. Soit dit en passant, hier, je vous ai rappelé ce que la Commission a dit de l’absence d’économies dans votre budget. Je souhaiterais que vous soyez alors aussi attentif aux termes mêmes qu’elle emploie, ce qui n’a pas été le cas.
Les termes de la Commission n’empêchent en rien, monsieur le ministre, d’adopter notre amendement, qui aurait le mérite de marquer une étape. Vous seriez fondé à nous demander si notre amendement ne concerne que le cavalier avec son cheval ou s’il vise aussi celui qui pratique son activité avec un cheval qui n’est pas le sien. Peut-être cette incertitude se situe-t-elle à ce niveau, car, à dire vrai, elle n’est pas dans le texte même de la Commission, laquelle se contente d’évoquer le droit d’utilisation des installations équestres.
Si l’enjeu est bien de ne pas « faire de la politique », comme vous dites, et s’il n’est pas simplement de refuser un amendement parce qu’il émane de l’UMP, peut-être, monsieur le ministre, pourrions-nous marquer cette étape, ce qui donnerait un argument supplémentaire au Gouvernement – dont nous souhaitons qu’il réussisse dans la discussion qui aura lieu dans les jours qui viennent – pour que le champ d’application du taux réduit soit le plus vaste possible à ce stade, et pour que demain la négociation de 2015 aboutisse sur un accord pour un taux à 5,5 %. Rien n’empêche, aujourd’hui, de marquer cette étape.
Puis-je ajouter, monsieur le ministre, que nous avons tout de même un petit soupçon, l’intensité de votre conviction aujourd’hui, que je crois sincère, n’ayant d’égale que l’assez grande légèreté avec laquelle vous avez abordé la question lors de l’examen du projet de loi de finances dans la nuit du lundi au mardi ? Charles de Courson et moi-même avions d’ailleurs réagi. Aviez-vous alors réellement envie de poursuivre ? Il y a quinze jours ou trois semaines, votre objectif était-il d’aller à la TVA à 5,5 ? Je n’en suis pas sûr car, sinon, vous auriez présenté les choses d’une autre manière.
Vu la réaction de l’opposition et la réaction dans le pays, êtes-vous revenu aujourd’hui à de meilleurs sentiments ? Sans doute, et je veux bien croire à votre sincérité d’aujourd’hui, mais marquez alors cette première étape en acceptant le vote d’un amendement en tout point conforme à ce que nous écrit la Commission, un amendement dont nous ne prétendons pas qu’il règle tout mais qui peut résoudre un certain nombre de situations. S’il vous plaît monsieur le ministre, acceptez cet amendement.
Monsieur Mariton, ce n’est pas parce qu’il vient de l’opposition que je ne peux pas accepter votre amendement. Je suis suffisamment ouvert, cela ne me gêne pas du tout d’accepter des amendements de l’opposition s’ils peuvent aider le Gouvernement à mener des batailles alors que nous sommes d’ailleurs d’accord sur l’objectif à atteindre. Si je ne peux pas l’accepter, c’est parce qu’il n’est pas bon.
Si vous n’évoquez que les activités sportives, le champ sera très restrictif, et nous ne pourrons finalement obtenir un taux réduit de TVA que pour les cavaliers utilisant des infrastructures sportives. Nous souhaitons, nous, aller beaucoup plus loin…
…et obtenir dans le cadre de la renégociation de la directive 2015 le taux réduit de TVA pour la totalité des centres équestres.
Votre amendement ne nous fait rien tenir du tout, il va juste nous poser un problème dans une négociation en cours. Nous sommes en relation quasi quotidienne avec la Commission, avec laquelle nous allons engager la semaine prochaine une nouvelle étape de discussion en présence des représentants des centres équestres, alors même que nous sommes trois ministres à avoir saisi le commissaire Semeta pour le convaincre.
Nous l’avons saisi depuis plus d’un an.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
M. Semeta a été de nouveau saisi par nos soins parce que nous voulons démontrer que, sur ce sujet, nous sommes d’une rigueur et d’une transparence absolues. Des discussions ont eu lieu avec les centres équestres. Selon eux, il est possible d’appliquer le taux intermédiaire de TVA pour les activités équestres en 2014, dans l’attente de la renégociation de la directive TVA. La Commission européenne nous dit le contraire, les centres équestres ne le croient pas. Comme nous sommes scrupuleusement honnêtes, nous allons avec eux à Bruxelles afin que Bruxelles fasse entendre sa doctrine et, si nous n’obtenons pas satisfaction, nous poursuivrons le combat pour la directive 2015, dont les négociations commencent à la fin de l’année 2014.
Enfin, faut-il vous rappeler, monsieur Mariton, que le contentieux dont il est question dure depuis six ans…
…et que, pendant six ans, vous n’avez rien obtenu de ce que vous nous demandez d’obtenir. Rien du tout !
Rien cédé ? Vous n’avez surtout rien obtenu du tout ! C’est macache bono, votre négociation !
Nous, nous sommes décidés à gagner cette négociation, nous voulons la gagner avec les centres équestres en allant avec leurs représentants devant la Commission pour que la plus grande transparence prévale. Si nous n’obtenons pas satisfaction la semaine prochaine, nous mobiliserons toute notre énergie avec eux pour 2015 et, si nous obtenons satisfaction, le Gouvernement déposera un amendement qui nous permettra d’ancrer les choses définitivement dans la loi.
Je vous demande donc, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, de faire en sorte que notre pays fasse bloc dans la négociation. Sinon, vous nous affaiblirez dans cette négociation.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Sur la base de l’article 58 alinéa 2.
Le débat peut être vif, mais parler de clientélisme, comme l’a fait le ministre, pour désigner les prises de position de l’UMP…
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Utiliser un tel mot, surtout quand on explique en même temps que le Gouvernement est toujours honnête, est à la fois une atteinte à l’intégrité des députés de l’opposition et une forme d’insulte à l’égard de la filière équestre, que nous défendons dans cet hémicycle, puisque vous suspectez en réalité ses membres de vendre leurs votes à celui qui les défendra le mieux. Ce type de dérapage devrait être sanctionné.
Sur l’amendement no 120 , je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jacques Myard.
Monsieur le ministre, j’ai passé pas mal de temps dans ma vie à essayer d’obtenir des certitudes avec les nobles incertitudes du sport juridique et, sur ce point précis, je vous l’ai d’ailleurs écrit, si l’on demandait un arrêt interprétatif à la Cour, je ne sais pas ce qui en sortirait. Il faut donc être d’une grande prudence en matière juridique.
Néanmoins, je diffère de vous sur un point. Lorsque l’on négocie à Bruxelles et que l’on a derrière soi une position claire du Parlement, ce n’est pas véritablement un handicap, c’est plutôt un soutien, et vous ne devez pas considérer les amendements que nous vous présentons comme un acte de défiance à votre égard. Vous nous avez parlé de la nouvelle directive TVA à partir de 2015. M. Semeta m’a personnellement écrit à ce propos que les taux réduits vont se réduire comme une peau de chagrin, ce qui n’est pas admissible de la part d’un commissaire car jusqu’à nouvel ordre, ce sont les États qui décident et non la Commission. Vous ne devez donc pas vous sentir agressé par ce que nous vous disons ce soir, cela doit au contraire renforcer la position du Gouvernement puisque vous poursuivez le même objectif que nous.
Le drame, comme l’a souligné Mme Dalloz, c’est que le temps presse. Si nous attendons 2015, l’irréparable aura lieu dans les semaines et les mois qui viennent. C’est la raison pour laquelle vous devez convaincre la Commission d’accepter un moratoire. Elle a peut-être juridiquement raison, mais, économiquement, elle a tort. Ce sera une catastrophe, non seulement en France mais partout ailleurs. Il faut donc lui expliquer qu’elle a peut-être raison mais que cela créera un problème économique majeur à un moment où, franchement, dans la zone euro, nous n’avons pas besoin de cela.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Tout d’abord, la sauvegarde de cette filière n’est pas exclusivement un combat de l’UMP. Mme Dubié avait présenté elle aussi un amendement, cosigné par M. Charasse. Je ne crois pas que ce soit un combat exclusivement partisan. Nous pouvons donc nous rassembler autour de l’objectif de maintenir un taux de TVA réduit pour cette filière.
Vous faites un choix tactique, celui d’aller devant la Commission en emmenant avec vous les représentants des centres équestres pour leur faire dire par la Commission ce à quoi ils n’auront pas droit. Nous proposons au contraire que l’ensemble de la représentation nationale vous donne un mandat clair, en adoptant ces amendements, pour que les responsables de la filière équestre et vous puissiez aller dire à la Commission ce que nous voulons.
Il ne s’agit pas de se mettre en infraction. Vous nous avez indiqué vous-même que vous étiez prêt à déposer un amendement en seconde lecture, ce qui signifie que le chemin inverse est également possible. Dans l’hypothèse où nous serions en infraction et où nous aurions définitivement tort avec notre interprétation, vous auriez tout le loisir de revenir en seconde lecture sur l’amendement que nous aurions adopté aujourd’hui.
Rien ne vous empêche de nous donner satisfaction, l’ensemble de la représentation nationale pourrait se rassembler autour de ce combat pour la survie d’une filière.
On pourrait croire que seule l’opposition défend ce soir la filière équestre.
Non, ce n’est pas le cas. Tout autant que vous, nous nous inquiétons de cette filière, nous avons les mêmes rapports avec les centres équestres sur nos territoires, nous en connaissons les difficultés. Nous savons l’importance de la filière sur le territoire national. Il n’y a pas que la pratique sportive : c’est une filière complexe, parce qu’elle est multiforme, relevant de l’agriculture, du sport, du commerce, du pari.
J’étais prêt à entendre les arguments qui ont été développés ici ou là, mais j’ai écouté la réponse très argumentée du ministre. L’enjeu, ce soir, ce n’est pas l’adoption d’un amendement de l’opposition, ce qui vous ferait certes plaisir, c’est la possibilité d’obtenir de façon durable de la Commission une fiscalité adaptée à la filière, et nous pouvons tous partager cet objectif.
La question se pose depuis 2004, avec des étapes successives, l’opposition comme la majorité ensuite n’ayant rien pu obtenir. Aujourd’hui, l’on vous donne un calendrier, avec des échéances très proches, et je le découvre avec plaisir ce soir. Les représentants de la filière iront la semaine prochaine avec les représentants du Gouvernement rencontrer des membres de la Commission pour avoir une réponse précise, claire et définitive sur la fiscalité de cette filière. Puisque nous nous reverrons pour une nouvelle lecture du projet de loi de finances, nous pouvons convenir ce soir d’attendre encore une quinzaine de jours.
Il n’y a pas, d’un côté, ceux qui défendent bien la filière équine et, de l’autre, ceux qui la défendent mal. Nous y sommes tous attachés et nous avons tous dans nos départements, nos circonscriptions, des installations équestres.
Je suis un peu surpris de la teneur du débat. Il y a quelques mois, lorsque les propriétaires de chevaux, les propriétaires de clubs, les associations manifestaient, c’était dans une espèce d’indifférence sidérale de la part du Gouvernement. Depuis qu’ils sont allés dans la rue, à Nice, Paris, Lyon, partout, il y a une prise en compte de cette vraie difficulté. Si l’on n’y prend pas garde, ce sont environ 6 000 établissements équestres qui vont disparaître, avec quelques milliers d’emplois perdus, et une filière d’excellence française. On entend ici et là que cela ne concerne que les riches. C’est absolument faux.
Aujourd’hui, la filière équine touche tout le monde et, parfois, ce sont plutôt les gens défavorisés qui font du cheval. Je le vis personnellement autour de moi et dans ma famille. Il y a aujourd’hui une insertion du monde du handicap par le cheval, souvent grâce à des gens qui viennent en plus de leurs heures de cours.
Expliquer que, parce que c’est un amendement de l’UMP, on ne veut pas le prendre en compte
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
,…
…c’est absolument abject.
Ce qui compte, monsieur le ministre, c’est le résultat et, quelle que soit votre motivation, si vous alliez dans quelques jours à Bruxelles avec un amendement voté par le Parlement français, cela aurait beaucoup plus de poids que la bonne volonté que vous avez certainement.
Je voudrais d’abord vous présenter mes excuses, monsieur le ministre, ce n’est pas vous qui m’avez écrit, non pas une lettre, comme vous avez voulu le faire croire mais une réponse à une question écrite publiée au Journal officiel du 23 octobre 2012, page 5 940. Je me suis trompé sur le nom du ministre qui m’a répondu, mais c’est bien une réponse qui figure au Journal officiel, questions écrites.
Je vous rappelle simplement la dernière phrase : « Il n’est pas envisagé de supprimer cette disposition qui permet d’appliquer le taux réduit notamment aux activités des centres équestres, la Cour de justice de l’Union européenne ne s’étant pas prononcée sur ce dispositif ». Il ne peut pas y avoir de procédure de manquement sur manquement puisqu’il n’y a pas eu une décision de la Cour européenne de justice.
L’argument avancé par le Gouvernement depuis plusieurs semaines ne tient donc pas sur le plan juridique.
Je ferai deux observations, dont une très concrète. Cela vous paraîtra peut-être surprenant, monsieur le ministre, mais je suis très favorable à ce que nous pratiquions l’aménagement des rythmes scolaires, et ce depuis longtemps.
Rires sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Le centre équestre de Crest m’a signalé que la facturation à la ville des activités équestres dans le cadre de l’aménagement des rythmes scolaires serait augmentée. C’est un effet immédiat de l’augmentation de TVA que vous décidez.
Je crois, monsieur le ministre, qu’aujourd’hui vous prenez enfin ce sujet au sérieux, et je vous remercie. Puis-je vous demander, avant que nous votions, ce que vous pensez de ce propos relaté par un journal du mercredi, propos du Président de la République qui, qualifiant les manifestations contre l’équitaxe, parle de la « droite indécrottable » ? Est-ce que c’est digne, monsieur le ministre ?
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Je souhaite moi aussi apporter deux précisions. La première porte sur ce qui a été voté il y a à peu près un an. Je vous cite les déclarations du ministre de l’époque : « Cela dit, comme il n’est pas improbable que la Cour de justice, à nouveau saisie, soit amenée à condamner la France pour manquement sur manquement et que soient prononcées une forte amende puis une astreinte de 250 000 euros par jour de manquement, le Gouvernement, pour éviter, non une vraisemblable amende, mais l’astreinte quotidienne, propose de renvoyer à un décret la date d’application de cet éventuel nouveau taux de TVA. » Cela suivait un passage dans lequel le ministre disait qu’il était en désaccord avec la position des instances européennes, qu’il y avait une poursuite mais que l’on irait le plus loin possible tant qu’il n’y aurait pas manquement sur manquement.
Mon rôle est aussi de mettre en garde contre les conséquences financières et budgétaires de décisions dont on sait – c’est le plus grave – qu’elles sont contraires à la législation européenne. Mes chers collègues, savez-vous que le contentieux sur les OPCVM nous coûtera 5 milliards d’euros, celui sur les précomptes mobiliers 2 milliards d’euros ?
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Nous allons payer 7 milliards d’euros à cause de la persistance de pratiques sur lesquelles nous avons été condamnés.
Mêmes mouvements.
En 2014, 2,5 milliards seront décaissés à ce titre, et il est probable que nous ayons encore trois fois le même montant à payer plus tard.
Il n’y aura pas 15 000 emplois supprimés…
…ni des milliers de chevaux tués, ce n’est pas vrai. Pour une bonne et simple raison, c’est que, contrairement à ce que prétend M. Mariton, nous avons vu les centres équestres à plusieurs reprises au cours des derniers mois, nous avons indiqué à leurs représentants que, si nous devions nous trouver contraints de procéder à un alignement du taux de TVA, le fonds que nous avons mis en place a vocation à compenser – c’est l’objet de la discussion que nous avons avec eux – la totalité des effets de cette augmentation,…
…et nous leur avons fait part de notre intention de mener le combat. Ce que vous dites, monsieur Mariton, est faux et inutilement polémique.
Quant à M. Martin-Lalande, je veux simplement lui rappeler que la lettre qu’il a lue…
C’est une question écrite, soit. Elle date d’octobre 2012 et la mise en demeure date d’un mois plus tard. Vous avez présenté la lettre comme étant de moi : ce n’était pas le cas.
Vous avez dit qu’elle était intervenue après le jugement : ce n’est pas vrai puisque la mise en demeure intervient un mois après. Je ne souhaite pas que nous travaillions sur ce sujet avec de telles méthodes, qui sont des méthodes politiciennes. Ce dossier mérite mieux. Si vous êtes désireux d’avancer avec nous, je vous fais une proposition concrète : retirez cet amendement. Si nous n’aboutissons pas, vous pourrez le déposer à nouveau dans quinze jours.
Non, je ne le reprends pas, parce que je considère qu’il va bloquer les négociations avec la Commission européenne et qu’il va donc à l’encontre de l’intérêt des centres équestres. En outre, il concerne un segment d’activité alors que nous souhaitons mettre en place le taux réduit de TVA pour des activités beaucoup plus larges. Votre amendement est donc inopportun quant à son contenu et inopportun dès lors que nous souhaitons réussir la négociation avec la Commission.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 80 Nombre de suffrages exprimés: 80 Majorité absolue: 41 Pour l’adoption: 34 contre: 46 (L’amendement no 120 n’est pas adopté.)
La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement no 42 , deuxième rectification.
Je souhaite parler de la situation de l’horticulture française, en défendant le maintien d’un taux réduit de TVA, notamment pour les produits qui n’ont subi aucune transformation, c’est-à-dire les produits directement rattachés à la terre, les produits agricoles. Quand nos collègues s’intéresseront à l’avenir de la filière horticole, ils apprendront que celle-ci a déjà lourdement payé le prix d’une première augmentation de la TVA et que, pour la deuxième année consécutive, le revenu des horticulteurs a baissé. Il n’y a qu’un nombre réduit d’entreprises en France, ce qui ne leur permet pas d’avoir les mêmes moyens de pression que d’autres catégories socioprofessionnelles. Il n’en reste pas moins que l’horticulture est un domaine dans lequel la France a une vraie compétence, une vraie marque au plan européen, avec des pôles horticoles qui suscitent la jalousie de nos voisins.
Dans ces conditions, compte tenu de la baisse régulière de la consommation dans ce secteur, en 2009, 2010, 2011, il serait préférable de ne pas augmenter une nouvelle fois la TVA et de rester au taux actuel, après l’augmentation d’il y a deux ans.
La commission n’a pas retenu cet amendement. Je ferai remarquer à notre collègue que, même si nous connaissons les difficultés de ce secteur, qui n’est d’ailleurs pas le seul à en connaître, la dernière note de conjoncture de FranceAgriMer n’est pas aussi sombre que le dit l’exposé sommaire de l’amendement, puisque le secteur reste en évolution positive en cumul courant, certes avec une baisse des végétaux d’extérieur et des produits de cimetière et d’obsèques, mais avec aussi une augmentation assez importante des végétaux d’intérieur qui fait plus que compenser la baisse d’activité des deux autres secteurs. Toujours est-il que, compte tenu du contexte budgétaire, il n’est pas possible d’accéder à cette demande.
Je tiens à rétablir certaines choses. En l’occurrence, le volume de la consommation de produits horticoles a baissé de 9,2 % en 2012. Je rappelle que le revenu des horticulteurs est l’un des plus faibles parmi les agriculteurs. Ne disons pas que tout va bien. Il faut avoir une vision globale : l’horticulture se porte mal. C’est donc un secteur qu’il faut soutenir.
Il faut que les choses soient précises. La dernière note, que j’ai en main et que je tiens à votre disposition, date d’octobre 2013, cher collègue. Vous vous appuyez sur les chiffres de 2012. Je veux bien, mais je peux vous dire qu’en volume, les sommes dépensées sur les trois types de produits étaient de 1,832 milliard sur les six premiers mois de l’année 2012, ils sont de 1,836 milliard cette année, ce qui représente une augmentation de 0,2 %. J’ai simplement signalé que l’exposé sommaire de l’amendement ne correspondait pas au contenu de la dernière note de conjoncture, qui date d’octobre 2013. Je vous la fais porter.
L’amendement no 42 , deuxième rectification, n’est pas adopté.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement no 456 rectifié .
Cet amendement poursuit deux objectifs. Tout d’abord, il rétablit la taxe affectée aux sociétés de course sur les paris hippiques sur internet, telle qu’elle était prévue par loi du 12 mai 2010 qui a ouvert le secteur des jeux d’argent à la concurrence sur internet. Le principe de cette taxe est de faire participer les opérateurs de paris hippiques en ligne au financement des courses qui leur permettent d’assurer leur chiffre d’affaires. La Commission européenne a questionné en 2010 la compatibilité de cette aide d’État avec les traités communautaires. Des échanges soutenus avec Bruxelles ont permis de valider le principe de cette taxe à un taux proche de 5,6 %, contre 8 % dans la loi de 2010.
L’amendement vise donc à affecter cette redevance pour que les opérateurs de paris hippiques en ligne contribuent effectivement au financement de l’organisation des courses hippiques. Corrélativement, cet amendement prévoit de modifier la fiscalité sur les paris hippiques à un taux qui sera fixé par décret. Voilà pour le premier point.
Ensuite, cet amendement clarifie certaines dispositions relatives aux paris transfrontaliers du PMU. Ces paris ont été autorisés par la loi de finances pour 1965, qui a conféré au PMU le droit de les organiser. Les dispositions de ce texte relatives à des paris pris en France sur des courses étrangères sont cependant devenues caduques du fait de la loi du 12 mai 2010. Il est donc nécessaire de procéder à un éclaircissement de ce texte pour tenir compte du cadre fiscal mis en place depuis 2010. En outre, un décret de 2003 définit le régime du prélèvement sur les paris pris à l’étranger sur les courses françaises. L’amendement remonte dans la loi les dispositions de ce décret relatives à l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement de cet impôt.
Dans l’attente des résultats des discussions avec Bruxelles, la taxe sur les paris en ligne a été affectée au budget général. Dans un deuxième temps, la fiscalité sur les paris hippiques – dont l’assiette est de près de 10 milliards d’euros – a été abaissée de 5,7 à 4,6 % pour ne pas pénaliser la filière hippique. Le taux pour 2014 de la fiscalité sur les mises des paris hippiques au profit du budget général n’est pas arrêté, mais il ne sera pas supérieur au taux prévu en 2010, à savoir 5,7 %.
La commission n’ayant pu examiner cet amendement, c’est un avis personnel que je donnerai. Cet amendement propose d’affecter aux sociétés de course la redevance sur les paris hippiques en ligne dus par les opérateurs agréés de ces paris. Il permet aussi de baisser le taux de cette redevance, qui sera précisément fixé par un décret. Il permettra au Gouvernement d’augmenter par décret le taux de prélèvement sur les paris hippiques, à savoir sur le pari mutuel et les paris hippiques en ligne, ce prélèvement étant dû par le PMU, les sociétés de course et les opérateurs agréés de paris hippiques en ligne. Il permet également de remonter du décret dans la loi tout ou partie du prélèvement de 12 % sur les fameux paris transfrontaliers dus par les sociétés de course par l’intermédiaire du PMU et, enfin, d’habiliter les sociétés de course à recevoir et répartir les paris engagés depuis l’étranger sur des courses françaises. À titre personnel, j’y suis favorable.
Le ministre pourrait-il nous préciser à quel taux il va fixer par décret les deux taux, qui oscillent entre 5 et 6,5 % pour le premier et entre 4,6 et 5,7 % pour le second ? Qui plus est, pourquoi est-ce un décret qui fixe les taux des deux premières composantes, quand c’est la loi qui fixe le taux de la troisième, sur les paris faits depuis l’étranger – en l’occurrence, à 12 % ?
Ce problème va bien au-delà de celui des courses. En 2010, faisant suite à la loi de 1891, le Parlement a décidé que l’organisation des courses, et partant l’encouragement pour l’élevage, étaient un service public. Or ce n’est pas à la Commission européenne de nous dire ce qu’est un service public : cela relève de la compétence des États. Ce qui s’est passé avec la Commission est grave. Elle nous a chicanés, en nous disant que le taux ne devait pas être de 8 % ou de 7,5 %, mais qu’en réalité, il ne fallait prendre en compte qu’un retour de 5,6 % sur les paris hippiques. De la même façon, et s’agissant du système social, la Commission vous dirait que telle chose n’est pas un service social ou un service public, et irait jusqu’à contester l’action du Gouvernement, quel qu’il soit.
Lorsque j’en avais parlé à votre prédécesseur, monsieur le ministre, je lui avais dit que cela ne relevait pas de la compétence de la Commission et que c’était une décision de l’État français. Il m’avait répondu en substance : « Je sais, mais j’ai tellement de contentieux avec la Commission que je n’ai pas envie de me battre. » Eh bien, sur ce sujet, il fallait se battre, monsieur le ministre ! Il n’est pas admissible que la Commission nous dise que notre taux de redevance est trop élevé et que nous devons le baisser. C’est pourquoi, je vous le dis comme je le pense, je suis scandalisé par la volonté de la Commission de mettre son nez dans la définition de ce qu’est un service public en France. Cela ne relève pas de sa compétence.
Quant au reste, je m’interroge, parce que la décision de la direction générale de la concurrence disait, s’agissant notamment du PMU, qu’il ne pouvait pas faire masse commune avec les réseaux. Sur ce point précis, je voudrais savoir où nous en sommes. Si j’ai bien compris, vous fixez un taux dans la loi : cela concerne-t-il uniquement les paris en ligne ou est-ce que cela concerne également la masse formée par les paris faits à l’étranger et ceux faits en France via le réseau en dur ?
Mais sur le point précis de cet amendement, je peux vous dire que la France se couche ! Et ça, ce n’est pas admissible !
Suite à l’intervention de M. Myard, j’avais envie de poser deux questions au ministre. La première est ponctuelle et porte sur cet amendement : est-ce qu’une fraction de cette taxe, qui doit financer, si je comprends bien, l’organisation au titre du service public, revient aux communes ?
Ma deuxième observation, c’est que l’on voit bien à travers cet amendement la complexité du sujet. Le Gouvernement a déposé depuis hier plus de quarante amendements que nous n’avons pas du tout vus en commission, ce qui explique la réponse interrogative, si je puis dire, du rapporteur général. Il y avait hier une vingtaine d’amendements de crédit qui ne portaient pas à conséquence – et je ne l’ai pas relevé –, mais là, nous allons aborder toute une série d’amendements du Gouvernement qui sont assez lourds et complexes. Je regrette donc que l’on n’ait pas pu du tout les voir en commission des finances, monsieur le ministre.
Monsieur de Courson, je veux vous répondre sur la question des taux de taxes affectées et sur la fiscalité sur les paris hippiques. Le taux des taxes affectées se situerait entre 5 et 6 % selon les charges constatées pour la filière responsable de l’organisation des courses pour l’année à venir. S’agissant de la fiscalité des paris hippiques, le taux sera fixé de manière à assurer la viabilité de la filière dans son ensemble. Nous sommes en train, avec ses acteurs, de procéder à la totalité des évaluations et des calculs, pour fixer le taux au plus près.
Quant à Jacques Myard, je le connais depuis longtemps, je sais combien quelles sont ses sensibilités européennes très affirmées. De surcroît, à Maisons-Laffitte, le cheval peut occasionner quelques passions.
Sourires.
Je retrouve là Jacques Myard, avec sa fibre résolument européenne et absolument équine. Je ne lui répondrai pas sur le fond, parce que je lui ai déjà répondu souvent au cours des quinze dernières années à l’occasion de nos échanges, mais il sait ce que je pense.
L’amendement no 456 rectifié est adopté.
La TVA est un bon impôt. Encore faut-il le manier avec les bons taux. Le législateur a choisi d’avoir un taux ordinaire et des taux minorés. Il a ensuite trouvé justifié de proposer l’augmentation de taux ordinaires et de marquer davantage de prudence sur les taux minorés. Le Gouvernement, dans ce qui s’appliquera à partir du 1er janvier, fait le choix de majorer un peu le taux ordinaire et de majorer beaucoup le taux minoré, le portant de 7 % à 10 %, sans parler, par exemple, du cas précis de l’équitation, qui voit son taux passer de 7 % à 20 %, comme nous en avons longuement discuté.
Monsieur le ministre, notre amendement est très simple. Il est fondamental. Il vous propose de démentir cette funeste idée que vous avez eue, à la fin de l’année dernière, d’augmenter le taux minoré de 7 % à 10 %. Cette augmentation aura un impact très fort sur les Français les plus modestes.
Vous avez entendu la première partie de mon propos, madame Delga : j’assume totalement la TVA sociale et je n’ai pas mis en cause l’augmentation du taux ordinaire. Simplement, l’augmentation du taux minoré est absurde socialement. De plus, elle ne produit aucun des effets de compétitivité que l’on peut rechercher avec le taux ordinaire.
Enfin, madame la présidente, nous sommes un certain nombre à penser ici que la TVA est un bon impôt. C’est d’ailleurs un impôt juste. Certaines études de l’OCDE montrent que l’articulation des différents taux fait de la TVA, en réalité, un impôt proportionnel. Mais cela ne peut fonctionner qu’avec des taux minorés qui le soient effectivement. C’est vous qui, en faisant passer le taux minoré de 7 % à 10 %, rendriez la TVA injuste. La TVA est un impôt juste, mais gardez, s’il vous plaît, le taux minoré à 7 %.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 14 .
Dans le même esprit, j’aimerais connaître la vision que le Gouvernement a sur les différentes répartitions de taux. La majorité a créé le CICE pour « accompagner » – c’est son affichage de communication – les entreprises dans leur compétitivité ; or, en réalité, porter le taux de 19,6 % à 20 % ne va absolument pas améliorer la compétitivité de nos entreprises. Cela continuera à favoriser les produits low-cost importés, qui sont en concurrence directe avec l’industrie française. Vous ferez supporter le plus gros effort, en termes de surcoût, aux classes moyennes et aux retraités. Ce passage de 7 % à 10 % est une grave erreur. Il aurait mieux valu, mais vous l’avez refusé par idéologie, augmenter le taux normal de 20 %, qui permettait un vrai soutien à la compétitivité de nos entreprises françaises contre la concurrence déloyale. Votre mesure constitue une nouvelle atteinte au pouvoir d’achat des ménages. Cette erreur vous marquera durablement et je vous invite donc à revenir sur votre décision et à laisser un taux intermédiaire à 7 %.
J’ai bien entendu les deux orateurs, mais je n’ai pas très bien compris, chez Mme Dalloz, la critique du passage de 19,6 % à 20 %. C’est sans rapport avec votre amendement, qui ne parle que du maintien du taux à 7 %.
Vous avez dit, madame Dalloz, que passer de 19,6 % à 20 % allait mettre en danger la compétitivité des entreprises françaises.
Vous proposiez d’ailleurs d’aller à 21,2 %, lors de la législature précédente. Je ne comprends pas très bien.
S’agissant du taux de TVA, le taux normal français est un taux qui se trouve dans la moyenne inférieure des pays européens. Le taux réduit est à peu près le même partout. Quant au taux intermédiaire, il est largement inférieur aux taux intermédiaires de nos voisins.
Je livre ces comparaisons à notre réflexion collective, car il est bon de s’interroger sur les niveaux des taux de TVA et sur leurs effets économiques et sociaux. Dans la réflexion qui s’ouvre devant nous, nous avons intérêt à intégrer cette dimension.
L’avis de la commission est défavorable.
J’ai bien écouté ce que disait ma collègue Marie-Christine Dalloz, et je n’ai pas retrouvé ses propos dans le résumé hâtif et approximatif fait par le rapporteur général. La première chose serait d’écouter les intervenants pour leur répondre de manière plus juste.
D’ailleurs, si vous tenez absolument à faire des comparaisons internationales, j’ai remarqué qu’aucun pays n’avait adopté les 35 heures. On pourrait peut-être en tirer certaines leçons.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Aucun pays ne fait non plus de meilleur pain, de meilleur fromage ou de meilleur Bordeaux !
S’agissant du fond de cet amendement, après la fiscalisation de certains produits d’épargne et la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires, vous nous donnez encore une preuve de votre fiscalité anti-sociale, puisque, en augmentant le taux de TVA intermédiaire, vous allez toucher des catégories de population qui ne sont pas les plus aisées. Je ne comprends pas pourquoi vous vous obstinez à ne pas mener une politique de gauche. De ce point de vue, nous essayons de vous aider, en vous faisant remarquer que certaines conséquences de vos décisions porteront atteinte au pouvoir d’achat des ménages les plus modestes, mais vous ne voulez pas nous écouter. Votre argument consiste à dire qu’il y a ici où là quelque chose à taxer et qu’il faut donc le taxer. Le problème, c’est que le quelque chose commence à être durement impacté par vos mesures fiscales successives.
Alors que vous avez annoncé une remise à plat du système fiscal et que l’on entend des appels à rendre ce système plus juste, je vous invite à faire de la fiscalité intelligente et donc à voter cet amendement qui permettra d’atteindre vos objectifs tout en respectant le programme sur lequel vous avez été élus.
Je voudrais revenir également, monsieur le rapporteur général, sur l’intervention de notre collègue Marie-Christine Dalloz. Vous répondez en cherchant, dans des pays voisins, quelques exemples de taux de TVA qui seraient plus élevés que le nôtre. L’objectif, ce n’est pas de savoir comment on peut justifier une augmentation d’impôt, c’est de savoir quel est le meilleur outil pour favoriser la compétitivité de nos entreprises.
C’est la réflexion qu’a menée notre collègue Marie-Christine Dalloz en montrant qu’affecter l’augmentation des taux de TVA au financement de la protection sociale permettrait de baisser à due proportion le montant des cotisations sociales pour la part salariale et donc d’augmenter le salaire net et, à partir de là, le pouvoir d’achat, mais aussi de baisser la part patronale et donc le coût du travail, améliorant ainsi la compétitivité des entreprises. En plus, cela permettrait de faire financer une part de notre protection sociale par les produits d’importation. Quand une entreprise se délocalise, ce peut être pour aller chercher des parts de marché à l’export, mais c’est bien souvent afin de trouver un coût du travail moins élevé, pour ensuite ramener ses produits sur le territoire national. La mesure rappelée par Mme Dalloz aurait donc le triple avantage d’augmenter le salaire net, de baisser le coût du travail et de faire financer une partie de notre protection sociale par la TVA sur les produits d’importation.
On ne peut pas repousser d’un revers de main ces amendements en disant qu’on peut trouver tel ou tel exemple de taux de TVA plus élevé qu’en France. Vous allez d’ailleurs commencer à avoir du mal à en trouver,…
…parce que grâce à vos réformes successives, nous allons bientôt détenir les records toutes catégories. Ce débat mérite un peu plus de considération de votre part, monsieur le rapporteur général, sans parler du ministre, qui s’est contenté d’émettre un avis défavorable sans répondre aux bonnes questions posées par mes deux collègues.
Monsieur le rapporteur général, le Premier ministre nous annonce l’autre jour une remise à plat de la fiscalité, et ce après nous avoir expliqué que c’était l’heure de la « pause fiscale », et on sait ce qu’il en est advenu : la pause fiscale est derrière nous. Mais lorsque nous avons eu l’idée de placer la TVA au taux de 21,2 %, je me souviens très bien, monsieur le rapporteur général, qu’on entendait sur les bancs socialistes : « Si on augmente la TVA, d’un, de deux ou de trois points, ce sera le pouvoir d’achat des Français qui baissera directement. » Maintenant, plus un mot : vous faites passer le taux intermédiaire de 7 % à 10 %, impactant ainsi directement le pouvoir d’achat, mais vous et vos collègues êtes devenus silencieux.
Et puis, monsieur le rapporteur général, sur votre blog, que je lis attentivement,…
…j’avais cru déceler un petit regret lorsque le Gouvernement a fait passer le taux normal de 19,6 % à 20 % car vous aviez écrit que vous auriez souhaité qu’il le porte à 20,4 %. Vous aviez bien compris qu’il fallait aller beaucoup plus loin et le porter, comme nous l’avions proposé, à 21 % ou 22 %. C’était le seul moyen de redonner de la compétitivité. Votre argument sur le pouvoir d’achat était de la poudre aux yeux, et il est tombé. Vous et le Gouvernement faites une erreur stratégique sur le taux intermédiaire. Nous vous donnons rendez-vous : en tournant le dos à la pause fiscale, vous serez échec et mat !
Je n’ai ni la langue de bois ni la langue dans ma poche, monsieur Vigier : vous venez de découvrir ce que j’ai écrit dans mon blog au printemps dernier. Tout à l’heure, votre collègue Dalloz m’a dit que quand on écrit quelque chose, on le relit et on l’assume. Moi, je n’ai jamais supprimé un seul de mes articles. Vous pouvez donc retrouver les articles montrant que j’avais des différences avec les propositions qui ont été retenues par le Gouvernement. Mais vous qui êtes au Nouveau Centre,…
Rires sur les bancs du groupe SRC.
Vous qui êtes à l’UDI, vous pouvez concevoir qu’il y ait des sensibilités différentes à l’intérieur d’une même famille politique et faire en conséquence des propositions différentes, et puis trancher ensuite.
Quant à M. Jacob, je ne comprends pas son agressivité.
« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.
J’ai seulement signalé, avec humilité, un point de comparaison sur lequel nous pouvons tous nous accorder : en France, le taux normal de TVA est égal, plutôt même légèrement inférieur, à la moyenne des pays voisins ; le taux intermédiaire, lui, est très inférieur ; et le taux réduit est à peu près similaire. J’ai livré ce rappel à la réflexion collective en vue de propositions ultérieures. Je n’avais pas d’arrière-pensées.
La parole est à M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement no 24 rectifié .
Il s’agit, par cet amendement, de prévoir des dispositions transitoires concernant le passage du taux normal de TVA de 19,6 % à 20 % pour les opérations qui se déroulent sur une longue période, en l’occurrence les ventes de logements en état futur d’achèvement. Je rappelle que les montants en sont très importants et que même une petite majoration de 0,4 point peut rendre caduc le plan de financement. Je me suis inspiré d’un amendement qu’avait proposé notre collègue Jean-Louis Dumont lors du collectif de fin 2012 et qui portait, lui, sur le logement social. L’Assemblée avait alors adopté des mesures transitoires pour les ventes à soi-même afin de bloquer le taux de TVA applicable. Il s’agit donc de décalquer sur le logement privé ce qui a été adopté l’an dernier pour le logement social.
L’article 68 de la dernière loi de finances rectificative pour 2013 a prévu une disposition transitoire maintenant le bénéfice du taux de 19,6 % pour les VEFA, pour autant que le contrat préliminaire ou le contrat ait été enregistré chez un notaire, ou auprès d’un service des impôts, avant la date de promulgation de la loi. Cette mesure vaut pour l’ensemble des ventes d’immeuble à construire et pour les sommes réclamées par le constructeur dans le cadre d’un contrat de construction d’une maison individuelle. Il n’était pas prévu d’étendre le bénéfice de cette mesure transitoire aux contrats enregistrés entre la date de promulgation de la loi et le 1er janvier 2014. Nous considérions que le délai d’un an avant l’entrée en vigueur de la hausse des taux permettait aux acteurs de prendre leurs dispositions en connaissance de cause. L’avis est donc défavorable.
La discussion qui vient de se dérouler, entre autres sur les VEFA, soulève un point très important. Je tiens à signaler que dans une zone tendue telle que Paris et l’ensemble de l’Île-de-France, les VEFA permettent de mener des opérations de promotion de l’immobilier privé et de l’immobilier social. Ainsi, 40 % de la production neuve annuelle à Paris et au moins 20 % sur l’ensemble de la région est réalisée en VEFA. Malheureusement, les VEFA sont actuellement bloquées en raison de la frilosité des banques, même si 40 % ont déjà fait l’objet d’un contrat avec un organisme HLM et qu’une partie de la promotion privée a déjà trouvé preneur. Plus le temps passe, plus la situation se dégrade. Il y va de la qualité et de la quantité de production à Paris et dans l’ensemble de l’Île-de-France. Je pense que les militants en faveur du logement considèrent que l’accession comme la location méritent un autre sort que celui qu’elles subissent depuis quelques années. Il y a un réel besoin en la matière, il a été quantifié et on a bien évalué le statut des futurs occupants. Je ne me permettrais pas de donner maintenant mon avis devant le ministre et le rapporteur général,…
…– je l’exprimerai en fin de parcours –, mais je rappelle la responsabilité qui est la nôtre : s’il y a des besoins de logements locatifs ou en accession, tenant compte de la diversité des statuts, va-t-on oui ou non prendre des mesures pérennes qui permettront au bâtiment de retrouver un niveau d’activité suffisant pour conserver l’emploi ? Quant au taux de TVA applicable, qu’il soit de 5 %, de 7 % ou même de 10 %, c’est au moins de l’argent qui entrera dans les caisses de l’État, qui en a bien besoin. Mais si on ne débloque pas la situation, ce seront des recettes en moins. À vous de choisir !
L’amendement no 24 rectifié n’est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 13.
La parole est à M. Thomas Thévenoud.
Sourires.
L’article 13 porte diverses dispositions de mise en conformité communautaire en matière douanière. Mon intervention portera sur l’importation des produits du tabac. On va passer, au 1er janvier, d’un maximum autorisé de cinq cartouches par véhicule à dix cartouches par personne dans la limite de cinq personnes par véhicule, et de cinquante à mille cigares par personne.
Cette mesure de libéralisation de l’importation des produits du tabac, imposée par l’Europe, pose, monsieur le ministre, trois séries de questions, que je voudrais vous soumettre.
Tout d’abord, il y a le problème de l’augmentation du marché illégal et de la contrebande de tabac en France. On estime aujourd’hui que 20 % du tabac consommé dans notre pays est d’origine illégale.
Quels sont les moyens de contrôle et les résultats obtenus dernièrement par l’administration ?
Ma deuxième question porte sur le chiffre d’affaires des buralistes et sur leur inquiétude à cet égard, notamment dans les zones frontalières. Comment va évoluer le contrat d’avenir qui lie l’État aux buralistes, en particulier pour accompagner ceux qui se trouvent dans ces zones ?
Ma troisième question concerne l’impact sur les recettes de l’État. Une étude de la direction du budget de 2011 faisait apparaître une perte de recettes de près de 2,5 milliards d’euros suite aux achats transfrontaliers.
Mais plus généralement, ne pensez-vous pas que l’adoption de cet article risque de porter préjudice à la lutte contre la contrebande et le marché illégal qui se développent malheureusement en France alors que la consommation de tabac, elle, reste stable – elle a même plutôt tendance, et c’est préoccupant, à augmenter chez les jeunes ?
L’article 13 est pudiquement intitulé : « Mesures de modernisation et de mise en conformité communautaire en matière douanière ». Mon analyse rejoint très largement celle que nous venons d’entendre. L’importance des mesures prévues dans cet article et les conséquences qu’elles pourraient revêtir justifient davantage d’explications de la part du Gouvernement. Ainsi, monsieur le ministre, lorsque vous êtes venu devant la commission, il n’aurait pas été scandaleux que vous attiriez notre attention sur l’importance de ce dispositif. Certes, vous pouvez toujours nous dire que nous sommes là pour lire. Je vous l’accorde. Nous essayons de le faire et le rapporteur général a évidemment analysé l’article 13. Mais, chacun le sait et on doit le reconnaître humblement, l’ampleur de ses conséquences n’est pas apparue immédiatement lors du dépôt du projet de loi de finances rectificative. Une discussion budgétaire responsable ne consiste pas en un jeu de devinettes.
Accordez que des parlementaires de bonne foi, avec un tel intitulé, n’y voient pas malice lorsque le Gouvernement passe avec beaucoup de pudeur et de rapidité sur ce que contient cet article.
Ce dispositif est porteur de conséquences majeures. Profitons de la séance pour que le Gouvernement nous les détaille, nous explique pourquoi nous en sommes là, et que chacun en mesure l’exacte dimension et l’exacte portée. Lorsqu’il est question de mesures aussi importantes – si je comprends bien l’analyse que vient de faire notre collègue, meilleur spécialiste que moi du sujet –, il serait souhaitable, monsieur le ministre, que le Gouvernement ne les présente pas sous le seul intitulé « mesures de modernisation et de mise en conformité en matière douanière ». Quand la donne change de manière significative, autant le dire explicitement.
Nous discutons de ces affaires depuis des années, puisque nous savions que les règles mises en oeuvre n’étaient pas eurocompatibles. Le problème de fond, c’est l’absence d’une politique de coordination des prix du tabac en Europe : tant que nous n’en aurons pas une, nous ne pourrons pas nous en sortir.
Il est inquiétant de constater que l’écart s’est considérablement creusé entre les prix français et ceux des pays voisins, au détriment de la France. Chez moi comme chez le rapporteur général, près de 30 % des produits consommés viennent du Luxembourg et de la Belgique. Des jeunes, à cinq ou six par voiture, vont s’approvisionner au Luxembourg où le tabac est 40 % moins cher. Ils font le plein – dans tous les sens du terme, car c’est là aussi que le carburant est le moins cher –, ils se font une petite sortie et ils reviennent avec la voiture bourrée de tabac.
Nous avions la règle des cinq ; par voie réglementaire, nous passons à dix – mais je pense que ce sera tout aussi anti-communautaire, monsieur le ministre. L’opération deviendra encore plus rentable.
Pour ma part, je pense que nous devons changer de politique. Nous ne pouvons pas continuer à augmenter le prix du tabac en France : la consommation officielle baisse, mais la consommation réelle augmente en raison de la progression des importations. Dans le sud, le long des Pyrénées, du côté d’Andorre, c’est proprement affreux…
L’écart y est de un à deux et même davantage. À Toulouse, on organise des voyages par cars entiers qui vont en Andorre et reviennent pleins de cartouches. Monsieur le ministre, il faut donc impérativement engager une politique européenne de coordination.
Il y a deux ou trois ans, un rapport parlementaire dressait un état des lieux en reprenant les informations dont on disposait alors sur la contrebande et la contrefaçon qui représentent tout de même quelques milliards d’euros de perte pour l’État. Avec la libre circulation actuelle, des produits contrefaits arrivent de grands pays où les usines tournent la nuit pour faire l’argent de poche – aujourd’hui l’Ukraine et la Chine, demain peut-être d’autres pays où ce sera moins cher – et où l’on remplit le papier de n’importe quoi. J’ai lu le rapport d’un responsable d’une fondation qui a analysé ces cigarettes : c’est absolument hallucinant ce que l’on trouve dedans…
On parle de l’Europe, on dit qu’il faut ouvrir, de la concurrence, aérer, aider les pays en voie de développement. Nous avons découvert qu’une commissaire voulait absolument libérer le commerce du tabac pour rendre service à des pays qui nous envoient actuellement du poison.
De temps en temps, on surprend des jeunes, au coin d’une rue, en train de vendre du tabac de qualité variable. Les grandes sociétés tabatières ont les défauts qu’on leur connaît ; mais, au moins, depuis qu’elles ont été prises une fois la main dans le cambouis…
…elles ont fait amende honorable et nous avons désormais une traçabilité de leurs produits.
Le tabac n’est pas encore interdit, même si l’ancien grand fumeur que je suis se demande combien de temps cela durera. Imaginons que l’on n’en vienne pas à interdire de fumer, en raison des fortes taxes qui rapportent de l’argent à l’État. Mais au moins, au nom de la santé publique, évitons les produits importés qui empoisonnent les plus jeunes, au seul motif qu’ils sont moins chers. Mieux vaut encore « au cul du camion » que de laisser entrer n’importe quel produit. L’Europe devrait y réfléchir.
Je suis saisie d’une série de seize amendements de précision, de cohérence, de clarification, de coordination ou tendant à la correction d’une erreur matérielle, présentés par M. le rapporteur général.
L’article 13, amendé, est adopté.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 361 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l’article 13.
Il s’agit d’un amendement assez traditionnel : il vise à étendre le champ des sacs plastiques biodégradables.
Nous avions adopté une première mesure sous la forme d’une taxe sur les sacs de caisses. Un deuxième segment est constitué par les sacs à fruits et légumes et un troisième par les sacs à déchets, c’est-à-dire les sacs-poubelles. Il s’agit d’élargir la mesure au deuxième segment, puisque nous avons déjà délibéré en 2010 sur le premier.
Cet amendement vise à soumettre à la taxe générale sur les activités polluantes, non seulement les sacs de caisse en plastique mais aussi les sacs en plastique utilisés pour l’emballage des fruits et légumes et le transport de marchandise. Cela pourrait être une piste de réflexion intéressante, mais bouleverser l’assiette prévue pour cette taxe dès juillet 2014 ne laisserait pas aux acteurs économiques le temps de s’organiser.
En effet, l’entrée en vigueur de la taxe sur les sacs plastiques est, depuis trois ans, prévue pour 2014. Elle interviendra sitôt que les décrets seront parus. Modifier son assiette avec un délai aussi court ne permettrait pas aux filières industrielles de se préparer à cette nouvelle législation. Je vous suggère plutôt de la laisser se mettre en place, comme vous l’avez dit, pour le premier volet de cette opération. Nous verrons ensuite, après avoir analysé l’impact de cette première mesure, comment l’étendre aux sacs à fruits et légumes, ce qui laissera aux acteurs économiques le temps d’anticiper notre décision. Pour l’heure, la commission est défavorable à votre amendement.
Je retire mon amendement. Je note que le rapporteur général y est favorable sur le fond mais qu’il voudrait que je le redépose dans un an. On peut résumer sa position ainsi…Disons que j’ai cru voir plus qu’une ouverture.
L’amendement no 361 rectifié est retiré.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 292 .
Notre rapporteur général appelle cet amendement un marronnier : il vise à n’assujettir à la TGAP que les industries dont les technologies ne sont pas les meilleures du moment – autrement dit de l’année. Comment définira-t-on les meilleures ? C’est à l’administration qu’il reviendra de dire quelle est la meilleure technologie du moment, sachant que cela pourra évoluer tous les ans ou tous les deux ans. C’est une idée, je le sais, que n’aiment pas beaucoup les juristes et les fiscalistes qui la trouvent un peu molle, mais je persiste à penser qu’elle est fructueuse.
Notre collègue a quasiment donné la réponse à sa question en soulignant les difficultés d’interprétation : légiférer en faisant une exception pour ceux qui appliquent les meilleures techniques disponibles est un exercice extrêmement difficile. Qu’est-ce que le meilleur ? Est-ce le moins cher, celui qui a le meilleur rapport qualité-prix, le plus efficace – et au regard de quel critère d’efficacité ? Ce serait ouvrir plus qu’une source de contentieux…Plutôt que d’encourager à des comportements plus vertueux, cela permettrait probablement à quelques avocats fiscalistes de déclencher et de soutenir beaucoup d’affaires !
J’ai déjà eu l’occasion de répondre à notre collègue de Courson en commission. Pour autant que l’on puisse juger de la meilleure technologie, si même c’était la même technologie, nous sommes bien dans le cadre d’une TGAP, donc d’une activité polluante. Si la meilleure technologie ne règle pas le problème de pollution, il n’y a pas de raison, même si la pollution est moindre, d’exonérer l’entreprise ou l’investissement de cette taxe. Il y a donc un petit non-sens dans cette affaire.
Je vais le retirer, mais il n’en demeure pas moins que, pour ma part, je n’ai pas une conception punitive de la fiscalité écologique : je cherche plutôt à récompenser les bons comportements.
Je pense qu’il est mieux de récompenser les bons comportements que de sanctionner les comportements, y compris lorsqu’ils sont bons…
L’amendement no 292 est retiré.
Mon amendement a pour but d’aménager une période de transition dans les départements de Guyane et de Mayotte, en ce qui concerne les taux de la TGAP applicable pendant la période allant de 2014 à 2018.
En effet, l’objet de la taxe générale sur les activités polluantes est d’inciter les producteurs de déchets à orienter ceux-ci vers des filières de valorisation des matières. Or il se trouve qu’en Guyane, de manière générale, il existe très peu d’infrastructures de recyclage de déchets, notamment du fait de la faible intervention des éco-organismes. Qui plus est, les communes isolées de ce département non accessibles par voie routière rencontrent des difficultés particulières pour mettre en place le recyclage.
Quant à Mayotte, la situation est celle-ci : la fiscalité est nouvelle puisqu’elle sera en oeuvre à partir de 2014. Il n’y a pas de taxe d’enlèvement des ordures ménagères et la fiscalité dont nous parlons sera mise en oeuvre à partir de cette date-là. Par ailleurs, les infrastructures de gestion de déchets ne seront opérationnelles qu’à partir du premier trimestre de 2014. Aussi cette taxe a-t-elle pour effet de compliquer le rattrapage, la mise à niveau des infrastructures de gestion des déchets dans ces départements.
Pour cette raison, il est proposé d’aménager trois catégories de transition : dans le département de Guyane en général, d’adopter un tarif de 10 euros par tonne de 2013 à 2018, et de retrouver un taux de droit commun en 2019 ; dans les parties de ce département non accessibles par voies terrestres, d’adopter un tarif de 3 euros par tonne de 2014 à 2018, avant de retrouver le droit commun ; enfin, dans le département de Mayotte, compte tenu de la nouveauté de cette disposition, nous proposons de fixer la taxe à zéro euro entre 2014 et 2017 puis à 10 euros par tonne en 2018, avant de retrouver également le taux de droit commun à partir de 2019.
L’amendement no 64 de notre collègue prévoit à juste titre d’adapter le barème de la TGAP « déchets » aux contraintes géographiques particulières de la Guyane et de Mayotte, comme le permet du reste l’article 73 de la Constitution dans les départements et régions d’outre-mer.
Une coordination s’impose néanmoins car l’article L. 651-4 du code de l’environnement prévoit, contrairement au code des douanes, que la TGAP n’est pas applicable à Mayotte. Pour remédier à cette incohérence entre les deux codes, j’ai déposé le sous-amendement no 398 , dont l’objet est de faire la coordination nécessaire. Le sous-amendement no 397 est quant à lui purement rédactionnel. Sous réserve de l’adoption de ces deux sous-amendements, je serai favorable à l’amendement no 64 de notre collègue.
Le sous-amendement no 397 est adopté.
Le sous-amendement no 398 est adopté.
L’amendement no 64 , modifié par la levée du gage, est adopté.
De nombreux reproches ont été adressés aux biocarburants de première génération. C’est pourquoi le développement d’une filière nationale de biodiesels issus des déchets et résidus tels que les graisses animales ou l’huile de friture usagée est nécessaire et peut permettre de répondre à ces critiques.
L’amendement no 310 vise donc à relever le plafond qui limite actuellement le dispositif du double comptage des biocarburants avancés, que l’on appelle les esters méthyliques d’huiles animales ou usagées. Ces biocarburants n’entrent pas en conflit avec l’alimentaire, contrairement aux esters méthyliques produits à partir d’huiles végétales. Ils contribuent à la sécurisation de l’approvisionnement énergétique à l’heure où les importations de gazole doivent diminuer. Enfin, leur bilan énergétique est satisfaisant, dans la mesure où ils permettent de réduire les gaz à effet de serre sans effet direct sur les terres agricoles.
Le développement de cette filière est aujourd’hui empêché par un plafond mis au dispositif dit de double comptage ; l’amendement no 310 vise à desserrer cette contrainte.
Sur le fond, votre amendement, cher collègue, prévoit l’augmentation annuelle des quantités de graisse animale et d’huiles usagées pouvant être comptées double, ce qui permettrait, dites-vous, d’atteindre les objectifs d’incorporation de biocarburants et d’alléger la TGAP. Cela ne semble pas aller totalement dans le sens, annoncé par le Gouvernement, d’une réduction du soutien aux biocarburants, même s’il est vrai que les biocarburants visés par votre amendement ne posent pas les mêmes problèmes d’affectation des sols que les biocarburants classiques de première génération.
En l’état, la commission n’a pas souhaité adopter votre amendement. J’émets donc un avis défavorable.
J’ai bien conscience, en entendant M. le rapporteur général, que le sujet interroge. Rappelons toutefois que ce système de plafonnement avait été introduit dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour l’année 2010 par le président de la commission des finances du Sénat. Cette initiative du législateur relevait du bon sens, puisqu’elle instaurait un plafonnement progressif.
L’amendement que je propose avec Christophe Caresche ne vise qu’à mettre à jour le plafond, compte tenu des productions à venir. Cela permettrait d’encourager une nouvelle filière et, en même temps, de concourir à la réduction des exportations, pour ne pas aggraver la dépendance énergétique.
Je demande donc à M. le rapporteur général et à M. le ministre de revoir leur position à l’aune de ces explications complémentaires.
L’amendement no 310 n’est pas adopté.
La parole est à M. Thomas Thévenoud, pour soutenir l’amendement no 249 .
La question que je voulais poser à la faveur de cet amendement no 249 est celle de l’optimisation fiscale à laquelle se livrent les multinationales du tabac.
Quatre multinationales se partagent 90 % du marché du tabac en France. Elles dégagent chaque année des profits considérables, qui progressent de 10 % par an depuis dix ans. On estime que les profits de ces quatre grands groupes approchent le montant d’un milliard d’euros par an. On estime aussi que leur niveau d’imposition n’est que de 5 %. Les multinationales s’enorgueillissent d’ailleurs de pratiquer l’optimisation fiscale à l’aide d’un certain nombre de sociétés écrans établies dans d’autres pays d’Europe.
La lutte contre l’optimisation fiscale est un des fils rouges de l’action que mènent les députés socialistes en faveur de la justice fiscale. On l’a vu récemment, lors de l’examen du projet de loi de finances, au cours duquel plusieurs amendements parlementaires ont été adoptés, notamment l’un qui portait sur l’abus de droit.
Il est donc normal que nous nous attaquions un jour à l’industrie du tabac, d’autant que ce n’est pas une industrie comme les autres. Je rappelle le bilan humain : 73 000 victimes par an dans notre pays. Quant au bilan en matière de santé publique, je l’ai dit tout à l’heure, la consommation ne diminue pas ; au contraire, elle progresse chez les jeunes. En ce qui concerne le bilan social, un certain nombre d’entreprises, notamment du côté des buralistes, sont en difficulté financière, et l’industrie du tabac est la seule industrie manufacturière qui ne lutte pas vraiment, c’est le moins qu’on puisse dire, contre le marché illégal, contre la contrefaçon. En ce qui concerne, enfin, le bilan financier pour l’État, rappelons les chiffres de la Cour des comptes : les recettes fiscales procurées sont estimées à 14 milliards d’euros par an, alors que le coût budgétaire de la politique de santé publique pour lutter contre les ravages du tabac s’élève à 47 milliards d’euros par an.
Il est donc normal que les industriels participent, par une contribution exceptionnelle, à l’effort national en matière de santé publique et de lutte contre le tabac. L’amendement que je présente a précisément pour objet d’instaurer une contribution sur le chiffre d’affaires de ces grandes entreprises, de ces multinationales. Exceptionnelle, cette contribution sera mise en place pour deux ans. Ce n’est pas une taxe affectée, mais une contribution reversée au PLFSS, autrement dit au budget de la Sécurité sociale, ainsi que l’autorise la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Nous avons déjà, par le passé, instauré des contributions exceptionnelles temporaires, sur des secteurs bien précis, comme le secteur pétrolier ou les banques. Rappelons enfin que l’Europe autorise un prélèvement exceptionnel pour un secteur soumis à des droits spécifiques en matière de fiscalité lorsque l’intérêt général est en cause, ce qui est le cas.
Il semblerait que l’amendement que je présente ce soir ait déclenché les foudres d’un certain nombre de grandes entreprises du tabac. J’espère qu’elles ne procéderont pas à l’Assemblée nationale comme elles l’ont fait au Parlement européen : nous avons découvert récemment un fichier des parlementaires européens, classés en fonction de leur proximité avec l’industrie du tabac, grâce à un code couleur, rouge ou bleu…
Le seul argument opposé, c’est le chantage à l’emploi. Selon mes estimations, jamais démenties, d’ailleurs, par l’industrie du tabac, ces quatre grandes entreprises emploieraient 2 700 salariés sur le territoire national. À titre de comparaison, l’hôpital public de Mâcon, dans ma circonscription, emploie le même nombre de salariés… La loi doit donc s’écrire ce soir en dehors de toute pression extérieure et dans l’intérêt de tous. C’est la raison pour laquelle j’espère que cet amendement suscitera une large adhésion.
La commission n’a pas retenu votre amendement, mon cher collègue. Vous le savez, puisque vous étiez présent. Cela étant, je me dois de faire quelques remarques.
Tout d’abord, vous avez raison en ce qui concerne les possibilités offertes par la directive 2008118CE qui encadre la fiscalité sur le tabac. La possibilité que vous évoquez n’y contreviendrait donc pas, même s’il y aurait d’autres moyens de parvenir à la même fin.
Ensuite, vous dites viser non pas le prix des cigarettes mais plutôt le bénéfice des cigarettiers. Je ne vois cependant pas très bien ce qui empêcherait lesdits cigarettiers de répercuter ce nouveau prélèvement sur les prix pour maintenir leurs prix hors taxes et remises. Ils sont tout simplement tenus de communiquer ces prix aux douanes, qui les homologuent, et la fiscalité, du moins sa part proportionnelle, s’ajuste à la hausse ; cela conduirait à une augmentation du prix du paquet de cigarettes. Je vous rappelle qu’il augmentera déjà, en moyenne, de trente-cinq centimes en janvier.
Je ne suis pas intervenu dans le débat sur l’article précédent, mais si j’ai eu une réaction un peu vive en écoutant M. Mariton, c’est tout simplement parce que l’article 13 avait tout simplement pour objet de mettre le droit en conformité avec le droit communautaire. Élu de la circonscription la plus voisine du Luxembourg, je suis particulièrement sensible à cette question. Je connais la situation des buralistes transfrontaliers et je connais le plan d’accompagnement conclu par l’État et la profession, dont je reçois régulièrement des membres. Nous nous mettons effectivement en conformité avec le droit européen. Si nous, ne sommes pas capables, nous, à la lecture de l’exposé des motifs et de l’article, de voir qu’il s’agit d’une question liée à la circulation des produits liés au tabac, il va falloir nous regarder dans la glace avec un regard un peu plus critique…
Cela dit, pour en revenir à l’amendement de M. Thévenoud, je confirme que la commission s’y est montrée défavorable.
Je veux également profiter de cet amendement pour apporter quelques précisions sur l’article 13, qui concerne la mise en conformité de notre législation avec des dispositions européennes qui concernent les conditions d’achat de tabac à l’étranger. Je répondrai également à M. Thévenoud.
Je veux rappeler aux parlementaires de l’opposition, et à vous-même, monsieur Thévenoud, que, en 2006, mon prédécesseur de l’époque, Jean-François Copé, a dû faire face à un amendement présenté par la majorité de l’époque, auquel il s’était opposé, qui visait à durcir les conditions d’achat de tabac par les ressortissants français au-delà des frontières afin de lutter contre la contrebande et protéger la profession de buraliste.
Cet amendement a fait l’objet de procédures contentieuses, qui ont abouti à un jugement rendu par la Cour de justice de l’Union européenne au mois de mars 2013, qui nous enjoignait de nous mettre en conformité avec la réglementation européenne. La Commission européenne avait en effet affirmé que les dispositions prises à l’époque par le législateur français n’étaient pas conformes au droit européen. Mon prédécesseur a donc pris, en l’absence de textes législatifs permettant de faire entrer dans le droit français ce qu’il nous était demandé d’entériner, une instruction. Celle-ci est donc en vigueur depuis près de neuf mois. Par l’article 13, nous proposions de donner force de loi à cette instruction prise par l’État à la suite d’un jugement de la CJUE, afin que les règles nationales soient enfin conformes avec le droit européen.
Cette affaire appelle de ma part deux remarques. Premièrement, depuis l’adoption de cet amendement en 2006 et au cours des années qui ont suivi, on n’a observé aucune modification des trafics entre la France et les pays limitrophes ; autrement dit, la disposition n’a pas eu d’impact sur le volume des marchandises échangées. La raison en est très simple : la douane procède à des contrôles massifs afin de lutter contre la contrebande et éviter une consommation trop importante de tabac. Je me suis rendu hier avec le président des buralistes de France à Roissy, fort tôt, pour examiner avec lui les conditions d’intervention de la douane dans cette lutte contre la contrebande. Nous avons pu mesurer l’importance du travail accompli par la direction générale des douanes : pas moins de 300 tonnes de tabac ont été récupérées l’an dernier dans le cadre de ces actions ponctuelles de lutte contre la contrebande. Cette année, ce sont près de 400 tonnes.
Deuxièmement, et cela répond à la question de M. Mariton, s’il n’y a pas eu de tohu-bohu autour de cette affaire au moment de la présentation du PLFR, c’est tout simplement parce que ce problème a été réglé depuis près de neuf mois. Le Gouvernement a pris les mesures juridiques nécessaires pour se mettre en conformité avec le droit européen. Ce que nous avons proposé par l’article 13 n’est rien d’autre que la régularisation législative de dispositions déjà en vigueur, qui ont été prises du fait d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne.
Pour ce qui est de l’amendement de M. Thévenoud, je ne reprendrai pas tous les arguments développés par M. le rapporteur général, que je fais miens. J’ajouterai simplement un argument supplémentaire : selon les analyses – approfondies, car je voulais vous être agréable – que j’ai demandées, la mesure que vous proposez est contraire aux dispositions de la directive 2008118 du Conseil de l’Union européenne du 16 décembre 2008, relative au régime général, à la détention, à la circulation et au contrôle des produits soumis à accise. Si nous adoptions la disposition législative que propose votre amendement, nous ouvririons un nouveau contentieux communautaire, alors que nous venons juste de régler celui auquel je viens de faire référence et qui a justifié l’article précédent.
Je ne veux surtout pas opposer les excellents arguments de M. le ministre avec ceux de M. le rapporteur général. J’ai cependant cru comprendre que, sur ce dernier point, vous n’êtes pas tout à fait sur la même ligne et je pense pour ma part que votre dernier argument, monsieur le ministre, n’est pas forcément recevable.
Tout d’abord, je salue votre travail personnel et celui de tout le Gouvernement en matière de lutte contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et l’optimisation fiscale. Vous avez exprimé encore aujourd’hui, dans cet hémicycle, votre volonté de continuer ce combat que nous partageons tous, en tout cas au sein de la majorité. Pour autant, nous ne pouvons pas balayer d’un revers de main l’amendement de M. Thévenoud.
Le chiffre d’affaires de l’industrie du tabac est assez hallucinant, et l’on en connaît les conséquences sociales et sanitaires. Il s’élève à 1,8 milliard d’euros par an dans notre pays. Les bénéfices sont estimés à 1 milliard d’euros par an. Or l’industrie du tabac ne déclarerait en France que 50 millions d’euros de bénéfices. Une émission a récemment été diffusée, que certains d’entre nous ont regardée. Elle mettait en avant la manière dont l’industrie du tabac optimise sa fiscalité, et même organise – j’emploie le terme à dessein – son évasion fiscale.
Je crois donc que l’amendement de M. Thévenoud nous appelle à débattre de cette industrie particulière. Nous souhaitons tous – ou du moins beaucoup d’entre nous – combattre l’optimisation fiscale des multinationales, qui mènent un lobbying intensif. En détournant ou en adaptant la réglementation française, les multinationales du tabac arrivent à ne déclarer que 50 millions d’euros de bénéfices alors que leurs bénéfices réels s’élèveraient à 1 milliard d’euros. L’amendement de M. Thévenoud est un élément important de notre réflexion sur cette question.
Premièrement, les éléments développés par M. Galut m’ont un peu surpris : il n’y a pas que l’industrie du tabac qui pratique l’optimisation fiscale. On se demande pourquoi la matraque fiscale devrait s’abattre en particulier sur cette industrie-là, où les pratiques d’optimisation fiscale ne sont ni plus ni moins développées que chez les autres !
Et pourquoi pas ? Il faut bien commencer quelque part ! Qui plus est, le tabac n’est pas un produit comme un autre !
Votre raisonnement pose un problème général. En tout cas, votre argumentation n’est pas exactement la même que celle de votre collègue M. Thévenoud.
Deuxièmement, un problème philosophique se pose. Je précise que je ne suis pas fumeur, et que selon le code couleur évoqué par M. Thévenoud, je ne suis ni rouge, ni bleu – je dois être blanc, car je suis totalement agnostique en matière de cigarette. J’ai cependant la désagréable impression que vous voulez mettre en place une fiscalité punitive contre une industrie.
Vous dites qu’il y a de l’évasion fiscale : à nouveau, nous sommes d’accord. Néanmoins, si l’on considère que le tabac est un fléau social, allons au bout de votre logique, et interdisons-le…
Sourires.
…au lieu de chercher à instaurer une taxe massive destinée en fait à punir : la fiscalité n’est pas faite pour cela.
Troisièmement, je suis un peu étonné de voir que cette taxe porte sur le chiffre d’affaires. D’après les arguments développés par M. le ministre de l’économie et des finances, Pierre Moscovici, et par l’administration de Bercy, j’avais compris que les taxes reposant sur les salaires étaient des taxes stupides – notamment l’imposition forfaitaire annuelle. J’avais aussi compris que la politique actuelle du ministère des finances visait à supprimer ces taxes pour faire porter l’imposition sur le bas du compte de résultat, et pas sur le haut. Or je lis dans l’exposé sommaire de votre amendement que vous voulez taxer le chiffre d’affaires de ces entreprises, et non leur résultat. Ces modalités me semblent particulièrement contraignantes, et l’assiette particulièrement large.
Quoi qu’il en soit, je salue cette forme d’inventivité fiscale. Elle m’apparaît néanmoins lourde de conséquences pour la survie de cette industrie. Si vous voulez la tuer, dites-le clairement ! En tout cas, je ne crois pas au dispositif que vous proposez.
J’interviens à nouveau pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur l’état d’esprit du Gouvernement par rapport à l’amendement de M. Thévenoud. Nous sommes tout à fait résolus à lutter contre l’optimisation. Vous savez très bien que nous avons pris énormément de mesures pour lutter contre l’optimisation et la fraude fiscales d’un certain nombre de secteurs industriels : près de soixante au total, qu’il s’agisse de la mise en oeuvre de préconisations du rapport de l’inspection générale des finances sur les prix de transfert, de la déductibilité des intérêts, de la comptabilité analytique, etc. Nous sommes déterminés à traiter tous ces sujets.
Cela étant, vous reconnaîtrez avec moi qu’il est plus facile de lutter, par des dispositions législatives, contre l’optimisation de groupes dont le siège social est situé en France et par le fait soumis à la législation fiscale française, que de lutter contre des groupes situés à l’étranger. Or les industriels du tabac sont en majorité situés à l’étranger. La fiscalisation et la lutte contre l’optimisation fiscale de groupes dont le siège social n’est pas situé en France pose de grandes difficultés. Vous avez d’ailleurs vu, messieurs Thévenoud et Galut, toute l’énergie qu’il a fallu déployer pour fiscaliser les acteurs du numérique en raison des activités qu’ils développent dans notre pays, alors qu’ils n’ont pas d’établissement stable en France,.
Autrement dit, notre détermination est totale, mais force est de reconnaître que compte tenu des spécificités de l’industrie du tabac, nous sommes dans une situation particulière. Sans aller jusqu’à rejoindre ce que disait à l’instant M. Aubert, je pense que pour lutter contre l’optimisation fiscale, il faut définir des règles qui s’appliquent à tous les secteurs industriels et économiques, sans aucune exception : il en va de la lisibilité des règles. Nous nous sommes engagés dans plusieurs projets au niveau international, notamment au sein de l’OCDE avec le projet BEPS qui concerne le numérique, ou encore au sein de l’Union européenne, pour atteindre cet objectif. Aussi ne faut-il pas prendre de dispositions non conformes à la réglementation européenne.
Je souhaite à présent revenir sur le petit désaccord que j’ai avec M. le rapporteur général. Pour moi, la règle est claire : si nous décidons de mettre en place une taxation supplémentaire de produits déjà concernés par des droits d’accises, alors le produit de cette taxation supplémentaire doit être affecté. Or ce n’est pas le cas du dispositif proposé par l’amendement de M. Thévenoud. C’est la raison pour laquelle nous considérons que ce dispositif n’est pas euro-compatible.
Monsieur le ministre, je ne veux pas prolonger outre mesure ce débat entre nous. Cela étant, si cela nous sert à clarifier les choses pour l’avenir, tant mieux ! La directive européenne prévoit précisément que « les produits soumis à accise peuvent faire l’objet d’autres impositions indirectes poursuivant des finalités spécifiques. » En l’occurrence, il s’agit d’un produit dont chacun s’accorde à reconnaître la spécificité. De plus, l’amendement no 249 donne une destination bien précise aux fonds recueillis par la nouvelle contribution qu’il propose. Cela ne me semble pas contraire à la directive. Ce n’est là que mon interprétation, qui vaut ce qu’elle vaut.
Pour le reste, je suis entièrement d’accord avec vous, monsieur le ministre : la lutte contre l’optimisation fiscale exige des dispositions générales. S’il est permis d’envisager – en tout cas de mon point de vue – une taxe spécifique sur un produit spécifique, on ne saurait se servir de ce biais pour répondre à une insuffisance au niveau général du dispositif de lutte contre l’abus de droit ou la fraude fiscale, ce qui me gênerait un peu. Vous me direz que l’important, ce n’est pas l’intention, mais le résultat ; je maintiens toutefois qu’il faut traiter la question de la fraude fiscale de manière globale.
Je serai brève. Je ne suis pas sûre qu’il ne soit pas pertinent, en matière de lutte contre la fraude fiscale, de viser des secteurs d’activité particuliers. Je ne suis pas sûre non plus qu’il soit impossible d’agir au niveau de l’OCDE ou de l’Union européenne pour déjouer les pratiques d’optimisation développés par certains acteurs économiques. Cela étant, il est permis de considérer cet amendement non comme une mesure de lutte contre l’optimisation fiscale, mais comme une surtaxe spécifique à un secteur d’activité, d’autant plus qu’il s’agit pas d’une disposition pérenne, mais d’une mesure à durée limitée.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Si l’on considérait les choses sous cet angle, les difficultés évoquées par M. le rapporteur général et M. le ministre seraient évitées : la surtaxe sur l’essence n’a pas posé de difficulté. Présenté de cette manière, l’amendement de notre collègue Thévenoud serait-il acceptable ?
Sandrine Mazetier vient de le rappeler : il s’agit effectivement d’une contribution exceptionnelle et temporaire. Plusieurs mesures de ce type ont déjà été prises par le passé dans d’autres secteurs. L’article 1er, dans le chapitre premier « Dispositions générales » de la directive de 2008, à laquelle M. le rapporteur général et M. le ministre ont tous deux fait référence, précise bien que « les États membres peuvent, à des fins spécifiques, prélever des taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise ». Je suis donc d’accord avec l’analyse juridique qui laisse entrevoir une possibilité d’euro-compatibilité pour cette contribution exceptionnelle.
Un autre argument a été évoqué, selon lequel cette contribution sera répercutée sur les prix du tabac. Nous avons, en France, un système d’homologation des prix du tabac. Ce système permettra donc de faire porter cet effort sur les marges des entreprises, sans répercussion sur les prix du tabac, car il ne s’agit pas, dans mon esprit, de les augmenter.
Malgré l’augmentation de la fiscalité du tabac, les profits augmentent, et la consommation reste stable. Il faut donc qu’une part de ces profits soit versée au budget de la Sécurité sociale pour mener des actions de prévention en matière de santé publique et de lutte contre le tabac. Je rappelle les sommes en jeu : il s’agit de 150 millions d’euros.
Tout, dans cette affaire, est question de précision et de rigueur juridique. J’ai déjà eu l’occasion de le dire il y a quelques semaines, à propos d’autres amendements portant sur l’abus de droit. Certains sont sympathiques et ont un retentissement médiatique incontestable, mais il faut se demander comment ils pourront passer le filtre du contrôle du Conseil constitutionnel. Il faut surtout se demander comment ils pourront être appliqués de façon opérationnelle, se poser la question de leur efficacité. C’est cela, la préoccupation du Gouvernement.
Vous dites qu’il n’y aura pas de répercussion sur les prix, parce que le ministère du budget a son mot à dire sur la fixation des prix du tabac. Mais le ministère du budget n’a aucun mot à dire : sa compétence en matière de fixation des prix du tabac est une compétence d’homologation, donc une compétence liée. Il homologue seulement après que les industriels ont déterminé le prix.
Oui, monsieur Dumont, c’est bien cela que prévoit la législation.
Je le redis : le ministère du budget ne fixe pas les prix du tabac.
Il fixe pourtant le montant des taxes qui font augmenter les prix du tabac…
Bien entendu, il fixe le montant des taxes, mais les fabricants ont tout loisir de les répercuter ou non sur les prix du tabac. Le ministère n’a, en la matière, qu’une compétence liée. Vous semblez penser, monsieur Launay, que lorsque le législateur augmente les taxes sur le tabac, cette augmentation est mécaniquement répercutée sur les prix par les fabricants. Pourtant M. Thévenoud a dit le contraire à l’instant en soutenant que le Gouvernement pourrait intervenir pour empêcher cette répercussion.
Le Gouvernement, je le répète, ne négocie pas le prix du tabac avec les industriels du tabac. Ce n’est pas ainsi que les choses se passent, et je ne souhaite pas qu’elles se passent ainsi : nous serions en contravention avec les règles qui régissent ces matières. Le Gouvernement homologue les prix préalablement déterminés par les industriels.
Vous constatez déjà, et vous en aurez encore souvent l’occasion, que tout cela n’est pas très facile à faire comprendre et à maîtriser.
L’amendement no 249 n’est pas adopté.
Cet amendement est le premier d’une série de quatre amendements déposés avec Vincent Feltesse et d’autres collègues, qui visent à réformer un crédit d’impôt existant depuis 2008, et qui a montré sa performance : le crédit d’impôt jeux vidéo.
En l’occurrence, l’amendement no 341 vise à adapter ce crédit d’impôt à ce qu’est la réalité de cette industrie dont nous sommes si fiers, et qui représente 5 000 emplois directs et 18 000 emplois indirects. Ce secteur est composé de 250 entreprises, parmi lesquelles des TPE extrêmement performantes et des leaders mondiaux comme Ubisoft, troisième groupe mondial. Cette créativité et cette innovation sont reconnues dans le monde entier.
Malheureusement, alors que 80 % de la production française est exportée, non seulement ces entreprises ont de plus en plus de difficultés à trouver des financements, mais surtout, elles subissent la concurrence de dispositifs fiscaux étrangers plus attractifs…
Le crédit d’impôt canadien, par exemple, s’élève à 37,5 %, contre 20 % en France.
Nous sommes ainsi passés du cinquième au septième rang mondial et nous voulons redresser la barre.
Le Gouvernement et les parlementaires ont mené une réflexion approfondie et la mobilisation sur ce sujet a dépassé nos clivages habituels – il n’est qu’à prendre l’exemple de l’excellent rapport de MM. Gattolin et Retailleau, publié au Sénat en septembre dernier.
Ainsi, le premier amendement, no 341 , vise tout simplement à ne pas limiter aux seuls jeux vidéo dont le coût de création est supérieur à 10 millions d’euros le bénéfice de l’allongement de la durée de prise en compte des dépenses éligibles au crédit d’impôt jeux vidéo de trente-six à soixante-douze mois.
La commission s’est montrée défavorable à l’amendement no 341 . Il est vrai que l’article 14 allonge le délai de prise en compte des dépenses éligibles de trente-six à soixante-douze mois, délai au terme duquel un jeu vidéo doit avoir l’agrément définitif du CNC pour bénéficier du crédit d’impôt. L’amendement propose de supprimer cette condition et donc de doubler le délai pour tous les jeux. Ce serait, d’une part, coûteux et, d’autre part, inadapté à l’intention du Gouvernement, qui est bien d’aider au développement des jeux les plus porteurs.
Je suis de l’avis de ceux qui ont défendu l’amendement no 341 . Au préalable, une petite remarque de forme, monsieur le rapporteur général : ce serait coûteux, avez-vous dit. Mais, par définition, toute mesure qui étend un avantage fiscal est coûteuse…Je ne crois donc pas que cet argument puisse être retenu.
Par ailleurs, aider les grandes entreprises n’est pas forcément dans notre intérêt. Nous avons perdu un grand nombre d’entreprises dans le secteur du jeu vidéo. Actuellement, les difficultés concernent davantage les petites entreprises qui n’ont pas un fonds national qui serait de nature à leur permettre de faire de l’amorçage – du reste, elles attendent du Gouvernement une initiative forte sur ce point. Les grandes entreprises, qui développent les jeux que vous êtes en train d’aider, ne sont pas forcément concernées par ce problème.
Par conséquent, s’il fallait même avoir un effet asymétrique, je pense qu’il faudrait mieux aider les petits jeux que les gros jeux, d’autant que la taille du programme ne se traduit pas forcément par des retombées proportionnelles : certains jeux, développés avec peu d’argent, ont des énormes retombées en termes de ventes. Un soutien à l’amendement no 341 ne serait que justice pour le secteur.
Le rapporteur général a rappelé que l’article 14 prévoit d’allonger la durée de prise en compte des dépenses éligibles de trente-six à soixante-douze mois. C’est évidemment une bonne mesure dans la mesure où développement des jeux fait appel à des techniques de plus en plus complexes : il faut donc donner du temps en temps, comme le disait le Président Mitterrand. Mais je repose ma question, qui sous-tend la démarche proposée par l’amendement no 341 : pourquoi favoriser seulement les plus gros acteurs et exclure les plus petits, qui en ont le plus besoin et qui sont souvent les plus créatifs ?
L’amendement no 341 n’est pas adopté.
L’amendement no 280 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 282 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 283 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 290 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 291 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 313 de M. le rapporteur général est également rédactionnel.
L’amendement no 313 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 14, amendé, est adopté.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement no 449 , tendant à insérer un article additionnel après l’article 14.
Comme vous le savez, le Gouvernement fait actuellement un effort important afin de garantir l’équilibre et la justice de notre système de retraites. Pour accompagner cette réforme, l’amendement proposé par le Gouvernement propose de prolonger d’un an la possibilité actuellement offerte aux adhérents des régimes Préfon et assimilés de déduire de leurs revenus imposables un montant supplémentaire de cotisations correspondant au rachat des droits antérieurs, et ce dans la limite de deux années de cotisations.
La commission n’ayant pas examiné l’amendement no 449 , le rapporteur général s’exprimera à titre personnel : nous avons déjà fait la même chose l’année dernière, nous allons la refaire cette année, et il y a de grandes chances pour que nous la fassions à nouveau l’année prochaine…
Nous avions prévu une sortie « en sifflet » du dispositif et ce sifflet est rallongé tous les ans…Eh bien, allons-y ! Avis favorable…
L’amendement no 449 est adopté.
L’amendement no 342 vise à abaisser le seuil d’éligibilité au crédit d’impôt jeux vidéo de 150 000 à 100 000 euros. En effet, ce seuil ne correspond plus à la réalité du marché : les jeux pour téléphones mobiles et smartphones sont de plus en plus nombreux et coûtent moins cher à développer. De plus, l’essentiel de ces jeux est développé par des petites entreprises, voire des très petites entreprises : le secteur des jeux vidéo en France est composé de petites structures économiques. C’est la raison pour laquelle, avec Vincent Feltesse, Razzy Hammadi, Guillaume Bachelet, Pierre-Alain Muet et Patrick Bloche, nous défendons l’amendement no 342 , sur lequel nous souhaitons avoir l’avis du rapporteur et du Gouvernement.
La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement no 349 .
Très franchement, avec un certain nombre de députés, ici présents, et de sénateurs, nous sommes très inquiets de l’évolution du secteur du jeu vidéo en France, qui est en train de fondre. Nous avons perdu 5 000 emplois depuis une dizaine d’années, et nous subissons véritablement une concurrence très forte de certains pays étrangers.
J’étais l’année dernière à Montréal, où les conditions d’accueil des jeux vidéos ne se résument pas seulement à la fiscalité nationale ou provinciale : il y a également la ville, et les conditions immobilières. Il est difficile de résister à de telles propositions quand on cherche l’endroit le plus adapté pour produire des jeux vidéos.
Vraiment, nous devons faire un effort. Je sais que ce n’est pas le moment de plaider ce genre de choses, mais je crois que si nous ne le faisons pas, nous allons perdre le jeu vidéo et les recettes qui en découlent – sans parler des emplois. Il serait tout de même assez paradoxal de ne pas pouvoir retenir ce secteur d’activité en France, alors que le marché mondial salue la créativité française et sa capacité à produire des jeux vidéo très appréciés – Ubisoft en est, parmi d’autres entreprises, une bonne illustration.
Je pense donc, comme d’autres parlementaires ici présents, que nous devons adapter le dispositif de crédit d’impôt jeux vidéo mis en place il y a plusieurs années, et qui a donné de bons résultats. Le jeu vidéo ayant évolué, il faut en faire de même pour le dispositif. L’amendement no 349 a pour objectif de baisser à 100 000 euros le seuil d’éligibilité. Le seuil de 150 000 euros est trop élevé compte tenu de l’évolution des jeux vidéo les plus vendus aujourd’hui, et qui peuvent désormais être conçus dans de petites entreprises.
M. Thévenoud demandait quel serait l’avis du rapporteur général, il va être satisfait : il aura l’avis du rapporteur général. (Sourires.), le rapporteur général peut difficilement être d’un autre avis que celui de la commission qui a examiné cet amendement ; or celle-ci a donné un avis défavorable aux deux amendements.
En effet, vous proposez d’abaisser le seuil, notamment pour les jeux sur supports mobiles – tablettes ou téléphones –, alors même que l’article précédent proposait de conforter les jeux dits « AAA », c’est-à-dire l’équivalent des gros blockbusters dans le cinéma.
Vous proposez une démarche inverse, et son coût n’est pas évalué. Bien sûr, vous direz que cela rapportera plus que cela ne coûtera. C’est d’ailleurs l’argument que j’entends à chaque fois, dans des domaines aussi divers que les travaux, le logement, etc. : « Vous allez diminuer les recettes de TVA, mais vous verrez, comme il y aura plus d’activité, l’État va gagner de l’argent ! » Je ne suis pas fanatique de ces amendements. La commission les a rejetés. Au Gouvernement de donner maintenant son point de vue.
Le Gouvernement est favorable à ces amendements. Vous proposez d’abaisser le seuil d’éligibilité au crédit d’impôt jeux vidéo exprimé en coût de développement du projet à 100 000 €, contre 150 000 € aujourd’hui. Nous pensons que cette proposition permettra d’inclure davantage de projets dans le champ de ce crédit d’impôt, et donc de soutenir la création.
Nous tenons beaucoup à ce troisième amendement, qui porte toujours sur le crédit d’impôt jeux vidéo. Je voudrais à ce propos corriger une erreur fréquemment commise : les jeux vidéos mentionnent systématiquement l’âge minimum du public auxquels ils sont destinés. La mention « 18 + », pourrait faire croire que le jeu en question est excessivement violent ou pornographique, ce qui n’est absolument pas le cas : l’amendement no 344 exclut évidemment les jeux à caractère violent ou pornographique. Le système européen de classification auquel il est fait référence, très exigeant en informations, a pour but de signifier au consommateur que le jeu en question exige une certaine maturité intellectuelle.
Ces jeux classés « 18 + », répondent à une forte demande, l’âge moyen des joueurs étant de trente-cinq ans. De ce fait, ils sont les plus attractifs à l’international et nécessitent de nombreux emplois car ce sont les plus poussés sur le plan technologique. Il y aurait donc quelque cohérence à ce que cet amendement no 344 vienne compléter l’excellent amendement no 342 que nous venons d’adopter.
La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement no 348 .
La parole est à M. Christian Eckert, pour donner l’avis de la commission et soutenir le sous-amendement no 468 .
Le rapporteur général n’est pas d’accord avec les propos qui viennent d’être tenus. On nous dit en effet que ces amendements, tels qu’ils sont proposés, excluraient les jeux très violents : or ils sont inclus.
Je suis désolé, ce n’est pas la lecture que j’en ai ! Votre amendement est très précisément rédigé et exclut les jeux à caractère pornographique, je vous l’accorde. Mais son objet est justement d’inclure les jeux violents et très violents, sinon je ne vois pas pourquoi on le présenterait !
Je suis donc défavorable à l’amendement no 344 tel qu’il est rédigé. En revanche, pour rassurer tout le monde, je présente un sous-amendement consistant à exclure expressément du crédit d’impôt les jeux de très grande violence. S’il est accepté, je pourrai imaginer que l’on adopte l’amendement ainsi sous-amendé ; mais s’il ne l’était pas, je serais très défavorable à ces amendements, pour les raisons que je viens d’indiquer.
Le Gouvernement est favorable à ces amendements. Je constate d’ailleurs que M. Bloche, dans la présentation qu’il fait de son amendement, l’esprit dans lequel il l’a rédigé, le but qu’il poursuit, évite les difficultés pointées par le rapporteur général.
Pour ce qui concerne le sous-amendement du rapporteur général, qui est une précaution prise par rapport à un problème qui, à mes yeux, ne se pose pas, je préconise la sagesse. Nous sommes donc favorables à ces amendements ainsi sagement et raisonnablement sous-amendés.
Le sous-amendement no 468 est adopté.
Là encore, l’idée est d’adapter notre dispositif à la réalité du jeu vidéo d’aujourd’hui, et de faire en sorte que la création de jeux vidéo se relocalise en France au lieu de partir pour d’autres pays plus accueillants.
L’amendement no 347 vise à élargir l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt qui, pour l’instant, ne prennent pas en compte les dépenses de personnels indirectement affectées à la création du jeu vidéo. Pourtant, certaines fonctions et compétences appelées à concourir à la production sont indissociables du processus de création. Cette restriction conduit à limiter très significativement le périmètre des dépenses éligibles, au détriment de la compétitivité du territoire français par rapport à la concurrence. Il vous est donc proposé d’élargir l’assiette des dépenses éligibles à ces dépenses indirectes mais qui contribuent à la localisation et à la création en France du jeu vidéo.
La parole est à M. Thomas Thévenoud, pour soutenir l’amendement no 343 .
Lors de l’examen de cet amendement no 343 en commission des finances, M. le rapporteur général m’avait demandé d’en préciser la rédaction. Celle-ci a donc été légèrement revue : nous sommes passés de « dépenses liées indirectement à l’activité de création » à « dépenses liées à la création et aux dépenses salariales directes et indirectes qui s’y rapportent », ce qui change tout…J’espère que, grâce à cette nouvelle rédaction, nous pourrons adopter notre amendement no 343 .
Je vais vous donner lecture de l’alinéa de l’article 220 terdecies du code général des impôts qu’il résulterait de l’adoption de votre amendement no 343 , tel que vous l’avez consolidé : seraient éligibles « les dépenses de personnel relatives aux salariés de l’entreprise affectés directement à la création et aux dépenses salariales directes et indirectes qui s’y rapportent, du jeu vidéo… » Convenez que cette formulation est pour le moins difficile à comprendre ! Je suis désolé, je ne suis donc pas favorable à cet amendement.
Par ailleurs, je m’étais interrogé en commission sur ce que l’on appelle des dépenses directes et indirectes liées à la création, fussent-elles salariales, puisque l’on a ajouté cette précision à la version examinée en commission.
Je comprends bien ce dernier point ; mais « directes » et « indirectes », qu’est-ce que cela veut dire ? Est-ce que la femme de ménage contribue à la création de jeux vidéo ?
Alors cette rédaction ouvre la porte à tous les contentieux possibles et imaginables ! Sans compter ce que donne désormais la rédaction qui découlerait de l’adoption de l’amendement no 343 ainsi consolidé…Je ne suis vraiment pas favorable à ces amendements, qui sont plus que flous et plus que mal rédigés d’un point de vue opérationnel.
Je propose, compte tenu des remarques de M. le rapporteur général, qui touchent à des questions de droit importantes, que nous prenions le temps de retravailler ces amendements d’ici à la deuxième lecture pour en préciser le contenu en droit.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 79 rectifié .
En 2006, notre Assemblée a voté à l’unanimité un dispositif de soutien à l’économie des zones d’emploi les plus en difficulté de notre pays. Il s’agissait des zones d’emploi remplissant plusieurs critères objectifs : un taux de chômage extrêmement lourd, supérieur de plus de trois points à la moyenne nationale ; une perte annuelle du nombre d’emplois ; une diminution de la population. Le Sénat a par la suite encore durci ces critères. Depuis le 1er janvier 2007, deux bassins d’emploi bénéficient de ce dispositif : le bassin de Lavelanet dans l’Ariège, et la zone d’emploi de la Vallée de la Meuse dans les Ardennes.
Pour vous donner quelques chiffres sur la force des vents contraires que subissent ces bassins d’emploi, le bassin de Lavelanet comprend environ 25 000 habitants ; depuis 2007, l’ensemble des fermetures d’entreprises qu’il a connues ont représenté une perte de 1 056 emplois.
Le département des Ardennes comprend 283 000 habitants, et perd entre 600 et 800 habitants par an. Le taux de chômage y est supérieur à 13 % – celui de la Bretagne, sur laquelle M. le Premier ministre s’est fortement exprimé cet après-midi dans cet hémicycle et pour laquelle un plan a été annoncé, est de l’ordre de 9 %.
Toujours concernant les Ardennes, si la tendance actuelle n’est pas inversée avant 2020, l’INSEE prévoit que chaque année le nombre de décès sera supérieur au nombre de naissances. Ces deux territoires sont donc, l’un comme l’autre, sur le point de partir en vrille s’il n’y a pas de dispositif de soutien.
Que prévoit le dispositif « bassin d’emploi à redynamiser » ? Un régime d’aides pour les entreprises existantes qui s’étendent, qui investissent, qui localisent des investissements et des emplois sur le territoire, ou bien pour des investissements nouveaux d’entreprises qui s’y créent.
Quelle est l’évaluation du dispositif ? Depuis le 1er janvier 2007, et en dépit de périodes de crises pendant lesquelles aucun emploi n’a été créé, le bilan à ce jour s’établit à 3 198 emplois sur l’ensemble des deux bassins.
Sur le bassin des Ardennes, 6,5 % des salariés sont dans ce dispositif. Imaginez, mes chers collègues, avec un chômage de 13 %, ce que serait ce taux si le dispositif BER n’avait pas existé !
Autre exemple chiffré pour vous montrer l’évaluation et l’impact du dispositif : c’est la première fois depuis des décennies que le département des Ardennes a traversé une crise en ayant un taux de chômage qui augmentait légèrement moins que le taux national : 1,5 point depuis le début de la crise, contre 1,8 point au niveau national.
Mes chers collègues, je suis venu vous demander aujourd’hui une prolongation du dispositif BER. Le présent amendement prévoit donc de conserver un dispositif qui fonctionne et de le prolonger de trois années. Pourquoi trois années ? Comme vous le savez, en matière économique, lorsqu’un projet d’implantation est à l’étude, un certain temps est nécessaire pour que les financements soient rassemblés ; il faut donc un peu de visibilité.
Monsieur le ministre, chers collègues, lorsqu’on est élu de ces territoires, on est face à sa conscience. Chaque jour en se rasant, on ne se demande pas à quelle élection on va être candidat ; on se demande si, comme élu, on fait les bons choix, on fait preuve d’assez de dynamisme, on donne les meilleurs atouts pour nos territoires, afin d’en finir avec ce départ en vrille, ce délitement qu’ils connaissent depuis des décennies. Ce nous vous demandons, c’est de nous donner des moyens pour éviter que ce délitement se poursuive et pour que nos territoires retrouvent un avenir économique.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Christophe Léonard, pour soutenir l’amendement no 314 , deuxième rectification.
Comme cela vient d’être indiqué, il existe dans notre pays des territoires en crise non pas depuis hier, mais depuis trente ans. Ce qui caractérise ces bassins d’emplois, c’est un effondrement économique et démographique sans fin. La situation du département des Ardennes, qui vient d’être évoquée, est particulièrement significative, avec un taux de chômage de 13,2 %, un taux de précarité de 20 %, une proportion des 18-25 ans sans emploi ni autre activité de près de 30 %, et pour corollaire une baisse démographique structurelle de 0,24 % chaque année.
L’amendement no 314 , deuxième rectification, que nous portons avec mes collègues Frédérique Massat et Alain Fauré, vise par conséquent à faire en sorte que de tels territoires en souffrance continuent à bénéficier de dispositifs particuliers de solidarité, et plus particulièrement du dispositif « bassin d’emploi à redynamiser ».
Le 15 novembre dernier, à l’occasion de la présentation par mes soins d’un amendement déposé avec Frédérique Massat et Alain Fauré lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2014, demandant un rapport sur l’opportunité d’une prolongation du dispositif BER, vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, à ce que nous puissions adopter un dispositif stabilisé dans le présent collectif budgétaire. Conformément à votre intention, cet amendement propose la prorogation pour deux ans des dispositions applicables aux bassins d’emplois à redynamiser, avec quelques aménagements du périmètre et des conditions d’éligibilité, en corrélation avec les recommandations d’optimisation de la dépense publique du rapport rendu le 2 octobre dernier par la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale sur la prévention et l’accompagnement par la puissance publique des plans de sauvegarde de l’emploi.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 404 rectifié et donner l’avis de la commission sur les amendements en discussion commune.
Il ne s’agit pas de légiférer pour les Ardennes ou pour l’Ariège, mais pour des bassins d’emploi à redynamiser : nous en sommes tous d’accord. La loi de la République doit être uniforme sur l’ensemble du territoire. Il se trouve que les critères actuellement retenus pour définir ces bassins d’emploi à redynamiser font ressortir deux territoires. J’ose espérer que, compte tenu du caractère un peu sombre de ces critères, il n’y aura pas davantage et que, au contraire, ces deux bassins d’emploi cesseront un jour de répondre aux conditions qui leur permettent pour l’heure de bénéficier d’un certain nombre d’aides spécifiques.
Je propose de sous-amender l’amendement de M. Léonard car les aides à finalité régionale sont en cours de modification, d’évaluation et de reformatage. Je ne souhaite pas, et nous avons suivi ce principe tout au long de la loi de finances rectificative, qu’elles soient prolongées au-delà d’un an, faute de quoi nous serions amenés à changer à nouveau les dispositifs pour tenir compte des décisions qui seront prises en matière d’aides à finalité régionale. C’est pourquoi je propose, à la fin de l’alinéa 3, de substituer à l’année 2015 l’année 2014.
C’est également cette raison qui me conduit à écarter l’amendement de M. Warsmann qui propose de prolonger le dispositif de trois ans et prévoit un champ d’exonérations encore plus large.
Je suis donc favorable à l’amendement no 314 , deuxième rectification, sous réserve de l’adoption du sous-amendement no 404 rectifié de votre serviteur et je demande à M. Warsmann de retirer son amendement au profit de celui de M. Léonard ainsi sous-amendé.
En 2006, je m’étais permis d’aider M. Warsmann pour trouver un système eurocompatible et efficace.
Il y a deux grandes différences entre l’amendement de M. Warsmann et celui de M. Léonard. La première concerne la durée. Celui de M. Léonard, aggravé par le sous-amendement du rapporteur général, limite la prorogation du dispositif à une seule année en raison de la révision des aides régionales. Pour ma part, je partage l’analyse de M. Warsmann : il faut donner une perspective.
En effet, entre le moment où la décision est prise et où elle est mise en place, l’année est déjà écoulée. Je comprends votre argumentation, monsieur le rapporteur général, mais ramener les deux ans de l’amendement Léonard à un an ne me paraît pas raisonnable. Mieux vaut prolonger le dispositif de trois ans, quitte à le revoir au vu du résultat des discussions sur la réforme du régime des aides régionales.
La seconde concerne le contenu. Si j’ai bien compris, les deux amendements maintiennent l’exonération d’impôt sur les sociétés, mais M. Léonard prévoit qu’on perdra le bénéfice de l’exonération si on distribue un sou de bénéfice. Cela me paraît un peu excessif. Par ailleurs, il avait été prévu en 2006 une exonération de taxe professionnelle, devenue CET, que je ne retrouve pas dans l’amendement de M. Léonard.
Si l’on veut que la mesure soit efficace pour nos collègues de l’Ariège et des Ardennes, mieux vaut s’orienter vers l’amendement de M. Warsmann.
J’ai cosigné l’amendement de M. Warsmann que nous avions aidé, M. de Courson l’a rappelé, à mettre en place ce dispositif en 2006. À l’époque, nous avions été très attentifs à son dimensionnement en termes de coût pour les finances publiques.
Si on compare ce dispositif à celui des zones franches urbaines, il ne s’agit pas de mettre en place des exonérations d’impôts d’État, d’impôt sur les bénéfices, et surtout de cotisations sociales. Il ne vise pas des entreprises existantes, mais exclusivement de nouvelles entreprises, de nouvelles activités, ou des entreprises qui s’étendent. Enfin, les exonérations d’impôts locaux, impôts fonciers et CET ne sont pas compensées par l’État, elles sont à la charge des collectivités territoriales.
Rappelons également que les critères ouvrant droit au bassin d’emploi à redynamiser sont extrêmement sélectifs. De ce fait, alors qu’il existe plusieurs dizaines de zones franches urbaines, on ne compte que deux bassins d’emploi à redynamiser : Lavelanet et la vallée de la Meuse sont vraiment des zones en très grande difficulté.
Il faut conserver le dispositif, comme le propose l’amendement de M. Warsmann. Et compte tenu du type d’activités visé, il faut donner une visibilité, monsieur le rapporteur général. On ne peut pas prolonger le dispositif d’un an seulement. Et je préférerais trois ans plutôt que deux.
Le sous-amendement no 404 rectifié , qui a reçu un avis favorable du ministre, propose de ramener à un an la durée de prorogation du dispositif BER. J’en déduis donc que, sur le fond, il est favorable à une prorogation de deux ans du BER réaménagé, mais qu’attentif et soucieux de voter un article 15 homogène, il propose, à titre provisoire, une durée d’un an. J’y vois par conséquent une acceptation anticipée commune du rapporteur général et du ministre à l’amendement de prorogation du BER réaménagé que nous serions amenés, avec mes collègues Massat et Fauré, à soumettre à l’approbation de la représentation nationale l’année prochaine si la situation économique et sociale des territoires concernés l’exigeait. Et je vous en remercie par anticipation…
Ce que vient de dire M. Léonard, qui a travaillé sur cet amendement de façon très méticuleuse, correspond exactement à ce que nous pensons. Nous allons entrer dans une période de fin des aides à finalité régionale et nous devrons les renégocier – cette renégociation interviendra au terme de l’année 2014. Nous proposons de respecter à la fois le principe de l’annualité budgétaire, ce qui n’empêche pas d’avoir des perspectives plus longues, et surtout le cadre des négociations avec l’Union européenne dont les fonds sont susceptibles d’abonder les aides que nous prévoyons d’apporter à ces territoires. Ce calendrier nous conduit à douze, voire quatorze mois ; en procédant ainsi, nous sommes sûrs de pouvoir aller au bout du dispositif avec l’accompagnement de l’Union européenne, puisque nous sommes toujours dans le cadre des calendriers des fonds européens, tout en profitant de cette année, au cours de laquelle nous allons négocier les nouvelles perspectives d’allocation des fonds européens, pour préparer la suite. Il faut y voir une démarche tout à la fois pragmatique et raisonnable, et certainement pas une manière de minorer la volonté que nous avons d’aider ces territoires.
Enfin, du fait de sa rédaction, l’amendement de M. Léonard est plus facile à sous-amender ; c’est la raison pour laquelle je propose à la représentation nationale de l’adopter.
Il ne vous étonnera pas que je sois en phase avec ce que vient de dire le ministre.
Serait-ce rendre service à des entreprises qui se créent que de leur accorder une exonération de charges, notamment sociales, pour une durée de trois ans, alors même que l’Europe pourrait nous imposer de revenir sur ce dispositif ? Imaginons que nous soyons conduits à leur retirer ce type d’exonérations dans le courant de l’année prochaine, voire l’année suivante : ce serait catastrophique pour elles, car leur plan de marche serait totalement bouleversé. Nous nous retrouverions dans une situation analogue à celle que nous avons longuement évoquée tout à l’heure, ce que je ne souhaite pas.
Soyons clairs : la révision des aides à finalité régionale nécessitera peut-être des modifications qu’il faudra prendre en compte. Prolongeons donc d’un an ; ensuite, si cela est possible et compatible avec l’orientation qui sera prise sur ces dossiers, nous pourrions alors proroger le dispositif d’un, deux ou trois ans supplémentaires.
Je ne comprends vraiment pas l’argument juridique : ce dispositif, comme tous les autres, n’existe que sous le contrôle de la norme européenne qui s’impose. Et quelle est la norme européenne aujourd’hui ? Dans les zones d’aides à finalité régionale, le total des exonérations pour un même acteur économique ne peut pas dépasser 200 000 euros tous les trois ans. Tout le monde le sait. Quand on monte un dossier, le porteur de projet est bien prévenu que, même s’il a droit à 300 000 ou 400 000 euros sur trois ans, il sera plafonné à 200 000 euros. On sait aussi que les aides à finalité régionale sont soumises à un régime dérogatoire dès lors que l’investissement ou le nombre de création d’emploi dépassent le maximum prévu, qui est appelé à être modifié – pour l’instant, c’est 15, 20 ou 25 % selon la taille de l’entreprise, que l’assiette correspond soit au montant de l’investissement, soit à deux années de masse salariale chargée correspondant au nombre d’emplois créés. Tout le monde sait que ce régime ne sera prolongé que de quelque mois, et que celui qui suivra n’est pas encore connu.
De ce fait, notre amendement ne sera pas perçu par les acteurs économiques comme un chèque en bois : tout le monde sait très bien que, quelles que soient les dispositions que l’on vote en droit français, on est de toute façon contraint de respecter le principe de concurrence. Tous les acteurs économiques savent bien que les règles de l’Union européenne vont évoluer et qu’il faudra bien les respecter. Nous sommes même l’un des territoires de France où l’on fait le plus attention, dans chaque projet, à ne pas dépasser les ratios fixés, pour le cas où l’Union européenne effectuerait un contrôle.
Le plus important, je le redis, c’est la visibilité. Comme nous avons énormément d’industries traditionnelles sur nos territoires, non seulement nous sommes victimes de pertes d’emplois considérables – j’ai cité les chiffres de Lavelanet et ceux des Ardennes ne sont pas mieux –, mais nous avons d’énormes difficultés à attirer des projets d’investissements dits exogènes. Mais ce type de projet exige de la visibilité ; personne ne viendra s’implanter chez nous si l’on ne sait puis lui dire ce qui se passera après un an. Il n’est pas possible d’ouvrir une entreprise dans un délai aussi court.
Enfin, personne dans les Ardennes ne comprendra que l’on a demandé aux députés de la majorité de l’Ariège et des Ardennes de raboter le dispositif. À l’origine, l’exonération était prévue pour sept ans. Premier coup de rabot, on est passé à cinq ans. Deuxième coup de rabot, les exonérations accordées aux collectivités locales sont supprimées. Troisième coup de rabot, l’exonération d’impôt sur les sociétés est conditionnée à la non-distribution de dividendes, ce qui fait qu’un projet important que la préfecture suit depuis deux ans dans mon département va être terriblement fragilisé. Cinquième coup de rabot ce soir, dans l’hémicycle : la prorogation du dispositif est ramenée à un an !
Mes chers collègues, comparaison n’est pas raison. Nous, on n’a pas mis de bonnet, on n’a pas cassé d’infrastructures, on est simplement en difficulté. On ne demande rien de plus que la prolongation de ce qu’on a. Le jour où le Gouvernement annonce un pacte d’avenir pour la Bretagne, et il a raison, on veut nous raboter le peu que nous avons. Ce n’est pas compréhensible. Nous ne demandons rien de plus que le maintien de ce qui existe, rien de plus que de nous laisser cet oxygène qui nous permet d’essayer de garder la tête hors de l’eau !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur Warsmann, je ne voudrais pas qu’il y ait de malentendu entre nous. Soyons clairs : celui qui sera éligible au dispositif dans l’année qui vient bénéficiera de l’exonération pendant cinq ans. Or à vous entendre, le dispositif semble ne valoir que pour un an, et l’on ne bénéficierait plus de rien ensuite.
Peut-être ai-je mal compris, mais je me permets d’éclairer l’Assemblée sur ce point : celui qui remplira les conditions pour entrer dans le dispositif en 2014 en bénéficiera pendant cinq ans. L’argument de la lisibilité ne tient pas. Sur le reste, les questions européennes et les contraintes, nous nous sommes longuement exprimés, je n’y reviens pas. Au demeurant, si vraiment il fallait prendre des mesures pour une durée longue, pourquoi n’avez-vous prévu que deux ans à la dernière prorogation ?
Nous pouvons tous tomber dans le misérabilisme. Moi, je suis élu lorrain : nous avons perdu deux cent mille emplois sidérurgiques, nous subissons une concurrence déloyale pas possible de la part de notre voisin luxembourgeois : je peux faire du Zola…
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Cela fait plusieurs années que je me dis qu’une zone franche transfrontalière ne serait pas totalement imbécile, mais au lieu d’inventer des dispositifs spécifiques qui ne sont ni plus ni moins que des niches – qu’on le veuille ou non, soyons réalistes !
Le dispositif sera prolongé pour un an et ses effets dureront cinq ans pour ses bénéficiaires.
Je ne sens pas de désaccords fondamentaux entre les deux parlementaires ardennais et je ne sens même pas de désaccord entre eux et nous. Finalement, monsieur Warsmann, ce que vous venez de dire à l’instant sur la qualité du dispositif et son caractère eurocompatible est très juste : vous avez noté vous-même que nous arrivons à la fin d’un dispositif et que nous allons renégocier l’ensemble des aides à finalité régionale.
La préoccupation du Gouvernement est double. Nous respectons un principe d’annualité budgétaire ; par conséquent, lorsque nous nous engageons, c’est en ayant la certitude d’être en terrain solide. Dans le passé, vous avez pris des engagements pluriannuels qui se déclinaient ensuite en annualités, mais vous étiez dans un cadre où les aides à finalité régionale avaient été négociées pour une durée longue, ce qui vous donnait de la visibilité. Nous ne sommes plus dans cette situation. Nous savons que l’an prochain, nous allons devoir renégocier les aides à finalité régionale, pour une période qui elle aussi sera longue : alors seulement, nous aurons de la visibilité.
La proposition que je vous fais consiste à adopter l’amendement de M. Léonard, en ayant à l’esprit le fait que nous allons entrer dans une nouvelle période de négociation. Si, entre la première et la deuxième lecture, par un travail que les Ardennais feraient en commun, vous arrivez à trouver des éléments d’amélioration, je suis à votre disposition pour en parler avec vous. Je l’ai fait avec le député Léonard qui s’est beaucoup engagé. Vous-même, par le passé, avez joué un rôle similaire lorsque vous étiez dans la majorité.
Mais ne faisons pas de débats qui se limiteraient à dresser les uns contre les autres. Ce n’est pas notre état d’esprit, je le dis très clairement. Notre état d’esprit, c’est de profiter de cette année pour consolider le dispositif des aides à finalité régionale. Une fois que nous aurons la visibilité nécessaire, nous aurons l’occasion de débattre de cette question, à la faveur des prochaines lois de finances.
Je veux seulement exprimer une inquiétude : comme l’a très bien dit Jean-Luc Warsmann, le dispositif est quand même restreint, par rapport à ce qu’il était en 2006. Voilà qu’on le restreint encore en séance, pour réduire sa visibilité à une seule année. Je comprends parfaitement vos raisons, monsieur le ministre : le dispositif européen d’aides va être révisé. On sait cependant que cela prend du temps : si le processus s’engage maintenant, il n’aboutira probablement pas avant 2015. Ce qui me gêne, c’est que ce dispositif, aux avantages réduits et reconduit pour un an seulement, est du coup rendu beaucoup moins attractif pour les entreprises susceptibles de s’installer à Lavelanet ou dans les Ardennes. Des dispositifs autrement plus coûteux et générateurs, je peux en témoigner dans ma circonscription, d’effets d’aubaine, comme les zones franches urbaines, ont à chaque fois été prorogés sur des périodes de trois à cinq ans…
Le Gouvernement montre l’intérêt qu’il porte au dispositif BER, dont chacun souhaite qu’il continue de fonctionner. D’autant qu’il n’est pas très coûteux. Vous avez entendu les chiffres donnés par Jean-Luc Warsmann : je trouve qu’ils sont assez remarquables. En termes de rapport coût-efficacité, on peut dire qu’il a bien fonctionné.
Je voudrais également apporter mon soutien à Jean-Luc Warsmann pour son amendement. Il a parlé avec un coeur et une énergie formidables de nos territoires qui souffrent le plus.
Monsieur le rapporteur général, nous n’allons pas nous lancer dans un concours en jouant les Zola : moi, j’ai simplement perdu 25 % des emplois sur deux bassins de ma circonscription et j’ai animé trois plans de revitalisation économique.
Lorsque vous avez 20 000 mètres carrés de locaux libres…
C’est un combat de tous les instants. Je vous le dis avec passion : lorsque vous devez présenter une stratégie à des chefs d’entreprise, il est indispensable de pouvoir le faire sur plusieurs années. Lorsqu’en 2008 ce krach industriel s’est produit, il s’est écoulé dix-huit mois entre la décision d’arbitrage du Premier ministre et la zone AFR. Je vous demande juste de réfléchir à cela : dix-huit mois avant qu’on puisse dire aux entreprises quels dispositifs d’accompagnement fiscal ou social pourraient être mis en place. La visibilité sur trois ans qui est réclamée ne me paraît donc pas superflue. Du reste, monsieur le rapporteur général, vous-même le dites très souvent : seule la stabilité fiscale et la lisibilité à long terme permettent d’apporter une réponse.
Quelquefois, nous sommes dos au mur, dans ces bassins d’emploi qui n’ont aucune autre possibilité de diversification, surtout lorsqu’ils sont encadrés par des métropoles qui, par définition, vampirisent tout. J’ajoute un dernier mot : dans ces territoires mal irrigués, même la bataille du numérique ne pourra être gagnée si nous n’avons pas le soutien financier. Lorsque vous cumulez ces inconvénients, vous êtes dans une difficulté considérable.
Soyez à l’écoute : il ne s’agit que de deux bassins d’emploi, monsieur le rapporteur général. Tout à l’heure, nous avons su apporter des réponses à d’autres problèmes. Un geste positif honorerait la représentation nationale.
Je veux rappeler d’où nous partons et où nous allons. Le 15 novembre dernier, proposant un amendement au dispositif des bassins d’emploi à redynamiser, vous avez évoqué, monsieur le rapporteur général, et à juste titre, les conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale, qui a publié un rapport. Ce rapport, dont les auteurs n’étaient pas tous de la majorité, s’est montré assez sévère sur le dispositif BER.
Cela dit, je voudrais saluer l’écoute, la compréhension et le soutien du Gouvernement, pour des territoires comme les Ardennes ou l’Ariège qui bénéficiaient jusqu’à présent du dispositif BER. Malheureusement, compte tenu de la situation délicate de la France, rien ne dit aujourd’hui que d’autres territoires ne pourraient pas passer le filtre du dispositif. La chambre de commerce et d’industrie des Ardennes a réalisé, quant à elle, un bilan du dispositif BER. Indépendamment des points très positifs de ce dispositif, que Jean-Luc Warsmann a soulignés tout à l’heure et qui ont permis la reprise d’activité et le maintien de l’emploi – environ 3 000 emplois dans le département des Ardennes –, il n’en demeure pas moins que des effets d’aubaine ont été notés, qui sont le corollaire de ce type de dispositif. Il appartient aux législateurs soucieux de la dépense publique que nous sommes de les corriger ou de les réduire. Enfin, les exonérations locales étant laissées à la décision des collectivités locales, certaines s’y refusaient, par manque de capacités financières, créant du coup un trou dans la raquette, ce que l’amendement de mes collègues permet d’éviter.
En conclusion, j’ai noté la disponibilité du Gouvernement dans les quinze jours qui nous séparent de la deuxième lecture pour retravailler le sujet dans deux directions principales. J’ai bien entendu la remarque sur la non-redistribution des dividendes ; peut-être conviendrait-il de réaménager ce critère dans le cas de porteurs de projets qui seraient des personnes physiques ou de petites entreprises. En outre, une fois sériés les effets d’aubaine, il faudrait étudier la possibilité d’accompagner des entreprises déjà installées sur le bassin à redynamiser et présentant des perspectives de développement.
Monsieur le ministre, j’ai suivi attentivement ce débat. Je voudrais des précisions. Le BER n’est pas sur la même thématique que les aides à finalité régionale : il s’agit bien d’un dispositif spécifique. Que vous vouliez revoir l’ensemble du dispositif AFR dans l’avenir, très bien, mais rien ne dit qu’il sera redéfini avant 2015. Peut-on imaginer que le dispositif BER, avec l’ensemble des avantages qui lui sont liés, sauf à revoir la question de la distribution de dividendes dans certains entreprises, soit maintenu et prorogé au moins d’un an, avec effet sur cinq ans ?
Je soutiens également l’amendement de mon collègue Warsmann. Pour commencer, il faut savoir que certains départements ont besoin d’aides de l’État. Monter une entreprise, dans des zones franches ou dans des zones défavorisées, nécessite une certaine sécurité. Quand un chef d’entreprise investit dans un bâtiment, dans du fonctionnement, croyez-moi, ce n’est pas en un an qu’il peut le faire.
Je me suis exprimé et je reste persuadé qu’un prolongement d’un an ne procure par la visibilité nécessaire à tout projet d’implantation externe. Je pense que l’amendement que Gilles Carrez m’a fait l’honneur de cosigner est le meilleur. Cela étant, j’ai bien noté, monsieur le ministre, vos paroles d’ouverture.
Dans l’hypothèse où, par un grand malheur, l’Assemblée limiterait ce soir à un an la prolongation du dispositif, ai-je bien entendu que le Gouvernement serait favorable à une prolongation pluriannuelle le jour où les nouvelles réglementations européennes seraient négociées, ce qui, pour le coup, nous rendrait de la visibilité ? Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse, qui est vraiment très importante à ce stade du débat.
On est sûr de ne jamais participer à ces débats pour rien
Sourires
plus l’heure avance, plus on est interpellé !
Je me suis exprimé clairement, monsieur le député Warsmann. Si nous attendons, ce n’est pas pour abandonner ces territoires en difficulté. Je me suis rendu dans les Ardennes où vous avez eu les uns et les autres la gentillesse de m’accueillir. Vous connaissez mon attachement à cette région que je connais bien.
Oui, lorsque nous disposerons de la définition des aides à finalité régionale et que ces dernières auront été négociées, le Gouvernement – qui souhaite que ces territoires en souffrance soient accompagnés, qu’ils puissent construire leurs projets de développement et que ceux-ci aboutissent – réunira à leur demande l’ensemble des parlementaires et élus du territoire afin de travailler ensemble dans un cadre pluriannuel, bien entendu.
L’amendement no 79 rectifié n’est pas adopté.
Le sous-amendement no 404 rectifié est adopté.
L’amendement no 314 deuxième rectification, sous-amendé, est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 158 .
L’amendement no 158 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 159 de M. le rapporteur général est également rédactionnel.
L’amendement no 159 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 15, amendé, est adopté.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 245 .
L’amendement no 245 propose de relever le seuil d’exonération des distributeurs sur le TST-D – actuellement fixé à 10 millions de chiffre d’affaires – à 150 millions afin de ne pas pénaliser les petits opérateurs déjà durement touchés par le bouleversement du marché de détail de la téléphonie mobile.
Vous proposez donc de relever le seuil d’exonération des distributeurs sur la TST-D en le passant de 10 à 150 millions afin de ne pas pénaliser ceux que l’on appelle les MVNO – dont je viens de découvrir l’existence, ce n’est pas une maladie ! –, autrement dit ces nouveaux opérateurs comme M6 Mobile ou La Poste Mobile.
Je ne vois pas pourquoi ces derniers devraient échapper à la TST-D ce qui, de surcroît, pénaliserait les recettes du CNC, cher au coeur de nombre de nos collègues et au vôtre, monsieur de Courson, j’en suis sûr. Avis défavorable.
Le second argument, monsieur le rapporteur général, ne tient pas et vous savez pourquoi : en raison du plafonnement des recettes.
Mais en l’espèce, il ne change pas : votre second argument tombe.
Reste le premier. Nous avons intérêt à développer ces MVNO, bien sûr, car ils assurent la diversité et une véritable concurrence. Si le seuil, à l’époque, avait été fixé à 10 millions, c’est qu’il n’y avait personne entre les très petits opérateurs et les très grands. Or, aujourd’hui, il y a les moyens.
L’amendement no 245 n’est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 220 .
L’amendement no 220 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 16, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 218 .
La taxe sur les services de télévision a été majorée par la loi de finances de 2011 pour compenser le taux de TVA réduit alors applicable aux abonnements de télévision payants. Désormais, comme le taux de TVA sur les abonnements payants n’est plus ce taux réduit mais le taux intermédiaire, nous avions proposé dans un premier temps de supprimer cette taxe sur les services de télévision.
Sur les conseils et l’avis du rapporteur général, en commission, nous avons modifié cet amendement pour proposer non la suppression de la taxe mais la modification de son taux en le faisant passer de 5,25 % à 3,75 % en espérant qu’il recueillera ainsi un avis favorable.
Cette proposition est en effet un peu moins brutale, si j’ose dire, que l’amendement présenté en commission, lequel, à l’instar de celui qui nous avait été soumis en loi de finances initiales, visait purement et simplement à exonérer de cette taxe Canal Plus – seul opérateur concerné en la circonstance.
Vous proposez maintenant de réduire la taxe. L’estimation, me dit-on, se situerait entre 6 et 8 millions pour Canal Plus, mais autant de moins qui disparaîtraient des ressources du CNC. Parallèlement, l’article 16 du PLFR contient une disposition majorant mécaniquement les crédits du CNC de l’ordre de 4 millions d’euros. Faites le bilan…
La commission n’a examiné cet amendement que dans le cadre de l’article 88. J’y ai été quant à moi plutôt défavorable, mais j’ai bien entendu les arguments ; il est possible de regarder ce qu’il y a lieu de faire sur ce point.
Madame la députée, vous proposez de réduire la majoration de TST sur la dernière tranche du barème de la taxe due par les distributeurs de services de télévision qui s’applique aux éditeurs de services de télévision s’auto-distribuant. Vous souhaitez ramener la majoration de 5,25% à 3,75%.
Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. En effet, tant le principe que le niveau de cette majoration ont été prévus par le législateur afin de tenir compte de la situation particulière des éditeurs qui s’auto-distribuent et qui justifie pleinement la différence de traitement fiscal que vous remettez en cause.
Ces éditeurs qui s’auto-distribuent sont, eu égard à l’intégration de leur double activité d’éditeur et de distributeur de services de télévision, dans une situation économique qui favorise leur développement. En tant qu’éditeurs ils bénéficient en effet d’un accès direct aux programmes dont ils acquièrent les droits d’exploitation, notamment, ceux aidés par le CNC, ce qui leur permet de commercialiser auprès des consommateurs une offre de contenus dont ils ont directement la maîtrise, à la différence des autres distributeurs.
Dans sa décision du mois de décembre 2010, le Conseil constitutionnel a d’ailleurs reconnu la constitutionnalité de la majoration de TST pour les éditeurs qui s’auto-distribuent – et non pas par rapport au taux de TVA différencié comme cela est indiqué dans l’exposé des motifs de votre amendement. En conséquence, il n’y a pas lieu de réduire la majoration de TST applicable aux éditeurs qui s’auto-distribuent.
Au bénéfice de ces explications, je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, je serai obligé d’en préconiser le rejet.
Exceptionnellement, je ne le retirerai pas malgré la demande et les explications extrêmement percutantes de M. le ministre.
Que fait l’article 16 du PLFR ? Il abonde le CNC. Nous passons notre temps à réfléchir à la fiscalité et aux taxes affectées, à retirer exceptionnellement de l’argent au CNC puis à lui en redonner, comme à l’article 16.
L’opérateur dont nous parlons est confronté à une situation de concurrence déloyale, totalement déloyale, de la part d’un autre opérateur qui se livre à un dumping sur des chaînes de sport. Sans le sport, ce service de télévision payant qu’est Canal Plus se cassera la figure. Or cette chaîne finance le cinéma et la production audiovisuelle.
Chacun parle de ses bassins d’emplois ; mais en région Île-de-France, ce secteur d’activité-là, ce n’est pas rien. Une étude récemment publiée démontre à quel point la production audiovisuelle – on aurait aussi pu parler des jeux vidéos – pèse beaucoup plus lourd dans l’économie de la première région d’Europe et, donc, de France, que le secteur du bâtiment ou d’autres secteurs d’activité.
Cet acteur, je le répète, est confronté à une concurrence absolument déloyale et à un dumping des tarifs de chaînes de sport, que l’on a refusé de prendre en compte dans le PLF. Dont acte. Alors qu’en PLFR, l’article 16 fait explicitement référence à la concurrence déloyale d’opérateurs n’opérant pas en France, il serait vraiment dommageable de ne pas en tirer les conséquences en introduisant immédiatement après l’article additionnel proposé par cet amendement. Nous en avons modifié la rédaction : nous ne proposons plus de supprimer définitivement la taxe, mais seulement d’en limiter le taux. Il la rend ainsi moins rentable pour le CNC, mais sans pour autant le priver des ressources induites.
Madame Mazetier, je veux soutenir votre amendement. Lors de la discussion de la LFI, vous aviez présenté un amendement visant à maintenir le taux réduit de TVA, ce qui n’était pas possible. Je suis néanmoins parfaitement conscient des problèmes de concurrence que vous avez évoqués et je trouve que l’amendement no 218 rééquilibre un peu les choses à travers le bon vecteur.
C’est en effet une bonne solution que celle qui consiste à baisser un peu la TST car elle profite au CNC ; or chacun sait que Canal Plus a des engagements très importants dans le domaine de cinéma. Je trouve donc que cela est un bon moyen. Six ou huit millions sont « déplacés », ce qui n’est pas à la hauteur des faux espoirs qui avaient été entretenus par le maintien de la TVA à taux réduit, mais cet amendement me paraît raisonnable. Pour ma part, je le voterai.
Je veux m’associer aux propos du président de la commission des finances : nous serons ainsi deux présidents de commission à plaider pour un bon équilibre dans le financement du cinéma. Il s’agit en réalité d’un problème de vases communicants…
Pour financer le cinéma, on peut passer soit par le CNC, soit par Canal Plus, dont c’est l’une des missions essentielles – c’est même pour cela que la chaîne a été créée.
Lors de la première lecture du projet de loi de finances pour 2014, je m’étais permis de présenter, avec plusieurs de mes collègues, un amendement plaidant le taux de TVA réduit pour Canal Plus, qui n’a pas été adopté. Il ne s’agit pas ici du même ordre de grandeur, puisque l’amendement de Sandrine Mazetier et Thomas Thévenoud est un amendement à 8 millions d’euros, alors que l’adoption du taux de TVA réduit pour Canal Plus aurait représenté un enjeu de 80 millions d’euros. Canal Plus ne va donc pas complètement s’y retrouver.
D’aucuns diront que c’est tout de même de l’argent en moins pour le CNC, mais il s’agit seulement de 8 millions d’euros. Comme nous avons donné récemment des signes extrêmement positifs au CNC, et que nous continuons à le faire, notamment au travers de cet article 16, je pense que cet amendement a sa logique et qu’il mérite d’être voté.
Juste un mot, madame la présidente, pour appuyer la démarche qui a été la nôtre, avec Sandrine Mazetier, et que viennent de soutenir à l’instant M. Carrez et M. Bloche. La chaîne qui a été citée est confrontée à une concurrence déloyale sur le marché de l’audiovisuel, notamment en matière de droits sportifs. Notre amendement n’a d’autre but que de permettre à cette chaîne française de poursuivre son développement et sa marche en avant. C’est ce que nous proposons, avec une approche relativement équilibrée des choses, pour ne pas dégrader non plus le financement du cinéma français.
L’amendement no 218 est adopté.
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Proposition de loi permettant le libre choix des maires concernant les rythmes scolaires dans l’enseignement du premier degré ;
Proposition de loi autorisant l’ouverture des commerces la nuit dans des zones touristiques ;
Proposition de loi visant à lutter contre l’ambroisie.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 5 décembre, à une heure trente.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron