La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour le groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, nos policiers sont contraints d’aller dans la rue pour appeler votre attention. Ils étaient en détresse, ils sont désormais en colère. Les jours passent, leur mobilisation n’a pas faibli, et ce dans toute la France. Ils commencent même à être rejoints par les pompiers, du jamais vu !
Car le constat est sans appel : ils sont attaqués par des délinquants qui, insuffisamment punis, se sentent intouchables, et ils travaillent dans des conditions dégradées.
Le commissariat d’Annemasse, par exemple, compte 116 policiers, effectif le plus bas depuis quinze ans, alors qu’il en faudrait 130 compte tenu de sa situation transfrontalière, si spécifique. En raison du coût de la vie, les postes ne sont pas pourvus. Ce n’est pourtant pas faute de vous avoir proposé d’attribuer une prime de vie chère aux fonctionnaires de cette zone !
Nous venons de découvrir vos propositions – tardives –, révélées aujourd’hui dans la presse. Bien des revendications des policiers n’ont pas été prises en compte.
Les policiers réclament en effet un assouplissement des règles de la légitime défense ainsi que le rétablissement, pour les agresseurs de membres des forces de l’ordre, des peines plancher que nous avions créées et que vous vous êtes empressés de supprimer !
Il est vrai qu’avec vous, le terrain est miné. Comme toujours, vous allez nous renvoyer vers le quinquennat de Nicolas Sarkozy,
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain
voire au précédent, celui de Jacques Chirac, en réinterprétant les chiffres ! Quand on ne sait pas quoi répondre, il est toujours plus facile d’accuser son voisin !
Le problème, c’est qu’entre mai 2012 et aujourd’hui, l’ensemble des indicateurs relatifs à l’insécurité est en hausse. Les vols simples ont ainsi augmenté de 14 % ; les atteintes volontaires à l’intégrité physique, de 12 %. La seule courbe qui s’inverse sous votre quinquennat, c’est celle de la population carcérale. Quelle réussite !
Entre 2007 et 2012, nous avions lancé plusieurs réformes pour moderniser et optimiser l’action de la police, ainsi qu’une réforme pénale ambitieuse. Pour nous, une politique de sécurité qui ne reposerait que sur les effectifs serait particulièrement inefficace.
Monsieur le Premier ministre, le président Hollande rencontre aujourd’hui les représentants de la police. Comme toujours, vous expliquez être dans une démarche de dialogue. Nous préférerions aujourd’hui vous voir enfin dans une démarche d’action.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la députée, vous indiquez qu’une politique efficace en matière de sécurité ne peut pas se réduire à la création d’emplois. J’imagine que c’est pour cette raison que vous avez soutenu un gouvernement qui en a supprimé 13 000 en cinq ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
De même, selon vous, une bonne politique de sécurité est une politique qui n’attache pas d’importance aux moyens alloués aux forces de l’ordre. C’est sans doute pour cette raison que vous avez soutenu un gouvernement qui a diminué de 15 % les crédits de fonctionnement de la police et de la gendarmerie !
Vous nous interrogez, madame la députée, sur le plan d’action qui est le nôtre. Je vous rappellerai d’abord ce que nous avons fait, avant de vous dire vers quoi nous nous orientons, au terme du dialogue que nous avons engagé avec les policiers.
D’abord, nous avons recréé des emplois – 9 000 – au sein de la police et de la gendarmerie. Ces 9 000 emplois ont permis de rehausser significativement le niveau des effectifs dans les territoires connaissant un déficit considérable de policiers et de gendarmes. Cela a été le cas par exemple en Seine-Saint-Denis, où je suis allé annoncer la création de 300 emplois supplémentaires. C’est le cas en Essonne, où j’ai annoncé la création de 200 emplois supplémentaires.
Vous me dites qu’il y a des territoires où l’on n’a pas encore rattrapé l’effet de la suppression d’effectifs. Bien entendu, car sil l’on peut supprimer très rapidement 13 000 emplois, il est beaucoup plus long de les rétablir ensuite.
Nous avons aussi donné des moyens supplémentaires à la police et la gendarmerie. Je rappelle que nous avons rééquipé tous les pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie – PSIG – et toutes les brigades anti-criminalité de la police.
J’annoncerai tout à l’heure, aux côtés du Président de la République, un ensemble de mesures dont on ne sait rien – avant de les critiquer, madame la députée, attendez qu’elles soient annoncées ! Elles ont pour principales orientations de renforcer le plan d’équipement, de déterminer les tâches indues à alléger et de répondre à certaines attentes, notamment en ce qui concerne la légitime défense.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Guillaume Bachelay, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le Premier ministre, en septembre, le chômage a diminué fortement. Un mouvement général se confirme, une dynamique s’installe, par-delà les variations de mois en mois : ce sont des femmes et des hommes qui ont pu retrouver un travail et une perspective. Plus de 66 000 concitoyens concernés, c’est la diminution la plus importante constatée sur un mois depuis vingt ans !
Voilà trois trimestres que le nombre d’inscrits à Pôle emploi en catégorie A se réduit : cela ne s’était pas vu depuis huit ans. Depuis le début de l’année, le nombre de demandeurs d’emploi sans activité a baissé de 90 000.
Cette tendance fait écho à d’autres évolutions positives – je pense à la progression des embauches sous contrat à durée indéterminée et à celle des investissements. Les efforts de la nation produisent des effets…
…et les choix faits depuis 2012, des résultats.
Choix de la mobilisation pour l’emploi, avec, entre autres, « l’embauche PME » : annoncée au début de l’année par le chef de l’État, cette aide a fait l’objet, à ce jour, de 800 000 demandes, ce qui est bon pour les recrutements durables.
Choix de la production, avec le soutien à la compétitivité des entreprises engagé par le Gouvernement, pour qu’elles puissent investir, exporter, embaucher.
Choix de l’innovation, avec, entre autres, la banque publique d’investissement, les investissements d’avenir, les transitions écologique et numérique.
Et puis choix de la qualification, avec, notamment, le demi-million de formations en direction des chômeurs de longue durée et l’apprentissage.
La bataille contre le chômage est engagée et elle se poursuit pour nos compatriotes qui sont encore trop nombreux à le vivre. Pour eux, nous sommes déterminés et mobilisés.
Monsieur le Premier ministre, comment le Gouvernement entend-il conforter, prolonger, amplifier l’action pour l’emploi ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur Guillaume Bachelay, vous l’avez souligné : 66 300 chômeurs de moins,…
…c’est un chiffre historique ! Cela représente, vous l’avez rappelé, 90 000 chômeurs de moins depuis le début de l’année.
Au-delà des sauts statistiques, au-delà des publications mensuelles, qui donnent lieu régulièrement à commentaire – quand le chômage augmente, ce serait à cause de la politique du Gouvernement, quand le chômage baisse, ce serait la conjoncture ou que nous aurions remis en cause ladite statistique, mais non ! –, au-delà donc de tout cela, ce qui compte, vous l’avez parfaitement rappelé, c’est la tendance. Et la tendance, elle s’appuie sur des faits objectifs : la création de 120 000 emplois et une croissance, trop faible encore, mais qui est revenue – or, comme nous l’évoquions hier avec Michel Sapin, avant, pour créer de l’emploi, pour que le solde soit positif, il fallait au moins 2 % de croissance, aujourd’hui, c’est moins. Notre politique doit donc viser à soutenir cette croissance. Je n’ignore rien bien sûr de la conjoncture – je pense à la baisse de l’euro, que nous avons souhaitée, au niveau des taux d’intérêt, au niveau des prix du pétrole,…
…mais reconnaissons aussi que la conjoncture internationale et européenne n’est pas non plus forcément très porteuse et qu’une partie de notre croissance est aussi portée par la demande intérieure.
On note aussi les résultats, en effet, d’une politique économique. Je pense au pacte de responsabilité et de solidarité, à la baisse du coût du travail, au CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, dont on a beaucoup parlé ici, à l’Assemblée nationale ; celui-ci a évidemment dans un premier temps favorisé la reconstitution des marges des entreprises, ainsi que le pouvoir d’achat, c’est-à-dire la hausse des salaires, mais aujourd’hui, nous voyons bien, les uns et les autres, sur le terrain, où nous en avons moult exemples – j’ai encore eu l’occasion de le vérifier l’autre jour à Marmande, dans le Lot-et-Garonne –, que, oui, le CICE permet la création d’emplois.
Politique de soutien à la compétitivité, donc. De tout cela, nous parlons avec modestie et humilité, il ne peut en être autrement, car nous pensons à tous ceux qui sont sans emploi depuis longtemps, nous pensons aux jeunes qui ne réussissent pas à trouver un travail, bref, à ce chômage de masse que nous connaissons depuis trente ans. Il s’agit donc plutôt d’une invitation à poursuivre.
Comment poursuivre ? Là encore, vous avez dit l’essentiel. D’abord, bien sûr, en soutenant la création d’emplois ; par exemple, avec le CICE, que nous avons proposé d’étendre au secteur associatif à partir du 1er janvier prochain.
Eh bien, pourquoi pas ? Comme quoi il y a des gens qui commencent à être convaincus qu’il faut aller dans le sens du CICE ! Je m’en félicite.
Et puis, il y a la question de la formation. Le plan « 500 000 formations supplémentaires », présenté avec toujours beaucoup de pugnacité par Myriam El Khomri et Clotilde Valter, n’a pas donné aujourd’hui encore son plein effet. Or ce travail, mené avec les régions, qui se sont engagées, doit lui aussi se poursuivre, car pour leur retour à l’emploi, ces jeunes sans formation, ces ouvriers non qualifiés, ces femmes qui ne sont pas qualifiées, ces citoyens qui vivent dans les quartiers populaires ou dans les zones rurales éloignées, ont besoin de cette formation, de cette qualification. De ce point de vue, je me réjouis que les chiffres de l’apprentissage aillent de nouveau dans le bon sens.
Donc soutien, et, parce que la croissance elle-même ne sera plus au niveau que nous avons connu, oui à la révolution numérique, oui aux emplois verts, oui à une croissance durable. Voilà ce que nous devons accompagner !
Enfin – et vous le savez bien, vous qui connaissez parfaitement ces dossiers, monsieur Bachelay –, politique de soutien à l’industrie, avec l’industrie du futur, l’investissement, le crédit d’impôt recherche ; des études indépendantes l’ont montré : nous avons stoppé la désindustrialisation de ce pays.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Au-delà des dossiers emblématiques comme Alstom ou STX, c’est tout le tissu industriel que nous devons accompagner, grâce à l’investissement, au numérique, à l’industrie du futur. C’est ainsi que la France sera au rendez-vous de la croissance et de l’emploi !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, depuis plusieurs nuits, des policiers manifestent, partout en France, contre la dégradation de leurs conditions de travail. Toutes et tous ici, nous comprenons leur colère, et je voudrais leur dire notre admiration pour leur engagement sans faille au service de notre sécurité.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, du groupe Les Républicains et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Ils dénoncent le manque de moyens humains et matériels et ils attendent le paiement des heures supplémentaires effectuées. Ils ne supportent plus de ne pas pouvoir se défendre face aux violences dont ils sont victimes, et de voir les délinquants qu’ils interpellent trop souvent relâchés.
Je le dis clairement : avec la majorité précédente, nous avons fait l’erreur de diminuer les moyens donnés à la police.
« Ah ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Néanmoins, vous le savez, les créations de poste que vous avez décidées tardent à se concrétiser et il faudra aller beaucoup plus loin. J’ajoute que le malaise des policiers dépasse la seule question des moyens. Nos policiers attendent d’être soutenus au quotidien – mais comment faire respecter leur autorité, alors même que François Hollande fragilise chaque jour un peu plus l’autorité de l’État ?
Je sais que vous en êtes conscient, monsieur le Premier ministre, vous qui avez toujours soutenu nos forces de sécurité et qui, avec Bernard Cazeneuve, tentez de préserver l’autorité de l’État.
Les policiers attendent aussi une réponse pénale plus ferme ; c’est indispensable pour que la défiance à l’égard de la justice se transforme en confiance.
Alors, il faut leur donner des signaux clairs. Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : êtes-vous prêt à aligner les conditions d’exercice de la légitime défense des policiers sur celles des gendarmes ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le président Vigier, je n’avais pas eu l’occasion de vous répondre la dernière fois. Or j’essaie de respecter une tradition que je m’impose en tant que Premier ministre, qui est de répondre personnellement aux présidents de groupe. Bernard Cazeneuve a déjà répondu il y a un instant à une question sur le même sujet, et il aura l’occasion de vous faire part des propositions que nous discuterons, le Président de la République, le ministre de l’intérieur, le ministre de la justice et moi-même, en fin d’après-midi, à l’Élysée, avec les syndicats de policiers et les gendarmes.
Vous avez eu raison, monsieur Vigier, d’exprimer notre admiration envers les policiers, les gendarmes et, en général, les forces de l’ordre – je veux y inclure les policiers municipaux et les sapeurs-pompiers –, tous ces agents de service public qui permettent la cohésion de notre société.
Applaudissements sur l’ensemble des bancs.
Les policiers, incontestablement, sont confrontés à des missions nouvelles – le ministre de l’intérieur l’a rappelé –, face au terrorisme, face à la violence présente dans notre société, face au défi, à la crise des migrants. À ce propos – vous avez vu les images et le ministre de l’intérieur l’évoquait ce matin en conseil des ministres –, je veux saluer ces CRS, ces policiers qui, depuis lundi, à Calais, participent à l’opération d’évacuation de la lande, dans l’esprit républicain que nous leur connaissons et avec un professionnalisme incroyable.
Ces policiers, comme vous l’avez souligné, sont aimés des Français.
C’est pourquoi, non seulement les violences à leur encontre sont insupportables, mais quand il y a des tracts, quand on les met en cause, quand on les compare à je ne sais quel passé,…
…alors que nous avons une des polices les plus professionnelles au monde – comparons avec ce qui se passe dans d’autres pays : même outre-Atlantique, dans une grande démocratie, le nombre de policiers tués et le nombre de personnes tuées par la police n’ont rien à voir avec ce que nous connaissons –, eh bien, moi, je veux saluer cette police républicaine, qui assure l’ordre républicain et la sécurité de nos concitoyens.
Le ministre de l’intérieur l’a rappelé : il faut des moyens. Oui, il faut continuer, il faut accélérer la mise en oeuvre de ces moyens – nous y reviendrons ce soir. J’ai déjà eu l’occasion, ainsi que le ministre de l’intérieur, de le dire : il faudra continuer à augmenter les effectifs dans les années qui viennent ; c’est vrai pour la police, pour la justice, pour l’administration pénitentiaire, pour la défense. Les budgets de fonctionnement et d’investissement – je pense notamment aux nouvelles technologies – devront augmenter, car nous devons protéger les Français, nous devons protéger la France et lui permettre d’assumer pleinement son rang.
Je voudrais partager avec vous, l’espace de quelques secondes, ma réflexion sur la question de la violence. Nous faisons face, il est vrai, à un problème d’autorité. Ce n’est pas un sujet nouveau : rappelons-nous les émeutes de 2005.
Autorité de l’enseignant, autorité du policier, autorité du gendarme, parfois même autorité de l’élu – je pense aux maires : la contestation de l’autorité est générale.
Par ailleurs, il y a une violence dans la société. Ce qui me frappe depuis quelques années – c’est l’élu des quartiers populaires d’Évry qui parle –, c’est que l’on est passé à autre chose. Aujourd’hui, on veut tuer des policiers. Les images qui nous arrivent du monde, ce que l’on voit sur l’internet, la réalité de cette violence, ce sont les policiers qui la subissent d’abord, parce qu’ils sont confrontés à ce qu’il y a de plus dur et de plus difficile dans la société. Par conséquent, les mesures à annoncer, ce que nous pourrons dire notamment sur les questions relatives à la justice ou à la légitime défense – le ministre de l’intérieur l’évoquait il y a un instant –, tous ces sujets seront sur la table en fin d’après-midi. J’espère que nous trouverons ensemble la bonne solution, car, je tiens à le dire, la place des policiers n’est pas dans la rue, avec des cagoules et des voitures : cela ne correspond pas exactement à leur rôle.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
C’est pourquoi, au-delà de la discussion que nous allons avoir, j’en appelle à ce que chacun respecte la loi, respecte les règles, car c’est aussi ce que les Français demandent à leurs policiers – qu’ils soutiennent et qu’ils aiment.
Un dernier mot. Je veux dire, pour avoir assumé cette responsabilité pendant deux ans, et, aujourd’hui, en tant que Premier ministre, que le pays et les policiers ont une sacrée chance : celle d’avoir Bernard Cazeneuve comme ministre de l’intérieur !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.– Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la ministre du logement et de l’habitat durable, le démantèlement de la « jungle » de Calais a débuté ce lundi. C’était une nécessité, à la fois pour les riverains épuisés par une situation incontrôlable, et pour les migrants, qui y vivaient dans des conditions sanitaires et humanitaires extrêmes.
Je veux rendre hommage, au nom de mes collègues écologistes réformistes, à la volonté politique du Gouvernement, mais aussi au travail des forces de l’ordre, des services sociaux, des associations, des collectivités locales,
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et sur quelques bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste
mobilisés pour organiser un accueil digne et un parcours d’insertion à des femmes, des enfants et des hommes auxquels nous devons secours et assistance.
Trente-trois réfugiés ont rejoint ce mardi, dans ma circonscription du Nord Vienne, les vingt-cinq personnes déjà arrivées il y a quelques mois. Les inquiétudes qui accompagnent l’arrivée de ces réfugiés, je les entends, je les comprends et j’y réponds. Mais je crois que nous devons agir en fonction des leçons de l’expérience, et non de préjugés ou de peurs instrumentalisées.
Six mois après l’arrivée des premiers réfugiés en Nord Vienne, mon constat est simple : la peur laisse souvent place à l’action pour aider ces femmes et ces hommes en situation de grande détresse. Communes, riverains et associations sont mobilisés pour que l’installation se passe au mieux.
Aujourd’hui, madame la ministre, l’accueil va prendre des proportions bien plus importantes que jusqu’à maintenant. Cela nécessite, de la part de l’État, de mettre en place une politique dédiée en matière de logement, premier pas vers une intégration réussie.
Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous expliquer la nature de l’accueil proposé aux migrants dans les CAO, les centres d’accueil et d’orientation, et les CADA, les centres d’accueil de demandeurs d’asile ? Combien de centres d’accueil sont aujourd’hui opérationnels ? Alors que la majorité des personnes mises à l’abri sont éligibles à l’asile, quel parcours d’insertion pourront-elles emprunter pour accéder à leurs droits ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
L’opération humanitaire que nous sommes en train d’achever à Calais, madame la députée, a focalisé les regards sur les conditions du démantèlement du camp. Nous avons voulu, avec Bernard Cazeneuve, mener cette opération en toute transparence, pour que chacun puisse se rendre compte de la réalité de notre engagement à sortir de la boue, du froid et de conditions de vie indignes des milliers de femmes et d’hommes, de familles et de mineurs non accompagnés.
À l’heure où je vous parle, c’est quasiment chose faite. À quatorze heures, nous avions mis à l’abri et envoyé dans des centres d’accueil et d’orientation plus de 3 900 personnes, et avons mis à l’abri, dans la lande de Calais, 950 mineurs qui appellent notre protection. Nos autres capacités pour la journée demeurent, puisque nous sommes encore en mesure d’envoyer plus de 1 000 personnes dans des centres d’accueil et d’orientation d’ici à cette nuit. Ainsi, nous espérons mettre à l’abri, d’ici à la fin de la journée, plus de 6 000 personnes qui vivaient dans ce bidonville.
Toutes les personnes seront mises à l’abri ce soir
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain
et, pour nous en assurer, les associations poursuivront leurs maraudes pour aller à la rencontre des personnes qui se trouveraient encore dans cette lande qui, à l’heure où je vous parle, est quasiment déserte.
Nous avons déjà ouvert, avec Bernard Cazeneuve, 167 centres d’accueil et d’orientation depuis octobre 2015, lesquels ont déjà accueilli 6 000 personnes. Ces derniers jours, nous en avons ouvert 287 autres pour accueillir les 4 000 personnes dont je parlais, et nous assurons une prise en charge globale, qui va de l’accompagnement pour l’aide à l’asile à l’accompagnement à la recherche d’emploi et de logement et à l’insertion.
À ce titre, je veux remercier l’ensemble des associations, des élus locaux et des services de l’État, qui se sont mobilisés avec nous dans cette opération massive.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le Premier ministre, quatre de vos ministres – respectivement en charge de l’agriculture, de l’environnement, de la santé et de l’économie – s’apprêtent à signer un arrêté très coercitif pour nos agriculteurs et leurs productions.
Le voici, car il existe bien, contrairement à ce que le ministre de l’agriculture a répondu la semaine dernière.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
S’il faut, bien sûr, des règles d’utilisation des produits phytosanitaires, votre volonté d’élargir le périmètre des zones de non-traitement n’est pas sans conséquences graves, très graves même, pour nos cultures et nos territoires ruraux. De telles mesures entraîneront inévitablement un retrait potentiel de plusieurs millions d’hectares ; un recul important de la production alimentaire française ; la suppression de milliers d’emplois agricoles ; la perte de plusieurs milliards d’euros par an de chiffre d’affaires ; des distorsions de concurrence accrues, enfin, avec les producteurs européens.
Si toutes les productions sont concernées, la situation est très préoccupante pour nos vignobles, car la délimitation de zones non traitées autour des lieux de vie conduira à un arrachage des plantations à proximité des habitations. Sans traitement contre les maladies, ces plantations ne pourront en effet survivre. Et toute nouvelle construction, mes chers collègues, fera reculer la vigne sur notre territoire. Ce sera la remise en cause de l’équilibre économique des petites exploitations, la transformation des villages et des paysages, atouts essentiels pour le tourisme.
Monsieur le Premier ministre, vous connaissez le sens des responsabilités, l’engagement et les pratiques des agriculteurs en faveur de l’environnement et pour préserver les populations et leur santé. Alors pourquoi engagez-vous une telle surenchère réglementaire, loin du besoin de simplification et d’allégement des contraintes ? Allez-vous écouter les agriculteurs, leur faire confiance, respecter leur travail et les rassurer cet après-midi ? Nous devons nous battre pour produire en France et consommer français.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je vous prie tout d’abord, monsieur le député, d’excuser M. Stépahne Le Foll.
Comme vous le savez, le Gouvernement doit réécrire un arrêté, le précédent ayant été cassé par le Conseil d’État pour un vice de forme dû, en 2006, à un gouvernement que vous connaissiez bien…
Bref, nous voulons recourir à une nouvelle méthode de travail pour engager la concertation avec les représentants du monde agricole, dans une démarche interministérielle qui, bien entendu, prendra en compte les différents points de vue. Cela se fera sous la responsabilité du préfet Bisch.
Conformément au souhait du Premier ministre, le comité de rénovation des normes en agriculture s’est réuni à plusieurs reprises, et dernièrement encore. Les consultations d’ensemble ont eu lieu, et je puis vous dire que le projet qui sera transmis à la Commission européenne…
…sera conforme à la ligne constante qui sous-tend notre action depuis 2012. Nous devons éviter – c’est le souci que vous avez exprimé, monsieur le député – toute « surtransposition » du droit européen, sans reculer bien entendu – vous ne l’avez d’ailleurs pas proposé – sur les dispositions en vigueur.
Nous devons faire preuve tout à la fois de pragmatisme s’agissant de l’environnement et de la santé des personnes,…
…et de réalisme pour ce qui concerne l’activité des agriculteurs.
L’arrêté est donc nécessaire ; il n’a d’autre objectif que de répondre à ces deux exigences. Tous les acteurs doivent être responsabilisés car, vous le savez, les personnes concernées par les conséquences sanitaires que ces produits peuvent entraîner sont, bien sûr, les agriculteurs dans leurs productions, mais aussi les ouvriers agricoles et l’ensemble des riverains des parcelles agricoles.
Je connais, monsieur le député, votre souci de l’équilibre entre les deux exigences que je rappelais. Je pense donc que vous aurez satisfaction.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. - « Non ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Michel Ménard, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage, alors que le chômage a drastiquement baissé le mois dernier – puisque notre pays compte au mois de septembre 66 300 demandeurs d’emploi de moins, soit 90 000 depuis le début de l’année –, nous devons poursuivre notre politique d’accompagnement vers l’emploi.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Dans ce cadre, notre soutien à la politique de formation professionnelle et à l’apprentissage est indispensable, car c’est par ces voies que les jeunes trouvent du travail.
Cela passe d’abord par les aides aux entreprises, afin qu’elles embauchent des apprentis : c’est pourquoi est accordée une prime de 1 000 euros aux petites et moyennes entreprises et de 2 000 euros aux très petites entreprises lors de l’embauche du premier apprenti.
Cela passe également par le développement de dispositifs pour la vie quotidienne, comme le plafonnement des loyers ou l’accès au permis de conduire, qui va bientôt être pris en charge dans le cadre du compte personnel de formation : cette dynamique générale porte ses fruits.
En effet, alors que 80 % des apprentis trouvent un emploi directement à l’issue de leur formation, le nombre d’apprentis et de jeunes en formation professionnelle augmente.
Mais la formation ne s’adresse pas qu’aux jeunes car les problématiques qui y sont liées touchent tous les Français. Alors que la droite a pour obsession de supprimer tous les dispositifs qui permettent l’accès à l’emploi, le Gouvernement a mis en place un plan de 500 000 formations pour accompagner les personnes au chômage, dont un certain nombre n’avaient aucune formation.
Madame la secrétaire d’État, la formation professionnelle doit s’adresser en priorité aux demandeurs d’emploi et aux personnes les moins formées. La formation professionnelle et l’apprentissage sont des outils plus qu’efficaces pour accéder à l’emploi.
Pouvez-vous nous indiquer comment nous allons continuer à développer l’offre de formation et de qualification ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage.
Monsieur le député, vous m’interrogez sur un sujet qui tient, je l’espère, à coeur à tous celles et tous ceux qui siègent dans cet hémicycle : l’accès de tous à l’emploi et à la formation. Depuis 2012, la formation comme moyen d’accès à l’emploi a constitué la priorité du Gouvernement.
A été tout d’abord votée la grande loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale qui a réformé la formation professionnelle. Elle a donné à ses acteurs – c’est-à-dire l’État, les régions et les partenaires sociaux – un cadre de travail efficace et coordonné.
Cette loi a également créé des droits nouveaux comme le compte personnel de formation, mais aussi le conseil en évolution professionnelle qui vise à accompagner les personnes concernées dans leurs démarches.
Elle a également permis de poser l’exigence de qualité des formations qui sont dispensées : c’est, tant pour les entreprises que pour les personnes bénéficiaires, extrêmement important.
Sur le terrain, cette démarche se traduit par un travail très concret qui s’appuie sur des diagnostics de besoins des entreprises, des territoires et des personnes en recherche d’emploi.
C’est ce cadre qu’avec Myriam El Khomri, nous avons retenu pour le plan « 500 000 formations ». Grâce à un financement de 1 milliard d’euros, ce plan est, depuis le début de l’année, décliné avec les régions ainsi qu’avec les partenaires sociaux. Aujourd’hui, 740 000 personnes ont pu ainsi bénéficier de ces formations.
Pour l’apprentissage, il s’agit, là aussi, d’élargir le nombre de personnes en bénéficiant.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, alors que nous examinons depuis hier le budget de la sécurité sociale, vous parcourez depuis plusieurs semaines les plateaux de télévision pour annoncer que vous avez sauvé la sécurité sociale : c’est un mensonge d’État !
La situation est catastrophique. Comment pouvez-vous cacher aux Français le montant du « trou de la sécu » qui s’élèvera à de 152 milliards d’euros ! – 152 milliards d’euros ! – à la fin de 2016 ? La dette des hôpitaux s’élève d’ores et déjà à 30 milliards d’euros et celle des régimes spéciaux à plus de 6 milliards d’euros.
La situation est donc dramatique. La Cour des Comptes vient d’ailleurs de vous le rappeler, tout comme le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie.
Madame la ministre, vous êtes tellement aux abois que vous restreignez même l’aide aux demandeurs d’emploi qui veulent sortir du chômage en créant leur propre entreprise. Vous vous en prenez aussi à l’économie collaborative, dite économie de partage.
Toute personne qui, à partir du 1er janvier 2017, mettra en location sa voiture, son camping-car, son bateau ou son combi – pour faire plaisir à M. Ayrault – devra obligatoirement, lorsqu’il en retirera des revenus supérieurs à 3 800 euros par an, se déclarer comme un professionnel et s’affilier au régime social des indépendants dont chacun connaît la réputation. Alors que les personnes concernées paient déjà des impôts sur ces revenus, elles devront donc payer en sus, et dès le 1er avril 2017, des cotisations.
Vous êtes tellement aux abois que vous avez failli taxer les chèques-vacances versés par les comités d’entreprises aux salariés.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Vous n’y avez renoncé au dernier moment que sous la pression populaire. Madame la ministre, pour votre dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, comptez-vous, après cinq ans d’inaction, écouter l’opposition afin de ne pas aggraver la situation ? Allez-vous enfin dire la vérité aux Français sur l’état de nos comptes sociaux ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi que sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le député, votre discours, pour ce qui est du déficit et de la dette, est habituel. Même si vous n’êtes pas parvenus à vous mettre d’accord sur vos programmes, essayons, au moins, de nous mettre d’accord sur les constats.
Il s’agit bien de constats, et non de projets. S’agissant de l’économie collaborative, elle mérite évidemment une attention particulière de la part du Parlement. Notre société, comme notre économie, évolue : personne n’aurait ici l’idée de revenir sur le développement d’un certain nombre d’activités dans des secteurs économiques importants qui correspondent aux besoins du moment.
Personne n’émettrait non plus ici l’idée que l’émergence de nouvelles formes de commerce, d’échanges ou de travail devrait obérer l’exercice d’activités plus traditionnelles – ce que l’on appelle généralement l’économie réelle – en leur opposant une concurrence qui ne serait pas équitable ou égale.
Certains exemples connus nous le rappellent : je fais allusion à Uber ou à Airbnb. Lorsque l’on rencontre des artisans et des commerçants, les hôteliers-restaurateurs par exemple, ce sont des questions qu’ils nous posent à raison.
Et le financement de la protection sociale, comme la relation au travail, imposent effectivement – indépendamment des questions fiscales – une réflexion du Parlement.
Sourires.
Ce n’est pas nouveau : beaucoup de députés – comme Pascal Terrasse et d’autres – présents ici ont travaillé sur cette question. Nous devons effectivement réfléchir à la nécessité ou non de s’affilier, ainsi qu’au moment comme au seuil d’activité opportuns pour le faire.
Il faut définir le partage de frais comme le revenu : c’est à cette tâche que nous appelons le Parlement.
En effet, monsieur le député, les seuils peuvent, comme je l’ai dit dans cet hémicycle lors de la discussion générale, se discuter.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé et porte sur les risques qui pèsent sur la distribution en gros des médicaments à La Réunion.
Le non-respect des obligations de service public prévues par le code de santé publique met à mal le modèle de répartition pharmaceutique mais, surtout, ne permet plus de garantir aux Réunionnais un égal accès au médicament.
Le refus de livrer des pharmacies sous vingt-quatre heures au motif qu’elles sont éloignées des grands axes routiers ou encore l’absence de stock d’au moins deux semaines de vente chez certains grossistes-répartiteurs remettent en cause la péréquation entre les grandes et les petites officines, entre les médicaments chers et les médicaments à petits prix, entre les petites commandes et les commandes importantes, entre les pharmacies isolées et celles situées en zone urbaine.
Pourtant, une majoration spécifique de l’ordre de 30 % est prévue pour la distribution en gros de médicaments outre-mer afin de tenir compte des surcoûts liés notamment au transit, à la nécessité de détenir des stocks plus importants et à la faible taille du marché.
La direction régionale de la concurrence a confirmé en 2014 l’existence de pratiques illégales. Récemment, l’Agence régionale de santé – ARS – Océan Indien a reconnu dans les médias l’existence de refus de livraison.
L’urgence aujourd’hui, madame la ministre, est d’agir comme vous l’avez fait en 2012, en mettant fin aux importations illégales de médicaments à La Réunion par des grossistes de France continentale et de Monaco.
Ma question est donc de savoir si vous avez déjà pris la décision de saisir à nouveau l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, pour que soient respectées les obligations de service public et les bonnes pratiques de distribution en gros de médicaments à usage humain.
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la députée, vous évoquez une situation qui demande de ma part beaucoup de vigilance, la distribution des médicaments partout sur le territoire français, en particulier à La Réunion.
Il y a trois grossistes répartiteurs et six sites de distribution sur le territoire de l’île. Ce sont les grossistes répartiteurs qui achètent et livrent les médicaments pour qu’ils soient distribués à leurs destinataires.
Ces grossistes répartiteurs, vous l’avez évoqué, ont des obligations de service public. Ils doivent détenir 90 % des références de médicaments existantes, stocker au moins l’équivalent de deux semaines de vente, livrer en moins de vingt-quatre heures toute pharmacie du secteur et rendre service à toutes les officines de pharmacie qui leur en font la demande.
Des dysfonctionnements m’ont été signalés par d’autres personnes, des particuliers. J’ai donc interrogé le préfet, qui m’a répondu qu’aucun pharmacien d’officine n’avait à ce jour signalé d’éventuelles difficultés ou des refus d’approvisionnement.
Par ailleurs, l’Agence régionale de santé confirme que la sécurité de la distribution du médicament n’est pas menacée à La Réunion même si certaines pratiques doivent être corrigées. Des contrôles ont lieu. L’ARS a réalisé un dernier contrôle, une inspection des trois grossistes répartiteurs au mois d’août 2016.
Je reste donc très vigilante. Je n’accepterai aucun manquement ni à La Réunion ni ailleurs à cette obligation qui est faite aux grossistes répartiteurs d’assumer leurs responsabilités vis-à-vis des pharmacies et des patients.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Pierre Morel-A-L’Huissier, pour le groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, le 13 novembre 2013, à l’appel du syndicat Alliance, 5 000 policiers avaient manifesté. Il y a trois ans.
Un an plus tard, le 13 novembre 2014, 8 500 policiers ont défilé à Paris pour « dénoncer leurs conditions de travail et le mal-être dans la police ». Il y a deux ans.
En octobre 2015, une autre manifestation a été organisée, dont l’événement déclencheur a été la fusillade au cours de laquelle un policier de la brigade anti-criminalité a été grièvement blessé. L’auteur des coups de feu était un détenu en fuite qui n’avait pas réintégré sa prison après une autorisation de sortie. Il y a simplement un an.
Enfin, en juin 2016, lors d’une cérémonie d’hommage au couple de policiers assassinés à Magnanville, un policier a refusé de serrer la main au Président de la République. Vous devez vous en souvenir personnellement, vous y étiez. Il y a simplement cinq mois.
Si je reprends ces différents événements, c’est pour vous faire comprendre que les manifestations actuelles sont l’expression d’un mal qui couve depuis plusieurs années.
Les policiers sont exaspérés et fatigués, ils sont asphyxiés par les procédures et les réponses pénales ne sont plus adaptées. Des voyous sont en liberté. Il y a aussi une violence accrue et le sentiment que les délinquants n’ont plus peur de leur police. Certains dénoncent le fait qu’ils ne sont plus que deux et non trois dans les véhicules de service. D’autres parlent de zones de non-droit dans certains quartiers, de réseaux connus et non démantelés.
Plus que d’avoir des revendications catégorielles, ce sont les conditions mêmes de l’exercice de leur métier qu’ils dénoncent, et nous ne pouvons qu’y être sensibles vu leur dévouement, et je pense aussi aux pompiers, aux policiers municipaux et aux gendarmes.
Aujourd’hui, c’est au tour du Président de la République de recevoir les représentants des policiers. Ma question est simple : allez-vous enfin les entendre ?
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.
Je le redis vraiment avec beaucoup de sincérité et de gravité, monsieur le député, si, comme c’est votre cas, et je vous connais personnellement, on respecte les policiers, on leur doit la vérité. Je sais qu’il y a des échéances électorales, et elles nous concernent tous, mais on ne peut pas affirmer question après question devant la représentation nationale qu’il y aurait eu une espèce d’âge d’or, à l’occasion duquel, vous le savez, un grand nombre d’emplois ont été supprimés,…
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains
Qu’avez-vous fait depuis ? Cela fait quatre ans et demi que vous êtes là !
…et une espèce d’incapacité de ce gouvernement à répondre aux questions qui sont posées.
Pour bien connaître les policiers, comme le Premier ministre, qui a été ministre de l’intérieur, je sais qu’ils attendent de nous, parce qu’ils sont en souffrance, de la dignité, de la vérité et non des outrances et des vociférations.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Au cours des derniers jours, un certain nombre de candidats aux primaires sont allés dans des commissariats.
L’un d’eux, député de l’Eure (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), M. Bruno Le Maire, a indiqué qu’on avait supprimé 13 000 emplois sous M. Fillon et M. Sarkozy et qu’il le regrettait. M. Juppé a regretté la même chose en expliquant qu’on avait eu grand tort de le faire. Sur ce sujet, il faudrait donc être moins dans la confrontation, moins dans l’antagonisme et davantage dans le respect.
Nous avons créé près de 9 000 emplois, nous avons augmenté de 15 % les moyens de la police.
Tout à l’heure, autour du Président de la République, après avoir écouté longuement les organisations syndicales, nous allons annoncer un ensemble de mesures qui s’inscrivent dans la continuité de ce que nous avons déjà fait et qui sont destinées à apporter des réponses précises sur autant de sujets différents que la légitime défense, l’anonymisation des policiers ou les matériels supplémentaires dont ils ont besoin.
J’appelle donc à ce que, sur ce sujet comme sur d’autres, nous soyons dans la dignité et dans la vérité.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Dominique Baert, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, hier, la majorité a largement adopté la première partie du projet de loi de finances pour 2017.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Pourquoi ? Parce qu’il répond aux attentes de nos concitoyens et aux besoins de notre économie : baisse d’impôts supplémentaire de l milliard d’euros sur le revenu, baisse de la CSG pour les retraités, allégement de la fiscalité des PME ou encore lutte contre des abus sur l’impôt de solidarité sur la fortune.
Ce ne sont que de bonnes mesures que, cependant, la droite n’a pas votées. Il est vrai que si vous parlez de fiscalité à un candidat à la primaire de la droite, il vous répond qu’il faut supprimer l’ISF. Pourtant, à droite, entre 2002 et 2012, ils n’ont pas touché à l’ISF. C’est dire que ce qu’ils préparent pour après 2017 serait plus libéral, plus injuste, pire que sous le quinquennat Sarkozy ! La droite de 2017 veut gouverner pour les riches, c’est clair.
Mais, chers collègues, comment vont-ils compenser la perte de recettes pour l’État ? Qui peut oublier qu’en 2017 le rendement de l’ISF sera de 5,4 milliards d’euros ? Comment l’opposition va-t-elle expliquer aux Français les plus modestes qu’elle veut supprimer des enseignants, des services publics ou augmenter la TVA, pour supprimer l’ISF, celui-là même qu’en 1981, lorsque François Mitterrand le créa, on appelait l’impôt sur les grandes fortunes ?
Qui, ici, peut oublier que ce que rapporte l’ISF représente la totalité les budgets de l’agriculture et de la culture réunis ? Monsieur le secrétaire d’État, notre majorité de gauche est fière, elle, d’avoir maintenu cet impôt juste, d’avoir augmenté la progressivité de son barème et lutté contre l’optimisation fiscale !
L’ISF est un marqueur clé de la justice fiscale et de la cohésion de notre beau pays. Il permet simplement à ceux qui ont beaucoup de participer davantage aux services collectifs que ceux qui ont peu. Cette justice, chers collègues, n’est-ce pas cela, la République ? Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement va-t-il résister à la démagogie fiscale de l’opposition ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.
L’ISF a une longue histoire. Il a été créé en 1982, supprimé en 1986 par le gouvernement de Jacques Chirac, qui l’avait d’ailleurs regretté par la suite,…
…puis rétabli par le gouvernement de Michel Rocard, avant de subir d’autres évolutions. Mesdames, messieurs les députés, sur qui pèse cet impôt ? Sur environ 340 000 contribuables, soit moins de 1 % des foyers fiscaux, qui disposent de patrimoines supérieurs à 1,3 million d’euros, après un abattement de 30 % sur la résidence principale et l’exonération des biens professionnels, et parfois même davantage compte tenu d’un certain nombre de mécanismes débordant d’imagination…
Nous avons d’ailleurs le choix de demander un effort à ces contribuables pour réduire les inégalités en France. Il est inexact de dire que l’ISF pénalise l’investissement. Certains disent que si l’on supprime l’ISF, on ne pourra plus investir en franchise d’impôt dans les PME. Cela donne à réfléchir !
Ce sont plus de 5 milliards d’euros, alors que vous aviez laissé un déficit de près de 150 milliards.
Par quoi allez-vous les remplacer ? Par de la TVA pour tout le monde ? Vous avez déjà eu cette idée, et vous l’avez encore ! Par d’autres augmentations d’impôts pour tous les Français ? La justice fiscale, c’est le principe constitutionnel selon lequel chacun contribue en proportion de ses facultés.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à Mme Gilda Hobert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le ministre de l’intérieur, j’associe à ma question mon collègue Stéphane Saint-André. Lundi, a commencé l’évacuation des migrants du camp de Calais. Vous avez tenu à ce que cette opération de démantèlement s’effectue dans des conditions sereines et de sécurité des personnes. Cela fut le cas grâce à une anticipation minutieuse dans son organisation. Il convient de saluer l’engagement des forces de police, des associations, de l’OFII et de l’OFPRA. Plusieurs milliers de personnes ont été transportées, selon leur choix de destination, vers des centres d’accueil et d’orientation – les CAO – répartis sur notre territoire.
Nous savons que la majorité des migrants ont fui leur pays, la guerre, la violence et que, relevant du statut de demandeur d’asile, ils sont en attente de l’étude de leur requête. De nombreux maires ont conduit une politique d’accueil responsable et solidaire. Outre un lieu décent d’hébergement, les personnes trouvent dans ces communes un soutien, des soins et des informations pour leur orientation future.
Vous avez rappelé ici même, monsieur le ministre, votre détermination à traiter le problème crucial des mineurs isolés. Grâce à la volonté partagée de nos deux gouvernements, les négociations engagées avec la Grande-Bretagne pour le rapprochement des mineurs de leurs familles portent leurs fruits. Plus de 200 d’entre eux ont déjà rejoint l’Angleterre. Dans l’attente du règlement de la situation de chacun, il est prévu qu’ils rejoignent un centre d’accueil provisoire.
Cependant, des difficultés se présentent aujourd’hui. D’une part, certains mineurs ont été séparés de membres de leur famille, partis en bus vers des CAO. D’autre part, des personnes se sont présentées à l’inscription au titre de mineurs alors qu’ils ne le sont pas. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer les mesures envisagées pour que la prise en charge des mineurs se fasse sans risque d’erreur et que la séparation d’avec les membres de leur famille ne soit pas vécue douloureusement ?
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Madame la députée, la question que vous évoquez est la plus délicate que nous ayons à traiter dans le cadre du démantèlement de la jungle de Calais. Pour rappel, il y avait entre 6 000 et 7 000 personnes à Calais dans une situation d’extrême précarité et de très grande vulnérabilité. Nous avons engagé une opération humanitaire de très grande ampleur, destinée à les mettre à l’abri.
Cette opération consiste à protéger ces personnes qui, pour 90 % d’entre elles, relèvent du droit d’asile, en les envoyant vers des centres d’accueil et d’orientation, où elles sont prises en charge par des acteurs associatifs et des acteurs de l’État qui les accompagnent dans leur demande d’asile, de manière à ce qu’elles sortent ensuite rapidement de ces centres pour accéder aux centres d’accueil pour demandeurs d’asile ou à des logements de droit commun.
Il n’y a plus quasiment plus, désormais, de majeurs à Calais. Nous achevons aujourd’hui ce processus de démantèlement. Des engins sont entrés dans la lande pour procéder à son aménagement, de sorte que les retours ne soient pas possibles. Nous sommes en train de traiter la question des mineurs isolés. Dans le cadre de cette opération, 900 mineurs isolés ont déjà été mis à l’abri au centre d’accueil provisoire à Calais. Les Britanniques sont sur place. Ils ont déjà permis l’arrivée en Grande-Bretagne de 200 mineurs. D’autres seront amenés à rejoindre la Grande-Bretagne au terme du travail des services britanniques dans les prochaines semaines.
Notre objectif est très simple : sortir de la boue et du froid les mineurs isolés, les mettre à l’abri et permettre le traitement de leur dossier, de sorte que ceux qui ont de la famille en Grande-Bretagne puissent la rejoindre dans les meilleures conditions, conformément au droit. Bien entendu, ceux qui n’ont pas d’attaches en Grande-Bretagne, conformément aux procédures de droit commun, nous les mettrons à l’abri en France et les intégrerons au dispositif d’accueil des mineurs isolés, à la seule différence que, dans ce cas, c’est l’État qui assurera l’intégralité du financement de cet accueil.
Monsieur le Premier ministre, chaque jour, plus de 90 000 voyageurs utilisent les trains express régionaux en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Chaque jour, notre région subit baisses de fréquentation, forte hausse des coûts, fraude élevée, pénurie de conducteurs ; depuis le début de l’année, elle a connu plus de quatre-vingt-six jours de grève, ce qui nuit gravement au quotidien des usagers.
« C’est une compétence régionale ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Plus d’un train sur trois est affecté ! Cette situation est inacceptable. Le service des TER coûte cher, très cher, aux habitants de la région : 1 million d’euros par jour. Malgré la volonté politique de la majorité régionale conduite par Christian Estrosi
« Ah ! » sur de nombreux bancs
et les efforts financiers réalisés, la SNCF refuse de coopérer pour améliorer, de manière significative, la qualité du service rendu, alors même qu’elle le surfacture.
Cela représente 36 millions d’euros supplémentaires pour rien.
Le modèle est à bout de souffle ; nous devons renverser la table pour offrir aux usagers de nouveaux transports régionaux et un service public digne de ce nom. Comment expliquez-vous à nos concitoyens que les régions de France subissent le monopole de la SNCF au mépris du principe de libre administration des collectivités locales ?
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Ma question est simple : monsieur le Premier ministre, combien de temps allez-vous attendre avant de permettre aux régions de France d’expérimenter l’ouverture à la concurrence de leurs TER ?
Nous allons déposer une proposition de loi en ce sens et nous espérons que vous la soutiendrez. Il y a urgence à agir pour remettre les transports régionaux sur de bons rails !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Madame la députée, vous évoquez la question de l’ouverture à la concurrence des TER, qui relèvent de la responsabilité des régions, et les annonces faites par le président Estrosi. Dans une démarche républicaine et responsable, mieux vaut toujours rester dans le cadre de la loi plutôt que de faire des déclarations qui ne correspondent à rien en termes de droit positif.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
En la matière, la loi attribue aujourd’hui – et depuis longtemps – le monopole à la SNCF. Le quatrième paquet ferroviaire que j’ai négocié prévoit que l’ouverture à la concurrence se fera, pour les trains commerciaux, c’est-à-dire les TGV, à partir de 2020, et pour les TER, à partir de 2023. Cette position n’est pas uniquement française ; c’est également celle de l’Allemagne, qui possède aussi un opérateur historique, de l’Italie et de l’Espagne. Tous ces pays européens ont décidé de fixer la date de l’ouverture à la concurrence à 2023. Cette ouverture ne sera pas automatique ; chacun prendra sa responsabilité politique. La France a tenu à ce que figure dans le texte la possibilité, pour les autorités organisatrices – en l’occurrence, les régions –, soit d’une attribution directe à l’opérateur historique – en l’occurrence la SNCF –, soit d’un appel à la concurrence. Ce sera la liberté des collectivités locales.
D’ici là, nous devons conduire une expérimentation. En effet, le résultat de l’ouverture à la concurrence du fret, depuis 2005, n’est pas extraordinaire puisque la part du fret ferroviaire a diminué de moitié par rapport à l’ensemble des transports de marchandises.
Mais nous sommes favorables à l’ouverture à la concurrence. Pour cela, il nous faut une loi, et contrairement à ce que semble vouloir M. Estrosi, nous la rédigerons en concertation avec les régions. Nous discutons aujourd’hui avec l’Association des régions de France pour définir un périmètre et proposer un texte de loi encadrant cette expérimentation.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à Mme Françoise Descamps-Crosnier, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le garde des sceaux, la France est confrontée depuis plusieurs années désormais à la menace terroriste. J’en mesure particulièrement l’ampleur et la gravité pour être élue d’un territoire, Magnanville, qui a déjà eu à en subir la funeste attaque. En raison de sa nature même, le terrorisme pose un défi à la société française tout entière : nos différents secteurs d’activité, nos différentes administrations sont amenés à réévaluer leurs modes d’organisation à l’aune de cette menace. La puissance publique, à travers ses différents acteurs, a pris la mesure du défi auquel elle fait face. Je veux rendre hommage aux fonctionnaires qui, sur tout le territoire, sont mobilisés face au risque terroriste. Parmi eux, l’administration pénitentiaire a un rôle particulièrement sensible à assumer.
La radicalisation en prison est un sujet majeur et complexe : dans cet espace confiné, l’idéologie terroriste trouve des voies de diffusion particulièrement propices. Comment lutter contre la propagation de l’idéologie terroriste en milieu carcéral ? Votre ministère s’est très tôt posé cette question et a mené des expérimentations pour trouver des réponses efficaces. J’ai moi-même eu l’occasion de le constater en visitant à deux reprises la maison d’arrêt de Fresne : l’implication des équipes y était totale.
Hier, vous avez annoncé la mise en oeuvre d’un plan de sécurisation de nos établissements pénitentiaires qui nous permettra, notamment, de mieux lutter contre la radicalisation violente. Réorganisation administrative, moyens supplémentaires à hauteur de 58,6 millions d’euros, structuration du renseignement pénitentiaire, nouvelle organisation de la prise en charge de la radicalisation… C’est un plan d’ensemble que vous avez présenté, et je veux saluer cette démarche globale et ambitieuse face à une menace protéiforme et complexe. Monsieur le ministre, au-delà des éléments structurels majeurs que vous avez présentés, pouvez-vous nous indiquer comment ce plan se traduira concrètement dans nos prisons ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la députée, merci pour votre question !
Vous avez raison, depuis le début de l’année, l’administration pénitentiaire s’est engagée dans une démarche courageuse, et je veux remercier Isabelle Gorce, qui en était alors directrice, car il n’était pas facile d’innover face à un phénomène aussi nouveau et aussi massif. Nous avions donc créé des unités dédiées. Neuf mois après, il est temps de tirer les leçons de cette expérience, devant un phénomène qui a numériquement progressé depuis : nous avons, en ce moment, dans nos établissements, 351 détenus pour des incriminations terroristes et 1 336 détenus, souvent de droit commun, qui se sont radicalisés.
De cette expérience des unités dédiées, nous retenons deux choses. Il faut évaluer pour orienter. Nous créons, à la place des unités existantes, six structures d’évaluation dans lesquelles passeront, pendant quatre mois, tous les détenus dont nous suspectons la radicalisation. Au terme de cette période, ils seront orientés dans des établissements qui seront organisés en fonction de la dangerosité supposée des personnes en question. Pour la première strate – les individus les plus déterminés, les plus prosélytes, les plus violents –, nous construirons, notamment dans les maisons centrales, plus de 300 places, ce qui nous permettra d’avoir des certitudes. Ceux qui sont moins déterminés, moins prosélytes, moins violents, mais tout aussi radicalisés, feront l’objet de processus de prise en charge personnelle dans vingt-sept établissements. Enfin, ceux qui sont dans une situation d’observation, mais qui nécessitent une attention et une vigilance, resteront dans leurs établissements actuels.
En contrepartie, nous créons des équipes de sécurité pénitentiaire et une sous-direction à la sécurité au sein de l’administration pénitentiaire. Ce ne sont encore que des expérimentations, mais j’en revendique la pertinence car face à un phénomène aussi nouveau, je ne crois pas que l’on puisse avoir des certitudes.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Votre secrétaire d’État, Mme Ségolène Neuville, a annoncé fièrement le 12 octobre dernier, dans cet hémicycle, une dotation supplémentaire de 50 millions d’euros pour l’insertion des bénéficiaires du RSA, le revenu de solidarité active. Ce montant représente 1,70 euro par mois pour chaque bénéficiaire du RSA. Quelle action d’insertion voulez-vous mener avec un montant aussi ridicule ?
La vérité, c’est que vous avez abandonné toute volonté d’insertion des personnes les plus vulnérables. Votre seule réponse a été de caricaturer la mesure décidée par le conseil départemental du Haut-Rhin, qui cherchait à donner un avenir aux bénéficiaires du RSA par une activité au service d’une association ou d’une collectivité publique, car personne n’a vocation à rester de manière indéfinie dans cette situation.
Pour répondre aux difficultés des départements qui souffrent le plus de l’explosion du RSA, le Gouvernement a annoncé la mise en place d’un fonds d’urgence de 200 millions d’euros. Ma question est la suivante : sur quels critères ces 200 millions d’euros seront-ils distribués aux conseils départementaux, qui sont en quasi-faillite ? À quelle date la liste des heureux bénéficiaires sera-t-elle annoncée ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Monsieur le député, il est à vrai dire assez savoureux de recevoir des leçons de la part d’un député qui, par ailleurs, préside un conseil départemental qui a voulu imposer aux bénéficiaires du RSA résidant dans ce département une forme de bénévolat obligatoire !
On sait à quoi cela a abouti : le tribunal administratif de Strasbourg a tranché il y a quelques jours. Tout naturellement, le Gouvernement s’est alors interrogé sur les inégalités entre départements en termes de politiques d’insertion. Nous avons accompli ce travail avec Jean-Michel Baylet. Nous avons constaté que les politiques d’insertion diffèrent extrêmement d’un département à l’autre : dans certains départements, beaucoup de choses sont faites ; dans d’autres, les choix politiques sont différents, et peu de choses sont faites.
Votre vision est trop restrictive : vous pensez que les politiques d’insertion doivent être uniquement destinées aux bénéficiaires du RSA, mais leur champ est bien plus large que cela ! Certes, le RSA est pour vous une compétence obligatoire ; néanmoins les politiques d’insertion doivent aussi concerner des personnes qui ne bénéficient plus du RSA, ou en bénéficieront à l’avenir. L’ambition de ce Gouvernement est de faire en sorte que les départements, qui sont reconnus comme les chefs de file de l’action sociale, soient les chefs de file de l’insertion, avec l’État, les missions locales, les caisses d’allocations familiales et l’ensemble des acteurs locaux qui travaillent dans ce domaine.
Oui, l’État a décidé de s’engager, avec 50 millions d’euros supplémentaires. J’y insiste : cette somme s’ajoute à tout le reste, pour les départements qui souhaiteront s’engager.
Je ne doute pas, monsieur Straumann, que le département que vous dirigez souhaitera s’engager, car votre conseil départemental veut travailler sur l’insertion – c’est en tout cas ce que vous avez cherché à nous faire croire aujourd’hui.
Rires et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
La réalité, c’est qu’il y a une vraie différence entre les politiques de droite et de gauche. Nous, nous nous engageons dans la lutte contre l’exclusion : pas vous !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Pierre Aylagas, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée de la ville. J’associe à cette intervention mon collègue et ami Jacques Cresta, qui est très engagé sur la question des conseils citoyens.
Madame la secrétaire d’État, vous vous êtes rendue le samedi 15 octobre dernier dans les Pyrénées-Orientales pour la rencontre territoriale des conseils citoyens, qui avait réuni plus d’une cinquantaine de conseillers citoyens venus de tout le département. La loi 21 février 2014 de programmation pour la ville, dite « loi Lamy », a permis la création de ces conseils citoyens, qui travaillent sur tous les pans de la vie quotidienne des habitants. Dans ce cadre, vous avez amorcé la « rentrée citoyenne », qui a débuté avec les rencontres territoriales.
Les rencontres territoriales se sont tenues pendant un mois et ont rassemblé les membres des conseils citoyens, des acteurs de proximité, des adultes relais et des conseillers citoyens de tous les territoires. Cela a permis d’échanger sur les questions d’éducation, d’emploi, de cadre de vie et de participation citoyenne. La rentrée citoyenne consiste donc à faire s’exprimer ceux qui vivent dans les quartiers populaires et ceux qui y travaillent.
Nous avons participé ensemble à ces échanges, au cours desquels des citoyens ont exprimé leur volonté de s’engager, de s’informer, de travailler avec les élus locaux, les institutions, de compléter leur formation. Je me félicite que tous ces citoyens aient pu exprimer leur engagement.
Comment mieux prendre en compte les usages et circulations des habitants dans le quartier ? Quelles solutions innovantes faut-il proposer pour que les populations des quartiers populaires retrouvent une activité professionnelle ? Quels types de discriminations sont vécus dans les quartiers ? Quels sont les outils de lutte contre les discriminations et quels en sont les acteurs relais sur les territoires ? Voici autant de questions auxquelles les habitants des quartiers populaires souhaitent avoir des réponses par les conseils citoyens.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous expliquer les enjeux de cette rentrée citoyenne ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. J’ai en effet lancé, il y a six semaines, avec le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, M. Patrick Kanner, une rentrée citoyenne, avec l’objectif essentiel que ce soient celles et ceux qui vivent et travaillent dans les quartiers populaires qui parlent de la réalité qu’ils vivent.
Dans toute la France, dans l’Hexagone aussi bien qu’outre-mer, ce sont près de 4 000 adultes relais et près de 15 000 conseillers citoyens qui ont pu débattre de questions de proximité. Je rappelle que les conseils citoyens ont été créés par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, dite loi Lamy, du 21 février 2014. Pour la première fois, des citoyens se tiennent aux côtés des institutions pour décider la transformation de leurs quartiers, et pour parler des politiques publiques et de la façon dont elles fonctionnent.
Dans les rencontres que j’ai pu faire, notamment dans les Pyrénées-Orientales, avec vous, monsieur le député, ainsi qu’avec M. Cresta, j’ai rencontré près de 3 000 personnes, qui m’ont dit leur expertise d’usage et leur besoin de formation. Nous y avons répondu avec les 7 millions d’euros qui ont été annoncés.
La rentrée citoyenne compte trois journées nationales. Le 17 octobre dernier, 260 médiateurs de l’action sociale ont fait des propositions. Hier, ce sont 120 responsables associatifs, venus de toute la France, qui nous ont exposé leur vision, et leur volonté de s’engager. Demain, nous clôturerons la rentrée citoyenne avec le Forum national des conseils citoyens. Plus d’un millier de personnes, représentant 860 quartiers de la politique de la ville, seront présentes pour parler de leur engagement.
C’est donc une révolution démocratique. J’insiste : l’enjeu de cette rentrée citoyenne, c’est de montrer, contre les affirmations stigmatisantes qui règnent dans le débat public, combien les quartiers populaires sont en train de produire leurs propres anticorps, face aux tenants d’un développement séparé, c’est de montrer la force, l’effervescence, l’innovation, l’engagement des quartiers populaires. Je suis convaincue que demain, nos quartiers populaires inspireront la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Marc Le Fur.
Il me semble que nous pouvons entrer directement dans la discussion des articles, qui nous permettra de répondre aux nombreuses questions qui ont été évoquées.
Nous abordons donc l’examen des articles de la première partie du projet de loi concernant les dispositions relatives à l’exercice 2015.
Je voudrais par avance alléger les débats qui vont suivre puisque nombre de mes collègues ont déposé des amendements de suppression d’articles : je rappelle que les quelque 17 milliards de déficits cumulés du régime général en 2012 vont être ramenés à 400 millions en 2017, que trois régimes sur quatre sont équilibrés et que des déremboursements et des franchises ne sont plus aujourd’hui d’actualité. C’est dire si la situation est positive pour le gouvernement actuel presque jusqu’à la caricature.
J’ajoute un point qui concerne plus particulièrement les régions minières puisque nous allons voter, lors de ce PLFSS, la subvention d’équilibre de 350 millions qui permettra aux mineurs et aux veuves de mineur, jusqu’au dernier vivant, de bénéficier de leur régime spécifique.
L’article 1erest adopté.
L’article 2 et l’annexe A sont adoptés.
Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.
L’ensemble de la première partie du projet de loi est adopté.
Il est normal d’exprimer son inquiétude devant cette présentation insincère de la construction de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie Le comité d’alerte a fait part dans son avis d’un certain nombre de remarques à cet égard. En effet, le respect de l’objectif tel qu’il est prévu repose sur l’annulation de crédits mis en réserve en début d’année et sur l’utilisation de crédits disponibles d’ici la fin de l’année 2016 pour couvrir des dépassements sur les soins de ville et sur l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, hospitalier, et rappelons qu’une disposition du PLFSS pour 2017 propose également à cet effet un prélèvement de 200 millions d’euros sur les fonds de roulement de l’Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier – l’ANFH – et du Fonds pour l’emploi hospitalier en substitution de crédits intégrés jusque-là à l’ONDAM. On peut donc s’interroger puisque, pour assurer le respect de l’objectif, le comité d’alerte « estime prudent de maintenir en réserve un montant suffisant de crédits hospitaliers […] pour faire face à un éventuel dérapage en fin d’année. » Je rappelle également qu’il émet une réserve de méthode sur les éléments ayant permis l’élaboration de l’ONDAM pour 2017. En effet, l’évolution prévue des dépenses est minorée, encore plus qu’à l’accoutumée, plusieurs dispositions devant permettre de financer hors ONDAM certaines dépenses d’assurance maladie, ce qui nuit à la compréhension des évolutions sous-jacentes d’une année sur l’autre. La multiplication de mesures de régulation comptables réduit plus généralement la capacité de l’ONDAM à constituer l’outil efficace de pilotage et de maîtrise des dépenses d’assurance maladie qu’il doit rester.
Par conséquent, on attend à ce sujet des réponses de votre part, madame la ministre des affaires sociales et de la santé, parce que devant de telles dispositions, il est légitime de parler d’insincérité de l’ONDAM tel qu’il est présenté. Ce n’est pas seulement l’appréciation de députés, c’est tout de même aussi le contenu du rapport du comité d’alerte, et celui-ci ne s’exprime pas souvent en de tels termes. Tout cela soumet l’avenir à beaucoup d’interrogations… Peut-être l’avenir n’est-il pas une préoccupation majeure pour vous, mais il le sera en tout cas pour la prochaine majorité.
Ce n’est pas digne ce que vous dites ! Nous avons tous ici le sens des responsabilités !
Chacun a bien compris notre collègue Bernard Perrut : pour couvrir les dépassements de l’ONDAM 2016, le Gouvernement prévoit un prélèvement de 200 millions sur plusieurs fonds de roulement, crédits au départ destinés à la formation permanente du personnel hospitalier et au Fonds pour l’emploi hospitalier. Il est vrai que si tous les crédits alloués n’ont pas été dépensés, il n’y a pas de raison de les thésauriser et la loi autorise à les utiliser l’année suivante, mais vous les reversez, madame la ministre, au FMESPP – le fameux Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés – en substitution des crédits de l’ONDAM et donc pour sous-estimer son objectif de dépenses. Le comité d’alerte vous en a fait l’observation, émettant des réserves sur la méthode et sur la présentation des économies annoncées. Nous ne sommes pas satisfaits : afin de paraître respecter l’objectif, vous procédez à des transferts, ce qui s’appelle de la tuyauterie. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 270 .
On entre en effet dans les mécanismes obscurs de l’élaboration de cette loi de financement de la sécurité sociale. Il s’agit, au moyen de diverses tuyauteries, de racler les fonds de tiroirs en déshabillant Pierre pour faire semblant d’habiller Paul. L’Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier vous a pourtant interpellée, madame la ministre, il y a eu des rencontres entre cet important organisme et votre cabinet, des ouvertures semblaient se dessiner… Et puis on lui a claqué la porte au nez en lui disant : « Allez voir ailleurs. » Ce ne sont pas des méthodes. C’est pourquoi je dénonce ce hold-up et demande la suppression de l’article 3.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance-maladie, pour donner l’avis de la commission sur ces deux amendements de suppression.
Je me permets d’abord de renvoyer au commentaire de cet article que j’ai fait dans mon rapport. Je vais cependant répondre aussi précisément que possible à mes collègues. S’agissant du Fonds pour l’emploi hospitalier, l’importance de ses réserves est structurelle en raison du maintien de prélèvements de loin supérieurs à ses charges car, depuis 2006, ce fonds n’est plus mis à contribution au bénéfice du Fonds de compensation du congé de fin d’activité. Il en va de même pour l’Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier : selon mes informations, cette association enregistre une progression de ses produits de 4 % par an, supérieure à celle de ses charges de formation – qui se montent, elles, à 3 %. Il s’agit donc de ressources inemployées qui sont redirigées dans un souci d’équilibre. Pour ma part, en bonne ménagère, je trouve que c’est tout à fait logique et de bon sens.
Mesdames, messieurs les députés, je vous salue toutes et tous en ce début de discussion des articles. La présidence a été un tout petit peu rapide,…
…mais les articles 2 et 3 étant au fond liés, il n’y a pas d’inconvénient à ce que je réponde à l’interpellation de M. Perrut, reprise par M. Door lors de la défense de son amendement.
En ce qui concerne l’avis du comité d’alerte, non, monsieur Perrut, celui-ci n’a pas estimé le budget insincère et aucune autre institution, le Conseil d’État ou la Cour des comptes, n’a jamais évoqué une telle possibilité. Je tiens à insister là-dessus parce qu’il n’est pas acceptable de prétendre que nous maquillerions les comptes pour ne pas dire la réalité des choix faits et des politiques menées. Le comité d’alerte a indiqué d’abord, comme l’année dernière, que les prévisions que nous fixons pour l’évolution de l’ONDAM sont extrêmement exigeantes et supposent de la part du Gouvernement un pilotage qu’il qualifie « d’infra-annuel ». C’était le même avis qu’il nous avait donné l’année dernière, et nous en avons évidemment tenu compte. Je dois vous dire que nous procédons de toute façon à un pilotage infra-annuel. On a ainsi en cours d’exercice pris un certain nombre de dispositions – qui nous ont d’ailleurs permis de faire mieux que ce qui était prévu. Le comité d’alerte constate que les engagements seront tenus pour l’année 2016. Comme en 2015, il a réitéré ses inquiétudes quant au fait que l’ONDAM sera très difficile à boucler en raison notamment de l’évolution du prix des médicaments – un élément intéressant pour la suite de nos débats. Il rappelle que tenir l’ONDAM suppose que des mesures assez ambitieuses de régulation du prix des médicaments soient mises en place. Le Gouvernement tient évidemment compte de ses recommandations et nous allons dès le début du mois de janvier procéder à un suivi extrêmement précis de l’ONDAM. Il ne s’agit donc pas d’insincérité mais bien de la réalisation d’un budget dans des conditions extrêmement exigeantes.
J’en viens aux deux amendements, présentés avec des argumentations qui se complétaient. J’émets un avis défavorable en indiquant qu’en raison précisément de la contrainte budgétaire qu’a rappelée le comité d’alerte, nous ne devons pas, comme l’a dit Mme la rapporteure, laisser de l’argent dormir dans des caisses alors qu’il pourrait être utilisé à bon escient ailleurs. Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales montre que les réserves de l’ANFH sont structurellement excédentaires de 368 millions d’euros. Cela veut dire que, quoi qu’elle mène comme actions de formation, il lui restera 368 millions d’euros de réserves. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement propose dans cet article d’affecter 300 millions d’euros à l’investissement hospitalier. Il ne s’agit donc pas de tuyauteries dans lesquelles disparaîtrait cet argent, mais d’affecter celui-ci utilement au monde hospitalier, c’est-à-dire à l’investissement.
Mme la ministre et moi ne sommes pas du tout sur la même longueur d’onde et j’aimerais que nous puissions nous comprendre.
Madame la ministre, vous présentez le PLFSS depuis cinq ans et c’est la première fois que le comité d’alerte vous alerte et conteste la méthode du Gouvernement et la façon dont il présente ses économies. Selon le comité, une partie des données ne correspondraient pas à des économies mais à des réaffectations de recettes et de dépenses, ce qui n’était pas prévu lorsque l’ONDAM a été créé il y a une vingtaine d’années.
Le comité de pilotage de l’ONDAM, qui a été créé au cours de la précédente législature, avait déjà posé ces questions et y avait répondu en insistant sur l’importance de conserver des réserves – réserves que vous allez d’ailleurs utiliser.
Le désaccord entre vous et le comité porte sur la méthode et sur l’appropriation de la dynamique des dépenses d’assurance maladie, étant entendu que des dépenses nouvelles vont apparaître, ce qui ne manquera pas de créer des difficultés.
C’est la première fois que le comité d’alerte ouvre un débat. Essayons de nous entendre, madame la ministre, et évitons de dire blanc d’un côté et noir de l’autre. Quelque chose s’est réellement passé pour que le comité d’alerte intervienne.
Cet article est symptomatique des tours de passe-passe budgétaires auxquels le ministère se livre pour contenir de manière artificielle les dépenses de l’ONDAM.
Le fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés finance des opérations de modernisation dans nos établissements hospitaliers. Il constitue à ce titre un levier déterminant d’investissement qui permet d’améliorer la qualité de la prise en charge des patients et contribue à améliorer l’efficience des actes pratiqués.
Les investissements et les opérations de modernisation qui sont réalisés dans ce cadre participent également, madame la ministre, à rendre effectif le virage ambulatoire, lui-même source d’économies identifiées de longue date et sur tous les bancs de cet hémicycle.
D’une manière générale, investir dans les établissements, publics ou privés, participe d’une meilleure maîtrise de la dépense de santé à moyen et à long terme. Dans ce cadre, on ne peut que regretter un montant de crédits déchus de 25 millions d’euros pour 2016, ce qui interroge à la fois sur les modalités d’engagement des crédits votés et sur la complexité des procédures à gérer pour obtenir l’attribution de ces crédits.
Cela ôte aussi un peu de sa crédibilité à la dotation du fonds pour l’année prochaine – Mme la rapporteure Delaunay fait référence à une gestion de bon père de famille – dans la mesure où chacun peut se demander à combien de millions d’euros s’élèveront les crédits déchus pour 2017.
Par ailleurs, la réduction de 62 millions d’euros de la participation de l’assurance maladie au financement du fonds s’accompagne d’une participation exceptionnelle du Fonds pour l’emploi hospitalier, à hauteur de 50 millions d’euros, et de l’Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier, à hauteur de 150 millions d’euros.
Cela revient à contenir artificiellement des fonds, par un jeu d’écriture que vous assumez, madame la ministre – mais alors il faut le dire – ce qui relève de l’astuce comptable, au même titre que vous le faites pour l’assurance maladie.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous proposons la suppression de ces dispositions. Je rappelle pour ceux qui nous écoutent que le déficit des hôpitaux, qui était quasiment nul en 2012, atteint aujourd’hui près de 550 millions d’euros.
Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable. Mais je signale à M. Richard que la notion de gestion « en bon père de famille » a disparu depuis que nous avons voté la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes !
Je ne voudrais pas assister à des manifestations de sexisme dans cet hémicycle !
Avis défavorable.
L’amendement no 594 n’est pas adopté.
Cet amendement vise à supprimer les alinéas 3 et 4 de l’article 3.
Cela relève en effet d’une saine gestion que de réguler les fonds excédentaires dormants – peut-être est-ce cela une gestion de bon père de famille. Toutefois, en cette première année de mise en oeuvre des GHT – groupements hospitaliers de territoire –, l’intervention de l’Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier aurait été tout à fait opportune.
Défavorable.
L’amendement no 51 n’est pas adopté.
Cet amendement a pour objet d’affecter 20 millions d’euros à l’ANAH – Agence nationale d’amélioration de l’habitat – pour financer l’adaptation de cent mille logements correspondant à l’engagement pris dans le cadre de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, dite loi ASV. Cet engagement est aujourd’hui tenu.
Je saisis l’occasion de l’examen de cet amendement pour répondre de façon plus large aux interpellations de M. le rapporteur Philip Cordery et de Mmes Huillier et Carrillon-Couvreur sur les réserves de la CNSA – Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
L’amendement vise à mobiliser ces réserves conformément à leur objet, à savoir l’accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées. Nous avions déjà procédé de la sorte l’année dernière en affectant 20 millions d’euros, ce qui porte l’effort global en direction de l’ANAH et de l’adaptation des logements à 40 millions d’euros.
Vous vous interrogez sur l’utilisation des réserves destinées au financement des établissements et services pour personnes âgées et personnes handicapées dans le cadre de l’objectif global des dépenses de santé.
On ne peut pas dire que cette mobilisation des réserves compense un désengagement de l’assurance maladie. L’ONDAM médico-social augmente de 2,9 %, soit nettement plus que l’ONDAM général. Cet abondement permet d’accélérer la mise en oeuvre des réformes de la tarification et de la contractualisation et de transformer l’offre en direction des personnes âgées et des personnes handicapées.
Je vous rappelle, madame la députée Huillier, que le soutien aux établissements et services médico-sociaux, qui sont ainsi financés, a permis de 2012 à 2016 l’installation de 18 700 places nouvelles pour personnes handicapées, de 25 000 places nouvelles en EHPAD – établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – et de 5 700 places dans le champ des services de soins infirmiers à domicile.
Au cours de cette période, les mesures nouvelles à destination de l’offre de prise en charge des personnes handicapées représentent au total plus de 1,2 milliard d’euros ; quant à celles visant au renforcement de l’offre pour les personnes âgées, elles atteignent 1,5 milliard d’euros.
Comme vous le voyez, madame la députée, nous nous engageons fortement en faveur des personnes âgées et handicapées. La mobilisation des réserves de la CNSA nous permet d’aller au-delà à travers des dispositions en direction des MDPH – maisons départementales des personnes handicapées –, des mesures de soutien aux services à domicile et des aides à l’investissement.
Comme vous le savez, la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement prévoit d’allouer chaque année 100 millions d’euros au PAI – plan d’aide à l’investissement – en 2016, 2017 et 2018. Il faut y ajouter 40 millions d’euros destinés aux résidences autonomie et 60 millions aux établissements pour personnes handicapées. Ces chiffrent témoignent d’un effort réellement considérable.
Enfin, madame la députée, je peux vous annoncer dès aujourd’hui que le plan d’aide à l’investissement 2017 sera renforcé de 15 millions d’euros supplémentaires qui permettront de favoriser l’investissement dans le secteur médico-social.
Il s’agit d’un axe très important de la convention signée, comme cela a été dit, entre l’Agence nationale de l’habitat, la CNSA et l’État. Cet abondement est effectué en contrepartie de l’engagement de l’ANAH en faveur du logement des personnes âgées et handicapées. Vous pouvez donc vous en douter, la commission s’est montrée très favorable à ces mesures prévues dans la loi relative au vieillissement.
Je ferai pour commencer une remarque. Nous nous souvenons de l’opposition féroce qu’avait manifestée la gauche lors de la création de la « journée de solidarité nationale », initialement fixée au lundi de Pentecôte, mais cela a légèrement évolué.
Cette mesure a permis d’autoriser et de financer un grand nombre de places destinées aux personnes âgées en situation de dépendance. Mais la situation est loin d’être résolue. Aussi, madame la ministre, avant d’exprimer mon opposition à cet amendement, je voudrais que vous nous précisiez effectivement où sont autorisées et situées les nouvelles places. Car dans la région Rhône-Alpes, en particulier dans le département de Haute-Savoie, nous n’avons constaté aucune création de place. Les personnes âgées se retrouvent parfois dans une situation telle qu’elles se suicident car nous n’avons pas de solution à leur proposer. J’aimerais que vous répondiez à cette question d’une dramaturgie maximale.
Je voudrais à présent vous exprimer notre surprise. Que la CNSA s’engage dans cette opération peut paraître plausible, mais seulement dans la mesure où il n’y a plus besoin de résoudre d’autres problèmes.
Enfin, 20 millions d’euros pour adapter cent mille logements, cela représente à peine 200 euros par logement, desquels il faut retirer les frais de dossier. Cela ne va pas bien loin.
En conclusion, nous trouvons cet amendement inadapté et c’est la raison pour laquelle nous nous opposerons à son adoption. J’attends vos réponses, madame la ministre.
Depuis quatre ans, nous assistons sans arrêt à des opérations de débasage et de reprise affectant les crédits de la CNSA, opérations que vous aviez pourtant, lorsque vous étiez dans l’opposition, tellement critiquées – sur ce terrain, nous étions des enfants de choeur à côté de vous – mais après avoir créé la CASA – contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie – en 2003, vous avez détourné plus d’un milliard d’euros qui était au départ destiné aux personnes âgées !
Je ferai la même remarque que Bernard Accoyer : dans mon département, il est extrêmement difficile de créer de nouvelles places. Les crédits suffisent à peine à financer les besoins courants et pour créer de nouvelles places il ne reste pratiquement plus rien.
Je suis tout à fait favorable à l’amendement du Gouvernement. Si je me félicite des financements qui sont apportés en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées, et je sais les efforts qui ont été faits pour améliorer la situation des personnes vulnérables, je m’élève contre le fait qu’on ait choisi la CASA pour financer ces efforts. C’est uniquement ce point qui me gêne, et vous m’en excuserez, madame la ministre. La CASA n’a pas été créée pour cela, même si les financements sont opportuns – j’estime qu’il en faudrait encore plus. Vous allez me dire que l’on prend l’argent là où il est, mais je ne peux que regretter que les réserves de la CASA ne servent pas à financer les mesures contenues dans la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, dite loi ASV.
Cela dit, tout ce qui est prévu dans ce texte me convient parfaitement. Ne pensez surtout pas, madame la ministre, que je regrette quoi que ce soit, bien au contraire. Je ne peux vous adresser que des compliments, mais ce léger problème d’affectation de recettes me gêne un peu.
L’amendement no 723 est adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
L’article 4 est adopté.
Il s’agit là encore de l’ONDAM et du comité d’alerte. Compte tenu du dynamisme des dépenses qui interviendront en 2016, sachant que l’année n’est pas encore terminée, le comité vous a alertée, madame la ministre, en estimant prudent de maintenir en réserve un montant suffisant de crédits hospitaliers dans le cadre de l’ONDAM.
Rappelons-nous que la loi de 2004 a été renforcée en 2011 et qu’en 2013, c’est vous-même, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics, qui aviez fixé le seuil d’alerte autour de 0,5 % alors qu’il était auparavant fixé à 0,75 %. Aujourd’hui si l’on considère la situation tendue dans laquelle se trouvent les comptes des hôpitaux, alors qu’on ne sait pas comment vont évoluer les dépenses d’assurance maladie au cours des deux derniers mois de l’année, on peut réellement s’inquiéter.
Le comité d’alerte vous invite à une extrême prudence en vous rappelant que la situation est sous tension. C’est pourquoi vous devez conserver cette réserve et ne pas la faire disparaître. Nous demandons donc, par cet amendement, la suppression de l’article 5.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 271 .
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je vais une nouvelle fois vous interroger en espérant que vous daignerez me répondre.
Il ressort de l’exposé des motifs de l’article 5 que vous anticipez une dynamique plus importante que prévue des dépenses des établissements hospitaliers, ce qui n’a rien d’étonnant, puisque vous n’avez conduit aucune réforme de structure.
Plus inquiétant, vous allez effectuer un prélèvement de 200 millions sur les contributions de l’assurance-maladie aux dépenses et services pour personnes âgées et handicapées. Quand on connaît la situation très tendue de ce secteur, on ne peut être qu’interloqué par une telle décision.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer l’article. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Nous avons tous lu le dernier avis du comité d’alerte, mais apparemment nous n’en tirons pas les mêmes conclusions.
Vous proposez de supprimer l’objectif des dépenses pour 2017, donc le financement des dépenses d’assurance maladie des patients en ville, à l’hôpital et dans les établissements médico-sociaux. Nous considérons pour notre part qu’il faut mettre à contribution les réserves prudentielles qui ont été constituées.
C’est aussi ce que pense le comité d’alerte, approuvé par la commission, au nom de laquelle j’émets un avis défavorable aux amendements.
Avis défavorable. Il s’agit d’un article obligatoire, qui fixe l’objectif de dépense pour l’année. Cet objectif étant exigeant, nous serons extrêmement attentifs aux conditions de réalisation du budget.
Au reste, je ne suis pas certaine d’avoir compris par quelles dispositions vous souhaitez remplacer l’article. Voulez-vous que nous fixions un objectif de dépense plus élevé, afin de pourvoir aux différentes interventions que vous appelez de vos voeux ? Ou faudrait-il écouter ceux d’entre vous qui jugent le budget trop laxiste et nous reprochent de faire augmenter l’ONDAM de 2,1 % par rapport à 2016 ? Quoi qu’il en soit, le comité d’alerte juge que cet objectif est très exigeant et considère qu’il faut nous donner les moyens de l’atteindre.
Le problème n’est pas là ! La vérité est que vous n’avez procédé à aucune réforme de structure !
Madame la ministre, la Cour des comptes souligne que l’ONDAM est sous tension. Elle pointe un problème et exprime une inquiétude. Face à cette situation, votre position consiste à répéter que tout va bien…
Le secrétaire d’État au budget peut-il nous indiquer à combien se monte la réserve de crédits pour les dépenses hospitalières ? J’ai en tête le chiffre de 500 millions.
558 millions !
À propos de l’ONDAM, c’est l’absence de réforme de structure que stigmatise la Cour des comptes.
Tous les pays se sont réformés sur le plan structurel. Tous ont utilisé les marges nouvelles apportées par le progrès, notamment en matière de médicaments, pour réformer l’hôpital, contenir son enveloppe, tenir les objectifs de dépense et permettre aux assurances maladie obligatoires de devenir excédentaires.
C’est ce manque, cette défaillance, cette absence de courage que nous dénonçons.
Loin d’être en position de pavoiser sur la situation de la branche maladie ou l’équilibre des comptes, vous mettez en péril l’avenir de l’assurance maladie, de l’accès aux soins et de la Sécurité sociale.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.
M. Door m’a interrogé légitimement sur la technique qui consiste mettre des crédits en réserve, c’est-à-dire à constituer, selon l’expression consacrée, une réserve de précaution. Cette méthode est souvent utilisée dans le budget de l’État.
Pour les dépenses hospitalières, le montant de la réserve atteint presque 560 millions ou plus précisément – puisque vous êtes quelqu’un de précis, monsieur Door – 558 millions d’euros.
L’important, lorsque ces réserves sont dégelées, c’est qu’elles soient utilisées pour l’hôpital. Nous y avons toujours veillé quand nous y avons recouru en fin de gestion et nous les avons toujours affectées au but pour lequel elles avaient été constituées.
En l’espèce, je ne sais s’il faut parler d’une gestion de bon père de famille ou de bonne ménagère.
Mme Delaunay m’a vexé en parlant tout à l’heure d’une gestion de bonne ménagère. Il m’arrive aussi – pas souvent, je vous l’accorde – de faire le ménage…
L’article 5 est adopté.
Je mets aux voix l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.
L’ensemble de la deuxième partie du projet de loi est adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article.
La parole est à M. Dominique Tian.
Parler de « niches sociales », comme le fait l’exposé des motifs, à propos de l’aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d’entreprises, l’ACCRE, qui permet à des cadres, sous certaines conditions, de créer ou de reprendre une entreprise, me semble invraisemblable. On a connu d’autres niches sociales que les aides aux chômeurs !
Nous sommes face à un vrai débat, que nous rouvrirons tout à l’heure, puisque j’ai cru comprendre en commission que les choses allaient peut-être évoluer. Je le souhaite que ce soit le cas. À défaut, nous enverrions un très mauvais signal aux demandeurs d’emploi.
Pour avoir travaillé pendant près de quinze années dans le financement et la création d’activité, je peux moi aussi témoigner de l’importance de l’ACCRE. Je crois sincèrement que, dans une période de chômage de masse, il est important de ne pas déstabiliser ce qui fonctionne bien par une politique de stop and go.
L’an dernier, en ma qualité de rapporteure pour avis du budget de l’emploi et du travail, j’avais axé mon avis budgétaire sur nos politiques d’aide à la création d’entreprise par les demandeurs d’emploi.
Il ne s’agit pas de prétendre que la création d’activité est la solution miracle au chômage de masse ni de faire de chaque demandeur d’emploi un chef d’entreprise qui s’ignore, mais il serait dommageable de passer à côté d’une mutation majeure de notre société.
Vous le savez, dans certains quartiers ou zones rurales, il est plus difficile pour certains jeunes de trouver un emploi que de créer leur propre activité. Nous devons tout mettre en oeuvre pour soutenir les talents et les compétences dans tous les territoires.
Tous les acteurs de la politique d’aide à la création d’entreprise que j’ai auditionnés estiment que les trois grands dispositifs d’aide publique que sont l’ACCRE, le NACRE – le nouvel accompagnement pour la création ou la reprise d’entreprise – et l’ACRE – l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise – font leurs preuves et se montrent plutôt efficaces.
Ils soulignent l’importance de stabiliser et de conforter les dispositifs de création d’entreprise par les demandeurs d’emploi, voire de les ouvrir à d’autres publics. À cette fin, j’ai déposé avec de nombreux collègues un amendement visant à étendre, à des fins d’insertion, le bénéfice de l’ACCRE aux personnes exerçant une activité réduite.
Malheureusement, l’amendement qui visait à apporter une réponse concrète permettant d’officialiser de petites activités jusqu’alors informelles et, partant, à abonder in fine le budget de la Sécurité sociale, a été déclaré irrecevable, au motif qu’il contrevenait aux dispositions de l’article 40.
J’espère que le Gouvernement reprendra cette proposition, qui s’inscrit dans le droit fil des dispositions de l’article 20 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 que nous avions adoptée l’an dernier.
L’article 6 prévoit de raboter quelques niches sociales pour récupérer des montants relativement modestes – 30 millions – en restreignant les conditions d’éligibilité aux exonérations sociales ouvertes par l’aide destinée aux chômeurs créateurs et repreneurs d’entreprise.
Cette mesure semble en contradiction avec le discours du Gouvernement, qui n’a cessé de vanter les mérites de l’entreprenariat et de valoriser l’esprit d’entreprise. De plus, selon l’annexe 5 jointe au projet de loi, il existe quatre-vingt-douze dispositifs d’exonération sociale ou d’exemption d’assiette, qui représentent en 2016 un coût de 44,5 milliards, soit 10 milliards de plus qu’en 2014.
On se demande pourquoi le Gouvernement choisit de remettre en cause un dispositif utile, qui permet à des chômeurs de rebondir, au lieu de s’attaquer en priorité aux quatre-vingt-douze niches sociales qui sapent le financement des organismes de Sécurité sociale.
Je me félicite que la disposition visant à restreindre l’accès à l’ACCRE ait été supprimée en commission. J’espère que nous ne reviendrons pas sur cette décision. Ce serait en effet un très mauvais signal envoyé aux chômeurs qui souhaitent créer leur activité.
Pour ma part, je voterai les amendements visant à supprimer les alinéas 5 à 7 de l’article 6.
Sur les alinéas 5 à 7, je partage l’analyse des orateurs qui m’ont précédé, mais, pour ma part, j’interviendrai sur les alinéas 1 à 4.
À l’unanimité, notre assemblée a instauré, pour les territoires le plus en difficulté, ceux dont le taux de chômage dépasse de 3 points la moyenne nationale, ceux qui voient partir leur population, ceux qui connaissent un taux annuel de perte d’emploi supérieur à 0,75 %, le dispositif « bassin d’emploi à redynamiser », dit BER.
Au lendemain de cette décision, deux bassins d’emploi – celui de la vallée de la Meuse, qui recouvre les trois quarts du département des Ardennes, et celui de Lavelanet dans l’Ariège, terre d’élection du sénateur Jean-Pierre Bel –, ont été élus à ce dispositif, qui a été prolongé le 5 décembre 2014.
Le secrétaire d’État qui, à l’époque, avait apporté le soutien du Gouvernement à une prolongation de trois ans, avait jugé cette durée « convenable, de nature à assurer une bonne visibilité du dispositif ». Nous ne comprenons donc pas pourquoi, dans ce PLFSS, une décision surgie on ne sait d’où tend à limiter à l’exonération des charges sociales, déjà limitée par ailleurs.
Je rappelle en effet que le dispositif d’exonération des charges versées à URSSAF ne fonctionne à plein régime qu’entre 1 et 1,4 SMIC et qu’il décroît ensuite. Heureusement pour notre département très industriel, l’industrie, soumise à la concurrence internationale, est un des secteurs qui profite le plus de la mesure, laquelle s’étend même à des personnes percevant plus de deux fois le SMIC.
Revenir sur cet avantage entraînerait une grande insécurité juridique et remettrait en cause la confiance dans la parole de l’État et du Gouvernement. En outre, cette décision, qui ne rapporterait que très peu d’argent, affaiblirait nos territoires.
Voilà pourquoi, chers collègues, puisque nous examinons un texte qui n’a jamais été partisan – la mesure avait été votée à l’unanimité –, je vous appelle à ne pas remettre en cause et à garantir jusqu’au 31 décembre 2017 un dispositif essentiel pour les territoires en difficulté, comme celui que j’ai l’honneur de représenter.
Les Ardennais sont manifestement très motivés par l’amendement de suppression que nous avons déposé. Nous estimons en effet que cet article, y compris dans ses premiers alinéas, est injuste.
Madame la ministre, comme l’année dernière, vous cherchez à faire des économies, de petites économies, sur le dos des territoires en difficulté. Le mécanisme du bassin d’emploi à redynamiser, le BER, a donné de bons résultats dans le département des Ardennes qui, pourtant, revenait de loin. Pourquoi vouloir abîmer ce qui fonctionne ? Pourquoi rechercher des moyens auprès de territoires en grande difficulté ? On ne peut parler de saupoudrage, puisque cette exonération, applicable au département des Ardennes, concerne 1 118 établissements, soit 4 000 salariés ardennais, principalement pour les petites et toutes petites entreprises, de moins de cinquante salariés. Sur 60,4 millions d’euros d’exonération de charges sociales depuis 2007, 12,2 millions ont contribué au développement des entreprises et 48,2 millions ont favorisé l’emploi lié à la création et à la reprise d’entreprises. L’impact du dispositif du BER sur l’économie des communes éligibles est très significatif. Quel mauvais signal donnons-nous aux entreprises, à changer les règles sans arrêt, à les précariser chaque année, à chaque PLFSS ! Le bilan du BER, j’y insiste, est, localement, très satisfaisant : malgré la crise, plus de 2 800 emplois ont été créés ou maintenus en six ans. En commission, la semaine dernière, lorsque j’ai défendu cet amendement, de nombreux députés, de droite, mais aussi du centre et de gauche, l’ont soutenu, pour avoir été sensibles à ces arguments. J’espère que nous allons pouvoir tous nous retrouver, à nouveau, autour de cet important dispositif pour un département en difficulté.
Nous restons dans les Ardennes, puisque la parole est à M. Christophe Léonard.
Chers collègues, je voudrais à mon tour intervenir sur l’article 6, qui vise à raboter ou à diminuer les avantages offerts par deux dispositifs : l’ACCRE, l’aide aux demandeurs d’emploi créant ou reprenant une entreprise, et le BER, l’exonération bénéficiant aux entreprises implantées dans un bassin d’emploi à redynamiser. S’agissant du premier dispositif, je me rangerai aisément aux arguments développés il y a quelques instants par notre collègue Chaynesse Khirouni, très éclairée sur le sujet. Le BER, quant à lui, fait partie des marronniers de notre discussion budgétaire puisque, comme cela a été dit par mes deux collègues ardennais précédemment, nous en avions discuté lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2013 ; nous avions alors reconduit le dispositif pour une année, jusqu’au 31 décembre 2014. Nous en avons rediscuté lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2014, pour le prolonger, cette fois, de trois ans. Nous en avons encore discuté l’année dernière avec M. le secrétaire d’État chargé du budget, qui était précédemment rapporteur général du budget. Il serait temps d’arrêter d’en discuter pour laisser vivre ce dispositif jusqu’au terme que nous lui avons fixé, soit le 31 décembre 2017. Je lis dans l’étude d’impact qui nous a été proposée que l’on attend de la réforme du BER 1 million d’euros. Je plaide ici pour la stabilité, la lisibilité et le bénéfice de contreparties. Nous avons en effet voté dans cette enceinte des dispositifs, tels le CICE, dépourvus de contreparties. Or, le dispositif des bassins d’emploi à redynamiser offre pour contreparties des créations d’emplois. Dans une circonscription comme la mienne, il a accompagné la reprise d’une unité industrielle comme Ardam Electrolux à Revin, ou la librairie Rimbaud à Charleville-Mézières. Je voterai donc, pour ma part, les amendements de suppression de l’article 6.
Je souhaite répondre aux orateurs, ce qui m’amènera peut-être à anticiper nos travaux sur cet article. Concernant le dispositif du BER, j’avais accepté et soutenu sa prorogation jusqu’à la fin 2017. Les effets de cette mesure ne s’arrêteront d’ailleurs pas au 1er janvier 2017 pour les entreprises existantes : l’article, tel qu’il est rédigé, concerne le flux et non le stock.
Quels sont les effets de cet article ? Auparavant, tous les salaires étaient exonérés d’un montant de charges correspondant à 1,4 fois le SMIC. Désormais, les salaires seront toujours exonérés jusqu’à 1,4 SMIC, puis le seront de façon dégressive jusqu’à 2 SMIC. Ce n’est donc pas une mesure complètement renversante.
Ce sujet, on l’a dit, constitue un marronnier. Nous avons toujours dit qu’il y avait là une situation – ne voyez rien de péjoratif dans mes mots – qui correspondait à une niche sociale.
Il n’y a pas de petites économies, monsieur le député, comme vous le dites généralement vous-même.
Concernant le dispositif de l’ACCRE, je rappelle, tout d’abord, que l’on ne touche pas aux mesures d’accompagnement de la création ou de la reprise d’entreprise par des chômeurs. Ensuite, madame Chaynesse Khirouni, le Gouvernement vous proposera de reprendre votre amendement, relatif à l’association pour le droit à l’initiative économique, l’ADIE, qui vient d’être déposé et qui se trouve placé après l’article 6. L’ADIE est, il est vrai, une petite structure, mais elle accomplit un travail très fin sur le terrain, un travail de proximité intéressant. La charge financière induite par votre amendement est d’ailleurs voisine de zéro.
Quelles modifications apportons-nous au dispositif de l’ACCRE ? Cette aide fait aujourd’hui bénéficier d’exonérations de cotisations les créateurs ou repreneurs d’entreprise, sans condition de revenus. Ce que nous souhaitons faire, c’est élargir le bénéfice de l’ACCRE aux salariés des entreprises en difficulté qui reprendraient une autre entreprise que la leur. En effet, à l’heure actuelle, cette aide ne peut bénéficier qu’à des salariés d’une entreprise en difficulté reprenant leur entreprise. Par ailleurs, nous entendons placer le dispositif sous conditions de revenus. Quels seront les seuils ? L’exonération sera totale jusqu’à un revenu de 19 000 euros, puis sera dégressive jusqu’à un revenu de 38 000 euros. Il me semble que ces seuils correspondent – je pèse mes mots – à des revenus décents.
Oui, mais l’exonération sera totale jusqu’à ce montant, qui représente un peu plus de 1 500 euros par mois. Au-delà, jusqu’à 38 000 euros, on sera exonéré de façon dégressive, tout en bénéficiant, bien sûr, de l’exonération précédente. On relève aujourd’hui des situations quelque peu paradoxales, qui justifient cette position, qui me paraît équilibrée. Le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général a déposé un amendement no 857 visant à modifier ces seuils et les indexer sur un pourcentage du plafond annuel de la Sécurité sociale, le PASS : 0,5 PASS au lieu de 19 000 euros, et 0,75 PASS au lieu de 38 000 euros. Le Gouvernement se montrera, là aussi, favorable à l’amendement de votre rapporteur dans le cadre de la discussion à venir.
Mais, mesdames, messieurs les députés, il faut être clair : j’ai entendu beaucoup d’orateurs, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances comme du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, nous dire que nous n’avons pas réduit le nombre de niches, alors que nous nous étions engagés à le faire. Mais, chaque fois que l’on essaie de retravailler sur une niche, qu’elle soit fiscale ou sociale, on se heurte à des levées de bouclier. Que ces niches concernent des secteurs géographiquement très ciblés ou des types d’activités ou de reprise précisément définis, leur remise en cause conduit tout le monde à s’indigner. Je pense qu’il est judicieux de travailler sur ces dispositifs, en instituant de la progressivité ou de la dégressivité – en l’occurrence, on vous propose la dégressivité en fonction du niveau de revenu. Au demeurant, la plupart des rapports qui examinent l’efficacité de ces dispositifs sont généralement plus sévères que ne l’est le Gouvernement.
À ce stade du débat, je suis, pour ainsi dire, effondré. Pour que chacun de nos collègues sache de quoi il retourne, je rappelle que le dispositif des bassins d’emploi à redynamiser est beaucoup moins intéressant que le mécanisme des zones franches urbaines. Premièrement, le mécanisme des zones franches urbaines offre des exonérations de charges à tout le stock d’entreprises, tandis que le dispositif des bassins d’emploi à redynamiser n’offre d’exonérations qu’en cas de créations d’emplois. Deuxièmement, le dispositif des BER prévoit une exonération des charges URSSAF payées par les employeurs jusqu’à 1,4 SMIC et des exonérations d’impôts locaux, qui ne sont pas compensées par l’État. Ce sont les collectivités locales, dans un département ayant, par définition, peu de moyens, qui font le choix de renoncer pendant cinq ans aux impôts locaux pour favoriser le développement économique. Troisièmement, 922 entreprises en ont profité dans le département des Ardennes pour 3 216 emplois. On ne parle donc pas de multinationales, mais de PME. En moyenne, cela concerne trois ou quatre emplois par entreprise. Quatrièmement, que nous dit-on dans l’étude d’impact du Gouvernement ? Au-delà de 2 SMIC, le surcoût pour l’entreprise excède 500 euros par mois, pour atteindre 6 550 euros par an. Ce n’est pas quelque chose que l’on peut rayer d’un trait de plume.
Enfin, mes chers collègues, nous avons tous souhaité, en 2014, prolonger le dispositif jusqu’au 31 décembre 2017. Chacun et chacune d’entre nous est engagé pour défendre le développement économique des territoires. Vous savez – nous savons tous – qu’un projet de création ou d’extension d’entreprise ne se réalise pas en quinze jours. Les projets d’extension d’entreprise, les projets d’investissement du 1er trimestre 2017 sont déjà élaborés. Si l’on vote cet article, on portera atteinte à la parole de l’État. Des porteurs de projets de création d’entreprise, d’investissement, à qui l’on avait présenté les débats de l’Assemblée et indiqué que le dispositif serait stable jusqu’au 31 décembre 2017, vont découvrir qu’au détour du PLFSS, les aides sont rabotées. Mes chers collègues, je vous le dis très sincèrement : ce n’est pas, me semble-t-il, une manière de procéder. Tout cela pour espérer 1 million d’euros dans la partie la plus en difficulté de l’Ariège et des Ardennes ! Mes chers collègues, je vous demande de nous aider et de ne pas voter cet article en l’état. J’ai déposé un amendement de suppression de l’article : je le retire puisque le Gouvernement semble indiquer qu’il envisage une modification de l’ACCRE, mais j’appelle tous nos collègues à nous aider en votant l’amendement no 12 . De fait, vous avez constaté que les députés ardennais, toutes tendances politiques confondues, défendaient cette position de manière unanime.
L’amendement no 14 est retiré.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement identique no 54 .
Vous qualifiez de niche sociale un dispositif en faveur de chômeurs qui vont reprendre une activité et placer leur argent personnel – ce sont des cadres, dans la plupart des cas – pour essayer de sauver une entreprise ou pour la reprendre. C’est pour le moins absurde ! Adopter votre article revient à leur dire qu’après tout, ils sont plutôt bien indemnisés par Pôle emploi et que le mieux serait qu’ils restent dans leur coin et que, surtout, ils ne reprennent pas une entreprise, à plus forte raison dans un bassin d’emploi à redynamiser. Vous parlez d’une niche sociale, mais il s’agit plutôt d’une incitation. De fait, à défaut d’incitation, personne n’agira. Si quelqu’un doit reprendre une entreprise, il doit au préalable engager son argent, mais je vous signale que la moitié des entreprises disparaissent au bout de quatre ans. Il est extrêmement compliqué de créer ou de reprendre une entreprise : si elle a périclité, c’est parce que, dans la plupart des cas, il s’est passé quelque chose. Vous allez décourager les personnes les plus aptes à reprendre une entreprise dans les bassins d’emploi, pour quelques économies de bout de chandelle : c’est, je le répète, totalement absurde ! Comme je le disais tout à l’heure lors des questions au Gouvernement, vous en êtes là ! De surcroît, le dispositif est totalement inopérant. J’avoue que je suis complètement abasourdi par le raisonnement que vous tenez pour économiser 1 million d’euros. Tout à l’heure, on parlait de 30 millions, on est ici à bien moins que cela. Nous allons dire aux cadres qui allaient prendre ce risque que surtout, ils ne le prennent pas, pour la seule raison que ce dispositif constituerait une niche : c’est incompréhensible !
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général, pour donner l’avis de la commission ?
Le sujet est très difficile, tant pour l’exonération bénéficiant aux entreprises implantées dans un bassin d’emploi à redynamiser que pour l’aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprise, l’ACCRE.
Concernant les quatre premiers alinéas de l’article, qui portent sur les bassins d’emploi à redynamiser, la difficulté vient de ce que notre assemblée avait l’an dernier refusé la suppression du dispositif,…
…et le Gouvernement l’avait entendue. Une autre source de difficulté provient du vote de la commission des affaires sociales, qui a supprimé les dispositions relatives à l’ACCRE.
Pour en revenir à l’ensemble de cet article, le Gouvernement propose un dispositif cohérent avec ce qui a été fait pour de nombreuses autres dispositions. Pour les aides ou exonérations sociales, le niveau des revenus ou des chiffres d’affaires est envisagé de façon à lisser le volume des exonérations, le montant brut, en quelque sorte. En effet, une exonération totale est plus incitative si elle est appliquée à un emploi au SMIC qu’à un emploi rémunéré trois ou quatre fois le SMIC. On peut toutefois considérer que les entreprises situées dans les bassins d’emploi à redynamiser font exception, puisqu’elles peuvent avoir besoin d’embaucher des cadres ou des salariés rémunérés à un niveau de salaire bien supérieur au SMIC.
J’aimerais faire remarquer cependant que le dispositif du Gouvernement ne concerne que les entreprises nouvellement créées, et qu’il n’obère pas du tout le stock existant, pour lequel le dispositif en vigueur continuera de s’appliquer. En outre, l’économie réalisée est modeste : 1 à 2 millions d’euros.
Concernant les aides à la création d’entreprise, le Gouvernement propose non pas de remettre en question le dispositif, mais de le maintenir jusqu’à un certain plafond, que l’on peut réévaluer, ce que j’ai proposé de faire. L’exonération sera totale pour les revenus n’excédant pas la moitié du PASS, puis dégressive jusqu’à un montant de revenus égal à ce plafond. Je comprends que la suppression proposée par la commission puisse heurter : lorsque nous avons fait cette proposition, il a été dit que le message ainsi adressé était inopportun dans le contexte que nous connaissons.
J’ai également proposé que le dispositif soit étendu aux personnes reprenant une entreprise dans un des quartiers prioritaires de la ville, dont je précise qu’ils ne sont pas situés uniquement dans les grandes agglomérations, puisque le cas de Guéret a été mentionné.
Je propose donc de refuser l’amendement de l’opposition visant à supprimer l’ensemble de l’article. Ayant entendu certaines voix de la majorité, monsieur le secrétaire d’État, il me semble toutefois nécessaire de demander une suspension de séance afin que la majorité puisse examiner la façon dont elle va avancer sur ces sujets.
La parole est à M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
La commission des finances a également été saisie d’amendements de suppression de l’article 6 qu’elle a rejetés pour ensuite adopter cet article. Je voudrais m’en expliquer dans l’hémicycle.
Je rappelle tout d’abord qu’à titre personnel je n’utilise jamais le terme « niche », compte tenu de sa connotation, et lui préfère les mots « aides fiscales et sociales ».
À la commission des finances, nous examinons ces dispositifs selon deux critères simples : est-ce juste ? Est-ce efficace ? Je comprends qu’il y ait d’autres approches, plus psychologiques ou symboliques. À l’instar du Gouvernement, il me semble que nous n’irions pas très loin s’il fallait considérer qu’on peut se passer de petites économies pour de mauvaises raisons ; je le dis notamment à l’adresse de nos collègues députés qui siègent à droite de l’hémicycle, qui nous promettent monts et merveilles en matière de maîtrise des dépenses publiques, mais qui auront beaucoup de difficulté à mettre en oeuvre un tel programme s’ils arrivent aux responsabilités demain.
Pour le dispositif propre aux BER, nous en avons déjà débattu, l’économie réalisée n’est que de 1 million d’euros ; c’est un sujet très spécifique. S’agissant de l’ACCRE, en revanche, et à moins que l’étude d’impact transmise en même temps que l’article 6 ne soit contestée, nous ne voyons aucune raison à ce qu’elle n’entre pas dans le droit commun des autres dispositifs du même type, soumis à des règles de plafonnement. Et l’explication en est simple ; elle a été apportée à la fois par la Cour des comptes, que tout le monde se plaît à citer, en 2012, dans un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales de 2015, et auparavant, dans un rapport de l’Assemblée. Lorsqu’elles représentent un pourcentage infime des revenus concernés, ces aides sont inefficaces. Une aide fiscale ou sociale qui représente entre 15 et 25 % d’un revenu est efficace, une aide qui représente 1 % d’un revenu ne l’est pas.
Selon le dispositif actuel, un créateur d’entreprise qui perçoit 200 000 euros de revenus annuels bénéficiera d’une aide de 7 000 euros ; est-ce de l’argent public utilisé de façon efficace, est-ce incitatif ? J’entends l’objection qui consiste à dire que, psychologiquement, les personnes créant des entreprises avec des revenus élevés seraient moins incitées à le faire, mais je ne crois pas qu’un tel effet puisse se faire sentir à ce niveau-là. Du point de vue de la commission des finances, donc, si l’on veut essayer d’être rigoureux quant au bon emploi des deniers publics, ce mécanisme plafonné est plutôt une mesure saine et de bon sens ; j’ajoute qu’il ne concernerait d’ailleurs, l’étude d’impact le montre, que 10 % des bénéficiaires actuels de l’ACCRE. L’aide serait ainsi non pas dévalorisée mais protégée.
La commission des finances a donc rejeté les amendements de suppression de l’article et adopté celui-ci en l’état.
Je ferai trois remarques.
Premièrement, monsieur Tian, je ne connais pas de niche ne se présentant pas comme un dispositif incitatif. Cela n’aurait d’ailleurs pas de sens. Une disposition relative aux modalités de calcul soit d’un impôt soit de cotisations sociales qui exonère, dispense ou réduit les contributions à acquitter est nécessairement incitative.
Vous en avez pourtant fait des tonnes – pardonnez-moi cette familiarité – sur le sujet, arguant de ce que le dispositif était non pas une niche mais une mesure incitative ! Toutes les niches sont bien présentées par ceux qui en bénéficient comme n’étant pas autre chose qu’un dispositif incitatif.
Deuxièmement, je vois bien ce qui s’annonce : on commence à opposer les niches entre elles. On joue la Meuse…
…contre les zones franches urbaines. Je n’ai pas encore entendu parler de l’outre-mer, où il existe également un certain nombre de dispositifs d’exonération de cotisations. On reviendra certainement aussi sur la montagne un peu plus tard. Les discussions consistant à opposer les niches entre elles ou à opposer les territoires entre eux sont sans fin ; nous ferions mieux de travailler sur des dispositifs généraux. On s’aperçoit même parfois que certaines niches sont moins généreuses que les dispositifs de droit commun ; un formidable paradoxe !
L’argument principal, cependant, dont tout le monde doit prendre conscience, c’est que 87 % des personnes concernées ne seront pas touchées par l’article.
Les personnes ou les entreprises qui seraient concernées par l’article sont celles dont les revenus dépassent les sommes que j’ai évoquées tout à l’heure, et dont chacun appréciera la valeur. Elles pourront d’ailleurs toujours bénéficier d’exonérations, mais jusqu’à un certain plafond. Dominique Lefebvre mentionnait à l’instant des exemples extrêmes, que l’on peut aujourd’hui observer. Sans aller aussi loin, il faut bien comprendre que près de 90 % des bénéficiaires actuels – 87 % pour être exact – verront leur situation inchangée.
Si vous adoptez l’amendement de votre rapporteur, mesdames, messieurs les députés, la proportion sera de 92 %. En outre, cette disposition fait des gagnants, à savoir ceux dont les revenus se situent entre 0,5 et 0,75 PASS ; je pourrais vous montrer des courbes, mais ce serait alors très technique. La dégressivité démarre en effet pour un revenu supérieur et la sortie est plus rapide.
Telle est la réalité. Vous pouvez toujours estimer que c’est ruineux pour certains territoires ou scandaleux. L’enjeu reste de garantir un bon usage des aides sociales et d’éviter les abus – il y en a peu, mais il y en a – et ces modifications ne toucheront pas 90 % des personnes concernées. Les dispositifs d’accompagnement tels que l’ARCE, l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise, évoquée par Chaynesse Khirouni tout à l’heure, resteront par ailleurs inchangés. Cette solution me paraît donc tout à fait raisonnable.
La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.
Comme il est fréquent, le Gouvernement a dialogué avec sa majorité. Il souhaite donc modifier l’article 6 par un amendement supprimant les alinéas 1 à 4. J’ignore si cette précision orale suffit ou si vous souhaitez procéder à une brève suspension de séance, monsieur le président.
Ce n’est pas nécessaire, monsieur le secrétaire d’État. Nous vous avons bien compris. En outre, cet amendement existe déjà.
Le Gouvernement souhaite donc déposer un amendement supprimant les alinéas 1 à 4, c’est-à-dire proposant de continuer à considérer la Meuse comme un département nécessitant un dispositif exceptionnel.
En effet, ou plus exactement de la vallée de la Meuse dans les Ardennes ! Au temps pour moi. En revanche, s’agissant du reste de l’article, le Gouvernement soutiendra l’amendement de M. le rapporteur Bapt, comme je l’ai déjà indiqué.
Je félicite M. Warsmann, un vrai politique ! Il me semble que vous avez refusé tout à l’heure que l’on entre dans des petites négociations, monsieur le secrétaire d’État, d’autant plus que les DOM-TOM ont oublié leur liste de courses ! En l’occurrence, vous divisez pour mieux régner ! Certains y gagnent et les autres sont de la revue ! On ne peut pas fonctionner ainsi ! Bien entendu, nous voterons l’amendement qui satisfait certains de nos collègues, mais cette histoire est tout de même assez compliquée ! Il n’est pas question de retirer l’amendement.
Si je comprends bien, tout se passe comme si l’amendement no 12 , dont M. Warsmann est le premier signataire et dont je suis cosignataire, était accepté, ce dont je me réjouis. En revanche, il me semble que le débat sur l’ACCRE – Aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise – reste entier. J’invite fortement M. Bapt à reprendre la position qu’il a adoptée l’année dernière en commission, le Gouvernement s’étant alors déjà livré à une tentative de ce genre, sur la base de laquelle nous avons supprimé le plafonnement de l’ACCRE en fonction des ressources.
Mais si ! L’ACCRE a été déterminant pour la création de certaines entreprises, comme Mme Khirouni l’a très bien dit tout à l’heure. Notre objectif, c’est que les demandeurs d’emploi retrouvent un emploi et créent des entreprises. Quant aux plafonds évoqués par M. le secrétaire d’État, de quoi parle-t-on on ? Il s’agit de rendre le dispositif dégressif à partir d’un revenu de 18 000 euros par an, soit 1 500 euros par mois. Comment voulez-vous créer une entreprise avec 1 500 euros par mois ? Par ailleurs, nous sommes loin du montant de 900 000 euros évoqué par M. Dominique Lefebvre, le dispositif prévoyant de n’attribuer aucune somme à partir de 30 000 euros. Il faut, me semble-t-il, savoir de quoi on parle et ramener les choses à leur juste réalité.
Je ne suis pas intervenu jusqu’à présent sur cet article introduit par le Gouvernement, qui consiste tout de même à faire contribuer les territoires les plus en difficulté et les chômeurs au financement de la Sécurité sociale. En effet, on diminue les exonérations destinées aux territoires en reconversion ayant connu des difficultés économiques fortes et aux chômeurs qui souhaitent reprendre ou créer une entreprise. Qu’on leur fasse financer la Sécurité sociale, c’est assez fort de café ! Votre proposition consistant à supprimer les alinéas 1 à 4, monsieur le secrétaire d’État, rétablit les dispositions antérieures relatives aux bassins d’emplois à redynamiser – BER. Sur ce point, je suis évidemment d’accord avec vous.
En revanche, je n’ai pas bien compris ce que vous entendez faire à propos de l’ACCRE. Je me range pour ma part à la position de la commission des affaires sociales qui a voté la suppression des dispositifs relatifs à l’ACCRE, car ils concernent les demandeurs d’emploi qui reprennent ou créent une entreprise. Vous me répondrez qu’ils ne suppriment pas les aides mais les diminuent. Certes, mais il faut tout de même qu’un repreneur d’entreprise ait quelque qualification pour ce faire, faute de quoi l’entreprise ne perdurera pas très longtemps ! En outre, ce sont généralement des gens dont le salaire est un peu supérieur au SMIC !
Dès lors, empêcher ceux qui disposent des capacités nécessaires pour reprendre ou créer une entreprise consiste tout bonnement à empêcher la reprise d’entreprise. Vous me répondrez que ce n’est pas vrai, car 87 % des bénéficiaires ne sont pas concernés par la mesure envisagée, mais c’est là le passé. Je préfère pour ma part m’intéresser à l’avenir. Faire payer les demandeurs d’emploi, alors même que les entreprises sont fragilisées et que les demandeurs d’emploi ont tendance à recréer leur propre emploi au moyen de certains dispositifs économiques tels que l’économie sociale et solidaire et l’économie circulaire, cela ne me semble pas conforme à l’air du temps.
Monsieur le secrétaire d’État fait preuve de sagesse en proposant de maintenir le dispositif « ardennais » de l’amendement de M. Warsmann. Pourquoi ne pas attribuer ce bénéfice à ce territoire, même si d’autres, sans doute se trouvent dans d’aussi grandes difficultés ?
Pour ce qui est de l’ACCRE, je considère qu’il est bon de payer des cotisations sociales lorsque l’on a un certain niveau de revenus, tant pour l’égalité et l’équité entre citoyens que pour la Sécurité sociale. L’article ne prévoit pas de supprimer ce dispositif, qui donne des résultats, mais de plafonner l’exonération, qui décroîtrait linéairement au-delà d’un certain seuil de revenu. N’oublions pas, à cet égard, que des cotisations non versées, ce sont des difficultés qui surgiront plus tard : on ne les retrouve pas une fois à la retraite !
Je demande à la majorité d’adopter les amendements déposés par M. Bapt, qui constituent une solution de moyen terme, à mon sens raisonnable.
Je souhaite simplement rappeler que l’ACCRE est déjà plafonnée : la première année d’activité, l’exonération de cotisations sociales s’applique aux revenus en deçà de 120 % du SMIC, soit 21 100 euros. La partie des revenus supérieure à 120 % du SMIC n’est pas exonérée.
J’attends l’examen des amendements déposés par le rapporteur et remercie le Gouvernement et le secrétaire d’État d’avoir repris mon amendement, qui vise à élargir le bénéfice de l’exonération de cotisations aux personnes exerçant une activité réduite à fin d’insertion.
L’amendement no 54 n’est pas adopté.
je l’ai déjà présenté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 12 .
Je remercie le Gouvernement qui a accepté d’évoluer sur ses positions et l’ensemble des collègues qui se rallieront à ces amendements, juridiquement justes et socialement équitables.
Avis favorable. Je souhaite apporter deux précisions. Il est vrai, monsieur Lurton, que l’article 10 du PLFSS pour 2016 concernait déjà les BER, mais il traitait dans une seconde partie des zones de revitalisation rurale et non de l’ACCRE. Ne dites pas que nous avions évacué ce problème l’an dernier !
Par ailleurs, je m’apprête à défendre deux amendements qui portent sur l’alinéa 7 de l’article, tandis qu’un amendement de la commission vise à supprimer ce même alinéa.
Je voudrais remercier M. le secrétaire d’État ainsi que le rapporteur d’avoir fait évoluer ce texte. Je rappelle que le dispositif du BER a été revu en 2013 : la durée d’aide a été réduite de sept à cinq ans et la distribution de dividendes interdite sur la durée d’éligibilité. Ce dispositif comporte des contreparties en matière de création d’emplois, ce qui n’est pas le cas d’autres dispositifs. Je fais partie de ceux qui, dans cette enceinte, ont réduit la propension des zones franches urbaines à autoriser des facilités fiscales sans création d’emplois.
Je me joins à mes deux autres collègues ardennais pour remercier le Gouvernement. Nous avions eu en commission une discussion intéressante et j’avais senti qu’un certain nombre de nos collègues étaient sensibles aux arguments que nous avions développés, mais le soutien de M. le secrétaire d’État s’est révélé crucial.
Ce dispositif peut paraître ancien, mais nous sortons d’une crise très longue durant laquelle la création d’emplois a été mise à mal, y compris dans le département des Ardennes. Il est vrai qu’une reprise économique nous permettrait de bénéficier au maximum de cet avantage ; il serait malvenu, aujourd’hui, de réduire le dispositif tel qu’il existait jusque-là. J’espère que les Ardennes sauront démontrer combien cette décision, prise collectivement, était sage.
Il s’agit d’un amendement que la commission a adopté. Je souhaite néanmoins le voir repoussé, compte tenu du débat que nous venons d’avoir et des deux amendements que je soutiendrai, acceptés au titre de l’article 88 du règlement. Ceux-ci visent à protéger l’essentiel – jusqu’à 90 % d’entre eux – des bénéficiaires actuels de l’ACCRE.
L’amendement no 124 est retiré.
Je regrette que M. Bapt ait retiré l’amendement no 124 , alors qu’il a proposé des avancées en commission. Cet amendement est devenu un amendement de la commission puisqu’il a été adopté à la quasi-unanimité : au côté de M. Bapt, premier signataire, figurent d’ailleurs les membres de l’opposition.
Nous défendons donc l’amendement no 179 , identique, qui vise à revenir sur le plafonnement de l’ACCRE.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 198 .
Nous sommes tous conscients que la création d’entreprise doit être favorisée autant que possible pour sortir du chômage. Comme mes collègues, je pense qu’un dispositif tel que l’ACCRE doit être maintenu dans le contexte économique actuel. Je me demande même si ces aides à durée limitée ne devraient pas être obligatoires, le temps que l’entreprise dégage un bénéfice. C’est une suggestion que j’avais faite dans une question écrite au secrétaire d’État au budget, à laquelle je n’ai toujours pas reçu de réponse.
Il est prévu de réduire le montant de cette aide et de réserver son éligibilité aux personnes ayant un niveau de revenus plus faible. Ce signal est mauvais : créer une entreprise a toujours un coût, qui ne dépend pas des revenus de la personne. Il faut attendre avant que l’entreprise puisse dégager des bénéfices. Depuis 2012, nous ne cessons de défendre la stabilité fiscale pour les entrepreneurs, que vous mettez à mal. Cette disposition le prouve, une fois de plus.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement no 348 .
Il a été largement démontré que les politiques générales d’allégement de charges ont un effet direct sur les entreprises et permettent de créer des emplois. L’article 6, qui prévoit la mise sous condition de ressources de l’aide accordée aux chômeurs créateurs et repreneurs d’entreprise, est néfaste. En procédant, sans concertation préalable, à une restriction de l’éligibilité à l’ACCRE, cette disposition va à l’encontre des mesures qui favorisent le maintien et le développement de l’emploi dans nos territoires et adresse un mauvais signal aux futurs créateurs d’entreprises. Les députés du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste maintiennent cet amendement.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 597 .
L’article 6 vise à réduire l’aide à la création ou à la reprise d’entreprise par les chômeurs, et c’est regrettable. On sait bien que créer son propre emploi est un moyen de sortir du chômage. Ce texte envoie un mauvais signal et tend à démontrer que le Gouvernement ne souhaite pas que les chômeurs sortent de leur condition, en tout cas les plus aisés d’entre eux.
Je pense en particulier aux cadres qui ont été licenciés de leur entreprise ou qui ont perdu leur emploi suite à la disparition de leur entreprise, qui ont du mal à trouver du travail en raison de leur âge et pour qui la création ou la reprise d’une entreprise est une solution. Bien évidemment, je maintiens mon amendement.
L’amendement de la commission des affaires sociales a été voté contre mon avis. Il ne faut pas dire que j’ai approuvé la suppression des alinéas 5 à 7 !
J’ai demandé à l’Assemblée de repousser cet amendement, au bénéfice de la proposition que j’ai faite de reprendre la discussion sur la base des deux amendements que j’ai déposés. Je m’étais d’ailleurs engagé à le faire après avoir discuté avec le Gouvernement, suite au vote de la commission. Avis défavorable.
Même avis.
Je veux souligner la concomitance entre la suppression de cet allégement de charges et le flou qui plane actuellement sur l’aide directe à la création d’entreprises du fait de l’application très compliquée de la loi NOTRe, qui prive les départements de leurs compétences en matière économique, sans que les intercommunalités ou les régions aient pris partout le relais. Il est très préjudiciable, dans le contexte économique actuel, et compte tenu du nombre de repreneurs potentiels inscrits à Pôle emploi, de supprimer maintenant cet allégement de charges.
Il est procédé au scrutin.
L’amendement no 233 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Nous en venons à l’amendement no 855 . Il est de correction, monsieur le rapporteur…
L’amendement no 855 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Vous avez de nouveau la parole pour soutenir l’amendement no 857 , monsieur le rapporteur.
Pour le coup, cet amendement n’est pas rédactionnel mais s’inscrit dans la discussion que nous avons sur l’ensemble du dispositif. Il vise à plafonner l’éligibilité des rémunérations bénéficiant de l’exonération. En l’état du droit, l’exonération est complète pour la fraction du revenu inférieure à 1,2 SMIC, quel que soit le montant du revenu. L’article 6 prévoit de plafonner les rémunérations éligibles à l’ACCRE : l’exonération serait totale pour les revenus n’excédant pas la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale, le PASS ; elle décroîtrait ensuite linéairement pour s’annuler lorsque les revenus atteignent le PASS, soit 38 616 euros en 2016.
Nous proposons par cet amendement une solution de moyen terme consistant à relever de 0,5 à 0,75 PASS le montant de revenus en deçà duquel l’exonération serait totale.
Favorable, comme nous l’avons indiqué tout à l’heure.
L’amendement no 857 est adopté.
L’amendement no 856 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
J’appelle l’amendement no 131 . C’est toujours à vous, monsieur le rapporteur.
Là encore, cet amendement s’inscrit dans la suite logique de notre débat. Il vise à élargir le bénéfice de l’aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprise aux personnes physiques reprenant une entreprise implantée dans un quartier prioritaire de la ville. En l’état du droit, seules sont éligibles les personnes créant une entreprise dans un quartier prioritaire. Il paraît logique de soutenir également celles qui reprennent des entreprises dans ces quartiers, dont il faut dynamiser l’économie.
Le coût de cette extension serait de l’ordre de 2 millions d’euros. Le gage est formel, il évite de contrevenir aux prescriptions de l’article 40 de la Constitution. J’invite donc l’Assemblée à adopter cet amendement.
Le Gouvernement est en désaccord avec le chiffrage du coût de l’amendement. Vous l’évaluez à 2 millions d’euros, monsieur le rapporteur, alors que notre estimation est plutôt de 1 million. Mais il ne s’agit là que de teasing : en dépit de notre profond désaccord sur le chiffrage – lequel n’est néanmoins pas de nature à remettre en cause le solde, qui est notre souci principal – et comme nous l’avions indiqué, le Gouvernement est favorable à votre amendement.
Sourires.
Je suis en total désaccord avec cet amendement, non que je ne veuille pas que l’on soutienne les quartiers prioritaires de la ville, mais parce que je ne comprends pas la discrimination consistant à flécher le renforcement de l’accompagnement sur des quartiers prioritaires urbains alors que des zones rurales sont extrêmement fragilisées sur le plan économique et ont également besoin que la nation envoie un signal, au moment où, par ailleurs, le contribuable local est très sollicité…
Allons !
Ce n’est pas nous qui opposons la ville à la campagne, c’est vous ! Cet amendement en est la preuve.
En outre, monsieur le secrétaire d’État, l’application de l’article 40 n’est manifestement pas tout à fait homogène selon que les amendements proviennent de notre bord ou du vôtre.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ce n’est pas le Gouvernement qui est chargé de l’appliquer, monsieur Viala.
Je comprends le raisonnement d’Arnaud Viala au sujet des territoires ruraux. Du reste, nous examinerons bientôt un amendement relatif aux zones de revitalisation rurale, les ZRR. Mais je soutiens aussi les mesures en faveur des quartiers prioritaires de la ville, d’autant que ma circonscription en abrite plusieurs. Il est tellement difficile de voir des boutiques et des petites entreprises fermer dans ces quartiers ! Qu’elles aient une chance de rouvrir le rideau, ce serait formidable. Nous devons faciliter le retour de l’emploi dans ces zones extrêmement difficiles, bien qu’il s’agisse en effet de zones urbaines et qu’il faille agir également dans les territoires ruraux.
J’ai entendu certains collègues murmurer que nous opposions ville et campagne. Mais cette opposition, c’est vous qui l’opérez avec cet amendement. Quand il est question de territoires en détresse, pourquoi ne penser qu’aux quartiers prioritaires de la ville ? Il en existe aussi en milieu rural ! Certains villages sont complètement abandonnés. Ils ont besoin que l’on retrouve de la ressource économique, que l’on y crée de l’activité et de l’emploi.
Lorsque vous pensez aux zones en difficulté, je vous demande d’aider tous ceux qui sont dans la difficulté, y compris en milieu rural. C’est pourquoi il faut étendre le dispositif aux communes rurales qui sont en grande difficulté, monsieur le secrétaire d’État. Le dispositif spécifique dont elles font l’objet, celui des zones de revitalisation rurale, doit recevoir le bénéfice de cet amendement.
Le Gouvernement a d’ores et déjà réglé en partie le problème, puisque la nouvelle technique de carroyage calcule les difficultés des quartiers en fonction des différences de revenu des personnes. Souvent, d’ailleurs, ces différences recoupent des données relatives à l’aide personnalisée au logement, aux minima sociaux, bref, à la pauvreté du territoire. Le ministère chargé de la politique de la ville a par exemple clairement identifié le secteur de Guéret, dans la Creuse – j’ignore si ses élus sont dans l’hémicycle ce soir –, comme relevant de la politique de la ville, alors que des quartiers de la région parisienne, pourtant typiquement urbains, sont sortis du périmètre de cette politique parce qu’ils ont réussi, qui par une résidentialisation, qui par un nouveau type de population, à sortir des difficultés. Il n’y a donc pas à opposer zones urbaines et zones rurales. Au contraire, ce gouvernement a institué un système de comptabilisation et d’identification des quartiers qui fait que l’on peut relever de la politique de la ville que l’on soit en milieu rural ou en milieu urbain.
Il en existe suffisamment pour ne pas en susciter lorsque les choses sont claires. Premièrement, nous ne touchons pas aux limites des quartiers prioritaires de la ville. Deuxièmement, nous corrigeons une anomalie. En effet, il est aussi intéressant d’empêcher qu’une entreprise ne disparaisse en favorisant sa reprise que d’aider la création d’entreprise dans ces quartiers. Et l’exemple de Guéret montre bien que les quartiers prioritaires de la ville ne sont pas situés que dans les grandes agglomérations. Je me félicite à cet égard de la position de M. Door, qui reconnaît la nécessité d’agir dans ces quartiers.
Enfin, et nous y reviendrons à l’occasion d’un prochain amendement, les dispositifs d’exonération pour création d’entreprise sont à l’heure actuelle plus avantageux dans les ZRR que dans les quartiers prioritaires de la ville. Alors évitez ce faux débat, qui du reste pourrait avoir un effet inverse car il existe des exonérations dans les ZRR.
Comme l’a indiqué Michel Liebgott, le carroyage adopté en 2014, lorsque je présidais l’Association des maires Ville et Banlieue, était extrêmement précis. Parmi les 1 500 quartiers relevant de la politique de la ville, il y a des zones rurales, des zones périurbaines, des quartiers situés à l’intérieur d’une ville. Le seul critère retenu à l’époque était le niveau de pauvreté, et je puis vous assurer que je travaillais en très bonne entente avec le président de l’Association des maires ruraux.
Bref, cet amendement ne pénalise absolument pas les quartiers ruraux.
Il ne faut pas opposer la ville et la campagne. Le carroyage, je vous le garantis, concernait aussi les zones rurales, et pas seulement les quartiers populaires difficiles des zones urbaines ou périurbaines. Je pense sincèrement que cette polémique n’a pas lieu d’être.
L’amendement no 131 est adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Costes, pour soutenir l’amendement no 297 .
Cet amendement s’inscrit tout à fait dans la discussion qui vient d’avoir lieu. Comme l’a regretté Mme Poletti, on ne cesse d’opposer l’urbain et le rural. Dans les quartiers prioritaires de la ville, le dispositif dérogatoire de l’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise, l’ACCRE, est ouvert à toute personne, sans condition particulière. Vous l’étendez aujourd’hui à la reprise d’entreprise. Mais en matière de difficultés économiques et sociales, certains territoires ruraux n’ont rien à envier aux quartiers prioritaires de la ville.
Des territoires ruraux sont en très grande difficulté, or, à chaque fois, on renforce les dispositifs applicables aux quartiers prioritaires. Je dis non ! Ce que vous faites dans ces quartiers, faites-le aussi dans les ZRR.
Vous m’objecterez certainement, monsieur le rapporteur, que certaines dérogations sont plus avantageuses dans les ZRR. Ce que je demande, moi, c’est une égalité de traitement, car on ne prend pas suffisamment en compte les territoires ruraux.
Peut-être faudrait-il revoir, comme on l’a dit, les critères et les zonages des ZRR. J’y suis tout à fait favorable, mais prenons alors en compte le rural et l’urbain de la même façon.
Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Tout chômeur qui crée ou reprend une entreprise peut bénéficier de l’ACCRE, quelle que soit la zone. Si l’on adoptait cette proposition, toute personne, au chômage ou non, créant ou reprenant une entreprise dans une ZRR y aurait alors droit, ce qui fait une grande différence et ce qui aurait un coût. Vous qui êtes attachés au financement de la sécurité sociale par des ressources venant des cotisations sociales…
Il n’importe. Le Gouvernement, je le répète, n’est pas favorable à cet amendement. Je n’ai pas l’habitude de me cacher, monsieur Barbier !
Nous devons tous prendre acte de l’illogisme dans lequel s’installent le Gouvernement et le rapporteur. On vient de nous expliquer, d’une part, qu’il n’était pas question d’opposer ville et campagne, et, d’autre part, qu’un dispositif plus favorable est légitime pour les quartiers urbains défavorisés et ne l’est pas pour les zones rurales défavorisées. Si ce n’est pas là une différence de traitement manifeste, il y a de quoi s’interroger !
Je croyais m’être fait comprendre, mais je vois que M. Viala a compris exactement le contraire.
Votre amendement, monsieur Costes, propose d’étendre le bénéfice de l’ACCRE aux personnes créant une entreprise dans une ZRR. Vous arguez que les zones rurales et les zones urbaines doivent avoir les mêmes avantages. Mais il existe déjà un dispositif spécifique d’exonération de cotisations sociales dans les ZRR.
Vous ne pouvez ignorer que cette exonération est totale pour les revenus n’excédant pas 1,5 SMIC, puis qu’elle décroît linéairement pour s’annuler à 2,4 SMIC. Or, en l’état actuel du droit, l’exonération au titre de l’ACCRE n’est totale que pour les revenus n’excédant pas 1,2 SMIC. Son montant est donc plus faible que dans le dispositif prévu pour les ZRR. On pourrait donc inverser votre propos et soutenir que les avantages dont bénéficient les ZRR sont supérieurs à ceux qui existent dans les quartiers prioritaires de la ville.
Qui plus est, l’exonération dans les ZRR n’est compatible avec aucune autre exonération ciblée. En conséquence, votre amendement serait défavorable aux entreprises établies dans ces zones, pour les revenus les plus modestes en tout cas. Selon l’interprétation qui pourrait en être faite par l’administration fiscale, il serait même susceptible de faire perdre le bénéfice des aides fiscales en ZRR, alors que l’ACCRE n’est pas assortie des mêmes avantages, notamment l’exonération d’impôt sur les bénéfices.
De plus, l’article 6 tel que nous l’avons amendé fixe le point de sortie de l’ACCRE à peu près au même niveau que celui de l’exonération en ZRR. Sur ce point là non plus, votre amendement n’aurait pas d’intérêt. Il se retournerait même contre les bénéficiaires actuels en ZRR. Il n’y a pas lieu, en l’occurrence, d’opposer la ville et la campagne. C’est vous qui tombez dans l’erreur inverse.
Je partage les explications du rapporteur, tout en reconnaissant que la technicité du dispositif peut être source d’erreurs.
L’amendement no 297 n’est pas adopté.
L’amendement no 858 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 6, amendé, est adopté.
Je suis saisi d’un amendement no 923 portant article additionnel après l’article 6.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour le soutenir.
Monsieur le président, je suggère que Mme Khirouni soutienne cet amendement, car il reprend le sien.
Cet amendement vise à élargir le bénéfice de l’exonération de cotisations aux personnes exerçant une activité réduite à des fins d’insertion. Celles-ci, peu nombreuses, sont accompagnées par l’Association pour le droit à l’initiative économique – Adie –, une structure d’accompagnement et de financement de la création d’entreprise. Grâce à ce dispositif, leurs activités ne resteront pas informelles.
L’amendement no 923 est adopté.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, premier orateur inscrit sur l’article.
C’est en rencontrant de nombreux représentants des professions indépendantes que j’ai pu mesurer les ravages qu’entraîne le régime social des indépendants – RSI – en outre-mer, dégâts parfois plus importants encore que ceux qu’il cause dans la métropole. Les élus ultramarins confirmeront sans aucun doute que cet article du projet de loi, sous couvert d’étendre un dispositif d’ajustement des cotisations sociales, organise une dégressivité susceptible d’accentuer encore la fragilité des acteurs en outre-mer. En tout cas, je le juge particulièrement inquiétant et je ne le voterai pas.
Plus généralement, le RSI fragilise le tissu économique de notre pays, malgré les tentatives des gouvernements successifs de le réformer. Souvenons-nous : il résulte d’un conflit intervenu dans les années 1990 entre la France et la Commission européenne, notre pays refusant jusqu’en 2000 de transposer une directive offrant la liberté d’affiliation aux professionnels indépendants.
À l’heure actuelle, cette liberté n’existe pas : les acteurs économiques restent prisonniers d’un système, bricolé à la va-vite, qui ne fonctionne pas. C’est pourquoi, après avoir consulté un professeur de droit, j’ai saisi le Défenseur des droits sur la légalité de ce régime. Le RSI actuel ne respecte en effet pas la loi qui l’a créé, puisqu’aucun arrêté de constitution n’a été publié. Le Gouvernement tenterait-il avec cet article de s’appuyer sur une nouvelle structure, afin d’éviter de rendre des comptes sur la base légale du RSI ?
Philippe Naillet soutiendra dans quelques instants les amendements qu’il a déposés sur cet article visant à réviser les exonérations pour les indépendants qui créent leur activité en outre-mer à compter du 1er janvier 2017.
Je le dis avec gravité : en l’état, cet article donnerait un coup d’arrêt à la création d’entreprises en outre-mer, alors que celle-ci a repris cette année. Vous connaissez, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, les handicaps auxquels nos entrepreneurs sont confrontés : l’insularité, l’éloignement et la concurrence des entreprises de la zone, qui emploient une main-d’oeuvre très peu coûteuse. Dans ces conditions, entreprendre relève du défi, car la prise de risque est très élevée.
De même, vous connaissez la situation sociale de nos territoires. Notre taux de chômage, massif, atteint 30 à 60 % chez les jeunes, une situation hors norme si on la compare à celle de la métropole. Aucun de vos territoires, monsieur Tian, n’est confronté à un tel taux de chômage. Pour être éligible au dispositif des bassins d’emploi à redynamiser, une zone doit présenter un taux de chômage supérieur de trois points au taux national. En outre-mer, ce taux est le double de celui de la métropole !
Dans ce contexte difficile, nos entreprises résistent pourtant : à La Réunion, leur taux de croissance est supérieur à 3 % ; elles soulagent les chômeurs, en créant des emplois. Leur situation reste néanmoins très fragile, comme l’attestent les dettes sociales et fiscales auxquelles elles sont souvent confrontées. Nous devons donc les soutenir.
Au nom des territoires d’outre-mer, je vous invite, chers collègues, à voter les amendements de M. Naillet et celui du Gouvernement, qui vont dans le bon sens.
Je suis saisi d’un amendement no 803 tendant à supprimer l’article 7.
La parole est à M. Philippe Naillet, pour le soutenir.
Mme Orphé a très justement décrit la réalité économique de nos territoires. Si nous nous réjouissons de voir le taux de chômage reculer de 1,9 point en métropole au troisième trimestre, nous constatons qu’il a augmenté de 0,6 point à La Réunion.
L’outre-mer, La Réunion en particulier, a cependant développé un réel esprit entrepreneurial, notamment grâce à l’exonération de cotisations et de contributions sociales. Les dispositions actuelles prévoient en effet une exonération totale pendant vingt-quatre mois à compter de la date de création de l’activité. Par la suite, les cotisations sont calculées sur un revenu dont l’assiette égale 50 % des revenus, dans la limite du plafond annuel de la Sécurité sociale – PASS.
Or cet article prévoit que seuls les travailleurs indépendants d’outre-mer dont les revenus annuels sont inférieurs à 100 % du PASS, soit à environ 38 666 euros, bénéficieront de l’exonération totale des cotisations et contributions sociales. De même, l’abattement de 50 % de l’assiette des revenus sous le PASS sera réservé aux travailleurs indépendants d’outre-mer dont les revenus sont compris entre 110 et 250 % du PASS.
Ces dispositions sont de nature à restreindre fortement la prise de risque des travailleurs indépendants, donc à freiner l’emploi en outre-mer. Si les exonérations totales ou partielles de cotisations et contributions sociales ont vocation à aider et à rassurer ces travailleurs indépendants, le dispositif risque, au contraire, de rendre moins attractif le statut de travailleur indépendant.
Il convient donc de supprimer cet article.
À défaut, je défendrai un autre amendement, no 804 , visant à modifier les taux d’exonération.
La commission a repoussé cet amendement de suppression. Il s’agit du reste plutôt d’un amendement d’appel, puisque M. Naillet est à l’initiative d’un autre amendement. Le Gouvernement a également déposé un amendement, qui, malgré des taux semblables, n’est pas identique. Il faudra donc exposer ces deux dispositifs dans la suite du débat. Dans l’immédiat, je suggère le retrait de cet amendement.
Je vous suggère également, monsieur Naillet, de retirer votre amendement de suppression pour vous rallier à celui que le Gouvernement a déposé, après de nombreux échanges avec des parlementaires représentants l’outre-mer.
Le régime de cotisations des travailleurs indépendants outre-mer est particulièrement favorable, puisque, comme M. Naillet l’a rappelé, ces entrepreneurs bénéficient d’une exonération totale durant les vingt-quatre premiers mois de leur activité et que la plupart de leurs cotisations et contributions sociales sont calculées sur une assiette abattue de 50 % des revenus. L’article 7 plafonne le montant des revenus annuels des bénéficiaires à 96 550 euros, soit 2,5 fois le PASS. Entre 42 500 euros et 96 550 euros, une dégressivité est applicable afin de lisser le plafonnement du dispositif.
L’amendement du Gouvernement, finalement assez proche de l’amendement no 804 de M. Naillet, vise premièrement à introduire un plateau pour les revenus situés entre 110 % et 150 % du PASS – soit entre 42 500 et 58 000 euros : 3 500 travailleurs indépendants ultramarins ne subiraient dès lors plus l’effet de la dégressivité prévue à l’article 7.
Deuxièmement, le Gouvernement propose que l’abattement pérenne de 50 % soit porté à 75 % la troisième année d’activité. Le dispositif s’étalerait ainsi sur trois ans, au lieu de deux actuellement. Aussi, mesdames et messieurs les députés, je vous invite à vous rallier à cette position intermédiaire, qui représente une avancée par rapport au texte initial de l’article.
Monsieur le secrétaire d’État, vous demandez aux élus d’outre-mer – qui l’accepteront, car ils n’ont pas d’autre possibilité – de choisir ce qui fait moins mal plutôt que ce qui fait plus mal.
Si M. Naillet ne le retire pas, je voterai son amendement de suppression, car le dispositif du Gouvernement, malheureusement, fera des dégâts importants en outre-mer. Mme Orphé et M. Naillet ont très bien expliqué la nécessité d’encourager la création d’entreprises, en raison du niveau élevé du chômage, et à quel point il importe de diminuer le risque qui pèse sur elles.
Le dispositif un peu bancal auquel on arrive est certes « mieux que ce qui est moins bien » – M. le secrétaire d’État a parlé d’or quand il a dit cela ! Le recul opéré par le Gouvernement fait moins mal que ce qui avait été prévu initialement, mais ce dispositif reste un mauvais dispositif pour notre outre-mer. Il représente un recul important.
En outre, nous aurions besoin de connaître la somme exacte qui atterrirait dans les caisses de l’État, c’est-à-dire qui serait autant de moins pour l’outre-mer. Une étude d’impact faite sur le dispositif initial évoquait – je parle de mémoire, sous le contrôle du rapporteur – un montant de 30 millions d’euros. À combien tomberons-nous ? Quel sera l’impact exact du compromis auquel vous aboutissez ?
Entre un dispositif démotivant et une position jusqu’au-boutiste, je pense que nous arrivons à un bon compromis. Je retire mon amendement.
L’amendement no 803 est retiré.
La parole est à M. Gérard Bapt, pour soutenir l’amendement no 810 rectifié .
Favorable.
L’amendement no 810 rectifié est adopté.
L’amendement no 859 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 860 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 861 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 862 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir l’amendement no 804 .
L’amendement no 804 est retiré.
L’amendement no 802 est retiré.
La commission n’a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, j’estime que le Gouvernement a fait un pas en avant et trouvé une solution de compromis acceptable par nos collègues ultramarins.
L’amendement no 922 est adopté.
L’amendement no 863 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir l’amendement no 801 .
L’amendement no 801 est retiré.
L’amendement no 864 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 866 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 867 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 868 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 869 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir l’amendement no 805 .
L’amendement no 805 est retiré.
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir l’amendement no 800 .
L’amendement no 800 est retiré.
L’amendement no 870 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 872 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 873 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 871 est adopté.
Vous voulez vous exprimer sur l’article, monsieur Lefebvre ? Allez-y, vous avez la parole.
Je n’ai pas voulu casser votre rythme, monsieur le président. J’ai bien compris que le Gouvernement avait intérêt à aller vite dans cette affaire – et notre assemblée aussi, d’ailleurs.
Néanmoins, j’ai posé une question, et j’aimerais avoir une réponse avant que nous ne votions sur l’article 7. J’imagine que le Gouvernement a fait faire une étude d’impact, et que les élus qui ont accepté le compromis en ont eux aussi fait faire une. Je voudrais donc savoir avec précision, puisque le premier dispositif retirait 30 millions d’euros aux acteurs de l’outre-mer, combien le nouveau leur enlèvera.
Notre assemblée doit avoir à sa disposition des études d’impact. Le secrétaire d’État a derrière lui des conseillers qui, visiblement, sont parfaitement au courant de la réponse, puisqu’ils ne cessent de parler entre eux depuis que j’ai posé ma question. Il me semble qu’avant que nous ne nous prononcions sur cet article 7, le minimum serait que nous connaissions avec précision l’impact d’un tel dispositif, qui nous a été présenté en cours de débat – de nombreux élus ultramarins n’étant pas là, ils en ignorent jusqu’à l’existence. Que l’on nous éclaire me paraît le minimum pour la bonne ordonnance de nos débats, monsieur le président.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Dans la réforme que vous avez adoptée en 2008, des études d’impact sont prévues pour les projets de loi, mais pas pour les propositions de loi ni pour les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale.
Monsieur Lefebvre, je ne suis pas en mesure d’enjoindre le Gouvernement de répondre à une question : c’est à lui de prendre la parole s’il le souhaite.
L’article 7, amendé, est adopté.
Nous en venons à l’article 8 – et sur cet article, la parole est à M. Frédéric Lefebvre.
Je vous remercie, monsieur le président.
Vous aurez compris que ce n’est pas la présidence que je mets en cause – mais cette réponse qui vient d’être faite sur les études d’impact !
Si je ne m’abuse, madame la présidente de la commission, vous n’étiez peut-être pas obligés de le faire, mais dans le rapport qu’il a produit, le rapporteur a bien précisé l’impact de la mesure ! En tout cas, c’est dans le rapport : il y a donc bien quelqu’un qui l’a fait.
Que vous, vous ne le connaissiez pas, je m’en doute, mais dès lors que le Gouvernement propose un dispositif, il ne va pas nous faire croire qu’il n’en connaît pas l’impact ! Je souhaiterais donc que nous soyons éclairés sur ce point. Ce serait quand même le minimum pour un débat de cette importance, d’autant qu’il a été demandé à des élus de se rallier à une position présentée comme intermédiaire. Cette position, il faudrait vérifier qu’elle l’est vraiment, intermédiaire ! Il serait bon que nous le sachions – au moins avant la fin de l’examen des articles consacrés au RSI, le régime social des indépendants, si vous avez besoin de temps pour affiner les choses.
Nous sommes en train d’assister à ce qui, s’agissant du RSI, est devenu depuis plus de dix ans une habitude : du bricolage. On va de bricolage en bricolage, quelle que soit la majorité ! Nous avons des discussions avec l’Europe, et une administration qui bricole au fur et à mesure que sont prises les décisions de justice, celles du Conseil d’État et celles de la Cour de justice de l’Union européenne. C’est pourquoi j’ai demandé que soit consulté un professeur de droit sur un point sur lequel il serait là encore utile que nous ayons un éclairage du Gouvernement : l’existence légale des caisses de base du RSI. J’ai posé la question tout à l’heure, et je n’ai pas eu de réponse.
À l’instant, il s’agissait de l’impact de l’article 7, monsieur le président : c’était autre chose.
Je vais vous retirer la parole, mon cher collègue, car vous avez largement dépassé le temps qui vous était imparti.
Je vous redonnerai la parole à l’occasion d’un amendement, monsieur Lefebvre. Ce sera plus simple.
La parole est à M. Gérard Bapt, pour soutenir l’amendement no 874 .
Oui, il l’est, mais je vais quand même intervenir, monsieur le président, car je connais M. Lefebvre, et sa capacité à revenir régulièrement sur les amendements, en dehors de son temps de parole et indépendamment de l’organisation du débat.
J’avais prévu de vous donner ma réponse, monsieur Lefebvre, à l’occasion de ma prochaine prise de parole – mais puisque vous y accordez une telle importance…
Vous aviez tout de même compris que l’économie qu’aurait permise l’article 7 se serait élevée à 30 millions d’euros ; je l’ai dit une fois, deux fois, trois fois, c’était écrit, tout le monde le sait. L’amendement du Gouvernement réduit l’économie de 7 millions d’euros.
D’autre part, je vous prierai d’éviter toute remarque concernant le comportement de mes assistants. Il n’est tout de même pas anormal que j’échange avec mes collaborateurs pendant les travaux : je suis assidu, j’essaie d’être précis.
La réponse est donc : 7 millions – et tout le monde ici sait faire une soustraction : trente moins sept, cela fait vingt-trois. Voilà !
Mais oui ! J’avais prévu de vous répondre, mais vous êtes d’une impatience qui dépasse tout entendement ! Si vous voulez faire traîner les débats, moi, cela ne me dérange pas, je peux le faire aussi – vous en avez l’habitude –, avec une courtoisie et une délicatesse que tout le monde ici connaît…
Oh, mais c’est qu’il prend la parole tout le temps ! Je ne veux pas mettre en cause la présidence, mais tout de même !
Monsieur le secrétaire d’État, nous discutions de l’article 7, qui concerne l’outre-mer.
L’article 7 a été voté !
Il n’aurait pas été absurde d’avoir votre réponse avant de voter sur l’article ! Et je pense qu’il aurait été intéressant pour les élus ultramarins de savoir que le compromis que vous proposiez ne faisait en réalité qu’améliorer de très peu le dispositif et que – je le dis haut et fort – celui-ci reste, à ce niveau encore, c’est-à-dire 23 millions d’euros, pénalisant pour les acteurs d’outre-mer.
Revenons maintenant à l’amendement no 874 – dont, objectivement, on ne vient pas de parler.
L’amendement no 874 est adopté.
L’article 8, amendé, est adopté.
Je suis saisi d’une série d’amendements portant article additionnel après l’article 8.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 747 .
Cet amendement, vous allez le reconnaître, monsieur le secrétaire d’État : il vise à supprimer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – le CICE – et à y substituer une baisse générale des charges sur les salaires. Pour présenter ce genre de disposition, on est obligé de jongler avec le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Nous avons déjà eu, à plusieurs reprises, cette discussion. Il s’agit de faire baisser durablement le coût du travail de façon à rendre l’économie compétitive. Le Président de la République a lui-même reconnu, il y a quelque temps, à la télévision, que la protection sociale ne devait pas peser trop lourdement sur le travail et qu’il faudrait sûrement trouver un financement différent pour certaines dispositions. Nous proposons donc de baisser les charges sociales sur le travail en supprimant le CICE par une opération de compensation. Bien sûr, il faudrait prévoir un financement complémentaire, ce que nous proposons de faire via une compensation à due concurrence par la TVA compétitivité telle qu’elle avait été votée lors de la précédente législature.
Vous aviez vous-même, monsieur le secrétaire d’État, affirmé par le passé qu’il était trop tôt pour le faire, mais que, peut-être en fin de mandat, il faudrait en passer par là. Eh bien, cela tombe bien : nous sommes en fin de mandat, vous êtes encore sur le banc du Gouvernement, et moi encore sur les bancs des parlementaires. Je vous fais donc une nouvelle fois la proposition de supprimer le CICE afin de diminuer les charges sur le travail.
Monsieur Vercamer, voilà pour vous le moyen de faire un « effet de séance » ! Mais ce n’est pas ainsi, à l’occasion d’un amendement sur le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature, que l’on propose une réforme aussi importante : supprimer le CICE et les cotisations patronales familiales sur les revenus salariaux !
Je propose donc à l’Assemblée de repousser cet amendement, d’en rester au chemin tracé par le pacte de responsabilité et de solidarité, qui a déjà donné des résultats pour ce qui est de l’état de nos entreprises et qui commence à donner des résultats pour ce qui est de la création d’emplois.
Dans le projet de loi de finances, le Gouvernement propose au contraire de faire passer de 6 à 7 % le taux du CICE et d’en étendre le champ à certaines catégories d’entreprises qui, jusqu’à présent, ne pouvaient pas en bénéficier.
S’agissant d’un amendement à 20 milliards d’euros, il me semble normal que le rapporteur pour avis de la commission des finances intervienne… Je suppose, monsieur Vercamer, que vous connaissez les conséquences qu’aurait l’adoption d’un tel amendement.
Premièrement, cela poserait des problèmes de mise en oeuvre, en particulier pour les salaires proches du SMIC. J’entends nombre de candidats à la primaire de la droite dire qu’il faudrait supprimer les cotisations patronales au niveau du SMIC, mais elles le sont déjà toutes, à l’exception de l’assurance chômage et des retraites complémentaires. Je ne vois pas comment un tel dispositif changerait les choses !
Deuxièmement, se pose le problème des 20 milliards : l’année où vous allez baisser les cotisations sociales, continuerez-vous à financer le CICE ? Je rappelle que vu l’état dans lequel vous aviez laissé, d’une part les finances publiques, d’autre part les entreprises, qui avaient perdu de la compétitivité et dont les taux de marge avaient baissé, nous avons été conduits à mettre en place le dispositif sous cette forme pour qu’il y ait à la fois un effet immédiat sur les comptes des entreprises et un étalement de sa mise en oeuvre. Ce dispositif est aujourd’hui parfaitement intégré par les entreprises et il a prouvé son efficacité.
Troisième point : il ne vous a pas échappé qu’une telle modification entraînerait, à enveloppe constante, des transferts très élevés entre les entreprises, liés au plafonnement du CICE à 2,5 SMIC ; d’autre part, une baisse des cotisations sociales augmenterait évidemment le résultat des entreprises, si bien qu’un certain nombre d’entre elles verraient leur impôt sur les sociétés considérablement majoré. Votre proposition me paraît donc hasardeuse, et pas seulement parce qu’elle intervient en fin de législature.
Si une telle baisse doit être décidée un jour, elle ne pourra l’être qu’une fois traités d’autres sujets, comme la consolidation des allégements sur les cotisations sociales. En l’état actuel des choses, et pour améliorer efficacement la compétitivité des entreprises, mieux vaut, comme l’a dit Gérard Bapt, porter le taux du CICE de 6 à 7 % – ce qui aidera beaucoup les entreprises, notamment celles qui emploient de la main-d’oeuvre – et en rester là pour l’instant.
Défavorable.
Je ne savais pas que le Président de la République était aussi contesté dans la majorité…
Oh !
Dois-je rappeler ce qu’il promettait en novembre 2014 ? « Nous allons faire le CICE pendant trois ans », annonçait-il, « ça va monter en régime, et après, en 2017, tout ce qui a été mis sur l’allégement du coût du travail, ça sera transféré en baisse de cotisations sociales pérennes ».
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Nous sommes, me semble-t-il, en train de débattre du budget pour 2017, et le transfert que je propose correspond bien à une promesse du Président de la République. Je propose donc que celui-ci tienne, enfin, l’une de ses promesses : je suis bon avec vous, reconnaissez-le !
Vous-même, monsieur le ministre, pendant le débat sur le PLFSS, l’an dernier – ou l’année précédente, je ne me souviens plus –, aviez soutenu cette idée, en précisant qu’elle était compliquée à mettre en oeuvre et qu’il fallait donc attendre la fin du mandat. Je ne fais, en somme, que prendre au mot, et le Président de la République, et le secrétaire d’État au budget.
Ce que vous dites est bien aimable, monsieur le rapporteur pour avis, mais vous nous avez expliqué, tout à l’heure, que les petites mesures étaient sans incidence et sans efficacité. Je vous propose donc une mesure, non pas à 20 milliards d’euros, mais à 30 ; en d’autres termes, un choc de compétitivité à travers une baisse des charges et du coût du travail.
Le transfert du produit du CICE, il est vrai, ne nous mène pas à 30 milliards ; c’est pour cette raison que je propose de compenser la différence via la « TVA compétitivité »,
« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain
celle-là même qui avait été annoncée par le Président de la République lors d’une émission télévisée,…
…face à une chef d’entreprise qui se plaignait aussi, d’ailleurs, de la complexité croissante imposée aux entreprises – j’y reviendrai à propos de l’amendement du Gouvernement qui suit.
L’amendement no 747 n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 829 .
Cet amendement de coordination précise les conditions de mise en oeuvre du dispositif de micro-bénéfice agricole, voté l’an dernier en loi de finances, s’agissant en particulier de l’assiette. Il n’a aucune incidence, ni en termes budgétaires, ni sur les bénéficiaires. Il ne relève que d’une coordination terminologique.
Favorable : l’amendement apporte une simplification, mais aussi une précision sur les notions de « revenu » et de « bénéfice ». Il ne modifie en rien le droit en vigueur.
L’amendement no 829 est adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumégas, pour soutenir l’amendement no 309 .
Cet amendement tend à réformer le système des cotisations du régime des retraites agricoles en supprimant l’effet de palier et en luttant contre la sous-cotisation des revenus les plus substantiels.
M. le secrétaire d’État a rappelé le principe de solidarité sociale qui veut que l’on cotise à proportion de ses moyens et reçoive à proportion de ses besoins. Ceux qui touchent des revenus élevés ne doivent donc pas pouvoir bénéficier d’un « bonus » en matière de cotisations, alors même que les retraites agricoles sont à un niveau anormalement bas. Des recettes sont nécessaires, même si, il faut le reconnaître, le Gouvernement a pris ce problème en compte après dix ans d’immobilisme.
Il faut toutefois aller plus loin et introduire de la proportionnalité dans les cotisations.
Défavorable. Je vous suggère, monsieur Roumégas, le retrait de votre amendement, qui est accroché à un article tout à fait inadéquat du code rural et de la pêche maritime.
Défavorable également.
L’amendement no 309 n’est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement no 1 .
J’en reviens, monsieur le secrétaire d’État, à la cotisation dite de « solidarité », à la charge des dirigeants de petites entreprises, dont la taille, inférieure au seuil d’assujettissement, n’en est pas moins supérieure à un minimum fixé par décret. Pour les intéressés, la cotisation ne génère aucun droit. Selon moi, elle est donc assimilable à un impôt, d’autant qu’elle touche les personnes assujetties à la CSG, la contribution sociale généralisée, et à la CRDS, la contribution pour le remboursement de la dette sociale, qui sont toutes deux, déjà, des contributions de solidarité. Il me semble à la fois inéquitable et inopportun de faire peser, sur ces personnes, une cotisation de solidarité supplémentaire.
Je propose donc, monsieur le secrétaire d’État, de supprimer ces cotisations de solidarité. Vous savez, vous qui êtes soucieux de la justice, qu’elles touchent en général des personnes qui démarrent, notamment des jeunes qui veulent monter leur entreprise et ne le peuvent pas en raison de cette cotisation supplémentaire, dont le montant est élevé puisqu’il peut atteindre 1 500 ou 2 000 euros. Pouvez-vous faire preuve de générosité, monsieur le secrétaire d’État ?
Votre amendement, monsieur Martin, vise à supprimer la cotisation de solidarité. Les plus petits exploitants y sont soumis, ce qui compense, pour eux, le non-assujettissement aux cotisations de droit commun.
Il n’est pas exact, d’autre part, de dire qu’aucun droit n’est ouvert aux cotisants de solidarité : ils bénéficient, depuis 2006, du régime d’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, sous certaines conditions. Ils peuvent aussi accéder à la formation professionnelle continue moyennant une contribution forfaitaire raisonnable.
On peut également rappeler que sont exemptées les personnes qui exercent une activité réelle agricole au sens du code rural, ainsi que les personnes qui bénéficient de la CMU-C, la couverture maladie universelle complémentaire.
La loi d’avenir pour l’agriculture du 13 octobre 2014 a en outre permis à des cotisants de solidarité de s’affilier plus facilement à la MSA, la Mutualité sociale agricole, par la révision de certaines conditions. Il me semble donc préférable d’en rester à cet équilibre.
J’ajouterai une remarque subsidiaire – ou pas tout à fait. Votre amendement aurait d’autres effets inopportuns, puisqu’il créerait une confusion rédactionnelle en supprimant les cotisations de solidarité tout en renommant la CSG « contribution de solidarité ». De plus, il vise à deux reprises l’article L. 731-24 du code rural, lequel a été abrogé par l’ancienne majorité en 2006.
À défaut d’un retrait, l’avis sera donc défavorable.
L’amendement est effectivement inopérant compte tenu de ce que vient de dire M. le rapporteur. Le Gouvernement suggère donc également un retrait. Dans l’esprit, cependant, nous parlons de 26 millions d’euros de recettes en moins pour le régime de sécurité sociale agricole, lequel, comme vous le savez, n’est pas excédentaire…
Indépendamment du problème rédactionnel que pose cet amendement, il me paraît donc plus sage de le retirer ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Ce que vient de dire M. le rapporteur n’est pas tout à fait exact. Il y a une injustice dès lors que les cotisations visées n’ouvrent pas droit à des points de retraite. Contrairement à ce que vous dites, monsieur le rapporteur, les personnes concernées ne sont donc pas couvertes comme les autres par la MSA.
Il faut aussi savoir que le problème se pose d’abord pour les jeunes. Si vous refusez mon amendement, acceptez au moins, monsieur le secrétaire d’État, le principe d’une compensation ou le droit, pour les intéressés, à toucher des points de retraite.
L’amendement no 1 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumégas, pour soutenir l’amendement no 307 .
Cet amendement participe du même esprit que celui que j’ai défendu précédemment. Nous vous proposons, Mme Allain et moi, de rétablir de la justice dans le système des retraites agricoles.
Aujourd’hui, 74 % des cotisants agricoles touchent un revenu inférieur au SMIC annuel, mais ils doivent acquitter une cotisation minimum calculée sur ce même SMIC. La majorité des paysans sont donc en situation de sur-cotisation, parfois de façon très lourde.
Il convient d’y remédier : c’est l’objet de cet amendement qui tend à créer un système progressif de prélèvement. Il supprime, d’abord, l’assiette minimale du niveau de cotisations, et ce afin d’éviter une sur-cotisation des plus modestes – lesquels, je le répète, sont majoritaires.
L’amendement vise aussi à rétablir un équilibre budgétaire en réajustant les taux de cotisation pour les revenus les plus élevés – je vous renvoie sur ce point à mon amendement précédent –, et à plafonner l’attribution de points jusqu’à un certain revenu. En effet, les hauts revenus sont très clairement favorisés puisque, soumis au même taux de cotisation, ils se voient attribuer des points sans aucun plafonnement.
Défavorable. Cet amendement, dans la lignée du no 309, tend à instaurer une progressivité des cotisations pour le régime de retraite complémentaire agricole. Sa rédaction, une fois encore, pose problème puisqu’elle omet la distinction juridique entre les exploitants et les collaborateurs familiaux, dont les cotisations ne reposent pas sur la même assiette.
Les taux choisis sont également surprenants : M. Roumégas a parlé des petits exploitants agricoles, mais ces taux sont plus élevés que le taux de cotisation minimal actuellement fixé à 3 %. Une telle mesure pourrait donc conduire à une hausse des cotisations pour les petits revenus, ce qui n’est à l’évidence pas son objectif. En outre, il n’appartient pas au législateur de définir les taux de cotisation.
Sur le principe, je vous rappelle que l’assiette minimale de cotisation peut en effet être supérieure au revenu professionnel de l’exploitant, mais dans le but de garantir un montant minimal de retraite. Si l’assiette est effectivement importante pour les retraites complémentaires, le taux est faible, tout comme le niveau de cotisation au régime de base.
Je vous invite donc à retirer votre amendement, peut-être pour le réécrire ; faute de quoi l’avis serait défavorable.
Même avis. L’amendement visant de surcroît les régimes d’assurance complémentaire, son inscription dans le PLFSS ne va pas de soi.
À défaut d’un retrait, l’avis serait donc défavorable.
L’amendement no 307 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumégas, pour soutenir l’amendement no 308 .
Nous restons sur le même sujet. J’aurais au moins aimé que le rapporteur ou le Gouvernement nous dise avoir entendu l’appel à un système plus juste et plus efficace pour les retraites agricoles – qui devront évoluer. Je leur donne une nouvelle occasion de le faire avec ce troisième amendement, qui vise à rétablir la justice sociale en mettant fin au phénomène de sous-cotisation pour les plus hauts revenus. Cela permettrait au passage de dégager des recettes supplémentaires pour la Mutualité sociale agricole.
Actuellement, les cotisations à l’assurance vieillesse individuelle et à l’assurance vieillesse agricole reposent sur des assiettes minimales respectives de 800 et 600 SMIC horaire, ce qui entraîne un phénomène de sur-cotisation pour tous les assurés ayant des revenus inférieurs. En revanche, pour les assurés ayant de gros revenus, supérieurs au plafond de la Sécurité sociale, les prélèvements ne s’effectuent qu’à hauteur de ce plafond. Ainsi, un assuré social ayant un revenu annuel de 50 000 euros ne cotise qu’à hauteur de 37 032 euros.
Même avis.
Les propos que je m’apprête à tenir concernent cet amendement no 308 en particulier, mais également les précédents. Il est vrai que nous aimerions obtenir du rapporteur, comme du secrétaire d’État au budget, des réponses qui ne soient pas uniquement des réponses administratives préparées par leurs services.
Eh oui, nous appelons de nos voeux des réponses porteuses de visions qui soient un tant soit peu politiques. L’incohérence dont vous parlez est, au fond, budgétaire. Je vous vois secouer la tête, monsieur le secrétaire d’État ; mais vous avez pris comme arguments d’une part le fait que les cotisations en question représentent environ 29 millions d’euros, et d’autre part le déficit du régime.
Or si l’on compare le régime agricole et le régime général du point de vue du rapport entre prestations et cotisations, on observe une parité : ce rapport est en effet identique dans les deux cas. Cela signifie que les agriculteurs ne cotisent pas moins que nos concitoyens. Ils sont, en, revanche, moins nombreux.
Ce n’est donc pas des assurés agricoles qu’il faut attendre un rééquilibrage de leur régime, mais de la solidarité nationale. Nous débattons de ces mêmes arguments depuis des années, et il n’est pas normal de briser ce consensus.
Les agriculteurs ont apporté leurs bras à la construction de la nation depuis des décennies, ce n’est pas pour qu’on leur dise maintenant : « eh bien on vous laisse tomber, c’est à vous de payer ! »
Par conséquent, j’aimerais obtenir de M. le secrétaire d’État au budget une réponse sur cette question.
L’amendement no 308 n’est pas adopté.
Il s’agit d’un amendement que j’avais déposé au nom de notre collègue Patrick Hetzel, mais qui sera beaucoup mieux défendu par Bernard Accoyer, qui a déposé un amendement identique.
Je suis en effet un peu juste concernant le lait de montagne et ses producteurs.
Sourires.
L’amendement no 55 est retiré.
La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement identique no 224 .
Il concerne la collecte du lait en zones de montagne. Nous en avons longuement discuté en commission : il consiste à alléger les charges pesant sur les opérations de collecte, dès lors qu’elles sont réalisées dans ces zones.
L’amendement vise en effet à compenser les surcoûts qui s’appliquent in fine aux producteurs exerçant leur activité dans ces zones, car ils affrontent d’ores et déjà des difficultés à la fois conjoncturelles – je ne m’étendrai pas sur ce point pour le moment – et structurelles – liées précisément aux caractéristiques des zones où sont implantées leurs exploitations.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement identique no 285 .
Il vise à sauvegarder – ou en tous cas à essayer de sauver – l’agriculture de montagne, qui est une agriculture difficile, car elle doit affronter des handicaps naturels, dont font évidemment partie le relief, les distances, la taille des exploitations et la modestie de leur volumes de production.
Sourires.
Sourires.
Par conséquent, cette agriculture est particulièrement frappée par la crise laitière comme par celle de l’élevage. La déprise laitière est également un problème bien connu – et parfois douloureusement vécu – sur tous les bancs de cet hémicycle.
Or cette agriculture ne joue pas seulement un rôle économique, mais aussi un rôle social et environnemental. Tout ces éléments rendent nécessaire une solidarité nationale visant à favoriser son maintien comme son avenir. Cette exonération de charges donnerait un peu d’oxygène à ce secteur qui traverse une crise extrêmement difficile.
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement identique no 350 .
Cet amendement vise également à réduire les surcoûts de collecte afin d’assurer aux producteurs de lait de montagne un accès au marché. La collecte dans les zones difficiles constitue un enjeu majeur au regard, en particulier, de la fin récente des quotas laitiers qui a constitué la dernière étape de la dérégulation du marché laitier : d’où l’importance de cet amendement.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement identique no 429 .
Même si son exposé sommaire est rédigé différemment, cet amendement est identique aux quatre précédents. Je serai brève, car nous avons longuement débattu, il y a deux semaines, des contraintes et des handicaps des zones de montagne.
Quand on y collecte du lait, l’on est obligé d’utiliser des camions de plus petite taille qu’en plaine afin d’atteindre les points de collecte situés jusque dans les vallées les plus reculées.
En outre, il faut utiliser des véhicules pouvant rouler sur la neige. La collecte y est aussi plus difficile, parce que les exploitations sont parfois très éloignées les unes des autres. Par conséquent, le temps de collecte pour les chauffeurs est souvent beaucoup plus long.
Cet amendement vise à prendre en compte ces difficultés. Non seulement l’agriculture de montagne est le plus souvent une agriculture de qualité, dont tout le monde peut bénéficier et apprécie les produits, mais elle permet de préserver nos paysages et une activité qui demeure le principal pourvoyeur d’emplois dans nos zones de montagne.
Bien sûr, je suis extrêmement sensible à ce qui est dit par les uns comme par les autres. Néanmoins, je voudrais souligner un point important : on pourrait sans doute, pour que l’aide apportée soit plus pérenne, préférer au dispositif proposé une aide à l’investissement.
Or la refonte des budgets de FranceAgriMer, début 2015, a eu pour conséquence la suppression de la ligne qui était dédiée à l’aide pour l’amélioration de la valorisation du lait en zones de montagne, que ce soit pour le volet investissements ou pour le volet appui technique.
On peut le regretter : j’ai d’ailleurs eu l’occasion, avec ma collègue Annie Genevard, de l’écrire dans le rapport sur l’acte II de la loi montagne que nous avons remis au Premier ministre.
Cette refonte, qui remonte à 2015, a encore complexifié la situation. Telles sont les raisons pour lesquelles j’ai – avec un certain nombre de collègues élus de circonscriptions montagnardes – déposé des amendements tant au projet de loi de finances qu’au projet de loi de financement de la sécurité sociale, afin que l’intérêt de l’agriculture de montagne soit pris en compte.
Il y a en effet un intérêt à produire et à continuer de produire en montagne. Or, pour les raisons que je viens d’évoquer, la différence de coûts entre l’agriculture de plaine et l’agriculture de montagne véritablement manifeste.
Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements identiques ?
Sourires.
Contrairement à vous, chers collègues qui êtes directement concernés par la montagne dans vos circonscriptions, je n’y suis lié que par des attaches familiales.
Non, un peu plus au nord. La production laitière de montagne est d’une qualité telle que la valeur ajoutée par la production fromagère de montagne est reconnue par le consommateur, qui accepte souvent de payer plus cher ses produits.
Le problème, pour répondre à M. Censi, tient à l’incohérence, à la mauvaise accroche de tel ou tel amendement sur tel article de tel code ou encore au fait que les conséquences de l’amendement proposé pourraient, s’il venait à être adopté, être préjudiciables aux intérêts de celui qu’il a vocation à défendre.
Il ne s’agit pas là d’une réponse administrative.
Je pensais que vous alliez employer un autre mot, celui – employé par un candidat qui est peut-être le vôtre – d’arguties juridiques.
Quoi qu’il en soit, il me semble que ces amendements sont des amendements d’appel.
En effet, ils proposent d’exonérer de cotisations sociales – de manière très large, c’est-à-dire totalement – les rémunérations versées, quel que soit leur montant, aux salariés embauchés pour la collecte de lait en montagne.
Sans méconnaître les difficultés spécifiques à cette activité, que Mme Laclais a très bien décrites, il apparaît compliqué de leur aménager un régime aussi dérogatoire, dont les conditions ne sont en outre pas précisées ni le coût connu. De plus, l’exonération se cumulerait avec les autres dispositions en vigueur, notamment avec l’allègement général.
Cet appel mérite cependant d’être entendu, bien que le dispositif proposé mérite d’être retravaillé afin de faire, peut-être, l’objet d’une nouvelle proposition au cours des années qui viennent. Pour l’heure, je propose de le rejeter.
Monsieur Accoyer, vous nous proposez – je n’ai pu m’empêcher de le relever – de donner de l’oxygène à la montagne.
Sourires.
Il s’agit bien évidemment d’un clin d’oeil.
Très honnêtement, nous ne disposons pas du bon outil. Nul ne conteste la problématique qui a été décrite : d’une part, des handicaps, et de l’autre, des atouts, notamment en termes de filières, de qualité et de valeur des produits, comme Gérard Bapt l’a rappelé.
Cependant, comment rendre applicable un amendement de cette nature ? En d’autres termes, comment être sûr que le camion ou le personnel qui le conduit en bénéficieront ?
Écoutez, le Gouvernement est défavorable à cet amendement car je ne vois pas nos fonctionnaires aller vérifier que le personnel qui bénéficie de cette exonération fiscale est bien affecté à la desserte d’une zone de montagne.
La qualification d’une telle zone est d’ailleurs assez complexe, même si elle renvoie à des décrets.
Mais enfin, le dispositif envisagé n’est pas le bon outil ! Imaginez-vous nos fonctionnaires aller s’assurer que le personnel concerné est bien affecté à la seule collecte en zone de montagne ?
Nous sommes en présence d’un outil d’exonération sociale qui n’est pas adapté : tel est le point de vue du Gouvernement.
Plusieurs orateurs ont demandé la parole. Je leur demande donc d’être relativement brefs. La parole est à M. Arnaud Viala.
Je tombe en effet de mon banc lorsque j’entends M. le secrétaire d’État dire que les zones de montagne en France ne sont pas identifiables..
Ce n’est pas ce que j’ai dit.
… alors que nous venons de passer quinze jours, dans ce même hémicycle, à examiner le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne. À l’entendre, il faudrait donc embaucher des fonctionnaires pour localiser la montagne dans notre pays !
Je ne l’ai pas dit.
Mais nous rêvons ! Ce que nous voulons dire, c’est que l’agriculture, a fortiori en zones défavorisées, a besoin de mesures compensatrices compte tenu du surcoût engendré par la localisation des exploitations concernées dans ces zones.
J’ajoute que ces amendements identiques vont être rejetés pour des raisons absolument fallacieuses. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017, je viens de déposer un amendement sur les indemnités compensatoires de handicaps naturels ou ICHN, que le Gouvernement est en train de fiscaliser : or il a été repoussé au motif qu’il s’agirait d’un cavalier législatif !
La mauvaise foi, ça suffit.
J’entends donc, de manière très claire, qu’après les débats – que nous avons voulu consensuels – que nous avons eus sur le projet de loi montagne, le Gouvernement ne prend pas en compte le handicap naturel de l’agriculture, qui souffre par ailleurs de manière affreuse, ce qui met en péril de nombreuses productions.
M. Viala m’attribue des propos que je n’ai pas prononcés : le compte rendu fera foi. Le Gouvernement demande une suspension de séance de dix minutes.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à dix-neuf heures vingt-cinq.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Les éleveurs de montagne ont des difficultés pour la collecte, mais on sait quelle est la qualité des fromages de montagne – je ne donnerai aucun nom pour n’en oublier aucun – et j’espère qu’ils font payer leur lait au juste prix, en intégrant notamment le prix du transport.
La crise du lait, on la connaît, elle est souvent évoquée ici lors des questions au Gouvernement. J’imagine assez bien la réaction des éleveurs normands ou bretons demain, dans les endroits en tout cas où il y a un grand nombre de troupeaux et beaucoup de lait, s’ils apprenaient que leurs collègues vendant du lait en montagne bénéficient d’une exonération de cotisations. Je pense que cela créerait un certain désordre.
Ce n’est pas exactement la même chose, effectivement, ce n’est pas la même agriculture, mais cela créerait du trouble, et il n’y a aucune étude d’impact. L’on connaît les zones de montagne, et ce n’était pas la peine de vous énerver ainsi, monsieur Viala, vous auriez pu le dire plus calmement, mais il me semble préférable de ne pas accepter ces amendements. Même si l’un d’entre eux a été présenté par un membre de notre groupe, c’est la position du groupe.
Je suis très étonné par votre argumentation, monsieur Issindou. Je n’aurais jamais imaginé que vous puissiez défendre une telle position, d’autant que vous donnez des arguments en faveur du lait de montagne pour expliquer ensuite qu’il ne faut pas l’aider.
Comment se passe la production de lait en zone de montagne, monsieur le secrétaire d’État ? Vous vous êtes probablement un peu égaré tout à l’heure, mais vous avez une propension à vous énerver quand vous êtes pris en défaut de cohérence. Les agriculteurs, en général, luttent contre le courant qui consiste parfois à créer des fermes immenses, des ranchs, de mille vaches par exemple. S’opposant à cela, ils sont souvent sur de petites exploitations qui se regroupent pour constituer des coopératives. C’est le cas sur l’Aubrac, monsieur Bapt, votre région, pour faire par exemple du fromage de Laguiole. Ils se prennent totalement en charge. Il y a aussi de très beaux cas à Abondance, avec le même fonctionnement.
Inspirez-vous donc des bonnes pratiques et aidez-les à plusieurs titres. Ils traversent une crise conjoncturelle, et en plus, cela leur permettrait de partager de bonnes pratiques.
Tout à l’heure, le Gouvernement s’est demandé ce qu’il fallait faire pour aider les zones rurales, en expliquant qu’il fallait arrêter avec les zonages et les découpages. Là, vous vous appuyez sur un découpage intelligent, qui est la zone de montagne, pour aider le monde rural, et, je vous le dis très clairement, à moindres frais.
Monsieur le secrétaire d’État, vous soulignez la difficulté qu’il y aurait à identifier les zones de collecte et, par conséquent, les salariés concernés. En fait, ce sont de coopératives et le périmètre de collecte de lait est parfaitement identifié. Je ne crois donc pas que votre argument puisse être pris en considération.
Je suis un peu consterné par le dérapage non contrôlé de M. Issindou. Je crois qu’il y a un problème, mais on va passer par indulgence sur cette expression quelque peu choquante.
Cette collecte, je le rappelle, est extrêmement difficile. Ce sont de petites quantités. Il y a la neige, le verglas, les congères, les glissements de terrain. Parfois, il faut faire vingt, trente, quarante kilomètres de plus pour aller collecter de petites quantités.
J’ajoute que les exploitants eux-mêmes ont de grandes difficultés, avec des normes extrêmement lourdes à assumer pour les bâtiments d’élevage, des contraintes sur l’épandage pendant six mois de l’année.
L’agriculture de montagne a du mal à survivre. C’est pourquoi nous devons adopter ces amendements, et je compte pour cela sur l’intelligence collective de nos collègues.
Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïtés, je tiens à préciser qu’à mon sens l’outil choisi n’est pas le bon, pour des raisons de mise en oeuvre. Je n’ai jamais dit que nous allions embaucher des fonctionnaires pour procéder à des vérifications, mais qu’il est difficile d’identifier les salariés affectés à telle ou telle fonction.
Par ailleurs, je n’ai jamais remis en cause le zonage. Vous imaginez bien que j’ai accordé un certain regard, avec mes collaborateurs, à la loi montagne qui a été adoptée. Je n’ignore pas les classifications qui ont été faites et ce que votre assemblée a décidé. Je dis simplement que ce n’est pas le bon outil, ni du point de vue juridique, ni de celui de l’efficacité.
N’y voyez pas un quelconque mépris de ma part. Je pense qu’il vaut mieux retravailler sur un dispositif de soutien à l’investissement, mais pas sur un dispositif d’exonération de cotisations, qui ne me semble pas le bon outil pour répondre à une problématique bien plus large, sur laquelle il faudrait discuter de la crise du lait en général ou de l’efficacité des filières en particulier, d’autant qu’elles peuvent être variables, puisque ce n’est pas parce que le lait est produit en montagne que la valeur ajoutée est nécessairement forte. Tout cela est assez compliqué et dépend des territoires et des filières.
Il est procédé au scrutin.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 831 rectifié .
Cet amendement a pour objet de répondre à une certaine ambiguïté qui a parfois été soulignée, s’agissant du fait générateur des prélèvements sociaux. Il permet de clarifier le droit et d’éviter des débats que l’on a pu avoir sur certains autres sujets par le passé. Il n’a pas d’incidence financière, ni budgétaire. Je vous propose donc de l’accepter.
Par ailleurs, le Gouvernement demande au Parlement de l’habiliter à prendre par voie d’ordonnance les dispositions nécessaires pour clarifier et consolider à droit constant, j’y insiste, les règles relatives aux assiettes sociales aujourd’hui largement éparses, peu cohérentes entre elles et, partant, très complexes à comprendre, ce qui est source de confusion, mais aussi parfois d’erreurs, qui peuvent générer des contentieux.
Je m’exprime à titre personnel, puisque je crois que cet amendement n’a pas été examiné par la commission. Il réécrit les dispositions du code qui établissent le fait générateur des cotisations et contributions sociales, afin de clarifier le fait que celui-ci est constitué par l’emploi ou l’activité des personnes considérées. Ainsi, on clarifie le droit applicable aux situations de décalage de paie et de versement tardif de certains éléments de rémunération. Elles sont alors rattachées aux périodes d’emploi qui ont généré ces droits. Les dispositions qui leur seront applicables seront celles en vigueur pendant cette période, et non lors du versement du salaire, ce qui constitue une clarification tout à fait appréciable.
En second lieu, il s’agit d’habiliter le Gouvernement pour prendre par voie d’ordonnance les dispositions nécessaires pour consolider à droit constant les règles de financement de la Sécurité sociale liées aux assiettes sociales, conformément aux engagements pris en matière de simplification et de lisibilité. Il s’agit de sujets éminemment techniques. À titre personnel, je suis favorable à cet amendement.
À la lecture de l’exposé des motifs du Gouvernement, j’avais senti qu’il y avait un souci. Quand quelque chose fonctionne, je ne vois pas l’intérêt de le clarifier. Aussi, lorsque le ministre parle de clarifier le droit applicable aux situations de décalage, c’est qu’évidemment il y a un loup. J’ai donc pris contact avec les entreprises qui m’ont dit que, si le souci était un souci de clarification, le mieux était de ne pas changer les règles, puisqu’elles n’avaient pas encore été saisies d’un tel problème. Cette intention manifeste du Gouvernement est très dangereuse pour les entreprises.
Dans votre amendement, prétendument anodin, il s’agit de faire correspondre les sommes dont le versement est décalé par rapport à la période d’emploi et de leur appliquer le taux de cotisation de la période d’emploi. C’est tout simplement ingérable en l’état des systèmes de paie des entreprises. Ce serait demander des mois de développement, puisqu’il faudrait historiser les taux, refaire les paies du mois d’emploi, recalculer les tranches pour lesquelles il y aurait un dépassement de plafond de la Sécurité sociale et des autres seuils – je pense aux anciennes réductions Fillon ou au CICE. Cela va nécessiter des calages de logiciels.
Au regard de ces conséquences, modifier les règles actuelles, qui sont bien maîtrisées par les entreprises et qui ne posent aucun problème d’application, ne me semble pas être un objectif de simplicité, ni de sécurité juridique. Les deux entreprises patronales que j’ai contactées m’ont dit qu’elles étaient extrêmement réservées sur cet amendement, voire qu’elles y étaient totalement opposées. Quoi qu’il en soit, ce n’est sans doute pas le bon moment.
Ce système qui fonctionne depuis toujours, et qui fonctionnait relativement bien quand j’étais chef d’entreprise, vous allez le complexifier. Celui qui a rédigé l’amendement ne sait pas comment fonctionnent les entreprises. Tout le monde n’a pas un salaire fixe. Certains ont des commissions sur des facturations, par exemple. Quelle est, dans ce cas, la date du fait générateur ? Celle de la facture ? Celle du paiement ? Celle de l’avoir sur la facture du retour de marchandise qui n’a pas été acceptée ? Imaginez la complexité ! Dans le cas de quelqu’un payé à la commission, avec un avoir, comment allons-nous calculer les charges sociales si le taux est modifié ?
Vous introduisez une complexité terrible. Rappelez-vous de Mme Charbonnier, qui avait dit au Président de la République lors d’une émission de télévision : « Monsieur le Président, arrêtez de nous simplifier la vie, ça nous complique l’existence ! ». C’est exactement ce que vous êtes en train de faire. Vous êtes en train de compliquer quelque chose qui était simple et qui fonctionnait bien. Quand on payait le salaire, les charges étaient payées sur le salaire versé. C’était assez simple. Peut-être y avait-il quelques écarts, parce qu’il fallait régulariser les heures supplémentaires ou le salaire à cause d’une erreur pour un congé maladie, par exemple. Toujours est-il que, dans l’ensemble, cela fonctionnait bien. Je ne vois vraiment pas pourquoi cet amendement est proposé.
L’amendement no 831 rectifié est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 830 .
Pour répondre au président Accoyer qui est en train de dire que je n’ai rien compris…
J’ai l’oreille fine, monsieur le président ! Je voudrais simplement vous dire que l’année dernière, nous avons eu des discussions sur la caisse des congés payés et sur le fait générateur – s’agissait-il de la période de travail ou de la période de versement du salaire représentant les congés payés ? L’un des buts de cet amendement, c’est de clarifier ce point qui a fait débat, y compris avec la Cour des comptes, si ma mémoire est bonne, pour connaître la période d’enregistrement de la recette, à savoir si elle correspondait au moment du fait générateur ou au moment de la perception de la cotisation. Il n’y a pas de loup. Cela ne changera rien pour les entreprises.
Quant à lui, l’amendement no 830 vise à corriger une erreur…
Merci. Cela fait avancer le débat…
Le Parlement a adopté un amendement à l’article 8 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016, qui a supprimé par incidence, contrairement aux objectifs recherchés par les parlementaires qui souhaitaient le diminuer, le seuil d’assujettissement au premier euro des indemnités de rupture des seuls mandataires sociaux et des dirigeants de plus de 380 000 euros versées à des salariés. Le présent amendement corrige cette erreur matérielle, en rétablissant le seuil supprimé pour l’assujettissement de l’indemnité de rupture des salariés qui reste à un niveau inchangé, ce qui leur est favorable. La rédaction de l’amendement avait en effet fait appliquer aux salariés ce qui était réservé aux seuls mandataires sociaux.
L’amendement no 830 est adopté.
Cet amendement vise à faire bénéficier les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – de l’exonération de charges sociales accordée en contrepartie des tâches effectuées au domicile des personnes âgées ou en situation de handicap, des personnes ayant la charge d’un enfant en situation de handicap et des familles en difficulté. À ce jour, seuls les centres communaux d’action sociale – les CCAS – et les centres intercommunaux d’action sociale – CIAS – bénéficient de cette exonération. Il vous est proposé de l’étendre aux EPCI qui sont amenés à gérer des services d’aide et d’accompagnement à domicile.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 649 .
La commission a compris l’intention d’étendre le bénéfice des aides aux personnes dépendant d’établissements intercommunaux qui agissent à domicile. Néanmoins, la commission a jugé que ce serait un amendement à retravailler, notamment parce que son coût est totalement inconnu. Peut-être serait-il opportun que M. Terrasse et M. Vercamer…
Pardon !
…que M. Lurton et M. Vercamer revoient sa rédaction pour le proposer à une autre instance. Aucune étude d’impact n’a été menée sur l’extension d’une mesure à toutes les personnes, qu’il faudrait d’ailleurs cibler, agissant au nom de CCAS ou d’établissements intercommunaux pour le soutien à domicile. Je m’en remets à la sagesse de mes collègues.
Je fais un peu la même analyse que votre rapporteur. Je ne sais pas combien de personnels des EPCI sont affectés à ce type de tâche. Habituellement, par vocation, ce sont les agents des CCAS et des CIAS qui le sont. Ne disposant d’aucun chiffrage, je crains que nous n’avancions sur un terrain un peu inconnu. L’exonération en question a, pour la Sécurité sociale, un coût de 850 millions d’euros, ce qui est loin d’être négligeable.
Je ne connais pas d’exemples de ce type, mais j’imagine que si un amendement a été rédigé, c’est qu’il en existe. Actuellement, une mission de l’inspection générale des finances travaille sur les services à la personne. Nous attendons ses conclusions. Sûrement fera-t-elle un point sur le nombre de personnels qui peuvent être concernés. Si ce nombre est faible, j’imagine que nous pourrions, par cohérence, considérer cet amendement avec bienveillance.
Alors même que j’ai quelques contacts avec les communes, les intercommunalités, les CCAS ou les CIAS, je ne vois pas bien de quel type de personnes vous parlez. Je ne suis pas certain qu’il y ait eu en commission une évaluation de l’impact de l’amendement. En attendant plus d’informations, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Monsieur le secrétaire d’État, je suis d’accord pour faire travailler la mission dont vous avez parlé sur ce sujet. Mais la vraie question est : qu’est-ce qui justifie que les EPCI, qui effectuent la même mission, ne soient pas exonérés ?
La lutte contre le mode de vie sédentaire représente un impératif de santé publique. Les chiffres de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, INSERM, publiés hier nous alertent sur les conséquences de la combinaison d’une alimentation trop riche, de la culture des écrans et de la diminution des activités physiques quotidiennes. Comme vous le savez, l’obésité touche 15 % de la population française. Un homme sur deux et une femme sur trois sont en situation de surpoids. Or le surpoids et l’obésité offrent un terrain propice au développement des pathologies cardiovasculaires ou du diabète de type 2.
Les transformations de l’organisation du travail en entreprise couplées à une motorisation croissante des déplacements de la vie quotidienne sur le trajet entre domicile et travail sont l’une des raisons du développement de la sédentarisation de nos modes de vie. Dans ce contexte, il est essentiel d’associer le monde de l’entreprise à la promotion de l’activité physique et sportive en développant un cadre réglementaire favorable aux initiatives des employeurs comme des salariés, par exemple dans le cadre des négociations menées par les partenaires sociaux sur la qualité de vie au travail, mais aussi de permettre aux entreprises d’investir dans le champ du sport, de la santé et du bien-être, conformément au plan que Marisol Touraine et Valérie Fourneyron ont initié en 2012.
Ce cadre incitatif que nous appelons de nos voeux n’a rien d’évident. En juin dernier, le groupe Adidas a été contraint de contester la décision de l’Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d’allocations familiales, Urssaf, qui a requalifié le régime fiscal et social de la mise à disposition gratuite aux salariés d’une salle de sport. L’Urssaf a considéré en effet que la mise à disposition d’un tel équipement auprès des salariés constituait un avantage en nature et devait par conséquent être assujettie aux cotisations sociales. L’amendement propose de modifier le code de la Sécurité sociale pour que l’avantage en nature fourni par l’employeur en vue de favoriser la pratique sportive en entreprise ne soit pas considéré comme une rémunération, pour la détermination de l’assiette des cotisations sociales.
À titre personnel, je suis très sensible aux arguments de santé publique que vient de développer M. Juanico, d’autant qu’ils vont dans le sens de ce que nous avons adopté à l’occasion de la loi santé, à l’initiative notamment de Valérie Fourneyron, en permettant aux médecins de prescrire des activités physiques.
La façon dont l’assurance maladie pourrait prendre en charge tout ou partie de ces prescriptions n’est pas encore précisée. En l’occurrence, il semble que la mise à disposition d’une salle de sport par l’employeur soit plutôt une bonne mesure de santé au travail – M. Sebaoun est d’accord ! –, qui peut difficilement nuire aux comptes de la Sécurité sociale.
Mais dans l’immédiat, on ne peut empêcher l’Urssaf de regarder cette mesure comme un avantage en nature et donc de l’assujettir aux cotisations sociales.
Pensons également que seules les grandes entreprises peuvent mettre de tels équipements à la disposition de leurs salariés. J’ai pu le constater dans l’aéronautique à Toulouse.
Donc, nonobstant le fait que dans un futur que j’espère proche, ce type de mesures pourra être travaillé et reconnu comme favorable à la santé publique, donc susceptible de faire l’objet d’incitations fiscales ou sociales, je vous propose de repousser cet amendement.
C’est un sujet difficile, car on est toujours à la merci d’une généralisation ou d’une extension du dispositif. Après la mise à disposition gratuite d’équipements sportifs, ne voudra-t-on pas passer à d’autres éléments ? Cette mise à disposition peut-elle ou non faire partie du contrat de travail ? Je ne suis pas favorable, par crainte d’extension…
…à cause du risque de contamination d’autres types d’activités.
Il est vrai que votre amendement est précis, puisqu’il mentionne « l’avantage en nature fourni par l’employeur afin de favoriser la pratique sportive en entreprise. » J’ai cependant peur que de fil en aiguille, l’on observe un effet d’extension – si le mot de contamination vous dérange. Monsieur Tian, ce mot n’a aucune connotation péjorative !
Oui, c’est ce que j’ai dit, mais si vous préférez, je remplace ce mot par « extension ».
Franchement, les commentaires sur les mots utilisés, en continu, commencent à devenir un peu irritants ! Je remplace ce mot ; je le retire. Êtes-vous content, monsieur Tian ? Je n’ai parlé de contamination qu’en pensant que ces mots avaient la même signification en matière fiscale. Il n’y avait là aucune autre allusion.
En plus, monsieur Juanico, je suis contrarié de vous voir citer une affaire précise qui fait l’objet d’un redressement ou d’un contentieux. Il est toujours difficile de donner l’impression ou le sentiment – comment dois-je m’exprimer ? – qu’on légiférerait à partir d’un cas, impliquant, qui plus est, une entreprise au nom connu. Bref, je ne suis pas favorable à cet amendement, même si je reconnais que la problématique est intéressante.
Pour terminer sur une note un peu plus humoristique, puisque vous êtes parti de la question du surpoids, j’ai remarqué que les départements les plus concernés étaient ceux du Nord et de Meurthe-et-Moselle. Vous savez d’où je viens ; je suis donc repéré…
Cet amendement mérite d’être adopté. Les Urssaf se livrent souvent à des requalifications en considérant comme des avantages en nature des biens, objets ou facilités pour accéder à un bien, mis à disposition des salariés. Elles font parfois des rappels sur plusieurs années, l’ensemble représentant des sommes importantes dans des grandes entreprises. D’abord, cet amendement concourt à la santé publique, comme l’a souligné le rapporteur qui, curieusement, a fait un double salto arrière pour s’y opposer. C’est assez étonnant ! Ensuite, comment à la fois soutenir la pratique du sport pour une meilleure santé – objectif qui nous rassemble tous – et ne pas réserver une protection particulière aux initiatives exposées au risque de taxation au titre de cotisations sociales ? Pour cette raison, nous allons voter cet amendement, et j’espère que nos collègues comprendront que la santé au travail est une priorité pour nous tous.
Le principe de la rémunération est d’être individuelle. Cette jurisprudence m’interpelle, car la présence d’une salle de sport ou d’équipements sportifs au sein d’une entreprise ne signifie pas que le salarié va obligatoirement y avoir recours. Il s’agit d’un bien collectif, qu’il lui est loisible d’utiliser ou non – une différence substantielle avec la rémunération, spécifique à chaque salarié. Il faudrait donc voter cet amendement.
Il faut également considérer la question de manière plus large. Je m’interroge ainsi sur les autres types d’avantages, tels qu’une crèche d’entreprise, susceptibles d’être mis en cause ; peut-être que le Gouvernement ou le rapporteur ont des informations à ce sujet. Reste que du point de vue du principe, je ne vois pas pourquoi quelque chose que le salarié ne va pas forcément utiliser serait intégré d’office dans sa rémunération !
Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants est assez sensible à cet amendement, non parce que je suis du Nord et que je suis concerné, à quelques kilos près, mais parce que je pense que c’est une mesure de bon sens. On ne peut pas pousser à développer la pratique sportive en entreprise pour favoriser le bien-être et lutter contre le burn-out, et taxer les entreprises qui le font !
Dans le cadre de la lutte contre l’obésité, ce type d’initiatives représente une bonne pratique. Il suffit d’allumer la télévision pour voir qu’elle se développe dans beaucoup d’entreprises, et je pense qu’elle est également bénéfique pour le climat social en leur sein. Cet amendement va donc dans le sens de l’histoire et de l’intérêt de l’entreprise comme de la société.
On a besoin d’une double cohérence. En fin de projet de loi, l’on examinera la branche « accidents du travail – maladies professionnelles », AT-MP. On rappellera alors qu’au sein de cette branche, il y a trois métiers, dont l’un est la prévention. Quand une entreprise se mêle de prévention, il ne faut pas qualifier cette démarche comme un avantage en nature !
Ce n’est pas dans cette direction qu’il faut aller. En discutant de cet amendement, pensons à ce que nous ferons quand nous débattrons de la branche AT-MP. Dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé, on a adopté une disposition qui reconnaît expressément que la prescription d’activités physiques participe d’un effet curatif et peut être de nature préventive. Pourquoi, alors que nous venons de voter cette loi, nous séparer de cette double notion en faisant de la mise à disposition d’une salle de sport dans une entreprise un avantage en nature ? Le redressement de l’Urssaf est sans doute regrettable, mais si l’Urssaf ne souhaitait pas cet amendement, elle n’aurait pas dû y procéder…
Dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé, nous nous sommes mobilisés, sur l’ensemble des bancs, pour autoriser la prescription d’activités physiques et sportives adaptées aux patients atteints d’affections de longue durée. C’est légitimement que le sujet du lien entre sport et santé nous a rassemblés, quand on sait que les maladies de la sédentarité représentent la première cause de mortalité évitable et coûtent 80 milliards d’euros par an.
Il faut situer l’amendement que j’ai cosigné avec mon collègue Régis Juanico dans un environnement global qui doit, tout au long du parcours de vie, et donc du parcours professionnel, inciter et faciliter l’accès à l’activité physique et sportive. Aujourd’hui, trop peu d’entreprises disposent malheureusement d’équipements qu’elles pourraient mettre à disposition de leurs salariés ; de plus, si les équipements représentent un aspect du problème, ils ne l’épuisent pas. En effet, ils sont aujourd’hui souvent utilisés par des publics extérieurs, et, inversement, ne le sont pas par tous les salariés de l’entreprise – d’où cette inégalité que représenterait un bulletin de salaire qui les prendrait en compte en tant qu’avantage en nature. Cet amendement d’appel constitue un élément intéressant, mais il faut aller plus loin.
Mes chers collègues, il faut voter cet amendement, c’est évident ! Les arguments relatifs à la politique de santé publique sont majeurs. Comme Valérie Fourneyron l’a rappelé, la sédentarité est le problème du siècle ; il en va autant de l’obésité, des maladies cardiovasculaires et du stress. Je mentionne la question de la santé mentale en entreprise car nous menons actuellement, avec Gérard Sebaoun, une mission d’information sur ce thème, et chacun sait que les effets du sport sont extrêmement bénéfiques pour éviter ce qui représente la première cause d’arrêts de travail dans les entreprises.
Pour ce qui est de la jurisprudence, je ne crois pas, monsieur Bapt, que nous ferions offense aux Urssaf ! En droit social, pourquoi hésiter quand on peut éviter de se reposer sur la seule jurisprudence et légiférer intelligemment pour clarifier les choses ? Faisons-le tout de suite !
Si l’amendement présenté par M. Juanico n’est pas adopté, faudra-t-il assujettir la salle de sport de l’Assemblée nationale au versement de cotisations sociales ? C’est un très bon exemple : mon collaborateur utilise cette salle, tandis que d’autres ne l’utilisent pas ; certains députés s’en servent, d’autres non. Est-ce un avantage en nature ? Faudra-t-il l’imputer sur le bulletin de salaire de nos collaborateurs qui utilisent la salle de sport de l’Assemblée nationale ?
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Je suis tout à fait d’accord avec ce qu’a dit Mme Fourneyron : il me semble qu’il s’agit avant tout d’un amendement d’appel.
Monsieur Accoyer, vous dites que vous défendez les TPE et les PME : pensez donc à leurs salariés qui, s’ils veulent faire du sport entre midi et deux heures, sont obligés de souscrire un abonnement à une salle de sport ! Vous comprendrez alors que la mise à disposition de salles de sport par les grandes entreprises peut être considérée comme un avantage en nature. Je rappelle que leurs salariés bénéficient déjà d’un comité d’entreprise, qui propose des accompagnements sociaux pour les colonies de vacances, ou les vacances des parents.
Non, ce n’est pas un nivellement par le bas. Ce que je dis, c’est que si nous ne voulons pas creuser encore plus le fossé entre les grandes entreprises et les TPE, alors il faut élargir la réflexion. Voilà ce que je voulais dire, monsieur Censi, je ne suis pas opposée au fait de…
Mais il y a des salles de sport dans les casernes, dans toutes les grandes administrations, y compris à Bercy !
C’est pourtant la vérité : on élargit le fossé entre les TPE et les PME d’un côté, et les très grandes entreprises de l’autre.
Il faut savoir qu’aujourd’hui, quand les partenaires sociaux négocient dans une entreprise l’ensemble des conditions d’organisation, dont les avantages en nature qui sont liés à la vie quotidienne des salariés, la salle de sport est prise en compte. On ne peut donc pas dire, il me semble, qu’il ne s’agit pas d’un avantage.
Je n’ai pas qualité pour me prononcer sur l’interprétation juridique faite par l’URSSAF, mais que les salles de sport soient conçues comme un avantage, c’est la réalité dans les négociations.
Je ne savais pas que je susciterais autant de réactions positives en défendant cet amendement d’appel. Il est piquant de voir qu’il recueille le soutien de députés ayant par le passé voté contre la prescription par ordonnance d’une activité physique adaptée, dans le cadre de l’examen de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Mais enfin, passons !
L’essentiel est de progresser sur cette question de l’activité physique et sportive, notamment sur le lieu de travail. Par cet amendement, je voulais simplement donner l’alerte au sujet d’une situation précise, mais je n’aurais pas dû nommer la grande entreprise du sport dont il est question, puisqu’un contentieux est en cours. Le plus important, pour moi, est de pointer la conception extensive qu’a l’URSSAF de la notion d’avantage en nature, en particulier concernant les équipements sportifs.
La rédaction de mon amendement n’est pas aboutie : il ne prend pas en compte l’ensemble des activités qui pourraient être intégrées sur le lieu de travail. Je souhaite travailler avec le Gouvernement, au cours des prochaines semaines, sur ce sujet, afin de clarifier la situation. Je retire donc cet amendement.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
L’amendement no 243 est retiré.
Je ne me serais pas jeté du haut de l’héliport de Bercy si cet amendement avait été adopté ! Comme je l’ai dit d’entrée de jeu, il pose une bonne question. Il est assez facile de comprendre les motivations de ses auteurs, mais il est difficile d’ignorer que le dispositif qu’ils proposent risque d’être étendu à d’autres cas. D’ailleurs, comme cela a été dit, parfois la mise à disposition d’installations sportives fait partie du contrat de travail.
Vous savez, le problème ne se pose pas que dans le cas évoqué par M. Juanico. Je vais vous faire une confidence : l’un de vos anciens collègues, bien connu ici, ayant présidé plusieurs commissions, est venu me voir à ce sujet…
Par exemple, mais aussi la commission des affaires sociales !
Vous aurez reconnu de qui je veux parler. Cette personne est venue me voir car elle est confrontée à un problème du même ordre dans son territoire : des entreprises y utilisent une piscine intercommunale dans des conditions favorables, afin de promouvoir le sport, le bien-être, etc. C’est alors un problème d’assujettissement à la TVA qui se pose. Il est tout à fait légitime, tout à fait compréhensible, que l’on se soucie de ces questions.
Je voudrais rassurer certains des orateurs qui se sont exprimés de façon tout à fait pertinente : il y a une différence entre les situations individuelles et les situations collectives. Il n’est pas question d’assujettir les personnes qui bénéficient de ces avantages au versement de cotisations sociales, car il est en effet difficile de savoir qui en bénéficie effectivement, mais d’assujettir l’employeur, sur une base forfaitaire.
J’essaie de vous parler de façon constructive et apaisée, et vous me faites des procès d’intention à chaque phrase ! Si vous le préférez, je continuerai ce débat en restant assis au banc du Gouvernement, et en me contentant de dire « favorable » ou « défavorable » sur chaque amendement.
J’essaie de faire avancer les choses car, je le répète, il y a là un vrai problème. Des difficultés juridiques se posent, qui conduisent à des contentieux – j’ai mentionné quelques-unes de ces difficultés, ainsi que les contentieux fiscaux impliquant l’URSSAF. Quoi qu’il en soit, cet amendement n’aurait pas réglé le problème.
Catherine Lemorton, la présidente de la commission des affaires sociales, a tout à l’heure évoqué le fait que certains employeurs mettent gratuitement à disposition des installations sportives, tandis que d’autres participent financièrement à des abonnements via les comités d’entreprise, ou par d’autres canaux, et que d’autres encore mutualisent des installations. Tout cela pose aussi un problème d’égalité. Je ne veux pas compliquer ce problème à outrance, mais pour avoir été confronté à des contentieux de cette nature…
C’est ridicule ! Et le soleil de Montpellier, lui aussi vous le fiscaliserez ?
Mais ce n’est pas la question, écoutez ! Franchement ! J’ai bien compris : vous cherchez à provoquer un incident, vous voulez m’énerver. Je me suis déjà énervé une fois : je vous rassure, cela n’arrivera plus.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Il n’y a plus lieu de donner l’avis du Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, puisque l’amendement a été retiré !
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly