La commission poursuit l'examen du projet de loi pour la croissance et l'activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques).
Après l'article 49
La commission est saisie des amendements SPE997 et SPE1006 de M. Jean-Christophe Fromantin, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
Dans le cadre de la discussion de l'article 49, le ministre de l'économie a déjà fourni des éléments de réponse concernant ces amendements, qui visent l'ouverture aux acteurs privés du capital des gares ferroviaires et routières, pour le premier, et des grands ports maritimes, pour le second.
Je ne reviens pas sur la question des gares. En revanche, en ce qui concerne les grands ports maritimes, il me semble que le statut juridique ne peut constituer un obstacle sérieux au moment où nous débattons d'un texte qui vise précisément à surmonter ce type de barrière.
Je rappelle que Rotterdam et Anvers sont les deux premiers ports « français » et que Gênes et Barcelone deviennent des ports majeurs du sud de la France, alors même que notre pays dispose d'une immense façade maritime et de grands ports qui devraient lui permettre de tenir un rôle de premier plan en matière portuaire, d'irriguer son territoire et son économie et de revitaliser son industrie. Nous devons réagir dès lors que les intérêts stratégiques de la France sont en jeu et que la perte de compétitivité de nos grands ports maritimes a des répercussions sur l'ensemble de notre économie.
Les investissements de l'État dans les grands ports maritimes sont aujourd'hui en baisse. Ils ne permettent même plus de draguer les ports afin d'y faire entrer des navires de plus en plus gros. Ce recul des investissements éloigne toujours plus nos ports des standards internationaux. Si l'État est en mesure de jouer son rôle d'investisseur et s'il fait aujourd'hui le choix stratégique d'un accompagnement auquel il a renoncé depuis des années, notre retard peut être rattrapé. Si ce n'est pas le cas, il doit consentir à l'ouverture du capital des grands ports maritimes à des investisseurs privés, comme cela existe déjà pour la manutention et l'outillage, afin de donner au secteur la forte impulsion que le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche, appelait de ses voeux mercredi dernier, en séance publique, lors du débat sur la politique maritime de la France. Les ambitions qu'il affichait sont légitimes, encore faut-il que les moyens suivent dans un contexte difficile.
L'amendement SPE1006 s'inscrit parfaitement dans la logique du projet de loi. Il transpose aux grands ports maritimes la dynamique que vous mettez en oeuvre pour les aéroports.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement SPE997. Il ne nous semble pas opportun d'ouvrir le capital des gares ferroviaires qui sont structurellement détenues par l'établissement public de tête.
Concernant l'amendement SPE1006, je me réfugierai d'autant moins derrière l'argument juridique du statut des grands ports maritimes que je tiens le raisonnement de M. Fromantin pour juste, convaincant et parfaitement cohérent avec la démarche que nous avons adoptée concernant les aéroports. Je vais de ce pas demander un rapport à l'Agence des participations de l'État sur les moyens d'aller en ce sens. Je vous invite, monsieur Fromantin, à retirer votre amendement, en m'engageant à vous communiquer ce document pour que nous puissions discuter sérieusement du sujet dans les prochains mois.
L'amendement SPE1006 est retiré.
Je suis défavorable à l'amendement SPE997.
Quant à l'ouverture du capital des grands ports maritimes, je suis réservée. En tout état de cause, les parlementaires auront leur rôle à jouer en la matière, l'expérience ayant montré qu'ils savaient imposer des contraintes qui ne sont pas inutiles.
S'agissant de l'investissement dans les ports maritimes, je partage les préoccupations de Jean-Christophe Fromantin : il y a une urgence absolue, notamment en matière d'entretien des voies d'accès et de dragage. Il faudra certainement « mettre la main au porte-monnaie ».
En revanche, je ne suis pas d'accord pour considérer que la propriété publique empêcherait le dynamisme, l'innovation et la puissance. Ainsi, les ports de Rotterdam et d'Anvers qu'il a cités sont détenus par des entités publiques, et, en Espagne, Ports de l'État est une structure nationale de gestion et de régulation qui permet de spécialiser les structures et de distribuer au mieux les investissements.
Je me félicite que le ministre s'empare de ce dossier, car la compétitivité maritime et portuaire est essentielle. La réforme portuaire en cours n'est pas terminée, mais il faut aller plus loin, tout en veillant à ne braquer personne en associant tous les acteurs.
La commission rejette l'amendement SPE997.
Section 4
Dispositions diverses
Article 50 : Obligation de proposer une offre réservée aux salariés en cas de transfert au secteur privé
La commission est saisie des amendements identiques SPE250 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE417 de M. Patrick Hetzel, qui tendent à supprimer l'article.
Depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, l'État, quand il cède ses participations, ne prend plus à sa charge l'éventuel écart entre la valeur réelle des actions et leur prix de vente aux salariés. Cela ne contribue pas à favoriser l'actionnariat salarié, dont l'incitation est pourtant une volonté proclamée dans l'exposé des motifs du projet de loi.
L'article 50 ne présente aucune valeur ajoutée : il n'offre aucune garantie supplémentaire par rapport à l'ordonnance ; il ne contraint pas non plus l'État à reprendre à sa charge le comblement entre prix de cession et valeur réelle des actions. Sur la forme, on ne comprend pas non plus qu'on introduise un article 31 ter dans une ordonnance qui ne comporte pas d'article 31 bis. Ce sont autant de raisons pour lesquelles nous demandons sa suppression.
Sur la forme, l'article 44 du projet de loi, que nous avons adopté ce matin, introduit dans l'ordonnance du 20 août dernier un article 31 bis relatif aux actions spécifiques de l'État. En toute logique, nous pouvons donc bien rédiger un article 31 ter.
Sur le fond, l'article 50 représente un apport réel par rapport au droit existant, car il rétablit les opérations réservées aux salariés des sociétés du secteur public, que l'ordonnance du mois d'août dernier avait supprimées. Elles se dérouleront désormais dans les conditions du droit commun puisque le financement par l'État de la décote par rapport aux opérations de marché n'existe plus.
Certains d'entre vous souhaitent manifestement rétablir la totalité du dispositif antérieur. Le Gouvernement préfère l'option moins dérogatoire retenue par les rapporteurs, qui oblige l'État à réserver 10 % des actions cédées aux salariés. Nous y reviendrons avec l'amendement SPE1795.
J'espère avoir convaincu MM. Poisson et Hetzel de retirer leurs amendements. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Le code du travail restreint le bénéfice des opérations réservées aux salariés à ceux qui sont déjà adhérents au plan d'épargne entreprise (PEE) alors qu'à mon sens, tous les salariés devraient en bénéficier. Mon amendement SPE841, qui sera appelé dans quelques instants, vise à introduire cette précision dont je ne vois pas trace dans l'amendement SP1 de Patrick Ollier ni dans celui des rapporteurs.
La commission rejette les amendements SPE250 et SPE417.
Elle en vient à l'amendement SPE974 de M. Philippe Vigier, qui peut faire l'objet d'une présentation commune avec l'amendement SPE1795 des rapporteurs, et avec l'amendement SPE841 de M. Jean-Frédéric Poisson.
L'amendement SPE974 vise à réserver 10 % des actions cédées aux salariés, ce qui constitue une bonne mesure incitative pour les salariés et les anciens salariés du secteur public à prendre des participations dans leurs entreprises.
Malgré un exposé sommaire un peu sévère, l'amendement SPE974 est intéressant, car il vise à promouvoir l'actionnariat salarié. Comme notre amendement SPE1795, il réintroduit le caractère obligatoire de la cession réservée aux salariés. En revanche, contrairement au nôtre, qui ne concerne que les premières, il s'applique indifféremment aux cessions se déroulant selon les procédures des marchés financiers et à celles qui ont lieu hors marché.
Les amendements SPE974 et SPE1795 visent à réintroduire pour l'État l'obligation, prévue par la loi du 6 août 1986, de réserver 10 % d'actions cédées aux salariés. Dans l'amendement des rapporteurs, qui a notre préférence, le décalage d'une partie du prix de cession de ces actions, qui ne peut être supérieur à 20 %, n'est pas pris en charge par l'État mais par l'entreprise, et seules sont concernées les cessions effectuées selon les procédures de marché.
Monsieur Poisson, vous vous interrogiez sur les salariés bénéficiaires de ces opérations. Le droit actuel prévoit que les offres réservées aux salariés peuvent être proposées à toute personne ayant passé cinq ans dans une entreprise publique. Or, la liste des personnes concernées est souvent très difficile à établir. Votre amendement SPE841 reprend une disposition du code de commerce qui est particulièrement délicate à mettre en oeuvre, car elle s'adresse à des salariés qui ont changé d'employeur depuis longtemps.
Pour notre part, nous souhaitons réserver ces opérations aux adhérents au PEE, sachant que l'adhésion y est extrêmement simple et qu'il sera donc très facile d'être éligible pour ces offres. Nous devons être certains que personne ne sera oublié, alors que le champ très large que vous proposez ne peut être couvert pour des raisons pratiques.
Je voudrais avoir la certitude que l'annonce officielle de la cession n'empêche pas les salariés d'adhérer au plan d'épargne entreprise.
Aucune durée d'adhésion au PEE n'est prévue, et il est possible d'y adhérer entre l'annonce de l'opération de cession et son exécution.
L'amendement SPE974 est retiré, de même que l'amendement SPE841.
La commission adopte l'amendement SPE1795.
Puis elle adopte l'article 50 modifié.
Article 51 : Définition des ratios d'investissement assurant la soutenabilité du modèle ferroviaire français conformément à la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire
La commission est saisie des amendements identiques SPE251 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE418 de M. Patrick Hetzel, qui tendent à supprimer l'article.
Je ne dénoncerai pas indéfiniment la mécanique consistant à nous faire voter des dispositions qui en modifient d'autres entrées en vigueur il y a six mois.
Le projet de loi portant réforme ferroviaire, dans la version déposée au Parlement, prévoyait que les ratios à respecter en vue de maîtriser la dette de SNCF Réseau seraient fixés par décret. Le Parlement a souhaité que ces ratios relèvent plutôt de la loi. La loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire précise ainsi que « les investissements de développement du réseau ferré national sont évalués au regard de ratios définis par le Parlement ».
Le Gouvernement souhaite répondre à la demande du Parlement en proposant de retenir un ratio unique correspondant au rapport entre la dette financière nette et la marge opérationnelle de SNCF Réseau. La mise en oeuvre de cette « règle d'or » du financement du secteur ferroviaire doit intervenir rapidement compte tenu de l'importance des enjeux liés à la maîtrise de la trajectoire financière du secteur. Cette règle d'or permettra d'encadrer la contribution de SNCF Réseau consacrée aux projets de développement du réseau et de concentrer son effort d'investissement sur le réseau existant, limitant ainsi la dérive d'un endettement qui progresse actuellement au rythme de 3 milliards d'euros par an.
Actuellement en cours de discussion, le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau sera transmis au Parlement avant sa signature, conformément à la même loi. Il déterminera notamment la trajectoire financière de SNCF Réseau, et il permettra de préciser l'impact de la règle d'or que nous vous proposons d'adopter aujourd'hui.
À défaut d'un retrait des amendements de suppression, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Ce nouveau ratio est certes plus simple que les précédents, mais je ne suis pas convaincu qu'il soit plus pertinent. Je crains qu'il ne se révèle un peu fruste pour mesurer la capacité de l'établissement à s'endetter.
Ce ratio, qui prend en compte la marge opérationnelle de SNCF Réseau, permet de limiter l'endettement pour les investissements nouveaux mais pas pour la maintenance.
Nous sommes confrontés à des injonctions contradictoires : la SNCF doit investir pour la maintenance, elle doit consentir des investissements nouveaux, et, dans le même temps, tenir une trajectoire financière. L'objet de la règle d'or est de rendre ces objectifs compatibles, la primauté étant donnée à l'investissement en matière de maintenance. Les ratios précédents plus complexes permettaient de piloter divers paramètres ; celui-ci répond précisément aux objectifs définis par la loi.
L'amendement SPE418 est retiré.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure thématique, la commission rejette l'amendement SPE251.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels SPE1469 et SPE1471 des rapporteurs.
Puis elle adopte l'article 51 modifié.
Article 52 : Applicabilité de l'exemption transitoire à l'obligation de déposer une offre publique d'achat du fait de l'attribution de vote double
La commission est saisie de l'amendement SPE1534 des rapporteurs.
L'article 52 permet à l'actionnaire bénéficiant de la dérogation d'augmenter sa détention en droits de vote au-delà de sa détention initiale au 2 avril 2014 sur l'ensemble de la période de la dérogation, soit du 2 avril 2014 au 31 décembre 2018, avec pour seule condition que « le pourcentage de droits de vote détenus au 31 décembre 2018 soit inférieur au pourcentage de droits de vote détenus au 2 avril 2014 ». Il s'agit d'un effet non souhaité de la rédaction proposée. L'objectif est de fixer une condition pour l'ensemble de la période de la dérogation temporaire, pas de permettre à l'actionnaire bénéficiaire d'augmenter sa détention en droits de vote. Celle-ci doit toujours être inférieure ou égale à celle constatée le 2 avril 2014.
La commission adopte l'amendement SPE1534.
Puis elle adopte l'article 52 modifié.
Article 53 : Renforcement du dispositif anti-« excès de vitesse » en matière d'augmentation de détention du capital ou des droits de vote
La commission adopte l'amendement rédactionnel SPE1535 des rapporteurs.
Puis elle adopte l'article 53 modifié.
Article 53 bis (nouveau) : Changement de dénomination de BPI-Groupe
La commission en vient à l'amendement SPE1547 des rapporteurs.
Il s'agit de modifier la dénomination de BPI-Groupe, institué par la loi du 31 décembre 2012 créant la Banque publique d'investissement, et de le désigner sous le nom de « Bpifrance », qu'utilisent aujourd'hui l'ensemble des entreprises et des acteurs concernés.
La commission adopte l'amendement SPE1547.
Article 53 ter (nouveau) : Habilitation des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour contrôler le respect des délais de paiement par les entreprises publiques
La commission est saisie de l'amendement SPE1536 des rapporteurs.
Cet amendement s'inscrit dans l'objectif général de réduction des délais de paiement auquel s'est engagé le Gouvernement. Afin de compléter le dispositif de lutte déjà en vigueur contre les retards de paiement par les entreprises, il est prévu d'habiliter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) à contrôler le respect des délais de paiement par les entreprises publiques. Il leur est également donné la possibilité de prononcer une amende administrative à l'encontre de ces mêmes entreprises.
Avis favorable à cet amendement extrêmement important. La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation avait accru la capacité de la DGCCRF à sanctionner les paiements tardifs des entreprises sans toutefois l'étendre aux entreprises publiques. C'est chose faite avec l'amendement.
En cas de paiement hors délai, les entreprises privées peuvent imposer des pénalités de retard à leurs clients. Or, celles qui ne le font pas sont susceptibles de se le voir reprocher par l'administration fiscale, redressement fiscal à l'appui. Même minime, à raison d'une quarantaine d'euros par facture, cela peut aller loin en cas de règlements tardifs nombreux. Du reste, c'est un problème que le redressement fiscal pèse sur celui qui subit les délais de paiement. Je déposerai un amendement sur le sujet d'ici à la séance publique mais, en tout état de cause, il faut éviter d'adopter une disposition qui poserait le même problème aux entreprises publiques.
À mon sens, l'amendement ne devrait pas avoir cet effet. Il n'en demeure pas moins que vous avez raison d'évoquer cette difficulté. A priori, si vous déposiez un amendement sur le sujet, le Gouvernement y serait favorable.
Les retards de paiement sont un véritable fléau, en particulier pour les petites et les moyennes entreprises (PME) mais aussi pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Ils sont souvent le fait des grands groupes publics ou privés. Tout ce que nous pourrons faire pour y remédier ira dans le bon sens.
Est-il prévu que l'État s'engage sur ses propres délais de paiement ? Certaines administrations, comme l'armée ou l'éducation nationale, ont fréquemment recours à des sous-traitants, qui nous font souvent part d'expériences assez négatives en la matière. Si l'État a affirmé sa volonté de ramener ses délais de paiement dans un premier temps à trente jours, puis à vingt jours, dans les faits, ceux-ci ont plutôt eu tendance à augmenter. Le Gouvernement reste-t-il vigilant ? La question est-elle traitée au niveau interministériel ?
Le médiateur national des relations inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance, que nous auditionnons souvent, nous a confié qu'il était très fréquemment sollicité pour des retards de paiement de la part des collectivités locales et de l'État.
Pour ce qui concerne l'État, un gros travail a été entrepris pour améliorer la situation et une réelle transparence est assurée grâce à l'Observatoire des délais de paiement. Les chiffres et les analyses montrent que les principales difficultés se situent du côté des hôpitaux, des collectivités locales et de l'armée.
Le Trésor public aussi ! Même si les maires le mandatent en temps utile, il met parfois quatre à cinq mois pour régler les entreprises. Or, la loi rend l'ordonnateur responsable d'un acte de paiement qu'il n'effectue pas lui-même.
L'amende sera-t-elle prononcée pour une période couvrant plusieurs marchés ou bien marché par marché ?
La pression est mise sur l'État par la transparence, et chacun, du Trésor public comme de l'ordonnateur, a sa part de responsabilité. Il faut bien avouer que les délais de paiement sont souvent liés aux problèmes budgétaires que rencontrent différents ministères. Il n'en demeure pas moins que certains retards sont abusifs. Je ne vois pas, pour l'instant, de piste possible.
En tout cas, la DGCCRF ne peut pas intervenir sur ce plan. Ce que comble l'amendement, c'est un vide en matière de contrôle et de sanction vis-à-vis des entreprises publiques. Rien ne justifiait que la DGCCRF n'ait pas, à cet égard, la même compétence que pour les entreprises privées. Je suis preneur d'une réflexion collective sur ce problème des délais de paiement excessifs de la sphère publique.
Monsieur Tourret, les sanctions prévues par la loi du 17 mars 2014, dite « loi Hamon », sont prononcées contrat par contrat.
La commission adopte l'amendement SPE1536.
Elle examine l'amendement SPE1019 de M. Jean-Yves Caullet.
Afin de faciliter l'innovation dite « de rupture », souvent portée par les jeunes entrepreneurs, cet amendement propose d'expérimenter un nouveau type de financement fondé sur un co-investissement public-privé entre l'État, ses opérateurs, et des référents-investisseurs privés reconnus au sein de leurs écosystèmes. Les entrepreneurs du numérique sont souvent considérés par les créateurs et fondateurs de start-up innovantes comme des interlocuteurs naturels partageant la connaissance du secteur, des réalités du terrain et des difficultés de financement.
Dans le cadre de l'expérimentation, les entrepreneurs et financeurs référents orienteraient les investissements de l'État qui s'engagerait, dans une limite définie par décret, à investir un euro pour chaque euro qu'eux-mêmes investiraient dans les projets. Un comité de pilotage regroupant les représentants des fonds et institutions publics concernés par écosystème validerait les investissements, sur proposition des référents privés.
La BPI fonctionne déjà en grande partie selon cette logique, comme en témoigne sa participation à certains fonds privés, à la French Tech ou encore à des mécanismes de cofinancement public-privé semblables à ce que propose l'amendement. Observant les règles de l'investisseur avisé, elle est souvent conduite à investir aux côtés d'investisseurs privés sur les nouvelles situations, intervenant parfois dans une dynamique de levier. Ces mécanismes sont également à l'oeuvre dans plusieurs dispositifs des programmes d'investissement d'avenir, ainsi que dans le fonds de cofinancement de nos start-up par les sociétés d'investissement de business angels (SIBA) en cours d'élaboration – comme dans votre amendement, il s'agira d'un mécanisme d'investissement à un euro pour un euro.
L'action de la BPI, de plus en plus tournée vers les mécanismes de cofinancement, donne satisfaction à l'esprit de votre amendement, que je vous suggère de retirer. Le Gouvernement estime qu'il est possible de faire plus pour le financement des industries technologiques, et nous continuerons à être collectivement vigilants en matière de co-investissement public-privé.
J'étais tentée de donner un avis favorable à cet intéressant amendement afin que nous puissions continuer à travailler sur le sujet d'ici à la séance publique.
La France a l'occasion d'effectuer un choix fort en termes de financement de la nouvelle économie : soit nous optons pour des déductions fiscales qui laissent toutes leurs marges de manoeuvre aux investisseurs privés, soit l'argent public est directement investi conjointement aux ressources privées. En privilégiant cette dernière solution, nous assumons notre singularité par rapport à nos partenaires européens comme l'Allemagne ou le Royaume-Uni.
Membre du comité de surveillance des investissements d'avenir, je confirme que de nombreux fonds, souvent gérés par la Caisse des dépôts et consignations, permettent d'abonder les initiatives privées. En revanche, les collectivités locales ne peuvent que très difficilement accompagner ces initiatives en raison de l'extrême complexité des mécanismes à mettre en oeuvre.
Je suis sensible au cofinancement. C'est dans cet esprit que nous avons créé hier les sociétés de libre partenariat (SLP). À mon sens, les objectifs visés par l'amendement doivent être atteints grâce au pilotage de la BPI. Je suis moins à l'aise avec l'inscription dans la loi d'un engagement d'investissement d'un euro pour un euro, qui aurait un coût budgétaire. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à Mme Erhel de bien vouloir retirer son amendement.
La recevabilité au regard de l'article 40 de la Constitution est examinée avec une plus grande tolérance dès lors qu'un amendement propose une expérimentation qui se déroule dans certaines conditions.
L'idée était d'expérimenter un dispositif plus réactif et décentralisé que ceux qui existent déjà, et capable d'intervenir dans tous les écosystèmes régionaux – hors des grandes métropoles, il est souvent difficile de trouver des systèmes d'accompagnement. L'association des créateurs de start-up au comité de pilotage chargé de détecter et de sélectionner les projets me semblait constituer une idée nouvelle. Si le ministre me garantit que cela existe déjà, je suis évidemment prête à retirer l'amendement.
Je peux vous garantir que nous avançons sur cette voie. Peut-être pourrions-nous demander à la mission d'information de votre assemblée sur la BPI de vérifier ce qu'il en est. Si ses conclusions étaient négatives sur ce point, je m'engage à y revenir par la loi.
Les acteurs économiques de terrain sont demandeurs, et le fonctionnement et la réactivité des dispositifs doivent être regardés de près. J'accepte cependant de retirer l'amendement.
Les plateformes de développement économique territorial, qui apportent déjà des réponses de ce type sans pour autant entrer au capital, pourraient également évoluer.
L'amendement SPE1019 est retiré.
Chapitre III
Industrie
Article 54 : Activités internationales de l'Autorité de sûreté nucléaire
La commission est saisie de l'amendement SPE1436 de M. Denis Baupin, qui tend à supprimer l'article.
J'appelle l'attention du Gouvernement et des parlementaires sur le fait qu'en adoptant l'article 54, nous mettrions le doigt dans un engrenage dangereux qui pourrait remettre en cause l'indépendance de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Cet article comporte, en effet, deux dispositions qui permettraient à cette autorité de chercher les financements dont elle a besoin grâce à des « contrats » extérieurs.
Un premier alinéa vise la coopération de l'ASN avec ses homologues étrangers. Les revues entre pairs existent déjà – et nous ne contestons pas leur utilité – mais certains propos invitent à la prudence en la matière. C'est ainsi que le précédent président de l'ASN, M. André-Claude Lacoste, devant la commission des affaires économiques, en juillet 2012, a reconnu qu'il savait – longtemps avant la catastrophe de Fukushima et parce que l'Autorité avait été mandatée pour une revue par les pairs au Japon – que « le modèle japonais de contrôle de sûreté nucléaire ne fonctionnait pas ». Á cette époque, AREVA envoyait pourtant du MOX en provenance de La Hague à Fukushima. M. Lacoste a encore admis : « Nous avons adouci notre propos suite à des discussions compliquées avec les autorités japonaises [...] » Permettez-moi de souligner la gravité de ces paroles : l'Autorité de sûreté nucléaire française a officiellement et publiquement laissé entendre que la sûreté nucléaire japonaise fonctionnait, alors qu'elle savait manifestement que ce n'était pas le cas.
Sachant ce qui s'est produit quelques mois après ce contrôle, nous voyons bien les limites de l'exercice des revues entre pairs, lorsque ces derniers veulent éviter de porter un jugement trop négatif sur leurs homologues. Si, en plus de cela, nous introduisions dans le code de l'environnement une disposition permettant à l'ASN d'être financée pour des prestations de conseil et des missions d'appui technique, le risque que son indépendance en pâtisse serait réel.
Le second alinéa pose encore plus problème. Il dispose que l'ASN « examine la conformité des options de sûreté des modèles d'installations nucléaires destinées à l'exportation aux exigences s'appliquant en France pour le même type d'installation. Les frais correspondants sont à la charge de l'entreprise intéressée. » Il me semble légitime que l'autorité de sûreté française, qui est l'une des meilleures au monde, s'intéresse aux exportations de centrales nucléaires françaises. À mon sens, elle devrait même se préoccuper de la sécurité des installations, sachant que nous envisageons de vendre des centrales en Jordanie, en Turquie ou en Inde, pays où la stabilité politique n'est pas toujours parfaite et où les risques de violence existent – je ne parle même pas de la situation actuelle en Ukraine.
Je souligne tout d'abord que l'ASN n'est pas un bureau d'études – l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) aurait parfaitement pu tenir ce rôle. C'est une autorité qui a pour vocation de prendre des décisions. Or, rien dans la rédaction de l'article 54 ne précise ce qu'il sera fait de ses avis, ni s'ils seront suivis, et l'on ne lui donne pas les moyens de s'opposer à l'exportation d'une centrale nucléaire. Je relève ensuite que l'autorité sera rémunérée par l'entreprise concernée : autrement dit l'ASN, qui doit être totalement indépendante des entreprises qu'elle contrôle, comme EDF ou AREVA, deviendra en quelque sorte la cliente de ces dernières. Je ne prétends pas que ces dispositions aient été rédigées dans cet esprit ; il n'en demeure pas moins qu'elles affaiblissent l'autorité et l'indépendance de l'ASN.
Nous demandons en conséquence la suppression de cet article.
L'ASN a incontestablement gagné en éthique et en indépendance sous la présidence de M. André-Claude Lacoste, qui n'hésite pas à s'exprimer, comme vous l'avez constaté.
Je suis sensible aux problèmes soulevés par M. Baupin. Avant d'entrer dans le détail de l'article 54, rappelons la situation actuelle.
Aujourd'hui, l'industrie nucléaire, qui fait travailler plusieurs milliers de Français, est soumise à une compétition féroce de la part d'autres opérateurs internationaux pour la vente de centrales à l'export. Des interrogations légitimes se sont fait jour, notamment dans le cadre du Comité de politique nucléaire, à propos des standards de sûreté de certaines d'entre elles. La volonté du Gouvernement est de garantir que le niveau de sûreté de ces centrales est identique à celui de celles que nous construisons en France. Dans la bataille économique, la sûreté est aussi un élément de compétitivité, beaucoup de pays étant devenus très sensibles à ce critère.
Ce que nous proposons dans cet article, c'est d'organiser le cadre dans lequel l'ASN pourrait opérer à l'export et d'améliorer l'existant. Nous pouvons nous accorder sur le fait que, si l'ASN certifiait ces projets, ce serait un mieux par rapport à la situation actuelle où il est difficile de contrôler la bonne application des règles. Rappelons que, lors de la vente aux Turcs du projet ATMEA, l'ASN a émis un avis qui a été rémunéré par AREVA.
S'agissant de l'indépendance des membres de l'Autorité, il me semble qu'elle est garantie par le niveau de leurs rémunérations – dans le cadre des plafonds d'emplois fixés sous votre contrôle collectif – et par les critères qui président à leur nomination. Aucun ne peut être soupçonné d'avoir un intérêt personnel à rechercher tel ou tel contrat.
Vous avez plus particulièrement pointé deux sujets d'inquiétude.
Le premier est la possibilité offerte à l'ASN d'être défrayée par une autre autorité de sûreté. Je préfère que cette disposition soit conservée dans le texte, car cela nous placerait sinon dans une situation difficile. Le président Brottes a souligné l'autorité morale de M. André-Claude Lacoste et je ne peux imaginer que l'ASN serait susceptible de rendre des rapports différents si elle était défrayée. Un aménagement, d'ailleurs proposé par un amendement du rapporteur général, pourrait toutefois consister à donner la possibilité à l'ASN de refuser la sollicitation d'une autre autorité. Cela répondrait à une partie des préoccupations, de M. Baupin, me semble-t-il.
Le second sujet est la possibilité offerte à l'ASN d'être défrayée par l'entreprise intéressée à la vente d'une centrale française, au titre de l'examen de sûreté auquel elle aurait procédé. Si la dernière phrase du troisième alinéa vous gêne, je ne verrais pas d'obstacle à ce que vous déposiez un amendement tendant à la supprimer. L'ASN verra à l'expérience quelle est l'ampleur des frais occasionnés : il reviendra ensuite au Parlement, qui fixe le budget de l'Autorité, de l'autoriser à être défrayée ou bien d'augmenter les plafonds d'emplois, le cas échéant.
Je vous invite donc à retirer votre amendement.
Je partage une partie des interrogations de notre collègue Denis Baupin. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons proposé, dans l'amendement SPE991 rectifié, une modification significative de la rédaction de l'article 54.
Nous sommes, nous aussi, attachés à l'indépendance de l'ASN. Nous savons l'autorité de cette institution au plan international : ses standards de sécurité sont parmi les plus élevés au monde. J'ai été frappée, moi aussi, lors de l'audition de M. Lacoste devant la commission des affaires économiques, par ses propos sur ses visites successives au Japon. Toutefois, celles-ci ne peuvent s'apparenter aux prestations visées par le deuxième alinéa de l'article. En 2007, il s'est rendu dans ce pays dans le cadre d'une mission internationale ; en 2011, il a été consulté par l'autorité japonaise. Ses avis n'ont pas la même valeur juridique en dehors de la France.
Nous avons également été gênés par la dernière phrase du troisième alinéa. Il est hors de question, pour nous, de mettre l'ASN dans les bagages de voyageurs de commerce, quels qu'ils soient et malgré tout l'intérêt que nous portons au développement de l'industrie nucléaire française à l'étranger. Nous ne pouvons accepter qu'il soit porté atteinte à l'indépendance de l'Autorité en l'associant, d'une manière ou d'une autre, à une démarche commerciale.
Notre amendement SPE991 rectifié apporte donc plusieurs modifications au troisième alinéa. Il supprime la mention de la saisine de l'autorité administrative, dans la mesure où celle-ci est déjà prévue par l'article L. 592-29 du code de l'environnement. Il procède à quelques substitutions de termes afin de marquer le fait que l'ASN n'est pas tenue d'examiner la conformité des options de sûreté mais « peut » le faire – ce qui lui laisse une marge de manoeuvre. Enfin, il supprime la dernière phrase.
Nous avons cherché à respecter l'indépendance et l'autorité de l'ASN en la préservant d'une démarche commerciale à laquelle elle doit rester étrangère. Cela n'empêche pas que nous ne pourrions qu'être choqués que nos industriels vendent à l'étranger des réacteurs qui n'auraient pas le même niveau de sûreté que ceux qui sont installés en France. Celle-ci doit être la même partout et nous sommes très fermes sur ce point.
Pour ce qui est du mécanisme de financement, il me paraît utile de citer l'exemple d'un dispositif qui fixe les modalités des relations entre bureaux d'études et opérateurs de télécommunications. Pendant longtemps, il y a eu des polémiques sur le fait que les opérateurs obtenaient des bureaux d'études qu'ils sollicitaient des résultats à leur convenance. Pour mettre fin à toute relation directe entre celui qui est intéressé aux résultats de la mesure et celui qui réalise la mesure, un fonds de financement tampon, alimenté par les contributions des opérateurs, a été mis en place. Une solution analogue pourrait être envisagée dans le cas qui nous occupe, même si nous ne pouvons y travailler maintenant.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'ouverture dont vous avez fait preuve à propos des frais. Je voudrais aussi dissiper tout malentendu : ma prise de position ne doit pas laisser penser que je tiens les membres du collège de l'ASN pour corruptibles. Simplement, ils sont soumis à de multiples pressions de la part d'EDF et d'AREVA, du fait du nombre considérable d'emplois en jeu.
Je reste préoccupé par le fait que l'ASN serait amenée à donner un label à l'export pour soutenir la compétitivité des réacteurs français. Certes, si des centrales nucléaires doivent être construites à l'étranger, je préfère qu'elles soient les plus sûres possibles, mais je me demande s'il est bien dans le rôle de l'Autorité de délivrer un label dans une compétition commerciale : cela me paraît problématique. L'Autorité doit être absolument au-dessus de tout soupçon, elle ne doit recevoir aucune pression pour accorder un label, même dans le cas de marchés très difficiles à obtenir – ou alors, il faudrait prévoir qu'elle peut opposer un veto. De plus, l'installation nucléaire en elle-même n'est qu'un élément à prendre en compte pour évaluer la sûreté ; le modèle national d'organisation de sûreté nucléaire est au moins aussi important et on sait à quelles conséquences a mené le manque d'indépendance de l'autorité de sûreté nucléaire japonaise par rapport à TEPCO.
Cela dit, je vais retirer mon amendement, car il avait surtout pour but de susciter le débat que nous avons eu, quitte à déposer d'autres amendements en séance. Il ne faut pas mettre l'Autorité de sûreté nucléaire au service de la compétitivité de notre industrie nucléaire : ce n'est pas son rôle.
L'amendement SPE1436 est retiré.
Je voudrais redire à Denis Baupin que les amendements que nous avons déposés sont nés de préoccupations très proches des siennes.
Notre amendement SPE991 rectifié donne à l'ASN une marge d'appréciation : elle peut ou non examiner les réacteurs. Par ailleurs, ce sur quoi elle se prononce, si elle choisit de le faire, c'est la conformité avec les « obligations applicables en France ». Si les conditions d'implantation locales ne sont pas équivalentes, elle ne se prononcera pas. Ainsi ne s'est-elle jamais prononcée sur quelque installation que ce soit au Japon, dans la mesure où les conditions d'installation ne sont pas comparables à la France.
Je n'ai jamais prétendu que l'ASN s'était prononcée sur des réacteurs japonais. C'est M. André-Claude Lacoste, et non pas l'ASN en tant que telle, qui s'est exprimé sur le système d'organisation de la sûreté nucléaire au Japon.
Par ailleurs, je n'ai pas la même lecture que vous de l'article 54, madame la rapporteure. Je ne vois nulle part qu'elle n'aurait à examiner que des réacteurs déjà installés en France. Il me semble que peuvent être visés des réacteurs n'ayant pas été construits en France.
La commission adopte successivement les amendements SPE76, SPE822 et SPE991 rectifié des rapporteurs.
Puis elle adopte l'article 54 ainsi modifié.
Après l'article 54
La commission est saisie de l'amendement SPE1678 de M. François Brottes.
Je défendrai également mes amendements SPE1956 et SPE1957.
Les industriels électro-intensifs sont confrontés à de grandes difficultés, qui entament leur compétitivité internationale. Elles ne sont pas seulement dues à l'essor du gaz de schiste aux États-Unis et au Canada, dont on sait les conséquences pour l'industrie chimique, mais aussi à la concurrence de nos voisins européens. Des pays comme l'Espagne, l'Italie ou l'Allemagne apportent, en effet, des aides significatives à leurs industries électro-intensives. En France, si l'énergie nucléaire contribue à assurer des tarifs de l'électricité relativement bas aux ménages, il n'en va pas de même pour les industriels.
Depuis longtemps, la commission des affaires économiques s'intéresse à ces industriels, que notre collègue Clotilde Valter étudie aussi dans le cadre de la commission d'enquête sur les tarifs de l'électricité. Les électro-intensifs bénéficient de tarifs bas grâce à des contrats conclus antérieurement à l'ouverture du marché à la concurrence. Or, ceux-ci vont arriver à échéance dans les mois qui viennent. Il y a donc urgence à régler ce problème, car si leur facture d'électricité double, ils seront tentés de se délocaliser. Ces industriels ne sont pas seulement confrontés à la concurrence internationale à l'export, ils subissent aussi la concurrence de produits importés, fabriqués avec une énergie beaucoup moins chère.
Les pays voisins ont recours à plusieurs leviers, plus ou moins opaques, mais la transparence commence peu à peu à se faire. Nous avons récemment pu rencontrer des industriels allemands au Bundestag, dans le cadre d'une réunion commune des deux commissions des affaires économiques consacrée à l'énergie. Nous avons appris qu'ils ne sont pas obligés de contribuer aux énergies renouvelables et qu'ils n'ont pratiquement pas à acquitter de frais de transport. Par ailleurs, une rémunération forfaitaire annuelle leur est versée en échange de leur faculté à interrompre instantanément leur consommation d'électricité. En Europe, la rémunération par mégawatt de cette interruptibilité s'élève à 10 000 euros en France, 105 000 euros en Italie, 30 000 euros en Allemagne – auxquels s'ajoute l'exonération des coûts de transport – et 294 875 euros en Espagne.
Les pressions très fortes qui s'exercent, à l'exportation comme à l'importation, sur nos industriels électro-intensifs nous obligent à prendre des dispositions partout où cela est possible pour leur permettre de rester en France. Peut-on se réjouir que la consommation d'énergie diminue car certaines de nos industries ferment ? Certainement pas, car cette décroissance est d'abord une décroissance d'emplois. Certains craignent que les aides aux électro-intensifs viennent peser sur les ménages : ce n'est pas impossible ; simplement, si ces industries sont délocalisées à l'étranger, les conséquences pèseront plus encore sur les ménages. Il y a un peu le feu à la maison, il faut bien le dire.
Le projet de loi relatif à la transition énergétique s'est attachée à réduire la facture du transport : le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) va être réduit d'environ 60 % pour les électro-intensifs – rappelons que cette réduction atteint 90 % en Allemagne. Pour ma part, je présente l'amendement SPE1956, qui tend à déverrouiller le dispositif de rémunération pour contribution potentielle à l'interruptibilité, en laissant le soin au Gouvernement d'en fixer les modalités par décret.
Pour ce qui est de l'amendement SPE1678, il tend à élargir le nombre de sites industriels bénéficiaires des dispositifs à destination des électro-intensifs en allant vers une sorte d'Exeltium II. Je suis prêt, monsieur le ministre, à examiner avec vous quelques aménagements. Mais je crains que si nous ne prenons pas en compte le cas des industriels grands consommateurs d'électricité sans être hyper électro-intensifs dans ce projet de loi, nous ne disposions plus d'occasion de le traiter dans un autre cadre législatif d'ici à l'année prochaine, lorsque les contrats que j'évoquais arriveront à échéance.
Toutes sortes de dispositifs ont été imaginés par le passé – certains se souviennent sans doute du tarif réglementé et transitoire d'ajustement au marché (TARTAM) – mais « ajouter du sparadrap à du sparadrap » ne nous fera pas rattraper nos voisins européens dans la course.
Bernadette Laclais a déposé un amendement portant sur ces mêmes questions, et c'est bien volontiers que je retirerai l'un des miens en sa faveur, lui demandant par avance de rectifier le sien de façon à le rattacher au code de l'énergie et de supprimer une disposition qui figure déjà dans le projet de loi relatif à la transition énergétique.
La situation des électro-intensifs constitue effectivement un sujet de préoccupation, mais toutes les dispositions que nous sommes susceptibles de prendre en leur faveur doivent s'inscrire, d'une part, dans le cadre communautaire – c'est toute la difficulté de notre position – et, d'autre part, en cohérence avec le projet de loi relatif à la transition énergétique. Comprenant que vous m'invitez à me prononcer davantage sur l'amendement SPE1489, qui concentre l'esprit de vos trois amendements, je suis prêt à émettre un avis favorable à l'amendement de Mme Laclais rectifié selon vos souhaits – quitte à l'améliorer en séance, car c'est là un sujet très encadré.
Une double concurrence s'exerce : à l'échelle internationale, du fait des bas prix du gaz de schiste qui induisent une concurrence déloyale pour les électro-intensifs qui ne peuvent en bénéficier ; à l'échelle européenne, du fait de l'asymétrie entre la France et l'Allemagne. Toutefois, des mouvements se sont produits, côté allemand, à la suite d'échanges avec la Commission européenne et une renégociation est en cours.
Il faut prêter attention à plusieurs critères : le caractère temporaire du mécanisme, qui ne doit durer que jusqu'au renouvellement des concessions hydroélectriques ; le caractère obligatoire de la cession d'hydroélectricité par les concessionnaires ; les conditions de cession de l'hydroélectricité ; les concessions hydrauliques visées – ne peuvent être concernées que les centrales au fil de l'eau ; la précision à apporter que la cession forcée doit se faire dans un cadre contractuel entre le concessionnaire et les électro-intensifs. Nous sommes en train de discuter de ces critères avec la Commission européenne. M'engageant à accélérer ces discussions, je souhaiterais, d'ici à l'examen du texte en séance, avoir le plein soutien de la commission sur le dispositif avant de le confirmer.
Je serai donc favorable à l'amendement rectifié de Mme Laclais.
Puisque je retire le seul amendement SPE1957 à son profit, quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement SPE1678 ?
Je vous invite à le retirer. Certes, c'est une bonne idée d'inclure certains secteurs stratégiques, comme les cimenteries, parmi les bénéficiaires du dispositif destiné aux électro-intensifs. Mais cela me gênerait qu'à ce stade de nos échanges avec Bruxelles, de telles dispositions figurent dans la loi.
Je m'engage, à la lumière des échanges que nous allons avoir dans la semaine qui vient avec la commission européenne, à intégrer les préoccupations que vous exprimez dans cet amendement. Il me semble que vous avez des garanties suffisantes avec l'amendement de Mme Laclais, que le Gouvernement est prêt à accepter.
L'amendement SPE1678 ne vise pas seulement les hyper électro-intensifs au coeur de l'amendement de Bernadette Laclais, mais aussi les gros consommateurs industriels : ces deux amendements sont donc complémentaires.
J'ai bien compris que le ministre m'engageait à retirer mon amendement pour ne pas braquer la Commission européenne. Je note toutefois que la discussion avec la Commission ne se déroule pas exactement dans les mêmes termes avec nos voisins, sur ces questions-là, et que les industriels français vivent cette dissymétrie comme une vraie injustice. Les Allemands ont triché pendant des années, il faut le dire, en exonérant leurs industriels du prix du TURPE : ils faisaient 100 % de cadeaux ; désormais, ils ne devront plus en faire que 90 % – voilà ce qui s'appelle une négociation bien menée ! Nous voulons toujours nous montrer extrêmement vertueux et, en fin de compte, nous sommes les dindons de la farce. Je le dis avec un peu de véhémence.
Je retire l'amendement SPE1678 pour ne pas perturber les discussions avec Bruxelles, mais croyez bien que j'y reviendrai lors de l'examen du texte en séance.
L'amendement SPE1678 est retiré.
Sauf erreur de ma part, cet amendement dit « Exeltium », qui vient d'être retiré, avait été rejeté par la commission des finances et en séance publique, lors de l'examen du dernier projet de loi de finances. Je crains que le débat n'ait déjà eu lieu.
Connaissant bien ces questions et depuis longtemps, je puis vous assurer qu'il ne s'agit absolument pas du même amendement. L'amendement SPE1678 n'a jamais été déposé !
Toujours est-il que, sur la modification de la fiscalité « Exeltium », nous avons déjà eu une forme de débat, et je trouverais dommage que cet amendement ne soit pas discuté dans le cadre d'une loi de finances, comme cela s'impose.
Le dispositif proposé n'a rien à voir avec la fiscalité : les impôts ne sont pas concernés et, si vous connaissiez le sujet, vous le sauriez. Le TURPE ne relève pas de la loi de finances, tout comme la CSPE. Les amendements « Exeltium » défendus par notre collègue Yves Blein étaient d'une autre nature.
Au risque de surprendre certains, nous sommes favorables aux dispositifs d'aide aux électro-intensifs. J'avais d'ailleurs formulé des propositions en ce sens dans le rapport que j'avais cosigné avec un représentant du MEDEF à l'occasion du débat national sur la transition énergétique. Nous partons du principe que si ces entreprises se délocalisent, elles consommeront à l'étranger toujours autant d'énergie, avec le même impact négatif dans le bilan global, alors que des emplois seront détruits en France.
Si l'un des amendements proposés par le président était adopté, je déposerais en séance un amendement complémentaire pour préciser que ces mesures d'aide ne doivent pas exonérer les entreprises concernées de faire des efforts en matière d'efficacité énergétique, considérant que leur facture énergétique n'est que la multiplication du tarif qui leur est appliqué par le volume de leur consommation. Il importe qu'en contrepartie des aides spécifiques qu'elles reçoivent, elles rendent un rapport annuel sur les efforts qu'elles ont fournis afin de les inciter à participer à l'objectif national de réduction de la consommation.
Ce serait une excellente idée... pourvu néanmoins que vous distinguiez bien, parmi les électro-intensifs, ceux qui consomment de l'électricité pour faire fonctionner leur entreprise et ceux pour qui l'électricité est une matière première : dans ce dernier cas, vous ne pouvez pas exiger d'eux des économies, car celles-ci viendraient diminuer leur volume de production.
Monsieur le président, comme vous, j'insiste sur la nécessité de traiter cette question maintenant : les contrats arrivent à échéance et les écarts de prix sont très importants. Nous risquons, si nous n'agissons pas, de mettre nos entreprises en grande difficulté. Notre industrie chimique, en particulier, pâtit des écarts concurrentiels avec les complexes chimiques et pétrochimiques en Inde et aux États-Unis, qui vont d'un à quatre pour le coût de l'énergie. Or, pour certaines entreprises de ce secteur, l'énergie représente 30 % des coûts de fabrication.
Je suis également favorable à l'amendement de Bernadette Laclais.
J'entends aussi vos arguments, monsieur le ministre, sur l'interruptibilité, autre sujet tout aussi important. L'extension du dispositif devrait aussi contribuer à la réduction des écarts avec les concurrents étrangers de nos entreprises.
J'aimerais apporter quelques précisions pour la clarté de nos débats. Deux amendements au projet de loi de finances relatifs à ces sujets ont été déposés : le premier, signé par Michel Vergnier, concernait les petites unités ; le second, au sujet duquel le Conseil constitutionnel n'a rien trouvé à redire, portait sur le consortium Exeltium. Il visait à l'exonérer du plafonnement de la déductibilité des intérêts de l'emprunt, qui a mis à mal son modèle économique principalement fondé sur l'endettement. Élargir ce dispositif à d'autres industriels, comme le propose l'amendement SPE1678, aurait donc un impact fiscal.
Pendant des années, nous nous sommes battus, droite et gauche confondues, pour créer ce consortium dans le double objectif de permettre aux industriels électro-intensifs de procéder à des achats collectifs d'énergie et de conclure des contrats à long terme – toutes possibilités que refusait la Commission européenne, au prétexte qu'elles empêchaient le marché de se mouvoir. Au bout de trois ans de combat, nous sommes parvenus à obtenir l'accord de Bruxelles. Certains industriels électro-intensifs sont entrés dans le consortium : leurs investissements leur ont ouvert le droit à un prix de l'énergie moindre, qui n'est d'ailleurs plus très attractif, compte tenu de la situation actuelle du marché de l'électricité. D'où les questions fiscales qui se posent, mais qui ne concernent pas l'amendement que j'ai déposé.
Monsieur le président, je tiens à exprimer les regrets du groupe UMP devant le retrait de votre amendement, que nous aurions volontiers soutenu.
Ceux qui me connaissent un peu savent que je le déposerai à nouveau. Je sais que j'ai le soutien de la rapporteure thématique et j'ai cru comprendre que le ministre n'était pas totalement indifférent à cette préoccupation.
Article 54 bis (nouveau) : Soutien aux biocarburants produits à partir de matières premières d'origine animale
La commission en vient à l'amendement SPE288 rectifié de M. Christophe Caresche.
Cet amendement porte sur un tout autre sujet : les biocarburants.
Rappelons que les biocarburants sont fabriqués à partir de deux types d'huile : l'une d'origine végétale, l'autre d'origine animale. Pour des raisons sur lesquelles je ne vais pas m'étendre, la filière végétale connaît la prospérité et va même jusqu'à importer des huiles, tandis que la filière animale s'est peu développée, faute d'opérateurs. Depuis quelques années, certaines entreprises se sont lancées dans la production de biocarburants d'origine animale, fortes de l'engagement des pouvoirs publics d'augmenter le plafond d'incorporation des huiles animales dans le diesel ou le gazole. Malheureusement, l'adoption d'un amendement en loi de finances est venue bloquer cette possibilité, si bien que ces entreprises sont aujourd'hui mises en difficulté. Le développement d'une filière animale, qui repose sur le traitement des carcasses, permettrait de donner de nouveaux débouchés aux abattoirs dont on connaît les problèmes. Je sais que le Premier ministre a été sensibilisé à cette question lorsqu'il a visité l'abattoir Gad, dont les acheteurs comptent développer les débouchés liés aux biocarburants.
Cet amendement, qui devrait intéresser les députés bretons – mais aussi normands, car Le Havre compte une usine de production –, vise à faire sortir du domaine de la loi la fixation des contingents d'huiles animales et d'huiles végétales entrant dans la composition des biocarburants, pour la faire entrer dans le domaine réglementaire, en la renvoyant à un arrêté du Gouvernement. Nous espérons qu'un relèvement du contingent viendra soutenir l'activité des entreprises, peu nombreuses, de ce secteur.
Cet amendement pose deux problèmes : d'une part, il n'est pas accompagné d'une évaluation de l'impact sur l'ensemble de la filière, notamment des effets de substitution pouvant affecter le biodiesel ; d'autre part, il a été déjà déposé dans le cadre de la loi de finances et rejeté. Il a un coût fiscal indéniable et je n'ai pas l'autorisation, compte tenu de la petite enveloppe dont je dispose, d'accepter ces dépenses supplémentaires.
Cela dit, le problème que vous soulevez mérite d'être débattu. S'agissant des biocarburants d'origine végétale, qu'en est-il de l'effet de substitution entre usage alimentaire et non-alimentaire ? Faut-il élargir les avantages fiscaux aux biocarburants d'origine animale et renforcer les filières en amont ?
Je souscris à tous les arguments que vous avez avancés et vous propose que nous travaillions ensemble à une étude d'impact, mais il me semble un peu trop tôt pour donner un avis favorable à votre amendement, même d'ici à la séance.
Cet amendement diffère de celui que j'avais déposé au projet de loi de finances, qui visait à modifier les répartitions, alors que celui-ci tend à renvoyer à un arrêté gouvernemental la fixation des contingents d'huiles végétales et animales incorporées dans le biocarburant. En conséquence, il n'a pas de répercussion fiscale, puisqu'il ne concerne pas la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Je maintiens donc mon amendement.
Je ne suis pas spécialiste de cette question, que j'ai découverte grâce à notre collègue Christophe Caresche. Il me semble que ses arguments, tout comme ceux du ministre, sont de bon sens. Je suis favorable à ce que nous continuions à travailler sur ce sujet.
J'apporte un soutien franc et massif à l'amendement de Christophe Caresche. J'ai étudié la question des biocarburants dans le cadre du transport maritime et fluvial. Sachant que la problématique de la substitution des terres est de plus en plus prégnante pour la filière, cela vaudrait le coup de s'intéresser à cette catégorie différente de carburant alternatif. Si l'on ajoute que des normes environnementales de plus en plus strictes pèsent sur l'utilisation du fioul par les navires marchands maritimes et fluviaux et que l'alimentation des bateaux en biocarburants se développe de plus en plus, cela fait encore des raisons supplémentaires d'encourager les potentialités de la filière française.
Nous soutiendrons également fortement cet amendement.
En 2010, alors qu'aucune filière industrielle n'était en mesure de retraiter les huiles animales, le Gouvernement et le Parlement avaient fortement incité les industriels à construire des usines dédiées à ce type de production. L'usine du Havre a été installée, pour un coût de 41 millions d'euros au financement duquel ont participé les industries agro-alimentaires bretonnes. Or, en 2014, alors qu'elle fonctionnait parfaitement bien, la proportion d'incorporation des huiles animales dans les biocarburants a été révisée à la baisse. Cette décision a paru à ses responsables d'autant plus incompréhensible que les huiles animales sont brûlées si elles ne sont pas traitées. Qui plus est, la réutilisation des carcasses participe d'une économie circulaire qui n'offre que des avantages.
Dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de juin dernier, nos collègues Marc Le Fur et Édouard Philippe, maire du Havre, et moi-même avions déposé un amendement portant sur les biocarburants d'origine animale. Le secrétaire d'État au budget nous avait répondu qu'il ne pouvait l'accepter en l'état, qu'il nécessitait d'être étudié. La même réponse nous a été opposée lorsque nous l'avons redéposé dans le cadre du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, puis du projet de loi de finances pour 2015. Même celui que la rapporteure générale de la commission des finances a déposé a connu le même sort ! C'est d'autant plus incompréhensible que nous ne saisissons pas l'impact fiscal dont vous faites état.
Les délais nécessaires pour saisir l'impact d'une telle mesure sont vraiment très longs, semble-t-il.
L'utilisation des carcasses pourrait être étendue à la filière de la pêche, à laquelle la Commission européenne va imposer une directive « zéro rejet ». Un projet a vu le jour en Normandie pour fabriquer des huiles Oméga-3 à partir de déchets de poisson, mais ceux-ci pourraient aussi être intégrés à la fabrication de biocarburants.
Je confirme que les biocarburants font régulièrement l'objet de débats en loi de finances. À l'automne dernier, sous l'impulsion de notre collègue François André, des amendements relatifs à ces sujets ont été discutés et certains ont été adoptés.
Christophe Caresche a raison de souligner que son amendement diffère de celui qu'il avait déposé dans le cadre du projet de loi de finances. L'enjeu ne me semble pas essentiellement de nature fiscale, mais renvoie plutôt à la protection de certaines filières. Pour ma part, je ne vois pas pourquoi la filière des huiles animales, dont les difficultés sont visibles, ne pourrait pas connaître la même prospérité que celle des huiles végétales. Chacun sait bien qui passe des appels pour empêcher que cet amendement soit adopté : des groupes de pression sont indéniablement à l'oeuvre.
Monsieur le ministre, cet amendement me semble aller dans le bon sens. J'ai bien conscience que votre enveloppe est petite ; les finances publiques ont beau aller mal, cet argument ne me semble pas résister à la réalité du coût qu'impliquerait cette mesure : 3 millions d'euros – j'en ai fait la vérification avec la rapporteure générale de la commission des finances.
Pour une fois qu'un Parisien dépose un amendement favorable à la Bretagne, dont la pertinence est à ce point reconnue, je ne peux qu'y être favorable ! Il va satisfaire le girondinisme viscéral des Bretons.
La commission adopte l'amendement SPE288 rectifié.
Après l'article 54
Elle en vient à l'amendement SPE198 de Mme Le Dain.
Cet amendement propose un nouveau calendrier de déploiement pour le projet de centre industriel de stockage géologique profond (Cigeo), en repoussant la date de dépôt de sa demande d'autorisation de 2015 à 2017, afin de tenir compte du débat public qui s'est tenu l'année dernière. Il s'agit de donner les moyens de mettre en oeuvre la réversibilité dans une phase expérimentale opérationnelle pour ce projet porteur de perspectives économiques.
La loi de 2006 sur les déchets nucléaires a défini le stockage géologique profond comme la solution de gestion des déchets radioactifs de moyenne et haute activité à vie longue. Le débat public de 2013 a permis de préciser et d'améliorer les définitions et les procédures de consultation du public. Il propose d'introduire une phase pilote et de définir la notion de réversibilité.
Cet amendement transcrit les conclusions du débat public et je n'ai donc aucun désaccord de fond. Ce sujet, d'une sensibilité politique toute particulière, nécessite néanmoins de mûrir encore à travers de nouveaux échanges. La loi nous laisse la possibilité de prendre les mesures requises. L'argument de la nécessité de débloquer des situations critiques, qui a pu être invoqué à plusieurs reprises pour justifier le dépôt d'amendements dans le cadre du présent texte, ne peut être repris pour ce qui concerne Cigeo, qui peut attendre la fin de l'année 2016. Sans vous dire que je ne partage pas vos arguments de fond, parce que je mentirais alors, je pense qu'il est préférable de remettre la rédaction de cet article à une phase ultérieure.
L'amendement SPE198 est retiré.
Article 54 ter (nouveau) : Soutien au mécanisme d'interruptibilité en matière d'approvisionnement électrique
La commission est saisie de l'amendement SPE1956 de M. François Brottes.
Cet amendement, je le rappelle, vise à déverrouiller le dispositif de rémunération des apports pour contribution potentielle à l'interruptibilité, en laissant le soin au Gouvernement d'en fixer les modalités par décret.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure thématique, la commission adopte l'amendement SPE1956.
Article 54 quater (nouveau) : Conditions d'accès à l'électricité des sites industriels électro-intensifs fortement exposés à la concurrence mondiale
La commission examine l'amendement SPE1489 de Mme Bernadette Laclais.
Tout d'abord, il me paraît important de souligner la chance que nous avons d'avoir un président de commission qui connaît extrêmement bien ces dossiers, qui en a fait avancer certains et qui est en mesure de rappeler l'historique des décisions dont ils ont fait l'objet au sein de notre assemblée.
Si nous avons choisi ce véhicule législatif plutôt qu'un autre, c'est non seulement parce qu'il y a urgence, mais aussi parce que la mesure que nous proposons se rattache bien à l'objectif de croissance et d'emploi affiché par le projet de loi – il s'agit de soutenir la compétitivité de nos entreprises et de créer de la croissance.
Je suis prête à rectifier mon amendement, dans la mesure où certains éléments sont redondants avec les dispositions, en cours de discussion, du projet de loi relatif à la transition énergétique. Je serais heureuse que, posant un cadre général et renvoyant à des dispositions réglementaires, il suscite l'unanimité, ce qui donnerait de la force au Gouvernement dans les discussions européennes et permettrait d'adresser un signe extrêmement positif aux industriels concernés.
Précisons la rectification apportée à votre amendement :
– le premier alinéa est ainsi rédigé : « Après le chapitre III du titre II du livre V du code de l'énergie, il est inséré un chapitre IV ainsi rédigé : » ;
– au deuxième alinéa, la référence : « L. 334-4 » est remplacée par la référence : « L. 524-1 » ;
– le troisième alinéa est supprimé.
Favorable à l'amendement rectifié.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure thématique, l'amendement SPE1489 ainsi rectifié est adopté à l'unanimité.
L'amendement SPE1957 de M. François Brottes est retiré.
Chapitre IV
Simplifier
Section 1
Alléger les obligations des entreprises
Avant l'article 55
La commission examine l'amendement SPE479 de M. Jean-Charles Taugourdeau.
Personne ne conteste aujourd'hui que les normes et les contraintes réglementaires sont un frein au développement économique de notre pays. La simplification des normes est un enjeu économique capital pour le maintien des outils de production et de l'emploi sur notre territoire.
Dans un élan louable de simplification, le comité interministériel pour la modernisation de l'action publique du 18 décembre 2012 a arrêté des mesures pour simplifier les normes en vigueur et endiguer la création de nouvelles normes. Parallèlement, à l'échelle européenne, le 23 novembre dernier, la commission a adopté un rapport soulignant l'importance d'alléger les contraintes réglementaires pour les entreprises. Dans cet esprit, elle préconise de libérer les microentreprises des réglementations contraignantes pour leur permettre de poursuivre leurs objectifs d'affaires. La stratégie de croissance de l'Union européenne Europe 2020 souligne également l'importance d'améliorer l'environnement des affaires grâce à une réglementation intelligente.
Il y a urgence pour le législateur à accompagner toutes les forces vives de notre pays créatrices de richesses. Les délais accordés par l'administration pour se conformer aux multiples règles prescrites par les soixante-huit codes en vigueur et les actes réglementaires sont souvent trop courts pour permettre aux entreprises de s'organiser et de trouver les financements nécessaires. Puisque le texte se revendique du fameux choc de simplification, il apparaît essentiel et nécessaire d'agir dès maintenant en faveur des entreprises en leur permettant d'éviter l'application brutale de normes et de contraintes réglementaires qui seraient manifestement défavorables à leur production et à leur compétitivité, ainsi qu'au maintien de l'emploi et de l'activité économique. Il s'agit ici non pas de supprimer les normes, mais d'exiger du bon sens et de l'intelligence dans leur application.
L'amendement met en lumière un problème pour les entreprises que je ne nie pas. Il soulève néanmoins plusieurs difficultés.
D'abord, il ouvre la possibilité à une entreprise qui aurait engagé un dialogue avec les pouvoirs publics de déroger aux normes, ce qui est contestable sur le plan juridique. Ensuite, votre préoccupation devrait être en partie satisfaite par l'amélioration du fonctionnement des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). L'administration doit jouer davantage qu'elle ne le fait un rôle de conseil. C'est le sens du regroupement des services du ministère du travail et de Bercy dans ces entités régionales. La réforme de l'inspection du travail répond également au souhait de faire évoluer la culture de l'administration. Enfin, une importante négociation sociale est en cours pour rénover en profondeur le cadre du dialogue social dans l'entreprise. Il serait malvenu à l'égard des partenaires sociaux d'aller dans la direction que vous proposez.
J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
Je suis sensible aux explications du ministre. En écho à ses propos sur les DIRECCTE, je connais aussi des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement qui expliquent aux entreprises qu'elles ne sont pas là pour les aider mais pour les contrôler. C'est comme cela que des entreprises vont s'installer ailleurs qu'en France.
J'accepte de retirer l'amendement et je proposerai une nouvelle rédaction.
L'amendement SPE479 est retiré.
Article 55 : Allégement des obligations comptables des TPE sans activité
La commission est saisie de l'amendement SPE1153 de M. Alain Tourret.
Cet amendement vise à étendre l'allégement des obligations comptables pour les microentreprises sans activité comptant zéro salarié à celles qui emploient un salarié. En effet, l'emploi d'un salarié quelques heures par mois, à temps partiel ou à temps complet, leur ferait perdre injustement le bénéfice des allégements prévus.
Cet exemple illustre la volonté partagée de simplification. Néanmoins, l'objet de l'amendement, tel que vous le présentez, est beaucoup plus large que celui de l'article 55 qui porte exclusivement sur les entreprises sans activité. En outre, la présence d'un salarié implique nécessairement des mouvements financiers et une activité de l'entreprise qui, de ce fait, n'entre plus dans le cadre de l'article. Ce sujet mérite toutefois d'être approfondi afin d'évaluer les conséquences d'une telle mesure et le nombre d'entreprises concernées. Je vous suggère de le retirer.
L'article vise uniquement les entreprises mises en sommeil, qui, par définition, n'ont pas de salarié en activité. J'émets donc un avis défavorable.
Toutefois, l'idée de simplifier les obligations comptables des TPE et des microentreprises est bienvenue. Le comité de simplification y travaille.
J'accepte la proposition du ministre d'une étude d'impact. Je retire donc l'amendement. Vous m'opposez qu'une entreprise n'est pas en sommeil si elle ne dort pas. Il me semble toutefois qu'on peut continuer à dormir avec quelques heures d'activité.
L'amendement SPE1153 est retiré.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels SPE1506 et SPE1505 des rapporteurs.
Puis elle examine l'amendement SPE1677 des rapporteurs.
Afin d'éviter d'éventuels détournements de la part de personnes mal intentionnées, l'amendement précise que l'exonération totale des obligations de déclaration comptable des personnes physiques qui ont mis en sommeil leur entreprise ne s'applique pas si l'entreprise réalise des opérations, notamment des cessions d'actifs, ayant un effet sur la structure de son bilan comptable.
La « structure du bilan » est-elle le terme consacré en comptabilité ? Il me semble que les alinéas 2 et 3 pourraient être réunis puisque leur contenu est quasi identique.
L'expression « cessation totale d'activité temporaire » me semble insatisfaisante. Les entreprises mises en sommeil cessent totalement leur activité de manière temporaire. Le mot « temporaire » est sans doute mal placé. Il faudrait revoir la rédaction pour lever l'ambiguïté.
L'exposé des motifs évoque, pour les entreprises visées, un chiffre d'affaires de 700 000 euros qui suppose nécessairement des flux. L'argument de M. Tourret me semble donc parfaitement valable.
Il n'est pas possible de fusionner les deux alinéas, car l'un porte sur les personnes physiques qui sont totalement exonérées d'obligation de déclaration et l'autre sur les personnes morales soumises à des obligations de déclaration simplifiées.
Quant à la cessation d'activité, l'entreprise mise en sommeil pour une durée maximale de deux ans peut décider, à l'issue de ce délai, de reprendre son activité.
La commission adopte l'amendement SPE1677.
Elle adopte ensuite l'article 55 modifié.
Article 55 bis (nouveau) : Allègement de l'obligation d'établir un rapport sur les délais de paiement pour les entreprises ne publiant pas de rapport de gestion
La commission examine l'amendement SPE1679 des rapporteurs.
Cet amendement vise à alléger l'obligation d'établir un rapport sur les délais de paiement pour les entreprises qui ne publient pas de rapport de gestion.
La loi de modernisation de l'économie de 2008 ainsi que la loi relative à la consommation du 17 mars 2014 ont prévu une attestation systématique de ces informations par le commissaire aux comptes. Or la loi de simplification du droit du 22 mars 2012 a introduit la possibilité pour les sociétés non cotées de ne pas publier leur rapport de gestion. Cette disposition, combinée à l'obligation de publier les informations sur les délais de paiement, aurait potentiellement pour conséquence d'imposer aux sociétés non cotées choisissant de ne pas déposer leur rapport de gestion au greffe de publier un document spécifique relatif aux délais de paiement, ce qui serait coûteux et source d'une complexité injustifiée.
La commission adopte l'amendement SPE1679.
Article 55 ter (nouveau) : Insaisissabilité de droit de la résidence principale des entrepreneurs individuels
Elle en vient à l'amendement SPE1676 des rapporteurs.
Cet amendement est le fruit de la ténacité. Issu de mon rapport sur l'entrepreneuriat individuel, il prévoit la protection par défaut – sans déclaration d'insaisissabilité devant notaire – de la résidence principale pour l'entrepreneur individuel. Cette mesure, qui n'avait pas été retenue dans la loi Pinel, est particulièrement importante, car de nombreux entrepreneurs individuels ignorent qu'ils engagent leur habitation principale en créant une entreprise.
Il s'agit d'une mesure de simplification et de protection pour les entrepreneurs individuels qui pourrait trouver un prolongement en matière fiscale dans l'établissement d'une distinction entre les revenus de l'entreprise et les revenus tirés de l'entreprise. Vous savez que les entrepreneurs individuels sont soumis à l'impôt sur le revenu sur l'ensemble de leurs bénéfices sauf lorsqu'ils ont choisi le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL). L'EIRL qui avait vocation à protéger le patrimoine de l'entrepreneur n'a pas rencontré le succès escompté en raison de la complexité du changement de statut.
Cet amendement est très important. En apportant une protection, il répond à une problématique – de manière partielle, ne soyons pas naïfs, les aspects bancaires ne peuvent pas être occultés. Cette mesure d'équité, qui récompense plus justement la prise de risque, est dans la droite ligne de la philosophie du projet de loi. C'est une mesure de justice qui est bonne pour l'activité. J'y suis très favorable.
Je suppose que l'amendement précise que seule la partie de l'habitation qui n'est pas utilisée à des fins professionnelles est protégée.
La signature bilatérale d'un billet à ordre continuera-t-elle à engager tous les biens du signataire ? Ce mécanisme automatique sera-t-il exclu ?
Toutes les pratiques consistant à mettre en collatéral des biens propres demeurent.
L'entrepreneur individuel sera protégé par défaut sur sa résidence principale ou la partie de cette résidence principale non affectée à l'usage professionnel. Il lui sera toujours possible d'affecter des biens personnels à son entreprise par une déclaration auprès du notaire.
La commission adopte l'amendement SPE1676.
Article 56 : Suppression de l'obligation de recourir à un acte extrajudiciaire dans les relations entre bailleurs et locataires d'un local commercial
La commission examine les amendements identiques SPE1508 des rapporteurs et SPE279 de M. Gilles Lurton.
Cet amendement, identique à des amendements de l'opposition, propose de maintenir l'obligation de procéder par signification pour l'acte notifiant le refus de renouvellement par le bailleur, suite à une demande en renouvellement notifiée par le locataire.
Il importe, pour protéger les parties, de maintenir la signification dans ce cas.
Je rappelle l'importance très lourde de conséquences que les tribunaux attachent à l'erreur consistant à utiliser la lettre recommandée ou l'acte extrajudiciaire au lieu de la signification : elle aboutit soit à un renouvellement automatique du bail soit à la nullité du congé. Le défaut de forme est considéré comme un défaut de fond. Il me semblerait utile de s'attaquer à ce problème tant les incidences sont graves.
La commission adopte les amendements SPE1508 et SPE279.
Puis elle adopte l'article 56 modifié.
Article 56 bis (nouveau) : Création d'une procédure amiable de recouvrement des petites créances par l'intermédiaire des huissiers
La commission est saisie des amendements identiques SPE1514 des rapporteurs et SPE1106 de M. Sébastien Huyghe.
Cet amendement tend à créer une procédure de recouvrement des petites créances par huissier afin de remédier aux difficultés que rencontrent les entrepreneurs des petites entreprises. Le retard de paiement moyen reste bloqué au-dessus du seuil des douze jours. Moins de 31 % des entreprises françaises règlent leurs fournisseurs sans retard.
Il est proposé de mettre en oeuvre une procédure simplifiée et déjudiciarisée permettant d'obtenir rapidement un titre exécutoire lorsque la créance, de nature contractuelle et d'un montant limité, n'est pas contestée par le débiteur.
Cette procédure permettra de résoudre les difficultés de trésorerie d'un grand nombre de petites entreprises.
En dépit de la faiblesse des montants, avez-vous prévu un moyen de contestation de la créance ?
La commission adopte les amendements SPE1514 et SPE1106.
La commission examine l'amendement SPE1484 de M. Jean-Frédéric Poisson.
Cet amendement d'appel concerne les contrats de mise à disposition au sein d'un commerce – les grands magasins, par exemple – d'espaces de vente distincts dudit commerce. Il convient de clarifier le cadre juridique, car la fin de ces contrats suscite des contestations et peut donner lieu à une indemnisation indue.
Sous réserve de plus ample expertise, la jurisprudence apporte déjà une réponse satisfaisante à la difficulté que vous soulevez en permettant de déterminer si les contrats de mise à disposition sont soumis au statut des baux commerciaux. Votre amendement risque de priver certains occupants de ces espaces de ce statut protecteur.
Nous sommes toutefois disposés à travailler avec vous pour clarifier ce point.
Je conviens de la nécessité d'un travail avec le Gouvernement pour trouver un équilibre entre la prise en compte de la spécificité des contrats de mise à disposition et la préservation de l'universalité des baux commerciaux.
Compte tenu de la proposition du ministre, je retire l'amendement, dont l'intention n'est évidemment pas de bouleverser les situations existantes ou de remettre en cause la validité des contrats en cours.
Sachez toutefois, monsieur le ministre, que vous prenez un risque en opposant à un commissaire aux lois l'argument selon lequel la jurisprudence exonère le Parlement de faire la loi.
L'amendement SPE1484 est retiré.
Article 57 : Habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour transposer une directive et pour simplifier le droit relatif aux contrats de concession
La commission est saisie des amendements identiques SPE252 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE419 de M. Patrick Hetzel.
Le recours à l'ordonnance est la méthode traditionnelle pour transposer une directive, sous tous les régimes. Avis défavorable.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette les amendements SPE252 et SPE419.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel SPE1503 des rapporteurs.
Elle adopte ensuite l'article 57 modifié.
Article 58 : Plafonnement des frais mis à la charge des entreprises en cas de publicité de la sanction ou de l'injonction les concernant
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels SPE1205 et SPE1206 des rapporteurs.
Puis elle examine l'amendement SPE1246 de M. Joël Giraud.
Avis favorable à cet amendement qui limite aux seuls contrats conclus hors d'un établissement commercial la possibilité pour le consommateur de se rétracter d'un contrat à compter du jour de sa conclusion.
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1246.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel SPE1207 des rapporteurs.
Puis elle adopte l'article 58 modifié.
Article 58 bis (nouveau) : Amélioration des modalités de déplacement du siège social d'une SARL sur le territoire
La commission est saisie de l'amendement SPE1538 du Gouvernement.
Nouvelle mesure de simplification, cet amendement permet au gérant d'une société à responsabilité limitée de déplacer le siège social avec une formalité simplifiée en France et non plus seulement au sein du même département ou d'un département limitrophe. Cette décision doit être ratifiée par l'assemblée des associés.
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1538.
Article 58 ter (nouveau) : Information des assemblées générales des sociétés anonymes sur la variété des profils professionnels au sein des conseils d'administration et des conseils de surveillance
Elle examine ensuite, en présentation commune, les amendements SPE1096, SPE1228 et SPE1230 de Mme Karine Berger.
Ces amendements portent tous sur une chose qui doit changer dans l'économie française : la consanguinité dans les conseils d'administration et les conseils de surveillance des entreprises. En la matière, la France est à l'âge de pierre par rapport à ses concurrents.
Malgré les volontés politiques réaffirmées, la diversité a peu progressé dans ces conseils. La consanguinité et une forme de cooptation demeurent. Or nous pouvons agir.
L'amendement SPE1096 est modéré. Il soumet les entreprises à une obligation d'information sur la diversité de la composition de leur conseil d'administration ou de leur conseil de surveillance tous les cinq ans. Outre la parité entre hommes et femmes, pour laquelle des règles existent, la notion de diversité recouvre les différents profils, les parcours professionnels ou la formation des personnes qui siègent dans ces conseils.
L'amendement SPE1228 est plus provocant. Il tend à interdire aux représentants siégeant dans les conseils d'administration ou de surveillance et cumulant plus de deux mandats de bénéficier de jetons de présence pour les mandats excédant ce nombre. Sachez que la rémunération peut atteindre 500 000 euros pour certains grands patrons d'industrie.
L'amendement SPE1230 propose de restreindre de cinq à deux le nombre de mandats détenus par une même personne. En l'absence de sanctions associée à la limitation à cinq du nombre de mandats prévue par le code de commerce, certaines personnes, rares, s'autorisent à s'affranchir de cette contrainte. Alors que le nombre moyen mandats se situe entre un et deux aux États-Unis, au Royaume-Uni, et dans une moindre mesure en Allemagne, il est entre trois et quatre en France.
Il faut agir maintenant pour lutter, sinon contre les conflits d'intérêts, du moins contre les intérêts convergents de certains conseils.
Je suis sensible à la question de la gouvernance des entreprises que vous soulevez au travers de ces amendements.
Le code de commerce prévoit déjà une information sur la parité. Je partage pleinement la philosophie de votre amendement et vous propose donc d'examiner si des informations supplémentaires peuvent être données au-delà de ce qu'imposent la directive sur le reporting non-financier et le code de commerce.
Quant aux deux autres amendements, il me semble que deux cas doivent être distingués : celui du mandataire social qui détient parallèlement un mandat d'administrateur, qui est le coeur du conflit d'intérêts que vous pourfendez mais qui correspond à la tradition du capitalisme croisé français. Dans ce cas, il me semble possible d'aller plus loin que la limitation de la rémunération en réduisant le nombre de mandats autorisés pour ceux qui sont mandataires eux-mêmes. Le cas est différent pour un ancien dirigeant à la retraite pour lequel la limitation à deux mandats peut être sévère dès lors qu'il met son expérience au service des entreprises. Il faut y réfléchir.
La volonté de clarification et de moralisation en cette matière me semble pertinente. Je vous propose d'adopter l'amendement SPE1096 qui mérite d'être retravaillé. Il nous servira de point d'appui pour réfléchir sur le distinguo que je viens d'évoquer. En limitant indistinctement le nombre de mandats, on risque de se priver de gens d'expérience qui ne sont pas concernés par les conflits d'intérêts. De ce fait, j'émets un avis favorable sur le premier amendement et je vous invite à retirer les deux autres.
Sur l'amendement SPE1096, l'ouverture du ministre va dans le bon sens. Il convient de corriger une erreur matérielle en substituant au mot « administration » le mot « assemblée ». Quant aux deux autres amendements, ils invitent au débat mais ne sont pas applicables en l'état.
Je rectifie évidemment l'amendement SPE1096 dans le sens indiqué par le rapporteur thématique. Je suis prête à retirer les deux autres amendements et à les réécrire. Je retiens de l'invite du ministre la limitation à deux du nombre de mandats pour ceux qui exercent une fonction exécutive et à trois ou quatre – nous en discuterons – pour les autres.
Je vous mets en garde sur l'amendement SP1096. Dès lors que vous employez le terme « diversité », vous tombez sous le coup de la loi pénale, car vous faites implicitement référence à des considérations ethniques. Je vous conseille de préférer le terme de parité.
J'ai été choqué par l'utilisation de l'expression « consanguinité ». Entendez-vous par là que les enfants d'un chef d'entreprise ne pourraient pas siéger au conseil d'administration ?
La diversité renvoie aux parcours professionnels, d'autant que l'information sur la parité est déjà prévue. Je ne suis pas opposée à apporter cette précision dans l'amendement. Quant à la consanguinité, elle vise évidemment la consanguinité d'entreprises, elle ne met pas en cause l'ADN.
Outre que je n'adhère pas au principe de cet amendement, l'emploi du terme de diversité me semble poser un sérieux problème juridique, sauf à l'expliciter davantage.
Par ailleurs, je suis surpris que le Gouvernement soit favorable à un amendement aux antipodes de la simplification qu'il défend.
Enfin, cet amendement raisonne sur l'hypothèse d'une homogénéité des entreprises dont chacun sait qu'elle est fausse. Il faut prendre en compte la taille des entreprises, leur activité et non la seule structure juridique de société anonyme. Il faut impérativement introduire de la nuance sans quoi cette mesure risque d'être contre-productive, voire d'avoir des conséquences extravagantes pour les entrepreneurs qu'il ne faut pas oublier.
Pourquoi ne pas remplacer le mot de diversité par celui très ancien et très simple de variété ?
Mes propos iront dans le même sens que ceux de M. Hetzel. Pour évaluer le rôle des administrateurs, ne nous focalisons pas sur le statut et le nombre de mandats, fondons-nous sur les besoins de l'entreprise. Les PME et ETI ont souvent recours à des administrateurs pour des missions de conseil. C'est très utile.
Je ne suis pas favorable à la réglementation dans ce domaine en dépit de certains abus dans certaines grandes entreprises du CAC40. Dès lors que les administrateurs remplissent correctement leur fonction de conseil, peu importe le nombre de mandats qu'ils détiennent.
Pour une entreprise qui monte en puissance, il peut être intéressant d'avoir à ses côtés un administrateur de renom pour obtenir des garanties bancaires ou autres. La consanguinité dans les grands groupes est une question. Au-delà, gardons-nous d'empêcher des soutiens aux entreprises en devenir.
Je propose de rectifier l'amendement SPE1096 pour remplacer le terme de diversité par les mots : « variété des profils professionnels ».
Il y a incontestablement à travailler les deux points soulevés par cet amendement. Sur le premier point, l'idée n'est pas d'imposer une obligation déclarative à toutes les entreprises. Ce sont les grands groupes qui sont visés. Il faut déterminer un seuil d'application. Au sujet des mandats, les entrepreneurs qui font appel à des administrateurs de renom pour aider la PME ou l'ETI n'ont pas de raison d'être soumis à une limite.
Le problème français historique, que vous cherchez à traiter, tient au nombre de mandats cumulés par des mandataires sociaux au sein des conseils d'administration de grands groupes. Il ne faut pas imposer des contraintes qui priveraient d'expérience les PME et ETI. La réflexion s'ouvre. Le Gouvernement a émis un avis favorable à l'amendement SPE1096 pour avoir une base de travail, en vue d'apporter, d'ici à la séance, des solutions aux problèmes de gouvernance dans les grands groupes.
Il faut pouvoir mesurer l'impact des propositions. Il serait intéressant de disposer de chiffes sur le nombre de mandats, le type et la taille des entreprises afin d'éclairer le débat et d'éviter les dispositions susceptibles de mettre en difficulté des entreprises en croissance.
Je retire les amendements au bénéfice de l'engagement du ministre de travailler à la mise en place d'un seuil pour le nombre de mandats d'ici à la séance.
Je précise que l'amendement SPE1096 qui est rectifié prévoit une information tous les cinq ans. Il n'est pas question ici d'une information annuelle.
La commission adopte l'amendement SPE1096 ainsi rectifié.
Les amendements SPE1228 et SPE1330 sont retirés.
Article 58 quater (nouveau) : Faculté, pour les sociétés, d'obtenir la non-publicité de leurs comptes annuels
La commission est saisie de l'amendement SPE818 de Mme Bernadette Laclais.
C'est un amendement auquel je tiens beaucoup. Des entreprises de plus en plus nombreuses rechignent à déposer leurs comptes de peur que les informations publiées soient exploitées par la concurrence. En effet, ces informations renseignent sur l'état de santé de l'entreprise et ses marges, et permettent à des personnes plus ou moins bien intentionnées d'exercer des pressions. Cet amendement a donc pour objet de donner la possibilité aux sociétés, quelle que soit leur forme, leur activité et leur importance, de déclarer que leurs comptes annuels ne seront pas rendus publics.
Il s'agit de ne pas donner à la concurrence des munitions pour mettre en difficulté les entreprises françaises dans un monde ouvert. Les sociétés françaises peuvent être fragilisées par certains modes de fonctionnement que nous ne pouvons pas ignorer.
Je partage votre analyse. Toutefois, au regard des contraintes législatives, en particulier la directive du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d'entreprises, la dispense de publication que prévoit l'amendement paraît trop large. Je vous propose de travailler en vue de la séance sur un amendement conforme au cadre communautaire, qui autoriserait à déroger à la publication pour certaines informations.
Je vous demande de retirer votre amendement au bénéfice de cet engagement.
J'accepte de retravailler l'amendement afin de résoudre les difficultés juridiques. Je tiens à ce que l'on repère très précisément les éléments dont la publication est susceptible de fragiliser l'entreprise et que l'on veille à ce qu'ils ne figurent pas dans des documents dont la publication serait autorisée. À cet égard, une analyse vigilante du contenu du compte d'exploitation et du bilan est indispensable. Nous devons être sûrs de protéger l'entreprise d'autant que, M. Brottes l'a dit, la réciprocité n'existe pas.
Le respect des règles européennes s'impose, j'en suis consciente. Mais les entreprises de certains pays européens qui sont moins réactifs que nous dans la publication des données jouissent d'un avantage concurrentiel.
En présence de concurrents étrangers, dans certains secteurs réduits, la divulgation d'informations peut devenir stratégique et poser problème pour certains acteurs français. C'est la difficulté que vous souhaitez résoudre.
Parallèlement, il ne faut pas perdre de vue que le développement du financement participatif que nous appelons tous de nos voeux ne réussira que si l'information est publique. Donner des informations aux tiers peut être une contrainte sur le plan stratégique et industriel, mais la transparence est la condition de l'accès à des financements intermédiés. La cohérence avec nos objectifs en matière de financement de l'économie impose sans doute de ne pas supprimer toutes les informations transmises par les entreprises.
Ce sujet revient régulièrement. Au départ, je défendais les mêmes principes que vous, monsieur le ministre. Mais, après avoir recueilli de nombreux témoignages, cette position paraît bien naïve : nous savons que ce sont surtout les concurrents européens qui regardent les comptes.
L'intérêt de l'amendement réside dans le choix donné aux entreprises : elles n'ont pas l'obligation de ne pas publier. Une entreprise désireuse de solliciter un financement participatif peut opter pour la transparence, qui, dans ce cas, sera volontaire. La proposition de notre collègue est intéressante, car elle laisse la responsabilité au chef d'entreprise et à ses équipes.
Je souhaite vraiment qu'une solution soit apportée aux entreprises qui ont une monoactivité, dont les concurrents peuvent tout connaître avec une grande facilité. Je maintiens l'amendement.
Cet amendement mérite un temps de rédaction supplémentaire pour éviter un champ d'application trop large.
Je ne peux pas m'empêcher, dans ce débat, de rappeler que les rapports de la Cour des comptes servent souvent de livre de chevet aux concurrents des entreprises publiques.
La commission adopte l'amendement SPE818.
Après l'article 58
Puis elle examine, en présentation commune, les amendements SPE1172 et SPE1171 de M. Francis Vercamer.
Ces amendements ont pour objet d'élargir le champ des sanctions en cas d'atteinte au secret professionnel, en ces temps où des organismes de contrôle de plus en plus nombreux interviennent dans les entreprises dans le cadre de plans de redressement, de contrôle par l'administration ou par des structures spécialisées, et sont autorisés à emporter des documents.
L'article L. 226-13 du code pénal punit la révélation d'une information à caractère secret par une personne investie d'une mission temporaire d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. L'amendement SPE1172 vise également les personnes effectuant une mission de contrôle, tandis que l'amendement SPE1171 accroît la sanction au même niveau que celle prévue pour atteinte à la vie privée, en faisant passer le montant de l'amende de 15 000 à 45 000 euros.
L'emploi du mot « notamment » n'est pas satisfaisant. Le champ de l'article L. 226-13 du code pénal est déjà très large et votre proposition n'ajoute rien au droit positif, qui répond déjà à votre préoccupation. Il pourrait même être lu a contrario comme retranchant par défaut d'autres éléments.
Avis défavorable aux deux amendements.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette successivement les amendements SPE1172 et SPE1171.
Elle est ensuite saisie de l'amendement SPE404 de M. Patrick Hetzel.
La profession des guides-conférenciers s'inquiète de certaines dispositions récentes. Dans l'avant-projet de loi, l'article 16 prévoyait de supprimer l'exigence d'une carte professionnelle pour exercer l'activité de guide-conférencier. Cette mesure a finalement été intégrée dans le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises. L'article 4 du même projet de loi habilite le Gouvernement à prendre des ordonnances pour supprimer certains régimes d'autorisation préalable et les remplacer par des régimes déclaratifs. Les termes de l'habilitation prévue sont très larges et ne font pas mention des professions concernées. Cependant, lors des débats, le ministre avait précisé que cette réforme concernerait notamment les opérateurs de voyages et les guides-conférenciers.
Vous avez indiqué, monsieur le ministre, devant la Délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, que les guides-conférenciers n'avaient pas à s'inquiéter, car ils n'étaient pas concernés. Une précision explicite dans le corps du texte serait de nature à calmer l'inquiétude de ces professionnels. Tel est le sens de mon amendement.
Depuis plusieurs semaines, le Gouvernement a décidé de retirer plusieurs professions réglementées ou autres de ce projet de loi. Néanmoins, l'habilitation pour simplification telle qu'elle a été votée couvre bien cette profession, qui a été citée par mon collègue Thierry Mandon. Devant la Délégation aux droits des femmes, j'ai bien indiqué, et je vous le confirme, que nous ne traiterions pas des guides-conférenciers dans ce projet de loi. Mais vous me demandez de contredire une habilitation qui vient d'être votée. L'intention du Gouvernement n'est pas de retrancher ici des éléments de simplification que nous comptons conduire par ailleurs.
On peut légitimement se demander si l'exigence de possession d'un niveau linguistique d'une autre langue à un niveau « quasi maternel », qui s'impose aujourd'hui aux guides-conférenciers, est pertinente pour toutes les situations et pour tous les guides-conférenciers. Je ne prends que cet exemple pour justifier de la volonté du Gouvernement de revisiter les contraintes de ces professions.
Par conséquent, je ne peux émettre qu'un avis défavorable à votre demande.
On pouvait vraiment déduire de vos propos devant la Délégation aux droits des femmes que la profession n'était pas concernée. Monsieur le ministre, il serait intéressant que vous les réécoutiez.
J'ai entendu vos arguments, mais j'insiste sur le fait que la suppression de la carte professionnelle de guide-conférencier aura de très fortes incidences sur les professionnels. Certes, il est important de libéraliser, mais il y a des sujets sur lesquels il faut savoir raison garder.
Nous avons déjà eu ce débat à propos des apprentis, le point étant de savoir si une déclaration préalable pour les travaux dangereux était préférable à une vérification au départ, qui prend beaucoup de temps et demande beaucoup de formalités. Dans le cas qui nous occupe, doit-on vérifier au préalable toutes les qualifications des guides-conférenciers ? Une première simplification a eu lieu en 2011, puisqu'il ne reste plus qu'une seule carte sur les trois ou quatre qui existaient auparavant.
Pourquoi ne pas mettre en place une déclaration préalable pour avoir une carte ? Puisque, aujourd'hui, des étrangers en provenance de pays européens peuvent agir en tant que guides-conférenciers sur notre territoire en faisant une simple déclaration sans contrôle a priori, il y a, de fait, déjà une discrimination. Une simple déclaration préalable apporterait une nouvelle simplification qui permettrait à chacun d'exercer cette profession, à condition que des vérifications soient conduites a posteriori. Cela libérerait les énergies.
Avis défavorable.
Alors que le ministre des affaires étrangères a lancé une grande offensive dans le domaine du tourisme, cette question mériterait de faire l'objet d'une réflexion plus approfondie. La profession existe et elle est codifiée dans le code du tourisme, ce qui est un gage de qualité pour nos partenaires extérieurs.
Je partage le sentiment de Monique Rabin. Nous avons la chance d'avoir en France des villes et des pays d'art et d'histoire, qui sont des formidables atouts touristiques pour notre pays. Au moment où l'on examine des textes pour renforcer notre compétitivité dans ce domaine, il serait dommage qu'on laisse la place à une moindre qualité. Les gens viennent chez nous parce qu'ils savent que des guides de qualité vont leur faire découvrir notre patrimoine. Il serait regrettable que celui-ci puisse être approprié par d'autres personnes que celles qui le connaissent très bien et qui en font véritablement la promotion.
Je ne voterai pas cet amendement, mais je me permets de plaider pour que cette disposition soit examinée dans le cadre d'un texte concernant le patrimoine, qui devrait être présenté au Parlement. Il serait logique qu'une réflexion sur ces questions soit menée de façon globale, et pas à travers le seul prisme de la simplification.
Vous pourriez peut-être, monsieur Hetzel, retirer l'amendement et poser une question écrite au ministre Mandon.
Je le maintiens, ce qui ne m'empêchera pas de poser une question écrite à Thierry Mandon !
La commission rejette l'amendement SPE404.
Section 2
Procédures de l'Autorité de la concurrence
Article 59 : Habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures pour préciser les règles applicables en matière de concentration économique et pour simplifier et améliorer l'efficacité des procédures devant l'Autorité de la concurrence
La commission est saisie des amendements identiques SPE255 de M. Jean-Frédéric Poisson, SPE422 de M. Patrick Hetzel et SPE1248 de M. Joël Giraud.
Avec l'article 59, vous voulez, monsieur le ministre, introduire dans l'article L. 430-3 du code de commerce la notion de seuil. S'agissant de la définition du seuil à partir duquel on considère qu'une entreprise est en situation de concentration, il me paraîtrait plus qu'opportun que le Parlement puisse débattre. Autant je peux comprendre qu'on veuille transcrire par ordonnance des directives européennes dont le caractère est plutôt technique, autant cette notion me semble éminemment politique et relever, de ce fait, de la compétence du Parlement. Je regrette donc le recours aux ordonnances sur ce sujet.
Par ailleurs, la modification de l'article L. 430-3 conduirait à une articulation différente du présent article avec l'article 11, à travers lequel la commission a adopté une nouvelle manière de considérer la position dominante. Je ne peux pas m'empêcher de faire le lien entre ces deux notions et je suis extrêmement sceptique quant aux conséquences de l'adoption en l'état de l'article 59, par lequel le Gouvernement, procédant par ordonnances, saisirait notre nouvelle amie de la semaine, l'Autorité de la concurrence, pour fixer le seuil à partir duquel la position de concentration serait considérée comme atteinte. L'Autorité serait alors juge et partie.
Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de cet article.
L'amendement SPE1248 est retiré.
Les amendements SPE1539, SPE1546, SPE1540, SPE1541 et SPE1543, que le Gouvernement a déposés après l'article 59, visent à inscrire dans le texte les éléments que l'article initial renvoyait à une ordonnance, répondant ainsi aux préoccupations de M. Poisson. Cette référence à des ordonnances n'était qu'une simplification légistique due à certains délais, en aucun cas une volonté de confisquer quelque information que ce soit au Parlement. Il ne s'agit pas de modifier les seuils, mais d'améliorer les procédures, d'harmoniser les pouvoirs d'enquête des autorités chargées de la répression des infractions économiques.
Les éléments relatifs à la concentration qui sont ici concernés n'auront pas d'effet sur l'article 11. Par contre, ils en auront sur le contrôle des concentrations, avec une rationalisation du dispositif, s'agissant notamment de l'articulation entre la DGCCRF et l'Autorité de la concurrence.
Je pense que ces explications répondent, pour l'essentiel, aux préoccupations de M. Poisson, qui étaient légitimes à la lecture de l'article initial. S'il maintenait son amendement de suppression, j'aurais un avis défavorable.
Avis défavorable. D'autant que tous les éléments de réponse ont été présentés de façon très précise à travers les amendements gouvernementaux.
La commission rejette les amendements SPE255 et SPE422.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels SPE1208 et SPE1209 des rapporteurs.
Elle adopte ensuite l'article 59 modifié.
Article 59 bis (nouveau) : Amélioration des règles en matière de contrôle des concentrations
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1539 du Gouvernement.
Article 59 ter (nouveau) : Renforcement des pouvoirs d'enquête de l'Autorité de la concurrence
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1546 du Gouvernement.
Article 59 quater (nouveau) : Rejet de saisines contentieuses pour les affaires de dimension locale
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1540 du Gouvernement.
Article 59 quinquies (nouveau) : Amélioration de la procédure transactionnelle et de la procédure de clémence devant l'Autorité de la concurrence
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1541rect. du Gouvernement.
Article 60 A (nouveau) : Reconnaissance des systèmes de garantie et des labels de commerce équitable
La commission est saisie de l'amendement SPE1955 du Gouvernement.
Cet amendement rédactionnel vise à transférer la mission de reconnaissance publique des labels privés de commerce équitable de la commission nationale du commerce équitable à la commission de concertation du commerce.
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1955.
Section 3
Faciliter la vie de l'entreprise
Article 60 : Carte d'identité virtuelle des entreprises
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette les amendements identiques SPE256 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE423 de M. Patrick Hetzel.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels SPE1210, SPE1211, SPE1213 et SPE1212 des rapporteurs.
Elle adopte ensuite l'article 60 modifié.
Après l'article 60
La commission examine, en présentation commune, les amendements SPE1306, SPE1312, SPE1373 et SPE1460 de M. Jean-Christophe Fromantin.
Ces quatre amendements concernent l'export et les PME. L'amendement SPE1306 vise à moduler au cas par cas les exigences de la part française en fonction des objectifs de rétablissement de l'équilibre de notre commerce extérieur et de l'impact de l'opération sur l'emploi. L'objectif est d'interpeller le ministre sur la nécessité d'une telle souplesse.
L'amendement SPE1312 a pour objet de redéfinir les règles de délégation de l'État à Coface pour l'instruction et l'octroi des garanties publiques en faveur des PME, afin de les dispenser systématiquement d'un examen en commission des garanties et du crédit au commerce extérieur. Dans nombre de cas, en effet, une procédure simplifiée d'examen des projets pourrait être mise en place pour éviter la lourdeur de certaines procédures.
L'amendement SPE1373 vise à mieux coordonner entre Coface et BPI l'instruction des dossiers à l'export, aujourd'hui traités par chacun de ces organismes avec sa propre base de données, ses critères et ses modes d'évaluation des entreprises.
L'amendement SPE1460 appelle à compléter le dispositif Ubifrance en accordant des délégations de service public à des entreprises privées implantées dans différents pays ou métropoles mondiales. Leur présence et leur expertise permettrait, tout en assurant des prestations de service semblables à celles fournies par l'acteur public, d'atteindre une meilleure dispersion géographique et de meilleures connaissances sectorielles.
Ces propositions techniques sont extraites d'un rapport à la rédaction duquel j'avais participé dans le cadre de la commission d'évaluation et de contrôle des politiques publiques. Conformément à l'esprit du projet de loi, elles tendent à simplifier, moduler, assouplir un certain nombre d'instructions pour nos exportateurs.
À la liste que vient de donner Jean-Christophe Fromantin, j'ajouterai la question des délais de paiement, qui sont un élément de concurrence à l'export. Nos entreprises qui exportent sont obligées de les respecter, ce qui est bien normal, alors que les entreprises avec lesquelles elles sont en concurrence à l'international ne respectent pas les mêmes obligations. Il leur arrive donc de perdre des marchés.
Les différents soutiens publics, et parfois privés, à l'export sont un sujet essentiel sur lequel le Gouvernement a déjà beaucoup fait, en simplifiant le dispositif avec le rapprochement des deux acteurs, l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et UBI, la création d'une nouvelle entité, Business France, que dirige Mme Pénicaud, et le lancement d'un label BPI international qui vise à mettre en résonnance la BPI, Business France et Coface. Il y a eu, ces derniers mois, une simplification du dispositif français, qui répond, monsieur Fromantin, à vos préoccupations.
L'amendement SPE1306 tend à assouplir les exigences en termes de part française du contrat d'exportation. Compte tenu de la répartition de plus en plus mondialisée des chaînes de valeur ajoutée, une réflexion est en cours pour réformer ces exigences afin de les rendre plus incitatives, plus simples et plus lisibles. L'une des pistes sur laquelle nous travaillons serait d'adapter le montant du soutien public au montant français du contrat, de manière à augmenter le nombre de bénéficiaires du soutien public et à prendre en compte les spécificités de certains secteurs d'activité.
En revanche, la suppression totale de ces exigences ne nous paraît pas souhaitable parce qu'elle aurait pour conséquence inévitable d'augmenter le recours à la sous-traitance étrangère dans les contrats pour lesquels on nous demande des garanties Coface. Elle ne manquerait pas de susciter des interrogations, légitimes, dans la situation de nos finances publiques. Nous pourrions, en effet, favoriser le financement de certains contrats export sans aucune répercussion sur le territoire français. Une étude au cas par cas serait plus indiquée.
Les exigences de la part française sont déjà différenciées. Elles peuvent être plus importantes pour les aides-projets FASEP (Fonds d'étude et d'aide au secteur privé) et RPE (Réserve pays émergents) que pour les garanties publiques. Á cet égard, nous avons déjà aidé certains financements export sur des critères plus pragmatiques. Quant à une différenciation en fonction du déficit commercial avec le pays cible, elle serait très difficile à mettre en pratique pour l'assurance-crédit parce qu'il faudrait justifier de la différence de traitement entre les exportateurs. Les encours sont déjà très importants sur les grands émergents et c'est impossible pour les autres garanties qui fonctionnent en enveloppes, comme le risque exportateur ou le risque de change.
Voilà pour l'amendement SPE1306, dont je demande le retrait.
Pour ce qui est de l'amendement SPE1312, les règles de délégation de l'État à la Coface pour l'instruction et l'octroi de garanties publiques évitent d'ores et déjà un passage en commission des garanties à la quasi-intégralité des PME – ce fut le cas pour 96,3 % des garanties publiques accordées à des PME entre janvier et novembre 2014, ainsi qu'au cours des années précédentes. Les rares dossiers de PME qui font l'objet d'un tel examen présentent généralement un niveau de risque significatif. Du fait des montants en jeu, de la situation de l'entreprise ou du marché export concerné, il est préférable de maintenir cette procédure.
Si ces informations vous ont convaincu, monsieur Fromentin, je vous suggère de retirer cet amendement également.
Par l'amendement SPE1373, vous proposez de créer une plateforme d'échange d'informations entre Bpifrance et Coface. La mise en place d'un outil de gestion de la relation client implique de recenser l'ensemble des contacts de Coface et de Bpifrance. Une mutualisation des données individuelles ne paraît pas possible aujourd'hui, d'une part, au regard du secret bancaire de Bpifrance qui l'oblige à préserver la confidentialité de ses données, d'autre part, en raison du caractère d'entité cotée de Coface. Une telle plateforme d'échange existe déjà en partie à travers le label Bpifrance Export, qui a pour but d'améliorer et de simplifier l'offre des trois acteurs essentiels en matière d'export, et de favoriser l'accès des PME et des ETI aux produits qui leur sont les plus adaptés. Une rationalisation a donc été opérée et des outils de mutualisation ont été mis en place. Ce label s'est concrétisé par l'installation, au sein des structures régionales et locales de Bpifrance, d'une vingtaine de chargés d'affaires internationaux et d'une vingtaine de développeurs venant de Coface.
Le dispositif n'est pas aussi abouti que ce que vous proposez, monsieur Fromantin, mais cette plateforme et ce label répondent à votre volonté de créer des synergies. Nous l'avons simplifié pour le rendre plus efficace et plus lisible pour les PME. Il y a encore beaucoup de progrès à faire sur ce volet, en particulier en termes de rationalisation de l'ensemble des dispositifs publics. Entre les collectivités locales, l'État et ces établissements, la myriade d'acteurs publics est en effet telle qu'elle peut nuire à la lisibilité. De même, en ce qui concerne les garanties export, une simplification des critères est sans doute nécessaire.
Enfin, la loi permet déjà d'octroyer des délégations de service public à des prestataires exclusifs dans le domaine du commerce international. Votre amendement SPE1460 est donc satisfait.
Même avis que celui du Gouvernement. Le rapport mentionné contient beaucoup de propositions très intéressantes, dont plusieurs relèvent du pouvoir réglementaire. Qui plus est, la mission d'information commune sur la Banque publique d'investissement qui vient d'être mise en place à l'Assemblée en reprendra sans doute quelques-unes dans son rapport.
Je retire les amendements.
Cela étant, monsieur le ministre, pourquoi ne pas remonter les activités de garantie de Coface dans Bpifrance ou BPI Export ? Ce serait plus simple, notamment pour les PME. Cela pourrait être une prochaine étape dans la mutualisation des aides et garanties aux entreprises dans le domaine du commerce international.
Je comprends votre point de vue sur la simplification. Nous y travaillons, mais il faut savoir que ce n'est pas simple sur le plan technique. En poussant votre raisonnement jusqu'au bout, il faudrait détacher la part publique de Coface qui, de fait, a beaucoup de synergies avec la part privée puisqu'elle utilise les mêmes systèmes d'information. Compte tenu de la nouvelle entité, cela suppose des travaux techniques extrêmement complexes et des choix industriels qui ne sont pas neutres. Par conséquent, même si ces éléments sont à l'étude, je ne peux pas vous donner aujourd'hui plus de précisions sur ce sujet.
Quant aux délais de paiement pour les PME à l'export évoqués par le président Brottes, je peux d'ores et déjà indiquer que j'aurai un avis favorable sur la proposition de loi que Mme Guittet déposera à ce sujet dans le cadre d'une prochaine niche. S'il y avait un parfait respect des délais de paiement pour toutes les entreprises, nous pourrions avoir une sorte de rigueur absolue pour les PME. Comme ce n'est pas encore le cas, je pense qu'un régime d'exception relativement pragmatique est une bonne chose.
Les amendements SPE1306, SPE1312, SPE1373 et SPE1460 sont retirés.
Article 61 : Dérogation, pour les trois EPIC du groupe public ferroviaire, à l'obligation d'utiliser la plateforme de traitement des factures dématérialisées créée par l'État
La commission est saisie de l'amendement SPE424 de M. Patrick Hetzel.
Cet amendement de suppression n'est pas un simple amendement d'appel. L'article 61 aurait, dans la réalité, des effets qui s'écartent de l'exposé des motifs.
L'obligation de transmettre les factures aux fournisseurs sous forme électronique semble déjà remplie par la SNCF et, en toute logique, il n'est pas proposé d'y déroger. En revanche, en exonérant la SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités des dispositions du II de l'article 1er de l'ordonnance du 26 juin 2014, il est bel et bien proposé de l'exonérer de l'obligation d'accepter les factures électroniques. Je ne vois pas pourquoi elle en serait dispensée alors que toutes les entreprises, des plus grandes aux plus petites, y seront contraintes à partir de 2017.
Nous n'avons pas l'intention de limiter nos ambitions en matière de facturation électronique. L'objet de l'article 61 est de traiter le problème spécifique de la SNCF, qui est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) doté de sa propre plateforme de facturation. En la matière, elle est même avant-gardiste puisqu'elle gère 7 000 factures par jour, dont 40 % en dématérialisation. L'idée n'est pas de la détacher du régime de droit commun.
Si nous voulons sortir la SNCF du dispositif de l'ordonnance visant à la dématérialisation progressive de l'ensemble des échanges de factures entre les personnes publiques et leurs fournisseurs, c'est que le groupe dispose déjà, depuis plusieurs années, d'une plateforme dématérialisée lui permettant de recevoir les factures de ses fournisseurs. L'exemption sollicitée porte sur la seule obligation d'utiliser la plateforme commune mise à disposition par l'État pour ne pas réduire à néant l'investissement réalisé par SNCF. Si d'autres cas similaires nous étaient révélés, je n'exclus pas de les traiter. La constitution du groupe public ferroviaire par la loi du 4 août 2014 impose déjà une très lourde restructuration des systèmes d'information pour la SNCF. Si nous ne lui appliquions pas un régime d'exception pour la facturation électronique, nous lui imposerions des investissements peu légitimes qui viendraient grever sa situation financière.
Le Gouvernement est très attaché au développement de la facturation électronique, vous le verrez avec l'amendement SPE1561 rectifié que je vais présenter dès maintenant. Cet amendement a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre toute mesure de nature à généraliser l'e-facturation, avec une montée en charge progressive entre 2017 et 2020 pour tenir compte de la taille des entreprises.
Tel que l'article est rédigé, la SNCF n'aura pas l'obligation de réceptionner les factures électroniques. Je souscris à l'argument – qui est d'ailleurs développé dans l'exposé des motifs du projet de loi – que la SNCF ne soit pas obligée d'utiliser la plateforme mutualisée. Mais cet article est mal rédigé et ne permet pas d'atteindre le but recherché.
L'intention du Gouvernement semble relever de l'article 2 de l'ordonnance, qui fait référence à la mutualisation, alors que l'article 1er fait référence à la réception et à l'émission de factures électroniques.
Ce point doit, en effet, être éclairci.
Précisons tout de même que, grâce à cette plate-forme, les retards sont passés de 100 millions d'euros à 20 millions entre 2008 et aujourd'hui. Elle est donc efficace, et il serait dommage de remettre en cause un dispositif qui fonctionne.
Je souscris pleinement à ce que vient de dire M. le rapporteur et je retire l'amendement. En tout état de cause, il faut sécuriser le dispositif ou au moins apporter des éclaircissements.
C'est le II de l'article 1er de l'ordonnance qui est visé. Je le cite : « L'État, les collectivités territoriales et les établissements publics acceptent les factures transmises sous forme électronique par les titulaires et les sous-traitants admis au paiement direct mentionnés au I, dans les conditions prévues à l'article 2. »
L'amendement SPE424 est retiré, ainsi que l'amendement SPE197 des rapporteurs.
La commission adopte l'article 61 sans modification.
Article 61 bis (nouveau) : Habilitation à légiférer par ordonnance pour permettre le développement de la facturation électronique entre les entreprises
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE1561 rectifié du Gouvernement.
Article 62 : Dispositifs publicitaires de grande taille implantés dans l'emprise d'équipements sportifs
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement de précision SPE1963 du Gouvernement.
La commission en vient à l'amendement SPE1154 de M. Alain Tourret.
C'est un amendement auquel nous tenons beaucoup – et, avec nous, nombre de villes moyennes.
Le texte du Gouvernement prévoit d'abaisser le seuil de la capacité d'accueil des équipements sportifs afin de permettre aux stades de 30 000 places de recevoir des enseignes publicitaires de grande taille. Mon amendement propose d'abaisser ce seuil à 15 000 places.
Il y a vingt ans, un certain nombre de stades ont été construits en France, sur un modèle de 15 000 à 20 000 places assises – celui de Caen en compte, par exemple, 18 000. Or, pour accueillir de grandes compétitions internationales comme en prépare actuellement l'UEFA, il est nécessaire de disposer de plus grands stades, ce qui explique le choix du seuil de 30 000 places. Le secrétaire d'État aux sports Thierry Braillard m'a assuré qu'il ne voyait aucun inconvénient à baisser ce seuil à 15 000 places pour des raisons d'équilibre.
En fixant le seuil à 30 000 places, vous allez renforcer l'inégalité qui existe déjà entre les grands stades et les autres, en raison de la différence de leurs budgets. Ne pas fixer le seuil à 15 000 places serait une erreur extrêmement préjudiciable à l'ensemble du monde du football et créerait un très fort déséquilibre, aggravant celui lié aux droits télévisés. Voilà pourquoi, à la demande du monde sportif, je vous demande d'abaisser le seuil à 15 000 places.
L'article 62 propose de baisser à 30 000 places le seuil de référence qui constitue le critère déterminant pour qu'un stade obtienne des dérogations en matière de publicité. Il s'agit d'un véritable assouplissement de la réglementation. Si nous fixons le seuil à 30 000 places, c'est que nous nous apprêtons à accueillir des événements sportifs internationaux, d'où l'importance de ces dérogations pour les grands stades.
Si le ministère des sports est sensible au seuil de 15 000 places, monsieur Tourret, il n'en est pas de même pour d'autres ministères – en particulier, celui de l'environnement, qui porte d'autres préoccupations. La position gouvernementale a été aujourd'hui arrêtée au seuil de 30 000 : c'est pourquoi, bien qu'étant sensible à vos arguments j'émets un avis défavorable à votre amendement.
En réalité, l'objectif de l'article 62 est de préparer l'Euro 2016. Et si notre collègue Alain Tourret soulève un problème réel, ce n'est pas ce soir que nous pourrons résoudre la question de l'abaissement du seuil sans en mesurer les impacts – d'autant que les besoins d'investissement ne sont pas les mêmes pour un stade de 15 000 ou de 30 000 places et que les dispositifs publicitaires doivent être en adéquation avec ceux-ci. Avis défavorable.
J'observe que le ministère de l'environnement n'est pas favorable à l'accroissement de l'activité ni au business. Á voir les nombreuses mesures relevant de la garde des sceaux qui ont été prises, on peut se demander si la ministre de l'environnement n'a pas plus d'influence. Elle est bien en train de faire du blocage.
Il s'agit bien, madame Rabin, d'une dérogation permanente puisqu'elle est codifiée. C'est pourquoi abaisser le seuil est un vrai sujet.
Monsieur Taugourdeau, je ne porte que des positions gouvernementales : qu'il s'agisse des professions juridiques ou de la publicité dans les stades, je défends la position gouvernementale, celle que je partage avec Mme Taubira comme avec Mme Royal et M. Braillard.
Les dérogations accordées aux stades de plus de 30 000 places survivront à l'Euro 2016. Vous rendez-vous bien compte de l'avantage monumental que vous allez donner à ces villes, en termes de publicité et de revenus ? Laissez intervenir les maires et ne tuez pas les villes moyennes !
La commission rejette l'amendement SPE1154.
Elle est ensuite saisie de l'amendement SPE730 de M. Jean-Yves Caullet.
Il s'agit d'un amendement de repli, par lequel nous proposons que l'implantation des dispositifs dérogatoires, en raison des conséquences des publicités sur le voisinage immédiat, soit soumise au conseil municipal ou au conseil communautaire concerné, plutôt qu'au seul maire ou président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent, afin de garantir une meilleure transparence dans la décision et une meilleure information de la population.
Suivant l'avis favorable du rapporteur thématique, la commission adopte l'amendement SPE730.
En conséquence, les amendements identiques SPE257 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE 425 de M. Patrick Hetzel tombent.
Si j'avais imaginé que mon amendement tombât, je me serais exprimé avant !
La métropole n'étant pas mentionnée dans l'amendement qui vient d'être adopté, j'invite la commission à s'assurer que la notion d'EPCI inclut bien la métropole de Lyon. Celle-ci a été expressément désignée, dans la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), comme une collectivité à statut particulier, au sens de l'article 72 de la Constitution. N'étant pas certain que la notion d'établissement public de coopération intercommunale recouvre lesdites collectivités, il me semblerait approprié de rajouter la métropole pour être sûr de couvrir tous les cas. Si vous oubliez M. Collomb dans cet article, je doute qu'il se réjouisse ! Il a, certes, été traité correctement dans la loi MAPTAM, mais s'il ne peut pas éclairer son nouveau stade, payé avec les fonds publics, cela ne collera pas !
Le ministre et le rapporteur thématique ont entendu le message. D'ici à l'examen du texte en séance publique, la question évoluera.
La commission adopte l'article 62 ainsi modifié.
Article 63 : Dispositions de coordination
La commission adopte l'article 63 sans modification.
Après l'article 63
La commission est saisie de l'amendement SPE1160 de M. Jean-Christophe Fromantin.
Cet amendement vise à s'assurer que les sommes versées par les entreprises pour soutenir la candidature de la France à l'Exposition universelle de 2025 peuvent être assimilées à du mécénat d'entreprise, pour autant que l'intégralité des fonds servent au financement de la candidature et non à la promotion de produits.
L'exposé de cet amendement est un peu négatif et peut-être trop direct. Il pourrait sans doute être rédigé différemment. Quoi qu'il en soit, je partage votre préoccupation, même s'il n'est pas nécessaire de l'inscrire dans le texte. La volonté du ministère des sports, que nous partageons, est d'engager une réflexion sur la meilleure implication des entreprises dans les grands événements et dans leur financement, qu'il s'agisse d'événements sportifs ou de grandes conférences. Nous avons la même préoccupation pour la COP21, dans la préparation de laquelle il est nécessaire d'impliquer les entreprises françaises, selon les modalités que vous proposez.
Bien que je partage vos objectifs, monsieur Fromantin, je vous demande de retirer cet amendement.
L'amendement SPE1160 est retiré.
Article 64 : Rapport annuel d'information sur les retraites chapeau
La commission examine l'amendement SPE1860 des rapporteurs.
Le présent amendement s'inspire des conclusions du rapport Charpin, rendu public ces jours derniers et qui traite des retraites chapeau. Il vise à ce que soit précisé dans le rapport de suivi de ces retraites les montants minimum et maximum des rentes servies, ainsi que le nombre de bénéficiaires potentiels, dans un objectif de transparence. Si quelques éléments sont, en effet, susceptibles d'être diffusés ici ou là, finalement les connaissances sur ces retraites sont peu précises. Le rapport décompte plus de 200 000 bénéficiaires pour une rente moyenne de 5 000 euros, à mettre en regard des cas très médiatisés qui seront abordés par plusieurs amendements que je défendrai par la suite.
La commission adopte l'amendement SPE1860.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel SPE1684 des rapporteurs.
Puis elle en vient à l'amendement SPE1129 de Mme Karine Berger.
L'article 64 permet enfin d'obtenir une information statistique concernant les retraites chapeau. Aussi proposons-nous d'aller au bout de la démarche et de faire en sorte que le rapport annuel soit mis à la disposition du public dans un format ouvert permettant sa libre réutilisation. Je sais que le Gouvernement est très attaché à la République numérique. Or ces données sont utiles pour comprendre le phénomène des retraites chapeau mais utiles aussi au débat public.
Je comprends votre volonté. Les services statistiques doivent disposer des données nécessaires au suivi de ces engagements de retraites d'entreprises, mais la mesure d'anonymisation que vous proposez paraît néanmoins a priori assez lourde, assez contraignante.
Je vous invite à retirer votre amendement, au bénéfice d'un travail sur des dispositions plus concrètes ne consistant pas à rendre des analyses publiques. Du reste, celles qui concernent les grands groupes le sont d'ores et déjà et font d'ailleurs partie des procédures définies par le code de gouvernement d'entreprises AFEP-MEDEF. Prévoir une information statistique plus lourde aurait un impact réel essentiellement sur les sociétés non cotées qui aujourd'hui n'émettent pas de telles statistiques. Je ne suis donc pas sûr que la voie que vous proposez soit la bonne.
L'amendement ne propose pas la publicité d'autres informations que celles qui figurent déjà dans le rapport prévu par l'article 64. Quant à l'anonymisation, il suffit tout simplement de ne pas mentionner la personne ni l'entreprise. Nous souhaitons que ces données soient disponibles sous forme numérique. J'y insiste pour la bonne compréhension du débat : il ne s'agit pas de donner de nouvelles informations, mais de donner la possibilité aux chercheurs, aux analystes d'utiliser le rapport dans un format ouvert.
Le problème, s'agissant de ces retraites chapeau, ce sont les mandataires sociaux qui touchent une retraite supplémentaire d'un montant particulièrement important, financée par l'entreprise par provisionnement, ce qui en fait un salaire différé, et exonérée de cotisations. Et cela n'est plus compris par les citoyens. Cependant, la notion de retraite chapeau recouvre également les retraites supplémentaires de millions de Français et, honnêtement, d'un point de vue politique, ce ne sont pas elles qui sont visées par cet article.
Nous avons bien une politique de publicité des données mais il faut la laisser prospérer d'elle-même. Je suis mal à l'aise à l'idée que, par le biais de l'article 64, on mène une politique dont la principale plus-value serait de faire porter aux ministères concernés – qui ne seraient pas forcément en mesure de le faire – ou aux entreprises la charge de l'anonymisation pour avoir une visibilité sur les millions de Français qui touchent des retraites supplémentaires. Concentrons-nous plutôt sur les quelques cas concrets qui nous ont conduits à commander un rapport à M. Charpin.
C'est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement qui sera de toute façon satisfait par notre politique d'open data.
Même avis, notamment en ce qui concerne les modalités de transmission de ces données. On peut certes envisager un format ouvert, mais il faudrait procéder à une nouvelle rédaction de l'amendement avant l'examen du texte en séance publique afin que tous les éléments puissent être transmis aux différents organismes chargés de réaliser les études.
Je maintiens mon amendement, car notre volonté d'assurer la transparence des données doit commencer par la publication des rapports que nous commandons.
La commission rejette l'amendement SPE1129.
Puis elle adopte l'article 64 modifié.
Article 64 bis (nouveau) : Conditionnement des retraites chapeau des dirigeants mandataires sociaux à la performance de l'entreprise
La commission est saisie de l'amendement SPE1861 des rapporteurs.
Cet amendement vise à soumettre à la performance de la société les engagements pris par une entreprise au titre des retraites chapeau. Il convient, en effet, de faire reposer la rente envisagée sur le travail, l'effort et le mérite.
Il est inadmissible que les mécanismes en question, qui sont des salaires différés pour les mandataires sociaux, soient totalement déconnectés de la performance de l'entreprise. Traiter ce sujet dans la loi constitue un durcissement par rapport au choix initialement fait en 2013 de traiter le problème à travers le code AFEP-MEDEF. M. Grandguillaume travaille – et nous y travaillerons avec lui – à la définition d'autres pistes qui pourront se révéler utiles pour aller encore plus loin. En attendant, l'amendement qu'il défend permet de franchir une étape en posant une contrainte en termes de performance. Il présente, en outre, l'avantage de ne pas chercher à dissuader par le biais de la fiscalité, méthode jusqu'à présent principalement suivie quelle que soit la majorité, et qui a touché non pas seulement des mandataires sociaux dont la rémunération a pu défrayer la chronique mais aussi des cadres de banque.
Outre le critère de la performance, on pourra aussi songer à celui de la fidélisation – le montant de la retraite chapeau de M. Varin avait ainsi fait d'autant plus polémique qu'il était resté très peu de temps au sein de l'entreprise.
Avis très favorable à l'amendement.
La commission adopte l'amendement SPE1861.
Après l'article 64
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements SPE1081 de Mme Karine Berger et SPE1296 de M. Joël Giraud.
Le présent amendement propose une évolution importante du droit en ce qu'il vise à aligner des pratiques françaises sur des pratiques allemandes plus que séculaires. Nous avons tous reçu des témoignages de créateurs de petites entreprises qui ont perdu la majorité du capital dès lors que leur start-up a pris une certaine ampleur. En Allemagne, un mécanisme protège ces actionnaires minoritaires à l'origine de l'entreprise. Il ne s'agit pas de leur donner tous les pouvoirs, mais de leur conserver celui d'influencer la stratégie de l'entreprise, y compris après avoir procédé à une augmentation de capital. Un exemple très connu en Allemagne est celui de la prise de contrôle de l'entreprise Wella par Procter & Gamble. Le grand groupe a voulu modifier complètement la stratégie de Wella, mais les actionnaires minoritaires, qui construisaient le pacte d'entreprise depuis des années, ont eu gain de cause devant la justice du fait de l'importance de la modification envisagée.
Il s'agit donc, ni plus ni moins, de donner la possibilité à des actionnaires qui ont défini la stratégie à l'origine du succès et de la croissance d'une entreprise de garder une certaine influence, y compris quand de grands groupes acquièrent la majorité de son capital.
Dans une note qui vous a été transmise, madame Berger, la direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy considère que la jurisprudence protège les actionnaires minoritaires et satisfait donc l'amendement. En outre, l'introduction dans le texte du terme « dominance » n'apparaît pas sûre à la DAJ. L'adoption d'un tel dispositif pourrait même, selon elle, dégrader la jurisprudence et la rendre moins protectrice pour les actionnaires minoritaires. Je suis prêt à poursuivre nos échanges et, à cette fin, je vous suggère de retirer votre amendement.
Cette question avait fait l'objet d'une proposition de loi de M. Assaf. Or la préoccupation du Gouvernement avait été la même compte tenu des nombreuses incertitudes juridiques que comportait le texte proposé.
Je suis un peu embarrassée par la réponse du ministre parce que l'amendement que nous proposons a été modifié à six reprises, depuis un an, au gré de nos échanges avec la DAJ. C'est ainsi, par exemple, que le terme « dominance » ne figure plus dans le dispositif proposé. Le but poursuivi avec cet amendement est de ne pas laisser à la jurisprudence le soin d'apprécier la façon dont les actionnaires minoritaires doivent être pris en compte. Et c'est parce qu'elle ne les a pas toujours protégés que nous défendons cette disposition bel et bien rédigée en fonction de cas concrets. Notre divergence me paraît moins porter sur la forme juridique – nous nous sommes, j'y insiste, alignés sur la note de la DAJ – que sur le fond du sujet.
Il n'y a pas de désaccord sur le fond. Quand nous aborderons le droit des actionnaires au regard des intérêts de l'entreprise, vous pourrez constater que le Gouvernement entend aller plus loin que le droit en vigueur dans bien d'autres pays. Je le répète, l'amendement tel qu'il est rédigé n'est pas conforme aux considérations de la DAJ. Or, pour être honnête, tant que les services juridiques ne me donneront pas leur aval, mon avis restera défavorable.
Dans la perspective du retrait de l'amendement, monsieur le ministre, pouvez-vous demander à vos services de nous donner une formulation idoine, car depuis un an, quand bien même nous tâchons de nous conformer aux notes qui nous sont transmises, votre réponse est toujours négative. Si vous nous communiquez, d'ici à mardi, une version qui soit, d'un point de vue juridique, validée par la DAJ, je retirerai volontiers mon amendement.
Nous avons tous à l'esprit des cas particuliers. N'oublions pas non plus les investisseurs extérieurs qui ont fait preuve de loyauté envers des actionnaires qui devenaient de fait minoritaires. Du reste, ces derniers restant actifs au sein de l'entreprise, il n'est pas facile de déterminer un éventuel préjudice d'une partie vis-à-vis de l'autre. Ce climat de confiance qui prévaut entre les parties peut être complètement perturbé par une intervention législative, qui pourrait faire du risque qu'une entreprise prend en entrant dans le capital d'une autre, un élément à apprécier comme donnant lieu à réparation. Autant je peux comprendre l'intention des auteurs des amendements, autant les moyens qu'ils proposent me semblent totalement disproportionnés. Le juge a déjà la possibilité de trancher des litiges manifestes, et si l'on systématisait le dispositif envisagé, nous aurions un vrai souci d'attractivité.
Je ne peux pas m'engager, madame Berger, car ce que vous cherchez à obtenir est tellement large que nous ne trouvons pas la rédaction qui convient. Il faudrait envisager une solution en fonction de cas particuliers. Nous avons travaillé avec des avocats spécialisés sur le sujet qui tous ont exprimé leurs craintes d'un changement législatif en la matière et qui tous ont souligné le fait que les Allemands sont en train de changer de système. Le plus simple serait de nous communiquer les cas concrets que vous cherchez à traiter afin que nous tâchions de clarifier les choses.
D'abord, le système en question fonctionne à merveille en Allemagne et a permis à des ETI de grandir, y compris quand leurs fondateurs sont devenus minoritaires. Je ne voudrais pas qu'on laisse penser qu'une intervention législative visant à instaurer un système qui, je le répète, fonctionne à merveille depuis plus de cent ans en Allemagne, pourrait avoir un effet immédiatement négatif en France.
Ensuite, monsieur le ministre, nous avons travaillé avec les avocats des entreprises qui ont vécu ces difficultés. Or ils nous assurent que le dispositif tel qu'il est rédigé convient. Je suis très gênée parce que voilà un an et demi que j'essaie de trouver un accord avec vos services sur la rédaction de l'amendement – comment dès lors ne pas penser que c'est bien le fond qui pose problème ?
Je retire mon amendement et, faute de nouvelle proposition de la part de la DAJ d'ici-là, je le représenterai en séance publique.
Les amendements SPE1081 et SPE1296 sont retirés.
La commission examine, en présentation commune, les amendements SPE1810 rectifié, SPE1812 rectifié, SPE1811 rectifié, SPE1814 rectifié, SPE1813 rectifié et SPE1815 rectifié du rapporteur général.
Ces amendements visent à introduire dans le code de commerce des articles destinés à définir le secret des affaires et à garantir sa protection civile et pénale. Dans une économie de l'innovation, la protection du capital stratégique des entreprises est déterminante pour préserver leur capacité de croissance et leur faculté de conquérir des marchés. Or la prédation est devenue une composante de la vie des affaires, qu'elle passe par l'espionnage industriel ou le détournement de procédure judiciaire. Nos entreprises sont juridiquement démunies face à ce phénomène, alors que de nombreux pays protègent les informations qui ne sont pas encore brevetables. De fait, la France accuse un retard préjudiciable.
L'amendement SPE1810 rectifié comble cette lacune en définissant le secret des affaires et en confiant le soin à chaque entreprise de protéger les informations qu'elle juge utiles. Ce sera le juge, in fine, qui appréciera la pertinence et la proportionnalité de la protection. Les dispositions ici présentées respectent la liberté de la presse et le droit syndical. Elles forment un ensemble conforme à la proposition de loi déposée par Bruno Le Roux et Jean-Jacques Urvoas le 16 juillet dernier, soutenue par le groupe SRC et par ailleurs réclamée par la délégation parlementaire au renseignement dans son rapport public pour l'année 2014. Le Gouvernement s'est prononcé sur cette proposition de loi lors d'une réunion interministérielle qui en a validé le contenu, le ministère de l'économie et la Chancellerie ayant été étroitement associés à son élaboration.
L'amendement SPE1814 rectifié vise à aménager la procédure civile pour protéger les secrets d'affaires d'une entreprise devant assurer sa défense. La phase contentieuse est trop souvent exploitée, voire détournée, dans le but de récupérer des secrets d'affaires. Dans la mesure où le précédent amendement instaure la protection civile du secret des affaires et offre de nombreux outils au juge pour sanctionner une violation, il convient d'éviter de laisser une faille dans le système. Le dispositif envisagé permet donc au juge de décider si les débats se tiendront ou non en chambre du conseil, à savoir à huis clos.
L'amendement SPE1812 rectifié tend à permettre aux entreprises d'invoquer l'article 47 de la directive 200643EC ou la convention de La Haye sur l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile et commerciale, afin de mettre en échec des demandes manifestement abusives concernant des informations stratégiques.
Autre élément très important, nous souhaitons protéger l'activité des journalistes qui dénonceraient des irrégularités. Ainsi, l'amendement SPE1813 rectifié introduit-il la notion de secret des affaires dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la plaçant à un niveau équivalent à la notion de secret professionnel. Il s'agit de sécuriser la capacité des journalistes à révéler des infractions commises par une entreprise.
Pour finir, l'amendement SPE1815 rectifié envisage les demandes extraordinairement diverses qui peuvent procéder de la volonté de profiter d'une procédure pour se livrer légalement à de l'espionnage économique. La France a recours à la commission rogatoire internationale qui assure une meilleure protection des droits de la défense. Dans cette optique, une loi a été adoptée en 1968 et modifiée en 1980 afin de faire obstacle à des demandes abusives. Toutefois, eu égard à la multiplication des procédures étrangères à l'occasion desquelles nos entreprises sont contraintes de communiquer des volumes de plus en plus considérables de documents dématérialisés, il convient de confirmer l'applicabilité de la loi de 1968 tout en renforçant son intelligibilité pour renforcer la sécurité juridique.
Cet ensemble de dispositions nous paraît indispensable pour assurer la sécurité, la créativité et la prospérité de nos entreprises innovantes.
Vous avez eu raison, monsieur le rapporteur général, de rappeler que la commission des lois a beaucoup travaillé sur la question.
Avis favorable à cette série d'amendements.
Ces amendements très importants ont l'avantage de s'appuyer sur le travail remarquable de nos collègues Bruno Le Roux et Jean-Jacques Urvoas. Nous en partageons l'intention, même si nous n'avons pas disposé du temps nécessaire à l'examen détaillé des dispositions proposées. Si la loi sur la sécurisation de l'emploi octroyait à l'inspection du travail le pouvoir de photocopier tout document lui paraissant utile, le présent amendement met les entreprises à l'abri des dangers auxquels ce genre d'investigation poussée à l'excès pouvait les exposer. Ne serait-ce que pour ce motif, les préoccupations du rapporteur général rejoignent les nôtres.
Néanmoins, j'y insiste, nous n'avons pas eu l'occasion d'examiner ces amendements en détail. Qui plus est, le mot « juge » a été prononcé à plusieurs reprises, ce qui nous conduira peut-être à émettre quelques réserves sur les procédures proposées. Compte tenu de ces remarques, les députés du groupe UMP s'abstiendront de manière positive pour prendre le temps d'étudier cet article volumineux d'ici à son examen en séance.
Les députés du groupe UDI sont, pour leur part, très intéressés par ces amendements. Comme nos collègues du groupe UMP, nous n'avons pas eu le temps de les lire et la référence au président du groupe SRC et au président de la commission des lois ne saurait constituer pour nous une garantie. Néanmoins, nous voterons ces amendements qui nous paraissent aller dans le bon sens, tout en nous réservant le droit de les sous-amender en séance publique.
Une étape importante est ici franchie puisque la protection de l'activité des entreprises n'existe pas en droit français. Aucun instrument juridique ne permet de protéger le secret des affaires. Les présentes dispositions s'inspirent des prescriptions internationales datant de trente ans auxquelles la France ne s'est toujours pas conformée, mais également de pratiques que d'autres pays nous opposent.
D'abord, on définit le secret des affaires ; ensuite, on confie à l'entreprise le soin de dire ce qu'elle considère être sa zone de protection ; enfin, on confie au juge le soin de décider si le secret a été violé ou non.
Le dispositif s'appuie sur deux types de procédure – l'une pénale, envisagée par le rapport Carayon, l'autre civile, visée par les directives européennes en cours d'élaboration –pour corriger les risques énormes que représente l'usage des procédures. La technique, pour obtenir ce que vous voulez savoir d'une entreprise, est d'intenter un certain nombre de procès puisque les règles de communication de pièces prévues en droit anglo-saxon permettent de disposer de tous les éléments possibles. Cela s'appelle « aller à la pêche ».
Ces procédures pénales ou civiles sont des instruments très utiles pour assurer la confidentialité des éléments du dossier de l'entreprise en cause. En somme, ces amendements répondent à toutes les questions qui se posaient.
Que prévoit-on pour les lanceurs d'alerte ? Le secret des affaires doit certes être protégé dans 99,9 % des cas, mais si l'on n'avait pas violé celui de certaines entreprises luxembourgeoises, par exemple, on n'aurait jamais rien su de leurs pratiques. Je pose donc une question naïve : comment articuler les deux attitudes ?
Comment appliquer le dispositif prévu par l'amendement SPE1810 rectifié dans le cadre de la recherche collaborative et de l'innovation ouverte ?
Je répondrai à la « naïveté » de Mme Berger que l'amendement SPE1810 rectifié modifie l'article L. 151-9 du code de commerce afin de préciser que l'article L. 151-8 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret, et à celui qui informe ou signale aux autorités compétentes des faits susceptibles de constituer des infractions aux lois et règlements en vigueur dont il a eu connaissance. Les lanceurs d'alerte sont donc protégés. Nous proposons, en effet, de renforcer la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
Quant à la question de Mme Erhel, la recherche collaborative implique par définition que les informations échangées ne donnent pas lieu à protection particulière, faute de quoi on devrait parler de recherche non collaborative.
Je suis favorable à cette série d'amendements.
Article 64 ter (nouveau) : Création de la notion juridique de secret des affaires
La commission adopte l'amendement SPE1810 rectifié.
Article 64 quater (nouveau) : Encadrement des modalités de communication d'informations ou de documents du Haut Conseil du commissariat aux comptes aux autorités étrangères
La commission adopte l'amendement SPE1812 rectifié.
Article 64 quinquies (nouveau) : Nouvelle exception à la publicité des débats en matière de procédure civile
La commission adopte l'amendement SPE1811 rectifié.
Article 64 sexies (nouveau) : Nouvelle exception à la publicité des audiences en matière correctionnelle
La commission adopte l'amendement SPE1814 rectifié.
Article 64 septies (nouveau) : Extension de l'exceptio veritas en faveur des journalistes au secret des affaires
La commission adopte l'amendement SPE1813 rectifié.
Article 64 octies (nouveau) : Modifications de la loi n° 68-678 du 26 juillet 1963, dite « loi de blocage »
La commission adopte l'amendement SPE1815 rectifié.
Après l'article 64
L'amendement SPE289 de M. Christophe Caresche est retiré.
Membres présents ou excusés
commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité
Réunion du samedi 17 janvier 2015 à 15 h 15
Présents. - Mme Karine Berger, M. Yves Blein, M. Marcel Bonnot, M. Jean-Louis Bricout, M. Jean-Jacques Bridey, M. François Brottes, Mme Colette Capdevielle, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Christophe Castaner, M. Gérard Cherpion, Mme Corinne Erhel, M. Richard Ferrand, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Laurent Grandguillaume, M. Patrick Hetzel, Mme Bernadette Laclais, M. Jean-Luc Laurent, M. Dominique Lefebvre, M. Arnaud Leroy, M. Gilles Lurton, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Frédéric Poisson, Mme Monique Rabin, M. Denys Robiliard, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gilles Savary, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alain Tourret, M. Stéphane Travert, Mme Cécile Untermaier, Mme Clotilde Valter, M. Francis Vercamer
Assistaient également à la réunion. - M. Denis Baupin, Mme Anne-Yvonne Le Dain, M. Emmanuel Macron