Séance en hémicycle du 14 avril 2015 à 22h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • CNCTR
  • avocat
  • finalité
  • interception
  • journaliste
  • médecin
  • protégée
  • renseignement
  • secret

La séance

Source

La séance est ouverte à vingt-deux heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif au renseignement (nos 2669, 2697, 2691).

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 5 à l’article 1er.

Avant d’appeler les amendements, je me permets de rappeler à chaque orateur que le temps de présentation d’un amendement est de deux minutes.

suite

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 5 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre de l’’intérieur, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, monsieur le rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, mes chers collègues, selon l’alinéa 23, le Premier ministre peut déléguer son pouvoir d’autorisation à six personnes. Ce pouvoir est considérable car la décision finale appartient au Premier ministre qui peut passer outre l’avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. En raison de l’étendue de ce pouvoir, nous souhaitons que la liste des personnes habilitées soit fixée par arrêté. Si leur nom ne doit pas être mentionné, au moins pourrons-nous connaître leur fonction. Dans tous les cas, davantage de transparence serait bienvenue. Tel est l’objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable car la publication obligatoire du nom de ces six personnes ne présente pas d’utilité en soi. Dans tous les cas, il s’agit bien d’une décision dont la responsabilité est endossée par le Premier ministre et non par le directeur de cabinet, le directeur adjoint du cabinet ou toute autre personne habilitée. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir dans la loi la publication d’un arrêté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de l’intérieur, pour donner l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne voudrais pas interrompre votre lecture du Canard enchaîné, monsieur le ministre, car je sais que vous y trouverez des renseignements importants, d’ailleurs moins chers que le système que vous nous proposez. Je ne pense pas que vous y trouverez la liste des six personnes mais j’aimerais bien la connaître, pour ma part. Dans le système britannique, les services de renseignement s’adressent aux ministres en charge des différents domaines. Vous avez listé dans l’un des alinéas précédents les différents services qui feront l’objet des décrets en fonction des différents ministères compétents, et nous avons passé une partie de l’après-midi à nous demander s’il fallait exclure ou non le ministère de la justice. Il semble que nous puissions déduire de votre texte que les six personnes sont des membres du Gouvernement en charge, par exemple, du ministère de la défense, du ministère des affaires étrangères, du ministère des affaires économiques mais nous n’en savons pas plus. S’agira-t-il aussi du coordinateur du renseignement auprès du Président de la République, poste que j’avais moi-même suggéré lors de la campagne de M. Sarkozy en 2006, et qui a été créé ?

Dans l’intérêt de tous et pour renforcer la transparence que l’on doit au pays, il ne serait pas absurde de connaître les six personnes mandatées par le Premier ministre pour exercer ce pouvoir. Cette disposition n’aurait rien d’exorbitant et ne gênerait en rien le pouvoir exécutif. C’est là un point clé. Il ne s’agit pas de désigner des fonctionnaires, que je sache, monsieur Urvoas. J’étais d’accord avec vous lorsque vous avez revendiqué l’autorité politique. Vous avez dit que l’avis de la Commission ne serait pas un avis conforme, que c’est une autorité administrative qui n’a rien à voir dans le régalien, qu’il nous appartient de revendiquer le pouvoir politique. Dites-nous qui est le pouvoir politique, c’est le minimum que nous pouvons vous demander dans cette maison. Sinon, nous ne servons à rien !

Si vous n’êtes pas capables de dire aux Français qui prend la décision politique de lancer une opération d’espionnage, je ne sais plus quoi vous dire. Je ne veux pas entrer dans les détails mais je veux savoir qui.

L’amendement no 5 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pourquoi le ministre ne répond-il pas ? Je vais finir par ne pas le voter, ce texte !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 272 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement rédactionnel tend à supprimer, dans chaque occurrence, le terme « dûment » qui n’ajoute rien à l’habilitation.

Par ailleurs, au II de cet amendement, il faudrait remplacer le terme « substitution » par « suppression ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’amendement devient ainsi l’amendement no 272 deuxième rectification.

L’amendement no 272 deuxième rectification, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie d’un amendement rédactionnel no 343 de M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur.

L’amendement no 343 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy pour soutenir l’amendement no 6 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les ministres de la défense, de l’intérieur, du budget et le garde des sceaux peuvent eux aussi déléguer leur pouvoir d’autorisation à trois personnes. Dans la lignée de l’amendement no 5 , cet amendement tend à ce que ces personnes soient désignées par arrêté.

L’amendement no 6 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 91 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les exigences tenant à la nature même des professions d’avocat et de journaliste et du mandat de parlementaire nécessitent la mise en oeuvre d’une procédure spécifique les concernant.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable. Il ne semble pas pertinent à la commission d’imposer, lors d’une demande concernant ces professions ou mandats, certaines garanties. Un tel dispositif paraît peu efficient et peu précis. On peine à savoir comment il se traduirait concrètement. L’idée de prendre en compte la spécificité de ces professions n’en est pas moins juste. C’est pourquoi la commission, sur ma proposition, a adopté un amendement écartant ces professions du champ de l’article L. 821-5 relatif à la procédure d’urgence. Nous aurons l’occasion sous peu de discuter de nouvelles garanties qui sont proposées par l’amendement no 386 deuxième rectification du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la présidente, je sais qu’il est tard et que vous avez envie d’expédier les travaux mais je vous demande tout de même de prendre le temps nécessaire pour étudier ce texte relatif aux libertés publiques !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur Lellouche, je vous arrête tout de suite. Personne, et en tout cas pas la présidence, n’a l’intention d’« expédier » ce texte. Ici, nous n’« expédions » pas. Nous donnons la parole au fur et à mesure de la discussion. Lorsque le Gouvernement ne répond pas, il assume sa responsabilité. La présidence n’a pas à exiger une réponse, ce qui ne signifie aucunement qu’elle « expédie ». Je vous rends la parole avec plaisir.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

N’expédions pas, en effet. Vous voyez, chers collègues, que ce n’est pas l’Union soviétique, à l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La présidence n’a pas de couleur, vous le savez bien, monsieur Lellouche.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C’est exact, madame la présidente, mais je vois que nos collègues de la majorité se gaussent. Aussi leur fais-je remarquer qu’il peut y avoir des différences de style dans la manière d’exercer la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout à l’heure, je n’ai pas obtenu de réponse à ma question relative à l’identité de ceux qui recevraient une délégation du Premier ministre, ce qui est extravagant ! À présent, nous débattons de la préservation du secret professionnel des avocats et des journalistes. Et cet amendement est repoussé d’un revers de main, sans même une réponse argumentée du Gouvernement ! Ce n’est pas possible de continuer ainsi. Si c’est comme ça, je m’en vais et je ne vote pas le texte !

Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes dans une mission commune consistant à lutter contre le terrorisme et à poursuivre d’autres finalités, et ce dans le cadre du droit, mais les professions de journaliste et d’avocat méritent d’être protégées. Elles le sont d’ailleurs par la Cour européenne des droits de l’homme dont les décisions, hiérarchie des normes oblige, s’imposent à la législation française – de façon parfois excessive, et même très excessive.

Au moins pour ces deux professions, je vous remercie de nous dire, monsieur le ministre, ce que vous comptez faire pour les protéger ! Si l’on commence à espionner les journalistes et les avocats, nous changeons de République ! Je vous pose cette question au nom de tous les journalistes et avocats de notre pays.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Nous allons bien entendu répondre de manière très précise à toutes vos questions. Je ne me souviens pas que vous ayez d’ailleurs posé une seule question dans cet hémicycle qui n’ait reçu une réponse précise du Gouvernement.

Cela étant, je voudrais poser une question à mon tour pour être sûr de répondre avec le niveau de précision que, légitimement, vous exigez : quel est l’article du projet de loi qui met en cause la liberté des avocats, des journalistes ou des professions protégées ? À quel article, quel alinéa – je suis prêt à répondre dans le détail – ce texte de loi met-il en cause les libertés dont vous redoutez qu’il y soit porté atteinte ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour répondre à la question que vient de poser M. le ministre, il faut lui poser une autre question : quel article protège les avocats, les journalistes, les médecins dans l’exercice du secret professionnel ? Nous serions ravis que le ministre nous réponde.

Notre représentant à la commission des lois, M. Coronado, a déposé un certain nombre d’amendements relatifs à la protection de ces professions qui ont besoin du secret professionnel, mais ils ont été rejetés. M. le rapporteur s’est exprimé sur ce sujet et nous attendons du Gouvernement qu’il confirme sa volonté de protéger ces professions. Contrairement à M. Lellouche, je ne m’exprime pas au nom des avocats, des journalistes ou des médecins mais au nom d’un certain nombre de principes démocratiques que nous devons respecter si nous voulons continuer à vivre dans une République respectable, maintenir l’État de droit et les libertés.

Rappelons tout de même que le texte relatif au secret des sources des journalistes n’a pas abouti. Les journalistes sont déjà fragilisés parce que le secret des sources n’est pas protégé comme il peut l’être chez l’un de nos voisins, la Belgique. Le Gouvernement, lors de la discussion de ce texte qui n’a pas abouti, avait refusé de s’inspirer du modèle belge. Il est par conséquent juste de demander au ministre comment il entend protéger ces professions très vulnérables aux outils de renseignement que vous mettez en place.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Je constate, de par la réponse de M. Mamère, qu’aucun article de ce texte de loi ne porte atteinte aux professions protégées puisqu’il me demande quels articles garantissent leur protection. Or, ce texte ne se rapporte pas à la protection des professions protégées mais au renseignement, et a pour principale mission d’assurer l’encadrement de l’activité des services de renseignement. Il ne contient pas d’élément sur les professions protégées parce que, comme l’a dit très justement M. Lellouche, ces professions ont toutes les garanties d’être protégées par les textes de nature conventionnelle et par un certain nombre de principes constitutionnels auxquels la loi doit se conformer.

Cela étant, comme nous sommes particulièrement vigilants sur ces sujets, nous introduisons dans le texte de loi, pour ces professions, des dispositions très protectrices. Ces professions sont ainsi exclues de la procédure d’urgence. Et d’autre part, comme nous entendons un certain nombre d’interrogations qui se sont exprimées, nous souhaitons aller beaucoup plus loin encore dans la protection de ces professions, en prenant des dispositions particulières.

Tout d’abord, en cas de procédure d’urgence, l’instance administrative indépendante doit pouvoir statuer de façon collégiale, ce qui garantit la protection de ces professions. Par ailleurs, nous souhaitons que, dans ce cadre, les transcriptions des interceptions de sécurité auxquelles il pourrait être procédé soient intégralement versées à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, pour que le contrôle puisse se faire de façon absolument complète.

Ces éléments de protection qui seront proposés par le Gouvernement et précisés par la garde des sceaux sont de nature à répondre à la totalité des préoccupations que vous exprimez.

D’ailleurs, nous le souhaitons, parce que ce texte est d’abord destiné à encadrer les activités des services de renseignement, à conforter les libertés publiques et à faire en sorte, ce qui est nouveau, qu’aucune technique de renseignement n’échappe à un avis de la haute autorité indépendante, d’un contrôle juridictionnel et d’un contrôle du juge judiciaire quand une infraction pénale est constatée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je tiens simplement à replacer l’amendement tel qu’il est rédigé dans le contexte du dispositif. Il nous est proposé d’insérer l’alinéa suivant : « Les moyens de garantie de préservation du secret professionnel des avocats et des sources des journalistes ainsi que de protection de l’exercice du mandat de parlementaire, lorsqu’il s’agit d’une demande les concernant ». Or, cet alinéa serait ajouté à la liste des précisions devant figurer dans la demande d’autorisation de mise en oeuvre du dispositif. Il est donc tout à fait anachronique de faire en sorte que la demande d’activation du processus précise les conditions dans lesquelles est garantie la préservation du secret professionnel, alors même – je le rappelle – que cette garantie est un droit fondamental, notamment pour la profession d’avocat.

Ainsi, à chaque fois que l’on entend préciser que le processus ne concerne pas les avocats, on entame le caractère fondamental du principe du secret professionnel et des conditions dans lesquelles il est préservé.

Ensuite, s’agissant de l’urgence, M. le ministre a rappelé que le débat en commission a permis d’ajouter l’alinéa 43 précisant que la procédure d’urgence ne s’applique pas aux professions protégées ni aux titulaires d’un mandat protégé.

Le présent amendement me paraît donc surabondant et, comme le laissait entendre M. le président de la commission des lois, il est quelque peu anachronique de préciser dans quelles conditions la demande d’autorisation ne s’applique pas aux professions réglementées.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

M. le ministre nous demande quel article pourrait mettre en cause ces professions protégées – et bien d’autres encore. Je n’ai pas souhaité me faire le porte-parole de telle ou telle profession, monsieur Mamère, mais celles-ci sont particulièrement importantes pour l’exercice de la démocratie. La vérité se fait par les journalistes et par la presse ; la défense des citoyens par les avocats et les juges – que l’on peut inclure en l’occurrence. Il s’agit de professions clés dans la structuration d’une démocratie.

Toujours avec l’air de ne pas y toucher – j’ai invoqué Raminagrobis et cela se confirme de plus en plus, tant vous tournez avec élégance autour du droit –, M. le ministre me demande donc quel est l’article qui menace ces professions et la démocratie. Mais c’est tout l’ensemble, mon cher ministre ! Nous voici face à un système où le Premier ministre et les personnes non connues qu’il désignera pourront prendre une décision souveraine après avis – non conforme – d’une commission. Autrement dit, ils décideront seuls. On ignore en outre dans quelles conditions la commission prend ou non la décision d’autoriser le dispositif. On sait que cette décision doit être proportionnelle, mais on n’en ignore le contenu puisqu’il a été dit hier que l’on excluait la subsidiarité. En somme, on ignore ce qui est autorisé, même si l’on sait que c’est proportionnel en fonction du jugement de la commission, voilà tout. On sait aussi qu’aucun traitement particulier n’est accordé à des professions clés dans un système démocratique.

Vous me demandez quel article est en cause ? C’est l’article 1er, monsieur le ministre, et nous sommes en plein dedans. La question qui se pose est donc la suivante : s’il y a un risque – et vous avez bien voulu reconnaître tout à l’heure, à 20 heures 31, qu’il y avait peut-être un risque –, dites-moi où est le contrôle ! Si ce contrôle ne prend pas la forme d’un avis conforme de la Commission, alors où est-il ?

Nous y reviendrons plus tard, mais ne feignez pas de croire que votre article ne comporte ni danger ni problème. Vous n’acceptez pas même de nous indiquer qui est susceptible d’être habilité à déclencher les enquêtes ! Aucune protection n’est prévue pour les professions en question ! Et vous me demandez quel article est en cause ? Nous y sommes, monsieur le ministre : c’est l’article 1er.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Je vais une nouvelle fois, monsieur Lellouche, répondre très précisément à votre question. En ce qui concerne l’arrêté qui déterminera les personnes qui, pour le compte des ministres, peuvent être habilitées à déclencher l’usage de ces techniques, il n’a jusqu’ici jamais été publié. Pour quelle raison ? En premier lieu, parce que ce sont les ministres qui endossent la responsabilité de cette décision. Ensuite, les personnes qui déclenchent le processus pour le compte d’un ministre appartiennent parfois aux services, et leur nom n’a pas à être dévoilé.

Peu importe, au fond : une fois l’arrêté publié, je vous donnerai le nom en question et je prends l’engagement – je demande que cela figure au compte rendu de la séance – de transmettre l’arrêté en question à la délégation parlementaire au renseignement. Ainsi, les parlementaires qui contrôlent l’activité des services de renseignement pourront accéder à son contenu.

En effet, le Gouvernement n’a aucunement la volonté de dissimuler quoi que ce soit au Parlement concernant ces dispositions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s’agit donc de fonctionnaires, et non de membres du Gouvernement !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Le texte prévoit que les membres du Gouvernement désignent des délégataires, lesquels sont des fonctionnaires. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas jusqu’à présent publié ces noms, monsieur Lellouche, puisqu’il s’agissait de fonctionnaires pouvant, pour certains d’entre eux, exercer des activités relevant du secret de la défense nationale. Cependant, parce que nous n’avons rien à cacher et parce que je souhaite percer tous les faux procès les uns après les autres, car la démarche du Gouvernement est sincère et transparente, je suis tout à fait prêt à transmettre les éléments en question à la délégation parlementaire au renseignement.

D’autre part, vous déplorez l’existence d’un ensemble d’éléments dont on ignore le contenu. Le texte prévoit précisément le contraire, pour la première fois dans l’histoire de la République – c’est la raison même pour laquelle nous l’avons élaboré : il n’est pas arrivé comme jaune d’oeuf sur toile cirée, par le caprice de je ne sais qui et suite à un événement arrivé on ne sait où ! Je rappelle à tous les parlementaires que le principe de ce texte a été décidé par M. Ayrault après l’affaire Snowden afin d’encadrer l’activité des services de renseignement en France.

C’est ainsi qu’il définit les finalités pour lesquelles les techniques peuvent être mises en oeuvre, les techniques mobilisées pour chacune de ces finalités, la liste des services susceptibles d’en déclencher l’emploi et les modalités des contrôles qui s’appliqueront au Gouvernement et aux services concernés en raison des décisions qu’ils auront prises de recourir auxdites techniques.

Il n’y a pas dans ce texte le moindre article qui soit attentatoire aux libertés prévues par l’article 66 de la Constitution, maintes fois interprété par le juge constitutionnel – comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire.

Je l’ai déjà souvent répété depuis le début de ce débat et je le fais à nouveau ici, puisque vous réitérez une inquiétude que je ne considère pas comme illégitime – dès lors qu’elle s’exprime, c’est qu’elle est sincère. Je réponds donc tout aussi sincèrement avec des arguments précis aux interrogations que vous formulez.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La question, déjà posée en commission et réitérée ce soir, est réelle : elle porte sur les modalités de recueil de renseignements concernant trois professions particulièrement signalées – magistrat, avocat et journaliste – ainsi que la mission de parlementaire. C’est bien parce que cette question se pose – à notre initiative – que vous allez sous peu, madame et monsieur les ministres, défendre des amendements du Gouvernement à l’alinéa 46 pour, précisément, prévoir un régime particulièrement protégé concernant ces professions et cette mission.

Ne sous-estimons pas la difficulté : écouter un membre du Parlement, un journaliste, un magistrat ou un avocat représente une intrusion extrêmement sérieuse dans l’exercice d’une liberté particulièrement protégée et appelle un régime très encadré. Il me semble que c’est l’objet de l’amendement que le Gouvernement présentera dans un instant. Il est heureux que cet amendement soit défendu dans l’hémicycle, monsieur le ministre, car sur cette question très sensible, nous n’étions pas à ce stade pleinement rassurés.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Vous avez été très assidu aux travaux en commission, monsieur Larrivé. Je me permets donc de vous rappeler qu’à une question concernant les professions protégées posée à cette occasion, j’ai très vite répondu que nous avions déjà rédigé un amendement et que nous étions en discussion avec M. le rapporteur afin de décider qui, de lui ou du Gouvernement, le défendrait.

Au cours de la préparation de ce projet de loi, le Gouvernement, parfaitement conscient de la question, a envisagé d’introduire des dispositions précises concernant les professions protégées, parce qu’elles sont garantes de la démocratie, qu’elles détiennent des secrets professionnels touchant à la protection de l’enquête, de l’instruction, du délibéré et des droits de la défense auxquels nous sommes attachés et que nous ne voulons pas mettre en péril.

C’est pourquoi ces professions ont été signalées dès les dispositions concernant la procédure d’urgence, afin de les en exclure. Je répète que nous avons envisagé d’emblée d’introduire des dispositions précises concernant la protection de ces professions, afin qu’il ne se crée aucun écart inexplicable entre la protection qui leur est garantie dans le cadre des procédures judiciaires et celle qui leur est due dans le cadre de ces dispositions administratives.

Le Gouvernement ne se précipite pas pour répondre à telle ou telle interpellation. Le sujet était déjà traité au stade de l’écriture préparatoire du projet de loi. Lorsque nous en avons parlé en commission, j’ai présenté le texte de l’amendement du Gouvernement car il était déjà rédigé, en précisant clairement à quelle partie du texte il était destiné. Il ne restait en suspens que la discussion que l’exécutif et le législatif – qui travaillent en parfaite intelligence – ont en toute cordialité afin de savoir qui des deux défendrait les dispositions en question. À cet égard, vous avez eu raison, monsieur le député, de rappeler que cet amendement porte sur l’alinéa 46 ; nous y reviendrons donc en temps voulu.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je rappelle que j’ai en effet posé cette question lors de l’examen en commission ; le Gouvernement, alors représenté par trois ministres – Mme Taubira et MM. Cazeneuve et Le Drian – avait en effet donné cette réponse. C’est la raison pour laquelle je ne me suis pas précipité, puisque l’amendement no 386 deuxième rectification sera bientôt examiné.

Je rappelle néanmoins qu’aux professions protégées qui ont été mentionnées doit s’ajouter – à l’initiative du groupe écologiste du Sénat – le statut des lanceurs d’alerte, pour lesquels la question de la protection dont ils doivent bénéficier reste entière. Je crois savoir que M. le rapporteur y est très sensible.

L’amendement no 91 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 172 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement porte sur le contenu de la demande d’autorisation de recours à des techniques de renseignement. Le projet de loi prévoit que la demande précise la ou les techniques à mettre en oeuvre, la ou les finalités poursuivies, le ou les motifs des mesures et la durée de validité. J’estime qu’il serait sage d’ajouter que cette motivation doit être « suffisante, pertinente et sincère ». Cela correspond à l’une des recommandations émises par le Défenseur des droits dans l’avis qu’il a rendu sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La commission a repoussé cet amendement, non sans souligner l’excellence du travail de M. Coronado, qui a lu avec attention tous les rapports de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, et qui a naturellement constaté qu’il était d’ores et déjà prévu, comme le dit le président actuel de cette commission, que la motivation soit « suffisante, pertinente et sincère ». C’est précisément parce que cela se fait dans le silence de la loi qu’il est inutile de le répéter. Je connais trop M. Coronado pour ne pas savoir qu’il comprend parfaitement que si la motivation est insuffisante, non pertinente et mensongère, elle n’est pas une motivation. C’est la raison pour laquelle l’amendement a été repoussé.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis.

L’amendement no 172 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 223 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’autorisation de mise en oeuvre des techniques de recueil de renseignements est délivrée pour une durée maximale de quatre mois et renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée que l’autorisation initiale.

Comme je l’ai indiqué en commission, il me semble important d’obtenir un avis exprès de la CNCTR en cas de renouvellement de la demande afin que, en l’absence de réponse de l’administration sur une demande formulée, ce ne soit qu’à titre exceptionnel.

D’autre part, les dispositifs de surveillance par les services de renseignement peuvent, comme cela a été dit, entraîner des conséquences particulièrement graves sur la protection de la vie privée et des données personnelles. N’y voyez aucune attaque contre la volonté et la bonne foi du Gouvernement, monsieur le ministre, mais il me semble évident que les autorités ne peuvent faire l’économie d’un avis exprès de la CNCTR. Cela me semble une évidence.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La commission a repoussé cet amendement. Le projet de loi prévoit d’ores et déjà l’avis exprès de la CNCTR en le réservant aux demandes visant l’introduction d’un dispositif dans un véhicule ou dans un lieu privé, ou encore un système de traitement automatisé de données. Autrement dit, la commission a souhaité prévoir un avis exprès pour les techniques les plus intrusives. Une gradation est prévue, des techniques les moins intrusives aux plus intrusives et, à chaque fois, des garanties supplémentaires sont données. Demander systématiquement l’avis exprès aura pour principale conséquence de remettre en cause cette gradation.

S’agissant des dispositifs techniques de proximité, nous savons que d’autres garanties sont prévues : l’inscription dans un registre spécial tenu à la disposition de la CNCTR, la mise en oeuvre par des agents individuellement désignés, la destruction des informations ou des documents recueillis dans un délai maximal de trente jours dès qu’il apparaît qu’ils ne sont pas en rapport avec l’autorisation de mise en oeuvre.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Même avis.

L’amendement no 223 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 345 .

L’amendement no 345 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Pierre Lellouche, pour soutenir l’amendement no 66 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable. Le texte prévoit un délai maximal. Il sera peut-être moins long, mais il n’est pas nécessaire de le raccourcir dans la loi.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Même avis.

L’amendement no 66 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie d’un amendement no 114 , qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 405 , 417 et 400 .

La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il se trouve qu’un amendement du Gouvernement ou de la commission, que nous examinerons ultérieurement, reprend l’objectif qui est le nôtre de prévoir une protection spécifique pour certaines professions compte tenu de la nature de leurs missions et de ce qu’elles signifient en termes de démocratie.

Nous pourrions appliquer la même procédure aux médecins, au titre de la protection du secret médical. Cette profession n’est pas visée par mon amendement mais elle fait l’objet d’un sous-amendement de M. Coronado.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie de deux sous-amendements, nos 405 et 417 , pouvant faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Sergio Coronado, pour les soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voulais dire à M. le président de la commission des lois, qui m’a félicité de lire les rapports, que je lis aussi les amendements de mes collègues, ce qui me permet de les sous-amender…

Le sous-amendement no 405 vise à prévoir la défense des magistrats, profession protégée par le code de procédure pénale.

Le sous-amendement no 417 étend cette protection aux médecins, qui sont soumis au secret médical. Cette disposition me paraît évidente, comme l’ont indiqué de nombreux acteurs de l’internet et de l’e-médecine à propos des données médicales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur, pour soutenir le sous-amendement de conséquence, no 400, et donner l’avis de la commission sur l’amendement no 114 et sur les sous-amendements nos 405 et 417 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La commission a émis un avis favorable à l’amendement et aux sous-amendements. Néanmoins le Gouvernement a déposé un amendement no 386 deuxième rectification qui crée un nouvel article L. 821-7, lequel instaure cette protection pour toutes les professions mentionnées dans l’amendement et les sous-amendements.

Le plus pertinent serait que M. Morin retire son amendement au profit de celui du Gouvernement. Toutefois, s’il le maintient, la commission émettra un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis, qui vaut pour tous les amendements portant sur ce sujet : nous avons rédigé un amendement, à l’alinéa 46, qui comporte toutes les précisions nécessaires. Il ne s’agit pas d’une divergence d’appréciation mais de la place de cette précision dans le texte.

L’amendement no 114 est retiré ; les sous-amendements nos 405 , 417 et 400 n’ont plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie de l’amendement rédactionnel, no 344, de M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur.

L’amendement no 344 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 53 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à préciser que si la CNCTR estime que l’avis de son président est discutable, elle peut se réunir et formuler un nouvel avis. Je considère que c’est la moindre des choses. On voit d’ailleurs le pouvoir donné au président, ou à son représentant. La CNCTR a un pouvoir surtout à travers lui.

Même si cela reste discutable, cette session de rattrapage pour les autres membres ne doit pas être un gadget. Aussi, pour que tout soit bien clair, il convient de préciser que l’avis formulé par l’ensemble de la Commission annule et remplace l’avis initial, ce qui, dans le texte actuel, n’est pas suffisamment clair.

Il est important de bien repositionner les choses et de préciser que la Commission dans son ensemble est souveraine, en tout cas davantage qu’une seule personne.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis favorable, car cet amendement apporte une précision utile. Dès lors que deux avis ont été successivement rendus, il ne faudrait pas laisser penser qu’ils peuvent être concurrents.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Avis favorable.

L’amendement no 53 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 273 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 35, qui dispose qu’en l’absence d’un avis remis dans les délais, celui-ci est réputé rendu.

Dans le cas d’un avis qui ne serait pas conforme, puisque nous en avons décidé ainsi, s’il n’y a pas d’avis du tout, il sera réputé rendu. Je considère que ce dispositif offre une protection moindre en matière de garantie des libertés. La protection domiciliaire ou le secret de la correspondance s’appuient sur une notion de liberté individuelle – je peux à ce titre vous citer, si vous le souhaitez, les décisions du Conseil constitutionnel.

Outre cet affaiblissement, je crains que ce membre de phrase ne conduise le Gouvernement à ne pas allouer à la Commission les moyens nécessaires à son fonctionnement. En effet, dès lors que le Gouvernement aura besoin d’un avis pour prendre une décision, les moyens seront nécessairement accordés à la Commission de façon à ce que cet avis soit rendu. Mais s’il peut se passer de cet avis et si la Commission n’a pas les moyens de rendre ses avis dans les délais très brefs qui lui sont impartis, il devient possible – je ne dis pas que c’est le but – qu’elle n’obtienne pas les moyens suffisants pour fonctionner correctement et remplir sa tâche.

C’est la raison pour laquelle il me semblerait vertueux de supprimer ce membre de phrase. On tablerait sur le fait qu’il faut nécessairement obtenir un avis. Compte tenu de la composition de la Commission, les premiers avis seront rendus par des magistrats. Je ne doute pas de leur conscience professionnelle et je suis sûr qu’ils feront tout ce qui est nécessaire pour rendre les avis dans les délais, sous réserve qu’on leur en ait donné les moyens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comme l’indique l’exposé sommaire, il s’agit d’un amendement de cohérence avec l’amendement instituant le caractère conforme de l’avis donné par la Commission. Dans la mesure où l’Assemblée ne l’a pas voté, le présent amendement devrait être retiré. S’il ne l’était pas, avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il n’a pas échappé à notre rapporteur que j’ai motivé mon amendement autrement que par l’argument figurant dans l’exposé sommaire.

Je maintiens naturellement cet amendement. J’ai en effet indiqué dans l’exposé sommaire qu’il s’agissait d’une démarche de cohérence avec le caractère conforme de l’avis, mais la suppression de la seconde phrase de l’alinéa 35 est d’autant plus importante que l’avis n’est pas conforme.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis défavorable.

L’amendement no 273 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 8 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il n’est pas inutile de nous arrêter un instant sur l’alinéa 35. Autant je suis séduit par le principe du « silence vaut accord » dans les relations entre l’administration et les citoyens, même s’il comporte un nombre incalculable d’exceptions, autant je suis très sceptique quant à l’application de ce principe pour cette procédure.

Posons-nous la bonne question : si la CNCTR n’a pu rendre son avis dans les temps, est-ce que cela signifie forcément qu’il faille donner au Gouvernement le feu vert, sans aucune réserve ? Non ! Imaginons que la Commission soit surchargée et ne donne pas de réponse. Dans ce cas, une demande d’autorisation risque de passer à la trappe, alors qu’elle était potentiellement contestable.

Ce n’est qu’une hypothèse mais, encore une fois, il faut faire en sorte que le pouvoir de contrôle de la CNCTR soit réel. Or s’il est réel, monsieur le ministre, il est contraignant. Une CNCTR qui ne serait qu’une caisse d’enregistrement ne servirait à rien. Tel est le sens de l’amendement que je propose.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Après les éclaircissements du Gouvernement et de la commission et les questions posées par nos collègues, notamment M. Tardy, nous comprenons qu’à ce stade, la Commission, et c’est parfaitement logique, n’a ni pouvoir normatif ni rôle régalien. Le Gouvernement la saisit pour avis, en réalité il saisit l’un de ses membres, et celui-ci, en cas de problème, peut demander leur avis à un ou plusieurs autres membres, mais si la Commission ne se réunit pas, ce n’est pas bien grave… Mais à ce stade, il ne se passe toujours rien. Si aucun avis n’est rendu, on continue quand même !

Je veux bien admettre l’urgence, la rapidité qu’exige la lutte contre l’espionnage industriel ou le terrorisme, et je peux imaginer que l’exécutif ait besoin de flexibilité et de réactivité.

En revanche, nous avons besoin d’une augmentation des contrôles. Or, pour l’instant, je ne la vois pas.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Toutes les demandes qui vous ont été formulées concernant les réunions, l’’avis conforme, rien de tout cela n’existe dans votre texte ! Il faudra bien, dans une phase suivante, que nous en arrivions au contrôle !

Nous reviendrons sur cette notion de contrôle lorsque nous examinerons les amendements que nous avons déposés, mais pour l’instant, comme l’a souligné notre collègue Tardy, la Commission de contrôle n’est qu’une chambre d’enregistrement, et l’exécutif fait exactement ce qu’il veut, sans qu’aucune protection soit prévue pour quiconque, y compris pour les parlementaires. En régime normal, en dehors de l’urgence, le pouvoir – vous aujourd’hui, demain je ne sais qui –fait ce qu’il veut ! Et après, vous nous dites qu’il n’y a aucun problème pour les libertés publiques. Vous m’excuserez, mais je considère pour ma part que c’est un peu limite…Mais nous en jugerons en fonction des contrôles qui figureront ou non dans cet article.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Monsieur Lellouche, je tiens à vous répondre car je ne voudrais pas que vous soyez plus inquiet que vous ne semblez l’être.

Vous m’interrogez sur l’effectivité du contrôle et c’est une excellente question. Vous nous expliquez qu’à partir du moment où le Gouvernement a la possibilité de se passer de l’avis de la CNCTR pour agir, il n’y a pas d’effectivité du contrôle. Je comprends votre raisonnement, qui appelle une réponse extrêmement précise.

La CNCTR est une haute autorité administrative qui donne un avis consultatif. Si le Gouvernement ne pouvait pas agir aussi longtemps que l’avis n’est pas donné, cela signifierait que cette haute autorité administrative, si elle prend beaucoup de temps pour rendre cet avis, peut bloquer le fonctionnement du dispositif. C’est la raison pour laquelle, dans le dispositif tel qu’il est conçu, le Gouvernement peut agir même si l’avis de la commission consultative n’a pas été rendu. Cela n’empêche pas celle-ci de contrôler, même si l’opération est enclenchée, les conditions dans lesquelles elle l’a été.

Il s’agit donc d’une autorité consultative, à qui on n’impose pas un délai, et le Gouvernement n’est pas obligé d’attendre son avis pour agir : tout cela ne signifie pas que le contrôle n’existe pas mais qu’il peut, même lorsque le dispositif est enclenché, être effectué par la haute autorité.

Si nous avons adopté ce raisonnement c’est que nous ne voulions pas, dans la mesure où il s’agit d’une autorité consultative, instaurer un avis conforme.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les arguments du ministre ne nous convainquent pas. Comme l’ont dit nos collègues de l’UMP, le silence ne peut valoir accord dans un secteur aussi sensible que le renseignement et s’agissant des de décisions de ce type, d’autant qu’on a accordé un pouvoir important au Premier ministre pour la mise en oeuvre de techniques de renseignement qui sont très intrusives.

D’autre part, ainsi que le précise le texte que vous nous soumettez, il suffit d’une seule personne de la CNCTR pour accorder une autorisation. Mais si le président veut revenir sur ce qui a été décidé, il lui faut convoquer l’ensemble des membres de la Commission. La manière dont est traitée cette Commission est assez extravagante. Le président de l’actuelle commission, M. Delarue, a eu raison d’exprimer son inquiétude. Il a d’ailleurs précisé que l’actuelle commission pouvait rendre son avis dans un délai inférieur à vingt-quatre heures. Je ne vois donc pas pourquoi nous nous passerions de cette autorisation, qui est nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’essaie de comprendre le cheminement de cette affaire, en respectant parfaitement le besoin de flexibilité et de rapidité de l’action de l’exécutif. À ce stade du texte, nous disposons d’un système dans lequel le Gouvernement a toute latitude pour faire ce qu’il a besoin de faire. Fort bien ! Selon vous, monsieur le ministre, initier une action de renseignement sur la base de l’avis d’une personne, voire sans aucun avis du tout, n’empêchera pas la commission de contrôler a posteriori. Je ne mets pas en doute votre parole mais dans la pratique, et nous avons vous et moi une petite expérience du fonctionnement de l’État, tout dépendra des membres de la Commission. S’ils n’ont pas émis un avis sur une demande de renseignement, il faudra qu’ils trouvent l’énergie ou le courage politique de se dresser ensuite face à leur ministre voire au Premier ministre et lui dire : « Nous n’avons rien dit mais nous pensons que ce n’est pas bien. Peut-être même que nous allons engager un recours. ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À ce stade du débat, je ne porte pas de jugement, je dis simplement que tout dépendra de la composition de la Commission. C’est pourquoi j’ai demandé tout à l’heure où est le contrôle. Vous avez beaucoup de pouvoir, mais où est la capacité de contrôle ? Pour l’instant, je ne la vois toujours pas. Mais nous y reviendrons tout à l’heure, monsieur le ministre.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

L’autorité administrative est indépendante. Elle n’a donc pas de ministre et d’ailleurs c’est ainsi qu’est conçu le dispositif.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Les membres de l’autorité administrative indépendante sont nommés par le vice-président du Conseil d’État s’ils sont magistrats administratifs et par la Cour de cassation s’ils sont magistrats du siège. Il n’existe donc aucune relation de subordination ni de dépendance des membres de la CNCTR envers le ministre et c’est très bien ainsi.

Deuxièmement, car vous posez des questions très concrètes supposant de se placer dans des cas très concrets, monsieur Lellouche, dès lors que la technique mobilisée pour telle ou telle finalité est très intrusive, comme le disait à l’instant Noël Mamère, on peut légitimement penser que les magistrats du siège et du parquet, compte tenu de toutes les vertus que vous leur prêtez, se mobiliseront avant que la technique ne l’ait elle-même été pour dire tout le mal qu’ils en pensent et rappeler le Gouvernement à ses devoirs. Pourquoi sinon prévoir partout des magistrats s’ils sont dépourvus de capacité d’interpellation du Gouvernement lorsqu’il enfreint les règles que vous redoutez de voir remises en cause ?

Si donc la technique est très intrusive et susceptible de porter atteinte à la vie privée de façon illégitime, on ne peut pas ne pas imaginer que la CNCTR rendra un avis préalablement à l’engagement de ces techniques par l’exécutif. Si ces techniques sont mobilisées en contrevenant à la loi, car c’est bien le seul problème susceptible de se poser et pour ma part je ne vois pas des problèmes partout, la CNCTR pourra solliciter le contrôle juridictionnel. Ainsi, en matière d’effectivité, d’efficience et de puissance du contrôle, ce qui existait jusqu’à présent est très sensiblement conforté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’ai un peu le sentiment, à entendre mon collègue Lellouche, qu’il trouve pour chaque trou que l’on fait dans son argumentation une cheville pour le boucher ! Vous avez dit tout à l’heure, mon cher collègue, que le contrôle est inexistant dans l’hypothèse où l’avis a priori est défaillant. Il faut déjà qu’il le soit ! On peut supposer que la CNCTR est organisée de telle sorte qu’elle ne rendra pas d’avis sur des affaires simples dans lesquelles qui ne dit mot consent. Une autorité administrative indépendante normalement constituée et qui se respecte se penchera de façon précise sur les cas qui font difficulté.

Mais admettons qu’il n’y ait pas d’avis rendu, pour une raison x ou y, puisque vous cherchez à balayer tout le spectre des possibles. Un contrôle a posteriori sera alors effectué, comme on vient de vous le dire. À quoi vous répondez : « Oui, à condition qu’ils osent ! » Mais si nous mettons en place une autorité de ce type en pensant qu’elle se défaussera du contrôle a priori et n’osera pas en faire un a posteriori, alors en effet il ne faut rien faire mais instaurer un système, qui est peut-être celui que vous préconisez, dans lequel ce n’est plus le Gouvernement qui décide mais une autre autorité ! Si on part du principe que nous sommes tous de bonne foi, mettre en place un avis avant la prise de décision…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, un avis. J’ai employé ce terme à dessein car, tout comme le Conseil d’État peut jouer le rôle de conseil mais aussi un rôle contentieux, l’autorité administrative a vocation à alerter le Gouvernement si le cas échéant il s’apprête à prendre une mauvaise disposition, mais s’il passe outre, elle a la possibilité de saisir le Conseil d’État.

Nier l’existence d’un contrôle me semble être une construction intellectuelle contestable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je cite pour mémoire l’actuel gendarme des services de renseignement, Jean-Marie Delarue, qui est sans doute l’un des mieux placés en France pour parler de contrôle des services. Selon lui, la CNCTR « ne pourra contrôler que ce qu’on voudra bien qu’elle contrôle » et il ajoute qu’« on est en train d’ériger un colosse aux pieds d’argile, un contrôleur dépendant d’un tiers pour accéder aux données qu’il est chargé de contrôler ». J’ai par ailleurs une autre question à poser, car nous légiférons pour le long terme. Rien n’interdit à un gouvernement d’étrangler les ressources de cette fameuse commission, ce qui amènera automatiquement à multiplier les autorisations accordées par défaut ou sans analyse préalable solide. Le problème, c’est que l’étude d’impact est complètement silencieuse au sujet des ressources publiques allouées aux opérations, sans lesquelles la commission ne pourra pas exercer ses activités. Pourrait-on en savoir un peu plus sur ce point ? C’est aussi l’un des moyens d’être sûr qu’elle accomplisse son travail correctement et dans les délais.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avant d’aller dîner, nous nous sommes attardés sur les précisions devant figurer dans la demande relatives aux techniques, aux finalités, aux motifs et à la durée de validité. Nous apprenons finalement qu’on peut se passer de l’étude de la demande et de ce qui la motive. J’en retire une vraie interrogation car je n’accepte pas non plus que le silence vaille accord en matière de recours à des techniques particulièrement intrusives et éventuellement attentatoires aux libertés et à la vie privée. J’ai moi aussi assisté à l’audition du président Delarue organisée par le rapporteur du texte. Selon lui, même dans le cas d’une procédure d’urgence, la CNCTR peut rendre un avis dans un délai inférieur à quarante-cinq minutes. Je ne comprends donc pas qu’on puisse envisager qu’elle puisse être dans l’incapacité de rendre un avis simple sur telle ou telle demande. Nous pourrions au contraire fixer une obligation d’avis assortie d’un délai. Il s’agit d’un sujet suffisamment grave pour qu’on refuse de considérer que le silence vaut accord.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si j’ai été laconique tout à l’heure, c’est parce que l’amendement de M. Tardy rouvre un débat que nous avons eu en commission au cours duquel l’essentiel de notre réflexion était selon moi grammatical voire sémantique. Je suis navré de voir que notre collègue a engagé un très long débat sur des sujets qui en sont très éloignés. L’histoire de cet alinéa est la suivante : le texte initial du Gouvernement disposait qu’« en l’absence d’avis rendu par le président de la commission, l’avis est réputé rendu », ce qui ne nous semblait pas d’une élégance impeccable. C’est la raison pour laquelle nous avons écrit qu’ « en l’absence d’avis dans les délais prévus, celui-ci est réputé rendu ». Nous n’avons rien changé sinon l’écriture que nous trouvons plus élégante.

En effet, quel est le sujet ? Dans le processus que nous mettons en place, la décision appartient aux services du Premier ministre une fois que la CNCTR a rendu son avis. Si pour une raison x ou y, elle n’a pas donné d’avis, le texte doit prévoir qu’il est alors réputé rendu, parce que sinon, cela bloque l’action des services. Préjuger que cet avis serait négatif revient à en décider avant que la commission ne l’ait émis. Pour des raisons organiques, nous avons donc prévu qu’en l’absence d’avis, l’avis est réputé rendu. Et la Commission peut continuer à travailler.

L’amendement no 8 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Charles de La Verpillière, pour soutenir l’amendement no 67 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Notre assemblée examine à juste titre avec beaucoup d’attention les articles et les alinéas énonçant les garanties qui présideront à la mise en oeuvre des moyens d’interception et de surveillance des correspondances et des communications. Nous aurons tout à l’heure un débat important sur la composition de la Commission, de même que nous venons de parler de la façon dont naît son avis ou sa décision. L’amendement no 67 qu’Éric Ciotti et moi-même présentons porte sur un sujet tout à fait différent. Il s’agit de la durée de validité de l’autorisation de mise en oeuvre des techniques d’interception, laquelle est délivrée par le Premier ministre. Le texte de la commission prévoit que cette autorisation aura une validité de quatre mois. Nous proposons de la porter à six mois.

L’expérience, en particulier l’attentat du 11 septembre 2001, montre que les attentats et les actes de terrorisme requièrent souvent une logistique très lourde et une préparation très longue. Il peut donc s’avérer nécessaire que la surveillance dure plus de quatre mois, parfois au moins six, voire davantage. Il est vrai que l’autorisation est renouvelable. Nous proposons de porter la validité de l’autorisation à six mois, sachant que cela n’affaiblit en aucun cas les garanties et les contrôles dont est entourée la mise en oeuvre de ces techniques d’interception et de surveillance.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’avis est défavorable. Cet amendement porte sur les délais et il est toujours compliqué de fixer le bon délai. Nous débattrons juste après d’un amendement proposant de le ramener à deux mois au lieu de quatre. Il est très compliqué de construire à ce sujet un argumentaire qui ne soit pas réfutable et ne s’expose pas au reproche de subjectivité. Du coup, si on fixe un délai, on essaie au moins de trouver des références. Or les références, nous les avons ! Dans le droit actuel, les autorisations de mise en oeuvre d’une interception de sécurité durent quatre mois, et sont renouvelables pour quatre mois. Depuis 1991, aucune observation selon laquelle ce délai est trop long ou trop court n’a été formulée. Il nous a donc semblé à même de constituer un élément de référence. En outre, en matière judiciaire, les mêmes techniques sont aussi autorisées pour quatre mois. Il nous a donc semblé assez cohérent que les délais soient identiques dans les ordres judiciaire et administratif, c’est-à-dire quatre mois. C’est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

L’avis est également défavorable, pour les raisons que vient d’exposer M. le rapporteur. La question de la durée se pose en effet et nous en avons débattu ici lorsque vous avez adopté la loi relative à la géolocalisation, mesdames et messieurs les députés. La durée de quatre mois est considérée par les services eux-mêmes comme une durée tout à fait optimale. Comme vous l’avez vous-même indiqué, monsieur le député, le renouvellement est prévu dans les mêmes conditions. Le seul point d’étonnement, c’est qu’en général les observations provenant de vos bancs interrogent, tout à fait légitimement et souvent avec pertinence, les principes de nécessité et de proportionnalité. Le choix de la durée de quatre mois satisfait très clairement l’exigence de respect des principes de nécessité et de proportionnalité. L’expérience le conforte car il s’avère depuis 1991 que la durée de quatre mois convient parfaitement aux nécessités des services. En outre, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, un délai identique est retenu pour les enquêtes judiciaires et le parallélisme semble tout à fait raisonnable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le président Urvoas a parlé de subjectivité s’agissant du choix de la durée de validité de ce type d’autorisation. Au contraire, c’est une question purement objective et purement pragmatique. Si nous voulons que le processus de décision fonctionne correctement, avec toutes les garanties que nous souhaitons sur tous les bancs, la Commission et les services du Premier ministre ne doivent pas être encombrés et saisis en permanence des mêmes faits et des mêmes demandes d’autorisation. Notre souci, pragmatique, est un souci d’efficacité. Nous proposons donc de porter la durée de l’autorisation de quatre à six mois. Encore une fois, cela n’affaiblit absolument pas les garanties qui doivent entourer l’utilisation de ces pratiques et de ces techniques. Au contraire, cela permet aussi bien à la Commission qu’au Premier ministre de se concentrer sur des faits.

Les terroristes préparent désormais des opérations de plus en plus lourdes, qui supposent une longue maturation. Il me semble qu’il faut s’adapter à ces nouvelles formes de terrorisme.

L’amendement no 67 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement no 136 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Contrairement à notre collègue La Verpillière, je propose de limiter la durée du renouvellement de l’autorisation à deux mois. J’ai entendu l’argumentaire du Gouvernement sur l’amendement précédent. Vous nous dites que le délai de quatre mois est celui qui existe en matière de police judiciaire, madame la garde des sceaux. Certes, mais il ne s’agit pas ici de police judiciaire, mais de police administrative, avec une construction différente.

Deuxième argument : vous nous dites que le délai de quatre mois correspond à celui qui est donné depuis 1991. Sauf qu’en 1991, on parlait d’écoutes téléphoniques, et qu’aujourd’hui on parle de moyens d’interception qui peuvent être extrêmement intrusifs. Lorsqu’on est sur des algorithmes ou des métadonnées, on n’est plus simplement dans l’écoute téléphonique ! Il faut donc réduire la durée du renouvellement de l’autorisation à deux mois. J’entends bien sûr l’argument du rapporteur, qui considère que tout cela est subjectif. Mais ce n’est pas en réduisant la durée du renouvellement, cher collègue de La Verpillière, que vous allez limiter l’efficacité du dispositif. Les services sont en mesure d’anticiper et de faire en sorte qu’il y ait une continuité dans les moyens.

J’ajoute que ce texte n’est pas un texte sur la lutte contre le terrorisme, mais un texte sur les services de renseignement – ce qui va bien au-delà de la seule lutte contre le terrorisme.

Enfin, madame la garde des sceaux, j’entends bien que la loi fixe les conditions de la demande d’interception. Mais pour avoir un peu d’expérience en la matière, je sais que les demandes d’interception sont souvent formulées de façon très vague. Il me paraîtrait donc raisonnable de prévoir que la Commission se prononce sur un renouvellement d’autorisation d’une durée de deux mois.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable, pour des raisons d’intelligibilité de la loi. Vous ne proposez pas de raccourcir le délai d’autorisation, monsieur Morin, mais le délai de renouvellement de cette autorisation. Le délai serait donc de quatre mois, renouvelable pour deux mois. C’est un facteur de complexité. Pour vous dire le fond de ma pensée, je dirais même que c’est bancal. Soit le renouvellement se justifie, et il n’y a pas de raison de le limiter à deux mois – autant garder une durée de quatre mois ; soit il est inutile, et mieux vaudrait alors supprimer la possibilité de renouvellement, ce qui n’est pas votre souhait. C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis défavorable. L’autorisation est donnée pour une durée maximale de quatre mois. On peut supputer que les services de renseignement ne mettront pas en oeuvre une surveillance supérieure à deux mois si, au terme de deux mois, ils constatent l’inutilité ou l’inanité de cette surveillance ou ont achevé de collecter les éléments dont ils ont besoin. Il s’agit donc d’une durée maximale. On peut expliquer à ceux qui proposent de prolonger cette durée qu’au vu à la fois de l’expérience et du principe, il est souhaitable d’en rester à quatre mois et de renouveler l’autorisation dans les mêmes conditions que la procédure initiale ; mais votre préoccupation est satisfaite, sauf à considérer que par manie, les services poursuivraient au-delà du nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’un de nos collègues a dit tout à l’heure que j’essayais de combler des trous par des chevilles, dans le seul but de compliquer la vie du Gouvernement. Ce n’est pas le cas.

N’ayant pu participer aux travaux de la commission, je découvre que les précisions prévues par le texte initial pour la demande d’autorisation – devaient y figurer la ou les techniques à mettre en oeuvre, la ou les finalités poursuivies, la durée de sa validité, la ou les personnes, le ou les lieux ou véhicules concernés – ont disparu du texte. Autrement dit, nous avons affaire à une Commission qui donne un avis sur la proportionnalité de ce qui est envisagé, mais on ne sait pas sur quoi elle peut fonder cet avis.

Je veux bien qu’on exclue un contrôle de subsidiarité – après tout, nous ne sommes pas tous spécialistes du renseignement. Mais le contrôle de la proportionnalité existe en droit britannique, monsieur Urvoas : lorsqu’un service de renseignement demande une enquête, il doit préciser qui est ciblé, ce qu’il va faire et quelle technique va être utilisée. Mais les dispositions équivalentes ne se retrouvent plus dans le texte de la commission. Comment la CNCTR peut-elle donner un avis préalable alors que tous ces critères ont disparu ? Sur quel fondement renouvelle-t-on l’autorisation, et sur quel fondement la Commission exerce-t-elle son contrôle a posteriori ? Pardonnez-moi de soulever ce point, mais c’est consubstantiel à la discussion que nous avons sur les délais et les renouvellements de l’autorisation. Si les critères objectifs disparaissent, sur quel fondement renouvelle-t-on, et sur quel fondement contrôle-t-on ? À moins que ces conditions ne soient maintenues, mais gardées secrètes, et ne soient pas encadrées par la loi ? Cela non plus ne serait donc pas du domaine de la loi ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais rassurer, autant que je puisse le faire, M. Lellouche. Ces précisions figuraient en effet dans le texte du Gouvernement. Le travail de la commission a consisté à les mettre en facteur commun : elles ont été placées plus haut dans le texte, de façon à être systématiquement valables, sans qu’il soit besoin de les rappeler à chaque fois.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si mon amendement est mal rédigé, s’il est « bancal », monsieur le rapporteur, je veux bien le remettre d’aplomb en proposant la même durée de deux mois pour l’autorisation préalable et pour le renouvellement. Le caractère très général de la demande de renseignement et le caractère intrusif des techniques qui peuvent être mises en oeuvre imposent en effet que le rendez-vous soit à bref délai.

L’amendement no 136 rectifié n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 173 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en avons déjà longuement débattu. Je le retire.

L’amendement no 173 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement no 131 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je viens d’évoquer le sujet. Je n’y reviens donc pas : l’amendement est défendu.

L’amendement no 131 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 274 .

L’amendement no 274 , repoussé par la commission et par le Gouvernement, n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 9 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans une interview très instructive au site AEF, qui m’a inspiré plusieurs amendements, Jean-Marie Delarue, actuel président de la CNCIS, nous dit que tout est tenu à disposition de la commission, et que c’est à elle d’aller à la pêche aux informations. Il y a un risque de dissimulation à ne pas négliger. Encore une fois, il ne s’agit pas de céder à la caricature : je fais confiance, comme le ministre, à nos services de renseignement. En revanche, nous ne pouvons ignorer que dans la précipitation, voire sous la pression politique, comme l’a rappelé Hervé Morin en commission, il peut y avoir des abus. Prémunissons-nous de ces abus en donnant à la CNCTR un accès direct et au fil de l’eau, autant que possible, aux registres de demande et d’autorisation. C’est parfois matériellement difficile, mais dans le cas présent, c’est possible. Je propose donc que la simple mise à disposition de ces registres soit remplacée par une communication systématique. Ce sera un petit pas, mais il est nécessaire. Il faut donner à cette Commission les moyens d’exercer réellement ses fonctions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable. L’interview du président Delarue que vient de citer notre collègue Tardy portait sur le texte avant son examen en commission. La commission a rectifié ce point en précisant que la CNCTR aura librement accès à tous les registres qu’elle souhaite, là où elle le décide. La proposition de M. Tardy est moins ambitieuse que le texte de la commission.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis. L’amendement est satisfait par l’alinéa 39.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne partage pas cet avis. Dans le texte de la commission, il faut aller chercher l’information, alors que je demande à ce qu’elle lui soit communiquée. Pardonnez-moi, mais ce n’est pas la même chose !

L’amendement no 9 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 35 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à imposer un avis préalable, même en cas d’urgence absolue. La CNCTR aurait alors une heure pour rendre sa décision. L’avis préalable est une garantie essentielle qui ne doit pas être supprimée. Lors de son audition, le président Delarue nous avait dit qu’il était capable de se prononcer dans un délai de quarante-cinq minutes si telle était la demande du Gouvernement. Il avait estimé que cela pourrait également être le cas de la future CNCTR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La commission aurait souhaité que nous examinions en même temps l’amendement no 381 rectifié du Gouvernement, qui concerne la même procédure d’urgence. Sachant que le débat va principalement porter sur l’urgence, il serait utile que le Gouvernement puisse présenter sa proposition. Je rappelle que la commission a unifié les systèmes d’urgence, pensant ainsi oeuvrer en faveur de la lisibilité de la loi. Le Gouvernement ne semble pas partager ce point de vue. Il a donc fait une proposition nouvelle de synthèse, qui a recueilli l’avis favorable de la commission et doit donc être présentée par lui. Cela permettra de comprendre l’avis défavorable de la commission sur l’amendement de M. Coronado.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’appelle donc l’amendement no 381 rectifié , qui fait l’objet d’un sous-amendement no 411 de M. Tardy.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Je souhaite prendre le temps de présenter de manière précise la position du Gouvernement dans cet amendement qui concerne la question de l’urgence.

Rappelons d’abord que la question des procédures d’urgence est une question particulièrement sensible, car il s’agit de concilier les exigences du contrôle – une technique ne doit être mise en oeuvre qu’après autorisation par un responsable politique, le Premier ministre, éclairé par l’avis d’une commission indépendante – et la nécessité de pouvoir agir de manière suffisamment rapide lorsque des circonstances particulières l’exigent.

Nul ne comprendrait en effet que, confrontés, par exemple, à une menace terroriste imminente, nos services se trouvent contraints d’attendre que telle ou telle formalité ait été accomplie. Je remarque, d’ailleurs, que cette question ne fait pas débat dans le cadre juridique actuel et que chacun s’accorde à dire que les choses fonctionnent plutôt bien sur ce point. Pourquoi ? D’abord, parce que le Gouvernement a choisi de saisir systématiquement la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité – la CNCIS – avant d’autoriser une interception de sécurité, alors que rien, dans la législation, n’oblige à une consultation préalable. Ensuite, parce que la CNCIS s’est mise en situation de répondre très vite à ses sollicitations. Dès lors, le Gouvernement sait qu’il peut disposer très rapidement d’un avis qui sécurise sa décision, mais il sait aussi qu’en cas de nécessité, il peut agir sans violer la loi. En pratique, l’avis de la CNCIS est rendu avant autorisation dans la quasi-totalité des cas.

Il ne s’agit pas du tout pour le Gouvernement de remettre en cause cette situation, mais de la conforter, s’agissant des interceptions de sécurité, et de l’adapter, s’agissant de certaines autres techniques qui, en raison de leurs conditions de mise en oeuvre, ne peuvent être régies par la même procédure. Sur ce point, le Gouvernement estime que la solution adoptée par la commission des lois ne parvient pas tout à fait à l’équilibre entre les exigences du contrôle et celles de l’efficacité opérationnelle. C’est pourquoi le Gouvernement soumet un nouvel amendement.

Le texte adopté par la commission des lois prévoit l’institution d’une seule procédure d’urgence, qui permet au chef de service d’autoriser lui-même l’opération, à charge pour lui de la justifier dans les vingt-quatre heures auprès du Premier ministre. Comme je l’ai déjà indiqué en commission, cette solution présente deux inconvénients : d’une part, elle permet que, pour toutes les techniques, des autorisations soient données par les services eux-mêmes. Encore faudrait-il que l’on s’entende sur la notion de « chef de service ». De qui s’agit-il : du directeur général, du responsable de l’opération ? Or, l’une des garanties centrales prévues par la loi de 1991 tient à ce qu’une interception de sécurité ne peut être demandée que par un ministre et autorisée par le Premier ministre ou l’un de ses proches collaborateurs. Les possibilités de délégation sont étroitement encadrées. D’autre part, cette solution ne permet pas, dans certaines situations opérationnelles, de s’adapter à l’urgence, car l’agent sera, dans tous les cas, contraint de solliciter une autorisation : ce ne serait simplement plus celle du Premier ministre, mais celle de son chef de service.

Par conséquent, l’amendement présenté par le Gouvernement vise à réattribuer au Premier ministre le pouvoir de délivrer les autorisations. Toutefois, il distingue deux cas d’urgence. En présence d’une urgence absolue, l’autorisation pourra être délivrée sans attendre l’avis de la CNCTR. Celle-ci sera cependant immédiatement avisée et il faudra justifier devant elle du recours à l’urgence. Elle pourra se prononcer a posteriori, y compris sur le bien-fondé du recours à l’urgence, recommander l’interruption de la mesure, voire saisir, dans le cadre de la mise en oeuvre du contrôle juridictionnel, le Conseil d’État. Je répète que cette situation doit demeurer totalement exceptionnelle. Il est paradoxal de penser que le Gouvernement se passera demain de l’avis préalable de la CNCTR alors qu’il attend aujourd’hui celui de la CNCIS, sans être obligé de le faire.

En cas d’urgence opérationnelle – deuxième situation – la mesure pourra faire l’objet d’une autorisation a posteriori. Cette urgence opérationnelle ne concerne que deux techniques, qui présentent la particularité d’être mises en oeuvre par les services opérationnels sur le terrain, dans le cadre de filatures. En quoi consistent-elles ? On peut prendre l’exemple d’un objectif qui est amené à rencontrer un nouveau comparse venu à bord d’un véhicule non repéré préalablement. L’intérêt de la surveillance peut se reporter sur le nouvel arrivé. Si l’opportunité survient de baliser ce nouveau véhicule, il peut être difficilement envisageable pour les agents de solliciter toute la chaîne hiérarchique afin d’obtenir l’autorisation de procéder, alors, au balisage. Il s’agit en effet d’une opération qui peut être risquée, et l’opportunité de procéder à l’intervention technique peut se présenter de manière extrêmement brève et, parfois, imprévisible. Ainsi, la possibilité d’agir sans autorisation préalable est étroitement circonscrite.

Voilà pourquoi, très précisément, le Gouvernement vous propose cet amendement, en vous demandant, bien entendu, de l’adopter.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir le sous-amendement no 411 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comme on pouvait s’y attendre, le Gouvernement veut revenir au texte initial, avec deux régimes d’urgence, pour lesquels, bien entendu, l’avis de la CNCTR passe à la trappe : l’urgence que vous appelez « absolue », monsieur le ministre, avec l’autorisation du Premier ministre, et l’urgence dite « opérationnelle », à l’article 2, où les agents décident directement, sans passer par le Premier ministre. Ces amendements gouvernementaux, déposés, hier, une heure avant le début de l’examen en séance, sont un retour en arrière. La rédaction que le rapporteur avait proposée et fait adopter en commission était une avancée. Elle ne créait pas de confusion entre les deux régimes ; au contraire, elle apportait des garanties. Elle « fusionnait » les deux – j’emploie des guillemets – en gardant l’autorisation du Premier ministre tout en se passant de l’avis de la CNCTR uniquement dans le cas où la menace est imminente. Et encore pourrait-on tout à fait avoir l’avis de la CNCTR dans l’heure, comme cela semble être le cas aujourd’hui avec la CNCIS. Cette idée excellente est proposée par notre collègue Hervé Morin ; je regrette que vous l’évacuiez aussi facilement.

Afin de parvenir à une solution de repli, je me suis donc demandé comment améliorer les garanties concernant ce régime d’urgence. L’idée m’en est venue en lisant avec attention les quinze amendements de dernière minute du Gouvernement. Au passage, j’en ai profité pour redéposer moi-même une dizaine d’amendements entre samedi et aujourd’hui, dont celui-ci. Pour les professions protégées, dont nous parlerons dans quelques instants, vous souhaitez ajouter la phrase suivante : « Les retranscriptions des données collectées en application du présent article sont transmises à la CNCTR, qui veille au caractère nécessaire et proportionné des atteintes au secret attaché à l’exercice de ces activités professionnelles ou mandats qui sont, le cas échéant, portées. » C’est une idée intéressante. Vous donnez à la CNCTR un pouvoir de veille du point de vue de l’opportunité. À défaut de le faire sur tout le texte, ce sous-amendement vise à reprendre cette idée pour les cas d’urgence. La CNCTR, qui n’a pas pu donner son avis préalable, pourrait ainsi veiller au caractère nécessaire et proportionné de l’utilisation du régime d’urgence.

Comme vous le voyez, monsieur le ministre, j’essaie de vous rejoindre sur certains points. Je pense donc que vous pouvez, ici aussi, renforcer le pouvoir de contrôle de la CNCTR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement no 411 et sur l’amendement no 381 rectifié ? ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S’agissant de l’amendement du Gouvernement, que vient de présenter le ministre de l’intérieur, la commission a donné un avis favorable puisque, contrairement à ce que vient de dire notre collègue Tardy, le Gouvernement ne propose pas du tout de revenir au texte initial.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il a intégré un certain nombre d’amendements qui avaient été souhaités par la commission. J’en cite trois. Le premier a pour objet de préciser – ce qui n’est pas anodin – que l’urgence sera exceptionnelle. De fait, au cours des auditions, un certain nombre de nos interlocuteurs nous ont mis en garde contre le risque que l’urgence soit systématiquement organisée de façon à annihiler un certain nombre d’expositions prévues en dehors des procédures d’urgence. On maintient donc le caractère exceptionnel de l’urgence.

Deuxième élément, qui est important – le ministre a raison d’y insister : s’il doit y avoir des recours contentieux devant le Conseil d’État, il faut qu’il puisse y avoir des argumentations. Or, dans le cadre de la procédure d’urgence, le chef de service ou le Gouvernement a l’obligation de faire parvenir à la CNCTR, dans un délai maximum de vingt-quatre mois…pardon, de vingt-quatre heures, tous les éléments de motivation et tout ce qui justifie le caractère d’urgence.

Ensuite, l’amendement du Gouvernement renvoie explicitement à l’article L. 821-6 du code de la sécurité intérieure, ce qui appelle l’attribution d’un certain nombre de pouvoirs à la CNCTR, notamment celui de demander l’interruption de techniques en cours. J’insiste sur ce qui a déjà été dit par le ministre : cette procédure d’urgence est exclue en cas de pénétration dans des lieux privés à usage d’habitation, et s’agissant des professions que nous avons déjà évoquées.

Sous cette réserve, l’amendement du Gouvernement a reçu un avis favorable de la commission.

Le sous-amendement n’a naturellement pas été étudié par la commission puisqu’il a été déposé en séance. À titre personnel, j’y suis défavorable, dans la mesure où il s’agit, précisément, d’une garantie spécifique prévue pour les professions sensibles ou en cas d’introduction domiciliaire, deux hypothèses qui sont exclues du champ de la procédure d’urgence. Il n’y a donc pas lieu de l’élargir dans le cas que nous évoquons.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement no 35 et sur le sous-amendement no 411  ?

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous ne sommes pas convaincus par l’amendement du Gouvernement, car il est assez compliqué de définir ce qu’est exactement l’ « urgence absolue » et l’ « urgence opérationnelle ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne serai pas loin de rejoindre notre collègue Tardy dans les observations qu’il a formulées vis-à-vis de votre amendement. Je ne dis pas que c’est un recul, mais c’est une manière d’« enfumage »,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…si l’on peut employer cette expression un peu familière, dans la mesure où vous trouvez un compromis plutôt bancal pour répondre à des inquiétudes qui ont été formulées par quelques-uns d’entre nous – notamment notre représentant à la commission des lois, Sergio Coronado – sur le fait que vous passez outre aux avis de cette Commission. M. Delarue, actuel président de la CNCIS, a déjà eu l’occasion de s’exprimer sur les dangers que représente ce recul de la nouvelle Commission, qui ne pourra exercer un contrôle qu’a posteriori – nous en avons parlé tout à l’heure. Comme nous l’avons déjà vu dans d’autres projets de loi, cette définition de l’urgence comporte un périmètre très flou. Or, plutôt que de clarifier, vous renforcez encore un peu plus ce flou, entre l’urgence absolue et l’urgence opérationnelle. Dans les deux cas, vous passez outre au contrôle de cette Commission, qui est pourtant indispensable pour garantir l’État de droit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je soutiens cet amendement du Gouvernement. Le délai de vingt-quatre mois, indiqué par erreur par le rapporteur, ne m’inquiète pas – celui de vingt-quatre heures me paraît plus opportun mais on pourrait trouver un compromis entre les deux.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Plus sérieusement, la procédure de l’urgence absolue est indispensable pour faciliter le caractère opérationnel de certaines interventions dont la nature justifie l’urgence, et dans un cadre tout à fait exceptionnel. Comme l’a précisé le ministre, certaines nécessités imposent le recours à la procédure d’urgence, sans avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. Avec la motivation qui doit être apportée dans les vingt-quatre heures, ce dispositif me paraît, dans la mesure où son caractère exceptionnel est clairement rappelé, tout à fait opportun.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le Gouvernement manifeste une volonté de compromis, mais nous maintiendrons l’amendement que nous avons déposé. Je suis assez attentif aux débats en commission des lois, et je me souviens que, lorsque nous avions abordé la question de l’urgence, M. le rapporteur, qui est également le président de notre commission et un très bon connaisseur de ce sujet, avait dit qu’il lui était impossible de comprendre le distinguo qui pouvait être opéré entre « urgence absolue » et « urgence opérationnelle ». Je constate donc que le Gouvernement a fait preuve de beaucoup de conviction pour le convaincre et lui expliquer ce qu’il n’arrivait pas à comprendre en commission.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, je voudrais être convaincu par l’amendement que vous nous proposez. Déjà, le fait que nous ayons eu trois versions différentes de l’urgence en l’espace de quelques jours démontre que l’on aurait pu avoir un peu plus de temps pour examiner tout cela.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par ailleurs, j’aimerais comprendre : désormais est prévue l’urgence absolue, qui rend possible l’autorisation du Premier ministre sans saisine préalable de la Commission. Je ne comprends toujours pas pourquoi, au moment où les services décident, au titre de l’urgence absolue, de se passer de l’avis de la Commission et donc de saisir le cabinet du Premier ministre, on ne prévoit pas, au même instant, la saisine de la Commission nationale de contrôle. Je ne vois pas ce qui empêche de mettre en place un système d’astreinte permettant à la Commission de se prononcer dans des délais à peu près comparables à ceux d’un cabinet ministériel qui est saisi d’une affaire de ce genre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par ailleurs, comme l’ont rappelé mes collègues Coronado et Tardy, le président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, Jean-Marie Delarue, nous a expliqué qu’il avait été capable de statuer en quarante-cinq minutes. Je ne comprends donc pas pourquoi la commission et le Premier ministre ne seraient pas saisis de la demande dans le même temps.

Je peux éventuellement concevoir que le Premier ministre arrête sa décision en se privant de l’avis de la commission ; comme dans tout régime parlementaire, il est en effet responsable devant le Parlement. En revanche, la raison pour laquelle on éviterait de consulter la commission pendant vingt-quatre heures m’échappe.

Ne vous méprenez pas sur mes intentions : je ne doute pas un seul instant que ces dispositions ont été rédigées sans aucune arrière-pensée. Cependant, je connais trop l’effet de cour de la Ve République. Je connais trop la capacité de résistance extrêmement forte d’un chef de service face à un pouvoir politique qui, au nom de l’urgence, lui demande de mettre en oeuvre un système d’interception. J’ai cru comprendre que cela s’était déjà produit dans l’histoire récente.

J’aimerais donc qu’on m’explique pourquoi on se prive d’une telle garantie alors même que celle-ci n’altérerait en rien l’efficacité des services.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je poursuis, madame la présidente, car c’est un sujet important.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout sujet est important, monsieur Morin. Veuillez conclure, je vous prie !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce sujet est fondamental car il concerne le dispositif dans sa totalité. Soyez rassurée, madame la présidente, je vous laisserai ensuite en paix et ne prendrai plus parole.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tel n’est pas le problème, cher collègue. Chacun doit pouvoir s’exprimer !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, vous affirmez que l’urgence opérationnelle, régime sous lequel un chef de service peut décider de poser une balise, en quelque sorte, ne concerne que deux techniques. Quelles sont précisément les techniques visées par l’urgence qui ouvre la possibilité pour un chef de service de procéder à une interception ? Par ailleurs, qu’entendez-vous par « chef de service » ? Est-ce simplement le patron du petit service ou est-ce le directeur de la police nationale ? Telles sont les questions auxquelles j’aimerais que le Gouvernement réponde.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je constate que le Gouvernement est en train de solidifier l’alliance entre l’UMP et l’UDI. En effet, je rejoins totalement les préoccupations d’Hervé Morin.

Je suggérerai au ministre de l’intérieur une formule toute simple : ne retenir qu’un seul régime d’urgence. Croyez-moi, monsieur le ministre, votre double système ajoutera inutilement à la complexité.

Le Gouvernement peut parfaitement invoquer l’urgence, et je souscris tout à fait sur ce point aux propos de notre collègue M. Ciotti ; il lui faut de la flexibilité pour être efficace. Toutefois, M. Morin a raison : au moment où l’urgence est signifiée au Premier ministre, rien n’empêche d’informer aussi la commission et de faire parvenir ensuite la justification dans les vingt-quatre ou quarante-huit heures qui suivent. C’est un garde-fou, une manière de faciliter le travail des membres de la commission si cette dernière doit par la suite rendre un avis, ce qui n’est pas toujours évident dans la pratique.

Sans sous-estimer la nécessité d’agir dans l’urgence, je vous propose de simplifier le dispositif en ne retenant qu’un seul régime et, lorsque celui-ci s’applique, de prévenir la commission immédiatement, en même temps que le Premier ministre.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Les différentes questions qui viennent de m’être posées appellent des réponses précises.

Tout d’abord, le fait que nous décidions d’enclencher une procédure en urgence du fait du contexte ou d’un risque imminent ne signifie absolument pas que la CNCTR n’est pas saisie. Elle est bel et bien saisie, mais il peut arriver que les services du Gouvernement n’obtiennent pas de réponse immédiate de sa part. Dans ce cas de figure, le Gouvernement est contraint, dans les vingt-quatre heures qui suivent la mobilisation de la technique, de motiver les conditions et les motifs de son utilisation dans un rapport détaillé adressé à la Commission. Pour répondre précisément à la question de Pierre Lellouche et d’Hervé Morin, l’administration peut donc, si la CNCTR n’est pas en mesure de répondre immédiatement, déclencher malgré tout le dispositif, à condition de lui envoyer dans les vingt-quatre heures une motivation rigoureusement fondée, ce qui permet à la Commission d’exercer son contrôle sur le champ ou de manière quasiment continue.

Vous m’avez par ailleurs interrogé sur ce qui justifiait la distinction entre l’urgence absolue et l’urgence opérationnelle. Il y a des situations opérationnelles dans lesquelles un service mobilise une technique – pour répondre à la question de Pierre Lellouche, cela ne vaut que pour deux techniques, les balises et le dispositif de proximité – sans que l’agent ait le temps d’en référer à l’autorité politique ; c’est l’exemple concret sur lequel je m’appuyais tout à l’heure. Dans ces seuls cas, le fonctionnaire peut enclencher le dispositif sans saisir d’autorité politique, mais le contrôle continue d’être exercé dans les conditions que j’ai indiqué pour l’urgence absolue.

Voilà très exactement de quoi il s’agit ; voilà pourquoi nous le faisons de cette manière-là. L’application du régime d’urgence n’exclut en aucun cas le contrôle : elle permet, en cas d’absence de réponse de la CNCTR – laquelle, je le répète, est donc saisie immédiatement –, de mettre en oeuvre la technique. Un rapport extrêmement motivé qui détaille les conditions du déclenchement de l’opération est alors adressé dans les vingt-quatre heures à la commission.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Hervé Morin.

Vous m’aviez pourtant affirmé que vous ne parleriez plus, cher collègue…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, le régime de l’urgence absolue que vous avez décrit ne correspond pas à celui qui figure dans le texte que vous nous proposez. Pourquoi ne pas inscrire dans le projet de loi la procédure que vous venez de présenter devant l’Assemblée nationale ?

Aux termes de l’article, en cas d’urgence absolue, le Premier ministre autorise la mise en oeuvre de techniques. Il vous suffirait d’ajouter que, dans le même temps, la CNCTR est saisie et que l’administration doit ensuite motiver sa décision dans les vingt-quatre heures. Faites en sorte d’apaiser les inquiétudes que nous pouvons avoir ; mettez le texte en adéquation avec ce que vous venez de dire devant l’Assemblée nationale.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

C’est inutile de le préciser, monsieur Morin, car l’alinéa suivant est en facteur commun : « La décision du Premier ministre est communiquée sans délai à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. Lorsqu’il a délivré une autorisation après un avis défavorable de la commission, le Premier ministre indique les motifs pour lesquels cet avis n’a pas été suivi. »

L’amendement no 35 n’est pas adopté.

Le sous-amendement no 411 n’est pas adopté.

L’amendement no 381 rectifié est adopté et les amendements nos 174 , 89 , 346 , 233 , 115 , 362 , 275 , 248 , 90 et 347 tombent, ainsi que le sous-amendement no 375 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la garde des sceaux, pour soutenir l’amendement no 410 rectifié .

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

L’amendement vise à rédiger l’alinéa 43 comme suit : « Par dérogation aux deux premiers alinéas du présent article, lorsque l’introduction prévue à l’article L. 853-2 concerne un lieu privé à usage d’habitation ou que la mise en oeuvre d’une technique de recueil de renseignement porte sur un magistrat, un avocat, un parlementaire ou un journaliste, l’avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement et l’autorisation du Premier ministre sont donnés et transmis par tout moyen. »

Cet amendement apporte un début de réponse aux interrogations qui avaient été formulées par les parlementaires en commission et sur lesquelles le Gouvernement avait déjà apporté des assurances. Nous avons en effet affirmé que nous souhaitions garantir aux professions qui en ont besoin la protection non seulement du secret des sources, afin de sauvegarder la liberté d’expression et la liberté de la presse, mais aussi du secret de l’enquête, du secret de l’instruction et du secret du délibéré, ainsi que, bien entendu, la préservation des droits de la défense, qui sont tous des droits constitutionnellement et conventionnellement garantis. Cet amendement est la première disposition concernant ces professions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La commission a donné un avis favorable à cet amendement gouvernemental dans la mesure où celui-ci étend aux magistrats des garanties qui avaient été demandées pour les autres professions et pour l’intrusion domiciliaire. Il marque donc un progrès de l’État de droit.

L’amendement no 410 rectifié est adopté et l’amendement no 310 tombe.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 276 .

L’amendement no 276 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 175 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous souhaitons par cet amendement élargir les possibilités de saisine du Conseil d’État.

La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement doit pouvoir saisir le Conseil d’État non pas seulement lorsqu’elle juge les suites données à ses avis ou recommandations insuffisantes, mais aussi dans tous les cas où elle le jugerait nécessaire. C’est pourquoi il est proposé de substituer aux mots : « estime que les suites qui y sont données sont insuffisantes » les mots : « estime nécessaire ».

Dans certains cas, le simple arrêt de l’interception sur demande du Premier ministre pourrait être insuffisant. Des poursuites pénales ou une indemnisation pourraient être nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’avis est défavorable. L’ensemble du texte est construit, chacun l’a bien compris, sur un équilibre, difficile à trouver et toujours un peu précaire, entre les libertés publiques, les données opérationnelles et la jurisprudence de la CEDH et du Conseil d’État. Nous sommes donc extrêmement vigilants sur la préservation de cet équilibre.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Même avis.

L’amendement no 175 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la garde des sceaux, pour soutenir l’amendement no 420 .

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Il s’agit pour ainsi dire d’un exercice intellectuel inversé : le présent amendement vise à coordonner le texte avec une disposition qui, je l’espère, sera par la suite adoptée par l’Assemblée et sur le fond de laquelle nous reviendrons en temps voulu. Il concerne la formation de jugement spécialisée du Conseil d’État telle qu’elle a été introduite par la commission.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’ajouterai quelques mots pour que l’ensemble de nos collègues comprennent bien de quoi il s’agit. C’est un exercice auquel nous ne nous livrons pas souvent, puisqu’en général les amendements de coordination viennent en discussion une fois que les modifications ont été apportées. Or, en l’espèce, compte tenu de la construction du projet de loi, l’amendement de fond, l’amendement no 409 rectifié du Gouvernement, qui concerne la formation juridictionnelle spécialisée que nous avons créée au sein du Conseil d’État, porte sur l’article 4, dont nous discuterons en toute logique après l’article 1er ; étant donné la vitesse à laquelle nous allons, ce sera probablement samedi matin ou samedi après-midi…

Nous avions souhaité que le contentieux de la mise en oeuvre des techniques de recueil de renseignement soit renvoyé exclusivement à une formation spécialisée. Le Gouvernement, en substance, souhaite que le Conseil d’État puisse également examiner ces affaires en s’appuyant sur les formations de l’assemblée ou de la section du contentieux. Mme la garde des sceaux y reviendra en temps utile. La commission ayant émis un avis favorable sur cet amendement, elle est également favorable à cet amendement de coordination par anticipation, et je m’exprime ici sous le contrôle de Dominique Raimbourg et Jean-Yves Le Bouillonnec, qui ont présidé la commission des lois quand cette question a été examinée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voterons cet amendement pour une raison que j’ai déjà exposée en commission : plus la matière est extraordinaire et sensible, plus le traitement juridictionnel doit être ordinaire. Plutôt que la référence à une formation spécialisée du Conseil d’État, telle qu’elle figurait auparavant dans le texte, nous préférons que l’on mentionne le Conseil d’État de manière générale, à charge pour cette instance de s’organiser pour juger de ces affaires. Il n’appartient pas au législateur d’entrer dans le détail du fonctionnement de cette maison.

L’amendement no 420 est adopté et l’amendement no 11 tombe.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie de deux amendements, nos 394 et 386 deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement no 386 deuxième rectification fait l’objet de quatre sous-amendements, nos 418 , 426 , 390 et 419 .

La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 394 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’amendement du Gouvernement constitue un pas dont nous regrettons qu’il n’ait pas été fait plus tôt. La réunion systématique de la CNCTR nous semble en effet indispensable. Toutefois, plusieurs garanties prévues par le code de procédure pénale pour les interceptions judiciaires sont ici absentes. Ainsi l’information systématique des présidents des assemblées pour les parlementaires, celle des premiers présidents pour les magistrats du siège, celle des procureurs généraux pour les membres du parquet, celle des bâtonniers pour les avocats. Pourquoi ces dispositions applicables aux écoutes judiciaires disparaîtraient-elles quand il s’agit d’écoutes administratives ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en venons à l’amendement no 386 deuxième rectification, qui fait l’objet de quatre sous-amendements, nos 418 , 426 , 390 et 419 .

La parole est à Mme la garde des sceaux, pour soutenir l’amendement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Je ne sais s’il est besoin de reprendre les arguments que nous avons développés à l’appui de la protection de certaines professions dans les cas d’urgence absolue. Il s’agit ici d’indiquer comment ces professions sont protégées de façon générale. Elles peuvent évidemment faire l’objet de techniques destinées au recueil de renseignements, mais dans des conditions dûment précisées par l’amendement : « Les techniques de recueil du renseignement […] ne peuvent être mises en oeuvre à l’encontre d’un magistrat, un avocat, un parlementaire, ou un journaliste ou concerner leurs véhicules, bureaux ou domiciles que sur autorisation motivée du Premier ministre prise après avis de la commission réunie. » Je précise qu’il s’agit là d’une réunion de la commission en formation plénière.

Deuxième condition : « La commission est informée des modalités d’exécution des autorisations » après que celles-ci ont été délivrées.

Enfin, comme le rappelait M. Tardy, les retranscriptions des données collectées sont transmises à la CNCTR, qui veille au caractère nécessaire et proportionné des techniques mises en oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis donc saisie de quatre sous-amendements, nos 418 , 426 , 390 et 419 .

Les sous-amendements nos 418 et 426 sont identiques.

La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir le sous-amendement no 418 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si vous le voulez bien, madame la présidente, je le défendrai en même temps que le sous-amendement no 419 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ces deux sous-amendements visent à prévoir la protection des médecins, le premier en les ajoutant à la liste des personnes protégées, le second en disposant que la CNCTR « veille au caractère nécessaire et proportionné des atteintes au secret médical des personnes », comme elle le fait pour les différents secrets professionnels évoqués par l’amendement du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir le sous-amendement identique no 426 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce sous-amendement se rapporte à un de mes prochains amendements, qui reprend globalement le dispositif présenté par le Gouvernement. Dans ce dispositif, en effet, il manque les médecins. Il me semble que nous devons légiférer sur le secret médical afin de l’inclure logiquement dans le dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir le sous-amendement no 390 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est nécessaire de créer un régime spécifique pour certaines professions qui exigent une protection particulière – magistrats, avocats, parlementaires, journalistes. Cependant, l’amendement du Gouvernement ne va pas assez loin. Il faut franchir un autre pas et prévoir, en plus d’une réunion de la commission en formation plénière et de son information régulière, que le Premier ministre ne puisse pas passer outre son avis initial. Il est donc proposé par cet amendement que l’avis de la CNCTR soit conforme, de manière à suivre la logique du dispositif jusqu’au bout.

Permettez-moi de relayer au passage une question suggérée sur Twitter : par « journalistes », désignez-vous les seuls détenteurs de la carte de presse ou ceux qui sont déclarés fiscalement comme tels ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le sous-amendement no 419 a été défendu par Mme Attard en même temps que le no 418.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 394 et 386 deuxième rectification, ainsi que sur les quatre sous-amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’amendement no 394 ayant été déposé après celui du Gouvernement, la commission ne l’a pas examiné. Il me semble que l’amendement no 386 deuxième rectification répond aux attentes de nos collègues du groupe écologistes. Je leur suggère de s’y rallier, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

La commission n’a pas non plus examiné les sous-amendements identiques nos 418 et 426 et la question de l’inclusion des médecins. J’avoue que ma conviction n’est pas forgée. Autant je comprends, du point de vue du fonctionnement de la démocratie et de la vie publique, la nécessité de protéger des professions comme celles de journaliste ou d’avocat, autant il me semble que celle de médecin n’entre pas exactement dans le même champ.

À ma connaissance, il existe sept professions protégées, parmi lesquelles les notaires et les huissiers.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Faut-il les traiter en bloc ? Faut-il isoler les notaires, les huissiers ou les médecins ? Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, même si, instinctivement, je ne mets pas les journalistes et les médecins sur le même plan au regard du fonctionnement de la démocratie.

Avis défavorable de la commission des lois, en revanche, au sous-amendement no 390 de M. Tardy. Nous avons déjà largement débattu du caractère conforme ou non de l’avis de la CNCTR.

Quant à l’amendement no 419 , qui n’a pas été examiné par la commission, avis plutôt défavorable à titre personnel.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement no 394 et sur les quatre sous-amendements ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

S’agissant des sous-amendements no 418 et 426 , relatifs aux médecins, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée. Les professions dites protégées le sont par notre droit en matière de procédures judiciaires, mais aussi par les engagements conventionnels de la France – en l’occurrence la Convention européenne des droits de l’homme. Nous avons néanmoins estimé qu’il était préférable de préciser dans le texte les protections que nous leur reconnaissons également en matière d’interventions de police administrative.

Comme l’indique le rapporteur à juste titre, les professions protégées mentionnées dans l’amendement du Gouvernement le sont au titre de la garantie du bon fonctionnement de la démocratie. En matière de procédures judiciaires, toutefois, les médecins font partie des professions protégées. Le secret médical est protégé.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Je rappelle que notre amendement prévoit, non pas une interdiction totale des écoutes administratives pour les professions citées, mais un encadrement de leurs conditions. De même, il ne peut s’agir de protéger le secret médical de façon absolue. Néanmoins, dans la mesure où nous voulons éviter les hiatus entre les conditions d’encadrement en matière judiciaire et en matière administrative, nous nous en remettons, sur la question de la protection des médecins, à la sagesse de l’Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En revanche, vous émettez un avis défavorable sur l’amendement no 394 et sur les sous-amendements nos 390 et 419

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite reprendre la question que soulevait un de mes amendements précédemment tombé, celle de l’égalité des citoyens devant la loi. Je considère en effet que tout citoyen doit être protégé et qu’il appartient à la CNCTR de vérifier effectivement que les techniques employées le sont de manière proportionnée et justifiée, pour des durées limitées, et que les données collectées sont détruites au terme du délai fixé par la loi. La protection de la vie privée, des échanges, du répertoire, des données ou des métadonnées vaut pour tous les citoyens. Du reste, le sixième alinéa de l’article 1er rappelle les principes du respect de la vie privée, du secret des correspondances et de l’inviolabilité du domicile. Ces principes ne valent pas que pour les professions protégées !

A contrario, je ne vois pas pourquoi l’on interdirait la pose en urgence d’une balise sur le véhicule d’un avocat soupçonné, par exemple, de collaboration avec une puissance étrangère.

Je suggérais pour ma part que l’on retire du texte ces protections spéciales et ces interdictions, et que l’on prévoie en revanche de faire siéger à la CNCTR des parlementaires, des magistrats et des avocats – bâtonniers, anciens bâtonniers ou membres du Conseil national des barreaux –, même si les amendements que j’avais posés en ce sens se heurtaient à un problème de recevabilité financière. Un tel dispositif serait mieux à même de garantir les droits de la défense et le secret de l’instruction. Les renseignements collectés ne doivent pas « contaminer » une procédure qui n’existe pas encore mais qui pourrait être déclenchée.

Mais nous aurons d’autres occasions d’évoquer ces sujets...

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Bien que certains éléments de son raisonnement se tiennent, je n’irai pas aussi loin que Sandrine Mazetier. Ce qui justifie les protections particulières proposées par le Gouvernement ou introduites par la commission, c’est que les professions concernées concourent au bon exercice de la démocratie. Les médecins, quant à eux, bénéficient de la protection du secret médical, tout comme bien d’autres catégories professionnelles bénéficient de telle ou telle disposition spécifique. Il ne me semble donc pas nécessaire d’isoler cette profession, car on trouvera toujours de bonnes raisons d’en ajouter d’autres à cette liste. Mieux vaut nous en tenir aux professions traditionnellement reconnues dans notre droit pour concourir au bon fonctionnement de la démocratie.

Voilà pourquoi je suis défavorable à l’ajout des médecins.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le sous-amendement no 419 ne vise pas à encadrer une profession. Il s’agit simplement de veiller à ce que la CNCTR protège le secret médical en tant que tel. On peut établir un parallèle avec le secret des sources pour les journalistes. Après tout, les professions soumises à un régime de ce type ne sont pas si nombreuses !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais le secret est déjà protégé par la loi !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faut être clair : on a l’impression, à vous entendre, qu’il s’agit de protéger les médecins. Or il ne s’agit pas de protéger les médecins !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Votre sous-amendement parle pourtant des médecins !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pardonnez-moi, c’est le sous-amendement que j’ai déposé : je sais de quoi je parle !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Bien sûr que j’ai écrit le mot « médecin », mais je parle du secret médical ! Ce n’est pas le médecin qu’on protège avec le secret médical, mais les citoyens !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En quoi le secret médical intéressera-t-il les services de renseignement ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je propose d’introduire le mot « médecin » pour protéger le secret médical. Mais on a le sentiment, à vous entendre, que l’objectif serait de protéger la catégorie des médecins : ce n’est pas le sujet ! L’objectif défendu par ma collègue, qui devrait nous rassembler les uns et les autres, est de protéger tous les citoyens à travers le secret médical. Si la profession de médecin est protégée, ainsi que Mme la garde des sceaux l’a rappelé tout à l’heure, c’est bien parce que cette profession porte le secret médical – chacun ici devrait réfléchir à l’importance de le protéger.

L’amendement no 394 n’est pas adopté.

Les sous-amendements identiques nos 418 et 426 ne sont pas adoptés, non plus que les sous-amendements nos 390 et 419 .

L’amendement no 386 deuxième rectification est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement no 133 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s’agit d’un sujet absolument essentiel, à savoir les moyens accordés à la commission pour veiller à ce que les données collectées au titre de l’autorisation d’interception soient bien conformes à ce qui a été visé. En clair, il faut absolument qu’il y ait une traçabilité et une transparence des interceptions effectuées. À ce titre, il faut permettre à la commission d’effectuer son travail dans les meilleures conditions.

Le Gouvernement avait initialement prévu que les données collectées seraient centralisées par service, ce qui rendait le travail de la commission absolument impossible. Or il est indispensable que celle-ci, pour effectuer son travail, bénéficie d’une centralisation des données. Vous allez m’expliquer que c’est difficile, qu’il faut veiller aux problématiques du renseignement, aux conditions dans lesquelles tout cela doit être crypté ; mais il faut que la commission dispose d’un lieu dans lequel elle puisse effectuer son travail de contrôle des interceptions effectuées.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable, pour des raisons liées aux auditions auxquelles nous avons procédé. J’ai souvent utilisé comme argument la référence au droit existant et aux interceptions de sécurité, parce qu’il existe un lieu unique, le groupement interministériel de contrôle, dit GIC, où tout aboutit.

En l’occurrence, nous aurons affaire à des objets qui sont par essence nomades. La loi valant pour la totalité de la République, il est compliqué d’organiser la centralisation des données dans un seul lieu alors que les outils peuvent être utilisés en Polynésie ou en Nouvelle-Calédonie. C’est la raison pour laquelle les personnes que nous avons auditionnées, notamment celles ayant l’habitude du contrôle, nous ont dit qu’il était beaucoup plus pertinent de prévoir que le contrôleur puisse accéder aux dispositifs et aux locaux où la traçabilité est organisée.

De fait, c’est vraiment là l’élément le plus décisif : il faut, et le texte le prévoit, à la fois la traçabilité – la mémoire, l’usage, le lieu, le moyen, le motif – et la centralisation de ce qui a été collecté. Il ne peut pas y avoir d’entrave au contrôleur dans cette fonction ; le texte ne prévoit justement pas de capacité d’entrave. La question de la centralisation est de ce fait moins importante que l’accès aux dispositifs et aux lieux. L’avis est donc défavorable pour des raisons opérationnelles.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Le Gouvernement émet également un avis défavorable, tout en étant très sensible aux demandes qui ont été formulées d’un accès facile, direct et centralisé aux données, demandes exprimées à plusieurs reprises au moment de la préparation de ce texte. Mais l’important est en effet, comme vient de le dire M. le rapporteur, qu’il n’y ait pas d’entrave à l’accès à ces données. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite simplement poser une question au rapporteur : comment la commission pourra-t-elle faire son travail quand les données collectées par telle ou telle partie d’un service de renseignement seront stockées dans des dizaines de lieux ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cela veut dire, en clair, que la commission sera dans l’incapacité d’effectuer sa mission en respectant l’objectif que vous voulez, que je veux et que nous voulons tous.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faut centraliser l’information, sinon cela ne marchera pas !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’interviens pour faire suite à ce qu’a dit Lionel Tardy tout à l’heure sur l’indépendance des hautes administrations – indépendantes, certes, mais qui dépendent quand même d’un ministère de tutelle ! On sait très bien ce qu’il se passe quand on ne précise pas les contours, les attributions et les moyens de ces administrations indépendantes.

Je prendrai l’exemple de la HADOPI, haute autorité indépendante : lorsqu’on coupe le robinet des finances et qu’on passe d’un budget de 11 millions à 6 millions, les missions ne peuvent pas être les mêmes.

Il est important que nous puissions débattre aujourd’hui de l’indépendance car cela concerne la défense de nos libertés, mais les moyens qui seront affectés à la CNCTR doivent absolument être blindés et bornés de façon importante, afin d’éviter dans les années à venir des changements d’attitude dans les moyens attribués à cette commission.

L’amendement no 133 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 277 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Amendement purement rédactionnel, madame la présidente.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis également défavorable parce que, avec cette modification qui vise à remplacer les mots : « la date de sa mise en oeuvre » par les mots : « sa date », l’alinéa serait ainsi rédigé : « Il est établi, sous l’autorité du Premier ministre et dans les conditions définies par lui, un relevé de chaque mise en oeuvre d’une technique de recueil de renseignement, qui mentionne sa date, celle de son achèvement et celle de sa première exploitation ». Nous n’avons donc pas le sentiment d’avoir obtenu une grande clarification ; mais peut-être pourriez-vous nous donner des explications ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C’est purement stylistique puisqu’il s’agit bien d’une date : en l’état, le texte évoque la date de la mise en oeuvre de la mise en oeuvre d’une technique – mais chacun fait comme il veut !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il nous semble qu’indiquer « sa date de mise en oeuvre » est plus précis parce qu’il pourrait s’agir de la date du relevé ou de la date de construction de l’outil. Or pour des raisons tenant au contrôle, ce qui nous intéresse, c’est de contrôler la mise en oeuvre de l’outil, donc « sa date de mise en oeuvre ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Honnêtement, on ne va pas se battre sur ce sujet : il y a suffisamment de sujets sur lesquels s’expliquer ! Je pense que la rédaction que je propose est plus limpide, mais comme mon avis n’est pas partagé, je ne me bats pas sur cette question et je retire l’amendement.

L’amendement no 277 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 54 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’ai demandé tout à l’heure que les registres d’autorisation soient communiqués à la CNCTR ; ici, ce sont les registres des techniques employées. Vous allez me répondre que c’est beaucoup plus lourd et conséquent et donc plus difficile à transmettre : vous voyez que j’ai déjà anticipé vos remarques !

Si vous ne voulez pas les transmettre directement, je propose donc qu’ils soient au moins mis à jour en temps réel : comme cela, si des commissaires de la CNCTR veulent accéder au registre, celui-ci sera bien à jour, évitant ainsi tout manque d’information ou toute dissimulation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’avis est défavorable : le texte nous paraît suffisamment complet puisqu’il prévoit la mention de la date de mise en oeuvre – « sa date », donc ! (Sourires) –, la mention de la date d’achèvement, celle de la première exploitation et celle de la nature des renseignements collectés. Cela nous paraît suffisamment complet : on ne voit pas ce que la notion d’actualisation en temps réel, qui par ailleurs est relativement ambiguë, apporterait. Avis défavorable.

L’amendement no 54 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Philippe Folliot, pour soutenir l’amendement no 116 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’alinéa 50 prévoit un relevé de chaque mise en oeuvre d’une technique de renseignement mentionnant la date de sa mise en oeuvre, celle de son achèvement et celle de sa première exploitation, ainsi que la nature des renseignements collectés. Il précise que ce relevé est tenu à la disposition de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, qui peut y accéder à tout moment.

Cet amendement a pour objet de tenir compte des exigences tenant à la nature même de la profession d’avocat ou de journaliste, tout comme de la fonction de parlementaire, nécessitant la mise en oeuvre d’une procédure spécifique ; cela a été abordé très longuement tout à l’heure.

Le présent amendement vise à prévoir, dans le cas où un membre de ces professions ou exerçant la fonction de parlementaire ferait l’objet d’une autorisation de mise en oeuvre des techniques de recueil de renseignement, la communication des données collectées serait faite auprès de la CNCTR et ce, de manière automatique.

C’est important compte tenu de la spécificité de ces professions car on pourrait aussi imaginer qu’un membre de ces professions ou exerçant la fonction parlementaire soit l’objet de collecte de renseignements sans lien ni recherche immédiate d’informations par la CNCTR. Cela permettra d’y pourvoir.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable, non pas parce que l’idée nous déplaît mais parce que nous craignons le risque de l’a contrario. Si on précise que l’accessibilité ou la transmission du registre est garantie pour ces professions, on va dire que les autres n’en bénéficient pas. Nous avons donc gardé un principe de lisibilité et de prévisibilité de la loi : les registres sont tenus à la disposition de la CNCTR.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis, d’autant qu’il est prévu que la CNCTR puisse se prononcer. Si elle estime que sa recommandation n’est pas satisfaite par le Premier ministre, elle pourra saisir le Conseil d’État – en formation de jugement spécialisée, dans l’état actuel du texte, mais nous avons déjà indiqué que nous reviendrions plus tard sur ce point avec un amendement.

Ainsi que vient de l’indiquer M. le rapporteur, c’est donc la question de l’accès aux registres qui importe. Pour ces raisons, l’avis du Gouvernement est également défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne comprends pas : qui peut le plus, peut le moins ! Vous avez dit que même si cela pouvait aller dans le bon sens, vous redoutez que des dispositions spécifiques pour ces deux professions et pour cette fonction ne posent a contrario un problème aux autres. Je ne le crois pas du tout. Le droit commun restera donc commun pour tous, quand bien même il existerait des éléments spécifiques pour ces deux professions et pour cette fonction, éléments dont tous, dans cette assemblée, soulignent la réalité de façon unanime. Je trouve donc que les arguments que vous mettez en avant ne sont pas du tout convaincants.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre, j’aimerais à ce stade obtenir une clarification de la position du Gouvernement sur ces questions de professions et de fonction, dont on a dit tout à l’heure qu’elles jouaient un rôle très particulier dans les institutions et dans la démocratie.

Un régime spécial a été prévu pour l’urgence, si j’ai bien compris. Or voilà que M. Urvoas nous indique qu’il ne faut pas préciser que les données sont transmises parce que cette précision impliquerait, a contrario, que les données ne sont pas transmises lorsque d’autres professions sont concernées ! Cela revient, en fait, à dénier sa spécificité à la fonction parlementaire et refuser que les sources des journalistes, des avocats ou des juges soient l’objet d’une protection particulière. Je trouve que l’argument n’est pas pertinent.

Je voudrais donc que le Gouvernement nous précise sa position. Les deux professions visées et la fonction de parlementaire font-elles l’objet d’une protection particulière ou pas, que ce soit en temps normal ou en cas d’urgence ? Et, ensuite, comment l’information est-elle transmise à la commission ? Si vous aviez la gentillesse de nous dire ce que vous avez en tête, je crois que ce serait très utile.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Je suis surprise, monsieur Lellouche, parce que je crois que vous étiez dans l’hémicycle, tout à l’heure, lorsque j’ai indiqué les conditions dans lesquelles des renseignements pourraient être recueillis sur les membres de ces professions. Ce sera donc un simple rappel.

Tout d’abord, il n’est pas possible d’invoquer l’urgence absolue en ce qui les concerne. Ensuite, le recueil d’informations est soumis à des conditions : la commission statue en formation plénière ; elle est informée des modalités d’exécution ; les données collectées lui sont transmises, de façon à lui permettre d’apprécier la nécessité et la proportionnalité du recueil de renseignements.

L’amendement no 116 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie de deux amendements, nos 178 rectifié et 353 , pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement no 353 fait l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 391 , 372 , 392 , 376 , 373 , 374 et 393 .

Les sous-amendements nos 372 et 392 sont identiques, de même que les sous-amendements nos 374 et 393 .

La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 178 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La question de la durée de conservation des données ou des correspondances est extrêmement importante. Nous en avons débattu lors des travaux en commission, et je me rappelle bien les interventions et les amendements du rapporteur.

Le présent amendement vise à maintenir les délais actuellement prévus pour la conservation des correspondances enregistrées, hors les cas où la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, qui remplacera l’actuelle Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, autoriserait une prorogation. Il reprend, vous l’aurez noté, une partie de l’amendement que le rapporteur avait déposé en commission, avant de le retirer, et qui visait à ce que la question des délais de conservation des données – question sensible et importante, vous le savez – ne soit pas renvoyée à un décret.

Contrairement à l’amendement no 353 du groupe socialiste, l’amendement no 178 rectifié maintient les délais de conservation des données actuellement en vigueur : dix jours pour les correspondances ; trois ans pour les données de connexion.

L’allongement général de la durée de conservation des données des interceptions de sécurité, actuellement de dix jours, qui serait portée à trente jours, risque de remettre en cause le contrôle opéré par la commission, ou, en tout cas, de le fragiliser. S’il peut parfois exister des problèmes ponctuels de traduction ou de déchiffrement, un allongement généralisé de cette durée serait excessif. Pour tenir compte de ces difficultés ponctuelles qui peuvent exister pour transcrire une interception, il est donc proposé que la commission puisse porter cette durée à trente jours, mais sur demande.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Pascal Popelin, pour soutenir l’amendement no 353 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sergio Coronado vient de faire référence au débat que nous avons eu en commission. Nous avons estimé qu’il était nécessaire de ne pas renvoyer ces questions de délai à un décret et que le législateur devait épuiser sa compétence en tranchant lui-même – ce point a fait consensus. Cependant, le consensus s’arrête là, puisque la proposition que je fais n’est pas exactement la même que celle de mon collègue Sergio Coronado.

L’amendement no 353 a pour objet de prévoir un régime légal de durée de conservation précis et différencié suivant la technique concernée, sans renvoyer à un décret – conformément à ce que je viens de dire – le soin de préciser des dispositions qui touchent d’aussi près à la garantie des libertés publiques. Les auteurs de l’amendement reprennent la position adoptée par l’Assemblée nationale à l’occasion de l’examen de la loi relative à la lutte contre le terrorisme de novembre 2014. Il maintient en outre un délai de conservation de cinq ans pour les données de connexion, délai déjà adopté par le Parlement pour le dispositif PNR à l’occasion de la loi de programmation militaire. Enfin, il propose de conserver que soient conservés pendant quatre-vingt-dix jours les renseignements collectés grâce à une sonorisation, une prise d’image ou une captation de données informatiques, là où le texte du Gouvernement prévoit une durée de conservation de douze mois.

L’amendement no 353 a également pour objet de faire courir la durée de conservation à partir de l’exploitation, qui est elle-même la matérialisation de l’ingérence dans la vie privée, et non du recueil. Tenant compte de cette évolution et dans l’objectif de limiter les délais de conservation en cas de non-exploitation, il pose enfin le principe d’une destruction au bout de six mois.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en arrivons aux sous-amendements.

La parole est à M. Sergio Coronado, pour défendre le sous-amendement no 391 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je présente trois sous-amendements à l’amendement du groupe socialiste, pour plusieurs raisons.

Le groupe socialiste veut une augmentation très sensible de la durée de conservation des correspondances, qui passe ainsi de dix à trente jours, comme je l’ai indiqué tout à l’heure. Lors de l’examen de la loi relative à la lutte contre le terrorisme, nous avions pourtant finalement rejeté un tel allongement. D’ailleurs, ces trente jours sont en fait six mois, car le délai ne court qu’à partir de l’exploitation, il est même indéfini pour les données chiffrées. De telles dispositions exposent le texte à un risque sérieux de censure, surtout si l’on se réfère à l’avis du Conseil d’État, qui préconise que le délai commence à courir à partir du recueil des correspondances. C’est pourquoi nous proposons, par le sous-amendement no 391 , que le délai de conservation reste fixé à dix jours à partir du recueil. De même, les sous-amendements nos 392 et 393 visent à ce que soient conservés les délais actuellement prévus.

Le groupe socialiste ne nous a en fait pas justifié la nécessité d’un tel allongement, alors même que le délai de conservation des données cryptées devient indéfini ! M. le rapporteur pourrait intervenir et rappeler le bien-fondé de l’amendement qu’il avait présenté en commission avant de le retirer. Peut-être pourra-t-il s’en remettre à la sagesse de ces collègues lorsqu’il lui sera demandé de donner son avis sur l’amendement du groupe écologiste, ainsi que sur les sous-amendements de celui-ci à l’amendement no 353 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Puis-je donc considérer, cher collègue, que vous avez défendu non seulement le sous-amendement no 391 mais aussi les sous-amendements nos 392 et 393  ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir le sous-amendement no 372 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En fait, je défendrai les sous-amendements nos 372 et 376 , puis les sous-amendements nos 373 et 374 , si vous l’acceptez, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est intéressant de proposer, comme l’avait fait le rapporteur en commission, un récapitulatif des durées de conservation des données. Et il appartient à la loi de les fixer, pas à un décret, je suis d’accord.

Oui, fixer ces durées dans la loi donne plus de garanties, à condition de ne pas en choisir de trop longues. Malheureusement, je crains, au vu de cet amendement du groupe socialiste, que ce ne soit encore le cas. Je propose donc plusieurs aménagements qui sont l’objet de mes quatre sous-amendements.

Les sous-amendements nos 376 et 372 visent à parvenir à une position équilibrée et, oserai-je dire, consensuelle. Comme l’avait proposé le rapporteur en commission, il s’agirait de s’en tenir à une durée de conservation de dix jours à compter de leur première exploitation pour les correspondances enregistrées. C’est la position qui avait été adoptée par la commission mixte paritaire lors de l’examen de la loi relative à la lutte contre le terrorisme. Elle semble plus raisonnable que celle qui nous est proposée.

Ensuite, ces sous-amendements ont pour objet de prendre en compte les recommandations du Conseil d’État, qui estime possible de passer de dix à trente jours, à condition que ce délai commence à courir à partir du recueil. Troisièmement, suivant en cela la proposition du groupe socialiste, ils distinguent deux durées, dont l’une est allongée, mais sans que soit retenu un délai de conservation de six mois, qui paraît très excessif.

J’en viens aux sous-amendements nos 373 et 374 . Quel chemin parcouru par le groupe socialiste, depuis les lois LOPPSI par exemple ! À l’époque, ils étaient scandalisés. Aujourd’hui, ils veulent sans cesse allonger les durées de conservation des données en allant plus loin que le rapporteur – il est quand même important de le rappeler.

Personnellement, je pense qu’il ne faut toucher à ces durées de conservation que d’une main tremblante. Je propose donc de réduire celles qui sont prévues par l’amendement no 353 . En ce qui concerne les renseignements collectés en recourant à la captation des données informatiques, la sonorisation et la prise d’images, il est plus raisonnable de s’en tenir à la proposition du rapporteur, à savoir une durée de trente jours à compter de la première exploitation – c’est l’objet du sous-amendement no 373 . J’admets, cette fois-ci, qu’instaurer un délai de six mois à compter du recueil semble constituer une avancée par rapport au droit existant – autant donc conserver cette proposition.

Concernant le sous-amendement no 374 , personnellement, même si je sais qu’il est d’autres points de vue sur cette question, je pense qu’il est excessif de conserver les données de connexion pendant cinq ans. Une durée de trois ans me paraît plus raisonnable. Les données de connexion, s’il s’agit bien de cela, sont assez limitées, et leur exploitation ne doit pas nécessiter autant de temps, surtout qu’il ne s’agit pas, à l’alinéa de l’amendement sur lequel porte ce sous-amendement, de données chiffrées.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements et sept sous-amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est aimable de soutenir la position du rapporteur, mais en l’espèce je n’avais pas de position, puisque j’ai retiré en commission l’amendement dont vous avez parlé, et que celui-ci n’a donc pas été soumis au vote.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C’est d’autant plus facile de le soutenir !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis d’accord !

Rappelons, pour que chacun l’ait bien présent à l’esprit, quel est le cadre. Il y a aujourd’hui trois types de durée de conservation sur lesquelles il vous est demandé de vous prononcer.

Dans le droit en vigueur, les interceptions de sécurité sont conservées dix jours. Le groupe socialiste propose, par son amendement no 353 , de porter ce délai à un mois, soit la durée que l’Assemblée nationale avait retenue dans le cadre de la loi relative à la lutte contre le terrorisme, dont Sébastien Pietrasanta était le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le délai envisagé s’inscrit donc dans la continuité de la position prise précédemment par l’Assemblée nationale.

La deuxième durée de conservation, c’est celle des données de connexion. Le Gouvernement propose de la fixer à cinq ans, encore une fois dans un souci de parallélisme des formes, puisque cette durée a été retenue pour le PNR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il paraît donc, là encore, logique d’en rester à cette durée.

En ce qui concerne la troisième durée de conservation, il faut remercier le Gouvernement d’avoir fait un pas. Il souhaitait que cela soit renvoyé à un décret, mais nous étions tous d’accord, en commission, pour considérer qu’elle devait figurer dans la loi, comme l’a très justement rappelé Pascal Popelin. Le Gouvernement l’a accepté – c’est un compromis –, mais il espérait que soit adoptée une durée de conservation de douze mois. Un mois me semblait acceptable, et j’avais indiqué en commission qu’il ne me paraissait pas possible de transiger à six mois. C’est donc une durée de trois mois qu’il est envisagé d’inscrire dans la loi. Cette position me paraît convenable.

Je vais donc émettre un avis favorable, avec l’assentiment de la commission, sur l’amendement no 353 et un avis défavorable sur l’autre amendement et sur l’ensemble des sous-amendements. Peut-être, par cohérence, Sergio Coronado pourrait-il retirer l’amendement no 178 rectifié : comme il proposait de sous-amender l’amendement du groupe socialiste, cela permettra de rendre les votes plus simples.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis défavorable à l’amendement no 178 rectifié et aux sous-amendements à l’amendement no 353 . Quant à celui-ci, nous y sommes favorables.

Le Gouvernement avait effectivement envisagé qu’un décret en Conseil d’État précise les durées de conservation – je ne rappellerai pas les durées prévues actuellement, car M. Popelin et M. le rapporteur l’ont déjà fait –, étant bien entendu que le projet de loi fixerait pour sa part les durées maximales selon la technique utilisée. La volonté de la commission, exprimée par le rapporteur, est d’inscrire directement ces durées de conservation dans la loi. Le Gouvernement souscrit donc à cette démarche et se rallie à l’amendement no 353 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais en revenir au sous-amendement no 393 de mon collègue Sergio Coronado et aux différences de traitement entre les correspondances et les données de connexion, lesquelles sont bien, en fait, des métadonnées.

On n’a pas encore assez dit, dans cet hémicycle, à quel point ces métadonnées sont importantes – aussi importantes, en définitive, que le contenu des messages interceptés, étudiés, collectés et, puisque c’est l’objet de la discussion que nous avons maintenant, conservés.

Pourquoi souhaitons-nous que la durée de conservation soit réduite ? Prenons tout simplement quelques exemples, et vous comprendrez très vite pourquoi les données de connexion sont aussi importantes que les contenus.

Vous vous êtes par exemple connectés à un site de rencontres échangiste ou fétichiste deux fois par jour pendant un mois, mais – nous dit-on – on ne sait pas du tout ce que vous avez écrit ou lu…

Autre exemple, vous avez appelé Sida Info Service pendant douze minutes, puis un laboratoire d’analyses médicales pendant deux minutes. Une semaine plus tard, le laboratoire vous a rappelé. On ne sait pas ce que vous vous êtes dit, mais il vous a rappelé, et vous avez ensuite appelé votre médecin pendant quinze minutes, mais, encore une fois, on ne sait pas vraiment de quoi vous avez parlé.

Vous comprendrez simplement, par ces deux exemples tirés de la vie quotidienne, à quel point les données de connexion fournissent finalement autant d’informations que le contenu des messages. Il ne faut donc pas accepter que la durée de conservation soit de cinq ans, en considérant tout simplement qu’elles sont de seconde zone, ou moins utiles, ou moins intéressantes pour l’analyse des données.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En ce qui me concerne, je suis tout à fait favorable à l’amendement no 353 du groupe socialiste, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, comme l’a dit M. le rapporteur, il met en cohérence les délais des différents textes que nous avons votés. Ensuite, en matière de terrorisme, il est important de conserver les renseignements pendant une certaine durée…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma chère collègue, je parle de la situation spécifique du terrorisme.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, mais ce n’est pas ce que dit le texte !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le terrorisme, disais-je, est l’une des raisons de fond de ce projet de loi. Ce que je voulais dire, c’est que certaines personnes peuvent être « dormantes » un certain temps, puis passer à l’action. Il est important d’avoir suffisamment de recul, de pouvoir remonter suffisamment en amont, pour connaître les contacts de la personne et mettre au jour toutes les ramifications de son réseau. Cet amendement me paraît donc sage, et intéressant.

N’oublions pas la finalité de ce projet de loi : il est important de faire en sorte que nos services puissent exploiter, dans des délais raisonnables, toutes les données utiles pour mener à bien une enquête.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mme Attard a soulevé un problème central, qui suscite une inquiétude à travers tout le pays. Dans le même temps, il faut reconnaître que les grandes multinationales américaines, qui organisent le trafic d’informations, ont déjà, en réalité, stocké ces métadonnées.

Depuis le début de cette discussion, je me pose la question suivante : à quoi tout cela sert-il ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Stocker des données de cette sorte pendant des années est-il utile à la République ?

Tel qu’il est rédigé, ce projet de loi comporte sept finalités.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La lutte contre le terrorisme n’est que l’une d’entre elles. J’avoue donc avoir du mal à me faire un jugement sur cette question. Je ne sais pas dans quelle mesure la commission des lois a travaillé avec des experts du renseignement pour déterminer les délais applicables aux différents types de données – un mois, trois mois cinq ans…

Mme Attard eu a raison de mettre le doigt – si j’ose dire – sur ces flux, car ce qui est certain, c’est qu’en la matière, avec les techniques actuelles, le renseignement ne se contentera pas de lire l’adresse sur l’enveloppe, mais ouvrira le courrier. Il s’agit donc bien, effectivement, d’un système de contrôle de masse, qui plus est sur une longue période. C’est un vrai problème.

Je ne dispose pas, pour ma part, des informations me permettant de juger s’il est utile ou non de conserver ce type de données pendant cinq ans ou plus. Un amendement du groupe UMP propose même de porter cette durée à sept ans : est-ce utile ? Très franchement, si l’on considère les résultats de ce type d’espionnage, tel qu’il est pratiqué aux États-Unis depuis des années, on s’aperçoit que l’effet sur les interceptions de terroristes est nul. Je dis bien : nul ; pas un seul attentat n’a été déjoué grâce aux informations recueillies par ces techniques d’interception de réseaux.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J’aurais aimé que nous discutions de cela.

Mme Attard a posé une deuxième question : combien de personnes comptez-vous engager, qui soient techniquement et éthiquement formées pour gérer cette montagne de données que vous allez stocker pendant des années ? Je dispose de chiffres sur cette question, mais vu l’heure tardive, je ne les citerai pas ; je me contenterai de vous dire que c’est exponentiel : plus vous augmentez la masse de données, plus c’est cher. Pour illustrer cela, on peut reprendre l’image de la meule de foin et de l’aiguille : si vous multipliez par cent ou mille la taille de votre meule de foin, l’aiguille sera encore plus difficile à trouver. Je ne suis donc pas certain que tout cela serve à quoi que ce soit : je suis très sceptique quant à ces délais.

L’amendement no 178 rectifié n’est pas adopté.

Le sous-amendement no 391 , les sous-amendements identiques nos 372 et 392 , les sous-amendements nos 376 et 373 et les sous-amendements identiques nos 374 et 393 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L’amendement no 353 est adopté et les amendements nos 68 , 56 , 177 , 95 , 176 , 37 , 55 , 117 , 144 , 299 et 96 tombent.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 224 .

L’amendement no 224 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement no 121 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comme je l’ai dit en commission, je n’ai pas bien compris le choix de cette durée : pourquoi passons-nous de trois ans à cinq ans ? Allez savoir ! J’ai déjà posé la question à M. le rapporteur ; je la pose à présent au Gouvernement.

Il me semble me rappeler que notre collègue Éric Ciotti proposait de porter cette durée à sept ans. Pourquoi pas dix ans ou quinze ans ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La durée de trois ans présente l’avantage de la cohérence avec le code de la sécurité intérieure. Je ne comprends toujours pas pourquoi il faudrait indéfiniment augmenter la durée de conservation de ces données.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur Morin, sans m’aventurer sur le fond du débat, je crains que vous ne défendiez pas le bon amendement. Vous avez la parole sur l’amendement no 121 , qui tend à insérer un alinéa après l’alinéa 53, et non sur l’amendement no 117 , lequel est tombé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous avez raison, madame la présidente : veuillez m’excuser !

L’amendement no 121 s’inspire du régime britannique. Il s’agit de prévoir très clairement des sanctions dans le cas où des agents des services spécialisés viendraient à ne pas respecter la loi. On me répliquera certainement que des incriminations sont déjà prévues par le code pénal en la matière ; j’estime pour ma part que, compte tenu du nouveau cadre fixé par ce projet de loi, notamment des procédures d’urgence, il serait bon que la loi prévoie clairement une incrimination nouvelle relative aux techniques de renseignement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Hervé Morin a anticipé mes critiques !

De deux choses l’une : soit les faits sont punissables au titre de l’article L. 226-15 du code pénal, auquel cas votre précision n’est pas utile, soit – et c’est ma conviction – ils se situent dans le cadre spécifique du renseignement, dont les agents sont soumis à un régime particulier. Il n’est donc pas de bonne politique de recopier les dispositions du code pénal dans le code de la sécurité intérieure. La commission a donc repoussé cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

L’avis du Gouvernement est défavorable. Cet amendement vise à aggraver les sanctions en matière de compromission du secret de la défense nationale, mais il est déjà satisfait, car le code pénal prévoit sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende. Votre amendement, par contraste, propose un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. En cas de violation du secret professionnel, la sanction prévue est d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

L’amendement no 121 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les amendements nos 348 et 364 de M. le rapporteur sont rédactionnels.

Les amendements nos 348 et 364 , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 240 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous avons déjà abordé cette question en commission, mais l’amendement no 240 est rédigé d’une manière différente que celui que j’avais alors présenté.

La question de fond est importante : que faire des données dont le recueil a été autorisé du chef d’une finalité, mais qui relèvent en réalité d’une autre finalité ? L’amendement que je présente propose une solution similaire aux amendements suivants du groupe UMP.

Cette solution est la suivante : pour exploiter une donnée relevant non pas de la finalité individuelle de l’autorisation, mais d’une finalité générale, il faudra une nouvelle autorisation. Lors de nos débats en commission, le président Urvoas avait évoqué l’idée d’une sorte de réquisitoire supplétif, si j’ose dire, à ceci près qu’il s’agirait non pas de procédure judiciaire, mais de procédure administrative. Il s’agit quoi qu’il en soit d’exiger une nouvelle autorisation, afin qu’il n’y ait pas d’exploitation incidente d’une donnée. Il nous semble que cela permettrait de garantir l’équilibre de ce dispositif, sans altérer son efficacité.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La commission a repoussé cet amendement. Guillaume Larrivé l’a dit très justement : le réquisitoire supplétif existe dans le domaine judiciaire ; or en matière de justice administrative, la situation est plus compliquée. Le dispositif proposé par M. Larrivé exige une nouvelle autorisation chaque fois qu’il s’avère qu’une donnée ne correspond pas à la finalité pour laquelle elle a été recueillie. La commission craint que les services soient tentés d’inscrire dès le départ des finalités très larges pour contourner ce dispositif. L’avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

L’avis du Gouvernement est également défavorable. Certes, la règle proposée par M. Larrivé est éprouvée en matière judiciaire, mais dans le domaine du renseignement, il est bon que les informations recueillies sur la base d’une finalité puissent être utilisées malgré tout si la finalité est différente. Pour cette raison, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

L’amendement no 240 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 267 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je serai bref, puisque cet amendement du groupe UMP est similaire à celui que vient de défendre Guillaume Larrivé. Je regrette, madame la ministre, que vous l’ayez rejeté. Notre dispositif vise à préciser qu’il n’est pas possible d’utiliser une donnée pour une finalité différente de celle pour laquelle elle a été recueillie : il est donc plus protecteur pour les libertés que le dispositif prévu par le projet de loi.

Je précise, madame la présidente, que cette présentation vaut aussi pour l’amendement suivant, no 268, qui va dans le même sens que celui qu’a défendu Guillaume Larrivé.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis défavorable. Je rappelle simplement que la commission peut effectuer un contrôle à tout moment. C’est une disposition importante du texte.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Une fois n’est pas coutume, l’amendement de M. Larrivé m’intéresse car il répond à des problèmes qui ne me paraissent pas totalement résolus dans le projet de loi. Je pensais pourtant que le travail mené avec M. le rapporteur nous aurait permis d’avancer.

Je rappelle que la demande d’autorisation peut être motivée par une ou plusieurs finalités – je ne reviendrai pas sur le débat sur la finalité unique ou multiple de la demande d’autorisation. De surcroît, dès lors que, par exemple, le travail de déchiffrage de ces données répond à plusieurs finalités, des données incidentes, qui n’entrent pas dans le champ de ce qui était initialement autorisé, peuvent être recueillies. Comment répondrons-nous à ce problème soulevé par M. Larrivé ? Peut-être la formulation de son amendement n’est-elle pas adaptée – c’est ce qu’on lui a répondu en commission –, mais le fait que l’ensemble des données puissent être traitées, y compris celles qui n’entrent pas dans le champ de l’autorisation octroyée, pose une vraie question. Sur ce point, le texte est lacunaire. Il serait bon que le rapporteur ou le Gouvernement apportent une réponse précise. À défaut, toutes les données seront exploitées et l’on prétendra par la suite qu’elles relevaient des finalités mentionnées dans la demande d’autorisation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tant sur le plan politique que technique, le fait que M. Ciotti, M. Coronado et moi-même soyons d’accord et nous opposions à Mme Taubira n’est pas parfaitement banal. Cela prouve qu’il y a un vrai sujet de fond.

Sur cette question précise, la rédaction actuelle du texte ne protège pas complètement contre tout risque de « chalutage ». Une autorisation est donnée pour recueillir un renseignement au service d’une finalité. Il apparaît que ce renseignement relève d’une autre finalité. Nous ne disons pas qu’il faut jeter à la poubelle ce renseignement. Mais dès lors qu’il a été recueilli dans un champ qui n’a pas été autorisé, la commission doit donner à nouveau son avis. Tel est l’objet de notre amendement. Peut-être sa rédaction n’est-elle pas optimale. Nous avons fait plusieurs tentatives, qui n’ont pas encore reçu l’agrément total de M. Urvoas, mais je suis sûr qu’une réflexion plus approfondie pourrait aboutir à une rédaction consensuelle car c’est un sujet d’intérêt général, qui peut nous rassembler.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma remarque sur la durée de conservation vaut également pour cette disposition. La confusion des genres sur les finalités d’une enquête fait partie des inquiétudes exprimées par beaucoup de gens dans notre pays, qui ne sont pas tous favorables au terrorisme ou naïfs. Ils se disent que le grand nombre de finalités justifiant le recueil de renseignements et le fait que l’autorisation des enquêtes soit donnée le plus souvent sur l’avis d’une seule personne peuvent conduire ensuite à l’exploitation des données pour d’autres finalités.

La vraie question est celle des modalités de contrôle, c’est-à-dire la composition de la commission – nous examinerons cette question ultérieurement. Si elle est composée de magistrats nommés et d’un spécialiste, cela ne suffira pas à garantir que le flot des informations n’est pas utilisé par des services à d’autres fins que celles pour lesquelles leur recueil a été autorisé. Ce sera très difficile à contrôler et beaucoup dépendra de la composition de la commission. L’inquiétude sur l’utilisation des données demeurera toujours.

L’amendement no 267 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’amendement no 268 a été défendu et a recueilli un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

L’amendement no 268 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l’amendement no 349 .

L’amendement no 349 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Nathalie Chabanne, pour soutenir l’amendement no 308 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à instaurer une obligation d’information par la CNCTR du président du tribunal de grande instance, dès lors qu’une autorisation de mise en oeuvre des techniques de renseignement est renouvelée et qu’aucune infraction n’a été constatée. Ce processus permettra la bonne information entre les services de renseignement et le pouvoir judiciaire, notamment pour la finalité des poursuites judiciaires dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il importe en effet de favoriser le continuum entre le renseignement, l’enquête préliminaire et la justice afin de refonder la chaîne pénale de la prévention, détection et arrestation jusqu’à la condamnation, à la détention et à la réinsertion. En outre, cette obligation d’information permettra de renforcer la prise en compte des principes de proportionnalité et de subsidiarité pour le renouvellement des autorisations, que ce soit pour l’avis de la CNCTR ou pour la décision d’autorisation par le Premier ministre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable. Nous avons eu déjà maintes fois l’occasion de rappeler que nous ne souhaitions pas mêler les finalités de la police judiciaire à celles de la police administrative. Or c’est ce que prévoit l’amendement. De plus, aux termes de l’article 40, alinéa 2, du code de procédure pénale, c’est le procureur de la République qui doit être prévenu en cas de nécessité, non le président du tribunal de grande instance de Paris, comme le prévoit votre amendement. L’amendement a donc recueilli un avis défavorable de la commission.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis défavorable, pour les mêmes raisons. Il n’y pas de raison que le président du tribunal de grande instance, magistrat du siège, soit informé. S’il fallait informer une juridiction, ce serait le parquet, le procureur de la République. De plus, vous prévoyez d’informer cette autorité « dès lors qu’aucune infraction n’a été constatée ». Or l’article 40 du code de procédure pénale pose l’obligation de signaler au parquet la connaissance d’un délit ou d’un crime. Le projet de loi n’altère pas cette obligation : le code procédure pénale s’applique totalement.

Si vous m’y autorisez, je souhaiterais changer de sujet et répondre à M. Larrivé. Je suis parfaitement sensible aux arguments qu’il a développés. C’est la raison pour laquelle j’ai précisé, d’une part, que la commission peut exercer son contrôle à tout moment et, d’autre part, que, dès lors que les éléments recueillis relèveraient d’une autre finalité et en cas de demande de renouvellement de l’autorisation, la commission pourrait vérifier la nécessité et la proportionnalité. Je rappelle qu’en cas de nécessité, elle peut saisir le Premier ministre. Si la réponse du Premier ministre n’est pas satisfaisante, elle peut saisir le Conseil d’État, qui statuera non pas en formation spécialisée, comme le prévoyait le texte initial, mais selon la procédure de droit commun.

L’amendement no 308 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi relatif au renseignement.

La séance est levée.

La séance est levée, le mercredi 15 avril, à zéro heure cinquante-cinq.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly