La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Le président de l’Assemblée nationale a reçu du Premier ministre, ce jour, communication du décret du Président de la République en date du 7 juillet 2015 complétant le décret du 12 juin 2015 portant convocation du Parlement en session extraordinaire.
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 8.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 77 rectifié .
Madame la présidente, monsieur le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, cet amendement vise à compléter les dispositions relatives à la délégation unique du personnel – DUP – prévue par le Gouvernement.
Les mesures de simplification et de rationalisation sont, à mon sens, trop peu nombreuses dans ce projet de loi. Mais s’il fallait en citer une, c’est bien l’instauration de la délégation unique du personnel, qui est ouverte aux entreprises de moins de 300 salariés. Cet amendement élargit la possibilité de mettre en place une délégation unique du personnel aux établissements, au lieu de la réserver aux seules entreprises.
La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
Nous avons déjà eu ce débat. La disposition proposée par M. Cherpion, introduite par le Sénat, vise à étendre la DUP, initialement prévue pour les entreprises de plus de 300 salariés, aux établissements de moins de 300 salariés. J’ai déjà eu l’occasion de vous dire, cher collègue Cherpion, que cela ne correspondait pas à la philosophie du projet de loi, car nous avons voulu faire du seuil de 300 salariés un point d’équilibre dans le texte. Pour ces raisons, avis défavorable.
La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, pour donner l’avis du Gouvernement.
Même avis, même analyse.
L’amendement no 77 rectifié n’est pas adopté.
L’instauration d’une délégation unique du personnel est plutôt une bonne mesure. Dès lors, essayons de gommer les effets de seuil le plus possible. Comme M. Cherpion et mes collègues du groupe Les Républicains, je propose donc de substituer, à l’alinéa 4, aux mots : « "deux cents" sont remplacés par les mots "trois cents" » les mots : « "Dans les entreprises de moins de deux cents salariés," sont supprimés ».
Ainsi, la possibilité d’instaurer une DUP serait la plus large possible, puisqu’elle serait ouverte sans limite de seuil. Ce serait, monsieur le ministre, un geste facile que les syndicats ouvriers ne contesteraient pas, qui permettrait de montrer votre ouverture d’esprit, et qui créerait très probablement et très rapidement des emplois.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 61 .
M. Tian a excellemment défendu son amendement. Pour ma part, je propose d’instaurer un seuil à 50 salariés au lieu de 300. Évitons, monsieur le ministre, les effets de seuil complémentaires ! C’est pourquoi je propose de passer au seuil de 50 salariés, qui existe déjà, contrairement au seuil de 300.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ?
Il est déjà possible, sans condition de seuil, de procéder à un regroupement d’instances représentatives du personnel – IRP –, par accord. C’est l’objet même de l’article 9, que nous examinerons un peu plus tard.
Aujourd’hui, le seuil de 300 salariés s’applique seulement à la possibilité pour l’employeur de créer une DUP de manière unilatérale. Ce seuil semble être le bon, dans le cadre de l’équilibre que j’évoquais tout à l’heure. Au-delà, le niveau de syndicalisation nécessite de prévoir un accord. Quelles que soient les modulations proposées, je suis donc défavorable à ces amendements, qui relèvent du même esprit.
Je suis sensible aux arguments qui viennent d’être exprimés. Je remercie M. Tian et M. Vercamer de leurs interventions, et surtout de reconnaître, à travers leurs amendements, les avancées contenues dans ce texte. Mais ils veulent aller encore plus loin – trop loin.
Une organisation a été prévue. Au-delà de 300 salariés, on peut organiser le dialogue social comme on l’entend, dans le cadre d’un accord entre les partenaires sociaux. Même si cette mesure n’est pas toujours partagée, il s’agit d’une grande avancée.
Entre 50 et 300 salariés, la DUP élargie, telle qu’elle est présentée, avec des possibilités de regroupement – comme chacun sait, il ne s’agit pas de fusion –, permet d’avancer.
Je suis donc défavorable à ces amendements, même si j’en comprends l’esprit.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 201 .
Jusqu’à présent, les DUP ne comprenaient que les délégués du personnel et le comité d’entreprise. Ce projet de loi prévoit d’y intégrer les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT.
Nous avons déjà dit à plusieurs reprises notre opposition à cette disposition, qui affaiblit le rôle et la place des CHSCT. Je ne développerai pas longuement, à nouveau, les arguments que nous avons déjà avancés. Les représentants des salariés seront en nombre moins important. Ils devront maîtriser tous les sujets, ce qui ne leur permettra pas d’approfondir toutes les problématiques, notamment les nouvelles questions qui se posent, comme les risques psychosociaux, pour ne prendre que cet exemple. Ce sera particulièrement le cas si les CHSCT sont fusionnés avec les autres instances au sein des DUP.
Outre les interrogations soulevées en matière budgétaire, que j’ai déjà évoquées lors de la discussion générale, les CHSCT ont un pouvoir d’enquête en matière d’accidents du travail, de maladies professionnelles ou à caractère professionnel, ainsi qu’en cas de danger grave et imminent. Ils doivent donc vraiment rester en capacité de mener de telles enquêtes, ce que ne permettra pas leur intégration à la DUP.
Par cet amendement, nous demandons donc que le CHSCT ne puisse pas être intégré à la DUP.
Nous avons déjà eu ce débat à plusieurs reprises, et je comprends combien il est important, eu égard aux prérogatives du CHSCT.
Permettez-moi de repréciser les choses. L’objet de la DUP n’est pas de diluer le CHSCT, mais de regrouper différentes instances au sein d’une seule et même instance tout en conservant leurs prérogatives. Tout au long des débats que nous avons eus en première lecture et en commission, je me suis efforcé, madame Fraysse, de vous démontrer – même si je ne suis visiblement pas arrivé à vous convaincre – qu’il fallait bien distinguer ce qui serait une fusion et ce qui relève à l’évidence d’une autre approche.
Parce qu’ils siégeront dans une même entité, qui ne sera pas issue d’une fusion, les représentants des salariés auront non seulement les appréciations nécessaires aux missions du CHSCT, mais également celles nécessaires à la compréhension des aspects financiers de l’entreprise. Une absence de confrontation des différents impératifs de l’entreprise, liés tant aux orientations stratégiques, aux données financières qu’aux conditions de travail, serait préjudiciable. Je sais que nous partageons cette conviction, madame Fraysse : la richesse des entreprises, c’est aussi les salariés. Nous avons besoin de mêler tous ces éléments. Je vous l’avais déjà dit, et je vous le répète avec beaucoup de conviction.
Malheureusement, je donne un avis défavorable à votre amendement no 201 . Mais encore une fois, je partage votre préoccupation : le CHSCT doit être respecté.
Je veux rassurer Mme Fraysse : le CHSCT sera respecté. Même avis.
Monsieur le rapporteur, vous m’avez au moins convaincue sur un point : comme vous, je sais l’intérêt que peut représenter, pour l’ensemble des salariés, la connaissance des différents aspects du fonctionnement de l’entreprise. De ce point de vue, le fait qu’ils siègent dans une instance qui traite de tous les sujets est un élément positif, un élément de richesse.
Pour autant, nous divergeons sur un autre point : je pense que la spécificité du CHSCT, qui demande un tel travail et qui a une telle importance, ne pourra pas garder dans le nouveau dispositif la qualité qu’elle avait auparavant. Je ne suis pas convaincue, monsieur le rapporteur, par vos arguments.
L’amendement no 201 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 232 .
Monsieur le rapporteur, cet amendement s’inscrit dans la continuité du débat que nous venons d’avoir. Nous avons fait le choix de ne pas revenir sur la question des seuils de 50 ou 300 salariés, même si, comme je le précise dans l’exposé sommaire, nous avions aussi soutenu l’idée d’un accord d’entreprise à partir de 50 salariés – sûrement pour d’autres raisons que celles qui ont amené le Sénat à instaurer ce même seuil…
Pour ne pas revenir sur un débat qui a déjà eu lieu, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, nous proposons de faire en sorte que l’employeur, tout en conservant ses prérogatives – ce qui, je crois, est souhaité dans le texte –, doive motiver son choix de passer en DUP, et que cette motivation fasse l’objet d’un dialogue. Dans un texte relatif au dialogue social, cela me semble très important ! Ce dialogue n’oblige pas l’employeur à tenir compte des avis qui se seront exprimés, puisque la décision de faire le choix de la DUP lui appartient in fine ; par contre, il permet de motiver ce choix et de l’expliquer, y compris à celles et ceux qui siégeront demain au sein de la délégation unique du personnel.
Cet amendement me semble de bon sens. Sans modifier les seuils, il permet de faire en sorte que l’employeur ne soit pas, dès le départ, dans une logique autoritaire, mais dans une logique de dialogue afin de convaincre les partenaires sociaux de l’intérêt de cette DUP.
Je comprends la démarche initiée par notre collègue Cavard, qui consiste à acter qu’il y a eu un débat, une information, un échange sur la mise en place de la DUP, bien que cela ne remette pas en cause les prérogatives qui sont celles que nous avons souhaité donner aux chefs d’entreprises – nous parlons bien des entreprises de moins de 300 salariés.
Inévitablement, ce débat aura lieu et cette information sera donnée. J’imagine mal qu’un chef d’entreprise puisse mettre en place une DUP sans avoir un échange avec l’ensemble des salariés.
De ce fait, je ne suis pas sûr qu’il soit nécessaire d’inscrire ce débat dans la loi. Pour ces raisons, tout en étant d’accord avec le principe développé par M. Cavard, je donne un avis défavorable à l’amendement no 232 .
Défavorable également. Je comprends votre intention, monsieur Cavard, mais prévoir une obligation de motivation entraînerait des conséquences juridiques assez lourdes. Il faudrait fournir des documents écrits, précis, et vous ouvririez là un nid à contentieux. C’est uniquement pour cette raison que je suis défavorable à votre amendement.
Si je vous ai bien compris, monsieur le rapporteur, vous êtes plutôt d’accord sur le principe mais vous pensez que cela se fera de fait. Mais vous savez comme moi que, si nous faisons la loi, c’est parce que les pratiques qui ont cours « de fait » ne sont pas toujours évidentes ! Si nous n’inscrivons pas dans la loi le principe selon lequel l’employeur ne peut pas se dispenser de ce dialogue, nous prenons un risque.
Monsieur le ministre, la motivation de la décision ne peut pas être donnée simplement dans un couloir. Si la motivation est écrite, je rejoins votre analyse, mais elle contredit celle du rapporteur puisque lui-même disait que la décision serait motivée de fait. Dans le cas d’un dialogue de fait, j’imagine que les arguments de l’employeur reposeront sur autre chose qu’une discussion de couloir : il y aura sûrement des éléments écrits, sur la base desquels les gens se seront mis d’accord.
Je maintiens donc mon amendement, dans la mesure où je crois qu’il s’inscrit vraiment dans l’esprit du projet de loi.
L’amendement no 232 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 202 .
À l’heure actuelle, l’employeur peut décider unilatéralement de mettre en place une délégation unique du personnel. Il lui suffit pour ce faire de consulter les représentants des salariés dans l’entreprise, mais en aucun cas il n’est obligé de tenir compte de leur avis. Un tel pouvoir unilatéral de l’employeur nous semble totalement injustifié. D’une part, il s’agit de la représentation des salariés. C’est donc leur droit constitutionnel à la participation qui est en jeu. D’autre part, la mise en place de la DUP aura d’importantes conséquences pour les élus du personnel eux-mêmes en matière de nombre d’élus, d’heures de délégation et de sujets à traiter, le tout avec moins de moyens. Il est donc pour le moins légitime que les représentants du personnel soient consultés, qu’ils puissent donner leur avis et que l’employeur soit obligé d’en tenir compte. Tel est le sens de cet amendement, qui propose que l’employeur ne puisse pas mettre en place une DUP tant que les institutions représentatives du personnel n’ont pas donné un avis conforme.
L’amendement abolit, en fait, la distinction entre les entreprises de moins de 300 salariés et celles de plus de 300 salariés. Vous proposez de rendre obligatoire un accord avant toute mise en place de la DUP, quelle que soit la taille de l’entreprise. Tel n’est pas l’équilibre retenu par le texte. L’avis est donc défavorable.
L’avis est défavorable. Tenir compte de l’avis n’est pas attendre un avis conforme.
L’amendement no 202 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 203 .
La plupart des entreprises sont composées de plusieurs établissements, parfois disséminés dans toute la France. La mise en place d’une DUP dans une entreprise aux établissements multiples n’est pas chose facile. Selon le projet de loi tel qu’il est rédigé, lorsque l’employeur met en place une DUP au niveau d’une entreprise comprenant plusieurs établissements, seuls les salariés des établissements dont l’effectif dépasse cinquante personnes en bénéficieront. Dans les établissements comptant moins de cinquante personnes et plus de onze, il n’existera aucun représentant des salariés alors qu’en l’absence de DUP on y trouverait des délégués du personnel.
Pas forcément !
Il y a donc là un problème, que l’amendement entend corriger. Si le texte tel qu’il est rédigé était maintenu, les salariés des établissements de moins de cinquante personnes n’auraient pas de représentants proches d’eux à qui s’adresser, ils n’auraient pas d’élus connaissant les spécificités de leurs conditions de travail. Je rappelle que les représentants du personnel sont avant tout des travailleurs, qui se proposent de défendre les intérêts de leurs collègues. Il nous semble important que ces salariés restent proches de leurs collègues et ne deviennent pas des permanents syndicaux dépourvus de tout lien avec les salariés. C’est pourquoi nous proposons que, dans les établissements comptant moins de cinquante personnes, en l’absence de toute représentation, les salariés puissent élire des délégués du personnel. Autrement dit, il s’agit de rétablir les délégués du personnel élus dans les établissements de moins de cinquante salariés, même si une DUP y est mise en place.
Dans les établissements de moins de cinquante salariés, le droit qui s’appliquera sera le droit actuel, et la DUP n’y changera rien. On y trouvera comme actuellement des délégués du personnel. Je ne vois donc pas où est le changement. L’avis est donc défavorable.
Même analyse et même avis.
L’amendement no 203 n’est pas adopté.
Les chambres d’agriculture sont des établissements publics administratifs employant en grande majorité des salariés relevant de contrats de droit privé. L’instance de représentation du personnel dans les chambres d’agriculture est une commission paritaire dont les attributions résultent d’une adaptation d’une petite partie des attributions des délégués du personnel, du comité d’entreprise et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. La commission paritaire des chambres d’agriculture ne dispose pas des mêmes moyens de fonctionnement que ces instances. Ainsi, les salariés des chambres d’agriculture ne bénéficient pas des garanties que peuvent assurer l’existence de délégués du personnel et celle d’un comité d’entreprise, ni même celle d’un CHSCT. L’amendement a pour objet de remédier à cette situation, en calquant le fonctionnement des commissions paritaires sur celui des DUP.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 240 .
Je n’ai pas grand-chose à ajouter. Tout le monde a bien compris qu’il s’agit d’éviter aux réseaux des chambres d’agriculture, et notamment à leur personnel, de se trouver en difficulté en faisant en sorte qu’ils bénéficient des dispositions du texte à bon escient. C’est pourquoi le groupe écologiste propose cet amendement, identique à celui de M. Pellois.
Je comprends le souci qui est le vôtre d’améliorer la représentation dans les chambres d’agriculture, chers collègues, mais ce que vous proposez contribuerait à les assimiler à des structures de droit privé. Qu’elles comptent des salariés relevant du droit privé ne signifie pas pour autant que ces structures ne relèvent pas du droit public. Une telle confusion est susceptible de constituer une difficulté. Je rappelle par ailleurs que les établissements de droit public sont dotés de commissions administratives paritaires, contrairement aux entreprises de droit privé. Il existe un dispositif spécifique. Pour ces raisons, je suis plutôt défavorable à ces amendements.
Je comprends également le sens des amendements visant à améliorer les garanties dont bénéficient les salariés des chambres d’agriculture. Néanmoins, des modifications importantes ont été mises en oeuvre par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, qui ont amélioré le dialogue social et la reconnaissance des représentants du personnel au sein du réseau des chambres d’agriculture. Un équilibre a été trouvé entre les spécificités du statut, ses avantages et les dispositions de droit commun. Le décret encadrant les conditions du dialogue social dans les chambres d’agriculture vient d’être publié, il l’a été au mois de mai. Il convient donc de le laisser vivre puis de l’évaluer avant de discuter de nouvelles modifications. J’admets que la situation n’est pas parfaite, disons-le tout à fait clairement, mais il faut laisser un peu de temps à la loi pour qu’elle s’applique. Il existe en outre un risque d’inconstitutionnalité au titre de la règle dite de « l’entonnoir ». Il est donc préférable d’attendre un peu. Je demande donc le retrait des amendements, à défaut de quoi j’émettrais un avis défavorable.
J’anticipe un peu l’évolution future de la loi. En effet, M. le rapporteur a proposé l’instauration de secrétaires adjoints au niveau des comités d’entreprise, ce qui prouve que germe déjà dans son esprit l’idée de rassembler les CHSCT et les CE, ce dont je le félicite ! Cet amendement propose, dans le cadre de la mise en oeuvre de la DUP élargie, de regrouper les attributions des différentes instances que sont le délégué du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Un tel regroupement s’inscrit dans une volonté de simplification et d’allégement des contraintes pesant sur les entreprises, une volonté qui vous honore, monsieur le rapporteur.
Nous reviendrons dans quelques instants sur votre affirmation, monsieur Cherpion ! À propos de l’amendement, nous ne sommes pas favorables à l’instance unique. Nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises et je prends soin à chaque fois de rappeler que le regroupement des instances n’équivaut pas à leur fusion. Il s’agit là d’un point important. L’avis est donc défavorable.
Même avis. Oui au regroupement, non à la fusion !
L’amendement no 71 n’est pas adopté.
Il propose la suppression de l’alinéa 20. La portée de cet ajout dû à la commission des affaires sociales de l’Assemblée est imprécise, notamment en matière de validité juridique des décisions qui seraient prises en l’absence de l’un des deux secrétaires. Comment la Cour de cassation caractérisera-t-elle juridiquement un avis de la DUP sur les conditions de travail si le secrétaire adjoint en charge de ce sujet n’est pas physiquement présent lors de la réunion concernée ? Il y a là une faille juridique susceptible d’être exploitée afin de remettre en cause la simplicité de la DUP, ce que je regrette.
J’ajoute à ce que vient de dire M. Cherpion que des circonstances exceptionnelles peuvent justifier une telle absence.
Alors que M. Cherpion tenait absolument tout à l’heure à l’instauration d’un secrétaire adjoint en y voyant les prémices d’une fusion, voilà qu’il propose maintenant de la supprimer, ce qui est tout à fait dommageable. L’instauration d’un secrétaire adjoint ne préfigure aucune fusion et vise simplement à répondre à une préoccupation qu’évoquait tout à l’heure Mme Fraysse. Nous considérons en effet que le regroupement de toutes les instances représentatives du personnel en une seule et même instance, la DUP, accroît objectivement la charge de travail. C’est pour cela que j’ai proposé la mise en place d’un secrétaire adjoint, et non pour préfigurer une quelconque fusion de ces instances comme l’affirmait à l’instant notre collègue Cherpion.
Je partage tout à fait l’analyse fort pertinente de M. le rapporteur. Même avis.
Quand nous ne sommes pas d’accord avec M. le rapporteur, celui-ci fait prévaloir son point de vue. C’est normal, c’est le débat. Une fois qu’un amendement a été mis aux voix, les républicains que nous sommes, au sens noble du terme, acceptent la décision de l’Assemblée. Mais alors, il nous est tout de même loisible de défendre un autre amendement portant sur le texte de l’article tel qu’il résulte des votes précédents. Il me semble que c’est tout simplement la démocratie, monsieur le rapporteur.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 62 .
Il s’agit d’un amendement déjà déposé lors de la précédente lecture mais qui me semble important. L’existence d’une délégation unique dotée d’un secrétaire et d’un secrétaire adjoint ayant chacun une prérogative ne doit pas empêcher l’ensemble de ses membres de se soucier de l’intérêt général et de prendre en compte les enjeux spécifiques à chacune des instances ainsi regroupées. Je propose donc que les membres de la délégation partagent tous les enjeux et toutes les problématiques relevant des instances qui la composent afin de s’enrichir mutuellement. La croissance de l’entreprise, par exemple, peut avoir des effets qui intéressent le CHSCT. Il importe que ces instances ne restent pas chacune dans sa tour d’ivoire.
Votre amendement est pleinement satisfait, cher collègue Vercamer. Tous siègent dans la même instance. À moins de ne pas entendre, ou de ne pas vouloir entendre, ce qui est dit au même moment dans la même instance, ils auront connaissance, comme je l’ai fait observer tout à l’heure à Mme Fraysse, de tous les éléments relatifs aux orientations stratégiques de l’entreprise, aux conditions financières et aux conditions d’hygiène, de sécurité et de travail qui auront été communiqués à la DUP. Votre demande est donc pleinement satisfaite. Elle correspond d’ailleurs à ce qui était l’un des objectifs de la mise en place de la DUP. Je vous demande donc de bien vouloir retirer l’amendement, à défaut de quoi j’émettrais un avis défavorable, car il est déjà satisfait.
Je souscris à cette analyse. Tous partagent évidemment l’ensemble des enjeux et des problématiques relevant de ces instances. L’amendement est satisfait et j’en demande donc le retrait.
Je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. Avoir connaissance de certains éléments n’implique pas qu’on les partage. Partager les enjeux, cela veut bien dire essayer de réfléchir à une position commune quelles que soient les instances dans lesquelles chacun dispose de prérogatives. C’est cela, l’esprit de l’amendement.
Il ne s’agit pas simplement de savoir ce que les autres ont prévu de faire sans en tenir compte dans ses propres dispositions. Il s’agit de réfléchir ensemble au développement de l’entreprise, à son développement social et à la sécurité du personnel.
Je pense que cela va mieux en le disant. On ne peut pas rejeter cet amendement en considérant qu’il est satisfait. Je vous rappelle que vous avez rejeté tout à l’heure un amendement qui proposait un avantage en tenant le même discours selon lequel « cela se passe déjà comme ça ». Il s’agit ici d’un amendement important, qui vise à faire partager les enjeux, ce qui n’est pas la même chose qu’avoir simplement connaissance de ce que font les membres des autres instances.
L’amendement no 62 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 233 .
Si vous avez envie de les présenter ensemble, ne boudez pas votre plaisir.
Je vais les défendre l’un après l’autre, mais je précise d’emblée, car cela me permettra d’abréger mon propos sur chacun d’eux, qu’ils poursuivent le même objectif : faire en sorte que les prérogatives qui sont actuellement celles du CHSCT soient maintenues dans le cadre de la DUP. Monsieur le ministre, vous en avez pris l’engagement devant nous, depuis le début.
Oui.
M. le rapporteur et l’ensemble de nos collègues tiennent à préserver cet engagement. Tel est l’esprit de ces trois amendements.
L’amendement no 233 a trait au débat que nous avons eu dans cet hémicycle en première lecture sur la question des délais de convocation : on a fini par les fixer à huit jours. Monsieur le rapporteur, je vous en remercie car c’était un bon compromis.
L’amendement prévoit que si l’ordre du jour d’une réunion de la DUP ne concerne que des sujets relevant du CHSCT, alors, dans la mesure où le délai de convocation de celui-ci est de quinze jours, le délai de convocation de la DUP pourrait être maintenu à quinze jours. Sur le reste, le débat a déjà eu lieu en première lecture, et le compromis sur le délai de huit jours a permis de trouver une bonne porte de sortie.
Je crois que M. Cavard a indiqué exactement les éléments du débat que nous avons eu l’autre jour. Oui, en effet, il y avait des délais de convocation fixés à cinq et d’autres à quinze jours. Au bout d’une heure et demie d’échange, nous sommes parvenus à un accord sur huit jours pour l’ensemble des délais.
Je ne vais donc pas rouvrir le débat, s’agissant du CHSCT, en fixant un délai à quinze jours. Je m’en tiens à notre accord…
… ou plutôt à l’accord de l’Assemblée. J’émets donc un avis défavorable.
Même avis.
L’amendement no 233 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 234 .
Cela va aller vite, puisque, toujours dans le cadre des droits du CHSCT, l’amendement propose qu’il puisse y avoir, dans le cadre des conclusions d’une expertise commune, au moins – ce qui ne veut pas dire seulement – un chapitre spécifique traitant des questions relatives au CHSCT. Il s’agit du minimum requis pour l’expertise commune.
Je ne comprends pas l’amendement. Si l’expertise demandée concerne le comité d’entreprise, le CE, les conclusions seront relatives au CE. Si l’expertise demandée concerne le CHSCT, les conclusions seront relatives au CHSCT. Et si l’expertise concerne les deux, j’imagine que dans ses conclusions figureront à la fois les impératifs relevant du CE et ceux relevant du CHSCT. Objectivement, je ne comprends donc pas l’objet de l’amendement : j’y suis, pour cette raison, défavorable.
Même avis. Je comprends le sens de l’amendement mais j’y serais défavorable s’il n’était pas retiré.
L’amendement no 234 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 235 .
Il clôt la série relative aux droits du CHSCT. Je souhaite que l’alinéa 24 soit complété par les mots : « et dans les délais applicables aux avis du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail quand les sujets traités par la délégation portent exclusivement sur les sujets relevant des attributions du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail conformément au 1° de l’ article L. 2326-5. »
Très concrètement, cet amendement permet, là aussi, de maintenir une logique et une présence : ne refaisons pas le débat sur le fait que la DUP est bien un organe qui aura aussi, en priorité, à travailler sur ces questions de santé et d’hygiène au travail.
Nous avions déjà ensemble échangé sur ce sujet puisque nous avions adopté un amendement que vous aviez présenté, monsieur Cavard, afin d’encadrer justement ce qui relevait des instances CE et CHSCT. Nous l’avons donc intégré.
Je serais tenté de vous dire que les avis du CHSCT doivent être rendus, aujourd’hui, au plus tard dans les quarante-cinq jours, alors que les avis concernant le CE doivent être rendus quinze jours avant le délai de consultation du CE, pour une réunion tous les deux mois. C’est à peu près le même délai qui est proposé : donc, là aussi, les éléments ont été intégrés. L’avis de la commission est donc défavorable.
Même avis.
L’amendement no 235 n’est pas adopté.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 195 .
Cet amendement propose de la suppression de l’alinéa 25 qui prévoit que : « les membres suppléants de la délégation unique du personnel participent aux réunions avec voix consultative. »
Cet amendement vise simplement à rétablir un élément de simplification qui a été remis en cause par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, et qui d’ailleurs a été modifié, au Sénat, par la commission des affaires sociales, à savoir que les suppléants ne siègent qu’en l’absence des titulaires.
M. le ministre avait d’ailleurs été très clair lors de l’examen en première lecture en commission à l’Assemblée nationale : souvenez-vous, monsieur le rapporteur, il avait lui-même dit qu’il ne s’agissait plus, alors, de suppléants mais de co-titulaires. Effectivement, il s’agit, dans ce cas, de co-titulaires.
Ne venez pas nous dire, car je connais la réponse, qu’il s’agit de former des personnes. Non : soit on est suppléant et on remplace le titulaire lorsqu’il est absent, soit on est co-titulaire. Choisissez !
Pourquoi le choix n’a-t-il pas été fait ? Je vous rappelle qu’aujourd’hui, avant même que nous ne modifions les textes, des suppléants siègent déjà dans les CE. Pourquoi l’argument que vous mettez en avant à cet instant n’a-t-il pas été développé avant ? Je continue, même si, visiblement, cet argument a dû commencer à entrer dans les têtes puisque vous l’avez vous-même repris, monsieur Cherpion.
En effet, je pense que la question des suppléants, lorsqu’elle est évoquée dans le cadre des instances représentatives du personnel, s’apparente à de la formation continue.
Je continue à penser que, si nous ne mettions pas les suppléants en position de siéger, alors nous retrouverions, dans les charges de formation, la nécessité de former ces personnels-là. J’ajoute que suivre les débats sur les orientations stratégiques, financières ou ceux portant sur les CHSCT nécessite que puisse être acquis une expérience et des éléments qui font que, le jour où le suppléant est amené à remplacer le titulaire, il est totalement au fait des éléments nécessaires au bon déroulement des débats. J’ai déjà beaucoup exposé ces éléments : je tiens beaucoup, je le dis, à la présence des suppléants. C’est un élément fort. Avis défavorable.
Monsieur le député Cherpion, vous connaissez ma position sur le fond.
Sur la forme, je voudrais dire que votre amendement, qui propose de supprimer l’alinéa 25, ne répond pas à l’objectif. Étant donné que les règles de fonctionnement de la DUP découlent, sauf aménagement, des règles des institutions qui la composent, la suppression de l’alinéa 25 n’empêcherait pas de comprendre que les suppléants siègent dans les réunions. Cela peut vous sembler un peu spécieux, mais telle est la réponse que je vous fais. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Juste une demande de précision. Nous sommes bien d’accord : lorsque les suppléants siégeront, ils auront une voix consultative si leur titulaire est présent, et délibérative si leur titulaire est absent ?
L’amendement no 195 n’est pas adopté.
Cet amendement demande de revenir au texte initial concernant le rôle des suppléants : c’est un débat que nous avons déjà eu et qui se poursuivra à l’article 12.
Le texte initial prévoyait qu’ « en cas d’absence des membres titulaires, les membres suppléants de la délégation unique du personnel participent aux réunions, avec voix délibérative. » À l’exception d’un cas précis, la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise, ils ne sont pas présents autrement. C’est logique : le rôle d’un suppléant est de suppléer.
Pourtant, vous avez souhaité revenir sur cette disposition : dans la DUP, les suppléants participeront à toutes les réunions avec voix consultative et non délibérative, mais ils participeront quand même. Le vrai problème, que vous semblez ne pas voir est, encore une fois, celui de la disponibilité des salariés et du temps qu’ils passent à leur poste, car dans les faits vous doublez le nombre de salariés qui assistent aux réunions.
Il s’agit du même débat. L’avis de la commission est également défavorable sur ces deux amendements identiques.
Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Il est vrai que ce qui est proposé est un retour au texte initial mais l’Assemblée, dans sa grande sagesse, n’a pas souhaité suivre ce raisonnement.
A contrario, la proposition qui a été faite par le Sénat n’était pas praticable, comme je l’avais indiqué : que la moitié des suppléants siègent, cela entraînerait des difficultés. Quels suppléants devraient siéger ? Ce n’était pas compréhensible.
Pour toutes ces raisons, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, que je sais très grande.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 63 .
C’est un amendement qui a l’air anodin, comme ça, mais il précise que les heures de délégation s’effectuent dans l’entreprise et non pas en dehors. Il s’agit d’éviter que les heures de délégation prises par un certain nombre de salariés s’exercent au sein d’organisations extérieures, par exemple au sein d’organisations syndicales.
Il s’agit également d’un débat que nous avons déjà eu : je rappelle que les membres de la DUP peuvent être amenés à exercer leur mandat dans l’intérêt de l’entreprise sans forcément être présents dans l’entreprise. L’avis de la commission est donc défavorable.
Même avis, même analyse.
L’amendement no 63 n’est pas adopté.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 145 .
Il est préférable de préciser le crédit d’heures des membres de la DUP incluant le CHSCT. Ce nombre est aujourd’hui de vingt heures. Il est porté à vingt-deux ou vingt-cinq heures en fonction de la taille de l’entreprise – selon qu’elle compte entre 50 et 99 salariés, ou entre 100 et 199 salariés –, puisque les élus exercent les attributions du CHSCT.
Je crois important que les heures de délégation soient établies en fonction de la taille de l’entreprise. Pour cela, il est préférable de renvoyer au pouvoir réglementaire. D’ailleurs, dans le rapport que j’ai commis, un tableau récapitule les heures de délégation prévues. L’avis de la commission est donc défavorable.
Même avis : il faut que les moyens soient globalement identiques.
L’amendement no 145 n’est pas adopté.
Cet alinéa prévoit que le membre de la DUP doit informer son employeur de son absence dans un délai de huit jours avant la date prévue. Nous comprenons cette disposition : elle est légitime. Mais elle nous paraît trop restrictive, parce que les élus du personnel doivent prendre des heures de délégation lorsque la situation l’exige et donc, éventuellement, dans l’urgence.
S’agissant de réunions de travail, il n’y aura évidemment aucun problème pour que l’élu prévienne, huit jours avant, de son absence. Mais s’agissant, par exemple, d’accidents ou d’autres situations imprévisibles, il ne pourra pas le faire. Dans ces cas, l’élu sera mis dans une situation fâcheuse puisqu’il ne pourra pas avertir son employeur dans le délai prévu par la loi.
Avec cet amendement, nous proposons donc de supprimer la troisième phrase de l’alinéa 27, qui oblige, dans tous les cas, à prévenir l’employeur de son absence huit jours avant.
Nous pensons, à tout le moins, que, si vous voulez conserver cette disposition, il conviendrait de l’assouplir, par exemple en ajoutant à cette même phrase, les mots : « sauf en cas de force majeure ». Je crois que nous allons nous trouver face à des situations compliquées si nous gardons le texte tel qu’il est.
L’amendement de Mme Fraysse est le même que celui que j’ai présenté, mais pas forcément pour les mêmes motifs.
Il n’y a pas de raison de prévoir un délai de prévenance pour les membres de la DUP alors que cette règle n’est prévue ni pour les délégués du personnel ni pour les membres du comité d’entreprise ni pour ceux du CHSCT. Pour des motifs complémentaires à ceux développés par Mme Fraysse, j’ai donc déposé le même amendement, auquel la commission est favorable.
Favorable. Je rappelle que le délai de prévenance doit s’appliquer uniquement dans les cas de mutualisation et d’annualisation.
L’article 8, amendé, est adopté.
L’article 7 bis a tout de même causé un certain trouble au Gouvernement, trouble de dernière heure puisque c’est dans l’après-midi que tout cela s’est passé.
Cet amendement propose de revenir sur l’abaissement des seuils concernant l’introduction d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration, proposé par l’Assemblée nationale.
Les dispositions relatives à la présence d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration des entreprises sont issues de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, qui avait transposé l’ANI du 11 janvier de la même année.
Ainsi, revenir sur le seuil d’application de cette mesure serait contraire à une disposition adoptée dans le cadre d’un accord entre les partenaires sociaux, et ce avant même la fin de sa période d’application. C’est la crédibilité même de la démarche du dialogue social qui est remise en cause. Pour cette raison, le présent amendement propose de revenir aux dispositions telles qu’elles avaient été négociées et inscrites dans l’ANI, c’est-à-dire de supprimer cet article.
C’est un article important, que nous avons introduit en première lecture, pour trois raisons. D’abord, des entreprises passaient au travers de la raquette alors même que, dans l’esprit du législateur, elles étaient visées par la nécessité d’avoir au sein de leur conseil d’administration des administrateurs salariés. Ensuite, nous avions le souci d’augmenter le nombre d’administrateurs salariés siégeant dans les conseils d’administration. Le troisième élément était relatif au seuil, que nous avons souhaité abaisser à 1 000 salariés.
C’étaient des éléments forts du positionnement de la majorité lors de la mise en place de ce dispositif qui est venu compléter le texte du Gouvernement. Nous n’entendons bien évidemment pas y renoncer. La commission est donc défavorable à ces amendements de suppression.
Cet amendement prévoit que les sociétés de tête dont l’activité principale est d’acquérir, de gérer des filiales et participations bénéficient, sous conditions, d’une dérogation à l’obligation de désigner des administrateurs salariés.
Afin de pouvoir peser sur les orientations stratégiques de l’entreprise, il est en effet impératif que les administrateurs salariés siègent au conseil d’administration des structures opérationnelles, au sein desquelles sont adoptées des décisions industrielles, commerciales, et non des sociétés de gestion patrimoniale.
C’est pourquoi nous proposons que, si une holding de gestion patrimoniale dispose d’une filiale soumise à l’obligation de désigner des administrateurs salariés, elle n’y soit elle-même pas contrainte parce ce n’est pas le lieu effectif de la décision. Cela permettra d’améliorer l’efficacité de l’action des administrateurs salariés en les faisant siéger précisément dans l’organe qui est véritablement l’organe de décision opérationnelle.
…sur lequel je vais donner quelques éléments d’information.
Les holdings qui ont un comité d’entreprise, c’est-à-dire qui ont plus de cinquante salariés, seront concernées par notre dispositif. Celles qui n’ont pas de comité d’entreprise sont celles qui sont passées au travers de la raquette et nous nous demandons comment traiter la question de la présence des administrateurs salariés dans les sociétés filles, issues de la holding, qui ont bien évidemment plus de 1 000 salariés et dans lesquelles il faut des administrateurs salariés comme je le soulignais en m’opposant aux amendements de suppression de l’article.
Ce qui est proposé par le Gouvernement me semble donc aller dans le bon sens. Encore une fois, nous devons être bien d’accord, l’objectif, c’est de faire en sorte qu’aucune entreprise ne puisse échapper à la volonté du législateur qu’il y ait des administrateurs salariés dans les conseils d’administration dès lors qu’on est au-dessus de 1 000 salariés.
Il y a une problématique spécifique des holdings ayant un comité d’entreprise, que l’on a vue par ailleurs. C’est l’objet de cet amendement présenté par le Gouvernement, auquel je suis favorable.
C’est une grande déception, monsieur le ministre. Nous avions espéré tout à l’heure que vous tiendriez compte de la réalité des choses. Pour reprendre vos propres termes, l’encre du premier texte est à peine sèche que vous le remettez en cause. Finalement, plutôt qu’un amendement de simplification, proposant la suppression pure et simple de l’article et le retour au texte initial, vous nous présentez ce que j’appellerai un amendement de contorsion proposant un système bizarre, étonnant, dans lequel il n’y a plus véritablement de règles, dans lequel tout le monde va se perdre. Nous ne voterons pas cet amendement.
Moi, j’en suis au stade des interrogations sur la portée exacte de cet amendement, et j’aimerais avoir des éclaircissements tant du ministre que du rapporteur à son propos.
La question est simple. Il s’agit non d’une extension du dispositif voté il y a deux ans, mais de son application. L’objectif est de faire en sorte que, là où il doit y avoir des administrateurs représentant les salariés, ils y soient. L’enjeu de la discussion, c’est qu’ils soient positionnés dans le conseil d’administration qui est décisionnaire, là où se prennent les décisions. Sinon, c’est une présence pour l’apparence mais pas pour la réalité de la décision.
Ce que je me demande, c’est si l’on place les administrateurs où il faut. Qui décide, en effet, dans un groupe avec une holding de tête qui maîtrise le capital, si ce n’est le conseil d’administration de la holding ? Je crains donc qu’avec l’amendement tel qu’il est rédigé, il n’y ait des administrateurs partout, mais partout où il n’y aura pas de décision à prendre, de décision concrète.
C’est le véritable danger de l’amendement, qui reviendrait sur la protection supplémentaire que nous avions, me semble-t-il, trouvée en première lecture ou en commission.
En l’état, je suis donc très réservé sur cet amendement. J’ai l’impression qu’en n’imposant pas des administrateurs au conseil d’administration ou à l’organe décisionnaire de la holding, on se prive de la représentation des salariés là où il faut qu’ils soient présents.
La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente-cinq.
La séance est reprise.
Sur l’amendement no 279 , je suis saisie par le groupe écologiste d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Christophe Cavard.
Monsieur le ministre, je vous avoue que je suis un peu surpris par votre amendement, étant donné la richesse du débat que nous avions eu en première lecture, le texte que vous nous aviez proposé, le travail parlementaire qui avait été fait et le rôle important que nous donnons à la représentation des administrateurs salariés. Le rapporteur l’a d’ailleurs rappelé pour refuser, à juste titre, les amendements de suppression de nos collègues du groupe Les Républicains.
Cet amendement me fait l’impression d’une sorte de repli ou de machine arrière par rapport à l’objectif poursuivi. Je ne reprends pas les arguments de Denys Robiliard. S’il est inquiet, j’éprouve, quant à moi, plus que de l’inquiétude. En effet, comme on le voit dans l’exposé sommaire, c’est bien dans la fameuse holding, là où sont prises un certain nombre d’orientations de l’entreprise concernant l’argent, ce nerf de la guerre, ou encore le patrimoine, que les salariés ne pourraient plus siéger.
Vous allez sûrement pouvoir m’expliquer, monsieur le ministre, pourquoi des administrateurs salariés n’auraient pas leur mot à dire dans cette holding qui gère le patrimoine et les moyens, et donc l’orientation de l’entreprise. Au nom de quoi et pour quelle raison ne pourraient-ils pas siéger et participer au conseil d’administration ? Ils sont loin d’y être majoritaires, mais ils participent et sont donc écoutés. Ils peuvent peut-être comprendre les orientations voire, éventuellement, les relayer, comme c’est le but même des administrateurs salariés. Or, vous leur refusez l’accès à ce lieu de décision, pourtant très important dans le fonctionnement des entreprises visées par l’amendement no 279 .
Je voudrais expliquer à M. Cavard qu’il ne s’agit pas du tout de reculer par rapport aux orientations qui avaient été adoptées. Il y a plusieurs cas de figure qui se présentent. Nous avons bien en tête et l’ANI et la loi : il avait été décidé de la représentation des administrateurs salariés dans les conseils d’administration. Cependant, quand on fait le bilan aujourd’hui, on constate qu’un certain nombre de holdings sont passées à travers les mailles du filet ou plutôt par les trous de la raquette. Ce n’est pas forcément de la mauvaise foi, c’est tout simplement parce que la législation l’a permis – il ne faut pas toujours porter le fer, comme s’il y avait eu un acte volontaire.
C’est bien du cas précis de celles qui sont passées à travers les mailles du filet que je parle. Selon le principe, il faut bien voir qu’on ne peut décider qu’il n’y aura des administrateurs salariés que dans les conseils d’administration d’entreprises où il y a des salariés. S’il s’agit seulement d’une holding de tête, avec trois ou quatre dirigeants d’une même famille qui ont mis leur patrimoine en commun et qui ont constitué une holding patrimoniale, vous pouvez toujours décider qu’il y aura des administrateurs salariés, mais s’il n’y a pas de salariés, il n’y aura pas d’administrateurs salariés. Par contre, ces dirigeants vont prendre des décisions qui auront des conséquences en cascade sur des filiales dans lesquelles il y a des salariés, et pas qu’un peu.
Nous ne sommes pas opposés à ce qu’il y ait des administrateurs salariés, bien au contraire. Ce que nous voulons, c’est trouver l’endroit où des administrateurs salariés peuvent siéger à un niveau opérationnel. C’est cela l’objet de cet amendement : permettre que des salariés puissent siéger au conseil d’administration dans des filiales qui sont les niveaux opérationnels. Vous me répondrez que ce n’est pas le niveau décisionnel ; mais le niveau décisionnel, ce peut être une simple structure familiale sans salariés qui décide des choix et des orientations du patrimoine familial.
J’essaie d’expliquer. Vous pouvez décider qu’il y aura des administrateurs salariés dans une holding que quatre membres d’une même famille ont constituée, mais cela ne pourra pas se faire, parce qu’il n’y a pas de salariés. Les décisions prises par la holding ont des conséquences en cascade. Si personne ne conteste la nécessité de la représentation, la question est : à quel niveau peut-on inscrire pour le mieux la représentation des administrateurs salariés dans le processus opérationnel ? Tel est l’objet de cet amendement. J’espère m’être bien fait comprendre.
Merci, monsieur le ministre, de ces explications dont je n’ai pas très bien saisi la teneur. Le groupe UDI était partagé sur cet article 7 bis. En effet, une partie de notre groupe avait déposé un amendement pour définir le nouveau seuil à partir duquel un administrateur salarié entrait dans le conseil d’administration, quand l’autre partie était plus modérée et plus réservée sur cette disposition.
J’ai l’impression qu’avec votre amendement vous faites des contorsions pour essayer de revenir à un dispositif différent, dont je n’ai pas bien compris la teneur. Je veux bien comprendre qu’il puisse y avoir des risques dans une société familiale. Lorsque nous avions examiné un amendement qui visait à doubler le nombre des administrateurs salariés, j’avais indiqué qu’il y avait des risques pour les sociétés familiales. Ce sont des sociétés qui grossissent sans jamais atteindre des niveaux énormes, mais elles pourraient avoir des problèmes d’administration si elles dépassaient ces seuils.
Il faut aussi tenir compte des entreprises qui choisissent d’établir leur siège à l’étranger, et il peut en effet y avoir un risque à cet égard. Mais je n’ai pas bien compris vos explications, monsieur le ministre. Par conséquent, je m’abstiendrai au nom du groupe UDI sur cet amendement arrivé à la dernière minute et qui n’a pas pu être examiné auparavant, même si je comprends son objectif : régler une situation qui est un peu compliquée.
Le groupe Les Républicains va s’abstenir. Il me semblait que dans les négociations qui s’étaient engagées avec les organisations patronales, monsieur le ministre, il y avait aussi la prise en compte des effectifs des sociétés cotées, ce qui aurait dû faire l’objet d’un amendement du Gouvernement pour que la paix soit obtenue. Pour la clarté des débats, je précise que les fruits des négociations ne sont pas ici exactement ceux qui étaient prévus. Les patrons ne sont donc pas si rassurés. Cela dit, comme nous n’y comprenons rien et que nous ne sommes pas tenus au courant ni par les uns ni par les autres – Mme Fraysse en sera étonnée, mais le MEDEF et la CGPME ne nous tiennent pas spécialement au courant –, ce défaut d’information nous amène à l’abstention, monsieur le ministre.
Je tiens également à expliquer mon vote. M. le ministre a dit lui-même : « J’essaie d’expliquer »… Il a bien essayé, mais c’est compliqué. Ce qui est sûr, monsieur le ministre, c’est que c’est bien dans les holdings que sont prises les grandes décisions, et que les salariés en seront écartés.
Non !
Cet amendement de dernière minute est évidemment un net recul et par conséquent je voterai contre.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 37 Nombre de suffrages exprimés: 25 Majorité absolue: 13 Pour l’adoption: 22 contre: 3 (L’amendement no 279 est adopté.)
Le présent amendement prévoit de rétablir les dispositions actuellement en vigueur, à savoir la désignation d’au moins un administrateur salarié lorsque le conseil d’administration comporte douze membres ou moins, et de deux lorsque le conseil d’administration en comporte plus de douze. Le fait de prévoir systématiquement deux administrateurs salariés présenterait en effet un risque profond de déstabilisation des conseils d’administration, notamment dans les entreprises de taille intermédiaire, les ETI. Je souligne que sur les 800 ETI de plus de 1 000 salariés en France, 65 % d’entre elles ont un conseil d’administration inférieur à sept membres. Y ajouter systématiquement deux administrateurs salariés présenterait donc le risque de déstabiliser la collégialité. Cela constituerait en outre une incitation forte à augmenter le nombre total d’administrateurs avec, au final, un risque de dilution de la représentation des salariés. On arriverait à un résultat inverse de celui recherché. Le nombre d’administrateurs salariés doit être fonction de la taille du conseil d’administration.
Sur l’amendement no 280 , je suis saisie par le groupe écologiste d’une demande de scrutin public.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 280 ?
La commission n’a pas examiné cet amendement. Je dois dire que je m’interroge puisque je suis celui qui avait proposé qu’il y ait deux administrateurs salariés dans les conseils d’administration. Mais je rappelle que l’objet de l’amendement n’est pas de revenir sur l’ensemble du dispositif, la question posée étant de savoir, si dans les conseils d’administration comportant moins de douze membres, le nombre minimum d’administrateurs salariés, que la commission a fixé à deux, peut être ramené à un. C’est l’enjeu de ce débat.
J’avais proposé le chiffre de deux parce que ce n’est pas un exercice aisé pour un salarié d’être tout seul dans ce type d’instance au fonctionnement particulier.
Je dois néanmoins reconnaître que l’argumentation développée à l’instant par M. le ministre nous rappelle à juste titre que dans les conseils d’administration de moins de douze membres, le fait d’avoir deux représentants des salariés pourrait redistribuer les cartes et provoquer au bout du compte une augmentation du nombre d’administrateurs, et donc une dilution de la représentation des salariés. J’entends cet argument. À titre personnel, j’émettrais donc un avis favorable, mais sans grande conviction, je dois le dire.
Pour ma part, c’est avec conviction que je vais voter cet amendement, monsieur le ministre, parce qu’il reprend l’argument que j’avais soutenu en première lecture. Je n’avais malheureusement pas été suivi, y compris par vous, et je suis donc très heureux que vous ayez dorénavant une appréciation un peu plus saine des conseils d’administration des entreprises. Au nom du groupe UDI, je voterai évidemment des deux mains,…
Il a fallu attendre un certain temps, monsieur le ministre, mais là, au moins, vous revenez à votre rôle en nous proposant un amendement qui marque le retour à la réalité et au pragmatisme, car il est vrai qu’il existe un risque de déstabilisation. C’est très drôle de constater que vous avez interverti les rôles avec le rapporteur : vous nous avez présenté tout à l’heure un amendement de contorsion ; cette fois-ci, nous assistons à un exercice de contorsion de la part du rapporteur, qui a difficilement avoué qu’il était finalement favorable.
Nous, nous n’avons pas de problème : nous voterons cet amendement avec conviction, parce qu’il correspond véritablement à l’intérêt des entreprises.
Je voterai moi aussi l’amendement du Gouvernement. J’ai souvenir qu’en première lecture, j’allais dans le sens de notre rapporteur en considérant qu’un minimum de deux administrateurs salariés était nécessaire, le fait d’être seul pouvant être handicapant, y compris du point de vue du fonctionnement du conseil et de l’apport des salariés. Cela étant, M. le ministre nous ayant indiqué que 65 % des 800 ETI de plus de 1 000 salariés ont un CA de moins de sept administrateurs, je crois qu’il faut être dans la raison. L’essentiel de l’article 7 bis est déjà validé : le seuil à partir duquel la présence d’administrateurs salariés est rendu obligatoire pour les entreprises est non plus de 5 000 mais de 1 000 salariés. Dès lors, je pense qu’il faut suivre le Gouvernement. On aura l’occasion, j’en suis sûr, d’en faire le bilan et de voir s’il faut apporter plus de souplesse ou d’autres modifications au dispositif.
Monsieur le ministre, je comprends votre argument, et aussi qu’il réjouisse l’UDI et le groupe Les Républicains.
Pas trop tout de même !
J’ai souligné durant la discussion générale le fait que ce type de texte permet de faire la différence entre les deux côtés de l’hémicycle, mais ici j’avoue que je m’inquiète un peu, vu cet amendement, de la manière dont les choses tournent. Monsieur le ministre, c’est très sérieux car les administrateurs salariés ne sont pas des administrateurs à part.
Or vous essayez de nous démontrer, comme mon collègue à l’instant, qu’il faudrait raison garder quant à leur nombre dans un conseil d’administration qui compte sept administrateurs. Mais les administrateurs salariés sont des administrateurs comme les autres ! Les salariés font vivre l’entreprise. C’est tout de même aussi grâce à eux que l’entreprise fonctionne.
Même si leur place est différente du point de vue leur apport, de leur contribution au fonctionnement, ou encore de la création même de l’entreprise, s’ils n’étaient pas là, celle-ci ne fonctionnerait pas. Je le répète : les administrateurs salariés sont des administrateurs comme les autres. Ce débat de fond, politique pour le coup, qui met en opposition le principe de la collégialité et les différents types d’administrateur me surprend. On a valorisé dans ce texte, et c’est une très bonne chose, le fait que les salariés ont pleinement leur rôle à jouer dans les conseils d’administration concernés, et même s’il n’y a que sept membres, deux administrateurs salariés seront une plus-value pour l’entreprise – s’il pouvait y en avoir plus, ce serait encore mieux – car les salariés, qui font la force de l’entreprise, et les administrateurs qui ont fourni un certain apport justifiant leur présence, trouvent ensemble des solutions aux problèmes et établissent des orientations pour l’entreprise. Ils ont en effet évidemment un intérêt commun : qu’elle se développe, qu’elle crée plus d’emplois, etc.
Je suis très surpris de ce débat politique qui met en opposition les différents types d’administrateur. Je voterai donc, au nom du groupe écologiste, contre cet amendement, qui déstabilise quelque peu cet article après les avancées qu’il a produites – je pense notamment à l’abaissement du seuil à 1 000 salariés, pour lequel je remercie le rapporteur.
La démarche initiée par le rapporteur lorsqu’il a proposé de prévoir deux représentants des salariés reste complètement pertinente. En plus, il y a les arguments que vient de développer mon collègue Christophe Cavard : c’est tout de même grâce aux salariés que l’entreprise fonctionne – quelquefois on l’oublie. J’ajoute qu’un tel amendement est très désobligeant à leur égard parce que ce sont des administrateurs à part entière.
Je n’ai pas dit le contraire.
Imaginez-vous, monsieur le ministre, que ces salariés viennent au conseil d’administration pour faire du mal, pour détruire ? C’est un a priori que je refuse absolument. Je pense qu’ils sont aussi respectables que les autres.
Je note que le satisfecit qu’ont d’emblée donné à cet amendement mes collègues de la droite – l’un d’eux a même dit : « Je le voterai des deux mains » – éclaire bien les intérêts que défendent les uns et les autres. Pour M. Cherpion, « l’intérêt des entreprises » est que les salariés soient exclus des conseils d’administration. Ce n’est pas mon opinion.
Pour toutes ces raisons, je voterai contre cet amendement. Je tiens à dire à mon tour, monsieur le ministre, que je suis très préoccupée de voir qu’au dernier moment, on revient ainsi sur des décisions qui avaient été prises dans la sérénité, après les avoir bien sous-pesées, longuement débattues en commission. C’est une orientation tout de même assez inquiétante. Vous me direz qu’elle n’est pas nouvelle mais, décidément, le patronat pèse lourdement sur les décisions du Gouvernement.
Madame Fraysse, nous ne sommes pas du tout opposés à la présence de représentants des salariés dans les conseils d’administration.
Non, pas le moins possible, mais M. le ministre a bien expliqué qu’il ne faut pas que leur nombre déséquilibre le système. La semaine dernière, j’ai participé à un débat avec un représentant d’une grande confédération syndicale ouvrière, qui n’est pas suspect d’être un grand ami du MEDEF, et il me disait : « Écoute, franchement, cette affaire ne sert strictement à rien. » Et il a raison.
Pourquoi ? Parce que le salarié qui siégera au conseil d’administration sera soumis à une obligation de confidentialité – ce qui est normal. Il y aura donc deux cas de figure : soit il manquera à cette obligation, et il s’exclura du système, voire se rendra coupable de délit d’entrave ; soit il la respectera et, dès lors, soyons raisonnables, sa présence au conseil d’administration n’aura aucun impact au niveau de la centrale qui l’aura désigné. Et si le représentant d’une grande centrale syndicale vous tient un tel discours, c’est qu’il a soupesé l’intérêt, ou plutôt le non-intérêt, de voir siéger des représentants des salariés au conseil d’administration.
Peut-être oublie-t-on une chose : c’est que les intérêts de l’entreprise sont aussi les intérêts des salariés, et réciproquement.
On a l’impression que l’on oppose tout le temps les salariés à l’entreprise, mais il n’y a pas d’un côté les méchants ou les gentils salariés et de l’autre les gentilles ou les méchantes entreprises ! Il y a simplement des stratégies différentes, qu’il faut s’efforcer de rendre gagnantgagnant pour tout le monde. En ce qui me concerne, je trouve que nous sommes parvenus à un point d’équilibre.
Néanmoins, je me permets de vous rappeler, monsieur Cherpion, que vous proposiez tout à l’heure purement et simplement la suppression de l’article.
Même si ce n’est plus le cas, nous ne nous inscrivons tout de même pas dans la même logique. Notre logique à nous est de trouver un point d’équilibre, en essayant de rattraper ce qui a été raté, notamment s’agissant des holdings, et d’aller un peu plus loin que ce qu’avait prévu l’ANI – ce que nous assumons –, tout en étant réalistes, dans le bon sens du terme. Il ne faut pas déséquilibrer les choses. Et nous savons bien que, sinon, de toute façon, on va assister à une inflation du nombre des membres des conseils d’administration et l’on n’y gagnerait rien : cela ne modifierait pas le rapport de forces entre les administrateurs salariés et les autres, car l’on ne ferait que gonfler artificiellement les chiffres. Je n’en vois pas du tout l’intérêt.
On verra de nouveau tout à l’heure, à l’occasion d’un amendement relatif à la date d’application, qu’il convient de trouver un point d’équilibre qui donne satisfaction à tout le monde, en renforçant effectivement la place des salariés dans l’entreprise sans déstabiliser pour autant celle-ci.
Puisqu’il y aurait obligation de confidentialité, il ne servirait à rien d’avoir des administrateurs salariés, monsieur Cherpion ? Mais ne pouvez-vous pas admettre qu’un salarié – bien qu’il ne soit « que » salarié –, est un homme ou une femme qui a un cerveau,…
…des compétences – même si ce ne sont sans doute pas les mêmes que les vôtres –, une expérience, et qu’il peut apporter dans un débat des arguments pertinents, même s’il est tenu par un impératif de confidentialité ?
Franchement, quand j’entends dire que la présence de deux administrateurs salariés au sein d’un petit conseil d’administration risquerait de le « déséquilibrer », cela me paraît… amusant, ou plutôt dérisoire.
Franchement, soyons sérieux ! D’ailleurs, on vient de le rappeler : vous souhaitiez la suppression de l’article. Cela confirme donc ce que je disais tout à l’heure en vous apostrophant – ce dont je m’excuse : vous souhaitez que les salariés ne participent pas à ces instances !
Nous proposons la désignation de deux administrateurs salariés, vous dites que vous préféreriez qu’il n’y en ait qu’un, mais, en réalité, vous préféreriez qu’il n’y en ait pas du tout !
C’est dommage, parce que je partage ce qui vient d’être dit : l’intérêt de l’entreprise est aussi celui des salariés, et il n’y a aucune raison d’opposer l’un à l’autre.
D’abord, je voudrais dire à Mme Fraysse que l’appréciation d’un amendement ne peut se faire sur la base de son acclamation par le camp adverse.
L’amendement dont il est question – et c’est en cela que je suis en total désaccord avec la conclusion de notre collègue Cavard – ne remet nullement en cause l’enjeu de fond, qui est, comme vient de le rappeler Mme Fraysse, d’assurer la présence d’administrateurs salariés au sein des conseils d’administration.
Cela n’est absolument pas remis en cause par l’amendement.
D’autre part, une caractéristique française, c’est que beaucoup d’entreprises – 98 % si mes souvenirs sont bons – ont moins de vingt salariés. Cela signifie que notre débat concerne un nombre restreint d’entreprises – ce qui ne doit pas dévaloriser pour autant la volonté du Gouvernement et de la majorité de faire entrer des administrateurs salariés dans les conseils d’administrations, ainsi que les dispositions complémentaires que nous avons adoptées en première lecture.
Je souhaitais le rappeler, car je trouve un peu fort de café que l’on nous reproche d’affaiblir les administrateurs salariés, alors que c’est nous qui avons contribué à les mettre en place !
Cela étant dit, j’ai moi-même indiqué que j’avais été, pour les raisons que j’ai évoquées, à l’origine de l’amendement visant à fixer un plancher à deux administrateurs salariés. Car si vous avez raison, madame Fraysse, de souligner que les représentants de salariés ne sont pas différents des autres administrateurs dans leurs droits et leurs prérogatives, ils le sont forcément, monsieur Cavard, dans leur approche,…
…ce qui est bien normal.
Mais vous ne pouvez pas considérer qu’un conseil d’administration de sept membres continuera, en présence d’administrateurs salariés, à fonctionner suivant la même logique que précédemment, car ces derniers vont perturber, au sens positif du terme, les débats en son sein. C’est ce qui m’a amené à prendre en considération les arguments du Gouvernement, et à reconnaître que la présence de deux administrateurs salariés pouvait, objectivement, perturber le fonctionnement d’un conseil d’administration de sept personnes. D’où mon avis favorable à cet amendement. Toutefois, je le répète avec force, il ne s’agit nullement d’une remise en cause de la présence d’administrateurs salariés au sein des conseils d’administration, ni de l’importance que nous leur accordons.
Voilà ce que je voulais préciser avant que nous ne passions au vote.
Il est procédé au scrutin.
Je demande une suspension de séance.
La séance, suspendue à vingt-trois heures cinq, est reprise à vingt-trois heures quinze.
Cet amendement a pour objet d’introduire un dispositif d’entrée en vigueur et de transition qui soit le plus souple possible. Il faut permettre aux entreprises concernées d’adapter dans les meilleures conditions leur gouvernance aux nouvelles obligations. Il est proposé de prévoir une entrée en vigueur – en vertu d’un principe que l’on pourrait qualifier de général – au plus tard six mois après l’assemblée générale qui procède à la modification des statuts. Plusieurs cas de figure se présentent. Certaines entreprises sont passées à travers les trous de la raquette ou les mailles du filet. D’autres ont mis en place un dispositif ; il faut leur donner le temps de s’adapter. Il y a également les nouvelles entrantes.
L’amendement vise à ce que l’assemblée générale ait lieu au plus tard six mois après la clôture de l’exercice 2016 pour les entreprises et leurs filiales de 5 000 salariés et plus – cela vise bien évidemment les entreprises qui devraient relever du cas de figure général mais qui sont passées au travers, sans qu’on leur fasse de procès d’intention – et six mois après la clôture de l’exercice 2017 pour les entreprises et leurs filiales de moins de 5 000 salariés, c’est-à-dire celles qui entrent dans le dispositif. En outre, les sociétés dont les filiales ont aujourd’hui des salariés dans leur conseil d’administration et qui entrent dans le champ de la nouvelle obligation prévue par la loi, ne devront désigner des administrateurs salariés dans leur conseil qu’à expiration – c’était demandé – des mandats d’administrateurs salariés présents dans leurs filiales éventuelles.
Nous répondons ainsi aux trois cas de figure en présence, ce qui permet une adaptation et une souplesse, tant pour celles qui sont passées à travers les mailles du filet – même si ce n’était pas intentionnel, car des facilités législatives le permettaient, on va dire les choses comme ça –, que pour celles qui étaient concernées et qui viennent de mettre en place les dispositions de l’ANI, auxquelles on donne le temps nécessaire pour se remettre, l’encre à peine sèche, des nouvelles dispositions que nous introduisons, et enfin pour celles qui n’étaient pas concernées jusqu’à présent, pour lesquelles on fixe un délai conforme au délai initial de l’ANI, à savoir six mois après le 31 décembre 2017.
Là encore, pour que les choses soient précises pour tout le monde, cet amendement vise en fait à assurer la période transitoire, c’est-à-dire celle qui permet, en fin de compte, que l’ensemble des entreprises de plus de 1 000 salariés aient des administrateurs salariés dans leur conseil d’administration. Cela concerne bien la phase transitoire. S’agissant de cette phase – j’en remercie le Gouvernement car c’est une demande qui a été portée par le président Le Roux et le groupe socialiste –,…
…l’enjeu était de bien distinguer les différentes entreprises au travers des situations constatées. Il s’agit premièrement des entreprises qui s’étaient déjà engagées dans la mise en place des administrateurs salariés, parce que soumises au seuil des 5 000 salariés et plus. Dans la proposition qui est faite, celles-ci auront un conseil d’administration qui terminera son mandat dans les mêmes conditions. Il s’agit ensuite des entreprises dont nous avons considéré qu’elles étaient passées – pour reprendre le terme utilisé précédemment – « au travers de la raquette », pour lesquelles nous considérons qu’il faut fixer une date au 1er janvier 2017 qui permette, là aussi, la mise en place des administrateurs salariés. Il s’agit enfin des entreprises que nous avons assujetties à l’obligation de présence des administrateurs salariés, c’est-à-dire celles qui emploient entre 1 000 et 5 000 salariés – puisque nous avons abaissé le seuil à 1 000 salariés –, pour lesquelles nous proposons que cela puisse se faire au terme de l’exercice 2017, donc avant le 31 décembre 2017.
C’est comme cela que nous avons envisagé, au travers de cet amendement présenté par le Gouvernement, de gérer la période transitoire. Sur cette base, qui correspond à une demande que nous avions formulée, et qui est satisfaite – j’en remercie encore le Gouvernement –, j’émets un avis favorable, même si la commission, madame la présidente, n’a bien évidemment pas pu se prononcer sur cet amendement.
Sur l’amendement no 284 , je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Gérard Cherpion.
Le Gouvernement nous en a déjà fait quelques-unes, mais là je crois que c’est de mieux en mieux : il demande en effet une suspension de séance pour rédiger un amendement à la sauvette, à vingt-trois heures vingt. C’est tout de même une première, et je pense que cela restera dans les annales de l’Assemblée nationale. Je trouve invraisemblable et insupportable que l’on puisse introduire un amendement comme cela…
…sous des pressions de je ne sais qui – on le verra bien, car on en reparlera à l’article suivant. Il est invraisemblable que l’on puisse concevoir un système – qui, en lui-même, a un certain intérêt – de telle manière, à une heure pareille. Je ne sais même pas si les députés de votre majorité vont accepter d’avaler la couleuvre. En ce qui nous concerne, nous ne l’avalerons pas et nous ne participerons pas à ce vote.
Je note, à travers cet argumentaire décidément compliqué – même si je veux bien entendre qu’il y a des périodes transitoires et qu’il faut les gérer – que l’amendement en discussion retarde l’entrée des administrateurs salariés au sein des conseils d’administration. Fin 2016 plus six mois pour les assemblées, plus six mois encore suivant la clôture de l’exercice, cela nous conduit à la fin 2018. Si les espoirs de la droite se concrétisent, elle aura tout loisir de revenir éventuellement sur ces dispositions.
Monsieur le ministre, sans vouloir vous faire de procès d’intention, les trois amendements que le Gouvernement a déposés à vingt-trois heures, dans la précipitation, contiennent tous des éléments de régression pour les droits des salariés : l’un supprime la représentation des salariés dans les conseils d’administration des holdings ; l’autre diminue le nombre de représentants des salariés dans les conseils d’administration – ils n’étaient que deux, mais c’était encore trop – ; le troisième, enfin, retarde l’entrée des salariés dans les conseils d’administration.
Non !
Telle est la réalité très triste et extrêmement préoccupante, qui me conduit évidemment à voter, pour la troisième fois, contre cet amendement qui va contre l’intérêt des salariés et donc contre l’intérêt du fonctionnement correct des entreprises et du dialogue social.
Monsieur le ministre, on peut comprendre que, puisque nous avons abaissé le seuil à 1 000 salariés en première lecture, vous souhaitiez accorder du temps supplémentaire. Mais j’ai eu beau lire et relire l’exposé sommaire, je n’ai pas trouvé de réponse aux questions que je me pose : où sont les éléments précis qui justifient cette disposition…
…ou quelles sont, le cas échéant, les entreprises qui vous auraient fait part de difficultés particulières à mettre en oeuvre dans les délais impartis le dispositif que nous avions voté ?
Je pourrais être d’accord sur votre idée générale : on peut laisser plus de temps puisqu’on fait entrer plus d’entreprises dans le dispositif, en raison de la baisse des seuils. Mais, comme on fait la loi ensemble, il faut tout de même s’appuyer sur des éléments précis et objectifs. Concernant ces entreprises, quels sont les éléments chiffrés, pratiques, concrets, qui vous permettent de nous proposer, tout à coup, de retarder la mise en place du dispositif ? J’ai compris que l’amendement avait été retravaillé au cours de la soirée mais j’ai cherché en vain les éléments expliquant que vous retardiez ce qui constitue, vous le reconnaissez tous, une avancée sociale, à savoir le fait que des salariés entrent dans les conseils d’administration, y compris dans les entreprises de 1 000 salariés et plus. Monsieur le ministre, essayez de nous donner des éléments précis, qui nous permettent de comprendre pourquoi vous voulez retarder le dispositif pour une partie des entreprises concernées.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 31 Nombre de suffrages exprimés: 27 Majorité absolue: 14 Pour l’adoption: 24 contre: 3 (L’amendement no 284 est adopté.)
L’article 7 bis, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 205 tendant à la suppression de l’article 9.
La mise en place d’une DUP dans les entreprises de plus de 300 salariés est possible si un accord le prévoit. Il est possible de ne regrouper que certaines institutions représentatives, et pas certaines autres. La DUP sera donc à géométrie variable. Les critiques que nous adressons à la DUP – centralisation, perte de moyens, spécialisation plus difficile des élus – reste évidemment valable, mais, avec ces dispositions à géométrie variable, le problème est aggravé, parce que cette DUP donnera lieu à une instance sui generis, autrement dit singulière, qui se substituera aux instances qu’elle comprend. Pardonnez-moi, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, de souligner qu’il s’agit là d’un pas vers la fusion des instances, puisque l’accord peut décider de règles de fonctionnement propres à l’instance.
On ne peut pas écarter, par exemple, l’hypothèse selon laquelle le CHSCT serait réduit à une simple commission. Les instances n’auront plus d’identité propre, ce qui pose des problèmes cruciaux quant à leur budget, notamment.
Nous contestons vigoureusement cette orientation dont vous vous défendez, mais qui conduit de fait à une fusion des instances. C’est pourquoi nous proposons par cet amendement de supprimer l’article 9.
Madame Fraysse, il n’y a pas de confusion : les articles précédents concernaient les entreprises de moins de 300 salariés, où la fusion n’est pas envisagée, alors qu’à présent nous traitons des entreprises de plus de 300 salariés, où la fusion est possible, mais uniquement en cas d’accord majoritaire. Je rappelle en outre que le seuil de représentativité a été relevé, pour être fixé à 50 %.
Vous considérez peut-être qu’un accord signé par des organisations représentant au moins 50 % des suffrages exprimés n’a pas de valeur… Il me semble au contraire que, dès le moment où les organisations syndicales auront donné leur accord en toute connaissance de cause, la mise en place d’une instance unique par fusion sera possible. Dans ce texte qui a trait au dialogue social, cette disposition relève d’une certaine croyance que nous avons dans ce dialogue.
Ces éléments étant mis en place, tout est clair : il n’y a aucun élément caché dans ce dispositif, puisque la distinction entre les entreprises de moins de 300 salariés, dans lesquelles il n’y a pas de fusion, et celles de plus de 300 salariés, ou celle-ci est possible par accord majoritaire, est clairement établie. L’avis est donc défavorable.
L’amendement no 205 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 236 .
La simplification est un objectif louable, à condition qu’elle ne soit pas en trompe-l’oeil. Le regroupement des instances représentatives du personnel est une bonne chose, mais quand le CHSCT y est intégré, il est prévu qu’à l’intérieur du regroupement une commission traite spécifiquement des sujets d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Vous voyez sans doute où je veux en venir : à quoi bon regrouper les IRP s’il est prévu de créer au sein de la nouvelle instance des sous-commissions ?
Il faut supprimer cette commission mais conserver l’obligation prévue à l’alinéa suivant, à savoir respecter le nombre minimal de réunions de l’instance consacrées en tout ou partie à l’exercice de ses attributions en matière d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qui ne peut être inférieur à quatre par an. C’est une fréquence suffisante pour que ces questions soient effectivement traitées.
Je regrette que vous proposiez, par ces amendements, de supprimer la possibilité de mise en place d’une commission chargée des sujets d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. En effet, au sein de cette instance unifiée, il importe de préserver une certaine souplesse, comme je l’ai dit tout à l’heure en répondant à plusieurs de nos collègues. Nous proposons simplement une possibilité, là où, d’ailleurs, la rapporteure du texte au Sénat avait préconisé une obligation.
Parce que l’adoption de ces amendements rendrait la création de ces commissions impossible, j’y suis défavorable.
L’article 9 est adopté.
Article 9
Parlons un peu de simplification concernant le présent texte. Le Sénat avait prévu de repousser d’un an la mise en place de la base de données unique dans les entreprises de moins de 300 salariés.
Prévue par la loi relative à la sécurisation de l’emploi de 2013, elle est devenue obligatoire dans les entreprises de 50 à 300 salariés à compter du 14 juin 2015. Elle n’est toutefois pas en fonction partout, car sa mise en place nécessite plus de temps. Elle constitue en réalité une contrainte juridique supplémentaire qui requiert des moyens dont les PME ne disposent pas forcément. Son contenu, déjà épais, augmentera très certainement après l’adoption du présent projet de loi.
Voilà pourquoi, dans un souci de simplification et d’accompagnement des entreprises, il convient de repousser ce délai d’un an et de rétablir l’article 9 bis.
Un bilan de la loi relative à la sécurisation de l’emploi a été établi. Il a montré que, si les entreprises étaient passées par une phase d’adaptation, on constate aujourd’hui que la base de données unique a bien été mise en place, y compris dans les plus petites entreprises. Aucune difficulté particulière n’a été rapportée qui justifierait le report d’un an de la mise en oeuvre de cette base de données dans les entreprises de moins de 300 salariés. L’avis est donc défavorable.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 2 .
L’amendement no 2 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 10, amendé, est adopté.
Volontiers, madame la présidente.
Les amendements nos 274 et 275 visent à élargir la couverture des salariés par un CHSCT. La commission propose que, dans toutes les entreprises de 50 salariés qui ne comporteraient que des établissements de moins de 50 salariés, l’ensemble des salariés puissent être rattachés à un CHSCT. En d’autres termes, le critère de rattachement du CHSCT est déplacé de l’établissement vers l’entreprise. Cet élargissement est évidemment facteur de progrès social pour les salariés. Tel est l’objet de ces amendements.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 237 .
L’amendement no 237 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Il existe des cas dans lesquels les deux instances, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, doivent être consultées. Or, dans ce cas, le texte ne prévoyait pas la fixation d’un délai pour la transmission de l’avis du CHSCT au CE, le premier devant, en tout état de cause, être saisi préalablement.
L’objet de cet amendement est donc de poser le principe d’une sollicitation en priorité du CHSCT et d’un délai fixé par décret ne pouvant être inférieur à quinze jours pour la transmission de l’avis du CHSCT au CE.
Favorable.
Mes chers collègues, je vous entends vous interroger sur l’ordre des amendements qui figure sur la feuille jaune, mais je vous confirme que les amendements identiques nos 31 et 119 seront appelés directement après celui-ci, car ils concernent la fin de l’alinéa 7, tandis que l’amendement de la commission porte sur l’alinéa 6.
L’amendement no 276 est adopté.
Les avis du CHSCT sont considérés comme négatifs s’ils n’ont pas été rendus dans les délais. Puisqu’il est question de simplifier la vie des entreprises, pourquoi ne pas appliquer ici aussi la règle selon laquelle le silence vaut accord et inverser la logique pour que les avis soient considérés comme positifs s’ils n’ont pas été rendus à temps ?
Ces deux amendements visent à inverser le principe existant pour l’ensemble des instances représentatives du personnel, à savoir que si l’instance représentative ne se prononce pas dans le délai imparti, son silence vaut refus. Les auteurs de ces amendements souhaitent au contraire que ce silence vaille acceptation. Je ne vois pas l’intérêt de cette inversion.
Même avis.
Monsieur Sirugue, c’est le contraire, dans l’administration : le silence vaut acceptation.
La règle générale, si l’on voulait simplifier, serait donc de dire que quand l’administration ne répond pas, c’est acquis.
En l’espèce, on peut considérer qu’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui ne rend pas d’avis a été prévenu, qu’il avait le temps de se prononcer mais qu’il ne l’a pas fait, et que ce silence peut être interprété comme une acceptation. C’est beaucoup plus simple.
L’article 11, amendé, est adopté.
Nous revenons au débat sur les suppléants dont la portée, cette fois-ci, dépasse la seule délégation unique du personnel.
Afin d’éviter toute répétition, je dirai simplement que la présence des suppléants à toutes les réunions est un luxe qui fait sans doute plaisir aux syndicats mais que les entreprises ne peuvent pas forcément se permettre. Il convient donc de revenir au texte initial.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement no 73 .
Nous proposons par cet amendement de revenir au texte initial du projet de loi. Que les suppléants participent aux réunions uniquement en l’absence des titulaires est une mesure de bon sens et de bonne gouvernance.
Une fois encore, mes chers collègues, je ne comprends pas le revirement qui a été opéré par rapport au texte initial. Il était prévu de systématiser le recours à la visioconférence pour plusieurs réunions de comité. La majorité a cependant jugé en commission, en première lecture, que l’utilisation de cette technique devait faire l’objet d’un accord et que, à défaut, elle ne pourrait intervenir que trois fois par an.
Pour justifier une telle décision, monsieur le rapporteur, vous pointez, dans l’exposé des motifs, l’absence de cadre légal. C’est étrange, car l’objectif de ces alinéas, dans la rédaction initiale du texte, était précisément d’en établir un, d’autant que la jurisprudence reconnaît déjà cette possibilité.
Ensuite, vous affirmez qu’il ne semble pas souhaitable de confier aux seuls chefs d’entreprise la responsabilité de fixer cette possibilité ; on est en droit de se demander pourquoi. Je crains qu’il ne s’agisse là d’une nouvelle manifestation de méfiance envers les chefs d’entreprise. Votre inquiétude porte sans doute sur le déroulement d’un vote à bulletin secret. Or, précisément, dans le texte initial, le Gouvernement avait inscrit que les conditions de déroulement d’un tel vote seraient prévues par décret afin de bien les sécuriser. Des start-up ont d’ailleurs peut-être déjà réfléchi à des solutions innovantes pour permettre cela, et j’imagine que le Gouvernement a déjà des idées derrière la tête.
Pourquoi se priver alors de ce progrès, qui sera profitable à tous, surtout au sein des grosses sociétés, car il est question ici de réunions du comité d’entreprise européen ou du comité de la société européenne ? En bref, je trouve cette méfiance absurde et contreproductive.
En outre, prévoir d’insérer des lignes sur de telles questions, qui sont secondaires, dans un accord, c’est ajouter des sujets de discussion, ce qui ne va pas du tout dans le sens de la simplification, à l’image de l’ensemble de ce texte. Il faut revenir à la possibilité d’un recours systématique à la visioconférence en laissant l’employeur en décider, c’est-à-dire en lui faisant enfin confiance. Une fois encore, cet amendement vise simplement à revenir au texte initial.
Le texte initial prévoyait en effet le recours à la visioconférence de manière unilatérale et sans aucune limite. Nous avons souhaité l’encadrer, et il me semble que cette disposition est positive : elle n’exprime aucune défiance envers cet outil, mais prévoit qu’il soit utilisé sur la base d’un accord, ce qui me paraît intéressant. L’avis est donc défavorable.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.
Deux autres amendements sont en discussion commune avec les précédents.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 206 .
Jusqu’à présent, le recours à la visioconférence était limité, puisqu’il intervenait si aucun des participants à la réunion ne s’était opposé à son usage. De plus, la possibilité de l’utiliser en cas de vote à bulletin secret était très discutée.
Le projet de loi prévoit une extension de son utilisation pour les réunions du CHSCT, de l’instance de coordination de ce comité, du comité d’entreprise, du comité de groupe, du comité d’entreprise européen, du comité de la société européenne en cas de réunion commune à plusieurs des institutions représentatives du personnel.
Le recours à la visioconférence signifie que les élus ne pourront pas se rencontrer directement pendant, avant et après les réunions.
Je comprends tout à fait la démarche dans laquelle s’inscrivent les amendements défendus à l’instant par nos collègues de droite. Ils proposent non seulement que le recours à la visioconférence devienne systématique, mais que seul l’employeur puisse en décider. On est vraiment en pleine démocratie !
Pour ma part, je pense que la visioconférence est une avancée et qu’elle doit pouvoir être utilisée lorsqu’il n’est pas possible de tenir une réunion physique dans des délais convenables, mais qu’elle doit aussi rester une exception.
Certains amendements adoptés en commission ont encadré le recours à la visioconférence, précisant qu’en l’absence d’accord entre l’employeur et les membres élus de chaque instance, ce recours est limité à trois réunions par an. Mais en cas d’accord, monsieur le rapporteur, on pourrait ne plus avoir que des réunions en visioconférence, ce qui me semble très dommageable pour le travail du comité d’entreprise et pour les rencontres auxquelles ils donnent lieu avec les représentants du personnel.
C’est pourquoi nous proposons par cet amendement de n’utiliser la visioconférence que dans des cas exceptionnels, lorsque la réunion ne peut vraiment pas…
Ne jouez pas les naïfs, mes chers collègues ! Comment croyez-vous que l’on procède actuellement ? Vous n’avez pas à vous insurger en brandissant des arguments qui n’en sont pas. Aujourd’hui n’utilise pas, ou très peu, la visioconférence, et pourtant cela marche !
Cela marchera encore mieux en l’utilisant davantage, car on pourra se réunir plus souvent.
Il est nécessaire, selon moi, de l’encadrer et de la limiter afin de permettre que les hommes et les femmes qui débattent se regardent et se connaissent.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement no 238 .
Cet amendement n’est pas très différent du précédent. Mon groupe n’est pas opposé – bien au contraire – à l’utilisation des nouvelles technologies et de la visioconférence en particulier. Celle-ci peut permettre de réunir des personnes éparpillées. Il ne s’agit donc pas d’en remettre en cause le principe.
En première lecture, l’Assemblée a néanmoins souhaité encadrer le recours à cette technique dès lors qu’il n’y avait pas accord. S’il y a accord, nous ne trouvons pour notre part pas gênant que l’on ne pose pas de limite. Mais pourquoi, en cas de désaccord, maintenir trois réunions par an ? Je ne me souviens plus, du reste, pourquoi nous avons retenu ce chiffre de trois.
Peut-être le rapporteur nous le rappellera-t-il…
Nous proposons par cet amendement qu’en l’absence d’accord du personnel, on ne puisse utiliser la visioconférence. Cela étant, le personnel lui-même peut être intéressé par l’emploi de cette technique. Il n’y a donc pas de raison d’avoir peur. Selon les sujets, il peut y avoir accord ou non. Sur des questions difficiles à traiter, on pourra avoir la volonté de se voir physiquement, de discuter préalablement. Ici même, on pratique bien les suspensions de séance pour mieux reprendre la discussion !
Sourires.
Bref, il s’agit de supprimer cette possibilité de tenir trois réunions par an en visioconférence. Nous ne voyons pas ce qui a pu amener à s’arc-bouter sur ce seuil de trois. S’il n’y a pas d’accord, autant ne pas faire de visioconférence du tout ! Mais je pense qu’il y aura accord toutes les fois que chacun y trouvera son compte.
Je ne vois pas comment ne pas reconnaître le principe de l’accord. Si accord il y a, on peut considérer que les parties prenantes à cet accord ont disposé des éléments suffisants pour juger de la pertinence du recours à la visioconférence. Dans le cas contraire, nous avions, en première lecture, limité ce recours à trois réunions par an.
Pourquoi trois ? Non pas, monsieur Cavard, pour procéder à une réduction drastique, mais pour empêcher que tous les travaux ne se fassent par visioconférence. Cela étant, je reconnais que le chiffre a été fixé sur la base d’une appréciation des temps forts pouvant justifier un échange par visioconférence.
Mais surtout, madame Fraysse, l’introduction de la notion de circonstance exceptionnelle présente un véritable risque. J’avais d’ailleurs répondu en ce sens à nos collègues de l’opposition au sujet d’un autre article : les circonstances exceptionnelles sont très difficiles à définir. Aussi, le risque de contentieux deviendrait bien plus important que dans le dispositif que nous proposons, lequel fait confiance aux partenaires sociaux dans l’hypothèse d’un accord ou limite à trois par an – que cela semble trop restreint, c’est un autre débat – le nombre de recours à la visioconférence dans l’hypothèse inverse.
Je crois que nous étions parvenus à un bon équilibre en première lecture. Avis défavorable, donc, aux deux amendements.
Même avis.
Le débat est semblable à celui de la loi relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, où l’on en était venu, en 2014, à vouloir interdire la géolocalisation !
La visioconférence, je le répète concerne les grands groupes, les groupes européens. Contrairement ce que vous dites, madame Fraysse, elle permet de démultiplier le dialogue social. Là où, en raison des contraintes – liées notamment aux déplacements et aux frais engendrés –, on n’organise qu’une réunion par an, on pourra en tenir plusieurs. La visioconférence permet parfaitement de s’exprimer, et même de voir ses interlocuteurs en grand format.
Nous avons d’ailleurs expérimenté cette technique à l’Assemblée nationale pour des réunions entre la commission des affaires européennes et le Parlement européen. Ayant rarement l’occasion, à titre personnel, de me rendre à Bruxelles ou à Strasbourg, j’ai pu ainsi discuter avec nos collègues européens et cela m’a semblé très intéressant. Si, à chaque fois que nous avons à discuter d’un sujet, il fallait emmener trente ou quarante députés français au Parlement européen, vous imaginez le bilan carbone – je n’oublie pas qu’il y a un Vert dans l’hémicycle ce soir – et les frais que cela représenterait ! Il n’y aurait plus qu’une seule réunion par an.
Je pense donc que la visioconférence va dans le bon sens et favorise le dialogue social.
L’article 12 est adopté.
La rationalisation des nombreuses négociations et consultations est la bienvenue. Cela dit, il ne s’agit que d’une rationalisation. Vous ne faites que regrouper les obligations en trois blocs. Cela fait joli, mais cela ne change que peu de chose et n’aidera pas à éviter les effets de seuil, notamment celui du passage de quarante-neuf à cinquante salariés, qui reste un des seuils les plus problématiques.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 207 .
Une jurisprudence constante oblige les employeurs à soumettre les projets d’accord collectif, ainsi que leur révision ou leur dénonciation, à l’avis du comité d’entreprise. Cela a du sens, car les compétences des élus du comité ne sont pas les mêmes que celles des négociateurs. Les accords peuvent avoir un accord non négligeable sur la vie économique de l’entreprise, et ces questions peuvent échapper aux négociateurs. De plus, les élus auront ainsi une meilleure connaissance des accords signés dans l’entreprise. Enfin et surtout, la loi relative à la sécurisation de l’emploi a donné une place importante aux accords en matière de licenciements collectifs, reléguant de fait le comité d’entreprise à un rôle secondaire alors que les élus qui y siègent, spécialistes des questions économiques, ont une expérience indéniable en matière de licenciements économiques.
Le fait que le comité d’entreprise donne un avis sur les accords mettant en place le plan de sauvegarde de l’emploi revêt encore plus d’importance. Ne plus soumettre les projets d’accords collectifs, notamment ceux qui mettent en place le plan de sauvegarde de l’emploi, constitue un véritable recul des droits des salariés. Une fois de plus, ce projet de loi remet en cause les jurisprudences progressistes. Son adoption serait contraire aux intérêts des salariés, et c’est inquiétant.
Les projets d’accord collectif doivent impérativement être soumis au comité d’entreprise. Tel est le sens de cet amendement.
Nous avions déjà rejeté cet amendement en première lecture. Depuis la loi du 20 août 2008, l’intérêt de la consultation du comité d’entreprise n’apparaît plus comme véritablement pertinent. En effet, le lien entre le comité d’entreprise et le délégué syndical est renforcé par la mesure de la représentativité des organisations syndicales et par les règles de conclusion des accords collectifs qui en découlent. Pour ces raisons, avis défavorable.
L’amendement no 207 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 208 .
Il est proposé par cet amendement de supprimer les alinéas 18 à 22, qui autorisent, par accord collectif, à décider du fonctionnement du comité d’entreprise en restreignant sa capacité d’action, s’agissant notamment des modalités de consultation récurrente, de la liste et du contenu de certaines informations récurrentes, du nombre de réunions annuelles – qui ne peut être inférieur à six –, ou encore des délais fixés au comité pour rendre ses avis.
Sur le principe, il est problématique que les délégués syndicaux représentant 30 % des suffrages décident du fonctionnement d’une autre institution représentative du personnel, à savoir le comité d’entreprise. Cette mise sous tutelle du comité d’entreprise est contraire à l’indépendance et à l’autonomie que nous revendiquons pour chaque instance. Elle s’inscrit dans une forme de centralisation et de mise sous contrôle des instances.
Par ailleurs, ces dispositions signifient que, par accord, les droits du comité d’entreprise peuvent être amoindris par rapport à ce que la loi prévoit. Nous considérons que certains droits ne sauraient faire l’objet d’arrangements conventionnels. La loi doit fixer un plancher.
Permettez-moi, monsieur le rapporteur, de citer ce que vous disiez commission à propos d’un amendement de la droite : « on ne peut pas renvoyer la définition de l’architecture des institutions représentatives du personnel et de leurs règles de fonctionnement à une négociation d’entreprise. Par ailleurs, je crois qu’il faut conserver un socle minimal qui permette de garantir la représentation des salariés. » Je n’ai rien à ajouter : c’est le sens de mon amendement.
Je suis une nouvelle fois assez surpris que l’on remette en cause le principe de l’accord d’entreprise. Certes, le texte introduit une forme de souplesse, mais, avec cet amendement, on fait comme si l’on considérait que les délégués syndicaux ne sont pas à même de définir les règles appropriées de consultation au sein de leur entreprise. J’avoue ne pas comprendre cette position. Avis défavorable, donc.
Même avis.
Comme je l’ai indiqué à la fin de mon propos, monsieur le rapporteur, les négociations et les accords sont une chose, mais la loi doit fixer des règles et des planchers. Ce n’est pas le principe de l’accord que je mets en cause.
L’amendement no 208 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 266 .
L’amendement no 266 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 146 .
Cet amendement vise à ajouter une disposition quant à la liste des éléments mis à la disposition des salariés en vue de la consultation annuelle.
En première lecture, M. le rapporteur avait répondu que l’obligation de discrétion figurait déjà à l’alinéa 43, qui dispose que les documents sont réputés confidentiels. Je propose néanmoins de préciser que l’ensemble des informations mises à disposition, c’est-à-dire non seulement les documents des sociétés commerciales, mais l’ensemble des six points fixés dans cette sous-section 3, relèvent de l’obligation de discrétion. Figurent notamment dans cette liste les informations relatives à la politique de recherche et de développement technologique de l’entreprise, qui me semblent devoir rester particulièrement confidentiels puisqu’il y va de l’avenir même de l’entreprise.
À plusieurs reprises, le Gouvernement, alors que nous examinions des textes traitant des questions de sécurité – le dernier en date étant le projet de loi relatif au renseignement –, nous a indiqué que nous étions soumis à diverses formes d’espionnage. Il paraît important que nous rappelions aux comités d’entreprise que les documents mis à disposition sont réputés confidentiels.
Les éléments considérés comme confidentiels le demeurent. Cela ne signifie pas que les autres doivent relever de la confidentialité. Ainsi, les informations sur le CICE ou sur la politique de recherche et de développement ne sont aucunement confidentielles et n’ont pas vocation à l’être. Au contraire, elles sont incluses dans la base de données unique.
Monsieur Vercamer, votre amendement est donc satisfait pour la partie correspondant aux documents comptables transmis au CE dans le cadre de ces consultations : ces documents ont déjà un caractère confidentiel, et il est confirmé. Je vous demande de retirer votre amendement, à défaut de quoi l’avis sera défavorable.
L’amendement no 146 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 188 .
L’amendement no 188 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 216 deuxième rectification.
Le principe d’égalité salariale est inscrit dans notre droit depuis près d’un demi-siècle, mais aujourd’hui encore, la rémunération des femmes demeure inférieure d’un quart à celle des hommes, malgré les différentes dispositions et sanctions prévues par la loi.
Dans la lignée de l’action d’Yvette Roudy, de Catherine Génisson et de ceux qui ont inscrit dans la loi des mesures favorisant l’égalité professionnelle, cet amendement vise à permettre aux comités d’entreprise de recourir à un expert afin d’analyser les informations, très riches, sur la situation comparée des femmes et des hommes, auxquelles ils ont désormais accès, puisque nous en avons adopté ce principe en première lecture.
Cela permettra d’expliquer les raisons pour lesquelles des inégalités et des écarts salariaux entre les femmes et les hommes peuvent encore exister dans une entreprise du XXIe siècle. Les acteurs de la négociation pourront ainsi élaborer des propositions pour parvenir à une égalité professionnelle parfaite, y compris en matière de rémunération.
Cet amendement, madame Mazetier, reviendrait à instaurer une nouvelle modalité de recours à une expertise spécifique, en vue de la préparation de la négociation sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Vous proposez de le faire dans toutes les entreprises de plus de 50 salariés.
J’avoue que cela me semble un peu excessif, notamment par rapport à la disposition que nous avons déjà adoptée en première lecture, issue d’un amendement dont vous étiez l’auteure. Je serais assez tenté d’en rester à ce qui a été adopté en première lecture. Avis défavorable.
Même avis.
Sur le fond – à savoir la question de l’égalité professionnelle –, nous sommes bien évidemment d’accord. Mais cet amendement pose deux questions. D’une part, le recours à une expertise contribuera à alourdir le système. D’autre part – et ce point est beaucoup plus important –, l’amendement vise à permettre au comité d’entreprise de recourir à un expert, alors même que la négociation sur l’égalité professionnelle relève d’un autre niveau, celui des délégués syndicaux. À ce titre, il ne me semble pas recevable.
Rien n’est excessif dans la République lorsqu’il s’agit d’établir l’égalité ! Constater, près d’un demi-siècle après l’inscription de l’égalité professionnelle dans notre droit, un écart salarial entre les femmes et les hommes de l’ordre de 25 %, c’est cela qui est excessif !
Toutes les mesures devraient être prises pour combler ce fossé insupportable, que rien n’explique en droit. Les facteurs sont multiples ; ils vont de la perception sociale à l’inégalité d’accès aux formations professionnelles, en passant par la promotion. Ils peuvent désormais être analysés par toutes les IRP, puisqu’en première lecture, nous avons prévu que toutes les informations sur la situation comparée seront accessibles, à travers la base de données unique. Mais elles seront tellement riches qu’il n’est pas inutile de prévoir qu’une expertise accompagne ceux qui seront amenés à s’en saisir.
J’entends ce que dit M. le rapporteur. Il est vrai que nous avons fait un pas immense en première lecture, en prévoyant que cette expertise sera financée dans les entreprises de 300 salariés et plus. Mais après tout, pourquoi les autres n’auraient-elles pas accès à cette expertise ? L’égalité n’est pas seulement l’affaire de ceux qui participent à ce qui est devenu, en première lecture, la négociation sur l’« égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et qualité de vie au travail ». Tous les membres des IRP peuvent se saisir de cette question, comme, du reste, tous les parlementaires.
L’amendement no 216 deuxième rectification n’est pas adopté.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 217 .
Il s’agit de revenir au texte que nous avions adopté en première lecture.
L’amendement no 217 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 277 .
L’amendement no 277 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 13, amendé, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 8 .
L’amendement no 8 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je crains qu’ajouter aux objectifs de la négociation la « mixité des emplois » ne relève de l’affichage. Je le répète, il faut plutôt agir au niveau de la formation. L’entreprise se réjouit lorsqu’une personne entre dans les critères de son offre de poste – peu importe son sexe ! Une entreprise de maçonnerie emploiera sans doute uniquement des hommes parce que les personnes qualifiées sont presque uniquement des hommes.
Ce n’est donc pas le bon niveau d’action, et cette disposition ne constitue qu’une obligation supplémentaire pour l’entreprise.
Il n’y a pas de raison que cet objectif ne soit pas expressément abordé dans le cadre de cette négociation. Celle-ci constitue même le cadre le plus approprié pour le faire. D’ailleurs, c’est déjà le cas aujourd’hui. Avis défavorable.
L’amendement no 34 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement no 260 .
Notre assemblée a beaucoup débattu des discriminations à l’embauche en première lecture. Cet amendement vise à instaurer un registre unique des candidatures dans les entreprises de plus de 50 salariés.
L’article L. 2242-8, que réécrit le projet de loi, prévoit que la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail porte notamment sur les mesures permettant de lutter contre les discriminations.
Le dispositif qui vous est proposé, inspiré du groupe de dialogue inter-partenaires, vise à renforcer la traçabilité et la transparence des procédures de recrutement, dans le cadre d’un accord global. Les organisations représentant les employeurs, sous réserve que la pédagogie nécessaire soit observée, ont donné leur accord pour que l’on discute, à l’intérieur des entreprises, de l’établissement d’un tel registre.
Le principe est en quelque sorte le même que celui qui conduit les forces de police à filmer leurs propres opérations : il s’agit de sécuriser les procédures – en l’espèce, le recrutement. Pour les entreprises qui n’ont rien à se reprocher, mettre en place ce fichier ou en discuter la possibilité serait un signe important, au moment où représentants des salariés et associations de lutte contre les discriminations sont fort marris que la généralisation du CV anonyme ait été abandonnée.
Je comprends l’intérêt d’un tel registre, mais il me semble lourd de le mettre en place au sein d’une entreprise de 50 salariés. Le seuil aurait dû être plus élevé. Par ailleurs, l’insertion de cet élément dans la négociation sur la qualité de vie au travail me paraît discutable. Avis défavorable.
Pour avoir présidé, pendant plus de neuf mois, un groupe de lutte contre les discriminations dans l’entreprise, je partage le sentiment de M. Goldberg. La lutte contre les discriminations est nécessaire ; elle participe d’un impératif républicain, car les discriminations portent atteinte à la cohésion sociale.
Néanmoins, je considère que le registre des candidatures n’est pas la bonne réponse. Les formes de recrutement sont diverses, parfois informelles ; 7 % des embauches seulement s’effectuent à partir d’une réponse à une offre d’emploi publiée, et la très grande majorité sont des réembauches, font suite à des candidatures spontanées ou sont des recrutements par relations – une spécificité bien française.
Par ailleurs, le fichier serait aussi énorme que son utilité discutable. C’est la raison pour laquelle le groupe de travail inter-partenaires, présidé par Jean-Christophe Sciberras, n’a pas retenu cette proposition.
Il existe d’autres moyens plus efficaces de lutter contre les discriminations à l’embauche. Lors la remise du rapport de la mission Sciberras, le 19 mars, j’ai annoncé 13 mesures, dont certaines entreront en vigueur dès le mois d’octobre, parmi lesquelles de grandes campagnes de testing. Le projet de loi sur la justice du XXIe siècle rendra possible les actions de groupe contre les discrimination. En revanche, l’introduction de l’obligation de tenir un registre dans les entreprises de plus de 50 salariés ne correspond pas du tout aux conclusions du groupe de travail. Je vous demande donc de retirer cet amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
Je n’ai pas cosigné cet amendement, mais j’en approuve la philosophie. Je ne veux pas parler à la place de l’auteur, mais je pense qu’il serait possible de relever les seuils en rectifiant l’amendement ou en le sous-amendant.
En première lecture, chers collègues, nous sommes revenus sur un élément de notre droit, le CV anonyme, pour la simple raison que la mesure n’était pas appliquée et ne semblait pas applicable.
Il était donc important d’avancer d’autres propositions.
Celle-là peut en faire partie, sous la réserve émise par Christophe Sirugue – concernant les seuils –, qui est sans doute pertinente. Quoi qu’il en soit, l’action judiciaire, individuelle ou collective, ne doit pas être la seule réponse aux problèmes de discrimination. Nous devons multiplier les dispositifs visant à assurer une sorte de prévention et modifier les comportements le plus tôt possible dans la chaîne du recrutement. Au demeurant, cela permettrait de ne pas embouteiller les tribunaux.
Le dispositif proposé par M. Goldberg me semble donc intéressant ; il mériterait d’être expérimenté, à défaut de pouvoir être généralisé immédiatement.
Je ne sais pas si l’amendement sera maintenu, mais nous le soutiendrons pour les raisons qui viennent d’être exposées. Comme le disait M. Hanotin, l’éventualité d’une expérimentation ne doit pas être écartée. Certes, la question des seuils mérite d’être posée, mais un tel dispositif nous permettrait au moins de disposer d’éléments objectifs.
Un registre des embauches et des candidatures mettrait en évidence les difficultés auxquelles sont confrontés un certain nombre de nos jeunes concitoyens, qui veulent travailler, mais ont parfois du mal à accéder à l’étape de l’entretien d’embauche.
Ouvrons les yeux ! Nous devons porter un autre regard sur l’embauche, la compétence, ou encore les modes de travail, car la sociologie évolue.
Nous ne devons pas balayer d’un revers de main de telles propositions. Si l’amendement est maintenu, nous le voterons, ce qui permettrait d’ouvrir un vrai débat avec les entrepreneurs autour de leurs critères d’embauche.
Je comprends les critiques émises contre le dispositif mais rappelons qu’il ne s’agit pas de le généraliser. Reprenons l’article dans sa rédaction actuelle : la « négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail » porte, entre autres, sur les « mesures permettant de lutter contre toute discrimination en matière de recrutement, d’emploi et d’accès à la formation professionnelle », auxquelles nous proposons d’ajouter celles permettant la mise en place de ce registre.
S’il s’agit d’une expérimentation, les deux arguments qui s’y opposent, en particulier celui du seuil, tombent.
M. le ministre évoquait le dispositif de l’action de groupe dans le cadre du travail, que j’accompagne de mes voeux. Encore faut-il prouver les faits, même si les opérations de testing peuvent y contribuer. À mon avis, le dispositif que je vous propose obéit non pas à une logique punitive, mais à une logique de sécurisation, y compris pour les entreprises, au cas où elles seraient visées par une action de groupe.
Souvenons-nous que les forces de police, au départ réticentes à filmer leurs opérations, ont fini par reconnaître que la vidéo leur donnait plus de sécurité. La logique est la même. Pour la quasi-totalité des entreprises qui ont d’ores et déjà mis en place des dispositifs de lutte contre la discrimination, la mesure sera indolore. Quant aux autres, elle pourrait servir de base à l’engagement de poursuites. Je maintiens mon amendement.
Nous allons finir par soutenir le Gouvernement ! À quoi sert donc le dispositif qui nous est proposé ? Voulez-vous vraiment demander aux entreprises de conserver tous les CV reçus, de les classer, pour une durée indéterminée, peut-être cinq ou dix ans ? Les archives papier vont atteindre un volume extraordinaire mais qu’allez-vous en déduire ? Qu’à Aulnay-sous-bois, par exemple, 60 % des personnes non retenues appartenaient à telle race ou telle religion ?
Parfaitement, telle race ou telle religion, car tel est le but que vous poursuivez, monsieur Goldberg. Mais vous aboutirez à des conclusions évidentes parce que certaines régions sont essentiellement peuplées d’un certain type de population, qui forcément recherchent un emploi. Vous ne prouverez donc rien du tout mais vous reprocherez au chef d’entreprise d’avoir refusé 80 % de CV. Ce n’est sécurisant pour personne, surtout pas pour le chef d’entreprise.
Surtout, votre exemple est mal venu : vous prétendez que les vidéos auraient permis de démontrer que la police n’arrête pas tel type de population plutôt que tel autre. Que je sache, la police fait bien son travail ! Les chefs d’entreprise aussi.
Par ailleurs, allez au bout de votre logique : pourquoi les entreprises privées seraient-elles particulièrement condamnables ? Agissez de même pour la SNCF, pour les entreprises publiques ! Or, nous n’obtenons même pas les statistiques des personnes handicapées que les entreprises publiques n’ont pas embauchées. Vous savez parfaitement que des ministères refusent de communiquer le taux de personnes handicapées embauchées, alors que tout le monde réclame ces statistiques.
Pourquoi reviendrait-il chaque fois à l’entreprise de prouver l’absence de discrimination ? Vous ne prouverez rien du tout avec un tel dispositif ! En revanche, vous alourdirez considérablement la procédure.
Vous faites un mauvais procès aux entreprises, qui plus est sans apporter la bonne solution au problème. Je comprends que le Gouvernement s’inquiète. Il me semble qu’un pays qui compte 5 millions de chômeurs devrait avoir d’autres préoccupations. Cette méthode est épouvantable, sur un plan pratique comme intellectuel, sans parler du message que vous adressez aux entreprises.
L’amendement no 260 n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 3 .
L’amendement no 3 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 209 .
Cet amendement vise à maintenir l’obligation annuelle et triennale de négocier. Vous proposez, dans votre texte, que, par accord majoritaire, la périodicité des négociations annuelles sur la rémunération, le temps de travail, le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise et la qualité de vie au travail, puisse devenir triennale et que les négociations triennales sur la gestion des emplois et des parcours professionnels puissent devenir quinquennales.
Or, la régularité des négociations permet d’informer, de mobiliser les salariés, sur les différentes thématiques. Les salariés doivent avoir le maximum d’occasions d’intervenir au sujet de leurs conditions de travail et de la gestion de leur entreprise, conformément à l’alinéa 8 du préambule de la Constitution de 1946. Tel est l’objet de cet amendement.
Vous me répondrez sans doute, monsieur le rapporteur que, dans la mesure où un accord a été trouvé, nous pouvons considérer que tout va bien. Or, les accords sont le résultat de rapports de force, ils sont fluctuants et soumis à caution. Surtout, la loi doit fixer une philosophie, un cadre. Comme par hasard, la souplesse que vous accordez ici se traduit par une baisse du nombre de négociations et non une augmentation. Bien sûr, les réunions seront moins nombreuses, ce qui va dans le sens de la simplification, mais à ce rythme, autant toutes les supprimer ! Ce n’est pas ce que vous souhaitez, aussi me paraît-il légitime de maintenir dans la loi l’obligation d’une négociation régulière. Parler des salaires ou des conditions de travail une fois par an, cela n’a tout de même rien d’exorbitant ! Nous tenons à ce que la loi maintienne le nombre de négociations actuellement prévu.
En la matière, les garanties apportées me semblent tout à fait suffisantes. Tout d’abord, comme vous l’avez rappelé, un accord majoritaire sera nécessaire, ce qui suppose que les organisations signataires aient recueilli au moins 50 % des suffrages aux dernières élections professionnelles. C’est une garantie importante, à moins de considérer une nouvelle fois que les accords majoritaires n’ont pas de portée.
Par ailleurs, la négociation sur les salaires peut, sur simple demande, redevenir annuelle.
Enfin, il faut conserver une certaine souplesse au dispositif pour s’adapter à la réalité des entreprises.
Avis défavorable.
L’amendement no 209 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement no 147 .
Le projet de loi permet, par accord collectif majoritaire, de modifier la périodicité des négociations annuelles sur les salaires pour la porter à trois ans.
Il est nécessaire de supprimer la disposition qui permet, malgré l’utilisation de cette possibilité, une obligation de négocier annuellement en cas de demande d’une organisation syndicale. En effet, cette disposition annihile l’impact d’une réelle avancée, qu’il faut préserver. On ne peut, d’un côté, prévoir la possibilité de négociations triennales et, de l’autre, les rendre annuelles.
Cette disposition est l’une des garanties proposées, rendue nécessaire par le caractère particulier de la négociation salariale. Le retour à une négociation annuelle doit être possible. Avis défavorable.
L’amendement no 147 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 4 .
L’amendement no 4 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 262 .
L’amendement no 262 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 14, amendé, est adopté.
Article 14
L’article 14 bis est adopté.
Cet article instaure une architecture complexe pour pallier l’absence de délégué syndical, avec trois étages : en priorité des élus mandatés, à défaut des élus du personnel non mandatés, à défaut un salarié non élu mais mandaté.
Je ne comprends pas que l’on donne la priorité à des personnes qui ne sont pas salariées de l’entreprise concernée, ce qui prouve, une nouvelle fois, votre peu de goût pour le dialogue direct. C’est dommage.
J’aurais voulu proposer un amendement, mais l’architecture est si complexe que c’est difficile. Cet article veut régler un problème réel mais il aboutit à alourdir et rigidifier le code du travail. On retombe vite dans les vieux travers.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 263 .
Cet amendement tend à soumettre un accord conclu avec un élu mandaté à l’approbation par la majorité des salariés de l’entreprise, comme c’est le cas pour les salariés mandatés.
L’amendement no 263 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 15, amendé, est adopté.
L’article 16 est adopté.
Il me faut expliquer cet amendement qui vise à engager une concertation entre organisations professionnelles d’employeurs concernant les règles de gouvernance et de répartition des crédits du fonds paritaire. Une ordonnance sera prise dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi.
De quoi s’agit-il ? Vous savez parfaitement que j’ai soulevé au Sénat le problème que posent les règles qui régissent le fonds paritaire de financement du dialogue social concernant les organisations d’employeurs.
Il ne s’agissait en aucun cas, comme on a pu le croire, de revenir sur la mesure de représentativité pour la négociation collective. Je rappelle que, pour être représentative, une organisation professionnelle doit rassembler au moins 8 % des adhérents du champ concerné. Aucune différence n’est faite selon les effectifs employés, et même les entreprises qui n’ont pas de salariés sont prises en compte.
En revanche, pour qu’un accord puisse s’appliquer une fois signé, il faut que l’organisation représentant 50 % des effectifs ne s’y oppose pas. Il existe donc un droit d’opposition à partir d’un seuil de 50 % de représentativité. La règle est claire. Les décrets ont presque tous été pris et les débats préparatoires avec les partenaires sociaux et dans cet hémicycle ont eu lieu.
Ce n’est pas le cas s’agissant du fonds paritaire qui, lui, répartit les cotisations qui sont prélevées sur la masse salariale des entreprises. Il m’est apparu problématique, comme je l’ai dit, de considérer, concernant la gestion de ces fonds, qu’un auto-entrepreneur équivaut à Renault ou à Airbus. Ainsi, une fédération de micro-entreprises pourrait se constituer demain dans le seul but d’accéder à ces fonds, ce qui, chacun le comprend, poserait un problème. Il ne s’agirait que de dérives minoritaires et non représentatives, mais elles n’iraient pas dans le sens de l’amélioration du dialogue social.
La majorité sénatoriale n’a pas souhaité adopter l’amendement que j’avais déposé. Cependant, les échanges auxquels nous avons tous assisté depuis témoignent du fait suivant : peu d’organisations s’étaient penchées sur la loi au point de la connaître en détail. Les clivages sur ce point sont bien plus complexes qu’une opposition simpliste entre les organisations interprofessionnelles nationales. Nombreuses sont les fédérations interprofessionnelles – composées en majorité de PME – qui ont soutenu la démarche que j’ai engagée.
J’ajoute qu’un protocole d’accord a été conclu en 2013 entre les organisations patronales, selon lequel il serait tenu compte de leur nombre d’adhérents dans les relations sociales. J’en tire la conclusion suivante : il existe un réel problème que l’on ne saurait laisser dans l’ombre, et je souhaite que la responsabilité prime sur toute autre considération.
Le dialogue est notre méthode. C’est pourquoi cet amendement vise à demander aux organisations interprofessionnelles d’employeurs une concertation en vue de réformer les règles de gouvernance et de répartition des crédits du fonds paritaire de financement du dialogue social, qui avait été créé par la loi du 5 mars 2014. Cette concertation prendra fin en novembre 2015. En fonction des résultats qu’elle produit, le Gouvernement réformera ces règles par ordonnance. Si un accord est trouvé, je m’engage à le transposer intégralement. Dans le cas contraire, le Gouvernement prendra ses responsabilités.
Nous avons été nombreux à être abondamment interrogés sur ce sujet par différentes organisations d’employeurs. Il est important de trouver une issue à la discussion difficile qu’elles conduisent aujourd’hui entre elles.
La proposition que formule le Gouvernement me semble opportune. Tout d’abord, elle donne corps à l’idée d’une nouvelle concertation, laquelle est nécessaire pour que les employeurs puissent confirmer l’accord conclu en 2013 et dont il semble objectivement que de nombreux signataires ont aujourd’hui quelque peine à se rappeler.
Ensuite, nous ne saurions lancer une concertation sans en fixer le terme : il me paraît important de fixer une date limite, en l’occurrence le 15 novembre 2015, comme l’a rappelé M. le ministre. Si un accord est conclu à cette date, il sera transposé ; en l’absence d’accord, il me semble légitime que le Gouvernement prenne ses responsabilités – c’est là un élément important.
Je voudrais simplement demander à M. le ministre de préciser un point rédactionnel dans l’amendement qui nous a été distribué : les organisations professionnelles d’employeurs sont explicitement mentionnées dans le premier paragraphe, mais pas dans le second. Je suppose que l’expression est implicite dans le membre de phrase ainsi rédigé : « au regard de la concertation mentionnée au même alinéa », mais je ne voudrais pas que l’on ait à discuter une nouvelle fois de la représentativité au sens large, y compris s’agissant des organisations autres que celles des employeurs. Je préfère donc que les choses soient précisées dès maintenant.
Pour le reste, j’émets un avis favorable sur cet amendement.
Je confirme le propos de M. le rapporteur : nous avons été, les uns et les autres, fort sollicités au sujet de ce qui était jusqu’à présent l’intention du Gouvernement, qui ne manquait pas de faire réagir.
Je crois me souvenir du péché originel qui se trouve à l’origine de cette affaire : les petites entreprises se sont senties lésées par les dispositions de la loi sur la formation professionnelle.
Il fallait donc que ce sentiment réapparaisse à un moment ou à un autre.
En l’occurrence, vous donnez du temps au temps, ayant bien compris que le mécontentement montait de toutes parts, et vous renvoyez la balle aux partenaires sociaux.
Dans ces conditions, j’ai deux questions. Tout d’abord, ces discussions ont-elles eu lieu entre eux avant qu’ils n’aboutissent à l’échec que l’on sait, à cause duquel nous revenons aujourd’hui sur un texte de loi ?
Ensuite, il s’agit de gouvernance et de répartition de crédits – c’est là le fond de l’affaire. Pouvez-vous donc, monsieur le ministre, nous informer – aujourd’hui ou demain, peu importe – quant à l’enveloppe concernée ? De quoi parle-t-on ? Je crois savoir en effet qu’il s’agit de sommes très importantes.
Non seulement vous ne respectez pas l’article L. 1 du code du travail – lequel prévoit une procédure de concertation assortie d’un document d’orientation et répondant aux objectifs que vous recherchez –, mais, de surcroît, vous nous présentez un amendement de dernière minute pour vous autoriser à prendre une ordonnance ! En matière de respect du dialogue social et du Parlement, c’est plutôt fort !
Voilà pour la forme. Sur le fond, vous vous souvenez que j’avais proposé dès la première lecture, en commission, que la répartition du fonds soit faite en fonction de l’audience. Je m’étonne que cette suggestion ait mis si longtemps à refaire surface – qui plus est sous la forme d’un amendement du Gouvernement, déposé à minuit et demie, en nouvelle lecture. Nous en discutons pourtant depuis longtemps ! Ne faudrait-il pas secouer quelque peu votre cabinet, monsieur le ministre, afin qu’il travaille plus vite ?
Sourires.
Quoi qu’il en soit, il est important de déterminer comment seront répartis les crédits de ce fonds car, à ce jour, la méthode n’est pas encore fixée. Il va de soi qu’une entreprise de zéro salarié ne pèse pas le même poids qu’une entreprise de 200 000 salariés, et je comprends que vous privilégiez la négociation. Toutefois, je ne suis pas certain qu’il soit possible de parvenir à un accord avant le 15 novembre.
Je ne voudrais pas que nous aboutissions à une disposition telle que celle que vous avez présentée au Sénat, et qui représente l’autre extrême. Je pense plutôt que l’on pourrait instaurer un système s’apparentant à celui des chambres de commerce, où des collèges variant en fonction du nombre de salariés ou de la taille de l’entreprise permettraient d’éviter la proportionnalité intégrale. Néanmoins, il me semble important de ne pas considérer une entreprise de 200 000 salariés comme une entreprise de zéro salarié.
Mon principal reproche tient au fait que la méthode de calcul du fonds n’est pas la même que celle de la mesure de l’audience, laquelle diffère de la mesure de la représentativité. Je ne voudrais pas, monsieur le ministre, que l’on change de méthode pour parvenir à ses fins chaque fois qu’il y a un gâteau à partager. Mieux vaudrait adopter une méthode générale, claire et précise que chacun connaîtrait par avance : ce serait plus sain pour le dialogue social et pour le paritarisme.
Une fois n’est pas coutume, monsieur le ministre, je reprendrai les arguments de M. Vercamer sur un amendement de ce type. Si le débat n’avait pas eu lieu au Sénat, nous aurions pu considérer que la question de la répartition du fonds n’avait pas été soulevée et que nous n’avions pas vu venir ce débat. Pourtant, le débat a bien eu lieu au Sénat. Nous savons ce que vous y avez proposé et connaissons le résultat du vote – sans pour autant le soutenir forcément. Quoi qu’il en soit, le débat a partiellement eu lieu.
Comme M. Vercamer, je constate donc que vous nous demandez d’adopter le principe de la négociation en fixant au mois de novembre 2015 un couperet au-delà duquel vous prendrez une ordonnance. Or, chacun sait que la négociation sera rude ; autrement dit, vous nous demandez d’adopter un amendement qui vous habilitera à prendre une ordonnance dès la fin de l’année, dont nous pourrons éventuellement reparler dix-huit mois plus tard, comme le prévoit la règle.
Sans doute est-il juste d’ouvrir une négociation entre les personnes intéressées. Dans ce cas, monsieur le ministre, je vous demande de trouver un texte – le Premier ministre lui-même a annoncé de nombreux débats sur les entreprises dans les mois à venir, et vous et vos équipes risquez d’être fort sollicités – pour y introduire un article ou au moins relancer le débat dans l’hémicycle, si la négociation échoue, ce qui éviterait d’avoir à emprunter la voie d’une ordonnance dont les parlementaires n’auraient l’occasion de débattre que dix-huit mois plus tard.
Enfin, la répartition du fonds étant calculée par rapport à la masse salariale, vous avez eu l’honnêteté, monsieur le ministre, de reconnaître qu’elle vous poserait problème si la représentativité patronale, telle qu’elle existe dans d’autres domaines, était appliquée. Cela s’appelle aussi la solidarité : les grandes entreprises, qui fournissent des moyens importants, pourraient faire preuve de solidarité vis-à-vis des entreprises plus petites qui emploient moins de salariés.
Sur ce sujet, nous voilà enfin revenus à la sagesse. Au fond, nous repartons de la position commune que le MEDEF, la CGPME et l’UPA ont exprimée le 19 juin 2013.
Je l’ai citée.
En effet. Reprenons ce texte : « C’est donc nécessairement au sein de ces champs d’activité économique que doit être appréciée la représentativité d’une organisation patronale de branche ». Outre l’ancienneté et l’influence, entre autres, le dernier critère d’appréciation de la représentativité est le suivant : « la mesure de l’audience de l’organisation à partir des adhésions, appréciée en fonction d’une pondération du poids des entreprises adhérentes ». Ce n’est pas notre texte, mais bien celui du MEDEF, de la CGPME et de l’UPA !
Dès lors, la proposition qui nous est faite aujourd’hui – même si elle est tardive et si l’on peut en contester la forme – offre une solution sur le fond.
Elle comporte toutefois un écueil, monsieur le ministre : celui de la date limite. En théorie, la mesure de l’audience doit être effectuée à la fin de l’année 2015, ce qui ne correspond pas au terme que vous fixez pour la négociation.
A-t-on vraiment besoin d’habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance ? Autrement dit, le dispositif actuel, tel qu’il est prévu par les articles L. 2135-13 et L. 2135-15 du code du travail, ne suffit-il pas ? La question vaut particulièrement pour l’article L. 2135-13, qui prévoit une répartition sur une base forfaitaire, d’une part, et en fonction de l’audience, d’autre part, répartition qui est fixée par décret.
Par conséquent, qu’est-ce qui empêche le Gouvernement de provoquer, comme il le souhaite, une concertation entre les organisations professionnelles puis, compte tenu de ses résultats, d’apprécier la façon dont l’audience doit être mesurée ? Précisons que la position commune à laquelle M. Cherpion vient de faire référence consiste à apprécier l’audience dans un double sens : celui du nombre d’entreprises et celui des effectifs salariés de l’entreprise – c’est la « pondération ».
Chacun comprend bien l’exemple cité par M. Combrexelles : « Un garage Renault n’a pas le même poids que le groupe Renault », disait-il. Il me semble toutefois que les textes que nous avons votés, notamment les dispositions de la loi – qui n’est pas si vieille – du 5 mars 2014, contiennent déjà les deux éléments de répartition et prévoient l’outil permettant de les appliquer, à savoir le décret.
En d’autres termes, est-il vraiment nécessaire de remettre le droit positif sur le métier et d’habiliter le Gouvernement à modifier une disposition qui n’a pas encore été appliquée ? Sous bénéfice d’inventaire, elle me semble pourtant applicable au moyen du décret qu’il vous appartient de prendre en l’état du code du travail.
En ce qui concerne la méthode, monsieur le rapporteur, nous avons eu ce débat en commission des affaires sociales, ou plus exactement nous ne l’avons pas eu puisque nous vous avons demandé avec insistance si vous alliez présenter un amendement traitant de la représentativité. Vous avez répondu par la négative et Jean-Patrick Gille qui, ce jour-là, présidait la commission, a dit qu’il ne voyait pas de quoi nous parlions… Et c’est ce soir, à minuit et demi, que nous engageons un débat qui aurait dû avoir lieu en commission. C’est une attitude que vous nous avez souvent reproché, mais cette fois vous êtes totalement coupable, d’ailleurs vous reconnaissez que cet amendement vient d’être déposé, il y a quelques minutes. Le rapporteur lui-même est choqué par ce comportement.
La semaine dernière, il ne connaissait pas encore l’existence de cet amendement.
Quoi qu’il en soit, nous allons donc examiner cet amendement surprise du Gouvernement. D’ailleurs, il n’y a guère de surprise, puisque la CGPME et quelques autres syndicats ne cessent de nous dire que c’est un sujet qui va revenir sur la table. Ils ne comprennent pas l’instabilité juridique qui entoure le dialogue social – qui d’ailleurs est tout sauf un dialogue.
Le sujet est vieux comme le monde. Staline demandait ainsi : « Le Vatican, combien de divisions ? » La CGPME est favorable à une représentativité basée sur « une entreprise, une voix », quand le MEDEF préfère « un salarié, une voix » – au final, le rapport de force n’est pas exactement le même.
Nous pouvons comprendre qu’il convienne d’étudier cette question sous un angle technique et d’y réfléchir, peut-être une fois pour toutes. Mais vous, monsieur le ministre, vous allez sortir un revolver chargé et avertir les organisations que, si elles ne prennent pas de décision, si elles ne parviennent pas à un accord, vous tirerez. Cette méthode ne débouche jamais sur une très bonne discussion.
La logique du dialogue social, monsieur le ministre, aurait été de se contenter de leur donner un peu de temps pour négocier et parvenir à un accord, même si l’on est en droit de se demander comment elles y arriveront, dans la mesure où elles ne l’ont pas fait depuis un si grand nombre d’années. Quoi qu’il en soit, leur dire que, faute d’accord, vous emploierez la manière forte, ce n’est sans doute pas la bonne solution ! Le dialogue social fait cruellement défaut dans de ce texte.
Je voudrais préciser deux ou trois points. Des questions ont été posées, notamment par Mme Le Callennec, dont certaines, très précises, sur le fonds et ce qu’il représente. Je rappelle que nous avons, à la demande des partenaires sociaux, porté le pourcentage de prélèvement de ce fonds à 0,016 % alors que nous l’avions tout d’abord fixé à 0,014 %. Ce fonds représente une somme d’environ 35 millions d’euros pour la part employeurs et autant pour les organisations syndicales, la moitié pour l’interprofession et l’autre moitié pour les branches. Voilà le sujet de cette discussion.
Ce n’est pas une question simple. Ce n’est pas le principe de l’audience que nous mesurons, car nous ne connaissons pas le résultat des mesures d’audience ; nous parlons des sous.
En la matière, le mieux est d’en revenir à l’avancée que rappelait M. Cherpion : une sorte d’accord a été signé en juin 2013 entre les organisations professionnelles, dont les trois organisations patronales. Cet accord prend en compte la pondération en matière de représentation des salariés, ce qui est assez logique. Jean-Denis Combrexelle – et d’autres – l’ont souligné : on ne peut appliquer uniquement la formule « une entreprise, une voix » ou « un auto-entrepreneur, une voix », car le partage ne serait pas satisfaisant. En outre, le niveau de représentation de 8 % entraînerait des problèmes dans les branches. On verrait peut-être apparaître des mouvements qui ne seraient pas acquis au dialogue social.
Monsieur Robiliard, l’introduction du principe d’audience implique bien une disposition législative, ce que nous avons fait pour le droit d’opposition. Dans un premier temps, nous souhaitons renvoyer à une discussion entre organisations patronales. Il s’agit donc bien d’une concertation. Vous me parlez de dialogue social ? Eh bien, nous leur demandons justement de prendre leurs responsabilités et d’en revenir à l’accord qu’ils ont signé en juin pour, dans six mois, nous dire comment ils voient les choses. Ce délai nous semble suffisant, d’autant qu’il s’agit d’un ajustement à la marge qui ne changera pas fondamentalement leur existence. S’ils ne le font pas, nous prendrons nos responsabilités mais, dans ce cas, nous aurons l’occasion d’en reparler. Nous ne ferons rien sans engager une concertation avec l’opposition, je tiens à le dire ici.
L’amendement no 285 est adopté.
L’article 17, amendé, est adopté.
Article 17
L’article 17 bis est adopté.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
Un fonds paritaire de financement des organisations syndicales et d’employeurs a été créé par la loi relative à la formation professionnelle. Ce fonds est abondé par une contribution des entreprises à hauteur de 0,016 % sur leur masse salariale et par une subvention de 85 millions d’euros de l’État.
Comme son nom l’indique, ce fonds doit servir à financer les actions des organisations syndicales, notamment la formation.
Je ne comprends donc pas le sens de l’alinéa 2 de cet article, qui dispose que le fonds pourra également financer des activités de recherche dans les domaines couverts par les politiques publiques. Ce n’est absolument pas son objet initial.
Le financement par le fonds paritaire d’activités de recherche dans les domaines couverts par les politiques publiques est déjà implicitement prévu par l’article L. 2135-11 du code du travail. L’article 18 ne fait que mentionner explicitement cette possibilité, qui existe déjà, afin de lever toute ambiguïté sur la portée du financement du fonds. Les travaux de recherche menés sur certains sujets ciblés peuvent en effet permettre aux organisations syndicales de salariés et aux organisations professionnelles d’employeurs d’accomplir leur mission. Cela me semble donc tout à fait pertinent. Avis défavorable.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 193 .
L’amendement no 193 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Il s’agit, pour rassurer un intervenant éminent, de compléter l’alinéa 6 de l’article, lequel serait donc ainsi rédigé : « La demande de l’organisation syndicale doit être expresse et écrite. Elle précise le niveau demandé du maintien de rémunération. L’accord écrit du salarié pour bénéficier du maintien de son salaire dans les conditions prévues au présent article lui est annexé. »
La commission avait émis un avis favorable, au cours de la réunion qui a eu lieu au titre de l’article 88 du règlement, sur deux amendements de notre collègue Denys Robiliard, qui avaient le même objet. Il s’est avéré que ces amendements posaient des problèmes techniques, notamment en termes de gestion, pour le fonds paritaire. L’amendement qui nous est présenté par le Gouvernement contourne ces difficultés en proposant un nouvel équilibre : l’employeur peut effectuer une retenue sur le salaire de son employé en cas de manquement de l’organisation syndicale, mais seulement si le salarié a accepté au préalable les conditions de la subrogation.
La commission n’a pas examiné cet amendement, mais à titre personnel j’y suis favorable.
L’amendement no 286 est adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 210 .
L’amendement no 210 est retiré.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 225 .
L’amendement no 225 est retiré.
L’article 18, amendé, est adopté.
L’article 19, qui n’était pas très long au début de nos travaux en première lecture, est devenu un article important. D’ailleurs le ministre, lors de la discussion générale, a indiqué l’importance qu’il attache à la réforme de la médecine du travail. Nous avons également abordé dans ce cadre la pénibilité et la reconnaissance des maladies psychiques.
Les débats relatifs à la médecine du travail ne sont naturellement pas clos, même si l’entonnoir nous empêche ce soir d’aller au-delà des prémices que nous avons connus en commission.
J’ai remarqué que, par ce texte, avait été inscrit dans la loi – je sais que cela ne fait pas plaisir à M. Tardy – le Conseil d’orientation des conditions de travail et ses déclinaisons régionales, ce qui, selon moi, est une bonne initiative.
Je voulais simplement rappeler à ce stade que le COCT, après la parution du rapport de Michel Issindou et un travail très long, qui avait débuté avec le rapport Gosselin et la loi de 2011, avait demandé, par la voie d’un communiqué de presse, que le processus législatif laisse toute sa place à l’expression des attentes des salariés et des employeurs, portées par les partenaires sociaux interprofessionnels réunis au sein du groupe permanent d’orientation du COCT. Ce langage diplomatique veut dire en clair : « Laissez-nous réfléchir à partir de vos travaux. »
J’ai déposé trois amendements, que je défendrai rapidement, visant revenir sur des notions qui ont été intégrées en première lecture et qui ne me paraissent pas de nature à améliorer la médecine du travail, ce qui est pourtant notre objectif. Je ne veux pas que la médecine du travail devienne un outil de sélection à l’embauche, voire une médecine de contrôle. Même s’il n’y a aucun doute dans l’esprit de chacun d’entre nous, je préfère le dire. Tel est le sens des amendements que je défendrai tout à l’heure.
Je suis saisi d’un amendement, no 243 , qui vise à supprimer l’article 19.
La parole est à M. Christophe Cavard, pour le soutenir.
Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement no 239 .
Loin de nous le désir de remettre en cause les éléments contenus dans ce texte, mais, comme je l’ai dit lors de la discussion générale, la médecine du travail est un sujet important. Je m’appuie sur les travaux de la commission et je salue notre collègue Michel Issindou, qui a largement alimenté le débat.
Très concrètement, nous pensons que ce sujet est tellement important qu’il mériterait de faire l’objet à lui seul d’un projet de loi.
Tout le monde n’est pas d’accord avec le rapport de Michel Issindou, mais il a le mérite d’avoir lancé un débat sur cette question et d’avoir montré la volonté des uns et des autres de retravailler, de réfléchir au rôle particulier que joue la médecine du travail. Nous trouvons quelque peu anormal qu’au cours de l’examen de ce texte, comme l’a indiqué Gérard Sebaoun, cet article 19 ait considérablement grossi au fur et à mesure des débats et que ce soit dans ce texte que la question est traitée.
Si nous demandons la suppression de l’article, ce n’est pas pour remettre en cause son contenu : nous entendons signifier que ce n’est pas dans ce texte qu’il convient de traiter la médecine du travail, mais dans un texte spécifique.
Avis défavorable.
Tout d’abord, en supprimant l’article, notre collègue revient sur des dispositifs qui vont au-delà des critiques qui peuvent être faites. J’appelle votre attention sur ce point : adopter la suppression de l’article 19 aurait pour conséquence la suppression de la consécration législative du COCT, rien de moins, ainsi que des dispositions de coordination relatives à la fiche individuelle de prévention aux expositions. À l’évidence, cher collègue, nous ne pouvons vous suivre sur la suppression de l’article.
Quant au second amendement, il vise à supprimer l’alinéa 1, lequel dispose que l’employeur peut « rompre le contrat de travail si l’avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ». Jusqu’à présent, l’employeur ne pouvait rompre le contrat de travail que s’il était dans l’incapacité de proposer un autre poste au salarié lorsque celui-ci refusait les conditions du reclassement proposé.
Je considère cette disposition comme une mesure de protection du salarié.
Cet amendement vise à rétablir la rédaction aujourd’hui en vigueur de l’article L. 4622-2 du code du travail. En première lecture, l’Assemblée nationale a introduit parmi les missions de la médecine du travail une notion particulière, la notion de tiers, qui n’est ni définie ni circonscrite, et peut donc être étendue à l’infini – au client, au consommateur… Personnellement, je ne sais pas bien ce qu’est la prévention des atteintes à la sécurité des tiers ; elle ne peut être un moyen de prévenir les risques concernant la santé des travailleurs. Parce que je ne souhaite pas le maintien de cette notion extrêmement floue, je demande la suppression des alinéas 2 et 3 de l’article 19.
Les alinéas dont il est question ont effectivement été introduits par voie d’amendement en première lecture. Ils disposent que les services de santé au travail ont pour mission d’assurer la surveillance de l’état de santé des travailleurs en fonction des risques qu’ils font courir non seulement à leur santé et à leur sécurité, mais aussi à celles des tiers. Les deux éléments sont bien distingués. Il s’agit, me semble-t-il, d’une mesure de protection des salariés eux-mêmes, mais également de leurs collègues ou des tiers qu’ils peuvent être amenés à côtoyer pendant leur travail. C’est un élément important qu’il convient de préserver ; c’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
L’amendement no 250 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Dans la même veine que le précédent, cet amendement vise à revenir à la rédaction de l’article L.4624-1 du code du travail actuellement en vigueur en supprimant la première phrase de l’alinéa 6 de l’article 19, qui prévoit que le médecin du travail « recherche le consentement du salarié sur les propositions qu’il adresse à l’employeur ».
Si l’initiative paraît excellente, elle pose néanmoins plus de questions qu’elle n’en résout. Quelle valeur a ce consentement ? Est-il opposable ? S’agit-il d’un consentement oral ou d’un consentement écrit ? Si d’aventure le salarié ne consentait pas à ces propositions, le laissera-t-on s’exposer à un risque particulier ? Quelles sont les voies de recours ?
À ce stade, je considère donc que la notion de « consentement » est extrêmement floue. Cela suffit à justifier qu’elle ne soit pas maintenue dans le texte.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. En première lecture, j’avais donné un avis favorable à la mesure en question, car je considère qu’elle permettrait de faire mieux accepter par le salarié, mais aussi par l’employeur, les préconisations du médecin du travail. Il me semble également qu’elle permettrait de réduire le nombre de recours contre les avis du médecin du travail.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, dont il partage l’objectif. Les choses doivent être claires : il est important que le salarié et le médecin puissent échanger sur les mesures individuelles d’adaptation au poste ou de reclassement ; c’est d’ailleurs le cas dans la pratique. Dans ce contexte, il importe d’aboutir dans la mesure du possible à une solution partagée.
Nous avons déjà débattu à ce sujet en première lecture. J’avais alors observé que la « recherche » du consentement ne signifiait pas nécessairement son obtention. Il est toujours préférable d’avoir le consentement du salarié en la matière, mais il n’est pas dramatique de ne pas l’obtenir. Je suis donc d’accord avec le ministre pour soutenir cet amendement.
L’amendement no 252 est adopté.
Il s’agit ici de la notion d’aptitudes particulières pour des risques particuliers. J’ai le sentiment que l’amendement qui a été adopté en première lecture cède à une forme de confusion entre une médecine censément préventive, la médecine du travail, et une médecine de contrôle.
La médecine de contrôle existe pour certaines professions exposées, comme le transport – je pense aux médecins assermentés pour le transport routier ou aux centres d’examens médicaux pour l’aviation civile. Pourquoi introduire cette notion de risques particuliers, alors que nous avons déjà dans les textes à la fois cette médecine de contrôle pour des professions particulières, qui sont très exposées – je reprendrai ici à mon compte les exemples donnés par Michel Issindou – et une surveillance médicale particulière pour tout un ensemble de personnes ou de salariés ?
C’est pour cette raison que cet amendement vise à supprimer les deux derniers alinéas de l’alinéa 8 de l’article.
Les salariés affectés à des postes présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité bénéficient d’une surveillance médicale spécifique. Cette disposition vise à dispenser une attention médicale particulière aux salariés affectés à des postes à risques. Compte tenu de la démographie des médecins du travail, nous savons que les services de santé au travail ne peuvent plus remplir leurs obligations en matière de visites médicales d’aptitude. Il ne me paraît donc pas absurde de renforcer leurs actions auprès des catégories de travailleurs qui en ont le plus besoin parce que leurs postes de travail présentent des risques particuliers pour leur santé, pour leur sécurité ou pour les personnes qu’ils côtoient pendant leur travail.
Votre inquiétude, monsieur Sebaoun, porte notamment sur la notion de tiers ; je rappelle qu’un décret en Conseil d’État doit déterminer les modalités d’identification de ces personnes à risque. Avis défavorable.
Même avis.
Je persiste et signe. Nous sommes là sur un terrain mouvant : la notion d’aptitude n’a pas un intérêt formel, et le rapport de Michel Issindou le rappelle. Si nous allons dans le sens de ce que vient de dire le rapporteur, nous aurons, d’un côté, une liste de métiers « à risque » – j’en ai cité quelques-uns, qui sont déjà soumis à des contrôles très particuliers – et, de l’autre, les autres. Ce n’est pas de cette façon qu’on règle les problèmes.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l’amendement no 251 , mis aux voix par assis et levé, n’est pas adopté.
Je suis étonné que le Gouvernement ait souhaité introduire dans la loi, au Sénat, le Conseil d’orientation des conditions de travail, le COCT. Ce comité existe déjà. Contrairement à d’autres, il fonctionne, puisque le « jaune » budgétaire parle de quarante-cinq réunions en 2012, pour un coût de 45 000 euros. C’est la preuve qu’il n’est pas nécessaire de l’inscrire dans le texte, à moins d’alourdir encore – et inutilement – le code du travail.
Il en va de même pour les comités régionaux d’orientation des conditions de travail. S’il existe des comités régionaux, pourquoi d’ailleurs y aurait-il besoin d’un Conseil national ? Je pose la question. Alors que le Gouvernement engage régulièrement des procédures de dérégulation des dispositifs de ce genre, il est contradictoire d’inscrire ces comités dans la loi.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement identique no 124 .
Les choses sont claires : la volonté de consacrer le COCT et les comités régionaux dans la partie législative du code du travail vise à pérenniser leur existence. Par conséquent, avis défavorable.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 221 .
Cet amendement vise à préciser la composition du COCT, en indiquant que les organismes de sécurité sociale y sont représentés.
L’amendement no 221 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 151 .
L’amendement no 151 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 19, amendé, est adopté.
Article 19
L’article 19 bis est adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Déclaration du Gouvernement sur la situation de la Grèce et les enjeux européens.
La séance est levée.
La séance est levée, le mercredi 8 juillet 2015, à une heure dix.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly