La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Avant la levée de la séance de ce matin, la majorité a renoncé à des mesures d'exemption pour les activités du secteur agroalimentaire et de la pêche. L'instauration d'une écotaxe ne vise-t-elle pas pourtant à favoriser ce qu'on appelle la transition énergétique et n'entendons-nous pas régulièrement le Président de la République, le Premier ministre et les membres du Gouvernement évoquer un « choc » : choc de fiscalité, choc de compétitivité, choc sociétal, choc de simplification voire choc écologique ?
Le présent amendement, cosigné par nos collègues MM. Folliot, Lassalle et de Courson, vise justement à prendre en compte les activités liées à l'exploitation des carrières, notamment de granit et autres matériaux de construction. L'exploitation du granit, qu'il soit breton, tarnais ou vosgien, reste une activité fragile. Ce ne sont pas les écologistes, lesquels soutiennent que nous entrons dans une nouvelle ère, qui contesteront la volonté de travailler à la poursuite de l'extraction de proximité au sein des territoires de matériaux nobles et naturels.
C'est pourquoi cet amendement vise à exempter de l'écotaxe les véhicules utilisés dans le secteur de la construction et des travaux publics, qui effectuent des trajets de moins de cinquante kilomètres.
La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires économiques, pour donner l'avis de la commission.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis.
J'abonderai dans le sens de notre collègue Benoit. Nous sommes là en présence d'un vrai sujet, qu'il s'agisse de l'ardoise, secteur très concurrentiel, ou encore du granit. Ce sont des pondéreux : le coût du transport est déterminant sur le coût final. En effet, si le coût initial est faible, les matériaux en question sont lourds.
Aussi, si nous voulons conserver ces carrières et ces mines, il est indispensable de prévoir des dispositions permettant d'exonérer le transport des matériaux. Nous mettrions sinon en danger ces entreprises qui, par ailleurs, connaissent des difficultés considérables : la concurrence chinoise, ça existe, monsieur le ministre ! On ne peut pas l'ignorer. On ne peut donc pas ajouter des boulets à des entreprises déjà soumises à de multiples difficultés. Si on veut défendre l'emploi français, si on veut défendre le « fabriqué en France », il faut passer des propos aux actes.
Je m'étonne de la réponse de la commission et du Gouvernement. Cet amendement va en effet dans le sens des travaux lancés par le Gouvernement précédent et que l'actuel va reprendre, portant sur l'indication géographique protégée pour le secteur du granit. Or, à travers cette démarche, le Gouvernement recherche des solutions pour lutter contre les distorsions de concurrence pour des activités comme l'exploitation du granit.
C'est pourquoi j'aurais aimé entendre l'avis du ministre sur cette question parce que je suis convaincu qu'il est sensible à l'idée d'une application progressive de l'écotaxe en vue d'atténuer tout effet incontrôlé puisque nulle expérimentation de la mise en oeuvre de l'écotaxe sur le territoire national n'est prévue.
(L'amendement n° 104 n'est pas adopté.)
Nous abordons là un sujet majeur : la question laitière. Je n'imagine pas que nous ne progressions pas en la matière.
Quelle est la situation des producteurs de lait ? Elle est à bien des égards dramatique. Même en admettant des incertitudes sur les coûts, on doit prendre en considération la réalité d'effets de masse.
Le coût de production, personne ne le contestera, est aujourd'hui de 350 euros pour mille litres. Or le prix de vente tourne autour de 280 euros pour mille litres – disons 285 euros - d'où un effet ciseaux. Les gens commencent à le dire : la crise actuelle est plus grave que celle de 2009 – chacun s'en rappelle s'agissant en particulier des excès qu'elle a parfois provoqués. Il faut donc éviter tout signe qui serait épouvantable pour nos producteurs de lait.
À quoi est due la présente crise ? Au coût du soja, passé de 280 à 420 euros par tonne,mais aussi au coût du maïs, passé de 180 à 240 euros par tonne. Je comprends bien, monsieur le ministre, que vous n'avez pas de prise sur le prix de ces matières premières. Vous pouvez toutefois éviter d'en rajouter.
Vous envisagez en effet une couche supplémentaire : faire payer le transport !
Ceux qui connaissent l'économie laitière le savent : le prix du lait est un dérivé du prix du pétrole – cela paraît surprenant mais c'est ainsi. En effet, les coûts de collecte sont importants – il faut aller au fond des fermes pour recueillir le lait. Et qu'on ne soutienne pas qu'il s'agit d'une question d'ordre régional : ce phénomène est encore plus marqué dans les zones laitières moins denses que la Bretagne, les coûts de collecte y étant bien plus considérables à cause des distances beaucoup plus longues entre les exploitations.
Cet amendement est dans le même esprit et concerne la filière laitière dont chacun connaît les difficultés. Que ceux qui n'en auraient pas été informés lisent la presse.
La production laitière est répartie sur l'ensemble du territoire national. Le lait est une denrée périssable qu'il faut donc récolter rapidement pour le traiter dans les usines. Si cette opération n'a pas lieu chaque jour, comme autrefois, les modes de réfrigération du lait ne permettent toutefois pas de le garder très longtemps. La mise en oeuvre du dispositif écotaxe doit se faire dans le cadre de la directive « eurovignette » qui permet l'exonération des véhicules dispensés de chronotachygraphes, ce qui est le cas des véhicules dédiés à la collecte de lait.
En effet, le règlement du Conseil des communautés européennes du 20 décembre 1985 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions en matière sociale dans le domaine des transports par route prévoit que les véhicules de collecte de lait dans les fermes n'ont pas l'obligation de posséder un appareil de contrôle. Il serait donc cohérent de les dispenser d'écotaxe.
Notre filière laitière a en effet besoin d'un « coup de pouce » ; c'est pourquoi nous demandons qu'elle soit exemptée de l'écotaxe.
Cet amendement, qui se situe dans le même registre que les deux précédents, a été repoussé par la commission. Je ne doute pas que le Gouvernement ait pour sa part souhaité prendre le temps de la réflexion – certaines évolutions ont d'ailleurs pu être constatées entre les travaux en commission et ceux en séance publique.
Il est prévu que l'écotaxe s'applique au transport de longue distance et aux professionnels du transport tentés d'utiliser un réseau routier pas forcément adapté, qu'il s'agisse de routes nationales ou départementales. Mais en aucun cas l'écotaxe ne visait des circuits de proximité. Il est vrai que, comme ceux du granit ou de la pêche, le secteur laitier est fragile et doit faire l'objet de la plus grande attention. C'est pourquoi l'UDI défend le présent amendement.
La parole est à M. Jean-Pierre Le Roch, pour soutenir l'amendement n° 167 .
La production laitière, on l'a mentionné, est répartie sur l'ensemble du territoire national et ne concerne donc pas que quelques régions. La mise en oeuvre du dispositif écotaxe doit se faire dans le cadre de la directive Eurovignette qui permet l'exonération des droits d'usage des véhicules dispensés de chronotachygraphes, ce qui est le cas des véhicules dédiés à la collecte de lait de ferme en ferme. Cela fait suite à un règlement du Conseil des communautés européennes du 20 décembre 1985.
Cet amendement vise à conforter l'activité de la filière laitière, essentielle à l'agriculture et à l'économie françaises, dans la continuité de l'action gouvernementale de soutien à cette filière, comme l'a encore montré récemment la table ronde organisée par le ministre de l'agriculture. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Même si ces amendements reprennent exactement, dans leur formulation, la possibilité d'exonération qu'ouvre aux États la directive Eurovignette, le problème reste le même. Pour pouvoir exonérer une marchandise, encore faudrait-il pouvoir identifier à l'oeil nu le contenu des camions.
Je sais que ceux de nos collègues qui soutiennent cette exonération se sont montrés très persuasifs, et je constate que la rédaction de l'amendement n° 167 permettrait de résoudre le problème de l'identification. Je donne donc un avis favorable à l'amendement n° 167 et un avis défavorable aux trois autres amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, mesdames et messieurs les parlementaires, vous connaissez mon opposition aux exonérations qui sont demandées ici et là depuis maintenant plusieurs heures, et qui ont pour finalité de mettre à mal le dispositif de l'écotaxe poids lourds, voire de remettre en cause ce que nous essayons de construire, dans la continuité du texte que nous avions unanimement voté en 2009.
J'y suis opposé, d'abord, parce que toute exonération pose de grandes difficultés de contrôle, comme Mme la rapporteure vient de le rappeler : comment savoir que tel véhicule transporte des marchandises et comment connaître leur nature ? Je reprends inlassablement la même argumentation : ce qui importe, c'est le coût du transport, le coût des infrastructures et le coût environnemental, indépendamment de la nature des marchandises transportées.
Lors des débats en commission, des solutions ont été proposées, qui ont été repoussées. Il faut être précis sur ce sujet : une solution existe, qui nous est fournie par une directive européenne, relative non pas à la collecte du lait, mais à une catégorie particulière de véhicules, les citernes à produits alimentaires, définies par l'arrêté du 9 février 2009, relatif aux modalités d'immatriculation des véhicules.
Nous avons beaucoup travaillé autour de cette question. Si le caractère sensible du secteur laitier nous intéresse, au même titre que tous les autres secteurs, en l'occurrence c'est moins la nature des marchandises que la manière dont elles sont transportées qui importe. C'est pourquoi j'ai beaucoup de réserves quant aux demandes d'exonérations.
Quoi qu'il en soit, les dispositions européennes nous permettent d'adosser notre dispositif à cette catégorie particulière de véhicule, et je salue la façon dont le député Jean-Pierre Le Roch vient à l'instant de présenter les choses d'un point de vue juridique.
J'ai beaucoup discuté avec plusieurs d'entre vous. Je salue notamment les efforts qui ont été faits par M. Ferrand et un certain nombre de parlementaires,…
…mais aussi le travail du ministre délégué chargé des affaires européennes, qui a mobilisé ses services, et surtout la contribution de Stéphane Le Foll.
Je me suis entretenu avec lui à plusieurs reprises, et hier encore, pour définir le système le plus incontestable.
Pour sécuriser le dispositif, je considère que la présentation la plus solide est bien celle de l'amendement n° 167 . Je remercie ses signataires d'avoir fait ce travail de précision, qui tranche avec certaines présentations que nous avons pu avoir. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Puisqu'il a été soufflé par le Gouvernement, il ne manquerait plus qu'il soit mal rédigé !
Je m'en remets, sur le vote de l'amendement n° 167 , à la sagesse de cette assemblée…
…qui ne manquera, je pense, d'être convaincue par la précision et la qualité de la rédaction de cet amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Je vous informe que sur l'amendement n° 167 , je suis saisie par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Martial Saddier.
C'est moi qui ai demandé un scrutin public, au nom des députés du groupe UMP, parce que nous assistons au bouquet final : nous en arrivons au coeur du dispositif et vous vous dévoilez totalement, monsieur le ministre.
Vous avouez que cet amendement est cautionné par un membre du Gouvernement, M. Le Foll, qui fait délibérément le choix de la filière laitière, au détriment de celle du bois, mais aussi de celles des fruits et légumes, de la pêche, bref de l'ensemble des filières que compte l'industrie agroalimentaire. Toutes vont être sanctionnées par cette écotaxe…
…qui, on l'a compris, va porter à 80 % sur les derniers kilomètres, c'est-à-dire sur le made in France, sur ce qui n'est pas délocalisable, et donc sur notre tissu de TPE et de PME.
Nous comprenons mieux, à présent, pourquoi vous n'avez pas répondu à toutes nos questions, d'abord en commission, et depuis ce matin. Je vous ai en effet demandé, avec un certain nombre de mes collègues, des précisions sur le poids des marchandises et la distance sur laquelle la majorité de cette écotaxe allait s'exercer.
Nous avons une fierté, de ce côté-ci de l'hémicycle : depuis le début, depuis les premières minutes du débat en commission, nous avons demandé que soit prise en compte la spécificité d'un certain nombre de producteurs, dont les producteurs laitiers. Vous avez rejeté en commission ces mêmes amendements, que vous demandez aujourd'hui à la représentation nationale de voter.
Vous avez déposé l'amendement n° 167 en catimini et à la vitesse de l'éclair, en vertu de l'article 88 de notre règlement, et aujourd'hui vous vous apprêtez à le voter. C'est grâce à nous, grâce à notre pugnacité et à notre persévérance, que la filière laitière est exonérée !
Nous attendons d'autres exonérations, et nous avons demandé un scrutin public pour que chacun prenne ses responsabilités. Vous allez prendre la responsabilité d'en exonérer certains et d'en taxer d'autres ; nous, nous demandons que l'ensemble de la filière agroalimentaire de proximité soit exonéré ; ce n'est pas ce que vous vous apprêtez à faire. Quant à nos amis écologistes, voyons comment ils vont s'exprimer lors du scrutin public.
Monsieur le ministre, je pense que nos travaux, depuis le début, auraient pu se dérouler de manière plus transparente.
J'ose imaginer que nous voterons cet amendement à l'unanimité, puisque tout le monde le réclame. J'espère donc que nos collègues écologistes, même s'ils n'aiment pas trop les paysans, le voteront également… (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
…parce que ceux qui seront les plus concernés par le coût de transport, ce sont les producteurs de lait bio : comme ils sont dispersés, ils se trouvent souvent loin des usines, si bien que le coût de transport est encore plus important pour eux que pour les productions très intensives, situées, elles, à proximité des usines.
S'il y en a un qui doit voter cet amendement, c'est bien vous, monsieur Lambert. Ne nous parlez pas du XXe, du XXIe ou du XXIIe siècle : la réalité, c'est que les producteurs de lait bio sont les premiers concernés.
Par ailleurs, vous manifestez, monsieur le ministre une certaine sollicitude pour nos producteurs de lait – et c'est le minimum –, mais ces producteurs, ils achètent du maïs et du soja, qui arrive à la ferme par camion, or ces camions vont payer l'écotaxe demain. Alors soyez cohérents : il faut que l'ensemble du trafic, de ferme à ferme, et de la coopérative à l'exploitation, soit exonéré d'écotaxe, y compris pour le maïs et pour le soja. Il faut que tous les intrants agricoles soient exonérés : c'est cette question qui est cruciale ; le reste n'est qu'affichage.
Si nous voulons défendre les producteurs laitiers, nous devons exonérer à la fois les produits qui sortent de chez eux, et les produits qui entrent dans leurs exploitations agricoles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'ai été convaincu par les arguments de M. le ministre. Je retire donc mon amendement, pour soutenir celui de mon excellent collègue Jean-Pierre Le Roch. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
(L'amendement n° 209 est retiré.)
Je ne voudrais pas que l'hypocrisie nous gouverne complètement. Sans vouloir faire de peine à qui que ce soit, et sans remettre en cause le mérite des uns et des autres, je voudrais d'abord témoigner du fait que les élus socialistes bretons ont joué un rôle tout à fait décisif pour nous convaincre que le secteur laitier, par sa nature même, méritait cette dérogation.
J'ai dit que je ne remettais pas en cause votre mérite : vous ne m'avez pas écouté. Je ne voudrais pas que l'hypocrisie nous gouverne complètement, disais-je : si vous voulez être fiers de vous, puisque vous avez plus d'influence que nous sur la FNSEA, intervenez auprès d'elle pour que nous ne nous contentions pas de mettre un sparadrap sur un grand malade ! Faites en sorte que les céréaliers partagent les 6 milliards d'euros de subventions qu'ils touchent, quel que soit leur cours – car vous avez raison, monsieur Le Fur, les céréales coûtent très cher ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Je ne croyais pas qu'un débat sur le lait créerait de telles tensions et de telles émotions !
Au-delà des nombreuses interventions qui ont été faites depuis ce matin de la part de l'opposition, qui n'a cessé de rabâcher cette histoire d'amendement rejeté, ou pas, par le Gouvernement, je tiens à souligner que le lait est bien un enjeu d'ampleur nationale, qui concerne l'ensemble des bassins de vie agricoles. Vous avez bien décrit, monsieur Le Fur, les difficultés qui sont liées au problème pétrolier, au problème des intrants et à celui des céréales. Mais sur quoi porte cet amendement ? Sur la fin du processus, le moment où la vache a produit son lait et où il faut le transporter depuis la ferme jusqu'à la laiterie.
Il s'agit d'un temps court, qui ne pèse pas beaucoup sur le prix, même s'il s'agit d'un maillon essentiel de la chaîne.
Avec un certain nombre de parlementaires bretons, mais aussi d'autres régions de France, nous avons porté ce débat auprès du ministre et des rapporteurs, dont je salue la volonté de dialogue, d'écoute et de travail collectif ; sans cela, nous n'aurions pas pu aboutir et apporter une réponse encourageante et positive pour ce secteur.
Monsieur Le Fur, vous n'avez eu de cesse, avec M. Saddier, de rappeler qu'il fallait exonérer le lait de l'écotaxe,…
…mais qu'y avait-il dans le décret du 6 mai 2012 ? Y avait-il une exonération ? Rien du tout !
S'il faut remercier quelqu'un aujourd'hui – et j'espère que vous le ferez, quand vous rencontrerez les producteurs de lait de vos circonscriptions – c'est M. Cuvillier, parce qu'il a accepté cet amendement, qui était porté par l'ensemble de la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Monsieur le ministre, chers collègues, ces débats me mettent très mal à l'aise. On voit bien que ce n'est pas une solution d'accorder des exonérations dans tous les sens : mieux vaut, si c'est le cas, remballer notre écotaxe poids lourds.
Je conçois qu'il y ait des spécificités territoriales. Lors des lois Grenelle, nous avions déjà eu des débats sur la manière de tenir compte des spécificités de certains territoires, notamment de la Bretagne. Je me rends compte que les Bretons sont bien mobilisés aujourd'hui : tant mieux pour les Bretons, mais pourquoi exonérer le lait, et pas l'ensemble de l'industrie agroalimentaire ? Et pourquoi ne pas exonérer d'autres régions ? Les Alsaciens pourraient demander une exonération sur le transport de la choucroute, les Lorrains sur celui de l'alcool de mirabelle… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est vraiment n'importe quoi.
Notre démocratie ne sort pas grandie d'arbitrages de cette sorte. Je vois bien, d'ailleurs, que vous êtes mal à l'aise, monsieur le ministre : reconnaissez-le. Vous dites qu'on ne peut pas généraliser les exonérations, mais vous cédez sur le lait, parce qu'il y a eu une mobilisation en faveur de cette filière. On aurait gagné à avoir un débat de fond sur les exonérations faisant l'unanimité, au lieu de s'en tenir à un seul secteur d'activité.
Les élus bretons vont repartir chez eux ; ils pourront expliquer qu'ils ne voulaient pas de la taxe poids lourds et qu'ils ont obtenu une exonération sur le lait. Vous pensez que les gens qui militent pour des stratégies environnementales vont comprendre cela ? C'est incompréhensible !
Ce débat est particulièrement lamentable. Opposer les catégories socioprofessionnelles, particulièrement les productions agricoles, les unes aux autres, ce n'est pas digne de notre réflexion sur l'écotaxe, ni du Grenelle de l'environnement.
On considère aujourd'hui qu'une avancée a été réalisée en exonérant les transporteurs de lait, notamment les coopératives qui vont chercher le lait : en Franche-Comté ce n'est pas quelques fois par semaine, mais tous les jours que l'on va chercher le lait afin de produire un fromage AOC !
Ces producteurs vont donc être exonérés contrairement, à côté d'eux, à des petits céréaliers – ça existe – qui, s'ils touchent, dans le cadre de la politique agricole commune, une prime, celle-ci est organisée en toute transparence et mérite le respect. En tout état de cause, mettre en exergue une partie de l'agriculture n'est pas le bon système.
Plutôt que donner un avis de sagesse, le Gouvernement aurait dû accepter le renvoi en commission. Depuis le départ, on sent bien que ce texte est mal ficelé. Ce qui devait concerner le trafic sur grandes distances va toucher dans nos cantons et nos circonscriptions les PME, les artisans et les commerçants.
Ce texte est bâclé. Vous pouvez toujours considérer que le décret qui avait été proposé n'était pas le bon, ce que vous faites est encore pire.
Je me demande ce qui est le pire. Je crois que c'est plutôt la droite qui a complètement raté la mise en place de cette « pollutaxe » que nous sommes en train de réussir à mettre en oeuvre.
Cela étant, il est surprenant de voir que nous nous écartons du fond du débat, qui porte sur la création d'une taxe pour réduire l'impact environnemental. J'entends qu'il existe des véhicules qui ne disposent pas de tachygraphes, et qui seraient donc exonérés de l'écotaxe. J'aimerai savoir quels sont ces véhicules, pour quelles raisons ils n'en sont pas équipés et si la situation en la matière est figée.
Je ne peux pas m'empêcher d'aller dans le sens de mon ami Gilles Savary : la droite ferait mieux d'être à nos côtés pour faire changer le modèle de production de l'industrie agroalimentaire qui étrangle aujourd'hui nos petits fermiers qui produisent du lait en important du soja. C'est peut-être le soja qu'il faudrait taxer afin que nous puissions produire localement plutôt qu'importer.
En tout cas ce n'est pas, comme l'a dit M. Savary, en posant un sparadrap sur une jambe de bois que l'on pourra redresser une filière mal en point après les dix années de politique ultra-industrielle dans l'agroalimentaire que la droite a menée.
Le groupe écologiste ne soutiendra pas cet amendement.
Ce sont les producteurs de lait bio qui en seront les principales victimes !
Pour ma part, je soutiendrai cet amendement sans soutenir d'autres demandes de dérogation qui conduiraient à la suppression de l'écotaxe, et je veux m'en expliquer.
L'élevage laitier a des spécificités que ne partagent pas les autres élevages. La collecte est quotidienne, et les distances à parcourir sont importantes entre le moment où le lait quitte l'exploitation agricole où il est produit et celui où il rejoint son lieu de transformation.
D'ailleurs, ce problème n'est pas nouveau. Il avait été pris à bras-le-corps à l'époque où Hervé Gaymard était ministre de l'agriculture. Tous ensemble ici, nous avions essayé de peser au niveau de l'Europe pour que soit maintenue l'aide à la collecte qui existait. Elle a été supprimée parce qu'elle a été considérée comme une distorsion de concurrence.
On le voit bien sur nos territoires : des coopératives différentes et des laiteries s'entendent pour mutualiser la collecte afin de réduire les distances. C'est donc qu'il existe un réel problème de coût de la collecte du lait qu'on ne retrouve pas de la même façon dans les autres productions agricoles. Il faut le prendre en compte.
Quant à l'argument consistant à dire que l'on va pénaliser le transport du maïs et du soja, faisons attention. Si l'on a tant développé le transport des protéines dans notre pays, c'est parce qu'à un certain moment, il a été décidé de supprimer la culture de protéines.
C'est pour cela qu'il faut importer aujourd'hui du soja d'Amérique du sud, avec les coûts que cela implique.
Tout cela pose la question d'une autre agriculture, centrée autour d'exploitations agricoles autonomes. Une exploitation agricole qui produit du lait doit aussi pouvoir produire les protéines pour éviter justement les charges de transport et le coût des intrants. C'est une chose aujourd'hui connue de tout le monde.
Souhaite-t-on la venue d'une agriculture d'un type nouveau ou le maintien d'une agriculture impliquant des consommations d'intrants massives et des importations de protéines d'Amérique du sud, tandis que les quotas laitiers disparaîtront ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Malheureusement, la teneur du débat me donne raison : les interventions qui se succèdent énumèrent différents secteurs d'activités à exonérer, et c'est précisément ce que nous souhaitions éviter.
Si je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, c'est précisément parce qu'il n'est pas question d'un secteur mais d'une catégorie d'activité. Le fondement juridique à cet égard est clair : les dispositions européennes sur l'eurovignette permettent à une catégorie de véhicules de ne pas être soumise au dispositif de l'écotaxe poids lourds.
Cela a été prévu par les instances européennes du fait de la spécificité de ces véhicules. Il s'agit ici des citernes à produits alimentaires dédiées à la collecte de lait. Il ne s'agit pas d'une catégorie particulière d'activités, mais bien d'un type de véhicules qui peut être exclu du champ d'application de l'écotaxe poids lourds.
Nous allons entendre, comme nous le subissons depuis un certain nombre d'heures, une succession de demandes d'exonérations. Mais il faut de la rigueur, et les réflexions des parlementaires de l'opposition en manquent. Il s'agit en l'occurrence d'une catégorie de véhicules juridiquement encadrée. Il ne s'agit pas d'un type d'activité dans telle ou telle région.
De façon active, les parlementaires socialistes, notamment bretons, ont porté cette demande et le ministre de l'agriculture est venu pour voir ce qu'il était possible de faire. Je tiens d'ailleurs à dire combien il est désagréable d'entendre mettre en cause mon collègue Stéphane Le Foll.
C'est le plus mauvais ministre de l'agriculture qu'on ait jamais eu ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous prêtez au ministre de l'agriculture la volonté de privilégier tel ou tel secteur de son domaine ministériel. Il n'en est rien. Il s'est simplement agi pour lui de voir précisément ce qu'il est possible de réaliser, dans un cadre juridique européen, et avec quelles conséquences.
La directive européenne « Eurovignette » permet une dérogation pour certaines catégories de véhicules, pas autre chose. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. Il convient de le rappeler car les interventions depuis hier soir manquent singulièrement de rigueur sur certains bancs de cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, nous voterons l'amendement n° 167 et je retire mon amendement.
Je me permets cependant d'apporter une précision à M. Chassaigne : l'agriculteur-éleveur conséquent produit lui-même son aliment si la taille de son exploitation est suffisante. Il n'a donc pas besoin de véhicule pour faire venir l'aliment chez lui. Mais si son exploitation est de petite taille, il achètera l'aliment à la coopérative, et paiera donc l'écotaxe pour faire venir cet aliment. Donc si l'on veut aider les producteurs de lait, il faut réduire l'écotaxe sur le lait qui sort de la ferme, mais aussi sur l'aliment qui arrive à la ferme.
C'est logique. Le contraire serait hypocrite, mes chers collègues. Il faut que vous soyez cohérents.
(L'amendement n° 11 est retiré.)
Ce qui compte à mes yeux, c'est le résultat. La question laitière en France est prise en compte, c'est une bonne chose.
Que les députés socialistes, notamment bretons, aient travaillé en la matière avec un ministre socialiste, c'est la moindre des choses : on n'aurait pas voulu que des députés de l'opposition concluent un accord avec le ministre socialiste !
Le résultat est donc là : l'activité laitière en France est prise en compte. Je retire donc mon amendement.
(L'amendement n° 84 est retiré.)
Je vais maintenant mettre aux voix l'amendement n° 167 .
Monsieur le ministre, levez-vous le gage ?
Oui, madame la présidente.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 88
Nombre de suffrages exprimés 88
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 86
contre 2
(L'amendement n° 167 , modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Grâce à la pugnacité des députés de l'UMP et de l'UDI, nous avons obtenu que les difficultés de la filière laitière soient prises en compte. En revanche, nous regrettons qu'il n'ait pas été possible d'avoir un débat ouvert sur l'ensemble des produits de proximité des TPE-PME.
Le ministre de l'agriculture semble avoir une forte sensibilité laitière, mais nous voudrions lui rappeler ainsi qu'à l'ensemble de la majorité que l'horticulture, le maraîchage, l'arboriculture fruitière et la vigne sont les principaux employeurs du monde agricole, et qu'ils ne bénéficient pas d'aides substantielles de la PAC. Pourtant, ils ne seront pas exonérés de l'écotaxe. Nous aurions aimé que se tienne un vrai débat de fond sur l'ensemble de la filière agricole et pas seulement sur la filière laitière, sachant toutefois que sans notre pression, vous n'auriez pas cédé sur ce point.
Cet amendement va dans le même sens concernant la filière bois. Avec Jean-Marie Sermier nous avons essayé jusqu'à une heure du matin de vous convaincre en commission qu'elle avait besoin de la même exonération. Il convient que ce que vous venez d'accepter à notre demande et sous notre pression pour la filière laitière soit également appliqué à la filière bois.
Cet amendement a été déposé par Charles de Courson, pour les raisons qu'a exposées mon collègue Martial Saddier.
Avis défavorable. Je rappelle que si l'exonération a été votée c'est parce qu'elle porte sur une catégorie de véhicules spécialisés. Mais j'ai beau faire ce rappel, vous en revenez toujours à vos approximations et à vos amalgames ! Je ne vois pas en effet de véhicule qui soit spécialisé pour transporter des produits d'horticulture ou des granulats.
Soyez donc plus rigoureux !
Nos réflexions et nos décisions sont fondées sur des textes qui ont un sens.
C'est pourquoi un amendement d'origine parlementaire vient d'être adopté : il était juridiquement rigoureux.
Si vous connaissiez le sens juridique des termes que vous utilisez, vous nous feriez gagner beaucoup de temps.
Monsieur le ministre, je me réjouis de votre ouverture à l'endroit des agriculteurs, notamment dans le secteur laitier. Mais un grand nombre d'activités, en particulier dans les zones de montagne, sont liées au transport et souffrent aujourd'hui d'un problème de rentabilité. Nous devons donc veiller à ne pas surcharger de taxes ces activités très précaires.
Je reviens rapidement sur la PAC car j'ai eu l'occasion d'interroger, dans cet hémicycle, le ministre de l'agriculture. Or, après quelques investigations et témoignages, il s'avère que s'agissant de la part de la France, il manquera 6 milliards d'euros, contrairement à ce que M. le ministre de l'agriculture m'a répondu ici même.
Malgré tout, la démarche entreprise ici va dans le bon sens car demain les professionnels de l'agriculture auront du mal à assurer l'équilibre de leurs exploitations et surtout à investir.
(Les amendements identiques nos 66 et 99 ne sont pas adoptés.)
Cet amendement a pour objet de modifier les taux de minoration prévus au 2° de l'article 275 du code des douanes, afin de réduire l'impact de la mesure dans les régions périphériques et péninsulaires. Il concerne donc un certain nombre de régions françaises, obligées d'exporter une grande partie de leur production dans les grands centres urbains, lesquels peuvent se situer à 400 ou 500 kilomètres des lieux de production.
Le taux de minoration, fixé à 40 % pour la Bretagne, a pour effet de limiter les disparités quant à l'impact de la mesure sur les différents territoires. Le caractère péninsulaire de la région, la spécificité des marchandises transportées – principalement de nature agricole et agroalimentaire – et la dispersion des activités économiques justifient une telle modulation.
Nous avons effectivement obtenu des taux de minoration importants ; cependant, si nous remettons ce sujet sur la table, c'est pour démontrer que ces taux se justifient.
Ces taux n'ont pas été accordés à la Bretagne par charité : ils constituent une exigence. Notre région est située à l'extrémité occidentale de l'Europe, loin de la « banane bleue », cette dorsale européenne qui traverse la Lotharingie, des Pays-Bas au nord de l'Italie. Ainsi, plus on renchérit le coût de transport, plus on nous marginalise. Voilà ce qu'il faut avoir à l'esprit, monsieur le ministre !
Pour éviter une telle marginalisation, il faut supprimer l'article 7 relatif à l'écotaxe, laquelle se répercutera automatiquement sur les coûts de transport et les coûts de production, et multipliera hélas le nombre de demandeurs d'emploi en Bretagne. Voilà les raisons pour lesquelles nous insistons sur ce sujet.
La France est riche de sa diversité. Ce n'est pas moi qui le dis, mais un grand géographe du XIXe siècle, Vidal de La Blache – vous voyez, monsieur Lambert, que l'on peut se rappeler certaines références historiques –, qui appelait à tenir compte de la diversité de la France. Tout ne se décide pas nécessairement à Paris, tout ce qui se décide à Paris n'est pas d'or !
La parole est à M. Richard Ferrand, pour soutenir l'amendement n° 165 .
Je ferai moins de littérature que notre collègue Marc Le Fur. (Sourires.) Je souhaite simplement préciser certaines choses, pour que tout le monde comprenne ce dont nous parlons, sans avoir besoin d'utiliser des citations.
À l'origine, les régions dites périphériques, à savoir l'Aquitaine, Midi-Pyrénées et la Bretagne – ce n'est pas qu'une affaire bretonne, puisque la Bretagne ne s'étend pas jusqu'au sud de l'Aquitaine, que je sache –, avaient bénéficié d'une minoration de la majoration, si je puis m'exprimer ainsi, de l'ordre de 40 %.
Or du fait des nouvelles modalités de répercussion de la taxe, il existe désormais un taux intrarégional et un taux interrégional. Pour illustrer cette situation, je vous propose de voyager plutôt que de faire des citations. (Sourires.) Sur un trajet Brest-Paris, le taux interrégional s'applique, soit 4,4 %. Il en est de même pour un Paris-Strasbourg : ainsi, l'instauration de ce taux interrégional réduit la portée du dispositif initial, qui visait justement à reconnaître la situation particulière et les difficultés des régions périphériques en matière de transport de marchandises.
Nous ne pouvons pas imaginer aujourd'hui qu'une partie du trajet soit prise en compte au tarif intrarégional, et qu'une autre partie de ce trajet soit comptabilisée au tarif interrégional : un tel système aurait sans doute été à l'origine d'une bureaucratie et de difficultés de gestion colossales, en premier lieu pour les transporteurs. Dans ce contexte, la solution la plus pertinente et la plus raisonnable consiste vraisemblablement à porter, pour les régions périphériques, la minoration de la majoration de 40 % à 50 % et de 25 % à 30 %, selon les cas. Il s'agirait, au fond, de rétablir la justice voulue initialement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
La commission du développement durable a rejeté les amendements. Je m'en remets sur ce point à la sagesse de notre assemblée.
Le code des douanes prévoit un barème kilométrique pour cette taxe, défini au niveau national avec une minoration ne s'appliquant pas à une, mais à trois régions périphériques : la Bretagne, Midi-Pyrénées et l'Aquitaine.
En séance publique au Sénat et en commission à l'Assemblée nationale, j'avais exprimé une solution qui me semblait raisonnable, équilibrée, consistant à ne pas remettre en cause la minoration du barème pour les régions périphériques ; nous nous engagerions à ne pas augmenter cette minoration pour obtenir, finalement, un système équilibré.
Un certain nombre de parlementaires ont remis en cause le système que nous souhaitions mettre en place. Comme l'a expliqué M. Ferrand, certains ont souhaité revenir à l'instauration de deux taux, intrarégional et interrégional. Cette solution comportait le même travers que l'ancien décret de 2012.
Il faudrait en effet procéder quasiment à des décompositions marchandise par marchandise, trajet par trajet, commande par commande, et appliquer à chacune de ces commandes de transport un taux différent selon le kilométrage et le parcours. Bref, il était impensable d'infliger un tel dispositif aux transporteurs, qui se seraient vus appliquer des taux différents selon les parcours réalisés.
Il est maintenant proposé d'augmenter les taux de minoration. J'avais adopté une position d'équilibre,…
…qui n'est pas suivie. Je renvoie donc à la position que j'ai défendue en commission et, comme Mme la rapporteure, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
En tout cas, monsieur Le Fur, je vous demande de faire preuve de rigueur dans vos propos.
Vous n'êtes pas seulement l'élu d'une circonscription, d'un département ou d'une région : vous êtes un représentant de la nation. J'ai préféré entendre la présentation de M. Ferrand,…
…qui faisait référence à la catégorie des collectivités concernées par l'amendement, c'est-à-dire aux régions périphériques. Mesdames et messieurs les députés, vous êtes des élus de la nation, et non les représentants des intérêts particuliers de certains territoires.
Monsieur le ministre, cela fait plusieurs fois que vous nous donnez des leçons de rigueur.
En effet !
Quand on donne ce type de leçons à l'Assemblée nationale, on assume ses positions ! Or pour la deuxième fois, voilà que vous vous en remettez à la sagesse de l'Assemblée, incapable de dire si vous êtes pour ou contre. En fait, vous êtes bien embêté : quand on lit les comptes rendus des débats au Sénat et en commission à l'Assemblée nationale, et qu'on les compare à vos propos aujourd'hui en séance, on se rend compte qu'il ne s'agit plus d'un grand écart, mais d'un grand équilibrisme !
Pour que ce débat continue dans la sérénité que nous connaissons depuis ce matin, personne ne devrait donner de leçons aux autres.
À commencer par vous-même !
Je ne vous ai encore jamais interpellé sur un quelconque manque de rigueur, monsieur le ministre.
Ah bon ?
Mais puisque sur les amendements précédents vous nous avez également donné des leçons de rigueur, en dénonçant notre prétendue incapacité à identifier telle catégorie de poids lourd, eh bien abaissons le niveau du débat.
Vous savez le faire !
Je vous en prie. Sachez que je ne prends l'avion que demain matin et que je pourrais donc faire durer tout le temps nécessaire le débat !
Monsieur le ministre, quelle différence faites-vous entre un camion qui collecte le lait et un camion qui livre du gaz naturel ? Quelle différence faites-vous entre un camion qui livre du lait et un grumier qui livre donc du bois. Il est impossible de les reconnaître visuellement. De même, à la sortie d'une parcelle, comment distinguez-vous un camion chargé de palettes de pommes ou de poires, ou un camion chargé de palettes de salades, d'artichauts ou d'autres fruits et légumes ?
Grâce à notre persévérance, la filière laitière est exonérée de l'écotaxe. Mais si vous éteignez l'incendie que vous n'avez pu maîtriser en la matière, nous aurions souhaité mener une réflexion beaucoup plus large, portant sur l'ensemble de la filière agroalimentaire, en particulier sur les secteurs qui emploient beaucoup de main-d'oeuvre, comme les fruits et légumes, l'horticulture, sans parler de la filière bois qui bénéficie le moins d'aides européennes et qui sera littéralement étripée par cette écotaxe.
Je cède donc la parole à M. Le Fur.
C'est moi qui préside, monsieur Jacob. Vous présidez le groupe UMP : chacun son rôle !
Vous avez la parole, monsieur le ministre.
Je suis particulièrement étonné de la position de M. Saddier.
La responsabilité du Gouvernement est de contribuer à l'enrichissement d'un texte et de faire en sorte que les travaux parlementaires aient un sens.
Il existe une procédure législative : des commissions sont saisies, des rapporteurs sont nommés, et chacun, en fonction de son appréhension des enjeux, vient enrichir le texte.
À cet égard, monsieur Saddier, vous devriez plutôt rendre hommage à la position du Gouvernement.
Le Gouvernement a exprimé sa position, et je la maintiens – elle figure dans le compte rendu de la réunion de la commission.
Cependant, lorsque trois amendements issus de trois groupes différents sont déposés, il est tout de même heureux que le Gouvernement puisse s'en remettre à la réflexion exprimée souverainement par les parlementaires. C'est cela, la démocratie parlementaire ! C'est cela, le respect du Parlement ! Vous devriez, au contraire, saluer l'action et le comportement du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je le retire, madame la présidente. Je soutiendrai celui de M. Ferrand.
(L'amendement n° 208 est retiré.)
Plusieurs députés du groupe UMP. M. Le Fur a demandé la parole !
Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 165 . Monsieur le ministre, levez-vous le gage ?
Oui, madame la présidente.
(L'amendement n° 165 , modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Mes chers collègues, je tiens à vous faire remarquer qu'en une heure, nous avons examiné onze amendements après l'article 6 ter.
S'agissant des systèmes électroniques embarqués, pourquoi imposer leur généralisation à tous les véhicules de transport, alors que certains n'emprunteront jamais le réseau écotaxé ? Aujourd'hui, ce sont 5 000 kilomètres du réseau local qui sont soumis à l'écotaxe, soit 1,3 % du réseau local départemental et 0,5 % du réseau local total.
Lorsque j'ai soutenu le principe de l'écotaxe, des transporteurs m'ont fait savoir que, de leur point de vue, le dispositif était scandaleux pour les transports de proximité. Je leur avais répondu qu'ils n'avaient aucune crainte à avoir dans la mesure où s'ils ne s'engageaient pas dans des transports de longue distance sur des réseaux écotaxés – qui seront limités –, ils ne paieraient jamais rien. À ceci près que désormais, vous imposez à tout le monde l'installation de dispositifs coûteux, et qui plus est ne serviront à rien.
L'amendement vise donc à exonérer les véhicules qui n'emprunteront pas les réseaux concernés de l'obligation d'installer ces équipements électroniques embarqués.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement n° 131 .
Monsieur le ministre, il est un peu facile de se réfugier derrière l'avis de sagesse de l'Assemblée alors que sur trois amendements identiques déposés par des groupes différents, le Gouvernement avait émis défavorable en commission sachant que le groupe majoritaire n'avait pas alors déposé d'amendement.
Vous pouvez faire ce que vous voulez, les Françaises et les Français, les socioprofessionnels qui liront le compte rendu de nos travaux en commission et dans l'hémicycle ne seront pas dupes.
Concernant l'amendement n° 131 , je rejoins les arguments de mon collègue Pancher. Il ne paraît pas opportun d'obliger l'ensemble des véhicules immatriculés en France de s'équiper d'un système électronique embarqué, dès lors qu'a priori ils ne passeront jamais sur le réseau concerné.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement n° 153 .
Monsieur le ministre, vous avez reproché à l'opposition de n'avoir pas travaillé ses amendements. J'avoue ne pas avoir apprécié cette critique : nous ne nous inscrivons tout simplement pas dans votre logique. Alors que vous exonérez un certain type de véhicules, nous souhaitons, nous, exonérer des professions, en particulier des professions en situation difficile.
Quelle est la situation par rapport à l'exonération des camions de lait ? Des véhicules venant d'Allemagne ou de Suisse transportant du lait importé par de grandes sociétés pourront être exonérés du fait non pas de la production acheminée mais du type de camion utilisé ! C'est ce qui nous différencie.
Plus précisément, monsieur le ministre, dites-nous ce que vous entendez par l'écotaxe poids lourds. En effet, si la taxe doit être payée par les véhicules en transit effectuant des trajets importants, pourquoi obliger tous les véhicules à installer un équipement spécifique alors qu'une grande partie d'entre eux ne fréquentera jamais des routes payantes ? Nous vous donnons l'occasion de faire en sorte que les véhicules qui ne passeront jamais sur une route payante ne soient pas obligés de s'équiper d'un système électronique embarqué.
Même avis.
Cessons d'être hypocrites. On assiste à une vaste opération de blanchiment. (Sourires sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Erreur ! Signet non défini.. En effet, il est dangereux !
Ceux-là même qui ont instauré la taxe poids lourds essaient de se défausser en la démantelant à petites touches. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vous rappelle, chers collègues, que c'est M. Jacques Barrot qui a imposé le chronotachygraphe électronique au sein de l'Union européenne, non seulement pour appliquer la taxe poids lourds, mais également pour surveiller les temps de pause et de repos des conducteurs. Ce dispositif permet en effet de surveiller les parcours, les distances effectuées par les camions, les temps de maintenance, de mise au repos et de révision des camions.
Votre amendement est donc nul et non avenu car vous remettez en cause un dispositif dont l'impact social est considérable. Le supprimer reviendrait à soumettre le secteur des poids lourds à la loi de la jungle, ce qui est déjà le problème aujourd'hui.
Qu'il me soit permis de revenir sur l'amendement précédent afin que les choses soient bien claires.
On ne fait qu'atténuer le problème en faisant évoluer le taux intrarégional en Aquitaine, en Midi-Pyrénées et en Bretagne. Dès que le camion sort de ces régions pour exporter nos produits, vous appliquez le taux maximum, à savoir le taux national, contrairement à la règle initiale. Si l'évolution va dans le bon sens, elle ne fait – ne nous leurrons pas, monsieur le ministre – qu'atténuer une difficulté que vous avez accrue.
Vous me rappeliez que je devais me comporter en élu de la nation.
Et non d'une région.
Je suis représentant du peuple, monsieur le ministre, et le peuple, ce n'est pas une abstraction. Ce sont des paysans, des ouvriers, des gens modestes. Si on ne les défend pas, qui le fera ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement n° 96 rectifié .
Notre collègue Breton m'a demandé de défendre cet amendement auquel il tient beaucoup dans la mesure où il s'occupe des questions de transport, qui méritent toute notre attention surtout en ces périodes difficiles.
Votre projet, monsieur le ministre, consiste à taxer lourdement le transport. Il convient qu'au moins une partie de la recette ainsi générée permette la modernisation de notre parc de véhicules. En effet, avec un parc plus moderne, la consommation en carburants sera moindre et moins polluante. Faites en sorte que la recette prise sur nos provinces n'aille pas uniquement au métro parisien !
L'un des objectifs essentiels de la taxe est de créer – cela n'aura échappé à personne – une ressource pérenne et significative pour l'agence de financement des infrastructures de transport, l'AFITF. Même si cette taxe monte rapidement en puissance, les besoins de l'agence sont considérables.
L'avis de la commission est défavorable.
(L'amendement n° 96 rectifié , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l'amendement n° 189 rectifié .
Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai également l'amendement suivant, n° 191 rectifié.
La mise en oeuvre de l'écotaxe poids lourds doit permettre de contribuer au financement d'infrastructures de transport alternatives à la route. Comme l'a rappelé le ministre lors de la présentation du projet en commission du développement durable, l'un de ses objectifs est de « faciliter le financement des infrastructures nécessaires à la politique de développement intermodal et à sa prise en charge par l'agence de financement des infrastructures de transport ».
Or certaines infrastructures alternatives à la route, notamment relatives au transport ferroviaire ou portuaire, relèvent désormais des compétences des régions. C'est la région qui fait des plates-formes intermodales. C'est la région qui subventionne le transbordement des conteneurs. C'est la région qui s'occupe du transport en commun interrégional.
À partir du moment où la région est exclue de la part de la taxe engendrée sur les routes, on pousse les départements à construire d'autres routes, par exemple des quatre voies, et à ne pas investir dans le transport ferroviaire ou le transport en commun, qui relèvent de la région. L'amendement vise à affecter une partie de la taxe au budget régional.
(Les amendements n° 189 rectifié et n° 191 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Il s'agit d'un amendement d'appel visant à démontrer l'absence de cohérence du texte.
Vous imposez les poids lourds avec l'écotaxe, lesquels sont déjà assujettis à la taxe à l'essieu. L'objet de cette taxe spéciale – et ce n'est pas illégitime – est de faire en sorte que les poids lourds concourent au paiement de la route qu'ils utilisent. Pourquoi pas ? Avec votre projet, il y aura donc deux taxes.
En outre, je n'ai toujours pas de réponse, monsieur le ministre, sur une augmentation significative éventuelle du diesel sous prétexte d'évolution fiscale. Chacun sait que des projets sont à l'étude – pas plus tard qu'hier, j'auditionnais M. de Perthuis qui est le président du Comité pour la fiscalité écologique.
L'écotaxe, la taxe à l'essieu, l'augmentation du gazole, c'est beaucoup ! On ne peut pas tout avoir. C'est pour cette raison que je vous invite à la cohérence.
Monsieur Le Fur, les deux taxes que vous évoquez ne peuvent pas se substituer l'une à l'autre.
La suppression de la taxe à l'essieu nécessiterait au regard des dispositions du droit européen une modification de la directive « Eurovignette ».
Par ailleurs, devant toutes ces tentatives de modification de l'écotaxe poids lourds, je rappelle à la représentation nationale que le Gouvernement est attaché au monopole des lois de finances en matière de dispositions fiscales : on ne peut, hors ces lois, procéder à des modifications visant à changer l'affectation d'une taxe ou à en supprimer d'autres.
Voilà quelques minutes, la représentation nationale a créé une nouvelle taxe additionnelle sur le tabac pour financer une exonération ;
Erreur ! Signet non défini.. Or voilà, monsieur le ministre, que vous rappelez maintenant le principe du monopole des lois de finances en la matière ! Il est vrai que nous ne sommes pas à cela près depuis la commission de la semaine dernière…
Puisque nous parlons beaucoup de diesel,…
Pas nous.
…je vous rappelle que trois centimes d'augmentation du diesel, cela représente un milliard de recettes fiscales. Vous venez de refuser d'ouvrir le débat sur la question de savoir si une partie de la taxe poids lourds pouvait aider le parc routier à se moderniser. Cela en dit long sur ce qui nous attend demain concernant l'évolution de la fiscalité sur le diesel !
Vous supprimez le financement de l'AFITF !
Enfin, monsieur le ministre, je voulais profiter de cet amendement pour souligner qu'à aucun moment dans le texte un lien est établi avec les politiques relatives à la pollution de l'air. Je pense notamment aux différents plans de protection de l'atmosphère – on compte trente-trois PPA dans notre pays – qui comportent des restrictions, des contraintes et obligations qui pèsent sur le transport poids lourds.
Un travail interministériel devra éviter que tous les dispositifs ne viennent s'additionner et peser de manière insupportable sur le transport local.
(L'amendement n° 5 n'est pas adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 7.
La parole est à M. Thierry Benoit.
Cet article 7 consacre en quelque sorte l'application de l'écotaxe dans notre pays.
Je voudrais ici vous faire à nouveau part des inquiétudes qui sont les miennes, monsieur le ministre, même si – je le répète – je ne doute pas de la bonne volonté qui vous anime de mettre en oeuvre une nouvelle taxe écologique visant à encourager le transfert multimodal et à renforcer les modes de transport alternatifs.
Je me concentrerai sur les activités de transport pour souligner leur fragilité…
…et les difficultés que rencontrent déjà les transporteurs. Marc Le Fur a évoqué la taxe à l'essieu et le coût de l'énergie. Le prix de l'énergie augmente en effet sans cesse depuis quelques années – de 16,5 % en 2011, de 9 % en 2012. En outre, les taux de marge des transporteurs s'amenuisent de semaine en semaine.
Avec quelques collègues du groupe UDI, j'ai donc déposé un amendement visant à abaisser le plafond de mise en oeuvre de l'écotaxe afin de réduire son effet sur les finances des entreprises de transport.
En outre, j'ai déposé un amendement demandant la suspension de son application immédiate et son report à janvier 2015. Mais j'imagine que vous allez trouver une argutie pour appeler à voter contre et à défaut de report, je milite pour une montée en puissance progressive.
De grâce, faites preuve de pragmatisme : dans ces moments si difficiles pour les entreprises, notamment les entreprises de transport, je vous conjure de tenir compte du principe de réalité.
Monsieur le ministre, je souhaite revenir sur les conséquences qu'aurait pour de nombreuses TPE et PME l'absence de mise en place d'un système de répercussion ou de compensation adapté de l'écotaxe. Seuls les transporteurs routiers bénéficient d'un dispositif leur permettant de répercuter le coût de la taxe.
Il s'agit d'une inégalité de traitement totalement injustifiée pour les entreprises qui assurent quotidiennement par camion l'approvisionnement du tissu économique local, notamment dans les territoires ruraux. J'insisterai plus particulièrement sur les entreprises qui ont une fonction vitale pour l'activité agricole de collecte et de livraison des produits car elles n'ont pas d'autre alternative que d'emprunter le réseau secondaire lors de leurs tournées, dont la fréquence croît en raison du caractère périssable des produits agricoles non transformés. Les grandes enseignes leur imposent des livraisons plus fréquentes, de volume réduit, ce qui ne fait qu'accroître le nombre de kilomètres parcourus, toujours sans alternative modale. L'écotaxe dont ces entreprises sont redevables va alourdir leurs charges et menacer leurs activités, pourtant déjà ébranlées par un contexte économique fortement dégradé.
Un traitement adapté aux transports pour compte propre doit donc être proposé afin que ces entreprises, à l'instar des transporteurs routiers, puissent bénéficier d'un mécanisme légal sur lequel s'appuyer pour répercuter dans de bonnes conditions les charges liées à la taxe.
Nous avons, avec mes collègues du groupe UDI, déposé des amendements en ce sens.
Monsieur le ministre, je veux profiter de la discussion de l'article 7, qui consacre la création de l'écotaxe dans notre pays, comme le disait notre collègue, pour évoquer avec vous un sujet un peu particulier qui concerne mon département mais pas uniquement : je veux parler de la route Centre-Europe-Atlantique.
Cet axe transversal européen qui parcourt la France d'est en ouest est particulièrement important en matière de développement économique, mais il est considéré aujourd'hui comme l'une des routes nationales les plus dangereuses de notre pays alors même que sa fréquentation augmente, les poids lourds représentant un tiers du trafic.
La précédente majorité, notamment la ministre Nathalie Kosciusko-Morizet, n'avait rien trouvé de mieux que d'envisager une privatisation de cette route, à travers une mise en concession et la création de péages. Avec des élus du centre de la France, de l'Allier, de la Saône-et-Loire, nous avons proposé d'utiliser l'écotaxe pour réaliser les travaux de mise en sécurité qui s'imposent.
J'aimerais donc vous interroger, monsieur le ministre, sur l'utilisation de l'écotaxe via l'AFITF,…
…sur la réalisation des investissements routiers, qui sont importants pour nous en matière tant de sécurité que de désenclavement économique de certaines régions.
L'écotaxe peut-elle faire partie d'une solution financière à nos problèmes ? Votre ministère – et je crois que c'est le cas – travaille-t-il sur cette hypothèse ? Bref, quel est selon vous l'avenir de la mise à deux fois de voies de la RCEA, sujet majeur pour nous ?
Le Grenelle de l'environnement a tout d'abord consacré une méthode de travail, dont le principe est repris aujourd'hui par l'actuelle majorité : l'association de la société civile, du monde socioprofessionnel et du monde des élus autour d'une même table afin de faire émerger un consensus. C'est ce consensus qui a permis d'établir le principe de la transparence des financements des infrastructures de transport. C'est à travers ces tables rondes du Grenelle de l'environnement que nous avons porté le principe fondamental de la création d'une écotaxe sur les coûts de transport.
Aujourd'hui, nous parlons des modalités de mise en oeuvre de cette taxe. Depuis une semaine, nous avons multiplié les questions pour souligner combien l'application du dispositif ne nous paraissait pas correspondre à la logique des tables rondes.
Contrairement à ce que vous prétendez, mesdames, messieurs les députés de la majorité, monsieur le ministre, nous sommes sollicités depuis le début de nos débats par des entreprises qui nous disent que ces mesures vont tout simplement les asphyxier et qui déplorent que l'esprit du Grenelle ne soit pas respecté.
L'esprit du Grenelle, rappelons-le : il a établi que pour qu'une écotaxe soit juste et efficace, pour qu'elle soit indolore et pour qu'elle soit dotée d'une vertu pédagogique, il fallait que son assiette soit large. Ce n'est pas le cas.
Nos travaux ont démontré que la taxe pèserait à 80 % sur les derniers kilomètres, c'est-à-dire sur le commerce local, sur un tissu de PME et TPE très fragiles et qui ont très peu de résultats.
C'est faux !
C'est faux !
Si ce que je dis est faux, monsieur le ministre, votre majorité n'aurait sans doute pas accepté l'amendement sur la filière laitière qui vous met en grande difficulté.
Nous sommes ici au coeur du dispositif et nous appelons la majorité et le Gouvernement à se ressaisir pour être fidèles à l'esprit du Grenelle. Oui, l'esprit du Grenelle doit maintenant souffler dans cet hémicycle. C'est le dernier moment où cela sera possible, mes chers collègues.
Après le souffle de l'esprit du Grenelle, revenons à Vaucouleurs que vous avez évoquée, monsieur le ministre : c'est la ville où Jeanne d'Arc a expliqué qu'elle avait entendu des voix, on l'a cru et elle a sauvé la France.
L'article 7 vise à mettre en oeuvre une disposition prévue dans la loi d'orientation du Grenelle de l'environnement : la répercussion de l'écotaxe par les transporteurs. Je dois dire que je ne comprends pas pourquoi de telles dispositions n'ont pas été prises par décret. Les conseillers juridiques de la fédération « France nature environnement » – dont j'ai toujours la note sous les yeux – ont fait part de leur surprise, affirmant que cela allait contribuer à alimenter un vaste déballage, nous l'avons bien vu au cours des dernières heures.
Deux questions se posent, monsieur le ministre, et il faut que vous y répondiez.
Première question : que va-t-on faire l'écotaxe ? Elle a été difficilement arrachée aux divers acteurs concernés, aux transporteurs notamment, avec une contrepartie directe : le financement des infrastructures de transport. Si vous nous expliquez que l'équivalent de son produit sera retranché de la dotation versée par l'État au budget de l'AFITF, tout cela n'est plus qu'une mascarade. Quelle somme exacte va pouvoir être affectée aux infrastructures de transport ?
Vous m'avez ri au nez tout à l'heure, monsieur le ministre, en me disant que parler d'une augmentation des durées de concession revenait à privatiser. Dans ces conditions, pourquoi ne nationalisez-vous pas ? Pourquoi ne critiquez-vous pas le fait que certains de vos collègues veulent privatiser dans d'autres domaines en revendant des actions du secteur public ? Un peu de cohérence !
Je le répète : que voulez-vous faire de l'écotaxe ? Nous souhaitons savoir de quels moyens nous allons disposer pour nous engager dans le vaste projet que vous avez dessiné.
Seconde question : existe-t-il des risques juridiques ? Vous avez négocié un décret avec la fédération nationale des transports routiers, qui ne se prive pas de le faire savoir. C'est désormais de notoriété publique. Les autres organisations ont à peine été associées. Certaines affirment qu'il existerait des risques juridiques – est-ce vrai ? ai-je mal compris ? m'ont-elles menti ? –, qu'il aurait fallu prendre en considération le transport pour compte propre au lieu de s'en tenir uniquement au transport pour le compte d'autrui, et qu'il y a là un vrai objet de recours auprès du Conseil constitutionnel.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez sur ce point. Si vous nous dites qu'il n'y a pas de recours possible, il n'y aura pas de problème et l'on pourra avancer.
Cet article 7 me permet de rappeler que c'est au titre de région périphérique et péninsulaire que la Bretagne a obtenu une réduction de 50 % de l'écotaxe sur son réseau. Ces aménagements ont permis d'éviter qu'elle finance à elle seule 10 % du produit fiscal attendu alors qu'elle ne représente que 4,3 % du PIB national. Sans l'exempter de l'effort demandé dans le cadre du dispositif de l'écotaxe, ces aménagements ont en partie neutralisé les effets d'une application uniforme qui aurait malmené son économie.
Nous examinons le mécanisme forfaitaire de répercussion de cette écotaxe par les transporteurs sur les chargeurs, et il est impératif, monsieur le ministre, que le ciblage des aménagements obtenus soit conservé au bénéfice des entreprises bretonnes, singulièrement finistériennes.
Le taux intrarégional se situe dans la moyenne nationale – 3,3 % – et avec l'application du taux interrégional unique – 4,4 % –, les entreprises des régions périphériques se trouvent pleinement confrontées au coût de leur périphéricité dans l'espace européen.
Pour préserver la simplicité et la lisibilité du mécanisme de répercussion, nous vous avons proposé d'adopter un amendement qui porte à 50 % la minoration de la taxe applicable à la Bretagne et à 30 % celle applicable aux régions Aquitaine et Midi-Pyrénées. Cet amendement répond pour partie à l'inquiétude des secteurs agricoles halieutique et agro-alimentaire dont les marges, vous le savez bien, sont très fragiles et qui désespèrent de pouvoir répercuter la hausse des coûts de production en aval.
L'écotaxe doit donner un signal prix conduisant à la réduction des flux de transports routiers et au développement de l'intermodalité – c'est un objectif essentiel que nous partageons tous.
En Bretagne, les alternatives, qu'elles soient ferroviaires ou maritimes, restent à construire.
Ce signal prix, d'autres l'ont dit avant moi, ne peut pas être intégralement supporté par les producteurs et les transformateurs. Telle n'est d'ailleurs sans doute pas, et même sûrement pas, l'intention des transporteurs, qui connaissent eux-mêmes des situations économiques difficiles – vous l'avez rappelé, monsieur le ministre. Mais il fallait un signal, et vous nous l'avez envoyé avec les deux amendements qui ont été adoptés.
Monsieur le ministre, en quelques heures, vous avez porté un coup fatal à l'esprit du Grenelle. Quel était l'objectif de cette grande idée que représentait la mise en place, pour la première fois dans notre pays, d'une taxe sur l'environnement ? L'esprit de cette écotaxe, c'était de faire payer des transports qui polluent, des transports qui font mal, des transports qui utilisent une voirie payée pour l'essentiel par les collectivités.
L'idée était de les taxer, certes ; mais l'objectif était surtout de mettre en place une intermodalité, afin de rendre les transports plus vertueux au regard de l'environnement, de les orienter de plus en plus vers le ferroviaire et le fluvial, de pousser à une réflexion sur la continuité du transport entre les camions, le train et tous les moyens mis à disposition, et d'éviter au bout du compte tant les engorgements que les rejets systématiques de CO2 dans l'atmosphère.
Voilà ce qu'était l'esprit du Grenelle : faire bouger les choses et mettre en place une première taxe pour envoyer un signal.
Aujourd'hui, après des heures de discussion en commission, après une nuit et une longue matinée de débats dans cet hémicycle, qu'en est-il exactement de cet article 7, qui est finalement le coeur de l'écotaxe ? Vous nous proposez un système compliqué, nous vous l'avons répété à plusieurs reprises, une usine à gaz qui n'a rien d'une écotaxe. Pourquoi ? Tout simplement parce que vous avez choisi de faire payer les camions de la même façon, dès l'instant qu'ils utilisent des routes écotaxables.
Cela signifie qu'un même camion, dès lors qu'il empruntera une route écotaxable, paiera ; mais lorsqu'il sera sur une autoroute, il ne paiera pas ! Et pourtant, la pollution est exactement la même dans les deux cas !
Vous avez finalement choisi, dans l'écotaxe, de ne retenir que le mot « taxe ». C'est dommage, parce qu'ensemble nous aurions pu continuer à faire vivre ce Grenelle, dont nous aurons tant besoin dans les décennies à venir !
Pour ma part, je pense qu'en quelques heures, nous avons donné un coup fatal à un décret d'application pris par le dernier gouvernement. Ce décret était, de l'avis de tous les professionnels, une véritable usine à gaz, car il manquait de lisibilité et était d'une complexité extrême.
Très bien !
Le nouveau système proposé ambitionne d'être plus simple, puisqu'il instaure une majoration identique quelle que soit l'activité, assise sur une base légale avec une taxe fixée par région pour le transport intrarégional et un taux unique national.
Je me réjouis donc, monsieur le ministre, de cette démarche de simplification qui permet à tous de disposer d'un mécanisme compréhensible. Le défi est ambitieux, et va plus loin que la seule simplification : il met en place une fiscalité écologique durable, tout en assurant la justice entre les territoires et la protection de leur compétitivité.
Tout comme ma collègue Annick Le Loch, je salue la prise en compte de la spécificité des régions périphériques et péninsulaires : leur isolement et leurs activités économiques justifient un régime particulier. La simplification ne doit pas être synonyme d'uniformisation ; elle doit assurer l'égalité entre les territoires au regard de leurs spécificités respectives.
L'objectif que nous poursuivons est d'imaginer un système juste et économiquement intelligent. J'ai bien noté, dans l'article 7, que le Gouvernement s'engage à évaluer ce dispositif et à en rendre compte au Parlement. Il sera intéressant de mesurer à cette occasion quelle l'influence il aura eu sur le report modal.
Peut-être faudra-t-il alors évoquer, ainsi que notre collègue Paul Molac l'a fait, la possibilité de consacrer une partie de cette taxe au financement des ports régionaux et des plateformes ferroviaires actuellement à la charge des régions, afin de permettre à nos transporteurs d'opter pour ces modes de transport.
Par ailleurs, ce rapport pourrait aborder la question du possible accroissement des transports de moins de 3,5 tonnes ; il serait intéressant de l'évaluer dans le cadre de ce dispositif.
Je suis, comme beaucoup ici, convaincu que les comportements de nos concitoyens doivent évoluer. Il existe pour cela deux méthodes : l'incitation ou la sanction.
Vous avez choisi la sanction ; je crois pour ma part qu'il faudrait introduire un peu plus d'incitation, monsieur le ministre. Or votre texte n'en contient pas : il n'y a que de la sanction fiscale.
Le Grenelle, c'était tout autre chose : c'était le bonus et le malus. On incitait et, éventuellement, on sanctionnait. Avec ce texte, on n'a que la pénalisation.
Qui plus est, j'ai longuement développé ce point hier soir lors de la défense de la motion de procédure,…
…nous sommes désormais en période de crise : autrement dit, les choses ont évolué. Certaines décisions opportunes en temps apaisé deviennent inopportunes en temps de crise. Le navigateur le sait bien, qui n'utilise pas les mêmes voiles lorsque le temps devient difficile. Or nous sommes justement dans une période de temps difficile. Nous ne devons pas pénaliser les acteurs économiques, mais au contraire les renforcer et les soutenir : voilà l'objectif !
Ajoutons que cet article 7, on l'a dit, organise une répercussion totalement erronée ! Le transporteur pourra répercuter : c'est logique. Mais le donneur d'ordres, lui, ne le pourra pas. Nos industries, et particulièrement nos industries agroalimentaires, ne pourront pas répercuter sur leurs clients le coût du transport qu'elles effectueront par elles-mêmes ou qu'elles paieront à leurs transporteurs. Votre système est donc pénalisant pour l'industrie ; or chacun sait que le vrai problème de l'industrie, c'est l'emploi, et que le vrai problème de l'emploi, c'est l'industrie. Sachons répercuter les coûts !
Enfin, mes chers collègues, ce texte pose un vrai problème d'inconstitutionnalité, que nous avons pointé du doigt hier soir. Ce système va générer un enrichissement sans cause, car certains transporteurs répercuteront plus qu'ils ne paieront au titre de la taxe. Cette question fragilise votre projet.
Nous avions un principe simple : l'impôt doit être payé par le contribuable, et celui qui paye peut le répercuter à son client – ni plus ni moins. C'était tellement simple que vous n'avez pas voulu adopter ce principe… Mais il est encore temps d'y revenir.
J'ai confiance en votre bon sens, monsieur le ministre : ne soyez pas qu'aux ordres ! Prenez des initiatives : nous les soutiendrons ! Que nous soyons de la majorité ou de l'opposition, sachons évoluer, sachons faire progresser : nous sommes tous ici réunis dans ce but !
Monsieur le ministre, vous avez voulu proposer un système simple ; mais à trop rechercher la simplicité, vous donnez dans une forme de brutalité.
Les orateurs qui m'ont précédé ont rappelé que le contexte économique avait changé : ce qui était possible il y a encore deux ans doit aujourd'hui être mis en oeuvre avec infiniment de prudence. Or votre texte ne fait pas preuve de la prudence nécessaire dans ses modalités de mise en oeuvre.
Deux problèmes majeurs se posent. Tout d'abord, un problème d'égalité devant l'impôt pour les transporteurs en compte propre, qui n'auront pas la possibilité de répercuter, et n'auront pas d'autres choix que de s'asphyxier un peu plus ou d'étrangler leurs clients. C'est malheureusement l'un des graves problèmes posés par les dispositions que vous nous proposez aujourd'hui.
Par ailleurs, votre mécanisme de majoration se veut beaucoup plus simple que ce qu'avait fait le précédent gouvernement. Il est vrai qu'il a le mérite de la simplicité ; mais là encore, il crée de graves injustices.
Marc Le Fur a évoqué les risques d'enrichissement sans cause, ou du moins d'effets d'aubaine : dans certains territoires, le taux de majoration sera beaucoup plus important que ce qui sera réellement payé par les transporteurs ; mais dans d'autres cas, il sera véritablement impossible pour les transporteurs de répercuter ce qu'ils auront effectivement acquitté, faute d'un taux de majoration suffisant dans votre mode de calcul.
J'ai été particulièrement édifié par les propos tenus par notre collègue Molac – il est parti, je le regrette – qui, après avoir milité pour l'instauration de l'écotaxe dans notre pays, demande aujourd'hui à l'Assemblée nationale d'en être dispensé. Cette lucidité un peu tardive de la part des députés verts, ou du moins d'une partie d'entre eux, devrait vous amener, monsieur le ministre, à un peu plus de réflexion sur ce sujet, et devrait en tout cas vous inquiéter.
La parole est à M. Marc Le .Fur, pour soutenir l'amendement n° 1 , qui tend à supprimer l'article
« Écotaxe : la fronde des députés PS », ai-je lu dans Le Télégramme du 27 mars dernier – il s'agissait des députés PS de Bretagne.
Fronde : cela veut dire qu'on se révolte ! Cela veut dire qu'on en appelle à la mémoire, aux bonnets rouges ! Cela veut dire qu'on se mobilise !
La Bretagne compte vingt et un députés : nous allons en faire l'appel. Patricia Adam : on ne l'a pas vue dans ce débat ! François André : absent ! Nathalie Appéré : absente ! Jean-Luc Bleunven : il était là tout à l'heure, mais n'a rien dit ; il est parti, mais cela ne change pas grand-chose !
Gwenegan Bui : il était là, et j'espère qu'il va revenir. Marie-Anne Chapdelaine : on ne l'a jamais vue. Chantal Guittet : elle lit les textes qu'on lui donne !
Je salue mon excellente collègue des Côtes-d'Armor Corinne Erhel, qui est bien présente ; mais on ne l'a pas entendue. Richard Ferrand : il s'est contenté de répondre au député Le Fur. Notre collègue Gilbert le Bris : il n'est plus là…
Viviane Le Dissez : on ne l'a pas entendue ! Annie Le Houerou : pas davantage ! Jean-Pierre Le Roch : très peu présent ! Annick Le Loch : présente, et je la salue !
Mmes Le Loch, Guittet et Erhel sont les trois seules députées présentes sur les vingt et un députés socialistes bretons ! On veut une fronde, on en appelle à l'opinion, mais ce n'est que de l'apparence ! Vous êtes ici aux ordres ! Vous exécutez les instructions que vous donne le Gouvernement ! Sachez réagir, comme d'autres ont su le faire ! Il faut que l'opinion le sache, y compris dans notre région ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Le Fur, je vais vous répondre avec le coeur. Vous êtes vice-président de l'Assemblée nationale…
Vous avez mis en cause certains de nos collègues, qui étaient présents cet après-midi, qui ont défendu des amendements, qui ont défendu non seulement leur circonscription, leur territoire, mais une vision générale de ce texte.
Ce n'est pas la première fois, monsieur Le Fur, que vous mettez en cause des parlementaires dans cet hémicycle : je le sais, puisque j'en ai été la cible ! Je trouve honteux qu'un vice-président de l'Assemblée nationale s'adonne à ce genre de sport !
Je ne mets personne en cause : je ne fais que constater les présences et les absences !
Même avis.
Je souhaite répondre à M. Le Fur. Ce n'est pas la première fois, monsieur le député, que vous m'interpellez. Je n'ai pas réagi les fois précédentes, mais je commence à en avoir assez de vos allusions : vous faites du populisme, voilà tout !
Si vous vous plaignez que la Bretagne compte vingt et un députés socialistes, c'est peut-être parce que les socialistes en Bretagne font leur travail, alors que les députés de votre parti ne le font pas ! Comptez-vous sur vos propres bancs ! Nous, nous travaillons en équipe, en commission, nous avons préparé ensemble les amendements, nous étions présents pour les voter.
Arrêtez de faire du populisme, arrêtez de dire des inepties à longueur de temps, travaillez vos amendements, et vous aurez peut-être un plus de députés de l'UMP en Bretagne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Martial Saddier, qui va naturellement s'exprimer sur l'amendement n° 1 . (Sourires.)
Comme si je vous avais habituée à autre chose, madame la présidente ! (Sourires.)
En 2008, le Président de la République Nicolas Sarkozy a voulu et institué la question prioritaire de constitutionnalité....
Réforme exceptionnelle, tournant dans l'histoire de la Ve République, elle permet à chaque citoyen d'engager une procédure pour vérifier, dans le strict respect de l'indépendance de nos institutions, à laquelle nous sommes particulièrement attachés, que le jugement, sur quelque mesure que ce soit, est conforme à la Constitution. Nous avons été un certain nombre à voter ce principe qui a constitué une réelle avancée.
Nos concitoyens n'ont pas tardé à s'en saisir, ainsi que les juridictions. Le Conseil constitutionnel a d'ores et déjà confirmé, à plusieurs reprises, que nos concitoyens étaient « victimes » de jugements non conformes à la Constitution et nous avons déjà été amenés, à l'Assemblée nationale et au Sénat, à revoir des textes qui n'étaient pas ou plus conformes à la Constitution.
Je le répète, je ne suis pas contre le principe d'une taxe puisque je l'ai voté. L'esprit du Grenelle soufflait dans cet hémicycle et je remercie, y compris les députés actuels de la majorité qui étaient alors dans l'opposition, qui à l'époque ont voté ce principe. Mais, comme je l'ai indiqué en commission, vous aurez des questions prioritaires de Constitutionnalité sur les modalités d'application…
…et nous craignons que le Conseil constitutionnel ne vous sanctionne.
Au-delà de la sanction, ce que nous regrettons c'est le financement de l'AFITF puisqu'un certain nombre de projets d'infrastructures risquent de tomber à l'eau. Notre seul mérite aura été de le rappeler dans cet hémicycle.
Le présent projet de loi limite le bénéfice de la compensation définie à l'article 7 au seul transport pour compte d'autrui, faisant l'impasse sur le cas d'autres acteurs économiques qui, utilisateurs de la route au même titre que les transporteurs routiers, seront également redevables de l'écotaxe. Il est en cela constitutif d'une rupture d'égalité qui n'apparaît pas justifiée, l'ensemble de ces acteurs se trouvant dans une situation objectivement similaire vis-à-vis de l'écotaxe.
Cet amendement vise donc à revenir sur cette rupture d'égalité, en élargissant le mécanisme défini à l'article 7 à l'ensemble de ces acteurs.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 107 .
Monsieur le ministre, j'essaie, à travers cet amendement et les suivants, de respecter une certaine cohérence. Bien évidemment, mon groupe soutient ardemment la taxe poids lourds et je souhaite voir mise en place le plus rapidement possible et dans de bonnes conditions. Encore faut-il éviter tout risque de contentieux, et notamment de recours devant le Conseil constitutionnel.
Mon amendement n° 107 vise à élargir le bénéfice de la répercussion de la taxe à l'ensemble des acteurs de la route. Telle qu'elle est prévue, la répercussion de la taxe ne bénéficiera qu'aux seuls transporteurs pour compte d'autrui, faisant l'impasse sur le cas de très nombreuses entreprises françaises, dont beaucoup de PME et TPE qui assurent la livraison de leur marchandise par leurs propres véhicules. Ces entreprises, qui seront redevables de la taxe au même titre que les transporteurs routiers, devront se débrouiller seules.
Mon amendement vise à revenir sur cette rupture d'égalité en élargissant le mécanisme défini à l'article 7 à l'ensemble de ces acteurs.
Même avis.
On aimerait que la commission et le Gouvernement nous disent pourquoi !
J'aimerais savoir pourquoi la commission et le Gouvernement sont défavorables à ces amendements. Avez-vous des garanties juridiques sur l'impossibilité d'un recours devant le Conseil constitutionnel ?
Monsieur le ministre, lors de mon intervention sur l'article 7, je vous ai indiqué que j'avais été très troublé par les auditions de membres de grandes organisations : ils m'avaient prévenu qu'il y aurait un recours devant le Conseil constitutionnel, car certaines catégories de transporteurs pourront répercuter cette taxe tandis que d'autres ne le pourront pas.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement n° 144 .
L'amendement n° 144 vise à préciser la notion de prestation de transport. Depuis plusieurs minutes, monsieur le ministre, nous vous posons des questions précises et vous ne répondez pas. Je le regrette. Vos réponses pourraient valider votre texte, ou à l'inverse le fragiliser. Donnez-nous des explications, des précisions et votre sentiment définitif sur les questions que nous vous posons ! Cet amendement en tout cas vous offre l'opportunité de nous dire clairement si, oui ou non nous sommes dans une prestation de transport et de la préciser au regard de l'écotaxe.
Même avis.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement n° 145 .
Nouvelle question, monsieur le ministre : je vous demande simplement de nous apporter une réponse définitive afin que nous puissions savoir si vous croyez à votre texte ou si finalement vous le jugez tellement fragile et si peu solide que vous n'osez même pas répondre aux questions que nous vous posons.
Pour des raisons précédemment exposées, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'article 7 est le coeur du dispositif. Les deux groupes de l'opposition soulèvent un problème de constitutionnalité potentiel – je dis bien : potentiel.
Un grand nombre d'entreprises nous ont interpellés sur cette question en annonçant clairement qu'elles allaient déposer une QPC. Nous ne disons pas que nous le souhaitons : si tel était le cas, nous pourrions déposer nous-mêmes un recours devant le Conseil constitutionnel. Nous ne disons pas que nous allons le faire…
…mais nous appelons l'attention du Gouvernement et de la majorité qui, a priori, comme l'a rappelé Jean-Marie Sermier tient à ce texte, tient à ce mécanisme de financement, mais qui ne nous donne aucune réponse.
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas vous réfugier derrière vos réponses précédentes puisque vous n'avez jamais donné votre position sur l'article 7,…
Vous n'avez jamais expliqué dans cet hémicycle pourquoi une question prioritaire de constitutionnalité serait repoussée par le Conseil constitutionnel.
C'est faux.
Vous n'avez pas bien écouté. Vous travaillez mal !
Ce n'est pas très sympathique de votre part de me dire que je travaille mal.
Monsieur le ministre, ce ne sont pas des arguments. Je vous le dis calmement, je suis très zen et j'ai toute la nuit devant moi : nous sommes au coeur du dispositif et nous demandons des réponses précises à des questions que nous relayons. Ce texte risque-t-il d'être retoqué par le Conseil constitutionnel à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité ?
Je souhaite revenir, comme mes collègues, sur un problème en espérant obtenir des réponses satisfaisantes.
L'article 7 prévoit que le transporteur pourra répercuter la taxe quel que soit le parcours. L'assiette de la taxe poids lourds est précisée à l'article 273 du code des douanes qui dit clairement que le fait générateur de la taxe intervient quand le camion passe une borne indiquant le début d'un tronçon de route compris dans le périmètre soumis à la taxe. Si un transporteur évite ces routes, il ne tombe donc pas sous le coup de la taxe. Quel est, monsieur le ministre, le statut exact de la somme qu'il ne manquera pas de répercuter sur son client ?
J'ai bien peur qu'avec l'article 7, comme l'ont dit mes collègues, nous ne mettions en place sans nous en rendre vraiment compte une nouvelle taxe avec une assiette et un fait générateur différent de ceux de la taxe poids lourds telle qu'elle figure dans le code des douanes. Dans ce cas, mes chers collègues, nous sommes totalement hors du cadre juridique. On aura droit, comme l'a dit Martial Saddier, à une question prioritaire de constitutionnalité dès le premier contentieux, avec un grand risque de censure constitutionnelle. La modestie des montants en jeu, que vous avez relevée et dont on a argué en commission, ne joue pas quand il s'agit d'une question de droit. Une fois de plus, monsieur le ministre, nous prenons date, comme nous avons pris date avec la loi Brottes qui est soumise aujourd'hui à l'examen du Conseil constitutionnel et dont nous connaîtrons le résultat dans le courant de l'après-midi – ce devrait être intéressant !
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 114 .
Monsieur le ministre, je regrette que nous soyons traités de cette façon. Pas même un mot, pas même une explication ! Quelle désinvolture ! Les relations entre le Gouvernement et le Parlement ne s'améliorent pas.
À aucun moment je n'ai présenté d'amendement remettant en cause le contenu de cette taxe. Vous ne répondez à aucune de nos questions,…
Jamais on ne vous aurait fait cela lorsque vous étiez dans l'opposition !
…notamment à celle de la constitutionnalité, qui n'est pas une mince affaire. Si vous êtes sûr de votre coup, tant mieux : cela signifie que toutes les grandes organisations qui nous ont rencontrés sont des imbéciles ou qu'elles n'ont rien compris. Ou alors il y a un vrai problème, et il faut en parler. Nous avons envie que cette taxe soit mise en place, monsieur le ministre !
Vous n'êtes pas vraiment en train de le démontrer !
Je l'ai dit tout à l'heure ! Parlez-en aux Bretons de votre majorité, qui passent leur temps à essayer de faire différer l'application de cette taxe.
Vous ne me répondrez pas non plus sur l'affectation de cette taxe, ce qui veut dire que les grands projets d'infrastructures ne seront pas réalisés demain ou après-demain. Serons-nous seulement vivants quand ils le seront ? Il n'y a pas un sou pour les financer !
Je repose calmement une autre question sur un autre amendement, peut-être moins stratégique que les autres : la prise en compte de l'itinéraire emprunté pour le calcul du taux de majoration des coûts de transport, c'est-à-dire le conditionnement de l'application de la majoration forfaitaire au paiement de l'écotaxe par le transporteur. En clair, dans la mesure où une grande partie du réseau routier ne sera pas soumise à l'écotaxe, la majoration du prix des transports ne doit pas s'appliquer dans les situations où il apparaît indiscutablement qu'aucune taxe n'a été acquittée par le transporteur.
Avis défavorable. Supprimer cette mention reviendrait à supprimer le caractère forfaitaire de la majoration et donc à revenir à un calcul au réel, comme vous l'aviez prévu dans le décret de mai 2012.
Même avis. Je souhaite simplement préciser deux ou trois choses.
Pour commencer, soyez attentifs. Nous avons eu hier de nombreuses heures de discussion : j'ai bien précisé que ce projet de loi avait été soumis pour avis au Conseil d'État et qu'à aucun moment un doute sur sa constitutionnalité n'a été émis. Nous avons pris toutes garanties et nous sommes parfaitement sereins, monsieur Pancher.
Vous pouvez saisir le Conseil constitutionnel, c'est votre droit, c'est légitime. Il est aussi possible que le Conseil soit saisi par une question prioritaire de constitutionnalité : nous sommes sereins, nous avons pris toutes les garanties à cet effet.
Je veux maintenant revenir sur une remarque que vous avez réitérée. Contrairement à mes prédécesseurs, nous avons consulté, dès le jour de ma nomination, toutes les organisations syndicales. Je le dis pour que ce soit mentionné au Journal officiel : je n'accepte pas que vous puissiez dire que nous n'avons travaillé qu'avec une seule d'entre elles. Peut-être était-ce une stratégie en d'autres temps, peut-être en êtes-vous nostalgique, mais je peux vous dire que nous avons travaillé avec toutes les organisations représentatives. Je me suis pour ma part présenté à chacun des congrès des deux organisations représentatives, FNTR et OTRE ; nous avons également travaillé avec TLF pour les logisticiens.
Nous avons travaillé avec tout le monde. Pourquoi ? D'abord parce que c'est notre façon d'aborder les choses : la négociation, la discussion, l'échange. Ensuite parce que, lorsque je suis arrivé au ministère des transports, de la mer et de la pêche, tout le monde avait les mots les plus durs au sujet d'un décret – votre décret !
Aujourd'hui, vous êtes sur des positions différentes : tantôt vous voulez maintenir la taxe, tantôt vous voulez financer plus de compensations ou plus d'infrastructures, tout en vous retranchant dans une posture qui aboutirait à supprimer les moyens dégagés par l'écotaxe. La réalité, c'est que tous les professionnels – et vous le savez, si vous les avez rencontrés – étaient opposés au décret que vous vous êtes empressés de signer en mai 2012.
Il vous a fallu trois ans pour concrétiser l'écotaxe poids lourds et maintenant, c'est vous qui nous donnez des leçons, alors même que depuis 2009, quand le principe en a été voté unanimement dans cette Assemblée, vous avez repoussé plusieurs fois l'échéance ! Par manque de courage, dites-le ! Reconnaissez-le ! Parce que vous saviez bien que vous n'aviez pas la capacité ni la volonté d'assumer. Nous en avons du reste la démonstration : vous aviez si peu la volonté d'assumer l'écotaxe poids lourds que vous nous démontrez à cet instant présent que vous n'en voulez pas !
Cela veut dire que vous avez trompé les Français ! Cela veut dire que toutes les discussions sur le Grenelle de l'environnement n'auront été que mensonges ! Les masques tombent ! (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Vous vouliez m'entendre ; eh bien, je vous le dis. Lorsque j'interviens, vous me reprochez d'être trop long, mais vous protestez quand, par délicatesse à votre endroit, je ne souhaite pas vous mettre devant ces réalités, face à vous-mêmes et à vos contradictions. Ce n'est plus un grand écart, c'est un reniement ! Eh bien, je me tais pour ne pas avoir à vous faire assumer pareille gymnastique politique. Si vous m'y contraignez, nous aurons chacun notre vérité, mais je sais dans quel état j'ai trouvé ce dossier : il n'y a pas eu de concertation avec les professionnels, le système prévu dans le décret de mai 2012 était inapplicable.
Il était de nature à tuer des professions, notamment les petits transporteurs ! (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Vous le savez, vous devriez le savoir ! Pour notre part, nous souhaitons conjuguer réalité économique et protection de l'emploi à la création d'une taxe environnementale qui permette non seulement le financement de modes alternatifs de transport, mais aussi une forme de modernisation.
C'est vous qui m'avez invité à parler !
Et puisqu'on nous assène une succession de contre-vérités, je rappelle enfin que le principe même de l'écotaxe poids lourds est incitatif. M. Le Fur, après avoir soutenu qu'il fallait la supprimer, nous demande maintenant de financer des incitations en faveur des professionnels des transports, qu'il n'hésite pourtant pas à malmener puisqu'il va jusqu'à remettre en question la répercussion prévue pour les protéger. Hier pourtant – c'était dans la nuit – j'ai précisé qu'il y avait là 40 000 entreprises concernées, victimes d'une concurrence déloyale contre laquelle nous souhaitons agir. Les incitations sont intégrées dans le dispositif même de l'écotaxe poids lourds, notamment grâce à une modulation du bonus puisque les camions les moins polluants bénéficieront d'une minoration de 15 % du barème.
Voilà la réalité. Vous êtes dans une succession de prises de position, de discussions, d'amendements et de sous-amendements tous plus contradictoires les uns que les autres. Je ne sais même plus quelle est votre ligne politique, je ne sais même plus ce que vous défendez ! Il n'y a aucune lisibilité dans ce que vous proposez !
Vous vous contredisez en permanence les uns les autres ! Finalement, messieurs les parlementaires, moi je remercie et je félicite la majorité qui est constante, qui a une volonté politique, qui l'assume et qui fait en sorte que nous puissions enfin conduire une politique ambitieuse de transport et de report modal ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je voudrais d'abord remercier Mme le rapporteur : j'ai d'ailleurs retiré mon amendement n° 114 , car je trouve que ses réflexions sont de bon sens.
Cela avait bien commencé, monsieur le ministre : on vous posait des questions, vous répondiez. Et tout à coup, vous vous emportez, vous attaquez tout ce qui est possible et vous ne répondez pas à la question essentielle : que va-t-on faire de l'argent de la taxe sur les poids lourds ? Il va tout simplement combler le trou sans fond de l'État, sans rien donner de nouveau en termes d'infrastructures.
Vous nous attaquez sur les délais de mise en oeuvre de la taxe poids lourds, mais vous êtes ministre, vous avez une administration, vous savez les raisons de ce retard : c'était la première fois qu'un pays aussi important que la France engageait un dispositif aussi large, qui pose des problèmes de concurrence internationale. Nous n'avons pas perdu de temps sur ce sujet !
De grâce, monsieur le ministre, restons dans le courtois ! Répondez simplement à nos questions : vous verrez que les débats seront beaucoup moins animés et que cette discussion finira de façon consensuelle.
Monsieur le ministre, nous abordons là un sujet, vous n'avez pas la réponse et vous vous en sortez par de l'esbroufe.
Le sujet, c'est celui du risque d'inconstitutionnalité. Vous nous répondez en invoquant l'avis du Conseil d'État. On nous fait le coup à tous les textes : comme vous ne communiquez pas cet avis, vous pouvez dire qu'il est favorable. Je peux tout aussi légitimement soutenir qu'il est défavorable. Cette histoire d'avis du Conseil d'État, c'est du bonneteau, pas autre chose ! Il nous a déjà servi le même argument lors de la loi sur le mariage pour tous. Il faut sortir de l'hypocrisie.
Revenons au vrai sujet, et je vais l'illustrer par un exemple concret. Les transporteurs font des lignes régulières. Prenons-en un qui serait installé aux limites de l'Ille-et-Vilaine et de la Mayenne, à côté du péage de La Gravelle.
À quelques kilomètres de chez moi !
Il fait régulièrement la ligne de Nice : 1 300 km, entièrement sur autoroutes concédées. Ce transporteur, chacun en convient, ne paiera donc pas l'écotaxe. Le problème, c'est qu'il va répercuter à son client 4,4 centimes par kilomètre, soit un peu plus de 57 euros, alors qu'il n'a pas payé l'impôt. Quel est le statut de cette somme ? C'est un enrichissement sans cause !
C'est une vraie difficulté. Certains transporteurs m'ont déjà interrogé : faut-il placer cette somme sur un compte spécial ? Que faut-il en faire ?
Cet argent est touché par le transporteur du fait qu'il est collecteur d'impôt. Il le touche en compensation. La compensation n'est pas illégitime quand on paye l'impôt, mais quand on ne paye pas l'impôt, quel est le statut de cette compensation ? Voilà le problème, et l'on n'en sort pas. Il y a une vraie difficulté, il y a un vrai risque : donnez-nous de vraies réponses. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
(Les amendements identiques nos 4 et 25 ne sont pas adoptés.)
Madame la présidente, je vous demande une suspension de séance pour réunir mon groupe et voir dans quelle mesure nous pouvons continuer à travailler avec le Gouvernement dans un esprit apaisé : tout cela est un peu compliqué.
Article 7
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt.)
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement n° 146 .
Cet amendement a pour objectif de préciser que le bénéficiaire de la majoration du prix de transport est le redevable de la taxe, pour éviter toute confusion : au-delà des propos tenus par les uns et les autres et de l'opinion que nous pouvons avoir de ce projet de loi, il s'agit ici de le conforter.
Monsieur le ministre, après cette suspension de séance qui aura permis à la tension de retomber et aux esprits de retrouver leur sérénité, pourriez-vous nous communiquer l'avis du Conseil constitutionnel dont vous avez fait état ainsi que ses remarques ?
Je n'ai pas fait état d'un avis du Conseil constitutionnel !
La commission du développement durable a rejeté cet amendement car il vise à exclure les commissionnaires de transport du bénéfice du système de répercussion. Or bien que les commissionnaires soient des intermédiaires, leur activité constitue une prestation de transport qui doit se traduire par une répercussion. Avis défavorable.
Comme la rapporteure, le Gouvernement considère que la répercussion doit être totale. Avis défavorable.
(L'amendement n° 146 n'est pas adopté.)
Cet amendement, déposé par mon collègue Philippe Vigier, vise à corriger les inégalités qui peuvent exister entre plusieurs départements à l'intérieur d'une même région.
Il part de faits précis et cite cet exemple : une entreprise du département d'Indre-et-Loire, qui possède quinze kilomètres de routes taxées, aurait un retour de 2,6 %, tout comme une entreprise d'Eure-et-Loir qui aurait pour sa part 476 kilomètres de routes taxées sur le département.
Cet amendement met en évidence des disparités entre des départements au sein d'une même région.
Volontiers, madame la présidente.
Ces amendements ont deux défauts : ils ne sont ni bretons ni socialistes (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Malgré tout, ils mettent en évidence une vraie faiblesse de ce texte : cette disposition problématique.
Votre taux régional a le mérite de la simplicité, monsieur le ministre, et je vous en donne acte. Cela étant, comme Marc Le Fur l'a très bien expliqué, il crée un effet d'aubaine dans certains cas où certains transporteurs auront un retour supérieur à la taxe qu'ils auront acquittée, alors que d'autres vont emprunter un réseau très fortement taxé dans leur département d'origine ne pourront pas en répercuter le coût.
Ajoutons qu'il existe quelques cas très atypiques en France. Contrairement à ce que vous m'avez reproché en commission, monsieur le ministre, je ne cherche pas à faire éclater tout le système. Ce n'est pas du tout ce que je propose. Il existe deux ou trois départements, extrêmement atypiques et probablement identifiés par vos services, où la règle que vous posez va créer énormément d'injustice.
Entendons-nous bien : contrairement à ce que Mme la rapporteure a affirmé l'autre jour, je ne propose pas qu'un département s'exonère. Mes amendements, tout comme celui de Philippe Vigier, vous offrent la possibilité de réparer des injustices, monsieur le ministre. Il s'agit de pouvoir appliquer le taux interrégional à ces départements dont la consistance du réseau taxé est particulièrement atypique. Avec ces amendements, vous ne prenez pas de risque, mais vous rétablissez un peu de justice là où existe vraiment un risque d'injustice très fort. Cela ne concernera guère que deux ou trois cas, et c'est vous qui établirez la liste des départements auxquels vous acceptez d'appliquer un autre taux que le taux régional.
Si l'on accorde à un département, quel qu'il soit, la possibilité de se détacher de sa région pour se rattacher à une autre, afin de bénéficier d'un taux de majoration inférieur, combien de département vont-ils demander à bénéficier du même traitement ? Cela aboutirait à un démantèlement total de ce dispositif et, au final, à des taux probablement différents au sein de chaque département. Rappelons que ce sont les départements qui ont défini les réseaux taxables. Avis défavorable.
Cette question a été débattue en commission, assez longuement d'ailleurs. Ces amendements visent à remettre en cause tout le système prévu, même en procédant par des modifications ponctuelles et limitées. Je suivrai donc l'avis de Mme la rapporteure.
Cela dit, dans le cadre du suivi de la mise en place de l'écotaxe poids lourd, un rapport annuel sera remis au Gouvernement et discuté au Parlement. Il sera intéressant d'analyser les conséquences et les éventuelles imperfections de cette mesure.
Madame la rapporteure, vous n'avez visiblement pas compris ce que je proposais. Il ne s'agit pas de permettre aux départements de s'exonérer de taxe, mais d'autoriser, dans certains cas, le ministre et à personne d'autre à en fixer le taux par arrêté. Votre réponse était vraiment à côté de la plaque !
Monsieur le ministre, je comprends bien qu'un Gouvernement n'aspire qu'à une chose quand il arrive devant nous : que le Parlement ne soit qu'une chambre d'enregistrement et qu'il se garde d'amender son texte.
C'est dommage : je vous offrais vraiment l'occasion de corriger une injustice créée par votre dispositif.
Dans mon département d'Eure-et-Loir, nous avons des entreprises qui représentent plusieurs centaines d'emplois. À Dreux, un bassin d'emplois qui présente un très fort taux de chômage, plusieurs centaines d'emplois sont en jeu dans les entreprises Translocauto, DHL et Huillet qui sont en grande difficulté. J'espère que ces entreprises seront encore là dans un an pour écouter les conclusions du rapport.
Je regrette que vous refusiez ces amendements très pragmatiques : ils ne remettaient pas en cause l'ensemble du système. Nous étions totalement prêts, au besoin, à faire en sorte que la loi apporte des précisions supplémentaires pour vous permettre de le verrouiller un peu plus. Encore une fois, c'est vous qui décideriez dans ces deux ou trois cas qui présentent des situations particulièrement atypiques.
(Les amendements nos 97 , 201 , 130 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Le tissu économique diffère d'une région à l'autre : certaines PME et TPE travaillent sur longue distance, d'autres sont spécialisées dans le transport interrégional, d'autres enfin dans le transport exclusivement local.
Mon amendement n° 7 vise à apporter une certaine souplesse. C'était l'esprit au moment de la création de la taxe poids lourds dans le cadre du Grenelle de l'environnement : il fallait tenir compte de la spécificité des transports des territoires périphériques, où le transport est davantage lié à l'économie locale qu'au transit interrégional.
Le présent amendement vise, dans une perspective de conciliation du dispositif du présent projet de loi et du respect des dispositions créées par le législateur, de compléter l'article 7 par un dispositif spécifique pour l'application du taux interrégional à la part du transport dans les régions périphériques.
(L'amendement n° 7 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 109 .
Mon amendement n° 109 vise à apporter un peu de souplesse à ces dispositions. Les taux de report indiqués au bas des factures sont compris entre 0 % et 7 %. Cette précision de pourcentage dans le dispositif législatif ne semble pas nécessaire car elle pourrait créer des contraintes à l'avenir.
Les taux de majoration de la facture de transports sont fixés par arrêté ministériel. Il apparaît donc préférable de fixer l'encadrement chiffré de ces taux également par arrêté ministériel plutôt que par la loi, sous peine d'avoir à modifier une nouvelle fois la loi en cas de changement d'assiette de l'écotaxe.
Défavorable. Pour des raisons constitutionnelles, il est impératif que le législateur fixe un encadrement précis, chiffré, à ce qui constitue une limitation de la liberté contractuelle. Cet encadrement ne saurait se faire par voie réglementaire.
Depuis le début de la discussion, je suis préoccupé par le fait que cette nouvelle taxe s'applique à travers le pays sans expérimentation. Nous n'en connaissons pas l'impact réel sur les entreprises notamment de transport, alors qu'en France ce secteur est fortement pénalisé. C'est même un contributeur unique en Europe, puisqu'il supporte une fiscalité quatre fois et demi plus élevée que la moyenne de ses concurrents européens !
L'amendement n° 87 vise à contenir le taux de la taxe à 2 %. À défaut d'obtenir un report de l'écotaxe à janvier 2015 – nous en parlerons plus tard – il faut en contrôler le taux. Nous pourrions ainsi poser le principe de l'écotaxe, à un taux très modéré, et permettre une progression ajustée au fil du temps en fonction du contexte économique.
L'amendement n° 88 est dans le même esprit. Il prévoit un taux de 2 % pour les deux premières années, avant de s'acheminer progressivement vers un taux maximum de 7 %.
Mon amendement n° 10 est dans le même esprit : il ne s'agit pas de refuser le principe sur le fond, mais de s'adapter à la crise économique extrêmement violente que les transporteurs traversent.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 192 .
Je suis atterré. S'il y a un sujet de préoccupation, c'est bien le réchauffement climatique, qui risque d'atteindre quatre degrés en quelques années ! Les jeunes risquent de connaître ce que jamais aucun homme depuis la naissance de l'humanité n'a vu se produire sur cette terre ! Il est aujourd'hui bien moins question de la petite crise que vous évoquez, effectivement importante, que du sujet qui va s'imposer à l'humanité, ce réchauffement climatique qui nous oblige à changer notre modèle !
Je suis aussi préoccupé en voyant que notre pays, après avoir depuis trop longtemps, plus de quarante ans, fait la part belle à la route, se retrouve seul ou presque en Europe à ne pas réussir à développer une alternative au transport routier, et de ce fait fragilisé face au moindre risque d'augmentation du pétrole. Il faut dire que la droite est tellement soumise au lobby de blocage… On se demande jusqu'où ils sont capables d'aller en reniant leurs propres valeurs !
Oui, je suis atterré. Si vous aviez avancé en temps et en heure sur cette mesure, elle serait en vigueur aujourd'hui et les entreprises auraient trouvé des réponses !
Et voilà !
Si vous aviez fait ce que vous aviez à faire il y a trois ou quatre ans, les entreprises de poids lourds auraient intégré la pollutaxe et elles seraient pareillement dans la crise ! On trouvera toujours un bon prétexte pour repousser sa mise en oeuvre.
Pour en revenir à mon amendement, même si je n'ai pas parlé depuis deux heures – et cela m'a manqué ! – nous souhaitons que cette pollutaxe ou écotaxe fasse reculer fortement le transport de marchandise. Son produit va donc baisser. Il faut donc, pour ne pas perdre les crédits destinés à l'AFITF et aux infrastructures alternatives à la route, conserver la capacité d'augmenter l'écotaxe.
Nous proposons de fixer une fourchette qui aille jusqu'à 10 %, en laissant le Gouvernement décider de l'évolution du taux en fonction de la réussite du dispositif sans qu'il soit besoin d'y revenir par la loi.
Nous souhaitons que cette loi réussisse, afin de faire reculer le transport routier de marchandises et de laisser la place à un autre modèle économique, solide et robuste, pour nos enfants. Le vôtre nous envoie droit dans le mur, un mur si terrifiant qu'à côté, la petite crise financière ne représente plus rien.
Les amendements nos 10 , 87 et 88 illustrent la confusion qui existe dans beaucoup d'esprits entre le taux de la taxe et les taux de la majoration. Avis défavorable.
L'amendement n° 192 traduit le souhait de pouvoir dans l'avenir augmenter le taux de la taxe. Mais la fourchette de 0 à 7 % prévue pour les taux de majoration dépend directement du barème de la taxe. On ne peut donc modifier cette fourchette que si l'on modifie le barème en même temps. Par conséquent, l'avis est également défavorable.
Cela fait tout de même de longues heures que nous travaillons sur ce texte et, comme l'a dit Mme la rapporteure, il y a toujours une confusion majeure dans l'esprit de ceux qui viennent de soutenir ces amendements. Le fondement même du texte, c'est répercussion et majoration. Autrement dit, il y a un taux de taxe et un taux de majoration. Après des heures de débat, force est de constater que vous n'avez toujours pas maîtrisé le système que nous proposons.
Surtout si vous dites n'importe quoi !
Il semble que la confirmation soit tombée : le Conseil constitutionnel viendrait de retoquer le dispositif de bonus-malus concernant l'électricité.
Au mois de septembre, nous avons passé de longues heures à vous expliquer que l'usine à gaz que vous nous proposiez était inconstitutionnelle. Je ne m'en réjouis pas : ce n'est jamais bon pour le pays, et le député à l'origine de cette disposition est un ami, quand bien même nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs, et un député de grande valeur. Mais vous nous donnez des leçons depuis un an sur un certain nombre de dossiers, vous nous en avez encore beaucoup donné la semaine dernière et cette nuit… Nous espérons simplement, pour l'AFITF et pour les projets qu'elle finance, que l'issue ne sera pas la même.
Enfin, sans polémique, je voudrais rappeler à notre collègue écologiste que le tunnel du Mont-Blanc est dans notre département, à Lionel Tardy et à moi. J'ai été pendant dix ans le député du tunnel du Mont-Blanc. Je n'ai pas de leçon à recevoir de sa part sur le combat pour l'alternative à la route. J'ai vécu de très près la catastrophe du tunnel du Mont-Blanc. J'en ai organisé en tant que maire le procès, à Bonneville, et si la taxe poids lourds est souvent identifiée à l'Alsace, elle est aussi liée au combat de toutes celles et ceux qui comme moi espèrent qu'il ne se produira plus jamais la même chose dans un tunnel. Bref, nous pouvons être en désaccord sur le fond, mais sur la forme je pense que nous sommes d'accord. Enfin, quand vous vous affichez clairement contre le canal Rhin-Rhône et contre la ligne Lyon-Turin, je vous en supplie, ne donnez pas de leçons aux autres !
Il est tout bonnement indécent de venir ouvrir un tel débat, que je ne poursuivrai pas. Nous aurons tout le temps de parler du Lyon-Turin et du canal Rhin-Rhône. Je vous prie, monsieur Saddier, d'arrêter de remettre sans cesse ces sujets sur la table, ce n'est pas le lieu. Nous trouverons d'autres moments pour en débattre.
Arrêtez de faire du populisme en affirmant des choses qui ne tiennent pas la route.
Vous lirez le document que je vous ai transmis, et vous comprendrez pourquoi il ne faut pas faire la ligne Lyon-Turin.
Je rassure M. Saddier : il semble effectivement que le Conseil constitutionnel ait invalidé le bonus-malus, non pas au prétexte que ce soit une usine à gaz, mais simplement parce qu'il aurait trouvé souhaitable de l'élargir au secteur tertiaire pour que toutes les activités soient concernées.
On peut donc penser que le bonus-malus n'est pas si mal engagé que cela. Remarquons par ailleurs que le Conseil a validé le reste de la loi. L'accès aux tarifs sociaux est donc acquis, de même que l'extension de la trêve hivernale à tous les ménages et les facilités de développement de l'éolien, qui étaient aussi des éléments importants du texte.
Mais le résultat sera le même pour l'écotaxe ! Ceci dit, c'est peut-être bien ce que souhaite le ministre…
Je vous remercie, madame la présidente, d'avoir précisé que les « amendements ventilateurs » qui nous avaient été soumis à une heure du matin ont été validés par le Conseil constitutionnel. Je ne suis pas sûr que ce soit une grande avancée pour le pays… Mais enfin, nous respectons la décision du Conseil.
L'amendement n° 12 complète l'alinéa 7 par les mots : « et ne sont modifiables que passé un délai de trois ans ». Il s'agit d'éviter une trop grande volatilité dans la fixation des taux, qui risquerait d'affecter les bilans des transporteurs routiers et de mettre un peu plus en péril leur compétitivité. Un peu de lisibilité à tout le moins semblerait de bon sens.
(L'amendement n° 12 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(M. Marc Le Fur remplace Mme Sandrine Mazetier au fauteuil de la présidence.)
Il s'agit de supprimer l'alinéa 8. Cela va dans le sens des préoccupations que nous exprimons depuis une semaine jour et nuit pour qu'il y ait équité entre le transport de proximité, l'activité économique de proximité et le périphérique.
(L'amendement n° 2 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 33 rectifié , 101 rectifié et 115 rectifié .
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir le n° 33 rectifié.
Il s'agit d'un amendement porté par Mme Lacroute, qui a beaucoup travaillé sur ce texte, notamment en commission.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l'amendement n° 101 rectifié .
C'est un amendement de Charles de Courson, que j'ai cosigné et qui va dans le sens de la simplification. À entendre le ministre à l'instant, on voit bien – mais ce n'est pas de sa faute ! – que la mise en oeuvre de l'écotaxe sera complexe. Dans le texte, seule la facture doit faire apparaître la majoration. Nous proposons qu'elle apparaisse aussi dans tous les autres documents commerciaux et contractuels, attestant que le prix de transport facturé comprend le pourcentage de majoration qui lui est applicable. L'amendement introduit donc les termes « ou tout autre document commercial établi », ce qui simplifiera bien les choses pour les entreprises.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 115 rectifié .
Cet amendement de notre groupe a pour objectif, pour des raisons techniques et financières, de retenir tout document commercial comme preuve de l'application de la majoration.
(Les amendements nos 33 rectifié , 101 rectifié et 115 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
Le présent amendement vise à permettre aux transporteurs et aux clients de conclure des accords qui tiennent compte de la taxe réellement acquittée au titre du transport effectué.
Puis-je considérer, cher collègue, que votre amendement n° 31 est également défendu ?
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 113 .
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 137 .
Amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 137 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 138 .
Amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 138 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 140 rectifié .
Amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 140 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Les auteurs de cet amendement proposent qu'un rapport soit remis, dont l'objet serait d'évaluer la mise en oeuvre de ce nouveau dispositif : on en mesure difficilement l'impact réel dans la vie économique du pays.
La première partie de l'amendement est satisfaite par l'adoption de l'amendement précédent, qui était un peu long.
La seconde partie relève de la prospective ; or c'est plutôt à la Commission européenne qu'il appartient de se livrer à cet exercice.
J'émets donc un avis défavorable.
(L'amendement n° 89 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 7, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 15 , 57 rectifié et 106 , portant article additionnel après l'article 7.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement n° 15 .
Le présent projet de loi limite le bénéfice de la compensation définie à l'article 7 au seul transport pour compte d'autrui, faisant l'impasse sur le cas d'autres acteurs économique qui, utilisateurs de la route au même titre que les transporteurs routiers, seront également redevables de l'écotaxe.
Sans rouvrir le débat ni revenir sur les raisons de fond, nous maintenons que cela introduit une véritable inégalité : le poids économique de l'écotaxe sera différent d'un type de transporteur à l'autre. Nous en revenons là aux problèmes d'assiette de l'impôt et au risque constitutionnel que nous avons évoqués.
À la suite de la décision du Conseil constitutionnel sur le bonus-malus que nous venons d'apprendre, Mme la rapporteure émettra sans doute un avis favorable sur cet amendement.
La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l'amendement n° 57 rectifié .
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 106 .
Il s'agit d'un amendement de compensation, qui vise à permettre aux entreprises de répercuter les charges acquittées sur la partie aval de leurs activités, résultant de la livraison de leurs marchandises aux clients. Le but est de forfaitiser la contribution et, évidemment, de la déconnecter du prix des transports.
L'amendement en commission CD 84 procédait des mêmes considérations.
Les entreprises qui transportent des marchandises pour leur propre compte sont effectivement à la fois transporteurs et chargeurs, mais la part du transport dans le prix qu'elles facturent à leurs clients est faible, et souvent difficilement identifiable.
Dans ces conditions, de quelle manière pourrait-on calculer et fixer des taux pour une majoration obligatoire ? Rien n'interdit à ces entreprises de répercuter la charge de la taxe sur leurs clients dans le cadre de leurs négociations contractuelles.
Avis défavorable, donc, quitte à vous décevoir, cher collègue Saddier…
(Les amendements identiques nos 15 , 57 rectifié et 106 , repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 14 , 54 rectifié et 105 .
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement n° 14 .
Je suis inquiet. Alors que le débat s'accélère, nous offrons à la majorité les dernières possibilités de se rattraper et d'éviter la catastrophe annoncée : un texte inapplicable, anticonstitutionnel, injuste. Cet amendement pourrait modestement contribuer à un rééquilibrage de ce projet de loi.
La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l'amendement n° 54 rectifié .
Mon amendement vise à limiter l'ampleur d'une rupture d'égalité, en permettant aux acteurs qui ne pourront bénéficier de la compensation prévue à l'article 7 de répercuter les charges résultant du paiement de cette majoration ou de l'écotaxe sur la partie amont de leur activité, c'est-à-dire avant que les marchandises dont elles sont propriétaires ne soient vendues.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 105 .
Cet amendement de compensation permet la répercussion a minima des charges acquittées par les entreprises sur la partie amont de leur activité, par exemple l'achat des marchandises aux fournisseurs. Il s'agit d'appliquer le système de compensation également aux livraisons effectuées en compte propre.
Prenons par exemple le cas de la distribution de proximité assurée par les grossistes-distributeurs, qui est au moins aussi important que le cas des producteurs de lait. Ce secteur est composé à 80 % de TPE, dont les marges sont équivalentes à celles réalisées par les transporteurs routiers, soit plus ou moins 1 %. Le surcroît de charges lié à l'acquittement de l'écotaxe ne sera pas moins important pour lui. Faute de compensation, ce secteur pourrait souffrir, sur le plan économique, des incidences financières de l'écotaxe, d'autant plus que le fonctionnement de la livraison de proximité a prouvé qu'il pouvait être vertueux en termes de consommation d'énergie et d'émission de CO2. C'est ainsi le cas lorsque vingt-cinq clients sont livrés par rotation de véhicule : cela évite la multiplication des liaisons directes entre vendeur et client, client et vendeur.
Nous ne demandons pas d'exonérations : ce ne serait pas supportable. Nous demandons, en revanche, que les charges puissent être répercutées. Accessoirement, cela pourrait éviter un contentieux devant le Conseil constitutionnel.
(Les amendements identiques nos 14 , 54 rectifié et 105 ne sont pas adoptés.)
Cet article est très important. Je m'étonne, en parcourant les liasses d'amendements qui nous sont remises, de voir qu'un amendement que j'avais déposé avec quelques collègues du groupe UDI et quelques collègues bretons de l'UMP n'y figure pas. Il a été pourtant examiné en commission et à aucun moment on ne m'a dit qu'il était irrecevable. Cet amendement avait pour objet de reporter l'entrée en vigueur de l'écotaxe au mois de janvier 2015. Pourquoi donc cet amendement a-t-il disparu ?
Je souhaite pouvoir entamer ici une discussion, d'autant que je ne remets en cause ni le principe d'une transition énergétique ni l'instauration en France d'une écotaxe. Simplement, je demande que nous tenions compte du contexte particulier qui est le nôtre.
Je souhaite donc que l'on puisse discuter de cet amendement ou, du moins, que l'on m'explique pourquoi il a été retiré. En commission, jamais il ne nous a été indiqué que cet amendement était irrecevable.
Ma remarque s'adresse bien sûr à vous, monsieur le ministre. J'imagine que, lorsque vous aurez terminé de lire le message que vous avez reçu sur votre téléphone, vous vous ferez un plaisir de me répondre afin que nous puissions terminer nos débats à la vitesse d'un boulet de canon.
Tout le monde se précipite pour vous répondre, monsieur Benoit. (Sourires.)
(L'article 7 bis est adopté.)
Je défends là un amendement déposé à l'initiative de mon excellent collègue Tetard.
L'article 2 du décret du 27 juillet 2011 dispose qu'« une période d'observation du trafic sur le réseau local se déroulera pendant un an à compter de l'entrée en vigueur de la taxe nationale sur les véhicules de transport de marchandises ». Cela impliquerait donc qu'une première révision puisse avoir lieu au plus tôt un an après l'entrée en vigueur de l'écotaxe. Toutefois, comme la fixation de la liste suppose de recueillir au préalable l'accord de tous les conseillers généraux concernés, il faudra certainement attendre plus d'un an. Or l'expérience montre que si aucun délai n'est fixé par la loi, ces études ont tendance à ne pas être réalisées.
Les enjeux économiques et les enjeux de report modal de cette écotaxe sont importants. Les départements et les communes, propriétaires des routes non soumises à l'écotaxe qui risquent de subir le report de trafic, seront soumis à forte pression des riverains. Ils doivent donc pouvoir répondre avec certitude quand on les interroge sur les routes retenues et les échéances de révision de la liste des routes locales taxables.
La liste peut être révisée à tout moment. Imposer que trois ans s'écoulent entre deux révisions introduit une rigidité inutile. Les collectivités territoriales sont favorables à une procédure plus souple.
J'émets donc un avis défavorable.
(L'amendement n° 75 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 7 ter est adopté.)
Cet amendement, cosigné par plus de deux cents collègues parlementaires, est plein de bon sens. Il a pour objet de créer la notion de transport routier privé de marchandises. Comment, en effet, pourrait-on taxer une marchandise qui a été vendue, achetée, louée, produite, extraite, transformée ou réparée par la même personne ? Ces faits constituent sans nul doute la notion de transport privé de marchandises, qui ne constitue pas un acte polluant, au sens de la pollution que nous combattons en créant cette écotaxe, cette taxe poids lourds.
Je le répète, c'est un amendement de bon sens, défendu par plus de deux cents collègues.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 108 .
Cet amendement, je n'en doute pas, sera repoussé. Je veux tout de même le présenter, car il s'inscrit dans la logique de tous ceux que j'ai défendus tout au long de cette séance. Je souhaitais vraiment que l'on puisse tenir compte du transport pour son propre compte, pour des raisons de justice et, notamment, pour le risque constitutionnel auquel s'expose le texte. On ne prend aucun risque à faire mieux plutôt que moins bien.
Je souhaitais également que nous puissions également définir sur le plan juridique, de façon très précise, ce qu'est le transport pour compte propre, afin de lui garantir une répercussion de la taxe dans le prix de la prestation de transport. Nous avons, vous le constatez, suivi une logique en travaillant sur ce texte, car nous voulons nous assurer qu'il sera appliqué correctement. La notion de transport pour compte propre doit donc être définie afin de permettre d'intégrer dans le prix des prestations l'impact financier de l'écotaxe acquittée ou, si ce n'est pas possible, d'intégrer la majoration forfaitaire au titre des taxes kilométriques acquittées. Si les métiers du transport pour compte propre sont très divers, il n'en demeure pas moins que les entreprises concernées doivent pouvoir répercuter l'écotaxe dans leur prix.
Même si vous n'acceptez pas, au motif que vous avez négocié avec la principale fédération professionnelle – je peux le comprendre –, cet élargissement de l'intégration dans le prix des répercussions de l'écotaxe sur ces entreprises, définir juridiquement ce qu'est le transport pour compte propre ne mange pas de pain. Imaginons que ce texte soit retoqué par le Conseil constitutionnel, ce que je ne souhaite pas. Au moins aurons-nous un cadre juridique pour prendre en compte la question du transport pour son propre compte.
Je soutiens les amendements identiques défendus par mes deux collègues, et je réitère ma question à propos de l'amendement n° 90 : monsieur le ministre, qu'avez-vous fait de notre amendement ?
Cet amendement, n° 90 , demandait la suspension immédiate de l'application et le report de l'écotaxe à janvier 2015. Il a été signé par quarante-deux parlementaires. Qu'est-il devenu ? Il devrait être abordé à ce moment de nos débats, puisqu'il tend à insérer un article après l'article 7 ter. Le but était de laisser aux entreprises, qui font face à des difficultés économiques importantes, le temps de s'adapter. Il permettrait aussi au Gouvernement de travailler à une harmonisation européenne sur la question de l'écotaxe.
Je le répète encore une fois : qu'est devenu l'amendement n° 90 ?
Monsieur le président, vous venez d'être interpellé ! J'ai été mis en cause par deux fois, d'une manière assez peu sympathique au demeurant. Mais le Gouvernement n'est pas responsable de la police des amendements ! Monsieur le président, pouvez-vous apporter des précisions aux parlementaires sur ce point ?
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 197 rectifié , qui tend à insérer un article additionnel après l'article 9.
Cet amendement porte sur la question de la dépénalisation des infractions au stationnement payant. Il a été défendu dans les termes suivants par mon collègue Denis Baupin au cours des travaux de la commission du développement durable : « Au cours de son discours sur le nouveau Grand Paris, le Premier ministre a indiqué que la hausse des amendes forfaitaires de stationnement pourrait être une source de financement pour les politiques de transport public. Cet amendement reprend des amendements quasi identiques déposés par M. Christian Philip en 2006 et par M. Roland Ries en 2009. Ce sujet fait consensus parmi les élus des grandes villes. »
Vous connaissez tous les éléments de ce débat : je ne m'y attarderai donc pas. Je laisse l'Assemblée décider de la manière dont nous pouvons faire avancer cette proposition, qui fait consensus depuis longtemps.
La question de la dépénalisation des amendes est extrêmement complexe. Le ministre a confirmé, lors de l'examen de cet amendement en commission, que cette piste est à l'étude. Elle peut susciter des inquiétudes dans les communes qui bénéficient de la répartition du produit des amendes de police recouvrées par l'État. L'avis de la commission est donc défavorable.
Comme Mme la rapporteure vient de l'indiquer, cette question est plus complexe qu'il n'y paraît. Vous avez raison de rappeler le discours très engagé du Premier ministre sur le nouveau Grand Paris. À cette occasion, il a évoqué la majoration des amendes de stationnement comme une piste de recettes supplémentaires.
Cette mesure pourra être examinée dans le cadre des prochains projets de lois de décentralisation. Quoi qu'il en soit, le Gouvernement y travaille, et examine les différents aspects de cette question avec un certain nombre de représentants des élus ; le GART, groupement des autorités responsables de transport, est notamment très actif. Les composantes de ce groupement sont unanimement favorables à la dépénalisation des amendes de stationnement, qui donnerait aux collectivités le pouvoir d'infliger des amendes au moyen de sanctions administratives.
Je rappelle que les propos du Premier ministre mentionnaient également la majoration de ces amendes. À nous de travailler pour décider si cette majoration doit être fixée par les collectivités, ou si elle doit être déterminée globalement en même temps que la dépénalisation. Autrement dit, les modalités de cette réforme ne sont pas encore totalement achevées. Je vous engage donc à retirer votre amendement. Nous continuerons ensuite nos travaux, et réglerons vraisemblablement cette question dans le cadre d'un projet de loi de décentralisation.
Je vous remercie, monsieur le ministre. Je prends note de votre position.
J'insiste sur la différence de montant entre les amendes dans les transports en commun et celles qui frappent le stationnement illicite. Cet écart est assez étonnant : les amendes pour défaut de titre de transport sont bien plus élevées que les amendes pour défaut de paiement à l'horodateur !
Cela étant, après avoir mis en lumière ces éléments, je retire mon amendement. Je souhaite que le Gouvernement s'attaque résolument à la question des infractions au stationnement payant. La sanction de ces infractions ne doit plus être conçue sur le modèle du timbre-amende, mais comme la répression d'une action bel et bien illicite.
(L'amendement n° 197 rectifié est retiré.)
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour défendre l'amendement n° 194 .
Cet amendement propose d'autoriser la mise en place de double sens cyclables dans les rues où la vitesse est limitée à 30 kilomètres-heure. À l'heure actuelle, dans les zones dites « zone 30 » par le code de la route, il est possible d'autoriser les cyclistes à prendre dans les deux sens des rues qui sont pourtant à sens unique pour les voitures. Il me semble aberrant que les élus locaux ne puissent mettre en place de double sens cyclable dans les rues à sens unique où la vitesse de circulation est limitée à trente kilomètres-heure. Il n'y a pourtant pas eu un seul accident depuis que les doubles sens cyclables ont été autorisés.
Ces aménagements permettent en outre de promouvoir l'usage du vélo, qui est une des réponses aux problèmes posés par le déplacement des personnes. Cet amendement vise donc une plus grande cohérence avec la politique générale de promotion du vélo que nous menons, notamment dans le cadre des zones 30.
Au cours des travaux en commission, M. Baupin a bien voulu retirer cet amendement, dans l'attente du Plan national vélo et des travaux qui seront menés dans ce cadre.
Certains parlementaires, dont M. Lambert, s'intéressent à l'ensemble du projet de loi : ils sont attentifs à tous ses articles – il n'y a pas que l'article 7 dans la vie ! Dans ce texte, en effet, il n'y a pas que l'écotaxe, il y a aussi d'autres mesures importantes.
Le groupe de travail sur le plan vélo permettra de creuser ce type de questions particulièrement sensibles. En effet, comme je le disais hier, les questions de conflits d'usage, de sécurisation, d'adaptation et d'adaptabilité de la réglementation selon les espaces, les lieux et les sites, feront partie de cette réflexion dont chacun pourra prendre sa part. Monsieur Saddier, votre formation politique y contribuera également. Peut-être même y sera-t-elle représentée par un sénateur UMP ? (Sourires.)
Je prends tout cela comme une marque d'intérêt pour la politique de mobilité et les enjeux du vélo. Sachez bien que nous donnerons suite à vos demandes dans les semaines à venir. Ces amendements serviront de base à notre réflexion commune.
Je note que notre demande ne semble pas si décalée. J'ai développé cet argument tout à l'heure : je n'y reviendrai pas.
Dans le souci de préserver le travail collectif qui sera mené dans le cadre du groupe de travail sur le plan vélo, je retire cet amendement. J'espère que le jour où nous nous retrouverons pour discuter de ce plan vélo viendra rapidement.
(L'amendement n° 197 rectifié est retiré.)
Monsieur le président, je n'avais pas prévu de prendre la parole sur cet article. Je comptais intervenir sur l'amendement n° 197 rectifié présenté par notre collègue François-Michel Lambert, mais puisque celui-ci l'a retiré, je n'ai pu le faire.
Je ne parle pas depuis cinq minutes : je sens que cela manque à M. le ministre ! (Sourires.) Je vous confirme, monsieur le ministre, que nous nous intéressons à l'ensemble du texte. Je l'ai démontré hier soir par mon intervention au cours de la discussion générale : j'ai autant parlé des remontées mécaniques, du transport fluvial et du vélo que de l'écotaxe. Nous avons tous joué le jeu : nous aurions pu reprendre les amendements portant sur la question du vélo qui ont été retirés.
À ce sujet, monsieur le ministre, nous aurions besoin d'un peu plus de précisions : vous ne nous avez toujours pas répondu au sujet du délai dans lequel le groupe de travail commencera ses travaux. Au-delà de la boutade, tolérerez-vous qu'un député UMP fasse partie de groupe de travail ? Vous m'avez tendu la perche, monsieur le ministre ; je la saisis, et vous interpelle donc à nouveau sur ces deux points : vous l'avez bien cherché ! Quand pourrons-nous enfin nous réunir pour parler du vélo ? Le groupe UMP aura-t-il l'honneur et l'avantage de participer à cette réflexion ?
(L'article 11 est adopté.)
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 141 .
Cet amendement est rédactionnel.
(L'amendement n° 194 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 11 bis est adopté.)
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 216 du Gouvernement, portant article additionnel après l'article 14.
Je serai bref, comme M. Saddier m'y invite. Cet amendement permet le transfert à titre gratuit de la propriété d'un certain nombre de sites appartenant à Voies navigables de France, en vue de leur valorisation. Ces dossiers sont bien entendu suivis en lien avec les collectivités territoriales, et nécessitent que des dispositions d'ordre législatif soient prises. Nous avons donc profité de l'occasion qu'offrait l'examen de ce texte et saisi cette perche – je dis cela à l'attention de M. Saddier que je sais, en bon montagnard, particulièrement attaché aux remontées mécaniques (Sourires) – pour prendre les mesures législatives nécessaires à ces huit projets qui sont très sensibles et très importants pour la requalification urbaine.
J'aimerais que les choses soient claires : je vois le regard interrogatif de M. Saddier et je ne voudrais pas qu'il y ait quelque incompréhension entre nous, car il n'y en a eu que trop jusqu'à présent.
Il s'agit d'un transfert à titre gratuit à Voies navigables de France, à charge pour VNF de valoriser ce patrimoine. Peut-être n'avais-je pas été suffisamment précis.
(L'amendement n° 216 , accepté par la commission, est adopté.)
J'y renonce, monsieur le président, de même que sur les articles suivants 16 à 21 bis.
(Les articles nos 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21 et 21 bis sont successivement adoptés.)
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 214 .
Peut-être voulez-vous que je l'explique, monsieur le ministre ? (Sourires.)
Vu votre « maritimité », je ne préfère pas ! (Sourires.)
Par cet amendement, je propose de mettre en place des instances chargées d'orienter la politique portuaire dans les ports nationaux ou décentralisés, afin de parvenir à une forme d'homogénéisation des structures de gouvernance.
Il s'agit d'un amendement d'appel. En effet, une mission a été confiée à votre collègue, M. Leroy, mission qui est chargée de contrôler l'efficacité économique et la compétitivité des ports et des services maritimes et de réfléchir à la mise en place de structures qui rendraient plus efficace encore l'organisation portuaire.
(L'amendement n° 214 , accepté par la commission, est adopté.)
À l'article 22, je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 178, de la commission.
(L'amendement n° 178 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 22, amendé, est adopté.)
Cet article 23 concerne la régulation du cabotage maritime national.
L'Union européenne a ouvert le transport maritime en 1986, puis le cabotage maritime en 1992 à la concurrence européenne, mais les États membres ne se sont pas mis d'accord sur les critères communs d'immatriculation de leurs navires. Certains ont abaissé leur pavillon au standard international, y compris pour ce qui concerne le cabotage européen, instaurant ainsi une concurrence déloyale avec les navires immatriculés en France au pavillon de premier registre. Cela a eu pour conséquence de mettre à mal l'activité et l'emploi maritimes en France.
Or la situation s'aggrave en raison des distorsions de concurrence entre armateurs avec l'existence, en Europe, de véritables pavillons de complaisance. C'est ainsi que la compagnie Corsica Ferries a pu rafler, en son temps, à la SNCM les deux tiers du trafic vers la Corse, et cela grâce à des prix cassés. Pourtant, l'enregistrement sous le pavillon du premier registre français assure un haut niveau de garantie en matière de sécurisation et de droits des salariés. À l'inverse, des entreprises basées dans un autre État membre peuvent immatriculer leurs navires sous des pavillons équivalents à des pavillons de complaisance. Ainsi, des entreprises d'armement remplacent des équipages de marins sous statuts nationaux par des marins communautaires ou issus de pays tiers, afin de les employer à bas coût et à des conditions sociales minimales, selon les normes internationales en vigueur.
Ces normes tendent, au final, à devenir la règle en Europe et en France grâce à la création de pavillons sous registre international. Se dessine, ainsi, une harmonisation par le bas du secteur maritime sur fond de mondialisation et de libéralisation des échanges. Ces pavillons peuvent, par conséquent, afficher des coûts de transports 40 % moins cher. Des navires qui battent pavillon français ont la possibilité de naviguer sans plus aucun marin français à bord, les conditions sociales étant minimales et précaires.
Mes amendements ont justement pour objectif de faire reconnaître le pavillon français sur le territoire français, en particulier quand il s'agit d'entreprises et de services réguliers internes à notre pays, voire de cabotage sur nos côtes.
Sur l'amendement n° 212 rectifié , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Sur l'article 23, je suis également saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 210 .
Cet amendement et les amendements suivants poursuivent le même objectif, à savoir le renforcement des règles applicables et l'affaiblissement du registre international français. Leur conséquence serait double : violer les règles européennes et faire condamner la France par Bruxelles ; priver de toute compétitivité les armements français.
Le texte va aussi loin que le permet le droit européen. Il est aussi ancré dans la réalité. C'est une avancée sociale et personne ne gagnerait rien à provoquer sa censure par jusqu'au-boutisme.
J'invite donc le groupe GDR à retirer cet amendement, à défaut j'en demanderai le rejet.
Je souhaite être précis concernant l'enjeu de l'article 23 parce que je ne voudrais pas qu'il y ait d'ambiguïté. Si nous devons ici interpréter des règles européennes, nous souhaitons en effet aller jusqu'au bout de ce qui est eurocompatible pour assurer une concurrence loyale et pour en finir avec ce qui, depuis un certain nombre d'années, fragilise la compétitivité de nos compagnies.
L'article 23 renforce le dispositif actuel qui a fortement évolué, notamment depuis la mise en oeuvre de la libéralisation du cabotage. Nous souhaitons garantir des conditions de commerce équitable entre les entreprises maritimes qui opèrent sur les mêmes lignes en renforçant particulièrement les contrôles à bord du navire. Cette mesure concernera notamment les lignes desservant les îles dans le cadre d'un service de transport maritime régulier, de certains services maritimes dans nos eaux territoriales, de l'installation de champs d'éoliennes, ou d'autres services en mer.
Si nous voulons rapprocher les exigences de notre propre législation de celles applicables aux bateaux battant autre pavillon, mais qui naviguent dans nos eaux territoriales, c'est parce qu'à ce jour, nous n'avons pas une concurrence loyale. Vous me répondrez, monsieur Chassaigne, qu'il convient de réserver au pavillon de premier registre l'accès à nos mers intérieures ou autres liaisons nationales. C'est sur ce point que parfois nous nous comprenons difficilement avec certaines organisations syndicales. En effet, si nous exigeons le pavillon de premier registre, nous serons dans l'euro-incompatibilité, puisque tout autre pavillon sera exclu de l'activité maritime.
En revanche, faire en sorte que ceux, quel que soit le pavillon, qui assurent des services dans nos eaux territoriales soient soumis aux règles sociales les plus proches de nos propres règles nous place dans un cadre juridique eurocompatible.
On pourra toujours nous répondre que c'est insuffisant et qu'il faut rejeter cet article 23. Ce serait alors laisser perdurer une situation plus dégradée encore. Or ce Gouvernement est le seul qui, depuis longtemps, soit allé aussi loin.
C'est une réalité ! Jamais il n'y a eu de dispositif législatif permettant d'aller aussi loin pour garantir des règles sociales applicables à notre pavillon et aux pavillons extérieurs qui assureraient des liaisons maritimes ou autres activités telles que les services maritimes dans nos eaux territoriales.
Cet article apporte donc une garantie supplémentaire. Nous essayons, par ce biais, d'éviter les concurrences déloyales et de renforcer le pavillon français, les règles françaises et l'emploi français dans nos ports et dans nos compagnies !
Je remercie Mme la rapporteure et M. le ministre pour leurs explications. Je connais sans doute beaucoup moins bien le dossier qu'eux !
Vous dites, monsieur le ministre, faire le maximum. Il serait essentiel de préciser ce que cela représente concrètement. Cela signifie-t-il que l'on pourra avoir, sur des bateaux battant pavillon français, des équipages étrangers, ce qui est déjà le cas depuis la mise en oeuvre de la directive Bolkestein ?
En accordant certains avantages à ces salariés, on respecterait les règles européennes. Je m'en suis entretenu, comme vous d'ailleurs voilà quelques jours, avec une organisation syndicale : celle-ci considère que rien n'interdit à un pays d'imposer des règles sociales et fiscales spécifiques dans la mesure où ces règles concernent des activités régulières dans le pays, à l'exemple de celle où règne la concurrence entre Corsica Ferries et la SNCM. Il en va de même d'ailleurs pour le cabotage sur nos ports. Il y a donc là une différence d'interprétation entre nous.
Je conclus, monsieur le président, encore que je n'interviendrai pas sur tous nos amendements – j'aurais d'ailleurs bien du mal ! (Sourires.)
Ce qu'elle soutient, c'est qu'il est juridiquement envisageable de légiférer pour inscrire de telles règles, ce qui aurait de grandes conséquences sur l'ensemble de l'activité maritime française.
Souffrez, monsieur le président, que nous prenions un peu de temps sur des dispositions importantes. Ce n'est pas parce que ce sont des questions maritimes que nous ne devons pas leur accorder tous les égards et tout le temps nécessaire.
Vous-même n'avez pas manqué, il y a quelques instants, de faire en sorte que le débat ne soit pas bâclé.
Je ne mets pas du tout en cause votre présidence, monsieur le président,…
J'espère bien ! Le ministre, en tout cas, parle aussi longtemps qu'il le veut.
…mais il y a un dédoublement de la personnalité. Le M. Le Fur qui était là-bas n'est pas le même que le président qui est là.
Je me permets de le souligner, car je ne souhaiterais pas que la qualité du débat pâtisse du fait que du temps ait été monopolisé pour éviter une incompréhension et rendre lisible le dispositif de l'écotaxe poids lourds.
Vous avez tout le temps que vous voulez, monsieur le ministre. Il en est toujours ainsi.
Du coup, nous venons de passer assez rapidement sur des articles extrêmement importants, et certains parlementaires sont sans doute quelque peu déçus que l'on n'ait pas porté autant d'attention à la sécurité ferroviaire. Je n'avais pas cité hier le nom de M. Savary, car je savais que je pourrais souligner son intervention et les observations qu'il a faites aujourd'hui pour montrer tout l'intérêt du texte.
Nous avons parlé du fluvial, pour lequel nous avons également pris des dispositions, et nous en venons au maritime et au social. Il est important que nous prenions notre temps. Certes, ces différents articles ne sont pas sous les projecteurs de l'actualité, mais méfions-nous : faute de traiter ces questions, l'actualité sociale pourrait peut nous rattraper, et je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté. Vous avez donc raison, monsieur Chassaigne, de demander plus de précision.
L'article 23 impose le respect d'un certain nombre de règles sociales du code des transports à tous les navires, y compris ceux qui sont sous pavillon tiers.
Il est demandé que, dans les eaux territoriales, un certain nombre de règles sociales essentielles, les règles dites de l'État d'accueil, soient respectées par tous les opérateurs, quel que soit le pavillon, et j'ai expliqué aux organisations syndicales, mes collaborateurs également, que ce dispositif allait au-delà des conditions prévues par le décret du 16 mars 1999.
La loi élargit le champ d'application à l'ensemble des personnes travaillant à bord, notamment les personnels du service général, qui, jusqu'à présent, n'étaient pas couverts.
Il est imposé aux navires, quelle que soit leur nationalité, un certain nombre de règles relatives à l'équipage, qui concernent sa nationalité et sa composition. Je pense en particulier au traitement équivalent aux navires de premier registre français.
Il y a aussi des règles ayant trait à la protection sociale, et je réponds précisément à votre demande d'éviter que certains personnels ne bénéficient que d'un régime minimal de protection sociale relevant de l'un des pays de l'Union européenne. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.
S'agissant des règles relatives au contrat de travail, les mentions obligatoires dans la convention collective applicable aux personnels à bord dans les compagnies étrangères sont également un plus.
L'article traite aussi des droits des salariés, de l'application des dispositions légales ou des stipulations conventionnelles pour les marins employés par des entreprises de la même branche d'activité établies en France.
Quant aux conditions relatives à la langue de travail à bord, elles doivent être conformes à la convention internationale STCW.
C'est donc, vous le voyez, un article exhaustif. Vous préconisez une rédaction, les organisations syndicales une autre, le groupe communiste du Sénat une troisième. Nous essayons de faire la synthèse, et nous le faisons volontiers car nous voulons éviter toute difficulté. Ce que nous souhaitons, c'est que le droit social soit à la fois le plus protecteur possible et le plus applicable aux compagnies, notamment aux compagnies tierces.
Enfin, il y a des documents qui doivent être disponibles à bord et présentés aux autorités de contrôle.
Ces règles sont étendues aux navires de prestations de services – c'est le cas de l'éolien off-shore, comme je l'ai dit, mais aussi d'autres prestations –, et sont assorties de sanctions dont l'armateur est passible en cas de non-respect de ses obligations.
Nous vous proposons donc le dispositif le plus complet qui soit ; il n'est peut-être pas parfait, j'en conviens, mais chacun est dans son rôle. Les organisations syndicales souhaitent aller plus loin, mais il ne serait pas responsable de notre part de prétendre qu'un dispositif plus exigeant soit à l'abri d'une annulation pour non-respect des dispositions européennes. Nous sommes allés jusqu'aux frontières de ce qu'il était possible de faire en matière de régime social notamment, de sécurité, de contrôle et de sanction, car le pavillon français, vous le savez, est particulièrement attaqué, notamment pour son activité « ferries ».
Dois-je rappeler le dossier SeaFrance, qu'il m'a fallu régler, et qui comportait la liquidation d'un pavillon français, d'une société nationale publique, deux vagues de licenciements concernant 1 500 emplois en tout ? Nous avons fait en sorte que puisse être relancée la SCOP MyFerryLink. Les salariés, les ouvriers ont décidé ensemble de ne pas baisser les bras, de ne pas accepter le traitement qui leur avait été réservé en d'autres temps par manque de volonté politique ou de décision responsable.
La compagnie Brittany Ferries est confrontée parfois aussi à des difficultés. Quant à la SNCM, nous connaissons les difficultés qui la guettent, nous savons quels sont les enjeux. Dès le premier jour, j'ai eu à coeur d'organiser une concertation avec l'ensemble des partenaires, y compris les organisations syndicales, directement ou par le biais de mes collaborateurs et de l'administration. Je souhaite que nous prenions toutes les garanties pour défendre le pavillon français.
Je disais tout à l'heure qu'un rapport serait demandé à Arnaud Leroy sur la compétitivité du pavillon français, un rapport sur l'organisation des ports étant confié à un autre parlementaire. Arnaud Leroy aura pour mission de lever tous les obstacles à la compétitivité du pavillon français, car il s'agit de l'emploi français.
S'agissant d'Armateurs de France - et je conclurai sur ce point, monsieur le président –, il est important que le monde maritime se retrouve dans les enjeux du débat. Il serait tout de même incompréhensible que, dans la presse, on ne voie pas d'interventions de députés bretons.
J'expliquerai donc, monsieur le président, que vous présidiez cette séance et que vous ne pouviez donc prendre la parole et voir votre nom mentionné au Journal officiel. En revanche, pour les avoir reçus à plusieurs reprises, je puis témoigner que les députés socialistes bretons que vous avez mis en cause tout à l'heure ont été très actifs pour améliorer le texte sur l'écotaxe poids lourds.
Ils ont fait leur travail, et celui-ci n'a pas lieu que dans l'hémicycle. Il y a un travail en commission et à mon ministère. Ce n'est pas parce que M. Le Fur ne les a pas vus, faute d'être venu en commission, que les députés n'ont pas travaillé. Ceux dont le nom a été cité ont bien travaillé, je puis en attester et je leur rends hommage.
Bref, monsieur Chassaigne, nous nous efforçons que cet article 23 soit le plus efficace possible pour défendre l'emploi français.
Je précise d'abord que je demanderai un scrutin public uniquement sur l'article dans son ensemble et non sur les différents amendements, sur lesquels, d'ailleurs, je ne reviendrai pas.
Je voudrais insister sur deux points, monsieur le ministre, pour essayer de bien comprendre.
S'agissant d'abord du choix du pavillon par un armateur, quelle est la limite ? La convention de Montego Bay stipule en son article 91 que : « Chaque État fixe les conditions auxquelles il soumet l'attribution de sa nationalité aux navires, les conditions d'immatriculation des navires sur son territoire et les conditions requises pour qu'ils aient le droit de battre son pavillon. » À partir de là, il semble que le droit de l'Union européenne doive reconnaître le principe qu'un État est libre ou non d'accepter tel ou tel pavillon. Les informations que je donne sont tirées d'un récent rapport d'un cabinet indépendant qui a travaillé sur ces questions.
La Cour de justice de l'Union européenne a constamment affirmé qu'un État membre conservait le droit de prendre des mesures visant à empêcher des prestataires de tirer parti de façon abusive des principes du marché intérieur. Les abus de la part d'un prestataire devraient être établis au cas par cas, l'intégration en droit interne de la directive sur les contrôles dans le port de l'État d'accueil va dans ce sens.
Je reviens aux explications très précises que vous nous avez données sur les règles sociales qui sont imposées.
La question est de savoir quelle est la portée de ces règles sur l'État d'un pavillon. L'État français a-t-il la possibilité d'interdire à un armateur de choisir le pavillon d'un pays étranger si ce pavillon ne respecte pas les règles sociales que vous venez de définir ? Le problème se situe bien à ce niveau, et les conséquences sont énormes, qu'il s'agisse de la traversée de la Manche, de la liaison avec la Corse ou du cabotage de fret. Je ne veux pas revenir sur les différents points, mais c'est, je crois, le problème fondamental : quelle sera la portée des exigences que vous affirmez ?
Vous avez raison, monsieur Chassaigne, c'est précisément là que nous avons des appréciations juridiques divergentes, mais qui ne portent pas sur l'objectif recherché : accroître le niveau d'exigence.
Il y a un droit international qui s'applique, et un règlement européen du 7 décembre 1992 sur le cabotage maritime qui concerne l'application du principe de la libre circulation des services aux transports maritimes à l'intérieur des États membres. Pour mémoire, c'est un règlement qui permet la libre prestation des services de transport maritime à l'intérieur d'un État membre pour les armateurs relevant d'États membres de l'Union européenne exploitant des navires immatriculés dans un État membre et battant pavillon de cet État membre, sous réserve que ces navires remplissent toutes les conditions requises pour être admis au cabotage dans cet État membre.
C'est là qu'intervient l'article 23. D'une part, nous relevons le niveau d'exigence des règles opposables à l'armateur. De l'autre, nous facilitons les contrôles, notamment par l'inspection du travail. Ainsi sera mieux prise en considération la réalité sociale, celle des marins comme des autres personnels des navires, et la concurrence dans les activités maritimes concernées ne sera pas faussée.
Nous poursuivrons les discussions avec les organisations syndicales. Nous en avons eu d'approfondies avec toutes celles du transport routier : FNTR, SEPTR, TLF… J'en ai également, pour le maritime, avec toutes les organisations. Je suis allé à Marseille et j'y retournerai pour les rencontrer de nouveau. Elles ont déjà noté elles-mêmes le changement que représentait un ministre s'intéressant, je ne dirai pas aux revendications, mais aux contributions des différents syndicats ou représentants de salariés, qui sont parfois, comme à la SNCM, actionnaires de leur société et ont un intérêt direct à sa compétitivité.
Tels sont, monsieur Chassaigne, les précisions que je souhaitais vous apporter.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 219 .
Nous essayons, monsieur Chassaigne, d'adapter par voie d'amendement ce qui représente une position mouvante. Je ne vous en fais pas grief…
Vous savez que je suis un grand spécialiste de ces questions ! (Sourires.)
S'agissant du maritime, il n'est pas impossible que les choses soient mouvantes (Sourires) ; ce n'est en rien critiquable.
Il s'agit des textes auxquels il est fait référence pour ces fameuses conditions sociales. Lors de la discussion au Sénat, une sénatrice du groupe communiste a proposé par amendement une formulation à laquelle le Gouvernement s'est rangé, considérant que le texte en serait rendu plus compréhensible et serait moins contesté par les personnes concernées.
Or, il semblerait que les organisations syndicales évoquent un risque de références incomplètes. Par conséquent, nous reprenons l'énumération exhaustive des différents documents. Nous essayons ainsi de produire le texte le plus sécurisant et le plus susceptible de s'adapter et de répondre aux exigences communes.
J'en suis désolé !
Toutefois, on ne peut pas dire que ce soit une complète découverte, puisqu'il s'agit de la rédaction initiale du projet de loi, précédemment modifiée par le Sénat. Je note que le Gouvernement avait émis un avis favorable à l'initiative sénatoriale. J'ai moi-même écrit dans mon rapport que cette évolution rédactionnelle, sans changer grand-chose au fond, me paraissait aller dans le bon sens. Cela dit, il ne s'agit que d'une évolution rédactionnelle, et je crois comprendre que les partenaires sociaux ont sollicité un retour à la version initiale, qu'ils jugent, je ne sais pourquoi, plus sécurisante. C'est aussi le rôle du législateur de respecter le dialogue social, surtout quand le fond de la loi n'en pâtit pas. Ainsi, bien que la commission du développement durable ne se soit pas prononcée, je dirai qu'à titre personnel je ne suis pas défavorable à l'amendement.
(L'amendement n° 219 est adopté.)
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 211 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 211 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 212 rectifié .
Il est également défendu, et je renonce au scrutin public.
(L'amendement n° 212 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 180 .
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 180 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je mets aux voix l'article 23, tel qu'il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 44
Nombre de suffrages exprimés 38
Majorité absolue 20
Pour l'adoption 36
contre 2
(L'article n° 23, amendé, est adopté.)
La parole est à M. André Chassaigne, pour présenter l'amendement n° 213 visant à insérer un article additionnel après l'article 23.
Il est défendu.
(L'amendement n° 213 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l'amendement n° 217 visant à insérer un article additionnel après l'article 24.
Il s'agit de rendre possible le traitement d'une situation de personnel sur l'aéroport de Toulon-Hyères, en donnant une suite à la concession, en cours de réattribution.
Non.
(L'amendement n° 217 , accepté par la commission, est adopté.)
À l'article 24 bis, la parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 198 .
L'article 24 bis a été introduit en commission par entre autres notre collègue Gilles Savary. Il s'agit d'un article très important. Dans la discussion générale, j'ai expliqué que le transport de marchandises n'était pas une filière en soi, mais une activité support de l'activité économique, permettant de mettre en relation producteur et consommateur. De ce fait, l'activité de transport de marchandises et, plus généralement, la logistique sont des activités liées à la capacité de structurer ou déstructurer le territoire. Notre seule réponse ayant été le transport routier, nous sommes aujourd'hui une France affaiblie.
Il est primordial de mettre en oeuvre le schéma directeur national de la logistique pour enfin poser les bases du constat et définir, notamment en termes d'aménagement du territoire, les moyens d'optimiser les flux de marchandises dans notre pays, afin que ceux-ci soient au service de la création de valeur et que soit réduit leur impact sur l'environnement et la santé de nos concitoyens.
Toutefois, dans sa rédaction actuelle, l'article 24 bis peut laisser entendre que la logistique se résume au seul transport, alors que ce dernier est au service d'une organisation logistique où les aspects territoriaux sont essentiels. Le présent amendement, rédactionnel, s'inscrit dans cette vision élargie de la logistique, en prévoyant que les gestionnaires d'infrastructures, plateformes et autres, seront associés à la conférence nationale sur la logistique et, par là même, que trouvent toute leur place les composantes de la réflexion sur la mise en oeuvre d'un schéma des « segments », tels que la logistique urbaine et la logistique portuaire, qui prennent de plus en plus d'importance, sans même parler de l'expertise que nous avons en France en matière de logistique territoriale.
Favorable.
Cet article est un ajout parlementaire au texte proposé par le Gouvernement. Je remercie l'ensemble des collègues qui l'ont soutenu, sur tous les bancs. Il s'agit d'adopter une perspective un peu différente de celle à laquelle nous avons sacrifié cet après-midi – mais c'était bien normal – et qui consiste à appréhender les modes de transport de façon séparée.
C'est peut-être là un des handicaps français, alors que nous avons beaucoup d'atouts en matière de transport, dans tous les domaines. Il s'agit d'ailleurs un pôle de compétitivité pour lequel il faut que nous soyons efficaces, car bientôt apparaîtront des concurrents en provenance du Sud-Est asiatique. Nous sommes forts dans l'aérien, le maritime, le ferroviaire, l'urbain… En revanche, nous sommes moins avancés que nos amis allemands et néerlandais dans la prise en compte du trajet de la marchandise, c'est-à-dire dans une optimisation de la marchandise raisonnant de façon intermodale et évitant le manichéisme du style : « Le train, c'est beau ; les camions, ce n'est pas beau… » Le remplacement des camions par des trains a échoué en effet, malgré tous les efforts menés depuis les années 2000 à l'instigation de la Commission européenne.
Il s'agit plutôt d'optimiser les modes de transport, de développer une approche plus intermodale. Certains de nos ports, et la plupart de nos aéroports, ne sont pas encore reliés au ferroviaire. Si nous avons pris du retard, c'est parce que les puissantes compagnies que nous avons dans chacun des secteurs sont restées trop isolées les unes des autres, alors que les Allemands et les Néerlandais ont développé des stratégies logistiques nationales.
C'est ce que nous avons demandé au Gouvernement, et je suis heureux qu'il l'accepte. Une clause de rendez-vous a été prévue pour réunir l'ensemble des partenaires dans une conférence logistique, afin de développer une autre approche du transport, une approche d'optimisation de notre compétitivité logistique visant à transporter les marchandises au moindre coût et de la façon la plus efficace.
En commission, nous avons eu un débat tardif, mais très intéressant, sur la filière logistique. Avec Jean-Marie Sermier, nous nous sommes associés à cette réflexion en soutenant l'amendement. La filière logistique est une filière économique à part entière ; elle est absolument indispensable et peut être source de croissance économique comme de progrès environnementaux. Elle s'inscrit de ce fait dans le développement durable, qui nous réunit tous. Nous ne pouvons donc que soutenir tout ce qui va dans le sens d'une meilleure structuration de la filière logistique dans notre pays.
(L'amendement n° 198 est adopté.)
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 199 .
Nous proposons d'ajouter : « de déterminer les besoins pour les années à venir ». C'est un complément qui exprime l'absolue nécessité d'être en prospective et en dynamique dans la création de ce schéma directeur national de la logistique.
(L'amendement n° 199 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 179 .
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 179 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 221 portant article additionnel après l'article 24 bis.
Nous en revenons à une discussion antérieure, puisque cet amendement avait été retiré un peu rapidement. Or son adoption est nécessaire pour remédier à la situation créée par la décision du 6 avril 2012 du Conseil constitutionnel, qui a censuré les articles L. 15-1 et L. 15-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et laissé au législateur jusqu'au 1er juillet 2013 pour les remplacer.
Vous vous souvenez peut-être que l'amendement avait été retiré en commission, car la chancellerie travaillait en parallèle à affiner sa rédaction. In fine, un texte commun a été rédigé, fruit d'un travail de concertation et témoin, partant, du respect du Gouvernement pour le Parlement. Vous l'avez constaté dans notre texte et vous le voyez à nouveau à l'occasion de cet amendement, alors qu'il s'agit de corriger des malfaçons et d'appliquer des décisions imposées par le Conseil constitutionnel.
La QPC, ça marche !
(L'amendement n° 221 , accepté par la commission, est adopté.)
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 177 à l'article 25.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 215 portant article additionnel après l'article 25.
Comme vous le savez, le Gouvernement a annoncé sa volonté de simplifier, de provoquer ce « choc de simplification »…
…et d'efficacité de l'action administrative, dont cet amendement est une illustration. Il mérite à ce titre que nous passions un peu de temps à l'examiner, mais je vais essayer d'être aussi clair que concis sur la nécessité de créer un nouvel établissement public administratif : le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement – CEREMA. Ce centre veut traduire concrètement notre ambition de simplification, puisqu'il rassemblerait les huit CETE, le CERTU que je ne présente plus, le CETMEF et le SETRA.
M. Savary a rappelé l'importance qu'il y avait à déterminer les enjeux de stratégie. Précisément, il nous sera profitable de disposer d'un organisme qui centralise toutes les expertises scientifiques ainsi que les différents points de vue, afin d'élaborer, de mettre en oeuvre et d'évaluer les politiques publiques d'aménagement, de développement durable et de mobilité. Cela se fera d'une façon transversale, avec l'appui de scientifiques et de techniciens, forts de la qualité généralement reconnue aux organismes actuels. Rassemblons, mutualisons, donnons à l'ensemble du territoire les moyens d'atteindre ce niveau élevé d'expertise.
La simplification des procédures se double ici d'une approche intermodale de globalisation des enjeux du transport : la commission du développement durable ne peut que soutenir ces deux aspects. D'ailleurs, monsieur le ministre, nous avons en Haute-Vienne, dont je suis l'élue, des espaces disponibles pour les futurs centres. Avis favorable.
Pour un hommage à la politique du Gouvernement !
Il me reste quatre ans pour essayer de trouver des raisons de rendre hommage à la politique du Gouvernement… Rien n'est donc perdu ! (Sourires.)
Monsieur le ministre, votre intention est probablement louable mais, à ce stade, nous n'avons pas eu de réponse très précise en commission sur le périmètre, les moyens ou les économies de ce futur CEREMA. Hier soir déjà, j'ai dit que vous vous précipitiez, alors que nous travaillons à des lois de décentralisation, pour créer un organe central qui risque de ne pas être adapté à toutes les compétences qui seront décentralisées au fil des trois grandes lois prévues. Vous vous réfugiez une nouvelle fois derrière le choc de simplification,…
…mais, lorsque nous avons débattu de ce sujet en commission, le choc de simplification n'était pas encore à l'ordre du jour. Il y aurait donc lieu de réfléchir un peu plus, afin d'assurer la cohérence avec les lois de décentralisation à venir.
Depuis votre arrivée au pouvoir, on ne compte plus les études, les missions, les regroupements – un exemple en étant ce commissariat à l'égalité des territoires créé la semaine dernière. Non seulement ce ne sont que des annonces, mais ces multiplications de structures nouvelles ne semblent pas aller vers le choc de simplification annoncé.
On regroupe ! Vous devriez vous en réjouir !
En application de l'article 101 du règlement, le Gouvernement demande à ce qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 2 du projet de loi.
La seconde délibération est de droit.
Je rappelle que le rejet par l'Assemblée des amendements présentés en seconde délibération vaut confirmation de la décision prise par l'Assemblée en première délibération.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 1 à l'article 2.
Il arrive parfois que la présidence soit un peu rapide. C'est ce qui s'est passé lors de l'examen de l'article 2, alors que nous étions au tout début de ce grand voyage, où il était question de l'écotaxe poids lourds et de ses enjeux. Je ne remets pas en cause la présidence, qui est souveraine, mais sa décision a été contestée par un certain nombre de parlementaires. Nous avons donc jugé préférable de pouvoir délibérer de nouveau, afin de revenir à la rédaction antérieure de l'article 2.
Il est quelque peu désagréable de votre part de remettre en cause mon excellente collègue, Mme Vautrin, qui est retenue cet après-midi à cause de circonstances très difficiles.
Quel est l'avis de la commission ?
J'ai eu l'occasion de le rappeler ce matin : il est de tradition dans cette maison de ne pas remettre en cause la présidence. Je ne dis pas que ce soit le cas, monsieur le ministre, mais vous avez tout de même évoqué sa décision « un peu rapide ».
Ce sont collègues qui n'ont pas levé la main parce qu'ils étaient endormis !
Nous sommes un certain nombre à pouvoir témoigner que, ce matin, la présidence – c'est à dessein que je ne la nomme pas – a demandé à deux reprises aux députés présents de lever la main pour indiquer s'ils étaient pour ou contre : il n'y avait aucune ambiguïté. Nous avons voté pour, aucune main ne s'est levée contre sur les bancs de la majorité : l'amendement a été adopté.
C'est un simple incident !
Sans polémiquer davantage, je dirai que la discussion de ce matin a été très calme et que, s'il est admis que la présidence ne doit pas être mise en cause, il est de droit que le Gouvernement puisse demander une deuxième lecture, d'autant plus importante en l'occurrence.
Je vous en remercie d'ailleurs, monsieur le ministre, car avions déposé cet amendement davantage pour susciter une discussion que pour le faire adopter. Nous avons été, sur tous les bancs mais peut-être à tort, saisis par des inquiétudes relatives à l'irruption de la région en tant que nouveau partenaire. Vous nous avez confirmé ce matin que nous n'avions pas de raisons d'être inquiets et que vos services ainsi que l'administration seraient vigilants : je vous en remercie. Je considère à titre personnel qu'il n'y a pas eu d'incident ou que, du moins, il est clos, mais je compte sur votre vigilance, monsieur le ministre. Si je suis favorable à ce que la région puisse contribuer à améliorer le transport frontalier ou transfrontalier, c'est à une condition : que cela ne retarde pas ce que nous avons passé tant d'années à mettre en oeuvre sur le terrain. C'est dans cet esprit que j'étais déjà intervenu ce matin.
Monsieur le ministre, peut-être souhaitez-vous vous excuser pour clore l'incident ?
Monsieur le président, qu'il soit bien clair que je ne m'excuse pas d'avoir mis en cause la présidence, car je ne l'ai pas fait et il n'y avait pas lieu de le faire. Il se produit parfois des situations un peu rapides et confuses, mais il ne s'agit que d'un incident de séance. Nous avons donc fait usage d'un droit qui est le nôtre pour demander une seconde délibération.
Cela n'a pas été « rapide », monsieur le ministre : il y a eu deux appels de la présidence. Les choses ont été on ne peut plus claires. Cela dit, vous avez parfaitement le droit de demander une seconde délibération au nom du Gouvernement, sans qu'il soit besoin de faire appel à des causes qui n'existent pas.
La parole est à M. Gilles Savary.
Mes chers collègues, je vous remercie d'être beaux joueurs et d'accepter les choses telles que le Gouvernement souhaite vous les soumettre. Ne jouons tout de même pas trop les Tartuffe, car j'ai entendu tout au long de la journée des mises en cause personnelles infiniment plus saignantes, venant de ces travées. Je ne citerai personne, mais tout le monde me comprendra.
J'ai assisté ici, car je suis de temps en temps dans l'hémicycle, peut-être moins fréquemment que vous, à un quasi-lynchage politique de Mme Laurence Rossignol, à deux ou trois reprises, sur des sujets bien moins douteux. Peut-être ai-je une mauvaise expérience de la vie publique, mais j'ai beaucoup siégé dans des communes, des régions, des départements, dans un autre parlement, et lorsqu'il existe une confusion ou un doute, le coup d'oeil d'un maire ou d'un président ne suffit pas : on accepte de compter les voix.
Cela n'a pas été le cas ce matin, puisque la présidente n'a pu nous dire quel était le nombre de voix favorables et le nombre de voix défavorables. C'était tout ce que j'exigeais, puisqu'il y avait confusion. En tout état de cause, l'incident est clos et le fond du dossier, monsieur Saddier, ne devrait pas nous séparer.
Monsieur Savary, que les choses soient bien claires : la présidence n'a pas à donner les résultats chiffrés d'un vote à main levée. C'est une constante, sans laquelle se poseraient de multiples difficultés. La présidence annonce l'issue du vote. Le Gouvernement a ensuite le droit de demander une seconde délibération, sans invoquer une cause particulière.
(L'amendement n° 1 est adopté.)
(L'article 2, amendé, est adopté.)
Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi.
La conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet auront lieu le mardi 16 avril, après les questions au Gouvernement.
Article 2
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à dix-neuf heures trente.)
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le président, madame la rapporteure et auteure de cette proposition de loi, mesdames, messieurs les députés, la sécurité aérienne est un objectif fondamental qui mobilise tous les acteurs du secteur aérien, et même si des progrès colossaux ont été accomplis, elle ne doit jamais être considérée comme pleinement acquise. La sécurité doit au contraire continuer de nous mobiliser. Les services de la direction générale de l'aviation civile travaillent au quotidien pour atteindre cet objectif de sécurité, en coopération étroite avec l'Agence européenne de sécurité aérienne.
Beaucoup de chemin a déjà été parcouru. Le très bon bilan de la sécurité aérienne internationale en 2012 doit nous inciter à continuer dans cette voie.
La France a toujours été totalement impliquée dans les efforts pour tendre vers une sécurité la plus grande possible. Elle s'est efforcée d'entraîner dans son mouvement les instances nationales, européennes et internationales concernées. Des avancées significatives ont eu lieu ces dernières années, tout particulièrement au plan international. Des initiatives structurantes ont vu le jour, telles que la création d'une liste des compagnies aériennes non communautaires dont les vols sont interdits ou restreints en Europe pour des raisons de sécurité, ce que les médias appellent communément la « liste noire ».
Des audits sont conduits par l'Organisation de l'aviation civile internationale et la France milite pour la publicité de leurs résultats. La Commission européenne réalise, elle aussi, des missions d'évaluation d'États tiers et aide certains d'entre eux à améliorer leur capacité à respecter les normes de l'OACI.
Cependant, si la conformité réglementaire reste indispensable, elle n'est pas suffisante. La France s'est donc engagée depuis 2006 dans une démarche fondée sur la gestion de la sécurité.
Notre pays s'est ainsi doté d'un plan de sécurité de l'État dans le domaine aérien qui permet de cibler mieux les actions sur les enjeux prioritaires de sécurité, en responsabilisant davantage les acteurs eux-mêmes. La France a aussi activement participé à la mise en place du plan de sécurité européen qui matérialise l'engagement qu'ont pris les États de l'Union de mieux se coordonner pour permettre à l'Europe de disposer du système de transport aérien le plus sûr au monde.
Pour continuer à avancer vers plus de sécurité, le travail d'harmonisation aux niveaux international et surtout européen doit se poursuivre.
Cependant, qu'en est-il des compagnies étrangères dont les avions ne sont pas directement contrôlés par l'Union européenne ni par la France ? Les autorités françaises sont très attachées à ce que les ressortissants français puissent voyager avec un haut niveau de sécurité. C'est pourquoi la DGAC veille au respect des normes internationales de sécurité par les compagnies étrangères qui fréquentent les aéroports français. Je parle des contrôles Safety Assessment of Foreign Aircraft,…
…ces inspections techniques au sol inopinées que les services français réalisent sur des aéronefs étrangers.
La France est l'un des leaders européens du programme SAFA : elle réalise près de 25 % de l'ensemble de ces contrôles au niveau européen. En 2012, elle en a effectué plus de 2 400, soit presque trois fois le quota d'inspection demandé par l'agence européenne.
Ces contrôles permettent de corriger et de prévenir les anomalies de sécurité, et d'exiger des compagnies étrangères qui souhaitent venir en France qu'elles se mettent à niveau sur les points pour lesquels elles présentent des faiblesses d'exploitation.
Ce processus contribue également à alimenter les travaux du comité européen qui se réunit régulièrement pour faire évoluer la liste noire. Odile Saugues – j'en ai été le témoin lorsque j'étais à ses côtés au sein de la commission – s'est intéressée à l'usage que l'on pouvait faire de cette liste noire. Elle est officiellement publiée sur les sites internet de l'Union européenne et relayée par le site de la DGAC ; elle est donc accessible aux voyageurs.
Cependant, les signataires de la proposition de loi dont Odile Saugues a pris l'initiative rappellent que les passagers peuvent être amenés à utiliser, pour les trajets dits « de bout de ligne », des compagnies qui figurent sur la liste noire. C'est une réalité que les voyageurs rencontrent parfois lors de correspondances, surtout à l'occasion de vols intérieurs de pays figurant sur la liste européenne. Il arrive très souvent que les passagers ne puissent pas éviter cette situation.
En effet, si des solutions peuvent parfois être trouvées pour les vols internationaux, il en va différemment pour les vols intérieurs. Il est fréquent que la totalité des transporteurs d'un pays figurent sur la liste des transporteurs interdits, ce qui exclut toute alternative. Les autres moyens de transport, terrestres ou maritimes, présentent eux aussi souvent des problèmes, au mieux du fait de leur lenteur, au pis du fait de leur vétusté ou des risques liés à un environnement dans lequel la sécurité n'est pas assurée. Dans certains pays, ils sont même parfois tout simplement inexistants. Or nos citoyens sont amenés à utiliser les transports aériens dans ces pays pour de multiples raisons, notamment professionnelles.
Veiller à la sécurité du transport aérien et interdire à des transporteurs potentiellement dangereux de desservir notre territoire ne peut conduire à restreindre la liberté de nos concitoyens de voyager où ils le souhaitent. La liberté implique le sens des responsabilités. Il est essentiel que le passager dispose clairement des informations relatives à son voyage, en particulier à la sécurité de ce voyage, avant de prendre la décision, en pleine connaissance de cause, de confirmer sa réservation ou d'y renoncer.
Tel est précisément le but de la présente proposition de loi, qui vient renforcer et compléter le dispositif juridique existant. Comme vous le savez, le cadre juridique en vigueur repose sur deux textes : le règlement européen n° 21112005 et le décret du 17 mars 2006. Ces textes ont instauré une obligation d'information sur le nom du transporteur effectif. Le défaut d'information sur ce nom est d'ores et déjà sanctionné d'une amende administrative.
Toutefois, ces dispositions ne suffisent pas, car le seul nom du transporteur n'informe pas le passager sur le fait que ce transporteur n'est pas autorisé à voler dans l'espace européen. Le texte complète donc très utilement ce dispositif d'information.
Elle impose, en France, à tous les vendeurs de billets, compagnies aériennes et agents de voyages, d'informer le passager de manière claire et non ambiguë que le transporteur figure sur la liste des transporteurs interdits d'exploitation dans l'Union européenne. De plus, le vendeur du billet doit inviter l'acheteur à rechercher une solution alternative. La sécurité des voyageurs doit primer sur les intérêts commerciaux.
Nous tenions donc à mettre à l'ordre du jour et à faire adopter cette proposition de loi dans les meilleurs délais, madame la députée. Elle a été examinée il y a bientôt trois ans. Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, et plusieurs membres du Gouvernement avaient déjà voté ce texte lorsqu'ils étaient députés.
Je tiens à vous remercier personnellement, madame Saugues, pour l'attention que vous accordez à ces enjeux de sécurité très sensibles et l'attachement que vous portez à ce texte dont les dispositions, complexes d'un point de vue juridique, sont parfois complexes à mettre en oeuvre. L'importance de ces enjeux doit nous inciter à conserver notre rôle de leader mondial en matière de sécurité aérienne.
L'occasion m'est ainsi donnée de saluer la qualité des services de la DGAC et de l'ensemble des acteurs français. La France est en effet une référence. J'ai eu l'occasion, dans l'exercice de mes fonctions, de constater qu'en matière aérienne la France était souvent prise en exemple et qu'elle impulsait un mouvement souvent suivi. La parole de la France est écoutée, respectée.
Mesdames et messieurs les députés, soyez assurés du plein soutien du Gouvernement à cette proposition de loi. Elle répond à la nécessité d'apporter sérénité et sécurité aux déplacements aériens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la rapporteure de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Vous pourriez l'applaudir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est parce que je ne me résous pas à accepter de voir les parlementaires français simples spectateurs de la politique de sécurité aérienne, se contentant de déplorer les pertes de vies humaines, que nous examinons aujourd'hui, en deuxième lecture, après le vote unanime du Sénat le 6 février 2013, la proposition de loi visant à « renforcer l'information de voyageurs lors de la commercialisation des titres de transport sur les compagnies aériennes figurant sur la liste noire de l'Union Européenne ».
Si depuis 2005, année noire pour la sécurité aérienne, le nombre mondial d'accidents est en diminution, nous ne pouvons nous contenter de ce constat. En 2009, 153 Français perdaient la vie dans la catastrophe de la Yemenia, dont un aéronef était montré du doigt par les autorités européennes – mais la compagnie avait très habilement cantonné l'appareil aux aéroports hors de la zone de l'Union.
Même si la proposition de loi que nous examinons ne résout malheureusement pas ce cas de figure, puisque la Yemenia ne figurait pas sur la liste noire de l'Union européenne, j'ai souhaité que l'on aille plus loin que le règlement européen 21112005 et que le décret du 17 mars 2006 créant l'obligation d'informer les passagers de l'identité du transporteur aérien.
Tout est fait, théoriquement, pour assurer la sécurité maximum dans le transport aérien civil. L'OACI, issue de la convention de Chicago, édicte des règles depuis 1944 au niveau mondial et tente de les faire appliquer avec des succès divers. Si l'Europe est une bonne élève – elle s'est dotée avec l'Agence européenne de la sécurité aérienne d'un organisme de certification des aéronefs, faisant ainsi le pendant de la Federal Aviation Administration américaine –, les réponses ne sont pas forcément parfaites, comme le montre l'exemple du vol AF 747 Rio-Paris.
Par ailleurs, le ciel européen étant de plus en plus encombré, l'Europe s'est dotée d'outils appropriés, les blocs d'espace aériens fonctionnels ou FAB, qui, en améliorant l'efficacité des vols, doivent corollairement en améliorer la sécurité. La France appartient au FAB « Europe centrale », lancé par elle, l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suisse, et qui accueille 55 % de tout le trafic aérien européen.
Les experts ont calculé qu'en 2018 le nombre de vols civils et militaires dans ces six pays devrait augmenter de près de 50 %. On peut donc considérer le FABEC comme un outil indispensable à une bonne gestion du trafic aérien.
D'autres dangers guettent la sécurité aérienne : la baisse drastique des coûts due à une impitoyable politique libérale ; les sous-traitances en cascade ; les temps de vols et repos sur les compagnies low cost ; les temps de formation des pilotes en discussion actuellement au Parlement européen. Par ailleurs, l'exemple des Dreamliner cloués au sol par la FAA à la suite d'incendies sur des vols des compagnies japonaises JAL et ANA, appelle à une vigilance sans faille.
La nécessité d'alléger les aéronefs par l'utilisation de batteries lithium-ion, due à un emport de passagers de plus en plus important, ne doit pas aller jusqu'à une prise de risques ; la FAA et le National Transportation Safety Board – NTSB – des États-Unis l'ont bien compris.
Mais la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui concerne des compagnies dites « de bout de ligne ». Dans les pays où elles opèrent, et malgré les efforts que certains pays, dont la France, fournissent pour leur venir en aide, il n'existe pas de culture de la sécurité aérienne et les règles de l'OACI ne sont pas toujours appliquées pour des raisons diverses : manque de moyens humains ; manque de moyens financiers dans la formation des pilotes ; non-certification des ateliers d'entretien ; pièces de rechange non conformes ; corruption…
Par ailleurs, ces compagnies « de bout de ligne » qui effectuent des emports hors du sol européen ne sont pas soumises à ces règlements. Faute de pouvoir interdire la vente de tels titres de transports à nos concitoyens, qui ont toute liberté pour les acquérir hors de France, il ne nous restait que l'obligation d'information et la pénalisation en cas de non-respect de cette clause.
En 2004, lors des auditions effectuées par la mission parlementaire sur la sécurité aérienne, j'avais été alertée par un voyagiste qui déclarait : « Il faut un cadre législatif, en particulier pour la vente du package dynamique sur internet. »
La présente proposition de loi, déposée le 21 décembre 2009, examinée par l'Assemblée nationale le 18 novembre 2010 et par le Sénat le 6 février 2013, a vu son titre modifié, transformant l'interdiction, difficile voire impossible à mettre en oeuvre, en obligation d'information.
Le Sénat a apporté des modifications de forme à ce texte ; il a toutefois transformé l'amende pénale en amende administrative, rapide et efficace et plus adaptée au droit des consommateurs. En introduisant un délai d'entrée en vigueur, la Haute Assemblée a souhaité permettre aux deux systèmes de réservation Sabre et Amadeus, qui servent à la réservation des billets d'avion dans le monde entier, une adaptation facilitée. Le Sénat a fait part de son souhait d'une entrée en vigueur rapide de ce texte.
Je remercie nos collègues de la commission du développement durable, ainsi que ceux du Sénat qui ont, de façon unanime ; souhaité améliorer la connaissance des passagers sur les risques pris en matière de transport aérien. Si certains avaient des doutes sur l'intérêt de travailler sur le sujet de la sécurité aérienne, je répondrais par un exemple récent : celui du manque de culture de la sécurité de certains patrons de compagnies aériennes. Il n'est pour s'en convaincre que de considérer la réaction du PDG de Lion Air, compagnie inscrite sur la liste noire de l'Union européenne depuis 2000.
Monsieur le ministre, ce travail ne sera terminé que si l'Europe se saisit de notre exemple pour étendre cette règle au niveau européen, ce qui la rendra plus efficace.
L'Union européenne a su, par son règlement 21112005 du 14 décembre 2005, emboîter le pas à la DGAC qui, dès août 2005, avait mis en place la liste noire française, et reprendre la préconisation n° 26 de la mission parlementaire que j'ai eu l'honneur de présider en 2004. ainsi que l'a reconnu le commissaire européen Tajani, auditionné en décembre 2009 par la commission des affaires européenne.
Voilà, monsieur le ministre, mes chers collègues, un exemple de travail parlementaire abouti, sans prises de position partisanes. Je veux en remercier tous ceux de mes collègues qui y ont contribué, sur tous les bancs de cette assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne prononcerai que quelques mots à l'occasion de l'adoption définitive de cette proposition de loi.
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a voté conforme le texte de la proposition de loi adoptée par le Sénat, visant à renforcer l'information des voyageurs lors de la commercialisation de titres de transport sur les compagnies aériennes figurant sur la liste noire de l'Union européenne. Le débat en commission, mercredi 3 avril dernier, a confirmé l'unanimité de tous les groupes, telle qu'elle s'était manifestée en 2010, lors de la première lecture du texte.
Je souhaiterais souligner le parcours assez exceptionnel de cette proposition de loi, dont notre rapporteure, Mme Odile Saugues, a retracé la genèse, les objectifs et les attentes. C'est un fait rare, pour ne pas dire exceptionnel, qu'une proposition de loi arrive en fin de procédure législative au terme de la navette entre les deux assemblées, en recueillant un accord unanime.
Cela démontre qu'une initiative parlementaire comme celle-ci, qui avait débuté en 2004 par un premier rapport d'information sur la sécurité du transport aérien, et qui s'était poursuivie en 2009 avec un second rapport sur la sécurité aérienne, peut atteindre son objectif, au-delà des positions partisanes et même des alternances politiques, pourvu qu'elle porte une idée simple et intelligente, que nous pouvons tous partager.
Il est vrai qu'attendre deux ans et demi pour obtenir un vote conforme et un texte définitif peut paraître excessif, mais ne boudons pas notre plaisir. Parions que le succès d'aujourd'hui ne restera pas unique et que nous voterons de nouveau, à l'unanimité, des propositions de loi utiles, simples et consensuelles.
J'invite donc l'Assemblée à adopter cette proposition de loi et j'adresse toutes mes félicitations à notre rapporteure, Odile Saugues.
Je renverrai l'ascenseur à mon collègue Martial Saddier dans quelques instants, car j'imagine que ses applaudissements m'étaient destinés, à moins qu'ils ne l'aient été à Jean-Paul Chanteguet qui les méritait également. (Sourires.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, « patience et longueur de temps font plus que force ni que rage ». Nous arrivons au terme de l'examen d'un texte qui aura été le fruit d'une longue période de gestation parlementaire.
Déposée il y a de cela trois ans et demi, votre proposition de loi n'a été inscrite à notre ordre du jour qu'un an plus tard, à l'occasion d'une niche réservée à l'opposition d'alors. Elle a ensuite dormi pendant près de deux ans dans les placards du Sénat, pour être à nouveau examinée au mois de février dernier et achever son parcours aujourd'hui même, compte tenu de l'absence d'amendements déposés et du consensus qui se dégage sur ce texte. Il faut dire que l'objet de votre proposition de loi ne peut que nous réunir, puisqu'il s'agit de renforcer l'information des voyageurs qui s'apprêtent à acheter un billet d'avion à une compagnie aérienne figurant sur la liste noire de l'Union européenne.
Si la portée de ce texte n'est pas à proprement parler révolutionnaire, vous en conviendrez, il a au moins le mérite d'attirer notre attention sur le fait que des centaines de voyageurs achètent chaque jour des billets d'avion, sans qu'aucune information leur soit donnée sur la dangerosité potentielle des compagnies auxquelles ils s'adressent. Car si l'avion est aujourd'hui le mode de transport le plus sûr au monde, avec un ratio d'un accident pour 5 millions de vols, il n'est pas inutile de rappeler que certaines compagnies aériennes sont plus souvent confrontées à des accidents que d'autres. Par ailleurs, selon le rapport annuel de la Direction générale de l'aviation civile de 2011, 43 % des accidents sont le fait d'une erreur humaine.
Cela doit nous interpeller sur le fait que, malgré les importants progrès accomplis dans le secteur aéronautique, la formation et les conditions de travail des pilotes doivent demeurer la préoccupation principale des professionnels, comme des pouvoirs publics. Dans ce domaine, les services de la DGAC travaillent au quotidien pour atteindre cet objectif de sécurité, en coopération étroite avec l'Agence européenne de sécurité aérienne.
Le très bon bilan de la sécurité aérienne internationale en 2012, et notamment celui de la France, doit nous inciter à poursuivre nos efforts ; en dehors du terrible accident du vol Rio-Paris de 2009, au cours des dernières années, aucun accident mortel n'a impliqué un aéronef français ou une compagnie française, et aucun n'est survenu sur notre territoire, ce qui n'est pas le cas dans d'autres zones géographiques.
Pour autant, de nombreux incidents sont régulièrement à déplorer, et cette proposition de loi, visant à sanctionner la commercialisation de titres de transport par les compagnies figurant sur la liste noire européenne, ne pourra qu'améliorer le droit existant. En effet, dans un contexte mondialisé où l'offre de vols est d'une extrême abondance, il est indispensable de renforcer l'information des passagers sur le niveau de fiabilité de toutes les compagnies.
Cette tendance a largement été accentuée avec l'essor d'internet, qui renforce la vulnérabilité des acheteurs : ceux-ci n'ont pas la possibilité de recevoir des conseils avisés sur le choix de leur billet d'avion et ont légitimement tendance à privilégier le meilleur prix au détriment de leur sécurité. Il suffit, pour s'en convaincre, de consulter les comparateurs de vols, puis d'interroger les sites internet : on n'obtient généralement aucune réponse et on tombe, dans le meilleur des cas, sur un centre d'appels à l'étranger, qui nous renvoie aux compagnies elles-mêmes. Tout cela est bien compliqué.
Comme dans beaucoup d'autres domaines – et l'actualité ne me démentira pas –, les consommateurs doivent pouvoir faire leur choix en toute transparence, sans ambiguïté aucune, et il est indispensable d'inciter les compagnies aériennes à proposer aux passagers des solutions de remplacement. La présente proposition de loi vient ainsi donner une visibilité supplémentaire à la liste noire de l'Union européenne, en prenant notamment en compte le cas des compagnies dites « de bout de ligne ».
Au premier abord, votre proposition initiale, qui prévoyait l'interdiction pure et simple de la vente sur le territoire français de billets d'avions par les compagnies figurant sur la liste noire de l'Union européenne, semblait aller de soi. Cette disposition n'aurait pourtant eu aucun effet pratique, puisque la vente de billets en ligne aurait permis de contourner cette interdiction. Or la vente en ligne se développe et connaît déjà d'importantes dérives ; peut-être aurions-nous intérêt à nous pencher sur ces centrales de réservation en ligne et à exiger un minimum de transparence. Allez sur les sites internet : c'est consternant de complexité.
Nous sommes donc favorables aux changements intervenus lors de la première lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat, qui ont utilement renforcé l'applicabilité du texte, mais cela ne doit pas nous empêcher d'aller plus loin dans l'information et la protection des voyageurs aériens, en instaurant par exemple, comme aux États-Unis, un système de notation des avions et des compagnies. D'autre part, cette proposition de loi ne s'appliquera qu'au territoire français : c'est très bien, mais il est donc urgent que la Commission européenne l'étende à l'ensemble des États membres, afin de ne pas pénaliser nos compagnies nationales. Monsieur le ministre, nous comptons sur votre mobilisation sur ce point, et il serait bon que vous preniez un peu de temps – pas nécessairement autant que sur le précédent texte de loi – pour nous donner quelques explications sur vos engagements dans ce domaine.
Cette proposition de loi garde néanmoins toute son utilité, puisque le défaut d'information du passager pourra enfin être clairement sanctionné, et le plus lourdement possible, de manière à dissuader certains professionnels, peu soucieux de la sécurité de leurs clients. Une autre question me vient évidemment à l'esprit, sur laquelle vous pourriez peut-être nous éclairer : avec quels moyens ferons-nous respecter cette loi, étant entendu que sans moyens humains, les sanctions ne s'appliquent pas ?
Par ailleurs, et il s'agit d'un élément central du dispositif de cette proposition de loi, le délit de mise en danger délibérée de la personne d'autrui pourra éventuellement être engagé : ce délit vient assurément renforcer les recours et la protection des consommateurs ; des consommateurs que les pouvoirs publics, à défaut de professionnels consciencieux, se doivent de préserver au maximum de toutes les situations d'asymétrie de l'information, à mesure que l'offre s'intensifie, alors même que les achats et les services se dématérialisent et que les publics les plus exposés risquent de voir leur sécurité et leur intégrité physique mise en danger.
Au-delà de la question primordiale de l'applicabilité du principe de précaution au travers de dispositifs d'information toujours plus performants, le problème qui se pose est celui de la lutte contre une forme de nivellement par le bas, à la fois de la sécurité, des conditions de travail des professionnels de l'aérien – voilà encore un beau sujet – et de la considération portée aux clients.
Il est donc nécessaire, j'y insiste, que tous les acteurs concernés fassent preuve d'une attention de tous les instants, afin que les mutations que connaît aujourd'hui le monde aérien n'affectent que de façon marginale la sécurité des consommateurs et leur confiance dans ce moyen de déplacement qui, je le répète, reste de loin le plus sûr du monde.
Parce que cette proposition de loi de bon sens permettra sans doute de limiter le nombre des terribles accidents que chacun garde encore en mémoire, et de renforcer l'information et la sécurité des passagers, nous considérons qu'elle va dans le bon sens et qu'elle représente une nouvelle étape importante dans la protection des voyageurs. Le groupe UDI y apportera évidemment tout son soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, c'est avec un vrai plaisir que je supplée, une fois de plus, Patrice Carvalho, empêché pour raisons de santé. Je siégeais à la commission du développement durable en 2010…
…et je me retrouve donc doublement en famille aujourd'hui, avec notre collègue auvergnate, Mme Saugues.
Nous sommes conviés à examiner en deuxième lecture ce texte adopté par notre assemblée voici plus de deux ans, en novembre 2010, et que le Sénat n'a adopté que le 6 février dernier. Des raisons de calendriers sont sans doute à l'origine de ce long délai. Voici venu le jour de l'adoption : j'en suis d'autant plus heureux que je connais l'énergie, la rigueur et l'intelligence que ma voisine de circonscription a mises à cette élaboration législative. Elle y ajoute toujours la passion, mêlée d'une connaissance quasi encyclopédique, quand le sujet arrive dans la conversation.
Le transport aérien est sans conteste le mode de transport le plus sûr, devant le rail et la route. Nous prenons davantage de risques en montant dans notre voiture que dans un avion. Néanmoins, il faut bien rappeler que, même si le ratio est seulement d'un accident aérien pour 5,3 millions de vols, quand l'accident survient, quand la catastrophe aérienne se produit, les victimes sont extrêmement nombreuses. C'est, à chaque fois, un profond traumatisme et un drame insupportable.
La série d'accidents survenus en 2005 a entraîné une prise de conscience et conduit à s'interroger sur leurs causes. Le développement du transport aérien a été considérable au cours de ces dernières années, et ce mouvement est appelé à se poursuivre. Il s'est accompagné de la création de nombreuses compagnies, dont certaines pratiquent des tarifs de plus en plus bas. Les compagnies aériennes traditionnelles y viennent également, ce qui implique d'accroître le volume d'activité pour compenser la réduction des marges. Cela ne menace pas en soi la sécurité, dès lors que les compagnies concernées respectent les normes en vigueur.
Mais nous savons tous que dans un certain nombre de compagnies, on n'hésite pas à soumettre le personnel, et notamment les pilotes, à des rythmes de travail et à une diversification des tâches qui accroissent les risques de défaillance et d'accidents. Le rapport annuel de la DGAC de 2011 rappelait que 43 % des accidents avaient pour origine une erreur humaine. Le matériel lui-même, dans un certain nombre de pays, ne fait pas l'objet des contrôles qui devraient pourtant s'imposer.
De cette situation sont nées, en France et au niveau européen, des listes noires des compagnies aériennes, qui sont régulièrement mises à jour. Le règlement européen du 14 décembre 2005 et le décret français du 17 mars 2006 ont créé une obligation d'information des passagers. La proposition de loi qui nous est soumise vise à améliorer l'information des clients, dont le trajet utilise, dans son dernier tronçon, une compagnie « de bout de ligne », opérant des vols hors de l'Union européenne et figurant sur la liste noire européenne. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette obligation d'information. Ce dispositif n'empêchera certes pas – nous en sommes tous conscients – des avions dangereux de voler et de transporter des centaines de passagers par jour.
En outre, dès lors qu'il s'agit des liaisons dites « de bout de ligne », il faut mesurer que les passagers n'ont souvent pas d'autre choix que d'emprunter des avions de compagnies figurant sur la liste noire faute d'alternatives fiables. De ce point de vue, si la responsabilité de la prise de risque pèse sur le passager, elle est limitée par l'absence d'alternative.
Le texte qui nous est soumis prévoit des sanctions pour défaut d'information. Cependant, ce ne sont pas les compagnies qui seront sanctionnées mais les tour operators et autres intermédiaires, ce qui réduit la portée de la dissuasion pour les compagnies peu scrupuleuses affrétant des avions dangereux et souhaitant plus que tout poursuivre leur business.
Le texte initial qui avait été présenté à l'Assemblée nationale prévoyait de sanctionner directement la commercialisation sur le sol français de billets d'avions « de bout de ligne » avec une compagnie figurant sur la liste noire. Rien ne nous interdit, dans l'exercice de notre souveraineté nationale, d'édicter une telle règle sur notre sol.
On nous rétorquera que cette mesure pourrait être contournée, via l'achat de billets par internet. Mais cela n'en aurait pas moins certains effets salutaires sur les choix des passagers et marquerait une volonté politique de ne pas céder à l'impuissance devant les effets de la mondialisation, au nom de laquelle tout serait permis.
Il conviendra aussi d'accompagner ce dispositif volontariste d'une démarche forte à l'échelle européenne, et je voudrais développer ce point.
Certes, une liste noire européenne des compagnies aériennes existe depuis 2006. Elle n'en demeure pas moins incomplète et de la complaisance existe à l'égard de certaines compagnies, comme ce fut par exemple le cas avec Yemenia.
Mais surtout, la libéralisation du secteur a été accompagnée d'une explosion de l'activité aérienne. Ainsi se multiplient les vols sur les mêmes itinéraires, dans une course aux tarifs bas qu'il faut bien compenser ailleurs, d'autant qu'on se doit maintenant presque partout de rémunérer des actionnaires qui en veulent sans cesse davantage. Si je n'avais pas évoqué la rémunération des actionnaires dans mon intervention, Mme Saugues aurait pensé que j'avais un problème aujourd'hui !
C'est pour l'essentiel par des économies sur la sécurité, les dépenses de maintenance et le personnel que se dégagent les marges. Cette tendance n'est pas présente uniquement dans les compagnies figurant sur la liste noire, mais également dans les compagnies low cost et les compagnies régulières.
Ces questions méritent d'être posées afin de trouver le cadre juridique approprié aux échelons européen et international de manière à contenir les dérives libérales et garantir un transport aérien sûr et de qualité.
Nous avons d'autant plus de raisons d'agir au niveau européen qu'à cette échelle-là le libéralisme est accompagné et relayé. Ainsi, l'agence européenne de la sécurité aérienne a publié le 1er octobre dernier sa proposition finale de réglementation sur le temps de vol des pilotes et navigants commerciaux. Selon plusieurs syndicats, ce texte met en danger la sécurité des vols et des passagers. La Fédération européenne des travailleurs des transports, qui représente plus de 100 000 navigants, a ainsi indiqué que les règles proposées : « vont forcer les équipages à voler plus de vingt heures sans repos approprié, et même sans une pause ».
La France s'honorerait de prendre des initiatives fortes afin d'exiger que soit mis un terme à cette libéralisation folle, en prenant les mesures qui s'imposent sur son territoire tout en portant le même message en Europe et dans le monde.
Bien évidemment, les députés du Front de gauche voteront sans hésitation cette proposition de loi. Tout ce qui contribue à renforcer la sécurité des vols et des passagers doit être pris en compte, notamment par une meilleure information.
Monsieur le ministre, madame la rapporteure, il reste toujours à faire. Il me faut bien terminer par une citation, et j'ai pensé à Paul Éluard : « L'oeuvre accomplie est oeuvre à faire car, le temps de se retourner, elle a changé. » Je ne doute pas que Mme Saugues reprendra cette citation à son compte, car je sais tout l'intérêt qu'elle porte à cette question de la sécurité dans les transports aériens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission du développement durable, je voudrais d'abord adresser toutes mes félicitations à Odile Saugues. Son long combat personnel, qui a commencé au lendemain du drame de Charm el-Cheikh, honore l'Assemblée nationale. Il a abouti à l'une des législations les plus fortes mise en place au plan européen ces dernières années dans le domaine des transports : la liste noire des compagnies indésirables.
En très peu de temps, cette réglementation a permis des résultats spectaculaires. Elle est aujourd'hui appliquée par des pays tiers, c'est-à-dire que certains pays refusent, sans être membres de l'Union européenne, qu'atterrissent sur leur sol des avions qui figurent sur la liste noire européenne. Parfois, c'est l'ensemble des compagnies d'un pays qui sont interdites, par exemple lorsque l'on considère que leur aviation civile est défaillante dans le contrôle des aéronefs.
Cette liste noire est un très grand succès. Elle a connu sa vingtième mise à jour depuis la première publication du 12 janvier 2006. Réactualisée en permanence, elle est accessible aux citoyens par un site web. Chaque fois que cette liste est modifiée, 40 000 personnes chargées du commerce des billets d'avion en sont informées par la Commission européenne. Un État peut être plus exigeant que cette liste noire s'il le souhaite, mais, lorsqu'il interdit un aéronef, il est tenu de le signaler à la Commission européenne.
Cette belle législation européenne se greffe sur des exigences de sécurité internationale assez fortement normalisées qui s'imposent à toutes les compagnies. C'est parce qu'il y a des manquements à ces exigences que l'on peut établir une liste noire. Ces exigences tiennent à la certification des matériels, aux rythmes de maintenance et de révision, aux temps de repos des matériels, à des tests de fatigue sur les aéronefs ainsi qu'à d'autres facteurs, notamment humains. Lorsqu'il ne peut pas être attesté que les avions sont conformes, ils sont placés sur liste noire.
Cette liste est efficace parce qu'elle touche à ce qu'une compagnie a de plus précieux : son image commerciale. Une compagnie placée sur liste noire est pratiquement mise au ban de l'ensemble des grands aéroports de destination européens, américains, et bientôt asiatiques. Confinées dans un espace très restreint, ces compagnies se retrouvent en très grande difficulté. Certains pays ont totalement refait leur flotte à partir de cette liste noire. Cette législation est donc très importante.
Aujourd'hui, nous traitons du versant de cette législation portant sur l'information des passagers. Il procède de cette logique de dissuasion de nature commerciale vis-à-vis des compagnies et traite des « bouts de lignes », c'est-à-dire de la partie finale du trajet. Il arrive souvent que l'on parte de Roissy vers un pays lointain, et que d'affrètement à des sous-compagnies en sous-traitance, on voyage avec une compagnie complètement différente de celle avec laquelle on est monté dans l'avion à Roissy, et qui peut figurer sur la liste noire.
Ce qui figure dans la proposition de loi d'Odile Saugues est donc particulièrement utile : il s'agit de faire que la compagnie effective soit signalée, et non pas seulement celle qui commercialise le voyage et qui a pu sous-traiter à une autre compagnie en bout de ligne les liaisons vers des pays extrêmement lointains. C'est un apport important.
Cette proposition de loi sollicite la responsabilité de chacun, car elle se heurte au dilemme de l'interdiction ou de l'information. L'interdiction empêcherait à nos concitoyens de se rendre dans des pays entiers. Certains pays sont intégralement placés sur liste noire. Personnellement, j'ai pris des avions placés sur liste noire. Ils peuvent effectivement être dangereux, mais dans certains pays il est plus dangereux de se déplacer en bus ou en automobile qu'en avion, y compris lorsque l'avion est en liste noire. Par exemple, l'Afghanistan et la République du Congo sont intégralement sur liste noire. Il y est très difficile pour un opérateur de proposer une solution alternative de transport qui ne serait pas dangereuse, comme le prévoit la proposition de loi.
Nous vivons une démocratisation du transport aérien. Nous avons fait d'immenses progrès au cours de ces dernières années. En 2012, seuls 475 décès ont été répertoriés sur 3 milliards de passagers transportés. Il est vrai que les statistiques peuvent évoluer rapidement, car ces drames font souvent de nombreuses victimes, mais ces chiffres donnent la mesure des choses, comparée à la dangerosité de l'automobile dans notre seul pays.
Des efforts considérables ont été accomplis tandis que l'augmentation du trafic aérien est continue. Odile Saugues l'a dit, il faudra que nous intervenions dans d'autres domaines, tels que la rationalisation des blocs d'espace et du contrôle aérien avec les programmes FAB et SESAR au niveau européen.
Il est toujours plaisant de discuter un texte de la commission du développement durable. Je tiens à saluer monsieur le ministre, ses collaborateurs et collaboratrices, le président de la commission du développement durable et madame la rapporteure. Mes chers collègues, nous discutons d'une proposition de loi visant à renforcer l'information des voyageurs lors de la commercialisation de titres de transport sur les compagnies aériennes figurant sur la liste noire de l'Union européenne.
Je salue mon collègue Jean-Marie Sermier, du groupe UMP, qui a beaucoup travaillé sur ce sujet. Il est retenu en circonscription ce soir mais il aurait aimé s'exprimer ici à ma place.
Madame la rapporteure, votre initiative vous honore, et au-delà, elle honore le Parlement et l'ensemble des parlementaires.
Nous espérons que ces dispositions s'étendront à terme à l'Union européenne dans son ensemble, mais ce n'est pas tout à fait un hasard si elles sont adoptées en France. Nous sommes la première destination touristique au monde, et accueillons donc énormément de voyageurs. Nous avons, avec Air France, l'une des plus grandes compagnies aériennes au monde, et je voudrais saluer l'ensemble des personnels de cette compagnie. Enfin, nous participons à Airbus, le plus grand constructeur d'aéronefs au monde. la France est donc en pointe sur ces questions de sécurité aérienne. Je salue également l'ensemble du personnel de la compagnie Airbus.
Cette proposition de loi a été adoptée à l'unanimité en première lecture, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Elle vise à sanctionner la commercialisation de titres de transport des compagnies aériennes figurant sur la liste noire de l'Union européenne sans respecter les règles de transparence de l'information aux clients.
Elle prévoit dans son article unique que toute personne physique ou morale commercialisant un titre de transport sur les vols d'un transporteur aérien figurant sur la liste noire de l'Union européenne doit informer le passager ou l'acquéreur de cette situation par écrit, de manière claire et non ambiguë, et l'inviter à rechercher des solutions de transport de remplacement. En cas de non-observation de ces dispositions, cette personne est passible d'une amende administrative de 7 500 euros par titre de transport, doublée en cas de récidive.
Cette proposition de loi complète le dispositif juridique existant : le règlement européen n° 21112005 et le décret du 17 mars 2006. Ce règlement européen du 14 décembre 2005 a prévu l'établissement d'une liste communautaire des transporteurs aériens qui font l'objet d'une interdiction d'exploitation dans la Communauté et l'information des passagers du transport aérien sur l'identité du transporteur aérien effectif.
Ces textes ont instauré une obligation d'information sur le nom du transporteur effectif. Le défaut d'information sur ce nom est d'ores et déjà sanctionné d'une amende administrative.
Toutefois, ces dispositions ne suffisent pas, car le seul nom du transporteur n'informe pas le passager de l'inscription de ce transporteur sur la liste noire de l'Union européenne. La proposition de loi complète donc très utilement ce dispositif.
Le groupe UMP a déjà voté cette proposition de loi en première lecture à l'Assemblée nationale, en novembre 2010. Dans notre commission, aujourd'hui présidée par Jean-Paul Chanteguet – elle l'était à l'époque par Christian Jacob –, nous sommes évidemment très attachés à ce que les ressortissants français – et, au-delà, les ressortissants de tous les pays – puissent voyager avec un haut niveau de sécurité.
L'État français veille au respect des normes internationales de sécurité par les compagnies étrangères qui fréquentent les aéroports nationaux en procédant à des contrôles SAFA – acronyme d'un programme dont le nom anglo-saxon a été si savamment prononcé par le ministre tout à l'heure. (Sourires). Il s'agit d'inspections techniques au sol, que les services français réalisent inopinément sur des aéronefs étrangers. La France effectue près de 25 % de ces contrôles en Europe, soit environ 11 000 par an : vous conviendrez que ce chiffre est tout à fait significatif.
Ainsi, presque toutes les compagnies étrangères ayant des programmes réguliers vers la France subissent un contrôle technique plusieurs fois par an. Ces contrôles permettent de mettre régulièrement à jour la liste noire, officiellement publiée sur les sites internet de l'Union européenne et donc accessible aux voyageurs.
Cependant, les passagers peuvent être obligés d'utiliser, par manque d'alternative pour les trajets dits « de bout de ligne » lors de vols intérieurs à l'étranger, des compagnies qui figurent sur la liste noire. Ces compagnies étrangères, dont la plupart sont basées dans des pays manquant de moyens financiers, ne sont pas soumises au droit européen : les directives ne peuvent donc pas y être appliquées. Le seul moyen dont nous disposons pour lutter contre le problème d'insécurité aérienne posé par ces compagnies est donc de donner toutes les informations nécessaires aux voyageurs, afin que ceux-ci soient conscients des risques et fassent leurs choix dans les meilleures conditions, dans un contexte de déploiement rapide de la vente de billets en ligne.
Il est donc essentiel que le passager dispose clairement des informations relatives à son voyage – en particulier à la sécurité de son voyage – avant de prendre la décision de confirmer sa réservation ou d'y renoncer. C'est précisément le but de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui.
Même si d'autres l'ont fait avant moi, il n'est pas inutile de rappeler que le transport aérien reste, globalement, de grande qualité et très sûr : avec le transport par câble, il est de loin le mode de transport le plus sûr au monde. Comme l'a rappelé très justement notre collègue André Chassaigne, lorsqu'un accident intervient dans le transport aérien, l'événement prend des dimensions particulièrement dramatiques.
Le groupe UMP votera cette proposition de loi, dont l'objectif est d'améliorer la transparence dans la vente des titres de transport aérien et de sanctionner les pratiques contraires à ce principe.
Cependant, cette loi ne s'appliquerait que sur le territoire français. Nous souhaitons vivement que la Commission européenne puisse étendre ces mesures à l'ensemble des États membres, afin de ne pas pénaliser nos compagnies nationales. Nous demandons donc au Gouvernement de faire avancer ce projet de règlement au niveau de l'Union européenne.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, c'est ma collègue Marie-Line Reynaud qui devait prendre la parole devant vous ce soir. Elle est empêchée : j'interviens donc en son nom.
Nous sommes réunis pour adopter définitivement cette proposition de loi pertinente et nécessaire, dont l'initiative appartient à notre collègue Odile Saugues, et qui vise à sanctionner la commercialisation de titres de transport sur les compagnies aériennes figurant sur la liste noire de l'Union européenne.
Cette proposition de loi a été adoptée en première lecture par notre assemblée, sous la XIIIe législature, le 18 novembre 2010, à l'unanimité des groupes politiques de l'époque. Le Sénat l'a adoptée en séance publique le 6 février dernier, en la modifiant.
L'article unique de cette proposition de loi accroît l'obligation d'information des voyageurs lors de la vente de billets sur des compagnies figurant sur la liste noire de l'Union européenne. Présentée après la série d'accidents de 2005, dont celui de l'appareil de la compagnie West Caribbean que nous avons encore tous en mémoire, puis celui d'un avion de Yemenia en juin 2009, cette initiative parlementaire entend assurer et définir les conditions d'une meilleure protection des voyageurs.
Face à ces drames humains, l'Union européenne a réagi en créant une liste noire des compagnies aériennes interdites d'exploitation en Europe, puis en adoptant le règlement européen n° 21112005 – vous l'avez dit, monsieur le ministre – qui améliore l'information des passagers sur les transporteurs. Toutefois, ce dispositif n'est pas parfait. Si cette liste noire permet aisément aux voyageurs d'identifier les compagnies aériennes à risque, une telle vérification s'avère beaucoup plus difficile pour les compagnies qui réalisent des vols dits « de bout de ligne », hors de l'Union européenne. Le dispositif prévu par la proposition de loi vise donc à combler cette lacune d'information, et aura un impact certain lors de l'achat de titres de transport aérien.
Le texte que nous propose Odile Saugues n'empêchera pas les avions dangereux de voler ni de transporter des centaines de passagers par jour, mais il incitera les voyageurs à ne pas monter à bord de ces appareils et veillera à leur information claire et complète.
Comme vous l'avez rappelé lors de votre intervention devant le Sénat, monsieur le ministre, le bilan de la sécurité aérienne internationale est très bon en 2012. Aucun accident mortel de transport public impliquant une compagnie française ou étrangère n'est à déplorer sur le territoire national. À l'échelle de la planète, le ratio a été d'un accident d'avion pour 3 millions de vols, sur l'ensemble des vols opérés par les 243 compagnies de l'association internationale du transport aérien, soit 84 % du trafic mondial.
Si les résultats sont bons, les différents acteurs du secteur aérien ne doivent pas relâcher leurs efforts pour renforcer toujours plus la sécurité aérienne – cet objectif est fondamental et constant. Ils doivent même redoubler leurs efforts si nous souhaitons atteindre le ratio d'un accident pour 10 millions de vols. L'avion est le moyen de transport le plus sûr au monde, devant le train et la route, mais chaque accident est potentiellement dramatique et suscite un émoi fort et légitime dans l'opinion.
À l'issue de la navette entre les deux chambres du Parlement, le texte est équilibré, bien rédigé et permettra une meilleure protection et information des passagers. La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a adopté cette proposition de loi à l'unanimité. Mes chers collègues, je vous invite à confirmer ce vote.
Je remercie ma collègue Odile Saugues pour sa pugnacité et sa persévérance, après une très longue gestation de ce texte – je l'ai compris ce soir. Ma chère Odile, tu fais la preuve qu'une femme auvergnate peut être aussi têtue qu'un Breton. (Sourires et applaudissements.)
L'usage du nom patronymique et le vouvoiement sont de rigueur, ma chère collègue. (Sourires.)
La discussion générale est close.
Monsieur le ministre, souhaitez-vous répondre aux orateurs ?
Tout a été dit !
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, l'article unique de la proposition de loi, sur lequel les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.
(L'article unique est adopté, ainsi que l'ensemble de la proposition de loi.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :
Proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à moderniser le régime des sections de commune ;
Proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relative à la prorogation du mécanisme de l'éco-participation répercutée à l'identique et affichée pour les équipements électriques et électroniques ménagers.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron