La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures cinq.
Ce matin, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles de la troisième partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 533 portant article additionnel après l’article 17.
Les services de restauration et d’hébergement des établissements médico-sociaux sont éligibles au taux réduit de TVA à 5,5 %, ce que la singularité et la complexité de leur organisation sur le plan humain, social et technique justifient tout à fait. Cet amendement a pour but d’étendre le bénéfice de ce taux aux établissements de santé, ce qui serait une mesure de justice car leurs services de restauration sont similaires à ceux proposés par les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD. Surtout, c’est une proposition de bon sens, mais reste-t-il du bon sens dans notre pays ?
En outre, il s’agit d’une mesure de simplification qui permettrait de traduire en actes concrets le « choc de simplification » prôné par le Gouvernement. Je pense notamment aux organismes qui, sur un même site, ont des activités à la fois sanitaires et médico-sociales.
En commission des affaires sociales, le rapporteur, M. Bapt, avait reconnu la pertinence de cet amendement, ce dont je lui sais gré, tout en précisant qu’il aurait davantage sa place dans le projet de loi de finances – PLF. Pourtant, son examen dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale – PLFSS – a été jugé recevable. Il est important de montrer notre volonté d’améliorer une situation qui est à tout le moins anachronique.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les recettes et l’équilibre général, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement no 533 .
La commission a rejeté cet amendement. Sa pertinence est une chose, mais intégrer la modification du taux d’une taxe intégralement affectée à l’État dans le PLFSS en est une autre. Quant au bon sens, si le gain d’une telle mesure était significatif pour les établissements de santé, cela aurait sans doute une répercussion sur le prix de journée ou sur une autre dotation dans le cadre général de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie – ONDAM.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
En effet, on peut se demander s’il est pertinent d’examiner cet amendement dans le cadre du PLFSS. Je pense pour ma part qu’il aurait davantage sa place dans le cadre du PLF. Cela dit, le dernier argument avancé par le rapporteur est tout à fait juste. Certes, les établissements publics de santé ne récupèrent pas la TVA, mais ils sont financés par des fonds publics : il y a une forme de circularité de l’argent, et une baisse de taux aurait nécessairement des répercussions sur l’ONDAM et le financement des hôpitaux. Cet amendement ne me paraît donc pas opportun. Le Gouvernement y est donc défavorable.
La parole est à M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles.
M. Delatte propose de distinguer les services de restauration proposés par les maisons de retraite et les logements-foyers de ceux des restaurants. Le problème du reste à charge se pose très fréquemment dans les logements-foyers et surtout dans les maisons de retraite, où le coût mensuel d’hébergement est trop cher. L’amendement vise à diminuer très légèrement ce reste à charge. En l’adoptant, nous aiderions les familles et les pensionnés.
J’ai bien compris l’argument du secrétaire d’État sur la circularité de l’argent public, mais il est très important d’aider les personnes hébergées dans ce type d’établissement, dont les familles ne supportent plus le coût. C’est d’ailleurs le sens du projet de loi sur l’adaptation de la société au vieillissement. Cet amendement pose une question sur la forme et sur le fond ; il faut que le Gouvernement y réfléchisse.
Monsieur Jacquat, l’amendement vise à diminuer le taux de TVA dans les établissements de santé. Ce taux est déjà à 5,5 % dans les établissements auxquels vous faites allusion !
L’amendement no 533 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement no 712 rectifié .
Cet amendement vise à instaurer un système de taxation progressive de l’huile de palme, laquelle pose des problèmes sanitaires et environnementaux. Cette huile est très utilisée dans l’agroalimentaire et l’industrie, en raison de ses qualités de conservation et de son très faible coût. Il en résulte une augmentation de la consommation d’acides gras saturés contenus, ce qui accroît le risque de survenue d’une maladie cardiovasculaire.
Surtout, sur le plan environnemental, l’un des problèmes majeurs qu’il faudra traiter dans le cadre de la 21e conférence des parties à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques – COP21 – est celui de la déforestation qui se poursuit : pour la seule Amazonie, c’est une surface équivalant à celle de la Belgique qui disparaît tous les ans. À l’échelle du monde, des forêts entières ont disparu pour être remplacées par des plantations de palmiers à huile. Nous, pays consommateurs, sommes responsables de cette déforestation puisque nous sommes les principaux clients des producteurs d’huile de palme.
Une taxation progressive de cette huile permettrait d’inciter les industriels à revenir progressivement aux produits de substitution qui existent. Il ne s’agit pas d’interdire, car une consommation modérée d’une huile de palme cultivée de façon durable ne poserait pas de problème. Le problème tient au caractère excessif de la consommation et à la manière dont les palmiers sont cultivés.
Cet amendement n’est peut-être pas un marronnier, mais il revient d’année en année !
Pour lutter contre la déforestation, a été conclu entre l’Union européenne et les principaux pays producteurs d’huile de palme un accord fixant des normes environnementales et sociales. Cela dit, dans certains pays émergents, comme la Chine et l’Inde, la consommation explose et les importations n’obéissent pas aux mêmes exigences.
Sur le plan sanitaire, comme pour beaucoup de produits alimentaires, tout dépend de la quantité que l’on consomme – vous l’avez vous-même rappelé. De plus, les produits dérivés de l’huile de palme ne contiennent pas d’acides gras trans, qui sont les plus athérogènes, car cette huile n’a pas besoin d’être chauffée. Enfin, je rappelle que l’on peut aussi produire, à partir de l’huile de palme, des huiles dont la teneur en acides gras saturés est différente.
Je n’ai pas de conseil à vous donner, mais peut-être pourriez-vous vous inspirer de ce que j’ai fait s’agissant des boissons énergisantes en taxant en l’occurrence une huile dont la teneur en acides gras saturés, donc la plus athérogène, est la plus élevée. Cela serait sans doute plus efficace.
Cela dit, la commission a rejeté cet amendement.
J’admire les arguments développés par le rapporteur.
Sa connaissance du sujet dépasse de loin la mienne, et je ne peux qu’émettre le même avis défavorable.
Je ne peux pas laisser dire que les pays émergents seraient aujourd’hui les seuls consommateurs d’huile de palme non durable ou non artisanale. C’est absolument faux.
Notre marché étant inondé de produits qui viennent du monde entier, même si les productions européennes n’usaient que d’huile de palme durable notre consommation n’en serait pas modifiée.
Il suffit de voir les publicités des producteurs pour bien comprendre que toute l’huile de ce type utilisée en Europe n’est absolument pas issue de cultures durables. Je dénonce d’ailleurs ces publicités qui relèvent de l’éco-blanchiement et du greenwashing. Ces derniers temps, les journaux ont été couverts par des milliers de pages destinées à justifier la consommation d’huile de palme et ce n’est pas acceptable.
Je me suis rendu dans les pays producteurs dont, parfois, 90 % des forêts ont disparu au profit de plantations de palmiers, et cela continue !
Si nous ne parvenons pas à envoyer un signal alors que nous demeurons les principaux consommateurs de ce produit, c’est que nous n’assumons pas nos responsabilités et que nous n’avons pas de leçons à donner à la veille du sommet pour le climat.
L’amendement no 712 rectifié n’est pas adopté.
Cet amendement vise à substituer au minimum de perception prévu par l’article 575 du code général des impôts un minimum de taxes en ligne avec la Directive 201164.
Le mécanisme français du minimum de perception à trois niveaux – simple, majoré et super-majoré – a récemment été déclaré contraire au droit européen par le Conseil d’État dans un arrêt récent du 27 mars 2015.
Le Conseil d’État a, d’une part, confirmé que le minimum de perception « simple » était conforme avec la réglementation européenne puisqu’il correspond à un droit de consommation minimum imposé de manière identique sur tous les produits du tabac ; d’autre part, il est revenu sur le minimum de perception « majoré » et « super-majoré ».
Il a statué que ces deux minima de perception, « majoré » et « super-majoré », créent une distorsion de concurrence puisqu’ils ne s’appliquent qu’à une certaine catégorie de produits et a donc annulé ces deux dispositions.
Profitant de cette décision, certains industriels du tabac ont baissé leurs prix de vente en dessous du minimum de perception, mettant ainsi en péril les politiques de santé publique.
Remplacer le minimum de perception par un minimum de taxes incluant la TVA permettra non seulement de ne plus toucher uniquement aux droits de consommation, mais également d’ajouter une pression fiscale supplémentaire sur tous les produits bas de gamme qui sont vendus en dessous du minimum de perception « simple ».
Cet amendement répondrait à une orientation s’inscrivant dans une politique de santé publique qui mérite d’être retenue.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 553 .
Les produits du tabac sont en effet soumis à un droit de consommation variable selon les catégories et composé de deux parts, l’une proportionnelle, l’autre spécifique.
Le montant du droit de consommation ne saurait être inférieur à un minimum de perception fixé par unité. Les 7ème et 9ème alinéas de l’article 575 A du code général des impôts – si souvent invoqué – permettent de majorer le minimum de perception lorsque le prix d’un produit s’écarte de la moyenne des prix de la même classe de produits.
Sans entrer dans le détail de perception des minima majorés et surmajorés – ils peuvent en effet être très variables – il suffit de retenir que ce dispositif, au fond, vise à rattraper par la fiscalité les fabricants qui tireraient les prix à la baisse afin d’attirer davantage de consommateurs.
De ce point de vue-là, la commission ne peut que vous suivre, mais votre amendement propose une solution juridique qui n’en est pas une faute, en l’état actuel, de pouvoir fonctionner.
Vous proposez en effet l’instauration, en lieu et place du minimum de perception actuel, d’un niveau minimum de taxe incluant le droit de consommation sur le tabac ainsi que la TVA.
En première analyse, l’inclusion de cette dernière n’est pas compatible avec la directive de 2011 car la TVA n’est pas un droit d’accise et n’a donc pas vocation à entrer dans la composition de l’accise minimale que vous proposez.
De surcroît, cela aurait pour effet de complexifier encore la fiscalité du tabac, les règles de calcul de la TVA sur ces produits étant elles-mêmes particulièrement ardues – on parle de TVA dite « en dedans ».
Surtout, je crois savoir que le Gouvernement envisage de travailler à une refonte du minimum de perception à l’occasion de la présentation du projet de loi de finances rectificative.
Dans cette attente, madame Louwagie, monsieur Claireaux, je vous propose de bien vouloir retirer vos amendements. À défaut, la commission sera défavorable à leur adoption.
Finalement, ces amendements ne modifieraient pas beaucoup la donne en changeant la présentation, mais pas les niveaux de prix et de droits perçus par l’État.
Si j’ose dire, ils visent à se mettre en conformité avec la possibilité d’application de ce que l’on appelait chez nous le super-minimum – je parle déjà au passé –, qui est remis en cause par le droit européen. Sinon, je le répète, son adoption n’aurait aucun effet ni sur les prix ni sur les recettes.
Nous avons utilisé au mieux la notion de super-minimum pour éviter que certains fabricants lancent des produits d’appel. Cela a plutôt bien fonctionné, mais il n’en est plus de même puisque nous devons nous mettre en conformité avec le droit européen.
Le rapporteur vient de le dire, nous vous proposerons en PLFR un dispositif conforme au droit européen qui devrait satisfaire nos objectifs communs, soit éviter le lancement de produits d’appel qui inciteraient trop de personnes au tabagisme.
Si ces amendements n’étaient pas retirés, le Gouvernement suggérerait à l’Assemblée de les repousser.
J’ai entendu les arguments de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État – ils ont déjà été développés l’année dernière en réponse à un amendement déposé par Jean-Pierre Door. Nous attendrons donc le projet de loi de finances rectificative. Je retire l’amendement.
L’amendement no 410 est retiré.
Cela a déjà été dit mais il importe de le rappeler : le mécanisme dit du minimum de perception majoré a montré son efficacité.
Dans le cas d’espèce, Mme Louwagie vient de le rappeler, il a été condamné par le Conseil d’État pour non-conformité avec le cadre juridique européen.
Certains ont immédiatement engagé une baisse des prix, or, nous essayons de lutter contre le tabagisme et ses excès en augmentant la fiscalité, mais il ne faudrait pas que les prix s’effondrent. M. le secrétaire d’État vient de proposer une piste, dont nous avons en effet déjà parlé. Il est urgent de régler ce problème et de stabiliser ce dispositif de minimum de perception majoré.
L’amendement no 553 n’est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements, nos 929 , 525 rectifié et 526 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 929 .
La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie, pour soutenir l’amendement no 525 rectifié .
Cet amendement visant à revoir à la hausse la fiscalité des cigarettes tend à compléter le Programme national de réduction du tabagisme – PNRT – proposé par Mme la ministre des affaires sociales.
Il a également pour but de consolider les objectifs du paquet neutre qui, couplé avec une augmentation du prix du tabac, a permis de faire baisser le tabagisme en Australie.
De l’avis de tous, la hausse de prix est la mesure la plus efficace pour faire diminuer le tabagisme. Nous en avons des preuves par neuf, si j’ose dire, monsieur le secrétaire d’État.
Le premier plan Cancer lancé par Jacques Chirac a permis une augmentation des prix de 40 %. Pardonnez-moi cet effet miroir mais la réduction de la consommation de tabac a été également de 40 %, ce dont nous étions tous très fiers.
Assurément, cet amendement va de pair avec une intensification de la lutte contre le commerce illicite – vous en avez donné le signal, monsieur le secrétaire d’État – et avec l’harmonisation fiscale au niveau européen dont Mme la ministre est la porte-parole.
Nous avons expertisé cet amendement – vous savez que ce sont les cigarettiers qui fixent les prix. Il entraînerait probablement une augmentation de 1 euro du prix du paquet de cigarettes. Mais si l’on tient compte du gel de la fiscalité l’année dernière, la hausse ne serait en réalité que de cinquante centimes environ.
Nous avons également analysé les effets qu’aurait cet amendement. L’objectif d’une réduction de 14 % de la consommation est ambitieux – celui de 10 %, souhaité par Mme la ministre, me semble plus approprié.
C’est important, monsieur le président. Je vous demande de m’accorder quelques minutes supplémentaires, comme vous l’avez fait pour nombre de mes collègues.
Je m’efforce de gérer les temps de parole conformément au règlement. Cela dit, vous devez également défendre l’amendement no 526 rectifié .
Celui-ci est décisif et je souhaite le défendre intégralement. Il permettrait d’augmenter les recettes de l’État tout en réduisant la consommation de pratiquement 14 %.
Parallèlement, vous le savez, j’ai proposé d’accompagner les buralistes et de revoir la fiscalité en leur faveur. En effet, nous ne devons pas les laisser seuls, sans soutien, en cas de réduction importante de la consommation de tabac.
Je dois dire que cette augmentation du prix est saluée par toutes les associations engagées dans le domaine de la santé, en particulier la Ligue contre le cancer. Elle est également soutenue, autant que nous puissions le savoir, par l’opinion publique – je le constate tous les jours. Un sondage paru hier dans Le Parisien montre que 55 % des Français sont favorables à une augmentation du prix du paquet de cigarettes à 10 euros pour réduire le tabagisme.
Merci, madame Delaunay. Je considère que vous avez également défendu l’amendement no 526 rectifié .
Vous avez parlé pendant près de cinq minutes : nous pouvons donc considérer que vous avez défendu vos deux amendements.
Si nous observions une minute de silence pour chaque victime du tabac, nous nous tairions pendant cinquante-quatre jours. Je demande cinq minutes.
Le règlement s’applique à tous les parlementaires qui siègent dans cet hémicycle. Je vous ai déjà dit ce matin, mais peut-être n’ai-je pas été assez clair, qu’il reste 700 amendements en discussion. Si j’accorde cinq minutes à chaque parlementaire – et ils sont tous égaux au sein de cette assemblée – nous ne nous en sortirons pas !
Je considère donc que ces deux amendements ont été défendus.
Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?
La commission n’a pas voté sur ces amendements, car Mme Michelle Delaunay les avait retirés à ma demande.
Si j’ai suggéré le retrait de ces amendements, c’est parce qu’ils sont censés venir en appui du Programme national de réduction du tabagisme. Or celui-ci comporte, outre le paquet neutre, mesure majeure dont notre assemblée débattra de nouveau dans peu de temps, un ensemble de dispositions que Mme la ministre a présentées il y a quelques semaines : non seulement des mesures de sensibilisation, d’information, d’éducation sanitaire, mais aussi certaines mesures contraignantes, comme l’interdiction de fumer dans les aires de jeux destinées aux enfants.
Ces amendements, qui auraient certainement des effets sur le tabagisme des jeunes, méritent d’être pris en considération, mais il n’est pas souhaitable qu’ils coïncident avec la mesure relative au paquet neutre, dont notre assemblée aura de nouveau à débattre dans peu de temps, à la suite des débats qui ont eu lieu au Sénat.
Je souhaiterais donc que Mme Michelle Delaunay, ma collègue, consoeur et amie, accepte à ce stade du débat de retirer son amendement, sachant que nous aurons à débattre de cette question à moyenne échéance.
La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, pour donner l’avis du Gouvernement sur ces amendements.
Ces amendements visent tous, à des niveaux divers, à augmenter le prix du tabac. Mme Delaunay vient de dire qu’elle souhaitait appuyer la démarche du Gouvernement et je l’en remercie.
J’ai présenté un Programme national de réduction du tabagisme. Au-delà de ce qui peut nous rassembler – au fond, personne ne se dit hostile à la lutte contre le tabagisme –, au-delà du consensus apparent, ce programme donne lieu, en réalité, à des batailles assez difficiles, et nous voyons bien que la lutte contre le tabagisme est plus que jamais nécessaire.
Les chiffres de la mortalité liée au tabac ont été rappelés à l’instant, et ils ont malheureusement été revus à la hausse dans les dernières études : le tabac fait 78 000 morts par an aujourd’hui, alors qu’il en faisait seulement – si je puis dire – 73 000 il y a quelques années. À cela vient s’ajouter une autre préoccupation : par rapport à l’année 2014, nous constatons une augmentation significative, qui varie selon les catégories de tabac, des ventes de tabac chez les buralistes. Ces chiffres ne sont pas ceux de la consommation, puisque rien ne nous dit que ces ventes sont la seule source de la consommation, mais nous observons en tout cas, à rebours des années précédentes, une augmentation des ventes chez les buralistes.
L’ensemble de ces données appelle à une grande vigilance et à une grande mobilisation. J’ai lancé l’année dernière un plan de réduction du tabagisme qui, du fait du calendrier parlementaire, ne prendra son plein essor que cette année, lorsque la loi de modernisation de notre système de santé aura été votée.
J’appelle donc à la mise en oeuvre résolue de ce plan qui comporte des mesures d’information, des mesures de soutien aux personnes qui souhaitent arrêter de fumer, avec l’augmentation de la prise en charge du sevrage tabagique pour certaines parties de la population, par exemple, ainsi que des mesures d’interdiction renforcées. Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, l’interdiction de fumer dans les aires de jeux pour enfants. On pourrait parler aussi de l’interdiction de fumer en voiture lorsque des enfants s’y trouvent. Nous avons également adopté des mesures visant à lutter contre les trafics et les ventes illicites de tabac, car ce sont des sources d’approvisionnement en tabac que nous ne pouvons pas ignorer. Il y a, enfin, la mesure phare, nouvelle, forte, que constitue la mise en oeuvre du paquet neutre.
L’augmentation du prix du tabac peut-elle favoriser la réduction du tabagisme ? Oui, c’est évident, et dire l’inverse n’aurait aucun sens. Les études le montrent. Mais elles montrent aussi que ce type de mesure n’a des effets que pendant un certain temps. Vous avez vous-même rappelé, madame la rapporteure, que des mesures ont été prises en ce sens au début des années 2000, mais que l’on a vite constaté un redémarrage de la consommation.
Nous ne devons évidemment pas écarter la perspective de mesures touchant au prix du tabac dans notre action résolue de lutte contre le tabagisme. Cela étant, au moment où nous nous apprêtons à mettre en oeuvre un plan cohérent de réduction du tabagisme, qui passe par le paquet neutre, par des mesures d’interdiction nouvelles et par une campagne de communication totalement différente de ce qui a été fait par le passé, est-il judicieux que nous dispersions nos efforts ?
Le choix que fait le Gouvernement aujourd’hui n’a pas vocation à durer pour l’éternité. Nous disons seulement qu’un plan de réduction du tabagisme est aujourd’hui sur le point d’entrer en vigueur : nous souhaitons qu’il se mette en place et qu’il déploie ses effets. Nous essayons par ailleurs de convaincre nos partenaires internationaux, et pas seulement européens, d’agir avec nous. Lors de la réunion du G7 qui s’est tenue à Berlin il y a une quinzaine de jours, la question du tabac a fait l’objet d’échanges informels entre presque tous les participants, parce qu’il s’agit évidemment d’un enjeu de santé publique majeur pour l’ensemble des pays du G7, et en réalité pour le monde entier.
Les organismes internationaux, l’Organisation mondiale de la santé, en tête, le placent en haut de leur agenda. Et tous ont salué le plan porté par la France ; les associations de lutte contre le tabagisme – elles me l’ont écrit – ont salué le plan mis en oeuvre par la France et ont réaffirmé leur soutien à celui-ci, y compris au cours des dernières semaines, à l’occasion des débats difficiles que nous avons connus au Sénat.
J’appelle à ce que nous travaillions de concert à la mise en place de cette politique de santé publique, qui n’exclut pas d’autres politiques. Je le répète : nous aurons, dans les mois qui viennent, à approfondir notre politique de lutte contre le tabagisme. La question du prix du tabac sera, comme chaque année, et même comme cela arrive deux ou trois fois par an, reprise, revue, réévaluée, et nous verrons si d’autres réponses peuvent être apportées. Mais, au nom de la cohérence de la politique que nous menons, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
Je me sens totalement en phase avec ce que vient de dire Mme la ministre, qui appelle à poursuivre notre lutte implacable contre le tabac, au travers de la loi Santé et des dispositifs déjà existants. Je me sens également totalement en phase avec les amendements que Michelle Delaunay vient de défendre avec brio.
Le tabagisme est un problème mondial, la ministre vient de le dire, et je ne rappellerai qu’un seul chiffre, qui est très impressionnant : selon un rapport de l’OMS paru en 2014, c’est 1 milliard de personnes qui pourraient mourir à cause du tabac au cours du XXIe siècle. Le débat qui nous occupe n’est donc pas un simple débat fiscal, même si la fiscalité représente 80 % du coût du tabac.
Mais je reviens au problème du prix. Trois questions se posent, au fond : sommes-nous aujourd’hui au juste prix ? Le prix est-il trop élevé ? Est-il, au contraire, trop faible ? Le prix du paquet de cigarettes est aujourd’hui de 7 euros en France. En Europe centrale, il est moitié moins cher. Dans les pays qui sont dans une dynamique de lutte antitabac, comme le Royaume-Uni, l’Irlande ou la Norvège, le prix du paquet y est respectivement de 10, 9 et 12 euros.
Le paquet neutre, qui constitue l’élément fort de la lutte contre le tabac, et qui sera bientôt mis en oeuvre dans le cadre de la loi Santé, donnera un rôle moteur à la France, qui sera même à l’avant-garde dans l’application de la directive européenne. Je tiens à ce que nous gardions ce rôle moteur.
L’effet prix est bien une réalité, comme le montre le plan Chirac. Entre 2002 et 2004, alors que le prix du tabac a augmenté de 40 %, le tonnage en tabac et le nombre de paquets de cigarettes vendus ont baissé d’un peu plus de 30 %. On a pratiqué la même augmentation de prix entre 2004 et 2014, mais en la lissant dans le temps : elle a eu un effet réel, mais moindre, à la fois sur le tonnage et sur le nombre de cigarettes vendues. Le prix du tabac est donc un vrai sujet. Mais nous devons marcher sur deux jambes aujourd’hui : nous devons certes prendre en compte l’effet prix, mais je crois beaucoup au paquet neutre, sur lequel nous sommes très engagés, et qui s’inscrit dans un plan très cohérent.
J’espère, monsieur le président, que vous me permettrez de dépasser mon temps de parole, comme vient de le faire mon collègue masculin.
Je rejoins Michelle Delaunay dans son combat incessant et dans sa lutte contre le tabagisme. Les chiffres ont été rappelés : le tabac provoque 78 000 décès en France chaque année, et représente un coût global de 120 milliards d’euros, soit dix fois le déficit de la Sécurité sociale. Selon les études de l’OMS, madame la ministre, en Europe la forte taxation des produits du tabac permettrait de réduire la consommation, ce qui aurait pour conséquence une diminution du taux de mortalité due au cancer du poumon. L’OMS estime que si les taxes étaient augmentées de 50 %, il y aurait 49 millions de fumeurs en moins.
Je ne crois pas que l’OMS fasse la même analyse sur l’efficacité du paquet neutre. Je ne crois pas non plus que vous réussirez à faire respecter l’interdiction de fumer sur les aires de jeux pour les enfants et dans les voitures. Comment pensez-vous pouvoir contrôler tous les individus qui allumeront une cigarette sur une aire de jeux ou dans une voiture ? Il a été constaté dans plusieurs pays qu’une augmentation progressive et soutenue des prix fait vraiment baisser la consommation.
En revanche, nous devons être sensibles aux arguments des débitants et aux difficultés qui se posent, notamment dans les zones frontalières. Nous avons déposé l’année dernière, avec ma collègue Bérengère Poletti, un amendement appelant à un travail d’harmonisation au niveau européen. Vous venez d’en parler, madame Delaunay, et vous nous avez dit que la ministre en était le porte-parole. Puisque vous êtes là, madame la ministre, pouvez-vous nous dire si vous êtes parvenue à convaincre vos homologues européens d’aller vers une harmonisation ?
Concernant le tabagisme, nous savons tous qu’il n’y a pas de solution miracle. Il existe en revanche un ensemble de solutions, et l’approche doit être globale.
Ici même, il y a des années, Claude Évin avait appelé notre attention sur les méfaits du tabagisme intense et des mesures avaient été préconisées, qui, encore aujourd’hui, ne sont pas toutes appliquées. Dans les gares, en dépit des affiches et des annonces, le personnel de la SCNF fume en tenue sur les quais.
Je tiens à souligner que le texte de Xavier Bertrand sur le tabagisme passif est relativement bien appliqué, même si des problèmes se posent concernant les terrasses fermées, alors que d’aucuns prétendaient que cela serait impossible.
Enfin, le président de l’Assemblée avait demandé un rapport à Jean-Louis Touraine et à moi-même sur l’efficience des politiques publiques de lutte contre le tabagisme, et nous avons fait des propositions.
Si nous reprenions les conclusions de Claude Evin, de Xavier Bertrand et celles de notre rapport, qui a été adopté à l’unanimité, nous ferions de grandes avancées dans la lutte contre le tabagisme.
Par ailleurs, comme l’a souligné Mme la ministre, il faut prendre du recul. Il y a deux jours, à l’Assemblée, un de nos collègues socialistes, M. Frédéric Barbier, a remis, en présence de M. Le Roux, un rapport qui évoque notamment la question de l’harmonisation au plan européen, laquelle sera difficile à réaliser, ainsi que la mise en place d’un paquet neutre européen, piste nouvelle qu’il convient d’approfondir. Le rapport penche en la matière pour une politique nationale qui ne dépasse pas la politique européenne. Outre les problèmes posés tant par le commerce transfrontalier que par le commerce parallèle, ce sujet important doit faire l’objet, comme l’a souligné Mme la ministre, d’un débat qui ne tombe pas dans la politique politicienne.
La parole est à M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance vieillesse.
Je tiens à expliquer ma position et, avec son accord, celle de Joëlle Huillier – nous sommes tous les deux rapporteurs du PLFSS et nous avons, en toute sincérité, voté en commission ces amendements de Mme Delaunay qui mène un combat remarquable avec sa sincérité et sa force de conviction : je tiens à la saluer.
Je tiens toutefois également à saluer le Gouvernement : la ministre a montré plusieurs fois, ici ou ailleurs, à travers ses propos, combien la lutte contre le tabagisme était un point fort de sa politique. Les engagements de Mme la ministre et de Mme Delaunay sont tous les deux respectables.
Nous sommes tous contre le tabagisme. Simplement, un autre projet de loi est en cours d’examen, lequel comporte une mesure forte, le paquet neutre, qui est loin de faire l’unanimité chez les buralistes. J’en sais quelque chose ! Ma permanence est voisine d’un bureau de tabac et je me fais engueuler presque tous les jours. Cette mesure forte me paraît toutefois essentielle. Pour ne pas brouiller les messages, le paquet neutre doit être la mesure pérenne de l’année 2015 : personne, je le pense du moins, ne reviendra en arrière. Il faut donc la défendre avec conviction. Nous devons tous comprendre que le paquet neutre est le combat de chacun, ici : lorsque le projet de loi reviendra devant l’Assemblée, la solidarité dans nos rangs devra être forte.
D’autant que cette mesure n’exclut pas, à court, moyen ou long terme, une action sur le prix du tabac. Nous sommes en effet convaincus que la lutte contre le tabagisme passe aussi par là. Il ne convient pas, toutefois, de mélanger cette année plusieurs dispositifs. Le paquet neutre est un beau message, qu’il convient de faire passer en priorité. C’est la raison pour laquelle je ne voterai pas l’amendement de Michèle Delaunay, j’allais dire, à regret.
Nous ne pouvons qu’être favorables aux politiques de lutte contre le tabagisme. Simplement, nous pensons qu’il faut aujourd’hui les mener au plan européen. S’arrêter à une frontière, alors que nous tenons tous un discours européen, me paraît artificiel. Les frontaliers nous le rappellent tous les jours : on ne peut mener à quelques kilomètres de distance des politiques différentes sans s’exposer à de la contrebande et des trafics de toutes sortes, ou plus simplement à des achats de l’autre côté de la frontière en toute légalité. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables au paquet neutre et nous pensons qu’il faut nous en tenir au calendrier fixé par l’Europe en matière de signes dissuasifs sur les paquets de cigarettes.
Les amendements de Mme Delaunay, qui fait de la hausse du prix du tabac une priorité constante, me conduisent à poser au Gouvernement la question du cannabis. En effet, l’amendement no 526 rectifié concerne le prix du tabac à rouler.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Le cannabis ne doit pas prêter à rire ! Trop de jeunes, dans notre pays, sont passés du tabac au cannabis. Trop de jeunes subissent aujourd’hui, devant leurs parents désolés, les conséquences de cette intoxication et de cette dépendance, qui est une autre violence dont les conséquences sont autrement plus graves encore que celles du tabac. Je n’ignore pas, bien sûr, les conséquences cancérologiques ou cardio-vasculaires liées à la consommation de tabac. Mais le cannabis a, en plus, des conséquences de nature psychologique, voire psychiatrique : elles se traduisent par la désinsertion sociale, touchant l’activité scolaire et universitaire ou le travail, sans oublier que le delta-9-tétrahydrocannabinol est un facteur déclenchant et aggravant de cette psychose gravissime qui frappe tant de jeunes, la schizophrénie.
Dans ces conditions, madame la ministre, il y a lieu de mettre en perspective vos priorités sanitaires et de travailler davantage la lutte contre le cannabis.
Il faut toujours se méfier. J’entends que tout le monde est d’accord pour lutter contre la contrebande, les cigarettiers les premiers – ceux qui organisent eux-mêmes le commerce de la contrebande. J’entends que tout le monde est d’accord pour lutter contre le tabagisme : les cigarettiers eux-mêmes, lorsqu’on le leur demande. Mais qui sont les premiers à prétendre qu’il faut conduire en la matière des politiques globales et les harmoniser au plan européen, ce qui aboutit à les retarder ? Je félicite le Gouvernement d’avoir mis en place un plan cohérent qui, s’il prend la suite d’autres plans – je reconnais que des mesures ont été prises avant nous en matière de lutte contre le tabagisme –, a pour objectif, au nom d’une lutte résolue, et, sans ignorer les mesures qui sont prises à nos portes, d’aller encore plus loin et plus vite.
C’est pourquoi je soutiens aujourd’hui ce plan global, dont les mesures se trouvent inscrites tant dans le PLFSS que dans le projet de loi Santé dans lequel nous réintroduirons, lorsqu’il reviendra en discussion à l’Assemblée, le paquet neutre, car c’est un engagement de la majorité. Si ce n’est pas la seule mesure, elle n’en est pas moins nécessaire et efficace, pour accompagner la politique conduite par le Gouvernement.
D’aucuns nous proposent d’échanger les mesures : adopter aujourd’hui l’augmentation des prix pour revenir demain sur le paquet neutre. C’est un marché de dupes. Ce que nous refusons aujourd’hui, je le dis ouvertement afin de lever toute ambiguïté, c’est de cumuler la mise en place du paquet neutre, qui changera les comportements et les habitudes, et les augmentations de prix. Des augmentations de prix massives, il y en aura, ne vous en faites pas, pour accompagner la politique mise en place de façon résolue. Vous êtes prêts à les défendre aujourd’hui : elles arriveront demain parce qu’elles sont nécessaires à la lutte contre le tabagisme.
Mais n’ouvrons pas tous les dossiers en même temps. Montrons que nous sommes capables d’aller de l’avant et plus vite que l’Europe. La question de la traçabilité nous donnera également l’occasion de le montrer. La lutte contre la contrefaçon et la contrebande implique que la France aille plus vite que d’autres pays européens.
C’est la raison pour laquelle, tout en reconnaissant avec Mme Delaunay que le prix est un élément important,…
…je demande, au nom du groupe SRC, que l’augmentation des prix du tabac ne soit pas concomitante avec la mise en place du paquet neutre. Consacrons tous nos efforts à ce dernier aspect de la politique conduite par le Gouvernement.
L’intervention de M. Accoyer a eu le mérite d’évoquer la question du tabac à rouler, sur lequel les jeunes se précipitent en particulier parce qu’il est 30 % moins cher que la cigarette. C’est pourquoi l’amendement no 526 rectifié vise à aligner le prix du tabac à rouler sur le prix actuel des cigarettes. Je vous demande d’examiner cette mesure, qui fait consensus : il s’agit de nos jeunes. Mme la ministre a parlé de cohérence. Rappelez-vous que le PNRT a pour leitmotiv « génération sans tabac ». Pensons à ceux qui entrent dès douze ans dans l’addiction à la centième cigarette.
J’anime un groupe de travail sur le tabagisme composé de députés et de sénateurs français ainsi que de parlementaires européens de tous bords politiques. J’apporte le soutien de ce groupe de travail à l’ensemble des amendements de Mme Delaunay, qui sont présentés aujourd’hui.
Contrairement à certains collègues, dont je ne mets pas en doute la bonne volonté, je tiens à affirmer qu’échelonner les mesures, ce n’est pas une bonne idée. Il faut des mesures concomitantes pour produire un effet massif.
Nous nous sommes rendu compte dans le passé que les mesures échelonnées étaient absorbées, y compris au plan psychologique, d’autant que l’industrie a le temps de réagir et de mettre en place des stratégies de riposte. Je félicite Mme la ministre pour son courage sur le paquet neutre. Toutefois, seul l’effet de masse, provoqué par l’adoption concomitante de l’augmentation des prix, permettra d’obtenir des résultats significatifs en matière de consommation. C’est pourquoi je soutiens ces amendements.
Non, madame Duflot ! Vous venez d’arriver, mais j’ai déjà largement outrepassé le nombre des orateurs autorisé par le règlement adopté sous la présidence de M. Accoyer.
Monsieur Claireaux, maintenez-vous l’amendement no 929 ?
Les amendements nos 929 , 525 rectifié et 526 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 552 .
L’amendement no 552 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Je le retire, car c’est un amendement de coordination avec l’amendement no 410 que j’ai retiré.
L’amendement no 411 est retiré.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 551 .
L’amendement no 551 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour soutenir l’amendement no 527 .
Cet amendement vise à harmoniser enfin les prix du tabac en Corse et sur le continent. En effet, nous acceptons depuis des décennies que le tabac soit 25 % moins cher en Corse que dans le reste de la France, alors que tout le monde s’irrite quand le prix est différent dans les pays voisins. Nous devons nous interroger sur la raison de cet écart, d’autant que l’Europe nous a demandé de nous mettre en conformité avec le droit communautaire et d’harmoniser le prix du tabac sur l’ensemble de notre territoire.
La fierté corse peut-elle accepter que le tabac soit 25 % moins cher sur l’île ? Cela, je le crois. Mais peut-elle accepter que la mortalité par cancer du poumon y soit 25 % plus élevée ?
Ce sont les chiffres de l’ARS. Personnellement, je ne souhaite pas que cette situation perdure en Corse. Mettons-nous en conformité avec le droit communautaire ! L’Europe nous demande d’agir avant le 31 décembre 2015.
La commission a donné à cet amendement un avis défavorable, considérant que le rapprochement des taux de taxation, qui est souhaitable, comme vient de l’expliquer Mme Delaunay, a déjà été engagé. Ce rapprochement des taux est progressif. M. le secrétaire d’État chargé du budget ne manquera pas de nous le confirmer.
Notre position est claire : dans la mesure où ce sujet fait l’objet d’un traitement global en matière sanitaire, le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Si je peux comprendre le voeu de Mme Delaunay que la santé soit la même pour tous,…
…je dois préciser, pour éclairer mes collègues, que nous parlons d’une situation qui dure depuis deux siècles,…
…même si elle peut paraître anachronique à certains d’entre vous. La Corse bénéficie d’un régime dérogatoire, reconnu au niveau national et maintenant au niveau européen. Tous les gouvernements ont contribué au maintien de ce dispositif des accises – le gouvernement actuel également, et je me souviens d’avoir obtenu un engagement de notre secrétaire d’État chargé du budget, dont je suis heureux d’avoir entendu la réponse.
Pour préciser la situation, madame Delaunay, nous avons besoin d’une étude d’impact.
Je m’oppose à votre amendement et je demande à mes collègues de le rejeter pour trois raisons.
En premier lieu, la Corse est une région où sont fabriquées les cigarettes. Plusieurs centaines d’emplois, directs et indirects, sont en jeu.
Sourires.
Pour la distribution du tabac, un réseau de buralistes rayonne et irrigue l’ensemble du monde rural. Les distributeurs ne sont d’ailleurs pas uniquement débitants de tabac : ils exercent des activités très diverses.
Dans la Corse rurale, on compte un buraliste pour 1 100 habitants, contre un pour 2 000 habitants ailleurs.
Par ailleurs, il existe un marché étranger, un marché touristique du tabac. Les cigarettes produites en Corse ne sont pas uniquement destinées à la consommation locale.
Enfin, au-delà des 1 500 emplois directs et indirects qui seraient concernés dans l’industrie et la distribution de ces produits, les droits sur le tabac constituent l’une des principales recettes tirées de la fiscalité indirecte pour la collectivité territoriale de Corse, à hauteur de 64 millions d’euros annuels.
En adoptant l’amendement de Mme Delaunay, le Parlement toucherait à cette recette et engendrerait une perte de l’ordre de 15 à 20 millions d’euros par an, qui ne serait pas compensée et entraînerait donc forcément une hausse de toutes les autres taxes indirectes.
Alors qu’au moins sept ou huit pays dérogent aujourd’hui au niveau de prix européen, l’assemblée de Corse a adopté à l’unanimité une motion demandant le report de la mise en conformité de la fiscalité sur le tabac en Corse avec le droit européen.
Tant que nous ne disposerons pas d’étude d’impact ni d’une vision globale sur ce sujet, je vous demande, madame Delaunay, d’attendre.
Les prix ont déjà augmenté. Sachez que l’écart de prix entre la Corse et le continent s’est réduit depuis dix ans ! Nous avons progressé. Cependant, nous avons encore besoin d’un peu de temps. Surtout, il faut comprendre que cette assemblée ne peut pas supprimer une part aussi importante des recettes propres de la collectivité territoriale de Corse, sauf à arrêter le dialogue entre le Gouvernement et cette dernière.
Mon collègue Paul Giacobbi ne pouvant être présent parmi nous aujourd’hui, il m’a demandé de parler en son nom.
Comme d’autres territoires de l’Union européenne, la Corse bénéficie, en raison notamment du handicap lié à l’insularité, d’un cadre fiscal dérogatoire lui permettant de garantir des prix de vente au détail pour les produits du tabac inférieurs à ceux en vigueur sur le continent.
La directive européenne 201164UE prévoit, à compter du 1er janvier 2016, l’alignement de ce cadre fiscal sur la fiscalité appliquée sur le continent. Une telle progression de la fiscalité appliquée aux produits du tabac en Corse conduirait à une explosion du marché parallèle et à de nombreuses destructions d’emplois à l’échelle de ce territoire. Cette baisse du marché officiel aurait également un impact sur le budget des collectivités corses, puisque les droits de consommation prélevés sur les produits du tabac en Corse sont versés à concurrence de trois quarts au budget de la collectivité territoriale de Corse et d’un quart au budget des deux départements de la Corse.
L’assemblée de Corse s’est prononcée en faveur d’une solution alternative, moins brutale pour ce territoire, proposant l’ouverture de « négociations utiles avec les autorités communautaires » afin d’obtenir la prorogation du régime fiscal dérogatoire selon les modalités suivantes : report au 1er janvier 2020 de la hausse de la fiscalité de 50 % à 57 % sur les cigarettes ; harmonisation fiscale totale le 31 décembre 2020 au plus tard. Le maintien de ce régime dérogatoire jusqu’au 31 décembre 2020 permettrait de protéger les recettes fiscales des collectivités territoriales insulaires, tout en demeurant neutre pour le budget de l’État.
C’est la raison pour laquelle le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste ne votera pas les amendements de Mme Delaunay. Il s’agit pour nous non pas d’aller à l’encontre de mesures en faveur de la santé publique – Mme Delaunay sait que nous partageons les mêmes combats –, mais de favoriser une progressivité pour la Corse, qui nous semble raisonnable.
Je voterai cet amendement, que j’ai cosigné, pour au moins deux raisons.
Tout d’abord, je souhaiterais savoir combien va nous coûter l’absence de mise en conformité du droit français avec celui de l’Union européenne. Je parle sous le contrôle de M. le secrétaire d’État chargé du budget : chaque année, à l’occasion de la discussion du PLF, nous examinons tous les contentieux que nous avons avec Bruxelles. Il serait regrettable d’en ajouter un nouveau. L’objectif de solde budgétaire est atteint au prix d’un équilibre bien agencé par le Gouvernement : il ne s’agirait pas de le détruire en écopant d’une amende supplémentaire infligée par l’Union européenne !
En outre, si certains amendements ne font l’objet d’aucune étude d’impact, celui que nous examinons actuellement est étayé par une étude d’impact très claire : les décès causés par un cancer du poumon sont 25,7 % fois plus fréquents en Corse qu’en métropole.
Ce seul chiffre devrait nous inciter à voter l’amendement de Mme Delaunay.
Valérie Rabault a tout dit. Indépendamment des arguments territoriaux défendus assez brillamment ici ou là, nous ne pouvons pas rester sourds à l’argument de santé publique. La Corse, c’est la France : il est inacceptable que les décès causés par un cancer du poumon y soient 25 % plus fréquents. Chacun sait aujourd’hui que le tabac en est responsable.
Merci, monsieur le président, de me donner la parole. Effectivement, je suis arrivée un peu tard puisque j’ai rencontré, comme d’autres collègues parlementaires, les syndicalistes qui manifestent actuellement pour défendre leurs collègues d’Air France.
Comme M. de Rocca Serra et M. Giacobbi, je pense que la Corse est une terre de spécificités auxquelles l’ensemble des élus du groupe écologiste sont très attentifs, qu’il s’agisse de la langue, du statut des îles européennes ou des questions institutionnelles – vous savez que nous sommes prêts à consentir à de larges évolutions. Je viens d’entendre mon collègue Sebaoun : la Corse, c’est la France, mais c’est aussi la Corse. Elle a une histoire, qui doit être respectée.
Cependant, cette spécificité n’est pas du meilleur goût lorsqu’elle consiste à avoir un taux de cancers du poumon aussi élevé, ni lorsque cette situation se justifie par un niveau de taxation du tabac différent. Oui à la spécificité de la Corse, oui au respect de l’île et de son peuple, mais c’est une erreur de s’obstiner à maintenir cette différence qui fait payer un lourd tribut aux populations de cette île.
Madame Delaunay, j’ai appris en vous écoutant aujourd’hui qu’il existait une différence entre la Corse et le reste du territoire français.
En vous écoutant exposer votre amendement, j’ai compris que les Corses ne pouvaient pas faire comme les Ardennais : ils ne peuvent pas acheter leurs cigarettes en Belgique.
Les Ardennais, eux aussi, paient leurs cigarettes beaucoup moins cher que l’ensemble des Français. Comme chacun l’a dit tout à l’heure, il est vraiment temps de trouver des solutions à l’échelle européenne.
En discutant de ce sujet avec Camille de Rocca Serra, j’ai appris que ce dispositif spécifique à la Corse, qui me choque moi aussi – je pense que nous devons protéger la santé des Corses comme celle de tous –, reposait sur un statut spécifique et que cette différence de prix correspondait à des rentrées fiscales dédiées à la Corse. M. le secrétaire d’État chargé du budget pourra confirmer ou infirmer mes propos : les droits acquittés sur l’alcool et le tabac arrivent dans les caisses de la collectivité territoriale de Corse.
Même si je suis extrêmement favorable à une harmonisation des prix, je pense qu’une telle décision prise dans le cadre du PLFSS provoquerait une baisse de rentrées fiscales pour la Corse, qu’il faudrait absolument compenser. Peut-être faut-il demander une suspension de séance, madame Delaunay, afin de sous-amender votre amendement et de concevoir un système de compensation. Les Corses, qui connaissent déjà des difficultés compte tenu de leur insularité, ne doivent pas payer double tarif dans cette affaire ! Certes, nous devons protéger leur santé, mais nous ne devons pas non plus les mettre en difficulté.
Je souhaite poursuivre l’interrogation de Mme Rabault : combien nous coûterait une éventuelle sanction de l’Union européenne à partir du 1er janvier 2016 si nous ne nous mettions pas en conformité avec le droit communautaire ? Surtout, qui va payer ?
D’habitude, lorsque la France est condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne pour non-respect de ses obligations européennes, c’est l’État français qui doit régler l’addition.
J’entends dire qu’une amende payée par l’État français serait préférée à une réduction des rentrées fiscales pour nos amis corses. Je pense que la suggestion de Mme Poletti doit être examinée très rapidement : il convient d’aligner le droit corse sur le droit français…
…afin de nous conformer totalement au droit de l’Union européenne, tout en octroyant une compensation financière à la collectivité territoriale de Corse.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Je souhaite clarifier nos débats ainsi que les votes auxquels nous allons procéder. M. de Rocca Serra nous a invités à ne pas voter l’amendement no 527 . Je veux indiquer à ceux qui nous regardent et à ceux qui seront amenés à lire le compte rendu de nos débats que nous voterons peut-être dans le même sens que M. de Rocca Serra, mais pas pour les mêmes raisons.
De son côté, notre collègue défend un secteur économique ; de notre côté, nous voterons contre cet amendement parce que nous souhaitons la mise en place du paquet neutre, dans le cadre du projet de loi de modernisation de notre système de santé. Comme, a priori, nous ne pouvons pas avoir fromage et dessert, nous choisissons le dessert.
Sourires et exclamations sur divers bancs.
Notre vote n’aura donc pas le même sens que celui de M. de Rocca Serra, car il sera motivé par des raisons de santé publique.
Mme Poletti a déclaré qu’elle était surprise de découvrir la situation corse. Mais vous avez sans doute été tout autant surpris, chers collègues de l’opposition, de découvrir que les aliments et boissons de nos compatriotes d’outre-mer comportaient plus de sucre qu’en métropole.
Vous avez été tellement surpris que vous n’avez même pas voté la proposition de loi permettant d’y remédier.
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
J’ai entendu dire par certains que le pourcentage du cancer du poumon était plus élevé en Corse qu’ailleurs, les mêmes concluant de manière hâtive, que c’était lié au prix faible du tabac.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
L’amendement, dans son exposé sommaire, établit une corrélation directe entre le nombre plus important de cancers du poumon en Corse qu’ailleurs et le fait que les taxes sur le tabac y soient moins élevées.
Je suis prêt à faire faire une étude épidémiologique approfondie sur la question de savoir s’il y a plus de fumeurs de tabac en Corse qu’ailleurs. Ce n’est pas sûr.
Sourires.
En revanche, il serait intéressant de savoir quelles sont les conséquences induites par la production d’électricité en Corse laquelle se fait au fioul lourd, en dehors de toutes les règles environnementales.
Aucun pays d’Europe ne l’accepte. Le seul endroit où la France l’accepte, c’est en Corse ! Aujourd’hui encore, les préfets autorisent que l’on produise de l’électricité au fioul lourd alors que l’on en connaît les conséquences sur la santé.
Dans la baie d’Ajaccio, vous êtes recouverts par un nuage de pollution parce que l’usine du Vazzio fonctionne au fioul lourd.
Procédons à des analyses sur les causes de ces cancers du poumon. Je rappelle qu’au moment de la catastrophe de Tchernobyl, un ministre de la République a expliqué que le nuage était passé au-dessus de Monaco, mais qu’il avait brusquement disparu à la hauteur de la Corse !
Pourtant depuis, le nombre de problèmes de thyroïde dus à Tchernobyl a fortement augmenté, sans que personne ne le reconnaisse ni l’assume. Parlons des problèmes de santé en Corse !
L’étude d’impact a bien évidemment été réalisée ; elle a révélé ce taux de mortalité par cancer du poumon. Je veux bien tout entendre, monsieur Pupponi, mais vous ne pouvez pas remettre en question la responsabilité du tabac dans le cancer pulmonaire.
L’impact du plan cancer mis en oeuvre par Chirac était en miroir avec l’augmentation du prix du tabac. Je vous l’ai dit, l’augmentation du prix du tabac dans le plan cancer avait entraîné une diminution de la consommation, et donc des cancers. L’étude d’impact, monsieur Pupponi, nous l’avons…
…et elle conclut que le tabac est clairement la cause de ces cancers. Monsieur Pupponi, 90 % des cancers pulmonaires sont liés à une hyperconsommation du tabac, même si vous refusez de l’admettre. Quant au fioul lourd, il n’est pas mis en cause.
Ensuite, M. de Rocca Serra a raison de parler des recettes. En effet, les recettes du tabac en Corse vont non pas à la Sécurité sociale, mais aux collectivités. Qui paiera l’amende, avez-vous demandé madame Poletti ? Celui qui a les recettes, bien évidemment, quand nous aurons harmonisé la fiscalité.
On ne peut pas réclamer d’un côté et ne pas faire de même de l’autre.
Vous avez également indiqué que cela aurait pour conséquence de faire baisser les recettes pour l’État. Mais savez-vous, qu’en face des 13 milliards de recettes du fait du tabac, les dépenses sanitaires représentent 25 milliards ? Donc, lorsqu’il y a moins de recettes, on dépense également beaucoup moins.
Enfin, il y a en effet deux fois plus de buralistes en Corse qu’en France continentale, vous l’avez rappelé, monsieur de Rocca Serra. Et il existe une autre particularité : c’est que les Corses vendent beaucoup plus de tabac qu’ils n’en fument. Et moi, je me demande s’il n’y en a pas un peu qui va sur le continent, comme lorsqu’il passe la frontière espagnole.
Permettez-moi d’apporter quelques précisions à la suite de l’intervention de M. Pupponi qui connaît bien la situation. Je prendrai un autre exemple, madame Delaunay. En Corse, le prix de l’essence et du gazole est largement supérieur à la moyenne nationale.
Pour autant, c’est en Corse qu’il y a le plus grand nombre de morts sur la route, rapporté au nombre d’habitants. N’invoquons donc pas toujours les statistiques. J’évoquerai aussi le problème de la pollution, madame Delaunay. François Pupponi a évoqué le cancer de la thyroïde,…
Des épidémiologistes ont démontré que l’on ne pouvait pas incriminer directement Tchernobyl parce que l’on constatait en Corse un taux de cancers de la thyroïde très supérieur à la moyenne nationale dans les années 1975-1980. En outre, on retrouve les mêmes facteurs à Porto Rico où il y a des personnes originaires de Corse. Cela signifie peut-être que nous avons en nous-mêmes quelque chose qui fait la différence au niveau de la santé.
Je terminerai sur un point simple. M. le secrétaire d’État chargé du budget disait, il y a un an, que nous devions être partenaires et aller vers la normalisation des prix. Or aujourd’hui, la Grèce, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, l’Estonie et la Roumanie ont encore un régime dérogatoire. Nous ne voulons pas avoir un régime dérogatoire à vie, madame Delaunay. Nous voulons que les choses soient simples et claires.
Nous ne voulons pas qu’il y ait d’impact ni au plan budgétaire ni sur la fiscalité indirecte de notre collectivité – qui plus est lorsqu’on veut faire de la Corse une collectivité unique. Nous ne voulons pas que plus de 2 000 buralistes deviennent des laissés-pour-compte. Nous ne voulons pas non plus supprimer 150 à 200 emplois dans la fabrication du tabac. C’est une industrie désormais. Ou alors il ne fallait pas l’implanter en Corse. Or elle l’a été par la volonté de l’État.
Tenons compte de l’ensemble de ces spécificités pour aboutir à un moment donné à la normalisation, mais faisons-le en conscience, en partenariat et non pas aujourd’hui dans cet hémicycle.
L’amendement no 527 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 528 .
Je me permets d’insister : je m’intéresse non seulement aux Corses adultes, mais également aux enfants corses qui fument dès douze ans et se précipitent de la même manière sur le tabac à rouler.
Je vous enverrai, monsieur de Rocca Serra, tous les travaux de l’Agence régionale de santé. Moi, je souhaite que le peuple corse soit en bonne santé. Vous aussi, j’en suis sûre !
L’amendement no 528 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement no 713 .
Le présent amendement vise à créer une taxe sur le diesel. Je sais que des dispositions sont prévues à cet égard. L’alignement de la taxation sur l’essence et le diesel, qui se fera progressivement, est une bonne chose. S’agissant des primes à la conversion des véhicules diesel, nous souhaitons que le processus s’accélère, car c’est également une bonne chose. Il faut en effet débarrasser le parc automobile des véhicules les plus polluants, et c’est urgent.
Mais il faut également pousser les constructeurs français à transformer leur parc et à s’adapter enfin aux motorisations modernes, c’est-à-dire les moins polluantes. Il faut donc aussi dissuader l’acquisition de véhicules neufs au diesel.
J’insiste sur l’intérêt de ces mesures qui ne pénaliseront pas les possesseurs de véhicules diesel qui ne peuvent pas changer aujourd’hui de voiture. Il s’agit en effet de taxer les nouveaux véhicules à l’immatriculation. Il y aura, au moment de l’acquisition, une prime aux véhicules les moins polluants.
Cette mesure aura un effet, à dix, quinze ans, sur le remplacement du parc automobile. Il s’agit d’une incitation en faveur du remplacement du parc automobile pour sortir du tout diesel, qui est la marque de la France.
D’un point de vue économique, le choix du tout diesel en France pèse sur la construction automobile française qui n’est pas adaptée à la demande, au marché européen et mondial. Or il est temps que les constructeurs français s’adaptent.
La mesure que nous proposons présente l’avantage de leur donner le temps de s’adapter, car il s’agit de se placer dans la perspective du temps de remplacement d’un parc automobile sur dix à quinze ans.
Lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, nous aurons un débat d’ensemble sur la fiscalité énergétique – le Gouvernement a déjà annoncé certaines mesures – et vous pourriez développer vos arguments à cette occasion, monsieur Roumegas. Je vous suggère donc de retirer votre amendement, faute de quoi je serais conduit à émettre un avis défavorable.
Même avis que la commission. Le Gouvernement a d’ores et déjà donné un signe fort en annonçant qu’il irait progressivement vers la convergence des fiscalités sur le diesel et sur l’essence, mais il ne souhaite pas créer une nouvelle taxe comme le préconise l’amendement. Le Gouvernement ne souhaite pas faire de la fiscalité punitive en matière d’environnement. Il est prêt à voir, dans le cadre du PLFR, comment se combinent les différents dispositifs : contribution au service public de l’électricité, fiscalité de l’essence, taxe sur les véhicules de sociétés, contribution climat-énergie. Nous sommes en train de travailler à ces diverses propositions. Je souhaite donc le retrait de l’amendement. À défaut, le Gouvernement y sera défavorable.
Je trouve préoccupante l’inattention dont font preuve certains de nos collègues à l’égard de l’industrie française. Chacun sait qu’en raison des filtres à particules qui les équipent, les moteurs diesel modernes conçus par les ingénieurs français et qui sont produits dans des usines françaises en France par des salariés français sont les moins polluants du monde. Après l’affaire récente qui a touché un grand constructeur allemand, il est bien regrettable que, dans cet hémicycle, l’on s’en prenne préférentiellement aux productions nationales, à ce qu’arrivent à faire nos ingénieurs dans nos usines.
Un tel amendement est éminemment dangereux pour l’industrie automobile française contre laquelle certains de nos collègues s’acharnent en gênant la circulation des voitures – on le voit notamment à Paris – ou plus généralement en inventant des taxes, en augmentant une fiscalité sur la base de laquelle de nombreux Français ont acheté leur véhicule il y a longtemps. Ces personnes se trouvent aujourd’hui mises devant le fait accompli, faisant les frais d’un compromis politique conclu récemment pas très loin d’ici.
Nous sommes opposés à cet amendement. Nous pensons au contraire qu’il faut tabler sur le progrès des technologies, encourager les voitures équipées de moteurs thermiques, diesel ou à essence de moins en moins polluantes. Les progrès accomplis en particulier par l’industrie française en ce domaine sont remarquables. Il faudra passer tranquillement à une mobilité qui s’appuiera de plus en plus sur des moteurs hybrides et sur des moteurs électriques.
Cette obsession de la lutte contre l’automobile, ciblée ici sur le diesel et à l’origine de tracasseries en tous genres, est dangereuse. Nous entendons la dénoncer en rejetant cet amendement.
Je conçois que M. Accoyer se présente comme le porte-parole de l’industrie dans cet hémicycle et son seul défenseur. Pour autant, je n’admets pas que l’on nous présente comme les fossoyeurs de l’industrie. Imaginer des incitations pour que celle-ci évolue afin de s’adapter à la demande et à la modernité, c’est au contraire la meilleure façon de la défendre. En effet, l’industrie française est aujourd’hui en difficulté à cause des choix qu’elle a faits. Et puis il ne faut pas oublier la santé. On n’est pas obligé d’opposer systématiquement efficacité économique et santé publique, ce qui serait dramatique.
J’ai compris que vous choisiriez l’efficacité économique. Nous pensons, quant à nous, qu’on peut concilier les deux.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez évoqué à propos de cet amendement une fiscalité écologique punitive, mais vos propositions me semblent beaucoup plus punitives que celle que je défends, qui consiste à créer une taxe sur l’achat d’un véhicule neuf, laissant à chacun la possibilité de décider que l’achat d’un diesel est moins intéressant et de reporter son choix sur un véhicule à essence, moins polluant. Vous assumez, pour votre part, le fait de taxer les gens qui possèdent déjà un véhicule et n’ont donc pas le choix, ce qui est beaucoup plus punitif que d’inciter à des choix plus vertueux.
Enfin, puisque M. le rapporteur m’a invité à une réflexion ultérieure, il ne faudra pas oublier une autre anomalie de la fiscalité du diesel – même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’une fiscalité –, à savoir le système de bonus et de malus qui, à l’achat d’un véhicule, ne tient compte que des émissions de CO2, et non des particules fines, ce qui se traduit par un bonus pour un véhicule diesel et un malus pour un véhicule moins polluant. J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que vous voudrez bien corriger cette anomalie – et cela n’a rien de punitif.
L’amendement no 713 n’est pas adopté.
Cet amendement traite d’un sujet totalement différent, très cher à M. le secrétaire d’État au budget : la dette sociale, qui atteint aujourd’hui dans notre pays le montant considérable de 158 milliards d’euros, devant lequel la Cour des comptes s’alarme à court terme. Vous avez pris la décision de transférer une partie de cette dette à la Caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES. Cette décision n’est pas idiote et est même intéressante économiquement, mais le montant de la dette reste considérable et ne peut qu’inquiéter.
Je propose donc, avec certains de mes collègues, la création d’un comité d’alerte inspiré du Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie créé par la loi de 2004 sur l’assurance maladie, qui a montré son utilité : à partir d’un certain montant de dette sociale, ce comité d’alerte se mettrait en action et alerterait l’ensemble des parlementaires.
Il faudrait même appeler le SAMU, monsieur Accoyer ! Nous revenons en effet, avec cet amendement, sur un sujet à propos duquel la Cour des comptes ne cesse de tirer la sonnette d’alarme.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
De fait, la création de ce comité d’alerte sur l’évolution de la dette sociale aurait pour conséquence que le Gouvernement devrait s’expliquer solennellement devant le Parlement. Or, c’est ce qu’il fait à l’occasion de la présentation de chaque PLFR et de chaque PLFSS.
Pour ce qui est de l’information, je rappelle qu’avec les rapports de la commission des comptes de la Sécurité sociale, le rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale, les annexes au projet de loi de financement de la Sécurité sociale ou les comptes rendus d’activité de la CADES, elle est largement accessible.
Qui plus est, monsieur Tian, votre amendement vient un peu à contretemps – pour ne pas dire : « à contre-Tian ».
Rires.
Cette année, en effet, pour la première fois, notre dette sociale diminuera – certes de quelques centaines de millions d’euros seulement, mais elle diminuera : nous nous engageons donc sur une pente vertueuse. Je pensais que vous le signaleriez au passage et je le fais donc à votre place.
Pour ces raisons, je propose le rejet de cet amendement.
Heureusement qu’il n’y avait pas de comités d’alerte lorsque vous étiez aux affaires car, au vu du montant des dettes que vous avez laissé grimper à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – ACOSS – ou à la CADES, il aurait fallu les réunir très souvent !
Le sujet est sérieux. M. le rapporteur vient de rappeler que, pour la première fois cette année, la dette sociale diminue – certes modestement encore, mais l’augmentation devrait être plus significative dans l’avenir. Et c’est maintenant, alors que vous avez laissé filer la dette, que vous voulez inventer un comité d’alerte !
Ce qui est plus grave, ce sont les déclarations que j’ai lues aujourd’hui d’un ancien Premier ministre, qui a été à la tête d’un gouvernement pendant cinq ans – vous devez le reconnaître – et qui vient d’avoir l’idée formidable d’instaurer une règle d’or. C’est toujours une idée intéressante et séduisante, car l’or attire toujours.
M. Fillon vient donc de se prononcer pour une règle d’or. Il était temps car, lorsqu’il était Premier ministre, il n’avait pas même une règle de bonne gestion, ce qui est pourtant plus simple.
Les masques tombent, monsieur Accoyer : M. Fillon a déclaré qu’il voulait instaurer une franchise médicale universelle – voilà qui a au moins le mérite de la clarté. C’est là, me direz-vous, une réforme structurelle. Il propose aussi – tenez-vous bien ! – un système d’assurance maladie fondé sur la liberté et sur la responsabilité. Ce n’était pas l’état d’esprit des membres du Conseil national de la Résistance que vous avez cité. L’esprit de solidarité et de mutualisation n’est en aucun cas l’esprit de liberté et de responsabilité. Avis défavorable, donc.
L’amendement no 310 n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 982 .
Cet amendement tend à corriger une erreur matérielle relative à la fusion de deux taxes, la taxe de solidarité additionnelle – TSA – et la taxe spéciale sur les conventions d’assurance – TSCA –, organisée l’an dernier. Je vous prie d’accepter cet amendement et d’excuser, madame la présidente de la commission, son dépôt tardif.
Cet amendement, que nous découvrons, procède de la reconnaissance d’une erreur ponctuelle et je pense que nous pouvons suivre le Gouvernement.
L’amendement no 982 est adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 311 .
Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement no 310 qu’a défendu M. Tian. Il tend à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport en vue de la mise en place d’un comité d’alerte sur l’évolution de la dette sociale.
Je rappellerai une fois encore quelques chiffres : la CRDS et la CADES, créées pour treize ans, devaient donc disparaître en 2009. En évoquant longuement, hier, l’impôt sur le revenu et la CSG, nous n’avons cependant pas abordé la CRDS, qui aurait pourtant mérité que nous en parlions, car cette contribution, créée pour une durée limitée, est toujours là.
Je rappelle également que le plafond de découvert de l’ACOSS a été en 2015 de 36,3 milliards d’euros et que 227 milliards d’euros ont été transférés à la CADES, qui n’a aujourd’hui amorti que 96,7 milliards d’euros.
Monsieur le secrétaire d’État, vous déclariez tout à l’heure que, pour la première fois, la dette sociale allait diminuer. Je tiens pour ma part à rappeler que, si le niveau des taux d’intérêt est aujourd’hui très favorable, nous ne sommes pas à l’abri d’une évolution de ces taux, qui pourrait provoquer un changement complet de la situation. Ce risque qui pèse sur la France et sur l’évolution de notre dette sociale justifie la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport en vue de la création d’un comité d’alerte qui permettrait de suivre attentivement l’évolution de cette situation, notamment l’évolution financière sur l’ensemble des places internationales.
Cet amendement, de la même veine que l’amendement no 310 , tend à la création d’un nouveau comité d’alerte. Il est bon de songer à alerter le Parlement, mais nous sommes informés mois par mois de l’évolution de la dette portée par l’ACOSS – je précise à ce propos que la dette sociale est non pas « financée » par cette agence, comme vous l’écrivez, mais « portée » par elle. Quant à la Cour des comptes, elle dispose de tous les éléments lui permettant d’alerter le Parlement – j’ai même l’impression qu’elle le fait bruyamment, d’année en année.
L’avis de la commission sur cet amendement est donc le même que sur celui que portait tout à l’heure M. Tian.
L’amendement no 311 n’est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements, nos 963 rectifié et 824 rectifié , portant article additionnel avant l’article 18 et pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 963 rectifié .
Cet amendement tend à instaurer un dispositif temporaire d’affiliation au régime général des personnes exerçant une activité économique réduite à des fins d’insertion.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l’amendement no 824 rectifié .
Pour ne pas tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, cet amendement de Mme Chaynesse Khirouni a été transformé et a désormais pour objet de demander un rapport. Si tel n’avait pas été le cas, sa rédaction aurait été identique à celle de l’amendement du Gouvernement que vient de présenter Mme la ministre. Je considère donc que, sur le fond, l’intention de Mme Khirouni est satisfaite et je retire donc cet amendement.
L’amendement no 824 rectifié est retiré.
L’amendement no 963 rectifié est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 965 rectifié .
Cet amendement vise à maintenir une dispense d’affiliation pour les correspondants locaux de presse, comme nous l’ont demandé de nombreux parlementaires. De nombreuses personnes sont concernées, mais la mesure ne s’appliquera, bien entendu, qu’à ceux dont les revenus sont inférieurs à 15 % du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 5 706 euros en 2015. Cette dispense s’appliquera, sauf option contraire de leur part : s’ils souhaitent s’affilier, ils pourront le faire.
Cette population, qui se caractérise par des activités souvent occasionnelles, est historiquement dispensée lorsqu’elle perçoit des revenus de faible montant. Cette dispense tient notamment compte des frais engagés pour la réalisation d’une activité qui reste, la plupart du temps, conçue comme non professionnelle. Je vous prie donc d’accepter cet amendement.
L’amendement du Gouvernement tend à tenir compte de la situation des correspondants de presse locaux, qui se plaignent bien souvent de ce que leurs seuls déplacements leur coûtent beaucoup plus cher que ce que leur rapporteront leurs petits comptes rendus de nos actions ou activités locales ou communales. À titre personnel, j’y suis donc favorable.
Je tiens à remercier M. le secrétaire d’État d’avoir donné suite aux sollicitations formulées par de nombreux parlementaires à ce propos et je rends notamment hommage à Régis Juanico, qui a été un interlocuteur du Gouvernement sur cette question et nous a représentés dans diverses réunions. Les correspondants de presses locaux sont très importants sur nos territoires pour relayer l’information. Ils sont également des interlocuteurs permettant de faire passer des messages, souvent de prévention, auprès de nos concitoyens. La mesure proposée se situe donc bien dans la logique du PLFSS et je tiens à saluer cet amendement, que le groupe socialiste votera.
L’amendement no 965 rectifié est adopté.
Cet amendement a pour objet la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement avant le 31 juillet 2016 sur la protection sociale des Français établis hors de France. Ce rapport pourrait aborder un certain nombre de problèmes spécifiques à nos compatriotes expatriés, dont la protection sociale est évidemment essentielle. Cela concerne notamment la nécessité de produire chaque année des certificats de vie afin de permettre la poursuite du versement des pensions de retraite et des pensions de réversion.
De même, des dispositions existent concernant la couverture maladie de ces compatriotes lorsqu’ils se trouvent sur le sol français, qui rendent leur protection plus difficile lorsqu’ils veulent faire valoir leurs droits. Il est donc nécessaire que cette situation soit détaillée dans un rapport, ainsi que le prévoit le présent amendement.
Il s’agit, à la demande de M. Accoyer, de fournir un nouveau rapport. Or le rapport demandé au cours des années précédentes a obtenu satisfaction sur un certain nombre d’éléments, notamment sur la retraite et les certificats de vie. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013 a constitué une avancée importante en espaçant la périodicité à laquelle ces certificats doivent être envoyés.
Par ailleurs, aux termes de l’article 45 de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, le Gouvernement remet déjà un rapport détaillant les conditions d’application des conventions internationales bilatérales existant en matière de retraite et évaluant les conséquences de leur mise en oeuvre pour les Français ayants droit de systèmes étrangers dès lors qu’ils ne résident plus dans l’État concerné. Le rapport examine également les difficultés liées à la perception d’une pension de retraite à l’étranger. Ce rapport devant être remis, votre amendement est satisfait par cette proximité.
Tout a été dit ; avis défavorable.
L’amendement no 93 n’est pas adopté.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 281 .
Cet amendement prévoit également la remise par le Gouvernement d’un rapport avant le mois d’octobre de l’année prochaine, c’est-à-dire avant la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.
Les dispositions européennes concernant la libre circulation des personnes permettaient aux pays de l’Union et à la Suisse d’autoriser leurs ressortissants à s’affilier librement à un régime d’assurance maladie. Les Français pouvaient ainsi être affiliés soit au régime suisse, soit au régime obligatoire français, soit à une assurance privée.
Le Gouvernement, avec une insistance quasi dogmatique, n’a pas souhaité que ce droit d’option, introduit au début des années 2000 et pérennisé ensuite par les gouvernements de droite, soit prorogé. Il a de ce fait contraint les travailleurs frontaliers français à s’affilier obligatoirement et autoritairement à la Sécurité sociale française, à la CMU sous critère de résidence. Or le montant des cotisations réclamées est élevé et une juridiction fédérale suisse a apporté un éclairage nouveau en rouvrant l’accès au système suisse.
Aussi serait-il bon d’informer nos compatriotes frontaliers des possibilités qui leur sont ouvertes et de leurs droits en matière de couverture maladie.
Rires.
Vous voulez un rapport sur le basculement dans le régime général de Sécurité sociale des travailleurs frontaliers suisses depuis la fin du droit d’option le 1er juin 2014. Ce basculement a bien marché…
…puisque la totalité des personnes concernées a opté, c’est-à-dire plus de 154 000 personnes. Elles ont toutes bénéficié de l’information nécessaire et les caisses de Sécurité sociale continueront de le faire de manière rapprochée.
Les cotisations à la couverture maladie que vous évoquez sont en réalité légèrement inférieures – de 8 % – au total des taux de cotisation d’assurance maladie applicables en France : il n’y a donc pas de situation défavorable. Mais, à la suite de l’arrêt du tribunal fédéral de Lausanne, nous avons encore des discussions avec nos homologues suisses. Marisol Touraine et moi-même avons cosigné il y a quelque temps un courrier destiné aux autorités suisses compétentes ; nous n’avons pas encore reçu de réponse à ma connaissance ni à celle de ma collègue. Il serait donc prématuré de demander un rapport. Laissons les choses se stabiliser et nous verrons alors ce que nous pourrons dire ou faire de plus.
Le basculement, objet de votre demande, ayant bien fonctionné, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.
L’amendement no 281 n’est pas adopté.
Monsieur Jacquat, vous êtes inscrit sur l’article 18, mais peut-être est-ce une erreur dans la mesure où vous n’avez pas déposé d’amendement sur cet article ?
Il ne s’agit pas d’une erreur. Les articles permettent parfois d’envoyer des messages : c’est à cela que sert le chapitre des « inscrits ».
Dans l’exposé des motifs du présent article, on peut lire ces mots : « en poursuivant la démarche d’intégration progressive au régime général des régimes spéciaux d’assurance maladie ». Le processus est donc en marche. La convergence des régimes – Bernard Accoyer sera tout à fait d’accord avec moi – est une demande de tous les Français. Je souhaite donc ardemment, madame la ministre, que vous fassiez le point sur ce sujet.
L’article 18, amendé, est adopté.
La parole est à M. Dominique Tian, premier orateur inscrit sur l’article 19.
Nous nous interrogeons beaucoup sur cet article 19 parce que l’affiliation obligatoire à la Sécurité sociale pour les marins résidant en France et travaillant à bord de navires immatriculés dans un État étranger ne peut qu’inquiéter un certain nombre de personnes dans le monde maritime.
Dans l’étude d’impact de ce PLFSS, il est indiqué que des « affaires récentes ont mis en évidence la quasi-absence de protection sociale des marins qui résident en France tout en travaillant à bord de navires immatriculés dans un État étranger ne prévoyant qu’une couverture sociale très réduite, voire aucune couverture sociale ».
Jusqu’à présent, les salariés d’un certain nombre de ces compagnies étaient affiliés à la Sécurité sociale par l’intermédiaire la CMU. Ils payaient donc tous les trimestres une cotisation à l’URSSAF, en contrepartie de quoi ils bénéficiaient d’une couverture sociale. Ce système n’était pas parfait mais fonctionnait.
Par un courrier daté de décembre 2014, la direction générale de l’assurance maladie a informé les marins d’une compagnie maritime battant pavillon étranger qu’elle ne pourrait plus, à partir du 31 janvier 2015, assurer leur couverture sociale et qu’il appartenait à leur employeur de souscrire pour eux une assurance privée. L’employeur s’est bien entendu exécuté, en complétant les assurances auxquelles il souscrivait déjà, mais ces dernières demandent aux salariés des cotisations bien plus onéreuses, en fonction de leurs éventuelles pathologies, ce qui est évidemment peu acceptable.
La mesure vise donc à assurer une couverture sociale satisfaisante aux marins résidant en France qui travaillent à bord de navires immatriculés dans un État autre qu’un État avec lequel la France est liée par un accord de coordination en matière de sécurité sociale, tout en permettant à la France de répondre aux obligations mises à la charge de l’État de résidence des marins par la Convention du travail maritime. L’étude d’impact ne nous fournit malheureusement aucune information : nous ne savons pas combien de marins sont concernés ni quels sont les montants en jeu.
Cela nous incite à la plus grande prudence sur cet article 19, d’autant plus qu’une proposition de loi pour l’économie bleue a été déposée récemment par Bruno Le Roux et le groupe socialiste, qui se penche particulièrement sur l’ensemble de la couverture sociale des marins, des pêcheurs à pied, etc. Il semble donc déjà acquis que le groupe socialiste lui-même n’est pas content de cet article 19 puisqu’il prévoit sa propre proposition de loi pour aborder ce sujet. Voilà pourquoi nous sommes pour le moment extrêmement réticents et inquiets face à cet article que vous nous proposez.
Je vais compléter les propos de M. Tian, qui a parfaitement cerné le problème.
Avec cet article 19, vous répondez, madame la ministre, à une question que je vous avais posée en février dernier, ce dont je souhaite vous remercier, comme je l’ai fait en commission.
Même si, de prime abord, j’ai cru que votre proposition pourrait répondre aux situations difficiles des marins français résidant en France et naviguant sous pavillon étranger, je m’aperçois, après expertise, qu’elle risque de créer plus de problèmes qu’elle n’en résout. Pourquoi ? L’argumentaire est un peu technique mais il mérite que nous prenions le temps de l’examiner si nous ne voulons pas commettre une grave erreur.
L’article 19 prévoit d’affilier les marins français résidant en France au régime général dans la même catégorie que les dirigeants de société ou les travailleurs indépendants. Or, depuis Colbert et une ordonnance de 1670, tous les marins sont soumis à la protection sociale de l’établissement national des invalides de la marine, dit ENIM. Cette affiliation est obligatoire pour tout marin français mais aussi étranger naviguant sous pavillon français.
Cette disposition exclurait donc les marins français, résidents français et naviguant sous pavillon étranger, qui deviendraient affiliés au régime général alors que leur demande est d’être affiliés à l’ENIM comme tous leurs collègues marins depuis 1670. J’ai bien compris que l’amendement que vous déposez sur cet article résout en partie le problème, mais il ne le résout malheureusement qu’en partie.
Pourquoi donc, dans de telles conditions, les marins français sous pavillon étranger seraient-ils affiliés au régime général alors que l’ensemble de leurs collègues, y compris ceux naviguant sous pavillon étranger, seraient affiliés à l’ENIM quand ils y naviguent par voie de détachement ? Il y a là, à mon sens, une rupture du principe constitutionnel d’égalité.
De plus, dans votre proposition, les cotisations des marins français naviguant sous pavillon étranger seraient dues par les salariés. Or la Convention du travail maritime de 2006, signée par toutes les parties au dossier – Guernesey, Bahamas, Royaume-Uni, France –, prévoit que ce sont les compagnies maritimes, c’est-à-dire les armateurs, qui prennent en charge la couverture sociale des marins. Par ailleurs, la Convention de 2006 impose la couverture des risques chômage, qui ne figurent pas dans cet article 19.
Puis-je poursuivre une minute, monsieur le président ?
Je vous concède quelques secondes pour conclure et vous renoncez à soutenir l’amendement de suppression no 984.
Je ne renonce pas à mon amendement mais je ne le défendrai pas !
Du côté des employeurs, le caractère obligatoire de cette affiliation au régime général de la Sécurité sociale pour tous les marins résidant en France, quelle que soit leur nationalité, n’offre aucune flexibilité ni aux marins ni à leurs employeurs étrangers qui ont fait le choix de prévoir des couvertures sociales pour leur personnel navigant.
Ces dispositions risquent donc, à terme, de dissuader les employeurs étrangers d’employer du personnel résidant en France. Comment pourra-t-on justifier, au sein d’un même armement employant des marins de sept nationalités différentes – je pense à l’un d’entre eux en particulier, bien connu – résidant dans différents pays, que certains membres d’équipage bénéficient d’une couverture plus étendue en fonction de leur lieu de résidence ?
Ce sont autant de questions sur lesquelles nous devons mener un travail de fond pour trouver la solution la plus appropriée. La proposition de loi d’Arnaud Leroy, qui sera débattue à la fin de la semaine prochaine en commission et au mois de novembre dans l’hémicycle, me paraît de nature à avancer vers la résolution de ce problème d’une façon plus performante.
Nous en arrivons à l’amendement no 984 , qui vise à supprimer l’article 19, et que M. Lurton a déjà défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Avis défavorable. Cet article comporte un dispositif utile, puisqu’il permet d’affilier au régime général de la Sécurité sociale les gens de mer qui résident en France et qui sont employés à bord de navires immatriculés dans un État étranger avec lequel la France n’a pas de dispositif de coordination en matière de sécurité sociale.
M. Tian dit ne pas avoir d’informations sur le nombre de personnes concernées. Le rapport indique pourtant, pages 200 et 201, que la mesure pourrait concerner, pour le commerce, un millier de marins qui résident en France et qui travaillent à bord de navires immatriculés dans un État qui n’est ni membre de l’UE ni partie à l’accord avec l’EEE et, pour la plaisance, environ 1 000 Français et 2 000 étrangers résidant en France.
Par ailleurs, je signale à M. Lurton que l’amendement du Gouvernement no 958 répond à sa préoccupation, puisqu’il prévoit que les personnes concernées pourront continuer d’être affiliées à l’ENIM.
L’amendement du Gouvernement ne donne pas la liberté d’affiliation ; il permet simplement le maintien à l’ENIM des marins qui y sont affiliés.
Merci monsieur le député ! Il me faut surtout remercier mes collaborateurs, qui fournissent un travail considérable.
Au fond, la question est la suivante : faut-il rattacher les gens de mer employés à bord de navires étrangers au régime général ou à l’ENIM ? Contrairement à vous, nous souhaitons qu’ils soient rattachés au régime général, notamment parce que ces gens de mer ne sont pas tous marins et que certains personnels ne pourraient être rattachés à l’ENIM. C’est ce qui justifie l’amendement suivant. Avis défavorable.
L’amendement no 984 n’est pas adopté.
L’amendement no 958 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 19, amendé, est adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 20.
La parole est à M. Bernard Accoyer.
Avec les articles 20 et 39, vous avez la prétention de remettre en cause tout l’édifice de l’assurance maladie, en créant une protection prétendument universelle. Avec les gouvernements de gauche, tout est universel, et les avancées transcendantales ! On en voit les conséquences, qui minent année après année l’édifice de la couverture maladie.
L’article 20 fait 7 pages et comprend 89 paragraphes, tandis que l’article 39 compte 21 pages et 230 paragraphes. C’est donc au travers de 319 paragraphes que vous entendez réécrire le code de la Sécurité sociale, madame la ministre. Nous vous le disons franchement : c’est prétentieux, et dangereux.
En introduisant l’attribution de droits à des personnes dès l’âge de 12 ans, en cessant de faire du versement des cotisations la règle générale – des dérogations existent déjà –, vous remettez en cause le principe fondateur de la Sécurité sociale selon lequel chacun cotise selon ses moyens et reçoit des prestations selon ses besoins. C’est le premier étage d’une fusée qui est en train de faire exploser la protection sociale. Vous en porterez la responsabilité !
Au-delà de ces dispositions particulièrement graves et préoccupantes, vous remettez en cause les conditions de délégation de gestion. Sur simple décision du ministre, il sera possible de retirer ces délégations. Alors que ce sont des dispositions pénales, relevant de la loi, qui seraient nécessaires en cas de fraude.
L’article 20 réécrit tout simplement le code de la Sécurité sociale. Il revoit totalement l’architecture du financement du risque maladie, du fait de la création, à l’article 39, d’une protection universelle maladie. Première question : pourquoi cet article précède-t-il celui dont il est une conséquence ?
S’agissant, d’ailleurs, de conséquences, celles de l’article 39 ne sont pas négligeables, puisqu’il réforme les conditions d’ouverture de droits aux prestations en nature et prévoit la disparition de la notion d’ayant droit majeur, au profit d’une logique d’individualisation des droits. Deuxième question : quel est l’objectif de cette révolution, qui prend le risque de couper le lien entre celui qui cotise et celui qui reçoit ?
Vous avez évoqué l’esprit qui avait présidé à la création de la Sécurité sociale. Le moins que l’on puisse dire est que vous lui tournez le dos.
L’article 20 tire les conséquences de l’absorption du dispositif de la CMU de base, qui repose sur le critère de résidence régulière en France. Concernant plus de 4,5 millions de personnes – un chiffre en augmentation constante –, il se caractérise par une gratuité totale des prestations pour les personnes dont les ressources annuelles sont inférieures à 9 600 euros. Compte tenu de ces caractéristiques, et de la place importante qu’occupe la gratuité des soins dans le dispositif, la condition de résidence en France métropolitaine ou dans les DOM doit être assortie d’une durée significative. Troisième et dernière question : quelle est votre définition de la durée significative ? Trois mois, six mois ou un an ?
L’article 20 est une conséquence de l’article 39, long de 21 pages. Ce dernier, qui mériterait d’être examiné avant, instaure une protection universelle maladie afin, comme l’explique l’exposé des motifs, de garantir l’effectivité des droits des assurés, qui sera désormais fondée sur l’activité professionnelle etou sur un critère de résidence stable ou régulière en France.
Par ailleurs, l’article 39 organise la suppression progressive de la notion d’ayant droit majeur. Ainsi, vous mettez fin à une disposition fondamentale de notre modèle. Cette modification substantielle fait disparaître le principe de filiation, notamment, qui entraînait l’affiliation.
L’article 20 est censé simplifier les processus permettant de mettre en oeuvre l’universalisation de la prise en charge des frais de santé et de garantir l’effectivité de ce droit tout au long de la vie des assurés.
Permettez-moi, madame la ministre, de douter de cette volonté de simplification, quand elle est déclinée dans 319 paragraphes.
Par ailleurs, cette réforme met à mal le principe sur lequel reposait le processus de prise en charge en coupant le lien fondamental qui existait entre cotisations et prestations. C’est une réforme en profondeur, qui mérite mieux que les deux articles dont elle fait l’objet dans un PLFSS. Elle ne vise pas le financement de la Sécurité sociale, mais un principe de notre Constitution.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Il est vrai qu’avec les articles 20 et 39, le Gouvernement change la nature de la protection sociale. Le groupe UDI n’est pas opposé à l’idée d’une meilleure protection, élargie à l’ensemble de ceux qui travaillent et résident en France.
Mais cela pose la question du financement de la protection sociale. Doit-on continuer à la faire porter uniquement par le travail ? La compétitivité décroît et la croissance ne décolle pas, parce que le coût du travail est trop lourd. Plus on élargira la protection, plus le coût du travail sera élevé.
Par ailleurs, cette réforme porte sur un principe fondamental de la Sécurité sociale, selon lequel chacun cotise selon ses moyens et reçoit des prestations en fonction de ses besoins.
Il existe de nombreux régimes et l’article 20 tente de régler en partie la situation. Il me semble important de la régler totalement, et de parvenir à un seul régime de protection universelle.
Comme Mme Louwagie, j’estime que ces deux articles ne devraient pas figurer dans le PLFSS.
Le Gouvernement devrait plutôt proposer un projet de loi de réforme de la Sécurité sociale. Pourquoi pas ? La société a changé en soixante-dix ans, et les fondements de la Sécurité sociale pourraient évoluer. Mais pas à l’occasion de deux articles dans un PLFSS !
Les bras m’en tombent lorsque j’entends certains collègues de l’opposition s’inquiéter de l’affaiblissement de notre système de protection sociale, qui pourrait affecter nos concitoyens.
Je voudrais rappeler que c’est lorsque vous étiez au pouvoir, chers collègues, que les mesures de désengagement de l’assurance maladie ont été les plus nombreuses. La Cour des comptes a bien expliqué qu’entre 2004 et 2008, le désengagement de l’assurance maladie a représenté 3,3 milliards d’euros, avec des mesures comme le ticket modérateur de 20 % sur les soins hospitaliers, le forfait de 18 euros sur les soins coûteux et l’ensemble des franchises médicales.
Vous entendre donner des leçons sur l’universalité de la protection sociale, c’est fort de café ! Il convenait donc de rappeler certains faits.
Je suis saisi d’un amendement, no 522 , qui vise à supprimer l’article 20.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour le soutenir.
L’assurance maladie ne sera plus une assurance à proprement parler, puisque l’affiliation sera automatique et l’ouverture des droits se fera sans vérification. Il s’agira, en quelque sorte, d’un marché libre. Avec la carte Vitale, qui permet à tout un chacun de rentrer dans une pharmacie avec une ordonnance et de repartir avec plusieurs milliers d’euros de médicaments sans avoir déboursé un centime, on imagine les conséquences de telles décisions. Elles entraîneront toute une série de fraudes. Mais on sait bien que la fraude n’a jamais été votre souci principal…
Il est étonnant qu’une avancée sociale, une adaptation aux conditions de vie de nos concitoyens suscite autant d’oppositions.
Monsieur Vercamer, il ne s’agit pas d’étendre un droit, mais de simplifier un mécanisme. Cet article n’a pas d’incidence financière et le problème du financement ne se pose pas.
Bien sûr, madame Louwagie, l’article est très complexe, mais cela tient à la matière à laquelle il s’applique, elle-même extraordinairement compliquée. Il faut bien s’attaquer aux détails de l’architecture pour la simplifier.
Et, de fait, il y a simplification, puisque la compensation bilatérale maladie, qui n’existait plus que pour quatre régimes spéciaux, est supprimée. L’article prévoit en contrepartie que tous les régimes financièrement intégrés au régime général sont tenus de retracer leurs charges et produits dans les comptes du régime général de chaque branche. Voilà une garantie d’information et de transparence tout à fait primordiale. Avis défavorable.
Je donne un avis défavorable, mais je voudrais aussi répondre en quelques mots à certains des arguments que j’ai entendus.
Nous aurons évidemment un débat sur la protection universelle maladie à l’article 39 : il prévoit des évolutions importantes mais qui, contrairement à ce que j’entends, ne viennent en aucun cas ni en aucune manière modifier les règles d’affiliation, ni créer de nouveaux droits pour des catégories de population qui aujourd’hui ne bénéficieraient pas de l’assurance maladie.
Il n’y a aucune nouveauté. Je suis effarée quand j’entends les derniers propos de M. Accoyer – même si j’en comprends la logique – consistant à dire que nous ouvrons les vannes ou permettons des affiliations incontrôlées.
Il n’y a, en matière d’affiliation, aucun changement par rapport à l’existant. L’objectif de l’article 39 est précisément de rendre effectifs des droits qui existent depuis 1999.
La CMU a donné un point d’aboutissement au principe d’universalité de la Sécurité sociale : tout Français, toute personne qui réside régulièrement en France, a droit à l’assurance maladie.
Il se trouve que, pour des raisons diverses, il y a indépendamment de la CMU des ruptures de droits. Ces droits sont rattrapés au bout de quelques mois, parfois de très longs mois après ; nous avons des personnes qui renoncent à bénéficier de soins parce qu’elles ne sont pas en situation de faire valoir leurs droits, qui pourtant existent.
Nous aurons l’occasion de reprendre ce débat à l’article 39. J’entends dire qu’il aurait dû être examiné avant les conditions financières.
Madame Le Callennec, nous suivons les règles du projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
Ce n’est pas moi qui ai inventé le projet de loi de financement de la Sécurité sociale !
Vous parlez beaucoup et moi, je ne vous interromps pas ni ne fais de grands gestes quand vous vous exprimez. Si vous voulez que je vous réponde, laissez-moi m’exprimer. Sinon, je peux m’asseoir et ne pas vous apporter de réponses.
J’entends aussi le débat ouvert par M. Vercamer, pour qui nous pourrions discuter, compte tenu des évolutions intervenues dans la société, mais qui se demande si ces dispositions ont bien leur place dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
Je voudrais vous dire deux choses, monsieur Vercamer. En premier lieu, ce n’est pas ce texte qui modifie quoi que ce soit aux prélèvements effectués.
Nous ne passons pas d’un système assis sur des contributions sur le travail à un système fiscalisé.
La CSG existe depuis un certain nombre d’années et cela fait aussi un certain nombre d’années que la part de l’impôt est majoritaire, comparée à la part des cotisations, pour ce qui est de l’assurance maladie. Je ne parle pas des retraites, évidemment, mais de l’assurance maladie : c’est une réalité. L’instauration de la CSG, qui est un impôt et non une cotisation comme chacun sait, a fait évoluer notre système de financement de l’assurance maladie.
En outre, ces articles ont bien leur place dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale, pour au moins trois raisons.
En effet, ces lois de financement définissent les règles de droit concernant l’assurance maladie et le rattachement aux différents régimes. À partir du moment où nous augmentons la fluidité entre les différents régimes, dans la mesure où les droits sont désormais attachés aux individus, nous sommes fondés à inscrire les dépenses qui vont être supportées par chacun d’eux.
En outre, nous devons inscrire cette réforme dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale parce qu’elle aura un impact sur les coûts de gestion. Nous allons en effet être amenés à revoir la manière dont les différents régimes mutualisent un certain nombre de dépenses et comment ils s’approprient certaines dépenses.
Enfin, nous allons être amenés à revoir sur un point les cotisations, ce dont vous auriez pu vous réjouir, puisque cette réforme nous conduit à supprimer les cotisations minimales du risque maladie-maternité des travailleurs indépendants agricoles et non-agricoles. C’est là une mesure positive pour ces catégories ; vous pourriez la soutenir.
En déposant un amendement de suppression, c’est aussi cette mesure-là que vous proposez de supprimer : vous vous en expliquerez auprès des travailleurs indépendants agricoles et non-agricoles, vous qui ne cessez de nous parler des travailleurs indépendants !
Bien sûr, nous leur expliquerons tout, ne vous inquiétez pas pour nous !
C’est une mesure qui s’inscrit aussi dans le cadre de la simplification du régime social des indépendants. Nous, nous agissons concrètement pour améliorer la situation des indépendants.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Sur le fond, au groupe UDI, nous sommes d’accord pour réfléchir à ces problèmes, madame la ministre. Nous vous disons simplement que cette réforme aurait mérité de faire l’objet d’un texte différent, ce qui nous aurait permis de nous engager dans un travail de fond, au lieu de légiférer au détour de deux articles de 319 alinéas au total.
C’est cela que nous vous reprochons, parce que nous avons du mal à nous y retrouver. Nous aurions pu vous faire des propositions complémentaires, réfléchir à la réforme des régimes spéciaux, ce que nous ne pouvons faire dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. C’est pourquoi je voterai l’amendement de suppression : ces dispositions devraient faire l’objet d’un texte différent.
J’ai été étonnée d’entendre ce qu’a dit la ministre sur les proportions respectives des cotisations et de la CSG dans le budget de la Sécurité sociale.
Je viens de retrouver le tableau de 2012 : les cotisations représentaient 58,4 % des recettes et la CSG 20,4 %.
Vous ne m’avez pas écoutée assez attentivement, madame la députée : je vous ai parlé non de la Sécurité sociale, mais de l’assurance maladie.
Non, je ne me trompe pas. Je le dis d’autant plus tranquillement que, dans le langage courant, nous avons tendance à parler de la Sécu pour désigner l’assurance maladie. Or, en droit, et non dans le vocabulaire quotidien que j’emploie moi-même, la Sécurité sociale englobe quatre branches, dont la branche vieillesse qui est évidemment financée par les cotisations et non par l’impôt.
L’amendement no 522 n’est pas adopté.
L’article 20, amendé, est adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 21.
La parole est à M. Denis Jacquat, rapporteur.
On nous explique que le coût des complémentaires santé est plus élevé pour les personnes de plus de 65 ans et que celles-ci doivent donc consentir un effort supplémentaire. On fait appel à la concurrence pour sélectionner les meilleures couvertures santé, lesquelles seront soumises à une fiscalité adaptée.
Cet article est très contestable. Alors que l’on fête les 70 ans de la Sécurité sociale universelle, on crée un dispositif spécifique pour les personnes de plus de 65 ans. Le Gouvernement choisit donc d’amplifier le principe de segmentation de la protection sociale.
Cette segmentation constitue une atteinte au système reposant sur la solidarité et la mutualisation des risques. Il ajoute à la complexité, sans étude préalable sur les conséquences de cet article. Il existe déjà huit dispositifs d’accès à la complémentaire. C’est pourquoi il convient de supprimer cet article qui ne fait absolument pas l’objet d’un consensus. Une remise à plat des voies d’accès à la complémentaire santé ainsi qu’une réponse universelle au problème sont nécessaires.
Les dispositions contenues dans cet article visant à faciliter l’accès à une complémentaire santé pour les personnes âgées de plus de 65 ans sont révélatrices d’un problème de fond : celui de l’insuffisante prise en charge des soins par la Sécurité sociale et du coût de ces soins pour nos concitoyens.
Force est de constater que de plus en plus de personnes accèdent aux soins selon leurs moyens et non selon leurs besoins.
Devant cette situation très préoccupante, vous proposez divers aménagements que j’ai déjà qualifiés de « rustines » dans la discussion générale, car ils ne règlent pas le problème de fond, mais se contentent d’atténuer les difficultés pour certains. C’est le cas de la couverture maladie universelle complémentaire, la CMU-C, ou de l’aide au paiement d’une complémentaire santé, l’ACS, pour les personnes à faibles revenus. C’est aussi le cas du dispositif complexe que vous créez dans cet article 21 en faveur des personnes âgées de plus de 65 ans et c’est le cas de celui de l’article 22 concernant l’ACS pour les CDD courts.
Nous espérons que ce dispositif améliorera la prise en charge des soins pour les personnes âgées, mais nous sommes sceptiques tant le mécanisme est complexe et discutable – à savoir un avantage fiscal pour inciter les organismes complémentaires à leur présenter des offres de qualité à un prix raisonnable.
Avec cette procédure de mise en concurrence par les prix, vous vous inscrivez complètement dans les lois du marché. Permettez-nous de douter de l’efficacité de ces mesures qui, encore une fois, ne sauraient remplacer l’indispensable amélioration de prise en charge par la Sécurité sociale.
Enfin, je profite de ce propos pour réitérer ma demande : je souhaite que l’assurance maladie puisse se positionner en tant que complémentaire santé destinée à tous les publics. J’avais déposé un amendement en ce sens. Il a été déclaré irrecevable et je m’en étonne, parce que le même amendement avait été déposé l’an dernier par mes soins et il était recevable : cela nous donne la mesure du caractère aléatoire de ces décisions.
Que l’on en soit satisfait ou non, force est de reconnaître que la situation de la protection sociale complémentaire a été profondément bouleversée par la mise en oeuvre de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.
On a choisi à ce moment-là, sur l’initiative des partenaires sociaux, de généraliser la couverture complémentaire santé pour les salariés par le biais de l’entreprise. Si cette décision a représenté une avancée pour les 400 000 salariés qui ne disposaient pas de couverture complémentaire, nous savions qu’allait dès lors se poser la question de l’universalité de la protection sociale complémentaire et qu’il nous fallait aller vers la généralisation, notamment pour les non-salariés, les chômeurs et les retraités.
Dans ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le Gouvernement a choisi de proposer – je crois qu’il est très important qu’il l’ait fait – des mesures en faveur des salariés ne bénéficiant pas de contrats à durée indéterminée et ne travaillant pas à temps plein, ainsi qu’en faveur des retraités.
Il fallait effectivement agir, et il nous appartient de nous assurer que les dispositifs qui seront mis en place à travers les articles qui vont venir en discussion soient les plus pertinents possible et qu’ils ne pénalisent pas, en particulier, les acteurs non lucratifs de la protection sociale complémentaire. En la matière, un travail a été fait en commission : il sera poursuivi ici, en séance, au travers de plusieurs amendements.
Au-delà de cet objectif, il ne faut pas oublier qu’il restera encore un certain nombre de choses à faire en matière de généralisation de la protection sociale complémentaire : se pose en effet toujours la question des fonctionnaires, de certains chômeurs, des salariés indépendants, ainsi que, par ailleurs, celle des marges de manoeuvre qui existent encore pour financer de nouveaux dispositifs d’aide – je pense notamment aux exonérations de cotisations sur la part employeur sur les contrats collectifs dont la Cour des comptes a, à plusieurs reprises, souligné le caractère contre-productif.
Madame la ministre, je voudrais conclure en vous posant une question : puisque l’article 2 de la loi relative à la sécurisation de l’emploi prévoyait que le Gouvernement remette au Parlement « un rapport sur les aides directes et indirectes accordées au financement de la complémentaire santé ainsi que sur une refonte de la fiscalité appliquée aux contrats », vous avez saisi l’Inspection générale des affaires sociales afin qu’un tel rapport puisse être rédigé.
À quelle échéance sera-t-il remis ? En effet, il contiendra sans doute un certain nombre d’informations intéressantes qui nous permettront de continuer à travailler sur la généralisation de la complémentaire santé.
L’article 21 fait couler beaucoup d’encre : il est très contesté. Dans un communiqué commun, un certain nombre d’institutions ont déploré qu’on crée là un dispositif spécifique pour les personnes de plus de 65 ans.
Selon toutes ces institutions ayant pignon sur rue – je suppose, madame la ministre, que vous les avez auditionnées –, le Gouvernement a choisi d’amplifier le principe de segmentation de la protection sociale. Je ne pense que c’était à l’origine votre objectif, car cela crée de la complexité.
Je me pose une question : pourquoi ce seuil de 65 ans ? Au demeurant, à cet âge, tout le monde n’est pas à la retraite.
Deuxième question : même en admettant ce seuil, pourquoi ne souhaite-t-on pas aider plutôt à la souscription de contrats par les personnes concernées ? Les personnes âgées de plus de 65 ans auront-elles encore la liberté de choix ?
Le groupe UDI ne peut que souscrire aux objectifs définis par cet article 21. D’ailleurs, je rappelle que nous avions soutenu – et peut-être voté –, lors des débats sur la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, le dispositif de généralisation de la complémentaire santé.
Aussi nous souscrivons à la volonté de donner aux personnes de 65 ans et plus la possibilité d’accéder aux offres d’assurance complémentaire de santé.
Néanmoins, derrière cette louable intention, se cachent de nombreuses difficultés, coûteuses et dangereuses – y compris pour les assurés eux-mêmes. Ces difficultés ont été mises en lumière, dès l’examen en commission, par Mme Delaunay elle-même, qui a souligné qu’il était risqué d’accorder une prépondérance au critère du prix.
La couverture santé des personnes âgées et leur accès aux soins ne peuvent être réduits à une simple mise en concurrence. En segmentant l’offre, le système de mise en concurrence participe à la destruction des mécanismes de solidarité et de mutualisation sur lesquels sont fondées les mutuelles.
Ce système conduira, à terme, à une augmentation des cotisations pour les plus âgés, puisque la solidarité inter-générationnelle ne pourra plus s’exercer. Pour ces raisons, ce dispositif nous laisse un peu perplexes.
Nous proposons évidemment la suppression de l’article 21. La méthode est en réalité tout à fait détestable, et l’ensemble du monde mutualiste, ainsi que les syndicats, s’en sont offusqués.
En juin 2015, François Hollande annonçait une mesure énigmatique pour les retraités : la généralisation de la complémentaire santé. Tout le monde s’en est un peu étonné, et une étude, comportant une évaluation du dispositif envisagé, devait en principe être menée.
Et puis, le 7 octobre 2015, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et le secrétaire d’État chargé du budget adressaient à l’IGAS une lettre de mission, demandant une remise à plat des dispositifs, alors qu’ils n’avaient pas encore pu être adoptés dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
L’ensemble des acteurs se révolte face à cette méthode et on comprend peu l’urgence de cette réforme, sinon, peut-être, celle qu’il y a pour le président Hollande à se constituer un socle électoral pour son programme. Quoi qu’il en soit, tout cela n’est pas très sérieux.
En créant un dispositif spécifique d’appel d’offres pour les personnes de plus de 65 ans, vous contribuez à amplifier le principe de segmentation de la protection sociale. Il existe déjà, comme cela a été rappelé tout à l’heure, huit dispositifs d’aide à la complémentaire santé. Cette segmentation constitue un frein à la solidarité et à la mutualisation des risques entre les actifs et les inactifs.
Par ailleurs, quand on parle d’appel d’offres sans en préciser les termes, il est loisible de penser que ce seront les acteurs les plus importants qui répondront, en proposant les prix les plus bas possible. Le prix constituera donc le seul élément de différenciation, au détriment de la qualité. Souvent, une mutuelle peu chère sera donc proposée.
Il fallait qu’une étude du système soit fournie, ainsi qu’une étude d’impact. Une concertation aurait également été tout à fait nécessaire. Or le Gouvernement fait tout le contraire : c’est pour cette raison que l’ensemble des acteurs du monde mutualiste, mais également syndical – je pense aux grands syndicats comme l’UNSA et la CFDT – est absolument opposé à ce procédé. Cela devrait nous amener à rejeter cet article.
Oui, mais je souhaite développer mon propos, car je ne me suis pas encore exprimé sur l’article 21.
Monsieur le président, comme vous avez accéléré le rythme des débats, je n’ai pas eu le temps de m’exprimer sur cet article dont l’importance est, là encore, considérable. Il illustre le comportement d’apprenti sorcier du Gouvernement en matière de protection sociale, en l’occurrence dans le domaine de l’assurance complémentaire.
Je voudrais d’abord démontrer à quel point le Gouvernement est loin des réalités des employeurs et des entreprises.
Madame la ministre, au 1er janvier 2016, les entreprises vont de voir mettre en place le compte pénibilité, la déclaration sociale nominative, la réforme des contrats responsables, ainsi que la généralisation de la complémentaire santé. Et vous prévoyez, pour la suite, d’autres mesures de complexification.
Madame la ministre, avez-vous déjà rempli ces papiers ? Avez-vous conscience de la somme d’heures de travail qu’ils représentent ? Je n’en ai pas l’impression, car dans ce cas vous auriez pris d’autres décisions.
La complémentaire pour les personnes retraitées de plus de 65 ans, pose, en premier lieu, un problème constitutionnel. Pourquoi la réserver uniquement aux personnes retraitées alors que beaucoup de nos concitoyens vont devoir travailler au-delà de cette échéance ? Cela crée donc une inégalité devant l’impôt qui soulèvera un problème évident de constitutionnalité.
En second lieu, vous procédez à un véritable hold-up car vous allez réserver aux grands organismes, dont vous devez être proche,…
Cela faisait longtemps !
…ce marché qui évidemment est très important.
Vous écartez ainsi les sociétés d’assurance ou les mutuelles qui n’auront pas la capacité de couvrir un tel risque à un prix compétitif, puisqu’il s’agira d’un appel d’offres gigantesque.
Il y a également là, par conséquent, quelque chose de dangereux et de malsain.
Par ailleurs, vous allez évidemment faire porter le financement du dispositif, une nouvelle fois, par les actifs. Une fois encore, c’est la génération des actifs qui va financer le prix attractif de ces complémentaires avec l’avantage fiscal lié à la réduction de la taxe de solidarité additionnelle de l’ordre de 2 %.
Cet avantage ne serait pas lié à l’écart entre la cotisation demandée et le coût réel du risque encouru sur une population âgée de plus de 65 ans, de plus en plus importante et au sein de laquelle la prévalence des pathologies chroniques et graves reste plus élevée que dans le reste de la population.
Le Gouvernement fait donc porter sur les actifs cet effort de solidarité : c’est inacceptable.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 554 .
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 658 .
La commission a rejeté tous ces amendements de suppression. En effet, les personnes de plus 65 ans rencontrent, dans l’accès à la complémentaire santé, des freins spécifiques.
Messieurs, la segmentation est de fait : le montant des primes des contrats individuels peut être majoré jusqu’à 150 % par rapport à celles des contrats souscrits au cours de la période d’activité. Les personnes âgées sont, par ailleurs, celles qui supportent le reste à charge le plus élevé.
Certes, la CMU-C et l’ACS permettent aux plus modestes d’accéder à la complémentaire mais, vous le savez, ces dispositifs sont soumis à des conditions de ressources. Par ailleurs, ils ne répondent pas forcément aux besoins spécifiques – par exemple en matière de prothèses auditives – des personnes âgées de plus de 65 ans.
L’article 21 refuse le statu quo et propose une offre spécifique pour les plus de 65 ans, sans déstabiliser les dispositifs existants. Il invite les complémentaires à leur proposer une offre adaptée, à un coût raisonnable.
Je vous rassure : un amendement permettra d’écarter les offres déraisonnablement basses.
La commission a en effet adopté un amendement qui vise à améliorer et à clarifier la rédaction de cet article. En attendant, je vous propose donc de rejeter cette série d’amendements de suppression.
J’émets un avis défavorable sur ces amendements de suppression, et saisis l’occasion pour donner un certain nombre d’explications à la fois sur les objectifs recherchés et sur la procédure proposée.
Auparavant, et cela a de l’importance, j’indique que nous parlons bien des complémentaires santé.
En effet, à plusieurs reprises, vous avez évoqué l’idée de l’universalisme de la couverture complémentaire santé.
Mais si. Or il n’y a pas d’universalisme en matière de complémentaire santé facultative : l’universalisme ne concerne, évidemment, que l’assurance maladie obligatoire.
Quel est l’objectif du Gouvernement ? Garantir l’accès des personnes âgées de plus de 65 ans à une complémentaire santé leur apportant de bonnes garanties. Et je parle bien de personnes âgées de plus de 65 ans, et non pas de personnes retraitées.
Si vous lisez l’article 21, vous verrez qu’il n’y est fait à aucun moment référence à la situation de retraité, puisque des personnes peuvent être retraitées à des âges très différents. Le texte propose donc un critère d’âge.
Pourquoi ce critère d’âge ? Il est nécessaire et légitime à deux titres. Il l’est d’abord parce que les personnes âgées doivent, au fur et à mesure de leur vieillissement, supporter des hausses de tarifs des complémentaires santé qui leur sont proposées.
Ces hausses peuvent – et c’est de plus en plus fréquent au fur et à mesure de leur avancée en âge – les conduire à renoncer à cette couverture. En effet, ces personnes voient, année après année, les primes qu’elles doivent payer augmenter.
Cela en amène certaines à renoncer à leur complémentaire santé. On voit en effet que le taux de renoncement à une complémentaire santé augmente avec l’âge. On en voit d’autres souscrire des complémentaires mal adaptées à leurs besoins. Voilà la première raison pour laquelle il nous paraît nécessaire de proposer un dispositif.
La seconde raison, qui explique d’ailleurs l’augmentation des primes en fonction de l’âge, tient au fait que les besoins de santé, ainsi que les dépenses qui restent à la charge des personnes âgées pour les satisfaire, augmentent.
Certains de ces besoins sont d’ailleurs spécifiques et coûteux : je pense par exemple aux audioprothèses. Certains d’entre vous – notamment M. Jacquat – m’ont interrogé sur ce point : je vous confirme que l’intention du Gouvernement est bien d’intégrer la prise en charge de ces audioprothèses dans les contrats qui seraient retenus dans le cadre de la mesure proposée.
Notre objectif est donc de faciliter l’accès des personnes âgées de plus de 65 ans à une couverture complémentaire santé. Comment y parvenir ? En instaurant un appel d’offres. C’est ce que nous avons fait d’ailleurs pour l’aide à la complémentaire santé, mais les conditions sont différentes puisque nous proposons de maintenir la liberté de choix. Il y aura un appel d’offres pour sélectionner des contrats, mais tous les contrats existants pourront continuer d’exister sur le marché.
Sur quels critères certains contrats seront-ils sélectionnés, identifiés, dans le cadre de la procédure ?
Mme la rapporteure a parlé des prix, des garanties et de la qualité, et précisé, de façon utile, que le prix serait considéré en fonction des niveaux de garantie, lesquels seront très précisément définis. Il s’agit évidemment non pas de favoriser une logique de low cost mais de garantir le meilleur rapport garanties sur prix ou, pour employer le vocabulaire technique, prestations sur cotisations. C’est ainsi que nous avons d’ailleurs procédé pour l’aide à la complémentaire santé. Les complémentaires ont proposé des prix pour trois niveaux de garanties, et c’est ce couple prix-garanties qui fait l’objet d’une note.
Par ailleurs, à côté de ces deux éléments – les prix et les remboursements –, il est prévu de prendre en compte d’autres critères relatifs à la qualité de service, comme l’existence ou non de réseaux de soins, l’accueil proposé aux assurés, par exemple l’amplitude horaire ou le nombre de points de contact, l’offre ou non de dispositifs de prévention, ce dernier point pouvant être particulièrement intéressant pour l’accompagnement du vieillissement ou la prévention de la perte d’autonomie.
La logique de la mesure, c’est donc bien le mieux-disant et non le moins-disant.
L’amendement que Mme la rapporteure a annoncé permettra d’écarter des offres anormalement basses et nous prémunira explicitement contre le risque de dumping, d’offres prédatrices. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement y sera favorable.
Bien entendu, comme nous sommes attachés à l’objectivité et à la transparence de la procédure de sélection, les critères relatifs au prix et aux garanties, qui sont strictement quantitatifs, occuperont une part majoritaire dans la notation par rapport aux critères qualitatifs. C’est d’ailleurs ce que traduit la rédaction de l’amendement de Mme la rapporteure, qui présente en premier les garanties et les prix puis, sur un autre plan, la qualité de service.
J’entends certains évoquer, pour la regretter, la segmentation de la complémentaire santé en différentes populations et différentes tranches d’âge, mais il serait temps d’ouvrir les yeux : la segmentation existe déjà. Elle existe pour les assurés en contrat individuel, puisque les complémentaires appliquent toutes une tarification par âge, et la majorité d’entre elles appliquent ce que l’on appelle une tarification convexe, c’est-à-dire que les hausses de tarifs sont de plus en plus fortes à mesure que l’âge augmente. On a donc de la segmentation alors même que différentes classes d’âge sont couvertes au sein d’un même organisme.
Vous allez faire monter les cotisations des actifs, c’est bien ce que nous disions !
C’est en cela que nous parlons de complémentaires santé et non pas d’assurance maladie, puisque l’assurance maladie, au sein d’un même organisme, organise la mutualisation des risques entre les différentes populations, quel que soit leur âge et quels que soient leurs risques alors que, au sein d’un même organisme de complémentaire santé, il y a des prix différents selon les âges puisqu’il n’y a pas de solidarité entre classes d’âge et que chaque classe d’âge paie ce qui correspond à son risque.
Comme l’a relevé notamment Mme Carrey-Conte, la généralisation de la complémentaire santé en entreprise, qui constituera un progrès pour des millions de salariés et leurs familles, peut d’ailleurs contribuer à cette segmentation en déplaçant les actifs et leurs familles des contrats individuels vers des contrats collectifs. La proportion des personnes âgées au sein des contrats individuels devrait donc s’accroître fortement.
La mesure proposée à l’article 21 prend acte de cette évolution et souhaite prévenir les effets de cette segmentation sur le coût des contrats pour les personnes âgées. Nous attendons de cette mesure qu’elle conduise les organismes qui ont une politique de segmentation à faire un effort dans le cadre de la mise en concurrence afin d’améliorer le rapport garanties-prix.
Il est vrai que certains organismes complémentaires ont une pratique tarifaire qui refuse cette segmentation, avec des écarts de tarif en tout cas plus limités entre classes d’âge. Notre conviction est que la mesure proposée ne devrait en aucun cas fragiliser ce modèle car, d’une part, les contrats pourront continuer d’être proposés et, d’autre part, les personnes âgées qui sont ainsi couvertes auront tout intérêt à conserver cette couverture.
Au-delà, d’autres populations pourront évidemment faire l’objet de réflexions, et la mesure que nous proposons pour les personnes âgées de plus de 65 ans n’interdit pas une réflexion plus globale à terme.
Nous avons saisi l’IGAS, qui doit nous remettre au début de l’année 2016 un rapport sur une refonte, mais à moyen terme, des différentes aides fiscales et sociales qui existent.
Pour l’ensemble de ces raisons, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, je suis défavorable aux amendements de suppression de cet article.
Je vous remercie, madame la ministre, pour toutes ces explications très utiles, mais je me pose toujours les mêmes questions.
Vous nous dites que le taux de renoncement augmente avec l’âge, ce que nous constatons effectivement, et que les prises en charge augmentent également – c’est tout aussi exact. Mais pourquoi instaurez-vous alors ce seuil de 65 ans ?
Par ailleurs, vous nous avez rassurés en nous disant que la liberté resterait de mise, mais, puisque les offres sélectionnées bénéficieront d’un label et que les critères seront définis par décret, qui, au final, va juger la qualité de l’offre ?
Cet amendement de la commission contient plusieurs dispositions, qui ont d’ailleurs déjà été en grande partie exposées, visant à améliorer et à clarifier la rédaction de l’article 21.
Il s’agit d’abord de supprimer les termes de « mise en concurrence ». En effet, contrairement à la procédure d’appel d’offres pour la complémentaire santé, qui a sélectionné un nombre limité d’offres, toutes les offres répondant aux critères fixés pour la procédure seront sélectionnées.
Il s’agit ensuite de supprimer le caractère « prépondérant » du montant des primes afin que le montant des primes soit apprécié de manière équilibrée, au regard des garanties offertes par le contrat proposé.
Il s’agit enfin de prévoir la possibilité d’écarter de l’appel d’offres une offre dont le montant des primes serait anormalement, déloyalement bas.
Nous avons par ailleurs émis le souhait de faire évoluer encore la rédaction pour introduire la notion de label, susceptible d’être un facteur de clarté supplémentaire dans ce texte. Je vous inviterai donc à adopter le sous-amendement que va présenter le Gouvernement.
Toutes ces dispositions seront complétées par l’amendement no 908 rectifié , qui vise à instaurer un plafonnement de l’évolution des primes afin de ne sélectionner que des offres dont les primes sont stables dans le temps.
Je suis favorable à l’amendement présenté par Mme la rapporteure, sous réserve de l’adoption de deux sous-amendements, le sous-amendement no 977 , qui est une précision rédactionnelle, et le sous-amendement no 983 , qui – il faut savoir rendre à César ce qui revient à César –, met en forme une demande de parlementaires. Compte tenu de la procédure législative, il est apparu plus simple que ce soit le Gouvernement qui dépose un sous-amendement, mais c’est le résultat de discussions avec les parlementaires.
La préoccupation qui a été exprimée, et que le Gouvernement entend très bien, c’est que l’on ait, au terme de la procédure d’appel d’offres – les offres présentées ayant été examinées par une commission, comme dans tous les appels d’offres –, un dispositif lisible et bien identifié par les personnes susceptibles de bénéficier de ces contrats ou en tout cas de s’interroger sur leur souhait d’y souscrire. D’où l’idée d’un label, qui ne se substitue pas à la procédure d’appel d’offres et de mise en concurrence mais vient couronner la procédure de sélection : un label sera décerné aux contrats qui auront été sélectionnés.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir le sous-amendement no 973 .
L’objectif est le même. L’appel d’offres n’étant pas fermé, la caractérisation des contrats retenus peut relever d’une labellisation.
Ils n’ont pas été examinés par la commission, c’est donc un avis personnel que je vous donne.
Il me semble, monsieur Claireaux, que le sous-amendement du Gouvernement répond à votre souhait. Je vous demande donc de retirer le vôtre car la rédaction du Gouvernement me paraît plus satisfaisante.
Je vous demande moi aussi, monsieur Claireaux, de retirer votre sous-amendement.
Je vous remercie, madame la rapporteure, pour les clarifications que vous apportez par cet amendement. Il y a toutefois un élément qui n’a pas été évoqué : le taux du crédit d’impôt.
Le taux proposé est de 2 % et j’aurais souhaité savoir comment il avait été calibré au regard des études actuarielles qui peuvent exister. Nous évitons en effet de multiplier les crédits d’impôt dans le projet de loi de finances, et je parle de nouveau sous le contrôle de M. le secrétaire d’État chargé du budget.
J’entends bien qu’une mission de l’IGAS étudiera l’ensemble des aspects financiers. Je regrette pour ma part que nous n’ayons pas eu d’étude d’impact précise sur la calibration de ce crédit d’impôt et que nous n’ayons un rapport de l’IGAS qu’après le vote de cet article.
Ma question porte aussi sur le crédit d’impôt.
Dans le texte initial, le crédit d’impôt n’était pas restituable. J’avais d’ailleurs présenté en commission un amendement tendant à supprimer ce petit bout de phrase parce qu’il me paraissait assez curieux d’offrir un crédit d’impôt aux personnes âgées de plus de 65 ans en prévoyant que, si elles ne sont pas imposables, et il s’agit donc des personnes les moins aisées, ce n’est pas restituable.
Le texte proposé par Mme la rapporteure prévoit que les modalités d’imputation de ce crédit d’impôt seront définies par décret. J’aurais voulu savoir ce qu’il y aura dans le décret parce que, si c’était pour avoir la même chose, c’est-à-dire que les personnes âgées les plus en difficulté n’ont pas le droit au crédit d’impôt parce qu’elles ne paient pas d’impôt, ce serait un peu fort de café.
Je précise que cet amendement émane du groupe socialiste.
Madame la ministre, je sais que le sujet que je vais aborder relève du domaine réglementaire, mais mon propos fait suite aux préoccupations évoquées notamment par Mme Fanélie Carrey-Conte. Au passage, je note que, parmi les organismes complémentaires d’assurance maladie – les OCAM –, les organismes mutualistes couvrent pour les deux tiers les contrats individuels, et qu’ils ont eu la crainte, sinon la hantise, au moment même où ils sont exposés à la généralisation de la complémentaire santé pour les salariés du secteur privé, de faire face à des opérations de dumpingprovenant d’autres types d’OCAM, notamment les instituts de prévoyance…
…et les sociétés d’assurance, qui pourraient minorer exagérément les prix des contrats individuels proposés en pensant se rattraper sur leurs autres offres de prévoyance.
Voilà pourquoi il est important, madame la ministre, que vous ayez d’ores et déjà précisé que les offres low cost seront écartées.
S’agissant de la composition de la commission qui aura à juger des offres, il serait souhaitable qu’un organisme tel que l’ACPR – l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – puisse être présent. Si des représentants des OCAM y étaient introduits, cela répondrait à l’objection que vous m’avez faite en évitant tout conflit d’intérêts et cela rassurerait à certains égards les organismes mutualistes.
Le sous-amendement no 973 est retiré.
Mes chers collègues, je vous indique qu’il reste 589 amendements en discussion.
Mouvements divers.
Je crois que chacun aura compris que nous devons tous – à part bien sûr Mme la ministre et M. le secrétaire d’État – faire preuve d’esprit de synthèse et de concision dans notre expression. J’appliquerai à la lettre l’excellent règlement qui remonte à la présidence de M. Accoyer : un orateur pour, un orateur contre, et pour deux minutes au plus.
Je suis saisi de deux amendements, nos 908 rectifié et 828 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour soutenir l’amendement no 908 rectifié .
L’un des objectifs poursuivis par l’article 21 est de faire baisser le coût des contrats. Mon amendement vise à plafonner l’évolution du montant des primes des contrats sélectionnés pendant toute la période couverte par l’appel d’offres, le taux de revalorisation des primes devant correspondre à l’évolution annuelle de l’ONDAM, donc à un niveau très modéré.
J’ai tenu mon contrat, monsieur le président.
Favorable.
Sourires.
L’amendement no 908 rectifié est adopté et l’amendement no 828 tombe.
Juste un mot pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : je précise à M. Vercamer, et je l’ai dit en commission, que le crédit d’impôt concernera les organismes proposant le contrat de complémentaire santé pour les inciter à respecter le cahier des charges, et non les personnes physiques contractantes.
J’indique à l’intention de Mme Rabault que le taux de 2 % n’a rien à voir avec le profil d’évolution des tarifs complémentaire santé en fonction de l’âge. Nous ne modifions pas la contribution financière des organismes selon le profil du contractant, mais il s’agit d’une incitation fiscale pour qu’il y ait plus d’offres intéressantes en direction des personnes âgées.
L’article 21, amendé, est adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 22, mais je pense qu’ils vont y renoncer.
N’est-ce pas, monsieur Tian ?…
J’ai un peu de mal à comprendre une telle précipitation, monsieur le président.
Il ne s’agit pas de précipitation, mais de l’application d’un règlement que vous avez voté.
Cet article prévoit la création d’une aide individuelle de l’employeur destinée à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les salariés précaires. Cela suscite bien sûr de nombreuses interrogations. Ainsi, cette disposition va percuter les accords de branche, je pense notamment à celle de l’intérim. Comment l’entreprise sera-t-elle en mesure de vérifier la nature responsable du contrat souscrit par le salarié ? Comment l’employeur pourra-t-il vérifier que le salarié ne se trouve pas dans une situation de cumul ? Troisième question : comment sera calculé le montant de l’aide individuelle dans le cadre de la portabilité ?
Il s’agit là encore d’une charge supplémentaire pour les entreprises. Je rappelle qu’au 1er janvier 2016, une avalanche d’obligations d’une complexité kafkaïenne va s’abattre sur elles.
J’ajoute que ce dispositif constituera aussi une charge financière pour les entreprises. En plus, il faudra s’assurer qu’il n’y a pas de cumul avec une autre aide à la complémentaire santé ou avec la CMU-C. Qui contrôlera ? Encore un dispositif généreux en apparence mais qui donnera lieu à des dérapages et qui compliquera, lui aussi – on sait que ce n’est pas le premier souci du Gouvernement –, la vie des entreprises, et rendra pour certaines d’entre elles leur mission impossible.
L’article 22 du PLFSS pour 2016 a pour objet d’instaurer un chèque santé versé par l’employeur au salarié précaire dispensé de s’affilier au contrat collectif d’entreprise afin de favoriser son accès à une couverture complémentaire individuelle. Cela est fort louable. Cependant, l’article prévoit une modification par décret des catégories de salariés dispensés d’affiliation. Je souligne que cette nouvelle multiplication de mesures catégorielles va les rendre totalement illisibles pour la population.
Madame la ministre, l’article 22 modifie et complète le dispositif de couverture complémentaire en matière de frais de santé introduit pour tous les salariés par l’article 1er de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, s’agissant notamment de la situation des salariés relevant de contrats très courts ou ayant une très faible quotité de travail.
Dans la discussion générale, je m’étais interrogé sur d’éventuelles difficultés concernant l’applicabilité de cet article à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les échanges que j’ai eus avec votre cabinet sont plutôt rassurants à ce sujet. Mais il serait utile que la volonté du législateur soit précisée ici même. Pouvez-vous donc nous confirmer que les dispositions de l’article 22 seront bien pleinement applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon ?
Comme Bernard Accoyer et Denis Jacquat viennent de le montrer, ce PLFSS contribue, une nouvelle fois, à la multiplication des mesures catégorielles. Voilà qui segmente encore plus la population. L’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire, l’UNOCAM, s’est étonnée elle-même de telles dispositions. C’est un nouveau pas de plus dans ce PLFSS dans la segmentation par des mesures catégorielles. Nous ne pouvons qu’être contre.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 600 .
Avec un souci de rapidité, monsieur le président, je prolongerai les arguments déjà avancés : le Gouvernement crée une nouvelle charge pour les entreprises et récupère ainsi d’une main ce qu’il leur a donné de l’autre par le CICE et le pacte de responsabilité. Je ne suis pas dupe, les entreprises non plus. Et c’est l’emploi qui va trinquer. On croyait savoir jusqu’à présent que l’emploi était la priorité du Gouvernement : on se rend compte qu’il n’en est rien.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements de suppression ?
L’avis est défavorable. En effet, la généralisation de la complémentaire santé via des contrats collectifs proposés par l’employeur paraît peu adaptée pour les salariés travaillant dans le cadre d’un contrat très court ou chez plusieurs employeurs. Ces salariés pourraient être contraints de se dispenser de complémentaire ou de devoir en changer très fréquemment au gré de leur changement de contrat de travail. Le dispositif proposé par cet article facilite la dispense d’affiliation au contrat collectif en contrepartie d’une contribution de l’employeur destinée au financement du contrat d’assurance complémentaire individuel. Je souligne que cette mesure présente un caractère d’urgence car sinon, au 1er janvier 2016, de nombreuses catégories de salariés risqueraient d’être peu ou pas couverts.
Avis défavorable. Je tiens à rassurer M. Claireaux sur le fait que ces dispositions seront bien applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour soutenir l’amendement no 624 .
L’amendement no 624 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je propose de supprimer l’alinéa 4, car le présent article modifie de manière substantielle les règles relatives à la participation de l’employeur au financement de la couverture complémentaire santé obligatoire des salariés. Ce n’est pas acceptable.
L’amendement no 336 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’Assemblée n’ayant pas voulu supprimer l’alinéa 4, cet amendement vise à en modifier la rédaction afin de ne pas introduire d’ambiguïté concernant la possibilité pour les entreprises de continuer à proposer à leurs salariés des contrats surcomplémentaires non responsables. De tels contrats existent actuellement et sont déjà autorisés par les textes. Ils sont assujettis à une taxe plus élevée.
En raison de la modification récente du cahier des charges des contrats responsables, les entreprises qui souhaitent continuer à proposer à leurs salariés une couverture comprenant des garanties désormais supérieures aux plafonds fixés doivent pouvoir le faire. C’est pourquoi nous proposons, dans un but de clarification, de modifier l’alinéa 4 et de le rédiger tel qu’il est indiqué dans l’amendement.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour soutenir l’amendement no 625 .
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements, hormis sur l’amendement no 625 .
Même avis.
Cet amendement soulève une difficulté que pourraient rencontrer certains salariés dans l’application de l’article 22.
Le transfert vers le contrat individuel peut conduire un salarié à perdre les garanties associées à un contrat de complémentaire santé, lorsqu’il relève d’un accord de branche, notamment en matière de portabilité, de droit non contributif, de politique de prévention ou d’action sociale de la branche. Dans ces cas, l’objectif de généralisation pourrait ne pas être atteint puisque le salarié pourra choisir de ne pas être couvert.
Certaines branches professionnelles, telles que la restauration rapide, les intermittents, le secteur de la propreté ou la boulangerie, identifiées par le rapport sur la solidarité et la protection sociale complémentaire collective rédigé par M. Libault, ont mis en place des dispositifs adéquats, qui ont fait leurs preuves. Dans ces branches, la mesure pourrait se traduire par une réduction des solidarités et une augmentation des cotisations sociales pour les entreprises.
C’est la raison pour laquelle cet amendement vise, en cohérence avec les préconisations du rapport rédigé par M. Combrexelle, à assouplir le dispositif afin que puissent primer des accords conventionnels, lorsqu’ils organisent des solutions spécifiques pour ces contrats de courte durée.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 284 .
Tous ces excellents amendements, y compris celui de M. Bapt, à qui, pour une fois, nous adressons quelques compliments, montrent que le travail du Gouvernement a été sérieusement improvisé. Il s’agissait surtout d’une posture pour faire croire à une avancée. C’est pourquoi l’Assemblée doit corriger de fond en comble l’article 22.
Votre amendement et celui de M. Bapt sont incompatibles, monsieur Accoyer...
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?
L’amendement de M. Bapt prévoit qu’un accord de branche puisse obliger les salariés précaires à adhérer au contrat collectif, alors que l’article 22 dispose que certains cas de dispense soient d’ordre public, c’est-à-dire qu’un salarié puisse demander à être dispensé du contrat collectif, même si l’accord d’entreprise ou de branche ne le prévoit pas.
Tous les accords de branche ne sont en effet pas toujours adaptés aux salariés en contrat précaire ou travaillant pour plusieurs employeurs. Certains ne prévoient pas les cas de dispense, pourtant pertinents, par exemple lorsqu’un salarié est déjà couvert par la complémentaire d’un autre employeur. Cette situation peut entraîner des doubles cotisations, ce qui est évidemment déplorable pour des personnes en contrat précaire.
J’ajoute que, selon toute vraisemblance, si une branche a mis en place un dispositif particulièrement adapté à la situation de l’employeur ou des employeurs multiples, il n’y a pas lieu de supposer que l’article 22 ferait échec à son attractivité. Si le dispositif est attractif, les salariés ne devraient pas avoir besoin de faire valoir leur droit à être dispensés du contrat collectif.
Je demande donc à M. Bapt de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, j’y serai défavorable, comme je le suis pour les autres amendements.
Je demande à M. Bapt de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, j’émettrai, comme sur les autres amendements, un avis défavorable.
Les salariés précaires, à contrats courts, peuvent se voir proposer une couverture complémentaire santé collective par un accord de branche. Vous proposez, monsieur Bapt, comme les autres auteurs d’amendements, que, dans le cas où un accord collectif est proposé, le salarié concerné n’ait pas le choix et soit obligé de prendre cette couverture collective.
Nous souhaitons que, dans ce cas, le salarié ait la liberté de choix – je ne doute pas que ce mot résonnera aux oreilles de l’opposition – car, dans certaines circonstances, le salarié peut être plus avantageusement couvert, soit par un conjoint qui dispose d’un contrat plus avantageux, soit par le contrat individuel qu’il pourra prendre, avec l’aide de ses employeurs.
Comme l’a fort justement indiqué Mme la rapporteure, si le contrat collectif est manifestement plus favorable, alors le salarié n’aura pas à hésiter et choisira naturellement le contrat collectif proposé.
Tout en comprenant la préoccupation qui est la vôtre, monsieur Bapt, celle de permettre une bonne couverture mutualisée – une mutualisation permet en général des garanties de meilleure qualité –, j’estime que l’objectif que vous poursuivez est atteint par la proposition du Gouvernement.
Cet amendement est utile car il a permis à Mme la ministre de préciser que le salarié aura le choix d’adhérer à la meilleure couverture complémentaire. J’accepte donc bien volontiers de le retirer.
L’amendement no 521 est retiré.
Nous maintenons nos amendements et soutenons M. Bapt, auquel nous sommes reconnaissants d’avoir repéré avec nous les insuffisances du dispositif. Nous lui marquons notre solidarité face à la rapporteure et la ministre, qui ne le ménagent pas.
Sourires.
Mieux aurait valu supprimer cet article, comme le fera certainement le Sénat, dans sa sagesse. Mêmes les rapporteurs ne sont pas d’accord entre eux, ni avec la ministre ! Nous avions demandé des mesures de simplification afin que quelqu’un y comprenne quelque chose. Or plus personne n’y comprend rien. Cela donnera un peu de travail aux sénateurs, mais nous savons qu’ils font bien les choses.
Cet amendement visait à clarifier la rédaction de l’alinéa 8 en supprimant les mots : « eu égard au fait qu’ils disposent par ailleurs d’une couverture complémentaire ».
Avis défavorable. L’amendement vise à remettre en cause le caractère d’ordre public de la dispense, prévue à l’alinéa 8 de l’article 22. Nous avons déjà avancé les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables à cette suppression.
Quant aux dispenses d’adhésion possibles pour les salariés en contrat court, l’article 22 ne revient pas en tant que tel sur les dispenses qui sont aujourd’hui possibles. Elles pourront toujours être prévues par voie réglementaire.
Même avis.
L’amendement no 104 n’est pas adopté.
Cet amendement retranscrit exactement l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 concernant le financement de la couverture-balai.
L’erreur à l’origine de cet amendement a été corrigée par l’amendement no 625 . Je suis donc défavorable à l’amendement de M. Tian.
Même avis.
L’amendement no 105 n’est pas adopté.
Avis défavorable. Le comité d’entreprise a vocation à représenter les salariés, non à libérer l’employeur de son obligation.
Même avis.
L’amendement no 106 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour soutenir l’amendement no 608 .
Favorable.
L’amendement no 608 est adopté.
L’amendement no 611 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 614 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 612 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Défavorable.
L’amendement no 338 n’est pas adopté.
L’amendement no 616 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement prévoit la possibilité de conditionner à une ancienneté de trois mois la généralisation de la couverture santé.
L’article 22 répond déjà à votre préoccupation, monsieur le député, en proposant une dispense de droit de la couverture collective complémentaire pour les salariés sous contrats courts, en fonction de certains seuils. Avis défavorable, donc.
Défavorable.
L’amendement no 107 n’est pas adopté.
Cet amendement vise à reporter au 1er janvier 2017 l’obligation de généralisation de la complémentaire santé d’entreprise, compte tenu des conséquences que cela risque d’avoir pour les entreprises en termes de travail, notamment pour le calcul des charges.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 155 .
Sur tous les bancs, nous sommes sollicités par les chefs d’entreprise, les travailleurs indépendants et les artisans en raison des contraintes induites par la généralisation de la complémentaire santé, qui interviendra, selon le texte voulu par le Gouvernement et sa majorité, au 1er janvier 2016. Ces dispositions sont intenables. Cet amendement propose donc de repousser d’un an la date d’entrée en application de la mesure.
J’ajoute que nous avons aussi été approchés par les salariés de mutuelles, d’organismes de prévoyance et d’assurances. C’est tout un secteur qui est extrêmement inquiet à la perspective du bouleversement qui va intervenir sur ce marché, qui est aussi leur profession. Madame la ministre, vous seriez bien inspirée d’accepter cet amendement !
Avis défavorable, car il est urgent d’apporter une réponse au problème de la complémentaire santé des salariés.
Cependant, monsieur Accoyer, je déposerai par la suite un amendement, no 925 , qui tend à apporter une certaine souplesse au dispositif et répondra à vos préoccupations.
Défavorable.
On a bien compris que les choses seraient compliquées – d’ailleurs, Mme la rapporteure vient de donner raison à Bernard Accoyer !
L’amendement no 108 prévoit une période transitoire de mise en conformité avec la nouvelle définition des contrats responsables en cas de modification des actes instituant les régimes. Sans cette période transitoire, nous entrerions directement dans un système extrêmement complexe, source de grande insécurité pour les branches, les entreprises et les salariés.
Avis défavorable sur l’amendement no 108 .
L’article 22 prévoit des dispositions permettant de mettre en oeuvre de manière concrète la participation de l’employeur à la complémentaire santé pour les salariés précaires dans des conditions leur assurant un traitement équitable par rapport aux salariés, via une aide individuelle de l’employeur destinée à l’acquisition de cette complémentaire. Toutes ces dispositions prendront effet au 1erjanvier 2016.
Afin de tenir compte des délais de négociation collective, l’amendement no 925 tend à permettre aux entreprises, à titre dérogatoire et pendant une année au plus, de prévoir, par décision unilatérale de l’employeur et à condition que cela ne soit pas contraire aux éventuels accords de branche ou d’entreprise, que la couverture complémentaire santé sera mise en oeuvre pour les salariés en contrat précaire par le versement d’une contribution aux salariés, si ceux-ci ne sont pas déjà couverts à titre collectif et obligatoire.
L’amendement no 108 n’est pas adopté.
L’amendement no 925 est adopté.
L’article 22, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Joëlle Huillier, rapporteure de la commission des affaires sociales de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social, pour soutenir l’amendement no 438 .
À partir du 1er janvier 2016, tous les salariés pourront bénéficier de la couverture complémentaire collective pour le remboursement des frais de santé. Or il se trouve que les travailleurs des ESAT, les établissements et services d’aide par le travail, ne pourront le faire car ils ne sont pas considérés comme des travailleurs par le code du travail. S’il est vrai que ce sont des personnes handicapées, elles reçoivent pourtant une fiche de paie, perçoivent un salaire et paient des cotisations sociales. Il me semble qu’il y a en la matière une injustice, et c’est pourquoi je demande au Gouvernement de bien vouloir nous présenter un rapport sur les moyens qui permettraient de généraliser totalement la couverture complémentaire.
Avis très favorable. Cet amendement aborde une question qui n’a pas été soulevée par la loi relative à la sécurisation de l’emploi : celle de la complémentaire santé des travailleurs handicapés. Il n’est pas simple d’y répondre, compte tenu de la situation très spécifique de ces personnes, qui ont un statut d’usagers d’un établissement médico-social et ne sont par conséquent pas considérées comme des salariés. Le droit du travail ne leur est pas applicable, sauf exception.
Un rapport dresserait très utilement un état des lieux afin de juger de la pertinence et des modalités de financement d’une couverture complémentaire collective obligatoire pour ces travailleurs.
Avis favorable. Je vous remercie, madame Huillier, d’avoir appelé notre attention sur la situation des travailleurs des ESAT – car ce sont des travailleurs – au regard de la généralisation de la couverture complémentaire santé, qui doit être clarifiée. Il n’y a a priori aucune raison qu’ils n’en bénéficient pas eux aussi. Un rapport permettrait d’avancer sur ce dossier et d’examiner les éventuelles dispositions à prendre.
L’amendement no 438 est adopté.
Je vous informe qu’à la demande du Gouvernement, l’Assemblée examinera par priorité, dès le début de la quatrième partie du projet de loi, les articles 57 à après 61.
L’article 23 est adopté.
Les entreprises de répartition pharmaceutique référencent la totalité des médicaments génériques mis sur le marché. Elles proposent aujourd’hui plus de 6 000 références de médicaments génériques ; ce sont les partenaires indissociables des officines pour aider au développement de ce marché.
Dans le cadre de ce partenariat, elles ont organisé des programmes de sensibilisation auprès de leurs clients, en mettant des fiches d’information à leur disposition et en multipliant les sessions de formation à contenu scientifique et économique sur l’intérêt et les modalités de la substitution.
En disposant de l’ensemble des références génériques, elles permettent aux pharmaciens de délivrer la prescription en dénomination commune internationale la moins coûteuse, comme le préconisent les dispositions réglementaires et le protocole d’accord signé entre les médecins et la Caisse nationale d’assurance maladie.
Il est donc proposé d’insérer, après le premier alinéa de l’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale, un alinéa ainsi rédigé : « Le montant des ventes de spécialités génériques définies au 5° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique et inscrites au répertoire des groupes génériques n’est pas inclus dans l’assiette de la contribution. »
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 288 .
Pour compléter ce qui a été excellemment dit par Bérengère Poletti, il s’agit d’appeler l’attention du Gouvernement sur la grave crise que traversent les répartiteurs, qui vont réaliser des pertes sur le dernier exercice. Or il s’agit d’un maillon indispensable à la distribution des médicaments dans les 22 000 officines, qui restent le noyau dur de la lutte contre la désertification, grâce la présence sur le terrain de professionnels qui distribuent conseils et médicaments. La répartition a apporté une aide considérable à la diffusion des médicaments génériques. Dans ces conditions, il y a lieu d’exonérer les répartiteurs du versement de la taxe sur la vente de médicaments génériques.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 555 .
Les entreprises de répartition pharmaceutique référencent la totalité des médicaments génériques mis sur le marché. Elles proposent aujourd’hui plus de 6 000 références de médicaments génériques ; ce sont les partenaires indissociables des officines pour aider au développement de ce marché.
Dans le cadre de ce partenariat, elles ont organisé des programmes de sensibilisation auprès de leurs clients, en mettant des fiches d’information à leur disposition et en multipliant les sessions de formation à contenu scientifique et économique sur l’intérêt et les modalités de la substitution.
En disposant de l’ensemble des références génériques, elles permettent aux pharmaciens de délivrer la prescription en dénomination commune internationale la moins coûteuse comme le préconisent les dispositions réglementaires et le protocole d’accord signé entre les médecins et la Caisse nationale d’assurance maladie.
Cet amendement a été très bien défendu par M. Claireaux. J’espère qu’il votera comme nous !
La commission a rejeté ces amendements. Les médicaments génériques sont déjà exonérés de la troisième tranche de la contribution, qui est la plus élevée et constituée de la fraction du chiffre d’affaires correspondant au montant de la marge rétrocédée aux pharmacies. Il ne paraît pas pertinent d’étendre cette exonération. Il s’agit d’une taxe qui porte, non pas sur les génériques eux-mêmes, mais sur leur distribution. Les retirer intégralement de l’assiette ne pourrait en aucun cas encourager la prescription des génériques que nous appelons de nos voeux.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Je n’interviendrai que quelques secondes. Chers collègues de l’opposition, vous défendez aujourd’hui la répartition pharmaceutique. Je rappelle qu’il y a deux ans, l’article 12 bis du PLFSS prévoyait précisément d’apporter 15 millions d’euros pour la répartition. Or vous vous êtes opposés à cet article avec un lobbying incroyable ! Je vous trouve vraiment très contradictoires, car nous avons traité ce problème très en amont.
Défavorable.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 24.
La parole est à M. Bernard Accoyer.
L’article 24 fixe le taux L de la clause de sauvegarde concernant les dépenses de médicaments, ainsi que le montant W.
L’attitude du Gouvernement vis-à-vis de l’industrie du médicament témoigne d’une grave dérive. Je ne répéterai pas tout ce que j’ai dit à ce sujet, mais il convient de rappeler que la moitié des économies réalisées par le Gouvernement sur les dépenses d’assurance maladie, à hauteur de 1,7 milliard d’euros, proviennent, pour la quatrième année consécutive, de baisses de prix autoritaires sur les médicaments – cela fait un total de 5,5 milliards d’euros. Comment voulez-vous, madame la ministre, que l’industrie du médicament résiste à ce traitement ? Comment voulez-vous qu’à l’avenir, l’accès à l’innovation soit solidement garanti ?
C’est toute l’industrie pharmaceutique et toute l’innovation dans ce domaine qui sont concernées. Ce secteur a perdu des emplois, sa balance commerciale a diminué de 50 %, et l’investissement qui y est lié a baissé de 100 millions d’euros cette année.
Quelques mots concernant l’hépatite C : je vous demande un instant d’attention, madame la ministre. Vous avez mis en place un système de couperet qui est, sur le plan éthique, d’une injustice absolue. Vous avez dit que vous vous en tiendrez à 600 ou 700 millions d’euros. Cela signifie que des commissions dont la composition est variable devront arbitrer, et que leurs décisions pourront différer selon leur localisation. Alors que ce sont les mêmes malades, les décisions seront différentes !
Tel stade de fibrose, dans telle commission, donnera lieu à une décision plus ou moins ouverte. L’une pourra donner un accord, l’autre un refus : ce n’est pas acceptable. Imaginons un nouveau traitement qui représente un progrès exceptionnel, extraordinaire, et qui guérisse 99,99 % des malades : même dans ce cas, il faut que les malades soient soignés suffisamment tôt pour avoir toutes les chances. Même si le virus est détruit par le nouveau médicament, il importe que les complications déjà causées par la maladie ne s’aggravent pas. Il ne faut pas, par exemple, que ces complications rendent nécessaire une transplantation – ou qu’elles aient d’autres conséquences éminemment graves.
Madame la ministre, j’appelle votre attention sur ce problème, que vous devez prendre en compte. Cela ne peut plus durer ! C’est différent en Allemagne, en Italie : nous sommes le seul pays à procéder de cette façon, d’une manière brutale et tout à fait inadmissible.
Monsieur le président, cette intervention sur l’article vaut aussi présentation de l’amendement no 127 , que je défends ainsi au nom de mon groupe.
Cette année encore, près de la moitié des économies à réaliser sur l’ONDAM – qui représentent, au total, 3,4 milliards d’euros – portent sur le médicament. Plutôt que de mener des réformes de structure pérennes, le Gouvernement paralyse les performances de ce fleuron qu’est l’industrie pharmaceutique française, alors même qu’il s’agit, de l’avis de tous, d’un secteur stratégique pour l’économie nationale et pour l’emploi. Cela témoigne d’une vision à court terme.
Or Mme la ministre de la santé a annoncé dès le mois d’avril 2014 son objectif de stabilisation des dépenses de médicaments. Cela signifie que le taux de croissance de ces dépenses devra être de 0 % au cours de la période 2015-2017. Dans la mesure où le taux L a été fixé à - 1 % en 2015, il convient de le porter à 0 % pour l’année 2016, et non pas de le maintenir à - 1 % comme le prévoit cet article. Il convient également de le porter à + 1 % pour l’année 2017, afin qu’en moyenne, sur cette période, l’objectif de stabilité soit respecté. Une telle mesure permettrait en outre de respecter les engagements de l’État relatifs à la lisibilité et à la prévisibilité de la régulation du secteur, enjeux que défend le Conseil stratégique des industries de santé.
Enfin, la fixation d’un taux d’évolution négatif au-delà duquel les entreprises sont lourdement taxées – à hauteur de 50 % à 70 % de leur chiffre d’affaires – pénalise l’attractivité de notre territoire, envoie un signal délétère aux investisseurs internationaux, alors même que de nombreux rapports officiels citent le secteur pharmaceutique comme un atout pour la réindustrialisation.
À défaut de traduire des choix de réformes structurelles, qui permettraient d’améliorer à moyen et long terme les comptes de la Sécurité sociale, et en particulier de l’assurance maladie, le Gouvernement fait une nouvelle fois peser l’effort de réduction des dépenses sur le médicament. Alors que ce secteur ne représente que 15 % des dépenses, il devra contribuer à hauteur de 1,7 milliard d’euros à la réduction des dépenses d’assurance maladie, soit plus de la moitié des économies.
Le médicament doit évidemment contribuer à la maîtrise des dépenses de santé, mais cet effort doit être équilibré, de manière à responsabiliser l’ensemble des acteurs de notre système de santé. C’est pourquoi nous proposons, par l’amendement no 661 , de hausser le seuil de progression du chiffre d’affaires au-delà duquel les laboratoires sont redevables d’une contribution au titre de la clause de sauvegarde.
Le Gouvernement considère en effet que la hausse naturelle des dépenses de médicaments prévue pour 2016 oblige à prévoir un taux d’évolution négatif, fixé à - 1 %. Or ce taux a déjà été appliqué en 2015, et le Gouvernement avait prévu pour la période 2015-2016 un taux de progression des dépenses de médicament nul, soit 0 %. C’est pourquoi nous avons déposé l’amendement no 661 .
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 146 .
Je reviendrai brièvement sur les conséquences des décisions du Gouvernement. Étant donné son mode de calcul, le déclenchement de la clause de sauvegarde conduira à taxer une baisse de chiffre d’affaires, sans parler du résultat. Dans ces conditions, c’est l’accès des Français à l’innovation qui sera, tôt ou tard, réduit. En effet, les laboratoires ne mettront plus à disposition, en France, les nouvelles molécules. Ils ont déjà commencé à mener dans d’autres pays leurs travaux de recherche, de développement, et leurs expérimentations. La France sera délaissée, alors qu’elle était, jusqu’à un passé récent, jusqu’à ce que vous attaquiez frontalement, madame la ministre, l’industrie pharmaceutique, un grand pays de création, de découverte, d’invention de nouveaux traitements et de nouvelles molécules.
C’est un vrai massacre que vous commettez dans ce secteur, qui est pourtant l’un des secteurs les plus indispensables et les plus prometteurs pour l’avenir de l’humanité. Voilà pourquoi il faut adopter cet amendement !
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 556 .
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 661 .
Cet amendement vise à fixer le taux L à 0 %. Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit en commission qu’un taux de - 1 % correspondait au même chiffre d’affaires que l’an dernier, ou compensait la progression du chiffre d’affaires.
C’est comme si vous disiez aux salariés que le SMIC baisse de 1 %, parce que cela leur laisserait le même pouvoir d’achat !
Nous avons déjà eu cet échange hier. Fixer la limite de progression du chiffre d’affaires hors taxe à - 1 % correspond tout simplement à notre objectif de stabilisation de la dépense remboursée. Je rappelle qu’il ne faut inclure dans ce périmètre ni les médicaments génériques, ni les médicaments orphelins, ni les médicaments non remboursés, ni bien sûr les médicaments exportés. Le taux L a été calibré de manière que le mécanisme n’ait pas à être déclenché en 2016, à condition que les économies sur les médicaments soient telles que prévues par l’ONDAM, ce qui paraît tout à fait crédible compte tenu de la baisse des prix princeps et de la diffusion toujours croissante des médicaments génériques. J’espère que cela vous rassurera !
L’avis de la commission est donc défavorable.
L’article 24 est adopté.
Les articles 25, 26 et 27 sont successivement adoptés.
Cet article concerne le Fonds de solidarité vieillesse, dont le déficit s’aggrave cette année. Cela devrait rendre le Gouvernement plus modeste. Il prétend maîtriser l’évolution du solde de la branche vieillesse. Tout d’abord, si les déficits de la branche vieillesse diminuent, c’est exclusivement dû – comme l’a dit la Cour des comptes – à la réforme Woerth. Toutes les mesures prises par la gauche ont au contraire contribué à dégrader son solde !
Je tenais à rappeler que le déficit du FSV s’aggrave. J’ai été attentif à vos propos, monsieur le rapporteur, j’attends la même attitude de votre part !
L’article 28 et l’annexe C sont adoptés.
L’article 29 est adopté.
La parole est à M. Denis Jacquat.
Cet article vise à approuver l’annexe B, laquelle prévoit le transfert de 500 millions d’euros de la branche AT-MP, excédentaire, vers la branche maladie, qui est très déficitaire. À ce propos, je voudrais rappeler ce que j’ai dit ici même il y a deux jours, lors de la présentation de ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
Cette hausse continue du versement de la branche AT-MP à la branche maladie est un sujet d’inquiétude majeur pour les partenaires sociaux : les uns regrettent que les données servant de fondement à l’évaluation du montant dû par la branche AT-MP à la branche maladie ne soient pas définies de manière suffisamment précise et transparente ; les autres regrettent que la méthode utilisée pour déterminer le montant dû empêche un réel débat sur les causes de la sous-déclaration et l’engagement de plans d’action pour les traiter.
La branche AT-MP a été excédentaire en 2014 – avec un solde de 691 millions d’euros – et devrait le rester en 2015, même si l’excédent devrait se réduire à 603 millions d’euros. Il devrait diminuer encore en 2016 pour atteindre 525 millions d’euros, en raison du transfert de cotisations – organisé par ce projet de loi – de 0,05 point entre la branche AT-MP et la branche maladie du régime général. Cette situation excédentaire, dont on ne peut que se réjouir, est le fruit d’efforts de restructuration de la branche ainsi que de réformes portant sur la tarification et les processus d’instruction des dossiers.
Il ne faudrait pas que le versement de la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles siphonne la branche AT-MP au point de menacer la logique assurantielle sur laquelle elle repose. Nombre des organisations que j’ai entendues ont fait part de leur crainte que la branche AT-MP devienne une variable d’ajustement pour combler les déficits de la branche maladie. Leurs représentants ont exprimé le souhait que les excédents de la branche AT-MP soient mobilisés à des fins autres que le versement de sommes à la branche maladie au titre de la sous-déclaration ou que le remboursement des dettes de la branche. Ils réclament notamment, et à juste titre, que ces excédents soient conservés au sein de la branche, afin d’engager des actions de prévention ou d’amélioration de la réparation des accidents du travail.
Cet amendement vise à supprimer le transfert de 500 millions d’euros de la branche AT-MP, qui est excédentaire, vers la branche maladie qui est, elle, très déficitaire. Ce nouveau transfert s’apparente à une décision purement comptable, qui est en totale contradiction avec le principe de l’autonomie de gestion des branches posé par l’ordonnance de 1967, et d’autre part avec la logique assurantielle de la branche AT-MP, dont la tarification est en partie fonction du risque.
Enfin, ce transfert enverrait un signal négatif aux partenaires sociaux impliqués dans la gouvernance paritaire de cette branche, et aux entreprises qui ont accompli des efforts considérables en matière de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. C’est pourquoi il convient de ne pas procéder à ce transfert.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 662 .
Il s’agit de supprimer l’alinéa 28 de l’annexe B, lequel tend à transférer 500 millions d’euros de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, dite « AT-MP », vers la branche famille.
À défaut de réformes structurelles, le Gouvernement organise un siphonnage de différents régimes afin d’équilibrer les comptes déficitaires.
La branche AT-MP, je le rappelle, est financée par les seules entreprises sur la base d’un rapport entre sinistres et primes. S’il est excédentaire, c’est donc que les entreprises font des efforts en matière de conditions de travail et de pénibilité.
Au moment où le Gouvernement appelle de ses voeux un travail sur la pénibilité, le siphonnage de la branche AT-MP au profit de la branche maladie n’est assurément pas un signe encourageant.
La branche AT-MP a su se réformer, ce qui n’est pas encore le cas d’autres branches. Je souhaite donc qu’elles se réforment elles aussi et que l’on renonce au transfert de 500 millions ici prévu.
À législation inchangée, en 2016, la croissance des produits serait plus rapide que celle des charges, ce qui améliorerait le solde de la branche AT-MP de près de 100 millions d’euros. Les excédents de cette branche approcheraient alors, d’après les comptes de la Sécurité sociale, 700 millions d’euros.
L’an passé, le législateur a fixé à 1 milliard d’euros le montant dû par la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, alors que la commission présidée par Jean-Pierre Bonin a pour sa part estimé, en 2014, que le coût de cette sous-déclaration avoisinerait, pour la branche maladie, 1,3 milliard d’euros selon une fourchette haute.
Les sous-déclarations peuvent avoir plusieurs causes, à commencer par une méconnaissance, de la part des victimes ou de leurs ayants droit de l’origine professionnelle de l’affection – en l’absence d’une traçabilité absolue des expositions, le lien de causalité est en effet très difficile à établir. Elles peuvent aussi tenir à une appréhension des salariés à l’égard de leur emploi ou de la procédure de déclaration, à des pressions qu’ils subissent ou encore à leur choix de solliciter de préférence une pension d’invalidité.
Dans ce contexte, il paraît tout à fait justifié que la branche AT-MP assure pleinement sa contribution. J’ajoute que, malgré le transfert de cotisation de 0,05 % de cette branche vers la branche maladie, elle restera excédentaire de 525 millions d’euros en 2016. Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
Défavorable également.
Cette mauvaise habitude du Gouvernement – et même des gouvernements successifs – d’un transfert de la branche AT-MP vers la branche maladie du régime général, sous le prétexte de sous-déclarations et autres artifices, fait en réalité peser des charges supplémentaires sur l’économie française, puisque la branche AT-MP est exclusivement financée par les entreprises.
On voit bien, à mesure que l’on avance dans l’examen de ce PLFSS, que la baisse des charges des entreprises n’est en rien une priorité pour le Gouvernement ; bien au contraire, à chaque fois qu’il peut reprendre d’une main ce qu’il a prétendument donné de l’autre à travers le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – ou le pacte de compétitivité, il le fait.
L’article 30 et l’annexe B sont adoptés.
Je mets aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016.
L’ensemble de la troisième partie du projet de loi est adopté.
La parole est à M. Bernard Accoyer, premier orateur inscrit sur l’article 57.
Cette intervention vaudra aussi défense de l’amendement no 154 , monsieur le président.
Le Gouvernement repousse de trois mois la revalorisation d’un certain nombre de prestations. Ce sont donc 500 millions d’euros de prestations qui manqueront à l’appel pour les assurés des régimes sociaux. Une telle pratique démontre que le Gouvernement n’obéit qu’à une seule logique : couper les financements, étirer les délais et décaler les versements. Il a, de plus, le culot de prétendre, dans l’exposé des motifs, que tout cela répond à un souci d’harmonisation.
La méthode employée montre les difficultés financières de l’État. Comme vient par ailleurs de le noter Bernard Accoyer, l’habillage est surprenant.
Dorénavant, les prestations sociales seront toutes revalorisées à la même date, à l’exception des pensions de retraite : cela me semble en effet une mesure d’harmonisation et de simplification.
Jusqu’à présent, les hausses de prestations étaient calculées sur la base de projections de la hausse des prix de l’année à venir : si ces projections s’avéraient inexactes, il fallait donc récupérer les trop-perçus auprès des bénéficiaires, ce qui générait beaucoup de confusion et des difficultés financières pour les intéressés.
Le Gouvernement propose un nouveau mode de calcul de la revalorisation des droits fondé sur l’inflation des douze derniers mois, lequel serait assorti d’un dispositif de « clapet » puisque le Gouvernement s’est par ailleurs engagé à maintenir le niveau des prestations en cas d’inflation négative.
Ces nouvelles modalités nous semblent plutôt opportunes car elles sécurisent les bénéficiaires. Je regrette cependant que leur mise en oeuvre s’accompagne d’économies importantes – pour la seule année 2016, certes –, compte tenu du nouveau mode de calcul et du décalage de la revalorisation au 1er avril : cela pénalisera, bien sûr, des personnes très modestes. On aurait pu faire le choix d’avancer cette revalorisation plutôt que de la différer.
Le Gouvernement envisage-t-il, en tout état de cause, des modalités de rattrapage pour les bénéficiaires lésés par ce dispositif ?
L’article 58 renforce les mutualisations entre les organismes, les branches et les régimes de la Sécurité sociale. L’objectif, que l’on peut partager, est de rationaliser la gestion des finances sociales de deux façons : d’abord en renforçant les mutualisations de compétences et de moyens, ensuite en préparant la fusion des caisses de base du régime social des indépendants, le RSI, dont on parle déjà tant.
Si j’ai bien lu les argumentaires du projet de loi, 20 millions d’euros par an d’économies sont attendus de la mutualisation ; à ce sujet j’ai été très étonnée de lire – et tout aussi étonnée que cela ne fasse pas réagir les frondeurs –, que le dispositif laisse « espérer une réduction des personnels affectés à cette tâche à hauteur de 1 000 équivalents-temps plein ». De la part d’une majorité socialiste, la chose a de quoi surprendre ! C’est un peu le monde à l’envers…
Vous vous trompez d’article, madame Le Callennec : nous discutons de l’article 57, pas de l’article 58 !
Ce n’est pas grave : considérons qu’il s’agit d’une intervention anticipée.
En effet, monsieur le président : les choses seront dites et je n’y reviendrai pas. D’ailleurs le fond reste le même. Il est pour le moins nouveau que la majorité socialiste espère une réduction des effectifs.
S’agissant de la fusion des caisses de base du RSI, rien ne nous est dit sur le calendrier, les économies attendues et, j’imagine, les suppressions d’emploi – que vous applaudirez sans doute.
L’intervention de M. Accoyer ne laisse pas de m’étonner : le contenu du présent article est en effet une bonne nouvelle, parce qu’il sécurise l’évolution des différentes prestations. Il prévoit de surcroît, on l’a un peu oublié, un mécanisme de bouclier : le niveau des prestations ne reculera pas même en cas d’inflation négative.
Je trouve d’autre part un peu fort de café que, depuis le début de l’examen de ce PLFSS, celles et ceux qui ne cessent d’annoncer des réductions de dépenses à hauteur de 100 à 150 milliards d’euros nous reprochent systématiquement tout dispositif générant des économies – même si celles-ci n’en sont pas le but. Le comble est atteint avec Mme Le Callennec, qui, avec son parti, a soutenu une majorité qui n’a eu de cesse de supprimer des emplois.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
La réduction des effectifs, ce n’est pas ce que M. Hollande a vendu aux électeurs en 2012 !
Nous pouvons en tout état de cause réaffecter les postes dont les missions évoluent.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 866 .
Il est rédactionnel, comme l’ensemble de mes amendements sur cet article.
L’amendement no 866 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement, excellemment défendu par M. Accoyer, tend à supprimer les mots : « au 1er avril de chaque année » à l’alinéa 9.
L’amendement no 154 a été défendu par M. Accoyer.
Quel est l’avis de la commission ?
Défavorable.
Je voudrais par ailleurs répondre à Mme Fraysse, qui, tout en comprenant la logique de rationalisation du Gouvernement, s’interrogeait sur un éventuel rattrapage lié au décalage dans le temps du versement des prestations.
Ce rattrapage est intervenu en creux puisque le Gouvernement a renoncé à un rattrapage inverse, à la baisse, de certaines prestations familiales : le mécanisme actuel, auquel il sera mis fin, eût en effet induit, compte tenu de l’inflation, une diminution à due concurrence des prestations. Votre préoccupation est donc en partie satisfaite, madame Fraysse.
Quant aux deux amendements identiques, la commission les a repoussés.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 869 , 873 rectifié , 876 , 877 , 878 , 879 et 880 rectifié , qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour les soutenir.
Les amendements nos 869 , 873 rectifié , 876 , 877 , 878 , 879 et 880 rectifié , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L’article 57, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 960 rectifié portant article additionnel après l’article 57.
Il s’agit de clarifier une disposition parfois plus ou moins appliquée suivant les lieux, visant à exempter de droits de mutation les transactions sur l’immobilier des organismes de Sécurité sociale.
L’amendement no 960 rectifié , accepté par la commission, est adopté.
Je suis saisi de deux amendements de M. Bapt, nos 798 et 799, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour les soutenir.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 971 .
Il s’agit d’étendre la mutualisation à la gestion des activités de trésorerie.
Monsieur le président, la commission n’a pas examiné cet amendement qui tend à compléter la mutualisation des activités de l’URSSAF en rendant possible la délégation à l’une des caisses des activités liées à la gestion de la trésorerie.
À titre personnel, j’y suis tout à fait favorable.
L’amendement no 971 est adopté.
Je suis saisi de trois amendements de M. Bapt, nos 792, 793 et 794, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour les soutenir.
Les deux premiers amendements sont rédactionnels et le troisième de précision.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 686 .
Je le retire puisqu’il sera satisfait par un amendement du Gouvernement.
L’amendement no 686 est retiré.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 795 .
L’amendement no 795 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 972 .
Je remercie Mme Clergeau d’avoir retiré son amendement, qui soulevait quelques problèmes rédactionnels et pouvait difficilement être corrigé par un sous-amendement.
Pour répondre aux préoccupations de Mme Clergeau, le Gouvernement propose par l’amendement no 972 de préciser les partages de responsabilités entre les différents agents comptables lorsque ce type de mutualisation est réalisé.
L’amendement no 972 est adopté.
Je suis saisi de trois amendements de M. Bapt, nos 796, 797 et 800, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour les soutenir.
Le premier est un amendement de conséquence, le deuxième corrige une erreur syntaxique et le troisième est rédactionnel.
L’article 58, amendé, est adopté.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 109 portant article additionnel après l’article 58.
En 2015, nous avons fait en sorte que la direction de l’informatique soit autonome pour la branche famille. Je propose qu’il en soit de même pour la branche maladie afin que la CNAM dispose d’une direction informatique unique.
Cette nouvelle organisation permettrait à la branche de faire face à des enjeux de modernisation et, probablement, de réaliser des gains de productivité.
Cet amendement vise en effet à reproduire la réforme impulsée notamment par la MECSS, avec M. Morange et moi-même, concernant le système d’information de la CNAF. Mais il se trouve, monsieur Tian, que la CNAM a déjà engagé cette réforme de son propre chef. Votre amendement est donc en quelque sorte satisfait.
Connaissant l’attention que je porte à ces questions relatives aux systèmes d’information, je vous propose donc de bien vouloir le retirer.
Retirez-vous l’amendement, monsieur Tian ? Cela fera moins de travail pour les sénateurs.
Sourires.
Je sais que ces travaux sont issus de la MECSS et je suis très sensible à leur transposition législative. Cela me semblait donc une bonne idée.
En revanche, je ne savais pas qu’une telle réforme était en cours mais compte tenu de notre bonne foi commune, je retire cet amendement.
L’amendement no 109 est retiré.
Le premier amendement est de précision, les trois autres sont rédactionnels.
L’article 59, amendé, est adopté.
L’article 60, amendé, est adopté.
Le premier est rédactionnel, le deuxième supprime un mot inutile et le troisième en fait de même pour une mention redondante.
Cet article vise à habiliter les services et agents de renseignement mentionnés dans un article du code de la sécurité intérieure que nous venons de voter à transmettre aux agents de l’État ou des organismes de protection sociale des informations strictement limitées aux missions de ces derniers.
La fraude aux prestations sociales doit être absolument combattue et sanctionnée mais, à la lecture des textes que nous venons de voter sur le renseignement, il m’a semblé à ce stade qu’elles ne mettent en péril ni l’indépendance nationale, ni l’intégrité du territoire, ni les intérêts économiques majeurs, etc.
Prenons en l’occurrence le cas d’un individu qui aurait quitté le territoire pour se livrer à des activités jugées scandaleuses – par exemple, un djihadiste – et qui continuerait à bénéficier de prestations sociales.
Mon inquiétude ne porte pas tant sur cet individu que sur sa famille. Cet amendement de suppression des alinéas 18 et 19 que je suis prêt à retirer si on me donne des explications – j’interroge le Gouvernement à ce propos – permet de s’assurer que la famille de l’individu restée en France et bénéficiant légitimement de prestations pour les enfants ou le logement ne sera pas touchée par cet article.
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour soutenir l’amendement no 575 .
Nous avons très bien compris la préoccupation de M. Sebaoun : la faute commise par un membre d’une famille ne doit pas pénaliser celle-ci, laquelle ignore parfois son départ.
Cet article dispose que les services de renseignement peuvent transmettre des informations utiles aux organismes de Sécurité sociale, par exemple lorsqu’une personne quitte le territoire et ne remplit donc plus le critère de résidence ouvrant droit à certaines prestations.
Il ne serait donc pas judicieux de se priver de cette source d’information, mais en précisant bien que la finalité n’est pas la remise en cause des prestations de tout le foyer lorsqu’une seule personne a quitté le territoire.
Ceux qui continuent à remplir les critères de résidence continueront à bénéficier des prestations dans les conditions de droit commun.
Au bénéfice de ces observations, peut-être pourriez-vous retirer votre amendement ?
Connaissant la valeur juridique des propos tenus par le Gouvernement en séance, je tiens à rassurer M. le député Sebaoun et à confirmer les propos de M. le rapporteur. Il ne s’agit bien entendu en aucun cas de priver de prestations la famille d’un enfant, par exemple, qui aurait quitté le territoire pour des raisons proches de celles que vous avez évoquées – tout le monde a compris. Il s’agit de créer un dispositif « miroir » par rapport à ce qui a été prévu dans la loi relative au renseignement de façon à permettre des échanges d’informations dans les deux sens, mais il n’est aucunement question, évidemment, de pénaliser des familles dont l’un des membres aurait quitté le territoire.
Cela étant dit en séance, M. Sebaoun peut être parfaitement rassuré et pourrait retirer son amendement. À défaut, je serais défavorable à son adoption.
L’amendement no 96 est retiré.
L’amendement no 575 est retiré.
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l’amendement no 381 .
Cet amendement vise à éviter un risque d’interprétation puisqu’il précise le dispositif de transmission d’informations par les services de renseignement aux organismes de Sécurité sociale.
Cela a été tacitement prévu par la loi sur le renseignement mais la rédaction du texte crée en l’état un risque d’a contrario : une telle précision pour les organismes de Sécurité sociale laisse craindre que pour d’autres échanges, demain, on oppose le caractère non-explicite de la loi.
Je vous suggère donc d’insérer les mentions que je propose au début de l’alinéa 19 qui lèvent ainsi tout risque en prévoyant expressément que ce dispositif s’inscrit dans le cadre plus général des échanges d’informations entre les services de renseignement et l’ensemble des autorités administratives.
Le Gouvernement partage l’appréciation du rapporteur et considère que l’amendement du président Urvoas permet d’éviter toute ambiguïté et ce que l’on appelle un a contrario.
Je reconnais bien là l’attention et la vigilance dont il fait preuve. Le Gouvernement est favorable à l’adoption de son amendement.
L’amendement no 381 est adopté.
L’article 61, amendé, est adopté.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 613 portant article additionnel après l’article 61.
Il s’agit de compléter notre arsenal de lutte contre la fraude.
L’article L. 114-19 du code de la Sécurité sociale consacre le « droit de communication » au profit des agents des organismes de Sécurité sociale, notamment des agents de contrôle.
Ce droit leur permet d’obtenir, sans que le secret professionnel leur soit opposable, les documents et informations nécessaires à la vérification des conditions d’obtention des prestations de Sécurité sociale, au recouvrement et au contrôle des prélèvements sociaux, à la lutte contre le travail dissimulé et au recouvrement des prestations versées indûment.
Cette procédure essentielle pour le contrôle et le recouvrement des cotisations et contributions sociales permet aux agents de contrôle de prendre connaissance de renseignements détenus par certaines personnes physiques ou morales pour engager des démarches de régularisations.
Il permet de doter les organismes sociaux de moyens de détection des cotisants potentiellement fraudeurs en pouvant exercer un droit de communication portant sur des personnes non identifiées, dans le respect des prescriptions de la loi du 6 janvier 1978 dite « Informatique et libertés ».
Il s’agit de reproduire dans la sphère sociale ce qui a été prévu en matière fiscale par l’article 21 de la dernière loi de finances rectificative pour 2014.
En clair, sont visés les revenus ou les gains issus de sites internet qui pourraient être dissimulés.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement du rapporteur Gérard Bapt, qui vise à élargir le principe du droit de communication aux activités réalisées sur des plates-formes en ligne à l’instar, vous l’avez dit, des évolutions prévues dans le domaine fiscal, cela dans le respect de la loi du 6 janvier 1978 dite « Informatique et libertés ».
L’amendement no 613 est adopté.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 305 .
Cet amendement vise à étendre la responsabilité des entreprises dominantes, les holdings, vis-à-vis des entreprises qu’elles contrôlent.
Il répond à deux préoccupations : d’une part, renforcer la responsabilité des holdings à l’égard de ces dernières, et, d’autre part, renforcer la lutte contre la fraude aux cotisations sociales des entreprises.
Les sommes en jeu, vous le savez tous, sont colossales puisque la Cour des comptes les a estimées à un montant de 20 à 25 milliards pour 2012.
Je rappelle à ce propos que la fraude aux prestations sociales – dont on parle beaucoup, ce qui est normal, mais que l’on met aussi en exergue – ne représente que 694,77 millions en 2013, ce qui est beaucoup moins important.
L’accent, malheureusement, est toujours mis sur les fraudes aux prestations, et il nous paraît tout à fait essentiel et prioritaire de nous attaquer à la fraude aux cotisations, autrement dit à la fraude patronale, car cela permettrait de dégager des moyens nouveaux.
Dans cette perspective, rendre les holdings responsables si les entreprises qu’elles contrôlent fraudent, nous semblerait une mesure utile, parce qu’elle serait dissuasive. Dans son article L. 243-7-3, le code de la Sécurité sociale dispose déjà que les holdings sont tenues solidairement et subsidiairement responsables en cas d’infraction de travail dissimulé. Avec cet amendement, nous souhaiterions étendre la subsidiarité et la solidarité entre l’entreprise contrôlée et l’entreprise dominante en cas de fraude aux cotisations sociales. Il s’agit en définitive de responsabiliser les holdings et de renforcer ainsi les contrôles internes aux groupes.
La commission a repoussé cet amendement, qui vise à étendre la responsabilité aux sociétés mères, de la même façon que cette responsabilité est engagée, conjointe et solidaire lorsqu’un contrat de travail dissimulé est établi dans l’une des entreprises du groupe. Dans ce cas, la société mère est redevable des prélèvements sociaux et des majorations afférentes. Il s’agit donc de responsabiliser et de rendre les sociétés mères plus attentives aux errements éventuels des entreprises du groupe.
Néanmoins, votre amendement propose d’étendre ce principe, au-delà des cas de travail dissimulé, aux cas d’infraction de non-paiement des cotisations sociales. Certes, on peut demander à la société mère un devoir particulier de vigilance, mais il peut paraître excessif de la rendre solidairement responsable d’un non-paiement des cotisations, puisque l’entreprise a une totale autonomie de gestion à cet égard, et que ce non-paiement peut avoir de multiples causes.
Je vous fais par ailleurs remarquer que l’infraction de non-paiement des cotisations n’existe pas juridiquement. Je vous invite donc, sur la base de cet argument juridique, à retirer cet amendement. Dans le cas contraire, je demanderai à l’Assemblée de le repousser.
Le rapporteur a raison d’indiquer que l’infraction, telle que vous la formulez, n’est pas caractérisée actuellement dans le code. Cela dit, je veux vous rassurer, madame la députée. Vous avez évoqué l’article L. 243-7-3 du code de la Sécurité sociale, qui traite effectivement du travail dissimulé. Mais l’article L. 82-21-1 du code du travail définit le travail dissimulé de façon précise et couvre le champ visé par votre amendement. Notre analyse, très étayée, nous conduit donc à dire que votre amendement est satisfait par la combinaison des deux articles que je viens d’évoquer. Le non-paiement des cotisations sociales est en effet assimilé par l’article L. 82-21-1 à du travail dissimulé. Nous partageons votre préoccupation, mais votre amendement est satisfait. S’il n’était pas retiré, je ne pourrais qu’émettre un avis défavorable.
Compte tenu de ces explications, je vais le retirer. Et nous le retravaillerons éventuellement, si nous le jugeons nécessaire, pour la seconde lecture.
L’amendement no 305 est retiré.
Nous en revenons au début de la quatrième partie, en abordant les articles relatifs à la famille.
Sur l’article 31, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Bernard Accoyer.
Cet article, qui concerne la petite enfance, nous conduit à évoquer la gravité de la situation dans laquelle se trouve la branche famille, ou plus exactement les conséquences majeures des mauvais coups portés à la famille par le Gouvernement depuis 2012.
L’indicateur le plus fort, c’est la natalité.
Or la natalité, qui est l’une de vos principales responsabilités, madame le ministre, est en train de baisser en France. Il est absolument évident que la politique familiale qui avait été construite en France depuis la Libération était efficace, qu’elle était enviée dans le monde entier, et que s’il reste un atout à notre pays, c’est sa fécondité et sa natalité. Or la natalité, je le répète, est en train de baisser.
Elle baisse depuis quelques mois, et de manière importante : en effet, sur le premier semestre 2015, c’est un déficit de 11 100 naissances qui est à déplorer, soit une baisse de 3 %. On ne peut pas déconnecter ce constat d’un certain nombre de mesures que vous avez prises, madame le ministre, avec un prélèvement de plus de 5 milliards d’euros sur les familles. Pourquoi vous acharnez-vous sur les familles avec enfants ? Pourquoi vous acharnez-vous sur la génération, alors que la pérennité d’un système de solidarité comme le nôtre ne repose que sur le renouvellement des générations ?
Monsieur le président, je présenterai, sur cet article 31, l’argumentaire de notre collègue Bernard Gérard, qui n’a pu être présent aujourd’hui.
Il souhaiterait que le Gouvernement revienne sur sa décision de reporter le versement de la prime à la naissance au second mois suivant la naissance. En effet, un retour au dispositif antérieur, avec un versement au septième mois de la grossesse, est tout à fait souhaitable, pour des raisons économiques et sociales, et surtout par souci de cohérence de nos politiques publiques, et notamment de la politique familiale. Cette prime est destinée à permettre aux jeunes parents de s’équiper pour l’arrivée d’un enfant dans leur foyer. Il va de soi que les achats doivent être effectués avant l’arrivée du bébé pour pouvoir l’accueillir dans les meilleures conditions, et non pas deux mois après la naissance.
Au-delà du soutien économique que cette mesure représenterait pour la filière puériculture, ce serait également un signe fort de soutien à la natalité qui, comme Bernard Accoyer l’a rappelé, a baissé de façon significative et préoccupante – moins 3 % – au premier semestre 2015.
Avec l’article 31, nous abordons les dispositions relatives à la branche famille. Il n’y a pas de changement notoire cette année dans votre PLFSS, si ce n’est la possibilité donnée, par l’article 31, aux caisses d’allocations familiales et à la Mutualité sociale agricole, de verser des pensions alimentaires dues aux parents isolés qui ne parviendraient pas à l’obtenir de leur ex-conjoint.
Comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, à titre personnel, je trouve cette mesure juste et nécessaire. Elle devrait permettre à de nombreuses femmes – mais aussi, parfois, à des hommes – qui se trouvent dans une situation de détresse totale, de percevoir ce qui leur est dû.
Ce PLFSS est aussi l’occasion, pour nous, de tirer les conséquences de la politique familiale que vous menez depuis maintenant trois ans, comme vient d’ailleurs de le faire notre collègue Bernard Accoyer. Avec la baisse du quotient familial, la réduction de la prestation d’accueil du jeune enfant et, enfin, la modulation des allocations familiales en 2015, ce sont, au bas mot, 4,5 milliards d’euros que vous avez retirés aux familles depuis trois ans. La seule modulation des allocations familiales les a privées de 800 000 euros cette année.
Les conséquences de cette politique se font déjà ressentir, avec un net recul de la natalité cette année. Ce n’est pas que je pense, comme me l’a répondu Mme Marie-Françoise Clergeau en commission, que les parents font des enfants pour avoir des allocations. Mais je pense vraiment que les mesures que vous avez prises, notamment le congé parental partagé, font renoncer certains parents à leur projet d’enfant.
Madame la ministre, je me permets d’intervenir sur cet article, afin de souligner l’importance de son application à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Comme je l’ai déjà indiqué dans le cadre des travaux menés avec votre cabinet, alors que le présent article vise, et à juste titre, l’extension à l’ensemble du territoire national de l’avancée sociale que constitue la garantie des impayés de pension alimentaire, et puisque ce sera bien le cas dans les autres collectivités d’outre-mer que sont Saint-Martin et Saint-Barthélemy, il ne serait pas envisageable que Saint-Pierre-et-Miquelon reste à l’écart de ce nouveau dispositif et ne puisse en bénéficier.
Vous aviez paru vous inquiéter, pendant un temps, de l’extension concomitante de l’allocation de soutien familial, l’ASF, dans notre archipel. Selon votre cabinet, il semblerait que votre inquiétude ait été levée hier. Je vous remercie donc, madame la ministre, de me donner des précisions à ce sujet. Pouvez-vous nous confirmer que la garantie contre les impayés de pension alimentaire et l’allocation de soutien familial seront bien étendues dans l’archipel, et si c’est le cas, dans quel délai ?
L’article 31 généralise l’expérimentation, menée dans vingt départements, visant à garantir les impayés de pension alimentaire. Nous y sommes totalement favorables, c’est évident, puisque cette mesure garantit une allocation de soutien familial. L’ASF est versée dès le premier mois d’impayé de pension, mais il faudra quand même que la personne qui ne touche pas la pension alimentaire le prouve, comme c’est déjà le cas aujourd’hui. Aujourd’hui, le non-paiement est constaté au bout de deux mois. C’est ce que prévoit la loi, mais on sait bien que, dans les faits, c’est souvent plus long.
Ce sont les caisses d’allocations familiales qui seront chargées du recouvrement, comme c’est déjà le cas aujourd’hui. Pour que cet article soit effectivement mis en oeuvre, et il est nécessaire qu’il le soit, il faut que les CAF soient capables d’assumer cette mission. A-t-on évalué le coût que cela représentera pour elles ? Se sont-elles organisées et ont-elles les moyens de récupérer ces impayés ? On nous dit qu’il sera procédé au prélèvement direct sur la rémunération du débiteur, mais il faut savoir que, dans le cas de pensions alimentaires non recouvrées, il est souvent très difficile de trouver un compte à débiter !
Je trouve que la généralisation de ce dispositif est une bonne chose, je trouve que l’intention est bonne, mais les CAF auront-elles les moyens de mettre cela en pratique ? Et que ferons-nous de ceux qui ne paient pas et qui ne sont pas solvables ?
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la branche famille, pour soutenir l’amendement no 582 .
L’avis du Gouvernement est favorable.
Je voudrais, si vous me le permettez, monsieur le président, saisir cette occasion pour dire quelques mots de l’article et répondre à quelques-unes des interpellations qui ont été faites.
Je remercie Mme Le Callennec du soutien qu’elle a exprimé à cette mesure, et je vais essayer d’apporter des réponses aussi précises que possible aux interrogations qu’elle a formulées. Mais auparavant, je voudrais dire que je m’étonne des interventions très péremptoires qui visaient à démontrer, je ne sais comment, que la politique du Gouvernement amenait inexorablement à une baisse de la natalité en France et à un recul par rapport aux autres pays.
C’est une évidence : les chiffres sont là pour le prouver. Voilà votre bilan !
Les chiffres sont là, en effet : en 2013, la France a conquis, si j’ose dire, la première place pour ce qui est de la natalité en Europe.
Jusque-là, nous occupions la deuxième place, derrière l’Irlande. Désormais, nous avons une natalité, une démographie, plus dynamique que celle de l’Irlande. Je me contente de le constater : j’en suis heureuse pour notre pays, mais je le constate, plus qu’autre chose. Je me dis que les Français expriment, à titre individuel et familial, une confiance qu’ils n’expriment pas toujours de manière collective, et nous avons à nous en réjouir.
Nous avons également à nous réjouir du fait que, en France, les femmes qui ont des enfants continuent, plus que dans d’autres pays, à travailler.
C’est un double succès, en effet. Nous avons des familles qui font des enfants et qui concilient vie professionnelle et vie familiale.
Malheureusement, certaines familles sont amenées à connaître une séparation, et c’est pour elles que nous avons créé la garantie contre les impayés de pension alimentaire, la GIPA, que nous avons expérimentée dans vingt départements et qui a pour objet de garantir au parent isolé – dans l’écrasante majorité des cas, une femme, la mère – de se voir verser un minimum de pension alimentaire, lorsque l’ex-conjoint ne respecte pas ses obligations.
Vous me demandez, madame Le Callennec, comment les caisses d’allocations familiales pourront faire face à ce surcroît de travail. Dans les vingt départements où l’expérimentation a été conduite, une centaine de personnels ont été affectés à cette prestation. Nous estimons qu’à terme 100 000 familles monoparentales seront potentiellement concernées et que le coût de la mesure s’élèvera, à terme, à 40 millions d’euros, dont il faudra retrancher le meilleur recouvrement des impayés. En effet, les CAF, qui versent la prestation, se retournent vers l’ex-conjoint défaillant pour récupérer les indus. Nous ne pouvons, à cette heure, estimer le montant des sommes qui seront ainsi récupérées.
Monsieur Claireaux, je peux vous rassurer : la prestation sera applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, de par la mise en oeuvre des textes.
L’amendement no 582 est adopté.
J’aurais tout de même voulu répondre à la ministre, monsieur le président.
Monsieur Accoyer, vous avez la parole pour soutenir l’amendement no 395 .
Je soutiendrai cet amendement également au nom de M. Gérard, qui avait déposé un amendement identique.
Auparavant, je dois répondre à vos propos, madame la ministre, qui sont très graves. Vous avez en effet affirmé qu’une dépense de 40 millions d’euros, sur laquelle vous récupérerez au moins 20 millions d’euros, efface les 4,5 milliards à 5 milliards que vous avez pris aux familles depuis que vous êtes aux responsabilités : 20 millions d’un côté ; 4,5 à 5 milliards de l’autre ! Voilà la manière dont vous défendez votre politique.
Le grave fléchissement que connaît pour la première fois la natalité est de la responsabilité du Gouvernement car il est le résultat de toute une série de mesures qu’il a prises : modulation des allocations familiales, diminution de la prime de naissance, baisse des aides à la garde d’enfants, baisse du plafond du quotient familial, baisse pour un demi-million de ménages de leurs allocations en 2015, transfert à la famille de charges incombant à l’État, diminution des prestations familiales – moins 1,1 % en 2015 –, multiplication des fraudes à la CNAF. Je pourrais poursuivre longtemps cette énumération dont la facture est lourde : une diminution des naissances de 0,3 %. Vous cassez la politique familiale qui était notre fierté.
L’amendement no 395 vise à dénoncer la publication, en cachette, par le Gouvernement, à la fin de l’année 2014, d’un décret repoussant de quatre mois le versement de la prime de naissance, qui s’élève à 923 euros – elle n’a pas été revalorisée en 2015. Alors que depuis sa création, en toute logique, son versement intervenait au septième mois de la grossesse, vous l’avez fait passer subrepticement au deuxième mois après la naissance. Madame le ministre, votre façon de procéder est aussi inacceptable que la mesure elle-même.
Comment est-il possible d’aider réellement les familles si l’aide n’est pas versée au moment où l’enfant est sur le point d’arriver et où elles doivent s’équiper ? Pour un foyer primipare, l’équipement est évalué à 1 500 euros. Quant aux enfants suivants, ils sont eux aussi l’occasion de nouvelles dépenses.
L’attitude consistant à cibler les familles parce qu’elles ne peuvent pas se défendre est insupportable. J’entendais la dénoncer.
Je sais que vous pouvez faire mieux. Depuis trois semaines, cela fait au moins trois fois que vous dites la même chose, à savoir qu’il y a 5 milliards d’euros en moins pour les enfants. Vous mentez, excusez-moi de le dire comme cela.
Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ce n’est pas la vérité, puisque les 4,6 milliards d’euros, qui concernent les allocations logements et qui sont retranscrits dans le budget de l’État, sont toujours là. Il n’y a aucune baisse des prestations en direction des familles, qui les perçoivent toujours. Il ne faut pas confondre le budget de l’État avec la branche famille : le total, lui, demeure le même.
Par ailleurs, vous vous fondez sur trop peu d’éléments pour pouvoir affirmer que la France subit une baisse de sa natalité : c’est faux.
Je suis allée visiter la CAF de Saint-Quentin, dans l’Aisne, un département qui connaît de grandes difficultés. Elle est très bien organisée et son personnel est admirable. Savez-vous que, dans ce département, la modulation des allocations familiales a touché 1,8 % des familles contre 70 % dans le VIIe arrondissement de Paris ? Je livre ces chiffres à votre réflexion.
C’est à juste titre que votre amendement aborde la date de versement de la prime de naissance, sujet sur lequel j’ai été interpellée à la fois au cours des auditions que j’ai menées et lors de ma visite de la CAF de Saint-Quentin.
J’ai été rassurée : cette CAF m’a en effet assuré que, même si la mesure était loin d’être pratique, les caisses dépannaient les familles lorsque celles-ci le leur demandaient en leur versant une avance. Les CAF sont à l’écoute des familles et règlent leurs problèmes.
Défavorable.
Madame la ministre, je souhaite, moi aussi, soutenir le mécanisme GIPA. C’est pourquoi je souhaiterais savoir si son expérimentation dans vingt départements a fait l’objet d’une analyse. Il serait en effet intéressant de pouvoir en prendre connaissance avant l’extension du dispositif à tous les départements.
Par ailleurs, un couple a besoin, notamment pour son premier enfant, de percevoir la prime de naissance avant l’arrivée de celui-ci : le recul de la date du versement de la prime n’est pas sans poser de problème.
Sans vouloir entrer dans une guerre de chiffres, je tiens à souligner que les propos de M. Accoyer m’ont étonné. Je suis allé vérifier les statistiques de l’INSEE : de 2010 à 2011, loin d’avoir explosé, la natalité a subi un fléchissement. M. Accoyer peut-il nous donner des éléments d’explication sur la politique familiale conduite sous le précédent quinquennat ?
Je remercie M. Sebaoun de sa remarque pertinente.
Madame Poletti, oui, un rapport a été rédigé sur l’expérimentation de la GIPA dans vingt départements : il a été récemment remis au Parlement. Je suis certaine que la commission des affaires sociales pourra vous le communiquer.
L’amendement no 395 n’est pas adopté.
L’article 31, amendé, est adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly