La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Le premier tour des élections régionales nous a sonnés : 19 637 communes ont porté l’extrême droite en tête. Au deuxième tour, dans la région Nord-Pas-Calais-Picardie, rassemblés, nous avons su éviter le pire. Mais le vote extrémiste demeure majoritaire dans les communes rurales de l’Aisne !
Au cours des cérémonies de voeux, élus, habitants, jeunes et moins jeunes me disent leur ras-le-bol. Non, ils ne sont pas racistes, mais ils se sentent oubliés et déclassés depuis trop longtemps !
Le chômage y est massif. L’agriculture et l’élevage souffrent. L’eau avec l’assainissement peut coûter jusqu’à 9 euros le mètre cube ! Pas de transports collectifs : il faut deux voitures pour aller au travail ou prendre le train pour Paris. Ils sont 5 000 à le faire chaque jour, avec des tarifs plus élevés. Les infrastructures ferroviaires et routières sont menacées et fragilisent nos PME. L’accès à la culture est limité. Pour nos étudiants, ce sont des frais de déplacement et d’hébergement. Services publics, commerces, artisans, écoles quittent nos campagnes, alors que la population des « rurbains » augmente.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Pour 2017, le pire est devant nous. La loi pour la République numérique devrait être un atout pour la ruralité en favorisant le télétravail ou l’accueil de nouvelles entreprises. Oui, la fibre optique dans l’Aisne, c’est prioritaire et urgent. Portée par le syndicat départemental, la première tranche s’élève à 150 millions d’euros, dont 46,7 millions sont à la charge des communautés de communes rurales. Comme pour la téléphonie mobile, les opérateurs investissent là où c’est rentable ! La fibre optique est gratuite dans les zones urbaines, mais la ruralité, elle, doit payer ! Où est l’égalité républicaine ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Au nom des députés RRDP, très attachés à la ruralité, je vous demande, monsieur le Premier ministre, quel est l’avenir pour la couverture numérique de nos territoires ruraux qui sont l’identité de la France ? Que comptez-vous faire pour que nos territoires les plus fragiles retrouvent confiance en la République ?
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.
Monsieur le député, vous avez raison de parler de l’exclusion numérique en quelque sorte comme d’une exclusion au carré parce qu’elle vient souvent s’appliquer à des territoires dans lesquels le transport et l’accès à des services de première nécessité, pour vivre et avoir une activité économique normale, sont déjà réduits.
Face à ce défi, nous ne sommes pas restés les bras croisés, vous le savez bien, et la mobilisation est pleine et entière. C’est d’abord le plan Très haut débit : 20 milliards d’euros, dont les deux tiers sont pris en charge par les opérateurs,…
…dans les zones denses et les zones intermédiaires, en effet, les zones les plus rentables, avec un déploiement que nous vérifions par des réunions très régulières, dans le cadre d’un pouvoir accru de sanctions, donné à l’ARCEP – Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – dans la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, quand ces déploiements ne sont pas réalisés.
« Non ! » sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Ne le niez pas, vous l’avez votée !
Face à cette situation, dans les zones non rentables, nous avons fait remonter les dossiers des réseaux d’initiative publique – RIP. Dans ce contexte, aujourd’hui, quatre-vingt-quatre dossiers sont prêts. L’année 2016 sera une année d’accélération de ces travaux. Nous allons dans les prochaines semaines sortir les premiers dossiers. L’Agence du numérique, qui travaille aux côtés d’Axelle Lemaire et de moi-même, est à marche forcée sur ces derniers. Nous cofinançons, aux côtés des collectivités territoriales, ce que les opérateurs ne prennent pas en charge. Sur les 150 millions d’euros dans le département de l’Aisne, 40 millions sont pris en charge par l’État. Nous allons accélérer ce déploiement du très haut débit pour que 2016 soit une année d’exécution.
Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Sur la couverture mobile, 300 communes qui ne sont pas aujourd’hui couvertes en 2G le seront d’ici à la fin de l’année, avec, également, un pouvoir de sanction de l’ARCEP, comme l’a prévu la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Toutes les communes qui ne sont pas couvertes en internet mobile le seront d’ici au printemps 2017. Nous renforcerons encore le dispositif, dans le cadre de la loi pour la République numérique que défend Axelle Lemaire, avec de nouvelles dispositions.
La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, le 12 janvier dernier, le tribunal correctionnel d’Amiens a condamné huit anciens salariés de Goodyear à neuf mois de prison ferme et à quinze mois avec sursis. Il faut remonter loin dans l’histoire du mouvement ouvrier pour trouver un tel jugement. Le plus ahurissant est que les plaignants – direction et cadres – avaient retiré leur plainte. C’est le ministère public qui a décidé de poursuivre et de requérir de la prison ferme, assimilant ainsi ces salariés à des voyous de droit commun.
Première question : qui a donné des instructions au procureur pour réclamer de telles peines ?
Les salariés de Goodyear se sont battus durant sept ans pour préserver leurs emplois et leur outil de travail.
Une commission d’enquête de notre Assemblée a montré que la liquidation de l’usine d’Amiens Nord avait été délibérément organisée par le groupe industriel et qu’il n’y avait pas de raisons économiques aux licenciements. En clair, la direction a pris en otages 1 175 salariés de l’entreprise picarde, selon le mode opératoire qu’avaient déjà connu les salariés de l’usine Continental située dans la même région et dans ma circonscription – c’est un dossier que je connais bien ! Mesurons-nous bien la violence de tels choix ? Suicides, dépressions, couples séparés : tel est le lot de nombre de ces travailleurs jetés à la rue. Et ce seraient eux, les délinquants ? Quelle inversion des rôles et des valeurs !
Le jugement d’Amiens ne relève pas de l’ordre républicain, monsieur le Premier ministre. Il relève de l’ordre économique dominant, selon lequel les victimes deviennent des voyous, les puissants ont toujours raison et les faibles toujours tort. Se battre pour préserver son emploi devient un délit, mais licencier sans raison des salariés serait dans l’ordre des choses. Cette logique-là, qui conduit à l’impunité des patrons voyous et à la criminalisation du mouvement social, est inacceptable.
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Vous savez, monsieur le député, le respect dans lequel nous tenons le combat syndical et le combat social. Ces combats ont une place singulière dans l’histoire de la France : ils ont souvent été à l’origine de lois, de progrès sociaux, d’améliorations des conditions de travail et de vie. Ils ont donc profité à la totalité de la société. Ce respect pour le combat social et syndical est montré par le Président de la République qui, depuis le début de ce quinquennat, a revalorisé le dialogue social, notamment en instaurant une conférence sociale annuelle.
Nous connaissons les difficultés rencontrées par le secteur industriel. Durant les deux précédents quinquennats, pendant une dizaine d’années, nous avons perdu 700 000 emplois industriels. Nous savons à quel point la tension est forte dans ce milieu économique, et à quel point l’angoisse est forte chez les personnes qui travaillent dans ce secteur.
Vous avez posé une question précise : vous avez demandé qui a donné des instructions dans le dossier Goodyear. Monsieur le député, je vous rappelle que vous avez voté ici même, à l’initiative du Gouvernement, une loi qui interdit toute instruction individuelle dans les procédures.
Nous respectons scrupuleusement cette interdiction.
Effectivement, l’entreprise avait retiré sa plainte, mais le parquet a choisi de poursuivre. Cela relève de ses prérogatives.
Cette première décision de justice a provoqué de l’émoi, mais vous savez que les parties ont fait appel. Nous sommes dans une société démocratique. Les magistrats vivent dans cette société, et ils savent que les sanctions décidées en première instance ont suscité des interrogations. Ce sont des juridictions indépendantes, souveraines, qui ont rendu cette décision. Une nouvelle décision de justice sera rendue en deuxième instance : vous aurez à l’apprécier.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
« Je maintiendrai toutes les ressources affectées à la politique familiale. »
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Souvenez-vous, monsieur le Premier ministre ! C’était l’engagement no 16 du candidat Hollande à la présidentielle de 2012.
Depuis cet engagement, malheureusement, se sont succédé des mesures en totale contradiction avec cette incantation préélectorale.
Je citerai par exemple le double rabot du quotient familial, la réduction des aides à la garde d’enfants, la modulation des allocations familiales,…
…ou encore la division par deux de la prime à la naissance, dont le versement est par ailleurs décalé de deux mois. Au total, ce sont 2,630 milliards d’euros qui, depuis 2013, ont été subtilisés aux 3,2 millions de familles injustement victimes de votre politique.
Aussi ne sommes-nous pas surpris que l’INSEE, qui a dévoilé mardi le bilan démographique 2015 de la France, confirme une chute des naissances. Le taux de fécondité passe de 2,1 à 1,96 enfant par femme : c’est la baisse la plus importante constatée depuis vingt ans.
Nous, députés du groupe Les Républicains, aux côtés des associations familiales, nous vous avions pourtant alerté sur les conséquences de vos mesures anti-familles sur la confiance des familles et sur la natalité. En effet, même si le lien avec le taux de fécondité n’est pas mécanique, on ne peut nier l’effet positif des politiques d’aide à la famille sur la natalité. Pour preuve, lorsque le taux de fécondité avait dramatiquement chuté en 1994, c’est une politique familiale volontariste, basée sur des mesures permettant de concilier vie familiale et vie professionnelle, qui a permis d’inverser la tendance en redonnant aux familles confiance et stabilité.
Monsieur le Premier ministre, la baisse de notre natalité ne doit pas s’inscrire dans la durée. Quel message positif comptez-vous enfin adresser aux familles de France ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.
Monsieur le député, la France continue d’être le pays d’Europe ayant les taux de natalité et de fécondité les plus élevés. Les taux français sont nettement supérieurs à ceux de bon nombre de nos voisins, nettement supérieurs à ceux de pays qui nous ressemblent pourtant beaucoup.
Notre politique familiale, que vous décriez, est donc une politique offensive, juste et équitable.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Elle permet à la France de conserver un taux de natalité extrêmement élevé et un taux d’activité professionnelle des femmes que les autres pays d’Europe nous envient.
C’est d’abord dans les modes d’accueil que la France investit. Le budget des allocations familiales consacré aux modes de garde augmente et continue d’augmenter chaque année de 7 %. Nous n’avons pas renoncé à équiper l’ensemble des communes, dans les territoires ruraux comme dans les territoires urbains, de modes d’accueil pour les enfants de moins de 3 ans. De même, nous avons développé l’accueil des enfants à l’école dès 2 ans.
Par ailleurs, la politique familiale que nous conduisons est juste, redistributive et équitable. Nous avons fait le choix de la réorienter en faveur des familles les plus modestes, et particulièrement en faveur des familles monoparentales, qui sont incontestablement celles qui souffrent le plus aujourd’hui. C’est pourquoi nous avons augmenté le complément familial, l’allocation de soutien familial, l’allocation de rentrée scolaire, et que nous généralisons la garantie des impayés de pensions alimentaires pour les mères dont les ex-conjoints défaillants n’assurent pas l’éducation des enfants. Voilà une politique familiale qui produit des résultats !
Enfin, vous faites des extrapolations sur le lien entre la politique familiale que nous conduisons et la baisse de la natalité.
Aucun scientifique, aucun démographe ne considère aujourd’hui qu’il serait juste et intelligent d’établir une relation entre cette baisse ponctuelle de la natalité et notre politique familiale.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Valérie Corre, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, la semaine dernière, les chiffres du déficit public de 2015 ont été publiés. Que montrent-ils ? Pour la quatrième année consécutive, grâce à l’action de la gauche, le déficit public baisse dans notre pays.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains. – « Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Très concrètement, le déficit de 2015 atteint 70,5 milliards d’euros, soit une baisse de 15 milliards d’euros par rapport à l’année précédente. Le déficit public se situe donc à 3,8 % du PIB, loin, très loin des années Sarkozy, où il avait atteint 7,5 % en 2009.
Grâce à l’action des gouvernements de Jean-Marc Ayrault et de Manuel Valls, la France redresse ses comptes publics.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ce redressement, on ne le fait pas par plaisir. Il est indispensable pour ne pas provoquer l’asphyxie financière de la France et la paralysie des services publics et de notre modèle social.
Sur cette question, comme sur tant d’autres, la droite aime donner des leçons,…
…mais elle refuse de voir que la gauche doit réparer ce qui a été abîmé. Nous ne devons pas avoir peur de le dire à l’heure où Nicolas Sarkozy cherche à se dérober de l’inventaire de son bilan entre 2007 et 2012.
Chers collègues, notre majorité sera donc la première de l’histoire de la Ve République à baisser chaque année le niveau des déficits publics.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Nous l’avons fait sans renoncer à nos priorités politiques comme la poursuite du plan d’embauche de 60 000 nouveaux personnels dans l’éducation nationale ; le financement des nouvelles mesures en faveur de la sécurité, la défense et la justice, déjà programmé, mais amplifié suite aux attentats qui ont frappé la France ; la suppression de la première tranche d’impôt sur le revenu qui libère du pouvoir d’achat pour les travailleurs et les retraités ainsi que les nouveaux droits sociaux tels que la généralisation du tiers-payant, la réforme de la dépendance ou l’amélioration de la couverture maladie des Français.
Monsieur le ministre, être de gauche, c’est porter une exigence : ne jamais opposer progrès et responsabilité. Comment le Gouvernement la met-elle en oeuvre ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Merci, madame la députée, d’avoir cité des chiffres qui même s’ils sont importants – nous parlons de milliards – paraissent lointains aux Français. Ils montrent cependant que la France est depuis quelques années gérée avec sérieux.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
On ne diminue pas un déficit pour le seul plaisir de le diminuer. On le diminue parce que c’est absolument indispensable pour la crédibilité de la France, pour permettre à la France de parler fort, de parler haut, de porter ses propositions en Europe et dans le monde. C’est indispensable pour financer les priorités qui sont les nôtres.
Les chiffres que vous avez avancés sont exacts, je les rappelle sans aucun esprit polémique. La vérité est la vérité, pour la droite comme pour la gauche, comme pour l’ensemble des Français.
En 2010, le déficit de l’État s’élevait à 149 milliards d’euros. En 2015, il est, grâce à notre gestion, de 70 milliards d’euros. La majorité a voté un déficit de 74 milliards d’euros, la réalité est à 70 milliards, c’est-à-dire que nous avons fait mieux que ce que vous nous aviez demandé de faire.
Comme je le disais, on ne maîtrise pas un déficit pour le plaisir. On le maîtrise pour financer les priorités de la France.
Le déficit a baissé en 2015 alors que par ailleurs nous avons fait face à des dépenses supplémentaires indispensables pour lutter contre le terrorisme. Vous avez voté ici des moyens supplémentaires pour lutter contre le terrorisme, pour assurer la sécurité des Français en 2016, pourtant nous continuerons en 2016 à diminuer le déficit de l’État. De même, nous souhaitons – c’était le cas l’année dernière, ce le sera cette année – que la marge de manoeuvre que nous avons conquise par le sérieux soit mise au profit de la lutte contre le chômage et de l’emploi. Nous avons les moyens de le faire grâce au sérieux de notre gestion.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Joëlle Huillier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Lundi 18 janvier, les forces de gendarmerie sont intervenues à Moirans, en Isère, pour appréhender les individus qui avaient provoqué des émeutes le 20 octobre dernier.
Lors de ces émeutes, la gare et ses alentours avaient été saccagés, le trafic SNCF et la circulation sur la RD 1085 avaient été interrompus, des voitures avaient été brûlées. Les forces de l’ordre, les pompiers, les services de l’État et des collectivités territoriales avaient alors effectué un travail exemplaire pour contenir les violences et rétablir l’ordre républicain.
Chers collègues, la fermeté républicaine a une fois de plus prévalu avec l’interpellation de quinze personnes ce lundi.
Oui, la justice et l’État sont au rendez-vous dans le respect des procédures. Les enquêtes, les investigations par les services de sécurité et la justice ne sont pas calquées sur l’instantanéité du flux médiatique. Les démagogues qui veulent faire croire que la gauche est laxiste,…
…ne trompent personne.
Dans un État de droit, on ne conteste pas les décisions de justice par la violence. On ne tente pas d’effrayer la population, on ne fait pas de chantage. La procédure en cours va permettre d’établir les responsabilités dans ces émeutes afin que chacun assume la conséquence de ses actes.
Les émeutes de Moirans ont constitué une atteinte à l’ordre républicain et la République s’est organisée pour y apporter la réponse appropriée. Nous devons tous nous en féliciter.
Monsieur le ministre, à Moirans comme sur l’ensemble du territoire, comment le Gouvernement porte-t-il le combat pour l’ordre républicain et pour la sécurité de nos concitoyens ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la députée, vous venez de rappeler les événements qui se sont produits à Moirans au mois d’octobre dernier et qui ont, à juste titre, profondément choqué les Français. Une poignée d’individus guidés par le seul instinct de la violence ont procédé à la destruction de véhicules qu’ils ont brûlés, ont occupé une gare, empêché les trains d’y arriver et d’en partir, le tout dans un climat de violence tout à fait inacceptable dans notre État de droit.
C’est la raison pour laquelle, le Premier ministre s’est rendu le 6 novembre dernier à Moirans et à Grenoble, pour rappeler la détermination de l’État : les individus qui avaient commis ces exactions devaient être rattrapés par la République et jugés.
Dans un État de droit, lorsque l’on est attaché à l’autorité de l’État, il ne peut y avoir d’arbitraire. La police scientifique et technique doit faire son travail sous l’autorité des magistrats et de juges indépendants, ces derniers, ainsi que les gendarmes ont du reste accompli un travail remarquable.
Le temps du déroulement des procédures judiciaires dans le respect du droit n’est pas celui de l’énervement et de l’excitation sur les plateaux de télévision. Dans un État de droit, on ne décrète pas les interpellations du bureau politique de telle ou telle organisation politique quand on est attaché aux principes de la République.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Les gendarmes et les magistrats ont fait leur travail : 15 interpellations ont eu lieu, des gardes à vue sont en cours et le droit passera.
Par ailleurs, quand on est attaché à l’État de droit, on donne des moyens aux forces de l’ordre pour remplir leurs missions.
C’est la raison pour laquelle lorsque je me suis rendu à Grenoble, j’ai annoncé la création de 114 postes de gendarmes et de policiers pour 2016, là où entre 2007 et 2012, il en avait été supprimé 120 !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse au Premier ministre ou à celui qui le remplacera. Nous adhérons aux objectifs d’un monde moins pollué, avec moins de CO2, c’est-à-dire à ceux de la lutte contre le changement climatique, dans l’esprit de la COP21.
L’industrie nucléaire française, monsieur le ministre de l’économie, peut et doit y contribuer. Le problème est que le Gouvernement déprime la filière française.
L’action d’EDF, vous l’avez rappelé hier, a perdu près de 60 % en un an. Certes, une telle situation n’est pas propre à la France. En Allemagne, celle d’E.ON a perdu 30%. Ce n’est cependant pas la même chose.
La Deutsche Bank a formulé une proposition, qui l’engage. Une solution pour EDF serait un changement de majorité et un gouvernement plus ouvert à l’avenir du nucléaire. Ce sont évidemment les Français qui décideront.
Hélas, beaucoup d’hypothèques sont aggravées par le Gouvernement. Il y a l’éventuelle fermeture de Fessenheim. Avec mon collègue socialiste Marc Goua, nous en avons chiffré le coût : 4 milliards d’euros.
Le Gouvernement a aussi fragilisé le dossier d’enfouissement des déchets nucléaire par le choix d’une mauvaise procédure parlementaire. Le coût explose, passant de 15 à 30 milliards – sur ce dernier point, la procédure n’est évidemment pas en cause.
Vous connaissez les difficultés de recapitalisation d’Areva, avec un risque d’aggravation du déficit budgétaire. Les enjeux sont considérables : l’emploi, l’industrie, l’environnement sont en cause. La responsabilité du Gouvernement est grave.
Quand une loi est mauvaise, vous me l’accorderez, monsieur le ministre, il faut la changer. Le Gouvernement a commencé à le faire pour la loi ALUR. Quand le fera-t-il pour la loi de transition énergétique, qui massacre la filière nucléaire ?
Exclamations sur les bancs du groupe écologiste.
Renoncerez-vous à fermer la centrale de Fessenheim ou nous direz-vous un jour combien cette fermeture va coûter ? Combien va coûter la recapitalisation d’Areva ? Dites-nous si vous allez changer de politique ou précisez-nous combien de milliards d’euros votre politique actuelle va encore coûter aux contribuables français.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.
On pourrait longuement gloser sur les performances relatives des groupes énergéticiens français et allemands, mais je tiens à vous dire qu’en comparaison, la situation des seconds est bien pire.
Les groupes E.On et RWE ont connu des situations de scission et leurs cours se sont effondrés durant les deux dernières années. Nous n’avons donc rien à envier à nos voisins.
Pour ce qui est de la situation française, je ne reviendrai pas sur les engagements pris par le Gouvernement dans le cadre de la loi pour la transition énergétique, mais vous avez raison de dire plus largement que, pour le groupe EDF, les défis à relever sont nombreux.
Celui-ci porte les investissements de la filière nucléaire,…
…qu’attendent en particulier les autres acteurs, sous-traitants de rang un et deux. Il porte l’entretien et les services du parc, les marchés à l’international, mais aussi le financement de la transition énergétique par un fonds qui a été décidé, et les investissements propres qui sont demandés au groupe.
Face à cette situation, l’État actionnaire a d’abord pris ses responsabilités en acceptant que le dividende soit versé en titres, donc en ne demandant pas d’argent, ce qui était classiquement le cas, à l’entreprise. C’est un premier pas.
Le deuxième, c’est la réorganisation de la filière nucléaire. La discussion est en train de se finaliser entre EDF et Areva. Sur ce point, je ne souscris pas à vos propos.
La réorganisation n’est pas mauvaise pour EDF. Elle lui permettra de contrôler une filiale commune, qui pourra produire et exporter des réacteurs. Elle lui permettra aussi de clarifier l’ingénierie du groupe. Donc, c’est bon.
Le prochain défi est d’obtenir dans les prochains mois une analyse pleine et entière du coût complet de ces politiques pour qu’EDF puisse préparer aussi la transformation de son modèle, parce que celui de demain ne ressemblera pas à celui d’hier.
La parole est à M. Luc Belot, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la secrétaire d’État au numérique, en 2004, le Parlement adoptait la loi pour la confiance dans l’économie numérique. À l’époque, seulement 10 % de l’humanité étaient connectée à Internet, et le commerce inter-entreprises électronique atteignait à peine 2 000 milliards d’euros.
Aujourd’hui, ce monde a été bouleversé. Chaque seconde, internet compte huit nouveaux utilisateurs ; chaque jour, 820 000 nouveaux sites internet sont ouverts ; 3 milliards d’humains sont connectés et 2 milliards d’entre eux le sont aussi à un réseau social.
En France, cette nouvelle donne est aussi une réalité : 34 millions de Français se connectent quotidiennement sur deux ou trois supports, ordinateur, tablette ou smartphone, et 83 % de notre population le fait régulièrement, soit pour des activités internet soit pour communiquer par mail.
Au regard de cette réalité, il était urgent, important que nous puissions disposer d’un cadre juridique stabilisé, c’est-à-dire d’une loi qui permette aux uns et aux autres de s’y retrouver pleinement.
Que deviennent nos données personnelles ? Qui utilise les traces que nous laissons sur internet ? En plus de notre identité, nous avons une identité numérique à part entière, qui doit avoir des droits équivalents à ceux que nous possédons dans le reste de la société.
C’est l’objet du travail que nous menons depuis des mois, lors de nos auditions, depuis la semaine dernière en commission, et depuis hier dans l’hémicycle, avec – je dois le dire à l’ensemble de mes collègues – des propositions particulièrement efficaces et constructives émanant de tous les groupes.
Alors que nous avons besoin d’aborder sereinement la deuxième vague de cette révolution numérique, et que certains voudraient construire des murs pour la contenir, comment comptez-vous apprendre aux Français et à nos entreprises, à surfer pour être à la pointe de cette révolution ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.
Monsieur le député, oui, il était temps d’actualiser notre logiciel républicain, à l’aune du numérique, un logiciel qui bogue parfois, et rencontre des virus ou des trolls.
Plus sérieusement, je salue le travail mené la semaine dernière par la commission des lois, lors d’un débat de dix-sept heures, de très haute tenue, marqué par une participation constructive des députés de tous les groupes.
Je remercie spécialement les nombreux rapporteurs – vous-même, monsieur Belot –, M. Bréhier, Mme Erhel, Mme Geoffroy et Mme Karamanli. Merci aussi aux rédacteurs citoyens, à ces milliers d’internautes qui ont participé à la rédaction d’un projet de loi qui est aussi le leur.
Ce texte vise à dire non au fatalisme, à l’idée qu’on ne puisse rien faire dans la sphère numérique aujourd’hui, que l’on soit impuissant face à la domination économique de certains géants ou à une certaine technocratie européenne qui déciderait à notre place.
Sans naïveté technophile, sans abandon aux seules forces du marché, le Gouvernement agit de manière proactive pour aider nos concitoyens à reconquérir leur autonomie dans la sphère virtuelle, en protégeant leurs données personnelles, en protégeant leur vie privée en ligne, avec la confidentialité des courriels, avec le droit à l’oubli pour les mineurs, avec la mort numérique et avec le maintien à la connexion pour les foyers fragilisés.
Et puis, nous aidons les start-up, les jeunes entreprises innovantes et les acteurs publics, ainsi que les collectivités locales, grâce à l’ouverture des données publiques.
Voilà une loi qui prépare la République de demain, qui prépare notre pays pour demain.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.
En l’absence de M. le Premier ministre, ma question s’adresse à M. le ministre de la ville. Permettez-moi tout d’abord de vous dire que c’est avec une certaine émotion que je pose cette dernière question, en remerciant mes collègues et particulièrement le président de groupe, Christian Jacob, pour la liberté et la confiance qu’il m’a accordées pendant ce mandat.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le ministre, l’égalité des chances est bien plus qu’un slogan : elle doit être une politique. Je ne doute pas de vos bonnes intentions, monsieur le ministre, mais force est de constater que les faits contrarient largement vos promesses.
L’égalité des chances, en premier lieu, doit être au rendez-vous des enfants de la République. Dans ma ville de Tourcoing, qui ressemble à tant de villes ouvrières et populaires de France, les enfants ont besoin de l’intervention de l’État et des collectivités territoriales pour établir cette égalité des chances.
Nous venons d’apprendre, monsieur le ministre, une décision incompréhensible de votre ministère : en effet, le dispositif de réussite éducative, qui permet aux enfants ayant des difficultés de langage et de vocabulaire d’être soutenus par des aides individuelles de l’éducation nationale, était jusqu’à présent financé par l’État. Depuis deux ans, et plus encore cette année, les collectivités territoriales doivent consacrer entièrement leur budget au désengagement de l’État : 400 000 euros pour la ville de Tourcoing rien que cette année.
Pour une ville qui connaît déjà 2 millions d’euros de charges supplémentaires du fait des rythmes scolaires décidés par votre gouvernement, une baisse de 200 000 euros pour son conservatoire de musique populaire et, je suis obligé malheureusement de le constater, une baisse de 5 millions d’euros de dotations pendant le mandat de François Hollande, c’est inacceptable – d’autant plus inacceptable, monsieur le ministre, que dans cette ville, 22 % des élèves du collège ont un retard d’un an et 27 % des 15 à 17 ans n’ont pas de diplôme.
Alors, monsieur le ministre, arrêtez les exercices comptables : aidez vraiment l’égalité des chances, aidez vraiment nos enfants des quartiers populaires !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le député, pour votre dernière question, j’aurais aimé que vous soyez plus précis dans votre argumentation.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La réussite éducative est une priorité absolue de notre gouvernement. Vous le savez, la refondation de l’école a été l’une des principales lois de ce quinquennat et le département du Nord, avec trente et un réseaux d’éducation prioritaire renforcés, dits REP +, et quarante-six réseaux d’éducation prioritaire, dits REP, n’est pas un département sacrifié, bien au contraire.
En complément de toutes ces mesures visant à assurer l’égalité des chances par l’éducation, nous avons développé, sanctuarisé le programme de réussite éducative dans les quartiers prioritaires de la ville, et le département du Nord est prioritaire en la matière, vous le savez. Dans ce cadre, je tiens à vous confirmer que 77 millions d’euros sont consacrés à cette politique volontariste, laquelle a d’ailleurs été instaurée par l’un de mes prédécesseurs, que je tiens à saluer : M. Jean-Louis Borloo, ministre de la ville sous un gouvernement précédent.
Non seulement nous préservons ces crédits, non seulement nous les sanctuarisons mais, bien évidemment, nous donnons des chances supplémentaires aux villes qui sont les plus concernées.
Je ne partage pas l’analyse que vous avez développée et que je vous demande de bien vouloir m’expliquer lors d’un entretien particulier, si vous le souhaitez. Oui, les quartiers prioritaires de la ville dans le Nord restent une priorité absolue. Je tiens à vous signaler que dans les 437 contrats de ville signés à ce jour, les crédits pour l’éducation restent une priorité pour notre gouvernement.
Monsieur Darmanin, vous êtes manifestement dans une logique de polémique
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains
je le regrette et les Tourquennois sauront reconnaître la vérité dans quelques jours !
Mêmes mouvements.
Ma question s’adresse à M. le ministre des finances. En 2008, la banque Société Générale a annoncé avoir perdu 4,911 milliards d’euros. La Société Générale se déclarait victime d’une escroquerie et accusait son employé, le trader Jérôme Kerviel.
Le Conseil d’État a permis par le passé la déduction fiscale de pertes issues de détournements commis par les salariés d’une entreprise. La Société Générale a donc déduit 2,2 milliards de ses impôts à partir de 2008, avant même que sa plainte contre Jérôme Kerviel ait été jugée. Une disposition légale qui ne s’applique que pour les innocents a été utilisée par la Société Générale, avant même qu’elle soit déclarée innocente par la justice, alors même que les preuves de la faute de la Société Générale s’accumulent.
En juillet 2008, la Banque de France lui inflige un blâme et une amende de 4 millions d’euros pour carence grave du système de contrôle interne. Je cite : « Les lacunes du contrôle engagent la responsabilité de la direction. » En 2014, la Cour de cassation reconnaît que la faute revient à Jérôme Kerviel et à la Société Générale. Aujourd’hui, un nouveau procès en appel débute pour déterminer, non pas l’innocence de la Société Générale, mais la part exacte de sa culpabilité.
En 2015, la commandante de police chargée de piloter cette affaire, Nathalie Le Roy, déclare au juge Le Loire : « J’ai la certitude que la hiérarchie de Jérôme Kerviel ne pouvait ignorer les positions prises par ce dernier. » La semaine dernière, c’est la magistrate Chantal de Leiris qui témoigne : « La Société Générale savait, c’est évident ».
Je peux comprendre qu’en 2008, le Gouvernement ait laissé faire pour sauver une banque qui semblait victime d’un escroc. Aujourd’hui, la coresponsabilité de la Société Générale est confirmée de toutes parts.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré hier attendre un jugement définitif pour récupérer les 2,2 milliards. La logique voudrait que vous récupériez l’argent dès maintenant, quitte à permettre une déduction après jugement définitif !
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
Merci, madame la députée, pour cette question qui est dans l’actualité et dont je comprends parfaitement qu’elle vous préoccupe. L’administration fiscale, placée sous l’autorité de Christian Eckert et de moi-même, agit dans le respect du droit, comme toute autre administration.
Le respect du droit, c’est d’abord et avant tout le respect des lois, le respect de la jurisprudence et le respect des décisions de justice qui sont rendues. C’est en vertu de cela, des lois que vous votez et des décisions de justice, que notre administration prend ses décisions. Dans le contexte de 2008 jusqu’à 2014, les décisions prises par l’administration fiscale l’ont été en respectant le droit.
Des procédures ont été engagées par M. Kerviel – il en a parfaitement le droit – pour réviser un premier jugement. En outre, la Cour de cassation a renvoyé à la Cour d’appel de Versailles le jugement sur ce point que vous avez parfaitement décrit : la responsabilité éventuelle de la banque elle-même. Sur ces deux points, je ne peux pas préjuger.
Préjuger, c’est agir contre le droit ; préjuger, c’est agir contre la loi. Que penseriez-vous d’une administration fiscale qui agirait uniquement en fonction des dossiers, des situations ou des personnes ?
Parfois, certains nous le demandent : nous nous y refusons. Ce gouvernement a toujours refusé, tant dans le domaine des procédures judiciaires que des procédures fiscales, de donner des instructions personnelles.
Évidemment, madame la députée, si la justice française, soit par le biais de la révision, soit par le biais de la cassation et du jugement de la cour d’appel, devait établir des faits différents de ceux qui ont précédé, alors mon administration en tirerait toutes les conséquences, y compris fiscales, vis-à-vis de la Société Générale.
Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : le Gouvernement a-t-il conscience de la dégradation du réseau routier français ?
Le réseau routier constitue un patrimoine considérable qui permet d’assurer 88 % des déplacements des Français. Mais aujourd’hui, ce réseau vieillit et s’abîme, au point de devenir par endroits dangereux.
Il y a d’abord le réseau national. Certes, les 9 000 kilomètres d’autoroutes concédées sont entretenues, mais vous ne consacrez que 243 millions d’euros à la régénération des chaussées et des ouvrages d’art des 12 000 kilomètres de routes nationales.
Les départements de France, qui entretiennent 380 000 kilomètres de route, sont à l’agonie financière. N’ayant pas réussi à les faire disparaître, vous leur imposez un garrot budgétaire qui rend bien des conseils départementaux incapables d’entretenir leurs routes.
« Très bien ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Il y a enfin les 660 000 kilomètres du réseau communal. Tous les maires de France tentent d’entretenir leurs routes, mais la baisse de 30 % des dotations de l’État aux collectivités se traduit par un effondrement du volume des travaux, que bien des arbitrages remettent au lendemain.
Un réseau routier mal entretenu est un réseau qui se dégrade. Lorsque les travaux d’entretien sont reportés, les coûts progressent de manière exponentielle.
La situation des routes françaises va rapidement devenir critique et cela est le fruit de vos choix. Avez-vous seulement mesuré les conséquences de votre politique pour la sécurité routière, l’image de la France et l’emploi dans le secteur des travaux publics ? L’effondrement de l’investissement des collectivités locales va rapidement avoir des conséquences sérieuses.
Ce quinquennat laissera une bombe à retardement, celle de l’altération prononcée de l’état nos routes, patrimoine collectif essentiel pour la vie de tous les Français comme pour le fonctionnement de notre économie.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, le Gouvernement peut partager vos préoccupations en ce qui concerne l’état du réseau routier français, mais vous admettrez avec lui que cette dégradation n’a pas commencé subitement il y a trois ans mais qu’elle est le résultat de choix qui ont été faits depuis longtemps, probablement par tout le monde, et qui justifient pleinement votre question.
Le Gouvernement a essayé d’y apporter des réponses, et d’abord pour ce qui relève directement de sa responsabilité, c’est-à-dire la qualité du réseau national. En ce qui concerne le réseau concédé, je veux rappeler qu’un accord est intervenu, aux termes duquel les sociétés concessionnaires doivent y consacrer 3 milliards de travaux. C’est extrêmement important si on veut un réseau autoroutier satisfaisant. En ce qui concerne le réseau national qui dépend de la compétence de l’État, conscient de ses difficultés et malgré les contraintes budgétaires, le Premier ministre a lancé un programme d’entretien exceptionnel de 100 millions d’euros, qui a été entièrement exécuté au cours de l’année 2015. Vous trouverez un descriptif de toutes ces opérations sur le site du ministère.
Je peux vous indiquer que le Premier ministre a souhaité que nous engagions une réflexion de même nature pour 2016. Cela aboutira à doubler les crédits consacrés à l’entretien.
S’agissant des travaux des collectivités locales, nous avons eu souvent des discussions avec elles à ce sujet, notamment dans le cadre des contrats de plan. Vous savez bien que sur ce point la volonté des élus et celle de l’État se sont souvent rencontrées et que le programme routier est au rendez-vous de ces contrats de plan État-région.
Il y a donc un vrai effort et une volonté partagée d’améliorer l’état du réseau routier.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme Valérie Fourneyron, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question, à laquelle j’associe mes collègues Guillaume Bachelay et Christophe Bouillon, s’adresse à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.
Monsieur le ministre, les salariés de Vallourec sont inquiets : inquiets pour la situation de leur groupe ; inquiets du devenir des sept sites industriels qui les emploient, dont celui de Déville-lès-Rouen en Seine-Maritime ; inquiets pour leur avenir et celui de leurs familles.
En avril 2015, l’entreprise Vallourec, spécialiste mondial des tubes sans soudure, a annoncé la suppression de 2 000 emplois, dont 900 sur les 5 000 que compte l’Hexagone.
La cause en est une crise mondiale de l’industrie pétrolière et gazière, profonde et durable, qui frappe de plein fouet le secteur de la métallurgie en le privant de nombreux débouchés ; en cause aussi une frilosité à réaliser les investissements qui auraient été opportuns dans le passé ; en cause enfin, une concurrence de plus en plus brutale venant de Chine.
Aujourd’hui, il ne s’agit plus de savoir qui a commis des erreurs et quand ; il s’agit de trouver des solutions pragmatiques et de sauver des emplois.
La semaine dernière, la direction du groupe a annoncé la suspension du plan de sauvegarde de l’emploi – PSE – qui était en cours de négociation avec les partenaires sociaux. Cette annonce a fait l’effet d’un coup de tonnerre ! Elle laisse en effet présager un durcissement du plan de restructuration, des suppressions de postes supplémentaires et une réduction des capacités de production ou du nombre des outils industriels.
L’État, qui détient 7 % du capital de Vallourec, et particulièrement votre ministère, sont totalement mobilisés pour rechercher de nouveaux actionnaires et des repreneurs, préserver l’emploi et assurer la survie des capacités industrielles françaises. Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, où en sont vos discussions avec la direction de Vallourec ? Quelles solutions industrielles envisager ? Quels investissements réaliser ? Quelle est la stratégie de l’État vis-à-vis de Vallourec ? Quelles sont enfin les avancées vers une réponse européenne au dumping des importations chinoises ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.
Vous avez, madame la ministre, parfaitement posé les termes du débat. Le groupe Vallourec se trouve en effet confronté à deux crises , et d’abord celle du secteur pétrolier, l’industrie parapétrolière représentant 66% du chiffre d’affaires du groupe. Celle-ci est aujourd’hui quasiment à l’arrêt en termes d’investissements du fait de l’effondrement du prix du pétrole, qui s’est encore accéléré ces dernières semaines, et tous les professionnels du secteurs considèrent que cette situation est appelée à perdurer pendant des mois encore.
La deuxième crise est celle de la sidérurgie, du fait en particulier des pratiques de dumping qui permettent aux importations chinoises d’inonder le marché européen, entraînant une baisse drastique des prix.
Face à cela, nous avons entrepris deux séries d’actions pour répondre à la situation du groupe Vallourec qui, comme vous l’avez dit, a, le 14 janvier dernier, repoussé la mise en oeuvre du PSE.
D’abord une action renforcée au niveau européen : il s’agit de prendre toutes les mesures nécessaires contre le dumping chinois. Nous avons, mon collègue Matthias Fekl et moi-même, défendu la position de la France à cet égard devant les conseils compétents pour que nous puissions prendre des mesures efficaces et plus rapides que celles que prévoient les dispositifs classiques aujourd’hui en vigueur.
Il faut ensuite mobiliser l’ensemble du corps productif de Vallourec pour répondre à cette situation. Il s’agit d’abord d’appeler l’ensemble des clients à participer à ces efforts, d’explorer toutes les voies possibles en termes de diversification des débouchés des sites productifs de Vallourec, mais aussi d’articuler le plan social, lancé au printemps dernier et sur lequel j’avais pris moi-même des engagements, et la réorganisation industrielle que doit préparer le groupe Vallourec.
Il s’agit enfin des efforts que les dirigeants du groupe et les actionnaires, dont la Banque publique d’investissement, la BPI, doivent assumer dans le cadre de ce défi.
C’est dans cette perspective que je tiendrai la semaine prochaine une nouvelle réunion de travail avec l’ensemble des élus concernés, à laquelle vous serez associée.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Permettez-moi de rendre hommage à Huguette Gallais, déportée, ancienne grande figure de la Résistance décédée à Fougères, en Bretagne, il y a quelques heures.
Des millions de Français vivent encore dans des déserts médicaux. L’accès aux soins, une évidence pour certains, est pour d’autres un véritable chemin de croix.
L’état d’urgence est également sanitaire ! Au plus grand mépris du principe d’égalité, la précarité sanitaire s’installe. Pire, elle s’aggrave.
Le projet de loi du Gouvernement du 17 décembre dernier aurait dû prioritairement mettre un terme aux déserts médicaux. C’était d’abord cela, la « modernisation de notre système de santé » !
Mais il n’en a rien été et la fausse bonne idée du tiers-payant a monopolisé les débats. Or, c’est oublier qu’avant de pouvoir payer ses soins, il faut y avoir accès !
Les dispositifs incitatifs ont fait leur temps, sans réel succès à la clé. Quant à la hausse ciblée du numerus clausus, elle devrait être généralisée à l’échelle du pays et intensifiée.
Nous avons besoin de mesures fortes, assumées, comme Philippe Vigier l’a proposé au nom du groupe UDI
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants
développer les internats régionaux, imposer des stages obligatoires en maison de santé pluridisciplinaire et amplifier la télémédecine.
Surtout, le groupe UDI propose d’encadrer l’installation des médecins comme nous le faisons pour les pharmacies et de les conventionner uniquement lorsqu’ils s’installent en zone non pourvue.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.
Je sais, monsieur le député Thierry Benoit, que vous aurez la gentillesse d’excuser Marisol Touraine, qui est partie au forum économique de Davos
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je lui ferai part de cet accueil...
Améliorer l’accès aux soins de proximité et réduire les inégalités ont été ses priorités depuis 2012. C’est pourquoi, dès la fin de cette année-là, elle a créé le pacte territoire santé dont l’objectif est d’inciter les jeunes médecins à s’installer dans les territoires sous-dotés.
En ville, dans les territoires ruraux, à l’hôpital, il importe de mettre en place des conditions de travail répondant aux attentes des jeunes médecins. En trois ans seulement, une nouvelle dynamique a été engagée.
Tout d’abord à travers les bourses versées aux jeunes en formation en contrepartie de leur installation en zone fragile. Ce sont ainsi 1 325 jeunes qui se sont engagés dans le dispositif depuis sa création.
En Bretagne, dans votre région, 54 contrats permettront à des jeunes de s’installer dans des territoires sous-dotés.
Deuxième outil : les contrats de praticiens territoriaux de médecine générale permettant de sécuriser l’installation des jeunes médecins. Plus de 500 professionnels se sont ainsi installés dans des territoires manquant de médecins, dont 30 en Bretagne et 6 dans votre département d’Ille-et-Vilaine.
Troisième outil : les maisons de santé pluri-professionnelles, qui répondent aux nouvelles attentes des professionnels. On en comptait 174 en 2012 ; il en existe désormais plus de 800.
Votre département ne comptait que 8 maisons de santé avant 2012 ; ce sont aujourd’hui 27 structures qui accueillent des patients.
Le pacte territoire santé 2 permettra quant à lui d’amplifier cette dynamique.
Vous nous avez interrogés sur notre état d’esprit : il se caractérise par la volonté de dialogue avec les jeunes médecins au premier chef, la volonté de comprendre leurs attentes et de leur donner les conditions d’une meilleure installation possible.
Très bien !
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour le groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, les départements sont les grands blessés de votre réforme territoriale. Certains sont moribonds, fragilisés par la baisse des dotations de l’État et la non-compensation des politiques sociales qui flambent.
Vous venez de transfuser quelques départements pour les sauver de la mort mais sans les guérir et il en reste beaucoup dans la salle d’attente.
Visiblement, leur situation ne vous inspire pas de prise de conscience et vous tirez sur l’ambulance : à chaque texte, vous en rajoutez à la charge des départements.
De plus, vous venez d’adresser le 22 décembre dernier deux instructions aux préfets faisant une étonnante interprétation de la loi NOTRe.
Il y est martelé que le département ne peut plus intervenir sur les aides économiques à partir du 1er janvier 2016. Vous omettez cependant toute disposition transitoire pour assurer le glissement de la compétence vers les régions.
Les aides aux entreprises votées entre le 8 août et la fin de l’année « tombent au 31 décembre 2015 ». À la fin de cette période, notamment en décembre, le délai administratif est devenu intenable car il était impossible de réunir si rapidement les pièces justificatives.
Derrière ces aides votées, validées par les préfets, ce sont des entreprises, des artisans, des commerçants, des emplois de proximité ! Cela revient à dire qu’au mois de décembre 2015, personne ne pouvait aider les entrepreneurs locaux ! Les enjeux sont pourtant réels quant à la baisse du chômage et au RSA.
Dans les Ardennes – mais nous ne sommes malheureusement pas les seuls – 1,5 million d’euros est bloqué pour des projets locaux. Empêcher la délivrance de ces aides aux petites entreprises, c’est fabriquer de nouveaux chômeurs. Comment allez-vous débloquer cette situation ubuesque ?
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République veut faire croire qu’il veut baisser la courbe du chômage. Sur ce dossier j’ai envie de lui dire : chiche !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Je veux absolument réagir à vos derniers propos.
Les représentants du patronat, des petites et moyennes entreprises, l’Union professionnelle artisanale, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment nous ont demandé une chose : mettre fin à un système de 13 000 aides possibles à destination des entreprises, donc créer un guichet unique, rationaliser les aides et essayer d’orchestrer l’ensemble.
Je vous rappelle, car c’est important, que si vous n’avez pas voté la loi à l’Assemblée nationale, vos collègues des Républicains l’ont votée au Sénat en l’état…
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
…insistant sur le fait qu’il fallait mettre fin aux doublons.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ne vous énervez pas ! Je ne m’énerve pas !
La circulaire, à la demande en particulier de l’ensemble des élus et des directeurs de service, rappelle les compétences de chacun.
Enfin, je vous rappelle que nous avons répondu à une question semblable au Sénat, monsieur Jacob, en précisant, s’agissant des aides initiées avant le 31 décembre, qu’une conférence territoriale de l’action publique – CTAP – est nécessaire pour savoir si la région concernée décide de poursuivre ou d’arrêter la délégation de compétences.
Je vous donne rendez-vous, notamment à M. Bussereau qui, semble-t-il, partage votre avis, afin que nous mettions au point les règles de droit qui couvrent totalement les départements.
Mais il n’est pas possible de continuer à dire, comme je l’entends depuis si longtemps, qu’il existe un mille-feuille administratif et des doublons tout en demandant d’arrêter toute tentative de rationalisation et de mutualisation – les contribuables sont les mêmes – dès qu’elle a lieu (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains) !
La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la garde des sceaux, dimanche matin, deux surveillantes de prison ont été victimes d’une tentative d’assassinat sur le parking du centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin, en Seine-et-Marne. Un véhicule les a délibérément renversées, avant de prendre la fuite.
Nous adressons bien évidemment nos pensées aux deux victimes et à leurs familles. L’une de ces surveillantes avait déjà subi une agression, il y a trois ans, dans les murs du centre pénitentiaire.
Si l’on ignore encore la cause du drame de dimanche – représailles d’un détenu ou attaque terroriste ? – ces faits démontrent, une fois encore, combien les personnels pénitentiaires, comme les représentants des forces de l’ordre, sont devenus des cibles privilégiées. Il ne s’agit pas d’un cas isolé, madame la garde des sceaux. Ces dernières années, les agressions sur les personnels pénitentiaires se sont multipliées, et ils sont tous concernés, quelle que soit leur formation.
À la dangerosité du métier, à laquelle le personnel est confronté chaque jour, s’ajoute un sentiment d’exclusion, un manque de reconnaissance. Les personnels pénitentiaires font régulièrement, et depuis longtemps, l’objet d’une vindicte et d’un déficit affectif. Ils sont pourtant des acteurs essentiels d’un lieu nécessaire de sanction et de lutte contre la récidive que la société tend trop souvent à oublier, la prison.
Parce qu’ils sont l’un des rouages indispensables de notre système judiciaire, la justice du XXIe siècle ne saurait se concevoir sans eux. Madame la garde des sceaux, au-delà de la question du renforcement de la sécurité dans les prisons, comment entendez-vous donner à ceux qui oeuvrent au quotidien pour le service public la reconnaissance qu’ils sont en droit d’attendre ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député, je vous remercie de la sollicitude que vous témoignez à l’endroit des deux surveillantes du centre pénitentiaire de Meaux – dont l’une est la première surveillante du centre – qui ont fait l’objet dimanche matin d’une agression sur le parking de celui-ci. Je me suis rendue sur place : la première surveillante a été très fortement agressée, puisque son pronostic vital était engagé dimanche matin, ce qui n’est heureusement plus le cas.
J’ai pu recevoir sa famille proche et j’ai également eu un contact avec la surveillante qui l’accompagnait. Nous sommes très proches d’elles. Leurs collègues ont montré un grand sang-froid, un grand professionnalisme et une très grande solidarité à leur égard. Il va de soi que toute l’administration pénitentiaire est à leurs côtés. Nous veillons à l’état psychologique des familles et à leur éventuel besoin d’un accompagnement, dans l’immédiat et à terme.
Vous avez raison de rendre hommage au travail effectué par les personnels pénitentiaires. Ceux-ci exercent une mission régalienne de l’État, par délégation, dans des conditions souvent difficiles, et nous veillons à reconnaître la qualité de leur travail. Nous avons mis en oeuvre, vous le savez, un plan de sécurisation des établissements de 33 millions d’euros en juin 2013. Nous avons par ailleurs signé avec le principal syndicat un protocole d’amélioration du régime statutaire et indemnitaire en mai 2013 et nous venons de signer, le 14 décembre 2015, avec la totalité des syndicats de l’administration pénitentiaire, un protocole qui leur affecte de nouveaux effectifs, d’une part, et qui améliore leur situation indemnitaire et statutaire, d’autre part.
Nous veillons par ailleurs à la revalorisation et à l’attractivité de ces métiers. Les personnels pénitentiaires ont raison de réclamer que leur protection soit mieux assurée : j’ai fait mettre en place, en février 2014, un plan de lutte contre la violence à l’intérieur des établissements, et j’ai également demandé que des dispositions soient prises pour sécuriser leurs abords.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, à l’heure où le Président de la République essaie par tous les moyens de faire baisser le chômage, je voudrais vous alerter sur un dossier, dont les conséquences pour l’emploi sont évidentes.
Votre gouvernement a annoncé un investissement de 1,5 milliard pour renouveler les trains Intercités. Cette excellente nouvelle fut accueillie avec soulagement par l’ensemble de la filière ferroviaire, ainsi que par les usagers, car les problèmes de vétusté, de sécurité, de fiabilité et d’attractivité commerciale sont criants.
L’État, qui est décisionnaire sur le renouvellement du matériel en tant qu’autorité organisatrice, doit s’engager financièrement avec la SNCF. Le matériel, qui présente un haut niveau de confort et de service, est prêt. Se pose aujourd’hui la question déterminante des délais et du montage juridique. Les contrats-cadres signés en 2009 avec Alstom et Bombardier sont toujours d’actualité. Je rappelle que seuls 250 trains Régiolis ont été commandés, sur les 1 000 annoncés. Ce sont 4 000 emplois qui sont concernés, dans toutes les régions de France, sur des sites qui n’ont aucune visibilité au-delà de 2017.
Si une commande était passée aujourd’hui, avec le contrat-cadre, elle favoriserait la continuité industrielle et une production de trains dès 2018. Si le Gouvernement opte en revanche pour des appels d’offres, nous risquons – et ce risque est majeur – d’avoir quatre années de rupture de charge, avec, à la clé, des restructurations et des fermetures de site, car les premiers trains ne sortiraient qu’à la fin de 2022. Les conséquences industrielles pourraient être catastrophiques, avec un gros risque social dès les premiers mois de 2017.
Quelle décision allez-vous prendre pour le développement de la filière ferroviaire française, qui offre de réelles opportunités de création d’emplois ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, votre question concerne l’avenir des trains d’équilibre du territoire – TET.
À la suite de la publication du rapport de la mission parlementaire présidée par M. Philippe Duron, j’ai présenté, au mois de juillet 2015, une feuille de route qui entendait à la fois répondre à la nécessité de faire des économies sur l’ensemble des trains d’équilibre du territoire, dont je rappelle que le déficit était passé de 200 millions à 400 millions en presque quatre ans, et acheter du matériel, à destination des grandes lignes du territoire.
Ce que veulent les élus, ce sont des trains qui roulent à 200 kilomètres à l’heure et qui présentent un haut niveau de services. Le problème qui se pose aujourd’hui, vous l’avez dit, c’est qu’il existe un marché ouvert, ou sur étagères, comme on dit, qui permettrait de répondre à cette demande. Mais une question se pose, qui fait toujours aujourd’hui l’objet d’une expertise juridique : celle de savoir si ce marché peut être utilisé pour du matériel qui présente des spécificités, notamment en termes de vitesse, puisque l’Association des régions de France demande que les trains puissent rouler à 200 kilomètres à l’heure.
Cette expertise est en cours. Je peux néanmoins vous indiquer que nous pourrons probablement vous donner une réponse définitive le 18 février, lors de la publication d’une nouvelle feuille de route sur l’avenir des TET. Nous sommes bien conscients des problèmes qui se posent : nous les avons examinés avec Emmanuel Macron et nous essaierons naturellement de prendre une décision sérieuse sur le plan juridique, qui prenne en compte les objectifs industriels que vous avez exposés, et qui permette aux trains d’équilibre du territoire d’assurer leur mission, car leur avenir est très important pour l’État, qui en est l’autorité organisatrice.
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quarante, sous la présidence de Mme Laurence Dumont.
Hier soir, l’Assemblée a commencé la discussion des articles, s’arrêtant à l’amendement no 234 rectifié à l’article 4.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 234 rectifié , 535 rectifié , 315 , 891 faisant l’objet d’un sous-amendement no 894 rectifié , 739 et 740 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Luc Belot, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour soutenir l’amendement no 234 rectifié .
Cet amendement a trait aux obligations relatives à l’open data imposées aux collectivités territoriales. L’article 106 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, la loi NOTRe, a défini de nouvelles obligations relativement contraignantes et posant certaines difficultés. De fait, les règles imposées aux administrations et à l’État n’étaient pas les mêmes que celles qui s’appliquaient aux collectivités, y compris pour la commission d’accès aux documents administratifs, la CADA. Faire varier les règles d’accès aux documents en fonction de la structure me semble pouvoir poser problème aux citoyens.
C’est pourquoi je voulais vous proposer de supprimer l’alinéa 7 et de compléter l’article par l’alinéa suivant : « Les articles L.1112-23 du code général des collectivités territoriales et L.125-12 du code des communes de Nouvelle-Calédonie sont abrogés. » Pour autant, les nombreux échanges que nous avons eus en commission et avec le Gouvernement m’ont sensibilisé à l’amendement que celui-ci a déposé, relativement aux communes de moins de 3 500 habitants. Étant donné qu’il me paraît désormais assez pertinent que les communes de moins de 3 500 habitants bénéficient d’un régime d’exception, je retire mon amendement en faveur de celui que va présenter Gouvernement.
L’amendement no 234 rectifié est retiré.
La parole est à M. Éric Straumann, pour soutenir l’amendement no 535 rectifié .
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 315 .
C’est un amendement de bon sens. La loi NOTRe prévoit un certain nombre d’obligations pour les collectivités en matière de transparence et de communication publique. Votre loi définit des restrictions, que vous avez jugées utiles, pour l’État et l’administration. Cet amendement vise à assurer un alignement des astres, c’est-à-dire à donner aux collectivités les mêmes obligations qu’à l’État, ni plus ni moins, en matière de transparence sur les informations qui font l’objet de ce texte. Je suis certain que vous serez favorable, madame la secrétaire d’État, à une telle mise en cohérence.
Je suis saisie d’un amendement no 891 qui fait l’objet d’un sous-amendement no 894 rectifié .
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du numérique, pour soutenir l’amendement.
Cet amendement vise à supprimer l’exemption des collectivités locales dans le dispositif juridique que nous sommes en train de créer, afin de faire droit aux nombreuses demandes exprimées en commission des lois. Plusieurs amendements ont d’ailleurs été déposés en ce sens pour insérer dans ce texte les dispositions de la loi NOTRe relatives à l’ouverture des données publiques des collectivités locales, afin de rendre plus lisible la cohérence générale et d’appliquer la politique d’open data à l’ensemble des acteurs publics.
Si le Gouvernement a d’abord été réticent à cette logique, pour ne pas revenir sur un travail législatif effectué tout récemment, j’ai entendu les arguments avancés. En revanche, nous souhaitons réintroduire le seuil des 3 500 habitants de la loi NOTRe. Il y a dans le projet de loi pour une République numérique beaucoup de bonnes choses pour les collectivités locales, en particulier la création des données d’intérêt général qui doivent renforcer les collectivités qui en seront outillées dans leurs négociations avec les délégataires de services publics, par exemple, notamment dans le cadre des schémas d’aménagement.
Au cours de mes nombreuses rencontres avec les représentants des collectivités locales, et plus particulièrement des petites communes – je pense à l’Association des petites villes de France, présidée par votre collègue Olivier Dussopt, ou au Conseil national d’évaluation des normes, dont le président, Alain Lambert souhaite introduire dans la loi un principe de proportionnalité pour les collectivités locales –, mon attention a cependant été attirée sur la faisabilité de cette politique ambitieuse d’ouverture des données publiques dans des communes qui n’en ont pas nécessairement les moyens à l’heure actuelle.
Selon l’association Villes Internet, sept communes françaises sur dix n’ont pas de site internet. Si nous devons être ambitieux, nous devons aussi être réalistes dans notre manière de traiter les collectivités locales et entendre leurs revendications. Tel est l’objet de cet amendement.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir le sous-amendement no 894 rectifié .
Ce sous-amendement vise à s’assurer qu’il n’y ait aucun recul en matière de publication en ligne pour les communes de plus de 3 500 habitants dotées de moins de cinquante agents et salariés, qui sont soumises depuis la loi NOTRe à une obligation de publication. Le fait d’avoir des seuils différents, l’un concernant le nombre d’agents, l’autre le nombre d’habitants, est à notre avis source de difficultés.
Je vais défendre en même temps l’amendement no 740 , madame la présidente.
Il y a un vrai problème entre l’alinéa 7 de l’article 4 et l’article 106 de la loi NOTRe, ce que le rapporteur a lui aussi relevé. Il faut trouver la meilleure manière de le résoudre en cherchant l’articulation adéquate entre le présent projet de loi et l’article susmentionné. Celui-ci est à ce jour très peu mis en oeuvre pour les collectivités de plus de 3 500 habitants. Sans doute aurait-il fallu prévoir une mise en application différée et différenciée. Mais j’ai cru comprendre que le Gouvernement voulait exonérer les collectivités de moins de 3 500 habitants des nouvelles obligations prévues dans cet article. Entre la rédaction actuelle de l’alinéa proposée par le Gouvernement et sa suppression, souhaitée par le rapporteur en commission, il devrait être possible de trouver un juste milieu. Tel est le sens de mes deux amendements, qui prévoient à cet effet l’application des dispositions proposées à cet alinéa, mais dans le même cadre limité que ce qui est prévu dans la loi NOTRe – disponibilité des documents en format numérique par exemple. Il est évident que si cette loi avait fait l’objet de davantage de réflexion, nous n’en serions pas là, et que ces problèmes sont aussi dus à la baisse des dotations attribuées aux collectivités territoriales, obligées de ce fait de rogner sur certaines dépenses, en l’occurrence celles portant sur la numérisation et sur la diffusion des données.
L’amendement no 740 a été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements et sur le sous-amendement ?
Même si on peut partager les arguments soutenus dans les amendements nos 535 rectifié et 315 , il s’avère que ceux-ci ne font pas référence à l’article L. 125-12 du code des communes de Nouvelle-Calédonie, alors qu’il faut aussi le prendre en compte. L’avis de la commission est donc défavorable. Il est en revanche favorable à l’amendement du Gouvernement, puisque j’ai retiré le mien.
S’agissant du sous-amendement, j’émettrai une demande de retrait, madame Attard : après relecture attentive de l’amendement du Gouvernement, je vous confirme qu’une commune de 3 500 habitants ou plus mais dotée de moins de cinquante agents ne sera pas concernée par cette nouvelle disposition.
Le sous-amendement no 894 rectifié est retiré.
Les amendements nos 535 rectifié et 315 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement no 550 .
Cet amendement vise à éviter les doublons dans la mise en ligne d’un même document par plusieurs administrations, car cela engendrerait pour chacune d’entre elles des coûts inutiles de traitement, notamment pour l’anonymisation des données à caractère personnel. Il vise aussi à s’assurer que ce traitement sera mis en oeuvre par ou après l’avis de l’administration la plus à même d’identifier les obligations mentionnées aux articles L. 311-5 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration ainsi que les données à caractère personnel contenues dans le document qu’elle a élaboré, ce qui facilitera par ailleurs les questions de responsabilité juridique. Je précise que cet amendement ne préjuge aucunement de la faculté de toute administration visée à l’article L. 300-2 dudit code de mettre en ligne sur sa propre plate-forme le document qu’elle aura pu aisément récupérer sur celle d’une autre administration. C’est donc un amendement qui sécurise juridiquement l’autorisation de mise en ligne de données par une administration.
Je partage le souci qui est le vôtre, madame de La Raudière, mais je vous invite à vous reporter à l’alinéa 11 de l’article 4, qui prévoit qu’un décret en Conseil d’État, pris après avis de la commission mentionnée à l’article L. 340-1 du code des relations entre le public et l’administration, définit les modalités d’application des articles L. 312-1 à L. 312-1-2 du même code. Mieux vaut en rester au niveau du décret plutôt que d’inscrire dans la loi la précision que vous proposez. À défaut de retrait, l’avis serait défavorable.
Même avis. Ce serait alourdir encore la charge des administrations que d’introduire une obligation de consulter systématiquement l’administration à l’origine de la rédaction du document pour connaître sa méthode d’anonymisation des données non communicables à tous. Il faut plutôt s’en remettre aux relations, sur une base volontaire, entre les administrations. Elles pourront procéder à cette démarche si nécessaire, mais la rendre obligatoire me paraît particulièrement fastidieux pour des objectifs qui ne me convainquent pas.
Je maintiens l’amendement, car je ne suis pas du tout convaincue par la réponse de Mme la secrétaire d’État. En effet, les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 ne sont pas uniquement des administrations d’État, mais aussi des collectivités, des agences de l’État et « les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission [de service public] ». Elles ont toutes une obligation de circulation des données entre elles. Par conséquent, si la loi ne définit pas qui est responsable, d’un point de vue juridique, de l’autorisation ou de la mise en ligne elle-même, on ne saura pas vers qui se retourner en cas de mauvaise application des obligations légales. Je trouve, monsieur le rapporteur, assez léger de renvoyer cette question à un décret. Je préférerais vraiment que ce soit inscrit dans la loi.
Je tiens à appuyer l’argumentation de ma collègue. Nous sommes ici sur une logique de flux de données qui soulève une vraie question : qui est responsable du flux ? Est-ce l’administration qui assure les missions concernées, ou celle qui assure la publication ? Je comprends que Mme la secrétaire d’État estime que ce serait facteur de lourdeur, mais s’il n’y a pas d’obligation, on voit bien que chacun verra midi à sa porte et que les citoyens auront une administration numérique asymétrique en fonction de la collectivité, de la structure ou du bon vouloir du responsable du service. Il serait tout à fait possible de procéder à des conventionnements, car ces flux sont généralement standardisés. Des administrations pourraient ainsi décider de s’entendre par avance sur le type de documents publié, sachant qu’il n’y aura ainsi pas de doublon. Il ne s’agirait pas forcément d’une mise en oeuvre ad hoc. Ce serait donc moins lourd que ce que suppose Mme la secrétaire d’État.
Il faut pouvoir s’assurer que les données soient réellement exploitables. Or, s’il faut à chaque fois demander aux uns et aux autres avant toute publication, c’est encore assez facile à organiser lorsqu’il n’y a qu’un niveau d’écart entre l’administration qui émet les données et celle qui pourrait elle aussi les publier, mais cela devient plus compliqué lorsqu’il y a deux ou trois niveaux de traitement – je pense à une donnée nationale qui passerait ensuite par une région ou par un département, puis par un EPCI, enfin par une commune –, même si maintenant Étalab et Data.gouv.fr sont capables de rassembler toutes ces données. Quand plusieurs administrations sont concurremment responsables des données, c’est au décret de déterminer le niveau de responsabilité et d’organisation : prévoir comment les administrations vont s’organiser entre elles à cet égard ne me semble pas relever du cadre de la loi.
L’amendement no 550 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement no 612 .
Un constitutionnaliste de premier rang me souffle à l’oreille que la notion de propriété ne relève pas du décret, or mon amendement portait sur la propriété des données… Je le rappelle à destination du compte rendu.
L’amendement no 612 est de précision rédactionnelle. Il s’agit de prévoir que l’alinéa 8 ne s’applique pas seulement aux documents, mais aussi aux données, conformément à ce qui est mentionné dans la loi CADA.
C’est tout à fait justifié, ma chère collègue. L’avis est donc favorable.
Même avis. Permettez-moi d’apporter à mon tour quelques précisions pour le compte rendu au sujet de l’amendement précédent : l’administration qui publie ou qui diffuse d’une manière ou d’une autre un document a l’obligation de vérifier au préalable qu’il est communicable au sens de la loi CADA et qu’il respecte donc toute la réglementation relative aux données personnelles. La loi est très claire : la responsabilité juridique pèse sur l’administration qui diffuse. Libre à elle ensuite de vérifier la démarche d’anonymisation utilisée par l’administration à l’origine du document.
L’amendement no 612 est adopté.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement no 223 .
Il s’agit d’un amendement de précision visant à remplacer, à l’alinéa 8, les mots : « des mentions », par les mots : « des données et informations », partant du principe que le terme « mention » ne renvoie à aucune définition connue.
Le terme « mention » est déjà fréquemment utilisé dans notre droit, et je ne pense pas que lui substituer les termes « données et informations » apporterait quelque garantie supplémentaire que ce soit. Autant j’étais favorable à la précision rédactionnelle proposée à l’instant par notre collègue Laure de La Raudière, autant mon avis est défavorable sur cet amendement.
L’amendement no 223 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement no 229 .
Cet amendement vise à renforcer la sécurisation des documents transmis en contraignant l’administration à se conformer aux identifications préalables des personnes à l’origine de la transmission. En effet, il est essentiel que la personne ayant transmis des documents puisse s’assurer de la préservation de son patrimoine. Elle est par ailleurs plus à même que l’administration d’identifier les données et informations qui relèvent du secret commercial et industriel. Cet accord préalable vise aussi à renforcer la protection des documents, ce qui est d’autant plus nécessaire que les concurrents européens ou étrangers de nos entreprises ne sont pas soumis à l’obligation de publication de leurs données et informations.
Identique à celui rendu sur l’amendement no 550 . Je pense qu’il faut, pour les mêmes raisons, gérer par décret en Conseil d’État les modalités d’application du dispositif. Je pense notamment à la liste des données de référence et à la désignation des administrations responsables de leur production de leur publication. Autant je reconnais la constance de votre propos, ma chère collègue, autant vous pouvez reconnaître la mienne. L’avis est défavorable.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment, si ce n’est que cet amendement ne concerne plus les données personnelles, mais une autre exception prévue à la loi CADA, le secret en matière commerciale et industrielle.
Ce secret, qui s’applique de toute façon en vertu des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, comporte trois dimensions : secret des procédés d’entreprise ; secret des informations économiques et financières ; secret des stratégies commerciales. Toute administration qui communiquerait un document aurait pour obligation de vérifier que le secret en matière commerciale et industrielle est bien respecté.
L’amendement no 229 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement no 235 .
Cet amendement vise à renforcer la protection des documents transmis. Si une personne n’a pas informé préalablement l’administration, celle-ci doit demander à la personne à l’origine de la transmission son accord préalable sur le projet de publication et doit procéder, le cas échéant, à l’occultation de données et informations avant de rendre les documents publics.
Avis défavorable. Je n’entends pas tout à fait comme vous le traitement des données aux fins de les anonymiser. En faisant débuter votre amendement par la phrase : « Si la personne n’a pas informé l’administration », madame Duby-Muller, vous occultez le fait qu’il ne revient pas aux personnes qui transmettent des informations d’estimer si les documents comportent des mentions entrant dans le champ d’application de l’article L. 311-5 ou L. 311-6 : c’est l’administration qui doit effectuer ce travail.
Il faut à mon sens maintenir la logique selon laquelle, lors de la transmission de ces documents, l’administration décide des informations qui doivent être supprimées pour rendre les documents anonymes. De plus, la jurisprudence de la CADA sur cette question est particulièrement abondante. Je préfère donc m’en tenir à la rédaction actuelle du texte.
L’amendement no 235 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement no 611 .
Il s’agit, comme l’amendement no 612 , d’un amendement de précision. L’article L. 312-1-1 du code des relations entre le public et l’administration vise la publication de « documents et données ». Cet amendement a donc pour objet d’ajouter « et données » après le mot « documents ».
L’amendement no 611 est adopté.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 332 .
L’article 4 fonde un principe de publication, sur lequel il n’est pas question de revenir. Il s’agit de prendre les précautions nécessaires pour éviter que la diffusion de données sensibles n’entrave l’activité et la compétitivité des entreprises. Le « secret des affaires », selon l’expression consacrée, ou secret en matière commerciale et industrielle, a été évoqué : il convient de ne pas mettre les entreprises en difficulté par une transparence qui leur serait néfaste. Tel est l’objet de cet amendement.
Ce sujet a déjà été abordé hier dans l’hémicycle. L’alinéa 9 prévoit une clause d’anonymisation pour toutes les « données à caractère personnel », qui incluent les données très sensibles, allant des informations de santé jusqu’aux noms dans les organigrammes – question que la commission avait abordée.
Votre amendement, monsieur Gosselin, vise donc à remplacer, dans l’alinéa 9, les termes « données personnelles » par les termes « données entrant dans le champ d’application des articles L. 311-5 ou L. 311-6 » du code des relations entre le public et l’administration, données portant atteinte à la vie privée, mais aussi au secret industriel et commercial.
Cet ajout semble peu approprié : l’alinéa 9 serait redondant avec l’alinéa précédent s’il n’apportait pas des garanties sur la question spécifique des données personnelles. Pourtant, sur ce sujet, cet amendement se limite aux données dont la publication porterait atteinte à la vie privée. Son effet rejoint donc celui de l’amendement CL229 qui a été examiné et rejeté en commission, notamment parce que la CNIL s’y est montrée très défavorable en première analyse.
Il convient donc de conserver la cohérence entre les alinéas 8 et 9, et d’en rester à la rédaction actuelle de l’article. C’est pourquoi, monsieur Gosselin, je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Je le maintiens. Cet échange a l’avantage de bien préciser les différents points de vue. Du moins les travaux préparatoires montreront-ils que nous cherchons à bien intégrer l’ensemble des éléments.
L’amendement no 332 n’est pas adopté.
Dans son avis sur le présent projet de loi, la CADA note que les dispositions de l’article 4 « maintiennent un régime d’interdiction absolue de publication des données personnelles, alors que certaines de ces données, qui n’intéressent ni la vie privée ni la réputation des personnes concernées, ne sont pas exclues du droit à communication et peuvent, par ailleurs, être utilement diffusées, ce qui est par exemple le cas des organigrammes administratifs ou des documents rendant compte des activités de nombreuses instances administratives qui, dès lors qu’ils mentionnent le nom des personnes qui y interviennent ou permettent de les identifier, comportent des données à caractère personnel ».
Cet amendement vise donc à limiter les informations non communicables à celles qui portent atteinte à la protection de la vie privée ou à la réputation des personnes. Il permettrait un droit à réutilisation des données efficace et efficient.
La commission a déjà débattu de la distinction entre vie privée et données personnelles. La CNIL est particulièrement réservée sur cette évolution. Je suis assez sensible à ses arguments, notamment lorsqu’elle refuse que la protection des données personnelles soit mise en cause. En l’état, il importe moins d’améliorer le régime de publication que celui de réutilisation de ces données. À ce titre, l’organigramme – qui vient d’être évoqué comme élément de réponse à M. Gosselin – ne semble pas être l’exemple le plus parlant.
Il convient de continuer à réfléchir sur le sujet, y compris avec la CNIL, car la protection des données personnelles et celle de la vie privée soulèvent de vraies questions. À ce stade, monsieur Coronado, je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, même si la question posée est très juste au regard des évolutions, moins juridiques que sociétales, actuelles. Faut-il protéger uniquement la vie privée et la réputation des personnes ? Faut-il étendre cette protection à une catégorie plus large, celle des données personnelles ?
On peut considérer – l’exemple me semble parlant – qu’un nom qui apparaît dans l’organigramme d’une administration relève d’une donnée personnelle, et qu’il doit être protégé à ce titre, mais que pour autant, la publication de ce document ne porte pas atteinte à la vie privée.
Une telle distinction bousculerait toutefois largement la jurisprudence de la CNIL, tout en introduisant un grand flou juridique. Où placer la frontière entre données personnelles et vie privée ? À cette question qui mérite d’être posée, cet amendement n’apporte pas de réponse adéquate, car il ne permettra pas d’assurer la sécurité juridique du dispositif législatif que nous sommes en train de créer.
Les arguments qui viennent de nous être opposés ne me semblent pas convaincants. L’organigramme d’une administration, qui rassemble des données personnelles – noms, photos –, en constitue probablement l’exemple le plus absurde : publier un nom ou une photo ne revient en aucun cas à « porter atteinte à la protection de la vie privée ou à la réputation des personnes ». Il n’est donc ni flou, ni complexe d’opérer cette distinction pour les données publiables, monsieur Belot, mais très simple.
L’amendement no 24 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 25 rectifié et 741 .
La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 25 rectifié .
Certaines archives, dès lors qu’elles sont numérisées, doivent pouvoir faire l’objet de publication et de réutilisation. Tel est l’objet de cet amendement.
Ma position sera identique à celle que j’ai défendue en commission. La formulation selon laquelle « les administrations […] ne sont pas tenues de publier les archives publiques issues des opérations de sélection » est trop restrictive. Pour empêcher la diffusion de données historiques – généalogiques, par exemple –, il faudrait limiter cette restriction aux seuls cas où les archives n’ont pas déjà été numérisées.
Bien que ma sensibilité à ce sujet soit connue, je me réfère à la réponse apportée par la secrétaire d’État en commission. Nous nous heurtons là aux moyens et aux capacités réels des territoires. Si cet amendement était adopté, les départements devraient mettre en ligne tous les documents nativement numériques, qui étaient auparavant conservés par toutes les administrations ayant leur siège dans le département, notamment tous les services déconcentrés de l’État.
On voit bien qu’il est nécessaire de pouvoir sélectionner qualitativement les documents d’archives qui sont à diffuser en ligne. Cette sélection ne constitue pas un obstacle à la présence massive des archives sur internet, puisque plus de 400 millions de documents numérisés sont d’ores et déjà accessibles gratuitement en ligne, qu’ils concernent l’état civil, le recensement de la population ou des registres militaires. Les administrations des archives concernées ne font donc pas preuve de mauvaise volonté : un principe de réalité s’impose à elles.
C’est la raison pour laquelle je vous propose de retirer vos amendements. À défaut, j’y serai défavorable.
Notre approche se doit d’être la plus pragmatique possible. La réalité des moyens des collectivités locales, notamment des départements, qui ont la charge d’ouvrir les archives numériques, conduit le Gouvernement à émettre un avis défavorable sur ces amendements.
Laisser la sélection qualitative des archives publiées à la discrétion des départements n’empêche pas, en réalité, que ces dernières soient présentes de manière massive sur internet : aujourd’hui, 400 millions de documents d’archives y figurent. C’est notamment le cas des registres d’état civil, des recensements de population ou des registres militaires. Tout cela est accessible gratuitement en ligne.
Le Gouvernement a lancé l’année dernière le programme Valeurs immatérielles transférées aux archives pour mémoire – VITAM –, supervisé à la fois par le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique et par le ministère de la culture et de la communication. À terme, un socle commun d’archivage électronique, pour toutes les administrations doit être développé. Il convient de suivre cette voie, sans imposer une nouvelle obligation juridique aux départements.
Nous maintenons cet amendement. Ces débats me conduiront peut-être à militer afin de mettre en ligne le plus grand nombre possible d’archives.
Sourires.
S’il paraissait logique d’éliminer des archives physiques après avoir procédé à une sélection, en raison des contraintes de coût, de volume ainsi que des conditions de stockage, il semble illogique d’appliquer le même raisonnement aux archives numériques.
Il est heureux pour les chercheurs que ce raisonnement ne soit pas appliqué et que tous les documents soient mis en ligne. Je ne supporterais pas qu’une personne décide de ce qui mérite ou non de figurer sur internet : il revient à chacun de procéder à sa propre sélection, en fonction de ses centres d’intérêt et de ses préoccupations. En tant que députés, nous estimons nécessaire que le maximum d’informations soit mis en ligne. Ce n’est qu’ensuite que doit se faire le tri.
Les nouveaux amendements déposés, le mien en particulier, montrent que nous avons tenu compte des remarques formulées par Mme la secrétaire d’État lors du débat en commission. Nous ne demanderons donc pas de numériser tous les documents pour les mettre en ligne.
Au contraire, mon amendement limite cette restriction aux seules archives déjà numérisées, donc à celles dont la mise à disposition ne soulève pas de problème technique. Nous dispensons donc ceux qui n’ont pas encore numérisé leurs archives d’engager des coûts supplémentaires – de numérisation notamment, puisque la mise à disposition des archives, une fois numérisées, est bien moins coûteuse.
Les amendements identiques nos 25 rectifié et 741 sont adoptés.
Demande de retrait – ou, à défaut, avis défavorable : l’amendement est satisfait par l’article 10 de la loi de 1978.
L’amendement no 742 n’est pas adopté.
Cet amendement, qui a été cosigné par de nombreux collègues de notre groupe, prolonge les débats que nous avons eus hier soir sur la gestion par les algorithmes et sur la nécessité d’une publication de ceux-ci.
Avec l’article 2, il s’agissait de savoir si un citoyen ayant fait l’objet d’une décision prise sur le fondement d’un algorithme pouvait demander la publication des règles définissant cet algorithme. Cette question est essentielle, car des traitements automatisés de plus en plus sophistiqués, mobilisant des données de plus en plus nombreuses, interviennent de plus en plus dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Il y a aujourd’hui en France et dans le monde un débat sur ce qu’il est désormais convenu d’appeler le « gouvernement des algorithmes ». Il ne s’agit donc pas d’un sujet simplement technique : c’est un sujet éminemment politique, qui regarde le fonctionnement de notre démocratie.
L’amendement qui vous est proposé tend à prévoir la publication systématique des règles des algorithmes, sans attendre qu’un citoyen en fasse la demande. Ces algorithmes servent à calculer les impôts, les allocations familiales, à déterminer l’affectation des enfants dans les écoles, les collèges, les lycées, les universités, etc. : autant de décisions qui ont un impact considérable sur la vie quotidienne des Français.
On pourra éventuellement encadrer la mesure en prévoyant, si nécessaire, des exceptions, mais le principe retenu devrait être de publier systématiquement les algorithmes. Si notre assemblée adoptait cet amendement, elle réaliserait une avancée essentielle en matière de droit de nos concitoyens à comprendre et à savoir – de droit à l’information publique.
La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir le sous-amendement no 884 .
Ce sous-amendement s’inscrit dans le droit fil de ce que nous défendons depuis le début du débat : il s’agit de préciser que le seuil fixé par arrêté sera d’un maximum de cinquante agents, comme pour l’obligation de publication des données.
Favorable à la fois au sous-amendement et à l’amendement. Je remercie Christian Paul d’avoir revu la rédaction de son amendement depuis l’examen du texte en commission.
Le Gouvernement est défavorable aux deux, et je vais vous expliquer pourquoi.
Nous visons tous le même objectif de transparence de l’action publique et d’accès à une administration plus ouverte, en défendant le droit de savoir. Toutefois, permettez-moi de vous alerter sur un point. Il est tentant de vouloir aller toujours plus loin ; mais pour que les mesures que nous sommes en train de prendre se concrétisent et que les administrations, noyées sous des charges nouvelles, ne décident pas de ne rien faire en attendant d’éventuels contentieux, nous souhaitons être au plus près de leurs réalités. C’est pourquoi nous introduisons des délais de mise en oeuvre et prévoyons des mécanismes d’encadrement, incluant certaines dérogations. Néanmoins, nous ouvrons, par défaut, les données, les codes sources, les algorithmes.
Ce que propose cet amendement va bien au-delà du cadre prévu par le projet de loi – et par la loi « CADA » auparavant –, à savoir une obligation de communication portant sur les documents administratifs existants, les documents communicables. Or un algorithme n’est pas un document administratif : il faut l’écrire.
En outre, l’amendement concernerait tous les algorithmes, même ceux ne fondant pas les décisions individuelles, y compris les algorithmes de gestion et les algorithmes de logistique internes à l’administration. Imaginez le travail que représenterait l’obligation de traduire de manière compréhensible pour tous la totalité des outils informatiques utilisés par les acteurs publics de notre pays !
Le champ de l’amendement est donc bien plus large que celui de l’article 2 du projet de loi – et je crains qu’une ambition démesurée n’ait des effets contre-productifs.
Madame la secrétaire d’État, permettez-moi de répondre à votre contestation – pacifique, bien entendu – de notre amendement.
D’abord, je pense que, comme nous l’avons dit hier soir, il sera plus aisé de rendre publiques a priori les règles définissant les algorithmes que de le faire des dizaines, des centaines, voire des milliers de fois à la demande des citoyens concernés. Ce sont en effet les mêmes informations qui sont en cause, à savoir les règles de fabrication de l’algorithme et les critères de mise en oeuvre. Alors que l’article 2 prévoit que l’on répondra à chaque citoyen qui en fera la demande, ce qui représente potentiellement des milliers de cas, voire davantage, nous proposons une publication a priori : cela devrait éviter d’avoir à réitérer l’opération pour les décisions individuelles, du moins dans la plupart des cas.
Vous soulevez le problème de la compréhension des algorithmes – problème majeur, que le président de la commission des lois connaît bien. Je ne relancerai pas le débat, mais qu’il s’agisse des algorithmes utilisés par les plateformes privées, par l’administration fiscale, par l’éducation nationale ou par d’autres administrations régaliennes, leur compréhension n’est pas chose aisée ! Toutefois, il ne s’agit pas de demander l’impossible aux administrations ; une traduction complète serait probablement chose infaisable.
Que dit l’amendement – qui pourrait d’ailleurs être sous-amendé ? Il prévoit la publication des règles « définissant les principaux traitements algorithmiques ».
Il ne s’agit pas de traduire les algorithmes de fonctionnement interne des administrations ! Concrètement, cela ne concernera que les algorithmes qui regardent les Français. Je crois que c’est faisable, et que cela permettra une expertise citoyenne. Personnellement, je suis bien incapable d’en décrypter un, mais il me sera possible de faire appel à des experts citoyens, qui, eux, sauront le faire.
En ce qui me concerne, je me méfie de la République des experts citoyens…
Le problème de cette mesure, c’est qu’elle donnera beaucoup de travail aux administrations ; dès lors que l’on changera d’algorithme, il faudra modifier les informations en ligne. Et cela pour quelle utilité ?
D’abord, le nombre de personnes capables d’analyser l’information sera réduit. Peu de gens savent décrypter un algorithme et dire s’il y a des failles.
L’intérêt public d’une telle mesure serait par conséquent limité.
Deuxièmement, ce serait une source de contentieux, non seulement objectif, mais aussi subjectif, puisque toute incompréhension ou mauvaise analyse de l’algorithme pourrait déboucher sur des réclamations. Par exemple, si j’ai mal compris la manière dont on calcule l’impôt sur le revenu et que j’estime que l’on m’a lésé, j’ouvrirai un contentieux en soutenant que l’algorithme a été mal conçu et qu’un expert citoyen juge que cela m’est défavorable !
Il faut donc faire attention : l’intérêt d’une telle mesure pour les citoyens sera faible, alors que la tâche pour l’administration et les coûts juridiques et de contentieux seront très lourds.
Quant à la notion d’expert citoyen… La transparence totale dans le fonctionnement de l’administration est-elle vraiment toujours nécessaire ?
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.
Il faut voir comment les administrations fonctionnent ! Il serait intéressant de rendre transparente la manière dont on affecte les logements sociaux, en indiquant le nom des personnes qui prennent les décisions, les bureaux concernés et les circuits utilisés !
Mêmes mouvements.
Un tel accès de transparence provoquerait sans doute un afflux de lettres de contestation !
Bref : on ne peut pas tout expliquer à tout moment.
Pour répondre à l’objection de Mme la secrétaire d’État sur la nature des algorithmes concernés, je propose un sous-amendement qui, au deuxième alinéa, compléterait la phrase ainsi : « , lorsqu’ils fondent des décisions individuelles ».
Cela me semble un combat d’arrière-garde. Quand on est engagé dans une démarche d’open data et que l’on met en ligne des données dans un format ouvert et réutilisable et que, par ailleurs, il existe des textes d’application, des lois, un code général des impôts, une jurisprudence, tout cela est nécessairement utilisé par les citoyens et débouche sur de nouveaux services. On le voit bien avec ce qui se passe à l’Assemblée : nos amendements et nos débats parlementaires sont en open data, mais l’application la plus utilisée est une application citoyenne, « La fabrique de la loi », développée par l’association Regards citoyens, car celle dont nous disposons en interne, Eliasse, bogue.
Eh bien, il se passera certainement la même chose pour ce qui est des algorithmes. En s’opposant à l’amendement, le Gouvernement cherche à construire une petite digue de sable, mais celle-ci sera emportée dès demain, j’en suis persuadée !
Je suis entièrement d’accord avec ce que vient de dire Laure de La Raudière : il s’agit d’un combat d’arrière-garde. Regards citoyens et le site « NosDéputés.fr » en offrent une belle illustration : nous consultons tous ce site car nous le trouvons efficace, plus parfois que celui de l’Assemblée.
Monsieur Aubert, vous préjugez de la capacité des citoyens à se saisir d’algorithmes, en faire l’analyse et arriver à des résultats. Vous dites : « On ne va pas tout dire à nos concitoyens parce qu’ils ne seront pas capables de comprendre ou d’analyser ». Je trouve cela terrible, voire inadmissible ! Mettons les données à disposition, et voyons ce que l’intelligence collective sera capable de concevoir. Vous verrez : peut-être serons-nous à la ramasse !
Nous sommes tous réunis ici pour aller vers l’open data, vers la République numérique, et faire en sorte que les documents de l’administration soient mis en ligne – ce qui est censé être déjà le cas, mais le sera encore plus à l’avenir. Notre objectif est la publication et la réutilisation des données numérisées : n’en ayons pas peur ! J’encourage tous nos collègues à aller dans cette direction ; sinon, nous risquons de sembler rétrogrades et en décalage avec ce que la société est déjà en train de faire. Tâchons au moins d’être en conformité avec ce qui se passe dans notre pays !
Il me semble, à moi aussi, qu’il s’agit d’un combat d’arrière-garde ; il me semble surtout que ce débat témoigne d’une très grande défiance envers nos administrations. Mme la secrétaire d’État nous propose, par ce projet de loi, d’aller le plus loin possible sans surcharger les administrations, pour que la société s’approprie les données et les réutilise – car, comme l’a dit Mme de La Raudière, l’important, c’est le réemploi des données.
Nous n’avons donc pas besoin d’en faire plus, à moins de vouloir montrer à notre administration que nous ne lui faisons pas confiance ! Une démocratie ne peut vivre qu’avec une administration solide, compétente, et qui sait que les autorités politiques lui font confiance. De toutes façons cela se fera : nous aboutirons à l’open data total. Ce n’est donc pas la peine de l’inscrire dans la loi, sinon il y aura des contentieux en permanence.
Madame Batho, je ne peux retenir votre sous-amendement, car la discussion de l’amendement avait commencé ; M. Paul peut néanmoins choisir de rectifier son amendement.
La parole est à M. Christian Paul.
J’accepte de rectifier mon amendement selon la proposition de Delphine Batho, qui relève du même esprit, et que le rapporteur avait approuvée. Nous ne voulons pas surcharger à l’infini les administrations, mais nous concentrer sur l’essentiel. Je répète qu’à mon sens, la publicité des algorithmes est une avancée démocratique incontestable. Elle ne mérite ni passion excessive, ni frilosité surprenante !
Nous sommes bien d’accord, monsieur Paul : votre amendement serait complété par les mots « lorsqu’ils fondent des décisions individuelles. »
Le sous-amendement no 884 est adopté.
L’amendement no 266 , tel qu’il vient d’être rectifié et sous-amendé, est adopté.
L’article 4 vise à élargir l’accès aux documents administratifs, notamment en ligne. Nous voulons une République numérique, mais nous n’avons toujours pas accès en permanence à internet dans l’hémicycle ! La connexion s’interrompt toutes les cinq minutes : si l’on pouvait y faire quelque chose, ce serait bien.
Cela fonctionne très bien !
Sourires.
Écoutez, pour moi, cela ne fonctionne pas ; je suis pourtant informaticien de profession…
Revenons à l’amendement no 743 . Malgré tout le talent de persuasion dont M. le rapporteur a fait preuve en commission, il ne m’a toujours pas convaincu sur ce point.
Dans son avis, la commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, s’interroge sur l’éventuelle nécessité d’encadrer la diffusion de documents administratifs par des délais, et sur l’opportunité d’introduire dans la loi la notion de péremption des informations diffusées, en l’articulant avec le droit des archives publiques – étant donné que l’immense majorité des documents administratifs est vouée à l’élimination à l’issue de leur durée d’utilité administrative. De très nombreux documents qui auront été diffusés sur internet en application des nouvelles dispositions seront donc détruits à plus ou moins long terme, avec l’autorisation de l’administration des archives.
Ces deux questions ne nous semblent toujours pas réglées par ce projet de loi : mon amendement vise à s’en saisir.
Je suis, moi aussi, sensible à l’avis de la CADA à propos de la notion de péremption des documents administratifs, mais je ne trouve pas que votre amendement réponde à cette préoccupation. J’ai bien compris que mes arguments n’ont pas suffi à vous convaincre en commission, et qu’il n’y suffiront pas non plus aujourd’hui ! Je vous signale néanmoins que l’article 5 de ce projet de loi fixe, précisément, des délais. Je préfère donc en rester à la rédaction actuelle de l’article 4 ; pour ce qui concerne les délais, reportons-nous à l’article 5. L’avis de la commission est donc défavorable.
Même avis que M. le rapporteur.
L’amendement no 743 n’est pas adopté.
Cet amendement avait suscité un certain intérêt chez M. le rapporteur et Mme la secrétaire d’État en commission ; je les en remercie. J’aimerais cependant que nous allions plus loin, aujourd’hui, dans l’hémicycle ! Il propose de retenir le système de la double licence pour la mise à disposition des données. Ce système prévoit deux licences distinctes : une licence gratuite, pour les cas où les résultats du traitement des données sont reversés gratuitement dans le domaine public ; une licence payante, lorsqu’il est fait des données une utilisation commerciale.
Je vous rappelle qu’en commission, nous avons débattu cette question de manière approfondie. J’ai eu l’impression, madame la secrétaire d’État, que vous étiez plutôt ouverte à cette proposition : le confirmez-vous ?
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 390 .
Sourires
nous avons repris textuellement l’amendement qu’elle avait déposé, avec plusieurs membres du groupe Les Républicains, en commission. Nous l’avons trouvé excellent, et l’avons donc repris tel quel, sans le modifier pour faire semblant de présenter un amendement qui nous fût propre.
On ne peut, en effet, aborder la question de l’ouverture des données – que ce texte consacre – sans aborder la création de valeur qui pourrait être réalisée par de grandes entreprises privées à partir des données rendues publiques gratuitement. Se pose, en filigrane, la question de la fiscalité des grands groupes du numérique – Google, Amazon, Facebook, Apple. Ces géants parviennent à exploiter les failles de nos systèmes juridiques et fiscaux pour se soustraire, au maximum, à leurs obligations.
Nous proposons la gratuité pour les citoyens et les entreprises qui remettent les données traitées ou utilisées dans le domaine public, sans utilisation commerciale. Il faut fixer ce principe de façon très claire. Si les données sont utilisées à des fins commerciales, en revanche, il me paraît juste de mettre en place un système de compensation financière. Cette contrepartie dérogatoire doit être effective.
Notre idée est donc d’instaurer un système permettant à tous de s’y retrouver. Le problème qui se pose est celui de la position dominante de certaines sociétés, qui pourraient conforter leur position sur le marché en captant les externalités positives de l’usage des données publiques. Ce résultat serait éloigné de l’objectif d’ouverture fixé à ce projet de loi ! La création de valeur privée au moyen de données publiques doit être payante : voilà pourquoi nous avons repris l’amendement de Mme Kosciusko-Morizet. Nous nous retrouvons sur un terrain éminemment révolutionnaire !
Sourires.
M. Chassaigne a repris l’amendement de Mme Kosciusko-Morizet ; je ne suis pas certain que celle-ci reprendrait les derniers mots qu’il a prononcés !
Au-delà de l’aspect révolutionnaire de cette question, nous touchons là à un débat de fond sur la logique de l’ open data. Nous avons déjà eu ce débat il y a deux mois à l’occasion de la transposition de la directive du 17 novembre 2003 sur la réutilisation des informations du secteur public, dite directive PSI. Nous l’avons repris la semaine dernière en commission, et cette semaine en séance publique.
J’ai défendu plusieurs amendements pour que la publication des données de l’ensemble des administrations et établissements chargés d’une mission de service public soit totalement gratuite. Concernant l’ensemble des données statistiques et de l’INSEE, le Gouvernement a avancé. C’est un bon exemple. Pour la gratuité des données, les deux prochains organismes qu’il faut cibler sont le SHOM – le service hydrographique et océanographique de la marine – et l’IGN – l’institut géographique national.
À bien choisir, je préfère un système de gratuité totale, même s’il faut un peu plus de temps pour le mettre en place, qu’un système de double licence ou d’ open database license – ODbL. Ces systèmes que vous proposez pourraient entrer en vigueur un petit peu plus vite, mais ils posent d’autres difficultés. Après le débat que nous avons eu sur la transposition de la directive PSI, nous avons engagé un travail important avec les administrations qui constituent le plus de données – je pense notamment à l’INSEE. Cette administration a rédigé, à cette occasion, une note analysant les risques de l’ODbL. Permettez-moi d’en citer quelques phrases.
« À supposer que soit rédigée une version de licence ODbL satisfaisante sur le papier, on ne voit pas comment, en pratique, il serait possible de la faire respecter en contrôlant l’usage des données SIRENE par des milliers d’ordinateurs et systèmes d’information. Les audits qui sont réalisés aujourd’hui auprès des rediffuseurs SIRENE – pourtant limités en nombre et bien identifiés – sont coûteux, complexes à mettre en oeuvre, et passent par une société spécialisée. On peut ainsi craindre, comme les rediffuseurs que nous avons rencontrés l’ont souligné, que les utilisateurs contournent facilement les obligations de la licence en ne mettant pas en partage leurs informations sensibles et récentes. »
C’est vraiment un débat politique de fond. Je préfère attendre un peu plus pour que l’ensemble des données publiques soit en accès libre et gratuit, plutôt que de choisir le système ODbL. Je comprends bien les avantages de ce système, mais à terme, les garanties sur la qualité des données ne seraient pas du même niveau. L’avis de la commission est donc défavorable.
J’ai eu l’occasion de dire, à plusieurs reprises, que je suis favorable à titre personnel à ce modèle de licence, car je trouve qu’il répond bien aux enjeux des données publiques. Il traduit bien l’idée que les données publiques doivent revenir gratuitement au public. Dès lors que des acteurs économiques puissants en feraient une utilisation plus abondante, il serait normal que les administrations puissent exiger une redevance sur l’exploitation de ces données.
Vous proposez d’imposer, par la loi, un modèle de licence exclusif. En l’occurrence, vous choisissez un modèle freemium établi en fonction de la fréquence de mise à jour des données produites. La démarche préconisée par le Gouvernement se veut plus nuancée, plus contractualisée, car certaines formes de licences conviennent à certains organismes publics, et pas à d’autres.
Pour l’IGN, par exemple, ce type de double licence est tout à fait adéquat. Suite au travail de réflexion mené avec le Gouvernement, l’IGN se dirige plutôt vers la définition d’un référentiel à grande échelle qui reprendrait la licence que vous proposez.
J’ai annoncé que les données de la base SIRENE de l’INSEE seront gratuites. Cette gratuité sera totale. Cette base est mise à jour très fréquemment, plus de 10 000 fois par jour. Or vous proposez une fréquence de mise à jour annuelle, qui n’est pas du tout en phase avec les besoins des entreprises qui doivent y avoir accès.
Le raisonnement est le même à propos du SHOM. Les fonds marins changent-ils tous les jours ? Non ! Ce sont des données pérennes, très stables dans le temps : en imposant un modèle freemium actualisé une fois par an, nous signerions donc l’arrêt de mort du SHOM.
Concernant Météo France, ce qui intéresse réellement les utilisateurs, ce sont les données prévisionnelles – savoir quel temps il fera demain – plutôt que les données météorologiques passées – sauf pour les chercheurs, les scientifiques. Or ces données prévisionnelles sont mises à jour plusieurs fois par jour, pas une fois par an.
Ayez donc confiance dans la négociation avec les organismes publics concernés, au cas par cas. Cette méthode permettra au Gouvernement de lister, par décret, un nombre défini et minimal de licences à utiliser. Cette liste sera fixée par l’administrateur général des données, qui conduira à ce titre une mission de service public de la donnée.
Je vous encourage donc à choisir la démarche du Gouvernement, qui est plus en phase avec les besoins de chacun des principaux organismes publics concernés par cette politique de licences. Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
L’amendement que j’ai présenté ne précise rien quant à la fréquence de mise à jour ! Ce n’est pas la question !
Permettez-moi de revenir sur vos deux principaux arguments. Premièrement, vous nous dites : il faut attendre. Attendre, toujours attendre ! C’est la réponse que vous faites très souvent à nos amendements, monsieur le rapporteur, mais vous savez bien que si la fréquence de mise à jour des données publiques est variable, la fréquence de mise à jour de la loi, elle, est très limitée ! Il n’y aura pas, en effet, de nouvelle loi sur ce sujet avant deux, trois ou quatre ans. Nous ne pouvons donc pas attendre pour mettre en place l’architecture de la mise à disposition de nos données.
Vous en conviendrez, madame la secrétaire d’État, le dispositif proposé est celui qui fournit l’architecture la plus globale – même si l’on peut toujours l’adapter ici ou là –, bien plus globale que la gratuité généralisée.
J’ajoute que le modèle de la double licence, dont on devine qu’il peut avoir vos faveurs, existe déjà et qu’il a fait ses preuves sur les systèmes logiciels. Rien ne s’oppose donc à l’étendre à la mise à disposition des données : si on ne le fait pas, l’ouverture généralisée s’imposera comme la règle d’ici à la prochaine loi, dans trois ou quatre ans.
C’est donc la dernière occasion qui nous est donnée de mettre en oeuvre une architecture qui ait du sens, et qui distingue entre les données réutilisées dans l’espace public, lesquelles doivent être gratuites, et celles que l’on réutilise à des fins commerciales.
Le sujet met en jeu les rapports entre les grandes et les petites entreprises, en particulier les nôtres : un écosystème est en train d’émerger, et ce sont les géants américains qui, on le sait, ont les capacités de réutiliser toutes ces données pour en faire des plates-formes commerciales. Je souhaite donc que l’on vote cette mesure dès à présent, sans attendre.
Je n’ai pas compris, madame la secrétaire d’État, vos propos sur la mise à jour des données. La proposition de Nathalie Kosciusko-Morizet me paraît relever du bon sens. Soit l’utilisation est gratuite, auquel cas la gratuité, que vous préconisez, est la règle pour l’ensemble des licences ; soit elle est commerciale, auquel cas il me semble logique qu’elle donne lieu à redevance.
Une telle mesure est, de surcroît, facile à mettre en oeuvre. Votre réponse ne me paraît donc pas adaptée : pourrions-nous avoir des éclaircissements complémentaires ? Pourquoi refuser de rendre payante l’utilisation des données à des fins commerciales ? J’avoue ne pas comprendre.
Les délais entre deux lois peuvent en effet être longs, madame Kosciusko-Morizet : tout à l’heure, dans ma question au Gouvernement, j’évoquais la loi pour la confiance dans l’économie numérique, la LCEN, adoptée en 2004. Nous sommes aujourd’hui en 2016, et j’espère que l’application de la loi se fera dans le courant de cette année…
Cependant je n’attends pas tout de la loi :…
…il faut plutôt se concentrer sur l’efficience. L’examen du présent texte a néanmoins permis à Mme la secrétaire d’État, la semaine dernière, de s’engager sur les données statistiques et sur l’INSEE, sans qu’il soit besoin de changer la législation.
N’en restons pas aux craintes sur les délais d’application : penchons-nous plutôt sur la transposition de la directive PSI dans notre législation, telle qu’elle existe, et sur la mise en oeuvre du texte que nous allons voter.
Je souscris à ce qui a été dit au sujet de l’IGN, mais je continue de penser que la gratuité des données est plus simple que la double licence. L’inscription du freemium dans la loi, on l’a vu, soulève bien des difficultés : restons-en à la version actuelle, y compris pour le SHOM, les revenus concernés étant fort modestes au regard du montant global des recettes du service océanographique. Je garde cependant à l’esprit que le SHOM et l’IGN doivent être les prochaines étapes, mais l’on peut aller beaucoup plus vite, sans attendre la loi.
Nous avons été sensibles, dans notre approche, à l’idée de faire payer les grands groupes. J’ai sous les yeux un rapport de 2015 du Conseil économique, social et environnemental sur « les nouveaux rapports industrieservices à l’ère du numérique ». Nous avons affaire, avec les « GAFA » – Google, Apple, Facebook, Amazon – à des monstres qui déplacent des sommes d’argent considérables. Ces nouveaux magnats de l’Internet, désormais au niveau de ceux du pétrole et de la presse, utilisent les paradis fiscaux pour échapper à l’impôt. Nous avons ici le moyen, par un système de licence, de les faire payer.
Ces entreprises du « GAFA », faut-il le rappeler, pèsent pour ainsi dire autant que celles du CAC 40, et l’écart ne cesse de se creuser : en valeur, l’indice CAC 40 représente 1 131 milliards de dollars, et les « GAFA », 1 675 milliards.
N’oublions pas non plus que le contrôle des données, dans une chaîne de valeur, requiert des investissements colossaux, à la portée des seuls « GAFA » ; d’où l’intérêt de cette mesure qui peut nous rassembler, même si les motifs peuvent légèrement différer : pour une fois que nous luttons ensemble contre le grand capital, autant en profiter…
Sourires.
Mme la secrétaire d’État, en réalité convaincue par les arguments de Nathalie Kosciusko-Morizet, donc un peu gênée aux entournures, nous dit qu’il est urgent d’attendre et que nous nous reverrons.
Même si nous écouterons toujours vos avis avec beaucoup d’intérêt, monsieur le rapporteur, il n’est pas certain que nous nous retrouverons dans l’hémicycle pour parler du numérique. Je ne sais pas non plus s’il y aura une loi « NOÉ » – nouvelles opportunités économiques –, ni si elle voit le jour, ce qu’elle contiendra.
Effectivement. J’ignore donc, disais-je, s’il y aura une loi « Macron 2 » ; mais c’est maintenant qu’il nous faut débattre des nouvelles opportunités.
Pour énoncer un peu trivialement une maxime de prudence, « un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ». Le moment me paraît donc bien choisi, d’autant que le Gouvernement, quel qu’il soit, peut faire preuve de mauvaise volonté pour publier des décrets et retarder ainsi l’application de la loi.
Passons aux actes. Il ne serait pas malséant, au vu des retombées économiques liées à l’utilisation des données par les « GAFA », de faire contribuer ces entreprises via la licence proposée. Bref, je le répète, le moment est venu de passer au vote.
Le débat paraît focalisé sur la question des licences. Mon amendement no 847 à l’article 6, lui, vise l’utilisation à l’identique des données gratuitement mises en ligne : c’est peut-être une façon plus générale de traiter le problème de l’autorisation dont nous parlons.
Rien n’interdit, aujourd’hui, d’appliquer le modèle préconisé par les amendements : si je n’ai pas été assez claire dans mes explications sur ce point, je vous prie de m’en excuser. Je n’entends nullement m’opposer au développement de ce genre de licence.
L’idée d’une gratuité absolue, selon le modèle appliqué à la base SIRENE de l’INSEE, peut sembler contre-intuitive, j’en conviens. Mais toutes les études économiques et statistiques – y compris dans des pays qui, tels que le Royaume-Uni, l’Australie ou les Pays-Bas, ont été à l’avant-garde pour l’ouverture des données publiques – montrent que la valeur économique générée par cette ouverture est plus grande avec la gratuité.
Si nous défendons un modèle de licence au cas par cas, c’est notamment pour assurer la transition du modèle économique des organismes publics, qui perdent subitement une partie de leurs recettes, et pour leur donner les moyens de compenser ces pertes.
Un exemple sera peut-être plus éloquent que de longues explications. L’IGN a vendu sa base cartographique à Google pour quelques millions d’euros, soit presque rien à l’échelle de cette entreprise. Il espérait que cette première vente se transforme en une rente grâce à l’actualisation de la base au cours des années suivantes ; mais il n’y eut aucune année suivante, car Google dispose des outils technologiques pour s’approprier les cartes et les gérer, sans parler des matériels comme les voitures, les drones ou les satellites, qui lui permettent d’élaborer ses propres cartes.
Gardons-nous de toute naïveté face à cette réalité. Nous poursuivons le même objectif, mais un traitement au cas par cas permettra d’accompagner les organismes publics dans cette transition vers l’ouverture générale des données, tout en confortant certains modèles économiques, et ce sans interdire, bien au contraire, les modèles payants. Ceux-ci, aux termes de l’article 6, seront énumérés par décret, et ils figureront bien entendu parmi les modèles dominants.
Je m’étonne donc que l’opposition veuille imposer par la loi ce qui peut être décidé au cas par cas, et au plus près des réalités des entités publiques.
Encore une fois, entre l’INSEE, Météo France, l’IGN ou les organismes de sécurité sociale, les réalités sont très différentes.
Sourires.
Comme vient de le dire Mme la secrétaire d’État, l’article 6 nous donnera l’occasion de décider des dispositifs à mettre en oeuvre. J’ai déposé, comme Mme Berger, un amendement tendant à la création d’une redevance en cas de réutilisation de la matière première mise à disposition par la puissance publique.
L’article 4, amendé, est adopté.
Article 4
La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement no 483 , tendant à la suppression de l’article.
Cet amendement, que j’ai cosigné avec Dino Cinieri, me paraît soulever un problème réel.
L’ouverture des données est un objectif majeur, mais il ne saurait constituer une fin en soi. Dans le domaine des matières et substances issues des déchets et susceptibles d’être utilisées en substitution, il convient d’être particulièrement attentif au respect des secrets industriels et commerciaux, dans un contexte de mondialisation des matières premières.
De plus, l’article 4 bis serait source de complexité bureaucratique, et il n’a donné lieu à aucune étude d’impact permettant d’évaluer les conséquences de sa mise en oeuvre : je pense notamment aux nouvelles charges financières induites pour les collectivités et les producteurs, ainsi qu’à la nécessité de préserver le secret industriel pour les produits électriques et électroniques éco-conçus.
En outre, un paquet législatif européen sur l’économie circulaire a été présenté en décembre dernier par la Commission européenne ; il fera l’objet de discussion dans les prochains mois. Un travail de concertation approfondie s’engagera ensuite, afin d’assurer une harmonisation européenne et la transcription en droit français.
Cette disposition me paraît donc prématurée. En outre, elle ne fait pas consensus au sein des différentes parties prenantes. Pour toutes ces raisons, il convient de supprimer cet article 4 bis, afin de laisser vivre la concertation.
Prenons le temps de réfléchir au meilleur dispositif qui permettra d’assurer une haute protection des données sensibles et, surtout, d’élaborer une législation identique dans tous les États membres.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement de suppression no 483 ?
Le débat qui a eu lieu en commission s’est déroulé à mon initiative, puisque cet article est issu d’un amendement que j’avais déposé sur un sujet qui, certes, est sensible. Vous imaginez donc bien, monsieur Vitel, que je suis défavorable à la suppression de cet article 4 bis quelques jours seulement après l’adoption de mon amendement par la commission.
L’enjeu de l’open data est véritablement de disposer d’un maximum de données qui puissent être utilisées. Prévoir la suppression pure et simple de cet article, qui complète très concrètement le II de l’article L. 541-10 du code de l’environnement par un 8° prévoyant les conditions dans lesquelles sont encouragées les démarches d’ouverture des données relatives aux déchets, n’est pas du tout dans l’esprit qui était le mien au moment du dépôt de l’amendement que je viens d’évoquer.
J’ai entendu vos arguments, mais les cahiers des charges des éco-organismes devront indiquer les conditions d’ouverture des données qu’ils détiennent. Je reviendrai sur ce point, de manière plus large, lors de l’examen des prochains amendements.
Le Gouvernement partage l’avis défavorable du rapporteur. Nous nous trouvons dans un cas de données d’intérêt général relatives à un secteur particulier : cette ouverture des données dans le monde des déchets est donc très intéressante. Le Gouvernement y tient.
Le député Philippe Vitel n’était pas, ce me semble, présent hier lors de la discussion générale. Il n’a donc pas dû entendre mes propos relatifs à l’économie circulaire ainsi qu’à l’absolue nécessité de disposer de données les plus fortes et les plus puissantes possible afin de créer de la valeur sur les flux de matières.
Aujourd’hui, il ne s’agit pas de gérer un modèle à bout de souffle qui détruit les matières premières plutôt que de favoriser la création de valeur à partir de ces dernières, l’économie linéaire, mais de passer à l’économie circulaire qui gère le flux de matières.
Celui-ci se trouve, à un moment donné, dans un état que l’on appelle déchet – un mot qui disparaîtra peut-être de notre vocabulaire dans quelques années – que nous devons régénérer en en réutilisant la matière.
Mais, afin de ne pas rester étriqué et de ne pas donner l’impression que seuls quelques-uns détiennent les réponses, il est absolument nécessaire de connaître et de déterminer quels sont les volumes, et donc les enjeux, de matière mobilisés – qui ne se trouvent qu’à un moment de leur évolution à l’état de déchets.
Si nous n’adoptons pas cette démarche, nous nous retrouverons de nouveau – permettez-moi de vous préciser des éléments dont vous ne disposez pas – dans la situation que nous connaissons aujourd’hui : la France exporte ses déchets, car nous ne savons pas de quelles matières premières régénérables nous disposons. Et, depuis une dizaine d’années, ce type d’exportation connaît une très forte croissance, à tel point que ce poste de notre balance commerciale – et je ne pense pas que cette évolution soit positive – est excédentaire de 2,8 milliards d’euros.
C’est l’équivalent de l’excédent que nous enregistrons dans le domaine agricole, c’est-à-dire que le gain économique que nous tirons de notre production agricole équivaut à ce que nous éjectons – permettez-moi ce terme – vers l’extérieur, et notamment vers la Chine : il s’agit d’une perte pour notre économie, qui a également des impacts environnementaux.
Nous devons cesser ce type de pratiques : pour cela, nous avons besoin de ces données pour générer de nouvelles valeurs ajoutées ainsi que pour déboucher sur de nouvelles créations de richesses et d’emplois.
L’amendement no 483 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 303 et 568 rectifié .
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement no 303 .
Dans la mesure où j’ai longuement expliqué l’intérêt de déterminer le plus précisément possible les éléments disponibles au sein des flux de matière que gèrent les éco-organismes, je serai plus bref sur cet amendement.
Il vise à préciser, à l’alinéa 2, que les déchets ne doivent pas être présentés sous forme de produits, mais plutôt sous forme de volumes de matière disponible : l’information pertinente n’est pas celle relative au nombre d’automobiles collectées par un éco-organisme, mais plutôt celle relative aux tonnes de matière comme l’acier ou le plastique, ainsi qu’à leurs spécifications.
C’est à dessein que j’ai pris l’exemple des voitures afin de ne pas stigmatiser un éco-organisme, car il n’en existe pas dans ce secteur : j’ai ainsi voulu, et tout le monde le comprendra, illustrer mon propos.
Monsieur le rapporteur, madame la secrétaire d’État, chers collègues, nous avons besoin d’obtenir ce type de précisions concernant ces éléments de la part des éco-organismes. Ne pas les obtenir reviendrait, en aval, à ne faire qu’un tiers ou qu’un quart du chemin et à ne pas permettre la création de valeur dont je parlais tout à l’heure – en un mot, à renoncer à aller de l’avant.
Or la création de valeur débouche sur la création de richesses, souvent territoriales, et d’emplois qui sont sans conteste non délocalisables. Ne pas adopter cette démarche reviendrait à continuer comme avant : nous continuerons à exporter nos déchets et à perdre énormément.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement identique no 568 rectifié .
Je partage effectivement l’analyse de notre collègue. Il semblerait utile et pertinent de compléter l’alinéa 2, qui porte sur les données relatives au domaine des déchets, par les mots : « au volume des matières issues du traitement des déchets et disponibles pour une substitution matière ».
L’idée est de faire davantage référence aux flux : il est important de préciser que les informations qui seront rendues publiques auront trait aux volumes de matière issus du traitement des déchets. Il faut qu’elles soient disponibles par matière et non par produit ou par équipement.
Nous prolongeons le débat que nous avons eu avec notre collègue Philippe Vitel à l’instant. Le sujet que vous abordez mérite certainement d’être précisé dans le cadre de nos débats actuels, mais je ne pense pas qu’il soit utile de l’inscrire dans la loi. La manière dont vous avez, l’un et l’autre, défendu cet amendement le montre bien, mais c’est précisément l’intérêt du débat que nous avons dans l’hémicycle.
Pour autant, je préfère en rester à cette rédaction générale du 8° du II de l’article L. 541-10 du code de l’environnement, telle qu’elle a été adoptée par la commission des lois. C’est pour cette raison que, lors de l’examen de ces deux amendements qui lui étaient soumis au titre de l’article 88, j’ai émis un avis défavorable.
Les éco-organismes sont en effet agréés par l’État pour une durée maximale de six ans renouvelable s’ils établissent qu’ils disposent des capacités techniques et financières nécessaires pour répondre aux exigences d’un cahier des charges fixé par arrêté interministériel, et après avis de l’instance représentative des parties prenantes le filière.
Les cahiers des charges des éco-organismes prévoient, notamment, dans ce 8°, « les conditions dans lesquelles sont encouragées les démarches d’ouverture des données relatives au domaine des déchets ».
Je n’ai pas l’impression que la rédaction que j’ai proposée en commission nous amène à trahir de grands secrets industriels. Aussi la précision que vous apportez devra être intégrée dans le cadre de l’élaboration du cahier des charges : elle me paraît davantage du ressort de ce type de document que de la loi. La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
Il est identique à celui du rapporteur : l’amendement dont est issu l’article 4 bis, et qui a été adopté la semaine dernière en commission des lois, constitue une avancée notable pour l’accès à l’information relative aux éco-déchets.
Je trouverais dommage d’en restreindre la portée : nous savons que les exceptions concernant le secret industriel et commercial à la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, dite loi CADA, s’appliquent en tout état de cause.
Le sujet est, il est vrai, intéressant : nous en avons parlé – mais pas à propos des open data – la semaine dernière lors de l’examen de la proposition de loi du groupe écologiste visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national applicable aux produits chimiques.
À cette occasion, nous avons évoqué le règlement concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances du 18 décembre 2006, dit règlement Reach, ainsi que l’obligation de codifier toutes les substances chimiques. Nous avons également débattu de la nécessité de – peut-être – faire preuve de souplesse dans l’utilisation ou la ré-utilisation de ces données.
Ceci étant dit, je pense qu’il est un peu tôt : seule une réglementation européenne pourra également, sur la question de l’économie circulaire, des déchets et de l’utilisation des open data, régler cette situation. Transposer cette réglementation dans une disposition législative me semble, à ce stade, prématuré.
Cher collègue, je suis un peu étonné par votre conclusion, vu la façon dont vous avez abordé cette question : nous nous attendions à ce que vous souteniez plutôt ces amendements, d’autant plus que, la semaine dernière, vous vous êtes montré très favorable à la proposition de loi que notre groupe avait inscrite à l’ordre du jour. Elle portait effectivement sur ces produits dangereux ainsi que sur la recherche de substituts.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je reviens sur la métaphore que j’ai utilisée hier lors de la conclusion de la discussion générale. Je dressais un parallèle avec les surfeurs : nous préparons mal la venue de la vague issue et du numérique et de la remise en cause de nos modèles. Cela questionne notre capacité à aller très vite.
Les flux de matière vont être atteints par une sorte d’uberisation, même si cette évolution est ralentie par la baisse des prix des matières premières. Mais si nous ne nous y préparons pas, si nous attendons que les autres s’y mettent, et si nous ne prenons pas d’avance en améliorant notre connaissance de nos flux – et notamment nos flux ce consommation – et donc des opportunités qu’ils recèlent, nous perdrons l’avance que nous avons prise grâce à la loi que vous avez tous, chers collègues, voté, au moins au sein de la majorité : celle du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Elle comportait en effet un titre IV, intitulé « Lutter contre les gaspillages et promouvoir l’économie circulaire : de la conception des produits à leur recyclage » relatif à l’économie circulaire, qui a été enrichi d’un amendement portant création d’une stratégie de transition vers l’économie circulaire. Nous ne nous orientons plus vers cette stratégie, mais plutôt vers un statu quo, alors que nous nous étions mis en mouvement. Or prolonger une telle situation serait fortement dommageable pour notre économie.
J’insiste vraiment : il faut prendre ce risque, qui n’est pas démesuré mais qui au contraire est extrêmement positif pour notre économie.
Permettez-moi de clarifier un point : le débat n’est pas – car nous y sommes en effet tous favorables – relatif à l’économie circulaire. Il porte sur la nécessité juridique de substituer au mot : « déchets » les mots « volume des matières issues du traitement des déchets et disponibles pour une substitution matière ».
Pendant qu’étaient débattus ces deux amendements identiques, j’ai consulté l’article L. 541-10 du code de l’environnement : juridiquement, le rapporteur a raison. Le 8° concerne le cahier des charges des éco-organismes. Et quand on prend connaissance des obligations relatives à ces cahiers des charges énumérées au II de ce même article, du 1° au 7°, c’est bien à chaque fois le mot : « déchets » qui y figure.
Je suis totalement d’accord sur le fond avec François-Michel Lambert, mais son amendement me paraît satisfait par la rédaction actuelle de cet article 4 bis. Je n’y vois pour ma part pas de risque, puisque c’est bien des cahiers des charges des éco-organismes dont il s’agit. Ils auront tout loisir, par la suite, d’entrer à ce niveau de détails. Je voulais juste donner cette explication de vote, compte tenu de mon attachement à l’économie circulaire.
Les amendements identiques nos 303 et 568 rectifié ne sont pas adoptés.
L’article 4 bis est adopté.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l’article 4 bis. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 744 3 ème rectification.
Par principe, les amendements que je dépose n’ont jamais pour objet de revenir sur des textes contre lesquels j’ai déjà voté, sauf lorsque des problèmes d’application se posent visiblement. C’est le cas s’agissant de cet amendement et de plusieurs autres.
Faisons ici un petit retour en arrière : lors des débats relatifs à la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, plusieurs députés de différents groupes avaient, compte tenu du retard pris dans la préparation du projet de loi numérique, introduit par voie d’amendement l’ouverture des données de transport.
Pour ma part, j’y avais ajouté, outre les horaires et les fréquences, les données relatives à l’accessibilité, qui sont très attendues notamment par les personnes handicapées. En utilisant l’article 49-3 de la Constitution, le Gouvernement en a profité pour réduire la portée de cet article.
Il est vrai qu’il aurait pu s’appliquer à des compagnies privées agissant dans un secteur concurrentiel, alors qu’initialement n’étaient visés que les services de transport publics par train ou par autocar.
La portée de cette disposition est tout de même trop réduite, puisque les obligations correspondantes seront considérées comme remplies au moyen de chartes et de lignes directrices. Tout cela devait être précisé dans un décret qui devait être pris le 6 novembre dernier : or nous n’en avons toujours pas vu la couleur !
En attendant sa publication, il est temps de rectifier cet article afin que les compagnies comme la SNCF soient, parce que ce sont des établissements publics, complètement soumises à l’obligation de publicité de leurs données de transport. Cela serait parfaitement cohérent avec le projet de loi que nous examinons : en la matière, de multiples possibilités d’innovation existent. Je pense par exemple à la création d’applications mobiles : il serait donc bon de ne pas les freiner.
Quel est l’avis de la commission sur cet amendement no 744 3 ème rectification ?
Lex specialis derogat legi generali : une loi spéciale déroge à une loi générale, cher collègue.
Dans la mesure où le projet de loi dont nous débattons ne revient pas sur la loi Macron – peut-être est-ce ce que vous souhaitiez –, ses dispositions spécifiques à l’open data dans le domaine des transports continuent de s’appliquer.
Sans difficulté donc, les données diffusées dans un standard ouvert et raisonnablement utilisables, c’est-à-dire lisibles par une machine par quelque acteur entrant également dans le champ de l’article L. 302 du code des relations entre le public et l’administration, que nous avons déjà évoqué, satisferont, de la même manière, aux obligations de l’article L. 312-1-1 du même code. L’avis de la commission est donc défavorable.
Défavorable.
La loi du 6 août 2015 crée un régime spécifique pour les données nécessaires à l’information des voyageurs. Le projet de loi que nous examinons crée des règles transversales pour l’ouverture des données dans l’ensemble de la sphère publique. Nous avons d’un côté une loi spéciale, de l’autre une loi générale. C’est la première qui s’appliquera au cas de figure que vous évoquez. Avis défavorable.
L’amendement no 744 troisième rectification n’est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 333 .
Il s’agit d’insérer la notion de diffusion à côté de celle de communication pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté.
C’est d’une logique implacable et je dois reconnaître qu’il y a une certaine cohérence et persistance dans vos propos.
Je le reconnais, monsieur Gosselin, mais l’alinéa 8 de l’article 4 répond parfaitement à votre demande : il fait référence non aux modalités de communication des documents, mais aux mentions entrant dans le champ d’application des articles L. 311-5 ou L. 311-6 qu’ils peuvent comporter et qui, de ce fait, ne les rendent communicables qu’aux intéressés. Votre amendement n’est pas utile. Je vous demande donc de le retirer. Sinon j’y serai défavorable.
L’amendement no 333 est retiré.
Plusieurs délais sont prévus pour l’entrée en vigueur de l’article 4 que nous venons de voter. C’est compréhensible. En revanche, fixer à deux ans après la promulgation de la loi le délai à l’issue duquel toutes les données administratives en question devront être diffusées risque de retarder encore une fois le mouvement. C’est pourquoi il serait plus sain de le réduire à un an et demi.
Les seuils, les délais, voilà des sujets qui reviennent régulièrement dans la discussion.
Vous savez à quel point je suis attaché au fait que ce texte s’applique vite, mais le changement de mentalité que cela va impliquer, la manière dont les uns et les autres vont s’en saisir peuvent justifier ces six petits mois supplémentaires. Je préfère en rester à deux ans et je suis donc défavorable à cet amendement.
L’amendement no 745 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 5 est adopté.
C’est un amendement de cohérence avec la formulation retenue à l’article 4 bis sur l’open data dans le domaine des déchets. Ne serait-ce que par principe, il est préférable de parler de conditions de réutilisation plutôt que de poser des limites.
En l’espèce, je préfère que l’on conserve la mention des limites puisque plusieurs articles du chapitre II de la loi CADA, « Du droit de réutilisation des informations publiques », y sont consacrés. Je suis donc défavorable à cet amendement.
L’amendement no 746 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
J’ai déjà évoqué cet amendement lors du débat sur la licence de ces données gratuites. Il propose que l’utilisateur s’engage à partager à l’identique les données produites à partir des informations publiques.
Un système de protection de l’open data, développé notamment en collaboration avec la Ville de Paris, permet de proposer un partage à l’identique sous le format dit ODBL. Cela permettrait peut-être de répondre à la problématique de la réutilisation commerciale d’un certain nombre de données ouvertes qui a été évoquée tout à l’heure, de façon plus constructive peut-être, en rappelant le principe de la protection de l’open data.
Nous poursuivons effectivement le débat que nous avions eu tout à l’heure avec M. Chassaigne et Mme Kosciusko-Morizet.
J’avais essayé il y a deux mois d’avancer sur ce type de questions lors de la transposition de la directive PSI. La loi n’est pas toujours le cadre le plus simple. Ce qui se fait à Paris et dans d’autres collectivités est plutôt assez performant. Pour autant, il est question là d’un certain nombre de données auxquelles on pourra accéder gratuitement sur data.gouv.fr. Avec Share Alike, ou la licence dite ODBL, il y a les difficultés d’une réutilisation potentielle et de l’acceptation d’une licence que nous avons évoquées tout à l’heure.
Je continue à penser, et M. Gosselin va me trouver plus libéral que lui, je le sens, que nous pouvons ne pas attendre un nouveau texte pour avancer sur le reste. C’est un vrai sujet de fond. Je ne doute pas que vous ayez bien compris que j’étais bien plus favorable à la gratuité des données publiques, à un accès total à ces données qu’à des systèmes de licence, double licence ODBL ou Share Alike. Je préfère vraiment que nous avancions sur la gratuité.
Je demande donc le retrait de cet amendement. Sinon, j’y suis défavorable.
Même avis, dans un débat un peu similaire à celui que nous avons eu avec Nathalie Kosciusko-Morizet et André Chassaigne.
Je vous propose simplement la promotion d’un autre type de licences, les licences de partage à l’identique. C’est également un modèle très intéressant et je donnerai pour exemple la Base Adresse nationale, gérée par La Poste mais aussi par OpenStreetMap et par le secrétariat général à la modernisation de l’action publique du Gouvernement, qui permet de remettre au pot en quelque sorte l’utilisation qui est faite d’une base de données.
Encore une fois, imposer un modèle plutôt qu’un autre me paraît délicat. Je préférerais que le Gouvernement continue à travailler à l’extension de certains types de modèles de licences avant de les généraliser, voire de les imposer.
Ce modèle est particulièrement intéressant et figurera sans aucun doute dans la liste prévue à l’article 6 du projet de loi, mais il me semble au mieux prématuré, sinon compliqué d’imposer par la loi une licence plutôt qu’une autre.
Le débat est effectivement posé, dans des termes sans doute un peu différents, mais nous nous retrouvons sur cette question de la réutilisation commerciale des données et je constate que rien n’est vraiment totalement tranché.
J’entends bien qu’on laisse la porte ouverte, qu’on ne veut pas bloquer l’avenir, etc., mais franchement, madame la secrétaire d’État, vous nous proposiez une République numérique et nous sommes tout de même bien loin des grands principes fondamentaux. Nous voyons bien que l’on est en plein tâtonnement, que la République n’est pas mûre et que l’on n’en est qu’au préambule. Je voulais tout de même pointer cette ambiguïté. Certes, la réflexion peut et doit se poursuivre, mais ne nous vendez pas ce que ce texte n’est pas.
Je trouve cette discussion presque un peu dangereuse pour le modèle économique et pour l’avenir.
En fait, avec ce genre d’amendements, on va contre le développement de nos petites entreprises,…
…qui ont besoin des données publiques. Aujourd’hui, déjà, elles essaient d’en vivre en les utilisant pour y ajouter de la valeur. Il y a de nombreuses entreprises qui naissent en France et tentent de se développer, et il y en aura encore plus demain. Ce n’est pas du tout le même combat que lorsque nous parlions tout à l’heure avec André Chassaigne ou Nathalie Kosciusko-Morizet des GAFA.
Si vous voulez lutter contre Google, Amazon et Facebook et leurs modèles totalement dévastateurs pour notre économie, il y a de nombreux autres moyens que de s’attaquer finalement, par le biais de fausses bonnes idées, aux entreprises qui essaient de se développer grâce aux données publiques qui seront mises en ligne.
C’est tout un nouveau modèle économique que nous sommes en train de condamner en nous y prenant trop vite et trop tôt et en n’allant pas jusqu’au bout de notre raisonnement, en n’ayant finalement en ligne de mire que notre lutte normale, logique et tout à fait légitime contre les GAFA, contre le modèle Google, qui ravage tout sur son passage et pour qui quelques millions d’euros, c’est de l’argent de poche.
Pour s’attaquer à ces GAFA, il y a la fiscalité. Nous avons évoqué en commission des lois les amendes que pouvait infliger la CNIL. Nous avons à notre disposition tout un arsenal bien plus puissant, bien plus efficace et, surtout, bien plus ciblé contre les GAFA car, en l’occurrence, nous mettons en péril un nombre incroyable de très petites entreprises, de moins de cinquante ou cent personnes, qui sont créatrices d’emplois et qui ont besoin d’utiliser des données publiques pour se développer.
J’ai été convaincue par votre réponse, madame la secrétaire d’État. Je retire donc mon amendement parce que je sais que des solutions concrètes seront apportées par voie réglementaire notamment. Cela dit, je tiens à préciser que ce n’est certainement pas parce que la Ville de Paris travaillerait contre les petites entreprises comme l’a laissé supposer à l’instant Mme Attard.
L’amendement no 847 est retiré.
Même objet que mon amendement no 735 à l’article 4 sur l’actualisation régulière des données qui a été adopté hier soir.
Nous parlons des modalités d’organisation et de réutilisation et c’est beaucoup moins pertinent. Pour une fois, je serai défavorable à votre amendement, monsieur Tardy.
L’amendement no 747 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement no 459 .
Cet amendement vise à confirmer qu’une réutilisation à des fins commerciales des données publiques donne lieu au paiement d’une redevance par la personne physique ou morale qui est demandeuse.
Il ne s’agit pas de remettre en cause le principe de la gratuité de la donnée publique. Il convient simplement de rétablir l’équilibre entre les administrations publiques produisant des données publiques et des entreprises privées qui souhaitent exploiter ces données pour en faire une source de richesse.
Le système de redevance pour la réutilisation des données à des fins commerciales ne doit pas être une barrière dissuasive pour des entreprises dynamiques mais il doit être une source de revenu complémentaire pour l’État, qui, ne l’oublions pas, met à disposition cette matière première dont bénéficieront les entreprises.
C’est le débat que nous avons eu hier et que nous avons eu à deux reprises cet après-midi dans l’hémicycle. Vous ne serez donc pas surpris que j’aie les mêmes arguments que tout à l’heure, qui ont conduit Mme Berger à retirer l’amendement no 847 . Je suis défavorable à cet amendement.
L’amendement no 459 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 493 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement no 551 .
L’article 6 pose le principe de la libre réutilisation des informations publiques en supprimant l’exception jusqu’alors prévue par la loi pour les documents produits ou reçus dans l’exercice d’une mission de service public industriel et commercial – SPIC. L’exception visant les SPIC est pourtant toujours justifiée au regard du cadre concurrentiel dans lequel ils interviennent.
La redevance de réutilisation instituée par la loi du 28 décembre 2015, qui se limite à la couverture des coûts exposés, n’est pas adaptée à ces entreprises.
Toutefois, le débat ayant déjà eu lieu sur cet aspect de la question, l’amendement n’a plus d’utilité et je le retire avec l’accord de ses deux cosignataires.
L’amendement no 551 est retiré.
Je pense qu’il va m’être demandé de retirer cet amendement : je tiens toutefois à prendre la suite de M. Duron, qui a ouvert le débat aux articles 1er et 4 sur les obligations faites aux SPIC.
Monsieur le rapporteur, vous avez en effet précisé, lors de l’examen de l’article 1er, que les amendements portant sur le sujet sont satisfaits en raison de l’amendement no 860 qui dispose que le secret industriel « comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles et est apprécié en tenant compte, le cas échéant, du fait que la mission de service public de l’administration mentionnée à l’article L. 300-2 est soumise à la concurrence. »
Monsieur le rapporteur, le texte protège-t-il, pour le droit existant, les entreprises qui sont déjà soumises à la concurrence, ou prévoit-il également de protéger les entreprises qui, après ouverture à la concurrence, y seront à l’avenir soumises, lorsque ce n’est pas encore le cas ?
Nous avons en effet déjà engagé ce débat avec M. Duron. Vous avez été plusieurs à nous alerter sur le sujet des SPIC. Je ne doute pas que la question que vous me posez est directement liée à l’amendement du Gouvernement no 860, deuxième rectification, à l’article 4, que nous avons adopté et qui commande le retrait à son profit de l’ensemble des amendements qui évoquent ces enjeux industriels et la manière dont ils sont posés. En effet, nous avons tous jugé que cet amendement permet de cadrer l’ensemble des activités à la fois dans le respect de l’ambition du texte et en répondant, s’agissant des données qui pourraient être soumises à discussion, aux spécificités du secret industriel et commercial dans l’exercice des missions de SPIC.
L’amendement no 860 , deuxième rectification –ainsi qu’un autre qui sera appelé ensuite – est vraiment de nature à vous rassurer. C’est la raison pour laquelle je vous demande, en effet, de retirer votre amendement.
Je tiens à rappeler les raisons pour lesquelles le Gouvernement a décidé de supprimer cette exception qui était applicable aux services publics industriels et commerciaux pour les faire entrer dans la politique d’ouverture des données publiques.
La première finalité est la transparence de l’action publique, qui concerne aussi ce type d’établissement. La seconde est le développement économique : ce qui est pertinent pour les SPIC l’est tout autant pour les services publics administratifs.
Il est vrai que certains gestionnaires de ce type de service public se sont inquiétés du fait que, lorsqu’ils exercent des activités soumises au droit de la concurrence, la réutilisation des données rendues publiques ne serait pas protégée par le principe du secret industriel et commercial. Or, tant l’article L. 311-6 que la doctrine de la CADA sont très précis sur le sujet : le secret industriel et commercial s’applique aux SPIC et la CADA tient notamment compte du positionnement concurrentiel de l’entreprise dans son environnement et accepte notamment des exceptions liées au secret sur les prix qui sont pratiqués ou sur l’accès à une liste de fournisseurs.
C’est pour répondre aux inquiétudes soulevées que le Gouvernement a déposé l’amendement no 860 , deuxième rectification, à l’article 4, amendement qui a été adopté hier, en vue de renforcer dans la loi l’application de la protection du secret industriel et commercial pour les SPIC. Il défendra également, à l’article 7, l’amendement no 861 rectifié , en vue de protéger les bases de données détenues par les SPIC qui interagissent dans un environnement concurrentiel.
Nous avons pleinement tenu compte des préoccupations qui ont été exprimées tout en restant cohérents avec notre politique d’ouverture des données.
C’est pourquoi je vous demande de retirer l’amendement. Faute de quoi, j’émettrai sur celui-ci un avis défavorable.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de ces précisions.
Ma question portait simplement sur la rédaction de l’amendement no 860 , deuxième rectification, qui est au présent de l’indicatif. Des entreprises SPIC comme la SNCF et la RATP, qui seront ouvertes à la concurrence pour une partie de leurs activités, se demandent si cette exception vaudra également pour ces activités. Ce que j’ai compris de votre réponse, c’est que ce présent vaut futur et que l’exception s’appliquera bien aux activités qui seront ouvertes ultérieurement à la concurrence.
C’est pourquoi je retire l’amendement no 460 .
L’amendement no 460 est retiré.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 494 rectifié .
L’amendement no 494 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisie de deux amendements, nos 316 rectifié et 534 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 316 rectifié .
Cet amendement vise à étendre aux collectivités la capacité d’établir une redevance très encadrée, puisque couvrant simplement les frais de collecte et de diffusion de données publiques.
La loi du 25 décembre 2015 limite cette capacité aux administrations des services publics. L’objet de cette extension est de permettre un accès équitable à tout l’écosystème économique, notamment à ceux qui sont au service de l’emploi et de l’entreprise.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 534 rectifié .
L’objet de cet amendement est proche de celui que vient de défendre M. Potier, ce qui montre les difficultés de coordination entre la loi Valter, dont l’encre est à peine sèche, le présent texte et le projet de loi Macron II, qui arrivera peut-être prochainement. Nous nous trouvons sur la corde raide et c’est l’occasion de le souligner une fois de plus.
Cela dit, les conditions de dérogation pour les administrations sont assez strictes, ce qui est très bien, du reste. Mais pourquoi se limiter aux administrations ? Si l’amendement ne remet pas en cause le bien-fondé de telles conditions, il vise à étendre la possibilité de dérogation encadrée aux collectivités territoriales et à leurs groupements au sens large, les EPCI, les syndicats et les syndicats mixtes, afin qu’il n’y ait aucune ambiguïté.
Monsieur Gosselin, votre amendement est satisfait. En effet, l’article 15 de la loi CADA dispose que « la réutilisation d’informations publiques est gratuite. Toutefois, les administrations mentionnées à l’article 1er peuvent établir une redevance de réutilisation », ce qui correspond à votre souhait, puisque les administrations mentionnées à l’article 1er sont « l’État, les collectivités territoriales », que vise votre amendement, « ainsi que les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission. »
Votre amendement étant, je le répète, satisfait, je vous demande de le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Monsieur Potier, votre amendement vise un sujet large. Je comprends la logique qui a prévalu à sa rédaction et à votre argumentation. Cependant, chacun pourra constater qu’il est très difficile, voire impossible, pour une collectivité de juger du caractère de position dominante d’un acteur quel qu’il soit – nous imaginons qui vous visez. Une collectivité locale pourra difficilement s’appuyer sur des moyens ou des services équivalents à ceux de l’Autorité de la concurrence pour en juger. Avis défavorable.
Monsieur Potier, la loi Valter introduit le principe de gratuité par défaut, principe que prolonge le présent texte. Si le Gouvernement a fait le choix de l’ouverture des données publiques, c’est que, d’une part, celle-ci correspond à un objectif de transparence de l’action publique et que, d’autre part, il a la conviction que la circulation la plus large des données est en elle-même source d’innovation et de valeur économiques et donc de recettes indirectes pour les territoires et pour le pays.
La question que vous posez est compréhensible et rejoint les débats que nous avons déjà eus sur les types de licence. Elle contrevient toutefois à l’esprit général de la politique d’ouverture des données publiques. Cela étant, rien n’interdit aux collectivités locales de choisir un type de licence plutôt qu’un autre : il me semble important de leur laisser la liberté de choix.
C’est pourquoi je vous demande de retirer l’amendement no 316 rectifié , faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Même avis que le rapporteur sur l’amendement no 534 rectifié .
J’entends les arguments du rapporteur sur la difficulté concrète qu’il y a à déterminer une situation dominante quand on n’est pas l’autorité compétente. L’idée n’était pas de spéculer sur ces données mais d’être au service d’un public plus large dans des écosystèmes territoriaux qui peuvent être éloignés des grands centres de décision. Par sagesse, je me range néanmoins à votre avis et retire mon amendement.
L’amendement no 316 rectifié est retiré.
Je n’ai pas la même sagesse que M. Potier et maintiens mon amendement parce que je ne suis pas totalement convaincu par vos arguments.
L’amendement no 534 rectifié n’est pas adopté.
Puisque nous récrivons une partie de la loi Valter adoptée il y a à peine un mois, autant le faire le mieux possible.
Cet amendement reprend un amendement que j’avais déposé sur ce texte et qui me paraît encore plus cohérent avec le présent projet de loi. Parfois, une négation change la tournure qu’on veut donner à un principe : c’est le cas ici. Il suffirait de préciser que « les administrations mentionnées […] ne peuvent établir une redevance de réutilisation que » sous certaines conditions. Ces redevances doivent redevenir ou rester une exception : autant l’affirmer clairement. Tel est le sens de mon amendement.
Je ne souhaite pas rouvrir ce débat que nous avons eu à de nombreuses reprises, d’autant que la rédaction que vous proposez n’apporte pas de grandes modifications et ne change pas substantiellement le texte. La gratuité est le principe et la redevance reste l’exception. C’est l’objet même de la loi Valter dont l’article 5 rédige ainsi l’article 15 de la loi du 17 juillet 1978 : « La réutilisation d’informations publiques est gratuite. Toutefois, les administrations mentionnées à l’article 1er peuvent établir une redevance de réutilisation lorsqu’elles sont tenues de couvrir par des recettes propres une part substantielle des coûts liés à l’accomplissement de leurs missions de service public. » Vous savez d’ailleurs que cette dernière partie de la phrase n’a pas ma préférence. Avis défavorable.
L’amendement no 748 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 670 .
Cet amendement vise à compléter l’article 6 par un alinéa précisant que toute réutilisation des données de référence « doit mentionner le document ou les sources originelles tels que mis en ligne par l’administration concernée ».
Puisqu’il est désormais permis d’utiliser, de réutiliser, d’exploiter et éventuellement de vendre les produits issus de ces données, il est important que leurs bénéficiaires in fine, parce qu’ils les ont achetées ou utilisées, puissent avoir accès aux données de bases, telles qu’elles ont été mises en ligne par l’administration. Le principe de réfutation est un principe scientifique fondamental qui représente également une sécurité pour les administrations : son application permettra d’éviter des réemplois, des réappropriations, voire des falsifications des données que ces administrations auront mises en ligne en toute transparence et honnêteté et dont les sources, après plusieurs réutilisations, ne seraient plus accessibles. C’est une mesure de précaution.
Nous ne pouvons que partager cette volonté de mentionner les sources en cas de réutilisation des données.
Madame Le Dain, votre amendement est satisfait par l’article 12 de la loi CADA : « Sauf accord de l’administration, la réutilisation des informations publiques est soumise à la condition que ces dernières ne soient pas altérées, que leur sens ne soit pas dénaturé et que leurs sources et la date de leur dernière mise à jour soient mentionnées. » Ainsi, les dispositions existantes permettent d’apporter l’ensemble des garanties que vous évoquiez. Votre demande, que vous aviez effectivement déjà formulée en commission, est satisfaite : je vous propose donc de retirer votre amendement.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Il aurait été opportun de faire explicitement référence à la loi CADA dans cet article, afin que nos concitoyens ne soient pas perdus. Le commun des mortels n’imagine pas une seconde que l’information relative à un concept donné puisse être éparpillée dans plusieurs lois différentes.
Cela dit, je suis têtue mais sympathique.
Sourires.
L’amendement no 670 est retiré.
L’article 6, amendé, est adopté.
La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-neuf heures.
Cet amendement reprend la toute dernière suggestion formulée par la CADA dans son avis sur le présent projet de loi.
Actuellement, certains documents sont exclus de la diffusion : c’est notamment le cas de ceux qui se rapportent à la gestion du domaine privé de l’État. Lorsque la CADA est saisie d’un refus de communication de ces documents, elle se déclare incompétente. Or, dans l’esprit du projet de loi, je ne vois pas pourquoi des informations de ce genre seraient exclues de la diffusion, sachant qu’il s’agit d’informations publiques dans la mesure où le domaine privé de l’État est financé par l’argent des contribuables.
La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 82 deuxième rectification.
Le présent amendement vise à élargir le champ de l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration, qui indique les personnes concernées par la communication des documents administratifs, aux documents des sociétés de droit privé, appartenant à des personnes publiques.
La CADA a, dans un avis du mois d’octobre 2015, indiqué que les documents des personnes de droit privé qui appartiennent à des personnes de droit public ne soient pas concernés par le droit de communication. Il s’agissait en l’espèce de documents détenus par la Société de valorisation financière et immobilière. Par cet amendement, il s’agit de préciser que les documents relatifs à la gestion du domaine privé de l’État et des collectivités territoriales seront communicables.
Sur le principe, je ne peux qu’être favorable. En commission, nous avons travaillé sur le sujet. Je suis favorable à la rédaction proposée par M. Coronado, laquelle s’insère bien dans le code des relations entre le public et l’administration. Par conséquent, je demanderai à M. Tardy de bien vouloir retirer son amendement no 21 .
La réflexion que vous engagez, monsieur Tardy, est très intéressante. On peut en effet se poser la question de savoir pourquoi le domaine privé de l’État ne ferait pas partie de l’obligation d’open data, par exemple les forêts publiques, les immeubles publics à usage de bureaux, etc.
À la suite de la discussion en commission, j’ai demandé une expertise juridique. Il m’a été indiqué qu’il était très difficile à ce stade de délimiter juridiquement la frontière du domaine privé, ce qui lui appartient ou pas.
Je n’utilise pas souvent ce joker, monsieur Tardy, je le fais avec parcimonie, mais étant donné que la piste que vous proposez est vraiment très intéressante, j’aimerais pouvoir creuser le sujet et je m’engage à le faire. Afin de parvenir à trouver une solution véritablement solide, il faudra que nous nous y employions au Sénat.
La question se pose également de savoir s’il faut inclure les collectivités locales dans ce périmètre ou non, ainsi que le propose Sergio Coronado. Je vous avoue que dans les délais contraints d’examen des amendements, je ne suis pas en mesure de répondre à ces questions. Je m’engage toutefois à approfondir le sujet et à vous apporter une réponse favorable si je reçois toutes les garanties juridiques nécessaires.
À ce stade, je demande le retrait des deux amendements. À défaut, l’avis sera défavorable.
Moi aussi, je maintiens mon amendement, car l’avis de la commission a été favorable.
L’amendement no 21 n’est pas adopté.
L’amendement no 82 deuxième rectification est adopté.
Il serait vraiment nécessaire de renvoyer le texte en commission comme je l’ai indiqué en défendant ma motion de renvoi. Vous serez plus d’une fois obligée de recourir à un joker, madame la secrétaire d’État.
Sourires.
C’est la première fois que je l’utilise.
Oui, mais il y en aura d’autres, nous n’en sommes qu’au début du texte.
J’ai redéposé mon amendement no 750 , à l’identique. Même si le rapporteur a indiqué, à juste titre sans doute, en commission que sa rédaction était trop large, le problème soulevé n’est toujours pas réglé. Et cela se produira pour d’autres amendements.
Pourtant, la CADA recommande dans son avis qu’il convient de prévoir une rédaction plus générale pour cet alinéa. Tel qu’il est rédigé, il pourrait en effet générer des obstacles à la réutilisation de documents administratifs, dont des bases de données, sur lesquels l’administration détient un droit de propriété intellectuelle, et s’entendre de manière trop restrictive.
Voilà une nouvelle fois, un exemple d’une disposition imparfaite, les délais ultracourts entre l’examen en commission et la discussion en séance ne nous ont pas permis de travailler de manière approfondie. Seule une deuxième lecture permettrait d’améliorer le texte. Celle-ci n’étant pas prévue, vous vous en remettez au Sénat. Pour ce qui me concerne, j’aimerais vérifier ce qu’il en sera. Au demeurant, nous n’avons toujours pas eu la confirmation d’une deuxième lecture par Mme la secrétaire d’État, alors que je lui avais posé cette question hier. Nous sommes donc face à un mur, avec un nouveau joker en perspective.
On commence à bien se connaître avec M. Tardy au point qu’il présente par avance les arguments qu’il pense que je lui opposerais pour lui demander de retirer son amendement en raison d’une rédaction trop large. Il a en effet vu juste.
Sourires.
Très souvent, en effet, sur les droits de propriété intellectuel de l’administration. Mais en l’occurrence, votre rédaction est trop large.
J’entends vos inquiétudes et vos craintes s’agissant de la navette. Mais s’il ne devait pas y avoir de deuxième lecture, nous aurions à nouveau, je n’en doute pas, ce débat en CMP.
Demande de retrait donc, ou, à défaut avis défavorable.
L’avis du Gouvernement est également défavorable car l’amendement vise à étendre le périmètre à l’ensemble des droits de propriété intellectuelle du droit sui generis du producteur d’une base de données. Ce droit extrêmement spécifique a été créé par la directive européenne de 1996 relative aux bases de données, qui vise à rémunérer l’investissement que le producteur de la base a dû consentir pour constituer la structure même de cette base.
Or l’alinéa 1er de l’article 7 vise à expliciter le fait que les administrations ne peuvent pas non plus se prévaloir de ce droit sui generis pour interdire la réutilisation d’une base de données. Cela répond à une jurisprudence, la décision de la cour administrative d’appel de Bordeaux de février 2015 qui avait souligné l’existence d’une incertitude juridique sur ce point.
Nous rendons le droit plus cohérent et plus lisible. Pour autant, inutile d’aller plus loin.
L’amendement no 750 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement no 237 .
Cet amendement conserve la possibilité pour les personnes morales de droit privé exerçant une mission de service public de bénéficier des dispositions relatives au droit d’interdiction des producteurs de bases de données.
En effet, il est nécessaire de protéger le savoir-faire des entreprises privées en charge de missions de service public, confrontées à la concurrence d’autant plus que leurs concurrents étrangers ne seront pas soumis à une obligation de publication de leurs bases de données.
Je suggère à notre collègue Duby-Muller de retirer son amendement car sa préoccupation est prise en compte par l’amendement no 861 rectifié du Gouvernement qui exclut du champ d’application de cet article les administrations dans l’exercice d’une mission de service public industriel et commercial soumise à la concurrence. Dans la mesure où cet amendement répond entièrement à votre attente, je vous suggère, madame Duby-Muller, de retirer le vôtre. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
Même position. Je demande le retrait au profit de l’amendement no 861 rectifié du Gouvernement à venir.
L’amendement no 237 est retiré.
Cet amendement vise à s’assurer que lorsque des agents publics possèdent des droits sur les données qu’ils ont participé à produire, ceux-ci soient reconnus mais ne fassent pas entrave à la libre réutilisation en open data.
Cette disposition permettra de résoudre les problèmes rencontrés par certaines administrations dans la libération de données publiques.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 386 .
Le droit d’auteur des fonctionnaires ne doit pas s’opposer à la réutilisation des données comme cela fut le cas pour certaines bases, je pense notamment à la base Mérimée sur le patrimoine, au fonds de documentation des armées.
Dès lors, cet amendement prévoit de prendre en compte l’article L. 131-3-1 du code de la propriété intellectuelle qui porte sur le droit d’auteur des fonctionnaires pour favoriser la réutilisation des données.
Ces données sont certes transférées à l’État, mais celui-ci ne peut pas s’opposer à la publication de ces bases de données.
Nous en arrivons à ce grand débat sur le droit d’auteur des fonctionnaires, qui nous conduira ensuite au débat sur les « communs ». Pour ma part, je souhaite renvoyer à un débat plus large.
En commission, nos travaux nous ont conduits à considérer qu’un certain nombre d’éléments n’étaient pas uniquement liés au projet de loi pour une République numérique. Toutes les études qui ont été menées étaient à la fois très poussées, mais extrêmement partisanes. D’un côté comme de l’autre, j’ai constaté qu’il était très difficile d’avancer sur cette question afin de trouver une solution. Je n’étais d’ailleurs pas sûr – je l’ai dit en commission – que l’on aboutisse à une rédaction équilibrée avant le débat en séance publique. J’ai même émis des doutes quant à la possibilité d’y arriver avant le passage du texte au Sénat.
S’agissant du droit d’auteur des fonctionnaires, pensons à la loi relative à la liberté de la création, car les implications sont plus larges que sur le seul sujet de l’open data. Quant au débat sur les « communs », je souhaite que l’on mène un réel travail, je l’ai dit en commission et redit au Gouvernement. Cela vaudra pour l’ensemble des discussions que nous aurons sur ce sujet.
En l’état actuel des positions des uns et des autres, des propositions de rédaction, des études très poussées qui ont été réalisées – le débat est ancien –, je ne crois que nous serons en mesure, dans ce texte, de trouver une porte de sortie. Je souhaite donc le retrait des deux amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable. Dans son alinéa 1, l’article 7 confirme cette réserve déjà existante, et analysée par la CADA, des droits des tiers s’agissant des bases de données qui incluent les agents publics. Nous ne souhaitons pas revenir sur ce dispositif.
L’amendement no 661 est retiré.
On ne cesse de nous balader ! Une fois, les « communs », c’est pour la loi création, une autre, pour la loi numérique ! C’est inacceptable pour le travail parlementaire !
S’agissant des droits d’auteur des fonctionnaires, les bases de données sont déjà transférées à l’État, mais il ne s’agit pas pour autant de faire en sorte que l’État puisse s’opposer à leur publication. Il est primordial de prendre en compte l’article L. 131-3-1 du code de la propriété intellectuelle dans le présent projet de loi pour préciser les limites de l’action de l’État concernant ce droit qui lui est effectivement transféré. Il faut ensuite appliquer une réglementation afin que l’État ne puisse pas s’opposer à la publication de ces bases de données.
Je maintiens l’amendement.
L’amendement no 386 n’est pas adopté.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’article 4 : la distinction entre bases de données et contenu des bases doit être clarifiée. Pour ma part, je considère que la communication d’une base de données ne vise que l’ensemble des données contenues dans cette base. Cet amendement devrait pouvoir le confirmer.
Je n’ai pas tout à fait la même lecture que vous. Il n’est pas inutile de maintenir le mot : « contenu » juste avant de mentionner les bases de données. Cette rédaction est, tout d’abord, en cohérence avec celle que nous avons adoptée pour d’autres textes et avec celle de certains textes européens. La loi no 98-536 du 1er juillet 1998, qui transpose dans le code de la propriété intellectuelle la directive 969CE du Parlement et du Conseil du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données, a ainsi introduit dans le code de la propriété intellectuelle deux articles – qui sont désormais les articles L. 342-1 et L. 342-2 – accordant des droits étendus au producteur de bases de données. Ce dernier peut en effet interdire « l’extraction, par transfert permanent ou temporaire de la totalité », la « réutilisation, par la mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle », et « l’extraction ou la réutilisation répétée et systématique ».
Il faut que nous puissions maintenir cette précision, qui apporte à la fois de la cohérence et de la lisibilité au texte que nous examinons. Je demande donc le retrait de l’amendement, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement no 751 est retiré.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 861 rectifié .
Je l’ai déjà présenté en partie, en réponse à M. Olivier Faure. Il a pour objet d’exclure de l’application de ce nouvel article 7 les bases de données produites ou reçues par les administrations dans le cadre d’une mission de service public industriel ou commercial soumise à la concurrence. Il tend à introduire une protection supplémentaire du secret industriel et commercial pour les catégories de services publics industriels et commerciaux– SPIC – en situation de concurrence. Cela devrait répondre aux nombreuses préoccupations qui se sont exprimées à ce sujet.
J’ai eu l’occasion de m’exprimer tout à l’heure à ce propos en émettant un avis favorable justifiant des demandes de retrait. Je suis parfaitement satisfait de cette rédaction, qui apporte l’ensemble des garanties que tous attendaient en matière de protection, notamment du secret industriel.
L’amendement no 861 rectifié est adopté.
Cet amendement, fondé sur des dispositions de directives européennes concernant la réutilisation des informations du secteur public, vise à faire notifier par l’administration le nom du titulaire des droits de propriété intellectuelle qui fondent le refus de la réutilisation du contenu de bases de données.
Cet amendement permet de renforcer la transparence entourant les décisions de refus de réutilisation des données publiques, et donc de garantir le respect du cadre législatif mis en place par la présente loi. Il s’inspire directement d’une disposition figurant dans une directive du Parlement européen.
Ils sont parfaitement satisfaits par l’article 2 de la loi de 1978. Toute décision défavorable en matière de réutilisation d’informations publiques est notifiée au demandeur sous la forme d’une décision écrite motivée, comportant l’indication des voies et délais de recours. Le deuxième alinéa ne s’applique pas aux décisions défavorables opposées par les bibliothèques, y compris les bibliothèques universitaires, les musées et les archives. Je demande donc le retrait de ces amendements, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Même avis que le rapporteur.
Cet amendement porte sur la réutilisation, à titre gratuit ou non. Les réutilisateurs, professionnels ou citoyens, sont en effet en attente d’une simplification du mécanisme des licences. Ces dispositions reprennent les suggestions retenues par le Conseil national du numérique.
Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’alinéa 5 de l’article 7. La rédaction actuelle est pourtant plus claire et embrasse un champ plus large. Je préférerais donc que nous en restions au texte issu de la commission. Par ailleurs, les listes des licences sont relativement stables – nous allons du reste examiner un amendement de M. Lionel Tardy visant à organiser une révision quinquennale de ce décret. Ces deux éléments nous invitent à nous en tenir là. Avis défavorable, donc.
Même avis, d’autant plus que le Gouvernement considère que cet amendement est satisfait. Le texte de loi pose en effet le principe de l’obligation de choisir une licence dans la liste fixée par décret lorsque les réutilisations se font à titre gratuit. Tel est exactement l’objet de l’article, qu’il est donc inutile d’amender.
L’amendement no 662 n’est pas adopté.
Je suis heureux que le Gouvernement ait changé d’avis sur cette disposition, suggérée par le Conseil national du numérique, qui avait été retoquée lorsque je l’avais proposée, voilà un mois, lors de l’examen de la loi Valter. Le but est de limiter le nombre de licences en le fixant par décret, afin de garantir l’uniformité de la politique de réutilisation des données sur le territoire national. Or, en permettant une homologation au cas par cas, on multiplie le nombre de licences, alors que ce nombre est aujourd’hui limité, ce qui est préférable pour la lisibilité de la politique d’open data.
Mieux vaut donc prévoir que le décret fixant la liste des licences soit révisé régulièrement et pris en concertation avec les administrations, qui pourraient alors proposer de nouvelles licences ou l’adaptation des licences existantes, mais toujours en limitant leur nombre final.
Suite à votre remarque en commission, monsieur le rapporteur, j’ai modifié mon amendement afin que cette révision soit quinquennale, et non plus annuelle.
Monsieur Tardy, je considère que vous avez également défendu votre amendement no 753 .
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir le sous-amendement no 871 .
En réponse à l’amendement no 752 , dont je partage la philosophie générale, il est envisageable d’introduire une révision du décret tous les cinq ans, mais il ne me semble en revanche pas opportun de revenir sur la décision d’homologation des licences utilisables, nécessaire pour permettre une souplesse dans l’évolution de cette liste. C’est l’objet du sous-amendement déposé par le Gouvernement.
Pour les raisons que je viens d’évoquer, notamment au terme de la discussion que nous avons eue avec Mme Dubié, j’émets évidemment un avis favorable aux arguments de M. Tardy et à la suppression de l’alinéa 3, qui fait l’objet du sous-amendement du Gouvernement.
Avis favorable, sous réserve de l’adoption du sous-amendement du Gouvernement.
Le sous-amendement no 871 est adopté.
L’amendement no 752 , sous-amendé, est adopté.
Les licences de réutilisation gratuite des données sont fixées par décret. L’amendement tend à préciser qu’il y aura une concertation avec les collectivités territoriales et leurs groupements. Je me situe une fois encore, avec cet amendement, dans le filon de la concorde territoriale, de l’efficacité, de la démocratie et de la transparence.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 533 .
Le projet de loi pour une république numérique prévoit que les licences de réutilisation gratuite des données soient fixées par décret – c’est tout l’enjeu de la discussion que nous venons d’avoir. Les collectivités territoriales et leurs groupements sont d’importants pourvoyeurs de données – je pense, bien sûr, aux mairies, mais aussi aux départements et aux régions –, dans le champ de leurs compétences. Elles ont pu mettre en place des licences de réutilisation des données pour veiller au respect de l’intérêt général et engager un dialogue de confiance avec les réutilisateurs.
Cet amendement propose donc que le décret fixant la liste des licences mobilisables fasse l’objet d’une concertation avec les collectivités et leurs groupements, afin de bénéficier à la fois de leur expérience, de leur vécu dans le domaine, de leurs initiatives et de prendre en compte leurs attentes dans la perspective d’une mobilisation efficace de l’outil « licences ».
Là encore s’exprime la volonté de travailler au plus près avec ceux qui sont à l’origine de certains dispositifs, notamment des licences.
La vigilance à laquelle vous nous invitez est certainement pertinente à bien des égards. Cependant, la réalité n’est pas encore si forte et les associations qui connaissent bien ces questions savent que les collectivités très en pointe ne sont pas si nombreuses – il s’agit de Rennes depuis 2010, de Nantes depuis 2011, de Paris et de la Saône-et-Loire, qui faisaient partie des précurseurs.
Une vraie concertation existe déjà avec Etalab et les collectivités locales et ce fonctionnement est plutôt fluide. S’il existait de véritables difficultés, sans doute aurais-je eu un regard plus favorable sur votre amendement, mais les choses se passent plutôt bien aujourd’hui et le nombre des licences concernées est relativement faible et ne suscite pas de préoccupation majeure.
Du point de vue tant de la simplification que de la fluidité que nous souhaitons tous en matière de mise à disposition de données publiques, je propose donc que nous en restions aux concertations actuelles et n’alourdissions pas le dispositif avec les éléments que propose l’amendement. Je vous invite donc à retirer celui-ci. À défaut, avis défavorable.
L’avis du Gouvernement est légèrement différent. Je considère en effet a priori que l’amendement présenté notamment par M. Potier est satisfait, car la loi du 17 octobre 2013, qui portait création d’un Conseil national d’évaluation des normes, oblige déjà l’État à consulter les collectivités territoriales et leurs établissements publics sur l’impact technique et financier des projets de textes réglementaires qui les concernent. Je puis également citer l’instance nationale partenariale dédiée au développement des échanges numériques entre l’État et le secteur public local, qui regroupe elle aussi des associations d’élus. Ma démarche a, du reste, toujours été de rencontrer toutes les associations représentatives des élus locaux.
Cela dit, la réalité du numérique aujourd’hui en France est qu’il émane des territoires, qu’il est inventé et diffusé par ceux-ci, au plus près d’eux. Ce retour des élus locaux est absolument essentiel. C’est la raison pour laquelle je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblé à propos de cet amendement.
Cet amendement a pour objet de s’assurer que la mission Etalab sera bien chargée de l’homologation des licences car elle est la principale autorité compétente en matière d’open data. Il ne faudrait pas que cela soit confié à d’autres administrations, beaucoup moins favorables à l’open data.
Nous connaissons tous la lecture vigilante et particulièrement attentive de Mme Dubié sur ces questions. Je suis parfaitement d’accord : l’avis est donc favorable.
L’avis du Gouvernement est défavorable car il n’est pas de légistique parfaite d’indiquer dans la loi une fonction ou une autorité administrative qui a été instituée par décret. En l’espèce, l’État pourra naturellement désigner Etalab en son sein pour mener cette mission mais, dans la mesure où Etalab n’existe pas au plan législatif, il est très délicat de l’introduire de cette manière dans la loi – en dépit de l’objectif recherché que je partage naturellement, vous l’aurez compris. C’est la raison de l’avis défavorable du Gouvernement.
L’amendement no 663 n’est pas adopté.
Il s’agit à nouveau de prévoir une révision quinquennale de la liste des licences mais avec une variante, les raisons étant différentes : outre l’homologation de nouvelles licences, il n’est pas exclu que les licences existantes évoluent, disparaissent avec le temps ou que de nouvelles plus appropriées se créent. Il faudrait donc prévoir une révision tous les cinq ans de la liste pour prendre en compte ces évolutions.
Nous avons évoqué le sujet il y a quelques minutes : je demande donc le retrait de cet amendement suite à l’adoption de l’amendement no 752 . À défaut, avis défavorable.
Je vais suivre l’avis du rapporteur.
L’amendement no 753 est retiré.
L’article 7, amendé, est adopté.
Il s’agit, comme le propose également mon collègue Tardy, de supprimer le premier alinéa de l’article 13 de la loi du 17 juillet 1978, qui limite strictement la réutilisation en cas de présence de données personnelles même si ces données ne portent pas atteinte à la vie privée des individus ; nous avons eu ce débat en début de séance.
Cette modification apparaît utile à la commission d’accès aux documents administratifs, la CADA. En effet, elle n’affecterait pas la portée de la protection de la vie privée assurée par l’article 9 du code civil – lequel assure d’une manière générale la protection de l’intimité de la vie privée – et par l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, qui prohibe la communication et donc la réutilisation de documents qui porteraient atteinte à la protection de la vie privée ou à la réputation des personnes.
Cette modification permettra en revanche la libre réutilisation des informations publiques comportant des données à caractère personnel qui ne contreviendraient à aucune de ces garanties.
Je suis plutôt d’accord avec le Conseil d’État – vous ne serez pas surpris, monsieur Coronado ! – qui, dans son avis sur le présent projet de loi, a considéré qu’il n’était ni conforme à la protection des droits, ni cohérent de supprimer le premier alinéa de l’article 13 de la loi de 1978. En effet, la réutilisation des informations publiques constitue, aux termes de l’article 10 de cette loi, un régime juridique autonome.
Dès lors, cette suppression conduirait des personnes réutilisant ces informations à ne plus être tenues à l’obligation soit d’occulter les mentions – je connais pourtant votre vigilance sur cet aspect – entrant dans le champ d’application des articles L. 311-5 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, que chacun doit connaître par coeur depuis le début de la soirée, soit de rendre impossible l’identification des personnes qui sont nommées, alors même que les administrations y sont tenues lorsqu’elles rendent publiques certaines informations.
Pour ces raisons, le Conseil d’État a écarté ces dispositions. Je suis favorable à son avis et donc défavorable à cet amendement.
Autant le débat que nous avons eu tout à l’heure concernant la distinction entre la vie privée et les données personnelles me semblait risqué, tant il introduisait une part de flou juridique, autant la manière dont vous le posez ici est plus claire. Cette possibilité de réutiliser des données personnelles si elles ont déjà été publiées ne semble a priori pas nuire à la réglementation sur les données personnelles.
Il est vrai que le Conseil d’État a estimé qu’il fallait rétablir cet alinéa qui avait été supprimé dans le texte initial du Gouvernement, considérant que cela apportait une protection supplémentaire de la vie en privée, en sus de la loi « Informatique et libertés » de 1978.
Je vous avoue que je suis embêtée sur ce sujet parce que, de la même manière, beaucoup de start-up, d’entreprises innovantes nous disent qu’il est essentiel pour elles d’avoir accès à ce type d’informations qui, de toute façon, sont dans le domaine public ; alors pourquoi ajouter une contrainte supplémentaire ? Du fait de cet avis nuancé, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée.
L’amendement no 26 n’est pas adopté.
Le présent article 7 bis, créé lors de l’examen du texte par la commission des lois, complète très utilement la rédaction initiale de ce projet de loi. Il va dans le sens du progrès puisque la mise à disposition de données semble de plus en plus indispensable à l’information de nos concitoyens.
La communication simplifiée des données des différents services statistiques ministériels permettra aussi une compréhension plus précise de sujets très variés. Je pense en particulier aux données statistiques dont dispose la DARES, dont les publications régulières – DARES Analyses ou DARES Indicateurs – informent de manière très utile sur les problématiques relatives au travail et à l’emploi.
Alors que le Président de la République, devant le Conseil économique, social et environnemental, a annoncé de nombreuses mesures pour l’emploi, une meilleure connaissance de la situation actuelle est nécessaire pour mieux comprendre les motivations et les conséquences attendues des mesures prises. Rendre plus accessibles les données de la DARES va donc dans ce sens.
Rendre plus accessibles toutes les données des services statistiques ministériels va aussi dans le sens d’une meilleure compréhension des politiques menées. Dans cette période de méfiance à l’égard du politique, cela constitue indéniablement un progrès notoire.
Nous avons entamé le débat sur la question des licences tout à l’heure. Le présent amendement revient sur le thème que nous avions commencé à aborder avec la présentation de l’amendement de Nathalie Kosciusko-Morizet.
Les redevances sont une barrière très lourde pour l’accès aux informations d’intérêt général, alors qu’elles ne représentent qu’une part très faible des recettes des services publics qui les établissent. De nombreux rapports ont montré l’inconvénient de ces redevances. La libération des données et leur diffusion sont pourtant une source d’externalités bien plus positives que leur maintien sous redevance.
Cet amendement propose d’ouvrir les données gratuitement dès lors qu’elles sont ensuite rediffusées gratuitement dans un format ouvert et réutilisable, sous licence de type « partage à l’identique » ou « share alike ». Cela permettrait d’ouvrir les données à des acteurs non-marchands qui se basent sur le contributif et la libre réutilisation, tout en les maintenant payantes pour les acteurs économiques importants. Les acteurs importants d’internet ne publient d’ailleurs pas de données en open data, je vous le rappelle.
J’ai dû exprimer cinq fois depuis le début de la séance mon avis défavorable – sans compter les nombreuses fois en commission.
Oui, mais j’estime qu’à la sixième fois, vous aviez tous bien compris ! J’ai cru noter dans vos argumentaires que vous aviez bien compris les éléments de positionnement sur cette question.
Pour les mêmes raisons, même avis que le rapporteur.
L’amendement no 27 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 128 .
En commission, le Gouvernement a prévu la fin des redevances de l’INSEE. Comme déjà indiqué dans plusieurs rapports, ces redevances sont une barrière très lourde pour l’accès aux informations d’intérêt général alors qu’elles ne représentent qu’une part très faible des recettes des services publics qui les établissent – 3 % pour l’INSEE, 5 % pour l’IGN – ; Sergio Coronado vient d’en parler. Cet amendement vise simplement à poursuivre le mouvement et à libérer les données de l’IGN et du SHOM, évoqués récemment par Mme la ministre.
Il me semble avoir été extrêmement clair depuis le début de la séance aujourd’hui sur ma volonté qu’IGN et SHOM puissent transmettre leurs données de manière gratuite et que l’accès à ces données soit simple. Lors du débat que nous avons eu tout à l’heure avec nos collègues Chassaigne et Kosciusko-Morizet, j’ai expliqué que je souhaitais que ces structures soient les deux prochaines à pouvoir le faire, sans attendre le cadre de la loi, dont les clauses de revoyure potentielle inquiétaient M. Gosselin.
Je vous confirme que si ces deux structures sont pour moi prioritaires dans l’accès aux données, je pense que le fait de ne pas attendre une nouvelle loi, l’engagement du Gouvernement et la démonstration – pas seulement l’engagement – faite mardi de la semaine dernière avec les données statistiques de l’INSEE sont plutôt de nature à me rassurer.
Ne souhaitant pas que la loi prévoit des ouvertures sectorielles mais assure la gratuité, je préfère que nous continuions ensemble ce travail pertinent pour aller très vite vers la gratuité totale pour ces deux organismes. Avis défavorable.
Nous avons déjà eu ce débat. Je rappelle que pour obtenir la gratuité totale de la base SIRENE de l’INSEE, l’État a dû s’engager à un effort de compensation financière pour la perte de recettes attendue, de l’ordre de 10 millions d’euros.
Il est donc compliqué d’imposer un modèle de gratuité absolue de manière subite. L’IGN s’est engagé, avec le Gouvernement, dans une démarche de définition de la licence la plus adéquate – a priori, la double licence. Ce travail doit continuer au cas par cas.
Je rappelle qu’au Royaume-Uni, pays très avancé en matière d’ouverture des données publiques, le passage à la gratuité a été systématiquement compensé au plan budgétaire. Il faut, à mon sens, assurer cet accompagnement auprès d’organismes qui sont publics et remplissent des missions de service public. Si nous avançons dans ce sens, il ne faut pas forcer le cours des choses à ce stade. Avis défavorable.
Vous avez raison, madame la secrétaire d’État : il ne faut pas forcer les choses. Mais je partage totalement l’avis du rapporteur : il faudra un jour rendre l’open data gratuit, et cela a un coût. Il faudra donc y penser parce que les administrations ne travailleront pas pour rien. C’est véritablement la question à se poser.
Nous parlions tout à l’heure de l’intérêt des entreprises, mais je pense aux start-up, qui n’ont pas toutes les moyens de se payer les fameuses « premières données » qui vont produire de la valeur ajoutée et dont nous sommes si fiers aujourd’hui – quand on voit la délégation qui s’est rendue au salon de Las Vegas, on ne peut d’ailleurs qu’être fier !
Le véritable coeur de la question est là : qui va compenser l’open data ? Comment peut-on faire ? Cet amendement ne le permettra sans doute pas, raison pour laquelle le groupe socialiste ne le votera pas. La véritable question qu’il faudra se poser est la suivante : comment rendre l’open data gratuit dès lors que l’on estime que c’est un bien pour le futur ?
L’amendement no 128 n’est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 577 et 749 rectifié .
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement no 577 .
Cet amendement, dans le prolongement des précédents débats, vise à inscrire dans le projet de loi pour une République numérique le principe du freemium pour la réutilisation des données publiques.
En effet, les administrations dont l’une des missions principales est la diffusion d’informations publiques, telles que Météo France ou l’IGN, seraient tenues de diffuser en ligne dans un format ouvert, aisément et gratuitement réutilisables, leurs bases de données, dès lors que ces bases existent déjà sous une forme électronique. Cette diffusion en ligne devrait faire l’objet d’une réactualisation annuelle.
En revanche, tout utilisateur ou réutilisateur qui aurait besoin de données actualisées à une fréquence plus élevée pourrait en faire la demande aux administrations concernées. Dans ce cas, un système de redevance pour la diffusion et la réutilisation pourrait être instauré.
La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 749 rectifié .
Cet amendement vise à ce que les administrations dont l’une des missions principales est la diffusion d’informations publiques soient tenues de publier en ligne dans un format ouvert, aisément et gratuitement réutilisable, leurs bases de données dès lors que ces bases existent déjà sous forme électronique. Cette disposition n’engendrerait donc aucun coût supplémentaire pour les administrations concernées.
Tout réutilisateur qui aurait besoin de données actualisées à une fréquence plus élevée pourrait alors en faire la demande aux administrations concernées. Dans ce cas d’espèce, un système de redevance pour la diffusion et la réutilisation pourrait être instauré. En d’autres termes, il s’agit de développer le principe du freemium, mélange de gratuit et de payant. Le freemium à l’avantage, contrairement à la loi Valter, de constituer une alternative au maintien d’une redevance, qui pourrait être intégral pour certaines administrations. Il faudrait réfléchir à la possibilité, à laquelle vous m’avez semblé ouverte, madame la secrétaire d’État, de substituer progressivement cette solution à la redevance.
Je pense que pour l’essentiel ces amendements sont satisfaits par l’article 4 du présent projet de loi, qui accroît les obligations des administrations en matière de diffusion.
Quant au modèle du freemium, dont nous avons déjà débattu tout à l’heure, je ne perçois pas aujourd’hui l’opportunité d’une telle solution dans le cadre de ce texte.
C’est pourquoi je vous demande de retirer ces amendements, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Même avis. L’examen de l’article 4 a déjà été l’occasion d’un long débat sur le choix entre gratuité et redevance, modèles de licences imposés par la loi ou non.
Le Gouvernement ayant annoncé la gratuité de la base SIRENE de l’INSEE, vous y avez vu une brèche où vous engouffrer ! Mais la position du Gouvernement n’a pas changé : il continue de prôner une approche au cas par cas, pragmatique, contractuelle et présentant assez de souplesse pour s’adapter aux évolutions technologiques.
Les amendements identiques nos 577 et 749 rectifié ne sont pas adoptés.
L’article 7 bis est adopté.
Le renforcement des missions et des pouvoirs de la Commission d’accès aux documents administratifs, ou CADA, va dans le sens du renforcement des autorités administratives indépendantes, dont le rôle de contrôle est essentiel.
La CADA, créée en 1978, n’a pas forcément évolué aussi rapidement que la nature ou les moyens de diffusion des documents administratifs. La question de la publication, de marginale qu’elle était, est devenue centrale. Il est donc bienvenu d’élargir les conditions de saisine de la CADA, jusqu’à présent limitée aux cas de refus de communication. Il était devenu indispensable de prévoir l’intervention du juge administratif en cas de refus de publication de documents administratifs.
Mais ce nouveau cas de saisine pour avis de la CADA risque d’entraîner une augmentation significative de sa charge de travail. En 2013, la commission avait été saisie de 5 306 demandes d’avis et ce nombre est appelé à augmenter, même si l’augmentation du contentieux sera sûrement limitée du fait de l’élargissement de l’obligation de publication de documents administratifs.
Néanmoins, madame la secrétaire d’État, je m’interroge sur les moyens supplémentaires qui pourraient être accordés à la CADA pour mener à bien ces nouvelles missions.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 862 .
L’article 18 de la loi « CADA » confie déjà à la commission le pouvoir de sanctionner une personne qui réutiliserait des données publiques en contravention des règles fixées par cette loi. La CADA peut infliger une amende dont le montant peut aller jusqu’à 300 000 euros à un utilisateur qui n’aurait pas respecté la licence d’utilisation.
Ce mécanisme de sanction est susceptible de prendre une dimension nouvelle d’autant plus qu’on soumet les services publics industriels et commerciaux, les SPIC, au régime de droit commun de réutilisation des données publiques, ce qui entraîne un besoin plus grand de protection contre des réutilisations commerciales illégales, notamment pour les données issues des activités des SPIC soumises à la concurrence. Je pense par exemple au transport de fret ferroviaire ou à la gestion de nouvelles lignes de métro en Île-de-France.
Pour cette raison, le présent amendement vise à augmenter significativement le montant maximal des amendes que peut prononcer la CADA en cas de réutilisation illégale à des fins commerciales. Celui-ci pourrait atteindre un million d’euros, voire deux millions en cas de récidive. On alignerait ainsi ce régime de sanction sur celui protégeant le secret industriel et commercial des entreprises publiques.
Eu égard à l’élargissement du périmètre de ce droit, il paraît effectivement particulièrement pertinent d’adapter le montant des sanctions. Le montant d’un million d’euros et celui de deux millions en cas de récidive me semblant effectivement plus adaptés, j’émets un avis favorable.
L’amendement no 862 est adopté.
Le texte soumis au Conseil d’État comptait deux éléments relatifs aux pouvoirs de la CADA : l’instauration d’une liste noire des administrations refusant de communiquer des documents administratifs malgré l’avis favorable de la CADA et l’extension de ses pouvoirs assortie de la possibilité de prononcer des sanctions.
Ces deux éléments ont été supprimés. Dans son avis, la CADA avait en exprimé ses réserves sur le second point, considérant que ses moyens ne lui permettaient pas d’assumer de tels pouvoirs et que son rôle est essentiellement de conseil et d’accompagnement, deux arguments tout à fait recevables.
En revanche, la publication sur le site de la CADA d’une liste noire des administrations qui ne suivent pas ses avis serait une bonne alternative et un gage de transparence.
Je suis partagé. La commission a émis un avis défavorable, suite à l’avis du Conseil d’État considérant qu’il n’était pas possible de reconnaître au président de cette commission le pouvoir de rendre publique en ligne une liste des administrations ayant confirmé une décision de refus de communication.
J’entends cependant les arguments que vous venez d’avancer, monsieur Tardy, notamment quant à la manière d’envisager ce traitement. En conséquence, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour des raisons juridiques. Cette disposition, issue de la consultation publique en ligne, figurait effectivement dans la version initiale du texte avant qu’il ne soit soumis au Conseil d’État. Mais il nous a été objecté que la décision de refus de communication de l’administration bénéficie en droit d’une présomption de légalité tant qu’elle n’a pas été annulée par un tribunal. Or la CADA n’est qu’une autorité consultative.
Le rôle que joue la CADA dans la politique d’open data est un rôle de médiateur entre les personnes privées et les administrations. On peut craindre que des pouvoirs plus coercitifs réduisent sa capacité d’assurer cette médiation.
L’amendement no 754 est adopté.
La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 30 rectifié .
Si j’avais su que l’amendement de M. Tardy allait bénéficier du soutien du rapporteur, je n’aurais peut-être pas déposé celui-ci.
Je vais quand même le présenter.
Conformément à une recommandation du rapport de Corinne Bouchoux et Jean-Jacques Hyest sur la refondation du droit à l’information publique à l’heure du numérique, il vise à faciliter le recours au juge en cas d’obstruction d’une administration en consacrant le rôle de la CADA. La saisine du juge des référés du tribunal administratif compétent serait effectuée par la CADA, dès réception d’une demande d’avis répondant à l’une des exigences, ce qui permettrait au demandeur de bénéficier d’une ordonnance sous quarante-huit heures.
La procédure finalement retenue au travers de l’adoption de l’amendement de M. Tardy est une facilité qui nous convient. En conséquence je retire cet amendement.
L’amendement no 30 est retiré.
Cet amendement vise à préciser que lorsque la CADA est consultée sur des projets de loi ou de décret, son avis est systématiquement publié.
L’amendement no 29 est adopté.
L’article 8, amendé, est adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 391 .
Cet amendement relatif à l’ouverture des documents et des données des assemblées parlementaires est un amendement d’appel, son adoption rencontrant – nous en convenons tous – certains obstacles juridiques et techniques.
Il s’agit d’appeler l’attention des membres de l’Assemblée et du Sénat sur nos politiques d’ouverture de données publiques. Certes notre assemblée est exemplaire en la matière, des efforts incontestables ayant été réalisés ces dernières années en matière de diffusion en open data de nos travaux, documents et études. Cela ne doit pas nous interdire de graver dans le marbre les obligations de transparence qui s’imposent désormais à nos assemblées parlementaires, au contraire : cela nous permettrait de réaliser un nouveau bond qualitatif.
Cette réflexion pourrait être conduite dans le cadre d’une réforme du règlement. En tout état de cause, nos concitoyens comprendraient mal que nous légiférions sur la transparence des données publiques tout en excluant notre assemblée du champ de la loi CADA.
Chacun connaît à la fois mon amour de l’open data, envers lequel j’ai eu l’occasion ici de déclarer ma flamme à de nombreuses reprises, et les enjeux de transparence qui y sont associés. Mes avis d’opposition à des demandes d’extension de l’open data sont donc en général particulièrement motivés.
Il s’agit en l’occurrence d’étendre ces obligations aux assemblées parlementaires. Je reconnais bien là le travail de transparence des données publiques, y compris de la décision publique, que vous nous proposez souvent de remettre sur le métier.
Notre pratique dans ce domaine est plutôt une bonne pratique. En mai dernier, le président Bartolone a décidé de mettre à disposition tout un ensemble de données en format open data pour les rendre accessibles à tous sur internet, dans un format librement exploitable et réutilisable – chacun appréciera les mots choisis – sans restriction technique, juridique ou financière.
Je vous invite à aller jeter un oeil sur ce site internet à l’adresse data.assemblée-nationale.fr, où se trouve l’ensemble des données réutilisables sous des formats divers et variés permettant une réutilisation la plus large possible. Y figurent la liste des députés, l’état-civil des anciens députés, la répartition de la réserve parlementaire, intégralement publique depuis 2013…
…nous étions nombreux à être particulièrement attachés à une telle publication –, la liste des représentants d’intérêts enregistrés auprès de l’Assemblée.
On y trouve en outre des extraits des dossiers législatifs, les comptes rendus des séances publiques, les résultats des scrutins publics et la liste des personnes auditionnées par les commissions.
Ce travail est donc déjà une réalité. Je vois donc votre amendement comme une manière de prendre date plutôt qu’un moyen de critiquer un fonctionnement qui ne serait pas optimal.
Vous comprendrez cependant que j’émette quelques réserves, à deux niveaux.
D’abord la loi n’a pas à imposer au Parlement ses règles de fonctionnement ; de telles règles ne peuvent être définies que par notre règlement, nos usages et le Bureau.
Deuxième élément : souscrire à l’amendement sous-entendrait qu’une autorité administrative indépendante, une AII, pourrait réguler et potentiellement contester le fonctionnement de l’open data.
Vous comprendrez bien que, pour ces deux raisons, si je suis favorable à ce qu’une telle pratique continue et s’amplifie, je ne suis en revanche pas favorable à l’inscription dans le texte de la loi qu’une AII, demain, puisse dire au Parlement pourquoi et comment il doit communiquer ses documents.
Je vous invite donc à bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Chassaigne.
En raison du principe de la séparation des pouvoirs, il me semble que le choix souverain revient au Parlement et qu’il est difficile au Gouvernement de s’y immiscer, même si je considère qu’il s’agit là d’un enjeu très important pour notre démocratie et qu’une telle mesure s’inscrirait dans la logique de la tendance actuelle.
En l’occurrence, je ne peux et ne dois que m’en remettre à la sagesse de l’Assemblée.
L’amendement no 391 est retiré.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
suite de la discussion du projet de loi pour une République numérique.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly